Accueil > Travaux en commission > Commission des affaires sociales > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des affaires sociales

Mercredi 6 avril 2016

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 40

Présidence de M. Jean-Patrick Gille, Vice-président

– Suite de l’examen des articles sur le projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs (n° 3600) (M. Christophe Sirugue, rapporteur)

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 6 avril 2016

La séance est ouverte à neuf heures trente.

(Présidence de M. Jean-Patrick Gille, vice-président de la Commission)

La Commission poursuit l’examen des articles du projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs (n° 3600) (M. Christophe Sirugue, rapporteur).

Article 3 : Autres congés

La Commission examine l’amendement AS413 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Nous demandons la suppression de cet article, qui traite des différents congés, pour les mêmes raisons qui nous avaient conduits à demander la suppression de l’article 2 sur le temps de travail.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Défavorable. C’est à l’architecture même du texte que s’oppose Mme Fraysse.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS30 de M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Cet amendement de précision et de cohérence tend à compléter l’intitulé de la sous-section 1 : « Congés de conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle » par les mots « et familiale ».

M. le rapporteur. Nous pourrions longuement disserter sur la question de savoir si la vie familiale est une sous-catégorie de la vie personnelle, mais je pense que cette proposition va dans le bon sens. Avis favorable.

M. Élie Aboud. Cela commence bien, aujourd’hui !

La Commission adopte cet amendement.

Elle examine ensuite les deux amendements identiques AS455 de M. Alain Tourret et AS597 de M. Gilles Lurton.

Mme Dominique Orliac. L’accord de branche, signé à un niveau supérieur à celui de l’accord d’entreprise, a pour objet de garantir une égalité de traitement entre salariés exerçant les mêmes métiers et d’éviter ainsi une concurrence déloyale entre entreprises par le biais du dumping social. De plus, dans les TPE, l’application directe d’un accord de branche constitue une réelle sécurité juridique, qui n’expose pas ces entreprises au contentieux, à l’inverse du recours au mandatement syndical par lequel elles seraient livrées à elles-mêmes. D’où la substitution proposée par notre amendement AS455.

M. Élie Aboud. Nous retirons notre amendement AS597.

M. le rapporteur. Par cohérence, compte tenu de nos échanges d’hier, je suppose… Quoi qu’il en soit, je ne peux que m’en féliciter.

Mme Orliac suggère de revenir sur l’architecture du texte. Avis défavorable.

Mme Isabelle Le Callennec. Dans l’ordre public, on précise parfois les choses ; dans le cas présent, s’agissant des congés, aucune durée n’est précisée.

M. le rapporteur. On ne porte dans l’ordre public que les principes et on renvoie la durée, l’organisation et autres soit à la négociation collective, soit, à défaut d’accord, au supplétif.

L’amendement AS597 est retiré.

La Commission rejette l’amendement AS455.

Elle examine ensuite l’amendement AS320 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. Cet amendement vise à porter de deux à cinq jours la durée du congé exceptionnel dans le cas du décès d’un enfant. Une convention, un accord d’entreprise ou de branche ne pourra prévoir un seuil inférieur.

Cet amendement est dans le prolongement d’une proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale le 23 novembre 2011 et par le Sénat le 1er avril 2015. Le décès d’un enfant est un moment extrêmement douloureux. Chaque année en France, près de 8 000 enfants et jeunes décèdent avant d’atteindre vingt-cinq ans, et près de deux tiers de ces décès sont dus à l’évolution d’une maladie – toujours la même dans la majorité des cas : 37 % touchent les enfants de moins d’un an, 18 % des enfants d’un an à quatorze ans, 45 % des adolescents.

Il est peu compréhensible que le congé pour décès d’un enfant soit plus court que le congé pour mariage. Un congé de moins de cinq jours ne permet même pas d’organiser l’inhumation et laisse les parents dans un état de totale sidération. Je vous invite à donner aux Français un signe de compréhension et de compassion.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Je soutiens cet amendement dont je suis cosignataire : cette inéquité entre les congés exceptionnels accordés à l’occasion de certains événements de la vie, alors que celui-ci est un véritable drame pour les familles, doit être corrigée. J’espère que cet amendement recevra un avis favorable.

M. Élie Aboud. On ne saurait s’opposer sur le fond à une telle proposition. Au-delà de l’aspect émotionnel, il faut regarder comment cela se passe dans la vie réelle. Un chef d’entreprise, quand un tel drame se produit, ne peut-il accorder plus que cinq jours ? C’est la seule question que l’on peut se poser.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement à l’unanimité.

Elle en vient à l’amendement AS321 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. Il s’agit d’un complément au précédent amendement, afin que la même règle s’applique en cas d’absence de convention, d’accord d’entreprise ou de branche.

M. le rapporteur. Avis favorable à cet amendement de pure cohérence. C’est le complément dans le dispositif supplétif.

La Commission adopte cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS914 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’ancienneté requise pour bénéficier du congé de proche aidant est aujourd’hui de deux ans. Cette durée est reprise au niveau des dispositions supplétives applicables en l’absence d’accord. Toutefois, au regard de la spécificité de ce congé qui relève de la catégorie des congés de conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle, il ne me semble pas que la condition d’ancienneté pour en bénéficier soit négociable, autrement dit qu’une ancienneté supérieure puisse être exigée pour l’ouverture de ce droit.

La Commission adopte cet amendement.

Elle adopte ensuite successivement les amendements de conséquence AS913 et AS915 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement AS518 de M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. Cet amendement vise à inscrire le congé sabbatique dans les congés de conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle plutôt que dans les congés d’évolution professionnelle.

M. le rapporteur. J’y suis plutôt favorable, mais votre amendement pose un problème de positionnement : en insérant votre dispositif après l’alinéa 105, vous créez une nouvelle sous-section 4 dans la section 2 alors qu’il devrait s’insérer dans la sous-section 2 de la section 3. Je vous propose de le retirer, afin que nous travaillions ensemble à une nouvelle rédaction d’ici à la séance.

M. Christophe Cavard. Avec plaisir, dès lors qu’il est adopté dans le principe…

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AS456 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Cet amendement vise à préciser le code du travail, qui ne vise expressément que les mutuelles, alors que l’article L. 114-16 du code de la mutualité concerne également les administrateurs des unions et des fédérations. En effet, cet alinéa se trouve au paragraphe concernant les mesures d’ordre public. Or la jurisprudence actuelle interprète généralement les mesures d’ordre public de manière restrictive. Les employeurs ayant tendance à limiter au maximum les droits des administrateurs mutualistes, cette précision permettra d’éviter toute difficulté d’interprétation du champ d’application de cette mesure essentielle pour la formation des élus des organismes mutualistes dans leur ensemble.

M. le rapporteur. Ce n’est pas parce que c’est inscrit dans l’ordre public que c’est forcément plus strict, mais il peut en effet exister une inquiétude ; si votre amendement cela peut être de nature à rassurer les représentants des mutuelles, j’y suis plutôt favorable.

La Commission adopte cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS457 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Cet amendement vise à étendre le congé mutualiste de formation aux bénévoles n’ayant pas la qualité d’administrateur, particulièrement impliqués dans le fonctionnement. Ainsi, ne seront concernés que les bénévoles titulaires d’un mandat prévu par la loi – notamment les délégués siégeant aux assemblées générales – ou par les statuts des organismes – délégués de territoires, membres des commissions départementales. Cette modification est cohérente avec la réflexion en cours sur l’évolution du code de la mutualité, dont l’une des orientations est le statut de mandataire mutualiste, tel que défini dans le présent amendement.

M. le rapporteur. Défavorable. Si nous étendons le congé de formation aux bénévoles, où nous arrêterons-nous ? Le compte engagement citoyen que nous créons dans le cadre du compte personnel d’activité (CPA) peut répondre à l’objectif que vous visez.

Mme Isabelle Le Callennec. Le compte engagement citoyen ouvre des droits à la formation, alors qu’il est ici question de droits à congé.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un congé de formation. Nous aurons l’occasion d’en reparler plus précisément le moment venu, lorsque nous traiterons du compte personnel d’activité.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS458 de Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Cet amendement précise que les bénévoles titulaires d’un mandat prévu par la loi ou les statuts des organismes peuvent bénéficier d’un congé de formation d’une durée maximale de quatre jours.

Ces militants sont indispensables au fonctionnement démocratique des mutuelles ; leur formation est fondamentale pour leur permettre notamment d’acquérir un socle de connaissances indispensable à la bonne compréhension des problématiques, dont la technicité est croissante, les règles prudentielles qui s’imposent aux organismes mutualistes nécessitant un niveau d’expertise important. Le processus de professionnalisation des militants mutualistes, voulu par les directives européennes, doit donc s’accompagner d’une formation adéquate.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

Elle adopte ensuite l’article 3 modifié.

Après l’article 3

La Commission examine les deux amendements identiques AS974 rectifié de M. Yves Blein, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques, et AS23 de Mme Dominique Orliac.

M. Yves Blein, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques. Ces deux amendements reprennent une proposition de loi déposée par Mme Orliac et adoptée à l’unanimité par l’Assemblée. Je laisse notre collègue les présenter.

Mme Dominique Orliac. L’amendement AS23 reprend les principales dispositions de la proposition de loi n° 2927 cosignée par l’ensemble des députés du groupe RRDP et adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale le 10 mars 2016.

À l’instar de cette proposition de loi, l’amendement propose d’étendre la durée de la période légale de protection contre le licenciement pour les mères à l’issue de leur congé de maternité, en la faisant passer de quatre à dix semaines. L’extension de cette période de protection s’applique également au second parent, qui en bénéficie à compter de la naissance de l’enfant, ainsi qu’aux parents adoptants.

L’amendement vise également à inscrire dans la loi l’évolution récente de la jurisprudence consistant à reporter le point de départ de cette période de protection à l’expiration des congés payés quand ces derniers sont pris directement après le congé de maternité. En effet, par son arrêt Société Foncia groupe, société anonyme, contre Mme Agnès X du 30 avril 2014, la chambre sociale de la Cour de cassation a estimé que « la période de protection de quatre semaines suivant le congé maternité étant suspendue par la prise des congés payés, son point de départ était reporté à la date de la reprise du travail par la salariée ».

L’amendement vise à sécuriser le parcours professionnel des parents après l’arrivée d’un enfant, sans remettre en cause le caractère relatif de la protection. Au cours de cette période, l’employeur peut en effet toujours licencier le ou la salariée en cas de « faute grave non liée à l’état de grossesse » ou en cas d’« impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement », conformément aux dispositions de l’alinéa 2 de l’article L. 1225-4 du code du travail.

La proposition de loi a reçu le soutien du Défenseur des droits, qui s’est saisi de ce texte avant son examen à l’Assemblée nationale. Dans son avis du 24 février 2016, celui-ci a estimé que les dispositions prévues constituaient « un moyen juridique pertinent » pour remédier à des éventuelles situations de discrimination et affirmé soutenir « pleinement l’opportunité de cette proposition de loi ».

Cet amendement reprend ma proposition, à deux dispositions près. Les dispositions relatives à l’interdiction pour l’employeur de prendre des mesures préparatoires au licenciement lors de la période de protection n’ont en effet pas été retenues. Ce retrait s’explique du fait qu’avec le recul je partage la position de Mme la ministre en ce qui concerne la difficulté de définir juridiquement la notion de « mesures préparatoires au licenciement ». L’amendement ne réduit pas l’apport de la proposition de loi puisque la Cour de cassation adopte déjà cette position dans sa jurisprudence.

M. le rapporteur. Avis favorable. Je me demandais justement pourquoi votre amendement ne reprenait pas l’intégralité de votre proposition de loi ; vous venez d’y répondre.

M. Gilles Lurton. Même si nous avions des réticences sur l’extension de la mesure au deuxième parent, notre groupe avait voté la proposition de loi. Je voterai donc pour ces amendements, par cohérence.

La Commission adopte ces amendements.

Article 4 : Compte épargne-temps

La Commission examine l’amendement AS414 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. L’article 4 récrit toute la partie du code du travail relative au compte épargne-temps. Comme pour les articles précédents, nous refusons la primauté donnée à l’accord collectif d’entreprise, qui est la porte ouverte à la remise en cause de la protection des salariés garantie par la loi, car c’est seulement l’absence d’accord d’entreprise que les règles légales supplétives s’appliqueront. C’est la raison pour laquelle nous demandons sa suppression.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

La Commission adopte ensuite, successivement, les amendements rédactionnels AS650, AS660, AS662, AS671, AS688 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS761 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel visant à restructurer l’alinéa 20, sans modification de fond.

La Commission adopte cet amendement.

Elle adopte ensuite successivement l’amendement de précision AS764 et l’amendement rédactionnel AS768 du rapporteur.

Ensuite de quoi, elle adopte l’article 4 modifié.

Article 5 : Sécurisation des conventions existantes

La Commission examine l’amendement AS520 de M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. En proposant d’ajouter, à l’alinéa 2, après les mots « présente loi », les mots « et après avoir échoué à trouver un accord mentionné à l’article L. 3121-61 du code du travail », cet amendement vise à encourager une nouvelle négociation pour obtenir un accord sur le forfait en jours, en cas d’échec, en particulier pour prolonger l’existant.

M. le rapporteur. Défavorable. Le dispositif que propose M. Cavard est relativement compliqué. Cela revient à exiger une nouvelle négociation pour que celle-ci échoue afin de permettre la poursuite des conventions actuelles…

La Commission rejette cet amendement.

Elle adopte ensuite successivement les amendements AS770 et AS771 du rapporteur, corrigeant chacun une erreur matérielle.

Ensuite de quoi, elle adopte l’article 5 modifié.

Article 6 : Travail de nuit dans le domaine fluvial

La Commission adopte l’article 6.

TITRE II
Favoriser une culture du dialogue et de la négociation

Chapitre Ier
Des règles de négociation plus souples et le renforcement de la loyauté de la négociation

Article 7 : Préambule des accords, méthode et publicité

La Commission examine l’amendement AS735 de Mme Éva Sas.

Mme Éva Sas. Le présent amendement vise à supprimer les alinéas 7 et 8 qui permettent de modifier les périodicités des négociations. En application de ces deux alinéas, les négociations annuelles pourraient devenir triennales. Ces négociations sont essentielles pour de nombreux aspects de la vie en entreprise et les rapports entre salariés et employeurs. Allonger leur périodicité ne nous semble pas judicieux. Les négociations annuelles incluent aujourd’hui les rémunérations ; avec le nouveau dispositif, seules les organisations signataires de l’accord pourraient demander une périodicité annuelle.

M. le rapporteur. Défavorable. Ces alinéas n’ont pas pour objet de restreindre le dialogue social ; au contraire, ils permettront plus de souplesse dans les négociations obligatoires, pour que celles-ci aient lieu au moment le plus opportun. J’ajoute que la négociation sur les salaires pourra être conduite annuellement si une organisation syndicale le souhaite. Par ailleurs, le plan d’action de l’employeur pour l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes devra également être remis chaque année à défaut d’accord.

Mme Éva Sas. Ces alinéas ne visent pas à adapter la périodicité des négociations au moment le plus opportun, mais bien à l’allonger, puisqu’une négociation annuelle pourra devenir triennale. Par ailleurs, seule une organisation signataire de l’accord pourra demander une négociation sur les salaires ; il aurait fallu pour le moins en donner le droit aux autres.

Mme Monique Iborra. Il faut trouver un équilibre. Nous sommes très favorables aux négociations d’entreprise – j’avais cru comprendre que Mme Sas ne l’était pas particulièrement – mais on ne saurait pour autant prévoir des négociations à répétition, et de surcroît dépourvues d’objet réel dans la mesure où, sur un certain nombre de questions, les choses peuvent être reprises à l’initiative des organisations syndicales. La légitime préoccupation de Mme Sas est satisfaite par le texte tel qu’il nous est présenté.

M. Gérard Cherpion. L’alinéa 8 est très clair : une organisation signataire peut demander des négociations sur les salaires. Il est logique que ce soit l’organisation signataire d’un accord qui en demande la révision, et elle peut le faire tous les ans. Il n’y a donc pas de souci.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS297 de M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. La question de la méthode des négociations n’est pas à négliger. Si la méthode n’est pas claire et cautionnée par les deux parties dès le départ, la négociation peut en souffrir. Le présent amendement porte sur le calendrier et la périodicité : alors que le texte prévoit seulement la possibilité d’établir un accord de méthode, il me semble important d’en faire une obligation.

M. le rapporteur. Ce que vous proposez n’est pas dans l’accord de méthode. J’y suis néanmoins favorable, car cela rendrait obligatoire la définition d’un calendrier de négociations. Je trouve intéressant que les partenaires définissent leur agenda, d’autant plus que nous leur permettons de moduler la périodicité des négociations.

M. Gérard Cherpion. J’y suis opposé. Il sera plus difficile de relancer la négociation s’il faut impérativement définir un calendrier dès le départ. Cela crée un risque de blocage.

La Commission adopte cet amendement.

Elle en vient à l’amendement AS624 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Cet amendement traite de la périodicité de la négociation des accords d’égalité professionnelle. Nous proposons qu’en l’absence d’accord, la périodicité reste d’un an : l’entreprise sera obligée de relancer les négociations dans ce délai. Comme M. Cherpion l’a rappelé tout à l’heure, l’alinéa 8 dispose qu’une organisation signataire peut demander une renégociation ; mais dans le cas visé en l’espèce, il n’y a pas d’organisation signataire puisque le plan « égalité professionnelle » a été refusé. L’égalité salariale et professionnelle est toujours le parent pauvre dans les négociations : ce n’est jamais la priorité. Si l’on veut qu’elle avance, il faut qu’elle soit renégociée tant qu’il n’y a pas de plan.

M. le rapporteur. L’alinéa 9 traite déjà des situations dans lesquelles une entreprise n’a pas conclu d’accord sur l’égalité professionnelle, en précisant que l’employeur est tenu d’établir chaque année un plan d’action pour l’égalité professionnelle, sans pouvoir reporter cette échéance. Mais si nous adoptions votre amendement, madame Coutelle, cette interdiction vaudrait pour tous les autres accords ; je ne saurais donner un avis favorable à une mesure aussi disproportionnée, même si je sais l’importance du combat que vous menez.

M. Élie Aboud. Votre amendement est satisfait, madame la présidente Coutelle. Pourquoi ne pas fixer un délai inférieur, chaque semestre ou trimestre ?

Mme Catherine Coutelle. L’égalité professionnelle se négocie chaque année en l’absence d’accord, mais le rattrapage des salaires entre les femmes et les hommes reste le parent pauvre de la négociation, alors que nous souhaitons depuis déjà un certain temps, à l’occasion de chaque texte de loi, en faire une priorité. Nous réécrirons notre proposition d’ici à la séance publique, afin de préciser que s’il n’y a qu’un plan unilatéral dans l’entreprise, ce point spécifique de l’égalité professionnelle devra être renégocié chaque année.

Je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement de précision AS791 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement AS310 de M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. Le texte proposé pour l’article L. 2222-3-1, à l’alinéa 11 de l’article 7 prévoit qu’une convention ou un accord collectif « peut » définir la méthode permettant à la négociation de s’accomplir dans des conditions de loyauté et de confiance mutuelle entre les parties. Je propose de remplacer « peut » par « doit ». Si on ne rend pas obligatoire la définition de la méthode de la négociation, des discussions pourront s’engager sans accord de méthode préalable. Or le rapport de M. Jean-Denis Combrexelle insiste sur la nécessité de fixer précisément le cadre et les règles de la démocratie sociale pour que celle-ci fonctionne. Il faut donc contraindre les parties à s’accorder sur la méthode.

M. le rapporteur. J’avais dans un premier temps la même idée que la vôtre, monsieur Cavard, mais je me suis ravisé en me rendant compte qu’une telle obligation pourrait allonger considérablement le temps des négociations, dans la mesure où il faudrait conclure un premier accord avant de discuter sur l’accord lui-même, au risque de les bloquer totalement dans les petites entreprises. Le rapport Combrexelle lui-même soulignait qu’une négociation sur la négociation pourrait s’avérer déstabilisante et stérilisante dans la pratique. En outre, si l’absence d’accord de méthode préalable entraînait la nullité des accords conclus, cela pourrait décourager la négociation collective, notamment dans les petites structures qui y sont peu habituées. Nous irions à l’inverse de l’objectif que nous recherchons. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

M. Christophe Cavard. Le rapport Combrexelle défend l’idée que le temps passé à discuter de la méthode n’est pas perdu, mais bien gagné dans la mesure où cela permet à la négociation de se dérouler dans de bonnes conditions. Le texte prévoit des accords types, qui pourraient exister pour les accords de méthode au niveau de la branche, ce qui aiderait la concertation dans les petites entreprises. Il serait dommage que les accords de méthode ne soient pas obligatoires, car ce serait prendre le risque de voir des négociations déraper.

Mme Isabelle Le Callennec. Il est intéressant de se mettre d’accord sur une méthode, mais il ne faudrait pas que cette discussion en vienne à bloquer la négociation. Incitons les partenaires sociaux à arrêter une méthode, dont l’intérêt pour eux est évident, mais ne la rendons pas obligatoire.

M. Gérard Cherpion. La majorité des entreprises de notre pays sont de petite taille. Si on obligeait les parties à s’accorder sur la méthode – même au niveau de la branche –, on bloquerait le système. Rappelons que le titre de ce chapitre Ier s’intitule : « Des règles de négociation plus souples et le renforcement de la loyauté de la négociation ». Ne rajoutons pas d’étage supplémentaire à la négociation si l’on vise la souplesse ! Dans les grandes entreprises, la négociation sur la méthode s’effectue presque spontanément, mais on risque d’empêcher tout accord dans les petites entreprises.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement AS214 de M. Patrick Hetzel.

M. Élie Aboud. Nous proposons de supprimer la fin de l’alinéa 11, à l’évidence pléonastique : une négociation doit de fait s’accomplir dans des « conditions de loyauté et de confiance mutuelle entre les parties ».

M. le rapporteur. Je n’y vois aucun pléonasme, mon cher collègue, dans la mesure où la jurisprudence invoque régulièrement la loyauté de la négociation. C’est précisément pour lui donner une assise juridique plus ferme que l’article 7 propose de l’inscrire dans le droit du travail. Je suggère d’en rester à la rédaction actuelle du texte et j’émets donc un avis défavorable à l’adoption de votre amendement.

Mme Isabelle Le Callennec. Tout le monde n’a pas la même appréciation de ce que sont des conditions de loyauté et de confiance mutuelle entre les parties… Tout porte à croire que cela donnera lieu à des interprétations très différentes.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS792 du rapporteur.

La Commission en vient à l’amendement AS667 de M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout. Nous souhaitons le renforcement du dialogue social, mais nous connaissons également les exigences de nos concitoyens pour ce qui touche à l’utilisation des aides publiques aux entreprises. Mon amendement propose de confier aux partenaires sociaux, dans le cadre de la négociation des accords d’entreprise, l’affectation et la répartition des différentes aides publiques, afin qu’un contrôle transparent puisse s’exercer. Les partenaires sociaux pourraient ainsi s’entendre sur la répartition du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) entre la création d’emplois, l’investissement ou le renforcement de la trésorerie.

M. le rapporteur. Monsieur Bricout, votre proposition n’a rien à voir avec l’accord de méthode et se trouve déjà mise en œuvre. En effet, la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi a instauré la base de données économiques et sociales (BDES), qui comporte des indications sur les flux financiers, les aides publiques et les crédits d’impôt dont bénéficie l’entreprise, autant d’informations données aux différents négociateurs. J’émets un avis défavorable à l’adoption de votre amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS793 et AS794 du rapporteur.

La Commission est saisie des amendements identiques AS29 de M. Patrick Hetzel et AS48 de M. Lionel Tardy.

M. Élie Aboud. L’amendement AS29 est défendu.

M. Lionel Tardy. Le Gouvernement a un goût immodéré pour les préambules et les bavardages législatifs sans force juridique. Ainsi, le projet prévoit que les conventions et les accords contiennent un préambule présentant de manière succincte leurs objectifs et leur contenu. Cela ne présente aucune utilité, car le texte mentionne que « l’absence de préambule n’est pas de nature à entraîner la nullité de la convention ou de l’accord ». Autant donc s’en passer, comme le propose mon amendement AS48.

M. le rapporteur. Le préambule n’est pas obligatoire. Je trouve curieux que vous en souhaitiez la suppression alors que vous avez insisté tout à l’heure sur la nécessité de bien préparer les conditions de la négociation… Le préambule invite les parties prenantes à expliquer l’économie générale de la convention et accroît la lisibilité et la bonne compréhension des accords collectifs. J’émets donc un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

M. Gérard Cherpion. Monsieur le rapporteur, vous venez de dire que le préambule n’est pas obligatoire, mais l’alinéa 19 spécifie bien que la convention ou l’accord contient un préambule.

M. le rapporteur. Je vous renvoie à l’alinéa suivant : « L’absence de préambule n’est pas de nature à entraîner la nullité de la convention ou de l’accord. » Ce n’est donc qu’une possibilité.

M. Gérard Cherpion. Le préambule est obligatoire, et le fait que son absence n’entraîne pas la nullité de l’accord constitue un élément distinct.

M. Gérard Sebaoun. Soit on part de l’idée que l’ensemble des négociateurs peuvent intégrer la totalité d’un accord de 150 à 200 pages techniques, soit on pense qu’une note de synthèse initiale permettant d’entrer dans la négociation est utile. Je penche pour la deuxième hypothèse…

Mme Isabelle Le Callennec. Le texte affirme que la convention ou l’accord contient un préambule, mais que l’absence de celui-ci n’entraîne aucune nullité. Cela signifie que le préambule peut être utile. On pourrait rejoindre les propos de M. Cavard et vouloir que le préambule présente succinctement les objectifs, les contenus et la méthode de l’accord. Il faudrait écrire que la convention « peut » contenir un préambule, puisque son absence n’engendre pas de nullité.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle aborde l’amendement AS409 de M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. Madame Le Callennec, on pourrait envisager que l’absence de préambule entraîne la nullité de l’accord.

Mon amendement vise à ce que le préambule, tout en restant succinct, ne présente pas uniquement les objectifs et le contenu de la convention, mais également les moyens et les délais.

Monsieur Cherpion, il importe de bien définir l’accord de méthode dans l’intérêt des salariés. Je vois à quel genre de souplesse vous pensez lorsque vous ne souhaitez pas rendre obligatoire l’accord de méthode.

M. le rapporteur. Votre argumentaire ne correspond pas à l’exposé sommaire de votre amendement, puisque vous souhaitez préciser les contours de l’accord de méthode tout en amendant la disposition portant sur le préambule. Par ailleurs, ce dernier n’a vocation à fixer ni les délais – qui regardent plutôt les clauses de suivi – ni les moyens de l’accord ; à quoi ces derniers renvoient-ils d’ailleurs ? J’émets un avis défavorable à l’adoption de votre amendement.

M. Jean-Pierre Barbier. Cherchons-nous vraiment à opérer un choc de simplification du code du travail ? En entendant cette discussion, j’ai plutôt l’impression que l’on va complexifier le dialogue social, car toutes ces dispositions auront au final un effet catastrophique sur la vie de nos entreprises.

M. Christophe Cavard. Monsieur le rapporteur, oublions l’exposé sommaire que l’on rédige parfois rapidement ; le préambule des conventions doit en exposer succinctement les objectifs. Il me serait intéressant que le préambule puisse indiquer les moyens, notamment en termes de temps accordé aux négociateurs, que l’on se donne pour atteindre les objectifs de l’accord. Les délais seront évidemment fonction du temps consacré à la négociation.

M. le rapporteur. Monsieur Cavard, le préambule ne peut pas être un préaccord. J’ai du mal à comprendre l’objet de votre amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS415 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Les alinéas 21 à 23 de l’article 7 instaurent une durée de validité par défaut de cinq ans pour les accords collectifs signés dans des branches ou dans des entreprises. Le droit existant offre aux organisations syndicales la liberté de fixer une durée limitée ou illimitée aux accords collectifs. L’instauration d’une durée de validité par défaut n’apporte rien et risque même de se révéler régressive dans la mesure où cela autorisera à revenir sur la règle des avantages individuels acquis, le texte précisant que « lorsque la convention ou l’accord arrive à expiration, la convention ou l’accord cesse de produire ses effets ». Je propose de supprimer ces dispositions dangereuses.

M. le rapporteur. Ces mesures ne dégradent pas la situation actuelle, à moins de considérer par principe que tout accord sera forcément défavorable aux salariés. Je ne partage pas cette vision. L’article 10 du projet de loi propose de généraliser l’accord majoritaire d’entreprise et garantit davantage l’équilibre entre la protection des salariés et les nécessités de l’entreprise. La suppression de la durée de validité par défaut des accords ne présente pas d’intérêt. Avis défavorable.

Mme Jacqueline Fraysse. Quel est l’intérêt de la fixer à cinq ans ?

M. le rapporteur. À défaut de son maintien dans l’accord, il faut bien une référence.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement AS734 de Mme Éva Sas.

Mme Éva Sas. L’alinéa 22 de l’article 7 du projet de loi prévoit une durée de validité des accords par défaut de cinq ans. Les modalités actuelles de dénonciation des accords sont satisfaisantes ; du coup, la fixation d’une durée de validité par défaut ne constitue pas une avancée et s’oppose même aux objectifs de souplesse, d’adaptation aux réalités de l’entreprise et de redynamisation du dialogue social. En effet, un accord apportant des garanties aux salariés ne serait pas pérenne et serait renégocié par défaut au bout de cinq ans. Il nous paraît plus simple et plus sage de ne pas fixer de durée par défaut, qui n’apporterait aucune garantie et aucune protection supplémentaires aux actifs.

M. le rapporteur. S’il n’y a pas de délai, la seule solution consiste à dénoncer un accord, et l’exercice n’est pas des plus faciles. En l’absence de durée de validité par défaut, un accord intervenu pendant la crise de 2008, par exemple, pourrait ainsi perdurer pendant un temps indéterminé. Je ne vois pas en quoi le fait de fixer une durée de validité constituerait un frein : ce peut être l’occasion de faire le point sur les normes conventionnelles, dont certaines seront peut-être devenues obsolètes. Votre proposition ne me paraît pas aller dans le sens de la négociation collective que l’article 7 vise précisément à encourager. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS103 de M. Gérard Cherpion.

Mme Isabelle Le Callennec. Cet amendement a pour objet la suppression des alinéas 24 à 28 de l’article 7. Le projet de loi impose aux partenaires sociaux de prévoir dans l’accord les conditions de son suivi ainsi qu’une clause de rendez-vous. La fréquence des réunions obligatoires des partenaires sociaux s’en trouvera augmentée alors que l’on a récemment multiplié les thèmes imposés de négociation, qu’ils soient annuels, triennaux ou quinquennaux.

M. le rapporteur. Avis défavorable. L’absence de clause de rendez-vous et de suivi de l’accord n’entraîne pas la nullité de celui-ci.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS797 du rapporteur.

La Commission en vient à l’amendement AS416 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. L’alinéa 34 de l’article 7 prévoit que l’employeur peut s’opposer à la publication d’un accord dans une base de données nationale s’il estime que sa diffusion porterait préjudice à son entreprise. Cette disposition heurte les exigences de publicité et de transparence des accords collectifs. Le droit actuel impose le dépôt – sous forme papier et électronique – des accords collectifs auprès des services du ministère chargé du travail. En vertu de l’article R. 2231-9 du code du travail, toute personne intéressée peut prendre connaissance gratuitement des conventions et des accords collectifs auprès de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) ou du service départemental de l’inspection du travail. La rédaction actuelle de l’article 7 remet en cause cette possibilité. Nous ne voyons pas, dès lors que l’employeur a signé l’accord, en quoi la diffusion de son contenu pourrait être préjudiciable à l’entreprise.

Nous proposons donc de supprimer cet alinéa.

M. le rapporteur. Madame Fraysse, l’obligation de dépôt existant aujourd’hui ne signifie pas que le texte de l’accord soit obligatoirement rendu public – à l’exception des conventions collectives de branche. Les accords peuvent contenir des éléments relatifs à la politique salariale et à la stratégie de l’entreprise qui peuvent exposer celle-ci à la concurrence. Je propose du reste dans l’amendement suivant, AS905, de rééquilibrer le dispositif en étendant aux salariés cette possibilité de s’opposer à la publication de l’accord. En effet, on peut imaginer que les salariés, pour des raisons de stratégie, ne tiennent pas à la publication d’informations qui pourraient être préjudiciables à l’action des organisations syndicales.

J’émets un avis défavorable à l’adoption de votre amendement.

M. Alain Fauré. Je rejoins les propos de M. le rapporteur : certains éléments doivent rester confidentiels, car ils pourraient se retourner contre les salariés au moment des négociations, de même que certaines entreprises évoluant dans des marchés très compétitifs peuvent refuser la publication de leurs bilans, qui pourrait porter préjudice à leur avenir et à celui de leurs salariés.

Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le rapporteur, j’apprécie que vous donniez aux salariés les mêmes droits qu’aux employeurs, mais vos propos ne me convainquent pas. Cet alinéa vise à empêcher la connaissance du contenu des accords et procède d’une volonté de dissimulation qui me dérange.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement AS905 du rapporteur.

M. le rapporteur. Je l’ai défendu à l’instant.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS906 du rapporteur.

La Commission examine l’amendement AS311 de M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. Si la publicité faite aux accords collectifs est renforcée, l’employeur peut en l’état seul s’y opposer, simplement en le notifiant aux signataires et à l’administration, et sans justification. Il est nécessaire que cette opposition soit motivée dans le cadre d’une clause figurant dans l’accord lui-même. Réinstaurer la confiance dans les accords collectifs en dépend. Mon amendement diffère donc quelque peu du vôtre, monsieur le rapporteur, car je souhaite amener les deux parties à s’entendre sur la non-publication de l’accord au lieu d’autoriser l’une ou l’autre à imposer unilatéralement son choix.

M. le rapporteur. Autrement dit, il faudrait donc s’entendre avant même la signature de l’accord sur la publication des éléments partagés, sans forcément savoir à cet instant quels éléments ont été partagés… Ce système me paraît bien compliqué et pourrait même empêcher la négociation d’aboutir. Monsieur Cavard, je vous demande de retirer votre amendement.

M. Gérard Cherpion. La publicité des accords est tout à fait normale et même légitime ; et si, dans un certain nombre de cas, il peut y avoir un besoin de confidentialité, le projet de loi le prévoit, il ne faudrait pas généraliser les clauses de motivation de non-publication de l’accord, sous peine d’aller à l’encontre du but recherché.

M. Christophe Cavard. Monsieur Cherpion, je ne comprends pas votre propos, puisque tout signataire pourra désormais s’opposer à la publication de l’accord. Cela ne facilitera donc pas sa publicité !

Monsieur le rapporteur, au moment de la signature de l’accord, la négociation est terminée : les parties en connaissent le contenu, et c’est à ce moment-là qu’elles décideront ensemble d’autoriser ou non sa publication, et non au départ.

M. le rapporteur. Mais on peut imaginer qu’un accord ait abouti, mais que les deux parties restent en désaccord sur sa publication. Du coup, c’est l’accord lui-même qui s’en trouverait compromis… Pour cette raison, votre amendement ne me paraît pas opportun. Je maintiens donc ma demande de retrait ou, à défaut, mon avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient alors à l’amendement AS907 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à reporter au 1er septembre 2017 l’entrée en vigueur des nouvelles conditions de publicité des accords. Aujourd’hui, ceux-ci sont déposés auprès de la direction générale du travail (DGT) pour les accords de branche et des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) pour les accords d’entreprise. Or la base de données qui les regroupe a besoin d’être adaptée à une consultation publique.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 7 modifié.

Article 8 : Mécanismes de révision et d’extinction d’un accord

La Commission est saisie de l’amendement AS687 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. L’article 8 contient au moins deux dispositions constituant à nos yeux des régressions des droits des salariés.

D’abord, la possibilité de mandatement des salariés est étendue à tous les types d’accords dans les entreprises dépourvues de délégué syndical. Actuellement, ce mode de négociation dérogatoire n’est possible que dans les domaines où la loi rend l’accord d’entreprise obligatoire pour appliquer une mesure, par exemple en matière d’intéressement ou de forfait jours. L’article 8 va donc contribuer à réduire encore un peu plus la place des délégués syndicaux, en leur retirant le monopole dont ils disposent pour négocier, sans résoudre le problème de la présence syndicale dans les entreprises – je rappelle que, à l’heure actuelle, deux tiers des établissements sont dépourvus de délégués syndicaux.

Alors que le projet de loi supprime le principe de faveur en rendant supplétive la convention collective de branche, le mandatement syndical risque d’entraîner une rupture d’égalité entre les entreprises d’un même secteur d’activité et la précarisation des conditions de travail des salariés concernés par cette négociation dérogatoire.

Qui plus est, l’article 8 remet en cause un principe essentiel du droit du travail : celui des avantages individuels acquis, en vertu duquel les salariés non couverts par un accord conservent ces avantages, c’est-à-dire non seulement leur salaire, mais aussi les droits relatifs aux congés ou aux conditions de travail : cela va bien plus loin que le seul maintien de la rémunération versée au cours des douze derniers mois.

Autant de raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de cet article.

M. le rapporteur. Sur le premier point, je ne partage pas du tout votre analyse. Vous ne pouvez pas dire à la fois que deux tiers des entreprises sont sans délégué syndical et que le mandatement, qui permet justement aux organisations syndicales d’accompagner les salariés lorsqu’il s’agit d’engager des négociations, leur serait défavorable ! Assurément, on peut regretter que les syndicats ne se soient pas davantage implantés dans les petites entreprises au cours de notre histoire. Mais le mandatement vise justement à leur d’accompagner les négociateurs, notamment les salariés des petites entreprises. C’est précisément parce que la relation de subordination est une réalité dans l’entreprise que l’accompagnement des salariés, donc le mandatement, contribue à préserver les garanties dont ils bénéficient, ce qui est notre objectif commun.

Pour ce qui est de votre second argument, j’avais à l’origine le même point de vue que vous, mais les auditions de chercheurs et de juristes que j’ai menées m’ont fait changer d’avis. Tous considèrent en effet que les avantages individuels acquis correspondent à une notion très floue, plutôt favorable aux salariés dans certains cas, aux entreprises dans d’autres ; il en ressort au total qu’elle n’est sécurisante pour personne. Le professeur Cesaro, qui a beaucoup travaillé sur cette question, a lui-même indiqué que le maintien de la rémunération pourrait dans bien des situations être plus avantageux pour les salariés que le maintien des avantages individuels acquis. En tout état de cause, il permettra à chaque salarié de savoir plus précisément ce à quoi il peut prétendre en cas de transfert de son contrat de travail.

J’émets donc un avis défavorable à votre amendement.

Mme Isabelle Le Callennec. Avec le mandatement, l’article 8 touche à un point dur, un sujet de forte divergence entre les organisations syndicales et les organisations patronales que nous avons auditionnées. Les petites et très petites entreprises notamment ne voient pas cette formule d’un bon œil. Je suis d’accord avec le rapporteur : l’exposé sommaire de l’amendement contient une contradiction. Les chefs d’entreprise, notamment de petites entreprises, nous assurent qu’ils sont tout à fait capables de négocier avec leurs salariés et qu’ils n’ont pas besoin d’une personne extérieure à l’entreprise pour cela.

M. le rapporteur. Avec le mandatement, l’interlocuteur n’est justement pas une personne extérieure à l’entreprise.

Mme Isabelle Le Callennec. Nous allons en reparler ; toujours est-il que cette forme d’accompagnement fait craindre aux employeurs l’insertion d’organisations syndicales dans l’entreprise. C’est là un point sensible et nous devons en avoir conscience.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement plusieurs amendements du rapporteur : l’amendement de précision AS908, puis les amendements rédactionnels AS798, AS799, AS800, AS801 et AS802.

Elle aborde ensuite l’amendement AS601 de M. Rémi Delatte.

M. Rémi Delatte. Nous sommes déterminés à utiliser ce texte pour assouplir et simplifier le fonctionnement de l’entreprise. C’était du reste un des objectifs du projet de loi, du moins à en croire ce que l’on nous en a dit ; surtout, c’est une exigence des entreprises, en particulier des plus petites d’entre elles, qui, en France, sont de loin les plus nombreuses.

L’amendement AS601 tend donc à supprimer le mandatement syndical pour permettre à l’entrepreneur de négocier directement les accords collectifs avec les salariés dès lors qu’il n’y a pas de délégué syndical dans l’entreprise.

M. le rapporteur. Sur ce point, un désaccord de fond nous oppose.

Certes, Mme Le Callennec dit vrai : les organisations patronales de l’artisanat et des PME sont hostiles au mandatement. Ce n’est pas nouveau : nous avons déjà eu ce débat lors de l’examen de la loi Rebsamen, à propos de l’instauration des commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI).

Je défendrai pour ma part ce que je considère comme une approche saine : personne ne nie la réalité du dialogue social dans les entreprises artisanales et dans les petites entreprises, mais il ne faut pas confondre dialogue social et capacité de négociation. Et sur ce dernier plan, le fait que les parties prenantes aient les mêmes possibilités de négociation, d’information, de formation est pour moi une garantie de la solidité des accords. Les employeurs ont derrière eux leurs organisations patronales ou leur expert-comptable, ce qui est tout à fait légitime ; de même, nous devons permettre aux salariés qui négocient, en l’absence de délégué syndical, de bénéficier de l’expertise et de l’accompagnement juridique des organisations syndicales.

Je le répète, le mandatement n’implique pas l’arrivée dans l’entreprise d’un personnel qui lui serait étranger : c’est un salarié de l’entreprise qui est mandaté par une organisation syndicale. Ne laissons donc pas penser qu’il s’agirait d’une intrusion.

Si notre objectif commun est de permettre que les négociations aient lieu, nous avons tout intérêt à ce que chaque partie ait à sa disposition tous les moyens de conclure un bon accord. Je ne saurais donc soutenir une suppression du mandatement.

Je le dis sans acrimonie : cessons de donner de l’écho à une position très souvent idéologique. Je comprends la peur des artisans et des chefs de petites entreprises, mais c’est se raconter une histoire que de voir forcément un adversaire dans l’organisation syndicale. Dans un texte qui porte sur la négociation collective, le fait que les parties prenantes disposent de tous les atouts pour négocier ne peut être que positif.

Avis défavorable.

M. Élie Aboud. C’est un vrai sujet. La première entreprise de France nous écoute. Sur quel fondement affirmez-vous, monsieur le rapporteur, que la personne mandatée n’est pas extérieure à l’entreprise ? Que se passera-t-il si, au sein de l’entreprise, aucun salarié n’accepte d’être mandaté ? Que les choses soient dites clairement…

M. le rapporteur. Dans ce cas, il n’y aura pas de mandatement. Les règles sont très claires.

M. Élie Aboud. Très bien.

Mme Isabelle Le Callennec. Monsieur le rapporteur, vous sous-entendez que nous entretenons l’idée selon laquelle les organisations syndicales, dans l’histoire de l’entreprise, joueraient systématiquement comme des freins ou des enquiquineurs. Mais voyez les images qui sont diffusées depuis plusieurs semaines. Les organisations syndicales que nous avons auditionnées sur ce texte ont des positions très diverses, elles le reconnaissent elles-mêmes, et ne partagent pas le même état d’esprit. Reste qu’elles existent et que certaines, pour des raisons historiques, ne peuvent être laissées de côté dans les négociations. Mettez-vous à la place des chefs d’entreprise : ils préfèrent avoir en face d’eux les organisations dites réformatrices, qui essaient de discuter, de contribuer à l’intérêt général. Mais toutes ne se comportent pas ainsi, il suffit d’allumer sa télévision pour le constater. Ce n’est pas une histoire que nous entretiendrions : c’est une réalité vécue sur le terrain en ce moment même. On a parlé de loyauté, d’un dialogue social apaisé : force est de constater que tout le monde n’est pas dans cet état d’esprit.

Nos collègues Arnaud Richard et Jean-Marc Germain conduisent actuellement une mission d’information sur le paritarisme dont nous attendons les conclusions avec impatience, mais il faut reconnaître que l’état d’esprit sur ce sujet n’est pas le même en France et en Allemagne. On nous invite à voter le présent texte comme si tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes ; ce n’est malheureusement pas le cas. Pour négocier, un chef d’entreprise préférera toujours avoir affaire à des interlocuteurs formés et soucieux de l’intérêt général.

M. Rémi Delatte. On a plusieurs fois invoqué l’équilibre de ce texte, qui vise, rappelons-le, « à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs ». Or j’ai parfois l’impression que notre rapporteur nourrit quelques soupçons quant à la capacité à négocier des petites entreprises. C’est vraiment dommage. J’ai parlé hier de confiance entre l’employeur et ses salariés ; c’est bien cette confiance qui, en règle générale, anime la vie quotidienne de l’entreprise.

Je rappelle enfin que l’amendement AS601 permet la négociation directe entre employeur et salariés mais n’empêche pas le recours au mandatement s’ils ne parviennent pas à s’entendre.

M. Michel Liebgott. Il faut trouver une solution équilibrée, qui fasse progresser le dialogue social. Toutes les organisations syndicales ne sont pas irresponsables : nombre d’entre elles souhaitent que des accords soient conclus. C’est d’ailleurs ce qui se produit dans la majorité des cas. Quant au salarié, pour prendre position au sein de l’entreprise, il doit aussi faire preuve d’un certain courage qui mérite d’être reconnu.

Assurément, notre pays n’a pas l’habitude de dialoguer, notamment dans l’entreprise. Mais nous devons faire confiance au dialogue social. C’est ce que souhaite le Gouvernement. Peut-être pourrons-nous, par voie d’amendement, améliorer encore le mandatement en le sécurisant davantage – mais nous y reviendrons.

M. le rapporteur. Au risque de heurter certains, ce sont vraiment des positions de principe qui sont en jeu. Aujourd’hui, 94 % des 36 000 accords d’entreprise conclus chaque année sont signés par les organisations syndicales, dont 80 % par la CGT – que je ne cite pas pour la stigmatiser mais parce qu’il me semble qu’il y a été fait allusion. Cessons donc de laisser penser qu’il n’y a pas de discussions dans nos entreprises ! Ces chiffres montrent au contraire qu’elles ont lieu et qu’elles fonctionnent. Dans ces 36 000 cas, il y a eu une discussion entre l’employeur et les organisations syndicales. Et l’essentiel, c’est bien qu’au bout du compte on négocie au sein de l’entreprise.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement AS697 de M. Alain Fauré.

M. Alain Fauré. Je propose que la désignation d’un salarié mandaté reçoive l’avis conforme de la commission mentionnée à l’article L. 23-111-1, autrement dit la commission paritaire régionale interprofessionnelle.

Nous devons tenir compte de la composition du tissu économique de notre pays : sur 3,9 millions d’entreprises, 3,8 millions sont de toutes petites entreprises. Nous venons d’entendre que 36 000 accords d’entreprise sont signés chaque année, dont 80 % par le syndicat que le rapporteur a cité. Dans les petites entreprises, les négociations sont parfois nécessaires et tous les salariés en mesure de les mener. Nous devrions les y encourager en prévoyant la désignation d’un salarié reconnu par la commission paritaire régionale interprofessionnelle, afin de soutenir la négociation. Si la décision unilatérale de l’employeur peut être inévitable dans certaines toutes petites entreprises, dans d’autres, il est utile que les salariés interviennent en étant secondés. Cela permettra d’y développer le syndicalisme. Nous avons besoin de dialogue et, pour dialoguer, il faut pouvoir s’appuyer sur des connaissances et sur des compétences.

M. le rapporteur. Je comprends votre propos, mais je ne vois pas en quoi les CPRI issues de la loi Rebsamen du 17 août 2015, qui les charge d’une mission de conseil et d’information, seraient légitimes lorsqu’il s’agit de valider ou d’invalider la désignation d’un salarié mandaté.

En outre, la procédure de désignation en serait significativement prolongée.

Enfin et surtout, comment une commission régionale pourrait-elle écarter un salarié mandaté, qui, je le rappelle, fait partie de l’entreprise ? Cela me paraît très risqué.

Pour ces raisons, et même si je comprends l’esprit de votre proposition, qui pourrait du reste rassurer sans doute une partie des employeurs, votre amendement ne me paraît pas applicable.

Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La Commission aborde quatre amendements identiques : les amendements AS155 de M. Lionel Tardy, AS163 de M. Gérard Cherpion, AS544 de M. Arnaud Richard et AS588 de M. Bernard Perrut.

M. Lionel Tardy. La loi sur le dialogue social votée l’été dernier permet le mandatement par une organisation syndicale d’un salarié extérieur à l’entreprise, mais qui peut aussi être totalement extérieur à la région et au secteur. Cela n’a pas vraiment de sens. Je doute de l’efficacité du mandatement dans les TPE et PME. Pourtant, vous voulez déjà étendre ce mécanisme qui vient à peine d’être adopté. Ce n’est pas souhaitable s’agissant de la négociation d’accords d’entreprise. D’où mon amendement AS155.

Mme Isabelle Le Callennec. Un mot, d’abord, à l’intention de M. le rapporteur : pour ma part, je n’ai cité aucune organisation syndicale. Je me permets simplement de vous dire que celle que vous avez mentionnée manifeste dans la rue pour demander le retrait du texte que nous examinons ! Mais je suis d’accord avec vous : sur le terrain, il y a sans doute beaucoup moins de postures, et des personnes tout à fait responsables, capables de juger au plus près de l’entreprise de ce qui est bon pour elle comme pour les salariés.

J’en viens à mon amendement AS163. La décision unilatérale de l’entreprise, lorsqu’elle est encadrée, peut être une bonne solution, à laquelle on ne fait pas suffisamment appel et qui n’est pas toujours connue dans les petites entreprises. Nous devrions insister sur cette formule au lieu d’agiter le chiffon rouge du mandatement.

M. Arnaud Richard. Je remercie Mme Le Callennec d’avoir cité la mission d’information sur le paritarisme dont je conduis les travaux avec Jean-Marc Germain. On ne peut pas me reprocher de manquer de bonne volonté lorsqu’il s’agit du dialogue social. Mais il est, me semble-t-il, beaucoup trop tôt pour en venir au mandatement dans les TPE, même si ce peut être un objectif : le dialogue social n’est pas suffisamment mûr.

Dans sa rédaction actuelle, la loi de 2015 permet, à certaines conditions, la conclusion d’accords collectifs d’entreprise dans le cadre d’un mandatement syndical, s’agissant de mesures dont la loi subordonne la mise en œuvre à un accord collectif. En pratique, le mandatement syndical est très rare : il concerne moins de 2 % des accords d’entreprise signés dans les domaines où il est déjà possible. Rien ne permet de penser que cette modalité est appelée à se développer en l’absence de volonté des salariés.

En outre, même si le mandatement syndical permet à certaines catégories d’entreprises de négocier un accord d’entreprise, ce mode dérogatoire devrait rester réservé aux mesures dont la loi subordonne la mise en œuvre à un accord collectif, afin de conserver un socle de négociation cohérent.

Enfin, et même si ce point de vue peut vous paraître très subjectif, le mandatement syndical ne permettrait pas de garantir l’égalité de traitement entre les salariés exerçant les mêmes métiers, ce qui exposerait les entreprises à une concurrence déloyale.

Le groupe de l’Union des démocrates et indépendants souhaite donc que soit conservé pour l’instant le périmètre actuel du mandatement, tout en ayant conscience que l’idéal, pour le bien du dialogue social, serait de l’étendre lorsque les parties seront mûres pour cela. D’où notre amendement AS544.

M. Bernard Perrut. Mon amendement AS588 est identique.

L’article L. 2232-24 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 17 août 2015, prévoit, sous conditions, la conclusion d’accords collectifs d’entreprise dans le cadre du mandatement syndical pour des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif.

Il convient de maintenir le périmètre actuel de la négociation ouverte au mandatement syndical et, au contraire, de ne pas l’étendre à tous les sujets relatifs au code du travail.

En effet, même si le mandatement syndical constitue un moyen ouvert à certaines catégories d’entreprises d’accéder à la négociation d’un accord d’entreprise, il n’en demeure pas moins que ce mode dérogatoire doit continuer à être réservé aux mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif, afin de conserver un socle cohérent de négociation.

À défaut, en plus de l’inversion de la hiérarchie des normes entre l’accord d’entreprise et l’accord de branche, le mandatement syndical ne permettrait pas de garantir une égalité de traitement entre des salariés exerçant les mêmes métiers et exposerait les entreprises à un risque de concurrence déloyale, ce qui inquiète de très nombreux chefs d’entreprise, notamment dans les métiers de l’artisanat, du bâtiment et des travaux publics.

M. le rapporteur. À l’heure actuelle, les salariés mandatés ne peuvent négocier que sur des mesures dont la loi subordonne la mise en œuvre à un accord collectif. Or les représentants de la DGT que nous avons auditionnés nous ont eux-mêmes indiqué qu’il était impossible de définir précisément ce périmètre. Voilà pourquoi le texte permet aux salariés mandatés de négocier tous les types d’accords collectifs. Pourquoi restreindre cette possibilité si l’on veut développer la négociation collective, sachant que le mandatement permet aux salariés mandatés d’être accompagnés ? Je suis défavorable à ces amendements.

M. Gérard Cherpion. Au risque de déplaire au rapporteur, dans la première version du texte qui nous a été transmise, c’était la décision unilatérale de l’employeur qui valait. Elle a été retirée, et c’est alors seulement que le Gouvernement s’est penché sur le problème du monopole syndical en matière de négociation collective et a décidé d’étendre le périmètre du mandatement. Cette disposition marque donc un recul du Gouvernement, qui va mettre en difficulté nombre d’entreprises.

M. le rapporteur. Je considère pour ma part que les négociations qui se sont engagées depuis ont permis d’en revenir à une forme de sagesse. La sagesse, ce n’est pas la décision unilatérale de l’employeur, mais la confiance dans la négociation collective dont toutes les parties prenantes doivent être présentes. Je maintiens donc mon argumentation et mon avis défavorable.

La Commission rejette les amendements identiques.

Puis elle adopte successivement plusieurs amendements rédactionnels du rapporteur : les amendements AS803, AS909, AS804, AS805 et AS806.

Elle adopte ensuite l’article 8 modifié.

Après l’article 8

La Commission est saisie de l’amendement AS36 de M. Patrick Hetzel.

M. Lionel Tardy. Cet amendement tend à préciser que l’égalité de rémunération est appréciée au regard de la globalité des éléments qui la composent.

M. le rapporteur. Et vous proposez d’introduire cette précision dans une partie du code du travail relative à l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes… J’imagine que la délégation aux droits des femmes sera particulièrement vigilante ! Car, en réalité, votre amendement reviendrait à vider de son sens le principe « à travail égal, salaire égal ». Prenez le cas d’une commerciale, qui percevrait une rémunération identique à son collègue masculin exerçant les mêmes fonctions, mais dans laquelle la part variable, liée à ses ventes, serait beaucoup plus importante : elle ne pourrait pas faire valoir qu’elle n’est pas traitée à égalité sur sa part fixe…

Je ne comprends vraiment pas cet amendement et j’émets un avis très défavorable.

M. Jean-Patrick Gille, président. On avait bien senti que M. Tardy l’avait défendu sans grand enthousiasme…

M. Lionel Tardy. J’en étais cosignataire, monsieur le rapporteur…

La Commission rejette l’amendement.

Article 9 : Ajustements relatifs au fonctionnement des instances représentatives du personnel

La Commission examine l’amendement AS910 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un amendement de clarification, qui précise, à la suite de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, que l’unification des compétences au profit du juge judiciaire en matière de contestation des élections professionnelles exclut tout autre recours administratif ou contentieux.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS807 du rapporteur.

Elle aborde ensuite l’amendement AS628 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Marie-Noëlle Battistel. La délégation aux droits des femmes a examiné le texte et procédé à de nombreuses auditions, notamment du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle (CSEP) et des partenaires sociaux. Elle a conclu que la négociation est un moment très important au sein d’une entreprise dont il importe de clarifier, du moins de hiérarchiser les différentes étapes, alors que le texte, en l’état, introduit une certaine complexité.

Ainsi, aux termes de l’article du code du travail relatif à la négociation, celle-ci s’appuie sur les seules informations contenues dans la base de données économiques et sociales (BDES) : le plan d’action, en tant que document de travail présenté par l’employeur, ne fait plus partie des éléments soumis à la négociation. Or la qualité de la négociation dépend évidemment des éléments préparatoires fournis par l’employeur, dont le plan d’action doit faire partie.

Nous proposons donc de modifier cet article du code du travail pour que la négociation s’appuie obligatoirement non seulement sur la BDES, mais aussi sur le plan d’action de l’employeur prévu à l’article L. 2323-17 du même code.

Cela permettra de clarifier la méthode comme suit : premièrement, le plan d’action doit être distingué de la BDES ; ensuite a lieu la consultation ; enfin, la négociation, qui doit déboucher sur un accord ou sur un plan unilatéral de l’employeur.

M. le rapporteur. La nouvelle mouture issue de la loi du 17 août 2015 visait précisément à éviter une confusion entre deux plans d’action : le plan d’action de l’employeur intervenant en amont des négociations, qui était assorti d’un rapport de situation comparée, et le plan d’action unilatéral de l’employeur en cas d’échec des négociations. Ce faisant, nous n’avons pas pris de risques : les éléments pertinents sont de toute façon communiqués à l’ensemble des acteurs dans le cadre de la négociation. Il me paraît un peu compliqué de revenir six mois après sur un dispositif que nous avons adopté en 2015. Vous savez comme moi que cette confusion existait. Veillons à ne pas rétablir ce que nous avions supprimé, par souci de simplicité, avec la loi du 17 août 2015.

Mme Catherine Coutelle. Je me permets d’insister sur ce point très important, dont nous avons beaucoup discuté lors de l’examen de la loi Rebsamen ; or celle-ci a un peu brouillé les messages.

Je ne remets pas en cause la base de données économiques et sociales (BDES), qui a le mérite de simplifier les choses en rassemblant toutes les données dans une base unique que tout le monde peut consulter. Mais ce que nous demandons, c’est que l’employeur mette en forme les données qui concernent l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, en indiquant quels sont les salaires perçus par les hommes et les femmes, quelles sont les promotions, quelles sont les formations, combien de femmes ont été embauchées et à quel niveau, etc. Les syndicats et, plus largement, les partenaires sociaux y tiennent beaucoup.

En réalité, ce que nous vous demandons, monsieur le rapporteur, c’est de rétablir le rapport de situation comparée. Je ne sais pas pourquoi ce terme est devenu tabou, pourquoi il provoque de l’urticaire – peut-être faudrait-il l’appeler « bilan de situation comparée » ? C’est pourtant le document dont les négociateurs s’étaient emparés, et qui allait dans le sens de la simplification. Si nous rétablissions ce rapport, nous n’aurions pas besoin de multiplier les plans d’action – sur ce point, je suis d’accord avec vous, monsieur le rapporteur. Ce dont nous avons besoin, c’est d’une situation comparée. Or ce n’est pas dit ainsi dans la loi.

Je précise que les décrets d’application correspondants de la loi Rebsamen ne sont pas encore parus. Les entreprises n’appliquant pas encore la loi Rebsamen, elles ne risquent pas de s’embrouiller.

M. Christophe Cavard. Il s’agit d’une question très importante, qui pourrait être traitée dans le cadre des accords de méthode. Je trouve dommage que notre proposition de rendre obligatoires les accords de méthode n’ait pas été davantage soutenue. Elle aurait permis de mettre en avant les enjeux que défend Mme Coutelle.

M. le rapporteur. Je comprends bien l’objectif que poursuivent Mme Battistel et Mme Coutelle et je le partage. Ce que vous souhaitez, chères collègues, c’est qu’on identifie mieux les données relatives à l’égalité professionnelle au sein de la base de données ; nous répondrons à cette préoccupation avec un amendement suivant. Cela me paraît préférable au fait de s’accrocher à tout prix au rapport de situation comparée, lequel présente peut-être moins d’intérêt que la base de données, dans la mesure où il est actualisé moins souvent. Avec votre amendement, vous réintroduisez un plan d’action, ce qui n’est pas souhaitable. Tout en partageant votre souci, je maintiens mon avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS629 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Actuellement, en l’absence d’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, l’article L. 2242-8 du code du travail dispose que la synthèse du plan d’action unilatéral établi par l’employeur est portée à la connaissance des salariés. Cependant, l’article ne prévoit pas d’obligation d’informer les salariés sur l’existence et le contenu synthétique de l’accord lorsqu’il en existe un. Il convient donc de préciser que, en cas d’accord, la synthèse de cet accord doit être portée à la connaissance des salariés.

M. le rapporteur. Il est normal que le plan d’action unilatéral de l’employeur fasse l’objet d’une diffusion spécifique. En revanche, il n’y a pas de raison, selon moi, que les modalités de publicité des accords conclus en matière d’égalité professionnelle dérogent aux règles de droit commun, que nous venons d’ailleurs de renforcer en adoptant l’article 7, lequel prévoit la possibilité de faire précéder les accords d’un préambule et impose la diffusion de tous les accords via une base de données nationale accessible à tous. Pourquoi faire un cas particulier ? Avis défavorable.

Mme Catherine Coutelle. L’étude d’impact – très intéressante à lire et qui s’apparente plutôt à un diagnostic, notamment en ce qui concerne les femmes – préconise d’accroître la transparence sur les accords, car les salariés les méconnaissent souvent et parfois même en ignorent l’existence. Nous avions le sentiment que l’obligation de publicité ne concernait que le plan d’action unilatéral de l’employeur, et non un éventuel plan d’action négocié et signé par les partenaires sociaux en matière d’égalité professionnelle. Si vous nous assurez qu’un tel accord fera bien partie de l’ensemble des documents auxquels s’appliquent les règles de transparence et qu’il sera affiché dans l’entreprise de manière à ce que l’on sache notamment comment les choses vont avancer en matière d’égalité salariale et combien de femmes pourront partir en formation, nous sommes prêts à retirer notre amendement.

M. le rapporteur. Je vous le confirme.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AS211 rectifié de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Le principe énoncé au 9° de l’article 1er parlant de « vie personnelle et familiale », il faut faire de même à l’article L. 2323-8 du code du travail, en ajoutant « et familiale ». Nous avons adopté un amendement analogue à l’article 3, l’amendement AS30 de mon collègue Patrick Hetzel.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS808 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement AS911 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à corriger un oubli dans la loi du 17 août 2015 : il étend la possibilité de recourir à une visioconférence aux réunions du comité de la société coopérative européenne et à celles du comité de la société issue de la fusion transfrontalière.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS627 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Avant la loi Rebsamen – toujours inappliquée faute de décrets –, lorsque le comité d’entreprise négociait en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, il avait en sa possession deux documents : les données relatives à l’égalité et un plan d’action proposé par l’employeur. Si la négociation aboutissait, le plan d’action était le cas échéant modifié et donnait lieu à un accord. Si la négociation échouait, le plan d’action proposé initialement devenait le plan d’action unilatéral de l’employeur.

Aujourd’hui, les choses ne sont vraiment pas claires – vous l’avez vous-même reconnu, monsieur le rapporteur. Lorsqu’on lit les dispositions actuelles, on a l’impression que le comité d’entreprise reçoit des informations et qu’il est consulté sur un rapport déjà négocié. Quel est le sens d’une discussion sur un rapport déjà négocié ?

D’où notre amendement, qui vise à réintégrer tous les éléments pertinents dans la négociation. Il précise que le plan d’action doit porter sur un nombre minimum de domaines prévus par décret et qu’un rapport de situation comparée est produit à l’issue de cette consultation. Ce rapport n’est pas figé. On le soumet au comité d’entreprise, puis on consulte, on négocie et, in fine, on signe ou non.

M. le rapporteur. Madame Coutelle, lors de l’examen de la loi Rebsamen, vous vous êtes vous-même battue – c’est le moins que l’on puisse dire – pour que tous les éléments qui figuraient dans le rapport de situation comparée, sans exception, soient repris dans la BDES. Et c’est le cas aujourd’hui. Dès lors, je ne vois pas pourquoi il faudrait rétablir le rapport de situation comparée. Avis défavorable.

M. Christophe Cavard. Toutes les dispositions que vous défendez, madame Coutelle, pourraient être intégrées dans notre réflexion sur les accords de méthode, lesquels visent précisément à définir le cadre général de la négociation, les thèmes de discussion et les informations qui sont portées à la connaissance des négociateurs. Je vous invite vraiment à travailler sur ce point avec nous d’ici à la séance publique.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS632 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Il s’agit d’un amendement de repli.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS916 et AS809 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement AS625 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Nous aimerions que le même vocabulaire soit utilisé dans la totalité du code du travail. Nous proposons donc d’utiliser, à l’article L. 2323-8, les termes de « situation comparée » des femmes et des hommes, plutôt que ceux de « situation respective », peu habituels.

M. le rapporteur. Cela participe de la clarification que vous souhaitez. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS626 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Cet amendement vise à préciser que le diagnostic et l’analyse de la situation comparée des femmes et des hommes reposent sur un ensemble d’indicateurs chiffrés.

M. le rapporteur. Je vous invite à retirer votre amendement, car il est, selon moi, satisfait : l’article L. 2323-17 du code du travail mentionne expressément les indicateurs chiffrés visant à établir l’analyse de la situation comparée entre les femmes et les hommes.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 9 modifié.

Après l’article 9

La Commission est saisie de l’amendement AS728 de Mme Éva Sas.

Mme Éva Sas. Notre objectif est que ce projet de loi contienne également des avancées pour les salariés. Il s’agit notamment de renforcer leur représentation dans les conseils d’administration, car nous croyons à une gestion partagée de l’entreprise. Le conseil d’administration est une instance stratégique pour l’entreprise, ses dirigeants et ses salariés, dans laquelle le pluralisme des visions et des légitimités doit s’exprimer. Si l’ambition du Gouvernement est véritablement d’améliorer le dialogue social, il nous suivra dans cette analyse.

À la suite de l’accord national interprofessionnel conclu entre les partenaires sociaux le 11 janvier 2013, la France a rejoint douze pays européens qui assurent la représentation des salariés au conseil d’administration des entreprises. Mais les premiers bilans et témoignages sur l’application de cette mesure nous enseignent que la représentation des salariés ne peut être efficace qui si ces derniers se partagent un nombre suffisant de postes d’administrateurs au sein des conseils.

Dans l’état actuel du droit, comprennent des administrateurs représentant les salariés les conseils d’administration et de surveillance des entreprises employant au moins 5 000 salariés permanents dans la société et ses filiales, dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au moins 10 000 salariés permanents dans la société et ses filiales, dont le siège social est fixé sur le territoire français et à l’étranger.

De surcroît, le code de commerce dispose que le nombre d’administrateurs salariés ne peut excéder le tiers des administrateurs. Notre amendement AS728 vise à faire de ce seuil maximum un seuil minimum de représentation des salariés.

M. le rapporteur. Nous avons déjà évoqué la question des administrateurs salariés dans le cadre de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi. Nous avons alors fait progresser les choses de manière significative en abaissant de 5 000 à 1 000 salariés en France, et de 10 000 à 5 000 salariés à l’échelle du monde, le seuil effectif à partir duquel les groupes sont obligés de prévoir la présence d’administrateurs salariés au sein de leur conseil d’administration. Cette mesure a permis, à elle seule, de multiplier par cinq le nombre de groupes concernés : il est passé de 90 à un peu plus de 400.

Je rappelle, en outre, que l’entrée en vigueur de ce dispositif est échelonnée : elle doit intervenir au plus tard dans les six mois suivant la clôture de l’exercice 2016 ou 2017. Nous sommes en phase de progression. Le calendrier prévu n’étant pas encore arrivé à son terme, il serait judicieux de ne pas revenir dès maintenant sur ce dispositif, même si je partage l’idée qu’il faudra encore faire progresser la présence des administrateurs salariés au sein des conseils d’administration. En l’état actuel des choses, j’émets un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS729 de Mme Éva Sas.

Mme Éva Sas. Le code de commerce prévoit des dispositions spécifiques pour les entreprises de petite taille en matière de représentation des salariés au conseil d’administration. En cohérence avec l’amendement précédent, nous proposons d’instaurer un seuil minimum de deux administrateurs salariés, sauf lorsque le conseil d’administration n’est composé que de trois membres.

Il est important de prendre en compte le rapport de force au sein de l’entreprise et, plus précisément, l’inégalité entre employeurs et salariés. Monsieur le rapporteur, il s’agit peut-être d’une des dernières occasions de progresser sur cette question au cours de cette législature – j’ai quelques doutes sur la suivante.

M. Élie Aboud. Ils ont le moral !

Mme Éva Sas. Il ne faut pas la manquer. C’est pourquoi nous avons proposé, avec cet amendement et le précédent, que les administrateurs salariés représentent un tiers des administrateurs et soient deux au minimum. Je sais par expérience, qu’un administrateur isolé a beaucoup de mal à exercer son mandat.

M. le rapporteur. Avis défavorable, pour la même raison que précédemment.

M. Jean-Patrick Gille, président. Le cœur et la raison…

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS212 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Encore une erreur dans la loi relative au dialogue social votée l’été dernier ! Avec ce texte, on s’était vanté d’étendre le recours à la visioconférence pour les réunions avec la délégation unique du personnel, mais vous avez introduit de la complexité et un principe de méfiance à l’égard de l’employeur en limitant cette possibilité. Il faudrait savoir !

Dans l’état actuel du droit, le recours à la visioconférence pour les réunions avec les différentes institutions représentatives du personnel ne peut être autorisé que par accord entre l’employeur et les membres élus du comité. En l’absence d’accord, ce recours est limité à trois réunions par année civile. On ne peut pas à la fois affirmer que l’on veut développer le dialogue social et imposer de tels freins. En outre, c’est contradictoire avec le développement des outils numériques. Il faut inverser la logique en prévoyant que l’employeur peut recourir à la visioconférence pour ces réunions, tout simplement.

M. le rapporteur. Je vous remercie, monsieur Tardy, de nous faire rajeunir de quelques mois : le même amendement avait déjà été déposé lors de l’examen de la loi relative au dialogue social. J’avais alors expliqué qu’il ne me semblait pas opportun de prévoir une décision unilatérale de l’employeur en la matière et qu’il fallait plutôt privilégier les accords collectifs. Je ne me déjugerai pas : avis défavorable.

M. Gérard Cherpion. En adoptant l’amendement AS911, nous avons étendu le recours à la visioconférence. Ce faisant, nous avons, selon les termes du rapporteur, rectifié ce qu’il qualifiait d’oubli, mais ce n’en était pas forcément un. Nous pouvons, là encore, encourager l’utilisation de la visioconférence, qui représente un gain de temps. Ce qui n’exclut pas de tenir des réunions formelles.

M. Lionel Tardy. Nous ne revenons pas sur la nécessité d’un accord entre l’employeur et les membres élus du comité, mais il ne nous semble pas normal de limiter le recours à la visioconférence à trois réunions en l’absence d’accord. Pourquoi trois réunions plutôt que deux, quatre ou cinq ? Cela n’a pas de sens.

La Commission rejette l’amendement.

Chapitre II
Renforcement de la légitimité des accords collectifs

Article 10 : Généralisation des accords majoritaires d’entreprise

La Commission est saisie de l’amendement AS560 de M. Arnaud Richard, tendant à supprimer l’article.

M. Arnaud Richard. Appelons un chat un chat : la représentativité syndicale peut entraîner, dans certaines entreprises, une forme de paralysie du dialogue social. La règle actuelle de validation des accords permet aux organisations syndicales défavorables de maintenir une position de neutralité sans pour autant bloquer systématiquement les accords négociés au sein de l’entreprise. À l’article 10, vous entérinez le principe d’une validation majoritaire des accords. De ce fait, certaines organisations auront désormais un droit de blocage automatique de tout accord, ce qui pourrait priver certaines entreprises de leur capacité à adapter leur organisation – pour parler de manière très diplomatique. En outre, face à la possibilité de telles situations de blocage, le recours au référendum n’est pas nécessairement une solution, dans la mesure où son organisation implique une préparation matérielle lourde et coûteuse à mettre en œuvre. Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé cet amendement de suppression, qui est aussi un amendement d’appel.

M. le rapporteur. Ainsi que cela nous a été rappelé au cours des auditions, lorsque le taux de 30 % a été fixé comme seuil de validité des accords, on nous expliquait déjà que cela empêcherait tout accord dans les entreprises. Or tel n’a pas été le cas. Aujourd’hui nous considérons, et les auditions ont conforté notre point de vue, que le passage de ce seuil à 50 % ne constituera pas non plus un frein à la négociation collective. J’en veux pour preuve que certaines entreprises, et non des moindres, ont d’ores et déjà instauré le principe de l’accord majoritaire.

Dès 2008, lors de la mise en place des accords à 30 %, il avait été précisé qu’il s’agissait d’une « étape préparant au passage à un mode de conclusion majoritaire des accords ». Nous ne faisons que nous inscrire dans cette tendance.

L’accord majoritaire prend tout son sens aujourd’hui, car il s’agit de donner un nouveau souffle à la négociation collective d’entreprise. C’est aussi un moyen de sécurisation. Je rappelle que ce texte doit nous permettre de maintenir un équilibre. En allant trop dans un sens ou trop dans l’autre, nous romprions cet équilibre, ce qui n’est ni le souhait du Gouvernement ni le mien. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques AS334 de M. Gérard Cherpion et AS429 de M. Christophe Caresche.

M. Gérard Cherpion. J’ai bien entendu l’argumentaire que vous venez de développer, monsieur le rapporteur. D’un point de vue philosophique, on ne peut qu’être d’accord avec l’idée de progresser vers des accords à 50 %. Cela étant, aujourd’hui, un certain nombre d’entreprises – notamment une que vous avez certainement reçue en audition – sont totalement incapables d’obtenir un accord à 50 %. Combien de temps faudra-t-il à ces entreprises pour parvenir à un tel accord ? Que se passera-t-il pendant ce temps-là ? Il faut absolument maintenir les règles actuelles. À moins que vous n’ayez prévu un système qui ménage une transition ? À défaut, nous risquons d’être confrontés à un blocage de la négociation dans un certain nombre d’entreprises. Quant au référendum, pourquoi pas, mais il doit pouvoir être demandé non seulement par les syndicats de salariés, mais aussi par le chef d’entreprise. Tel est l’objet de l’amendement AS222 que je présenterai.

M. Christophe Caresche. Parmi les deux évolutions qui nous sont proposées, la généralisation de l’accord majoritaire est à mon avis l’évolution la plus notable et la plus importante : dans les faits, le recours au référendum restera exceptionnel. D’un point de vue purement intellectuel, il est difficile d’être contre cette généralisation ; c’est même plutôt une évolution intéressante. Toutefois, à ma connaissance, un certain nombre d’entreprises auront des difficultés à signer des accords dans ces conditions. Ainsi que le rapporteur l’a relevé, le dispositif actuel a plutôt bien fonctionné : de nombreux accords d’entreprise sont signés aujourd’hui, mais en appliquant les règles de validité actuelles. En généralisant les accords majoritaires, nous faisons un peu un saut dans l’inconnu. D’ailleurs, M. Combrexelle lui-même a considéré que cette évolution pouvait poser problème, puisqu’il a proposé une option intermédiaire dans son rapport, qui consisterait à réserver le système de validation majoritaire à un certain nombre de domaines de la négociation. Peut-être serait-il possible de travailler sur ce point d’ici à la séance publique ; mais pour l’heure, je propose, par mon amendement AS429, que nous en restions à la situation actuelle.

M. le rapporteur. Avec ces deux amendements, chers collègues, vous ne laissez aucune chance aux accords à 50 %, puisque vous les supprimez purement et simplement.

M. Christophe Caresche. Certes.

M. le rapporteur. D’autre part, je vous proposerai par amendement que la généralisation de l’accord majoritaire n’intervienne qu’à l’issue d’un retour d’expérience. D’ici là, le seuil de validité de 50 % s’appliquera exclusivement aux accords portant sur la durée du travail, les repos et les congés et aux accords de préservation et de développement de l’emploi.

Je n’ai pas la même appréciation que vous : je pense qu’il est possible de conclure des accords majoritaires dans les entreprises, de même qu’il a été possible de conclure des accords à 30 % en dépit des objections que l’on avançait à l’époque. Il faut aller dans le sens d’une légitimation des accords collectifs. Cela me paraît un élément important en termes de participation. Avis défavorable aux deux amendements : le dispositif proposé me paraît exagérément complexe au regard des objectifs que nous poursuivons.

M. Daniel Goldberg. D’après leur exposé sommaire, ces deux amendements visent à maintenir les règles actuelles. Or, selon celles-ci, les syndicats ayant obtenu la majorité des voix aux élections professionnelles peuvent s’opposer à un accord. En d’autres termes, les organisations syndicales ont, aujourd’hui, trois possibilités : signer l’accord, ne pas le signer, ne pas le signer et s’y opposer. Si vous adoptiez ces amendements, cette troisième possibilité disparaîtrait. Ce serait donc non pas un maintien des règles actuelles, mais une nouvelle donne très défavorable aux syndicats qui ont recueilli la majorité des voix des salariés.

L’amendement AS429 est retiré.

La Commission rejette l’amendement AS334.

La Commission examine l’amendement AS559 de M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Pour que la règle évolue peu à peu vers celle de l’accord majoritaire, cet amendement de compromis vise à soumettre la validation d’un accord à sa signature par des organisations ayant obtenu au moins 40 % des suffrages. La légitimité des accords s’en trouverait renforcée, cependant que certaines organisations conserveraient la possibilité d’occuper une position de neutralité. Ce pas supplémentaire va dans le sens de l’histoire.

M. le rapporteur. Avis défavorable : si le passage d’un taux de représentativité de 30 % à un taux de 50 % a du sens, car il instaure le principe de l’accord majoritaire, le passage à un taux de 40 %, en revanche, me semble dépourvu de tout intérêt.

La Commission rejette l’amendement AS559.

Puis elle examine les amendements identiques AS417 de Mme Jacqueline Fraysse, AS644 de Mme Fanélie Carrey-Conte et AS745 de Mme Éva Sas.

Mme Jacqueline Fraysse. Par l’amendement AS417, nous entendons nous opposer à l’organisation d’un référendum d’entreprise à l’initiative d’organisations syndicales représentatives minoritaires ayant obtenu 30 % des suffrages. L’expérience montre en effet que ce serait ouvrir la porte aux manœuvres destinées à court-circuiter les organisations syndicales majoritaires. Sous prétexte de démocratie directe, cette mesure affaiblirait en réalité la légitimité syndicale, alors qu’aucun dialogue social n’est possible sans les syndicats. Cette disposition aurait pour résultat de favoriser les syndicats les plus « modérés » pour obtenir des accords favorables au patronat.

Certes, nul ne saurait croire que l’entreprise est un lieu de débat serein et neutre – même s’il arrive, et c’est heureux, que des accords positifs soient signés. Non, l’entreprise est un lieu rarement serein et jamais neutre, car des rapports de force et de domination s’y exercent, particulièrement en période de chômage où les tensions sont vives. Il va de soi que l’arme du référendum permettra au patronat d’isoler les salariés en empêchant la réflexion collective, car il est naturellement plus aisé d’obtenir des concessions d’individus que d’une collectivité, surtout lorsqu’il s’agit de conserver son emploi – l’affaire Smart a tristement illustré cette réalité que je n’invente nullement.

En clair, nous estimons qu’il s’agit d’une disposition extrêmement grave dont nous demandons la suppression.

Mme Fanélie Carrey-Conte. L’amendement AS644 vise lui aussi à supprimer les alinéas 8 à 15 de l’article. Je ne suis pas opposée par principe à l’idée de consulter les salariés mais, en l’occurrence, le référendum proposé présente plusieurs dangers pour les salariés. D’une part, il réduit à néant l’avancée que constitue l’accord majoritaire à 50 %, qui permet de sécuriser et de légitimer la négociation dans l’entreprise. D’autre part, le contexte étant ce qu’il est, les référendums ne porteront pas sur des nouveaux droits pour les salariés, mais plus vraisemblablement sur des mesures de modération salariale ou d’augmentation du temps de travail, comme l’illustrent deux référendums récents – sur le travail de nuit chez Séphora et sur le passage aux trente-neuf heures chez Smart.

Le référendum permettrait la pleine expression de la liberté des salariés, nous dit-on souvent. Cependant, les différentes parties prenantes d’une entreprise ne sont pas à égalité, puisque les salariés entretiennent un lien de subordination avec leur employeur. Quelle liberté peut-on donc exprimer lorsque la solution alternative consiste en une mesure de modération salariale, de délocalisation ou de licenciement, comme le montrent de nombreux exemples ?

Enfin, méfions-nous de cette fausse idée selon laquelle l’expression directe des salariés serait toujours le meilleur moyen de défendre les intérêts de tous et notamment des plus fragiles. C’est particulièrement le cas dans le domaine de l’égalité entre femmes et hommes : dans de nombreux secteurs professionnels où les femmes sont minoritaires, la volonté de la majorité, exprimée par référendum, pourrait aller à l’encontre des intérêts des salariées pour tout ce qui touche, entre autres, à l’organisation du temps de travail, le travail en soirée et le travail nocturne – toutes questions dont on sait bien qu’elles sont très discriminantes à l’égard des femmes.

Mme Isabelle Attard. Nous soutenons nous aussi la logique des accords majoritaires à 50 %, qui est la plus adaptée pour légitimer et responsabiliser les acteurs du dialogue social. L’instauration d’un droit de recours au référendum nous semble contre-productive et de nature à déresponsabiliser les partenaires sociaux dans la recherche de compromis efficaces et acceptables, tout en reniant les résultats des élections professionnelles. L’objectif d’un tel référendum est tout à fait discutable, puisque son instauration va de pair avec la volonté de privilégier la négociation collective à l’échelon de l’entreprise, là où le lien de subordination entre salariés et employeurs pèse de tout son poids et où les menaces de chantage à l’emploi sont les plus fortes. Songez à ce à quoi ont abouti des années de négociation sur le site de PSA à Aulnay, et à l’influence que peuvent avoir les syndicats « maison » dans les entreprises ! Quel pourrait être le résultat d’un référendum dès lors que les personnes qui y prennent part ne sont pas à égalité ?

Par principe, le référendum est souhaitable lorsque tous les participants sont à égalité et qu’il n’existe aucun lien de subordination entre eux. Il nous paraît très dangereux de permettre l’organisation d’un référendum dans l’entreprise, où il n’existe aucune garantie d’égalité entre les citoyens.

M. Bernard Accoyer. Ce refus catégorique de tout référendum d’entreprise nous inquiète et nous étonne. Il s’agit pourtant d’un mécanisme de démocratie directe portant sur des questions sociales. Confier une prééminence, voire une hégémonie à des groupes forcément éloignés des problèmes de chaque individu nuit à l’expression des libertés individuelles fondamentales. La méthode en vigueur jusqu’ici a montré à de nombreuses reprises qu’elle donnait lieu au sein de l’entreprise à des blocages qui pouvaient se traduire par des catastrophes économiques, et donc sociales. J’appelle nos collègues à porter un regard nouveau sur la réalité de l’économie d’aujourd’hui !

M. Gérard Sebaoun. Je retiens des auditions que nous avons conduites que le référendum est une procédure lourde, et que la seule demande de référendum – d’où qu’elle émane – produira des tensions dans de nombreuses entreprises où il existe pourtant un accord majoritaire. Je ne suis donc pas certain que la liberté et les rapports sociaux dans l’entreprise y gagnent ; c’est pourquoi je soutiendrai ces amendements.

Mme Jacqueline Fraysse. Les propos de M. Accoyer confirment la pertinence de mon amendement : pour qu’elle puisse s’exercer, la liberté d’expression, à laquelle je suis très attachée, suppose une réelle égalité entre les citoyens – qui n’existe pas dans l’entreprise. Que diraient les parlementaires de la majorité si les textes qu’ils adoptent étaient soumis à référendum par leurs collègues minoritaires ? Je doute qu’ils apprécieraient…

M. le rapporteur. La priorité demeure la recherche d’un accord majoritaire. Le référendum, madame Fraysse, ne remet aucunement en cause les organisations syndicales majoritaires, puisqu’il est clairement prévu que le recours au référendum soit possible en l’absence d’accord majoritaire, autrement dit lorsque les organisations signataires ont recueilli entre 30 % et 49,99 % des suffrages ; cet argument souvent entendu est donc inexact.

Néanmoins, les organisations syndicales ayant recueilli au moins 30 % des suffrages peuvent – sans que l’obligation leur en soit faite – demander la consultation des salariés afin de légitimer les accords conclus. De ce point de vue, l’alinéa 9 est extrêmement précis et permettra d’éviter toute confusion.

En clair, loin de remettre en cause le principe majoritaire et la recherche d’un accord majoritaire, cette disposition vise simplement à débloquer la situation en ouvrant la possibilité de consulter les salariés lorsqu’un accord a été conclu par des organisations ayant recueilli entre 30 % et 50 % des suffrages.

La Commission rejette les amendements AS417, AS644 et AS745.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS917 du rapporteur.

Elle passe à l’amendement AS329 de M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Mme Fraysse a évoqué avec raison certaines lois adoptées ici et qui pourraient connaître un sort inverse si elles étaient soumises à un verdict populaire ; permettez-moi de citer le cas d’un grand projet structurant de la région nantaise qui a été validé par toutes les voies juridiques et administratives, et pour lequel un référendum sera tout de même organisé ! La France serait donc une grande entreprise où le référendum est possible, tandis qu’il ne le serait pas dans une véritable entreprise qui crée des emplois !

Mon amendement AS329 vise à valoriser la consultation des salariés, car ce sont eux qui font la vie de l’entreprise !

M. le rapporteur. Avis défavorable. Il serait étonnant de confier l’initiative de la consultation des salariés à l’employeur alors que notre objectif est de permettre aux organisations syndicales de chercher à légitimer leurs positions par un référendum d’entreprise ! Au demeurant, une telle inversion bloquerait complètement le dialogue social et risquerait, comme le faisait remarquer M. Sebaoun, de créer de fortes tensions dans l’entreprise, a fortiori si l’employeur décidait de tenir une consultation contre l’avis des organisations syndicales.

La Commission rejette l’amendement AS329.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS602 de M. Rémi Delatte et AS299 de M. Daniel Goldberg.

M. Élie Aboud. L’amendement AS602 est défendu.

M. Daniel Goldberg. Mon amendement AS299 vise à ce que la tenue d’un référendum d’entreprise puisse être proposée non pas par une seule organisation syndicale, mais par plusieurs. Dans certaines entreprises, une organisation syndicale peut avoir obtenu 30 % des suffrages : en décidant de consulter les salariés, elle pourrait contourner la voix de celles qui ont rassemblé les 70 % de suffrages restants. Si la possibilité du référendum doit être ouverte, malgré les craintes qu’elle suscite, je propose qu’elle ne soit donc réservée qu’à plusieurs syndicats.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Votre proposition, monsieur Goldberg, reviendrait à créer un droit de veto majoritaire. Si, dans une entreprise donnée, deux organisations syndicales ont chacune obtenu 40 % des suffrages et une troisième en a recueilli 20 %, l’une des deux premières ne pourrait pas demander l’organisation d’un référendum puisque les deux autres pourraient s’y opposer. Cela ne me semble pas être l’esprit de la mesure que nous voulons adopter.

M. Rémi Delatte. Il me semble très important de donner la possibilité à l’employeur de recourir au référendum d’entreprise. Tout d’abord, c’est une mesure d’équité, de justice et d’équilibre. Par ailleurs, j’ai bien compris que la pertinence du référendum d’entreprise est diversement appréciée ; ce mécanisme me semble pourtant utile, ne serait-ce que parce qu’il permet d’exercer une liberté d’expression fondamentale. Je m’étonne des critiques qui ont été formulées à son égard, qui sont en pleine contradiction avec l’objectif de protection des salariés.

M. Yves Censi. À entendre le rapporteur, le chef d’entreprise n’a aucune légitimité pour organiser un référendum : cette vision théorique, idéologique même, de la lutte des classes ne correspond en rien à la réalité de l’entreprise. Au contraire, cette mesure salutaire permettrait de débloquer certaines situations. Le référendum est une forme de respiration démocratique dans l’entreprise qui est susceptible de relancer un débat totalement bloqué sur des questions relatives au temps de travail, par exemple, jusqu’à aboutir à un accord qui n’aurait pas été possible sans consultation des salariés. Abandonnons l’idée selon laquelle il existe une véritable séparation de classes entre employeur et salariés : c’est faux.

La Commission rejette les amendements AS602 et AS299.

Elle passe à l’amendement AS300 de M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. Je suis favorable à la tenue de référendums pourvu qu’ils soient organisés dans des conditions qui ne mettent pas en péril les organisations professionnelles et qui permettent à chacun, employeurs comme salariés, de se sentir à l’aise dans l’entreprise et d’y négocier des accords. Cela étant, la possibilité de déclencher un référendum, telle qu’elle est prévue en l’état actuel du texte, c’est-à-dire à l’initiative d’organisations syndicales ayant recueilli 30 % des suffrages, pose problème. Imaginons que, dans une commune, l’opposition municipale représentant 30 % des voix ait ainsi un droit de tirage automatique lui permettant de consulter la population. Qu’en dirait la majorité ?

L’entreprise, comme la collectivité locale, est une communauté humaine. Il me semble souhaitable de permettre aux organisations syndicales ayant recueilli 50 % des suffrages et n’ayant pas signé un accord, de pouvoir déclencher un référendum – lequel renforcera la légitimité de l’accord s’il lui est favorable.

M. le rapporteur. En l’état, le texte n’ouvre cette possibilité qu’aux organisations signataires de l’accord. J’ajoute, monsieur Goldberg, que si l’organisation syndicale en question a obtenu 50 % des suffrages, alors l’accord est majoritaire et validé, et aucune consultation n’est possible.

M. Alain Calmette. L’analogie entre les entreprises et les collectivités locales ne me semble pas valable. En cas d’accord majoritaire, aucun référendum n’est possible. En l’état, le texte trouve un équilibre très pertinent dans lequel les accords majoritaires peuvent en priorité découler de la signature d’organisations syndicales représentant plus de 50 % des suffrages ou – en contrepartie, en quelque sorte, du passage de 30 % à 50 % – de la consultation des salariés. Je comprends mal les réticences que suscite un tel mécanisme.

M. Daniel Goldberg. Imaginons le cas d’une entreprise où une organisation syndicale représentant 30 % des suffrages signerait un accord – mais ne pourrait désormais plus le faire valider sans consultation – et une autre, qui ne représenterait que 20 % des suffrages, ne signerait pas l’accord mais en accepterait certains des points et approuverait le principe du référendum.

Il se peut certes que mon amendement pose un problème de forme : soit, nous y reviendrons avant la séance. Entendons-nous néanmoins sur le principe consistant à permettre à des organisations signataires ou non signataires d’un accord et représentant ensemble 50 % des suffrages de déclencher un référendum. Aux trois possibilités actuelles – signer l’accord, ne pas le signer et s’y opposer – se substitueraient donc les possibilités suivantes : on signe l’accord sans demander de référendum, on signe et on en demande un, ou on ne signe mais on en demande un. Un référendum positif donnerait une assise supplémentaire à l’accord et favoriserait le dialogue social.

M. le rapporteur. Sur la forme, il est exact que votre amendement, en l’état, n’est pas applicable. Sur le fond, je comprends votre intention de ne pas réserver aux seules organisations signataires le droit de participer au débat. Cependant, le fait que certaines ne soient pas signataires signifie qu’il n’y a pas eu d’accord entre elles. Il serait étonnant, dans ces conditions, que l’on recherche tout de même un accord sur le principe de la consultation… Le fait que le seul point d’accord soit l’organisation d’un référendum se traduirait par une belle instabilité dans l’entreprise ! Je maintiens donc mon avis défavorable, tant sur la forme que sur le fond.

La Commission rejette l’amendement AS300.

Puis elle examine l’amendement AS222 de M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. L’article 10 prévoit d’étendre le champ de l’accord majoritaire, ce qui risque de rendre plus difficile la conclusion d’accords collectifs dans certaines entreprises, d’où des situations de blocage. Une modalité alternative est donc prévue de telle sorte que les organisations syndicales signataires représentant entre 30 % et 50 % des suffrages puissent demander la consultation des salariés, étant entendu que si la majorité des salariés s’exprime en faveur de l’accord, celui-ci est réputé valide.

Mon amendement AS222 vise à étendre le recours à la consultation directe à l’initiative de l’employeur, afin de rééquilibrer le dispositif.

M. le rapporteur. Nous revenons au débat de tout à l’heure. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement AS222.

Elle examine l’amendement AS313 de M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. Il me semble important d’encadrer la procédure du référendum dans le temps, comme le souhaitent certains partenaires sociaux. L’amendement AS313 vise à préciser que les organisations disposent de huit jours pour indiquer qu’elles souhaitent une consultation des salariés. En l’état, le texte ne fixe aucun délai.

M. le rapporteur. Je suis favorable au principe consistant à fixer un délai, mais le délai de huit jours me paraît trop court, notamment en cas de vacances scolaires. Je propose à M. Cavard de retirer son amendement pour le préciser d’ici la séance.

M. Christophe Cavard. Je vous fais la contre-proposition suivante : je veux bien rectifier mon amendement de telle sorte que le délai soit plus long.

M. le rapporteur. Un délai d’un mois me paraît tout à fait compatible avec les enjeux.

M. Christophe Cavard. D’accord.

M. Yves Censi. Tout cela n’est pas sérieux. On passe de huit jours à un mois… Voilà précisément un cas de complexification du code du travail où les procédures se chevauchent entre elles. La moindre erreur commise par un chef d’entreprise ou par un cadre concernant ce délai deviendra source de confrontations en tous genres. Il ne me paraît pas raisonnable d’adopter des amendements fixant de tels délais qui, loin de simplifier le texte, le complexifient. Prenons au moins le temps d’un débat sérieux sur la question !

M. le rapporteur. Le délai d’un mois sécurise le dispositif. Le changement de délai n’a aucun effet sur la complexité du texte ; au contraire, il laisse le temps de rassembler tous les éléments relatifs à l’accord qui sont nécessaires à la tenue d’un référendum.

La Commission adopte l’amendement AS313 tel qu’il vient d’être rectifié.

La Commission examine l’amendement AS315 de M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. Cet amendement prévoit que la consultation des salariés visant à valider l’accord d’entreprise doit intervenir dans un délai maximum de deux mois ; ce délai qui me paraît suffisant pour permettre à tous de bien s’organiser.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS589 de M. Gilles Savary.

M. Gilles Savary. Aux termes de l’alinéa 11, la définition des modalités de la consultation prévue à l’alinéa 9 doit faire l’objet d’un protocole spécifique conclu entre l’employeur et les organisations syndicales signataires de l’accord à valider. Rien n’est cependant prévu en cas de refus d’une organisation signataire de conclure ce protocole ni dans l’hypothèse où une organisation, hostile à cette consultation, ferait traîner la négociation du protocole. Nous proposons donc de supprimer purement et simplement celui-ci pour nous en tenir au droit électoral général et de permettre de placer les opérations de vote sous contrôle de l’autorité publique – préfet ou direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) – à la simple demande de l’employeur ou d’un salarié de l’entreprise concernée.

M. le rapporteur. Je ne partage pas votre appréciation. Le protocole est un élément essentiel de la consultation : il permet notamment de définir les modalités d’information des salariés ainsi que les modalités d’organisation et de déroulement du vote. De toute façon, si le protocole n’est pas approuvé, l’accord ne le sera pas davantage. Rien ne justifie par conséquent la suppression de ce protocole.

D’autre part, je doute de l’opportunité de faire appel à l’autorité administrative en amont de toute contestation. Non seulement cela risque d’alourdir considérablement l’organisation de la consultation mais je ne suis pas convaincu que cette autorité dispose aujourd’hui des moyens suffisants pour répondre aux demandes qui pourraient lui être adressées.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle aborde l’amendement AS301 de M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. Le fait que le protocole soit qualifié de « spécifique » nous pose un problème d’interprétation. Les modalités d’organisation de la consultation des salariés doivent-elles être négociées une fois pour toutes dans l’entreprise ou bien faut-il établir un protocole d’organisation électorale propre à chaque référendum ? Dans le second cas, la durée de six mois prévue dans mon amendement ne tient pas. Mais si nous retenons la rédaction actuelle de l’alinéa 11, seules les organisations favorables à l’accord et l’employeur définiront les modalités précises de la consultation. Si nous voulons garantir à coup sûr l’honnêteté des opérations électorales, il conviendrait pour le moins d’y associer le plus largement possible toutes les parties prenantes et que, dans chaque entreprise, le protocole d’organisation des référendums soit discuté à froid par toutes les organisations syndicales et non par les seules signataires de l’accord à valider.

M. le rapporteur. Rien ne l’empêche aujourd’hui. Le protocole n’est pas forcément lié à un accord donné : il peut très bien être générique et couvrir tous les accords. Qui plus est, votre proposition est contradictoire avec l’amendement AS315 que nous venons d’adopter et qui prévoit que la consultation des salariés visant à valider l’accord d’entreprise doit intervenir dans un délai de deux mois. Avis défavorable.

M. Richard Ferrand. La négociation d’un protocole spécifique aux opérations électorales porte en soi le ferment de contestations éventuelles, y compris devant les juridictions compétentes. Compte tenu des multiples délais que nous venons d’insérer dans le texte, nous risquons, si nous n’adoptons pas cet amendement, de créer un système de contestations permanentes et de faire de cette consultation un serpent de mer qui polluera en permanence la vie dans l’entreprise. Il me semblerait donc infiniment plus simple de fixer par voie réglementaire les modalités d’organisation de cette consultation et d’en informer chaque salaire par le biais d’une circulaire. Alors que nous essayons justement de simplifier les procédures et de donner une plus large part à la démocratie directe, nous risquons, en multipliant les étapes de pré-négociation, de créer un bazar sans nom, au point d’en faire un véritable antidote à l’organisation de ce référendum. Simplifions tout cela en le renvoyant à une norme, réglementaire ou autre, faute de quoi nous allons lasser tout le monde.

M. Rémi Delatte. Très bien !

M. Yves Censi. Je comprends que le rapporteur soit dans une position difficile, lui qui est obligé de négocier avec le Gouvernement et les différents courants de la majorité. Cela étant, je l’engage à ne pas céder aux différentes propositions qui lui sont faites. Notre discussion illustre parfaitement ce que je disais tout à l’heure : nous avons voté un amendement instaurant un délai et voilà que nous débattons à nouveau de l’instauration d’un autre délai – de six mois entre l’adoption du protocole et la consultation. C’est à la fois déraisonnable, et surtout complètement théorique. Il serait bon que nous évitions d’ajouter par amendement toute forme de délai au dispositif : comme vient de le dire notre collègue, cette question relève du décret et aurait dû faire l’objet de négociations avec les partenaires sociaux, acteurs qui connaissent très bien le détail des procédures.

M. Gérard Sebaoun. Les modalités de contestation de la consultation électorale seront-elles fixées par décret ? Devant qui pourra-t-on contester ?

M. Richard Ferrand. Devant le tribunal d’instance.

M. Daniel Goldberg. Je partage les remarques de mes collègues : les modalités d’organisation du référendum ne doivent laisser aucune place à la contestation. Or ce projet de loi prévoit que seules les parties favorables à l’accord – le chef d’entreprise et une minorité de 30 % des organisations syndicales – organiseront le scrutin, ce qui n’est pas sans poser problème. J’entends bien que la rédaction de mon amendement laisse à penser qu’il y aurait un délai de six mois entre l’adoption du protocole et la date de chaque consultation. Cela n’étant pas mon souhait, je vais le retirer et propose soit qu’un décret stabilise les règles applicables, soit que l’on prévoie une négociation à froid entre toutes les parties en présence dans l’entreprise sur l’organisation d’un référendum.

M. le rapporteur. Je vous propose, cher collègue, que nous retravaillions ensemble cette question afin de mettre au point les dispositions à prendre à défaut de protocole. Nous avons intérêt à sécuriser tout cela.

L’amendement AS301 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement rédactionnel AS810 du rapporteur.

M. Gérard Cherpion. Je ne suis pas certain que cet amendement ait une portée strictement rédactionnelle… Et s’il n’y a qu’un établissement ?

M. le rapporteur. L’article indéfini « des » recouvre « un ou plusieurs ».

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de précision AS811 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement AS302 de M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. Cet amendement concerne lui aussi l’organisation du référendum, qui prendra le pas sur l’accord majoritaire. Souvenez-vous du débat que nous avions eu l’an dernier sur l’extension du travail dominical : la règle annoncée était qu’en l’absence d’accord, il n’y aurait pas d’ouverture des magasins le dimanche. Avec le projet de loi, même en l’absence d’accord, cette ouverture serait finalement possible si les salaires l’acceptent par référendum. Cela concerne notamment une grande enseigne de distribution culturelle qui, sans doute, a voulu avancer sur ce terrain…

Se pose néanmoins la question de la participation minimale des salariés au référendum dès lors que ce dernier prendra le pas sur le contrat de travail. Je propose donc que le résultat du référendum ne soit valide que si le taux de participation atteint celui enregistré lors des élections professionnelles.

M. le rapporteur. Je connais peu de cas dans lesquels le code du travail impose un taux de participation minimal. Qui plus est, si nous en instaurions un dans ce texte, cela pourrait entraîner des conséquences sur d’autres consultations. Votre amendement me semble davantage porteur de difficultés que de solutions. Dès lors qu’une consultation est ouverte, chaque salarié peut y participer. S’il s’en abstient, cela peut constituer un élément d’analyse du scrutin mais on ne peut subordonner la validation de ce dernier à l’atteinte d’un taux minimal de participation. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement l’amendement rédactionnel AS812 et l’amendement de coordination AS918 du rapporteur.

Elle en vient ensuite aux amendements identiques AS880 de la Commission des affaires économiques, AS124 de M. Hervé Pellois et AS460 de Mme Jeanine Dubié.

M. Yves Blein, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques. Ces amendements visent le problème spécifique de l’organisation du dialogue social dans les chambres d’agriculture. Si la loi d’avenir pour l’agriculture a instauré une règle de mesure de la représentativité syndicale, il n’existe aucune norme applicable en matière de capacité à négocier ni de conditions de validité des accords. Ainsi, dans le réseau des chambres d’agriculture, une organisation syndicale non représentative est invitée à négocier et peut conclure un accord s’appliquant à tous les salariés. Sachant que les négociations vont être indispensables pour organiser la régionalisation et la modernisation du réseau, il est essentiel de conforter la légitimité des accords collectifs en renforçant la majorité dite d’engagement. Tel est l’objet de l’amendement AS880.

Mme Annie Le Houerou. L’amendement AS124 est défendu.

Mme Dominique Orliac. Dans les chambres d’agriculture, le cadre statutaire est peu propice à la négociation que la présente loi vise à favoriser aux niveaux les plus pertinents. Notre amendement AS460 est calqué sur les dispositions prévues par le code du travail et la présente loi.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte les amendements identiques AS880, AS124 et AS460.

Puis elle est saisie de l’amendement AS1040 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à reporter au 1er janvier 2017 la généralisation des accords majoritaires relatifs à la durée du travail, aux repos et aux congés. L’objectif est de permettre aux partenaires sociaux de mieux s’approprier les nouvelles règles de validité des accords collectifs et de ne pas compromettre les négociations en cours.

La Commission adopte l’amendement.

Elle aborde l’amendement AS919 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement tient compte des déclarations du Premier ministre sur la nécessité d’avoir un retour d’expérience à partir des accords relatifs à l’organisation du temps de travail. Nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport présentant un bilan de l’application des nouvelles conditions de validité des accords collectifs portant sur la durée du travail, les repos et les congés. Ces retours d’expérience doivent également nous permettre d’évaluer l’opportunité d’une généralisation de ces dispositions à d’autres domaines – le texte actuel prévoyant quant à lui l’automaticité de cette dernière.

M. Daniel Goldberg. Si j’approuve la démarche du rapporteur, quel rôle le Parlement aura-t-il à jouer une fois que ce rapport lui aura été remis ? Pourra-t-il se prononcer, par voie législative ou autre, avant que le nouveau dispositif ne soit généralisé aux autres questions de droit que la durée du travail, les repos et les congés ?

M. le rapporteur. Je vous confirme que mon amendement implique l’adoption d’un nouvel acte législatif préalablement à la généralisation du dispositif.

M. Daniel Goldberg. Dans ce cas, je retire mon amendement AS304.

L’amendement AS304 est retiré.

La Commission adopte l’amendement AS919.

En conséquence les amendements identiques AS881, AS303 et AS305 tombent.

Enfin, la Commission adopte l’article 10 modifié.

Après l’article 10

La Commission examine l’amendement AS882 de la Commission des affaires économiques.

M. Yves Blein, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques. Ce projet de loi traduit le choix de renforcer la négociation collective dans les entreprises afin que s’élaborent au plus près du terrain les règles permettant le développement économique de notre pays. Pour que les effets de ce pari se fassent pleinement ressentir, il est impératif que cette capacité de discussion puisse atteindre tout le tissu des TPE et des PME dans lesquelles les organisations syndicales sont souvent faiblement représentées. Il nous faut développer la culture et la pratique du dialogue social et ainsi permettre progressivement aux organisations syndicales de réussir et parfaire leur implantation.

Pour ce faire, il convient d’autoriser plus largement les représentants du personnel, même lorsqu’ils ne sont pas mandatés, à conclure des accords collectifs de travail, comme le prévoit le I de cet amendement adopté par la Commission des affaires économiques. Dans les entreprises de moins de cinquante salariés dépourvues de représentants du personnel, est prévue au IV la possibilité qu’un ou plusieurs salariés soient spécifiquement élus par leurs pairs pour négocier un accord avec l’employeur. Cet accord devrait ensuite être validé par au moins deux tiers des personnels de l’entreprise.

Ces propositions n’ont pas été conçues dans l’objectif de contourner la représentation syndicale mais bien dans celui de favoriser la culture du dialogue et de la négociation, propice au développement de la syndicalisation dans les entreprises – les organisations syndicales ayant aujourd’hui du mal à pénétrer dans le tissu des TPE-PME. Un salarié qui sera demain désigné par ses pairs pour négocier un accord aura forcément, à un moment ou à un autre, besoin d’un expert qui puisse lui apporter un regard sur la situation dans laquelle il se trouve : il se tournera alors naturellement vers les organisations syndicales – de gré plutôt que de force. La représentation syndicale devrait donc s’en trouver encouragée dans les petites entreprises où elles sont pour l’heure peu présentes.

M. le rapporteur. Je suis résolument hostile à cet amendement qui, d’une part, est en contradiction avec l’argumentation que nous avons soutenue tout au long de nos travaux sur le mandatement et, d’autre part, présente une difficulté : non seulement vous supprimez la priorité accordée aux élus et aux salariés mandatés mais, plus grave encore, vous autorisez des élus non mandatés à négocier des accords non pas par défaut, mais au même titre que les élus mandatés. Vous autorisez par ailleurs des salariés non mandatés élus par leurs pairs à négocier tout type d’accord. C’est là une négation totale de l’équilibre du projet de loi et de la nécessaire prise en compte de l’ensemble des partenaires. Autrement dit, vous nous suggérez de prendre le risque de permettre à des salariés ne bénéficiant pas de l’assistance d’une organisation syndicale de négocier des accords susceptibles d’être moins protecteurs. D’autre part, votre amendement permettrait de ratifier à la majorité des deux tiers un projet d’accord unilatéral de l’employeur si aucun salarié n’a souhaité négocier. Cela me paraît totalement inacceptable.

M. Christophe Cavard. Je souhaite apporter mon soutien au rapporteur. L’argument consistant à dire que cet amendement renforcerait le désir de négociation des salariés pourrait être entendu si la mesure proposée n’était pas aussi prématurée. Le projet de loi permet d’ouvrir le dialogue social dans le cadre du mandat et de règles définissant les modalités de la négociation : s’il a des effets positifs, cette culture de la négociation se développera au niveau de l’entreprise, avec des salariés mieux formés, mieux syndiqués. Peut-être pourra-t-on alors envisager l’adoption de dispositifs du type de celui que vous proposez. Mais pour l’heure, ce serait extrêmement risqué.

M. Gérard Sebaoun. J’abonderai moi aussi dans le sens du rapporteur. Nous voulons des salariés rompus à la négociation, car c’est un exercice extrêmement compliqué. Je vous laisse imaginer le déséquilibre qu’instaurerait cet amendement.

M. Alain Calmette. On ne peut pas non plus écarter d’un revers de main l’absence de dialogue social dans nombre de PME où le seul fait de parler de mandatement est immédiatement ressenti comme posant une difficulté majeure. Si nous nous accordons tous pour favoriser le dialogue social et l’implantation syndicale dans les petites entreprises, nous sommes tout de même confrontés à une attitude systématique de refus, voire de rejet réciproque. Il me semblerait donc intéressant d’expérimenter une formule préfigurant le mandatement, sans le contourner, qui permettrait de favoriser la syndicalisation au fil du temps au sein des PME.

M. Gérard Cherpion. Je soutiens cet amendement qui me semble tout à fait conforme à l’esprit du projet de loi dans la mesure où il vise, de façon tout à la fois ouverte et encadrée, au renforcement de la négociation collective dans les entreprises.

La Commission rejette l’amendement AS882.

Elle est saisie de l’amendement AS118 de Mme Isabelle Le Callennec.

M. Gérard Cherpion. En prévoyant l’extension des accords majoritaires dans l’entreprise aux accords collectifs relatifs à la durée du travail, aux repos et aux congés ainsi que la généralisation de cette extension dès septembre 2019 à l’ensemble des accords collectifs, le projet de loi fait le choix de placer l’entreprise au cœur du dialogue social. C’est bien au niveau de l’entreprise qu’il faut arrimer la négociation collective. Cette avancée ne trouvera toutefois pas à s’appliquer dans un grand nombre de PME et d’ETI dépourvues d’organisations syndicales représentatives.

En élargissant le champ de la négociation collective, le présent amendement prévoit donc la possibilité pour ces PME et ETI de négocier et de signer des accords tout en définissant les conditions de validité et d’application de ces derniers. Il s’agit ainsi de dynamiser et de renforcer la démocratie sociale dans ces entreprises.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Non seulement vous proposez de modifier les conditions de validation d’un accord négocié par des représentants élus non mandatés, mais vous supprimez l’obligation de validation de l’accord par la commission paritaire de branche – qui, exerçant un contrôle de légalité, est un garde-fou important. Enfin, vous souhaitez instaurer l’obligation de recueillir l’approbation des salariés pour pouvoir valider chaque accord ainsi négocié. Vous qui parliez d’alléger, vous proposez largement ce qu’il faut sur le plan des lourdeurs administratives…

La Commission rejette l’amendement.

La séance est levée à treize heures.

Présences en réunion

Commission des affaires sociales

Réunion du mercredi 6 avril 2016 à 9 heures 30

Présents. – M. Élie Aboud, M. Bernard Accoyer, M. Pierre Aylagas, M. Gérard Bapt, M. Jean-Pierre Barbier, Mme Kheira Bouziane-Laroussi, Mme Valérie Boyer, Mme Sylviane Bulteau, M. Alain Calmette, Mme Marie-Arlette Carlotti, Mme Martine Carrillon-Couvreur, M. Christophe Cavard, M. Yves Censi, M. Gérard Cherpion, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Jean-Louis Costes, M. Rémi Delatte, Mme Michèle Delaunay, M. Richard Ferrand, Mme Jacqueline Fraysse, M. Jean-Patrick Gille, M. Henri Guaino, Mme Joëlle Huillier, M. Christian Hutin, Mme Monique Iborra, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, Mme Chaynesse Khirouni, Mme Bernadette Laclais, Mme Conchita Lacuey, Mme Isabelle Le Callennec, Mme Annie Le Houerou, M. Jean Leonetti, Mme Marie-Thérèse Le Roy, M. Céleste Lett, M. Michel Liebgott, Mme Gabrielle Louis-Carabin, M. Gilles Lurton, Mme Véronique Massonneau, M. Pierre Morange, M. Hervé Morin, M. Philippe Noguès, M. Robert Olive, Mme Dominique Orliac, Mme Monique Orphé, Mme Luce Pane, M. Bernard Perrut, Mme Bérengère Poletti, M. Pierre Ribeaud, M. Arnaud Richard, M. Jean-Louis Roumégas, M. Gérard Sebaoun, M. Fernand Siré, M. Christophe Sirugue, M. Jean-Louis Touraine

Excusés. – Mme Gisèle Biémouret, M. Stéphane Claireaux, M. Dominique Dord, Mme Catherine Lemorton, M. Jean-Philippe Nilor, M. Denys Robiliard, M. Arnaud Robinet, M. Jonas Tahuaitu, M. Francis Vercamer, M. Arnaud Viala, M. Jean-Sébastien Vialatte, M. Jean Jacques Vlody

Assistaient également à la réunion. – Mme Isabelle Attard, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Yves Blein, M. Jean-Louis Bricout, M. Christophe Caresche, Mme Fanélie Carrey-Conte, Mme Catherine Coutelle, M. Alain Fauré, M. Daniel Goldberg, M. Mathieu Hanotin, M. Patrick Hetzel, M. Christophe Premat, Mme Eva Sas, M. Gilles Savary, M. Lionel Tardy, M. Alain Tourret