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Commission des affaires économiques

Mardi 5 juillet 2016

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 93

Présidence de Mme Frédérique Massat, Présidente

– Audition de Mme Muriel Pénicaud, directrice générale de Business France, sur l’aide apportée aux entreprises exportatrices

La commission a auditionné Mme Muriel Pénicaud, directrice générale de Business France, sur l’aide apportée aux entreprises exportatrices.

Mme la présidente Frédérique Massat. Nous accueillons aujourd’hui Mme Muriel Pénicaud, directrice générale de Business France, dans le cadre d’une séquence consacrée à l’export qui se poursuivra par une table ronde avec des entreprises exportatrices et, demain, par l’audition du secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, M. Matthias Fekl.

Madame Muriel Pénicaud, nous vous recevons pour la première fois depuis la création de Business France le 1er janvier 2015. Je rappelle que cette structure, placée sous une triple tutelle ministérielle et dont notre collègue Seybah Dagoma préside le conseil d’administration, est issue de la fusion d’Ubifrance et de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII).

Alors que le commerce extérieur est important pour l’économie française, nous souhaitons faire avec vous le point sur les actions entreprises par Business France, dans la continuité des actions précédentes, et sur les outils mis à la disposition des entreprises, sur lesquels nous espérons recueillir leurs suggestions d’éventuelles améliorations qui pourraient y être apportées.

Pour ce faire, je vous soumets quelques questions. Comment vous acquittez-vous de la mission en faveur d’un accompagnement pour les 1 000 entreprises de taille intermédiaire (ETI) et petites et moyennes entreprises (PME) de croissance qui vous a été confiée par l’État, en partenariat avec BPIfrance, dans le cadre du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi ?

Quelles sont les conséquences du redécoupage des régions et des compétences nouvelles qui leur ont été attribuées sur votre organisation et sur vos liens avec ces dernières ? Nous sommes très soucieux de l’adaptation des outils au plus près et au service des territoires.

Quelles peuvent être les conséquences de l’accord économique et commercial global (CETA) conclu entre l’Union européenne et le Canada et du Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP), en négociation avec les États-Unis, sur les marchés à l’export des entreprises françaises ?

Quel regard portez-vous sur le « Brexit » et son impact sur les relations commerciales ?

Mme Muriel Pénicaud, directrice générale de Business France. C’est un honneur pour moi de vous présenter le bilan de notre action depuis deux ans et nos perspectives.

La création de Business France par la fusion d’Ubifrance et de l’AFII a été dictée par la raison d’être commune des deux structures : développer l’internationalisation de l’économie française au service de la création de valeur, de la création d’activité et de l’emploi. Ce sont ces objectifs qui font lever le matin les personnes qui travaillent chez Business France. C’est notre manière singulière de servir notre pays que d’être au service du développement des exportateurs et des investisseurs étrangers.

Business France exerce, de par la loi, trois métiers : le soutien à l’export des entreprises françaises, la prospection et l’accueil des investissements étrangers, ainsi que la promotion de l’image économique de la France.

Quel est le contexte ? Vous connaissez les chiffres : la France est un des grands pays exportateurs du monde : si notre pays se classe au troisième rang pour les services, il n’est que huitième pour les biens. Le montant de nos exportations de biens et services s’élève à 455 milliards d’euros en 2015. La part de celles-ci dans le PIB a doublé en cinquante ans pour représenter aujourd’hui 29 % du PIB. C’est un élément structurant de l’activité économique. On estime entre 6 et 7 millions le nombre d’emplois dans des entreprises qui ont une dimension internationale soit parce qu’elles possèdent des filiales à l’étranger, soit parce qu’elles exportent, soit parce que ce sont des filiales de groupes étrangers. Ce sujet n’est donc pas anecdotique mais au cœur de notre économie.

Concernant les investissements, 20 000 entreprises étrangères sont installées en France, elles emploient directement 2 millions de salariés. Nous sommes le troisième pays le plus attractif d’Europe pour les investissements, derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni. Mais nous sommes de loin le premier en matière d’investissement industriel et de recherche et développement (R&D).

En 2015, 962 nouveaux projets d’investissement ont été décidés – soit 19 par semaine –, représentant 33 600 emplois créés.

En dépit de notre excellence dans ces deux domaines, nous souffrons d’un certain nombre de handicaps.

En premier lieu, le déficit commercial : s’il a diminué en 2015 pour s’établir à 45,7 milliards d’euros – soit 22 % de mieux qu’en 2014 –, grâce notamment, mais pas uniquement, à la forte baisse du prix du pétrole, il reste, hors énergie, de 23 milliards d’euros, essentiellement en raison des biens puisque la balance commerciale des services est excédentaire de 9 milliards d’euros.

Notre difficulté tient à ce que le nombre et la taille des entreprises sont structurellement insuffisants. Nous recensons 125 000 entreprises exportatrices en France en 2015, soit 3 % de plus que l’année précédente. Cette tendance est encourageante mais il faut comparer ces chiffres aux 200 000 entreprises italiennes ou aux 400 000 en Allemagne. Une raison principale l’explique : la France compte moins d’ETI et moins d’ETI exportatrices ; l’essentiel des exportations est concentré sur un faible nombre d’entreprises : 1 000 entreprises réalisent 70 % de l’export français ; 10 000 entreprises font 90 % du commerce extérieur. Business France en accompagne 9 700. En outre, 30 % des entreprises qui exportent une année n’exportent plus l’année suivante.

Nous avons donc deux motifs de préoccupation – le nombre d’entreprises exportatrices mais aussi la pérennisation de la démarche d’exportation dans la stratégie de ces dernières – liés au tissu d’entreprises, principalement constitué de TPE et de PME. C’est pourquoi il est important de développer des actions collectives, nationales et locales, dans leur direction pour leur permettre d’exporter.

Enfin, la France souffre d’un déficit d’image depuis une dizaine d’années qui est mesuré par de nombreux indicateurs. La perception de l’attractivité de la France est en deçà de la réalité.

La mobilisation de nombreux parlementaires ainsi que le rapport de MM. Alain Bentéjac et Jacques Despont en juin 2013 ont conduit le Gouvernement à décider la fusion d’Ubifrance et de l’AFII, annoncée par le Président de la République le 17 février 2014. Le chantier de la fusion a été lancé le 23 juin 2014. Je tiens à saluer le travail avec les services de l’État puisque nous avons été en mesure de fusionner au 1er janvier 2015, soit sept mois plus tard, alors que ni le texte de l’ordonnance, ni les décrets n’avaient été publiés.

Nous avons la chance d’avoir un député pour président du conseil d’administration. Je salue M. Jean-Paul Bacquet qui a été le président de l’époque de la fusion, auquel a succédé Mme Estelle Grelier pour une brève période avant de devenir ministre, puis aujourd’hui Mme Seybah Dagoma depuis le 12 mai. La gouvernance comprend des représentants du personnel, les présidents de deux régions, ainsi que des représentants de l’État et des entreprises.

La fusion a été opérée en dix-huit mois. La fusion juridique, financière et comptable a été réalisée immédiatement mais il fallait dix-huit mois pour l’achever complètement. C’est chose faite depuis le 30 juin. Les directions métier sont en place ; les réseaux internationaux d’export et de l’investissement ont été fusionnés au sein d’une seule direction dans chaque pays au 1er septembre 2015. Sur le plan social, onze accords collectifs ont été conclus depuis deux ans, à l’unanimité des organisations syndicales. Nous avons réalisé récemment un audit auprès des 1 500 collaborateurs dans le monde : 85 % d’entre eux disent comprendre le sens de la fusion et affirment que les clients et les partenaires en perçoivent le sens. Enfin, nous avons mis en place une comptabilité analytique, la gestion budgétaire et comptable publique (GBCP), un intranet et, dans quelques semaines, un internet commun.

Cette fusion a été pensée pour apporter de la simplification et de la lisibilité aux PME et aux ETI – vous connaissez l’écosystème de l’export, il est complexe, reconnaissons-le. Elle répond à l’objectif de clarté en plaçant un opérateur national au cœur du dispositif, à condition qu’il travaille avec tous les autres évidemment.

Parallèlement à la fusion, sous la houlette de nos ministères de tutelle et du ministère de l’agriculture, nous nous sommes aussi rapprochés de la Sopexa. Ce projet attendait dans les tiroirs depuis de nombreuses années. Les entreprises avaient du mal à comprendre pourquoi, si elles travaillaient dans le domaine du vin de Bordeaux, Ubifrance les accompagnait et si elles étaient dans le Beaujolais, Sopexa. Nous avons convenu d’un accord aux termes duquel toutes les actions dites collectives – les salons internationaux – sont transférées à partir du 1er janvier prochain de Sopexa à Business France. La répartition est la suivante : Sopexa travaille sur le marketing, la promotion et la communication des entreprises à destination des consommateurs, Business récupère toute l’action collective sur financement public, les relations d’affaires entre les entreprises et les distributeurs et les importateurs. En prévision de ce rapprochement qui sera effectif le 1er janvier, puisque les salons se programment à l’avance, nous avons le 1er juillet accueilli treize collaborateurs de Sopexa.

Nous avons mené un projet d’entreprise qui a été partagé avec l’ensemble des personnels. Je tiens à le souligner, vous pouvez compter sur le principal actif de Business France, à savoir la qualité des équipes. Business France emploie 1 500 collaborateurs dans 72 pays, représentant cinquante nationalités, chose assez rare pour une agence nationale. La moitié des collaborateurs sont français, les autres viennent des pays dans lesquels nous sommes implantés. C’est très important car nous devons parler le langage des affaires et comprendre les cultures – comment faire du commerce en Chine, en Corée, dans la Silicon Valley ? Les deux tiers de ces effectifs travaillent hors de France, à chaque fois, dans des équipes mixtes.

Dans la recherche de simplification et de lisibilité pour les entreprises, nous avons développé une stratégie partenariale audacieuse pour rendre plus efficient l’ensemble du système de soutien à l’export.

Avec BPIfrance, vous l’avez évoqué, Madame la présidente, nous avons signé un accord de partenariat stratégique qui a été initié à la demande du Gouvernement dans le cadre du pacte de compétitivité et d’emploi. Ensemble, nous travaillons pour aider à grandir très vite à l’export 1 000 ETI et PME de croissance. Nous sommes en train de dépasser cet objectif avec six mois d’avance et nous allons poursuivre car les entreprises plébiscitent cette collaboration : elles peuvent, dans la même journée et dans le même lieu, rencontrer le conseiller marché de Business France, le banquier et, demain, l’assureur, puisque l’activité garantie publique de la Coface a vocation à rejoindre BPIfrance. Voilà un bel exemple de partenariat qui marche très bien et qui nous rend collectivement plus efficace au service des entreprises.

Nous avons aussi conclu, le 11 mars 2015, un partenariat avec les réseaux consulaires en France et à l’étranger. Nous avons décliné cet accord dans toutes les régions de France, au travers de plans d’action. L’objectif est d’accompagner ensemble 3 000 entreprises à l’export d’ici 2017. À l’étranger, sur la cinquantaine de pays où les deux structures sont présentes, nous avons signé 43 accords de partenariat et de coopération.

Avec les régions, nous avons une longue tradition de travail commun. Jusqu’à présent, les politiques de soutien à l’export variaient d’une région à l’autre mais toutes les régions apportent leur aide, les unes en soutenant le volontariat international en entreprise (VIE), les autres avec des aides à l’export pour les PME. Le 25 juin 2015, nous avons signé un accord avec l’Assemblée des régions de France ; à la suite de la réforme territoriale, nous sommes en discussion très avancée avec cette dernière pour renégocier cet accord, ainsi qu’avec chacune des treize régions pour pouvoir signer d’ici la fin de l’année des conventions qui nous permettent de travailler ensemble sur la prospection, les aides à l’export et la promotion des territoires. En tant qu’agence nationale, nous sommes le bras armé de tous les acteurs sur le territoire pour aller chercher à l’étranger les marchés et les investisseurs.

La fusion nous a aussi permis d’améliorer notre couverture géographique : grâce au cumul des deux réseaux, nous avons pu ouvrir ces derniers mois des bureaux dans un certain nombre de pays dans lesquels nous n’étions pas présents : le Nigéria, le Kenya, l’Éthiopie ou l’Iran.

Notre plus grande fierté tient à ce que, dans l’année de la fusion qui, vous l’imaginez, absorbe une partie de l’énergie, nos résultats sont supérieurs au cumul de ceux des deux agences précédentes. Ce n’était pas un pari gagné d’avance, mais nous avons fait le choix, avec les équipes, d’apporter de la valeur tout de suite. Une fusion pour une fusion, cela ne motive personne mais si elle apporte de la valeur aux entreprises et donc à l’action collective, elle fait sens.

Nous avons négocié le contrat d’objectifs et de performance (COP) 2015-2017 avec l’État – nous avons mis à votre disposition un dépliant qui présente les principaux objectifs. Que ce soit pour les VIE, le soutien à l’export, les investissements étrangers, ou la promotion de l’image économique de la France, tous les objectifs ont été atteints ou dépassés pour la première année, ce qui est un motif de fierté pour les équipes mais aussi une source de motivation.

Vous allez me dire, tout va très bien, tout est parfait. Je me dois de partager avec vous un souci. Je sais que dans la période actuelle, nous ne sommes pas les seuls à y être confrontés ; je mesure l’effort de réduction des dépenses que nous devons faire et que nous avons fait – la baisse de la subvention de l’État en cinq ans s’élève à 17 %, dont 8 % pour la seule année 2015. Mais je souhaite attirer l’attention sur notre modèle économique qui diffère de celui des autres agences comparables en Europe. Pour ces agences, les États ont fait le choix d’un financement presque entièrement public, y compris dans un pays comme le Royaume-Uni, qui est peu suspect d’étatisme et de centralisme – la subvention publique britannique s’élève à 473 millions d’euros, dont 90 % venant de l’État ; en Italie, la subvention est de 188 millions d’euros. En France, pour des raisons tenant notamment à la réduction des déficits, dont nous sommes solidaires, vous le verrez sur le graphique qui vous a été distribué, la subvention de l’État est passée en quelques années de 127 millions d’euros théoriques à 100,7 millions réels.

Le COP repose sur un engagement triennal de l’État qui prévoit une subvention annuelle de 113 millions d’euros ; en loi de finances pour 2016, celle-ci était de 110 millions ; à la date d’aujourd’hui, sans espoir d’amélioration, elle s’établit à 100,7 millions, ce qui ne couvre même plus les dépenses de personnel. Nous devons donc compter sur nos ressources propres. Or, nous subissons sur cette question une double peine. En effet, les règles relatives aux établissements publics industriels et commerciaux sont ainsi faites que le plafond d’emplois ne concerne pas seulement la subvention publique mais aussi les ressources propres. Aujourd’hui, des fédérations professionnelles, des bailleurs de fonds comme la Banque mondiale, l’OCDE, l’Union européenne, ou les régions veulent nous confier des missions que nous sommes obligés de refuser car nous ne pouvons pas affecter des personnes pour les assumer. C’est la double peine : non seulement il faut compenser par des ressources propres la baisse des subventions de l’État mais il nous est aussi interdit de recruter pour remplir ces missions.

Aujourd’hui, la pérennité de notre modèle économique nous préoccupe.

L’une des entreprises que vous recevrez lors de la table ronde faisant suite à mon audition ne fait appel ni à Business France, ni aux chambres de commerce et d’industrie (CCI), ni à BPIfrance parce qu’elle considère que ces services coûtent trop chers et qu’ils devraient être gratuits.

Mais, pour être honnête, le fait que nos services ne soient pas gratuits nous a fait beaucoup progresser. Depuis une dizaine d’années, nous nous imposons une exigence de qualité et nous mesurons en courant d’affaires notre résultat. C’est le grand changement qui s’est opéré avec la création de Business France : on mesure tout en résultats, en nombre d’emplois créés pour l’investissement et en nombre de courant d’affaires pour l’export ; celui-ci est passé de 38 % à 47 % l’année dernière. L’absence de gratuité nous fait progresser, mais jusqu’à un certain point. La fragilité du tissu de PME, j’y reviens, nous oblige à limiter le coût des prestations, sinon un certain nombre d’entreprises ne pourront pas et n’oseront pas tenter leur chance à l’export, qui est pourtant la condition de leur croissance et de leur pérennité.

Mme Fanny Dombre Coste. Depuis plus de dix ans, notre pays fait face à un déficit commercial important, mais, depuis quatre ans, ce déficit connaît une réduction constante, passant de 75 milliards d’euros en 2011 à 46 milliards en 2015. Pour la première fois depuis huit ans, le solde de la balance courante de la France est quasiment à l’équilibre en 2015, à 0,2 % du PIB. Nos PME reprennent le chemin de l’export, passant de 121 000 à 125 000 en un an, retrouvant ainsi un niveau jamais atteint depuis 2009. Ces chiffres sont de nature à nous rassurer, mais nous devons poursuivre nos efforts afin de faire de nos entreprises des exportateurs de long terme, vous l’avez dit.

Le Gouvernement a donné la priorité à la diplomatie économique en améliorant la compétitivité de nos entreprises, en mobilisant le réseau diplomatique et en regroupant autour du ministère des affaires étrangères les opérateurs publics et, en particulier, Business France, qui joue un rôle central. Un an après la fusion entre Ubifrance et l’AFII, nous sommes heureux de vous accueillir afin de faire un point d’étape sur les travaux de l’agence que vous dirigez. Mes questions porteront sur plusieurs points.

De nombreux acteurs sont engagés sur le marché de l’internationalisation. Cette pluralité constitue indéniablement une richesse mais permet-elle une véritable coopération ?

Les ambassades jouent un rôle essentiel dans la diplomatie économique, notamment dans la détection de potentiels investisseurs étrangers ou la valorisation du territoire. Comment s’organisent les échanges au sein de ce que vous appelez le triangle d’or – ambassade, direction générale du trésor, Business France ?

Le déploiement d’une stratégie de communication et d’influence pour renforcer l’image économique de la France est un des piliers de l’action de votre agence. Il semble que le made in France soit aujourd’hui mieux reconnu à l’international. Comment envisagez-vous de poursuivre ces actions de communication ?

En 2015, 9 755 PME et ETI ont bénéficié des prestations export. Ces chiffres sont très encourageants. Nous le savons, beaucoup de nos PME sont des exportatrices qui s’ignorent parce qu’elles ne connaissent pas toujours les dispositifs de soutien. Quelles sont vos pistes pour améliorer encore la lisibilité de votre offre auprès des entreprises ?

Le portage des petites entreprises par les grands groupes est une des forces de nos concurrents, notamment de l’Allemagne ou de l’Italie, qui parviennent à jouer sur cette dynamique collective pour aider les PME et les ETI à découvrir et à s’ancrer sur les marchés à l’étranger en bénéficiant de l’expérience et des moyens d’une plus grande entreprise. Je sais par ailleurs que vous menez des actions par filière. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce point ?

La loi NOTRe donne aux régions un rôle prépondérant. Après quelques mois, nous savons que certaines régions sont plus avancées que d’autres, vous avez évoqué des conventions qui seraient signées d’ici la fin de l’année. Comment voyez-vous ce déploiement de façon très concrète ?

Je salue l’initiative prise par le Gouvernement de fusionner Ubifrance et l’AFII, offrant ainsi aux chefs d’entreprise un interlocuteur unique. Je tiens à saluer les résultats encourageants qui confortent ce choix. Vous avez fixé avec les CCI un objectif commun pour 2017 d’aider plus de 3 000 PME de plus et de générer au moins mille contrats. Cet objectif est ambitieux et répond à la nécessité de poursuivre le développement de nos entreprises et de les accompagner pour leur permettre d’être plus innovantes et plus compétitives sur le marché international.

M. Laurent Furst. Je ne dirai rien de particulier sur la fusion, un projet que vous avez su mener à bien. La baisse de ressources que vous n’avez pas cachée me semble particulièrement importante. À quoi cette baisse vous a-t-elle conduit à renoncer ? Diriez-vous que vous ne pouvez pas aller plus loin dans l’effort que le Gouvernement demande à Business France ?

S’agissant du commerce extérieur, le déficit commercial a diminué mais dans un contexte particulier qui est d’abord celui de la baisse massive du coût de l’énergie, mais aussi d’une évolution des taux de change et d’une croissance intérieure de la France inférieure à celle de l’ensemble de nos partenaires commerciaux. Pour le déficit structurel, il me semble difficile de décerner un satisfecit. Quelques secteurs continuent d’évoluer de manière positive : l’aéronautique, les vins et spiritueux, ou les services.

J’ai examiné les chiffres de la filière bois. Alors que la France possède la quatrième forêt de l’Union européenne, les industries de la filière bois perdent des parts de marché et le déficit s’accroît. D’autres questions se posent pour la filière agroalimentaire. Votre travail s’organise-t-il par filières ?

Sur l’accueil des investissements étrangers, je serais moins optimiste que vous. Nous accueillons beaucoup de réseaux commerciaux et peu de sites industriels. La désindustrialisation de la France est un problème récurrent depuis de très nombreuses années.

Les investisseurs étrangers que je côtoie soulignent toujours deux séries de problèmes : la fiscalité et les charges, d’une part, l’illisibilité et l’instabilité du droit français, d’autre part. Partagez-vous cette analyse ? Conseillez-vous le Gouvernement dans ces matières ?

Concernant l’image de la France, nous avons connu de longues séries de grèves et de manifestations depuis quelques mois. Comment arrivez-vous à convaincre que notre pays va bien, et qu’il faut y investir ? La situation est-elle pesante pour le développement économique de la nation ?

M. Hervé Pellois. Lors du forum des PME à l’international à Vannes, qui réunissait 1 400 entreprises bretonnes intéressées par l’export, j’ai entendu un patron de PME qui se réjouissait des progrès réalisés en matière de douanes et regrettait le manque d’avancées en matière de réglementation sanitaire. Pouvez-vous expliciter ce qu’il voulait dire ?

L’e-commerce connaît un développement exponentiel – il a augmenté de 31 % en un an en Chine, pays qui recèle un potentiel de 360 millions de clients contre 34 millions en France. Comment analysez-vous ce phénomène ? Comment encouragez-vous les entreprises françaises à s’y intéresser ?

Quelles sont les mesures prises pour inciter les entreprises à recourir au VIE ?

M. Dino Cinieri. Avec 125 000 entreprises exportatrices, soit une hausse de 3,1 % de leur nombre en un an, nous sommes le troisième pays exportateur mondial de services. Quelle est la part entre l’import et l’export dans la balance commerciale ? Quelles sont les aides dont bénéficient les entreprises ?

Pouvez-vous préciser le contenu des conventions que vous envisagez avec les régions ?

Comment comptez-vous aider les viticulteurs, les forestiers et les agriculteurs à reconquérir les parts de marché perdues ?

M. Yves Daniel. En 2015, le département Agrotech de Business France a été le deuxième en nombre de clients. Pouvez-vous nous présenter les points forts de la filière agroalimentaire à l’export et les aspects que vous souhaitez développer ?

Le directeur du département Agrotech, M. Christophe Monnier, connaît parfaitement la Russie puisqu’il a été pendant plusieurs années chargé de mission agricole dans ce pays. Comment ce département peut-il contribuer au rétablissement des relations agricoles entre la Russie et la France ?

M. Jean-Pierre Le Roch. En 2015, vous avez lancé le programme « Acceleratech China ». Vous avez annoncé avec BPIfrance votre souhait de poursuivre votre action commune au service de l’internationalisation des startups françaises en lançant deux programmes complémentaires le « French Tech tour China » et « Impact China », qui font de la Chine une cible de développement prioritaire. Si le marché chinois présente d’importantes opportunités pour les startups de la French Tech, il répond à des codes qui lui sont propres et peut se révéler complexe à appréhender. Pouvez-vous dresser un bilan du précédent programme et nous présenter les objectifs des deux nouveaux ?

Vendredi dernier, dans ma circonscription, était organisée une rencontre entre les entreprises agroalimentaires, les filières agricoles, la région Bretagne et une banque chinoise, Bank of China pour ne pas la nommer, autour d’une question : comment accompagner et renforcer les partenariats agricoles et agroalimentaires avec une province chinoise ? Quel regard portez-vous sur les partenariats entre la France et la Chine dans ce domaine et sur l’attente de la Chine par rapport à la France ?

Mme Marie-Hélène Fabre. La France souffre d’un déficit d’ETI, par rapport à la plupart de ses partenaires commerciaux. Là où l’Allemagne peut aligner près de 12 000 entreprises exportatrices, notre pays n’en compte que 4 000. Comment peut-on augmenter le nombre de PME exportatrices ? Vous semble-t-il pertinent de mettre en place, pour simplifier les procédures douanières, un guichet unique national ?

Pouvez-vous nous présenter les dispositifs que vous mettez en œuvre pour un secteur très performant en matière d’exportation, la viticulture ? Quels sont les outils mis à la disposition des producteurs même modestes pour faire connaître leur production à l’étranger ?

Mme Pascale Got. Quelle est votre analyse du Brexit et de ses conséquences ?

M. Philippe Kemel. Dans votre rapport annuel, page 11, il est indiqué que 30 % des investissements concernent la production. On sait que les investissements étrangers en France peuvent permettre de reconquérir l’activité industrielle dans notre pays. Déployez-vous une politique particulière dans ce domaine ? A-t-on les moyens d’encourager la constitution de joint-ventures pour favoriser le renforcement industriel des territoires ?

La R&D est particulièrement volatile dans notre pays. Menez-vous des actions pour retenir la R&D réalisée par des entreprises étrangères en France ?

M. Jean Grellier. Quelles relations entretenez-vous avec les comités stratégiques de filière du Conseil national de l’industrie ? Quelles suites donnez-vous à leurs recommandations ?

Mme Annick Le Loch. Quels sont les liens entre Business France et la plateforme « France Viande Export » créée par le ministre de l’agriculture ?

Quelles peuvent être, selon vous, les conséquences du Brexit sur le commerce international ?

Dans le Finistère, une entreprise chinoise, Synutra, a investi des dizaines de millions d’euros pour produire du lait ; quel rôle avez-vous joué dans l’installation de cette entreprise, qui suscite d’ailleurs des craintes ?

Enfin, le CETA peut-il accroître les échanges commerciaux au profit des entreprises françaises ?

Mme Muriel Pénicaud. Je vous remercie pour ce magnifique éventail de questions, qui sont au cœur de notre action au quotidien.

La fusion entre Ubifrance et l’AFII devait permettre de répondre à la problématique de la multiplicité des acteurs en créant un noyau central. Nous ne sommes pas au bout du chemin. J’ai évoqué notre travail avec la Sopexa, avec BPIfrance ou avec les chambres de commerce. Je n’ai pas cité nos autres partenariats, mais nous avons conclu un accord avec les conseillers du commerce extérieur, ainsi qu’avec Atout France, l’Agence française pour le développement, Expertise France ou des partenaires privés comme Chronopost, la Société générale, le Crédit agricole, et Euler Hermes. Nous sommes en discussion avec les opérateurs spécialisés du commerce international (OSCI), pour trouver une convergence entre privé et public afin que tous les opérateurs soient mobilisés dans le même sens, mais aussi avec l’Organisation internationale de la francophonie – 20 % des actions que nous menons à l’export ont pour cadre des pays francophones.

La pluralité des acteurs peut être une richesse ou un handicap. Elle est une richesse si on travaille ensemble, en mettant à profit l’expertise de chacun. Elle est un handicap si on intervient en ordre dispersé. C’est l’une des raisons pour lesquelles l’ensemble des acteurs, à la demande des tutelles, ont créé un site commun que nous gérons, france-international.fr qui, sans être encore très dynamique, présente l’offre des différents acteurs. Nous avons fait beaucoup de progrès depuis dix mois, mais nous ne sommes pas au bout du chemin.

Les régions sont l’élément structurant des partenariats que nous développons cette année. Afin de tirer les conséquences de la loi NOTRe, du renforcement des compétences des régions en matière internationale et de leur redécoupage, nous avons engagé avec elles des discussions qui sont aujourd’hui très avancées. En matière d’investissement, nous travaillons déjà systématiquement ensemble. Chaque semaine, nous apportons sur une sorte de place de marché virtuelle une trentaine de projets que nous avons collectés dans le monde. Nous les partageons avec l’ensemble des régions et celles-ci disposent de quelques semaines pour proposer une offre. Ce système fonctionne bien.

En matière d’export, les politiques des régions étaient et restent très différentes. Le VIE est un formidable bijou. À la sortie, 97 % des jeunes trouvent un emploi ; 75 % des volontaires dans le domaine commercial décrochent un contrat pour leur entreprise, avant un an. Les jeunes plébiscitent le dispositif – nous enregistrons 85 000 candidatures par an –, y compris ceux qui ont un emploi mais qui ont envie d’aller à l’international. Avant 35 ans, il est difficile d’obtenir un poste à responsabilité à l’international dans une entreprise française.

L’Association pour l’emploi des cadres (APEC) a réalisé une étude très intéressante dont il ressort que 30 % des cadres d’entreprises françaises dans le monde ont été VIE ou volontaires du service national en entreprises (VSNE). Je remercie tous les jours les législateurs qui, à l’occasion de la fin du service militaire, ont eu la bonne idée de créer ce dispositif. Pourquoi leur nombre n’est-il pas plus important compte tenu de la demande ? Parce que de nombreuses PME ignorent encore le dispositif : 2 000 PME seulement l’utilisent. Le rôle de la région ne doit pas se résumer à une aide financière aux entreprises, il consiste aussi à promouvoir ce dispositif auprès des PME. Nous essayons de mobiliser également les chambres de commerce, et les conseillers du commerce extérieur pour que tout l’écosystème en parle. Ce dispositif est un bien commun. Il est simple, clé en main pour les PME et accessible à une TPE.

Des discussions sont en cours avec toutes les régions. Nos équipes y sont restreintes – une à quatre personnes par région. Nous avons choisi d’aider les entreprises à se projeter à l’international mais nous travaillons en amont au quotidien avec tous ceux qui, en capillarité, peuvent être au contact des entreprises. Plus nous travaillerons avec les autres acteurs du soutien aux exportations, plus nous pourrons jouer notre rôle, qui est d’aider les entreprises à conquérir des parts de marché à l’international.

La diplomatie économique a connu un changement d’intensité extrêmement fort depuis trois ans, qui nous est très bénéfique. Nous faisons partie de ce que j’appelle le triangle d’or. Autour des ambassadeurs ont été créés des conseils économiques qui rassemblent tous les acteurs pour faciliter la coordination dans chaque pays. Lorsque l’ambassadeur contacte un dirigeant à haut niveau parce que son rang le lui permet et qu’il emmène le collaborateur de Business France, celui-ci va ensuite travailler le sujet avec les équipes pour transformer ce contact en opportunité d’investissement. C’est un système très efficace. Je signale également le mois de l’investisseur, au cours duquel nous faisons ensemble la promotion de l’image économique de la France.

La force de notre action réside dans notre approche sectorielle. Nos équipes sont entièrement organisées par secteur. Nous avons des experts – vous en avez cité un, j’en suis très fière – dans tous les domaines. 80 % des collaborateurs de Business France viennent du secteur privé. La complémentarité avec les 20 % venant du secteur public est extrêmement grande. Nous travaillons avec les fédérations professionnelles et avec les pôles de compétitivité pour les aider à s’internationaliser. La programmation de nos 500 opérations collectives dans le monde, dont les 150 pavillons France que nous organisons dans les salons internationaux, est effectuée en concertation avec les professions. Dans quelques domaines, la collaboration est perfectible.

L’agriculture et l’agroalimentaire, que vous avez évoqués, représentent 20 % de nos activités. Cette part devrait avoisiner 30 % avec l’accord trouvé avec la Sopexa. Nous allons passer d’environ 2 000 entreprises accompagnées à près de 4 000. La moitié d’entre elles relèvent des vins et spiritueux. Ce domaine est vraiment le fer de lance du secteur. Cela ne veut pas dire que c’est facile, car la compétition s’aiguise chaque jour. Il est un domaine dont on ne parle pas beaucoup mais dans lequel nous excellons aussi, ce sont les équipements et les machines agricoles. C’est vrai dans la viticulture, on exporte beaucoup de machines de vinification, et dans les tracteurs.

Grâce à l’opérateur unique, au lieu de passer notre temps à nous observer, nous pouvons mobiliser toutes les forces pour faire connaître les entreprises – il y a beaucoup de TPE, souvent très innovantes – en travaillant avec les fédérations ; c’est plus facile dans les domaines dans lesquels les entreprises sont déjà structurées – c’est le cas dans le vin, avec les groupements. Dans d’autres domaines, c’est plus difficile. Il existe dix-sept branches dans l’agroalimentaire.

La ville durable – smart cities – est un domaine très porteur, qui associe plusieurs secteurs, et, dans lequel nous avons beaucoup à apporter, qu’il s’agisse de gestion de l’eau, de gestion de l’environnement, de construction, ou de connectivité. Nous possédons toutes les compétences, pas seulement dans des grands groupes. Vous l’avez souligné, en Allemagne, les grands groupes emmènent depuis toujours les PME dans leurs bagages à l’export. En France, c’est assez rare ; le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS) le fait très bien ; certaines entreprises le font à titre individuel mais ce n’est pas la norme. Avec les pôles de compétitivité ou dans le cadre de l’industrie du futur, nous développons notre manière à la française d’emmener groupées des grandes entreprises et des petites.

Autre secteur, la French Tech. Ce label a été créé par l’AFII il y a trois ans. Chose extraordinaire, la communauté des startups, très active, s’en est emparée. On dénombre plus de 8 000 startups, dont la moitié en région parisienne. Un exemple concret des vertus de la fusion : à l’occasion du Consumer electronic show (CES) de Las Vegas, notre équipe export a emmené des entreprises chercher des clients tandis que l’équipe investissement cherchait des investisseurs pour les faire rencontrer à ceux qui connaissaient un problème d’accès au capital. L’équipe promotion a orchestré les relations publiques, ce qui, comme vous l’avez vu, a fait un certain bruit. Sur les 8 000 startups, 500 sont dans le domaine de la Fintech, un secteur à valoriser, de la Biotech ou encore de la Cleantech – pardonnez ce jargon.

Vous avez souligné l’action que nous menons avec BPIfrance. C’est notre recherche et développement à nous, c’est le laboratoire le plus avancé. Nous travaillons ensemble dans la Silicon Valley, à New York et en Chine. Dans la Silicon Valley, nous accompagnons des startups pendant dix semaines pour leur faire gagner au moins dix mois. Huit sur dix lèvent des fonds avant la fin des dix semaines et toutes élargissent leur marché mais aussi se mettent à oser rêver plus grand. Les entreprises excellent dans la technologie mais elles n’ont pas toujours l’audace qu’ont les Américains ou d’autres car nous sommes un trop grand pays ou un trop petit pays. Notre culture technologique est plus forte que notre culture commerciale.

L’opération « Acceleratech », qui se décline en deux programmes, l’un pour les startups très avancées, l’autre pour celles qui le sont moins, marche très bien aussi, avec un écosystème très différent. Nous n’en connaissons pas encore le bilan car l’opération est en cours. Mais nous sommes très confiants car beaucoup de contacts de haut niveau ont été pris. Ce sont des opérations très intensives sur lesquelles on met beaucoup de moyens humains.

Ce coaching très intensif correspond au développement de l’accompagnement personnalisé. Sur les 9 700 entreprises que nous avons accompagnées l’année dernière, 6 000 ont bénéficié de sur-mesure, dont les 1 000 ETI et PME avec BPIfrance. Cela ne veut pas dire que l’on va faire moins de salons, moins d’opérations collectives. L’année dernière, nous avons organisé 50 000 rendez-vous d’affaires individuels puisque notre métier, c’est de faire rencontrer la bonne entreprise à l’autre bonne entreprise qui va investir ou devenir client.

S’agissant des investissements étrangers, la France est le premier pays d’accueil des investissements industriels en Europe. Les investisseurs étrangers nous plébiscitent, ce qui peut paraître contre-intuitif ou paradoxal. Pour quelles raisons ? Pour l’accès aux marchés : notre géographie et nos infrastructures, qui sont les meilleures d’Europe, font qu’il est très facile de produire en France pour réexporter sur toute l’Europe, et de plus en plus vers l’Afrique et le Moyen-Orient. La France est une très bonne base logistique. Ce n’est pas un hasard si Fedex a choisi Roissy comme plateforme pour toute l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient ; il y a d’autres exemples de ce type. Parmi nos atouts, il faut aussi citer une très forte productivité, 20 % supérieure à celle du Royaume-Uni, ainsi qu’un coût du travail similaire à l’Allemagne depuis le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE).

Chaque pays a ses avantages et ses inconvénients, vous les connaissez comme moi. Dans toute compétition avec les autres pays, il faut ne pas cacher ses handicaps et jouer avec ses atouts.

Avec les grèves – auxquelles j’ajoute les inondations –, on a cumulé les difficultés dans notre dialogue avec les investisseurs potentiels. Sur les 5 000 entreprises intéressées chaque année, 1 000 décident d’investir en France dont 522 grâce à l’action de Business France. Les investisseurs ont des comportements très différents des touristes, ils ne raisonnent pas à court terme, mais à long terme. Nous devons mettre en valeur les forces structurelles de notre pays et encourager les gouvernements à atténuer petit à petit, par des réformes, nos handicaps. L’instabilité de l’environnement des affaires – fiscal et juridique – est très redoutée par les investisseurs. Je dirais presque que pour eux, peu importe que ce soit cher, pourvu qu’ils trouvent la visibilité qu’ils attendent. La question, par exemple, des rescrits fiscaux est extrêmement sensible.

Plus de la moitié des investissements étrangers non européens sont réalisés dans un trio de tête de pays – Allemagne, France, Royaume-Uni – qui se tiennent au coude à coude. Nous ne sommes pas en compétition avec les pays low cost. Personne n’investit en France dans ce but. Les investisseurs recherchent de la valeur ajoutée. J’en veux pour preuve que 9 % des investissements étrangers concernent la recherche et développement, soit plus que leur poids dans le PIB ; ils représentent 28 % de la R&D française. Le premier centre de R&D créé par Facebook en dehors des États-Unis est implanté à Paris. Nous sommes très forts en big data. Nous possédons une école scientifique et de mathématiques remarquable. Je n’oublie pas le crédit impôt recherche que tout le monde nous envie. C’est un bijou. Mesdames et Messieurs les parlementaires, protégez-le ! Il est fondamental dans l’attractivité de la R&D. Nous avons les talents, une recherche publique qui est très forte, la recherche privée, et le crédit d’impôt. Nous avons un « package » pour l’innovation que nous réussissons très bien à valoriser.

Business France obéit à des priorités stratégiques. Elle ne s’occupe pas du déploiement d’enseignes commerciales. Si une enseigne veut se développer, c’est parce qu’elle considère qu’il y a un marché, l’apport de l’argent public n’est pas nécessaire. Nos priorités, définies dans le COP, sont au nombre de trois : l’industrie – avec quatorze priorités sectorielles –, la R&D car elle apporte une très forte valeur ajoutée et un très fort effet induit sur d’autres décisions, ainsi que les quartiers généraux ; il faut y ajouter, depuis peu, l’accueil de startups étrangères, grâce à la mise en place du French Tech Paris ticket. Plus de la moitié des projets que nous ramenons en France doivent concerner ces sujets.

Quant au Brexit, hormis les commentaires politiques qu’il ne m’appartient pas de faire, et les regrets, la priorité du moment reste de savoir comment tout cela va se passer mais ce n’est pas de mon ressort. Nous avions commencé à réfléchir à la question et nous n’allons évidemment pas rester inactifs. Le plus important est de comprendre quels sont nos atouts. Ils ne sont pas tous connus. Peu de gens savent qu’en Île-de-France, 1,2 million d’emplois sont liés aux services financiers – 800 000 emplois directs et 400 000 emplois indirects. C’est le troisième secteur employeur d’Île-de-France. 40 % des transactions sont faites à partir d’Euronext. Nous sommes une place essentielle dans la zone euro.

Dans le cadre de nos actions de communication consistant à mettre à disposition des chiffres clés, en neuf langues et diffusés dans le monde entier, nous avons sorti vendredi dernier un document sur la place financière et économique de Paris. Mais c’est évidemment un pur hasard de calendrier ! De toute façon, il n’était pas inutile de mettre en valeur nos atouts, nombreux, en tant que place financière. Nous verrons selon l’évolution du contexte. Nous possédons un autre atout : de l’immobilier disponible et à un prix accessible.

C’est tout bête mais, pour accueillir des milliers de personnes, il faut quatre choses : un marché – nous comptons le plus grand nombre de sièges sociaux d’entreprises industrielles d’Europe et on accède en moins de deux heures à toute l’Europe, la proximité avec les clients est très forte – ; les talents, c’est très important dans la compétition pour ce secteur ; l’immobilier ; le sujet de préoccupation aujourd’hui, hormis la compétitivité taxe – il faut d’abord bien protéger la déduction fiscale pour les impatriés, ce sujet sera très regardé –, ce sont les écoles : si nous étions amenés à accueillir des milliers de personnes, il faudrait des cursus bilingues à une autre échelle. Nous pouvons compter sur un certain nombre d’atouts, mais nous ne sommes pas les seuls : il existe quatre places en Europe. Le Brexit est aussi l’occasion de valoriser une filière méconnue mais très vivante et reconnue dans le monde.

Sur le TTIP et le CETA, le secrétaire d’État, M. Matthias Fekl, que vous auditionnez demain, sera plus en mesure de vous répondre. Lorsque la signature de ce genre d’accord approche, nous commençons à travailler sur des plans d’action pour les différents secteurs. Mais c’est encore trop tôt.

M. Hervé Pellois. Vous n’avez pas répondu à la question sur les avancées en matière de douane.

Mme Muriel Pénicaud. Sur ce sujet, comme sur celui des normes sanitaires, le secrétaire d’État sera plus à même de répondre. En tant qu’utilisateur, je peux dire que les douanes ont fait un gros effort de lisibilité qui aide à faire de la France un hub logistique.

Je fais le lien avec la question sur le e-commerce à laquelle je n’ai pas répondu car le e-commerce est d’abord un métier de logistique. Nous travaillons beaucoup sur ce sujet, notamment avec Alibaba et Jd.com. Pour réussir, il faut une chaîne logistique remarquable. Nous ne sommes pas les plus mauvais dans ce domaine.

Pour notre équipe de juristes et de fiscalistes qui délivrent du conseil aux entreprises toute la journée, la question des normes sanitaires est l’une de celles qui revient le plus souvent. La diplomatie économique est très mobilisée sur le sujet parce que ce sont des négociations pays par pays, qui sont complexes. Je réponds indirectement à la question sur la Russie. Nous mobilisons nos forces là où c’est jouable – nous avons beaucoup d’atouts, d’énergie entrepreneuriale dans ce pays. Nous donnons la priorité aux secteurs dans lesquels la porte est ouverte ou peut s’ouvrir. Mais ce sont des sujets que vous aborderez demain avec le secrétaire d’État.

Mme la présidente Frédérique Massat. Je vous remercie, Madame la directrice générale.

Mme Muriel Pénicaud. Je vous remercie pour votre accueil. Je tiens à vous signaler la documentation que nous mettons à disposition sur notre site internet, en particulier les kits sur de nombreux sujets, souvent en lien avec l’actualité. Dans le cadre de la campagne « créative France », une plateforme présente des témoignages d’investisseurs qui disent pourquoi il faut investir en France. Il n’y a pas de meilleure démonstration.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 5 juillet 2016 à 16 h 15

Présents. – M. Dino Cinieri, M. Yves Daniel, Mme Fanny Dombre Coste, Mme Corinne Erhel, Mme Sophie Errante, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Laurent Furst, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, M. Philippe Kemel, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Frédérique Massat, M. Hervé Pellois

Excusés. – M. Damien Abad, M. Jean-Claude Bouchet, Mme Jeanine Dubié, Mme Béatrice Santais, M. Lionel Tardy, Mme Catherine Troallic

Assistait également à la réunion. – M. Christophe Premat