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Commission des affaires économiques

Mardi 29 mars 2016

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 64

Présidence de Mme Frédérique Massat, Présidente

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l’habitat durable 2

– Informations relatives à la commission 20

La commission a auditionné Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l’habitat durable.

Mme la présidente Frédérique Massat. Nous avons le plaisir d’accueillir, pour la deuxième fois, Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l’habitat durable.

Je vous remercie, Madame la ministre, d’avoir accepté de faire un tour d’horizon de la politique du logement, politique relevant de notre commission mais aussi de l’habitat durable, compétence que nous partageons avec la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. L’actualité sur ce sujet est importante. Le 14 mars, vous avez fait des annonces concernant un programme d’action sur la mobilisation du foncier, question dans laquelle certains de nos collègues ici présents sont très investis. M. Daniel Goldberg nous a présenté un rapport sur ce sujet, et M. Thierry Repentin, président de la Commission nationale de l’aménagement, de l’urbanisme et du foncier, sera devant nous le 26 avril prochain, afin de nous présenter son rapport. Des missions d’information et de contrôle ont été mises en place sur l’application de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), dont nous venons de fêter les deux ans. Nos collègues Daniel Goldberg et Jean-Marie Tétart sont co-rapporteurs d’une mission de contrôle, de même qu’Audrey Linkenheld et Éric Straumann.

Nous aurons également à examiner un certain nombre de textes, notamment le projet de loi « Égalité et citoyenneté » qui, à ce jour, comprendrait des articles concernant le logement. Ce texte n’a pas encore été présenté en conseil des ministres. Notre commission étant compétente au fond sur les questions de logement, nous souhaitons nous investir dans l’organisation des travaux sur ce futur projet de loi, pourquoi pas en créant une commission spéciale ?

Je rappelle, par ailleurs, Madame la ministre, que vous pilotez, avec Mme Ségolène Royal, ministre de l’environnement, le programme « Habiter mieux ».

Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l’habitat durable. Un important travail législatif sur les questions de logement a été mené depuis 2012. Mon action s’inscrit pleinement dans le cadre des deux textes de loi sur lesquels vous avez longuement travaillé. Elle poursuit également la démarche de simplification entreprise depuis l’an passé, avec deux textes législatifs, l’un, portant habilitation, pour réformer le financement du logement social par le réseau Action Logement, l’autre s’inscrivant dans le cadre du projet de loi Égalité et citoyenneté, à venir.

Pour vous présenter de manière sommaire mon action, celle-ci comporte trois pans. Gagner la bataille du logement dans toute sa dimension, afin que chacun puisse choisir l’endroit où il va habiter, constitue le premier pan. Le plan de relance de la construction mis en œuvre commence à porter ses fruits. Les chiffres pour 2015 et ceux du premier trimestre 2016, que je présenterai demain en conseil des ministres, sont très encourageants, alors même qu’ils couvrent une période hivernale, et tant dans la construction que dans la rénovation. En ce qui concerne la construction, d’importants dispositifs d’aide ont été mis en place. Les objectifs de construction de logements sociaux pour 2015 ont été tenus. Dans le logement privé, il faut noter l’impact du nouveau prêt à taux zéro (PTZ) ainsi que l’efficacité du dispositif Pinel.

L’entrée en vigueur de l’encadrement des loyers va faciliter l’accession à un logement abordable. Nous avons fait, la semaine dernière, un bilan d’étape des deux ans de la loi ALUR, avec un dossier de presse, pour voir où nous en sommes des mesures qui étaient d’application immédiate, des décrets qui ont été pris et de ceux qui restent en attente. Du point de vue réglementaire, d’ailleurs, nous avons également un travail important à faire sur la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. De nombreux sujets, assez complexes à traduire dans le cadre du règlement, intéressent, en effet, le ministère du logement.

Dans le cadre de la relance de la construction, l’accent est mis sur la question du foncier. La loi relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social a été adoptée fin 2012. Des rapports ont été publiés. Celui de votre collègue Daniel Goldberg pointe des évolutions importantes pour libérer du foncier. Celui que m’a remis M. Dominique Figeat, qui a travaillé avec l’ensemble des professionnels, concluait une mission qui lui avait été confiée par Mme Sylvia Pinel et M. Christian Eckert. Ces deux rapports aboutissent à des conclusions communes sur un certain nombre de points. Enfin, l’action de M. Thierry Repentin sur la mobilisation du foncier public a permis des déblocages dans pas mal d’endroits.

J’ai déjà annoncé des mesures importantes dans ce domaine. Il n’est pas temps aujourd’hui d’ouvrir le débat sur une nouvelle fiscalité foncière, mais nous avons acté certaines propositions, comme l’accès aux données en matière foncière. C’est un sujet majeur, mais l’affaire n’est pas simple, car la volonté de ne pas rendre publiques ces données perdure.

Nous poursuivons également la bataille contre les recours visant les permis de construire. Dans certains endroits, des simplifications ont permis de raccourcir considérablement les délais. Dans d’autres, la pratique du recours n’est pas toujours très saine. Il nous faudra sans doute consulter le Conseil d’État pour savoir comment avancer sur ce sujet, sans pour autant empêcher les particuliers de faire des recours. Nous sommes confrontés, en matière de logements sociaux notamment, à des gens qui se sont spécialisés dans les recours abusifs et qui arrivent encore aujourd’hui à faire pression sur les promoteurs et les bailleurs sociaux.

Je pense que nous reviendrons, au cours de cette audition, sur le financement du logement social et sur le Fonds national des aides à la pierre (FNAP). Je ne m’y attarde donc pas.

Autre thématique du logement, la rénovation est un enjeu majeur pour les ménages qui bénéficient de ces travaux, mais aussi pour l’emploi. Dans le cadre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, les objectifs de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) pour le programme Habiter mieux ont été augmentés. Ils passent, cette année, de 50 000 à 70 000 logements rénovés, soit une augmentation de 40 %, avec la volonté de passer à 100 000 logements l’an prochain. Cette augmentation est financée, et l’ANAH est en train de déployer, par territoires, le nombre de logements rénovés.

Ce programme concerne la rénovation de logements par des propriétaires bailleurs ou occupants très modestes. Nous avons constaté, en travaillant avec la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB), que l’impact était réel sur le secteur du bâtiment : ces travaux effectués sur nos territoires concernent à la fois de nombreuses entreprises du bâtiment et des publics très précarisés. Nous devons pouvoir compter sur des professionnels ; aussi des conventions départementales ont-elles été conclues entre l’ANAH et la CAPEB, qui est un énorme réseau, ainsi qu’avec la Fédération française du bâtiment.

Plus généralement, les objectifs de rénovation ont considérablement augmenté. Si les objectifs fixés par la loi ne sont pas encore atteints, il y a une forte augmentation des logements rénovés dans le parc social. J’espère pouvoir annoncer prochainement, avec la Caisse des dépôts et consignations, la création de prêts de hauts de bilan, qui permettront d’améliorer les résultats de certaines opérations et d’augmenter les objectifs de rénovation dans le logement social, pour les porter autour de 135 000, contre environ 100 000 aujourd’hui.

Enfin, le crédit d’impôt pour la transition énergétique, porté par Mme Ségolène Royal, permet d’accélérer nombre de travaux.

Parmi les autres chantiers prévus pour cette année, la réflexion sur ce que sera la future réglementation pour les bâtiments à énergie positive (BEPOS) constituera un sujet important.

L’habitat durable est un sujet qui relève de mon ministère, lequel est très sollicité pour faire vivre la notion de « ville durable », pour engager une nouvelle génération d’éco-quartiers ou d’éco-cités, en prenant en compte la longévité de l’habitat.

Les éco-matériaux font aujourd’hui l’objet de nombreux travaux, ce qui n’est pas négligeable dans la perspective de la future réglementation bas-carbone. La filière bois, par exemple, a connu une forte mobilisation, avec notamment la création, il y a deux ans, d’un comité stratégique. Celui-ci commence à produire ses effets sur l’organisation de la filière à l’échelle française, notamment pour répondre à la demande en construction, mais aussi s’agissant de sujets très techniques, comme les délais de paiement pour les préfabriqués –problème que j’essaie de résoudre en poussant Bercy à avancer sur ce sujet.

La façon dont nous donnons à voir notre conception de la ville durable à l’international est un autre aspect de notre activité. Nous avons lancé, la semaine dernière, avec Mme Ségolène Royal, le réseau français des acteurs de la ville durable, qui permettra de faire connaître bien des innovations portées aujourd’hui sur nos territoires. Un appel à manifestation d’intérêt, intitulé « Démonstrateurs industriels pour la ville durable », a été lancé, dont l’objet est de faire aider par l’État, pendant cinq ans, les territoires désireux de construire de nouveaux quartiers. Les projets présentés allaient du quartier très urbain au quartier alpin ; ils étaient portés par des bailleurs sociaux aussi bien que par des promoteurs privés, de grands groupes du bâtiment ou de l’énergie, et des groupes travaillant sur l’usage du logement.

Autre dimension importante de la politique que nous portons : la solidarité. Au passage, je rappelle que cette semaine marque la fin de la trêve hivernale pour les expulsions.

En ce qui concerne l’hébergement, 30 000 places ont été pérennisées depuis 2012, ce qui fait qu’aujourd’hui, nous sommes passés de 80 000 à 110 000 places pérennes. Comme l’an passé, qui avait vu la pérennisation de 2 000 places, nous avons obtenu, cette année, de pérenniser 2 300 places supplémentaires réparties sur l’ensemble du territoire. Plus de places pérennes, cela veut dire des centres en dur pour assurer des conditions d’accueil dignes. Cela vise également à réduire le recours à l’hébergement dans des hôtels, qui coûte beaucoup plus cher et dont l’effet social est très limité.

L’État, par ailleurs, se mobilise aujourd’hui pour développer des produits spécifiques, comme les maisons relais ou les pensions de famille, qui participent du logement social non familial, et qui répondent durablement à l’accueil et au soutien de publics très précarisés, incapables d’être autonomes.

Le plan de lutte contre la pauvreté nous avait fixé des objectifs sur lesquels nous devons avancer. Nous devons réaliser, d’ici à la fin du quinquennat, 500 places d’hébergement pour les femmes victimes de violences.

S’agissant de l’accueil des migrants, notre action est distincte de celle que nous menons pour l’hébergement. Nous mettons à l’abri les migrants qui vivaient jusqu’à présent dans la jungle de Calais. Nous avons créé plus de 109 centres d’accueil et d’orientation (CAO), répartis sur l’ensemble de la France. Nous mettons aussi à l’abri les migrants qui vivent en Île-de-France dans des campements illicites. Dans le cadre du plan de relocalisation de l’Union européenne, nous agissons également pour créer des places répondant au nombre de réfugiés qui seront relocalisés en France, à la suite de la mise en œuvre des hot spots.

Beaucoup d’évolutions législatives ont concerné les questions d’aménagement et d’urbanisme. De nouvelles règles d’urbanisme sont applicables depuis le 1er janvier, ce qui va demander un travail important pour les mettre en œuvre sur nos territoires. Par ailleurs, le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) a connu une montée en puissance. La semaine dernière, plusieurs associations d’élus m’ont fait part de l’intérêt de cet outil pour travailler sur les questions d’urbanisme à un niveau supérieur à l’échelon communal. C’est un grand succès pour cet outil, alors que nous avions, au départ, des doutes sur sa mise en œuvre.

En ce qui concerne les textes, le projet de loi réformant le réseau Action Logement a été voté à l’unanimité il y a quinze jours à l’Assemblée nationale. J’attends maintenant son inscription à l’ordre du jour du Sénat, car il faut que les choses aillent vite.

Le projet de loi Égalité et citoyenneté, qui doit être présenté en conseil des ministres le 13 avril, sera probablement examiné à l’Assemblée au mois de juin, et ce, je l’espère, dans le cadre d’une commission spéciale. Le titre II de ce texte traite du logement et de la mixité sociale, avec des dispositions visant à une attribution des logements sociaux plus transparente et plus volontairement ciblée en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville pour les publics les plus défavorisés. Des articles concernent la nouvelle politique en matière de loyers ; elle donne aux bailleurs sociaux la possibilité d’expérimenter une nouvelle répartition des loyers à l’échelle de leurs parcs. D’autres articles visent à améliorer l’application de l’article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) par un renforcement des pouvoirs de l’État. Ils tendent aussi à remédier aux effets de seuil que la loi relative à la mobilisation du foncier public a pu créer dans des communes qui ne connaissaient pas de pression en matière de logement au moment de son adoption, en 2013.

M. Philippe Bies. Je m’interroge sur la création du FNAP, et notamment sur la traduction dans le projet de décret des engagements pris par le Gouvernement lors de la discussion du projet de loi de finances (PLF). Nous avions obtenu le principe de la cogestion de ce fonds, et des assurances concernant la composition du conseil d’administration. Or, aujourd’hui, la règle de la double majorité, telle qu’elle est prévue pour les délibérations prises pour l’adoption du budget annuel, donne au collège des représentants de l’État un pouvoir de blocage. Par conséquent, les seuls vrais décideurs, comme d’habitude, seront, de fait, les directions centrales des ministères. Cela ne nous convient pas du tout.

Les premiers éléments sur la préparation du budget pour 2017 sont inquiétants pour les bailleurs puisqu’il est question d’accroître le prélèvement opéré sur les organismes HLM. Nous avons encore un peu de temps pour voir venir, mais cela n’est guère rassurant.

J’ai aussi une remarque à propos d’un engagement du Président de la République sur la baisse des taux de commissionnement des banques sur le livret A. Cette baisse est aujourd’hui effective. Elle représente, bon an, mal an, 200 millions d’euros, qui devaient être consacrés, avait dit le Président lors du congrès de l’Union sociale pour l’habitat (USH), le 24 septembre dernier, aux investissements et, éventuellement, aux baisses de loyers que vous avez vous-même évoquées et que nous examinerons dans le cadre du projet de loi Égalité et citoyenneté.

M. Philippe Le Ray. Madame la ministre, vous connaissez parfaitement votre sujet, mais vous êtes passée très vite sur certains points. Et je vous rappelle qu’avant 2012, la majorité précédente avait, elle aussi, beaucoup œuvré à la politique du logement.

Vous n’avez donné aucun chiffre. Depuis votre arrivée et celle de vos prédécesseurs au Gouvernement, nous avons ressenti un fort ralentissement de la construction dans notre pays. J’aimerais que vous vous expliquiez sur ce point.

Concernant la mobilisation foncière, quels chiffres pouvez-vous nous donner ? Peut-on réellement parler de mobilisation ? L’impact de la fiscalité a-t-il eu des conséquences directes sur cette mobilisation ?

En ce qui concerne le plan de rénovation, ne le trouvez-vous pas un peu juste, compte tenu de votre sensibilité écologiste ? Face à l’ampleur de la demande, aujourd’hui, on pouvait attendre, de la part de votre Gouvernement, plus que 100 000 logements par an.

Par ailleurs, quels sont les hauts de bilan que vous voulez renforcer pour les bailleurs sociaux, qui sont, en effet, souvent en difficulté ? S’agit-il d’apports en capitaux, de prêts, et de quels montants ?

Concernant les règles d’urbanisme, vous avez rencontré récemment les élus locaux. L’empilement des règles depuis des années commence à compliquer la tâche dans certains territoires, notamment littoraux. Vous connaissez peut-être les collectifs des « PLUmés », qui regroupent des gens parfois très modestes. Du fait de la conjugaison des lois Littoral et ALUR, et de directives telle la directive-cadre sur l’eau (DCE), des gens qui étaient propriétaires d’un bien constructible se retrouvent du jour au lendemain avec un bien qui ne l’est plus. J’aimerais avoir votre sentiment sur ce sujet.

Je souhaiterais également avoir votre avis sur la densification. Dans certains territoires, on est en train de surdensifier, et cela risque d’entraîner des problèmes à l’avenir. Mme Cécile Duflot nous avait parlé ici même de son idéal de ne plus consommer un seul mètre carré pour la construction à l’avenir. Or certains territoires plus ruraux ont moins de moyens que les agglomérations pour installer tout le monde dans les bourgs.

Enfin, les services de l’État n’hésitent pas non plus à faire des recours qui sont parfois un peu abusifs.

Mme Michèle Bonneton. Malgré les avancées obtenues avec la loi ALUR, la volonté de rénovation thermique, le chèque énergie, un nouvel urbanisme et d’autres mesures, le mal-logement demeure un problème en France.

Pour réduire les difficultés à se loger, il faudrait produire 500 000 logements par an. Partagez-vous cet objectif ? Si oui, quelles dispositions le Gouvernement entend-il mettre en place pour y parvenir ? En même temps, comment aller vers les 180 000 logements sociaux nouveaux par an dont notre pays a grandement besoin ?

La rénovation thermique de l’habitat est un enjeu considérable pour l’emploi, pour les ménages, ainsi que pour la lutte contre le changement climatique. Pouvez-vous nous donner des éléments au sujet de la rénovation thermique ? L’objectif de 380 000 rénovations thermiques en 2017 reste-t-il d’actualité ?

Malgré l’adoption de la loi ALUR, l’UFC-Que Choisir dénonce le manque de transparence dans les pratiques des agences immobilières, au détriment des locataires. Quelles mesures envisagez-vous pour faire appliquer la loi ?

Le dispositif Pinel ne risque-t-il pas de produire des logements vides, comme certains dispositifs du même type précédemment ?

La loi ALUR a prévu que le Gouvernement devait rendre, avant le 31 décembre 2014, un rapport sur l’immobilier locatif de loisir qui bénéficie du dispositif dit Censi-Bouvard, dispositif qui, pour beaucoup, ne correspond pas aux besoins. Ce rapport n’a toujours pas été publié ; peut-on l’espérer pour bientôt ?

Enfin, pourriez-vous nous brosser à grands traits les objectifs, les principales mesures, le calendrier et le mode de concertation des futures dispositions sur le logement dont vous nous avez parlé, dans le cadre de la loi Égalité et citoyenneté à venir ?

Mme Audrey Linkenheld. Bien que M. Daniel Goldberg et moi-même soyons nous-mêmes engagés dans le rapport d’application de la loi ALUR, nous sommes très heureux que vous en ayez fait le bilan des deux ans. Il est normal que le Gouvernement se préoccupe de savoir ce que deviennent les projets de loi, une fois votés.

Je suis également heureuse de vous entendre dire que vous vous inscrivez dans la continuité législative depuis 2012 et que les mesures, plans de relance, lois et autres dispositifs portent enfin leurs fruits en matière de construction et de rénovation.

Je suis particulièrement satisfaite que vous soyez aussi la ministre de l’habitat durable, dont vous avez peu parlé. Il est sans doute nécessaire de remettre en perspective les différentes lois et autres règlements qui ont été pris s’agissant notamment de la rénovation. Je ne suis pas sûre que les nombreux dispositifs soient tous lisibles, tant pour les élus locaux que pour les particuliers. Comment envisagez-vous cette mise en perspective, s’agissant notamment de la performance énergétique, dont on sait qu’elle doit entrer dans les critères de l’habitat décent ?

J’aimerais avoir votre point de vue sur la question des Roms, dont on parle moins aujourd’hui, sans doute parce que les migrants sont venus les éclipser sur la scène médiatique. Pourtant, ces hommes, ces femmes et ces enfants sont toujours là, leurs campements aussi. Quel est votre regard sur cette question ? Une circulaire ministérielle a été prise en 2012. Où en sont les travaux qui avaient été menés en leur temps, notamment par la mission nationale d’appui à la résorption des bidonvilles ? Pouvez-vous nous en dire plus sur ce sujet ?

M. Guillaume Chevrollier. Vous êtes la troisième ministre du logement depuis 2012 et la bataille du logement a plus profité au logement social qu’au secteur privé. Or il est nécessaire de maintenir un équilibre entre les deux. Le secteur privé est primordial pour fixer les populations et permettre aux familles de se constituer un capital pour l’avenir, et cela nécessite des lois pragmatiques et non idéologiques. Serez-vous, comme Mme Cécile Duflot avec la loi ALUR, une ministre pétrie d’idéologie, qui fera de grands discours et causera beaucoup de dégâts psychologiques sur le marché, pour peu de résultats et une loi très faiblement mise en œuvre ?

En ce qui concerne la fiscalité liée au logement, l’idée circule depuis quelques années que l’on pourrait taxer les logements des propriétaires qui ont terminé de payer leur résidence principale. Cette idée inquiète légitimement ceux qui veulent investir dans la pierre. Quelle est votre position sur ce sujet ?

Par ailleurs, allez-vous prendre des mesures de simplification pour l’instruction des permis de construire ? Pour l’instant, on ne peut pas instruire de permis de construire dans le cadre de permis d’aménager tant que les travaux provisoires ne sont pas réalisés. Allez-vous agir dans ce domaine ? Ce serait un moyen, pour les maîtres d’ouvrage, d’accélérer la réalisation des projets.

Mme Brigitte Allain. Avant la loi ALUR, les seules constructions possibles dans les zones agricoles, naturelles et forestières étaient des installations nécessaires à l’exploitation agricole. Les extensions des bâtiments existants étaient donc interdites, sauf lorsqu’elles étaient nécessaires à l’exploitation. La loi ALUR et la loi d’avenir pour l’agriculture, tout en maintenant le caractère exceptionnel du recours aux secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées (STECAL), ont introduit une certaine souplesse en rendant possible, sous certaines conditions, l’extension de ces bâtiments.

Tous les bâtiments existants à l’usage d’habitation situés en zone A ou N peuvent désormais faire l’objet d’une extension, mais elle est encadrée. D’une part, elle ne doit pas compromettre l’activité agricole ou la qualité paysagère du site. D’autre part, le règlement de la zone PLU concernée doit préciser les conditions qui permettent d’assurer l’insertion de ces extensions dans l’environnement, et donc, une meilleure intégration paysagère de l’ensemble. Tous les autres bâtiments existants situés en zone A ou N ne peuvent faire l’objet d’aucune extension, sauf s’il s’agit de constructions nécessaires à l’exploitation.

Peut-on considérer que la création d’une piscine complétant un aménagement de gîte rural, dans une ferme pratiquant l’agrotourisme, est une extension pouvant être reconnue comme nécessaire à l’exploitation, dans un département, comme celui de la Dordogne, réputé tant pour ses étés chauds que pour son accueil ou son patrimoine riche et exceptionnel ? Cette question m’a été posée par un de mes concitoyens et j’aimerais pouvoir lui répondre.

M. Hervé Pellois. L’interdiction faite par la loi ALUR de construire en dehors de l’enveloppe urbaine des centres-villes ou des bourgs fragilise le développement équilibré de certains de nos territoires. Permettre aux dents creuses des hameaux de devenir constructibles, tout en poursuivant les efforts de réduction de la taille des parcelles permettrait de densifier et de préserver les paysages dans le sens voulu par la loi. Cela aurait plusieurs conséquences positives sur le soutien au secteur de la construction et à l’emploi, comme la possibilité de construire des logements sociaux en dehors des bourgs-centres et des centres-villes pour une meilleure mixité sociale, et la réduction du recours aux lotissements, grands consommateurs de terres agricoles.

Par ailleurs, les dernières lois sur le logement renforcent toutes le rôle des communautés d’agglomération et des communautés de communes en matière d’habitat et de stratégie de peuplement. Pour autant, ce sont toujours les communes qui restent sanctionnables en cas de non-respect des obligations de production de logements sociaux. Certaines communes, notamment en Bretagne, rencontrent des difficultés qui vous ont été rapportées par le Club Décentralisation et Habitat Bretagne. Envisagez-vous d’assouplir la loi afin que ces communes puissent remplir leurs obligations au niveau intercommunal si cela n’est pas possible au plan local ?

M. Jean-Claude Mathis. Le Réseau national des aménageurs vous a remis, le 8 mars dernier, un rapport intitulé « Coproduire l’aménagement ». Ce document formule des propositions pour élaborer collectivement des solutions permettant la construction de logements et d’habitat durable respectueux de l’environnement et œuvrant à un meilleur équilibre social.

Vous avez souhaité introduire davantage de collaboration aux différentes étapes des projets d’aménagement, poursuivre l’adaptation des supports juridiques pour mieux intégrer les différents acteurs dans la démarche d’aménagement, optimiser les opérations par le développement d’une meilleure stratégie foncière et développer l’innovation au service de l’aménagement. L’idée de réunir tous les acteurs de l’aménagement opérationnel, quel que soit leur statut, public, parapublic ou privé, le volume de leurs opérations ou leurs territoires d’intervention, est bonne. Comment et dans quels délais comptez-vous la concrétiser ?

Par ailleurs, quelles solutions innovantes pourriez-vous également mettre en œuvre ?

Mme Jacqueline Maquet. Avec certains de mes collègues, nous avons eu l’occasion de travailler sur les dispositions du projet de loi Égalité et citoyenneté qui concernent le logement. Ce texte est complémentaire de la loi ALUR et se concentre principalement sur la question de la mixité sociale et sur l’attribution de logements sociaux. Il fait suite au comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté (CIEC) du 6 mars 2015 sur la ghettoïsation de certains quartiers.

Il importe de se concentrer sur les dispositions qui ont été adoptées depuis 2012. Je pense notamment aux sanctions contre les communes qui ne respectent pas la loi SRU. Je pense également aux préfets qui ne jouent pas le jeu dans certaines zones tendues. Il faut tout simplement faire appliquer la loi et sanctionner un peu plus.

S’agissant des places au titre du droit au logement opposable (DALO) relevant du contingent préfectoral, il faut arrêter de les attribuer dans des quartiers qui comptent déjà plus de 50 % de logements sociaux. Une commune ne doit pas non plus construire que des PLS (prêts locatifs sociaux) pour atteindre les 25 % de logements sociaux.

Actuellement, la loi prévoit de bons dispositifs pour la mixité sociale dans les quartiers. Il faut les appliquer. Je ferai une suggestion, qui n’apparaît pas dans le futur texte : il conviendrait de réformer les commissions d’attribution de logements et de développer l’interbailleur, avec des cartographies du parc social. Qu’en pensez-vous, Madame la ministre ?

Mme Marie-Hélène Fabre. La loi de finances pour 2016 a étendu l’abattement de 30 % sur la base d’imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties dont bénéficient les bailleurs sociaux pour leur patrimoine situé en zone urbaine sensible, aux 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville. L’absence de compensation par l’État de l’extension de cet abattement se révèle localement difficile pour certaines collectivités, qui doivent éponger un manque à gagner supplémentaire.

Si l’objectif de cette mesure est méritoire, le dispositif actuel n’est compensé que dans les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) anciennement situés en zone urbaine sensible, non dans ceux ou celles dont les quartiers sont éligibles aux contrats de ville. Dans ce cas, aucune mesure compensatoire n’est, à ce jour, envisagée, et cet effort repose uniquement sur une ponction du budget des collectivités concernées. Comment comptez-vous remédier à l’iniquité de cette situation ?

M. Daniel Goldberg. Je voudrais d’abord rassurer notre collègue Guillaume Chevrollier : 80 % des dispositions de la loi ALUR sont aujourd’hui en application et 95 % le seront avant l’été.

En ce qui concerne l’habitat indigne, parfois lié aux questions de sécurité dans certains quartiers, il est sans doute nécessaire d’engager les collectivités à être encore plus efficaces et de leur en donner pleinement les moyens. De ce point de vue, des dispositifs ont été votés, mais, à ce jour, ils ne sont pas appliqués. Ainsi, la déclaration de mise en location et le permis de diviser sont, selon moi, deux dispositifs importants, qui donneraient aux collectivités les moyens d’avoir une plus grande prise sur le bâti de leurs communes.

Il serait également nécessaire de faire un bilan du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD), lancé lors de la précédente législature dans le cadre de la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion (MOLLE), pour savoir ce qui a pu être engagé, sachant que la reconstruction de la ville sur la ville, la lutte contre les marchands de sommeil et une meilleure maîtrise du bâti sont des objectifs importants.

Par ailleurs, des mesures prudentielles sont aujourd’hui en discussion au comité de Bâle suite à la crise des subprimes. Il semblerait que notre modèle français du taux du crédit immobilier soit mis à mal et que l’on veuille nous appliquer le modèle anglo-saxon, avec des crédits à taux variable, voire à taux variable non capé, assortis d’un affaiblissement de la procédure de cautionnement par rapport aux hypothèques classiques. Sachant que ce ne sont pas les États qui négocient, mais les banques centrales, comptez-vous avoir un contact avec ceux qui négocient actuellement, non pas au nom de la France, mais quasiment en notre nom du point de vue des autres banques centrales européennes ?

Mme Marie-Noëlle Battistel. Le tourisme est devenu la première richesse économique d’une grande partie des territoires de montagne. Or la moitié du parc d’hébergement touristique a plus de trente ans et est souvent mal entretenu. Parallèlement, les attentes de la clientèle ont évolué, et il y a de plus en plus de « lits froids ».

Ce sujet est devenu un enjeu économique central des stations de ski. Aujourd’hui, l’avenir de plus en plus de résidences de tourisme est incertain, notamment dans le tourisme social, et la capacité d’accueil en lits marchands diminue d’année en année, malgré la mise en place, par la loi SRU de 2000, de la procédure ORIL (Opérations de réhabilitation de l’immobilier de loisir) et de l’engagement de la Caisse des dépôts. Les dispositifs de défiscalisation centrés sur le neuf, qui devaient également impulser des opérations de revitalisation du tourisme, n’ont finalement pas porté les fruits espérés.

Devant ce constat, que pensez-vous de l’idée de transférer la fiscalité incitative prévue par le dispositif Censi-Bouvard de la construction neuve vers la réhabilitation ? Sinon, quelle action comptez-vous mettre en œuvre en faveur de la réhabilitation de l’immobilier de loisir, afin d’enrayer le syndrome des volets clos en montagne et de donner plus de visibilité aux investisseurs, qui montent leurs projets sur les domaines skiables en fonction du nombre de lits qu’ils peuvent attendre ? Le problème du logement des saisonniers pourrait, de surcroît, être résolu par ces dispositifs.

S’agissant des hébergements réservés aux femmes victimes de violences, qui restent encore à créer, j’ai noté qu’ils seraient construits avant la fin de l’année.

M. Lionel Tardy. Le passage des PLU aux PLUI pose des problèmes d’application, notamment le changement de zonage pour certains propriétaires, et ce, pour deux raisons. La première, c’est que le document d’urbanisme est révisé plus tôt que ce qui était initialement prévu. La deuxième est que les habitants d’une commune ont l’impression que le centre de décision est trop éloigné. Que comptez-vous faire à ce sujet ?

La taxation du loyer fictif semble revenir sur la table. Pouvez-vous nous confirmer une nouvelle fois que cette idée n’est pas envisagée par le Gouvernement ?

M. Jean-Luc Laurent. L’encadrement des loyers est particulièrement nécessaire en Île-de-France, au regard de la tension sur le logement et de la cherté des loyers. À cet égard, on constate, dans le département du Val-de-Marne comme dans ceux de la petite couronne, une panne des remontées d’informations, qui empêche l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne (OLAP) de faire le travail préalable à la mise en œuvre de l’encadrement des loyers. Quelles dispositions comptez-vous prendre concrètement pour que l’encadrement des loyers, qui a été voté par le Parlement, devienne effectif le plus rapidement possible ?

Lorsque M. Jean-Louis Borloo était à la tête du ministère, nous avions obtenu la création d’un établissement public foncier (EPF) d’État en Île-de-France pour mobiliser le foncier, qui existe, afin de favoriser le développement économique et l’implantation d’entreprises, et fournir des terrains aux côtés de maires bâtisseurs – il en existe aussi – pour construire du logement diversifié. Lorsque Mme Cécile Duflot était ministre, nous avions milité, en particulier M. Daniel Goldberg et moi-même, pour la création d’un EPF unique, c’est-à-dire pour passer de trois EPF départementaux et un EPF d’Île-de-France à un seul établissement public afin d’avoir un dispositif simple, pratique et plus efficace.

Cet EPF unique est devenu effectif depuis début janvier. Quelle est l’intention de l’État au regard des objectifs de construction en Île-de-France ? Quelle orientation fixez-vous à cet EPF d’État, tant du point de vue du développement économique et de l’implantation d’entreprises que du logement diversifié ? Je rappelle que le schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF) avait fixé à 30 % minimum l’effort en matière de diversification, avec une production de logements sociaux. Une lettre de mission existe-t-elle, qui permette d’y voir clair en cette période ?

Mme Annick Le Loch. Je relaie une question qui m’a été posée par la présidente de l’office public d’aménagement et de construction (OPAC) de ma circonscription.

Les logements sociaux sont attribués sous certaines conditions de ressources. Est actuellement pris en compte le revenu fiscal de référence de chaque personne vivant au foyer figurant sur l’avis d’imposition de l’année n-2, ou de l’année n-1 lorsque les ressources concernées ont diminué d’au moins 10 % par rapport à l’année n-2. Il est donc aujourd’hui impossible d’attribuer un logement locatif à un ménage qui subit une chute brutale de revenu en cours d’année, à la suite d’une perte d’emploi ou d’un accident de la vie, par exemple.

S’il était possible de prendre en compte l’année n, cela éviterait d’aggraver plus longtemps les difficultés financières de ces familles, qui se trouvent très souvent en situation de surendettement. Qu’en pensez-vous, Madame la ministre ?

Mme la présidente Frédérique Massat. Quel lien votre ministère a-t-il avec la relocalisation des migrants ? Quelles sont vos responsabilités à ce niveau ? Les territoires qui attendent d’accueillir des migrants peuvent-ils vous contacter ? Nous aimerions plus de lisibilité sur l’action du Gouvernement et de votre ministère dans ce domaine.

Mme la ministre. Je commencerai par le financement du logement social, et notamment la création du FNAP.

L’objectif du FNAP était de sécuriser les fonds pour avoir de la visibilité, éviter d’être tributaires de contingences budgétaires et veiller à ce que l’argent du logement social aille bien au logement social. La gouvernance devait effectivement en être partagée. C’est bien l’esprit dans lequel a été élaborée la loi de finances, avec la volonté que ce soit bien un établissement de l’État qui gère le fonds. La question qui fait aujourd’hui débat est celle de la double majorité de l’État. Bien qu’il s’agisse d’un établissement public de l’État, il nous faut parvenir à une véritable cogestion, ce qui explique que nous ayons des visions qui ne sont pas encore tout à fait concordantes.

Cela étant, nous voulons que la programmation, au sein du FNAP, soit collégiale : services de l’État, collectivités territoriales et bailleurs. Il me semble extrêmement important que ce fonds ne soit pas une simple chambre d’enregistrement de la programmation. Chaque acteur aura son rôle à jouer.

Ensuite, pour vous assurer que nous avons compris les difficultés actuelles, sachez que le décret n’est pas encore envoyé au Conseil d’État. Nous avons donc encore des marges de manœuvre pour arriver à trouver des points de concordance. Cependant, s’agissant d’un établissement public de l’État, il est normal que l’État cherche à pouvoir tenir ses engagements. L’objectif est que le FNAP soit effectif au second semestre 2016.

Les services de Bercy réfléchissent en ce moment à la baisse du taux de commissionnement, l’objectif étant de faire baisser les loyers. La situation devrait se débloquer dans les prochains jours.

En ce qui concerne le budget pour 2017, je pense qu’il est un peu trop tôt pour en discuter aujourd’hui.

Les aides de hauts de bilan envisagées sont des prêts sur vingt ans. Nous allons mettre en place un système avec la Caisse des dépôts. J’espère pouvoir faire une annonce dans les semaines qui viennent, pour l’ensemble des bailleurs sociaux. Nous avons également engagé une discussion avec Action Logement pour développer un prêt supplémentaire, ce qui permettrait une amélioration des bilans pour ces programmes.

S’agissant des chiffres de la construction, ils ont baissé en 2011. Le dispositif Scellier avait considérablement dopé les chiffres, mais il faut se demander à quel prix pour les territoires qui, aujourd’hui, ne savent pas quoi faire de ces logements. Vous avez sans doute tous lu l’article sur la commune de Saint-Gaudens ! Que faire de tous ces bâtis vides qui ne répondent pas à un besoin local, qui ont poussé des gens au surendettement et mis une commune en grande difficulté ?

On a observé une nette reprise des chiffres de la construction depuis le troisième trimestre 2015. Les derniers chiffres ont été publiés vendredi dernier par le Commissariat général au développement durable. Les autorisations ont augmenté de 5 % en trois mois et de 7 % en un an. Pour 2016, les autorisations de mise en chantier ont augmenté de 2,5 % sur la période hivernale. Nous attendons les chiffres du deuxième trimestre. Le logement locatif connaît une reprise particulièrement forte, avec une augmentation de 11 % pour les autorisations et de 7 % pour les mises en chantier.

Ces chiffres sont plutôt bons ; reste à savoir si le mouvement va se poursuivre. Pour avoir visité, la semaine dernière, plusieurs entreprises, je puis vous dire que le logement repart vraiment à la hausse. Par contre, le secteur des infrastructures et des travaux publics repart beaucoup moins bien.

S’agissant de la mobilisation foncière, M. Thierry Repentin, que vous allez recevoir prochainement, vous donnera sans doute des réponses concernant celle du foncier public, mise en œuvre à la suite de la loi de 2013. En 2015, 71 terrains ont été vendus, avec ou sans décote, dont 37 propriétés de l’État, 26 propriétés de la SNCF, le reste provenant de la Société de valorisation foncière et immobilière (SOVAFIM) ou d’établissements de santé. Depuis 2013, 31 terrains ont bénéficié d’une décote, ce qui représente un montant total de 77 millions d’euros, le taux moyen de la décote étant de 60 %.

Certains sujets sont portés à la Commission nationale de l’aménagement, de l’urbanisme et du foncier (CNAUF). Je ne vous cache pas qu’en ce qui concerne certains terrains, nous avons des discussions, que j’essaie de mener avec M. Thierry Repentin, lorsque nous avons affaire à d’autres ministères qui ne veulent pas appliquer les décotes. Nous tenons bon, et cela nous permet d’avancer dans des zones territoriales très tendues ou lorsque le foncier est très cher, comme c’est le cas en Savoie et en Haute-Savoie.

Plus généralement, la loi ALUR a renforcé l’action des établissements publics fonciers. À la suite de la réorganisation des régions, nous avons lancé un diagnostic territorial sur cette question. Il nous faut, en effet, savoir comment couvrir aujourd’hui chaque territoire de nos régions d’établissements publics fonciers, soit d’État, soit locaux, et éviter la concurrence entre les territoires. Le diagnostic est en cours pour les cinq régions concernées.

J’en profite pour répondre à la question de M. Jean-Luc Laurent concernant ce très bel établissement public foncier d’Île-de-France (EPFIF), obtenu après des années de travail acharné pour montrer qu’il était plus utile d’avoir un seul établissement au niveau régional que quatre répartis sur tout le territoire. Le programme pluriannuel d’intervention (PPI) est en cours d’examen. L’État a donné comme orientations à l’EPFIF de créer plus de 12 000 logements par an. Dans ce cadre, la règle, pour l’EPFIF, était de construire 30 % de logements sociaux, et 50 % dans les communes carencées. Les critères fixés dans les autres départements allant parfois au-delà de ceux de l’EPFIF, un travail est en cours pour harmoniser les taux. En Île-de-France, il y a des territoires très urbains et d’autres très ruraux, et aujourd’hui, certaines communes très rurales veulent utiliser cet outil afin de s’orienter vers des productions très particulières.

L’EPFIF a deux orientations : la mobilisation du foncier pour développer l’activité économique, s’agissant notamment du remembrement de friches industrielles et de friches économiques pas très bien réparties, et la construction de logements sociaux et privés. L’Établissement a connu quelques déconvenues avec des terrains qu’il a portés pendant plusieurs années, puis revendus pour réaliser des programmes de logements. Or ces programmes ont été arrêtés par de nouvelles majorités issues des élections municipales. Il a donc fallu rappeler à l’ensemble des communes le coût du portage foncier. Ce portage n’est pas gratuit, la dépollution des terrains non plus. C’est précisément parce que cela coûte très cher que l’on a créé les établissements publics fonciers. Cela étant, aujourd’hui, les choses sont à peu près rentrées dans l’ordre.

Vous m’avez interrogée sur mes ambitions en matière de rénovation des logements. Je suis partisane de la fixation d’objectifs importants, car la rénovation permet de limiter les gaz à effet de serre et de faire du bien aux ménages en réduisant considérablement leur facture énergétique. En outre, elle crée de l’emploi local. De nombreuses entreprises sont, à ce jour, très engagées sur ce sujet.

Les objectifs que je me suis fixés concernent plusieurs secteurs. D’abord, la rénovation des logements des ménages modestes à travers l’action de l’ANAH en direction des propriétaires occupants et bailleurs. L’objectif était, pour 2014 et 2015, de 50 000 rénovations, contre 12 500 en 2012, ce qui montre la montée en puissance du programme Habiter mieux depuis 2012. Cette année, l’objectif est de 70 000 rénovations.

Ces travaux s’adressent aux ménages modestes, concernent tous les territoires et toutes les régions. Beaucoup sont conduits en zone rurale ou périurbaine, avec une forte intervention dans les zones pavillonnaires et les maisons individuelles, notamment sur des maisons individuelles des années quatre-vingt. J’ai visité, il y a quinze jours, une maison datant de 1984, dont les occupants paient une facture d’énergie s’élevant à 3 000 euros par an. Dans un lotissement de 20 maisons identiques, je vous laisse imaginer la situation, dans un secteur où le taux d’emploi n’est pas très bon.

Les objectifs de l’ANAH ont donc été accrus, ainsi que ceux des bailleurs sociaux avec les prêts de hauts de bilan. Concernant les travaux de rénovation pour les ménages « classiques », c’est-à-dire ceux qui ne sont pas particulièrement modestes, le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) s’élève à 2 milliards d’euros par an, ce qui n’est pas négligeable.

La montée en puissance doit concerner l’ensemble du secteur de la rénovation, y compris les professionnels. L’an passé, un processus de labellisation « Reconnu garant de l’environnement » (RGE), a été lancé à destination des entreprises. Aujourd’hui, 60 000 entreprises sont labellisées RGE, ce qui représente une grande partie du secteur. Ce label assure aux particuliers la qualité des travaux, le respect du cahier des charges, et leur évite toute déconvenue. Nous agissons en lien avec les grandes fédérations, comme la Fédération française du bâtiment et la CAPEB. L’an passé également, a été lancé le programme d’action pour la qualité de la construction et la transition énergétique (PACTE), qui veille au respect des règles de l’art par les professionnels dans tout le secteur de la construction et de la rénovation. Car, derrière les crédits d’impôts, subventions et aides aux ménages, il y a aussi une filière industrielle que nous devons mettre en mouvement.

Les règles d’urbanisme suscitent beaucoup de questions, en particulier les dents creuses et la loi Littoral. S’agissant de cette dernière, la loi ALUR n’a rien apporté de nouveau. Elle a simplement rappelé les outils qui pouvaient être utilisés pour la construction dans ces secteurs, et notamment les STECAL.

Néanmoins, vous êtes nombreux à m’avoir sollicitée ces derniers temps sur ce sujet, en particulier les élus de Bretagne. Nous devons avoir une discussion technique en la matière, et voir la façon dont sont appliqués ces dispositifs au plan local. Rappelons tout de même que certains hameaux n’ont pas vocation à être densifiés puisque les documents d’urbanisme ne l’avaient pas prévu. En l’occurrence, les gens n’ont pas été « PLUmés ». D’autres endroits demandent que nous y travaillions ensemble. La direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) a déjà donné à plusieurs reprises des instructions pour faire une analyse plus fine de la façon dont les choses se passent.

En ce qui concerne la densification, j’ai les mêmes objectifs qu’un grand nombre d’entre vous. Il faut arrêter de consommer du foncier, comme nous l’avons fait dans notre pays à tort et à travers depuis si longtemps, en particulier le foncier agricole. Il est aujourd’hui extrêmement difficile de trouver du foncier agricole de qualité pour y exercer des activités agricoles. De surcroît, on rogne sur les espaces verts, alors que nos concitoyens nous en demandent toujours plus. C’est pourquoi nous avons un objectif d’intensification plutôt que de densification. Il faut que nous arrivions à recycler du foncier.

Cela n’est pas sans poser de lourds problèmes à l’État et aux collectivités. Recycler du foncier pollué, s’agissant notamment de friches industrielles utilisées pendant un siècle, conduit à faire des travaux très importants, y compris en termes d’innovation. Il est néanmoins possible de faire de la densification importante qui soit acceptable, pourvu qu’elle soit intelligente. Les urbanistes et les architectes savent aujourd’hui construire de façon densifiée en répondant à des besoins de logement et d’activité économique, sans trop artificialiser les sols. On a pu voir, lors de catastrophes naturelles, les dégâts dus à une trop forte artificialisation des sols.

Nous devons être capables de concilier nos objectifs d’intensification et de construction, mais ce n’est pas en allant toujours plus loin et en consommant toujours plus que nous y parviendrons. D’autant que des phénomènes nouveaux apparaissent dans les zones périurbaines, tel du mal-vivre dans les lotissements. Le modèle du lotissement n’est pas toujours celui qui répond le mieux aux besoins d’aujourd’hui, y compris en termes de coût et de sociabilité. Certains lotissements sont en déshérence, parce qu’ils ne sont pas bien reliés en termes d’aménagement urbain.

Il faut réfléchir, notamment avec le réseau des aménageurs, à la façon dont on peut défendre ces projets d’aménagement qui répondent à des besoins forts, en limitant au maximum la consommation foncière tout en trouvant des espaces de vie importants. Cela implique que les propositions faites aux élus soient moins formatées. Je pense qu’on peut vraiment marier densification et qualité de vie.

Du reste, là où on vit mal, le problème, souvent, n’est pas celui de la densification, mais plutôt celui de la mobilité. Personnellement, je viens d’un milieu très urbain. Je peux vous dire que dans certains quartiers d’Île-de-France, il faut plus de vingt minutes pour atteindre une rue où passe un bus. On peut comprendre qu’on y vive mal. Et dire qu’une simple marche à pied aurait permis de se rendre compte des maux dont souffrirait le quartier avant même qu’il ne soit construit !

Pour répondre à la question de Mme Michèle Bonneton, le Gouvernement, en lien avec l’ensemble des acteurs du logement et de l’habitat, a fixé un objectif de construction de 500 000 logements par an. C’était l’un des rares points d’accord, en 2012, dans le cadre des grands débats qui s’étaient tenus sur le logement. J’estime qu’il est important de continuer à afficher des objectifs, même si on ne les atteint pas, car ils montrent la voie à suivre.

Le nombre de logements sociaux agréés pour 2015 est de 110 000. Si l’on prend en compte les logements de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et les logements en outre-mer, il est, de mémoire, de 125 000. Il s’agit d’une forte progression. Nous devons continuer dans ce sens, pour répondre à la demande.

En ce qui concerne le dispositif Pinel, je rappelle qu’il ne concerne pas l’ensemble du territoire. Il est zoné. Les préfets peuvent donner leur autorisation en zone B2 si une réelle demande locale le justifie. J’ai rappelé à l’ensemble des préfets qu’ils devaient veiller attentivement à cela. Il faut faire attention, notamment sur des territoires en déprise, où des logements anciens vides nécessiteraient une réhabilitation, à ne pas faire, à côté, du dispositif Pinel qui ajouterait de la difficulté. Cela étant, ce dispositif a essentiellement fonctionné dans les zones où il y avait une forte demande de logements.

S’agissant d’un autre dispositif, le Censi-Bouvard, le rapport d’évaluation, transmis le 16 novembre dernier, laisse entendre qu’une reconduction à l’identique ne serait pas la plus opportune. En zone de montagne, sa réforme et son application à la réhabilitation sont à l’étude pour déterminer s’il pourrait constituer une solution. J’y suis plutôt favorable. L’étude porte essentiellement sur le plan financier. Ce sujet était au menu du Conseil national de la montagne, qui a eu lieu fin septembre. Toute la question est de savoir si nous aurons le temps d’élaborer une loi sur la montagne. En principe, nous pourrons le faire, et cette disposition sera intégrée dans le texte. Aujourd’hui, nous en sommes aux évaluations financières. Il est vrai, Madame Marie-Noëlle Battistel, que le bâti concerné nécessite une importante rénovation.

Je ne peux répondre ici à la question très précise que vous m’avez posée, Madame Brigitte Allain, à propos de la création d’une piscine. Je m’engage à vous transmettre, dans les plus brefs délais, une réponse écrite.

S’agissant des pratiques des agents immobiliers, l’UFC-Que Choisir a mené une enquête, dont les conclusions montrent que 90 % des professionnels respectent l’encadrement des honoraires. Cette enquête montre aussi que certains d’entre eux ne respectent pas des obligations légales qui datent de vingt-cinq ans. Ce n’est donc pas seulement une affaire d’encadrement des honoraires.

Il est très important de valoriser tous les aspects de la modernisation dont cette profession a été l’objet et qui sont issus du travail législatif que vous avez mené dans le cadre de la loi ALUR : adoption du code de déontologie, parution du décret relatif à la formation continue des professionnels de l’immobilier, mise en place du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières (CNTGI), premier organisme permettant le dialogue entre les locataires et les professionnels de l’immobilier. J’ai rencontré tous les professionnels. Ils se disent tous très heureux de la création de cette instance, parce qu’ils ne pouvaient pas, jusqu’à présent, dialoguer entre eux. Ils sont également heureux d’être associés au travail réglementaire, même si nous ne suivons pas obligatoirement leur avis, qu’il est malgré tout très important pour nous d’avoir.

Certes, il reste encore des choses à faire, en particulier pour améliorer la transparence des pratiques des agences. Toutefois, sans nier les résultats de l’enquête de l’UFC-Que Choisir, qui me conduiront certainement à demander des contrôles supplémentaires à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), il faut aussi montrer que nous progressons, et souligner que cela fait suite à un débat législatif extrêmement important.

J’en arrive à la question de Madame Audrey Linkenheld sur l’habitat durable, la rénovation et la lisibilité des dispositifs. Nous devons travailler, en partenariat avec les collectivités, à rendre plus lisibles les dispositifs d’aide mis en œuvre par le Gouvernement et par les collectivités territoriales.

En ce qui concerne la rénovation et les éco-prêts, il existe une plateforme téléphonique gérée par l’Agence départementale d’information sur le logement (ADIL). Nous devons maintenant rendre plus lisibles les effets de la rénovation pour les particuliers, tant sur leur pouvoir d’achat que sur la valorisation de leur patrimoine, sans oublier l’impact sur l’emploi.

Actuellement, les Roms occupent moins l’espace médiatique, mais la question de leur hébergement occupe beaucoup mon ministère. Une mission nationale d’appui à la résorption des bidonvilles, confiée à Adoma, est en cours. Par ailleurs, une stratégie régionale a été adoptée en Île-de-France, à la suite des travaux menés par la préfecture de Paris et
d’Île-de-France et l’ensemble des associations, afin de résorber les campements insalubres. J’ai moi-même validé cette stratégie régionale, et nous avons demandé à la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (DIHAL) et à M. Sylvain Mathieu, son représentant, de travailler à une duplication de sa stratégie pour l’ensemble des régions.

Cette stratégie régionale permet de parler de tous les sujets : les difficultés rencontrées par les collectivités en matière d’accueil, les expulsions, l’insalubrité ou la scolarisation. Il faut aussi penser à ce qu’il faudra faire après le démantèlement des campements, c’est-à-dire aux programmes d’insertion et au logement. Cette stratégie a été mise en œuvre à l’issue de réunions importantes entre la préfecture et les associations, dont l’organisation a nécessité plus de cinq ans. J’ai quelques inquiétudes concernant certaines collectivités, mais il y a des fonds européens qui ne demandent qu’à être employés et qui peuvent les aider en la matière.

En ce qui concerne l’instruction des permis de construire, Monsieur Guillaume Chevrollier, je vous ferai parvenir une réponse écrite. Sachez que parmi les mesures de simplification, il y a un raccourcissement des délais d’examen et une réduction des obligations en matière de stationnement. J’ai signé une ordonnance pour regrouper les études d’impact des projets, ce qui va accélérer les délais. Il y a également une simplification des règles d’accessibilité dès lors qu’il y a réversibilité des logements. Dans ce débat sur la simplification, je reste ouverte, car il reste à faire, notamment s’agissant des permis de construire et des pollutions, sur lesquels on peut discuter.

Mme Marie-Hélène Fabre m’a interrogée sur la taxe foncière sur les propriétés bâties dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Un abattement a été généralisé dans tous les QPV, pour tous les bailleurs sociaux. Je souligne le service ainsi rendu aux bailleurs sociaux, cet abattement permettant d’améliorer l’équilibre financier de leurs programmes, et notamment de maintenir les loyers au-dessous du plafond. L’abattement est partiellement compensé par l’État. Nous sommes prêts à regarder, en lien avec le ministère de la ville, où cela crée de vraies difficultés.

M. François Pupponi. Partout !

Mme la ministre. Non, je ne crois pas.

M. Michel Sordi. Je suis d’accord avec François Pupponi !

Mme la ministre. Je tiens à dire que l’abattement doit bénéficier aux programmes de logements. Ce qui veut dire qu’on vérifie si les programmes sont de meilleure qualité et les loyers plus bas, et s’il ne s’agit pas d’une exonération pour l’exonération.

En ce qui concerne les saisonniers, nous manquons de solutions. Certains territoires ont réfléchi à la façon dont ils pouvaient offrir des produits particuliers. Nous pourrions lancer une expérimentation sur des territoires pilotes, soit sur le littoral, soit en zone de montagne, car les saisonniers ne doivent pas être obligés de se loger à soixante-dix kilomètres de leur lieu de travail ou dans des caravanes. En outre, se pose la question des logements répondant à la durée temporaire du travail. Nous pouvons peut-être trouver des opérateurs qui nous apporteraient des solutions. Pour ma part, je souhaite que nous puissions répondre à cette question dans le cadre des discussions sur la loi Montagne.

S’agissant des loyers fictifs, Monsieur Lionel Tardy, c’est au secrétaire d’État chargé du budget, M. Christian Eckert, qu’il faut poser la question.

Aujourd’hui, l’encadrement des loyers en Île-de-France s’applique à Paris. Pour que les données remontent à une autre échelle, il faut que l’OLAP demande l’agrément à l’échelle de l’aire urbaine ou métropolitaine. Dès lors que la demande est faite et que l’agrément est donné, la loi impose que les données remontent.

En Île-de-France, il y a certainement un besoin d’encadrement dans les zones qui jouxtent Paris et qui connaissent les mêmes niveaux de loyers. Mais ce sont des zones qui n’ont pas bénéficié d’une observation ancienne. Le département du Val-de-Marne, ayant depuis longtemps demandé une observation des loyers, dispose de quelques éléments. Mais ce n’est pas le cas d’autres territoires limitrophes de Paris. Je souhaite donc que l’OLAP se saisisse de la question et m’en saisisse à son tour. Tant qu’il ne demandera pas l’élargissement de son agrément, les données ne remonteront pas.

En ce qui concerne l’attribution de logements sociaux en fonction des revenus de l’année n-2, il est possible de neutraliser les ressources dans le cas d’une situation exceptionnelle. Mais c’est plus difficile pour des ménages qui subissent une baisse très forte de revenus et qui n’ont pas fait de demande antérieure.

S’agissant des femmes victimes de violences, notre objectif est de créer 500 places d’ici à mai 2017.

Je vous donne les chiffres exacts, concernant la construction de logements sociaux. À ce jour, 140 000 logements sociaux ont été notifiés aux préfets, 35 000 en prêts locatifs aidés d’intégration (PLAI), 68 500 en prêts locatifs à usage social (PLUS) et 36 500 en prêts locatifs sociaux (PLS). L’objectif national était de 110 000, le reste concernant l’ANRU, la reconstruction et les DOM.

En ce qui concerne l’habitat indigne, Monsieur Daniel Goldberg¸ il y a en effet, parmi les décrets à prendre sur la loi ALUR, ceux portant sur les deux dispositifs importants que sont la déclaration de mise en location et le permis de diviser. Nous préparons également un décret de décence concernant l’état de performance énergétique du logement, en lien avec la loi relative à la transition énergétique.

J’en viens au programme national de requalification des quartiers anciens dégradés. Un bilan a été fait par l’ANRU, mais il conviendrait de mener une réflexion plus globale, concernant l’impact de ces programmes sur l’habitat indigne.

Je répondrai plus tard à la question concernant Bâle 3.

S’agissant des migrants, tout ce qui est lié à l’hébergement et à la mise à l’abri de ceux qui sont aujourd’hui sur le territoire français concerne le ministère du logement, dans la mesure où c’est lui qui paie et qui coordonne les acteurs.

Nous avons fait le choix de créer des centres d’accueil et d’orientation (CAO), afin de trouver des solutions pérennes pour des personnes qui étaient jusqu’à présent bloquées dans la jungle de Calais. 109 centres d’accueil et d’orientation ont été créés sur l’ensemble du territoire français, hors Île-de-France, et ont pris en charge 3 500 personnes issues de la jungle de Calais, dont 20 % sont parties.

À ce jour, 80 % des personnes restantes ont fait une demande d’asile en France. Un certain nombre d’entre elles sont toujours dans ces centres, mais une partie relève des centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA). L’augmentation du nombre de places de CADA est extrêmement importante, parce que les personnes qui sont aujourd’hui, soit dans un centre d’accueil et d’orientation, soit dans un centre d’hébergement classique, relèvent des places de CADA.

Par ailleurs, des places ont été créées en Île-de-France pour accueillir les migrants arrivés ces derniers mois. Au-delà, il y a la question de la relocalisation, c’est-à-dire la prise en charge des 30 000 réfugiés que la France s’est engagée, auprès de l’Union européenne, à accueillir sur son territoire.

Nous avons demandé à la DIHAL de mettre en place une cellule chargée de faciliter le relogement des personnes qui obtiennent le statut de réfugié et de trouver des places pérennes, et ce, pas seulement dans le logement social vacant.

Aujourd’hui, nous préparons, avec le ministre de l’intérieur, un travail plus global pour être en capacité d’accueillir ces personnes de manière pérenne. Il faut donc continuer à trouver des places sur l’ensemble du territoire, en essayant de privilégier des lieux qui soient reliés aux centres-villes, ces personnes ayant besoin d’un accompagnement social très important.

Je le souligne, l’urgence était de mettre les gens à l’abri. À Calais, un centre d’accueil a été ouvert aux femmes et aux enfants, qui étaient la proie des passeurs et étaient victimes de violences sexuelles. Nous devons également prendre en charge les familles de réfugiés syriens qui arrivent sur le territoire français. Il faut savoir que nous demandons à toutes ces personnes de faire une demande d’asile.

M. François Pupponi. En ce qui concerne la TFPB, dans le cadre de l’application de la loi Lamy, nous avons constaté, ce matin, avec mon collègue Michel Sordi, que la direction générale des finances publiques (DGFIP) était dans l’incapacité de nous donner les chiffres exacts concernant l’abattement.

En mars, la DGFIP a notifié aux communes les plus pauvres de France, où il y a beaucoup de logements sociaux, le montant de la TFPB et des abattements – au doigt mouillé. On est en train de calculer que la perte de recettes pour les communes les plus pauvres de France est supérieure au montant de la péréquation qu’elles touchent. On marche sur la tête !

De plus, les bailleurs ne nous donnent pas ce montant. Je suis prêt à négocier avec eux pour savoir combien ils doivent réinvestir sur la commune, mais il faut que nous en connaissions le montant exact. Or la DGFIP n’est pas capable de nous donner ce chiffre avant octobre ou novembre. Il lui faut un an pour calculer le nombre de logements, le montant des exonérations, les abattements, le montant de la compensation par l’État. L’intention est bonne, mais les bailleurs font ce qu’ils veulent et, au final, ce sont les communes qui paient !

Mme la présidente Frédérique Massat. C’est avec le secrétaire d’État chargé du budget qu’il faut voir cela.

Mme Audrey Linkenheld. Les conventions doivent être signées avant le 6 mai !

M. François Pupponi. C’est pour cette raison que j’interpelle Madame la ministre. Lors de l’examen du projet de loi de finances, en séance publique, nous avons posé dix fois la question au secrétaire d’État chargé du budget, qui nous a répondu à chaque fois qu’il allait mettre en place une commission. Mais il ne l’a pas fait.

Enfin, s’agissant des migrants, il faudrait veiller à ne pas toujours les installer dans les mêmes quartiers. Tandis que je vous écoutais, Madame la ministre, j’ai reçu un texto de mes services m’indiquant que, demain, arriveraient à Sarcelles 30 migrants, à la suite du démantèlement d’un camp de 800 personnes à Paris. Quand on démantèle à Paris, où envoie-t-on les migrants ? À Sarcelles et dans les hôtels « glauques » de la grande couronne ! Ces migrants vont arriver au centre communal d’action sociale (CCAS) pour être pris en charge, l’inscription des enfants dans les écoles etc.

Mme la ministre. Il n’y aura pas d’inscription des enfants dans les écoles puisqu’il s’agit d’un campement de 400 personnes, toutes célibataires ou isolées.

Depuis le mois de juillet, rien qu’en Île-de-France, nous avons mis à l’abri plus de 5 000 personnes qui étaient à la rue. Alors oui, ils vont sur tous les territoires, à Sarcelles comme à Paris. Il est vrai que le plus difficile est d’anticiper et que les communes apprennent souvent au dernier moment l’arrivée de migrants. Mais face à l’injonction de mettre les gens à l’abri, on les envoie partout en France.

M. François Pupponi. Il faudrait donner aux communes les plus pauvres les moyens d’assumer ces populations.

Mme la ministre. Je suis d’accord avec vous. Même si la commission que vous souhaitiez n’a pas été créée, j’estime qu’il faut regarder de très près cette question de la TFPB.

En tout cas, pour la mise à l’abri des personnes les plus démunies, je le répète, tous les territoires sont mobilisés.

Mme Audrey Linkenheld. Tous ceux qui ont de la disponibilité.

Mme la ministre. Pas seulement. Nous n’avons pas diffusé la liste des CAO parce que nous ne voulons pas que ces centres fassent l’objet de manifestations de rejet. Tous les territoires sont mobilisés, urbains comme ruraux, communes SRU ou pas. Nous cherchons des locaux disponibles et dignes : il y en a peu à Sarcelles comme ailleurs, et nous installons les migrants à Sarcelles comme ailleurs.

M. François Pupponi. Je vais aller voir si le préfet a réservé des chambres dans les hôtels d’Enghien !

Mme la ministre. Je vous propose d’en discuter ensemble, avec le préfet du Val-d’Oise.

Mme la présidente Frédérique Massat. Merci, Madame la ministre, pour vos réponses.

*

Informations relatives à la commission

– Le champ de la saisine pour avis sur le projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs (n° 3600), concerne les articles suivants : articles 2, 10, 11, 12, 13, 14, 21, 23, 24, 25, 26, 28, 29, 30, 38, 39, 40, 41, 42, 45, 46 et 47.

– M. Damien Abad a été nommé rapporteur sur la proposition de loi visant à mieux définir l’abus de dépendance économique (n° 3571).

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 29 mars 2016 à 16 h 15

Présents. – Mme Brigitte Allain, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Philippe Bies, Mme Michèle Bonneton, M. Dino Cinieri, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Christian Franqueville, M. Daniel Goldberg, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Hervé Pellois, M. François Pupponi, M. Michel Sordi, M. Lionel Tardy, Mme Catherine Troallic

Excusés. – M. Jean-Claude Bouchet, M. Georges Ginesta, M. Bernard Reynès, M. Frédéric Roig

Assistaient également à la réunion. – M. Guillaume Chevrollier, M. Dominique Potier