La commission a auditionné M. Stéphane Richard, président-directeur général d’Orange.
M. le président François Brottes. Pour commencer, je voudrais vous donner lecture, après consultation de l’ensemble des groupes politiques, des noms des rapporteurs budgétaires nommés dans notre commission. L’avis budgétaire sur l’agriculture et alimentation sera rédigé par Mme Marie-Lou Marcel (SRC), celui sur la pêche par Mme Annick le Loch (SRC), celui sur la forêt par M. André Chassaigne (GDR), celui sur l’industrie par M. Jean Grellier (SRC), celui sur l’énergie par M. David Habib (SRC), celui sur les entreprises par Mme Anne Grommerch (UMP), celui sur le tourisme par M. Eric Straumann (UMP), celui sur le commerce extérieur par M. Joël Giraud (RRDP), celui sur la consommation par M. Damien Abad (UMP), celui sur les communications électroniques par Mme Corinne Erhel (SRC), celui sur les postes par Mme Michèle Bonneton (écologiste), celui sur l’outre-mer par M. Serge Letchimy (SRC), celui sur les grands organismes de recherche par M. Franck Reynier (UDI), celui sur la recherche industrielle par M. Christophe Borgel (SRC), celui sur la politique de la ville par M. François Pupponi (SRC), celui sur le logement par M. Daniel Goldberg (SRC) et celui sur l’économie sociale et solidaire par M. Philippe Kemel (SRC), sous réserve de son inscription imminente parmi les membres de la commission.
Je vous indique aussi que je propose que notre commission, sans attendre la fin de l’été, va s’intéresser à l’impact des mesures particulières qui existent dans notre pays pour les zones franches, afin que nous puissions faire des propositions dans le cadre de la loi de finances, à travers une mission d’information. Le rapporteur sera M. Henri Jibrayel et le président M. Michel Sordi, du groupe UMP. Je demande aux groupes qui le souhaitent de me transmettre le nom de députés souhaitant participer à la mission. Ce n’est pas une obligation. Il faudrait éviter que la mission comporte plus de dix membres. Et je souhaiterais qu’on me transmette encore au moins un nom du côté du groupe UMP et deux du côté du groupe SRC.
Je remercie en votre nom à tous le président de France Télécom-Orange d’avoir pu se mobiliser dans des délais très courts pour venir rendre compte, devant le Parlement, de l’incident grave de vendredi dernier. J’en profite pour rappeler que la téléphonie mobile n’est pas incluse dans le service universel : les obligations qui s’imposent aux opérateurs dérivent pour l’essentiel des licences et là, en tout état de cause, il semble qu’elles n’aient pas été respectées. Il faut que nous puissions comprendre avec vous, monsieur le président, les causes de l’incident de vendredi dernier, les modalités d’indemnisation proposées et surtout, les moyens qui pourraient permettre que cette situation ne se reproduise pas. Il y a un vrai besoin d’explication.
Nous avons d’ailleurs auditionné ce matin le président de l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes), dans le cadre d’une réunion qui avait été prévue avant la panne. Je lui ai proposé de se joindre à nous cet après-midi mais je crois que des contraintes d’emploi du temps l’ont empêché de le faire... Je le dis avec le sourire, monsieur le président, mais je ne suis pas sûr que l’incident de vendredi vous ait fait sourire.
M. Stéphane Richard, président de France Télécom-Orange. Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les députés, pour votre invitation à venir vous parler d’un sujet qui a des répercussions, au-delà du groupe France Télécom-Orange, sur l’ensemble du pays. Je considère qu’il est de mon devoir de venir devant la représentation nationale. Je serai d’ailleurs auditionné la semaine prochaine au Sénat, dans le cadre d’une réunion programmé avant les évènements de vendredi dernier.
Je vais vous donner l’ensemble des éléments d’information et d’analyse qui sont en notre possession à l’heure actuelle, bien que le travail d’expertise ne soit pas complètement abouti. La panne de vendredi dernier a été importante puisqu’elle a touché un grand nombre de nos clients directs ou clients des opérateurs, virtuels ou non, que nous accueillons sur notre réseau. Cette panne a débuté vendredi 15h et duré jusqu’à samedi 3h20. Il s’agit d’un évènement rarissime dans l’histoire de France Télécom : il faut remonter à 2004 pour trouver un évènement similaire.
Quoi que rarissime, ce type de problème survient partout dans le monde. Le plus récent est un black-out de l’ensemble des services voix et SMS en Norvège. Tous les grands réseaux américains ont aussi été touchés par ce type de problème au cours des 18 derniers mois. Il faut réaliser qu’on est face à une technologie très complexe et qu’il est normal de connaître des problèmes à intervalles réguliers – vous voyez que nous sommes à une fréquence décennale.
C’est pour nous une leçon d’humilité. Nous avons accumulé une grande expérience ; notre réseau est fréquemment classé comme le meilleur en terme de qualité ; et nous investissons des sommes très importantes pour la mise à niveau et la maintenance de notre réseau. Mais devant ce type d’incident, il faut garder de la modestie.
Que s’est-il exactement passé ? Nous avons d’abord constaté que le trafic de communication s’est écroulé vers 15h vendredi. Il faut savoir que le trafic est supervisé seconde par seconde : nous sommes donc en mesure de détecter très rapidement des anomalies. A partir de 15h06, le trafic s’est fortement réduit. A 15h30, il était tombé de 30 % par rapport à la normale. C’était un jour de trafic important mais ce point n’a pas de rapport avec l’incident qui s’est produit. Nous avons activé rapidement le dispositif de crise maximale pour nous, que nous appelons « crise rouge », qui mobilise instantanément plus de 200 personnes de la direction technique et d’autres services.
J’en profite pour vous dire que je suis entouré d’une partie de l’équipe de direction : Delphine Ernotte, qui est en charge des activités mobile et fixe en France, Pierre Louette, secrétaire général, Philippe Chicaud, patron de la technique France, Michaël Trabbia et Jérémie Dutray qui travaillent également avec moi, et Thierry Bonhomme, qui est patron du réseau pour le groupe.
La situation a continué à se dégrader après l’activation de la « crise rouge » : à 19h seules 10 % des communications étaient acheminées par le réseau. Nous avons ensuite réalisé plusieurs interventions pour rétablir les communications, mais elles n’ont pu avoir d’effet que dans la soirée, après 23h pour la vois et les SMS tandis que l’internet mobile, la data, n’a pu être rétablie qu’entre 00h15 et 3h sur l’ensemble du réseau.
La réactivité interne de l’entreprise n’est pas critiquable. Le PC de crise a été activé et les équipes techniques se sont mobilisées très vite. La panne a été connue très rapidement, sur les réseaux sociaux et la blogosphère notamment. Il est désormais difficile d’éviter que certains responsables apprennent l’évènement par internet et non par l’entreprise directement…
M. le président François Brottes. …il est encore plus difficile de les prévenir avant.
M. Stéphane Richard. Cet évènement a eu immédiatement une portée médiatique importante. C’est la raison pour laquelle nous avons mis en place rapidement des moyens pour informer nos clients et j’ai organisé une conférence de presse dès le lendemain, samedi, afin d’expliquer de la manière la plus transparente possible ce qui s’était passé et les modalités d’indemnisation.
La panne a été d’origine logicielle. Elle a affecté un des éléments principaux du réseau mobile. Un réseau mobile est constitué de trois grandes partie : le cœur de réseau, constitué notamment de serveurs informatiques qui gèrent les abonnés, et leur localisation ; les réseaux de collecte, c’est-à-dire les infrastructures de transport de données qui permettent d’acheminer les informations sur l’ensemble du territoire ; et puis il y a ce qu’on connaît le mieux, les antennes et stations de base, l’élément radio des réseaux de téléphonie mobiles. Le HLR (home location register) est le cœur du système puisqu’il gère l’authentification et la localisation de tous les abonnés, directs ou hébergés sur le réseau. Le HLR contient deux types de machine. Il y a d’abord le back-end, composé de six grandes machines qui gèrent les données de nos 30 millions de clients. Ces machines sont triplées : il y a une seule machine active et deux qui tournent en parallèle afin d’assurer la redondance. Il y a ensuite le front-end, constitué de 9 machines. C’est le dialogue entre ces deux composantes qui assurent le bon fonctionnement du système. Les machines sont installées sur plusieurs sites en France. Elles sont fournies par Alcatel-Lucent, notre fournisseur cœur de réseau, et sont de dernières génération : le problème n’a donc en aucun cas été causé par une éventuelle vétusté du matériel.
Il se trouve que chaque année, les équipes d’Alcatel-Lucent mettent à jour ces équipements, comme on met à jour un logiciel d’ordinateur, par exemple pour passer de la 3G à la 4G. Cette mise à jour se fait par un patch. Une mise à jour est intervenue sur nos équipements HLR 3 jours avant l’incident. Il semble que cette mise à jour soit la cause-source de cet incident. Il se trouve que cet incident n’a pas fait l’objet d’une alerte automatique, qui doit permettre d’activer les équipements redondants. Peut-être sommes-nous là dans le défaut de conception du système ou dans la défaillance humaine, je ne le sais pas encore… Toujours est-il que les redondances ou solutions de secours prévues par le système n’ont pas apporté de solution car elles n’ont pas été mises en œuvre.
Ce problème n’est pas lié, a priori, à une attaque, à l’afflux de trafic, ou à un sous-investissement quelconque dans le réseau. Il s’agit tout simplement d’un accident logiciel. Dans tous les grands réseaux, il y a des problèmes qui peuvent survenir, présentant un caractère imprévisible, mais dont il est important de tirer un certain nombre d’enseignements.
Quels sont-ils ? Dès samedi, j’ai demandé un audit interne qui permette d’aller au bout de ce qui s’est passé, non pas sur le plan technique puisque nous en avons désormais une vision assez clair, mais plutôt sur les aspects périphériques comme la communication. J’en profite pour vous dire que j’ai eu M. Jean-Ludovic Silicani au téléphone samedi matin et de nouveau ce matin. Il m’a expliqué que vous aviez laissé ouverte la possibilité qu’il participe à l’audition de cet après-midi, ainsi que les raisons pour lesquelles il pensait qu’il ne s’agissait pas d’une bonne idée et c’est son droit le plus strict. Même s’il est normal qu’elle soit au courant d’incident comme celui de vendredi dernier, j’en profite pour rappeler qu’il n’y a aucune obligation juridique d’informer l’ARCEP…
M. le président François Brottes. …mais on peut mettre la courtoisie au rang des urgences, monsieur le président…
M. Stéphane Richard. La courtoisie a été respectée, puisque j’ai appelé M. Silicani dès le samedi matin. Je ne sais d’ailleurs pas s’il eût été courtois de le réveiller à 3h du matin…
Donc l’audit est en cours. J’ai demandé des conclusions pour le 10 septembre et un rapport d’étape pour la fin du mois de juillet. Par ailleurs, j’ai remis au Gouvernement, en application de l’article D. 98-5 du code des postes et des communications électroniques, un rapport détaillant les causes de l’incident et nos investigations complémentaires.
Au-delà des aspects purement juridiques, il y a pour nous des enseignements à tirer de cette crise. Il y a quelques jours, j’ai dit que nous mettrions beaucoup moins de temps pour revenir à une situation normale que vendredi dernier si nous étions confrontés à nouveau un problème de ce type. Il y a une phase nécessaire pour comprendre ce qui s’est passé, qui sera beaucoup plus rapide s’il devait y avoir une prochaine fois.
Je termine par la question de l’indemnisation. Il s’agit d’un sujet compliqué parce que d’un côté, il y a le terrain du droit, ce que prévoient les contrats, et de l’autre la politique commerciale. Cet incident n’est pas une bonne chose pour notre relation avec nos clients. Nous avons essayé de proposer quelque chose qui nous paraisse équilibré, mais il y aura forcément des situations individuelles ne s’inscrivant pas dans ce cadre. De manière générale, nous avons proposé pour nos clients au forfait une journée illimitée, voix et SMS, pour les clients au forfait une journée de SMS illimités et pour les clients disposant d’un forfait illimité 1 GO de data gratuite. Je signale que nous allons prendre soin de signaler aux clients quel sera le jour où ils bénéficieront de la gratuité. Il faut rappeler que la dernière fois qu’un incident de ce type était survenu, la gratuité avait été révélée a posteriori. Nous avons choisi la semaine de la rentrée pour cette journée de gratuité et nous le rappellerons à nos clients peu avant.
M. le président François Brottes. Durant les quelques années au cours desquelles j’ai présidé le Comité opérationnel d’expérimentations sur les antennes-relais (COMOP), j’ai entendu l’ensemble des opérateurs exprimer leurs réserves quant à la réduction de la puissance des antennes-relais sur un périmètre préalablement défini, au motif que cela constituerait un risque majeur susceptible d’entraîner des arrêts de fonctionnement du service. Mais, lors de ces débats, aucun opérateur n’avait pensé à un bug de l’importance de celui qui est survenu vendredi dernier. Je répète d’ailleurs que cet incident aurait pu frapper n’importe quel opérateur.
Par ailleurs, j’insiste sur le fait que l’on n’est pas passé brusquement, sur l’ensemble du réseau, d’une situation de fonctionnement normal à une situation de crise : un certain nombre de terminaux ont en effet continué à fonctionner tandis que d’autres s’arrêtaient. Cela a induit les clients en erreur, qui pouvaient croire à une panne de leur terminal ou d’un émetteur. La communication émanant des opérateurs est donc utile pour permettre aux clients, qui doivent souvent se contenter des informations plus ou moins fiables qui circulent sur les réseaux sociaux, de comprendre la situation et de prendre au plus tôt les bonnes décisions. Il me semble que vous devriez mener une réflexion sur ce point.
Je vais à présent donner la parole aux différents orateurs, à commencer par Mme Laure de La Raudière, pour le groupe UMP.
Mme Laure de La Raudière. Cette panne a confirmé l’importance du secteur des télécommunications pour le bon fonctionnement de notre économie et de notre société, d’autant plus qu’elle est survenue – cela tombe toujours mal – le jour des résultats du bac et des premiers grands départs en vacances. Un autre enseignement de cet incident est d’avoir mis en évidence le caractère primordial de l’internet et de la téléphonie mobiles pour nos compatriotes. S’il ne pourra jamais être mis fin au risque de panne des systèmes informatiques, il me paraît important que vous engagiez une réflexion sur les moyens permettant de renforcer votre système de sécurité et ainsi de réduire au minimum la durée de ces incidents. C’est un axe de travail majeur pour votre société, qui pourrait également impliquer d’autres acteurs. Peut-on à cet égard envisager un basculement du trafic d’un réseau vers celui d’un concurrent ? Il conviendrait nécessairement de régler certaines difficultés de facturation.
Par ailleurs, vous avez affirmé qu’Orange constituait le meilleur réseau du point de vue de la qualité de service. Or il n’existe pas d’objectifs en ce domaine, contrairement à la sécurité et au taux de couverture du réseau. Pour autant, il me semble que, depuis quelques mois, la qualité de votre service sur les réseaux mobiles 3G s’est fortement dégradée : les abonnés au 3G reçoivent souvent un service correspondant à la qualité 2G. Est-ce lié à l’arrivée de Free ? En d’autres termes, cela concerne-t-il votre seul réseau ou bien également ceux de vos concurrents ? Si cette seconde hypothèse est vérifiée, peut-on l’expliquer par l’explosion du trafic et que proposez-vous pour y remédier ? En tout état de cause, cette situation est d’autant moins acceptable que les clients paient plus cher pour bénéficier de la 3G. L’accélération de vos investissements dans la 4G est-elle une conséquence de cette situation ? Combien de temps devrait-on ressentir ce défaut dans la qualité de service ?
S’agissant du très haut débit, vous connaissez les craintes des collectivités locales concernant vos engagements à l’égard des zones AMII (appel à manifestation d’intention d’investir). Que pouvez-vous leur proposer, dans le cadre de votre politique contractuelle, pour assurer le déploiement du réseau sur ces territoires ?
Par ailleurs, vous proposez souvent, dans le cadre des réseaux d’initiative publique (RIP), des technologies VDSL et VDSL 2. S’agissant de ces technologies, quel est le pourcentage des lignes qui seront situées à plus d’un kilomètre en retrait des sous-répartiteurs, et qui souffriront de ce fait d’une qualité de réseau insuffisante et n’apporteront donc pas un niveau de services comparable à celui de la fibre optique ? Certes, il est légitime de promouvoir le VDSL, et je comprends que cela soit de votre intérêt, mais il ne faudrait pas que les hameaux isolés en pâtissent. Si tel était le cas, nous aboutirions, malgré l’importance des investissements consentis par les collectivités locales pour développer cette technologie, à une véritable fracture numérique. Les craintes en la matière sont bien réelles.
M. le président François Brottes. Le temps nous étant compté, je souhaiterais que l’on concentre nos échanges sur l’incident de vendredi dernier ; M. Richard aura en effet l’occasion de revenir devant nous. Je lui demande donc de bien vouloir répondre en priorité aux questions portant sur ce sujet, qui a justifié la tenue de cette réunion.
Mme Laure de La Raudière. Je compte sur vous, monsieur le président, pour réinviter M. Richard afin qu’il puisse s’exprimer plus longuement sur le thème du très haut débit.
M. le président François Brottes. Vous en avez l’assurance.
Mme Corinne Erhel. La panne a permis de prendre conscience de l’importance des réseaux pour tous les secteurs d’activité. Vous nous avez expliqué ce qui s’est passé ainsi que les enseignements qu’on pouvait en tirer. Lors de son audition, M. Jean-Ludovic Silicani, président de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) a déploré n’avoir pas été prévenu en temps utile de cette panne. Il a par ailleurs incriminé l’équipementier de télécommunications Alcatel- Lucent. Je considère qu’il faut être très prudent sur l’incidence que de telles annonces peuvent avoir sur des entreprises qui opèrent dans un secteur aussi concurrentiel mais aussi sur leurs salariés. M. Silicani a également évoqué les conséquences de l’arrivée d’un quatrième opérateur sur le marché français de la téléphonie mobile. Pourriez-vous nous préciser quelles sont-elles en matière d’investissements, non seulement pour Orange, mais également pour les autres opérateurs ? Je souhaiterais également que vous nous éclairiez sur les conséquences de l’arrivée d’un nouvel opérateur en termes d’emplois. M. Silicani a avancé le chiffre de 3 000 emplois supprimés par Orange et de 2 000 emplois créés par Free Mobile. Qu’en est-il exactement ? Enfin, le président de l’ARCEP a rappelé qu’au cours des quinze dernières années, l’État s’était dessaisi de sa compétence en matière de télécommunications au profit d’un régulateur indépendant avec lequel, on voit le aujourd’hui, les relations des opérateurs sont tendues. Dans quelle mesure, selon vous, une rupture avec cette évolution est envisageable ?
M. Thierry Benoit. Je tiens tout d’abord à rappeler qu’Orange est une belle entreprise, le fleuron du secteur des télécommunications. Les précisions apportées quant aux origines de la panne et aux enseignements qu’il convient d’en tirer sont importantes mais je souhaiterais aborder des questions plus globales. En ce qui concerne l’emploi tout d’abord, Orange emploie 160 000 personnes dont la moitié sur le territoire national. Des projets de restructuration sont envisagés : combien d’emplois pourraient être supprimés en 2012-2013 et sur quels sites ? S’agissant de la concurrence ensuite, vous avez exprimé certaines critiques sur l’ouverture du marché français des télécommunications et l’arrivée d’un quatrième opérateur. Pour autant, Orange a négocié un contrat d’itinérance avec ce nouvel opérateur d’un montant de 500 millions d’euros en 2012. Dans ces conditions, sur quelle base se fondent ces critiques ? Par ailleurs, dans un contexte de restructuration du secteur des télécommunications en Europe, pourriez-vous nous indiquer quelles sont les perspectives de rapprochement entre Orange et Deutsche Telekom ? Enfin, vous avez fait part de l’intérêt que porte Orange au développement du très haut débit dans les zones denses mais quelles modalités d’investissements sont envisagées pour les territoires moins denses et quel type de coopération pourrait être mise en place avec les conseils généraux et les conseils régionaux ?
M. André Chassaigne. Vous nous avez fait part des enseignements que vous avez tirés de la panne ainsi que de l’audit interne qui a été engagé. Dès à présent, vous avez évacués, comme source de la panne, les questions de sous-investissement, de très forte intensité du trafic ou d’agression extérieure. Mais pourriez-vous préciser qui sont les opérateurs en charge de la mise à jour des logiciels ? S’agit-il des sous-traitants ou ces mises à jour sont-elles effectuées par le personnel d’Orange ? Par ailleurs, vous avez évoqué un geste commercial auprès de vos clients pour compenser la gêne occasionnée par la panne. Quel est le coût de cette mesure ? Plus largement, quel est le coût d’une telle panne pour la société ? Certes, Orange est une belle entreprise qui fournit des services de qualité mais, dans le même temps, l’entreprise enregistre un bénéfice net qui s’est élevé à 3,8 milliards d’euros en 2011. Un tel montant justifie une exigence de non défaillance. Enfin, je souhaiterais aborder un aspect humain en rappelant que de nombreux territoires défavorisés souffrent d’un manque d’accès aux télécommunications – je parle de téléphone fixe, il n’y a pas de connexion au téléphone mobile sur ces territoires – pendant plusieurs semaines parfois. Je considère qu’une entreprise qui dégage un tel bénéfice net ne peut laisser des pans entiers du territoire sans moyens de télécommunications.
M. Joël Giraud. Quand des pannes aussi importantes se manifestent, j’estime qu’une information doit être rapidement diffusée le plus largement possible. Je souhaiterais appeler l’attention sur le fait que, dans de nombreuses villes, les boutiques Orange ont été remplacées par des « mobile stores », animés par des salariés en contrat à durée déterminée, qui ne font pas partie du personnel de l’entreprise. Malheureusement, ces « mobile stores » ne donnent pas accès à certains services, comme le service après-vente par exemple. Alors que l’on souligne la qualité de l’itinérance des réseaux, il me semble que l’on devrait également insister sur le maillage territorial des boutiques Orange.
Mme Frédérique Massat. L’idée d’un réseau mobile de substitution a été proposée par une entreprise innovante toulousaine ; il permettrait de fournir un service d’urgence par SMS. Quelle appréciation portez-vous sur une telle initiative ? Des investissements pour le développement de réseaux alternatifs susceptibles de détecter des pannes en amont sont-ils envisagés ? En ce qui concerne la compensation proposée aux clients d’Orange suite à la panne, certaines associations de consommateurs ont exprimé leur mécontentement. Pourriez-vous nous préciser si cette initiative résulte d’une obligation d’indemnisation ou si elle constitue simplement un geste commercial ? Enfin, dans quelle mesure la relation avec l’ARCEP doit-elle être reconsidérée ?
M. Lionel Tardy. J’ai relevé que la communication du Gouvernement sur la panne n’a fait apparaître l’ARCEP à aucun moment. Quelle est la procédure normalement suivie pour faire face à ce type d’incidents ? Par ailleurs, en ce qui concerne la répartition des rôles entre l’État et l’ARCEP, ne faut-il pas envisager, à terme, un rôle de supervision pour l’État et de réalisation d’audits des opérateurs pour l’ARCEP ?
Mme Clothilde Valter. Les clients d’Orange sont multiples. Au-delà des particuliers et des entreprises, il y a également des services publics qui gèrent des situations d’urgence. Quelles préconisations peut-on faire pour garantir la permanence des télécommunications dans ces services ?
M. Henri Jibrayel. J’estime que, si nous sommes aujourd’hui informés des origines et des enseignements que vous tirez de la panne, ce n’est pas le cas du grand public qui doit être mieux informé à ce sujet afin d’être rassuré.
M. François Sauvadet. Orange est non seulement une belle entreprise mais elle a également un bon dirigeant dont je salue les efforts d’information à travers la conférence de presse que vous avez tenue ainsi que la démarche de compensation qui a été initiée, même s’il est difficile d’évaluer avec précision le préjudice subi. Je considère qu’Orange a aujourd’hui un devoir de transparence et que les conclusions des investigations qui ont été lancées doivent être rendues publiques. Plus généralement, il importe de réfléchir aux moyens d’informer les personnes de l’existence d’une panne afin de leur permettre de faire face à la situation dans les meilleures conditions.
M. Eric Straumann. J’étais sur le terrain vendredi après-midi et dès quinze heures, les gens m’ont alerté. Avez-vous eu des réclamations portant sur des préjudices spéciaux ? Les services de secours, de police ou de gendarmerie ont-ils été gênés par ce bug ? Pour le reste, je rejoins votre analyse, il s’agit surtout d’un événement de grande portée médiatique. Nos concitoyens ont ressenti cette gêne mais l’ont également relativisée.
M. Alain Marc. Pendant quelques heures, j’ai retrouvé le cours normal de la vie… Plus sérieusement, je crois qu’on a beaucoup exagéré sur cette affaire. L’émotion soulevée par les médias pose surtout la question de notre degré de dépendance à l’égard des technologies, pas seulement d’un point de vue économique mais également sur le plan psychologique. Il arrive qu’il y ait des incidents et face à celui que vous avez dû gérer, je tiens à saluer la transparence dont vous avez fait preuve.
Mme Marie-Lou Marcel. Vous avez annoncé des mesures de dédommagement pour les usagers, en particulier une journée de télécommunications offerte. D’après les enquêtes réalisées auprès des usagers, ceux-ci ne semblent cependant absolument pas satisfaits. 32 % considèrent ce geste comme insuffisant et quant aux 9 % de satisfaits, ils auraient préféré pouvoir choisir leur jour de gratuité. La réponse semble donc inadaptée de leur point de vue. Quelle est l’utilité d’une journée, même offerte, passée à téléphoner et à envoyer des SMS sans limite ?
M. Razzy Hammadi. Vous avez parlé de geste commercial en direction de vos clients. J’ai le sentiment que n’a pas été pris en compte le dédommagement de ceux qui travaillaient avec leurs abonnements, comme les chauffeurs le taxi ou les petits artisans. Pour eux, le geste que vous proposez est-il vraiment suffisant ? Cela me semble très en deçà du préjudice que certains ont subi. On estime ainsi que pour certains taxis, la perte a pu aller jusqu’à 400 ou 500 euros. Vous n’avez pas communiqué sur le sujet mais avez-vous prévu un dédommagement spécifique pour les professionnels ?
M. Daniel Fasquelle. Je partage totalement le point de vue de mon collègue, il convient de distinguer le préjudice subi par les professionnels et par les particuliers.
Ce faisant, pour être victime du bug, encore faut-il avoir la chance d’être relié au réseau mobile. Malheureusement, la fracture numérique demeure une réalité et de nombreuses zones blanches persistent. Certains secteurs ne sont du reste même pas reliés au réseau filaire, comme cela a été dit par M. André Chassaigne, je sais que Mme Catherine Vautrin rencontre également des difficultés de cet ordre à Champlat-et-Boujacourt. Je crains qu’avec la 4G et le très haut débit, la fracture ne s’accroisse encore, quand les investissements ne se font pas. C’est le cas dans ma circonscription, à Maresville par exemple. Comment comptez-vous contribuer à la réduction de cette fracture ?
Par ailleurs, nous avons débattu l’an dernier d’un projet de loi sur les droits des consommateurs, qui n’a pas abouti, mais qui contenait plusieurs dispositions concernant la téléphonie mobile, qu’il s’agisse notamment des engagements de 24 mois ou du changement d’opérateur. Quelles sont aujourd’hui vos réponses à ces questions qui intéressent les consommateurs au premier chef ?
M. le président François Brottes. La desserte de l’ensemble du territoire n’est pas l’apanage d’un seul opérateur. Il faudrait poser cette question simultanément à l’ensemble des opérateurs ; je ne voudrais pas que M. Stéphane Richard, que nous avons invité ici pour évoquer le problème de la panne du réseau Orange, ait le sentiment d’être tombé dans un piège. J’insiste sur ce point pour la bonne tenue de nos débats sachant qu’en ce qui concerne le régulateur, nous connaissons son avis éclairé depuis ce matin.
Mme Annick Le Loch. Ma question se situe dans le prolongement de celle posée par M. André Chassaigne et concerne des perturbations intervenues dans le Finistère. Dans la commune de Pont-Croix, du 1er au 5 juillet dernier, les élus, les habitants, les entreprises ne parvenaient pas à téléphoner et n’ont eu aucun interlocuteur. Qu’en est-il du service rendu aux usagers ?
Mme Catherine Vautrin. Je voudrais d’abord m’associer aux commentaires faits par nos collègues sur la qualité du travail de France Télécom et sur ce que représente cette entreprise dans notre pays. Je voudrais aussi revenir sur la stratégie d’investissement. J’ai eu à connaître dans ma circonscription des conséquences d’une décision stratégique prise cette année, de gel de certains investissements. Or, dans un chantier d’enfouissement par exemple, quand un acteur aussi important que votre entreprise gèle ses investissements, les autres partenaires, comme les syndicats d’électrification, se démobilisent également. À l’arrivée, les opérations engagées ne se font pas, ce qui est préjudiciable aux entreprises locales. Mon ami Daniel Fasquelle a eu la gentillesse d’évoquer la situation de la charmante commune de Champlat-Boujacourt. Au XXIème siècle, le fait qu’une commune soit coupée du monde pendant plusieurs jours pose tout de même problème, notamment sur le plan de la sécurité publique.
M. Lionel Tardy. J’aurai encore une question sur le déploiement du FttH (fiber to the home). D’après les chiffres publiés fin mai par l’ARCEP, sur la construction de nouvelles prises FttH fin 2011 et début 2012, on constate un recul : 140 000 prises au troisième trimestre 2011, 125 000 au quatrième trimestre, 105 000 au premier trimestre 2012. Or, nous en avons tous convenu plusieurs fois en commission des affaires économiques, sous la précédente législature, il faudrait multiplier par cinq le nombre de ces constructions de prises FttH pour tenir l’objectif initial de deux millions de prises par an. Comment croire que le programme de déploiement du FttH ne va pas être bouleversé par l’arrivée de Free ? Au final, qui va investir combien et comment ? Ne pensez-vous pas qu’une opération vérité devrait être menée sans délai par l’ensemble des opérateurs, pour tenir les objectifs du programme national de très haut débit ? Enfin, que pensez-vous des projets de taxes sur le numérique que nos collègues sénateurs s’apprêteraient à discuter prochainement ?
M. Stéphane Richard. S’agissant de la communication sur l’incident, nous avons diffusé un communiqué national à 17h48, l’incident ayant démarré à 15h06. Il est exact que l’ensemble des équipements incriminés sont fabriqués par Alcatel-Lucent ; c’est un fait. Pour autant, je tiens à souligner que nous avons collaboré avec les équipes de ce fabricant dans des conditions parfaites, pour comprendre et résoudre l’incident. Je donnerai une estimation du coût de l’incident pour l’opérateur lors de la présentation semestrielle des comptes de l’entreprise, le 26 juillet prochain. Ce coût devrait être de plusieurs dizaines millions d’euros mais je ne peux pas donner d’estimation plus précise à ce jour.
Plusieurs d’entre vous ont évoqué les associations de consommateurs. Toutes n’ont pas été critiques, certaines ont même approuvé les dispositions que nous avons prises. Nous sommes du reste habitués à certaines critiques, émanant notamment de certaines associations que je n’ai jamais entendu émettre d’appréciation positive sur notre secteur. En ce qui concerne la question sur les chiffres de satisfaction de la clientèle, les retours que nous avons de nos clients sont au contraire positifs. Il s’agit donc de prendre du recul. Nous essayons de rester dans les conditions générales de vente, je rappelle que la téléphonie mobile est une activité commerciale et concurrentielle. En cas d’interruption du service, l’indemnisation prévue par les conditions générales de vente est de un euro, ou dix minutes de communication. Nous avons essayé d’adapter l’indemnisation à la période d’indisponibilité de nos services. Je rappelle que l’interruption du trafic voix/SMS a duré à peu près huit heures, et que cette interruption n’a pas non plus concerné tout le monde. En France ou ailleurs, des problèmes de ce type surviennent fréquemment et nous avons donc regardé ce qui se faisait d’une manière générale. On ne peut pas non plus sortir complètement des usages de notre métier. Je n’aurai pas l’outrecuidance de rappeler ce que d’autres opérateurs, avec certes moins de clients, ont fait dans les mêmes circonstances, sans même parfois informer leurs clients. Nous essayons donc d’être honnêtes et transparents dans la communication, tout en étant conscients que nos propositions ne contenteront pas les clients ayant rencontré des problèmes particuliers du fait de l’interruption du service.
J’en profite pour revenir sur nos relations avec l’ARCEP, qu’il s’agisse de ses services, des membres du collège ou de son président. Ce sont des relations de travail normales, parfaitement fluides. Je ne voudrais pas qu’on construise une histoire de confrontation entre les opérateurs et l’ARCEP, qui tient le rôle qui lui est imparti en tant que régulateur. J’ai quelques éléments de comparaison puisque l’entreprise que je dirige est présente dans 34 pays. La situation en France est parfaitement normale.
S’agissant de la communication avec les pouvoirs publics, le code des postes et communications électroniques prévoit que notre interface unique est le ministère de l’intérieur, c’est notre seule obligation légale, en cas d’atteinte à la sécurité ou perte d’intégrité ayant un impact significatif sur le fonctionnement des réseaux et des services.
Les services d’urgence ont bien fonctionné pendant toute la durée de la crise et en particulier le numéro 112 car il peut être basculé sur d’autres réseaux que celui d’Orange. Je tiens à remercier les parlementaires qui ont adressé des compliments à l’entreprise. Cela nous touche car il est difficile de gérer un évènement d’une telle ampleur. Nous avons tâché de faire preuve de transparence et de réactivité. L’ensemble de nos équipes se sont mobilisées. Nous n’avons pas reçu de demandes de la part de particuliers ayant subi un préjudice particulier majeur. Cela s’explique, je pense, par plusieurs raisons. D’abord, il faut relativiser l’ampleur de la crise : je ne la minimise pas, mais il s’est agi d’une interruption de seulement quelques heures du réseau un vendredi en fin de journée. Ensuite, le réseau fixe dont les entreprises sont le plus souvent équipées ont continué de fonctionner. Pour l’instant, nous avons prévu le même type d’indemnité pour les particuliers et pour les professionnels. Si nous recevons des demandes spécifiques, nous les étudierons.
S’agissant des sujets ne relevant pas du bug, je voudrais répondre à M. le président sur le conflit des antennes mobiles. Il a en effet été l’un des artisans d’une réflexion associant les associations d’usagers et les opérateurs. Il faut garder à l’esprit que si l’on diminue la puissance des antennes, il est évident que cela ne peut s’accompagner, en l’état actuel de la technologie, d’une amélioration de la qualité du service. Il faut donc trouver une forme de compromis entre les différents acteurs. Je regrette que des conflits se soient cristallisés en plusieurs endroits, et notamment à Paris. La qualité du service en pâtit. Plusieurs sites ont été fermés à la demande des élus, et il est difficile aujourd'hui d’installer de nouvelles antennes mobiles permettant d’accompagner la croissance des usages. Or, le trafic des données a été multiplié par soixante-huit en cinq ans et devrait encore l’être par sept d’ici 2015. Ce phénomène est lié à une croissance extrêmement rapide des accès en mobilité. Ainsi, ce sont aujourd'hui deux tiers des accès aux réseaux sociaux tels que Facebook qui sont réalisés en mobilité, depuis le téléphone portable.
S’agissant de la qualité, une étude annuelle est menée par le régulateur, l’ARCEP. Elle nous a placés en tête du classement des opérateurs même si cela ne signifie pas que la qualité de service fournie soit uniforme sur l’ensemble du territoire.
Quant aux questions relatives au très haut débit, je veux souligner que France Telecom - Orange a annoncé un plan de deux milliards d’euros d’investissement jusqu’en 2015, notamment dans les zones denses. Nous n’avons pas l’intention d’y renoncer ou de revoir à la baisse nos ambitions. Nous avons passé des accords avec les trois autres grands opérateurs – SFR, Bouygues, Iliad – dans les zones moins dense. De plus, nous candidatons aux appels d’offre des collectivités publiques pour participer aux contrats d’initiatives publiques. En 2012, nous avons doublé nos investissements dans la fibre optique par rapport à l’année précédente, et nous allons encore les augmenter significativement en 2013.
S’agissant du débat relatif au quatrième opérateur, mon expérience de terrain ne me conduit pas à partager les observations de M. Silicani sur le solde net de destruction d’emploi (+2 000 -3 000). J’ignore d’où proviennent ces estimations, mais il me semble qu’il existe une différence entre la théorie de la concurrence – qui prévoit une baisse des prix profitable au consommateur dans le cas de l’augmentation du nombre d’acteurs sur le marché – et la réalité à court terme pour les entreprises, en termes d’emploi notamment. L’impact de l’arrivée de Free sur la filière en matière d’emploi me parait à tout le moins nuancé et clairement négatif si l’on prend en compte l’ensemble de la filière, en incluant les sous-traitants.
Certains d’entre vous m’ont interrogé sur le contrat d’itinérance. Certes, ce contrat est intéressant pour France Télécom - Orange, mais ses revenus ne compenseront absolument pas les pertes que nous subissons sur le marché de détail. L’arrivée du quatrième opérateur réduit nos revenus et nos marges ce qui nécessite des adaptations au niveau de l’entreprise. Nous n’avons pas décidé de réduire l’emploi à Orange. En effet, nous disposons d’une situation plus confortable que nos concurrents dans la mesure où les activités « mobile » en France ne représentent qu’un quart de nos activités à travers le monde et qu’en outre le siège social mondial se situant en France cela mobilise des emplois qui bénéficient à toutes les activités. En revanche, nous avons d’ores et déjà prévu de diminuer le rythme des recrutements au cours des prochaines années.
S’agissant des restructurations en Europe, je pense que nous sommes allés trop loin dans la fragmentation du paysage de l’industrie en Europe et qu’il faut désormais entrer dans une phase de consolidation. C’est d’ailleurs la voie qui est empruntée par plusieurs de nos voisins. A cet égard, il est singulier que ce soit justement la période choisie en France pour l’arrivée d’un quatrième opérateur mobile. La consolidation pourrait prendre plusieurs formes. Une baisse sensible du nombre d’opérateurs dans plusieurs pays se produira sûrement. En revanche, je ne pense pas que ce mouvement débouche sur le rapprochement des grands opérateurs nationaux, ni que l’on assiste à l’émergence d’opérateurs continentaux notamment pour des raisons liées à la régulation. Orange a par exemple une coopération très forte avec Deutsche Telekom, mais il n’est absolument pas envisagé d’opérer une fusion en tant que telle. Il me semble que l’on assiste à la prise de conscience au niveau européen de l’impossibilité d’augmenter d’une part les charges et les contraintes pour les opérateurs et d’autre part de leur demander toujours plus d’investissements. A cet égard, nous avons participé ce matin avec nos collègues italien, allemand et espagnol à une réunion intéressante avec la commissaire européenne en charge de ces dossiers, Mme Kroes. Un changement profond d’approche est à l’œuvre au sein de la commission concernant tant la régulation – le prix d’accès au réseau fixe - que la fiscalité. Il faut espérer qu’il inspirera également les régulateurs nationaux. On ne peut alourdir sans cesse les charges qui pèsent sur les opérateurs sans les mettre en danger économiquement. Ainsi, la valorisation boursières des cinq principaux opérateurs mobile européens – Orange, Deutsche Telekom, Telefonica, Telecom Italia et KPM – qui emploient 600 000 personnes à travers le monde et comptent près d’un milliard de clients, ne représente même pas la moitié de celle d’Apple, et est légèrement inférieure à celle de Google. Les opérateurs sont des géants aux pieds d’argile. La troisième révolution industrielle de l’économie numérique ne peut se faire sans disposer des réseaux adéquats. Or, ceux-ci nécessitent des investissements majeurs que sont seuls à même de réaliser les opérateurs, en ces temps de niveaux élevés d’endettement public. Il faut créer des conditions favorables à l’investissement.
S’agissant des questions liées à la fracture numérique, je veux souligner que nous disposons d’un maillage territorial important. En outre, nous avons introduit un système des directeurs régionaux qui sont les interlocuteurs privilégiés des collectivités territoriales. Nous sommes donc présents sur l’ensemble du territoire. Il faut cependant être conscient des difficultés qu’engendre l’entretien d’un réseau de cuivre ramifié aussi complexe. La maintenance est compliquée et coûteuse même si ce n’est pas un domaine pour lequel nous cherchons à faire des économies. Nous essayons de donner la priorité aux incidents collectifs. Quand des problèmes se produisent, je vous incite à vous rapprocher du délégué régional, qui est l’interlocuteur dédié, et le mieux à même de disposer des informations pertinentes.
Quant à la question de Mme Catherine Vautrin relative à l’enfouissement, je reconnais qu’il y a eu ponctuellement des décalages entre nos engagements et les investissements effectivement réalisés. Le cas dont vous m’avez fait part est néanmoins en voie d’être réglé puisque les investissements nécessaires ont été prévus pour 2012. Il y a des économies qui ne valent pas la peine d’être faites en raison du déficit d’image qu’elles peuvent provoquer, je pense que c’est le cas de l’enfouissement. Le problème majeur est cependant qu’il ne rapporte rien à l’opérateur. Or, dans une période comme celle que nous connaissons actuellement, il est tentant de se consacrer à d’autres priorités et investissements productifs même si nous savons qu’il s’agit d’un point important pour les élus et le public. Par ailleurs, le très haut débit arrivera partout, selon un calendrier en fonction des zones.
Je vous remercie pour vos questions et l’intérêt que vous portez à notre entreprise.
M. le président François Brottes. Je vous remercie, monsieur le président. Je vous renouvelle notre invitation pour une audition plus complète au semestre prochain consacrée aux sujets de la 4G et du très haut débit fixe.
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Informations relatives à la commission
La commission a procédé à la nomination des rapporteurs pour avis sur le projet de loi de finances pour 2013.
PLF 2013 - Missions |
Rapporteur |
Groupe |
Agriculture, alimentation forêt et affaires rurales |
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Agriculture et alimentation |
Mme Marie-Lou Marcel |
SRC |
Pêche |
Mme Annick Le Loch |
SRC |
Forêt |
M. André Chassaigne |
GDR |
Économie |
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Industrie |
M. Jean-Grellier |
SRC |
Énergie |
M. David Habib |
SRC |
Entreprises |
Mme Anne Grommerch |
UMP |
Tourisme |
M. Éric Straumann |
UMP |
Commerce extérieur |
M. Joël Giraud |
RRDP |
Consommation |
M. Damien Abad |
UMP |
Communications électroniques |
Mme Corinne Erhel |
SRC |
Postes |
Mme Michèle Bonneton |
Écologiste |
Outre-mer |
M. Serge Letchimy |
SRC |
Recherche et enseignement supérieur |
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Grands organismes de recherche |
M. Franck Reynier |
UDI |
Recherche industrielle |
M. Christophe Borgel |
SRC |
Ville et logement |
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Ville |
M. François Pupponi |
SRC |
Logement |
M. Daniel Goldberg |
SRC |
Économie sociale et solidaire |
M. Philippe Kemel (sous réserve de sa nomination à la commission) |
SRC |
La commission a créé une mission d’information sur les zones franches et leur impact en matière de développement économique, d’emplois et de présence des commerces et des services.
——fpfp——
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mercredi 11 juillet 2012 à 16 h 15
Présents. - M. Damien Abad, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, M. André Chassaigne, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Joël Giraud, M. Daniel Goldberg, M. Jean Grellier, Mme Anne Grommerch, M. Razzy Hammadi, M. Antoine Herth, M. Henri Jibrayel, Mme Laure de La Raudière, Mme Annick Le Loch, Mme Annick Lepetit, M. Philippe Le Ray, Mme Jacqueline Maquet, M. Alain Marc, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Germinal Peiro, M. Dominique Potier, M. François Pupponi, M. François Sauvadet, M. Éric Straumann, M. Lionel Tardy, Mme Clotilde Valter, Mme Catherine Vautrin
Excusés. - M. Frédéric Roig, M. Fabrice Verdier