Accueil > Travaux en commission > Commission des affaires économiques > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des affaires économiques

Mercredi 6 mai 2015

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 55

Présidence de M. François Brottes Président

– Audition de M. Marwan Lahoud, président d’Airbus Group SAS, directeur général délégué d’Airbus Group

La commission a auditionné M. Marwan Lahoud, président d’Airbus Group SAS, directeur général délégué d’Airbus Group.

M. le président François Brottes. C’est un plaisir pour nous de vous accueillir, monsieur Lahoud. Nous vous entendrons faire le point sur la nouvelle gouvernance de votre groupe, dont même la dénomination a changé ; sur la restructuration menée au terme d’un effort important ; sur ses conséquences pour l’emploi direct et l’emploi au sein des entreprises sous-traitantes partout en France. Nous aimerions aussi connaître l’appréciation que vous portez sur le développement des avions à propulsion électrique : faut-il sourire à cette idée ou en attendre un bouleversement de l’économie générale du transport aérien ?

M. Marwan Lahoud, président d’Airbus Group SAS, directeur général délégué d’Airbus Group. Je suis heureux de me trouver à nouveau devant vous. Vous m’aviez invité, en octobre 2013, alors que le groupe EADS connaissait une période de grande mutation. Nous venions de mettre la dernière main à la révision stratégique rendue nécessaire par l’échec de la fusion avec BAE Systems ; c’est à ce moment qu’a été décidée la réorganisation du groupe. Qu’en est-il maintenant ?

EADS est devenu Airbus Group. Nous avons choisi la plus puissante et la plus prestigieuse de nos marques, celle qui permet à nos 155 000 salariés de se reconnaître une identité unique, celle, aussi, que connaît l’homme de la rue de New York à Djakarta. Le groupe compte trois divisions : Airbus pour les aéronefs civils, Airbus Défense et Espace et Airbus Helicopters. Nous sommes le premier fournisseur de la défense française, de la défense allemande et de la Royal Air Force, et aussi l’un des premiers exportateurs en matière de défense en France. Précédemment, l’organisation de cette activité était très dispersée ; le regroupement auquel nous avons procédé nous a donné une idée plus précise de notre poids dans ce secteur et de notre responsabilité à l’égard de nos clients nationaux – être fournisseur de la défense nationale emporte une responsabilité particulière. Airbus Helicopters est le premier hélicoptériste mondial, dans le domaine civil et dans le domaine militaire.

M. Tom Enders est président exécutif du groupe comme l’était M. Louis Gallois avant lui, mais l’actionnariat a été simplifié : il n’y a plus de pacte d’actionnaires ni, donc, de décisions prises hors des instances de direction – conseil d’administration, assemblée générale et comité exécutif. Bien entendu, des relations particulières continuent d’unir le groupe Airbus et les États français et allemand, qui ont souhaité conserver une participation dans le capital, en raison de notre activité « défense » et de son importance pour la sécurité nationale ; cela tient aux droits régaliens des États, non à leur qualité d’actionnaires. Le principal objectif du changement de gouvernance était que l’on n’en parle plus et que, la question étant réglée, on passe aux autres sujets de fond que sont l’évolution du marché et la production d’avions, de missiles, de lanceurs, de satellites et d’hélicoptères nécessaires à nos clients. C’est fait ; là est le vrai changement.

Deux tendances marquent le secteur de l’aéronautique et de la défense. La première est la forte croissance du transport aérien, supérieure à 5 % par an – cette progression ne se fait malheureusement pas en Europe, non plus qu’en Amérique du Nord, mais en Asie et au Moyen Orient. La deuxième tendance est la stagnation, sinon la diminution, des budgets de défense dans les pays occidentaux, cependant que de nouveaux acteurs et de nouveaux investisseurs apparaissent dans d’autres régions du monde. On assiste donc à un déplacement vers l’Est de l’activité aéronautique et spatiale. Sans nouveaux programmes structurants en Occident et face à de nouveaux concurrents, le groupe Airbus et l’industrie dans son ensemble évoluent dans un environnement durement compétitif. On notera aussi une sorte de grand écart : si 90 % de notre effectif est employé en Europe de l’Ouest, principalement en France, en Allemagne, en Espagne et au Royaume Uni, notre chiffre d’affaires est pour plus de 70 % réalisé hors de ces quatre pays. Il a doublé entre 2001 et 2014 pour passer de 30 à 60 milliards d’euros en quinze ans et la valeur des prises de commandes en 2014 a été presque trois fois celle du chiffre d’affaires. La tendance à la croissance va donc se poursuivre, avec un carnet de commandes total de plus de 800 milliards d’euros, qui représente plus de dix années de production.

Cette situation permet certes de préparer confortablement l’avenir, mais nous sommes inquiets de voir la part « Défense et Espace » de notre carnet de commandes diminuer progressivement.

L’année 2014 a été pour le groupe une année record dans le secteur de l’aviation civile : 629 aéronefs vendus, 1 456 commandes nettes et 6 386 appareils en commande. Dans le secteur « Défense et Espace », le fait marquant a été le lancement d’Ariane 6. Cette grande décision a été prise par le conseil des ministres de l’Agence spatiale européenne (ESA) dans un cadre nouveau : la concurrence vient d’acteurs uniquement privés. Nous nous sommes entretenus il y a deux semaines avec les dirigeants de Google, SpaceX et Facebook. Leurs ambitions sont considérables et leurs moyens, comparés aux nôtres, illimités, et ils ont l’intention d’investir dans les avions, les lanceurs et les satellites en s’affranchissant de toutes les contraintes qui sont les nôtres. Dans ce contexte, il était normal de passer à l’étape industrielle pour produire Ariane 6. Entre 1979 et aujourd’hui, les agences d’État – le Centre national d’études spatiales et son homologue allemand, le DLR, ou encore l’ESA – ont eu un rôle essentiel dans la mise sur les rails des programmes de lanceurs, mais la nouvelle situation exigeait de modifier la pratique et d’industrialiser la conception, la fabrication et le lancement des lanceurs spatiaux. Ce fut la décision prise en décembre par les États membres de l’ESA.

Tel est le contexte. J’en viens à la stratégie du groupe. De longues années durant, nous avons tenté d’équilibrer nos activités civiles et nos activités militaires ou institutionnelles. L’échec de la fusion avec BAE Systems qui aurait permis une forte consolidation de nos activités et la révision stratégique qui s’en est suivie nous ont conduits à renoncer à cette stratégie – non qu’elle ne fût pas pertinente, mais quand l’activité civile augmente de 5 % par an cependant que l’activité militaire, au mieux, stagne, l’équilibre recherché devient une chimère. Aussi avons-nous décidé de nous concentrer sur nos domaines de compétence technique avérés : les objets volants civils ou militaires et les services qui leur sont directement associés, et les activités spatiales.

Il en va pour les satellites comme pour les lanceurs : une révolution est en marche, avec l’apparition d’acteurs privés dont l’approche est purement commerciale, et l’on va passer de l’époque où il fallait entre un an et dix-huit mois pour mettre au point chaque prototype, au prix de plusieurs dizaines de millions d’euros pièce, à une époque nouvelle où l’on produira sans doute des dizaines de satellites par mois pour quelques dizaines de milliers d’euros. Cela aura un effet sur l’industrie dans son ensemble et nous devrons nous adapter ; grâce à la synergie que permet le groupe, nous sommes très bien placés pour le faire. Cette évolution modifiera aussi radicalement la manière de concevoir les applications spatiales. Les projets annoncés par Google et les autres acteurs de l’Internet peuvent sembler farfelus mais, après tout, des gens n’ont-ils pas osé penser, il y a plus de cent ans, que l’homme pouvait voler ?

Nous devons donc oser nous remettre en cause. Le projet d’avion à propulsion électrique a effectivement fait sourire. Il n’empêche : nous avons fait voler un premier prototype. Sans doute ne transportera-t-on pas demain 100 passagers dans un aéronef de ce type, mais peut-être après-demain. Encore faut-il retrouver l’esprit pionnier, l’envie et l’audace de repousser les limites, ne serait-ce que pour attirer dans nos usines et dans nos bureaux d’études les jeunes gens dont la présence est nécessaire au développement de nos activités.

M. le président François Brottes. Je vous remercie. La parole est maintenant aux députés qui souhaitent vous interroger, et pour commencer aux représentants des groupes politiques.

M. Jean Grellier. Cet exposé rassure quelque peu le groupe SRC sur l’avenir de l’industrie aéronautique et de défense française et sa répartition sur l’ensemble du territoire – on sait l’importance du groupe Airbus pour l’emploi en France. Quelle est votre stratégie à l’égard de vos sous-traitants ? Contribuez-vous au développement des compétences en leur sein ? Trouvez-vous les professionnels qualifiés nécessaires à l’évolution de votre groupe ? Vous êtes aussi vice-président du comité stratégique de filière « Aéronautique » ; comment mobilise-t-il les acteurs concernés au service du développement de la filière ? Quel impact a l’évolution du taux de change entre l’euro et le dollar sur le développement de vos activités ? Enfin, pensez-vous que d’autres filières industrielles bénéficieraient de la dynamique européenne à l’œuvre dans la gestion du groupe Airbus ?

M. Philippe Armand Martin. Je m’exprime au nom du groupe UMP. Selon la presse, la direction du groupe Airbus jugerait le programme d’avion militaire A400M dans une situation « critique », après que des tests réalisés en Allemagne ont révélé 875 défauts. L’armée de l’air française recevant aussi cet appareil, il est surprenant, souligne Le Figaro, que le ministère de la défense ait accepté de réceptionner un appareil « manifestement imparfait ». Selon quelles modalités financières se fera la remise à niveau ?

L’Office national d’études et de recherches aérospatiales (ONERA) subit depuis quelques années des coupes budgétaires qui ne sont pas sans incidence sur l’avenir des grandes souffleries de Modane où sont testées les maquettes des prototypes d’Airbus. Alors que la concurrence internationale s’est intensifiée, les industriels américains et chinois développant leurs propres souffleries, le groupe Airbus doit continuer de disposer de souffleries de pointe. Quelle est votre opinion sur la situation de l’ONERA ?

Mme Michèle Bonneton. Le groupe écologiste s’interroge sur la manière dont le groupe Airbus adaptera ses capacités de production au nombre très élevé de commandes qu’il a obtenues et sur la répartition internationale de ses investissements à cette fin. L’évolution du taux de change entre l’euro et le dollar peut-elle laisser espérer des relocalisations en Europe et en France ? Quels sont les thèmes de recherche privilégiés par vos équipes et les secteurs d’avenir de l’industrie aéronautique et spatiale ? Comment le groupe Airbus renforce-t-il son efficacité énergétique, en particulier l’utilisation des énergies renouvelables ? Des progrès sont-ils envisagés dans la réduction du bruit des avions aux abords des aéroports ? Tout cela demande des capitaux importants ; quels sont vos besoins et comment comptez-vous y faire face ? Que recevez-vous de l’État français par le biais du crédit impôt recherche et du crédit d'impôt compétitivité et emploi (CICE) ?

M. le président François Brottes. Quel est votre point de vue sur le projet de partenariat transatlantique de commerce et d’investissement entre les États-Unis et l’Union européenne ?

M. Franck Reynier. Nous fêtons les dix ans du premier vol de l’A380. Le groupe UDI n’ignore pas que ce fut un succès commercial qui s’est fait en bien des lieux aux dépens du Boeing 747. Cependant, les marchés des États-Unis, d’Amérique latine et l’Afrique restent encore à conquérir ; quels sont vos plans à ce sujet ? Quel est d’autre part votre sentiment sur l’évolution de la capacité d’accueil des aéroports français ? Le crash de l’appareil de la compagnie Germanwings provoquera-t-il une évolution de la sécurité aérienne ? Vos équipes de recherche et développement travaillent-elles ce sujet ? Enfin, le groupe Airbus a annoncé le dépôt d’une plainte contre X pour des soupçons d’espionnage industriel ; qu’en est-il ?

Mme Jeanine Dubié. Je m’exprime au nom du groupe RRDP et aussi en ma qualité d’élue de la région Midi-Pyrénées, au dynamisme économique de laquelle le groupe Airbus contribue puissamment. En octobre 2013, vous expliquiez devant nous le succès de l’aéronautique française et européenne par l’esprit d’équipe régnant au sein du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas). L’accélération de la cadence de production des avions, qui oblige les sous-traitants à s’organiser pour répondre à cette demande accrue, a-t-elle mis cet esprit à mal ? Il y a peu M. Fabrice Brégier, directeur exécutif de la division Airbus, a fortement critiqué les retards de livraison des équipements de cabines d’avion ; est-ce le signe de tensions croissantes entre le constructeur et ses sous-traitants ? Comment pouvez-vous les accompagner dans cette montée en charge?

Vous indiquez régulièrement que, faute de travailleurs convenablement formés, 2 000 emplois ne sont pas pourvus au sein de la filière. Quel est votre avis sur les politiques publiques conduites pour remédier à cette situation ? Que faites-vous en interne à ce sujet ? Les clusters régionaux tels Aerospace Midi-Pyrénées répondent-ils à vos attentes ? Enfin, vous avez déclaré que le CICE est une bonne mesure mais que les dispositions d’application en réduisent la portée ; pourriez-vous expliciter votre pensée ?

M. André Chassaigne. L’accroissement considérable des besoins de transport aérien s’est traduit par le volume des commandes signées à l’occasion du salon du Bourget, leur valeur passant de 90 millions de dollars en 2011 à 135 millions de dollars en 2013. Cela conduit à l’accélération d’une production dont les clients souhaitent qu’elle réponde également à des impératifs de qualité environnementale, qu’elle consomme moins d’énergie et qu’elle prenne en compte la préparation de l’« après-pétrole». Le groupe GDR sait que répondre à ces exigences suppose des capitaux gigantesques, dans un schéma où les retours sur investissement sont très longs. Le poids des activités financières est tel que l’on peut craindre qu’elles ne servent à la spéculation plutôt qu’à l’industrie. Dans ce cadre, on est amené à s’interroger sur le lien entre le groupe Airbus et la puissance publique alors que l’État n’a plus les mêmes moyens d’interventions qu’autrefois. L’État intervient-il dans la définition de la stratégie du groupe et notamment dans celles de ses décisions qui concernent l’emploi ? La question ne peut manquer de se poser quand des suppressions d’emplois ont été annoncées sur certains sites alors que les syndicats estiment très importants les besoins de recrutements.

À la demande de certains grands groupes, un texte va nous être soumis qui vise à allonger le délai de règlement des fournisseurs, que la loi de modernisation de l’économie avait limité. Le groupe Airbus éprouve-t-il des difficultés à régler ses sous-traitants dans les délais légaux ? Il va sans dire qu’ils pâtiraient de l’allongement de ces délais.

M. Marwan Lahoud. La filière aéronautique repose sur la solidarité, qui s’exerce par le biais du Gifas et du comité stratégique de filière ; nous ne serions rien sans nos sous-traitants et ils ne seraient rien sans nous. Ce préalable étant posé, les relations entre donneurs d’ordre et fournisseurs, faites de droits et d’obligations, peuvent connaître des tensions. Mais si les échanges ne se font pas toujours dans la joie et la bonne humeur, la bonne volonté et la conscience de la nécessité de réussir ensemble sont toujours présentes.

Trois principes prévalent aussi bien dans le groupe Airbus qu’au niveau du Gifas. Le premier est que l’arbitrage doit être rapide ; aussi, en cas de conflit, le médiateur de filière siège au conseil du Gifas pour régler les problèmes en donnant aux présidents réunis un état de situation. Le deuxième est que des règles professionnelles doivent être définies et appliquées ; ainsi n’avons-nous pas attendu la loi de modernisation de l’économie pour imposer une discipline de filière pour les délais de paiement. À ce propos, je ne prétendrais pas que le groupe Airbus soit satisfait de devoir régler ses sous-traitants dans des délais courts alors que le délai de règlement de ses factures par l’État, qui ne s’applique pas les règles qu’il édicte, est infiniment long ; mais c’est ainsi.

M. André Chassaigne. Heureusement, vous avez le CICE !

M. Marwan Lahoud. Le troisième principe qui vaut au sein de la filière est qu’aucune réduction de coût ne vaut la mort d’un sous-traitant.

Ces trois principes étant énoncés, l’exécution se fait au cas par cas mais, en ma qualité de président du Gifas, et ayant écouté le médiateur, qui est indépendant, je crois pouvoir dire que les relations sont plutôt meilleures au sein de la filière aéronautique que dans d’autres filières. Airbus compte 11 000 sous-traitants ; nous faisons vivre ces entreprises, qui sont en majorité très petites.

Le groupe bénéficie chaque année d’un crédit impôt recherche compris entre 100 et 120 millions d’euros, à rapporter à 3,4 milliards d’euros de recherche autofinancée et à 2 milliards d’investissements industriels, soit 5,4 milliards d’euros en tout ; c’est une excellente chose et il ne faut pas toucher à cette disposition. Dans son principe, le CICE est une bonne idée, mais ce crédit étant assis sur les rémunérations dont le montant n’excède pas 2,5 Smic, la mesure n’a presque aucun impact pour l’industrie aéronautique, où les salaires sont élevés. Nous préférons bien rémunérer nos compagnons, nos techniciens et nos ingénieurs, et nous n’aurons pas le CICE. Il représente quelque 40 millions d’euros par an pour le groupe ; rapporté à notre masse salariale, ce montant a l’épaisseur d’un trait de plume – et il suffit que la participation aux bénéfices de l'entreprise versée aux salariés augmente un peu pour qu’il soit effacé. Cela vaut pour l’ensemble de la filière. De plus, ajoutera le président du comité Aéro-PME du Gifas si vous l’interrogez, le groupe Airbus dispose de l’escouade de comptables qui saura répondre aux questions de l’administration fiscale, mais ce n’est pas le cas des petits sous-traitants confrontés à un contrôleur du fisc tatillon venu leur dire que telle dépense n’est pas véritablement une dépense de recherche.

Quelque 80 % de nos 3,4 milliards d’euros d’investissements en R&D visent à abaisser le niveau des émissions polluantes et du bruit. Je ne prétendrai pas qu’il s’agisse d’une recherche désintéressée : un avion qui consomme moins pollue moins et il est aussi plus économique pour une compagnie aérienne, si bien qu’il se vendra mieux.

Après que j’ai pesté pendant des années contre un euro trop fort, il serait malvenu que je ne me dise pas complétement satisfait de la baisse de la monnaie européenne ou, au choix, de la hausse du dollar. Mais, parce que nous avons dû accumuler les couvertures de change pour atténuer l’impact de ce déséquilibre persistant, nous ne bénéficierons de l’effet positif de cette inflexion que dans 12 à 18 mois, à supposer que l’euro se maintienne à son taux actuel face au dollar ; le taux de change entre les deux monnaies est volatil.

L’A400M est un très bon avion et les 875 défauts rendus publics par la presse allemande constituent un niveau de défectuosité assez normal. Ayant commencé ma carrière par des contrôles de ce type, je sais d’expérience que pour l’équipe de professionnels chargés de réceptionner l’appareil, une éraflure de la peinture est un défaut, comme l’est un moteur qui ne fonctionne pas. Il faut, sans se laisser impressionner par le nombre, distinguer les défauts selon qu’ils empêchent l’avion de voler ou de fonctionner ou qu’ils traduisent une inadéquation avec la commande passée. L’A400M vole, il fait la guerre tous les jours avec les armées de l’air française et turque, et il participe à l’action humanitaire de la Royal Air Force. L’armée allemande a reçu son premier A400M ; les difficultés dont il est fait état sont des difficultés normales de mise en service, et je vous invite à vous référer à ce sujet à l’entrée en service d’appareils militaires antérieurs. Elle est toujours beaucoup plus complexe que pour les aéronefs civils, ce qui explique les standards successifs ; on n’a pas toutes les capacités d’emblée.

Cela étant, nous rencontrons des difficultés, nous accusons des retards et nous en assumons les conséquences. M. Tom Enders a présenté ses excuses à nos clients, nous avons provisionné nos comptes pour assumer les coûts à venir de ce fait et nous respecterons nos engagements. Mais l’ingénieur en aéronautique qui sommeille en moi vous le redit, l’A400M est un avion très bien né. Une fois les péchés de jeunesse amendés, je suis confiant sur le fait qu’il se vendra et rendra des services dans le monde entier. Nous menons d’ailleurs des campagnes à l’exportation prometteuses au Moyen Orient, en Asie et en Amérique latine.

Il est exact que les ventes de l’A380 connaissent une stagnation car nous ne perçons pas sur certains marchés. Nous nous sommes fixés des objectifs très ambitieux en Asie, notamment en Chine, avec une activité commerciale intense ces derniers temps, et je suis assez optimiste. L’avion a aujourd’hui la maturité suffisante pour rendre possibles des percées commerciales.

Tout avionneur s’attache en permanence à la sécurité aérienne par la recherche et en analysant les données recueillies lors des vols. Un accident aérien est impressionnant parce que beaucoup de gens meurent en même temps mais l’avion reste le moyen de transport le plus sûr qui soit. Nous améliorons tous les jours l’interface entre l’homme et la machine et nous nous employons à anticiper tout ce qui peut l’être en tirant les enseignements des accidents qui, malheureusement, se produisent. Nous faisons des propositions, mais le sujet est complexe car il concerne aussi les États et les compagnies aériennes, avec lesquels nous travaillons main dans la main.

La presse allemande ayant allégué l’écoute d’EADS et d’Eurocopter par les services secrets germaniques à la demande de la NSA, nous avons déposé plainte contre X pour protéger nos droits et avoir accès au dossier. Nous avons été frappé que seule notre entreprise soit citée. Je n’en sais pas davantage.

Comme tout grand exportateur, nous préférons le libre-échange au protectionnisme. Nous sommes donc extrêmement soucieux que le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement ait pour effet l’ouverture réelle des frontières. Nous avons vu Boeing défendre son territoire, comme nous aurions défendu le nôtre, quand il s’est agi de fournir des avions ravitailleurs à l’armée de l’air américaine ; il ne faudrait pas que le futur partenariat ne soit qu’un faux-semblant. Si la compétition est réellement ouverte, nous ne la craignons pas ; c’est ce que nous disons aux négociateurs européens.

Au sein de l’ONERA, membre du Gifas, des chercheuses et des chercheurs continuent de faire de grandes avancées, au-delà des seules souffleries. L’industrie est attachée à la permanence de la contribution de l’Office à la recherche amont, la main dans la main avec nos équipes de chercheurs. Nous l’avons fait savoir aux pouvoirs publics, nous avons indiqué les axes de recherche qui pourraient servir l’industrie aéronautique et spatiale, et nous travaillons avec le président de l’ONERA à bien définir l’articulation entre recherche aéronautique publique et recherche aéronautique privée.

Mme Catherine Troallic. La compagnie Emirates envisage de commander deux cents A380 à condition qu’ils soient fabriqués en version « néo », économe en carburant. Députée de la circonscription de Seine-Maritime où est implanté Aircelle, un de vos sous-traitants, je m’intéresse particulièrement à ce projet. L’entreprise est fortement soutenue par la Région Haute-Normandie, qui a dernièrement financé la mise au point de nouvelles technologies visant à réduire la consommation de kérosène, notamment utilisées dans le développement de l’A320NEO. J’aimerais connaître votre point de vue sur la conversion énergétique en cours et savoir quels sont vos projets dans ce domaine. Aircelle étant l’intégrateur exclusif des nacelles moteur pour les deux types de motorisation de l’A380, j’aimerais aussi connaître les perspectives de commandes de cet avion. Où en est la réflexion sur le projet d’A380NEO ? Si le groupe Airbus décidait de se lancer dans cette nouvelle technologie, quel impact cela aurait-il pour ses sous-traitants, notamment Aircelle, en termes d’emploi, et quelles seraient les conséquences sur la production de l’A320 dont vous avez récemment dit vouloir augmenter la cadence ?

M. Jean-Claude Mathis. Vous avez rappelé qu’avec un chiffre d’affaires croissant pour la cinquième année consécutive, l’industrie aérospatiale française se porte bien. On note toutefois une certaine précarité de l’emploi, avec des tendances contrastées. Plusieurs milliers de postes d’ouvriers qualifiés ne trouvent pas preneurs faute de candidats et de formations adaptées ; d’autre part, la diminution générale des budgets de la défense fait peser un risque sur la survie de centaines de petites entreprises sous-traitantes. Dans ce contexte, qu’attendez-vous du législateur ?

Mme Frédérique Massat. Nous sommes très fiers du groupe Airbus, dont la bonne santé me réjouit. Je rappelle que le président de la République vient d’annoncer une augmentation du budget de la défense – après des baisses certes, mais le fait est – et que semblable décision a été prise par l’Allemagne. Il est fâcheux d’apprendre que, selon les déclarations que vous avez faites à la presse, les difficultés que la filière éprouve à recruter en France l’amènent à embaucher des personnels tunisiens et polonais pour les usines françaises : nous devons tout faire pour remédier à cette situation. Étant donné l’accélération de la cadence de production rendue nécessaire par l’importance des commandes, y a-t-il des perspectives de créations de postes ?

Selon le quotidien La Dépêche du Midi, les primes de participation et d’intéressement qui vont être versées par le groupe au titre des résultats de 2014 seront de 84 % supérieures à celles de l’an dernier. Mais qu’en sera-t-il des salaires ? Ils ont augmenté de 3 % en 2014 ; à quoi les salariés peuvent-ils s’attendre en 2015 ? Enfin, la performance du groupe a augmenté ; comment répartissez-vous les bénéfices entre l’investissement, les salariés et les actionnaires ?

M. Dino Cinieri. Je me réjouis de la confirmation de la commande de cent avions de la famille A320NEO par la compagnie aérienne colombienne Avianca. Des négociations sont-elles en cours au sujet de l’A380 ? Comment est accueilli l’E-Fan, premier avion à propulsion électrique d’Airbus ?

M. Philippe Kemel. Vous avez fait état de perspectives de très fort développement mais aussi d’un chiffre d’affaires réalisé à 80 % à l’étranger ; y aura-t-il des délocalisations ? Étant donné l’importance de l’innovation, envisagez-vous des partenariats avec Google, Apple, Facebook et Amazon ? Enfin, considérant les difficultés que vous éprouvez pour recruter des techniciens, ne pourrait-on envisager des partenariats visant à des apprentissages spécialisés entre Airbus et les régions françaises qui, telles le Nord-Pas-de-Calais, sont peu pourvues en emplois par le groupe ?

Mme Laure de La Raudière. Quelle est votre analyse des projets du fondateur de SpaceX – et de de Tesla Motors – qui veut produire des lanceurs à très bas coût ?

M. Kléber Mesquida. La région Languedoc-Roussillon soutient, avec la Fondation Van Allen de l’Université de Montpellier, le CNES et Airbus, un projet de développement de nano-satellites. Vous souhaitez augmenter la cadence de livraison des A320 ; il est probable que de nombreux éléments seront fabriqués par des sous-traitants. Dans ce cadre, envisagez-vous une extension de ces activités de recherche dans la future grande région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, principalement dans le Languedoc-Roussillon et notamment à l’Université de Montpellier ?

M. Jean-Marie Tétart. Vous nous avez montré que la restructuration de votre groupe lui permet de répondre aux exigences assez dures du moment et de porter cette part d’audace et de rêve qui fait les beaux jours de ses nouveaux concurrents. La production industrielle d’Ariane 6 est aussi une très bonne nouvelle. Mais n’y a-t-il pas quelque inconvénient à ce que ce lanceur, tout en gardant son nom, soit estampillé « Airbus » ? Peut-on espérer vendre Ariane 6 à Boeing, qui concurrence aussi Airbus dans la fabrication de satellites ? En France même, Thales et d’autres fabriquent aussi des satellites ; quelle garantie d’impartialité aura-t-on de la part d’Airbus à l’égard de ces entreprises qui sont aussi une force pour notre économie ?

M. Christophe Borgel. Le groupe avait annoncé une restructuration touchant la branche « Défense et Espace ». Le succès exceptionnel de l’activité « satellites » en 2014 vous conduira-t-il à reconsidérer une restructuration dont il avait été dit qu’elle serait conditionnée par les résultats ? De manière récurrente, des emplois de production ne sont pas pourvus et l’adéquation entre formations et emplois est critiquée de manière répétitive. S’il le faut, les parlementaires de la région Midi-Pyrénées sont prêts à peser pour que l’Éducation nationale s’adapte en favorisant les formations à des emplois nécessaires dans notre pays.

Mme Annick Le Loch. Je me fais l’écho de l’inquiétude des salariés d’entreprises de sous-traitance des activités « défense » du groupe Airbus en Bretagne. L’annonce faite l’an dernier de la recherche d’un repreneur pour les activités de sécurité et d’électronique de défense fait craindre des cessions et des restructurations des filiales avec des conséquences potentielles sur l’emploi chez les sous-traitants. Je pense notamment à une entreprise de ma circonscription dont 80 % du chiffre d’affaires provient de l’activité de radio mobile sécurisée – Private Mobile Radiocommunications (PMR) – d’Airbus, activité qui est hors du cœur de métier du groupe. Vous venez de dire que la filière repose sur la solidarité ; comment s’exercera-t-elle ? Pouvez-vous rassurer les salariés ?

M. Hervé Pellois. La Pologne, qui a jusqu’à ce jour privilégié les équipements américains, a donc acheté 50 hélicoptères au groupe Airbus. Faut-il interpréter ce revirement surprenant comme une petite contribution polonaise à l’Europe de la défense ?

M. Jean-Pierre Le Roch. Vous avez publiquement déploré que quelque 2 000 postes restent non pourvus en France dans la filière aéronautique et spatiale, principalement dans les métiers de la production, soulignant que l’inadéquation des formations aux besoins de la filière amène les entreprises membres du Gifas à recruter à l’étranger pour des usines françaises. Quels sont précisément les besoins en formation insatisfaits ? Le groupe Airbus collabore-t-il avec des universités françaises ? Si tel est le cas, dans quelles régions les liens pourraient-ils être renforcés avec vos entreprises ?

Mme Marie-Lou Marcel. Dans l’Aveyron s’étend de Rodez à Tulle la Mecanic Vallée. Y sont à l’œuvre 200 entreprises qui rassemblent plus de 14 000 emplois. Ce tissu industriel constitué de sous-traitants spécialisés qui répondent aux besoins des secteurs de l’automobile, de l’aéronautique et des machines-outils est un atout majeur de développement économique. C’est dans un nouvel espace robotisé que Figeac Aéro fournira à Safran les viroles de carter en titane équipant les réacteurs de l’A320. Comment comptez-vous renforcer les partenariats avec les entreprises françaises qui font la vitalité de nos territoires ?

M. Marwan Lahoud. Il existe un projet d’A380NEO. Mais, avant de décider de réaliser un investissement de plusieurs milliards d’euros, nous prenons le temps d’analyser le marché, de déterminer le coût de la nouvelle motorisation et de définir l’impact de cette fabrication sur nos résultats. Bien entendu, si nous lançons la nouvelle version, toute la chaîne de production, dont Aircelle, en bénéficiera. Mais il n’est pas question de prendre une décision à plusieurs milliards d’euros si la commercialisation de l’A380 n’est pas améliorée de manière déterminante. Le sujet est en cours de discussion et la décision interviendra quand nous aurons pesé tous les éléments du dossier.

Plusieurs raisons expliquent que des postes ne soient pas pourvus dans les métiers de la production de la filière aéronautique française, y compris dans des régions durement frappées par le chômage. La première est l’absence de qualifications. Être soudeur, ajusteur ou chaudronnier industriel demande des qualifications précises que les lycées professionnels, en de nombreux lieux, ne permettent pas d’acquérir. Il n’en va pas de même partout, car nous avons réussi à nous mettre d’accord avec des collectivités locales et des lycées professionnels. Le lycée Airbus de Toulouse est un exemple pour tous et à Méaulte, dans la Somme, où nous avons une usine, une initiative locale a été prise avec le proviseur pour former à ces métiers. J’en appelle à une coopération locale avec les lycées et les collectivités, de manière qu’à leur sortie des lycées professionnels les élèves aient la qualification qui leur permettra d’intégrer une filière qui a des besoins. Il y a aussi que ces métiers ont mauvaise réputation ; sur ce plan, c’est à l’industrie d’agir, et le Gifas présentera cette année au Salon du Bourget les métiers de la production dans un « avion des métiers ». Cela nous permettra par exemple d’expliquer qu’être ajusteur au XXIème siècle signifie piloter une machine numérique. La troisième raison est la faible mobilité des salariés : si nous ouvrons un poste à Nantes, il est très difficile de convaincre quelqu’un qui cherche un emploi en Champagne de postuler. Tout cela conduit à la situation grotesque que des postes restent non pourvus dans une filière qui recrute.

Le groupe Airbus a une tradition sociale ; les informations parues dans La Dépêche du Midi au sujet des rémunérations ne disent pas autre chose. Cette tradition sera respectée. Si notre succès est ce qu’il est, c’est que les relations sociales dans l’entreprise unissent avant tout des gens passionnés par l’aéronautique. Le dialogue social y est adulte. Nous savons qu’il faut partager les résultats avec nos salariés, ils savent qu’il faut faire des efforts quand la situation n’est pas florissante – c’est arrivé, et les efforts ont été très importants. Ce donnant-donnant participe de notre contrat social et nous chercherons, comme nous l’avons toujours fait, à trouver un accord sur la politique salariale.

La montée en cadence et l’organisation de la production concernent tout le groupe et toute la chaîne de sous-traitance. Nous ne sommes pas une industrie qui délocalise : même à l’époque de l’euro fort, plus de 70 % de la production était faite sur le territoire national. Nous avons été amenés à établir certaines activités hors d’Europe pour accompagner une vente – cela avait un effet multiplicateur sur une activité correspondante en Europe. Ce schéma est appelé à se poursuivre, même si la pression des coûts, des charges et de la fiscalité est de plus en plus difficile à supporter. Notre message aux pouvoirs publics est donc : « Nous voulons rester sur le territoire national, facilitez-nous un peu les choses ». J’ajoute que activité « défense » nous ancre en Europe ; si elle devait disparaître ou être réduite à la portion congrue, nous n’aurions plus besoin de rester. Cela ne se ferait pas du jour au lendemain, mais au gré des changements à la tête de l’entreprise. Aujourd’hui, les 14 membres du comité exécutif sont tous passés par des activités « défense ». S’il n’en est plus ainsi demain, l’attachement au drapeau et au territoire risque de s’estomper.

La force de Google, Apple, Facebook, Amazon, SpaceX se résume en quelques mots : des moyens financiers illimités et une créativité qui ne l’est pas moins. Eric Schmidt, le président de Google, m’a conseillé tout net de développer les activités d’Airbus dans les domaines non réglementés – là où le développement est le plus fort. L’annonce faite par Elon Musk, président de Tesla Motors et de SpaceX, qu’il allait fabriquer des voitures électriques avait été jugée risible ; on a cessé de rire. Ensuite, il a fait rire en annonçant qu’il fabriquerait un lanceur spatial, et plus personne ne rit. Et quand Google dit vouloir permettre l’accès à Internet dans les zones à ce jour non couvertes en lançant 800 ballons en haute atmosphère, on commence par se gausser, mais…

La leçon à tirer de tout cela est qu’il faut retrouver l’audace qui a permis de faire voler avions, fusées et satellites, et à l’homme de fouler la Lune. Pour cela, il faut accepter l’idée de l’échec – et mieux vaut échouer vite ! Tom Enders a entraîné les dirigeants du groupe en « voyage d’apprentissage » en Californie. Là-bas, j’ai retrouvé ma jeunesse d’ingénieur en aéronautique : on expérimente et, si cela ne marche pas, on passe à autre chose… Nous devons retrouver cet esprit pionnier et pour cela attirer des jeunes gens que nous ne ferons pas rêver avec des tableaux budgétaires mais avec des projets véritablement audacieux. Le E-Fan, prototype d’avion à propulsion électrique, en est un : comme ce fut le cas pour SpaceX, les experts ont souri ; aujourd’hui, il vole.

Avec Ariane 6, on change la manière de faire : les industriels – la co-entreprise Airbus Safran Launchers – prennent leurs responsabilités en finançant une partie du développement. Ce sera toujours un lanceur Ariane, marque puissante, et les comportements ne changeront pas : aujourd’hui, les étages sont assemblés aux Mureaux et les lanceurs achevés à Kourou, sans que rien soit fait pour retarder ceux qui servent à lancer les satellites de nos concurrents. Ariane est une activité en soi, qui ne souffre pas la moindre distorsion de concurrence. Notre objectif est de vendre le plus de lanceurs possible, y compris pour lancer les satellites de nos concurrents. Rien ne justifie la moindre inquiétude à ce sujet. D’ailleurs, Airbus Safran Launchers a une gestion assez autonome. « Ce ne sont là que paroles », me direz-vous ; eh bien, non. Les actionnaires de MBDA – qui sont Airbus Group pour 37,5 %, BAE Systems pour 37,5 % et Finmeccanica pour 25 % – sont aussi ceux d’Eurofighter ; pourtant, loin d’empêcher la vente des missiles installés sous le Rafale, ils l’ont encouragée.

Nous avions dit que nous ajusterions le plan social « Défense et Espace » en fonction des prises de commandes et nous sommes en train de revoir les objectifs de réduction d’effectif dans l’activité spatiale pour tenir compte des ventes de satellites exceptionnelles réalisées en 2014. Cela étant, si les ventes ont été tellement nombreuses, c’est que nos commerciaux ont déployé tout leur talent, mais c’est aussi que les perspectives d’amélioration de notre compétitivité leur ont permis de faire des propositions plus concurrentielles. C’est un cercle vertueux, et c’est la vie normale de l’entreprise de procéder aux ajustements nécessaires, dans un sens ou dans l’autre, pour emporter des affaires.

La PMR, une activité très rentable, va sortir du groupe Airbus car les opérateurs de télécommunication ont une trop grande avance dans le développement de la large bande pour que nous puissions suivre. Nous voulons ainsi garantir l’avenir de la prochaine génération de radio professionnelle sécurisée. Les acquéreurs potentiels sont les opérateurs du secteur des télécommunications qui ont déjà investi dans ce domaine. L’acquéreur sera sans doute un membre du Gifas ; l’esprit de solidarité de la filière sera donc toujours là.

L’achat de 50 hélicoptères par la Pologne est une excellente nouvelle pour le groupe Airbus, et pour la France et l’Allemagne dont les gouvernements se sont beaucoup mobilisés à cette fin par une démarche commune du président de la République et de la Chancelière auprès des autorités polonaises. C’est aussi une excellente nouvelle pour l’Union européenne en matière de défense ; cela montre que lorsque la volonté existe, les Européens peuvent être compétitifs, vis-à-vis des États-Unis en particulier.

M. le président François Brottes. Qu’en est-il du marché de l’occasion ? Un organisme garantit-il que les avions obsolescents sont en état de voler ?

M. Marwan Lahoud. Aucun avion ne décolle s’il n’est pas en état de voler. L’aéronautique et le spatial sont de ces rares activités où l’hypothèse de l’accident est minutieusement analysée dans tous ses aspects. Airbus, comme Boeing, travaille assidûment avec les compagnies aériennes qui figurent sur la liste noire de l’Union européenne pour mettre leur maintenance aéronautique à un niveau sans cesse croissant. Les besoins en appareils nouveaux sont estimés à 35 000 d’ici 2030, dont 15 000 serviront à remplacer les flottes existantes et 20 000 à faire face à l’augmentation du trafic. À ce jour, les flottes les plus anciennes sont celles d’Amérique du Nord, puis viennent les flottes européennes ; les flottes asiatiques et moyenne-orientales sont neuves.

Des projets de démantèlement des avions et de recyclage des pièces, une activité en pleine expansion, voient le jour un peu partout. Nous avons créé avec Sita la co-entreprise Tarmac Aerosave. La récupération des pièces métalliques dans de bonnes conditions suppose que les usines soient situées dans des lieux très secs.

M. Alain Suguenot. Est-ce à dire ailleurs qu’en France ?

M. Marwan Lahoud. Tarmac Aerosave a une usine à Tarbes, où le climat est assez sec. Il le serait plus encore dans le Sichuan.

M. le président François Brottes. Nos homologues du Bundestag, jugeant trop forte l’implication des pouvoirs publics dans votre groupe, refusent l’idée d’un « Airbus de l’énergie » construit en suivant ce modèle de gouvernance ; qu’en pensez-vous ?

M. Marwan Lahoud. Cet argument aurait été recevable en 1998 ; il ne l’est plus, car l’implication publique dans le groupe a changé de nature. Dans notre industrie, un État a des droits parce qu’il est la puissance publique. L’État allemand s’est opposé à la fusion d’EADS et de BAE Systems alors qu’il ne détenait pas une seule action du groupe. De même, le gouvernement britannique a un droit de regard sur Rolls-Royce et BAE Systems, alors que le Royaume Uni n’en est pas actionnaire. Il ne s’agit pas de pouvoir actionnarial mais de souveraineté nationale.

M. le président François Brottes. Je vous remercie.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 6 mai 2015 à 9 h 30

Présents. - M. Damien Abad, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. Christophe Borgel, M. Jean-Claude Bouchet, M. François Brottes, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, M. Jean-Michel Couve, Mme Fanny Dombre Coste, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Franck Gilard, M. Joël Giraud, M. Daniel Goldberg, M. Jean Grellier, Mme Anne Grommerch, M. Henri Jibrayel, M. Philippe Kemel, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Kléber Mesquida, M. Yannick Moreau, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, Mme Josette Pons, M. Dominique Potier, M. Patrice Prat, M. Franck Reynier, M. Frédéric Roig, M. François Sauvadet, M. Michel Sordi, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Jean-Marie Tetart, Mme Catherine Troallic, Mme Clotilde Valter

Excusés. - M. Bruno Nestor Azerot, Mme Ericka Bareigts, M. Denis Baupin, M. Marcel Bonnot, Mme Pascale Got, M. Thierry Lazaro, M. Serge Letchimy, M. François Pupponi, M. Bernard Reynès, Mme Béatrice Santais, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Catherine Vautrin

Assistaient également à la réunion. - M. François André, M. Paul Molac, M. François Vannson