La Commission procède d’abord à l’audition de M. Sébastien Soriano, président de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), accompagné de Mme Martine Lombard et de M. Jacques Stern.
Mme la présidente Frédérique Massat. Monsieur Soriano, je vous remercie d’avoir accepté de vous soumettre à un agenda un peu particulier, qui nous a amenés à différer notre rencontre à plusieurs reprises.
Nous auditionnons régulièrement l’ARCEP au sein de la Commission des affaires économiques, au regard des attributions de l’Autorité et en raison de notre compétence en matière de numérique. Nous avons maintenu l’intégralité de nos travaux, mais compte tenu de l’actualité et des réunions qui vont se succéder dans la matinée, je vous demanderai d’être concis, afin que nous puissions terminer cette audition vers onze heures. Pour autant, je vous rassure, notre réunion ne sera pas expédiée, car il y a ici nombre de parlementaires avertis.
Au regard de l’actualité tragique, ma première question portera sur le rôle de l’Autorité dans les législations à venir, s’agissant notamment de l’état d’urgence, car nous allons être amenés à nous pencher sur un volet relatif au numérique. Pouvez-vous nous donner votre sentiment sur cette question ?
Les enchères s’étant terminées hier, nous souhaiterions également que vous fassiez un point sur l’attribution des fréquences 700 mégahertz.
Enfin, nous avons des questions sur le déploiement du très haut débit, la neutralité du net et le projet de loi pour une République numérique, sur lequel vous avez émis un avis et des recommandations, mais aussi certaines réserves.
M. Sébastien Soriano, président de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). Je vous remercie, madame la présidente, d’avoir maintenu cette audition, malgré la période extrêmement difficile que nous traversons. Je suis accompagné aujourd’hui des deux membres du collège de l’ARCEP qui ont été désignés par le Président de l’Assemblée nationale, M. Jacques Stern et Mme Martine Lombard. Ce rendez-vous est très important pour l’ARCEP, qui est une autorité indépendante, la contrepartie de cette nécessaire indépendance étant le contrôle par le Parlement.
L’objectif de mon propos introductif est de faire une présentation des principaux sujets qui sont en ce moment à l’agenda de l’ARCEP. Pour nous, l’intérêt de cette audition, au-delà du contrôle, est de comprendre sur quels sujets vous souhaitez que nous travaillions.
Nous sommes en train de travailler sur deux dossiers extrêmement structurants dans le domaine du mobile et du fixe : l’attribution de la bande des 700 mégahertz, d’une part, la tarification du cuivre, qui concerne le réseau téléphonique, le réseau fixe d’Orange, d’autre part.
En ce qui concerne la bande des 700 mégahertz, j’avais indiqué, lors de mon audition par votre commission le 13 janvier 2015, que nous ferions nos meilleurs efforts pour tenir le calendrier très exigeant fixé par le Gouvernement. C’est chose faite puisque nous avons réalisé cette attribution de fréquences. L’enchère s’est terminée hier, en effet. Cette attribution permet des couvertures nouvelles, originales, qui vont apporter notamment la 4G sur les lignes ferroviaires du TER, du Transilien et du RER. Outre qu’elle rapportera environ 2,8 milliards d’euros de revenu à l’État, cette attribution aux quatre opérateurs du marché de différents blocs de fréquences – deux blocs pour Orange et Free Mobile, un pour SFR et un pour Bouygues Telecom – confirme la présence et l’engagement de quatre opérateurs sur le marché français. Elle permet à Iliad (Free), de rattraper une partie de son retard en matière de fréquences, et donc, de s’engager pleinement comme un opérateur de réseau sur ce marché.
L’autre dossier d’actualité que j’avais évoqué lors de mon audition en janvier est celui de la paire de cuivre. J’avais souhaité que l’ARCEP donne à l’ensemble des acteurs du secteur – l’opérateur historique, les opérateurs alternatifs, les collectivités territoriales qui investissent dans les réseaux numériques – le maximum de visibilité sur le tarif du dégroupage, qui est un élément structurant puisque c’est le prix auquel les opérateurs alternatifs paient l’accès au réseau de France Télécom. Nous avons engagé une consultation publique sur ce sujet. Nous donnons une visibilité, dans un premier temps, à deux ans, soit en 2016-2017. Dans un deuxième temps, nous construirons un price cap pour les trois années suivantes, 2018, 2019 et 2020.
Notre actualité, c’est aussi la mise en œuvre de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques du 6 août dernier, dite « Macron ». Je vais rappeler les principales têtes de chapitres qui concernent l’ARCEP.
D’abord, nous devons établir, d’ici au 7 décembre, des lignes directrices sur la manière dont les collectivités territoriales qui établissent des réseaux publics à très haut débit tarifient l’accès à leurs réseaux. Nous avons mis un texte en consultation publique et nous avons pris connaissance, ces derniers jours, des éléments fournis par les acteurs. Ces contributions à la consultation publique, très riches, nous amènent à amender quelque peu notre travail.
Le Gouvernement a désormais la faculté de saisir pour avis l’ARCEP comme un expert indépendant sur toute question relevant de sa compétence, ce qui est nouveau. Jusqu’à présent, l’ARCEP ne pouvait être saisie que pour rendre un avis sur des textes législatifs ou réglementaires. Nous avons été saisis à deux reprises par le Gouvernement : une première fois sur la question de la mesure de la bande passante sur internet, une deuxième fois sur la tarification du portage de la presse par La Poste.
Un nouveau pouvoir nous est confié en matière de partage des réseaux mobiles. C’est la question de l’itinérance et de la mutualisation. Les accords passés entre les opérateurs mobiles pour partager leurs réseaux sont-ils bénéfiques ? Vont-ils trop loin ? Nous allons, sur ce terrain, établir des lignes directrices dont nous mettrons sur la table une première copie en fin d’année.
Nous avons également un rapport à rendre au Parlement concernant l’investissement mobile. Je dois avouer que nous sommes un peu en retard, compte tenu de l’accumulation des dossiers et des moyens contraints. Nous devions rendre cet avis le 7 novembre ; j’espère que nous pourrons le rendre d’ici à la fin du mois de novembre ou, en tout état de cause, d’ici à la fin de l’année. C’est un premier rapport, qui sera par la suite annuel. L’initialisation demande un peu plus de temps.
Par ailleurs, nous sommes impliqués dans le dossier des zones blanches. Le Gouvernement a engagé une action importante pour compléter le programme « zones blanches ». À ce stade, nous ne faisons que l’accompagner. Nous aurons un rôle plus important par la suite puisque nous devrons veiller à ce que le travail entre opérateurs se fasse de manière fluide, et à faire respecter les obligations prévues par la loi en termes de couverture des zones blanches.
Nous avons également, depuis l’adoption de cette loi, la faculté d’enrichir nos indicateurs de qualité de service et de couverture puisque nous avons la possibilité de réaliser des séries de mesures en les faisant payer par les opérateurs. Nous sommes en train d’y travailler.
Voilà pour les principaux éléments de la loi Macron.
Nous avons engagé, à l’ARCEP, un travail original, sur lequel je souhaiterais avoir vos observations : le lancement d’une revue stratégique. Nous pensons que l’ARCEP est arrivée à la fin d’un cycle. Elle a été créée en 1997 pour ouvrir le marché à la concurrence. C’est chose faite à ce jour. Nous devons donc nous demander à quoi elle servirait si on la recréait aujourd’hui.
De nouvelles compétences nous sont confiées par la loi Macron, mais aussi par les décisions européennes relatives à la neutralité du net, dont nous sommes le gardien. C’est un métier totalement nouveau. On sort d’une vision où le régulateur accompagnait de manière transitoire l’ouverture d’un marché à la concurrence. On nous demande maintenant un travail permanent consistant à veiller au respect d’un certain nombre de règles du jeu sur le marché.
Il y a également les stratégies nationales pour la sécurité du numérique, qui sont adoptées ou en cours d’adoption. Au niveau du Gouvernement, le Premier ministre a adopté une stratégie le 18 juin dernier. Mme Axelle Lemaire, secrétaire d’État chargée du numérique, travaille à un projet de loi sur lequel nous avons rendu un avis au Gouvernement. Le ministre de l’économie a également indiqué qu’il souhaitait lancer un chantier sur les nouvelles opportunités économiques, avec un important volet numérique.
Au niveau européen, des travaux considérables sont menés dans le cadre du projet de marché unique numérique (Digital single market), dont un volet concernera les télécoms. Plus généralement, la question est de trouver comment, dans le domaine numérique, l’Europe pourrait répondre de manière groupée aux enjeux et aux acteurs internationaux très puissants face auxquels les États pris isolément n’ont pas forcément toutes les réponses.
Cet exercice a d’abord été mené en interne. Nous avons lancé une consultation publique et nous attendons les réponses jusqu’au 4 décembre. Nous publierons une feuille de route sur notre action le 19 janvier prochain. Il ne s’agit pas, pour l’ARCEP, de réfléchir à ses missions puisque c’est le Parlement qui les lui confie. En revanche, nous revendiquons le fait de hiérarchiser nos priorités, compte tenu des nouveaux éléments que je vous ai indiqués et des moyens nécessairement contraints.
M. Fabrice Verdier. Monsieur le président, le dialogue entre la représentation nationale et l’ARCEP est d’autant plus nécessaire que les chantiers de l’Autorité sont nombreux : projet de loi pour une République numérique, attribution des fréquences 700 mégahertz aux opérateurs, neutralité du net.
J’aimerais avoir votre avis, en tant que régulateur, sur le nombre d’opérateurs dans un marché en plein bouleversement depuis l’arrivée de Free.
Je m’attarderai davantage sur la couverture mobile et la fibre en France. Il y a aujourd’hui encore 150 communes en France qui n’ont pas accès au réseau de téléphonie mobile et 2 200 autres qui n’ont pas accès à l’internet mobile, malgré l’engagement initial des opérateurs pour constituer un réseau commun afin de couvrir tout le territoire. Les habitants et les maires de ces communes, qui sont victimes d’une véritable inégalité territoriale numérique, et donc, économique, s’en plaignent régulièrement.
Dans le cadre de la loi Macron, des engagements ont été pris : couverture, d’ici à la fin 2016, en téléphonie mobile 2G a minima des dernières communes situées dans les zones blanches ; couverture en 3G effective sur tout le territoire à la mi-2017 ; installation sur quatre ans, à compter de 2016, de 800 nouveaux sites dans les zones rurales pour couvrir les endroits peu éloignés du centre-bourg restant sans couverture dans des communes elles-mêmes couvertes. Je me félicite de ces mesures, d’autant qu’avec mon collègue sénateur Pierre Camani, nous avions, devant la défaillance des opérateurs, incité, dans un rapport, les pouvoirs publics à prendre leurs responsabilités en la matière. Le 21 mai dernier, les quatre opérateurs mobiles nationaux ont formalisé l’engagement de mettre en place l’ensemble de ces mesures et garanti qu’aucune commune ne serait oubliée. À cette fin, un nouveau recensement devrait être effectué. L’ARCEP a prévu des sanctions en cas de non-respect de ces engagements. Où en est-on de ce nouveau recensement ? Selon quelles méthodes ont été déterminés les sites en dehors des centres-bourgs ? Compte tenu de la promesse non tenue par les opérateurs pour 2013, estimez-vous que les nouvelles obligations réglementaires seront suffisamment contraignantes pour atteindre ce nouvel objectif ?
Outre la couverture du territoire, l’ARCEP poursuit ses efforts dans le domaine de la qualité d’accès et de service en publiant, sur une base trimestrielle et semestrielle, des indicateurs de qualité des services fixes d’accès à l’internet et de téléphonie : délais de raccordement et autres taux de pannes en ce qui concerne l’accès, temps de réponse ou plaintes concernant la facturation pour ce qui est du service clients. Toutefois, au cours des auditions et des déplacements que j’ai effectués avec Pierre Camani, j’ai constaté que les indicateurs produits par l’ARCEP s’agissant de la qualité du réseau reflétaient insuffisamment la réalité du terrain, caractérisée par l’absence de maintenance du réseau, les sous-traitances en cascade, la difficulté pour les usagers et les élus d’identifier un interlocuteur auprès des opérateurs, notamment de l’opérateur historique. Dans quarante-sept communes de ma circonscription sur quatre-vingt-treize, les dysfonctionnements ont fait l’objet de délibérations en conseil municipal. C’est dire s’ils suscitent mécontentement et difficultés ! Nous avons eu l’occasion d’échanger sur la nécessité d’améliorer les indicateurs de façon que le ressenti des usagers soit conforme aux indicateurs que peuvent nous donner, notamment, les opérateurs. Quelles sont les évolutions concernant les indicateurs de couverture et de qualité de la couverture ?
M. Lionel Tardy. Je tiens à saluer le rôle de l’ARCEP dans le cadre du programme « zones blanches », tel qu’actualisé par la loi Macron. La liste des 171 nouvelles communes, publiée il y a quinze jours, qui comprend notamment la commune de Montmin, dans ma circonscription, a été établie suite à des mesures précises sur le territoire. Comment interviendra l’ARCEP une fois cette liste définitivement établie ?
Concernant le projet de loi pour une République numérique, quelle est votre analyse de la neutralité du net telle que définie à l’article 16, étant entendu que cet article fait de l’ARCEP le garant de cette neutralité ? Pour rappel, le texte actuel prévoit que lorsque l’Autorité estime qu’il existe un risque caractérisé qu’un exploitant de réseau ou une personne fournissant des services de communication ne respecte pas ses obligations, elle peut mettre en demeure l’exploitant ou le fournisseur de s’y conformer.
Enfin, l’ARCEP va publier prochainement des lignes directrices sur le partage des réseaux mobiles afin de veiller à la question de la concurrence, concernant notamment les infrastructures. Envisagez-vous d’adopter des lignes directrices similaires pour le fixe ?
Toujours dans le cadre du partage des réseaux mobiles, l’ARCEP a-t-elle prévu de travailler sur l’itinérance multiple, en particulier pour certains métiers pour lesquels l’accès au réseau sans interruption est impératif, notamment dans les zones de montagne ? Cela concerne les forces de sécurité, la protection civile, les services médicaux, ainsi que les particuliers puisque l'itinérante multiple, en France, est actuellement couvert par des cartes SIM étrangères.
M. André Chassaigne. Je voudrais, moi aussi, saluer l’action de l’ARCEP et la qualité des relations qu’elle entretient avec le Parlement. Son action est caractérisée par sa réactivité aux interrogations et ses conseils objectifs, dont j’ai pu bénéficier dans le cadre de l’élaboration d’un texte législatif.
Quels sont précisément les moyens de saisir l’ARCEP ? Je crois savoir que l’Autorité peut être saisie par une organisation professionnelle, une association d’utilisateurs agréée, une personne physique ou morale concernée. La question s’était posée de donner cette possibilité à un élu local, par exemple un maire qui, sans être directement concerné, veut résoudre des problèmes sur son territoire. Quels sont donc les leviers qui peuvent être actionnés ?
S’agissant des sanctions, avez-vous été conduits à en prendre d’autres que celles prévues pour non-respect de ses obligations par un opérateur ? Dans le cas d’un dysfonctionnement avéré, quels leviers utilisez-vous pour obtenir des réponses ? Procédez-vous à une forme d’enquête pour vérifier la validation ?
Vous avez, dans votre propos liminaire, montré que, depuis 1997, les missions qui vous étaient confiées avaient beaucoup évolué et s’étaient multipliées. Définies tant au niveau national qu’européen, elles consistent à veiller au respect de leurs obligations par les opérateurs, à prendre en charge les consultations publiques et l’élaboration de rapports. Vous avez même précisé que sa charge de travail avait contraint l’Autorité à retarder la remise d’un rapport. De quels moyens humains disposez-vous ? Quant à vos moyens financiers, les estimez-vous suffisants pour faire face à toutes les missions qui vous sont confiées ?
M. Franck Reynier. Je voudrais, moi aussi, insister sur la question des zones blanches. Il est essentiel pour nos territoires de disposer de la téléphonie mobile et d’un internet à débit acceptable. L’attribution des fréquences 700 mégahertz pourra, je l’espère, apporter des réponses en la matière. L’impact sur les collectivités territoriales est important puisque les intercommunalités, les conseils départementaux ou les régions sont obligés de se substituer aux opérateurs et d’investir fortement pour atténuer les zones blanches. Dans une période où leurs budgets sont mis à mal, il importe que l’ARCEP soit sensibilisée à ces questions. De fait, l’accès à la téléphonie mobile et à l’internet sur l’ensemble de notre territoire est aujourd’hui un vrai problème.
Les textes de loi sur lesquels nous allons travailler dans les semaines qui viennent ont pour ambition le développement de l’économie numérique, qui est essentiel. En tant que régulateur national, votre mission est d’avoir une vision qui dépasse largement notre territoire national. Il y a quelques semaines, nous avons reçu ici des acteurs de l’économie numérique. Les dirigeants de BlaBlaCar, de Deezer ou de Withings nous ont fait part de leurs attentes et des difficultés qu’ils pouvaient rencontrer. Ils demandent une simplification des réglementations et une harmonisation à l’échelle européenne. Aujourd’hui, pour être efficaces, nos entreprises nationales et européennes ont besoin d’un marché suffisamment important, d’un volume opérationnel qui leur permette de concurrencer les entreprises internationales. Il est aussi de votre responsabilité, dans le cadre de votre mission de contrôle au niveau national, d’avoir ce souci d’harmonisation, de simplification et d’efficacité pour aider les nombreuses entreprises compétitives de notre pays.
Mme Jeanine Dubié. La dernière fois que vous étiez venu, monsieur le président, c’était pour nous présenter votre projet très ambitieux pour l’ARCEP. De fait, en moins d’un an, vous avez beaucoup travaillé pour moderniser l’Autorité et renforcer sa visibilité, de sorte qu’elle ne se présente plus seulement comme un régulateur, mais comme un interlocuteur légitime vis-à-vis de la filière numérique.
Vous avez évoqué votre revue stratégique, que vous avez soumise à consultation publique. C’est, en effet, l’occasion de mieux envisager le rôle et les missions de l’ARCEP au regard de la transformation numérique, et de le faire en collaboration avec l’ensemble des acteurs du secteur. Dans cette revue, vous avez identifié parmi vos trois chantiers prioritaires le déploiement de la fibre optique. Pour ce nouveau saut technologique, nous avons confiance dans les engagements du Gouvernement. Néanmoins, nombreux sont les parlementaires élus de territoires montagnards et ruraux qui seront attentifs à ce que ceux-ci ne soient pas, une fois encore, pénalisés. Nous comptons sur le plan France très haut débit pour ne pas répéter les erreurs passées ni accentuer la fracture numérique territoriale.
La loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a étendu le pouvoir de sanction de l’ARCEP pour veiller à la bonne mise en œuvre de ce plan. Comment envisagez-vous ce nouveau pouvoir ? Dans quelle mesure comptez-vous vous en servir face aux opérateurs ? Quel est votre sentiment global vis-à-vis des objectifs de couverture fixés par le plan France très haut débit ?
En ce qui concerne la couverture mobile en zone blanche, après une première liste de 67 communes, une liste de 171 communes vient de sortir, et une autre est attendue. Pouvez-vous nous dire à quel moment elle arrivera et surtout qui aura en charge les mesures ?
Enfin, l’ARCEP connaît un contexte budgétaire difficile puisque, cette année encore, elle subit une nouvelle baisse de ses crédits, en dépit de l’augmentation de ses missions et compétences. Comment l’Autorité va-t-elle s’adapter à cette baisse de dotation ? L’a-t-elle prise en compte lors de la définition de ses priorités dans le cadre de la revue stratégique ?
Mme Michèle Bonneton. Ces dernières années, j’ai rédigé l’avis budgétaire sur les postes. J’ai ainsi pu me rendre compte de l’activité et de l’utilité de l’ARCEP, qui joue un rôle déterminant dans le suivi et le contrôle, à la fois, des activités postales et des communications électroniques.
En ce qui concerne l’activité postale, la compensation de l’État pour la distribution de la presse diminue régulièrement : elle est passée de 217 millions d’euros en 2013 à 119 millions d’euros pour 2016. Le renouvellement des accords Schwartz n’est pas encore finalisé. Vous avez un rôle à jouer dans ce domaine. Le volume du courrier baisse depuis plus de quinze ans. Cette baisse a même tendance à s’accélérer ces dernières années, avec un volume de moins 5 % par an, ce qui est considérable.
L’ARCEP est également chargée de donner à La Poste l’autorisation d’augmenter le prix des timbres. En juillet 2014, elle a accordé une augmentation très substantielle de 5,2 % en moyenne par an pendant quatre ans. Après une augmentation de 7 % au 1er janvier 2015, une nouvelle augmentation de 3,6 % est prévue au 1er janvier 2016. Si l’objectif est d’apporter des recettes supplémentaires à La Poste, on peut aussi craindre que cette augmentation ait pour conséquence d’accentuer la baisse du volume du courrier. Qu’en pensez-vous ?
Quant à ses moyens, l’ARCEP est confrontée depuis plusieurs années à une baisse de ses crédits, alors que de nouvelles missions lui sont régulièrement confiées, comme le processus de libération de la bande de 700 mégahertz, le pilotage du déploiement du très haut débit, le suivi de l’évolution de la couverture des zones blanches. Le Gouvernement peut aussi la saisir pour expertise. Dès lors, l’ARCEP ne semble plus en mesure d’assurer totalement certaines activités, comme les études et la prospective, cependant indispensables pour préparer correctement l’avenir. Il est vrai que, pour 2016, le plafond d’emplois est stabilisé, mais il reste en deçà de ce qui serait vraisemblablement nécessaire.
Ainsi, la dernière étude de l’ARCEP sur le secteur postal a plus de cinq ans, alors que ce secteur est en plein bouleversement. Je pense, par exemple, au boom des petits colis et de l’e-commerce. Un rapport sur le développement des objets connectés qui utilisent de nombreuses fréquences serait le bienvenu. Compte tenu de cette situation, j’ai déposé un amendement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016 pour demander une augmentation de 1 million d’euros pour le budget de l’ARCEP. Mon amendement a été repoussé. Il n’est donc pas superflu, monsieur le président, de mieux informer mes collègues.
L’adaptation à la réglementation de l’Union européenne en matière de fréquences en montagne aura des conséquences financières importantes pour les intéressés. Dans mon département de l’Isère, une association de prévention et de secours en montagne en estime le coût à environ 60 000 euros, soit sept années de son budget, ce qui met en danger son existence même. Ne pensez-vous pas qu’il serait indispensable de prendre des mesures d’accompagnement pour éviter de telles situations ?
L’ARCEP détient certaines compétences. Pensez-vous qu’elles sont suffisantes ? Sinon, quelles évolutions juridiques estimez-vous souhaitables, notamment en matière de règlement des différends et de sanctions ?
En 2014, la société SFR a été condamnée par l’Autorité de la concurrence à hauteur de 46 millions d’euros pour avoir mis en place et maintenu un écart de prix abusif dans la téléphonie mobile à La Réunion et à Mayotte. Avez-vous les moyens juridiques pour intervenir en amont et éviter ce genre de pratique ?
Pouvez-vous nous éclairer sur la suite des accords Schwartz ?
L’ARCEP contrôle aussi la qualité des services publics assurés par La Poste. Que pouvez-vous en dire ?
M. Frédéric Barbier. Sur le terrain, où nous nous déplaçons souvent, nous constatons une dégradation globale de la téléphonie mobile. Non seulement il y a des zones blanches, mais il n’y a parfois plus de réseau dans des endroits où il y en avait auparavant. C’est le cas dans mon département du Doubs. Les opérateurs ont-ils baissé le niveau ? Ont-ils régulé différemment ? Quels moyens avez-vous pour contrôler la qualité du réseau sur le territoire ?
En matière de raccordement à la fibre et de dégroupage, le résultat de ma dernière expérience est que dix-huit mois se sont écoulés entre la demande de la collectivité territoriale et la mise en service. Les délais sont beaucoup trop longs. Nombre de communes sont prêtes à investir et veulent améliorer le service apporté aux populations, mais elles hésitent à s’engager sur un dossier aussi long. Quels sont vos moyens pour intervenir ?
Dans d’autres pays, le wifi est libre d’accès, sans code et gratuit dans des commerces, des hôtels et des restaurants. Il est utile, sur le plan économique, de pouvoir communiquer facilement partout. Où en sommes-nous en France ? Sommes-nous en capacité de développer ce dispositif ?
Je note, enfin, que du côté de la SNCF, les choses bougent, ainsi que du côté des compagnies aériennes. De plus en plus de compagnies, que ce soit aux États-Unis, dans les pays arabes ou dans le Sud-Est asiatique, installent le wifi à bord des avions. Cela va-t-il évoluer chez nous ?
Mme Laure de La Raudière. Comme mes collègues, j’ai le sentiment que la qualité de service mobile a diminué sur les territoires. Je me demande si ce n’est pas parce que la définition des mesures de la qualité de service n’est plus adaptée aux terminaux que l’on utilise aujourd’hui. Les opérateurs disent atteindre les objectifs de couverture qui leur sont assignés en fonction des licences et des tests de qualité de service que vous avez mis en œuvre. Ne faut-il pas revoir la façon de mesurer la qualité de service ? Est-il possible de le faire pour les licences 5G ?
Concernant la qualité de service internet, ce sont les opérateurs qui la mesurent pour le compte de l’ARCEP. Ne faudrait-il pas avoir des mesures indépendantes ? Vous avez, avec le troisième « paquet Télécom », la possibilité d’imposer une qualité de service minimale sur internet.
S’agissant de la protection des données personnelles au niveau européen, quel pourrait être, selon vous, le calendrier d’un règlement et vers quoi semble s’orienter la Commission européenne sur ce sujet majeur pour la souveraineté de l’Europe ? L’Allemagne a décidé très récemment d’imposer l’hébergement des données des Allemands en Europe. Peut-on pousser ce dispositif au niveau européen ?
Mme Marie-Lou Marcel. La semaine dernière, vous avez communiqué les nouvelles conditions tarifaires pour la location de la paire de cuivre d’Orange par les autres opérateurs. C’est la première fois que l’ARCEP fixe ces tarifs. Vous évoquez, à cet égard, une meilleure visibilité de nature à inciter l’investissement et le déploiement des réseaux très haut débit et à favoriser, à terme, la migration des abonnés à l’ADSL vers la fibre. Cette évolution tarifaire est-elle également un message pour une meilleure stabilité des prix dans le fixe, adressé notamment à certains acteurs agressifs sur le marché ?
Que pensez-vous des pistes développées par l’un de vos prédécesseurs à la tête de l’ARCEP qui, dans un rapport remis au Gouvernement en février, préconisait l’extinction progressive des réseaux de cuivre et la migration des clients vers la nouvelle infrastructure lorsque des zones sont entièrement couvertes par la fibre ?
Enfin, quel est votre sentiment sur la détérioration des services et des réseaux dans les zones rurales ?
M. Jean-Claude Mathis. Monsieur le président, vous avez lancé récemment une étude portant sur l’évaluation des actions de l’ARCEP en matière d’information des utilisateurs, de couverture et de qualité des services mobiles téléphoniques et d’accès à l’internet fixe. La consultation publique, ouverte jusqu’au 4 décembre, doit permettre le dépôt de contributions extérieures. C’est une procédure assez inhabituelle, destinée normalement à définir vos nouvelles priorités en termes de régulation, et les nouveaux modes d’intervention à l’heure du numérique. Des pistes sont évoquées, comme la neutralité du net, le développement des objets connectés ou encore la connectivité mobile. En cette période un peu trouble, qu’attendez-vous concrètement de cette consultation ?
Mme Marie-Hélène Fabre. Je ne reviens pas sur les zones blanches, mais j’appelle l’attention sur les zones qui ne sont couvertes que partiellement. Elles n’existent pas uniquement sur les territoires ruraux ou de montagne, le littoral est également concerné. C’est le cas dans ma circonscription. On parle peu des zones grises, qui posent pourtant de graves problèmes. Ainsi, le week-end dernier, dans une commune de mon département située en zone grise, une personne est décédée d’un AVC parce qu’on n’a pas pu joindre les secours. Que pouvez-vous faire ? Un décret paru en août 2014 vous donne les moyens de contraindre les opérateurs à couvrir ces zones. Où en est-on ? Quels moyens supplémentaires avez-vous obtenus ?
M. François de Mazières. Le transfert de la bande des 700 mégahertz aura pour conséquence d’obliger les détenteurs de télévisions anciennes à changer de matériel. Avez-vous une évaluation du nombre de personnes concernées et du coût d’un tel changement ?
Par ailleurs, quel sera le rôle de l’ARCEP dans la protection et l’usage des données personnelles ?
Enfin, la ville où je suis élu était desservie, au titre de l’accord conclu entre les opérateurs, par SFR. Après la fusion Numericable-SFR, la nouvelle société a indiqué n’opérer que par le câble, ce qui a anéanti l’effort consenti pour le déploiement de la fibre SFR. Évidemment, les performances ne sont pas les mêmes. J’ai alerté l’ARCEP à ce sujet et je salue l’efficacité avec laquelle elle a rouvert la concurrence. Le seul problème, c’est que cela a abouti à un retard important. Orange s’étant remis sur les rangs, le temps de faire les études a repoussé les délais. Numericable en profite pour se livrer à un incroyable phoning pour convaincre les gens de souscrire très rapidement un abonnement. Comment réagissez-vous à cela ?
M. Éric Straumann. Aujourd’hui, l’envoi des factures des opérateurs, notamment de l’opérateur historique, est dématérialisé. L’abonné reçoit un avis indiquant que la facture est disponible sur un site, accessible seulement par le biais d’un code. En outre, une fois le mois écoulé, la facture disparaît. Il faut donc téléphoner si l’on veut en obtenir une copie. Je trouve cela anormal, alors qu’il suffirait, comme le font d’autres opérateurs, d’envoyer une facture au format pdf que le client peut conserver sur son ordinateur, au lieu d’utiliser cette procédure très compliquée, qui cache certainement autre chose.
M. Antoine Herth. J’ai séjourné la semaine dernière dans une commune du Berry qui ne figure pas sur la liste du ministère de l’économie recensant les communes situées en zone grise. Or, s’il peut y avoir la 3G ou la 2G dans le bourg, ce n’est pas le cas pour les habitations dispersées sur le territoire de la commune. Je pense qu’il faut rester relativement modeste sur ce sujet pour ne pas donner de faux espoirs à la population.
Je suis encore, pour quelques semaines, chargé des transports de la région Alsace, et la question du déploiement de la téléphonie dans le réseau TER m’intéresse beaucoup. Pouvez-vous nous donner des précisions sur le cahier des charges que vous avez mis en place ? En Alsace, qui n’est peut-être pas représentative de l’ensemble des réseaux nationaux, il y a 750 trains par jour, mais aussi 250 bus TER – donc, peut-être deux sujets de réflexion.
Mme la présidente Frédérique Massat. Je crois savoir que vous avez quelques réserves s’agissant de la lettre recommandée électronique que pourrait introduire le projet de loi pour une République numérique. Pouvez-vous nous en dire plus ?
M. Sébastien Soriano. Concernant l’harmonisation européenne, je sais que les entrepreneurs auditionnés par votre commission vous ont demandé avec insistance de réfléchir à deux fois avant de définir des règles dans le domaine du numérique. Avec le monde comme terrain de jeu, ils ont besoin d’agilité, de souplesse et d’avoir une vision internationale. L’ARCEP partage pleinement cette philosophie.
Outre des dispositions nationales, comme celles issues de la loi Macron, nous mettons en œuvre des directives et des règlements européens. Pour l’essentiel, notre action dérive à 80 % du cadre européen. Nous sommes associés à la stratégie numérique pour l’Europe, et nous défendons l’Europe comme étant une solution en matière de numérique. Cela peut sembler paradoxal mais, dans le secteur du numérique, c’est l’Europe qui, potentiellement, assurera davantage de souveraineté en apportant des réponses sur des sujets qui, aujourd’hui, échappent aux États parce que les entreprises ne sont pas nécessairement installées dans chacun des États.
C’est un message que nous adressons au Gouvernement au regard du projet de loi pour une République numérique. Nous l’invitons à s’insérer le plus possible dans le cadre européen et à préférer le droit souple et le recours à la régulation plutôt que la définition de réglementations sectorielles trop précises. De telles règles pourraient s’avérer très rapidement obsolètes, être contournées par des acteurs innovants et poser des problèmes de compétitivité. Elles pourraient n’être pas appliquées par des opérateurs qui ne sont pas installés en France, alors que les opérateurs français, eux, devraient les respecter. Si on impose trop de règles à ces derniers, il y aura un problème potentiel de compétitivité. C’est une préoccupation que nous partageons avec le Gouvernement.
En matière de neutralité de l’internet, ce n’est pas tant le contenu que nous demandons au Gouvernement de modifier que les modalités de contrôle. Nous l’invitons à renforcer ce contrôle en donnant notamment à l’ARCEP la capacité d’effectuer des investigations. Elle aurait, en quelque sorte, un rôle de gendarme, et plus seulement d’arbitre, comme par le passé.
L’ARCEP est, depuis longtemps, très investie au niveau européen, où elle participe à des groupes de travail techniques. Moi-même, je collabore au BEREC (Body of european regulators of electronic communications) – en français, l’ORECE (Organe des régulateurs européens des communications électroniques) –, dans lequel je pourrais être amené à prendre des responsabilités dans les prochaines années. En tout cas, l’Europe est un élément clé de notre action, et c’est par ce prisme que nous allons nous manifester dans le cadre des projets de loi.
Pour répondre à votre question sur les mesures de sécurité qui pourraient être adoptées suite aux événements du 13 novembre, madame la présidente, je ne sais pas précisément ce que le Gouvernement a en tête. Je peux vous dire que l’ARCEP a été saisie pour avis, dans le cadre de la loi relative au renseignement, au titre, non pas de la protection des libertés, qui ne figure pas parmi ses compétences, mais du bon fonctionnement des réseaux. Elle a fait un certain nombre de remarques qui ont été prises en compte par le Gouvernement. Un mécanisme de coopération a été institué entre l’ARCEP et la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), qui ont désormais la faculté de se saisir pour avis. J’ai moi-même proposé au Président de la République la nomination d’un expert en communications électroniques pour composer le collège de la CNCTR, en la personne de M. Patrick Puges. Selon moi, la bonne réponse, ce sont des mécanismes de coopération entre les organes de contrôle chargés du renseignement et des opérations pouvant impliquer des interventions techniques et l’ARCEP en tant que régulateur des réseaux. Mais chacun doit rester dans son rôle. Nous pouvons apporter une expertise technique, mais nous ne pouvons pas nous substituer aux organes qui régulent la question des libertés individuelles et des libertés publiques.
Concernant la question de la lettre recommandée électronique, l’ARCEP regrette le manque de concertation avec le Gouvernement sur un dispositif pourtant important. Le recommandé électronique serait, il est vrai, un vrai gage de simplification pour nos concitoyens et nos entreprises. Néanmoins, nous ne sommes pas convaincus par le dispositif qui a été élaboré. Nous nous tenons à la disposition du Gouvernement et du Parlement pour aboutir à un dispositif plus opérationnel et plus sécurisant. En réalité, nous recommandons le lancement d’une mission, même si, malheureusement, cela risque de faire perdre du temps, car nous avons l’impression que ce dispositif manque encore de maturité technique.
Mme Martine Lombard, membre du collège de l’ARCEP. La question de la couverture mobile est très sensible. Nous-mêmes, membres du collège de l’ARCEP, en sommes conscients puisque, lorsque nous nous rendons en région, notamment dans le cadre des commissions consultatives régionales de l’aménagement numérique du territoire, nous sommes régulièrement pris à partie à ce sujet. J’imagine donc ce qu’il peut en être dans vos circonscriptions…
La réduction de la fracture numérique du territoire est un chantier essentiel qui exige la collaboration de tous : l’exécutif, le Parlement, qui a ainsi voté la loi Macron du 6 août 2015, les opérateurs, les collectivités territoriales et le régulateur, sans que cela porte atteinte à son indépendance.
La loi du 6 août 2015 fixe deux échéances : l’une à fin 2016, pour le rattrapage de la couverture en 2G des communes qui en sont totalement dépourvues ; l’autre à mi-2017, pour la couverture en 3G des communes qui ne sont pas encore couvertes. Ces échéances sont précédées de deux étapes préalables. La première est celle du recensement des communes concernées par les préfectures de région, sous l’égide du Gouvernement. Je sais, d’ailleurs, que, sur le terrain, les choses se passent parfois de manière tumultueuse. La liste publiée dans un arrêté du 5 novembre dernier comporte ainsi 171 communes, qui s’ajoutent aux 67 communes dont nous savions déjà qu’elles n’étaient pas couvertes, soit un total de 238 communes exclues de toute couverture numérique. Il semble cependant que cette liste ne soit pas exhaustive, puisqu’un recensement complémentaire est en cours et devrait aboutir début décembre, de sorte qu’aucune commune ne devrait être oubliée.
La seconde étape consiste dans la mise au point, à la suite de l’accord de principe obtenu en mai dernier par le ministre chargé de l’économie, de conventions entre les quatre opérateurs. Ces conventions, prévues par la loi, doivent être transmises à l’ARCEP en même temps qu’au ministre, afin que l’Autorité en vérifie la conformité au cadre réglementaire. Elle pourra ensuite, en vertu du pouvoir que lui a confié la loi, en sanctionner, le cas échéant, le non-respect. Mais n’anticipons pas : il faut espérer que les opérateurs respecteront leurs engagements.
Je précise cependant que le dispositif que je viens de décrire ne concerne que les centres-bourgs, d’où le caractère parfois déceptif des annonces actuelles. Toutefois, la loi a prévu la couverture de 800 zones d’activité situées hors des centres-bourgs. Celles-ci ne feront pas l’objet d’une liste fixée par arrêté ministériel : les collectivités territoriales elles-mêmes adresseront leurs dossiers à l’Agence du numérique, et l’État assurera le cofinancement des opérations retenues.
Par ailleurs, je ne veux pas esquiver la responsabilité de l’ARCEP dans la déception suscitée par certaines mesures, qui explique la vivacité des réactions auxquelles nous sommes confrontés. Nous sommes bien conscients de l’écart qui peut exister entre les cartes de couverture mobile et le ressenti des citoyens. En effet, si l’on en croit ces cartes, dressées par les opérateurs, 99,98 % de la population bénéficient d’une couverture mobile. J’ai toutefois le sentiment que nous sommes très nombreux à nous situer dans les 0,02 % restants… Au reste, la couverture peut être sporadique. Je le constate moi-même lorsque je rends visite à ma mère, qui habite dans une zone littorale et pour qui cette couverture mobile représente un enjeu en termes de santé. On touche ici à la question des zones grises. Un très vaste chantier sera ouvert en 2016 afin d’améliorer ces cartes de couverture mobile. Le projet de loi pour une République numérique devrait nous permettre, s’il est adopté, de disposer d’instruments plus nombreux pour établir des cartes qui reflètent la réalité du service et de la couverture non seulement à l’extérieur, mais aussi à l’intérieur des bâtiments.
M. Jacques Stern, membre du collège de l’ARCEP. En ce qui concerne la neutralité de l’internet, je veux rappeler tout d’abord qu’en tant que régulateur technico-économique, l’ARCEP s’est saisie de cette question à l’été 2009. Elle a ainsi approfondi la définition du principe de neutralité, exploré les exceptions à ce principe et, surtout, leur encadrement très strict, de sorte que l’on peut dire de l’ARCEP qu’elle fait figure de précurseur parmi les régulateurs européens. Nous nous félicitons donc de l’adoption du règlement européen sur les télécommunications ainsi que de l’inscription du concept d’internet ouvert et de neutralité de l’internet dans le projet de loi pour une République numérique.
Ces deux textes constituent un acte fondateur très fort, puisqu’au-delà de la neutralité de l’internet – c’est-à-dire l’obligation d’acheminer les contenus indépendamment de leur origine, de leur destination et de leur nature –, le règlement reconnaît aux citoyens le droit d’accéder à toutes les données disponibles sur le réseau et de contribuer à les alimenter. C’est pourquoi il est peut-être plus judicieux de faire référence au concept d’internet ouvert, plus englobant que celui de neutralité de l’internet, qui est essentiellement technico-économique. Cet acte fondateur a une portée plus importante que les mesures prises dans ce domaine par d’autres pays, notamment les États-Unis, où la Commission fédérale des communications (FCC) a établi un acte administratif à droit constant, cet acte devant encore être validé par les juridictions fédérales.
Notre autorité se voit, en outre, confier un nouveau rôle, puisqu’elle sera la gardienne de ce droit et devra contrôler les exceptions au principe de neutralité. Ces exceptions sont au nombre de deux. La première a trait à la gestion du trafic, qui est absolument nécessaire pour faire face à des périodes de congestion du réseau. Elle doit être proportionnée, transparente et non discriminatoire et ne saurait donc être simplement fondée sur des objectifs commerciaux.
La seconde exception concerne les services gérés, qui ne sont pas une autre voie d’accès à internet, plus coûteuse et plus rapide. Il s’agit, non pas d’autoriser un réseau à deux vitesses, mais de pouvoir s’écarter de l’internet du meilleur effort pour des services qui, fonctionnellement, ont besoin d’une optimisation spécifique. En outre, la mise en place de ces services ne doit pas dégrader la qualité de l’internet général. Quels sont ces services ? Pour l’instant, nous en connaissons principalement deux : les services de télévision et de voix sur IP (VoIP), à quoi s’ajouteront probablement, dans l’avenir, les services de télémédecine.
Le règlement européen et le projet de loi sur lequel vous aurez à vous prononcer ne sont certainement que la première pierre de l’édifice. Une fois que le règlement entrera en application, nous aurons neuf mois pour établir avec nos homologues européens des lignes directrices. Vous aurez, quant à vous, en tant que parlementaires, à faire évoluer ce règlement, qui n’est qu’un premier pas.
M. Sébastien Soriano. Les moyens de l’ARCEP sont-ils suffisants ? Il m’est très difficile de vous répondre sur ce point. Si je vous dis qu’ils le sont, vous penserez qu’il faut m’en ôter ; si je vous dis qu’ils sont insuffisants, vous penserez que, comme le font habituellement les présidents d’autorité administrative, j’en réclame davantage. En revanche, je peux vous dire, de manière factuelle, que moins nous avons de moyens, plus nous travaillons sur le court terme et plus nous nous limitons à répondre aux sollicitations des acteurs, notamment économiques, puisqu’il s’agit là de notre rôle principal.
Prenons l’exemple de la bande des 700 mégahertz. Si l’on a beaucoup de moyens, on peut envisager d’imposer de nouvelles obligations de couverture en vue d’offrir un service nouveau et différent à nos concitoyens. Si l’on en a moins, on se contentera d’organiser une procédure permettant à chaque opérateur de disposer de fréquences. L’importance des moyens de l’ARCEP détermine donc sa capacité d’intervenir dans des domaines autres que les sujets strictement concurrentiels liés au fonctionnement du marché. Il se trouve que la question de la bande des 700 mégahertz était si importante que nous y avons consacré l’ensemble de nos moyens, de sorte que nous avons pu traiter le dossier dans son ensemble. Mais l’enjeu est bien celui-là : plus nous aurons de moyens, plus nous pourrons nous pencher sur la question des zones blanches ou sur celle de l’enrichissement des indicateurs de la qualité de service. Je pense en particulier à la dégradation du cuivre, sujet sur lequel M. André Chassaigne a déposé une proposition de loi, dont nous sommes parfaitement conscients et qui nous a étonnés. Avions-nous tous les indicateurs qui nous auraient permis de la détecter plus tôt ? Peut-être pas.
Mme Laure de La Raudière. J’ai écrit au président de l’ARCEP à ce sujet il y a plusieurs mois !
M. Sébastien Soriano. L’ARCEP s’est saisie de ce dossier à la mi-2014.
Nous devons donc sans doute enrichir ces indicateurs – en collaboration avec le Gouvernement puisqu’il s’agit du service universel –, mais cela représente un travail important. Quant au recensement des zones blanches, il est vrai qu’il est discutable, mais parce que, pour être précis, il nécessite un travail de fourmi.
Encore une fois, moins l’ARCEP aura de moyens, plus elle se concentrera sur le noyau dur de ses missions et sur son rôle d’arbitre des intérêts de grands opérateurs économiques, qui est au demeurant un rôle essentiel puisque les réseaux numériques sont une infrastructure d’échanges. La question des moyens de l’ARCEP est donc de nature politique et, à ce titre, elle relève du Gouvernement et du Parlement.
Prenons un autre exemple, celui de l’itinérance multiple, qui rejoint le problème des zones grises. L’ARCEP souhaiterait développer beaucoup plus, notamment dans les zones rurales – et cela concernerait 10 % à 15 % de la population –, une mutualisation très forte, quasiment un réseau unique. Mais cela nécessite beaucoup de moyens, et sans doute également de nouvelles dispositions législatives. En tout état de cause, nous mettrons ce dossier sur la table dans le cadre de la définition de nos lignes directrices sur le partage et la mutualisation des réseaux. Mais c’est un sujet au long cours pour lequel nos moyens sont aujourd’hui limités.
Vis-à-vis de La Poste, nous jouons un rôle de tiers de confiance. Le marché postal étant en déclin, il ne s’ouvrira pas massivement à la concurrence. Il s’agit donc pour nous d’accompagner ce marché en apportant de l’objectivité sur les questions des coûts, des prix et de la qualité du service universel. C’est un travail particulier, différent de celui que nous faisons dans le domaine du numérique. Nous avons le sentiment que notre accompagnement dans le domaine des tarifs est raisonnable et n’accélérera pas la migration des usages. La plupart des personnes qui utilisent encore les services postaux n’ont pas forcément d’autre choix – je pense aux usages professionnels. Nous ne nous attendons donc pas à ce que l’augmentation des prix, progressive et raisonnable, dégrade artificiellement le trafic.
En ce qui concerne les accords Schwartz, l’avis que nous avons rendu avait pour but d’apporter de l’objectivité sur un sujet, celui de la compensation versée à La Poste au titre de sa mission de service public de transport de la presse, très débattu depuis des années. Nous avons examiné les coûts de La Poste et établi de manière très claire que celle-ci était très significativement sous-compensée. Nous allons continuer à travailler sur le sujet avec le Gouvernement, dans le cadre de la mission qui a été confiée à M. Emmanuel Giannesini.
Mme Martine Lombard a répondu en grande partie à la question de la couverture et de la qualité des services mobiles. Nous sommes conscients que nos indicateurs sont insuffisants, et nous allons les enrichir. À titre d’exemple, pour vérifier la qualité de la couverture d’un réseau en service de données, on vérifie aujourd’hui que le téléchargement d’un fichier de 500 kilo-octets peut se faire en une minute : cela ne correspond plus du tout au service qu’attendent nos concitoyens. Devons-nous augmenter la taille du fichier ou diminuer la durée du téléchargement ? Quoi qu’il en soit, nous devons modifier cet indicateur. Nous allons donc enrichir ces données et déterminer des éléments d’appréciation de la couverture beaucoup plus fins, notamment en prenant en compte l’indoor et l’outdoor. De fait, la loi Macron nous permet désormais de demander beaucoup plus massivement aux opérateurs de faire réaliser des mesures par des prestataires indépendants que nous aurons choisis, sur la base d’un cahier des charges que nous aurons nous-mêmes défini. En contrôlant ainsi la fiabilité des éléments fournis par les opérateurs, nous contribuerons à l’enrichissement des indicateurs.
Enfin, la migration du cuivre vers la fibre est un chantier au long cours. Le très haut débit est un enjeu extrêmement important pour notre pays. J’entends souvent dire, carte à l’appui, que la France est en retard dans ce domaine. C’est vrai, dans la mesure où cette carte fixe le très haut débit à 30 mégabits, ce qui avantage les pays qui peuvent massivement réutiliser les infrastructures existantes du téléphone et du câble. Tel n’est pas le cas en France, où le câble ne couvre que 30 % de la population. Nous pouvons, certes, moderniser le cuivre en rapprochant les équipements actifs de l’abonné, mais l’architecture du réseau français est très défavorable, de sorte qu’on ne peut pas amener massivement du très haut débit par le cuivre. La France est donc condamnée, à l’instar des pays en voie de développement, au Frog leap. Il lui faut sauter une génération technologique, en déployant massivement la fibre optique jusqu’à l’abonné. Certes, le plan France très haut débit prévoit d’équiper, non pas l’ensemble de la population, mais environ 80 % des foyers. Cette ambition est toutefois sans équivalent en Europe, si bien que, si nous sommes actuellement en retard, nous pouvons espérer être en avance dans dix ans.
Dans le cadre de ce chantier extrêmement important, auquel participent non seulement les opérateurs privés mais aussi les collectivités territoriales à travers les réseaux d’initiative publique, nous souhaitons donner le maximum de visibilité aux acteurs, notamment en produisant des éléments de référence sur le prix du cuivre. Oui, celui-ci augmente, de manière progressive et modérée. Nous avons estimé qu’il n’était pas souhaitable de laisser la paire de cuivre baisser, comme aurait pu le commander la réduction d’un certain nombre de coûts. Dès lors, la réduction se porte vers d’autres tarifs, en vertu du principe d’orientation vers les coûts selon lequel Orange ne doit pas faire de marge dans ce domaine. Cette stabilisation du signal économique dans un sens légèrement ascendant nous paraît favorable à la transition vers le très haut débit.
Enfin, la mise en œuvre du rapport Champsaur relève du Gouvernement. La loi Macron prévoit notamment l’adoption d’un statut de « zone fibrée », qui permettra d’inciter à la bascule, c’est-à-dire au remplacement du réseau de cuivre par un réseau de fibre optique, et nous participerons de manière active à ces travaux.
Mme la présidente Frédérique Massat. Merci, monsieur Soriano, pour la concision de vos réponses. Nous vous entendrons à nouveau, sans doute au début de l’année prochaine, à l’occasion de la remise du rapport de l’ARCEP au Parlement.
*
La Commission examine ensuite, sur le rapport de M. Yves Jégo, la proposition de loi tendant à favoriser la baisse de la production de CO2 par le développement de l’effacement électrique diffus (n° 3146).
Mme la présidente Frédérique Massat. Nous poursuivons nos travaux par l’examen de la proposition de loi de M. Yves Jégo tendant à favoriser la baisse de la production de CO2 par le développement de l’effacement électrique diffus. Je vous rappelle, à ce propos, que, le 10 novembre dernier, notre commission a créé une mission d’information relative aux enjeux et aux impacts de l’effacement électrique diffus, dont M. Jégo a été nommé président et Mme Battistel rapporteure. Cette question, importante au regard des enjeux que représentent les économies d’énergie, a été évoquée à de multiples reprises au sein de notre commission et fait l’objet de plusieurs dispositions de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Aussi, je vous remercie, monsieur le rapporteur, de nous permettre de poursuivre notre réflexion sur ce sujet. Nous pourrons ainsi construire, dans les mois à venir, grâce aux expertises que vous aurez recueillies dans le cadre de la mission d’information, un dispositif qui, je n’en doute pas, sera consensuel. Il s’agit de poser les bases d’une méthode de travail et de nous fixer des rendez-vous réguliers.
M. Yves Jégo, rapporteur. La présente proposition de loi s’inscrit dans le prolongement de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, puisqu’elle reprend un amendement que j’avais déposé sur ce texte et qui avait été rejeté au milieu de la nuit, à une voix près. Il est vrai, madame la présidente, que le sujet est important, mais il est aussi complexe. C’est pourquoi il importe que nous trouvions les voies et moyens pour aboutir à un accord le plus consensuel possible, afin de faire avancer les choses.
Permettez-moi, tout d’abord, de rappeler que l’effacement électrique diffus, qui doit être distingué de l’effacement électrique industriel, consiste pour des opérateurs à effacer, grâce à une série de microcoupures, une partie de la production électrique, en particulier aux moments où celle-ci est la plus coûteuse, c’est-à-dire lors des pics de consommation. Cette pratique, outre qu’elle ne provoque aucune rupture de confort, permet aux consommateurs concernés de réaliser une économie pouvant représenter jusqu’à 10 % de leur facture. Au moment où le coût de l’énergie augmente de manière importante, en particulier pour les 8 millions de foyers français équipés de chauffage électrique, on mesure ce qu’un tel dispositif peut avoir d’avantageux.
Mais son intérêt majeur – et il est important de le souligner à quelques semaines de l’ouverture de la COP21 – est sans doute de permettre aux producteurs d’électricité d’éviter de déclencher, à certaines périodes de l’année, des moyens de production peu économes en CO2, notamment les centrales à charbon. On estime ainsi que, si le marché de l’effacement concernait, non pas 100 000 foyers, comme c’est le cas actuellement, mais 1 million, on pourrait économiser jusqu’à 2 millions de tonnes de CO2 par an. Ces chiffres sont certes sujets à discussion, mais notre mission d’information nous permettra, je l’espère, d’affiner l’analyse. Un tel dispositif a d’autant plus d’intérêt que notre mix énergétique comporte une part croissante d’énergies renouvelables, dont la production aléatoire rend la gestion des stocks de plus en plus en plus complexe. L’effacement électrique diffus constitue donc un outil supplémentaire de bonne gestion du transport et de la distribution de l’électricité.
Cette question a beaucoup mobilisé le Parlement, en particulier notre commission, depuis 2007. De texte en texte, nous progressons, et ma proposition de loi se veut un petit pas de plus, en clarifiant certaines des dispositions existantes. Néanmoins, force est de constater que les progrès accomplis ne sont pas suffisants, puisque le marché de l’effacement électrique diffus ne fonctionne pas. Seulement 100 000 foyers y participent, si bien que les opérateurs d’effacement, qui installent les boîtiers permettant de réaliser les microcoupures, ne peuvent pas développer leurs investissements. Le dernier rapport de Réseau de transport d’électricité (RTE) évalue ainsi le gain total des quinze opérateurs d’effacement à 1 783 euros…
Notre commission, en particulier votre prédécesseur, Madame la présidente, a beaucoup œuvré pour trouver le bon équilibre en la matière. Là est, en effet, l’enjeu : il s’agit de garantir une juste répartition des coûts et des bénéfices de l’opération d’effacement. Tel est, du reste, l’objet de la proposition de loi.
Le premier gain, je l’ai dit, est réalisé par le consommateur : non seulement le boîtier est installé gratuitement et son confort n’est pas affecté par les microcoupures de courant, mais il consomme moins et sa facture diminue.
Ensuite, l’opérateur d’effacement, qui prend le risque d’investir pour installer ces boîtiers, doit trouver son mode de rémunération. Cet opérateur peut être soit indépendant, soit distributeur d’énergie, soit distributeur et producteur. Il sera d’ailleurs intéressant de tous les entendre dans le cadre de la mission d’information, car on comprend bien qu’un effaceur qui est également producteur et distributeur n’a pas la même vision des choses qu’un opérateur qui n’est qu’effaceur.
Enfin, le distributeur d’énergie, que l’effacement prive d’une partie de son gain, doit bénéficier d’une compensation – et nous sommes là au cœur de la proposition de loi. Actuellement, celui qui efface l’électricité chez le particulier doit, de par la loi, verser au distributeur une somme correspondant à l’énergie qui n’a pas été consommée. Tout cela paraît parfaitement logique, mais le marché est tel qu’il ne permet pas de parvenir à un équilibre entre le versement réalisé par l’opérateur d’effacement et la rémunération que celui-ci tire de la revente de l’énergie effacée.
Notre commission a donc envisagé, un temps, que ce versement soit compensé par une prime issue de la contribution au service public de l’électricité (CSPE). Mais cette solution pouvait favoriser certaines dérives, notamment la constitution de bulles comparables à celles que nous avons connues avec le photovoltaïque. C’est pourquoi il n’est prévu, dans la proposition de loi que je vous soumets, aucun prélèvement d’aucune sorte. Je propose plutôt de prendre en compte un phénomène qui est décrit dans la loi relative à la transition énergétique mais dont on n’a pas défini les bénéficiaires. Je m’explique.
Lorsqu’on efface de l’électricité dans les phases où sa consommation est très importante, on en fait diminuer le prix global puisqu’on évite au producteur de recourir, par exemple, à des centrales à charbon. Dès lors, le distributeur bénéficie d’un gain, puisqu’il achète l’énergie moins chère. C’est l’utilisation de ce gain – que la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte évoque mais dont elle ne détermine pas la destination – qui fait l’objet de la proposition de loi. Nous proposons, en effet, que ce gain, qui pourrait avoisiner 200 millions d’euros par an, soit affecté en partie à la diminution du versement dû par les opérateurs d’effacement. Ainsi, non seulement l’opération pourrait trouver son équilibre, mais les opérateurs d’effacement sauraient où ils vont en matière tarifaire, connaîtraient leur rémunération et pourraient donc investir. Ces investissements sont nécessaires si nous voulons porter le nombre de foyers équipés d’un boîtier de 100 000 à 1 million, sur un total de 8 millions de foyers, car il n’est pas question que le consommateur paie quoi que ce soit.
En tout état de cause, je me réjouis que nous puissions aborder à nouveau le sujet, notamment dans le cadre de la mission d’information. Nous devons bannir toute arrière-pensée en la matière. Si le dispositif ne fonctionne pas, il faut que nous comprenions pourquoi. Ce qui est certain, c’est que les producteurs d’électricité, qui sollicitent souvent les pouvoirs publics pour obtenir une augmentation de leurs tarifs, n’aiment ni produire moins d’électricité, ni que le tarif global diminue du fait d’opérations qui ne seraient pas les leurs. Cette logique économique et industrielle peut, du reste, se comprendre.
Pourtant, la France est actuellement plutôt en pointe dans ce domaine, notamment parce que les entreprises d’effacement y ont développé des savoir-faire technologiques innovants. Nous devons faire en sorte que le dispositif trouve son propre équilibre, sans recourir à des financements publics. S’il permettait de réduire la production de CO2 de quelques milliers, voire de quelques millions de tonnes, il serait tout de même dommage de s’en priver ou de ne pas en accélérer le développement, faute de s’être donné les moyens d’en comprendre tous les mécanismes. C’est pourquoi, encore une fois, je me réjouis de la création de la mission d’information, qui devrait nous permettre, dans un délai bref, de tout mettre à plat et sans doute – car nous n’y échapperons pas – de revenir sur la législation actuelle pour en clarifier certains points.
Je plaide donc en faveur d’une politique des petits pas, mais de petits pas rapides, sans être précipités. Notre réflexion sur le sujet a tout de même débuté en 2007. Si nous nous en tenons à la loi relative à la transition énergétique, le dispositif devrait entrer en vigueur en 2017. Or les phénomènes s’accélèrent et, comme nous le verrons au mois de décembre, nous ne pouvons pas perdre de temps en matière de réduction des émissions de CO2.
Mme la présidente Frédérique Massat. J’ai omis de préciser dans mon introduction que nous organiserons, au mois de janvier, la réunion constitutive de la mission d’information consacrée au contrôle de l’application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Nos travaux avanceront ainsi de manière corrélée.
Mme Marie-Noëlle Battistel. Je commencerai par un bref rappel du contexte législatif. Adoptée en 2013, la loi n° 2013-312 dite « Brottes » définit, pour la première fois, un cadre pour les effacements explicites, c’est-à-dire permettant la valorisation de l’énergie effacée sur les marchés de l’énergie. Le principe d’une rémunération des fournisseurs par les opérateurs d’effacement est posé ainsi que celui du versement d’une prime aux opérateurs d’effacement, alimentée, dans un premier temps, par la CSPE au titre de leur contribution aux objectifs de la politique énergétique. La loi de 2013 a été mise en œuvre et des effacements diffus ont été valorisés sur le marché de l’énergie, même si nous convenons avec vous, monsieur le rapporteur, que cela reste insuffisant.
En janvier 2015, dans le cadre de la commission spéciale pour l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, a été organisée une table ronde sur le sujet. Tous les parlementaires présents et les entreprises du secteur invitées se sont accordés sur la nécessité d’un versement des opérateurs aux fournisseurs, la question étant dès lors de déterminer le mode de calcul d’un tel versement. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui a été définitivement adoptée en juillet dernier, modifie la loi Brottes. La prime aux opérateurs est remplacée par un système d’appel d’offres rémunérant les effacements de consommation du candidat retenu, dont les modalités sont fixées par arrêté des ministres en charge de l’énergie et de l’économie. Ce système présente l’avantage, par rapport à celui de la prime, de mieux maîtriser les charges de service public et de piloter le déploiement de la filière en volume. Le rôle des gestionnaires de réseaux dans la mise en œuvre est clarifié : RTE ne peut pas exercer l’activité d’opérateur d’effacement, car il assure la mise en œuvre technique des effacements et doit donc demeurer neutre.
Enfin, la loi relative à la transition énergétique définit deux régimes qui ne sont pas cumulables : le régime général, qui permet aux opérateurs de se rémunérer via le système d’appel d’offres, et le régime dérogatoire qui, en cas d’économie d’énergie significative, permet de répartir le paiement fait aux fournisseurs entre l’opérateur d’effacement et le gestionnaire de réseaux. Les coûts supportés par ce dernier sont ensuite couverts par la communauté des fournisseurs dans le cadre d’un règlement appelé « règlement des écarts ».
Quatre mois après l’adoption de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, Monsieur Jégo, vous déposez une proposition de loi – inspirée d’un de vos amendements , que nous avions repoussé, il est vrai, de justesse – qui revient sur certaines de ses dispositions, en particulier sur la répartition du bénéfice. Or un dispositif équilibré a été trouvé, le Gouvernement doit lancer les premiers appels d’offres et en évaluer les résultats. En outre, à ce stade, aucune évaluation nouvelle n’a été réalisée, notamment sur la question importante du report, évaluation dont les résultats peuvent s’avérer très différents selon que l’on modélise les économies d’énergie à quelques heures ou à quelques jours de l’opération d’effacement. On ne peut donc pas partir, sans étude précise, du postulat selon lequel il n’y aurait aucun report dans tout effacement. J’ajoute que l’impact escompté sur les économies d’émission de gaz à effet de serre et les gains pour le consommateur n’ont pas fait non plus l’objet d’évaluations nouvelles. Dans ce contexte et pour toutes ces raisons, vous comprendrez que nous ne puissions pas adopter cette proposition de loi.
Par ailleurs, celle-ci prévoit explicitement que de la somme versée par l’opérateur d’effacement aux fournisseurs seront déduits les gains que ces derniers retirent de l’effacement. Le paiement à la charge des opérateurs risque donc d’être suspendu dans l’attente du calcul, extrêmement complexe, de ces gains. De surcroît, la rationalité économique d’un tel dispositif est discutable puisque ce dernier revient à demander aux fournisseurs de rémunérer les opérateurs d’effacement pour la baisse des prix qu’ils engendrent. En outre, une longue suspension du versement ou un non-versement au fournisseur seraient inconstitutionnels, en vertu d’une décision du Conseil constitutionnel du 11 avril 2013 selon laquelle le versement est nécessaire pour assurer la constitutionnalité du dispositif. Enfin, la proposition de loi prévoit que le gestionnaire public du réseau de transport est l’unique acteur qui verse l’argent aux fournisseurs avant de voir ses coûts couverts selon les modalités existantes. Il joue donc le rôle de caisse : c’est lui qui supporterait l’ensemble des charges, qui pourraient être importantes.
Même si chacun est convaincu que l’effacement est vertueux et qu’il offre des perspectives écologiques et économiques intéressantes, le dispositif s’inscrit aujourd’hui dans une zone d’instabilité. Aussi le sujet mérite-t-il d’être expertisé. Vous comprendrez donc qu’à ce stade, compte tenu de la mission d’information qui a été créée, le groupe socialiste, républicain et citoyen propose la suppression de l’article unique de la proposition de loi.
M. Franck Reynier. On peut toujours trouver de bonnes raisons de ne pas agir ! Le groupe Union des démocrates et indépendants est très favorable au principe de l’effacement, qui est bénéfique pour l’environnement. À l’heure où nous accueillons la COP21, nous devons montrer à nos concitoyens que des solutions existent, dont ils peuvent être les acteurs. La proposition de loi d’Yves Jégo répond à ces attentes et à ces objectifs. La baisse de la consommation électrique est un enjeu important non seulement parce qu’elle contribue à l’efficacité énergétique, mais aussi parce qu’elle est bénéfique pour le budget des ménages. Très souvent, les logements de mauvaise qualité sont équipés de chauffage électrique. Apporter aux ménages, souvent modestes, qui les occupent des solutions qui ne leur demandent pas un investissement personnel est donc judicieux et vertueux.
Enfin, je m’étonne que ces dispositifs, favorables à l’environnement et source d’économie pour les consommateurs, n’aient pas encore été pris en compte dans le cahier des charges des fabricants de compteurs intelligents déployés sur l’ensemble du territoire. En conclusion, le groupe Union des démocrates et indépendants défend la proposition de loi présentée par M. Yves Jégo.
M. Denis Baupin. Bien entendu, le groupe écologiste partage la volonté de favoriser l’effacement. Au reste, personne ne peut s’y opposer, dans un pays où, en dépit de sa faible efficacité énergétique, le chauffage électrique occupe une place très importante et accroît notre vulnérabilité dans le domaine énergétique. L’effacement diffus peut donc être une solution. Encore faut-il que le gain énergétique de l’effacement compense l’impact écologique de la fabrication des boîtiers dont les foyers doivent être équipés. Cela mérite d’être examiné.
En outre, si nous nous accordons tous sur le principe de l’effacement, reste à savoir, dès lors qu’il n’existe pas de business model, quels sont les acteurs qui participent au financement du dispositif. Or, dans ce domaine, même après le travail réalisé dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, nous ne disposons pas d’une véritable étude d’impact comportant des tableaux clairs qui retraceraient les flux financiers, la rémunération des différents acteurs et les gains escomptables dans les hypothèses envisagées – par exemple, en portant le nombre des foyers équipés de 100 000 à 1 million. Il reviendra donc à la mission d’information de mener ces études de manière à éclairer nos décisions au moment où nous devrons trancher la question du rôle des divers acteurs. Au-delà de l’aspect législatif et réglementaire, il s’agit en effet d’encadrer un marché, dans lequel, en outre, une seule entreprise s’est, pour l’instant, véritablement positionnée. Je ne critique pas ceux qui ont pris des risques et qui ont innové dans ce domaine, mais nous devons nous interroger sur les effets d’aubaine que pourrait susciter le dispositif que nous entendons créer.
C’est pourquoi, dans l’attente des conclusions de la mission d’information, mieux vaut, me semble-t-il, adopter l’amendement de suppression de l’article unique.
M. Christophe Borgel. Je souscris entièrement à l’intervention de Mme Marie-Noëlle Battistel. Je souhaiterais cependant insister sur l’état d’esprit du groupe socialiste, républicain et citoyen : nous devons sortir de l’affrontement qui a caractérisé l’examen de cette question en séance publique et retrouver un chemin commun. L’effacement est une promesse, et la mission d’information doit nous permettre de vérifier que le modèle théorique est suffisamment fiable et que le dispositif est économe à la fois en CO2, donc favorable à l’environnement, et en énergie, donc bénéfique pour les consommateurs.
M. Alain Suguenot. Il n’est jamais trop tard pour bien faire ! Je rappelle que la loi Brottes date tout de même de 2013 et que les décrets d’application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte ne sont toujours pas publiés. Dans ce contexte, la proposition de loi de M. Yves Jégo a le mérite de recentrer le débat. On sait bien que le modèle de rémunération ne sera jamais parfait. On sait aussi que la meilleure énergie est celle qu’on ne consomme pas. Par conséquent, l’effacement devrait, à terme, se traduire par une réelle économie d’énergie. Mieux, l’électricité effacée ne devrait pas être distribuée sur le marché, et le problème de la rémunération ne se poserait pas. Il est vrai cependant que le fournisseur d’électricité verrait cela d’un très mauvais œil.
Aussi, le véritable enjeu de cette proposition de loi est-il peut-être de placer chacun face à ses responsabilités. En tout état de cause, je crains que le décret, surtout s’il tarde à paraître, ne réponde pas à l’urgence de la situation. Au reste, l’amendement de suppression déposé par nos collègues de la majorité laisse supposer – et ce n’est pas un procès d’intention que je fais à la majorité – qu’une bonne loi serait nécessairement socialiste.
Mme la présidente Frédérique Massat. Nous ferons une bonne mission d’information. Sa composition sera d’ailleurs plurielle.
M. Alain Suguenot. Dans le domaine de la transition énergétique, nous devons tous aller de l’avant. Nous savons que nous devrons nous battre contre les fournisseurs. Mais la loi doit remplir son rôle.
Mme Josette Pons. L’effacement électrique est un dispositif vertueux qui permet de réaliser des économies d’énergie, d’équilibrer le réseau en période de pointe et d’éviter ainsi les coupures d’électricité, tout en diminuant, dans une proportion qui peut atteindre 15 %, la facture du consommateur.
La loi Brottes de 2013 n’a pas, hélas ! permis à ce dispositif de se développer significativement. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a entendu remédier à cette situation en rénovant le cadre juridique applicable. Quant à la proposition de loi de M. Yves Jégo, elle a le mérite de mettre en avant l’effacement électrique diffus, qui concerne les petits consommateurs, afin de les associer plus étroitement aux objectifs de l’effacement. Alors que va s’ouvrir la COP21, il paraît opportun d’étudier ce dispositif utile sous l’aspect de la maîtrise de la consommation énergétique et du développement durable.
Cette proposition de loi s’inscrit dans le prolongement du débat qui a eu lieu lors de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. En effet, l’article 46, devenu article 168, a fait l’objet d’un vaste et long débat sur le cadre juridique de l’effacement, en particulier sur la répartition des compensations financières. Ce cadre juridique est un sujet extrêmement technique que seuls quelques spécialistes maîtrisent parfaitement.
La loi sur la transition énergétique pour la croissance verte a été adoptée il y a tout juste quatre mois, mais le décret prévu à l’article 168 n’a pas encore été publié. Certes, il peut paraître incongru de vouloir modifier un dispositif qui n’est pas encore appliqué – et dont nous devrons, du reste, surveiller l’application afin de le faire évoluer, le cas échéant, notamment sur la base des travaux de la mission d’information. De fait, eu égard aux conséquences du développement de l’effacement électrique pour notre environnement, le cadre juridique doit être encore adapté. C’est pourquoi Julien Aubert, porte-parole du groupe Les Républicains sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, avait soutenu l’amendement de M. Jégo. Aussi, le groupe Les Républicains soutient-il les objectifs de la proposition de loi.
La Commission en vient à l’examen de l’article unique de la proposition de loi.
Article unique
La Commission est saisie de l’amendement de suppression CE1 de Mme Marie-Noëlle Battistel.
M. le rapporteur. Avis défavorable. L’article unique de la proposition de loi vise, non pas à remettre en cause le dispositif prévu dans la loi relative à la transition énergétique, mais à en préciser certains points, notamment l’affectation du gain correspondant à la baisse des tarifs de l’électricité.
Cela dit, j’ai entendu les souhaits exprimés par les groupes de la majorité. En tout état de cause, je me réjouis d’avoir déposé cette proposition de loi, car, sans elle, la mission d’information n’aurait peut-être pas vu le jour. Je souhaite que cette dernière s’inscrive dans un calendrier le plus resserré possible, madame la présidente, et qu’elle soit conclusive. Elle se devra de répondre à la question suivante : pourquoi, en dépit des efforts et de la bonne volonté de chacun, le dispositif ne fonctionne-t-il pas et comment faire en sorte qu’il fonctionne ?
En conclusion, quand on ne veut pas agir, on trouve toujours des prétextes pour justifier son inaction. Le sujet est certes complexe, mais la réduction des émissions de CO2 est une urgence. Aussi, devons-nous agir plus vite, ensemble, et, à l’instar du colibri de la légende, participer à notre échelle au combat pour la planète !
La Commission adopte l’amendement.
L’article unique est ainsi supprimé.
Mme la présidente Frédérique Massat. Mes chers collègues, je vous donne rendez-vous pour l’examen du texte en séance publique et pour le début des travaux de la mission d’information.
*
Informations relatives à la commission
La commission a nommé :
– Mme Marie-Hélène Fabre rapporteure sur le projet de loi relatif aux réseaux consulaires (sous réserve de son dépôt) ;
- Mme Corinne Erhel rapporteure sur le projet de loi pour une République numérique (sous réserve de son dépôt) ;
– Mme Béatrice Santais rapporteure pour avis sur l’article 11 du projet de loi de finances rectificative pour 2015 (n° 3217).
——fpfp——
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mercredi 18 novembre 2015 à 9 h 30
Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, M. Frédéric Barbier, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Denis Baupin, M. Philippe Bies, Mme Michèle Bonneton, M. Christophe Borgel, M. Jean-Claude Bouchet, M. André Chassaigne, M. Jean-Michel Couve, Mme Fanny Dombre Coste, Mme Jeanine Dubié, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Christian Franqueville, M. Franck Gilard, M. Georges Ginesta, M. Daniel Goldberg, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, M. Antoine Herth, M. Yves Jégo, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. François de Mazières, M. Kléber Mesquida, M. Yannick Moreau, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, Mme Josette Pons, M. Dominique Potier, M. François Pupponi, M. Franck Reynier, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Michel Sordi, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Marie Tetart, M. Fabrice Verdier
Excusés. - M. Bruno Nestor Azerot, Mme Ericka Bareigts, M. Yves Blein, Mme Corinne Erhel, Mme Anne Grommerch, M. Henri Jibrayel, M. Philippe Kemel, M. Serge Letchimy, M. Bernard Reynès, M. Thierry Robert, M. Jean-Charles Taugourdeau, Mme Catherine Vautrin
Assistaient également à la réunion. - M. Dino Cinieri, M. Michel Heinrich, M. François Vannson