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Mercredi 15 avril 2015

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 44

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président et de Mme Frédérique Massat, Vice-Présidente de la Commission des affaires économiques

– Audition, commune avec la commission des affaires économiques, de M. Carlos Tavares, président du directoire de PSA Peugeot Citroën.

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu, conjointement avec la commission des affaires économiques, M. Carlos Tavares, président du directoire de PSA Peugeot Citroën.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Mes chers collègues, les commissions du développement durable et des affaires économiques auditionnent aujourd’hui M. Carlos Tavares, président du directoire de PSA Peugeot-Citroën.

Monsieur le président, les centres d’intérêt de nos deux commissions sont très complémentaires, ce qui justifie votre audition commune. Bien entendu, nous souhaiterions que vous présentiez la situation et la dynamique du groupe dans un marché des véhicules en évolution, tant en Europe que dans les grands pays émergents. Mais notre attention se porte également sur les progrès techniques et technologiques, et sur l’adaptation de l’industrie automobile aux enjeux environnementaux et sanitaires. En particulier, nous aimerions que vous abordiez les thématiques des moteurs diesel, de la « recyclabilité » des matériaux, de l’écoconception de vos produits, et que vous nous présentiez la nouvelle génération des véhicules électriques que vous envisagez.

Le hasard du calendrier parlementaire fait que la Commission spéciale sur le projet de loi relatif à la transition énergétique et à la croissance verte se réunit ce matin pour procéder à une nouvelle lecture, ce qui explique l’absence d’un certain nombre de nos collègues membres de cette commission spéciale ; vous voudrez bien les en excuser.

Vous êtes accompagné de M. Gilles Le Borgne, directeur de la recherche et du développement du groupe PSA, de M. Christian Peugeot, directeur des affaires publiques, de Mme Mathilde Lheureux, déléguée aux institutions publiques, et de Mme Laure de Servigny, attachée de presse.

Je passe maintenant la parole à Mme Frédérique Massat, vice-présidente de la Commission des affaires économiques.

Mme la vice-présidente Frédérique Massat. Mesdames, messieurs, je vous souhaite la bienvenue au sein de cette réunion conjointe de la Commission des affaires économiques et de la Commission du développement durable. Je vous demande de bien vouloir excuser l’absence de M. François Brottes, président de la Commission des affaires économiques, qui préside en ce moment même la Commission spéciale sur la transition énergétique.

Monsieur Carlos Tavares, le 21 mai 2014, vous aviez été entendu par la Commission des affaires économiques, et je ne doute pas qu’aujourd’hui nos collègues seront en mesure de faire le lien entre les deux auditions. Mais bien des choses se sont passées depuis, et je sais que vous serez là pour répondre à nos questions.

Les priorités de la Commission des affaires économiques concernent plutôt la stratégie industrielle du groupe, la façon dont vous entendez poursuivre son redressement, mais aussi la recherche et le développement, ainsi que la transition énergétique – questions qui intéressent d’ailleurs également la Commission du développement durable.

Vous nous avez distribué un certain nombre de documents, notamment sur le diesel et l’activité du groupe. Je ne doute pas que nous parlerons également avec de l’avenir du véhicule électrique, sujet que nous avions déjà évoqué en mai 2014. Au-delà, nous pourrons aborder les textes, en particulier relatifs à la transition énergétique, qui font une large part à de nouvelles mobilités. J’imagine que vous pourrez faire le lien entre l’activité législative, l’activité et les projets de votre groupe.

Quoi qu’il en soit, je vous remercie pour votre présence.

M. Carlos Tavares, président du directoire du groupe PSA Peugeot-Citroën. Monsieur le président, madame la vice-présidente, mesdames et messieurs les députés, je veux d’abord vous remercier pour le temps que vous nous accordez, et l’opportunité que vous nous donnez de vous apporter des éléments d’information, voire de clarification, sur la stratégie mise en œuvre par le groupe automobile PSA Peugeot-Citroën.

J’articulerai mon exposé introductif autour de trois thèmes : celui de la reconstruction économique, dont vous connaissez l’importance ; celui de la performance de l’entreprise, le seul bouclier qui protège durablement l’entreprise ; et celui du développement durable avec, notamment, une partie sur le diesel moderne, sujet sur lequel nos concitoyens ont droit à une information rigoureuse, objective et précise. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé à M. Gilles Le Borgne, notre patron de la R&D « monde », de se joindre à nous pour vous apporter tous les éléments nécessaires.

Ma première partie concerne donc la reconstruction économique du groupe.

Je veux souligner quelques-uns des résultats qui ont été obtenus par l’entreprise au cours de l’année 2014, qui a effectivement été marquée par une accélération de sa reconstruction économique. Cette accélération se mesure au travers de trois éléments : premièrement, un flux de cash-flow opérationnel, positif en 2014, à hauteur de 2,2 milliards d’euros, ce qui est essentiel ; deuxièmement, le résultat opérationnel courant de la division automobile est lui aussi devenu positif avec 63 millions d’euros, ce qui constitue une amélioration significative par rapport au milliard de pertes enregistré en 2013 ; troisièmement, fin 2014, l’entreprise PSA était totalement désendettée.

C’est là le fruit de l’engagement exemplaire de la discipline et de la rigueur avec laquelle chacun des collaborateurs du groupe a mis en œuvre notre plan de reconstruction économique « Back in the Race ». Je tiens ici à les remercier et à souligner la qualité de leur travail.

Je précise qu’au vu de ces résultats, nous avons renoncé par anticipation à toute émission supplémentaire d’emprunt garanti par l’État. Vous savez que pendant la période très difficile qu’a connue l’entreprise, l’État a soutenu PSA par une garantie plafonnée à 7 milliards d’euros. À la date à laquelle nous avons renoncé à cette garantie, nous avions tiré 1,5 milliard d’euros. Mais en réalité, compte tenu des opérations qui ont été faites depuis, actuellement, nous n’avons pas en circulation plus de 300 millions d’euros couverts par la garantie d’État. C’est un autre aspect de l’accélération du redressement du groupe.

Ainsi, PSA est-il en train de reconstruire son modèle d’affaires. Pour autant, nous devons rester concentrés et lucides.

Nous devons rester concentrés parce que nous avons encore un objectif à atteindre pour pouvoir déclarer que la reconstruction économique du groupe est terminée : la marge opérationnelle de la division automobile doit atteindre un niveau de 2 %, alors qu’elle était faiblement positive en 2014.

Nous devons rester lucides parce que, une fois ce troisième objectif atteint, nous serons encore, parmi tous les constructeurs automobiles au monde de taille significative, le moins rentable de l’ensemble de la profession, ce qui constitue un élément de vulnérabilité dont nous voulons nous débarrasser.

Pour l’avenir, nous allons consolider cette croissance rentable autour d’un certain nombre de leviers que je veux ici rapidement citer.

En premier lieu, la force de l’entreprise est d’avoir trois marques fortes – dont une marque premium – qui sont désormais totalement différenciées et complémentaires. D’abord, la marque Peugeot qui est la convergence parfaite entre la rigueur de l’ingénierie et l’émotion latine : des voitures bien conçues, bien construites, parfaitement élégantes et dignes de confiance. Ensuite, la marque Citroën qui exprime la créativité par la technologie au service du bien-être et de la tranquillité du corps et de l’esprit de nos clients : une marque tournée vers l’innovation utile et le bien-être. Enfin, la marque DS, qui est l’expression du luxe à la française dans le monde automobile, et qui a été créée officiellement en 2014 – ce fut une de mes premières décisions. Nous sommes en train de préparer le plan « produits » et l’ensemble des produits qui viendront renforcer la gamme de cette marque premium.

En second lieu, s’agissant de la stratégie « produits », nous avons fait une analyse simple : dans le monde, les marchés automobiles ont une segmentation qui ne dépasse pas 23 segments. Pour couvrir 100 % de chaque marché, nous allons nous concentrer sur la réalisation de 26 véhicules globaux. C’est une approche globale de l’ensemble des marchés sur lesquels nous opérons, destinée à donner à notre R&D les moyens d’être encore plus efficiente dans la phase amont de la création et de la conception.

En troisième lieu, nous avons mis en œuvre une organisation matricielle avec trois dimensions : une dimension « métiers » où s’accumule l’expertise de l’entreprise dans tous les domaines qui concourent à la conception, à la fabrication et à la vente de nos véhicules ; une dimension « marques » avec le portefeuille des trois marques que j’ai citées ; et une dimension récemment créée, qui est celle des régions du monde. Chacune d’entre elles sera pilotée par un patron, dont l’objectif est de maximiser le business rentable dans cette région.

Forts de cette organisation matricielle à trois dimensions, nous avons connu en 2014, malgré la mise en œuvre d’un plan de redressement économique tout à fait consistant, une augmentation de nos ventes de 4,3 % qui nous a permis de vendre près de 3 millions de véhicules. Pendant la reconstruction économique de l’entreprise, nous avons donc continué à croître. Nos ventes ont augmenté de 8 % en Europe et de 31 % en Chine de 31 %. Ces deux résultats sont à mettre à l’actif du travail de nos commerçants sur ces marchés.

En 2014, la rentabilité de nos opérations s’est améliorée dans toutes les régions, sauf en Amérique latine et en Eurasie, qui intègre le marché tourmenté russe. Malgré tout, nos résultats continuent à s’améliorer sur ces deux marchés.

En 2015, nous allons poursuivre le redressement de nos activités économiques dans toutes les régions – amélioration dans les situations qui étaient déjà rentables, et correction dans celles qui ne l’étaient pas. Nous espérons trouver les conditions d’un retour en Iran, qui constitue pour notre groupe un enjeu majeur ; vous connaissez en effet la force commerciale qu’avait notamment Peugeot sur ce marché, avant la mise en place des sanctions. Nous allons enfin continuer à soutenir la croissance de nos marques dans les marchés africains et moyen-orientaux sur lesquels nous connaissons en ce moment un très bon succès.

PSA est en train d’évoluer dans la bonne direction, vers sa reconstruction économique complète. Les résultats de 2014 sont extrêmement encourageants, mais il nous reste toutefois un critère à atteindre, celui de l’efficience du fonctionnement de nos opérations automobiles : nous visons une marge opérationnelle de 2 % sur la division automobile, si possible avant 2008.

Je terminerai cette première partie en vous donnant un chiffre qui est assez peu communiqué : après le plan de reconstruction économique « Back in the Race », dans le plan suivant, que nous présenterons une fois la reconstruction économique terminée, nous fixerons, pour notre division automobile, un objectif de marge opérationnelle de 5 %. C’est en effet la porte d’entrée de la première Ligue des grands constructeurs automobiles mondiaux. Le fait d’atteindre ce niveau d’efficience nous placera dans une position tout à fait concurrentielle par rapport aux meilleurs.

La deuxième partie de mon propos portera sur la performance, élément essentiel de pérennité et de protection de l’entreprise sur le moyen et le long terme.

D’abord, le fait que nous soyons une entreprise française, avec une empreinte extrêmement importante en France, constitue pour nous un atout.

En 2015, nous employons en France près de 79 000 salariés, sur un total de 84 000 dans le monde. Nous y avons cinq usines terminales, onze usines de mécanique, et 85 % de nos moteurs et boîtes de vitesses y sont fabriqués.

En 2014, nous avons produit dans notre pays 933 000 véhicules et nous en avons vendu environ 600 000 sur le marché français. Cela veut dire que nous sommes, et de très loin, un exportateur net de véhicules produits en France. PSA est d’ailleurs le troisième exportateur français et, en 2014, il a apporté une contribution positive de 4,7 milliards d’euros à la balance commerciale du pays.

Notre présence industrielle en France est donc absolument essentielle, à la fois pour notre groupe et pour la France, raison pour laquelle nous avons la responsabilité, le devoir et le privilège de continuer à piloter l’amélioration de la performance sur les opérations de notre pays.

J’ajouterai que 75 % de notre potentiel de R&D est réalisé dans notre pays, avec pas moins de 11 500 chercheurs sur quatre centres. Je précise qu’en 2014, la totalité de la dépense de R&D du groupe PSA est restée stable, aux environs de 2,2 milliards d’euros. Enfin, inutile de vous rappeler que nous sommes, et de très loin, le premier constructeur automobile français, et le premier producteur d’automobiles en France.

Ensuite, nous sommes entièrement mobilisés à l’amélioration de notre performance industrielle. Pourquoi et comment ?

Nous sommes mobilisés parce que la performance industrielle pilote l’économique, la qualité et l’attractivité de nos modèles, donc la performance commerciale. Mais derrière, nous avons pu nous appuyer sur un facteur qui a été fondamental pour l’accélération du redressement de l’entreprise : l’excellence de la relation que nous avons avec nos partenaires sociaux, notamment avec les signataires du nouveau contrat social que nous avons établi avec eux. Je veux souligner ici la maturité et le sens des responsabilités de ces signataires du nouveau contrat social avec lesquels nous avons un dialogue particulièrement nourri. Sur la seule année 2014, j’ai rencontré dans mon bureau à quatre reprises les six partenaires sociaux, pour discuter de la situation de l’entreprise et partager avec eux les enjeux et les défis auxquels nous étions collectivement confrontés.

Je vous rappelle les engagements que nous avons pris dans le cadre de ce nouveau contrat social :

Premièrement, produire un million de voitures en France : j’ai bon espoir que cette année nous en serons très près, si ce n’est déjà fait, compte tenu de l’amélioration du marché européen qui tire la production de voitures en France.

Deuxièmement, investir en France 1,5 milliard d’euros sur trois ans – en 2014, 2015 et 2016. Nous avons affecté à chacun de nos sites industriels en France un futur véhicule qui sera produit dans ses usines. Je tiens à vous faire remarquer que, lorsque nous affectons un nouveau véhicule à un site industriel en France, nous le faisons généralement avec deux ou trois ans d’avance par rapport au lancement effectif de ce véhicule. Chaque véhicule ayant une durée de vie de l’ordre de six ans, chaque site industriel de PSA en France a une visibilité de l’ordre de huit ans sur son activité. Je connais peu d’industries dans notre pays qui puissent le revendiquer. C’est une retombée directe de ce nouveau contrat social, dont je tiens à souligner l’importance dans l’accélération du redressement de l’entreprise.

Évidemment, la pérennité de ces sites ne peut pas se résumer à la simple affectation de nos véhicules. Elle doit être le résultat de la convergence de deux facteurs : d’une part, des véhicules attractifs, équipés des nouvelles technologies recherchées par nos clients ; d’autre part, un outil industriel modernisé qui permet au site d’être compétitif en qualité et en coût par rapport à tous les sites concurrents – notamment ceux du continent européen.

Nous devons donc continuer à travailler à l’efficience et à la modernisation de l’appareil industriel, non seulement chez nous, mais également chez nos fournisseurs. Pour autant, je précise que la part la plus importante de la réduction des coûts qui a eu lieu ces trois dernières années – 730 euros de prix de revient de fabrication par véhicule – a été obtenue dans nos propres usines. Nous ne demandons donc pas à nos partenaires des efforts que nous ne nous imposons pas à nous-mêmes. Nous sommes en train de montrer la voie vers l’amélioration de l’efficience de nos propres sites. Il est très important de continuer à moderniser l’outil industriel par le compactage, par l’amélioration des flux internes, par l’amélioration de la qualité sur la ligne principale de montage pour ne pas avoir à faire de la retouche en fin de ligne, qui est évidemment coûteuse. C’est à toutes ces améliorations que nous sommes actuellement en train de travailler avec l’ensemble de nos équipes dirigeantes dans les sites industriels.

En expliquant le sens de ce que nous voulons faire pour l’entreprise, nous savons pouvoir emporter l’adhésion de nos collaborateurs, même si les défis qui sont devant nous ne doivent pas être sous-estimés : ils sont très difficiles parce que nous sommes soumis à une concurrence extrêmement sévère de l’ensemble des constructeurs automobiles mondiaux qui opèrent sur les mêmes marchés que nous.

Vous avez un bon exemple de cette façon de travailler, qui s’est traduite par la décision récente d’affecter notre nouveau moteur PureTech, 1,2 litre, turbo essence, sur le site de Trémery, dans l’est de la France. Cette décision a été rendue possible par les engagements pris par le site en matière d’amélioration de la qualité et de réduction des coûts à l’horizon de 2018.

Je veux maintenant rappeler qu’il est essentiel que les efforts de PSA sur notre territoire soient accompagnés par les pouvoirs publics, afin que l’on puisse soutenir l’action de nos équipes, et donc continuer à moderniser et à promouvoir la compétitivité de ce site. Nous savons tous que le progrès sera le résultat d’un pilotage raisonné et déterminé de la performance. S’en tenir au statu quo conduirait inéluctablement à sa disparition, que nous souhaitons écarter de notre champ de vision.

La troisième partie de mon exposé concernera le développement durable, et notamment le fait que les technologies nouvelles que nous développons au sein de PSA sont au cœur du développement durable de l’entreprise.

Je souhaite d’abord vous rappeler que l’entreprise PSA, malgré les difficultés qu’elle a connues, n’a jamais baissé la garde en matière de recherche et développement. En effet, nous avons maintenu nos efforts de recherche et développement, avec les investissements associés, à hauteur de 7 à 8 % de notre chiffre d’affaires.

Il est vrai que nous avons mis un accent très important sur le rendement de l’argent dépensé, et pas uniquement sur le montant total de la dépense. Cet effort est piloté par M. Gilles Le Borgne, le patron de notre recherche et développement. Il se traduit par la capacité de l’entreprise à faire davantage de projets, à développer davantage de technologies et de produits, ce qui est le meilleur garant de l’avenir.

Au cœur de ce développement durable, il y a les choix technologiques du groupe. L’automobile est un concentré remarquable de technologie. Au cours de ces dernières décennies, nous avons assisté à son évolution extraordinaire en matière de fiabilité, de réduction de la consommation et donc de l’émission de produits polluants, en matière de respect de l’environnement par la réutilisation de matériaux et par la « recyclabilité » des véhicules en fin d’usage, ainsi qu’en matière de sécurité active et passive. Sans oublier la communication de l’automobile avec son environnement extérieur.

Je voudrais rappeler que l’automobile, par sa modernisation et le développement des nouvelles technologies qu’elle induit, constitue un moteur qui tire tout un tissu économique dans le pays où nous opérons.

Les choix technologiques que nous avons effectués dans le domaine du véhicule propre sont divers. La conviction de PSA est qu’il n’y a pas une seule technologie qui puisse répondre à l’ensemble des questions posées par les consommateurs et par nos concitoyens. Un grand groupe automobile de dimension internationale doit avoir un portefeuille de technologies propres – notamment dans le domaine des motorisations – pour apporter des solutions appropriées à l’ensemble des marchés dans lesquels il intervient.

Le contexte peut être différent d’un marché à l’autre. Ainsi, les besoins exprimés par le marché chinois ne sont pas les mêmes que ceux d’un marché européen ou sud-américain. Il faut tenir compte de cette réalité et apporter des réponses aux différentes communautés dans lesquelles nous opérons, et avec lesquelles nous souhaitons être en parfaite harmonie.

PSA est d’abord un pourvoyeur de solutions de mobilités durables et propres. Nous sommes, sur le marché européen, et notamment français, leaders sur le marché européen pour la faiblesse des émissions de CO2 – en moyenne, en 2014, 110 g de CO2 par kilomètre parcouru. Ce point, largement méconnu, est pourtant essentiel. Toujours en 2014, un tiers de nos ventes émettait moins de 100 g de CO2 au kilomètre, ce qui est assez remarquable et traduit la maîtrise technologique du groupe PSA.

Nous avons donc décidé de développer plusieurs types de technologies dans lesquelles nous sommes déjà leaders : les moteurs à essence de type PureTech et les moteurs diesel modernes de type Blue HDi. Mais nous avons également décidé – dès que je suis arrivé chez PSA – de lancer une technologie Plug-in Hybride essence – donc une technologie essence hybride rechargeable – que nous allons implanter sur notre plate-forme haut de gamme, que nous appelons EMP2 ; M. Gilles Le Borgne est actuellement en train de la développer avec ses équipes. Enfin, nous allons introduire, sur notre plate-forme d’entrée que nous appelons EMP1, une chaîne de traction électrique pour apporter à nos marchés, notamment européens et français, des véhicules électriques au meilleur niveau de performance. Ces deux développements sont maintenant engagés et les produits seront disponibles sur le marché à la fin de cette décennie.

Comme vous pouvez le constater, entre des moteurs essence PureTech particulièrement performants, des moteurs diesels qui sont les meilleurs du marché et qui sont parfaitement propres lorsqu’ils respectent la norme Euro 6, des technologies Plug-in essence rechargeables et des véhicules purement électriques, PSA se dote, à l’intérieur des enveloppes que nous nous sommes fixées, des moyens d’avoir un portefeuille de quatre technologies majeures sur lesquelles nous espérons être parmi les plus performants. Et je veux vous adresser une requête très simple : la neutralité technologique vis-à-vis des objectifs que vous nous demandez de respecter.

Il est parfaitement légitime que les sociétés dans lesquelles nous opérons nous demandent d’améliorer nos performances, de respecter un certain nombre de critères, notamment en matière d’émission. Nous sommes des pourvoyeurs de solutions pour atteindre les objectifs qui nous sont fixés. Mais nous vous demandons de formuler ces objectifs avec une parfaite neutralité vis-à-vis des technologies. En effet, c’est de cette façon que la société pourra bénéficier de la meilleure créativité concurrentielle de l’ensemble des constructeurs – notamment la nôtre – et nous nous faisons fort d’inventer les technologies et les solutions pour atteindre ces objectifs, aussi sévères soient-ils. Mais il est indispensable que ces objectifs sociétaux soient exprimés en matière de résultats, sans préjuger du type de technologie qui permettra de les atteindre.

Par ailleurs, nous allons continuer à réduire notre empreinte environnementale et à améliorer notre performance en matière de développement, notamment en utilisant des matériaux recyclés. Nous nous sommes engagés à maintenir, à l’horizon de 2020, une intégration de 30 % de matériaux recyclés ou d’origine renouvelable sur nos véhicules. Enfin, l’ensemble de nos véhicules, pour nos trois marques, Peugeot, Citroën et DS, sont valorisables à 95 % en masse – donc recyclables à 95 %.

Sur la question particulière du diesel, qui alimente de nombreuses discussions dans notre pays, je voudrais rappeler quelques points essentiels, puis laisser la parole à Gilles Le Borgne qui vous donnera des exemples techniques précis.

D’abord, nos concitoyens ont droit à une information objective, rigoureuse et scientifique sur le sujet. Il est donc très important que nous vous apportions, comme à nos concitoyens, des éléments d’information solides. C’est la raison pour laquelle, dans les exemples qui vous seront présentés, ont été utilisées des informations de tierce partie : ce ne sont pas des informations de PSA, mais des informations disponibles à tout un chacun, dont vous pouvez vérifier la robustesse.

Ensuite, on a tendance à oublier que la technologie du diesel n’est pas statique. Elle a été rendue hautement dynamique et évolutive par les réglementations qui ont poussé depuis plus de vingt ans les constructeurs à progresser fortement, notamment dans le domaine de la production de CO2. C’est ainsi que, grâce à vous, le diesel – en particulier le diesel propre – est aujourd’hui l’outil de masse le plus performant dans la réduction des émissions.

M. Gilles Le Borgne. Mesdames et messieurs les députés, nous avons voulu vous présenter trois idées simples et vérifiables – que nous avons illustrées par des transparents.

Première idée : avec les normes Euro 6 qui sont appliquées depuis septembre 2014 sur les nouveaux véhicules et qui vont être généralisées en septembre 2015 à l’ensemble de la flotte, essence et diesel sont similaires en termes d’émissions polluantes.

Depuis plus de vingt ans, on a assisté à une réduction drastique des limites d’émission, entre la norme Euro 1 en 1992, avec l’ensemble des réglementations qui ont suivi, et la norme Euro 6. Et aujourd’hui, s’agissant des polluants qui défraient la chronique, à savoir les particules, les NOx, les HC plus NOx, les deux technologies sont équivalentes. C’est ce que l’on appelle dans notre jargon le « fuel neutral ». Et même, s’agissant du monoxyde de carbone, l’essence est un peu plus émissive que le diesel – avec une valeur de 1 pour l’essence, contre 0,5 pour le diesel.

Deuxième idée : aujourd’hui, le transport terrestre représente, en moyenne, en France, 17 % des émissions de particules fines, loin derrière l’activité résidentielle urbaine qui en représente 48 %, liés en grande partie au chauffage urbain, mais aussi derrière l’industrie, qui en représente 22 %.

Malgré tout, l’ensemble des constructeurs automobiles s’est mobilisé autour d’une invention de PSA : le filtre à particules que nous avions introduit dès les années 2000. Ce filtre à particules est obligatoire depuis janvier 2011 – norme Euro 5. Il s’agit d’un filtre fermé, qui fonctionne dans toutes les conditions de température et de pression. Aujourd’hui, la quantité de particules contenue dans les gaz d’échappement d’un moteur diesel moderne est plus faible que celle de l’air ambiant qu’il aspire pour fonctionner. À l’inverse, une seule voiture ancienne émet l’équivalent de 600 voitures modernes.

Il est donc clair que c’est l’élimination progressive des véhicules diesels non équipés de filtres qui est la solution au problème posé par les particules fines – en commençant bien sûr par les véhicules les plus anciens, dits Euro 1 ou Euro 2.

Troisième idée : le diesel est aujourd’hui incontournable pour atteindre l’objectif de 95 grammes de CO2 fixé pour 2020. Comme M. Carlos Tavares vient de l’expliquer, avec un peu plus de 110 g de CO2 par km, nous sommes leaders en Europe. La moyenne du marché européen, qui est le plus exigeant en termes de réduction de gaz à effet de serre, notamment de limitation de CO2 se situe en effet bien au-delà, à 123,7 g de CO2 par kilomètre.

Nous l’avons dit tout à l’heure, les véhicules vendus à moins de 100 g, qui représentent un tiers de notre portefeuille, sont à 66 % des diesels. De ce point de vue, nous ne sommes pas une exception. La moyenne des véhicules vendus à moins de 100 g par les cinq premiers constructeurs européens, qui n’est que de 19 %, est constituée à 72 % de diesels. Il faut donc retenir que les voitures les moins émissives en termes de CO2 sont aujourd’hui majoritairement des diesels.

M. Carlos Tavares. Pour terminer cette parenthèse sur le diesel, je voudrais réitérer solennellement devant vous la proposition que j’ai faite devant la Commission des affaires économiques en mai 2014 : que soit créée une commission d’experts et de scientifiques indépendants, à la disposition de laquelle je me suis engagé à mettre toutes les données, tous les résultats d’essais et de mesures auxquels nous avons procédé. Ce serait notre manière d’apporter notre contribution scientifique, afin que la meilleure décision soit prise à la fois pour nos concitoyens et pour notre pays.

J’en viens maintenant à notre troisième axe de développement : celui du véhicule connecté et autonome.

Le véhicule connecté est déjà une réalité. En effet, depuis 2003, les véhicules Peugeot sont équipés d’un appel d’urgence et d’un appel d’assistance que l’on peut actionner et qui se déclenche automatiquement en cas d’accident. 1,6 million de véhicules déjà vendus sont équipés de ce système d’appel d’urgence, et nous avons traité à ce jour 13 000 appels d’urgence. Dans bon nombre de cas, des vies ont pu être sauvées, ce dont nous sommes particulièrement fiers.

Nous allons continuer à travailler avec l’ensemble des acteurs de ce type de prestations pour renforcer la connexion et répondre à une attente simple de nos consommateurs : une connexion sans coupure entre le domicile, le lieu de travail et le mode de transport. Un certain nombre de prestations vont déjà dans le sens de cette connexion permanente, mais nous allons poursuivre nos efforts pour y parvenir.

Nous avons également pris acte d’une tendance lourde et permanente, qui est d’offrir de plus en plus de sécurité. Vous connaissez les progrès spectaculaires qui ont été réalisés au cours des dernières décennies sur la sécurité passive. Nous avons maintenant des développements très importants sur l’aide à la conduite dans le domaine de la sécurité active : tout ce qui concerne la compréhension de l’environnement du véhicule pendant les phases de conduite, et les aides à la conduite. Les essais consuméristes intègrent de plus en plus souvent cette dimension – détection de piétons, freinage d’urgence, extension du régulateur de vitesse. C’est ce que nous appelons dans notre jargon l’ADAS, ou Advanced Driver Assistance System, que nous sommes en train de développer. Je veux annoncer ici avec grand plaisir que nos premières technologies liées à l’aide à la conduite – en particulier la conduite automatisée et l’aide à la conduite en situation d’embouteillage – seront disponibles sur notre prochaine génération de Peugeot 508. Ce sera une première pour notre groupe. Nous mettons la main aux derniers préparatifs.

La voiture de demain sera, de toute évidence, équipée de fonctions qui vont déléguer la conduite, et de services connectés. Cela permettra de rendre à nos clients et au consommateur du temps de qualité, ce qui correspond à une attente forte. Mais cela pose un certain nombre de défis auxquels nous devons nous attaquer – place du constructeur automobile dans la chaîne de valeur, rôle des nouveaux entrants comme Google ou Apple, risque de désintermédiation que nous souhaitons éviter. Je pense aussi aux questions de la responsabilité du constructeur par rapport à celle du conducteur, dès lors qu’il y a une prise en main du pilotage de l’automobile, à celle de la distraction de la conduite, avec tout ce que cela signifie dans le type de communication que le conducteur peut avoir avec le monde environnant. Sans oublier les questions de sûreté de fonctionnement et de cybersécurité.

En conclusion, mesdames et messieurs, je voudrais d’abord vous dire mon immense confiance dans le groupe PSA Peugeot-Citroën dont le potentiel, tout à fait extraordinaire, n’a été que très partiellement concrétisé à ce jour. Je voudrais ensuite vous dire que l’automobile française a un avenir dès l’instant où nous serons capables de nous mobiliser sur les changements nécessaires pour améliorer notre performance vis-à-vis de nos concurrents. Il me semble très important de prendre conscience que la France appartient au club très fermé des nations automobiles. C’est un élément que nous devons garder à l’esprit. PSA a tous les atouts pour devenir un grand constructeur automobile mondial.

L’automobile est une richesse. Elle apporte de la mobilité, de la liberté de mouvement et de la fluidité, nécessaires à une société moderne et adaptable. L’automobile est un bien de civilisation. La France est pays d’automobiles, et nous devons être en permanence en parfaite harmonie avec la société dans laquelle nous opérons.

Vous le savez, la France est un berceau historique de l’automobile. PSA se positionne de manière claire et déterminée en apporteur de solutions plutôt qu’en poseur de problèmes. Cela me semble très important. Mais nous apportons des solutions dès lors que nous sommes sollicités par vous-mêmes, pour vous faire part de notre inventivité et de notre expertise.

M. Rémi Pauvros (au nom du groupe SRC). Merci pour cet exposé. Nous sommes très heureux d’entendre parler aujourd’hui du groupe Peugeot, ce qui n’était pas évident il y a quelques mois, et surtout il y a un peu plus d’un an.

Je tiens à souligner qu’au moment où l’automobile allait très mal, et cela ne concerne pas seulement votre groupe, le Gouvernement a pris ses responsabilités. Ainsi, la recapitalisation du groupe Peugeot a sans aucun doute permis la mise en œuvre de la stratégie que vous nous avez présentée et qui a porté ses fruits. Il est de bon ton de dire ce qui ne va pas. Soulignons ce que nous avons fait de bien.

Je tiens à souligner également, tout comme vous, le contrat social qui a été négocié et a permis la mobilisation générale de l’ensemble de l’entreprise. Et je veux moi aussi saluer la part prise par les salariés dans cette mobilisation, qui ne s’est pas faite sans douleur. Je le sais d’autant plus que je suis député du Nord, où se trouve le site de Trith-Saint-Léger.

J’aimerais maintenant savoir quelle est votre stratégie de développement, s’agissant des différents sites de France. Quelles sont les perspectives en matière d’emplois ?

J’en viens au développement durable. Le Gouvernement a pris un certain nombre d’initiatives. Nous-mêmes, en tant que parlementaires, avons souhaité la mise en place de dispositifs d’aide pour accompagner les modifications du parc automobile français. Le renouvellement du parc suppose, notamment, la disparition du parc automobile diesel polluant. Or les propriétaires du parc ancien n’ont pas forcément les moyens de changer de véhicule. Quelle est votre stratégie en la matière, s’agissant en particulier des nouveaux modèles ? Je pense à l’hybride rechargeable essence et à la technologie 100 % électrique.

Pourriez-vous par ailleurs nous parler d’autres technologies, que vous n’avez pas abordées ? Je pense aux techniques de piles à combustible hydrogène, déjà commercialisées au Japon, au biométhane et au gaz naturel liquéfié. Dans ces domaines, où en est votre R&D ?

Revenons sur le parc diesel. Je crois que vous avez raison de vouloir casser l’image qui associe systématique diesel et pollution, et je considère que votre proposition de créer un groupe d’experts indépendant est judicieuse. Cela dit, pensez-vous qu’une amélioration soit encore possible, surtout en matière d’émission de microparticules ? Or celles-ci sont particulièrement nocives pour la santé de nos concitoyens.

Enfin, comme vous l’avez souligné, la stratégie du groupe est liée à la qualité du produit proposé, à sa performance et à sa compétitivité. Mais vous nous avez dit que la production d’un véhicule durait environ six ans. Au-delà de six ans, et d’un point de vue environnemental, quelle est votre stratégie ?

M. Martial Saddier. Les députés UMP souhaitent tout d’abord rappeler que le groupe PSA est une véritable chance pour notre pays et un motif de fierté. Nous saluons, à travers vous, les milliers de vos collaborateurs qui travaillent, soit directement pour le groupe, soit comme sous-traitants.

Nous approuvons le choix de l’implantation locale du groupe PSA. C’est ainsi que depuis des années, la fabrication des moteurs et des véhicules se fait sur le sol français. D’autres constructeurs ont fait d’autres choix, tout aussi respectables. Reste que la représentation nationale ne peut que se féliciter de cet aspect de la politique du groupe, qui fait vivre sur notre territoire de nombreuses entreprises de sous-traitants – même si les relations entre les donneurs d’ordres et leurs sous-traitants ne sont jamais faciles.

Nous souhaitons souligner la volonté du groupe d’instaurer la notion de filières, impulsée, faut-il le rappeler, par M. Luc Chatel quand il était ministre de l’industrie. Certes, des sous-traitants forts constituent une chance pour un donneur d’ordres, qui bénéficie ainsi d’un réseau. Mais on sent, dans le groupe PSA, entre les sous-traitants et le donneur d’ordres, l’envie de faire ensemble et d’améliorer les relations.

Nous souhaitons également saluer les innovations technologiques apportées par le groupe. Rappelons que, dans les années 2000, PSA a inventé le filtre à particules.

J’en viens à mes questions :

Premièrement, ne pensez-vous pas qu’il faudrait envisager globalement les questions liées à la qualité de l’air et au réchauffement climatique ? On parle CO2 d’un côté, NOx et particules de l’autre. Or on sait bien que lorsque l’on agit sur un secteur, on peut provoquer des effets négatifs sur d’autres. Je fais partie de ceux qui, depuis plusieurs années, demandent de pouvoir disposer d’indicateurs globaux d’environnement et de développement durable – CO2, NOx et particules fines.

Deuxièmement, sur le plan de l’innovation technologique, quel a été le coût pour l’entreprise, et par voie de conséquence, pour votre deuxième concurrent français, de la norme Euro 6 et de fabrication des petits moteurs à essence ? Mais on raconte aussi beaucoup de choses sur l’efficacité du filtre à particules. Pourriez-vous nous en rappeler le mécanisme de fonctionnement ? Pourriez-vous également revenir sur les « usines intelligentes » de la quatrième révolution industrielle ? Car vous n’avez fait qu’effleurer le sujet.

Troisièmement, quelle est l’ampleur du parc de véhicules roulants anciens ? Statistiquement, combien d’années sont nécessaires pour que ce parc ancien s’efface ? Quel est aujourd’hui le pourcentage de véhicules diesel par rapport aux véhicules à essence ?

M. Franck Reynier. Monsieur le président Tavares, vous l’avez rappelé, l’automobile est une industrie majeure en France, et la France est une nation automobile. Vous présidez le groupe PSA depuis maintenant un an, et je voudrais, au nom du groupe UDI, vous dire que cette première année présente un bilan prometteur. Ces bons résultats sont le fruit de choix stratégiques, mais aussi de la mobilisation de l’ensemble des salariés et des sous-traitants du groupe PSA.

Vous avez retrouvé un flux de liquidités positif en 2014. PSA ne perd plus d’argent à chaque fois qu’un véhicule est vendu, ce qui est important, même si le résultat net comptable n’est pas encore à la hauteur de ce que vous attendez. Des actions ont été menées : chasse aux dépenses inutiles ; gestion des stocks très rigoureuse ; catalogue passant de 45 à 26 modèles ; enfin, désendettement total du groupe, suite à l’augmentation de capital et à l’entrée de l’État et du groupe Dongfeng dans le capital.

Reste qu’en 2014, le chiffre d’affaires a progressé d’environ 1 % sur cette année, sur un marché global qui, au niveau mondial, est en croissance de plus de 4 %. On se doit d’être encore plus ambitieux et de réfléchir plus particulièrement dans les domaines de l’innovation.

Tout d’abord, pourriez-vous faire le point sur la différenciation des marques, Peugeot, Citroën et DS ? Vous faites délibérément le choix d’aller vers des niveaux de gammes assez élevés. Certains de vos concurrents ont des produits d’entrée de gamme, qu’on peut qualifier de marques low cost. J’aimerais avoir votre avis sur cette part de segment, que vous ne semblez pas souhaiter occuper.

Ensuite, une part importante de votre R&D s’effectue en France, où l’on s’est engagé résolument en faveur des véhicules propres. Or vous avez décidé l’arrêt de la technologie Hybrid Air : pourriez-vous nous en dire un mot ? Pourriez-vous également nous informer sur l’ensemble des possibilités techniques et technologiques et sur un calendrier éventuel ? Des offres sont déjà disponibles dans certaines marques. Or il me semble que le groupe PSA ne propose pas suffisamment de produits au consommateur.

J’observe qu’une part importante de la production des automobiles de votre groupe est réalisée par des sous-traitants. Pouvez-vous faire un point sur la R&D, mais aussi sur la coordination et la coopération avec l’ensemble des sous-traitants ?

Je me souviens que, lors de votre précédente audition, vous aviez rappelé que le French way of life était apprécié à l’international. Quelles sont aujourd’hui les déclinaisons concrètes de ce concept, après un an de travail sur ce sujet ?

Enfin, vous avez dit que l’automobile, c’était la liberté. J’ai envie de rappeler que l’automobile, c’est aussi, pour beaucoup, la passion et le plaisir. Le facteur humain est essentiel. L’histoire a démontré que les constructeurs étaient toujours animés par la passion et la compétition. L’image compte aussi en termes de détermination, de compétition et de compétitivité. Quel est donc l’engagement du groupe PSA dans la compétition ?

Mme Michèle Bonneton. Au nom du groupe écologiste, merci pour votre exposé précis et détaillé. La filière automobile est très importante pour la mobilité des Français. C’est aussi un vivier d’emplois et un facteur positif pour notre commerce extérieur, comme vous nous l’avez rappelé. Encore faut-il prendre en compte toute la mesure de l’impact de l’automobile sur l’environnement, sur le changement climatique ou sur la santé ainsi que sur l’occupation des sols et leur imperméabilisation.

D’où mes questions : le plafonnement des dépenses en R&D, et même leur réduction annoncée de 150 millions d’euros, bénéficient sans doute aux ratios économiques de court terme. Mais cela est-il compatible avec une stratégie de long terme ? Qu’en est-il du projet de moteur qui consommerait 2 litres aux 100 kilomètres ? L’Hybrid Air est-il arrêté définitivement ? Qu’en est-il du développement des voitures dites « intelligentes » qui, par exemple, conduiraient toutes seules ?

Par ailleurs, dans le passé, PSA a largement misé sur le développement du diesel. Les nouvelles normes pour ces moteurs, telles que les normes Euro 6, ont incité à réorienter une partie de la production automobile vers les moteurs à essence et les véhicules les moins polluants. Y a-t-il une évolution dans la demande ? Quelle est la politique de PSA pour l’environnement ? Notamment, que pensez-vous de l’objectif annoncé de donner à tous les Français accès à un véhicule électrique ? Je pense à votre remarque d’après laquelle les élus ne devraient pas interférer sur le choix des technologies.

Ensuite, les premières analyses sur la mise en place du CICE – le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – semblent montrer que celui-ci a été principalement utilisé pour augmenter les salaires, souvent au détriment de l’investissement. Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est chez PSA ?

Enfin, le Gouvernement veut relancer l’investissement public et privé. Quelles seraient les mesures utiles à la relance de l’investissement en France que pourrait prendre votre entreprise ?

M. Patrice Carvalho (groupe GDR). Monsieur le président de PSA, les pics de pollution que nous avons connus dans nos grandes agglomérations et les difficultés que nous rencontrons pour y faire face placent au cœur du débat le poids du trafic dans la dégradation de notre environnement. Soit dit en passant, on parle toujours des automobiles, mais jamais des avions qui sont aussi de grands pollueurs…

Tout ce qui peut limiter le trafic – comme le covoiturage, par exemple – est évidemment à encourager. Il n’en reste pas moins que, pour nos concitoyens, la voiture est considérée comme un vecteur de liberté individuelle. Si, en milieu urbain, les transports publics permettent des déplacements aisés et peu coûteux, en zone périurbaine et rurale, l’automobile est indispensable. En outre, l’éloignement entre le domicile et le lieu de travail devenant de plus en plus important, certaines familles n’ont d’autre choix que d’avoir plusieurs véhicules. La question n’est donc pas tant de savoir comment nous allons limiter les déplacements en voiture de nos concitoyens, que de les doter de véhicules propres. J’aurais donc, monsieur le président, deux séries de questions à vous poser.

La première concerne l’état de la recherche menée chez PSA sur les véhicules utilisant de nouvelles ressources énergétiques non polluantes. Je pense bien sûr à la voiture électrique. Mais jusqu’à présent, sa faible autonomie en limite le développement. Peut-être pourriez-vous nous parler de la voiture à hydrogène ? En France en tout cas, les constructeurs automobiles ne semblent pas très engagés dans cette technologie.

La seconde concerne le diesel, domaine où PSA a la réputation d’être au point. Je souligne les efforts qui ont été faits dans la dernière période pour améliorer les moteurs diesel. Les automobilistes français ont longtemps été encouragés à se doter de véhicules diesels. Le coût à l’achat était plus élevé mais le carburant moins cher, on en consommait moins et l’espérance de vie des moteurs plus longue. En 2013, les véhicules diesel représentaient 76 % des véhicules, malgré une baisse de six points par rapport à 2012, et le plus bas niveau depuis dix ans.

Aujourd’hui, il est dans l’air du temps de décourager nos concitoyens de se doter de voitures diesel, en alourdissant la fiscalité sur le gazole. Or j’ai le sentiment que nous confondons deux éléments : l’âge et le caractère polluant des véhicules.

Le parc automobile compte des moteurs diesel d’ancienne génération, gros émetteurs de CO2 et de particules. Mais on peut dire la même chose des moteurs Indenor, considérés comme révolutionnaires il y a cinquante ans, et qui étaient très polluants. Ces moteurs, qu’on ne trouve plus aujourd’hui sur le marché, n’avaient rien à voir avec les moteurs diesels qui fonctionnent aujourd’hui.

Pour nous, l’enjeu majeur est de déterminer les mesures que nous devons prendre pour inciter les conducteurs d’anciens véhicules diesel à se doter de véhicules de nouvelle génération. Or ce n’est pas aisé : d’une part, le pouvoir d’achat est en berne ; d’autre part, il faut dix à quinze ans pour que les technologies se diffusent largement dans le parc automobile.

On l’a dit, les moteurs diesel de nouvelle génération n’ont rien à voir avec leurs prédécesseurs. Dès 2000, PSA a mis au point un filtre à particules révolutionnaire qui, à mon avis, peut encore être amélioré par la recherche. De fait, la technologie n'a cessé de progresser, au point que les moteurs diesel d’aujourd’hui ne sont pas plus polluants que les moteurs à essence. Ils le seraient même moins, si je me réfère à votre propos introductif.

En France, s’attaquer au diesel en France revient à « se tirer une balle dans le pied ». Monsieur le président, pourriez-vous nous dire si des marges d’amélioration existent et si, par voie de conséquence, le diesel constitue un atout pour la transition énergétique ?

J’ajoute que je souscris complètement à votre idée de créer une commission composée de scientifiques indépendants, qui ferait une véritable analyse comparative du diesel et des autres sources d’énergie.

Mme Jeanine Dubié. Monsieur le président, au nom des députés RRDP, je vous remercie pour votre intervention, qui nous permet d’apprécier la situation que connaît PSA aujourd’hui.

Nous avons compris que les conditions ont changé par rapport à l’année dernière, et nous n’avons pas oublié que votre groupe n’est pas passé loin du chaos. Nous ne pouvons que nous réjouir de sa belle progression. Manifestement, le plan que vous nous aviez présenté a bien fonctionné. À travers vous, nous souhaitons féliciter le directoire de PSA mais aussi et surtout l’ensemble de ses salariés qui ont su s’adapter et relever un immense défi.

Cela m’amène à ma première question : dans un contexte économique mouvant, avec des évolutions parfois brutales, dans quelle mesure peut-on considérer que le groupe est durablement sauvé ? Ensuite, certains vous prédisent, dans un horizon plus ou moins lointain, un destin intégralement chinois. Votre groupe ne risque-t-il pas d’être absorbé par les industriels automobiles chinois ?

Pensez-vous que le CICE a contribué à baisser le coût du travail ? Ce dispositif a-t-il joué un rôle important dans votre industrie ?

Pour la production du nouveau moteur EB, le site de Trémery en Moselle a été préféré au site de Vigo en Espagne. Est-ce un signe de l’amélioration de notre compétitivité, et donc de l’efficacité des mesures prises par le Gouvernement à cette fin ?

Vous devez savoir aussi que de nouveaux chantiers fiscaux sont en réflexion, et que le dispositif du CICE risque d’évoluer. Avez-vous des recommandations à nous faire pour améliorer l’efficience du dispositif, afin qu’il soit plus concentré sur des industries particulièrement menacées par des délocalisations ?

Enfin, les actualités récentes concernant l’Iran devraient vous réjouir. Ceux qui connaissent ce pays savent que PSA y est très présent. Mais si des lots de pièces détachées y sont vendus, l’embargo interdit d’y vendre des voitures. La fin des sanctions internationales pourrait être validée en juin prochain. Suivez-vous ces négociations ? Êtes-vous prêts à revenir, aussi rapidement que possible, sur le marché iranien qui vous offre de belles perspectives ?

M. Gilles Savary. Vous nous dites que vous souhaitez que les pouvoirs publics fassent preuve de neutralité technologique. Cela nous met un peu mal à l’aise, parce que nous ne sommes pas en situation de neutralité fiscale. Vous avez observé qu’aujourd’hui, la tendance est à la taxation du diesel. Je pense que le groupe de travail qui se mettrait en place devrait aussi nous donner des conseils. Faut-il taxer le carburant ou les émissions ? Comment ?

Par ailleurs, avez-vous des informations sur ce qui se passe chez Gefco ? Celles qui nous parviennent sont un peu préoccupantes.

Quelle est pour vous la plus-value de votre actionnaire chinois ? Je ne vous pose pas cette question parce qu’il vous a apporté des capitaux, mais parce qu’il peut vous ouvrir des perspectives en Chine. Je m’y suis rendu la semaine dernière et j’ai constaté avec plaisir qu’il y avait, notamment, beaucoup de voitures Citroën dans ce pays – davantage que dans certains pays européens.

Enfin, je tenais à vous féliciter pour la résilience de votre groupe. Elle montre le rôle qu’un État peut jouer quand une entreprise se trouve en très grande difficulté.

M. Marcel Bonnot. Monsieur le président, qu’attendez-vous des futurs décrets d’application de la loi sur la transition énergétique en matière de réduction d’émissions de polluants atmosphériques, que ce soit sur le plan des objectifs ou sur le plan des moyens ?

Ensuite, les nouvelles mesures annoncées contre le diesel auront-elles un impact sur la stratégie du groupe ? Je pense en particulier à l’objectif du million de véhicules vendus en France en 2017, qui figurait en contrepartie de l’accord de compétitivité de 2013.

Enfin, PSA a lancé sur le site Sochaux-Montbéliard – dans ma circonscription – un programme d’investissement de 300 millions d’euros pour la production de deux nouveaux modèles. De son côté, la communauté d’agglomération que je préside s’est lancée dans une démarche financière importante pour appréhender une fraction du foncier, afin de permettre à des fournisseurs d’être sur site dès le mois de septembre de cette année. Pouvez-vous me confirmer qu’il s’agit bien là d’opérations s’inscrivant dans la reconstruction économique du site, et visant à sa pérennité et à l’amélioration de sa compétitivité ?

M. Thierry Benoit. Monsieur le président, nous sommes en 2015. Vous êtes un capitaine d’industrie, et vous avez démontré en un an votre capacité de management. Je suis pour ma part un client exclusif du groupe PSA et je me demande pourquoi nous parlons depuis si longtemps du moteur hybride et du moteur électrique alors que, finalement, très peu d’offres dans votre groupe concernent ces motorisations. Il faut s’élever dans la gamme pour se voir proposer des moteurs hybrides. Quant à la démocratisation du moteur électrique, elle peine à s’affirmer.

Ensuite, vous nous avez parlé des cinq usines terminales et des onze usines mécaniques implantées dans notre pays. Or nous savons que c’est le marché européen qui tire la production d’automobiles en France. L’emploi industriel sera-t-il maintenu sur les sites existants ? Je pense notamment au site de Rennes, où l’évolution de l’emploi, depuis plusieurs années, n’est pas celle qu’à titre personnel je souhaiterais. Quelles sont donc les perspectives ? Et comment associez-vous le tissu des collectivités locales à votre stratégie ?

En dernier lieu, comment, dans votre business plan, les partenaires équipementiers et sous-traitants sont-ils associés à votre stratégie ? Je me pose la même question s’agissant du maintien de l’emploi industriel.

M. Kleber Mesquida. Monsieur le président, je tiens à vous remercier pour la compétitivité du groupe PSA et sa contribution à la balance extérieure.

Vous avez participé, la semaine dernière, aux côtés de Mme Ségolène Royal, au dispositif destiné à soutenir l’achat de véhicules propres. J’aimerais savoir où en est votre groupe, s’agissant de la R&D, de la production ou plus généralement de sa politique en faveur du véhicule tout électrique et du véhicule hybride rechargeable. Aujourd’hui, on parle beaucoup de la pollution des moteurs diesel, que l’on compare aux moteurs à essence. Par ses dernières dispositions, le Gouvernement incite à l’achat de véhicules hybrides et de véhicules électriques – prime et bonus. Où en êtes-vous donc ?

M. Jacques Kossowski. La promotion actuelle du véhicule tout électrique par des primes d’acquisition allant jusqu’à 10 000 euros par véhicule m’amène à m’interroger. Si nous arrivons, à terme, à constituer un parc de plusieurs millions de véhicules, ne risquons-nous pas de nous heurter à un problème de production électrique, alors que l’on souhaite diminuer de 50 % la production d’énergie nucléaire en France ? Je rappelle que l’on prévoit 7 millions de points de charge d’ici à 2030. Comment résoudre cette équation ? En Allemagne, où l’électricité provient, actuellement, pour 44 %, du charbon qui émet beaucoup de gaz à effet de serre, on a calculé que les émissions des véhicules électriques pouvaient dépasser celles d’une voiture conventionnelle.

Se pose aussi la question de l’utilisation de certaines matières premières pour la construction des batteries ; je pense en particulier au lithium. En outre, il n’est toujours pas possible de faire de longs trajets avec les véhicules tout électriques. Deux véhicules seront peut-être nécessaires : l’un pour les petites distances, en vile, l’autre pour les plus longues distances. Est-ce vraiment une avancée écologique ? La meilleure solution ne passe-t-elle pas par le moteur hybride ? J’aimerais avoir votre point de vue.

Enfin, monsieur le président du directoire, je tiens à vous dire que je suis ravi d’avoir aujourd’hui en face de moi quelqu’un qui ne vient pas se lamenter des charges imposées aux entreprises !

M. Jean Grellier. Premièrement, des perspectives s’offrent aujourd’hui avec la production de biogaz. Nous en sommes encore au balbutiement. Avez-vous des perspectives de développement s’agissant ce type de carburant ? Quels éléments techniques pourriez-vous nous apporter ?

Deuxièmement, quelle est votre stratégie en matière de sous-traitance ? Avez-vous participé aux restructurations qui ont eu lieu dans certains secteurs ? Quelle est la part de sous-traitance qui se maintient aujourd’hui en France, et la part que je qualifierais de low cost ?

Je vous poserai les mêmes questions s’agissant des pièces détachées. Vous vous opposez à la libéralisation de ce secteur. Quelles sont aujourd’hui les perspectives de développement de la fabrication de pièces détachées en France et en Europe, et éventuellement de celle des pièces détachées low cost ? Quelle est la part de ce secteur dans les résultats du groupe ?

M. Yannick Favennec. Monsieur le président Carlos Tavares, permettez au passionné d’automobile que je suis de ne pas cacher sa joie de vous accueillir ce matin. (Sourires)

À chaque pic de pollution, le diesel est pointé du doigt. Récemment, le Premier ministre a même indiqué qu’il nous faudrait sortir progressivement du tout diesel. Une telle mesure risquerait de pénaliser les Français les plus modestes, notamment ceux qui habitent dans les territoires ruraux.

De leur côté, les constructeurs européens, dont vous faites partie, défendent le diesel en disant qu’il est moderne et propre. Y a-t-il, selon vous, une volonté de désinformation sur la modernité du diesel et sur sa performance réelle en matière de dépollution ? PSA est le groupe européen le plus performant en matière de réduction des émissions de CO2. Selon vous, jusqu’à quel niveau de CO2 par km la technologie permettra-t-elle de descendre, dans un horizon de vingt ou trente ans ?

Où en êtes-vous sur l’Hybrid Air, moteur thermique et air comprimé ? Avez-vous l’intention de le développer, ou l’avez-vous mis entre parenthèses ?

Comme mon collègue M. Thierry Benoit, je m’interroge à propos de l’usine PSA de Rennes, qui est proche de ma circonscription de la Mayenne. Quel est son avenir ? Quel modèle souhaitez-vous y développer ?

Enfin, en dehors de la marque DS, qui est votre marque premium, Peugeot et Citroën ont-elles l’intention de développer des modèles haut de gamme ?

M. Philippe Noguès. PSA reste un groupe européen, avec 58 % de voitures vendues en Europe, et 12 % des parts du marché européen. Mais l’arrivée de Dongfeng au capital de PSA et la nécessité économique de développer de nouveaux relais de croissance via le marché chinois offrent des perspectives intéressantes.

PSA compte aujourd’hui 184 000 salariés dans le monde, dont 79 000 en France, mais aussi 61 000 dans le reste de l’Europe. Compte tenu de l’effort financier consenti par l’État en 2014, il me semble important que les effectifs du groupe restent majoritairement en France. Vos propos étaient rassurants, mais je voudrais insister : comment envisagez-vous la question à plus long terme, et quelles mesures comptez-vous prendre pour pérenniser le maintien des effectifs français dans le groupe ?

M. Guillaume Chevrollier. Alors que notre pays subit depuis de longues années une désindustrialisation, votre groupe a récemment décidé d’ouvrir une usine de moteurs en Lorraine. C’est une très bonne nouvelle. Est-ce le signe d’un nouvel essor industriel ? Ou est-il inéluctable que même les voitures de marque française soient produites de plus en plus souvent à l’étranger, du fait de l’environnement fiscal et social de notre pays ?

Par ailleurs, les constructeurs français ont développé le secteur du diesel et en ont considérablement amélioré les moteurs, notamment avec le filtre à particules. Or le Gouvernement et ses alliés, notamment la maire de Paris, attaquent le diesel. Comment l’expliquez-vous ? (Murmures sur divers bancs)

Les spécialistes considèrent que réduire le problème de la pollution atmosphérique aux seules émissions de CO2 est une ineptie, et que d’autres éléments doivent être pris en compte, comme les particules, les dioxydes d’azote et les hydrocarbures imbrûlés.

En bref, comment améliorer l’image du diesel, secteur d’excellence de notre industrie, et dont les moteurs sont plébiscités par les automobilistes français ?

M. Hervé Pellois. À la fin de l’année dernière, l’usine Peugeot-Citroën de Rennes, qui produit les Peugeot 508 et les Citroën C5, cumulait 1,5 million d’heures de chômage partiel. Les perspectives de cette usine semblent meilleures, car on vient d’apprendre que la future Peugeot 6008 devrait être construite sur le site. Néanmoins, les syndicats s’inquiètent, car ils estiment que les faibles volumes de production annoncés pour ce nouveau véhicule ne permettront pas d’assurer la pérennité du site et de ses emplois. Comme mes collègues Thierry Benoit et Yannick Favennec, nous nous interrogeons : comment répondez-vous à nos inquiétudes ? Plus largement, comment envisagez-vous le futur de cette usine PSA, fleuron de notre industrie automobile de l’Ouest de la France ?

M. Jean-Claude Mathis. Lors de votre présentation du plan « Back in the Race », vous avez déclaré avoir atteint deux de vos trois objectifs. Quelles mesures pensez-vous mettre en œuvre pour atteindre, dans un délai raisonnable, le troisième de ces objectifs ?

Par ailleurs, que répondez-vous aux critiques injustifiées de ceux qui vous reprochent, notamment, de négliger le domaine de la recherche ? Mais je crois que vous avez déjà répondu en partie à cette question.

M. Jean-Pierre Blazy. Monsieur le président, je souhaite vous interroger à propos de l’ancien site d’Aulnay. Je suis maire de Gonesse, et 20 hectares de ce site sont situés sur ma commune. En outre, dans ma circonscription, je rencontre encore nombre de ses ex-salariés qui n’ont toujours pas de solution de reconversion.

Il y a un an et demi, on cessait, à Aulnay, d’assembler la C3. 3 000 salariés ont été concernés ; la moitié devait être reconvertie en interne et l’autre moitié devait trouver une reconversion sur le bassin d’emploi local. Pouvez-vous aujourd’hui faire le point ? Je peux vous assurer que la situation reste très critique.

La reconversion du site – 18 hectares – n’est pas simple non plus. Aujourd’hui, seule l’entreprise ID Logistics a prévu de s’y installer et nous avons signé, conjointement avec le maire d’Aulnay, le permis de construire. Mais très peu de salariés seront repris dans cette entreprise.

En matière de reconversion, PSA a pris des engagements. Or il semble que, tant sur le volet social que sur le volet de la reconversion du site, ces engagements ne soient pas encore tenus. Que pouvez-vous nous en dire ? C’est un vrai sujet d’inquiétude, même s’il peut y avoir, dans le cadre du Grand Paris, des perspectives intéressantes pour ce site, par ailleurs bien situé.

M. Gérard Menuel. Monsieur le président, j’ai l’impression qu’au fil des décennies, la politique des deux-roues, au sein de Peugeot, a connu des hauts et des bas. Il me semble même que ce secteur a failli être abandonné. Qu’en est-il aujourd’hui ?

M. Jean-Pierre Le Roch. Ma question porte sur l’usine PSA de La Janais à Rennes. Depuis 2000, celle-ci a divisé ses effectifs par deux, prévoyant une production d’environ 80 000 véhicules cette année, contre 345 000 en 2005. Ainsi, bien qu’il soit prévu de confier l’assemblage d’un nouveau véhicule sur le site et de remonter la production, les années de 2015 et 2016 sont annoncées comme très difficiles.

Par ailleurs, une partie importante des pièces nécessaires à la fabrication de ce nouveau véhicule viendra de l’usine de Sochaux, ce qui risque d’engendrer des coûts de logistique importants. Or cette usine est un élément moteur de toute la filière automobile bretonne et fournit, en outre, des débouchés à des équipementiers installés en Ille-et-Vilaine et dans le Morbihan. Je souhaiterais donc connaître, monsieur le président, votre point de vue sur l’avenir du site de Rennes.

M. Éric Straumann. Monsieur le président Carlos Tavares, je voudrais relever votre discours positif, voire optimiste, qui tranche avec le climat ambiant. Je n’ai pas de question à vous poser. Je souhaite simplement saluer le redressement de Peugeot, qui s’est traduit par une augmentation de notre activité, notamment sur le site de Mulhouse, où l’on fabrique aujourd’hui les 2008, les C4 et les DS 4. 11 000 véhicules supplémentaires vont y être fabriqués au cours des prochains mois. Je tiens donc à exprimer la gratitude des élus alsaciens pour les efforts réalisés sur le site de Mulhouse.

M. Jean-Pierre Vigier. Monsieur le président, avec votre plan « Back in the Race », vous avez restauré la rentabilité de l’entreprise qui avait cumulé plus de 7,3 milliards de pertes sur 2012 et 2013. Ce plan prévoit la redéfinition complète de la gamme de voitures qui sera réduite de 45 à 26 modèles. Ces modèles devraient permettre d’augmenter la couverture du marché et de dégager davantage de marge. Ma question sera très simple : au vu de vos projets, comment comptez-vous organiser votre activité pour éviter la délocalisation à laquelle nous pousse malheureusement le contexte très concurrentiel que nous connaissons ?

M. Charles-Ange Ginesy. Monsieur le président, vous nous avez présenté votre groupe, sa reconstruction économique, ses performances, la faiblesse des émissions de CO2 de vos véhicules qui font de vous un leader mondial en ce domaine, et les progrès de vos moteurs diesel. Mais je souhaiterais que vous nous donniez plus de précision sur les véhicules électriques et sur les véhicules hybrides. Connaissez-vous déjà les caractéristiques techniques de ces véhicules à venir ? Pouvez-vous nous soumettre un calendrier ?

Que pensez-vous des véhicules industriels et en particulier, au moment où l’on parle de mobilités douces, des véhicules de transport collectif ? Ce secteur présente-t-il, ou non, un intérêt pour votre groupe ?

M. Philippe Armand Martin. Peugeot a dernièrement annoncé sa décision d’investir en Lorraine pour la production de ses moteurs à essence. L’investissement total annoncé atteindrait 180 millions d’euros, dont 25 millions d’investissement public. Pouvez-vous nous détailler la composition du financement public affecté au site de Trémery ?

Ensuite, tous les constructeurs automobiles sont conscients de l’importance qu’il y a à prendre en compte l’environnement. Toutefois, en matière d’émissions de CO2, les normes ne sont pas identiques dans l’ensemble des pays. Pouvez-vous nous indiquer les évolutions de parts de marché de vos véhicules diesel sur les principaux marchés mondiaux ?

Enfin, le Gouvernement a renforcé la prime à l’acquisition d’un véhicule électrique en remplacement d’un véhicule diesel ancien. Pouvez-vous nous préciser les perspectives économiques que cela emporte pour votre entreprise ?

Mme Anne Grommerch. Monsieur Carlos Tavares, vous êtes venu à Trémery, le 27 mars dernier, pour nous annoncer la création de cette ligne turbo essence. Ce fut un grand soulagement pour les salariés mosellans. Quelles en seront les retombées en termes d’emplois ?

Par ailleurs, vous nous avez présenté l’évolution technologique qui a permis de produire des moteurs diesel propres. J’observe que le Gouvernement a progressivement modifié son discours, après avoir très fortement attaqué le diesel dans son ensemble. On commence maintenant à parler des vieux moteurs diesel qui polluent énormément. Des aides ont été annoncées en cas d’achat de véhicules hybrides ou électriques. Mais ceux-ci sont beaucoup plus chers et ne conviennent pas à tous les budgets. En outre, la faible durée des batteries des véhicules électriques est une source de difficulté en territoire rural. Quelles mesures faudrait-il donc prendre pour inciter les propriétaires d’anciens véhicules diesel à changer de véhicule ?

M. Luc Chatel. Je voudrais d’abord adresser mes félicitations à M. Carlos Tavares et à son équipe pour le redressement de l’entreprise – dont l’entrée de l’État dans son capital n’est pas, selon moi, la principale raison.

Ensuite, au sein du marché automobile mondial, il y a le club de ceux qui vendent 10 millions de véhicules par an, et puis il y a les autres. Faut-il s’attendre à de nouvelles consolidations dans les années qui viennent ? Est-ce que le groupe PSA pourrait faire partie de ce club ?

Enfin, sur le plan de la compétitivité, il est très intéressant de comparer la situation des États-Unis à celle de la France. Les États-Unis ont retrouvé leur niveau de production automobile de 2008 ; la France produit aujourd’hui 60 % de ce qu’elle produisait avant la crise. Monsieur le président, j’ai noté votre volonté de produire 1 million de véhicules automobiles en France. Les Américains, de leur côté, ont travaillé sur le coût de l’énergie – gaz et pétrole de schiste – et sur la compétitivité tout au long de la chaîne. Que souhaitez-vous que fassent les responsables politiques français pour que notre pays redevienne un grand pays de production automobile ?

M. Laurent Furst. Monsieur le président, l’industrie change et elle est fragile. L’exemple d’Alcatel, entreprise d’abord sans usines, mariée à Lucent pour devenir une entreprise mondiale, et qui n’est plus maintenant qu’un secteur du groupe Nokia, le prouve.

J’ai une question simple à vous poser. Les leaders du secteur automobile, GM, Toyota, Volkswagen, produisent 10 millions de véhicules par an. Le groupe Renault, allié avec Nissan, en produit autour de 7 millions. Vous en produisez moins de 3 millions. Aujourd’hui, vous vous retrouvez seul, petit et peu rentable dans le monde industriel et globalisé de l’industrie automobile. Pourrez-vous survivre ainsi et amortir la recherche et les technologies du futur ?

Le groupe Fiat vient d’annoncer qu’il recherchait, ou qu’il avait trouvé, un partenaire européen pour grandir. Par le passé, vous avez développé des alliances sectorielles avec certains groupes industriels, notamment avec BMW, pour produire des véhicules professionnels ou créer certains moteurs. Allez-vous poursuivre ces alliances sectorielles ou allez-vous rechercher un partenaire pour grandir ?

Mme la vice-présidente Frédérique Massat. Monsieur le président, pouvez-vous nous dire combien votre groupe a pu toucher grâce au CICE et au CIR, le crédit d’impôt-recherche ? Ce sont deux dispositifs auxquels la majorité tient, et que nous avons maintenus.

Ensuite, vous demandez aux élus de faire preuve de neutralité technologique. Mais les députés que nous sommes pensent être capables de faire des choix pour le pays. Aujourd’hui, à l’instant où je vous parle, dans une autre salle où l’on examine le texte sur la transition énergétique, nous travaillons sur certains dispositifs et nous venons de décider d’un bonus sur le véhicule électrique. Qu’en pensez-vous ?

Nous avons également approuvé l’implantation de bornes électriques sur le territoire, qui seront mises en place par un nouvel opérateur national, pour favoriser le déploiement du véhicule électrique. Il nous semble que cela relève de notre responsabilité.

Donc, comment aboutir à un équilibre entre votre demande de neutralité et notre capacité à légiférer ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Monsieur le président, 10 millions de véhicules, sur les 30 millions qui composent notre parc national, sont relativement polluants. Le ministère a mis en place une prime pour en faire sortir les plus polluants : 10 000 euros seront ainsi versés à l’acheteur d’un véhicule électrique qui met au rebut son véhicule diesel de plus de treize ans. Dans la mesure où l’on a inscrit, en loi de finances 2015, 214 millions d’euros à cette fin, 21 000 véhicules diesel seulement pourront être retirés de la circulation. Dans ces conditions, il faudra plusieurs dizaines d’années pour faire sortir de notre parc les véhicules les plus polluants.

Nous sommes confrontés à un problème financier. Ne faudrait-il pas envisager de récupérer la fiscalité sur le diesel et utiliser les moyens financiers que cela procurerait – un centime rapporte 350 à 400 millions d’euros – pour mettre en place, sur cinq ou dix ans, un programme de retrait particulièrement efficace des véhicules les plus polluants ? Nous avons tous compris que les véhicules qui répondent aux normes Euro 6 sont beaucoup moins polluants que les précédents.

Mme Marie-Lou Marcel. Monsieur le président Carlos Tavares, le 18 février dernier, vous vous êtes félicité de vos bons résultats, et notamment de la baisse des coûts de production sur les sites français – une baisse de 730 euros par véhicule entre 2012 et 2014.

D’ici à 2016, vous comptez réduire encore le coût de revient de fabrication de 500 euros par véhicule en travaillant sur le sourcing. Ces nouveaux process de fabrication qui accroissent la compétitivité de votre groupe vont de pair avec la mise en place d’un système de flexibilité pour les salariés, sur cinq jours. La CFTC s’en est inquiétée : avec le système de modulation horaire à « plus cinq jours/moins cinq jours », en période d’activité soutenue, un salarié peut travailler jusqu’à dix samedis en ne touchant que 25 % de valorisation.

Pouvez-vous nous décrire plus précisément les nouvelles conditions de travail des salariés de votre groupe, ainsi que les voies que vous comptez prendre pour intégrer au mieux ceux-ci aux objectifs de compétitivité de PSA ?

M. Carlos Tavares. Vos questions sont nombreuses mais passionnantes.

Je commencerai par une remarque générale. Nous ne pouvons pas traiter de la question de la mobilité propre sans traiter, dans le même temps, de la question de l’énergie propre. C’est deux questions vont de pair et, si on ne les traite pas en parallèle, on se trouve confronté à des contradictions que vous connaissez bien. De mon côté, j’ai toujours défendu le véhicule électrique, mais celui-ci prend tout son sens si l’énergie électrique est propre. Si vous voulez en accélérer la diffusion, ce qui est parfaitement légitime, il faut, dans le même temps, s’assurer que l’énergie électrique nécessaire à la propulsion de ces véhicules sera également propre, et pas uniquement à Paris, pas uniquement en France, pas uniquement en Europe, mais sur l’ensemble de la planète. C’est un sujet essentiel.

Ensuite, si l’on abonde aujourd’hui l’achat d’un véhicule électrique par 10 000 euros versés au client final, c’est dans le but de lever les freins à l’achat de ce type de véhicule, qui sont de deux ordres : d’une part, le véhicule électrique manque d’autonomie ; d’autre part, les consommateurs considèrent, à tort ou à raison, que le réseau de chargement est insuffisant.

PSA soutient les véhicules électriques. Nous en avons d’ailleurs quatre modèles en vente : une petite Citroën, une petite Peugeot, un petit utilitaire Citroën et un petit utilitaire Peugeot. Mais nous devons évidemment regarder au-delà de nos seuls intérêts. Pour ma part, je ne pense pas que l’on puisse résoudre le problème sans traiter cette double dimension.

Pendant combien de temps faudra-t-il soutenir la vente de véhicules électriques ? Jusqu’à ce que les freins à l’achat soient levés. Or ils seront levés dans un délai qui, s’agissant de l’autonomie des véhicules électriques, dépasse cinq ans. Pourrons-nous, pendant cinq ans, offrir cette prime de 10 000 euros ? Je crois que vous avez la réponse.

Un autre élément me semble également important. Au niveau européen, l’objectif qui a été fixé est d’atteindre 95 grammes de CO2 par kilomètre parcouru d’ici à 2020. Mais cet objectif auquel souscrit l’ensemble des constructeurs automobiles européens ne pourra être respecté qu’en diffusant largement le véhicule électrique et le véhicule diesel. Les deux sont nécessaires et il faudra savoir procéder à un dosage entre l’un et l’autre.

Pour atteindre en 2020 l’objectif de 95 grammes, il faudra donc continuer à diffuser dans des proportions importantes les véhicules diesel. En effet, celui-ci ne nécessite pas de subventions particulières. Il est propre, parce que vous l’avez voulu propre grâce à la sévérité de vos réglementations. Et il est produit aujourd’hui à un fort volume à un coût maîtrisé.

Nous devrons donc jouer sur une diffusion en masse du véhicule diesel, et sur une apparition progressive du véhicule électrique, qui sera forcément lente. On l’a dit, les États ne pourront pas soutenir économiquement très longtemps l’achat de ce type de véhicule. En outre, il faudra donner aux techniciens le temps d’ôter les verrous qui existent encore. Il faudra travailler sur la densité du réseau de chargement et sur l’autonomie des véhicules en faisant évoluer la chimie des batteries.

Nous avons besoin de gérer le mix entre les deux types de véhicules de la manière la plus raisonnable, et ne pas oublier que nous avons besoin du véhicule diesel Euro 6, voire Euro 7, pour atteindre, en 2020, les 95 g de CO2 et, en 2030, l’objectif que nous allons nous fixer. Celui-ci, qui sera sans aucun doute discuté cette année à Paris au cours du COP 21, dépendra de l’utilisation ou non des véhicules diesel.

À propos des émissions de CO2, j’observe que la Peugeot 208, que nous allons vendre en France en juin de cette année, ne consomme que 3 litres aux 100 kilomètres, performance que nous n’aurions pas osé imaginer il y a seulement dix ans. Voilà pourquoi le véhicule consommant 2 litres aux 100 kilomètres, que Mme Bonneton évoqué, est déjà dans notre champ de vision.

Je vous dirai maintenant quelques mots du filtre à particules, avant de laisser la parole à Gilles Le Borgne, qui vous fournira des éléments scientifiques plus précis.

Le filtre à particules fonctionne même sur des particules très petites. Des progrès spectaculaires ont été réalisés en la matière et si, dans le même temps, nous observons la densité en particules dans des lieux où il n’y a pas d’automobiles, nous avons de quoi être très surpris. Nous disposons de quelques données issues d’organismes de l’administration française, qui ne sont donc pas les nôtres mais que vous pouvez vérifier par vous-mêmes, et qui sont tout à fait frappantes.

Comme vous l’avez souligné au travers de vos questions, le remplacement du parc ancien va prendre du temps. Combien en faudra-t-il pour changer significativement la donne ? En gros, dix ans. Et n’oubliez jamais qu’au niveau national, le transport routier dans son ensemble ne représente que 17 % du total des émissions de particules fines (PM2,5, de moins de 2,5 microgrammes). Nous nous sommes donc engagés à travailler sur ces 17 % et à progresser, mais dans le même temps, nous ne pouvons pas négliger que 87 % des émissions de particules viennent d’ailleurs. Sans doute serait-il pertinent, d’un point de vue sociétal, de traiter le problème dans sa globalité.

M. Gilles Le Borgne. À l’occasion d’une audition au Sénat, j’avais apporté un filtre à particules et montré à vos collègues que l’on ne pouvait pas voir à travers. Ce filtre est mécaniquement fermé et bloque les particules. Au bout de 100 ou 300 kilomètres, on change le réglage du moteur de manière à réchauffer les gaz et à provoquer la combustion naturelle des suies, qui sont en fait du carbone. Ces suies brûlent avec l’oxygène en excès, donnent du gaz carbonique et de l’eau – sous forme de vapeur – qui passent par les parois du filtre en carbure de silicium, et sont évacués par l’échappement. Je précise que l’ADEME avait validé le fonctionnement de ce filtre en indiquant bien que la filtration descendait jusqu’à 7 nanomètres. Il est donc très efficace.

Voici quelques chiffres et quelques repères, que vous pouvez retrouver en quelques clics sur AirParif. Ainsi, aujourd’hui, dans la station Auber du RER, la concentration moyenne de particules est de 329 microgrammes par m3 de particules. Je vous rappelle que le seuil d’alerte est à 80 microgrammes et que l’OMS recommande de ne pas dépasser une moyenne 20 microgrammes sur une année ! Ce n’est pas pour vilipender ce qui se passe dans les stations de métro ou dans le RER : il n’empêche que c’est l’endroit le plus pollué de la région parisienne. Sachez également que les cheminées, même les meilleures, vendues sous le label « Flamme verte », produisent en une année autant de particules que 15 millions de km parcourus par un véhicule diesel moderne.

De notre côté, nous travaillons et nous allons continuer à progresser avec les prochaines réglementations Euro 6, puis Euro 7 à partir de 2020. Mais nous travaillons sur 30 % du phénomène – dans la mesure où en Île-de-France, 30 % des PM2,5 viennent du trafic routier. Le reste, soit 70 %, n’est évidemment pas traité sous l’angle des émissions particulaires.

M. Carlos Tavares. Vous m’avez demandé si, en limitant nos dépenses de R&D, nous étions en train de sacrifier le long terme de l’entreprise au profit du court terme. Ma réponse pourra vous sembler paradoxale, mais elle est tout à fait respectueuse : ma conviction est que c’est exactement l’inverse.

Si nous n’améliorons pas l’efficience de notre création – combien d’objets nous pouvons créer, combien de moteurs, de produits et de technologies nous pouvons développer pour une masse de dépenses données – il n’y aura pas d’avenir pour l’entreprise. Si l’amont de l’entreprise n’est pas parfaitement efficient, toute l’entreprise y perdra en performance. S’occuper du rendement de la dépense en R&D et l’amener, sous le leadership de Gilles Le Borgne, à un niveau de performance plus élevé, c'est justement protéger l’entreprise.

De manière un peu paradoxale, fixer aujourd’hui une limite – très raisonnable et très compétitive – aux dépenses de R&D, c’est nous mettre en situation d’améliorer le rendement de l’argent dépensé, l’organisation, la manière dont nous travaillons ensemble, la transversalité de collaboration dans les différents métiers, la manière dont nous anticipons les résultats de performances de nos voitures par le calcul plutôt que par l’essai systématique, etc.

Toute la modernisation du processus de création, qui est évidemment mise sous la contrainte d’une limite budgétaire qui force au progrès, nous garantira donc un avenir à moyen et long terme.

Ensuite, vous m’avez interrogé sur l’Hybrid Air. Mme la coprésidente m’a fait remarquer que nous vous demandions la neutralité technologique alors que, de votre côté, vous aviez envie de décider sur du réel, ce que je comprends et respecte parfaitement. Je vais vous apporter quelques éclaircissements.

Nous avons développé l’Hybrid Air – qui fonctionne – mais nous l’avons mis sur étagère. En effet, nous ne pouvons pas augmenter le prix de nos voitures de 3 000 ou 4 000 euros pour couvrir le coût de cette technologie, car le client ne les achèterait pas. En outre, c’est une technologie qui nous est propre. Or aucun gouvernement ne choisira une technologie que nous sommes les seuls à utiliser, car cela obligerait les autres constructeurs à s’aligner sur nous. C’est une situation à laquelle nous sommes tous confrontés collectivement : si nous choisissons des technologies plutôt que des résultats, nous inhibons la capacité créative des entreprises qui est au service des communautés dans lesquelles nous opérons.

La meilleure façon de nous faire contribuer à l’amélioration de la santé et de la qualité de vie de nos concitoyens, c’est de nous fixer des objectifs, certes sévères, mais qui nous laissent totale liberté pour exprimer la créativité de nos forces de R&D et trouver les solutions qui nous permettront d’atteindre ces objectifs.

Il me reste encore à répondre à de nombreuses questions. Je commencerai par celle qui portait sur le CICE.

Pour vous donner un ordre de grandeur, sur une masse salariale de 4 milliards d’euros en France, le CICE représente pour l’entreprise PSA à peu près 100 millions. Pour autant, ce dispositif va dans le bon sens, dans la mesure où il nous permet d’améliorer les équations économiques et d’affecter certains projets dans des usines françaises. Évidemment, il ne nous dispense pas du travail que nous devons faire nous-mêmes pour améliorer la performance de notre entreprise, que ce soit dans le rendement de notre ingénierie, dans la qualité du dialogue avec nos fournisseurs ou dans le rendement de notre outil industriel.

Si nous butons sur des écueils qui nous pénalisent par rapport à nos concurrents, vous pouvez compter sur nous pour venir vous l’expliquer. Mais je pense que nous avons plus à faire par la qualité du dialogue et par l’acceptation d’une idée simple : le statu quo, c’est la disparition, alors que le changement et le progrès, c’est l’avenir et la pérennité. Tel est le sens du dialogue que nous menons avec nos partenaires sociaux. Évidemment, ce n’est pas facile parce que le changement est synonyme d’inconnu et peut provoquer des angoisses.

À ce propos, vous m’avez demandé si la présence d’un acteur chinois dans notre capital allait nous faire perdre notre indépendance. Sincèrement, vous pouvez être rassurés. Notre actionnaire est très content de constater qu’en l’espace de douze mois, sa valeur de capitalisation boursière – les 14 % qu’il détient dans l’entreprise – a été doublée. Il est maintenant conforté dans son investissement. Certes, il y a un an, vu de la Chine, il n’était pas évident d’investir 800 millions d’euros dans PSA, une entreprise française mal en point. Mais notre plan de reconstruction a porté ses fruits et l’actionnaire chinois, ainsi que l’État français et la famille Peugeot, ont vu le montant de leur participation dans l’entreprise doubler en l’espace de douze mois.

Nos actionnaires chinois se comportent de manière tout à fait exemplaire. Jusqu’à présent, ils nous ont accordé leur confiance. Nous avons toute latitude pour faire ce que nous avons à entreprendre, y compris prendre des décisions qui ne sont pas les plus populaires, mais qui sont nécessaires pour assainir l’entreprise et la rendre plus performante. Je voulais donc vous dire que je ne perçois aucun risque et que nous ne devons pas nous laisser emporter par nos anxiétés. Je m’en porte garant devant vous.

Vous avez posé des questions sur l’avenir de l’entreprise, sur l’usine de Rennes et sur le site d’Aulnay.

Qu’en est-il de l’avenir de l’entreprise ?

Nous devons travailler sur un troisième critère de reconstruction économique, celui de la marge opérationnelle de la division automobile. C’est le critère qui mesure le mieux l’efficience du fonctionnement d’un constructeur automobile, car il capte tout le processus de création, de validation, de fabrication et de distribution de l’objet.

Nous sommes actuellement en train d’activer tous les leviers du plan de reconstruction « Back in the Race ». Ces leviers sont suffisants pour nous permettre d’atteindre notre objectif. La seule question qui reste est de savoir quand. Nous avons dit que ce serait au plus tard au 2 018. Tous les observateurs, qui connaissent l’esprit compétitif de l’équipe à la tête de PSA, savent que nous tentons d’y parvenir plus tôt. L’avenir nous le dira. Quoi qu’il en soit, la fin de la période de reconstruction économique de PSA est proche.

Nous aurons alors, avec tous nos collaborateurs qui partagent une communauté de destin avec leur entreprise, le privilège et le plaisir de poser sur la table l’ensemble des options qui se présentent devant nous puisque nous serons à nouveau maîtres de notre destin : nous aurons une entreprise sans dettes, rentable et générant du cash-flow de manière récurrente.

Deux options pourront éventuellement se combiner.

La première est une option de développement dans une position de croissance organique – c’est-à-dire par nos propres moyens. Grâce à nos résultats, nous pouvons nous donner les moyens financiers d’engager ce que l’on appelle dans notre jargon une « croissance organique stand-alone », en position isolée. Cette option a l’avantage de nous laisser un total contrôle de nos décisions. Elle a aussi l’inconvénient d’être assez lente, ce qui peut nous faire rester dans une position de faible taille pendant une durée plus importante et nous rendre plus vulnérables.

Cette première voie nous amènera sur des marchés mondiaux, où nous ne sommes pas aujourd’hui présents. Mais elle a des limites qui sont liées à une pente de croissance évidemment plus faible que si nous avions – et je parle de l’autre option – noué une alliance stratégique avec un autre constructeur pour pouvoir intégrer le « club des Titans » – ceux qui vendent entre 8 et 10 millions de véhicules par an.

L’autre option a l’avantage de nous apporter la taille. Et le fait d’être un constructeur de grande taille permet, d’une part de diluer les coûts d’ingénierie et donc d’améliorer la rentabilité de chaque modèle, d’autre part de renforcer sa puissance d’achat en pesant davantage dans le business des fournisseurs. Un constructeur qui vend 10 millions de voitures par an met en effet beaucoup plus de pression qu’un constructeur qui en pèse 3 millions. C’est d’ailleurs là que réside la différence en compétitivité des coûts pour un constructeur automobile.

La taille favorise donc la rentabilité du constructeur. Mais elle apporte aussi de la lourdeur, de la bureaucratie, de la lenteur et un déficit de « manœuvrabilité ». Elle n’est donc pas sans inconvénients.

La position que nous avons prise et que j’ai proposée au comité exécutif et au conseil est très simple : d’abord, ne pas se disperser et rester concentrés sur l’exécution du plan « Back in the Race ». Nous terminons notre redressement jusqu’à ce que l’assainissement de l’entreprise soit indiscutable. Ensuite, nous posons le jeu, avec les différentes alternatives, de la façon la plus objective, sans idée préconçue. Nous évaluons les avantages et les inconvénients et nous prenons une décision qui, évidemment, ne sera prise qu’avec l’accord de nos trois actionnaires de tête : l’État français, la famille Peugeot et Dongfeng. En effet, ce sont eux qui auront à nous orienter, après que nous leur aurons apporté les éléments nécessaires.

Et là, je souhaite mettre un peu de sérénité dans le débat : entre la pensée unique selon laquelle il faudrait à tout prix devenir gros, et l’audace irresponsable qui amène à penser que, lorsque l’on est tout petit, on peut toujours s’en sortir, il est possible de discuter et de construire. Je ne doute d’ailleurs pas que nous aurons à en rediscuter. Cela dit, j’ai bien apprécié l’expression : « seul, petit et peu rentable ». Pour ce qui est du « peu rentable », nous allons nous en occuper ; pour ce qui est du « petit » et du « seul », on ne peut pas s’en occuper tout seul.

Venons-en au site de Rennes. Je dis aux collaborateurs de l’usine de Rennes la même chose qu’à tous les collaborateurs de toutes nos usines en France – que je vous répète ici avec respect et conviction : il faut transformer l’inquiétude et l’anxiété en action. Celles-ci n’ont jamais résolu les problèmes ; elles auraient même tendance à les aggraver. Ce que nous avons fait à Rennes a été assez simple : nous avons respecté le nouveau contrat social avec nos partenaires, et nous avons affecté à l’usine de Rennes un véhicule dont le nom de code est l’apr. 87, le successeur du Peugeot 5 008.

Nous l’avons décidé sur la base d’un plan d’action qui repose sur trois éléments.

Premier élément : la performance intrinsèque à l’usine. Nous avons fixé à l’usine de Rennes un objectif que je qualifie de particulièrement raisonnable, que certains pourraient qualifier de conservateur, mais qui est en fait difficile compte tenu du point de départ : être aussi performants à Rennes en qualité et en coût qu’à Sochaux. Nous avons ainsi demandé à l’usine de Rennes d’être au même niveau qu’une autre usine du groupe PSA en France. Cela semble particulièrement légitime, même si le gap de performance qu’il s’agira de combler n’est pas négligeable. Mais le challenge est entre les mains de l’équipe de Rennes.

Deuxième élément : il était évident, dans les propositions qui nous étaient faites par nos partenaires fournisseurs, que bon nombre d’entre eux considéraient que l’on allait fermer cette usine et intégraient dans leur offre des éléments d’anticipation du coût d’une éventuelle restructuration de leurs ateliers. Mais ce n’était pas légitime : non seulement nous n’avions pas pris cette décision, mais il était clair que je ne voulais pas qu’elle soit prise. Nous avons donc remis les choses au point avec chacun de nos partenaires et nous leur avons demandé de reprendre leurs offres, leurs propositions et de les améliorer. Ils l’ont fait, ce qui a amélioré du même coup l’équation économique du projet.

Troisième élément : cette usine souffre, en amont, d’un handicap logistique. En effet, elle se trouve à l’Ouest de la France, alors que notre centre de gravité industriel est plutôt à l’Est. La base fournisseurs est un peu éloignée, ce qui est pénalisant lorsqu’il s’agit de transporter les pièces jusqu’à l’usine de Rennes. Nous avons donc utilisé ce qui est dans le droit français, à savoir la possibilité de faire appel à nos partenaires locaux pour essayer de combler ce handicap logistique.

Ces trois actions nous ont permis de construire un business plan pour ce projet, qui est maintenant rentable et nous conforte dans la décision que nous avons prise. Il permettra, je l’espère, pendant la durée de fabrication de ce véhicule, de démontrer l’efficacité économique de l’usine et donc de lui ouvrir les portes de l’avenir. J’ajoute que les salariés de l’usine de Rennes ont huit ans de visibilité, et qu’il y a peu d’industries dans notre pays qui le permettent. Ainsi, il y a à la fois la volonté, l’organisation et le temps pour travailler à améliorer la performance de cette usine.

Parlons du site d’Aulnay, dont se soucie M. Jean-Pierre Blazy.

Il y a deux dimensions à prendre en compte : d’abord, le reclassement des collaborateurs d’Aulnay. L’entreprise PSA a pris des engagements très clairs à ce propos. Je sais que certaines personnes ont à cœur de dire que nous ne les avons pas respectés. Avec tout le respect et l’amitié que j’ai pour vous, je ne peux pas laisser dire cela et je vais donc vous adresser une lettre pour vous donner les éléments chiffrés sur la question, qui est suivie personnellement par notre patron DRH et par moi-même.

Les salariés qui n’ont pas été reclassés sont ceux qui n’ont pas voulu accepter un certain nombre de propositions. J’ai été confronté à plusieurs cas, que j’ai trouvés parfaitement raisonnables. Je vais vous les présenter pour que vous puissiez savoir jusqu’où nous sommes allés pour respecter nos engagements. Je ne dis pas qu’il ne peut pas y avoir un cas particulier dans les 3 000 cas dont vous avez fait état. Mais croyez-moi, nous avons la ferme intention de respecter totalement nos engagements, car il en va de la crédibilité de l’entreprise.

Autre dimension à prendre en compte : la reconversion du site, sous le pilotage direct du secrétaire général de l’entreprise. Un projet, validé avec les collectivités locales et les représentants du préfet, constitue le socle de notre accord. Il ne nous a pas échappé qu’un certain nombre d’autres idées fleurissaient çà et là, qui pourraient être mises sur la table. Pour ma part, je considère que nous avons travaillé dans la transparence, avec les uns et les autres, pour donner un avenir assez séduisant à cette zone et la mettre au service de la collectivité.

Jusqu’à preuve de contraire, c’est notre référence et c’est le fruit de cet accord que nous allons essayer de mettre en œuvre. J’espère que nous ne serons pas perturbés dans cette mise en œuvre. Quoi qu’il en soit, le secrétaire général pilote en personne ce dossier et me rend compte de manière régulière. Mais je reste à votre disposition si, à un moment donné, des dérapages se produisaient.

Ensuite, plusieurs questions ont porté sur la voiture électrique, l’hybride rechargeable et la voiture à hydrogène. Je vous parlerai des deux premières, et Gilles Le Borgne vous parlera de la voiture à hydrogène.

Les deux principaux verrous à la diffusion du véhicule électrique sont l’insuffisance de la densité du réseau de chargement, et sa faible autonomie.

Sur la densité du réseau de chargement, vous en savez autant que moi, puisque c’est vous qui décidez. Sur l’autonomie du véhicule électrique, je pense que la chimie des batteries va continuer à progresser. Mais tout porte à croire qu’à l’horizon de trois à cinq ans, elle aura progressé au mieux de 50 à 70 % par rapport à ce que nous connaissons aujourd’hui. À cet horizon, le véhicule électrique restera donc un véhicule de « commuting », celui que vous pouvez utiliser pour vous rendre quotidiennement au travail, mais pas pour partir en vacances avec toute votre famille, parce que l’autonomie, le volume, l’habitabilité ne seront pas conformes à vos attentes.

Cela ne veut pas dire qu’un jour, le problème ne sera pas résolu. Certains constructeurs mettent déjà beaucoup plus de batteries dans les voitures, en sacrifiant d’autres prestations, pour augmenter leur autonomie – ce qui augmente également leur prix. Mais vous devez aussi savoir qu’une autre difficulté du véhicule électrique tient au fait que la partie « chaîne de traction et batterie » est très onéreuse. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il faut le soutenir au niveau de son prix de vente ; sinon, le consommateur ne peut pas se l’offrir. Ce surcoût technique reste extrêmement élevé. À un certain moment, nous aurons suffisamment de véhicules dans la rue pour que la production en volume permette d’envisager la réduction des coûts. Mais je ne l’envisage pas dans les trois ou cinq ans. Peut-être dans dix ou quinze ans ?

En tout cas, et je vous l’ai dit tout à l’heure, nous ne pouvons pas envisager la question du véhicule électrique sans envisager celle de l’énergie propre. Sans oublier que nous ne sommes pas tous logés à la même enseigne, ni sur le plan de la propreté de l’électricité, ni sur le plan du coût de l’électricité, ne serait-ce qu’en Europe.

Maintenant, le Plug-in-Hybrid, ou hybride rechargeable, a la capacité de concilier le meilleur des deux mondes. En effet, de par son caractère rechargeable, il offre la possibilité de faire du « zéro émission », c’est-à-dire du mode électrique pur sur une autonomie très limitée, de l’ordre de 50 km. Et sur des trajets plus longs, il a une autonomie égale ou supérieure à un véhicule thermique classique. Vous bénéficiez alors de tous les avantages que vous connaissez déjà dans votre berline ou votre monospace aujourd’hui, et qui sont évidemment nécessaires pour le confort de votre famille et de vos déplacements. L’inconvénient de ce véhicule est son surcoût assez spectaculaire. Il sera donc introduit par le haut de gamme, pour des véhicules qui sont d’une diffusion plus faible, avec des prix plus importants.

Je précise que nous allons introduire le Plug-in-Hybrid, ainsi que les véhicules électriques (nouvelle génération), en 2019-2020, c’est-à-dire relativement rapidement. Gilles Le Borgne et ses équipes travaillent à l’introduction de ces technologies au meilleur niveau de compétitivité de l’industrie automobile, et je lui fais totalement confiance.

Mais vous n’avez évidemment pas oublié de noter que, lorsque nous avons connu ce dernier pic de pollution à Paris, toute la moitié nord de la France avait été affectée. Ce n’étaient pas les véhicules qui roulaient dans Paris qui en étaient responsables, mais une nappe de pollution qui couvrait cette moitié nord. C’est la raison pour laquelle on ne peut pas traiter cette question uniquement avec notre réglementation. D’ailleurs, pourquoi la France se pénaliserait-elle en appliquant une technologie qu’elle maîtrise et qui, suffisamment répandue, pourrait traiter le problème de CO2 si les pays qui l’entourent adoptent une attitude moins vertueuse ? Toute réglementation qui serait spécifique à notre pays, aussi responsable et pertinente qu’elle le soit, dans la mesure où elle serait en décalage avec la réglementation de la Commission européenne, risquerait de nous handicaper par rapport à nos concurrents, ce que nous ne souhaitons pas – pas plus que vous, d’ailleurs.

M. Gilles Le Borgne. La pile à combustible alimentée à l’hydrogène est une technologie que nous avons travaillée chez PSA. En 2005, en collaboration avec le CEA, dans le cadre du programme GENEPAC, nous avons développé une pile de 100 kilowatts. Mais, pour plusieurs raisons, nous n’avons pas engagé de développement sur cette technologie, qui reste donc dans la phase amont de la R&D.

Le véhicule à hydrogène sera encore plus cher que le Plug-in-Hybrid que l’on vient de citer ; il sera donc lui aussi réservé à la partie haute du segment. Il a un certain nombre de limitations intrinsèques à la disponibilité de l’hydrogène propre. En effet, si vous obtenez l’hydrogène par un cracking d’hydrocarbures, cela n’a pas de sens ; et si vous le faites par l’hydrolyse de l’eau, vous avez le même problème d’origine de l’électricité. Ensuite, une fois que vous avez produit l’hydrogène, il faut le transporter dans les zones de distribution ; or les niveaux de pression sont extrêmement élevés, de plusieurs centaines de bars, et entre la compression et la détente, vous perdez beaucoup d’énergie. Ces problèmes de distribution n’étant pas traités aujourd’hui, avec les problèmes d’analyse de cycles de vie globaux, on considère que ce n’est pas une technologie pour les années 2025. Voilà pourquoi nous sommes plutôt en position de veille.

M. Carlos Tavares. L’un d’entre vous a demandé si nous avions une offre de produits suffisamment propres. La réponse est dans les chiffres que nous avons fournis, mais je préfère revenir dessus.

En matière d’émissions de CO2, nous sommes, en Europe, le constructeur automobile le plus performant. Nous maîtrisons parfaitement toutes les technologies qui permettent de réduire ces émissions.

Nous avons des véhicules (diesel) qui consomment 3 litres aux 100 km, grâce aux moteurs Blue HDI ; ainsi, la Peugeot 208, qui sera vendue dès cette année, en sera équipée. Nous avons des véhicules à essence PureTech, qui sont au meilleur niveau de performance. Nous avons de l’hybride diesel et quatre véhicules électriques en vente. Nous avons donc l’ensemble des quatre technologies de base que nous jugeons utiles, avec les développements que je vous ai signalés – chaîne de traction électrique et Plug-in-Hybrid rechargeable essence à l’horizon 2019-2020. Je pense que nous sommes correctement outillés pour faire face à l’ensemble des demandes des sociétés dans lesquelles nous opérons.

Par ailleurs, est-ce que tout ce qui se fait sur le diesel a un impact sur notre engagement de fabriquer un million de véhicules en France ? Potentiellement, oui. Si l’opinion publique est convaincue du caractère nocif d’un diesel moderne, cela a un effet immédiat sur notre mix. Le mix diesel de nos ventes est en train de baisser, alors même que nous sommes reconnus comme les grands spécialistes du moteur diesel. Donc, dès l’instant où l’on fait croire à l’opinion publique que le diesel moderne est une mauvaise technologie, PSA en est impacté.

L’intérêt de nos concitoyens, celui de la France et celui de PSA, est de faire en sorte que s’il devait y avoir une mutation, elle soit progressive. Vous avez notre engagement que nous saurons nous adapter aux mutations, comme nous l’avons démontré dans le passé. Mais évidemment, tout mouvement brutal dans la perception que l’opinion peut avoir de l’intérêt de telle ou telle technologie aura des conséquences brutales sur l’industrie, ce qui n’est évidemment ni votre souhait ni le mien. Voilà pourquoi que je trouve absolument essentiel – et c’est peut-être le point le plus important de notre échange de ce matin – que l’on s’appuie sur des éléments factuels, rigoureux et indépendants pour analyser la question du diesel.

Vous avez pu constater que dans les points qui vous ont été présentés, il n’y avait aucune donnée de PSA. Lorsque nous avons mis en avant l’équivalence de l’essence et du diesel au niveau des normes Euro 6, ce n’était pas à partir de nos documents. Encore une fois, cette équivalence est le fruit de la réglementation appliquée depuis septembre 2014, qui a amené le diesel et l’essence à des niveaux d’émission bas et similaires.

La réussite de l’objectif de 95 g de CO2 en 2020, qui a été fixé par l’Union européenne, passe par une utilisation massive du diesel – par tout le monde, à savoir PSA, par notre concurrent français et par nos principaux concurrents allemands. Cela prouve que tout le monde est arrivé à la conclusion que c’était un outil fantastique pour réduire les émissions de CO2.

Si nous sommes sincères dans notre volonté de traiter le problème du réchauffement climatique, il serait incohérent de ne pas donner au diesel le rôle qui doit être le sien. Et si nous avons des incertitudes sur la question des particules, intégrons dans les futures normes Euro 7 ou Euro 8 des contraintes supplémentaires pour traiter des particules à un niveau de taille que je suis aujourd’hui incapable de définir – mais Gilles Le Borgne vous a expliqué que le filtre à particules était un dispositif mécanique de blocage des particules.

L’ensemble de ces éléments sont factuels et scientifiques. En tant que constructeur automobile, je ne peux pas vous demander de nous croire sur parole. Voilà pourquoi je vous ai proposé de faire la transparence sur nos résultats de mesures, d’essais et de spécifications pour qu’un groupe de scientifiques indépendants puisse utiliser les mêmes données que les nôtres et porter un jugement. Comme je vous l’ai dit, notre volonté stratégique est d’être un apporteur de solution, et pas un poseur de problèmes.

Enfin, je ne pourrai malheureusement pas vous répondre à propos de la situation de Gefco. Comme nous n’en sommes plus l’actionnaire majoritaire, nous ne pouvons ni contrôler ni piloter cette entreprise. En outre, son activité de messagerie, qui rencontre des difficultés de rentabilité, ne concerne pas PSA. En effet, nous utilisons Gefco pour transporter des pièces et des véhicules. Je ne suis donc pas en mesure de vous expliquer dans le détail ce qui s’y passe.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Monsieur Carlos Tavares, je vous remercie, ainsi que vos collaborateurs, de nous avoir consacré autant de temps. Vous aurez noté que les parlementaires s’intéressent fortement à l’avenir du groupe PSA, à celui de l’industrie automobile ainsi qu’à la prise en compte des enjeux environnementaux et du développement durable.

Mme la vice-présidente Frédérique Massat. Merci, mesdames, messieurs, pour votre apport. Nous serons sans aucun doute amenés à nous revoir très prochainement. Vous êtes les bienvenus au sein de nos commissions respectives, pour faire le point sur ces dossiers qui constituent des enjeux majeurs pour nos territoires, tant au plan industriel qu’environnemental.

Merci à tous pour la qualité de ces échanges.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Réunion du mercredi 15 avril 2015 à 9 h 30

Présents. – M. Alexis Bachelay, M. Serge Bardy, Mme Catherine Beaubatie, M. Jacques Alain Bénisti, M. Florent Boudié, M. Vincent Burroni, M. Alain Calmette, M. Yann Capet, M. Patrice Carvalho, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Luc Chatel, M. Guillaume Chevrollier, M. Stéphane Demilly, Mme Françoise Dubois, M. Philippe Duron, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, M. Jean-Marc Fournel, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Laurent Furst, M. Claude de Ganay, M. Alain Gest, M. Charles-Ange Ginesy, M. Jacques Kossowski, Mme Valérie Lacroute, M. Gérard Menuel, M. Robert Olive, M. Rémi Pauvros, M. Christophe Priou, Mme Sophie Rohfritsch, M. Martial Saddier, M. Gilles Savary, M. Jean-Marie Sermier, M. Thierry Solère, Mme Suzanne Tallard, M. Thomas Thévenoud, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. – Mme Sylviane Alaux, M. Yves Albarello, M. Julien Aubert, Mme Chantal Berthelot, M. Philippe Bies, M. Christophe Bouillon, Mme Sabine Buis, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Florence Delaunay, M. David Douillet, Mme Sophie Errante, Mme Geneviève Gaillard, M. Michel Heinrich, M. Christian Jacob, M. Jacques Krabal, M. Alain Leboeuf, Mme Viviane Le Dissez, M. Michel Lesage, M. Bertrand Pancher, M. Philippe Plisson, M. Napole Polutélé, Mme Catherine Quéré, M. Gilbert Sauvan, M. Gabriel Serville

Assistaient également à la réunion. – M. Frédéric Barbier, M. Jean-Pierre Blazy, M. Philippe Noguès