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Commission des affaires sociales

Mardi 13 octobre 2015

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 03

Présidence de Mme Catherine Lemorton, Présidente

– Examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 (n° 3106) (M. Gérard Bapt, Mmes Michèle Delaunay, Joëlle Huillier, MM. Michel Issindou, Denis Jacquat et Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteurs)

– Présences en réunion 48

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mardi 13 octobre 2015

La séance est ouverte à seize heures vingt-cinq.

(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)

La Commission procède à l’examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 (n° 3106) sur le rapport de M. Gérard Bapt, Mmes Michèle Delaunay, Joëlle Huillier, MM. Michel Issindou, Denis Jacquat et Mme Marie-Françoise Clergeau.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Mes chers collègues, nous allons donc commencer l’examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2016.

Concernant les amendements pour le débat en commission, 398 amendements ont été déposés. Sur ce total, dix ont été retirés avant publication et quatre-vingt-dix ont été déclarés irrecevables. Pour être plus précise, j’ajoute que, comme pour tous les textes examinés par notre commission, j’ai demandé à ce que la commission des finances procède à l’examen de la recevabilité financière de ces amendements, en application des articles 89 et 121-2 du règlement.

La commission des finances a donc procédé à l’examen des amendements au titre de l’article 40 de la Constitution : ont été déclarés irrecevables les amendements réduisant les recettes sociales lorsqu’ils n’étaient pas gagés, ainsi que les amendements augmentant une dépense d’un organisme de sécurité sociale.

Comme vous le savez, en ce qui concerne les lois de financement, le contrôle de recevabilité porte également sur le respect des dispositions organiques, au premier rang desquelles figure la définition du champ de ces lois. Ont donc été également déclarées irrecevables les dispositions qui n’ont pas d’effet direct ou qui ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale.

Sur les 104 amendements renvoyés à la commission des finances, quatre-vingt-sept ont été déclarés irrecevables, dont vingt-trois pour non-respect des dispositions organiques précitées, les autres l’ayant été pour augmentation de charges ou diminution de recettes non ou mal gagées.

Par ailleurs, j’ai refusé trois amendements comportant une injonction au Gouvernement – qui constitue un cas d’irrecevabilité des amendements, conformément à une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel.

Il nous reste donc 298 amendements à examiner. Comme nous le faisons à chaque fois que nous sommes en présence d’un nombre élevé d’amendements, nous allons appliquer le dispositif prévu par l’article 100, alinéa 7 de notre règlement pour les discussions en séance publique. Ainsi, pour chaque amendement, ne pourront intervenir pour deux minutes chacun, outre l’auteur ou l’un des auteurs, que le rapporteur et un orateur contre.

Ces précisions étant apportées, nous allons sans plus attendre commencer l’examen des articles du PLFSS. Mme Delaunay, rapporteur pour l’assurance maladie, n’a pu se joindre à nous dès le début de cette séance, étant actuellement retenue au tribunal ayant été appelée à témoigner dans le cadre du procès du docteur Bonnemaison. Elle nous rejoindra ultérieurement et, entre-temps, M. Bapt la suppléera.

PREMIÈRE PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2014

Article 1er : Approbation des tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2014

La Commission adopte l’article 1er sans modification.

Article 2 : Approbation du rapport annexé sur le tableau patrimonial et la couverture des déficits de l’exercice 2014 (annexe A)

La Commission adopte l’article 2 sans modification.

Elle adopte ensuite la première partie du projet de loi.

DEUXIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2015

Article 3 : Rectification de la dotation au FMESPP et à l’ONIAM

La Commission examine l’amendement AS306 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet amendement porte sur des dispositions symptomatiques du défaut de cap du Gouvernement dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016. Ainsi, il réduit de 50 millions d’euros les ressources du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) à l’article 3, et augmente ces ressources du même montant pour l’année suivante à l’article 16, au motif que les établissements de santé ont des besoins en matière d’investissement. Si de tels besoins existent, pourquoi ne pas y répondre dès 2015 ?

Un certain nombre d’établissements publics doivent se moderniser, que ce soit dans le domaine de l’ambulatoire, pour se doter de matériels plus performants qui permettront des économies de fonctionnement, ou encore pour se mettre en conformité avec les nouvelles lois – je pense notamment à l’accessibilité. Dans ces conditions, il ne me paraît pas opportun de réduire les ressources du FMESPP, c’est pourquoi l’amendement AS306 vise à supprimer l’alinéa 1 de l’article 3.

M. Gérard Bapt, rapporteur suppléant Mme Michèle Delaunay, rapporteure pour l’assurance maladie. Si M. Vercamer a raison d’insister sur l’importance du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, il a tort de présenter un amendement de suppression de l’alinéa 1 de l’article 3. En 2015, les ressources du FMESPP ne s’élevaient pas à 280 millions d’euros, mais à 492 millions d’euros, en raison d’un report de crédits de 211 millions d’euros, provenant des années précédentes. Le fonds est donc richement doté et, contrairement à ce qui a été dit, il me paraît de bonne gestion de ne pas laisser des fonds inutilisés. Je suis donc défavorable à l’amendement AS306.

M. Jean-Pierre Door. Je soutiens l’amendement de M. Vercamer. Cela fait en effet deux ou trois ans que nous constatons qu’il existe des besoins réels sur tout le territoire, dans de très nombreux établissements. Si les budgets votés ne sont pas utilisés, c’est très certainement en raison d’un problème de communication entre les établissements et les agences régionales de santé (ARS), aboutissant au rejet des dossiers présentés. Il me paraît essentiel d’éclaircir ce point.

M. Francis Vercamer. M. le rapporteur nous signale un report de crédits de 211 millions d’euros, ce qui montre bien que le Gouvernement n’a pas de cap, puisqu’il inscrit des crédits qu’il ne dépense pas en dépit des besoins. La diminution de ressources du FMESPP de 50 millions d’euros n’a, à mon sens, pour objet que d’améliorer l’aspect des comptes ; si cette décision peut se comprendre, elle devrait être assumée plutôt que masquée par une explication peu convaincante.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 3 sans modification.

Article 4 : Ajustement des mécanismes de la clause de sauvegarde et de la contribution due au titre des médicaments traitant l’hépatite C

La Commission est saisie des amendements identiques AS1 de M. Jean-Pierre Door et AS202 de M. Bernard Accoyer.

M. Jean-Pierre Door. L’article 4 procède à des ajustements ponctuels des dispositifs L et W, touchant l’industrie pharmaceutique, afin d’améliorer la prévisibilité du montant qui serait dû par chaque industriel au cas où la clause de sauvegarde viendrait à se déclencher. Le calcul prévu n’est pas très cohérent, puisque la comparaison devant s’établir entre les années N et N-1 ne porte pas sur la même assiette – ce qui entraîne un manque de visibilité pour les entreprises concernées. À ce problème technique s’ajoute la difficulté consistant à taxer la croissance négative du chiffre d’affaires des entreprises, ce qui ne s’est jamais vu. L’amendement AS1 vise à remédier à ces incohérences.

M. Bernard Accoyer. L’article 4 est relatif à l’un des problèmes majeurs du PLFSS, à savoir l’absence totale de réforme de structure, jointe à une réduction autoritaire des budgets, en l’occurrence de celui réservé au médicament, ce qui a d’ores et déjà des conséquences très importantes sur la recherche, le développement et l’emploi dans l’industrie du médicament, et, plus grave, sur l’innovation thérapeutique.

Les dispositions prévues à l’article 4 sont iniques, car basées sur un calcul imprévisible : dans ces conditions, comment les entreprises concernées peuvent-elles investir et préserver leur activité et leurs emplois ? Nous proposons donc de modifier en profondeur l’article 4.

M. Gérard Bapt, rapporteur suppléant Mme Michèle Delaunay, rapporteure pour l’assurance maladie. Ces amendements suppriment le fruit de la concertation qui a eu lieu entre le Gouvernement et l’industrie pharmaceutique. Un groupe de travail a été mis en place entre le comité économique des produits de santé (CEPS), l’inspection générale des finances et les industries pharmaceutiques, afin d’aider ces dernières à s’adapter aux nouvelles conditions découlant de la création du taux L dans le PLFSS pour 2015. L’article 4, qui résulte de ce travail concerté, vise à corriger les effets non anticipés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. Par ailleurs, je vous rappelle que l’assiette concernée par le taux L porte sur les médicaments hors génériques, ce qui signifie que le chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique peut augmenter globalement, hors génériques. Enfin, le chiffre d’affaires est minoré, le cas échéant, des remises conventionnelles. Le taux L n’a donc pas vocation à être mis en œuvre, mais plutôt à constituer un garde-fou.

Compte tenu de la nécessité de stabiliser les dépenses pharmaceutiques par habitant, particulièrement élevées en France, et du fait que l’article 4 résulte d’une concertation entre l’industrie et le Gouvernement, il vous est proposé de rejeter ces amendements de suppression.

M. Jean-Pierre Barbier. Je crois que nous ne parlons pas de la même chose, monsieur le rapporteur. La mise en œuvre de la clause de sauvegarde concerne les produits innovants et l’on constate, cette année comme les années précédentes, que l’innovation n’est pas financée, si ce n’est par une taxation de l’industrie pharmaceutique. Ce qui pose problème, c’est que vous compariez le chiffre d’affaires de l’année N diminué des remises au chiffre d’affaires de l’année N-1 diminué des remises, mais aussi des contributions déjà versées par les laboratoires. Je veux croire qu’il s’agit là d’une erreur d’écriture, car sinon, les laboratoires vont se voir appliquer une double peine en étant taxés sur la progression d’un chiffre d’affaires qu’ils n’auront pas réalisé. Je vous invite à examiner cette disposition de plus près car, en l’état actuel, vous mettez en cause les produits innovants et le financement de la recherche sur ces produits – et, à terme, l’accès aux soins par les patients.

La Commission rejette les amendements identiques.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS155 de M. Jean-Pierre Door et AS179 de M. Bernard Accoyer.

M. Arnaud Robinet. L’amendement AS155 vise à rétablir une règle de calcul cohérente pour le déclenchement de la clause de sauvegarde.

La contribution telle que prévue par l’article L.138‑10 du code de la sécurité sociale – c’est l’article 14 de la LFSS pour 2015 – prévoit que le déclenchement du mécanisme résulte de la comparaison entre le chiffre d’affaires net de remises d’une année N et le même chiffre d’affaires de l’année N-1 minoré de la contribution versée au titre du mécanisme L de l’année N-1.

L’assiette de cette contribution n’étant pas identique d’une année sur l’autre, cela engendre un cercle vicieux dont il résulte que, plus la contribution versée l’année N-1 est forte, plus le versement de l’année N sera important – ce qui induit un manque de visibilité pour les entreprises du médicament.

Depuis des années, l’industrie pharmaceutique est prise comme variable d’ajustement dans le cadre du PLFSS – par tous les gouvernements, de gauche comme de droite. Nous devrions plutôt déterminer des objectifs et des moyens et, pour cela, travailler main dans la main avec l’industrie de santé. Il y va de l’avenir de l’innovation et de la recherche privée – qui, à mon sens, doit être complémentaire de la recherche publique.

M. Bernard Accoyer. Je démens catégoriquement que les dispositions prévues à l’article 4 soient le fruit d’une négociation avec l’industrie pharmaceutique. Cet article incohérent constitue soit une provocation, soit une erreur grave. Alors que la France a été un grand pays d’innovation, de recherche et développement de nouveaux médicaments, depuis trois ans, le Gouvernement fait preuve d’un véritable acharnement sur l’industrie pharmaceutique, qui va supporter cette année encore plus de la moitié des réductions de dépenses. En cédant à cette facilité, vous prenez la responsabilité de la dégradation de l’industrie pharmaceutique dans notre pays et de la réduction de l’accès à l’innovation pour nos compatriotes.

M. Gérard Bapt, rapporteur suppléant Mme Michèle Delaunay, rapporteure pour l’assurance maladie. Je rappelle que l’objectif du Gouvernement est de stabiliser la dépense pharmaceutique. L’assiette concernant le taux L s’entend hors produits génériques, afin d’encourager la prescription de ces produits. Par ailleurs, si les génériques ne sont pas compris dans le chiffre d’affaires, les médicaments combattant les maladies orphelines ne le sont pas non plus ; or, ces médicaments s’adressant à un public très restreint sont très chers, car il faut financer l’innovation mise en œuvre par le laboratoire ayant décidé de rechercher un médicament efficace pour combattre une maladie orpheline. L’article 4 vise à corriger certaines anomalies relatives à la fixation du chiffre d’affaires, au moyen de dispositions élaborées en concertation avec l’industrie pharmaceutique. Je suis donc défavorable à ces amendements de suppression.

M. Élie Aboud. Le débat sur ces amendements ne saurait se résumer à une confrontation entre un groupe défendant l’industrie pharmaceutique d’une part, et le rapporteur cherchant à diminuer les dépenses d’autre part. En tout état de cause, vous ne pouvez affirmer que l’article 4 résulte d’une concertation entre le Gouvernement et les laboratoires : en réalité, ceux-ci trouvent aberrant que l’on compare deux assiettes différentes d’une année sur l’autre, et s’inquiètent de l’avenir des produits innovants.

La Commission rejette les amendements identiques.

Puis elle examine les amendements identiques AS156 de M. Jean-Pierre Door et AS181 de M. Bernard Accoyer.

M. Jean-Pierre Door. Contrairement à ce qu’affirme M. le rapporteur, le Gouvernement ne stabilise plus l’industrie pharmaceutique et ses résultats, il les contraint et les étrangle. Les entreprises se trouvent dans l’impossibilité de provisionner le montant de la taxe à laquelle elles sont soumises, ce qui les fragilise : comment voulez-vous qu’une entreprise, quelle qu’elle soit, soit taxée sur un chiffre d’affaires qu’elle n’a pas encore réalisé ?

M. Bernard Accoyer. Les dispositions de l’article 4 sont tout à fait irréalistes, pour ne pas dire surréalistes, dans la mesure où elles prévoient de déterminer les constantes réduisant l’enveloppe destinée au médicament et déclenchant la clause de sauvegarde trois mois après la clôture de l’exercice. Ainsi, il n’y a plus aucune prévisibilité – les laboratoires sont dans l’incapacité totale de provisionner le montant des taxes qu’elles vont devoir acquitter – et cette incertitude ne peut aboutir qu’à la contraction d’un secteur pourtant décisif. L’amendement AS181 propose donc de rétablir des modalités de calcul plus rationnelles, acceptées par l’industrie concernée.

M. Gérard Bapt, rapporteur suppléant Mme Michèle Delaunay, rapporteure pour l’assurance maladie. Ces amendements identiques ont pour objet de supprimer les alinéas 13 à 15 de l’article 4, visant à ce que chaque entreprise exploitant un médicament soit habilitée à signer, à titre propre, un avenant conventionnel avec le CEPS, y compris lorsqu’elle appartient à un groupe.

Je ne suis pas favorable à la suppression d’une disposition qui répond à la demande formulée par l’ensemble des acteurs, alors que le mécanisme en vigueur jusqu’alors ne permettait pas à la filiale d’un grand laboratoire pharmaceutique de conventionner à titre personnel avec le CEPS. Il n’y a rien de complexe dans le mécanisme retenu, puisqu’en application de l’article 10 du PLFSS, les dépenses des entreprises qui appartiennent à un groupe sont déjà isolées afin de rendre la fiscalité la plus juste et la plus cohérente possible.

M. Dominique Tian. Lorsque le tribunal de commerce de Brive-la-Gaillarde a statué, le mois dernier, sur la procédure de redressement d’une usine de médicaments génériques employant trente-sept salariés, le Président de la République lui-même s’est adressé au LEEM, le syndicat des fabricants de médicaments, afin qu’une solution soit trouvée. Le chef de l’État, qui a montré qu’il se préoccupait de l’état de santé de l’industrie pharmaceutique de notre pays, risque de ne pas apprécier les dispositions de ce PLFSS ayant pour objet de matraquer une industrie du médicament qui, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ne réalise plus de bénéfices très importants, et se trouve même dans une situation critique.

La Commission rejette les amendements identiques.

Puis elle examine les amendements identiques AS2 de M. Jean-Pierre Door et AS204 de M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Perrut. Il est faux d’affirmer que l’industrie pharmaceutique est d’accord avec l’évolution proposée par le Gouvernement. L’article 4 a pour objet de supprimer la possibilité de calcul de la contribution par groupe d’entreprises, ce qui ajoute à la complexité du dispositif.

L’article 14 de la LFSS 2015 a profondément modifié les règles de calcul de la contribution à la charge des entreprises pharmaceutiques, dite « clause de sauvegarde ». Ces dernières sont désormais taxées sur la base d’un chiffre d’affaires net des remises qu’elles versent à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS). Ces éléments ne sont connus que trois mois après la clôture de l’exercice, à savoir en mars de l’année N+1 pour une contribution calculée au titre d’une année N. Les entreprises sont donc dans l’impossibilité de provisionner le montant de la taxe et cette imprévisibilité fragilise la certification de leurs comptes par les commissaires aux comptes.

Cet amendement vise donc à rétablir la possibilité de calcul de la contribution par groupe d’entreprises.

M. Bernard Accoyer. L’article 4 procède d’une facilité qui semble constituer la marque de fabrique de l’ensemble de ce PLFSS : plutôt que de faire des réformes de structure et de réduire ce qui pourrait l’être par la rationalisation, la modernisation et la mise en cohérence, le Gouvernement coupe les dépenses sans se préoccuper des conséquences, par des dispositions dangereuses pour l’accès aux soins et pour l’avenir de l’industrie du médicament.

M. Gérard Bapt, rapporteur suppléant Mme Michèle Delaunay, rapporteure pour l’assurance maladie. Il ne s’agit pas de couper les dépenses, mais simplement de faire en sorte que les entreprises puissent conventionner à titre propre avec le CEPS. L’objet du groupe de travail que j’ai évoqué tout à l’heure a justement été de faire en sorte que les difficultés qui auraient pu apparaître si le taux L avait été mis en œuvre cette année puissent être levées à l’issue d’une concertation. Nous sommes donc défavorables à ces amendements.

La Commission rejette les amendements identiques.

Puis elle adopte l’article 4 sans modification.

Article 5 : Rectification des prévisions et objectifs relatifs à 2015

La Commission adopte l’article 5 sans modification.

Article 6 : Rectification de l’ONDAM et des sous-ONDAM pour 2015

La Commission adopte l’article 6 sans modification.

Après l’article 6

La Commission est saisie de l’amendement AS308 de M. Francis Vercamer.

M. Arnaud Richard. Cet amendement de bon sens, souhaité par l’ensemble des observateurs des dépenses sociales, porte sur le seuil d’alerte de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) en matière de soins de ville – étant précisé que l’ONDAM n’est pas un budget à proprement parler, mais un indicateur des dépenses de santé. Il contient une disposition préconisée par la Cour des comptes, et figurant dans nos engagements européens de contrôle des trajectoires des dépenses publiques, qui consiste à diminuer le seuil d’alerte de 1 % à 0,5 %, étant précisé que, depuis 1997, la plupart des dépassements de l’ONDAM sont de l’ordre de 0,7 % – ce qui représente près de 20 milliards d’euros au total. Une telle disposition nous permettrait de remplir notre engagement de renforcer le pilotage infra-annuel des dépenses de santé au travers de l’ONDAM.

M. Gérard Bapt, rapporteur suppléant Mme Michèle Delaunay, rapporteure pour l’assurance maladie. La modification proposée est en fait déjà actée, puisque depuis l’an dernier, le seuil au-delà duquel le comité d’alerte donne notification au Parlement est situé à 0,5 %. Vouloir inscrire l’abaissement de seuil dans le code de la sécurité sociale n’apporte aucune contrainte supplémentaire dans le cadre de l’ONDAM, mais peut avoir pour conséquence de supprimer un instrument de flexibilité en cas de besoin. Je propose donc de repousser cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte la deuxième partie du projet de loi.

TROISIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2016

TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES,
AU RECOUVREMENT ET A LA TRÉSORERIE

Chapitre Ier
Dispositions relatives au pacte de responsabilité et de solidarité et évolutions
de certains dispositifs particuliers en découlant

Article 7 : Élargissement du champ de la réduction de cotisation patronale famille

La Commission examine les amendements identiques AS120 de Mme Jacqueline Fraysse et AS222 de M. Jean-Louis Roumegas, tendant à supprimer l’article 7.

Mme Jacqueline Fraysse. L’amendement AS120 vise à supprimer l’extension du dispositif d’exonération de cotisations patronales familiales découlant de la mise en œuvre du pacte de responsabilité. Nous considérons qu’en élargissant le dispositif aux salaires représentant jusqu’à 3,5 SMIC, nous allons encore diminuer les recettes des organismes de la sécurité sociale – 4,5 milliards d’euros en année pleine – dans un contexte où le déficit du régime général et du fonds de solidarité vieillesse va atteindre 9,7 milliards d’euros en 2016, et le déficit de la branche famille 800 millions d’euros. Ces exonérations, mises en place pour redonner de la compétitivité aux entreprises, sont d’autant plus coûteuses qu’elles n’ont pas d’effet significatif sur l’emploi, comme l’attestent de nombreuses études.

De surcroît, nous craignons que cette disposition conduise à de nouvelles baisses des prestations familiales, déjà fortement altérées par la politique de modulation mise en place l’an dernier. Pour toutes ces raisons, nous souhaitons supprimer l’article 7.

M. Jean-Louis Roumegas. L’article 7 prévoit la deuxième étape de la mise en application du pacte de responsabilité en matière d’exonération de cotisations familiales. Pour ce faire, il étend jusqu’au seuil de 3,5 SMIC, soit plus de 5 000 euros bruts mensuels, la baisse de 1,8 point des cotisations familiales.

À ce niveau de salaire, on ne voit pas en quoi le montant des cotisations familiales pourrait représenter un frein pour l’emploi, la charge pour l’employeur étant quasi inexistante. En revanche, l’abaissement des cotisations sur plus de 90 % des salaires vient grever les ressources de la sécurité sociale : il s’agit, une fois de plus, d’un cadeau fait aux entreprises sans aucune contrepartie et, en l’espèce, sans aucun effet sur l’emploi.

Nous proposons par conséquent de supprimer l’article 7.

M. Gérard Bapt, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Ces deux amendements identiques sont justifiés par des exposés des motifs distincts.

Mme Fraysse redoute une baisse des prestations sociales, notamment des prestations familiales. Je peux la rassurer sur ce point : avec l’appui de cette Commission, le Parlement a obtenu l’an dernier que toute baisse des cotisations sociales soit compensée à l’euro près par le budget de l’État.

Quant à M. Roumegas, il se préoccupe du niveau salarial auquel s’appliquerait désormais l’exonération supplémentaire de cotisations familiales, en affirmant qu’elle n’aurait pas d’effet sur l’emploi. Or, je rappelle que le rapport Gallois contenait justement des propositions visant à l’amélioration de la compétitivité des entreprises exportatrices – où le niveau de salaire moyen est plus élevé que dans les entreprises de main-d’œuvre ou de services.

Je suis donc défavorable à ces amendements.

La Commission rejette les amendements identiques.

Elle est ensuite saisie d’un amendement AS320 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. L’amendement AS320 est un amendement d’appel, qui vise à remplacer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) par la suppression des cotisations patronales familiales. Il s’agit en fait d’engager une réflexion au sujet du financement de la protection sociale. On ne peut pas développer la couverture maladie universelle (CMU) et d’autres avancées de la protection sociale en en faisant peser le financement uniquement sur le travail. Si nous voulons préserver l’emploi en France et éviter la fuite des entreprises en dehors de nos frontières, nous devons répartir différemment la charge de la protection sociale.

Notre amendement vise donc à supprimer le CICE – qui ne s’applique pas à toutes les entreprises, puisque celles de l’économie sociale et solidaire (ESS) ne sont pas concernées, ne payant pas d’impôts – et à le remplacer par une suppression des cotisations patronales familiales.

M. Gérard Bapt, rapporteur. On dit parfois que l’on a tort d’avoir raison trop tôt. Peut-être est-ce votre cas quand vous défendez une idée prise pour hypothèse dans la feuille de route définie par le Président de la République : sur ce point, une réflexion est en cours, qui ne saurait aboutir avant 2017.

Par ailleurs, en l’état actuel des choses et de la progression de l’exonération des cotisations sociales familiales, c’est à juste titre que votre amendement est gagé, puisqu’il se traduirait par une dépense supplémentaire de 3 milliards d’euros, mais je note que votre amendement ne prévoit rien de particulier pour obtenir des ressources supplémentaires équivalentes, si ce n’est la majoration habituelle des droits sur le tabac. Je propose donc de rejet cet amendement.

M. Francis Vercamer. Vous avez mal lu mon amendement, monsieur le rapporteur : celui-ci prévoit un gage portant sur la TVA.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Dont acte, cher collègue.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS370 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Je présenterai en même temps l’amendement AS366. L’exonération de charges sociales jusqu’à un certain niveau de salaire crée un effet de seuil important. À ce sujet, la Cour des comptes a d’ailleurs remarqué qu’un tel dispositif pouvait avoir pour conséquence la mise en place de trappes à bas salaires : ainsi, le fait de passer de 1,6 SMIC à 1,61 SMIC peut impliquer, pour l’entreprise concernée, de payer la totalité des charges, ce qui l’incite à maintenir ses salariés en dessous de 1,6 SMIC.

Le Gouvernement propose un seuil allant jusqu’à 3,5 SMIC, ce qui ne fait que repousser le problème à un niveau de charges plus élevé. Afin d’éviter l’effet de seuil, nous proposons avec l’amendement AS370 d’appliquer un abattement de 1,8 % de cotisations jusqu’à 3,5 SMIC et, au-delà de ce niveau de salaire, l’application du taux normal.

Quant à l’amendement AS366, il prévoit qu’au-delà de dix fois le SMIC, le taux de cotisations soit augmenté de 0,2 % pour la partie supérieure à ce niveau de salaire – une référence que Gérard Mulliez, fondateur du groupe Auchan et titulaire de l’une des plus grandes fortunes de France, estime raisonnable.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. Pour lutter contre les effets de seuil, vous créez un nouvel effet de seuil – même si c’est à dix fois le SMIC. Ce que vous proposez, c’est en quelque sorte un abattement à la base : une telle mesure coûterait 4 milliards d’euros de recettes.

M. Francis Vercamer. Toute proposition destinée à éviter un effet de seuil coûtera de l’argent ! Mais le Gouvernement peut-il renoncer à suivre les avis de la Cour des comptes ? J’essaie, pour ma part, de régler un problème que la Cour a plusieurs fois soulevé. Bien sûr, nous pourrions aussi demander au Premier président de la Cour de ne plus venir à la commission…

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle se saisit de l’amendement AS115 de M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. Cet amendement vise à ramener le niveau de rémunération concerné par les allégements de cotisation d’allocations familiales à la charge des employeurs de 3,5 SMIC à 2,5 SMIC. De nombreux économistes considèrent que plus on s’éloigne du SMIC, plus l’effet de ce type de mesure est faible ; il serait donc préférable de concentrer les allégements sur les bas salaires. Parallèlement, l’amendement tend à porter la modulation de cotisation de 1,8 point à 2,5 points.

Le Président de la République a confirmé qu’une transformation du CICE en allégements de cotisations était envisagée. Dès lors, il serait de bonne méthode de rapprocher les assiettes. Or le CICE concerne les salaires jusqu’à 2,5 SMIC.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Vous abordez là un débat fondamental, de façon rationnelle, en proposant une concentration de toutes les aides sur les bas salaires. Mais le rapport Gallois avait insisté, à l’inverse, sur le fait que le niveau des cotisations sociales constituait un élément essentiel de la compétitivité des entreprises exportatrices, surtout pour celles qui facturent en euros. Je vous suggère de retirer votre amendement, et de le déposer à nouveau en vue de la séance publique, afin que ce débat ait lieu avec le Gouvernement.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS366 de M. Francis Vercamer.

Elle se saisit alors de quatre amendements identiques, AS3 de M. Jean-Pierre Door, AS14 de M. Dominique Tian, AS64 de M. Lionel Tardy, AS319 de M. Francis Vercamer.

M. Bernard Perrut. Cet article met en œuvre la deuxième étape du pacte de responsabilité, en étendant le taux réduit de cotisations d’allocations familiales, déjà applicable aux salaires égaux ou inférieurs à 1,6 SMIC, aux rémunérations situées entre 1,6 et 3,5 SMIC. Mais le Gouvernement revient sur ses engagements en repoussant du 1er janvier au 1er avril 2016 ces nouveaux allégements de charges, au risque de casser la confiance dont ont besoin les entreprises pour investir et embaucher. Au vu de la situation catastrophique dans laquelle se trouve notre pays, on ne peut que s’opposer à ce retard.

Cet article est d’autant plus incompréhensible que le Président de la République a regretté, il y a quelques semaines, la suppression de la TVA sociale qui aurait pourtant dû financer les mêmes allégements de charge. Quatre années ont déjà été perdues pour la compétitivité de nos entreprises, et le Gouvernement retarde encore l’application d’une mesure pourtant bonne pour l’emploi – même si, bien sûr, on pourrait s’interroger sur la pertinence de ces réductions de cotisations.

M. Dominique Tian. Il faut baisser les cotisations sur le travail parce que la France n’est plus compétitive : c’est du bon sens. Or cet article annule un quart des baisses de charges prévues en 2016. C’est un très mauvais signal, en contradiction avec les propos
– étonnants, mais lucides – du Président de la République rappelés par M. Perrut. Il vient après un autre message source de confusion : l’annonce d’une couverture universelle, en contradiction totale avec la sécurité sociale imaginée à la Libération où ceux qui sont indemnisés sont ceux qui ont cotisé. On se demande où on va !

Les entreprises ont besoin de visibilité et sont une fois de plus mises en difficulté, ce qui est inacceptable.

M. Lionel Tardy. Comme je l’ai dit lors des questions au Gouvernement la semaine dernière, ce report de trois mois des allégements de charge est un très mauvais signal envoyé à nos entreprises. Celles-ci ont besoin de stabilité fiscale, et une mesure à laquelle elles tenaient est reportée, tout près de l’échéance – cette mesure devait entrer en vigueur au 1er janvier 2016. Ces allégements ne régleront certes pas tout, mais ils apporteront un peu d’oxygène à nos entreprises, qui en ont bien besoin en ce moment.

Comme pour les montants accordés aux chambres de commerce et d’industrie (CCI) dans le projet de loi des finances, le Gouvernement prend des engagements dont on se rend compte plus tard qu’il ne les tient pas. Que devient la crédibilité de la parole donnée ? Vos financements sont incomplets, je le comprends bien, mais il fallait y réfléchir avant !

Pouvez-vous nous préciser enfin, monsieur le rapporteur, quelles sont les économies attendues de cette mesure ? Les entreprises sauront ainsi combien leur coûte l’amateurisme budgétaire du Gouvernement. Dans tous les cas, elles n’ont pas – pas plus que les ménages d’ailleurs – à être considérées comme des variables d’ajustement.

M. Arnaud Richard. Les entreprises ont besoin de visibilité, et ce report constitue un signal extrêmement négatif. Ce sont 40 % des salariés français qui sont touchés, et les chefs d’entreprise vont s’interroger sur la valeur de la parole publique.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. L’adoption de ces amendements coûterait 1 milliard d’euros !

Mais le Gouvernement ne fait pas d’économies sur les mesures en faveur des entreprises : le report de l’extension de l’assiette de l’allégement de cotisations familiales permettra de financer différentes mesures qui figurent dans la loi Macron, ainsi que le suramortissement mis en place par le Gouvernement.

Il y a certes une remise en question du calendrier, mais pas du fond, l’objectif étant toujours d’améliorer la compétitivité des entreprises afin de créer des emplois. L’enveloppe globale prévue par le pacte de responsabilité sera respectée.

M. Jean-Pierre Barbier. Je ne reviens pas sur le mauvais coup porté aux entreprises. Mais où est le grand soir fiscal annoncé par François Hollande ? Ce phénomène de tuyauterie est invraisemblable. Nous nous réjouissons des exonérations de cotisations, mais elles seront compensées, nous dites-vous, par le budget de l’État : quelles recettes seront utilisées ? Personne ne nous le dit.

Or ce seront, j’en ai peur, ceux qui bénéficieront de quelques exonérations sur leurs cotisations sociales qui finiront par les payer quand même lorsqu’ils acquitteront leur impôt sur le revenu. Ce que vous mettez en place, c’est un cercle vicieux d’une fiscalité qui tourne en rond sans régler aucun problème.

La Commission rejette les amendements identiques.

Puis elle adopte l’article 7 sans modification.

Article 8 : Suppression progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés (étape 2 du Pacte de responsabilité et de solidarité)

La Commission examine d’abord deux amendements identiques, AS121 de Mme Jacqueline Fraysse et AS223 de M. Jean-Louis Roumegas, tendant à supprimer l’article 8.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à supprimer la hausse d’abattement de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S). Cette mesure représentera un manque à gagner d’un milliard d’euros pour la sécurité sociale. Cette disposition, qui vient s’ajouter à toutes les mesures généreuses déjà prises en faveur des entreprises, réduit les recettes de la sécurité sociale sans que l’on ait le plaisir d’en constater le moindre effet positif pour la collectivité.

M. Jean-Louis Roumegas. La C3S est un impôt qui n’est pas satisfaisant, puisqu’il ne garantit pas que les entreprises soient imposées en fonction de leur rentabilité. Mais la solution retenue par le Gouvernement a entraîné, dès cette année, une réduction de 67 % du nombre d’entreprises imposées, et donc des pertes de recettes importantes pour la sécurité sociale dès 2014. En portant le montant de l’abattement à 19 millions d’euros, cet article entraînera une perte supplémentaire d’un milliard d’euros.

C’est surtout le principe même de cette mesure qui est contestable : le pacte de responsabilité la justifiait par la nécessité d’aider les TPE et les PME. Mais vous allez cette fois bien au-delà : cet abattement ne concerne plus seulement les TPE et les PME, ou les entreprises en difficulté ; il n’a pour condition aucune action sociale ou environnementale. Depuis le début, nous dénonçons d’ailleurs le fait que le pacte de responsabilité ne demande pas la moindre contrepartie aux entreprises.

Cette mesure est donc injuste et inefficace.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. L’extension de l’abattement permettra de toucher toutes les PME, mais aussi les établissements de taille intermédiaire (ETI) dont notre pays manque, par rapport notamment à l’Allemagne ; or c’est à partir de cette taille que les entreprises peuvent exporter.

De plus, les finances sociales ne seront pas pénalisées, puisque les effets de cette mesure seront intégralement compensés par le budget de l’État.

Monsieur Barbier, le projet de loi de finances, et donc les réformes fiscales prévues par le Gouvernement, sont en cours de discussion dans l’hémicycle. Bien sûr, il est difficile d’être à la fois ici et là-bas. Mais il est bien prévu une compensation à l’euro près pour les finances sociales des mesures du pacte de responsabilité.

La Commission rejette les amendements identiques.

Puis elle adopte l’article 8 sans modification.

Article 9 : Modification du dispositif d’exonérations de cotisations sociales patronales dans les outre-mer (LODEOM)

La Commission adopte l’article 9 sans modification.

Article 10 : Suppression des dispositifs d’exonérations sociales applicables aux bassins d’emplois à redynamiser (BER), aux zones de restructuration de la défense (ZRD) et aux zones de revitalisation rurale (ZRR)

La Commission se saisit de l’amendement AS325 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Vous supprimez ici des dispositifs destinés à des territoires en souffrance. Les zones de restructuration de la défense (ZRD), créées au moment de la fermeture de différentes implantations militaires, n’ont que six années d’existence, ce qui n’est pas suffisant pour réimplanter de l’activité économique : vous mettez en danger leur avenir. Vous supprimez également les avantages sociaux dans les zones de revitalisation rurale (ZRR), ce qui est un signe négatif, alors que les habitants des zones rurales se sentent souvent délaissés. Quant aux bassins d’emplois à redynamiser (BER), les exonérations fiscales et sociales qui y sont prévues devaient de toute façon prendre fin au 31 décembre 2017 : les supprimer dès aujourd’hui est également surprenant ; cela risque de désorienter les entreprises, ainsi que les collectivités territoriales, qui ont pu investir.

Je propose donc de supprimer l’article 10.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. Vous regrettiez tout à l’heure, monsieur Vercamer, que le Gouvernement ne suive pas les observations de la Cour des comptes : or voilà des années que la Cour, mais aussi l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l’inspection générale des finances (IGF), dénoncent l’insuffisante efficience de ces dispositifs.

Cet article ne touche pas aux avantages fiscaux, mais seulement aux avantages sociaux, qu’il fige au niveau actuel. Autrement dit, on arrête le flux, mais on ne réduit pas le stock.

De plus, la progression du régime des allégements généraux rend ces dispositifs bien moins attractifs.

M. Dominique Tian. Nous avons eu le même débat à propos des zones franches l’an dernier : geler les avantages accordés aux entreprises ne va pas les inciter à investir dans ces zones… De plus, les rapports que vous citez regrettaient la trop grande complexité de ces dispositifs, et surtout la grande insécurité juridique subie par les entreprises : cette politique est donc contreproductive, et pour tout dire un peu absurde.

Mme Bérengère Poletti. Cet amendement est important : il est question ici de zones qui sont toutes en difficulté, qui ont toutes besoin d’aide, et qui avaient avec l’État une sorte de contrat. L’État n’honore pas ses engagements : les signaux de reniement de la parole de l’État sont nombreux dans ce PLFSS, ce qui détruit la confiance de nos concitoyens. C’est très préoccupant, et j’espère que cet amendement sera voté.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 10 sans modification.

Après l’article 10

La Commission se saisit de l’amendement AS4 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Cet amendement est très attendu de tous les particuliers employeurs, qui sont plus de 3 millions dans notre pays. Depuis trois ans, plus de 21 000 emplois équivalents temps plein ont disparu dans le secteur des services à la personne. L’an dernier, après de longs débats, nous avions adopté une réduction de cotisations, mais pour les seules activités de garde d’enfants de six à treize ans.

Nous demandons la généralisation de cette réduction de 1,50 euro. Vous devez l’accepter, car le développement des emplois de services à la personne est très attendu. C’est l’une des meilleures façons de lutter contre le chômage.

M. Gérard Bapt, rapporteur. L’an dernier, nous avions effectivement fait un grand progrès, en réduisant les cotisations pour la garde des enfants de six à treize ans. Cette mesure a pris effet au 1er janvier 2015, et les premiers chiffres sont prometteurs : il semble que le nombre d’heures ait augmenté.

Il serait toutefois judicieux d’attendre l’évaluation précise des mesures adoptées l’an dernier. J’ai reçu Mme Levaux, présidente de la Fédération des particuliers employeurs de France (FEPEM), qui est plutôt partisane de la stabilité. Attendons l’année prochaine pour tirer des conclusions.

De plus, de telles mesures coûtent cher au budget de l’État : j’attends toujours des députés de l’opposition qu’ils nous proposent des économies. Vous parlez d’économiser 100 à 150 milliards d’euros, mais cet après-midi, vous ne nous proposez que des dépenses !

M. Élie Aboud. Dans une autre vie, monsieur le rapporteur, vous disiez que la prévention ne coûte jamais cher, puisqu’elle évite des accidents qui, eux, auraient coûté très cher !

La mesure que nous vous proposons créerait des emplois ; c’est donc bien une mesure positive pour la sécurité sociale. Elle ferait aussi reculer le travail au noir. Le Gouvernement a bien compris qu’un geste était nécessaire, puisqu’il nous a suivis l’année dernière, mais sur une toute petite partie des heures concernées. L’extension de cette mesure aux seniors à tout le moins serait très intéressante.

M. Bernard Accoyer. Eh bien, monsieur le rapporteur, je vais vous proposer une piste d’économies : permettez aux familles d’embaucher, cela fonctionne ! Il faut favoriser la déclaration, l’officialisation des emplois qui existent de toute façon dans les familles. Ainsi, des cotisations sont payées, et les personnes employées gagnent des droits sociaux.

La Commission rejette l’amendement.

Chapitre II
Simplification du recouvrement des cotisations dues
par les entreprises et les travailleurs non-salariés

Article 11 : Proportionnalité du redressement en matière de protection sociale complémentaire

La Commission se saisit d’abord de l’amendement AS355 de M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. Cet amendement est, ainsi que les suivants, issu des propositions que Marc Goua et moi-même avons formulées dans notre rapport au Gouvernement, rapport qui cherche à établir un nouveau mode de relations entre l’URSSAF et les entreprises.

Le redressement infligé par l’URSSAF doit absolument être proportionnel à l’importance de la faute – parfois commise, d’ailleurs, en toute bonne foi – car les conséquences d’un redressement peuvent en effet être dramatiques.

Ce premier amendement est rédactionnel. Il s’agit de marquer que le recouvrement n’est pas effectué par un tiers, par un agent, par exemple, d’une société extérieure.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je commence par remercier et féliciter MM. Gérard et Goua, puisque leur travail est à l’origine de l’article 11 que nous discutons, et qui impose une proportionnalité entre l’erreur, ou la faute, et l’importance du redressement.

Malheureusement, la notion d’agents de contrôle est plus large que celle d’inspecteur du recouvrement par laquelle vous proposez de la remplacer. Sur ce sujet rédactionnel de moindre importance, je vous demanderais de bien vouloir retirer votre amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS357 de M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. Les termes utilisés par l’article de « méconnaissance d’une particulière gravité » sont très vagues. On peut toujours avoir tort, mais il faut savoir pourquoi on est condamné ! Il nous paraît donc nécessaire de prévoir un formalisme particulier et d’expliquer au cotisant ce qui lui est reproché.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement alourdit par trop la procédure administrative, notamment en prévoyant une contresignature systématique par le directeur de l’organisme chargé du recouvrement. Mais c’est un détail.

En l’état du droit, une simple erreur a pour effet de soumettre l’intégralité des versements de l’employeur aux prélèvements sociaux, alors qu’ils en sont en principe exonérés. L’article 11 prévoit de proportionner le redressement aux seules sommes faisant défaut. C’est son grand mérite.

Si l’erreur est purement administrative – s’il s’agit, par exemple, d’un oubli de déclaration –, le redressement est égal à une fois et demie les sommes manquantes.

Si le manquement est d’une autre nature, sans être constitutif d’une méconnaissance d’une particulière gravité, le redressement est égal à trois fois les sommes manquantes.

Vous souhaitez que dans ce dernier cas, la nature du manquement soit précisée par courrier à l’employeur redressé. Je vous rejoins sur l’esprit de cet amendement, mais il présente des problèmes de rédaction. Je vous propose de retirer cet amendement, afin que nous en déposions ensemble une nouvelle version en séance.

L’amendement est retiré.

La Commission se saisit alors de l’amendement AS360.

M. Bernard Gérard. Cet amendement vise à corriger une erreur juridique. La prescription doit courir à partir de l’avertissement ou de la mise en demeure, et non à partir du début du contrôle.

M. Gérard Bapt, rapporteur. De fait, les règles contentieuses usuelles du code de la sécurité sociale se réfèrent le plus souvent à la date de l’avertissement ou de la mise en demeure, et non à celle du début de contrôle.

Mais en pratique, il s’agit de la même année, puisqu’un contrôle ouvert au cours d’une année doit en principe être clos au cours de la même année. Si c’est bien le cas, votre amendement est satisfait. Je vous propose de retirer cet amendement, afin que nous effectuions les vérifications nécessaires et que nous déposions éventuellement un amendement en séance publique.

L’amendement est retiré.

La Commission se saisit alors de l’amendement AS358.

M. Bernard Gérard. Encore une fois, il convient d’expliquer au cotisant les mesures prises à son encontre, en l’occurrence la raison pour laquelle il entre dans l’un des cas d’exception au principe de proportionnalité. Il est intolérable que quelqu’un qui va être sanctionné ne sache pas ce qu’on lui reproche ! Je demande donc un courrier circonstancié.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Ces précisions sont d’ordre réglementaire. En tout état de cause, un agent de contrôle doit toujours motiver ses décisions, sans quoi elles tomberaient au contentieux. Je vous propose donc de retirer cet amendement.

La Commission rejette cet amendement.

Puis elle adopte l’article 11 sans modification.

Après l’article 11

La Commission se saisit, en discussion commune, des amendements AS15 de M. Dominique Tian et AS351 de M. Bernard Gérard.

M. Dominique Tian. Je me réjouis de ce que M. Bapt a reconnu l’excellence du rapport parlementaire de nos deux collègues, et je laisse à M. Gérard le soin d’expliquer ces amendements, qui sont similaires.

M. Bernard Gérard. Merci, mon cher collègue.

Cet amendement vise à améliorer le processus de décision des commissions de recours amiable. Il paraît indispensable que le cotisant puisse présenter des observations, et s’exprimer s’il le souhaite. La commission Fouquet avait d’ailleurs formulé des propositions en ce sens, « l’explication orale éclairant les productions écrites lorsque les problèmes sont complexes ». C’est le but de cet amendement, qui permettrait de supprimer tout un contentieux parasite qui engorge les tribunaux des affaires de sécurité sociale. Aujourd’hui, on peut parfois attendre une décision pendant des années ! À Lille, le greffe ne suit pas, l’audiencement ne fonctionne plus.

Cet amendement va donc dans le sens d’une simplification et d’une amélioration considérable des relations entre l’URSSAF et l’entreprise.

Mme la présidente Lemorton. J’appelle votre attention sur le fait que ces amendements sont similaires, mais pas identiques.

M. Dominique Tian. Je retire le mien pour me rallier à celui de M. Gérard.

L’amendement AS15 est retiré.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS351.

La Commission examine l’amendement AS354 de M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. Cet amendement, qui reprend la proposition n° 43 de notre rapport, vise à améliorer la procédure d’annulation d’une décision de la commission de recours amiable par l’autorité de tutelle, et ce pour la bonne information du cotisant. En cas d’annulation, en effet, le cotisant n’est informé que du rejet du recours, et non des raisons qui l’ont motivé. Or, la charte sur le fonctionnement des recours amiables, adoptée par l’ensemble des membres du conseil d’administration de l’ACOSS et validée par la tutelle, prévoit que toute décision d’annulation doit être motivée. Pourtant, une lettre collective interne diffusée aux directeurs d’URSSAF précise qu’il ne faut en aucun cas faire mention des motifs de l’annulation. Ce n’est ni acceptable en droit ni conforme au principe du contradictoire. Pour respecter le cotisant en situation de redressement, il convient de l’informer des raisons ayant motivé la décision le concernant.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. Cet amendement présente l’inconvénient majeur de rompre l’unicité de la décision administrative. En effet, les délibérations de la commission de recours amiable n’ont d’existence que lorsqu’elles sont validées ou annulées par la mission nationale de contrôle. Elles ne peuvent donc pas être communiquées. Le requérant a naturellement la possibilité de déposer un recours pour faire invalider une décision qu’il estime défavorable, mais il ne faut pas mettre la commission de recours amiable en opposition avec une administration dont elle fait partie intégrante.

M. Bernard Accoyer. À quoi servent donc les rapports parlementaires ? M. le rapporteur n’a retenu aucune des propositions issues du rapport de MM. Gérard et Goua qui lui ont été présentées. Leur travail n’a-t-il été qu’une perte de temps ?

Mme la présidente. Tous les parlementaires auteurs de rapports ont connu la frustration, hélas…

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS345 de M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. Cet amendement vise à ce que soit désigné au sein de chaque union de recouvrement un interlocuteur unique chargé de conseiller les entreprises et de faciliter leurs démarches sociales. Les plateformes téléphoniques, en effet, ne permettent pas toujours aux entreprises d’obtenir les renseignements adéquats, car leur dossier n’est pas forcément connu de l’interlocuteur qu’ils ont au bout du fil. La proposition n° 16 de notre rapport visait précisément à améliorer les rapports entre les URSSAF et les cotisants ; l’existence d’un interlocuteur unique y contribuerait.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. J’ai salué la qualité du rapport de MM. Gérard et Goua, qui est largement repris dans l’article 11. Il en est aussi résulté un certain nombre d’amendements cosignés par les auteurs dudit rapport : certains sont d’ordre réglementaire, d’autres ont été déclarés irrecevables, d’autres enfin partent d’une intention louable – c’est le cas de l’amendement AS345.

En effet, l’existence d’un interlocuteur unique pourrait sembler susceptible de faciliter les relations entre l’administration et les cotisants. Cela étant, il pose un problème de gestion, car l’interlocuteur en question ne pourra pas toujours être la même personne, notamment en période de congé et de maladie. D’autre part, il alourdirait la charge qui pèse sur les URSSAF – surtout de taille modeste – en les obligeant à augmenter leur effectif. Enfin, les liens entre une entreprise et un interlocuteur unique au sein de l’administration pourraient, s’ils devenaient privilégiés, évoluer de telle sorte qu’ils nuisent à l’objectivité de leur dialogue. Mieux vaut préférer l’existence d’un dossier unique par entreprise auquel les agents contactés puissent accéder aisément.

La Commission rejette l’amendement.

Elle passe à l’amendement AS346 de M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. Cet amendement, qui reprend la proposition n° 28 de notre rapport, vise à renforcer la sécurité juridique des cotisants. Lorsque les entreprises en font la demande explicite, les URSSAF doivent leur fournir une réponse précise, complète et argumentée ; or, ce n’est pas toujours le cas, loin s’en faut. Les réponses étant parfois lapidaires, les entreprises ne savent pas ce qu’elles ont à faire.

C’est la raison pour laquelle notre rapport préconise l’ouverture du rescrit non seulement au déclarant, mais aussi au tiers déclarant et aux organismes professionnels. Nul n’est censé ignorer la loi, nous dit-on : rien n’est plus faux. En réalité, il est de plus en plus difficile de s’y retrouver et les conséquences d’un redressement sont très lourdes. Les entreprises doivent donc à tout le moins obtenir une réponse précise sur leur cas.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cette intention positive sera concrétisée par l’ordonnance qui sera publiée en application de la loi relative à la simplification des entreprises. Elle prévoira en effet que les réponses apportées à des questions précises le soient sous forme de rescrit social, même si les questions n’auront pas été posées sous cette forme. Le rescrit a pour effet d’engager le réseau de recouvrement dans son ensemble à apporter une réponse identique aux mêmes cas de figure. De ce fait, il est plus efficace encore qu’une réponse individuelle, aussi circonstanciée soit-elle. L’objectif de l’amendement étant non seulement atteint mais élargi, j’en propose donc le retrait.

M. Bernard Gérard. Je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS344 de M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. En cas de contrôle, certaines décisions sont explicites et d’autres implicites. Lorsqu’un inspecteur ne fait aucune observation sur tel ou tel sujet, il est anormal que l’un de ses collègues estime quelques années plus tard qu’il y a pourtant matière à recours – avec toutes les conséquences dramatiques qui en découlent pour l’entreprise. La jurisprudence de la Cour de cassation ne permet pas de tenir compte des décisions dites implicites. C’est pour remédier à cette anomalie que je propose d’en faire mention à l’article L. 243-6-4 du code de la sécurité sociale.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Le code de la sécurité sociale permet à un cotisant ayant changé d’organisme de recouvrement de se prévaloir d’une décision explicite rendue en sa faveur par son précédent organisme de rattachement. L’amendement vise à étendre cette possibilité aux décisions implicites, mais comment se prévaloir d’une décision qui, par définition, n’a pas été formulée par écrit ? Cela reviendrait à permettre aux cotisants de se prévaloir devant une URSSAF de ce qu’un autre organisme aura toléré sans le préciser de manière explicite. Dès lors, l’amendement aurait un effet inverse à son objectif : les organismes de recouvrement auraient tendance à adopter des positions plus sévères à l’égard des entreprises pour éviter, dans le doute, la validation implicite de certaines pratiques. Il serait plus logique que ces positions soient exprimées de manière explicite. Je propose donc de rejeter cet amendement qui risque de nuire à l’intérêt des entreprises concernées.

M. Bernard Gérard. C’est précisément l’inverse ! C’est à la fois une cause d’insécurité juridique et un facteur d’injustice que d’exiger d’une entreprise qu’elle s’acquitte d’une amende alors que lors d’un contrôle effectué plusieurs années auparavant, rien ne lui a été demandé concernant telle ou telle cotisation. Les URSSAF sont destinées à percevoir des cotisations, et non des pénalités ! Or, avec une telle mesure, les entreprises seront tenues de payer des pénalités pour des fautes qu’en toute bonne foi, elles n’ont jamais voulu commettre ! Ce serait faire œuvre utile que d’inclure les décisions implicites dans le texte.

La Commission rejette l’amendement.

Elle se saisit ensuite de l’amendement AS350 de M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. Cet amendement vise à améliorer le fonctionnement de la commission de recours amiable. L’amélioration consistant à suspendre les majorations de retard en cas de saisine de cette commission par le cotisant va de soi. Il serait tout à fait anormal que l’organisme de recouvrement puisse profiter de ses propres délais. Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude : il n’y a aucune raison pour que les URSSAF perçoivent des pénalités parce qu’elles tardent à décider du montant d’une majoration. C’est une question de justice.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. Avec cet amendement, les commissions de recours amiable risqueraient l’embolie et ploieraient sous la charge, car les cotisants les saisiraient systématiquement afin de suspendre le cours des majorations. De surcroît, les majorations, qui peuvent être remises une fois les cotisations acquittées, ont précisément pour objet d’éviter les retards de paiement ; le mécanisme proposé, au contraire, les favoriserait. Enfin, il est toujours possible de demander au juge l’interruption du cours des majorations. Il n’est pas souhaitable de transférer ce pouvoir aux commissions de recours amiable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS347 de M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. Cet amendement vise à donner une base légale à l’avis amiable.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. L’amendement permet de substituer un avis amiable à un avertissement ou à une mise en demeure. À la différence de la mise en demeure, néanmoins, l’avis amiable ne sécurise pas les créances : c’est comme si aucune procédure de recouvrement n’avait été enclenchée. En effet, seule une mise en demeure permet d’interrompre le délai de prescription. Une procédure similaire existe déjà pour les recouvrements d’un montant inférieur à 76 euros. En l’espèce, les montants visés sont bien supérieurs, puisqu’il s’agit du plafond mensuel de la sécurité sociale, soit plus de 3 000 euros – de ce point de vue, je m’interroge même sur la recevabilité financière de cette proposition.

La Commission rejette l’amendement.

Elle passe à l’amendement AS349 de M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. Cet amendement vise à clarifier le contenu de la mise en demeure, de sorte qu’il soit précis et motivé.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Lors d’un précédent amendement, j’ai convenu de la nécessité que les cotisants soient informés de manière précise de la motivation des décisions qui les concernent. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

Article 12 : Délégation aux URSSAF du recouvrement des cotisations d’assurance maladie des professions libérales

La Commission adopte l’article 12 sans modification.

Article 13 : Renforcement des options de lissage des revenus professionnels des non-salariés agricoles soumis à cotisations sociales

La Commission adopte l’article 13 sans modification.

Article 14 : Report à 2020 de l’obligation de bascule au régime micro-social des personnes relevant du régime micro-fiscal au 31 décembre 2015

La Commission adopte l’article 14 sans modification.

Après l’article 14

La commission examine l’amendement AS387 du rapporteur Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement technique vise à sécuriser une procédure de contrôle. Le code de la sécurité sociale prévoit un redressement forfaitaire en cas de constat de travail dissimulé si la situation réelle ne peut pas être reconstituée. Sauf preuve contraire apportée par l’employeur, les rémunérations versées ou dues au titre d’un travail dissimulé sont évaluées à six fois le SMIC, assiette à laquelle s’appliquent les prélèvements sociaux.

Cette rédaction a pu donner lieu à des confusions sur l’intention du législateur, certains juges estimant que si l’employeur apporte la preuve que le salarié employé illégalement l’est depuis moins de six mois, l’assiette doit être ramenée au nombre de SMIC correspondant au nombre de mois d’emploi, même si aucune preuve n’est donnée de la rémunération réelle de l’employé en question. De ce fait, un employeur salariant illégalement depuis quatre mois une personne dont la rémunération mensuelle atteint deux SMIC – soit une assiette réelle de huit SMIC – peut subir un redressement calculé sur la base de quatre SMIC seulement, soit moins que l’intention du législateur, c’est-à-dire six SMIC.

Afin de sécuriser les actions de lutte contre la fraude et d’appliquer pleinement la logique forfaitaire du redressement, cet amendement vise à apporter deux corrections au dispositif en vigueur. D’une part, il précise que la preuve contraire, qui peut toujours être apportée par l’employeur pour que le redressement s’effectue « au réel », doit concerner non seulement la durée réelle d’emploi mais aussi le niveau réel de salaire. D’autre part, afin d’éviter toute réduction de la sanction forfaitaire en fonction du temps passé dans l’entreprise, il substitue à une sanction forfaitaire correspondant à six SMIC une autre exprimée en fraction du plafond annuel de la sécurité sociale – en l’occurrence 25 %, ce qui correspond peu ou prou à six SMIC. Calculée en fraction du plafond annuel de sécurité sociale, la sanction forfaitaire s’élève à 9 510 euros, soit légèrement plus que si elle équivalait à six SMIC – 8 742 euros.

M. Bernard Accoyer. Je note la constance avec laquelle notre rapporteur, la majorité et le Gouvernement appliquent une logique punitive faite de sanctions, au détriment de toute mesure d’incitation. Vous avez ainsi repoussé nos amendements encourageant à déclarer certains emplois, notamment familiaux. Aucun texte ne pourra donc être examiné sous cette législature sans qu’il y soit ajouté des sanctions en tous genres !

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle passe à l’amendement AS338 de Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. Un amendement initial ayant été déclaré irrecevable au titre de l’article 40, cet amendement de repli prévoit la remise d’un rapport. L’article 20 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a instauré un droit temporaire à l’affiliation au régime général de la sécurité sociale pour les personnes exerçant une activité réduite. Plusieurs conditions sont requises : l’activité doit être déclarée, les revenus annuels qui en sont tirés ne doivent pas dépasser 4 875 euros et les bénéficiaires doivent bénéficier du soutien d’une association agréée pour leurs démarches administratives et financières.

Ce dispositif devait prendre fin en 2012, mais la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 l’a prolongé jusqu’à la fin 2014. Il est souhaitable de le pérenniser, car il contribue à l’insertion des personnes exerçant une activité économique réduite et à la diminution du secteur informel de l’économie. Le Gouvernement étant favorable à cette mesure, il convient d’envisager les pistes permettant d’avancer.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Le problème est réel, à telle enseigne que nous avons déjà décidé de proroger le dispositif jusqu’à la fin 2014. Cela étant, vous proposez qu’un rapport soit remis avant le 15 décembre mais, à cette date, le PLFSS aura déjà été voté. Je vous propose donc de retirer cet amendement et de suggérer au Gouvernement de reprendre en séance celui que vous aviez initialement déposé, ce qui permettra en outre de résoudre la question du gage.

Mme Chaynesse Khirouni. Soit, je retire cet amendement en attendant que la proposition initiale soit examinée en séance.

L’amendement est retiré.

Chapitre III
Dispositions relatives aux recettes et à la trésorerie des organismes de sécurité sociale

Article 15 : Transferts de recettes entre organismes et branches de la sécurité sociale

La Commission examine l’amendement AS5 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Cet article laisse accroire que les allégements de charges votés en loi de financement rectificative pour 2014 sont compensés ; c’est parfaitement faux ! Des réaffectations de taxes renvoyant sans nouvelles ressources le coût de la mesure vers le budget de l’État ne constituent en rien une compensation. M. Eckert l’a d’ailleurs reconnu lors de son audition le 7 octobre dernier, en indiquant que la réduction du budget de l’État serait moindre cette année en raison du coût des allégements de charges. Il confirme ainsi que ces mesures sont financées par la dette et qu’elles ne sont pas compensées. C’est pourquoi nous vous proposons de supprimer cet article qui s’apparente à une véritable tuyauterie !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet article est d’une lecture assez ardue, je le concède, mais il est le fruit de l’imagination créative de notre administration – la même que sous la précédente législature. Toutefois, ne pas le voter entraînerait une conséquence double. Tout d’abord, nous nous mettrions en contradiction avec le droit de l’Union européenne qui interdit d’affecter à des organismes servant des prestations contributives le produit de prélèvements sur le capital acquittés par des personnes non affiliées à un régime de sécurité sociale en France. D’autre part, nous créerions un vaste déséquilibre dans les comptes sociaux car il faut tirer les conséquences de la compensation par le projet de loi de finances du pacte de responsabilité – compensation effectuée pour l’essentiel via la reprise par l’État de dépenses aujourd’hui couvertes par la branche famille. Faute de modification de cette « tuyauterie », ladite branche serait surcompensée au détriment des autres organismes. Je propose donc le rejet de cet amendement.

M. Jean-Pierre Barbier. Je constate qu’avec cet article, vous ôtez à la caisse d’amortissement de la dette sociale, la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), 1,5 milliard de recettes provenant des prélèvements sociaux. Vous compensez cette diminution par un apport de 1,4 milliard provenant de la CSG sur les revenus d’activité et de remplacement, et les produits des jeux, ainsi que 100 millions tirés de la CSG sur les revenus du capital. Or, ces sommes affectées à la CADES feront bien défaut quelque part ! Avec quelles recettes financerez-vous ce mouvement de fonds ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Le dispositif est certes complexe, mais il simplifie le financement de la CADES, qui ne reposera plus que sur les ressources tirées de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), supprimant le troisième mode de financement qui existait. D’autre part, les pertes de recettes et les transferts internes à la sécurité sociale sont bien compensés, et l’équilibre est garanti.

M. Jean-Pierre Barbier. Certes, on revient à l’équilibre en transférant à la CADES un montant de 1,5 milliard, mais il sera prélevé ailleurs. D’autre part, la CADES était jusqu’à présent financée à hauteur de 13,1 % par le fonds de réserve des retraites, et cela n’apparaît plus dans les données qui nous sont communiquées. Qu’en est-il ?

Cette question du financement de la CADES me semble très préoccupante. À l’article 17, monsieur le rapporteur, vous présenterez un amendement visant à transférer une partie du déficit de l’ACOSS aux comptes de la CADES. Vous supprimez des recettes tout en alourdissant le budget de la CADES ! Comment ferez-vous donc l’an prochain ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Nous reparlerons de l’an prochain en temps voulu. Pour cette année, le transfert de la dette de l’ACOSS à la CADES est d’ores et déjà préfinancé.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS356 de M. Bernard Accoyer.

Mme Claudine Schmid. Cet amendement vise à éviter le transfert du produit de la CSG sur les revenus du capital au fonds de solidarité vieillesse, le FSV. Ce transfert a été décidé malgré l’arrêt du 26 février 2015 de la Cour de justice de l’Union européenne et celui du 27 juillet 2015 du Conseil d’État, qui a considéré que l’imposition des prélèvements sociaux sur les revenus du capital des non-résidents n’est pas conforme à la législation européenne, ce dont M. le rapporteur a d’ailleurs convenu par écrit. Il est étonnant que le Gouvernement contourne par cet article les décisions de ces juridictions. Le rejet du présent amendement nous engagerait donc à nouveau sur la voie de trois années de contentieux. Du même coup, l’argument selon lequel l’adoption de l’amendement précédent nous mettrait en contradiction avec le droit européen n’est pas recevable. D’autre part, l’affectation du produit de la CSG sur les revenus du capital à une prestation sociale non contributive constitue selon moi la première étape de la fusion entre la CSG et l’impôt sur le revenu, que M. Ayrault vient de présenter en séance publique. Enfin, hormis les réserves exprimées ci-dessus, un tel article a davantage sa place en projet de loi de finances.

M. Philip Cordery. Avant 2012, les non-résidents ne s’acquittaient ni de la CSG ni de la CRDS ; en 2012, nous avons mis un terme à cette inégalité. Certes, la Cour de justice de l’Union européenne y a vu un problème de conformité avec le droit européen, mais seul le mécanisme est en cause, et non le principe d’égalité devant l’impôt. Le Gouvernement propose de réaffecter le produit de ces prélèvements au FSV et, pour partie, à la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA. Ces prestations n’étant pas liées à l’appartenance à un régime de sécurité sociale, la mesure est conforme au droit européen. En outre, elle est juste et cohérente, car il est essentiel que tous les contribuables participent de la même manière à l’effort national. Je m’étonne que Mme Schmid défende son amendement avec tant d’ardeur car, si tous les députés agissaient ainsi sous la pression des électeurs afin de supprimer des prélèvements impopulaires, la solidarité disparaîtrait dans notre pays ! De surcroît, le véritable problème ne tient pas aux prélèvements sociaux, que chacun paie, mais à l’inégalité qui subsiste en matière d’impôt sur le revenu, puisque les non-résidents paient un forfait de 20 %. Cette question, toutefois, relève du projet de loi de finances.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Par cet amendement, vous contestez la conformité de l’article 15 à la jurisprudence européenne. La Cour de justice de l’Union européenne a jugé que des prélèvements sociaux sur le capital acquittés par des personnes affiliées à un régime de sécurité sociale dans un autre État membre ne peuvent pas être affectés à des organismes servant des prestations sociales contributives. Au passage, j’insiste sur le fait que l’on peut être non-résident tout en étant affilié ou, inversement, non affilié tout en étant résident.

Le Gouvernement a choisi de réaffecter ces prélèvements sociaux à la première section d’un FSV réorganisé, section qui ne servira que des prestations non contributives, dont les personnes non affiliées pourront, le cas échéant, bénéficier si elles se trouvent en situation de chômage à leur retour sur le territoire national. Mon rapport expose longuement les arguments juridiques permettant de penser que la solution retenue par le Gouvernement est conforme au droit de l’Union. En outre, il me semble que la Commission réfléchit à l’interprétation rigide de la règle qui a inspiré l’arrêt Ruyter. Je ne peux donc qu’être défavorable à cet amendement qui remet en cause le principe même de l’article 15 sans proposer de solution alternative.

M. Bernard Accoyer. Monsieur Cordery, l’amendement de M. Le Borgn’ est le même que celui que Mme Schmid et moi-même avons signé, si bien que je suis surpris de votre attaque contre un député représentant les Français de l’étranger qui se montre fidèle à ses électeurs, injustement traités par cette mesure inique. Inique, car l’opacité du texte de l’article 15 – que vous avez vous-même reconnue, monsieur le rapporteur – illustre ce système de tuyauteries infernales et pernicieuses qu’est devenu le PLFSS : cette illisibilité crée un problème de sincérité.

Nous assistons à un bal d’hypocrites, car on contourne une décision de justice, attitude dilatoire qui engendrera le lancement d’une nouvelle procédure et qui nous conduira à la même situation. Le Gouvernement pose des bombes à retardement pour le cas, fort probable, où une alternance se produirait dans deux ans. Il a déjà agi de la même manière pour le transfert du revenu de solidarité active (RSA) aux départements.

Vous avez également ponctionné le fonds de solidarité vieillesse, qui se retrouve maintenant gravement déficitaire. Il n’y a aucune sincérité puisque les cotisations pour la vieillesse des chômeurs ont été remplacées par d’autres cotisations, comme l’exige la nature même du FSV. L’article 15 constitue un arrangement malsain et une insulte pour les Français expatriés qui ont investi en France. Une fois de plus, la majorité incite à désinvestir, ce qui créera du chômage.

M. Denys Robiliard. Nous devons respecter la décision de justice de l’Union européenne (UE) qui nous oblige à rembourser des contributions prélevées. Le besoin de financement reste identique, et l’on affirme que la contribution sociale généralisée (CSG) est, en droit français, un impôt. Celui-ci, créé par Michel Rocard, vise à refuser de faire supporter au seul travail le financement de la sécurité sociale. L’instauration de la CSG répond donc au souhait de fiscaliser une partie des recettes de la sécurité sociale, la part de ce mode de financement pouvant être débattue.

Rien ne justifie que des revenus générés en France échappent à l’impôt ; on peut discuter de la conformité de cette disposition au droit de l’Union, mais on ne peut pas faire de procès d’intention. Monsieur Accoyer, allez voir au ministère de l’agriculture les conséquences de décisions prises par le précédent gouvernement, et dont la présente majorité a dû assurer le financement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 15 sans modification.

Après l’article 15

La Commission examine l’amendement AS363 de M. Bernard Accoyer.

Mme Claudine Schmid. Le Gouvernement estime pouvoir contourner des décisions de justice en affectant la recette de la CSG prélevée sur les non-résidents à des prestations non-contributives comme celles du FSV. La sécurité juridique de ce montage pose question au regard du droit européen.

Cet amendement vise donc à ce que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de six mois, un rapport sur l’ensemble des conséquences de l’application de ce nouveau dispositif pour les non-résidents.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Madame Schmid, vous demandez un rapport sur un sujet qui n’existe pas ; en effet, vous souhaitez évaluer les conséquences pour les non-résidents de l’attribution au FSV de la CSG et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS). Or, ce n’est pas ce que prévoit l’article 15 ! Celui-ci affecte l’essentiel du produit des prélèvements sociaux sur le capital à la première section d’un FSV rénové, servant uniquement des prestations non contributives, et pas seulement la CSG et la CRDS, dont l’ensemble du produit n’est d’ailleurs pas mobilisé. En outre, il ne s’agit pas des non-résidents, mais des non-affiliés. Ainsi, même si votre amendement était mieux rédigé, je ne vois pas ce qu’il pourrait apporter comme information. Si vous êtes si sûre que l’article 15 n’empêchera pas de nouveaux contentieux, le juge dira le droit ! Vous préjugez de décisions qui dépendent, entre autres, des explications apportées par les autorités françaises à la Commission européenne. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Article 16 : Prélèvement au profit du fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés

La Commission adopte l’article 16 sans modification.

Article 17 : Aménagement du calendrier de reprise des déficits par la CADES

La Commission étudie l’amendement AS385 du rapporteur Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement, technique, a pour objet de mettre en cohérence le calendrier annuel de reprise de dette par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) avec les dispositions de l’article 17 du projet. L’article 4 de l’ordonnance du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale prévoit que les déficits sont repris à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) au titre des années 2011 à 2017 avant le 30 juin de chaque année. Cette reprise de dette est encadrée par un double plafond : 62 milliards d’euros sur la période et 10 milliards par an.

L’article 17 ouvre la possibilité de reprendre dès 2016 le solde permettant de saturer le plafond de 62 milliards d’euros, en faisant sauter la limite annuelle de 10 milliards. En 2016, la CADES reprendra donc 23,6 milliards d’euros à l’ACOSS, et non 10 milliards.

Afin d’étaler dans le temps cette opération et d’éviter de concentrer au premier semestre l’appel aux marchés, il serait souhaitable de supprimer l’obligation de reprise au 30 juin. L’article 29 prévoit d’ailleurs un plafond d’emprunt de l’ACOSS majoré jusqu’à fin août, afin qu’elle puisse porter la dette de la CADES jusqu’à cette date.

M. Jean-Pierre Barbier. Monsieur Robiliard, vous récoltez ce que vous avez semé, car les « plans de campagne » couvraient la période allant de 1992 à 2002.

La CADES a été créée en 1996 dans le but louable d’amortir et d’étaler la dette sociale. Dans ses premières années, elle fut financée exclusivement par la CRDS, avant que la CSG et le fonds de réserve des retraites ne viennent l’alimenter. Le déficit de l’ACOSS s’élève aujourd’hui à 36 milliards d’euros. M. François Fillon, alors Premier ministre, avait préfinancé 62 milliards d’euros, et il reste 23,6 milliards dont vous prélevez entre 10 et 15 milliards d’euros pour réduire le découvert de l’ACOSS. Parallèlement, vous diminuez les recettes de la CADES, et l’ACOSS conservera une dette de 10 milliards d’euros. L’année prochaine, les déficits sociaux de l’année 2016 devront être intégrés, soit une nouvelle dizaine de milliards d’euros, si bien que le déficit cumulé de l’ACOSS se situera entre 26 et 27 milliards d’euros. Monsieur le rapporteur, comment le découvert de l’ACOSS, qui sera plafonné car on ne pourra pas déplafonner à nouveau, pourra être repris alors que la CADES connaîtra une baisse de ses recettes ? Deux solutions s’offriront à vous : allonger le délai de remboursement de la CADES au-delà de 2024 ou augmenter la CRDS. J’avais déjà alerté Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, sur ce sujet ; en fait, juste avant de quitter le pouvoir, vous dépouillez la CADES de ses 23,6 milliards d’euros, et vous laissez à vos successeurs le soin de régler la situation. Vous l’écrivez d’ailleurs dans le rapport annexé au projet de loi. Qu’allez-vous faire après 2016 ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Notre démarche n’est pas insincère, puisque nous l’écrivons dans le rapport, comme vous venez de le souligner, monsieur Barbier. À chaque année budgétaire suffit sa peine ! Nous devrons résoudre ce problème dans le PLFSS pour 2017, mais, pour l’année 2016, nous vous proposons une mesure de bonne gestion. L’ACOSS supporte à l’heure actuelle une part de la dette sociale, en la finançant à des conditions avantageuses par des taux d’intérêt négatifs, le ralentissement économique américain pouvant inciter la Réserve fédérale (Fed) à maintenir sa politique de taux bas.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 17 modifié.

Après l’article 17 

La Commission est saisie de l’amendement AS173 de M. Rémi Delatte.

M. Rémi Delatte. Cet amendement a pour but d’étendre aux établissements de santé le taux réduit de TVA à 5,5 % applicable à la fourniture de logement et de nourriture dans les maisons de retraite et les logements-foyers.

La restauration en milieu hospitalier ne peut être assimilée à la celle d’entreprise et il n’y a pas lieu d’appliquer, comme aujourd’hui, le même taux de TVA. Elle s’avère humainement et techniquement beaucoup plus proche, sinon identique parfois, de la restauration effectuée dans les établissements médico-sociaux pour les personnes âgées et les handicapés.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Monsieur Delatte, si ces établissements profitaient d’une baisse de la TVA, le Gouvernement en tiendrait probablement compte en diminuant ses dotations. Par ailleurs, la TVA étant un impôt intégralement affecté à l’État, vous devriez proposer d’amender le projet de loi de finances (PLF) et non le PLFSS. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS227 de M. Jean-Louis Roumegas. 

M. Jean-Louis Roumegas. Nous proposons de créer une taxation qui aura pour effet d’augmenter progressivement le prix de l’huile de palme. Notre démarche poursuit un objectif sanitaire et environnemental. On attend des États se réunissant en France dans quelques semaines pour la 21e conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP-21) des mesures de réduction des gaz à effet de serre (GES) et d’arrêt de la déforestation, celle-ci constituant l’une des causes principales du dérèglement climatique. Pour des raisons économiques, les pays occidentaux s’avèrent de grands consommateurs d’huile de palme, dont les industriels abusent car elle est bon marché et facile à produire. Elle représente un facteur majeur du processus de déforestation, et la consommation excessive de ses acides gras saturés contribue aux maladies cardio-vasculaires.

Nous avons donc une responsabilité dans le développement de l’huile de palme et il nous revient d’augmenter progressivement sa taxation, aujourd’hui très faible, afin d’inciter les industriels à la délaisser. Il ne s’agit pas d’interdire l’huile de palme, car ce produit n’est pas dangereux s’il est modérément consommé et cultivé de manière durable.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Mon avis est défavorable, car le Gouvernement ne souhaite pas instaurer de nouvelles taxes, même sur le Nutella ! L’huile de palme ne contient pas d’acides gras trans qui s’avèrent les plus agressifs pour les mécanismes d’athérogenèse.

L’huile de palme importée dans l’UE obéit à des exigences environnementales et sociales strictes, dont le respect est contrôlé sur place par des organisations non-gouvernementales (ONG) ; si ces huiles ne partaient plus vers l’UE, la demande des pays émergents pourrait être satisfaite par la production chinoise qui n’est soumise à aucun contrôle. En outre, on peut douter qu’une taxe fasse baisser la consommation. Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

M. Jean-Louis Roumegas. Monsieur le rapporteur, vous avez défendu l’instauration de taxes spécifiques sur les boissons énergisantes et vous connaissez bien les questions de santé environnementale, si bien que je m’étonne de votre position.

Vous méconnaissez le marché de l’huile de palme, car il n’arrive pas que de l’huile durable et artisanale en Europe. Votre réponse ne me satisfait donc pas.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement AS242 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Joëlle Huillier. Les Français sont nombreux à croire que les fumeurs rapportent plus qu’ils ne coûtent à l’État, du fait de la fiscalité du tabac. Au contraire, le coût des dégâts du tabagisme, en hausse constante, pèse lourdement sur les comptes publics et ampute la sécurité sociale de toute marge de manœuvre. Dans la dernière étude de l’Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT), parue en septembre 2015, le coût global du tabac est évalué à 120,4 milliards d’euros par an, soit dix fois le déficit de la sécurité sociale, qui s’élève à 13 milliards d’euros en 2015. Ce document révèle également que le coût s’élève à 25,9 milliards d’euros par an pour les seules dépenses sanitaires.

Notre amendement vise à exercer une forte pression fiscale sur les prix des cigarettes, qui constituent un élément essentiel de la lutte contre le tabac, comme l’a lui-même rappelé le président de la République par ces mots : « L’évolution des prix nous enseigne que les seules baisses significatives – elles ont été rares – de la consommation de tabac se sont produites après des augmentations fortes du prix des cigarettes ». En outre, une augmentation du prix accroît les rentrées fiscales et permet de compenser partiellement le coût sanitaire et social du tabac qui pèse sur les comptes de la sécurité sociale.

Il s’avère urgent de prendre des mesures fortes et courageuses. Le tabac tue aujourd’hui 220 personnes par jour et 79 000 par an. L’objectif, à terme, est d’atteindre le seuil psychologique de 10 euros le paquet de cigarette. L’amendement a pour objet d’augmenter le taux proportionnel frappant les cigarettes de 49,7 % à 52,9 % et le minimum de perception de 210 à 247 euros pour 1 000 cigarettes, afin d’accroître le prix du paquet de cigarettes.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement est le premier d’une série visant à augmenter la fiscalité sur les produits du tabac. Étant cardiologue, je ne contesterai pas les méfaits du tabac, qui ne sont d’ailleurs pas uniquement vasculaires. Néanmoins, le projet de loi de modernisation du système de santé comporte une mesure qui s’intègre dans le programme national de réduction du tabagisme (PNRT), présenté par Mme la ministre en septembre dernier, et qui établit le paquet neutre.

Nous devons demander au Gouvernement s’il est opportun, au moment où l’on souhaite déployer le paquet neutre, d’augmenter le prix du tabac et, comme le proposent les amendements suivants, d’aligner le prix du tabac roulé sur celui du transformé et celui pratiqué en Corse sur celui du continent. Ce débat sera utile, car la hausse du prix du tabac s’est montrée efficace pour réduire la consommation de tabac chez les jeunes, qui sont plus sensibles au coût des cigarettes qu’à leur présentation. Le Gouvernement n’ayant pas arbitré sur la concomitance de la mise en circulation du paquet neutre et de l’augmentation du prix du tabac, je demande aux auteurs de ces amendements de les retirer. Ils pourront les redéposer en vue de la discussion en séance publique, qui sera éclairée par les arbitrages du Gouvernement.

M. Francis Vercamer. Je salue la volonté de combattre le tabagisme qui provoque tant de drames. Néanmoins, issu d’une région frontalière, je constate que la vente de tabac se développe de l’autre côté de la frontière, si bien que c’est l’UE qui devrait se pencher sur l’opportunité d’augmenter la fiscalité sur le tabac.

Dans ma région, on voit arriver, parfois dans des semi-remorques, des quantités massives de tabac ne devant pas toujours obéir aux réglementations ; cette situation crée davantage de menaces pour la santé que le tabac vendu légalement en France. En outre, le PLF diminue les crédits affectés aux services des douanes et supprime des postes dans cette administration. Si on laisse le tabac entrer frauduleusement dans notre pays, on ne réglera pas le problème de santé publique. En l’absence de réflexion européenne sur le sujet, je ne soutiendrai pas ces amendements.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure pour l’assurance maladie. Cet amendement complète le PNRT présenté par Mme la ministre et ne le contredit aucunement. Le dernier rapport de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a montré que la mesure la plus efficace contre le tabagisme était l’augmentation du prix, si bien qu’il nous faut l’introduire dans ce PLFSS. L’augmentation de prix décidée l’année dernière a constitué un rattrapage utile après une période de gel.

Un plan doit être complet pour réussir : nous devons donc utiliser toutes les armes à notre disposition, et celle du prix possède l’impact le plus fort.

M. Gérard Sebaoun. Nous sommes tous inquiets de l’augmentation des cas de cancer dans notre pays, cette maladie représentant la première cause de mortalité ; or 30 % des décès par cancer sont dus au tabac en France. Il faut donc savoir ce que l’on veut ; si nous souhaitons agir pour la santé publique, nous ne pouvons pas faire l’impasse sur l’intoxication mortelle induite par ce combustible.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Par souci de cohésion, je retire cet amendement que nous réintroduirons en séance publique. J’invite chacun à nous rejoindre et à en cosigner la prochaine version ; en effet, dans dix ans, notre action contre le tabac sera évaluée sans mansuétude, car toutes ses conséquences nous sont connues. Nous parlons là de la drogue la plus puissante et du tueur le plus efficace.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS243 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Cet amendement vise à aligner la fiscalité pesant sur le tabac à rouler sur celle des cigarettes, le prix de celui-là étant aujourd’hui inférieur de 30 % à celui de celles-ci. Cet écart fait que beaucoup de jeunes entrent dans le tabagisme par ce mode de consommation sur lequel nous devons donc agir. Par cohérence, je retire néanmoins l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission étudie l’amendement AS244 de Mme Michèle Delauany.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Nous souhaitons que le prix du tabac en Corse devienne identique à celui du continent. Les buralistes ne soutiennent pas cet alignement, alors qu’ils le demandent pour l’Espagne où le prix est le même qu’en Corse ; nous nous interrogeons donc sur la logique de ces professionnels, le prix pratiqué en Corse favorisant les ventes illicites.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Là encore, je demande le retrait de cet amendement.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AS245 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS238 de M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. L’affaire des mesures biaisées de la pollution induite par le diesel des véhicules Volkswagen a fait tomber le mythe, alimenté par les constructeurs, d’un diesel propre. L’OMS a d’ailleurs jugé que les particules fines des moteurs diesel étaient un cancérigène probable, et nous savons maintenant qu’elles causent des maladies cardio-vasculaires et des cancers.

Deux tiers du parc automobile français marche au gazole ; cette proportion découle de choix opérés par les constructeurs et soutenus par les pouvoirs publics, qui isolent aujourd’hui l’industrie automobile française en Europe et dans le monde. Cette singularité joue un rôle dans les faibles résultats enregistrés à l’exportation et dans le marasme de la filière automobile de notre pays qui a raté le virage du véhicule propre.

Nous devons sortir de cette situation pour des raisons économiques et sanitaires, et cet amendement propose de créer une taxe sur les immatriculations de voitures neuves livrées à partir du 1er juillet 2016. Il ne s’agit pas de pénaliser ceux qui ont déjà acquis un véhicule diesel, mais d’inciter les futurs acheteurs à privilégier d’autres voitures. Cela permettra de rééquilibrer la demande et de modifier la composition du parc français d’ici dix à quinze ans, période nécessaire au renouvellement d’un parc automobile.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je rejoins l’argumentation sanitaire développée par M. Roumegas. Cependant, la fiscalité énergétique fait actuellement l’objet d’un grand débat qui trouvera sa concrétisation législative dans le prochain projet de loi de finances rectificative (PLFR). La mesure que vous défendez, monsieur Roumegas, doit s’intégrer dans un ensemble de dispositions plus large, et il conviendrait que vous déposiez cet amendement lors de l’examen du PLFR. Tout en partageant votre objectif, je vous demande de retirer votre amendement.

M. Gérard Sebaoun. Je partage l’exposé des motifs développé par M. Roumegas, mais si la mortalité par cancer due au tabac s’élève à 30 %, celle due à l’alcool à 10 %, celle due à toutes les formes d’exposition professionnelle à 4 %, et celle découlant de la pollution à 2 %. Cela ne signifie pas qu’il ne faille pas lutter contre la pollution, mais il faut s’attaquer au tabac et avoir un débat argumenté sur le diesel.

M. Francis Vercamer. Je veux bien comprendre que si on élève les taxes sur le tabac, le prix augmentera et la consommation diminuera peut-être – même si la réflexion doit être conduite à l’échelle européenne. En revanche, une taxe de 500 euros sur la carte grise n’aura pas d’impact sur la demande de véhicules. Si le diesel est dangereux pour la santé, exigeons plutôt des constructeurs des aménagements permettant d’éliminer ses effets néfastes. L’exposé des motifs cite l’OMS qui estime que les particules fines sont cancérigènes : il serait plus opportun de lutter contre ces particules que d’instaurer une taxe !

M. Jean-Louis Roumegas. Je maintiens mon amendement. Monsieur Vercamer, la taxe sur la carte grise vise à dissuader l’acquisition de véhicules neufs diesel et à renouveler progressivement le parc automobile. La convergence des taxations sur les carburants constitue une autre disposition qui relève, comme l’a indiqué M. le rapporteur, du PLFR.

Monsieur Sebaoun, je me méfie de vos chiffres car les causes du cancer s’avèrent de plus en plus entremêlées. Des expositions cumulées – au tabac, à l’alcool et à la pollution – renforcent les risques d’avoir un cancer, mais il est difficile d’identifier le facteur déclenchant la maladie.

Monsieur le rapporteur, il est opportun de déposer cet amendement dans le cadre de la discussion du PLFSS, car nous proposons d’affecter le produit de cette taxe à l’assurance maladie, qui a bien besoin de ressources nouvelles.

M. Bernard Accoyer. Je suis contre cet amendement.

Tout d’abord, effectivement, il se dit beaucoup de choses, notamment des choses fausses. Les nouveaux diesels polluent très peu, et ce grâce à une technologie française. Ainsi, en empruntant la direction souhaitée par M. Roumegas, nous nous tirerions une balle dans le pied. Compte tenu de la situation économique et sociale de notre pays, ce n’est pas le moment !

Ensuite, s’il est une qualité qu’on ne peut dénier à la majorité, c’est son imagination fertile en matière de fiscalité. Cependant, la pollution a bien d’autres causes que les moteurs diesels. La première, c’est le chauffage domestique, notamment le chauffage au bois – sauf dans certaines conditions particulières. Nous en faisons la douloureuse expérience en Haute-Savoie.

Enfin, arrêtons de dire que tout va mal en matière de santé publique ! L’espérance de vie en France est une des plus longues au monde et elle continue de s’allonger chaque année de près de trois mois. Avancer tous ensemble, c’est bien, mais il faut aussi savoir s’arrêter. Or notre collègue propose d’instaurer une taxe dont le montant, initialement de 500 euros, serait ensuite allègrement porté à 3 000 euros. Soyons sérieux !

Nous nous opposons à cet amendement.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Chacun sait que c’est, dans 80 % des cas, sur des sujets dont les poumons sont altérés par le tabac, que les dégâts pulmonaires de la pollution – les pires dégâts de la pollution – sont particulièrement graves. Si l’on peut parler d’effet cumulatif, le primum movens, c’est le tabac.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je souhaite apporter une précision. Le produit de la taxe que cet amendement tend à instaurer serait affecté non à l’assurance maladie, comme vous l’avez prétendu, monsieur Roumegas, mais au FSV.

La Commission repousse l’amendement.

Chapitre IV

Dispositions relatives à l’architecture financière de la sécurité sociale

Article 18 : Intégration au régime général du régime spécial d’assurance maladie, maternité et décès du grand port maritime de Bordeaux

La Commission adopte l’article 18 sans modification.

Article 19 : Affiliation au régime général des gens de mer employés à bord de navires étrangers

La Commission adopte l’article 19 sans modification.

Article 20 : Réforme de l’architecture financière de la branche maladie

La Commission adopte l’article 20 sans modification.

Chapitre V
Dispositions contribuant à l’organisation et au financement de l’assurance maladie

Article 21 : Amélioration de la couverture complémentaire santé pour les personnes âgées de plus de 65 ans

La Commission examine l’amendement AS16 de M. Dominique Tian tendant à supprimer l’article.

M. Jean-Pierre Barbier. Quoiqu’il procède de bonnes intentions, l’article 21 du PLFSS est très contesté, et un examen attentif révèle qu’il est effectivement très contestable.

Nous nous réjouissons, bien sûr, de l’universalité de la sécurité sociale, dont nous célébrons les soixante-dix ans, mais cet article provoque une véritable segmentation de la protection sociale.

Aujourd’hui, il existe déjà huit dispositifs pour permettre aux personnes âgées de plus de 65 ans d’accéder à une couverture complémentaire santé. En outre, par cet article qui fait surtout référence au prix et peu à la qualité des contrats, vous ouvrez le champ de la protection sociale à des opérateurs qui peuvent être des banquiers sans connaissance réelle et donnez le sentiment de casser cet esprit de mutualisation et de solidarité qui anime les mutuelles. Ces opérateurs peuvent ne proposer qu’une offre à moindre coût. Il faut alors regarder quel service est apporté : on peut craindre qu’il y ait beaucoup moins de prévention ou que ne soient couverts que les gros risques. Ainsi, cette couverture complémentaire pour les plus de 65 ans ne permettrait pas aux gens de se soigner dans de très bonnes conditions.

C’est pourquoi nous présentons cet amendement de suppression, d’autant plus qu’aucune étude d’impact n’a été réalisée et que l’élaboration de ce dispositif par le Gouvernement n’a été précédée d’aucune concertation, ce que nous pouvons également regretter.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Je suis très défavorable à cet amendement de suppression.

Dans le cadre de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, les partenaires sociaux ont souhaité généraliser l’accès de la couverture complémentaire en matière de santé. Il a été décidé de généraliser la couverture santé des salariés à compter du 1er janvier prochain, mais les personnes âgées de plus de 65 ans restent hors du champ de ce dispositif. C’est d’autant plus regrettable que ce sont elles qui ont le plus besoin de soins, ce sont donc elles qui ont le plus grand besoin d’une complémentaire santé.

Le montant des contrats individuels est majoré, jusqu’à 150 %, par rapport aux contrats souscrits pendant la période d’activité, en particulier parce que l’employeur ne participe plus. Quant à la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) et à l’aide à la complémentaire santé (ACS), qui permettent aux plus modestes d’accéder à la complémentaire santé, ces dispositifs sont soumis à des conditions de ressources, et ils ne répondent pas aux besoins spécifiques des personnes âgées.

Nous pourrions accepter ce statu quo, mais ce sont 5 % des personnes âgées – le chiffre est parfaitement connu – qui n’ont pas de complémentaire santé, et cette proportion augmente avec l’âge… alors que les besoins augmentent aussi. Nous pouvons, au contraire, développer une offre spécifique, sans déstabiliser l’ensemble des dispositifs existant ; c’est précisément l’objet de l’article 21.

L’emploi du terme « prépondérant » est effectivement inopportun. Après concertation avec Mme la ministre, nous vous proposerons une nouvelle rédaction, pour que le prix soit considéré au regard d’un panier de services. Cela nous permettra de juger de la qualité des services rendus et d’éviter des propositions low cost.

M. Élie Aboud. Je compléterai le propos de M. Barbier. Il s’agirait, en l’occurrence, d’instaurer un énième dispositif, alors que nous demandons, pour notre part, une remise à plat qui mette un terme à toute cette confusion.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour les accidents du travail et les maladies professionnelles (AT-MP). Puisque nous nous inspirons un petit peu de ce qui existe dans la loi sur la sécurisation de l’emploi, n’oublions pas que le dispositif qu’elle instaure ne couvre pas les prothèses auditives. Or celles-ci coûtent excessivement cher. À l’heure du vieillissement de la population, j’espère que les prothèses auditives seront couvertes par ces complémentaires santé.

M. Bernard Accoyer. En réalité, cher Denis Jacquat, c’est le régime obligatoire qui ne rembourse pas les prothèses auditives à un niveau décent. Le problème n’est donc pas tant celui de la couverture complémentaire.

Les dispositions de l’article 21 posent un problème très simple : qui va payer ? Évidemment, ce sont les autres générations, c’est-à-dire les employeurs et également les salariés qui paieront, dans la mesure où l’avantage lié à cette cotisation se répercute dans le calcul de leur fiscalité, de leurs charges sociales.

Encore une fois, le Gouvernement instaure un dispositif sans l’avoir correctement évalué – il n’y a pas d’étude d’impact digne de ce nom. Encore une fois, ce sont d’autres qui paieront.

La Commission rejette l’amendement.

Puis la Commission examine les amendements identiques AS392 de la rapporteure Michèle Delaunay et AS267 du rapporteur Gérard Bapt.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. L’amendement AS392 vise à améliorer et à clarifier la rédaction de cet article.

La rédaction actuelle de cet article prévoit que les offres seront sélectionnées selon deux types de critères : un critère, « prépondérant », de montant des primes et des critères relatifs à la qualité de service. Le mot « prépondérant » a suscité un débat, à juste titre. Je propose de le supprimer, et de préciser que le montant des primes est apprécié au regard des garanties offertes par le contrat proposé – ce sera l’occasion de tenir compte de la remarque de M. Jacquat sur la prise en charge des prothèses auditives.

En outre, en vertu de cet amendement, une offre dont le montant des primes serait anormalement bas, une offre de pur dumping, pourra être écartée. Ainsi, nous pourrons nous assurer que le niveau de couverture complémentaire est durablement suffisant.

En ce qui concerne le crédit d’impôt de 2 % dont peuvent bénéficier les organismes complémentaires assujettis à la taxe de solidarité additionnelle, et non les personnes, l’amendement apporte une clarification rédactionnelle bienvenue.

Enfin, il est proposé de supprimer les termes de « mise en concurrence » puisque la procédure proposée consiste à sélectionner toutes les offres répondant aux critères mentionnés aux articles L. 864-1 et L. 864-2 du code de la sécurité sociale.

Je suppose que cet amendement répond aux réserves formulées précédemment.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je défends l’amendement identique AS267 au nom du groupe SRC. L’objectif visé n’est pas tant d’accorder un avantage fiscal à certains organismes dont les offres répondraient à des critères à la fois de prix et de qualité que de permettre à des personnes âgées de plus de 65 ans d’accéder à des contrats de couverture complémentaire à un coût moindre que celui aujourd’hui proposé par le marché.

Il est important d’éviter que le critère de prix soit prépondérant pour prévenir toute action de dumping. Des organismes qui ne sont que marginalement concernés par les contrats individuels auraient pu, à la faveur d’une baisse illégitime du prix, élargir leur marché en y intégrant d’autres éléments de prévoyance, que peuvent proposer des assurances ou des instituts de prévoyance. Voilà pourquoi le groupe socialiste s’associe pleinement à la démarche de Mme la rapporteure Michèle Delaunay.

M. Bernard Accoyer. Je m’étonne que notre rapporteure, qui doit partager le même souci de maîtrise des coûts du régime obligatoire et des régimes complémentaires que le Gouvernement, propose de supprimer le mot « prépondérant » du montant. Même si l’évaluation de tout cela ne semble guère précise, cela coûterait, dès la première année, 104 millions d’euros et, au bout de dix ans, 1 milliard d’euros Je veux bien que le mot « argent » soit un gros mot, mais, réunis pour examiner le projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous devons précisément nous pencher sur le coût de la dispensation des soins.

En outre, enlever les mots « mise en concurrence », c’est faire preuve d’un dogmatisme et d’un idéalisme qui témoignent d’une déconnexion des réalités. La question des coûts se pose de la même façon qu’il s’agisse du régime obligatoire ou des régimes complémentaires, puisque, de toute façon, ce sont les Français qui financent tout cela.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, les amendements AS158 de M. Jean-Pierre Door, AS324 et AS323 de M. Francis Vercamer, ainsi que AS161 de M. Jean-Pierre Door tombent.

La Commission adopte l’article 21 modifié.

Article 22 : Adaptation de la généralisation de la couverture complémentaire en matière de frais de santé pour les contrats courts et les temps très partiels

La Commission examine l’amendement AS17 de M. Dominique Tian de suppression de l’article.

M. Jean-Pierre Barbier. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 22, qui prévoit la création d’une aide individuelle de l’employeur destinée à l’acquisition par les salariés précaires d’une complémentaire santé. Une nouvelle fois, il s’agit d’ajouter des dispositifs aux dispositifs. Ainsi, après l’adoption, l’an dernier, d’un dispositif permettant à tout salarié de bénéficier d’une mutuelle, est instauré un dispositif spécifique au profit des salariés précaires.

Cela pose tout d’abord la question – soulevée par l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire (UNOCAM) – de la segmentation des offres en fonction des publics différents.

Cela pose aussi la question de la soutenabilité économique de tout cela. Le propre d’un salarié précaire est que son emploi est menacé ; son employeur peut le licencier pour des raisons diverses et variées. Si vous alourdissez les charges payées par un employeur pour un salarié précaire, ne risquez-vous pas d’aggraver encore la précarité de la situation de ce dernier ? N’avez-vous pas peur que des employeurs ne se défassent des salariés concernés ? Il faut se poser la question. Bien sûr, l’intention est louable, et je ne la conteste pas. En revanche, les conséquences risquent d’être dramatiques pour ces travailleurs qui risquent de perdre leur emploi parce qu’on aura trop augmenté les charges payées par leurs employeurs.

Mme Michèle Delaunay, rapporteur. Je ne peux qu’être défavorable à cet amendement. Vous le savez, la loi de sécurisation de l’emploi 2013 ne couvre pas de manière satisfaisante l’ensemble des salariés. Je songe en particulier à ceux dont le contrat de travail est d’une durée très courte. Le contrat collectif apparaît d’un montant trop élevé et ils peuvent ainsi être amenés à se dispenser de le payer. Ils se dispensent donc de couverture complémentaire sans contrepartie ou, quelquefois, changent très fréquemment d’assurance complémentaire.

Le dispositif proposé facilite la dispense d’affiliation au contrat collectif quand celui-ci paraît trop cher, en contrepartie d’une contribution de l’employeur dont le montant dépendra notamment de la durée du contrat et de la durée de travail prévue par celui-ci.

Il est assez urgent de prendre cette mesure. Si nous ne le faisons pas, de nombreux salariés risquent, à compter du 1er janvier 2016, de ne pas être couverts par une complémentaire santé, et pas forcément ceux qui en ont le moins besoin.

M. Jean-Pierre Barbier. Je rappellerai simplement qu’une mesure avait été prise pour taxer des contrats à durée déterminée. Vous souhaitiez que leur fussent préférés des contrats à durée indéterminée. Or un certain nombre de contrats à durée déterminée n’ont pas été renouvelés, ou conclus, à cause de cette taxation. J’appelle votre attention sur ce point. Il ne faudrait pas rendre la situation de ces travailleurs encore plus précaire qu’elle n’est, ni leur faire perdre leur emploi.

M. Bernard Accoyer. Depuis 2012, la priorité affichée du Gouvernement, dans le droit fil de la campagne de François Hollande, est la lutte contre le chômage. En l’occurrence, vous l’oubliez quelque peu, puisque vous alourdissez les charges, ce qui ne peut que nuire à l’emploi et aggraver le problème du chômage. Il n’y a donc aucune logique dans cette disposition. Supprimons-la.

La Commission rejette l’amendement.

Puis la Commission examine les amendements identiques AS160 de M. Jean-Pierre Door et AS373 de M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Je retire mon amendement AS373 pour me rallier à l’amendement AS160.

Par cet article 22, le Gouvernement crée un mécanisme prévoyant le versement par l’employeur d’une aide financière pour l’acquisition par le salarié d’une complémentaire santé quand il ne bénéficie pas de la couverture collective d’entreprise ou d’un dispositif d’aide publique à la complémentaire santé. La gestion d’un tel dispositif peut se révéler complexe pour de petites entreprises ainsi que pour les salariés bénéficiant de contrats de courte durée. De plus, il risque d’entraîner un surenchérissement du coût de la complémentaire santé pour les salariés les plus précaires qui auront fait le choix de s’orienter vers une couverture individuelle nécessairement plus coûteuse. Il vous est donc proposé de reporter au 1er janvier 2017 l’entrée en vigueur l’ensemble du dispositif et de prévoir, par accord de branche, une adhésion obligatoire des salariés précaires.

L’amendement AS373 est retiré.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Tout d’abord, cet amendement fait référence à un « accord de branche » qui figurerait au IV de l’article L. 911-7. Or celui-ci ne mentionne aucun accord de ce type. Le dispositif ne tient donc pas.

Sur le fond, cet amendement propose qu’un accord de branche puisse prévoir l’adhésion obligatoire des salariés en contrat précaire au contrat collectif proposé par l’employeur. On saisit assez mal l’intérêt de cette démarche, puisque la loi prévoit déjà que c’est bien l’obligation de proposer à ses salariés une offre de complémentaire santé collective qui prévaudra à compter du 1er janvier 2016. Il n’est donc pas nécessaire de prévoir qu’un accord collectif peut imposer aux salariés d’une branche de souscrire à un contrat collectif.

En revanche, le dispositif actuel ne prévoit rien pour certains salariés en contrat précaire, en particulier pour ceux qui exercent une activité auprès de plusieurs employeurs. La logique de l’article 22 n’est donc en aucun cas d’inciter les salariés à se dispenser du contrat collectif proposé par l’employeur, elle est de proposer une solution – de rattrapage, en quelque sorte – lorsque le contrat collectif n’est pas adapté.

La Commission rejette l’amendement AS160.

Elle en vient ensuite aux amendements identiques AS228 de M. Jean-Pierre Door et AS384 de M. Gilles Lurton.

M. Jean-Pierre Door. L’amendement a pour objet d’insérer l’alinéa suivant : « Un accord de branche peut déroger aux dispositions prévues au présent article en prévoyant la couverture des risques à titre obligatoire pour l’ensemble des salariés, quelles que soient la nature et la durée du contrat. ».

Il s’agit également de reporter l’entrée en vigueur de l’ensemble du dispositif au 1er janvier 2017.

L’amendement AS384 est retiré.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. L’inutilité d’un accord collectif est déjà établie, et le caractère obligatoire peut entraîner le fait que les propositions ne soient pas adaptées. Pour cette même raison, je n’y suis pas favorable.

Je ne suis pas favorable non plus au report de la date d’entrée en vigueur du dispositif, qui ajouterait de la complexité. En outre, la souscription d’un contrat est assez urgente.

La Commission rejette l’amendement AS228.

Puis elle examine les amendements identiques AS230 de M. Jean-Pierre Door et AS372 de M.Gilles Lurton.

M. Jean-Pierre Barbier. Par l’amendement AS230, nous proposons de déroger aux dispositions du présent article par accords de branche prévoyant une affiliation obligatoire et collective pour l’ensemble des salariés présents dans l’entreprise quelles que soient la nature et la durée du contrat.

L’article 22 prévoit le versement d’une aide individuelle par l’employeur, destinée à l’acquisition d’une complémentaire santé par les salariés précaires ne bénéficiant pas de la couverture collective d’entreprise. Je ne peux que répéter les arguments développés tout à l’heure : c’est vraiment dangereux.

Nous proposons donc de repousser l’entrée en vigueur du dispositif au 1er janvier 2017.

L’amendement AS372 est retiré.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Je suis défavorable à l’amendement AS230. Tous les organismes que j’ai auditionnés ont insisté sur le fait qu’il est urgent de remédier à ce qu’ils appellent les « trous dans la raquette ». Je suis cependant sensible à l’argument selon lequel il sera difficile pour certaines branches de conclure un accord entre la date de promulgation de la loi et le 1er janvier 2016. Je proposerai donc, en séance publique, un amendement dont l’objet sera de permettre à l’employeur de décider de manière unilatérale de dispenser les salariés de la couverture complémentaire collective pendant un an, à titre transitoire, en attendant l’accord de branche, tout en leur garantissant les contreparties prévues.

M. Jean-Pierre Barbier. Bien sûr, madame la rapporteure, les organismes auditionnés peuvent être favorables à cette mesure, dont le but – nul ne le conteste – est louable, mais avez-vous auditionné les représentants des employeurs ?

Par ailleurs, je n’ai pas très bien compris de quelles contreparties il s’agit.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Il s’agit de contreparties financières.

La Commission rejette l’amendement AS230.

Puis elle adopte l’article 22 sans modification.

Après l’article 22

La Commission examine l’amendement AS393 de la rapporteure Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Portant sur les entreprises, les articles précédents laissent de côté les particuliers employeurs. Malheureusement, dans bien des cas, leurs salariés ne sont pas éligibles aux dispositifs d’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS et CMU-C) et il ne leur est pas facile de souscrire à une complémentaire santé.

Je souhaite donc que soit établi un rapport permettant d’étudier une généralisation de la couverture complémentaire, qui serait étendue aux salariés de particuliers employeurs.

M. Jean-Pierre Barbier. Nous parlions tout à l’heure du travail au noir des salariés à domicile. Continuez à instaurer de tels dispositifs, continuez à renchérir le coût du travail à domicile et le travail au noir se développera encore un peu plus !

Tout cela n’est pas favorable à l’emploi, et vous allez aggraver la situation de travailleurs précaires en les contraignant au travail au noir. C’est suicidaire !

Mme la présidente Catherine Lemorton. Tout d’abord, monsieur Barbier, il ne s’agit, pour l’heure, que de prévoir un rapport, ce qui ne renchérit aucun coût. Ensuite, vous nous reprochez habituellement de ne pas faire d’évaluation. Eh bien, en voici une ! Elle permettra de connaître la situation des salariés et des particuliers employeurs.

M. Jean-Pierre Barbier. On la connaît déjà !

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Non, monsieur, on ne la connaît pas, et on ne sait pas quel serait l’impact du dispositif sur le coût salarial. Nous ne savons pas non plus combien de salariés ne bénéficient pas de l’ACS ou de la CMU-C parce qu’ils font trop d’heures. Nous arrivons à pénaliser les salariés de particuliers employeurs qui, pour vivre, travaillent un nombre important d’heures. C’est là une injustice fondamentale, dont je demande qu’elle soit analysée. On ne peut pas laisser une partie de la population hors de notre champ. Il faut trouver des solutions.

Vous vous souciez de ne pas augmenter le coût de revient horaire de ces salariés. Cependant, il ne s’agit pas de ne prendre en compte que les employeurs ! Il ne peut pas y avoir un « trou dans la raquette » au détriment de salariés de particuliers employeurs qui sont trop énergiques et trop volontaires et qui font un nombre d’heures important. Nous ne saurions fermer les yeux sur ce problème. Je vous propose donc de l’examiner, et nous déciderons ensuite ensemble.

La Commission adopte l’amendement.

Article 23 : Prorogation d’un an de la contribution des organismes assurant la couverture complémentaire en santé prévue à l’avenant n° 8 de la convention médicale

La Commission examine l’amendement AS18 de M. Dominique Tian tendant à supprimer l’article.

M. Jean-Pierre Barbier. Par cet article, il est prévu de proroger jusqu’au terme de la convention médicale en 2016 la participation transitoire des organismes complémentaires au « forfait médecin traitant » (FMT) pour un montant de 150 millions d’euros. Or, issue de la LFSS pour 2014, cette contribution au FMT s’est transformée en un dispositif parafiscal et est devenue un sujet de litige entre les pouvoirs publics et l’UNOCAM.

On peut également regretter l’absence d’évaluation de ce dispositif au service des assurés sociaux.

Il convient donc de supprimer cet article.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Je suis défavorable à cet amendement. Même les professionnels sont d’accord pour proroger d’un an cette participation, jusqu’à la convention médicale ! Certains m’ont tout au plus dit qu’il serait pertinent de la payer sur neuf mois plutôt que douze, compte tenu de la date de renouvellement de la convention. Pourquoi donc vous montrer plus hostile à cette prorogation que les principaux intéressés, sinon par dogmatisme ?

M. Jean-Pierre Door. À titre personnel, je ne peux pas soutenir cet amendement.

Il faut attendre la prochaine convention médicale, en 2016, pour se prononcer sur cette participation au forfait médecin traitant, qui a joué un rôle important dans le développement des réseaux et de la rémunération au forfait. Quatre ou cinq euros par acte, ce n’est pas énorme, mais cette contribution supplémentaire était bienvenue.

La convention doit être renouvelée dans moins d’un an. Alors, attendons la fin des négociations.

M. Gérard Sebaoun. Ces 150 millions d’euros s’inscrivent dans le cadre de l’avenant n° 8 de la convention, visant à limiter les dépassements d’honoraires. Il s’agit donc de proroger une excellente initiative, qui a quand même réduit les dépassements d’honoraires.

L’amendement AS18 est retiré.

La Commission adopte l’article 23 sans modification.

Après l’article 23

La Commission examine l’amendement AS157 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Les entreprises de répartition pharmaceutique référencent la totalité des médicaments génériques mis sur le marché. Elles sont les partenaires des officines pour aider au développement de ce marché – elles ont ainsi organisé, dans le cadre de ce partenariat, des programmes de sensibilisation auprès des clients et elles contribuent à la diffusion de l’information. En disposant de l’ensemble des références génériques, elles permettent aux pharmaciens de délivrer la prescription en dénomination commune internationale la moins coûteuse, comme le préconise, notamment, le protocole d’accord signé entre les médecins et la Caisse nationale d’assurance maladie.

Nous proposons donc que le montant des ventes de spécialités génériques inscrites au répertoire des groupes génériques ne soit pas inclus dans l’assiette de la contribution sur les ventes directes des entreprises pharmaceutiques.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Je suis défavorable à cet amendement.

La contribution prévue à l’article L. 138-1 du code de la sécurité sociale est assise sur les ventes en gros de spécialités pharmaceutiques remboursables, et payée par les grossistes répartiteurs et les laboratoires qui réalisent des ventes directes aux officines. Les médicaments génériques de l’assiette de la contribution sont déjà partiellement exonérés du paiement de la contribution et il ne paraît pas pertinent d’élargir cette exonération. Ils sont exonérés de la troisième tranche de cette contribution, constituée de la fraction du chiffre d’affaires qui correspond au montant de la marge rétrocédée aux pharmacies – cela représente environ 20 % de la contribution. Les deux autres tranches sont simplement une taxe sur le chiffre d’affaires desdits grossistes répartiteurs, dont vous savez qu’ils distribuent toutes sortes de médicaments : princeps, génériques, homéopathiques, etc.

Il s’agit donc d’une taxe portant non pas sur les génériques eux-mêmes mais simplement sur leur distribution. Les retirer intégralement de l’assiette de cette contribution n’aurait pas de sens et ne pourrait en aucun cas encourager la prescription des génériques. Cela représenterait en revanche une perte de recettes significative. Il existe d’autres dispositifs – nous avons évoqué le sujet avec Mme la ministre – pour encourager le développement des médicaments génériques.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je me permets une rectification, madame la rapporteure : les grossistes répartiteurs ne livrent pas de produits d’homéopathie.

Cela étant, il s’agit effectivement de favoriser la diffusion des médicaments génériques. Les pharmaciens ont des contrats avec un génériqueur particulier, mais certains patients peuvent être habitués à une marque de générique. Les grossistes répartiteurs, qui stockent un nombre important de médicaments de génériques de toutes marques, favorisent la prise de génériques par nos concitoyens.

La Commission rejette l’amendement.

Article 24 : Régulation des dépenses au titre de la clause de sauvegarde (taux L) et des médicaments traitant l’hépatite C (montant W) pour 2016

La Commission est saisie de l’amendement AS305 de M. Francis Vercamer

M. Francis Vercamer. Cette année encore, le médicament, qui ne représente que 15 % des dépenses d’assurance maladie, va fortement contribuer à la réduction des dépenses de cette branche. Il faut dire que le Gouvernement ne veut pas prendre de mesures structurelles pour essayer de résoudre le problème budgétaire par des réformes de fond portant, par exemple, sur la carte hospitalière ou sur le virage ambulatoire – qui est envisagé de manière tout à fait marginale.

Le Gouvernement va donc faire peser l’effort sur le médicament en prévoyant un taux négatif d’évolution du chiffre d’affaires de 1 %, alors que ce taux avait déjà été appliqué en 2015. J’observe qu’à l’époque, le Gouvernement avait prévu un taux d’évolution à zéro entre 2015 et 2017. Je propose, quant à moi, de fixer effectivement ce taux à zéro, pour éviter de taxer une évolution négative.

M. Bernard Accoyer. Cet amendement doit être adopté, car les dispositions de l’article 24 sont dangereuses : elles risquent d’affaiblir notre industrie du médicament, qui finira par disparaître. Je rappelle que cette industrie a déjà dû réduire ses effectifs et qu’après avoir été excédentaire, la balance commerciale du médicament a chuté de 50 %. Il ne faudrait pas oublier quelles sont les priorités !

M. Jean-Pierre Door. Ainsi, on veut taxer la croissance négative d’un chiffre d’affaires. Mais c’est du jamais vu ! Cela signifie que moins vous gagnez, et plus vous êtes taxé. En l’occurrence, les entreprises pharmaceutiques, qui sont en décroissance, vont être taxées. C’est très curieux. Au moins aurait-on pu en discuter d’abord avec le Conseil stratégique des industries de santé.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Door, à événement inattendu, amendement inattendu. Qui aurait pu prévoir, au moment de la campagne présidentielle de 2012, qu’il faudrait consacrer un milliard par an à un seul produit ? L’année dernière, lorsque le Sovaldi contre l’hépatite C est arrivé sur le marché, les pouvoirs publics ont dû intervenir. Et aucun malade de notre pays ne s’est vu refuser ce nouveau traitement– dans la mesure où son médecin le lui avait prescrit.

Dans les années à venir, nous serons à nouveau confrontés au défi que constitue l’arrivée de nouvelles molécules qui auront des fenêtres thérapeutiques très étroites, mais qui seront très chères. C’est cela l’innovation.

M. Jean-Pierre Door. Je vous suis. Mais le problème ne vient pas seulement des molécules permettant de soigner l’hépatite C, dont on a beaucoup parlé. Il vient du fait que cette taxe va s’appliquer à toutes les entreprises pharmaceutiques, y compris celles qui ne développent pas de tels produits. On va pénaliser des entreprises dont le chiffre d’affaires a baissé de 0,5 à 1 %. C’est cela qui est regrettable.

M. Jean-Pierre Barbier. L’an dernier, le prix du traitement de l’hépatite C nous a amenés à débattre du financement de l’innovation. Nous en discuterons à nouveau parce qu’une dizaine de molécules de ce type vont arriver. Il faudra se poser les bonnes questions. Moyennant 30 000, 40 000 ou 50 000 euros, une molécule comme le Sovaldi permet de guérir en quelques semaines des patients atteints de l’hépatite C, alors même qu’ils étaient en traitement depuis des années, faisant l’objet de soins très coûteux – transplantations, etc. Nous ne pourrons pas financer l’innovation dans notre pays tant que nous n’accepterons pas de comparer ce que cela peut rapporter et ce que cela coûte. Vous préférez, comme d’habitude et par faciliter, taxer l’industrie pharmaceutique.

On ne s’interroge pas non plus sur les baisses de recettes. En effet, vous baissez le prix du médicament, les recettes de TVA, les chiffres d’affaires des laboratoires, l’impôt sur les sociétés qu’ils pourraient verser. Les laboratoires vont licencier, et il n’y aura plus d’innovation en France. Aujourd’hui, sur les 34 nouvelles molécules produites, 8 seulement sont issues de l’industrie française. Il y a vraiment de quoi être préoccupé.

Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Je voudrais essayer de vous convaincre : ce taux de moins 1 % correspond, en fait, à une stabilisation de la dépense remboursée. En revanche, un taux de 0 % correspond à une progression d’environ 1 % de la dépense remboursée, ce qui n’est pas compatible avec l’objectif de l’ONDAM.

Je rappelle en outre qu’il ne faut compter dans ce périmètre ni les génériques, ni les médicaments orphelins, ni les médicaments non remboursés, ni le chiffre d’affaires lié aux exportations.

La fixation du taux L a été calibrée de manière que le mécanisme n’ait pas à être déclenché en 2016 si l’on réalise les économies sur les médicaments qui ont permis de construire l’ONDAM. C’est tout à fait possible, compte tenu des baisses de prix des princeps et de la diffusion croissante des génériques.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 24 sans modification.

TITRE II
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Article 25 : Approbation du montant de la compensation des exonérations mentionnées à l’annexe 5

La Commission adopte l’article 25 sans modification.

Article 26 : Approbation du tableau d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires pour 2016

La Commission adopte l’article 26 et l’annexe C sans modification.

Article 27 : Approbation du tableau d’équilibre du régime général pour 2016

La Commission adopte l’article 27 et l’annexe C sans modification.

Article 28 : Approbation du tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires (FSV), détermination de l’objectif d’amortissement de la dette sociale et des prévisions de recettes du FRR et de la section 2 du FSV pour 2016

La Commission adopte l’article 28 et l’annexe C sans modification.

Article 29 : Habilitation des régimes de base et des organismes concourant à leur financement à recourir à l’emprunt

La Commission adopte l’article 29 sans modification.

Article 30 : Approbation du rapport sur l’évolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale (annexe B)

La Commission adopte l’article 30 et l’annexe B sans modification

Puis elle adopte la troisième partie du projet de loi modifiée.

QUATRIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES POUR L’EXERCICE 2016

TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES À LA BRANCHE FAMILLE

Article 31 : Généralisation du dispositif de garantie contre les impayés de pension alimentaire

La Commission adopte l’article 31 sans modification.

Article 32 : Transfert aux caisses d’allocations familiales du service des prestations familiales aux fonctionnaires en poste dans les DOM

La Commission adopte l’article 32 sans modification.

Article 33 : Extension de l’allocation de soutien familial et du complément de libre choix du mode de garde à la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon

La Commission adopte l’article 33 sans modification.

Article 34 : Objectifs de dépenses de la branche famille pour l’année 2016

La Commission adopte l’article 34 sans modification.

Après l’article 34

La Commission examine l’amendement AS7 de M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. L’année dernière, vous avez décidé de fractionner le congé parental en obligeant les deux parents à le partager. Cet amendement vise à améliorer les conditions dans lesquelles ce congé parental pourra être pris et indemnisé.

Nous souhaiterions que l’on puisse évaluer, à partir d’un rapport que le Gouvernement remettrait au Parlement, l’opportunité donnée aux parents de faire valoir leur droit à indemnisation de congé parental de manière fractionnée, dans la limite d’un an pour le premier enfant, de trois ans pour un deuxième enfant et plus, et ce jusqu’à sa majorité.

L’objectif de ce fractionnement serait de ne pas éloigner durablement la femme de son travail, et de donner aux deux parents la possibilité de se rendre disponibles aux moments clés de la vie de l’enfant.

J’ajoute que la réussite d’une politique familiale, c’est le libre choix laissé aux familles de mettre en œuvre « leur » politique familiale, celle qu’ils souhaitent. Or toutes les mesures prises par le Gouvernement depuis maintenant trois ans ont porté un coup à cette politique : les derniers chiffres de la natalité qui m’ont été communiqués, et sur lesquels je me suis exprimé en présence de Mme le ministre, montrent des signes inquiétants de baisse de la natalité.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille. Monsieur le député, dans votre exposé sommaire, vous vous inquiétez pour notre taux de natalité. Je crois pourtant que de nombreux pays nous envient ce taux de natalité, qui est dû à la politique familiale dynamique que nous avons mise en place depuis longtemps.

J’observe par ailleurs que, quelles que soient les enquêtes ou les statistiques dont nous disposions, aucun lien de causalité n’a jamais été établi entre les allocations familiales et le dynamisme démographique. Heureusement, les Français ne font pas des enfants à cause des allocations familiales.

Mais venons-en à votre amendement. Vous évoquez la réforme du congé parental initiée par la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, et vous proposez que le Gouvernement remette au Parlement un nouveau rapport. Sur la forme, je suis au regret de vous répondre qu’il s’agit du mauvais instrument pour agir. Sur le fond, je remarque que le dispositif que vous proposez consisterait à vider de son sens ce congé parental, qui serait finalement divisé en deux fois trois périodes, et serait particulièrement complexe à gérer pour les caisses d’allocations familiales (CAF) comme pour les employeurs.

J’ajoute que le calendrier ne me semble pas le bon : il est encore trop tôt pour étudier l’impact de la mesure. Il faut laisser les familles s’approprier le dispositif. Laissons donc à cette réforme le temps de s’enraciner.

Mon avis sera donc défavorable.

M. Bernard Accoyer. Je souhaite faire une remarque sur cet article 34. Pour 2016, l’objectif des dépenses de la branche famille est fixé à 49,6 milliards d’euros, en baisse de 5 milliards d’euros, soit de 10 % par rapport à l’année précédente. On comprend qu’une telle baisse ait des conséquences sur la vie des familles, sur les conditions dans lesquelles elles pourront élever et éduquer leurs enfants, et sur la natalité – contrairement à ce que vous venez d’affirmer de façon un peu imprudente.

Mme la présidente Catherine Lemorton. J’observe, monsieur Accoyer, que l’article 34 a déjà été voté.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Monsieur Accoyer, votre propos est quelque peu provocateur. Les quelques milliards d’euros dont vous parlez se trouvent dans le projet de loi de finances ; ils correspondent aux allocations logement qui ont été retirées de la branche famille. Ce n’est donc qu’un report vers le budget de l’État.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS340 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à un autre amendement qui n’a pas passé l’obstacle de l’article 40.

L’amendement AS340 vise à améliorer les relations entre les caisses d’allocations familiales et les départements, dans le cadre de l’insertion des bénéficiaires des contrats de RSA. En effet, à l’occasion du rapport parlementaire que nous avons présenté avec mon collègue Christian Hutin, nous nous sommes rendu compte que ce n’était pas toujours le cas. Voilà pourquoi je propose l’établissement d’un rapport qui permette de renforcer le partenariat entre les conseils départementaux et les caisses d’allocations familiales et d’améliorer la prise en charge des bénéficiaires du RSA. Certains départements ont des programmes départementaux d’insertion, et les CAF n’en ont même pas connaissance. Il ne faut donc pas s’étonner que le RSA ait du mal à fonctionner dans sa phase d’insertion – comme pour le RMI auparavant.

Mme Marie-France Clergeau, rapporteure. Cet amendement propose la rédaction d’un énième rapport.

Sur le fond, je partage votre intérêt sur toutes les mesures qui permettraient d’améliorer les conditions de prise en charge et d’accompagnement des bénéficiaires du RSA. On constate parfois, dans certains départements, que l’articulation entre les CAF et les départements pourrait être optimisée, par exemple pour traiter les demandes de prestation. Cependant, je ne crois pas que commander un nouveau rapport soit la solution : cela n’apportera rien de plus, car la question ne peut pas se régler au niveau central.

À mon avis, il revient plutôt à la CNAF et à l’Association des départements de France d’opérer un travail de sensibilisation et d’accompagnement, au cas par cas. À cet égard, je crois qu’il serait très profitable de renforcer, dans les départements où cela est nécessaire, les canaux de dialogue entre la CAF et le conseil départemental, par exemple lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des schémas départementaux en faveur de l’enfance et de la famille.

Sur la forme, j’ajouterai que le contenu de ce rapport est flou et ne précise pas ce que signifient les « modalités d’un meilleur partenariat ».

J’émets donc un avis défavorable.

M. Francis Vercamer. Madame la rapporteure, l’amendement qui a été refusé au titre de l’article 40, précisait ces modalités – je ne suis d’ailleurs pas persuadé que la conclusion d’une convention entraîne des charges financières pour les collectivités ou les CAF et je redéposerai cet amendement pour la séance.

La Commission rejette l’amendement.

La séance est levée à vingt heures cinq.

——fpfp——

Présences en réunion

Réunion du mardi 13 octobre 2015 à 16 heures 15

Présents. – M. Élie Aboud, M. Bernard Accoyer, M. Pierre Aylagas, M. Alexis Bachelay, M. Gérard Bapt, M. Jean-Pierre Barbier, Mme Gisèle Biémouret, Mme Kheira Bouziane-Laroussi, Mme Valérie Boyer, Mme Sylviane Bulteau, Mme Martine Carrillon-Couvreur, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Philip Cordery, M. Rémi Delatte, Mme Michèle Delaunay, M. Jean-Pierre Door, M. Dominique Dord, Mme Françoise Dumas, Mme Jacqueline Fraysse, M. Jean-Patrick Gille, Mme Joëlle Huillier, M. Christian Hutin, Mme Monique Iborra, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, Mme Chaynesse Khirouni, Mme Bernadette Laclais, Mme Conchita Lacuey, Mme Annie Le Houerou, Mme Catherine Lemorton, M. Gilles Lurton, Mme Véronique Massonneau, M. Robert Olive, Mme Dominique Orliac, Mme Monique Orphé, M. Bernard Perrut, Mme Bérengère Poletti, M. Arnaud Richard, M. Denys Robiliard, M. Arnaud Robinet, M. Jean-Louis Roumegas, M. Gérard Sebaoun, M. Fernand Siré, M. Christophe Sirugue, M. Jonas Tahuaitu, M. Dominique Tian, M. Francis Vercamer

Excusés. – M. Stéphane Claireaux, M. David Habib, M. Michel Liebgott

Assistaient également à la réunion. – M. Christophe Caresche, M. Bernard Gérard, Mme Claudine Schmid, M. Lionel Tardy