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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2013-2014

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du jeudi 24 octobre 2013

SOMMAIRE

Présidence de Mme Sandrine Mazetier

1. Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014

Troisième partie (suite)

Après l’article 15 (suite)

Amendement no 472

M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Amendements nos 475 , 476 , 637 rectifié , 468 , 479 , 459 , 616 rectifié , 628 rectifié , 618 rectifié , 636 rectifié , 567 , 574

Article 16

Mme Véronique Louwagie

M. Jean-Pierre Door

M. Thierry Mariani

M. Dominique Tian

Amendement no 444, 445 et 446

Article 17

Mme Véronique Louwagie

Article 18

Mme Véronique Louwagie

Amendement no 613 et 309

Article 19

Amendement no 614 et 310

Article 20 et annexe C

M. Bernard Accoyer

Mme Véronique Louwagie

Amendement no 615 et 311

Article 21 et annexe B

M. Bernard Accoyer

M. Jean-Pierre Door

Amendements nos 231 , 328 , 601 , 670, 671, 672, 673, 674, 675, 676, 677, 678, 679, 680, 681 et 682 , 819 , 683

Article 22

Mme Véronique Louwagie

Amendements nos 324 , 800 et 801

Article 23

Amendements nos 447 , 49 , 190 , 713 , 168 , 385 , 448, 449, 450, 451 et 452 , 72 , 834

Après l’article 23

Amendements nos 214 , 786 , 770

Mme Valérie Rabault, rapporteure pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Article 24

M. Bernard Accoyer

M. Francis Vercamer

Amendement no 513

Après l’article 24

Amendement no 579, 575 et 577

Article 25

Mme Paola Zanetti

Amendement no 787 rectifié

Article 26

Mme Jacqueline Fraysse

Amendement no 791

Vote sur l’ensemble de la troisième partie

Suspension et reprise de la séance

Quatrième partie

Article 65

Amendements nos 315, 316, 314, 369, 318 et 320 , 370

Article 66

Article 67

Amendements nos 354 , 360

Article 68

Amendement no 409 rectifié, 407, 359 rectifié, 364, 365, 367 et 376

Après l’article 68

Amendements nos 217 , 346 , 347 , 349 , 186 , 195 , 344 , 408 , 340 , 611 , 216

Avant l’article 27 (amendements précédemment réservés)

Amendement no 73

M. Christian Paul, rapporteur de la commission des affaires sociales

Amendement no 820 (sous-amendement)

Article 27

M. Bernard Accoyer

Mme Annie Le Houerou

Amendements nos 27 , 45 , 170 , 74 rectifié

Après l’article 27 (amendements précédemment réservés)

Amendements nos 232 rectifié , 602 , 795 rectifié , 831 (sous-amendement)

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Sandrine Mazetier

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014 (nos 1412, 1470, 1462).

Troisième partie (suite)

Mme la présidente. Ce matin, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n472 après l’article 15.

Après l’article 15 (suite)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n472.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à créer une contribution patronale sur la part variable de rémunération des opérateurs des marchés financiers, les fameux bonus des traders, qui sont en effet exonérés de toute cotisation sociale, ce qui est d’autant moins acceptable qu’ils sont déconnectés de l’économie réelle : l’année dernière, les trois banques françaises cotées au CAC 40, la Société générale, le Crédit agricole et BNP-Paribas, les ont augmentés de 14 %, de sorte qu’ils ont atteint un montant global de 1,2 milliard d’euros. Je crois me souvenir que toute la gauche avait défendu la création d’une contribution patronale sur ces bonus… Nous proposons donc de fixer celle-ci à 40 % des bonus excédant le plafond annuel de la Sécurité sociale, soit un peu plus de 37 000 euros en 2013.

J’en profite pour demander à nouveau au Gouvernement s’il compte réclamer à la Société générale le cadeau fiscal de 1,7 milliard d’euros qu’il lui a accordé de façon totalement indue pour compenser les prétendues pertes subies par la banque lors de l’affaire Kerviel, pertes qui n’ont jamais été démontrées à cette heure par quelque enquête que ce soit, judiciaire ou parlementaire.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les recettes et l’équilibre général, pour donner l’avis de la commission sur cet amendement.

M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales. Mme Fraysse nous propose la création d’une contribution de 40 % sur les bonus, mais je voudrais lui rappeler que ces bonus font partie du salaire et que des charges sociales sont donc acquittées, selon le droit commun, ainsi que l’impôt sur le revenu. Par ailleurs, le Parlement européen a adopté une loi limitant, à partir de 2014, le versement de bonus supérieurs au salaire. Enfin, je rappelle que notre majorité conduit une politique constante afin de faire contribuer les plus hauts revenus, et nous l’avons encore vu ce matin au sujet des stock-options et des actions gratuites.

Cet amendement, examiné au titre de l’article 88 du Règlement, a été repoussé en commission. Avis défavorable, donc.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget. Le Gouvernement comprend l’objectif, louable, de cet amendement, mais considère qu’une réflexion doit être menée sur l’assiette, qui n’est pas définie dans cette proposition. Cette réflexion devra avoir lieu dans un cadre concerté au plan international, de manière à ne pas affaiblir la place financière de Paris.

La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2013 a élargi l’assiette de la taxe sur les salaires et créé une tranche supplémentaire sur les rémunérations dépassant 150 000 euros. Ces dispositions concourent à l’objectif qui est le vôtre, madame la députée, c’est-à-dire réguler les rémunérations excessives du secteur financier, mais, en l’absence d’éléments sur l’assiette et compte tenu de la nécessité d’une coordination internationale pour que cette taxe atteigne les objectifs que vous lui assignez, l’avis du Gouvernement est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. J’entends ce que dit le Gouvernement, mais cela ne me convainc pas, car à force d’attendre on ne fait rien. De même, monsieur le rapporteur, je n’ai pas parlé des salaires des traders, mais de la part variable de leurs rémunérations, qui ne contribue pas, quant à elle, au financement de la protection sociale, alors qu’elle le devrait, comme toutes les rémunérations.

(L’amendement n472 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n475.

Mme Jacqueline Fraysse. Malgré l’allongement de la durée de cotisation prévue par la réforme des retraites, l’équilibre financier de l’assurance vieillesse et, plus généralement, de la protection sociale n’est pas assuré. En effet, le déficit de 13,2 milliards prévu par le PLFSS risque fort d’être dépassé en raison de l’austérité budgétaire, comme cela a été le cas pour le précédent, dont la prévision de déficit a été dépassée de 1,7 milliard. Il est donc impératif d’élargir l’assiette de cotisation afin de dégager des recettes nouvelles.

Par cet amendement, nous proposons de le faire avec intelligence, en modulant les cotisations sociales patronales selon la politique de l’entreprise en matière de salaires, de création d’emplois et de formation professionnelle. Les entreprises qui augmenteraient la part des salaires et favoriseraient l’emploi et la formation verraient leurs cotisations allégées, alors que celles qui feraient l’inverse, en privilégiant la rentabilité financière, verraient leurs cotisations alourdies. Cette modulation contribuerait, je pense, à faire pression sur les logiques financières des entreprises et, dans le même temps, dégagerait des moyens nouveaux pour la protection sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. L’amendement propose d’instaurer une cotisation additionnelle vieillesse à la charge des entreprises en fonction de leurs modalités de répartition des richesses : c’est un système qui semble très complexe et très lourd à gérer. Par ailleurs, il met à mal le principe fondamental des cotisations, qui veut qu’elles s’appliquent à tous de la même manière et soient liées aux rémunérations versées aux salariés et non à la situation de l’entreprise, quel que soit l’angle sous lequel on souhaite appréhender celle-ci. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Si nous adoptions votre amendement, madame la députée, il conduirait à une refonte radicale du mode de financement de la protection sociale. Il soulève donc de nombreuses questions de faisabilité qui le rendent difficilement applicable en l’état.

Le Gouvernement entend poursuivre une réflexion très approfondie sur le financement de la protection sociale. Les débats que nous avons eus ce matin, sur ces sujets et sur d’autres à caractère plus fiscal, témoignent de notre volonté de partager cette réflexion avec les parlementaires, et par conséquent avec votre groupe et avec vous-même. Pour cette raison, je donne un avis défavorable à cet amendement, à moins que vous n’acceptiez, la réflexion étant engagée, de le retirer.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je participerai naturellement à cette réflexion avec beaucoup d’intérêt mais, pour l’heure, je maintiens cet amendement.

(L’amendement n475 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n476.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que les précédents, avec la même préoccupation : assujettir les revenus financiers des sociétés financières et non financières à une contribution d’assurance vieillesse. Au-delà du gain non négligeable que rapporterait une telle cotisation, nous poursuivons l’ambition de remettre fondamentalement en cause les placements financiers qui ne sont pas investis dans l’intérêt économique de notre pays. Il n’est pas acceptable que les revenus financiers des entreprises, qui s’élèvent à plus de 300 milliards d’euros par an, échappent à toute cotisation en faveur de la protection sociale. L’application des taux de cotisation patronale à ces revenus apporterait plus de 80 milliards par an, au régime général. Lors de l’examen du texte sur les retraites, Mme la ministre et M. le rapporteur m’invitaient à poser ces questions lors des débats financiers ; je le fais volontiers aujourd’hui.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. L’amendement que vous proposez, madame Fraysse, conduit à transformer totalement les modalités de financement de la protection sociale. Nous avons eu ce matin des discussions, notamment sur un amendement de M. Germain rappelant que ce chantier serait ouvert dans les mois à venir, dans le cadre des travaux du Haut Conseil du financement de la protection sociale. Je vous invite donc, puisque vous allez y participer, à retirer l’amendement, sans quoi j’émettrais un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Cet amendement témoigne d’une belle opiniâtreté de votre part, madame Fraysse, dans votre réflexion sur la modernisation de notre protection sociale. Il n’est pas exactement le même que le précédent, mais il lui fait largement écho. Cette réflexion, vous le savez, est engagée au sein du Haut Conseil du financement de la protection sociale et nous entendons la poursuivre. Le Gouvernement souhaite également, comme cela a été rappelé ce matin au terme de l’examen de l’amendement déposé par Jean-Marc Germain, que cette réflexion soit menée au sein du Parlement.

Par ailleurs, votre amendement n’est pas un amendement à trois francs six sous, madame la députée ! Son impact serait de 30 milliards d’euros. Vous comprendrez donc que l’on prenne le temps d’y réfléchir avec vous. Enfin, sa rédaction actuelle pose un problème eu égard à la réglementation européenne. Pour ces trois raisons, je vous propose de retirer votre amendement. Si vous deviez le maintenir, mon avis serait défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. À propos d’opiniâtreté, vous devez bien avoir constaté, à droite comme à gauche, que cela fait des années que nous déposons ces amendements, parce que nous pensons sincèrement que l’on peut corriger un certain nombre de dysfonctionnements qui pénalisent terriblement notre économie et développer une protection sociale beaucoup plus audacieuse. On me répond qu’on réfléchit, ce dont je me félicite évidemment, et nous sommes d’ailleurs tout à fait disposés à participer à cette réflexion. Mais, année après année, on ne fait que réfléchir, sans jamais agir sensiblement sur ces éléments pourtant importants. C’est pourquoi je n’ai pas envie de retirer cet amendement, même si j’entends ce qui m’est dit. Je souhaite que l’on passe aux actes après la réflexion.

(L’amendement n476 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Sur l’amendement n637 rectifié, je suis saisie par le groupe de l’Union des démocrates et indépendants d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

M. Bernard Accoyer. C’est très bien ! Ils ont raison !

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n637 rectifié.

M. Francis Vercamer. Cet amendement vise à rétablir la possibilité pour les particuliers employeurs d’opter pour le régime de la déclaration au forfait des travailleurs à domicile – mesure qui a été supprimée l’an dernier.

M. Bernard Accoyer. Bonne idée !

M. Francis Vercamer. Depuis cette suppression, un repli de 4,4 % de l’emploi salarié à domicile a été constaté au premier trimestre 2013 et le travail clandestin se développe à nouveau. Entre le premier trimestre 2012 et le premier trimestre 2013, le volume horaire déclaré a chuté de 7,9 %. Qui plus est, le Gouvernement a diminué les avantages fiscaux liés aux services à la personne. Le président du groupe UDI, Jean-Louis Borloo, avait interpellé le Gouvernement à l’occasion d’une question d’actualité ; il avait également écrit au Premier ministre au moment de la motion de censure. Celui-ci l’avait reçu et lui avait fait savoir que le Gouvernement pourrait revoir sa position sur le service à la personne. Or, depuis ce jour, rien ne s’est passé.

Je propose donc cet amendement visant à rétablir le forfait. Rappelons que les services à la personne emploient 2,2 millions de professionnels, qui travaillent auprès de 4,5 millions de familles françaises, et que ce secteur a créé entre 100 000 et 120 000 emplois par an au cours des dernières années. Or les mesures prises par le Gouvernement menacent aujourd’hui 100 000 à 150 000 emplois.

Souvent, ces salariés à domicile sont considérés comme des salariés qui travailleraient chez des nantis. Ce n’est pas vrai du tout, puisque la plupart travaillent chez des personnes à mobilité réduite ou dans le secteur de l’économie sociale et solidaire pour aider des personnes qui en ont besoin.

M. Philippe Gosselin. Il est bon de le rappeler !

M. Francis Vercamer. Il me semblait important de rompre avec ce discours trop répandu dans l’hémicycle, selon lequel les employeurs seraient des nantis qui n’auraient pas besoin de réductions fiscales ou de moyens particuliers.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement un peu particulier sur lequel vous demandez un scrutin public. Je comprends votre intention de favoriser l’emploi à domicile.

M. Philippe Gosselin. Ah !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Néanmoins, la diminution de l’emploi à domicile a commencé en 2011 : elle n’est donc pas directement liée à la mesure que nous avons prise en 2013.

M. Jean-Marc Germain. C’est un mea culpa !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Deuxièmement, la majorité ne considère pas les bénéficiaires des services à domicile comme des nantis, puisqu’elle a accordé 0,75 euro de réduction de charges par heure de travail effectuée.

Enfin, vous rattachez votre amendement au deuxième alinéa de l’article L. 241-11, mais celui-ci a été abrogé par la loi du 29 juillet 1998. Il aurait fallu le rattacher à un dispositif encore en vigueur !

M. Philippe Gosselin. Nous pouvons le rectifier, si c’est la vraie raison de votre refus !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je vous l’avais signalé en commission, mais je vois que l’amendement est resté inchangé. Je vous le signale donc une seconde fois…

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Il est intéressant de rappeler quelques points d’histoire que le rapporteur vient d’évoquer à l’instant. Rappelons tout d’abord – et cela ne risque pas de vous faire de peine, monsieur Vercamer – qu’il y a quelques années Jean-Louis Borloo avait fait adopter, en faveur de l’emploi à domicile, une mesure incitative consistant en un abattement de 15 %. En 2011, le groupe UMP, avec le soutien du gouvernement de l’époque, a voulu supprimer cette mesure. J’imagine que cela vous avait alors fait beaucoup de peine.

M. Jean-Frédéric Poisson. Il en pleure encore ! (Sourires.)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Il est toujours bon de faire ce genre de rappels. S’agissant des emplois à domicile – sujet que M. Poisson maîtrise sur le bout des doigts –, beaucoup de dispositions concernaient des taux réduits de TVA. Or elles étaient non-eurocompatibles et mettaient la France dans une situation pré-contentieuse qui risquait de lui coûter beaucoup d’argent, plongeant de fait le député Poisson dans une situation de profonde angoisse,…

M. Jean-Frédéric Poisson. Oh ! Allons !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. …puisqu’il n’aime pas les déficits et qu’il aurait été fort triste que nous soyons dans l’obligation de les augmenter pour payer les contentieux à l’origine desquels se trouvait son gouvernement.

Pour toutes ces raisons, nous avons pris deux types de mesures. La première visait à mettre fin au contentieux européen, tout en préservant les taux réduits de TVA, les crédits d’impôt et d’autres dispositions favorables aux emplois à domicile, car nous avons bien conscience de leur importance. La seconde mesure, issue d’un amendement de Christian Eckert, était destinée à amortir l’effet des mauvaises nouvelles annoncées.

Tout le monde a oublié ces éléments essentiels du récit que je viens de rappeler, autorisant par là un certain nombre de personnes à des commentaires sans vergogne. Je ne puis donc être favorable à cet amendement, malgré tout ce que je viens de dire et malgré la volonté du Gouvernement d’accompagner l’emploi à domicile pour les raisons précisées par le rapporteur. Qui plus est, le passage au forfait n’a pas eu un impact très important. Quand on regarde, en effet, l’évolution de l’emploi à domicile ces derniers mois, on se rend compte que les emplois déclarés au forfait et les autres ont connu une évolution assez comparable. C’est donc davantage le contexte économique que le passage au forfait qui explique la situation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Les dispositifs Borloo mis en place pour doper l’emploi à domicile ou les services à la personne ont donné d’excellents résultats ces dernières années, malgré le contexte économique. La crise a violemment sévi à la fin de l’année 2008 et en 2009 ; cependant, les différents dispositifs ont permis la création de nombreux emplois dans ce secteur qu’il faut absolument sauvegarder.

J’entends les arguments du ministre sur l’eurocompatibilité et le risque des amendes. Toutefois, c’est à mon sens une raison supplémentaire pour être extrêmement précautionneux vis-à-vis de ce secteur. Qui plus est, une difficulté supplémentaire le menace aujourd’hui : des mesures prises dans l’accord national interprofessionnel, que nous avons récemment examiné, et en particulier un dispositif, sur lequel j’ai été alertée dans ma circonscription, concernant le temps partiel, qi est très défavorable au secteur des services à la personne ou de l’aide à domicile. À l’occasion de l’excellent amendement de M. Vercamer, que le groupe UMP votera, je souhaitais vous appeler, monsieur le ministre, à la plus grande vigilance.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Cet amendement est un amendement de bon sens, auquel M. le ministre ne devrait pas rester indifférent. Depuis que les cotisations au forfait ont été supprimées, la baisse du nombre d’emplois dans le secteur de l’aide à la personne est de près de 5 %, celle du nombre d’heures déclarées est de 8 à 10 %. Cela signifie une baisse des recettes pour la Sécurité sociale, une baisse des droits pour les salariés du secteur, une augmentation du travail non déclaré et du chômage.

Où est l’intérêt de cette mesure consistant à supprimer la déclaration au forfait, issue pourtant d’une très bonne idée de la gauche – le chèque emploi service universel ? La création de ce chèque remonte à une vingtaine d’années. Il a considérablement aidé à faire diminuer le travail non déclaré, améliorant de ce fait la situation des salariés aussi bien que celle des caisses des branches maladie et vieillesse. Comme vient de le dire excellemment Bérengère Poletti, le groupe UMP votera l’amendement de M. Vercamer et de ses collègues de l’UDI.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Monsieur le président Accoyer, vous avez raison. Mme Bérengère Poletti comme vous-même avez dit de façon excellente des choses complètement fausses. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Comme quoi, c’est possible !

M. Jean-Pierre Barbier. C’est à force de vous écouter, monsieur le ministre !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Je veux apporter quelques éléments de précision. Le chèque emploi service et le forfait sont des sujets qui n’ont absolument rien à voir l’un avec l’autre.

M. Bernard Accoyer. Ils sont tout de même souvent utilisés ensemble !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Ce sont deux sujets complètement disjoints… Mais permettez-moi de saluer le président Borloo qui ne peut pas entrer dans l’hémicycle, parce qu’il n’a pas de cravate ! (Rires.) Il doit être très triste de ne pas pouvoir participer à nos débats, mais je ne peux lui prêter la mienne, sans quoi ce serait à moi de sortir. J’en suis bien désolé.

Reprenons. Deuxième point, de loin le plus important : ce que nous avons fait sur le forfait était destiné à adosser le dispositif de cotisations au salaire afin que celui-ci soit assorti d’une protection sociale digne de ce nom. Il est tout à fait normal que l’on ne puisse pas disjoindre le niveau de cotisations sociales de celui des salaires, sauf à accepter une protection sociale au rabais.

Enfin, je le répète, cette modification n’a pas eu d’impact sur l’emploi, puisque les taux d’emploi, que les salariés en question soient déclarés au forfait ou non, accusent la même baisse. La faute en revient donc à la conjoncture, et je ne partage donc pas votre analyse.

M. Bernard Accoyer. Elle n’est pas nécessairement inexacte pour autant !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Borloo.

M. Jean-Louis Borloo. Monsieur le ministre, cet amendement est un élément d’une réflexion plus globale. Vous considérez que les services à la personne, ce sont des salariés utilisés par les familles bourgeoises, avec un avantage fiscal. En complément de ce qu’a dit M. Accoyer, je précise que ce modèle économique, illustré par le chèque emploi-service universel dont nous revendiquons la paternité, permet aux familles populaires de France d’acheter des prestations familiales complémentaires qui leur sont indispensables, à un prix compatible avec leurs revenus.

M. Bernard Accoyer. Tout à fait !

M. Jean-Louis Borloo. Voilà l’idée centrale. Ce modèle peut concerner des millions d’emplois, et il se règle ou se dérègle à peu de chose près, monsieur le ministre. Lorsque le programme a été mis au point – M. Accoyer était alors président de l’Assemblée nationale et nous, nous étions aux affaires –, il s’agissait de créer un modèle économique d’acquisition de prestations de bonheur ou de confiance à effet d’utilité marginale. Le forfait en était une des composantes, mais pas la seule, je pense au niveau de défiscalisation, et les entreprises qui délivrent le chèque emploi-service universel ou le chèque restaurant y trouvent un intérêt car ces dispositifs contribuent à la qualité du travail de leurs collaborateurs.

En résumé, monsieur le ministre, il s’agit d’un secteur dans lequel, en cinq ans, le temps de travail des opérateurs a augmenté de 50 %, 450 000 emplois nets ont été créés, alors que, depuis la loi de financement de la Sécurité sociale de l’an dernier, on en est à 38 000 destructions d’emplois. Nous vous demandons de regarder la situation avec un intérêt républicain total, en considérant que la mesure proposée est un des éléments du dispositif.

J’ajoute que l’Agence nationale des services à la personne, qui emploie trente-quatre salariés, est l’outil d’adaptation permanente du secteur, celui qui a créé le plus d’emplois : comme la première réforme structurelle du Gouvernement consiste en sa destruction, reconnaissez qu’on ne parle pas des mêmes réformes de structure, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Monsieur Borloo, il faut en tout cas avoir toujours une cravate à domicile… (Sourires.) L’intérêt républicain du Gouvernement pour ce sujet est total et, malgré nos points de divergence, nous ne pouvons que tomber d’accord sur l’importance que revêtent les emplois à domicile, non seulement pour l’emploi lui-même dans un contexte où il faut en créer, mais aussi pour les bénéficiaires de ces services. Ceux-ci sont très divers et ont un caractère social incontestable. Vous avez vous-même, je ne le nie pas car il ne faut jamais nier les faits, contribué par les mesures que vous avez prises à développer l’emploi à domicile, mais vous avez eu à regretter que vos amis de l’UMP remettent en cause des mesures que vous aviez vous-même mises en œuvre. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Mais si, mesdames et messieurs les députés de l’UMP, souvenez-vous de la remise en cause de l’abattement en 2011, époque au M. Accoyer était au « perchoir ».

Deuxième point : l’affaire du forfait. Prenons ce problème de façon républicaine comme vous le souhaitez. Vous conviendrez avec moi, car je suppose qu’étant centriste que vous êtes extrêmement pondéré, modéré et soucieux des questions sociales…

M. Philippe Gosselin et M. Jean-Pierre Barbier. Comme tout le monde !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Non, pas comme tout le monde !

Vous conviendrez donc, monsieur Borloo, qu’il est tout à fait normal que les cotisations sociales soient adossées au salaire de façon à garantir un haut niveau de protection sociale, consubstantiel au modèle social français, et qu’on ne peut pas, sous prétexte que le travail au noir est un danger, abaisser tous nos systèmes de protection sociale pour l’éviter – raisonnement souvent développé sur certains bancs et que je ne peux suivre. Par conséquent, la mesure que le Gouvernement a prise est une mesure juste, non que nous considérions les employeurs comme riches, vision que vous nous prêtez et qui est très loin de ce que nous pensons, mais parce que nous voulons que l’emploi bénéficie d’un dispositif de cotisations garantissant la protection sociale des travailleurs.

Enfin, je veux insister sur le fait que cette mesure de justice a été prise sans préjudice des efforts faits par l’État en faveur de l’emploi à domicile. Ces efforts, vous le savez, représentent 4 milliards d’exonérations et crédits d’impôt, et 900 millions du fait de l’application de la TVA à taux réduit après que nous avons remis de l’ordre dans les questions d’eurocompatibilité.

L’évolution des chiffres de l’emploi à domicile n’est certes pas à la hauteur de ce que l’on pourrait espérer, mais ce n’est pas pour des raisons liées à la suppression du forfait : si c’était le cas, seuls les emplois rémunérés au-delà du SMIC auraient été pénalisés. La diminution des emplois résulte donc bien de la situation économique.

Par conséquent, sachez : premièrement, que le Gouvernement se préoccupe de la situation de l’emploi à domicile, au point, d’ailleurs d’avoir pris des mesures pour éviter que les contentieux européens ne conduisent à la disparition de tous les taux réduits de TVA dans ce secteur ; deuxièmement, que les mesures qu’est en train de prendre le Gouvernement en matière d’accompagnement et de maintien à domicile des personnes âgées, liées à leur perte d’autonomie, sont très fortement créatrices d’emplois à domicile. Nous sommes très préoccupés par ce sujet, de façon républicaine et avec le souci de l’efficacité.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Madame la présidente, j’ai cru comprendre que l’article du code de la Sécurité sociale auquel se rapporte mon amendement n’était pas le bon. J’ai donc demandé à le rectifier, et le rapporteur m’a dit que ce n’était pas possible en cours de discussion. Mais c’était possible, tout à l’heure, pour l’amendement de M. Germain (« C’est vrai ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP), dont un paragraphe entier a été supprimé en plein milieu de la discussion ! Il ne faut pas faire deux poids et deux mesures !

M. Jean-Marc Germain. Le scrutin a été annoncé ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Bérengère Poletti. Germain est traité en chouchou !

Mme la présidente. Monsieur Vercamer, n’ayez pas d’inquiétude, tous les députés présents vont se prononcer sur votre amendement, de surcroît par scrutin public comme vous l’avez vous-même demandé.

Je mets aux voix l’amendement n637 rectifié.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants61
Nombre de suffrages exprimés61
Majorité absolue31
Pour l’adoption22
contre39

(L’amendement n637 rectifié n’est pas adopté.)

M. Jean-Louis Borloo. C’est nul !

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n468.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à aider au développement de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Aujourd’hui, les exonérations de cotisations sociales patronales peuvent être diminuées en cas de manquement de l’employeur à ses obligations de négociation annuelle en matière de salaires, de durée et d’organisation du temps de travail. La réduction d’exonérations est de 10 % et peut atteindre 100 % si ce manquement persiste pour la troisième année consécutive. Cette disposition est très intéressante car elle est dissuasive. C’est pourquoi nous proposons de l’élargir aux manquements à l’article L. 2323-47 du code du travail, relatif aux obligations de l’employeur en matière d’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.

Mme Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes, évoquait, lors de la réforme des retraites, la nécessité d’une volonté politique forte pour atteindre un niveau effectif d’égalité professionnelle. Ce principe, pourtant inscrit dans notre législation depuis 1972, a été bafoué au fil du temps, ce qui explique le retard important de notre pays. Aujourd’hui encore, à compétences et poste égaux, il y a un écart salarial de 27 %.

Il y a eu toutefois, je tiens à le souligner, des progrès dans la dernière période : au 15 juillet dernier, selon le ministère du travail, 402 mises demeure avaient été adressées et quatre pénalités infligées pour non-respect de l’obligation de négociation en matière d’égalité professionnelle. C’est un pas en avant que je ne nie pas, mais il s’agit d’en faire un de plus.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a apprécié les motivations de l’amendement de Mme Fraysse, qui vient d’ailleurs de noter elle-même que les efforts de la majorité commençaient à porter leurs fruits en ce qui concerne l’égalité hommes-femmes dans les entreprises, notamment grâce aux efforts déployés par la délégation aux droits des femmes que préside Catherine Coutelle.

Néanmoins, le dispositif que vous proposez pose problème, madame la députée, car il mélange deux aspects : des mesures économiques d’aide aux entreprises sous forme d’allégements de cotisations, et des obligations relatives à la vie de l’entreprise, notamment en matière d’information. Les entreprises ne respectant pas les obligations que vous mentionnez doivent être pénalisées, mais sans mettre en cause des allégements généraux qui tiennent à l’emploi et au niveau des salaires, et dont la réduction ou la suppression risquerait de mettre en danger un certain nombre d’emplois. Voilà pourquoi, tout en partageant vos motivations, la commission a repoussé votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je comprends la gêne de notre rapporteur, mais son argumentation ne tient pas deux minutes. Je ne vois pas pourquoi, alors que des entreprises ne respectant pas leurs obligations dans le cadre des négociations annuelles obligatoires, notamment en matière salariale, risquent une pénalité, il serait impossible de les sanctionner de la même façon si elles ne les respectent pas en matière d’égalité de salaire entre les hommes et les femmes.

C’est un raisonnement qui me paraît traduire un malaise. Je veux croire que les engagements dans ce domaine sont pris au sérieux et qu’au moins certains d’entre vous font des efforts en ce sens, mais l’amendement que je défends offre l’occasion de faire un petit pas, même modeste, et aurait donc pu être accepté.

(L’amendement n468 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n479.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise deux objectifs. D’une part, il s’agit de lutter, par un effet fiscal incitatif, contre le temps partiel subi. Je rappelle que le temps partiel est subi dans 80 % des cas : lorsqu’on interroge les salariés concernés, ils déclarent vouloir accroître leur durée d’activité. Je rappelle aussi que 80 % des salariés à temps partiel sont des femmes, ce qui entraîne pour elles de graves difficultés en termes de pouvoir d’achat et de niveau de pension.

Le second objectif est d’assurer un financement supplémentaire de la protection sociale par une majoration de 10 % des cotisations dues par l’employeur s’il abuse du temps partiel. En l’occurrence, je rappelle que, dans les services aux particuliers, plus de 31 % des employés sont à temps partiel. Quand je parle d’abus, il faut bien mesurer de quoi nous parlons.

La loi relative à la sécurisation de l’emploi, qui fixe une durée minimale de vingt-quatre heures de temps partiel, prévoit beaucoup de dérogations,…

Mme Bérengère Poletti. Heureusement !

Mme Jacqueline Fraysse. …ce que nous avons regretté lors de ce débat. La mesure que nous proposons compléterait ce dispositif en incitant financièrement les employeurs à respecter la durée des vingt-quatre heures minimum de temps partiel et à ne pas faire subir à leurs salariés une contrainte excessive.

Mme Bérengère Poletti. Ce serait une catastrophe !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement a été rejeté par la commission. Il nous est proposé de majorer de 10 % les cotisations patronales dans les entreprises de plus de vingt salariés qui emploient au moins 20 % de leur effectif à temps partiel.

Mais, dans la vie collective, voire individuelle, il y a le souhaitable et le possible. Dans le contexte économique actuel, aucune création d’emploi – y compris à temps partiel, qui peut déboucher sur un temps complet – ne doit être pénalisée.

En outre, certains secteurs d’activité fonctionnent essentiellement avec des emplois à temps partiel compte tenu de leur spécificité – le transport scolaire ou la distribution de la presse, par exemple –, ce qui pose un problème de la pluriactivité aux salariés concernés. Il me semble dangereux de les pénaliser par le dispositif que vous proposez.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement. Pénaliser de manière indifférenciée les entreprises qui recourent au temps partiel alors que les contraintes de leur activité sont inégales serait inefficace et inéquitable.

L’amélioration de la situation des salariés à temps partiel passe par des mesures adaptées, comme celles que nous avons pu mettre en œuvre par la loi relative à la sécurisation de l’emploi, et non par des pénalités sans rapport avec l’objet.

Pour ces raisons, madame la députée, le Gouvernement émet un avis défavorable à votre amendement.

(L’amendement n479 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n459.

Mme Jacqueline Fraysse. Par cet amendement, nous proposons d’augmenter de cinq points le taux des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les produits de placement financiers, sous la forme d’une contribution additionnelle.

Une fois encore, nous poursuivons deux objectifs : apporter des moyens nouveaux à la Sécurité sociale qui en manque au point qu’elle ne cesse de réduire les budgets hospitaliers et la prise en charge des dépenses de santé, au point que, désormais, un Français sur trois déclare renoncer à des soins par manque de moyens ; rétablir l’équité entre les prélèvements sur les revenus du travail et sur ceux du capital.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Elle a repoussé cet amendement, sachant que le taux global des prélèvements sociaux sur les revenus du capital est actuellement de 15,5 %, après avoir été accru par notre majorité mais aussi par la majorité précédente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier.

M. Jean-Pierre Barbier. Je ne souhaitais pas forcément m’exprimer sur cet amendement, mais à chaque fois que nos collègues, et particulièrement Mme Fraysse, demanderont de taxer et de retaxer les revenus du patrimoine pour favoriser les revenus du travail, il sera nécessaire de leur rappeler que, pour la plupart d’entre nous, le capital ne tombe pas du ciel. Le capital, c’est ce que possèdent des gens qui ont souvent travaillé toute leur vie, qui ont économisé pour se constituer un patrimoine.

M. Denys Robiliard. Historiquement, ce n’est pas vrai !

M. Jean-Pierre Barbier. Évidemment, vous ciblez toujours ceux qui possèdent un patrimoine énorme. Mais n’oubliez pas qu’avec les mesures que vous préconisez, vous taxez aussi les petits épargnants, les gens qui ont économisé toute leur vie, les classes moyennes. On ne peut pas laisser stigmatiser sans cesse les gens qui ont un patrimoine. La coupe est pleine ! Par pitié, arrêtez de stigmatiser les gens qui ont un patrimoine…

M. Philippe Gosselin et M. Jean-Frédéric Poisson. Très bien !

M. Jean-Pierre Barbier. …et qui l’ont parfois gagné au prix de grands sacrifices, en travaillant toute leur vie pour le construire.

M. Jean-Pierre Door. C’est le nivellement par le bas !

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Sans vouloir faire durer ce débat, nous ne pouvons rester silencieux sur des mesures qui vont à l’inverse de la marche du monde depuis que le mur de Berlin est tombé et que l’illusion du communisme a laissé le capitalisme seul en piste. Même si ce dernier peut malheureusement connaître des dérapages, et la financiarisation de l’économie en est un, particulièrement condamnable, qui produit les conséquences que l’on sait, il y a des limites à ne pas franchir.

Or, ces limites ont été franchies la nuit dernière par le Gouvernement, qui a porté jusqu’au taux dissuasif de 15,5 % l’imposition de l’épargne familiale de plus de 20 millions de Français : les PEA, l’assurance-vie, les plans d’épargne-logement, c’est-à-dire tous les investissements des familles françaises moyennes, qui, au demeurant, ont été encouragées à y placer leur argent par le Gouvernement lui-même. C’est vrai que le Gouvernement nous a habitués à ce double mouvement : on encourage d’un côté pour taxer de l’autre.

Que ne taxez-vous pas plutôt les œuvres d’art, sanctuarisées au moment de la création de l’impôt sur les grandes fortunes ? Et si, à cette époque-là, il avait été décidé que les parts dans les entreprises étaient exonérées de l’impôt sur la fortune, la France serait un pays totalement industrialisé. Vous n’avez pas fait ce choix et nous en voyons les conséquences.

Las, vous persistez dans l’erreur, et si vous n’allez pas jusqu’à suivre Mme Fraysse, vous avez déjà dépassé le seuil acceptable la nuit dernière. Mme Fraysse, elle, est dans son rôle : elle montre l’ineptie de la politique que conduit le Gouvernement socialiste.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Les événements vont à une vitesse tout à fait considérable et les rangs du parti socialiste se fissurent de minute en minute, comme le montre la lecture du blog de Jean-Marie Le Guen. Ce membre éminent du parti socialiste est même intervenu ce matin dans nos débats…

M. Bernard Accoyer. Il n’est pas resté longtemps !

M. Dominique Tian. C’est son habitude : il vient quelques minutes, il met un peu la panique et il s’en va.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Il est efficace ! (Sourires.)

M. Dominique Tian. En l’occurrence, c’est sur son blog qu’il y a la panique : il déclare que la fiscalisation du plan d’épargne-logement n’est pas normale et qu’il faut s’interroger à ce sujet.

M. Jean-Frédéric Poisson. C’est sensé !

M. Dominique Tian. C’est quelqu’un de sensé, en effet, et je pense que le ministre va tout de suite lui répondre sur le PEL.

Si vous le permettez, madame la présidente, je voudrais également apporter quelques informations à la suite des débats que nous avons eus ce matin sur la cigarette et sa taxation. Mme Touraine a déclaré qu’il était peut-être temps de penser à fiscaliser la cigarette électronique. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Gosselin. Cela manquait !

M. Dominique Tian. Nous nous étonnons de cette politique : soit on essaie de lutter contre le tabac, sachant qu’il ne faut pas non plus dépasser certaines bornes, soit on taxe la cigarette électronique, qui est tout de même, a priori, le meilleur moyen d’arrêter de fumer. Nous avons besoin de réponses, tant en matière de politique de santé que de pression fiscale. On sent qu’au parti socialiste ça part dans tous les sens !

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je voudrais inviter mes collègues de droite, notamment M. Accoyer qui a pris cette fâcheuse habitude, à ne pas parler en mon nom. Quand j’ai quelque chose à dire, je le dis ; quand je n’ai rien à dire, je ne dis rien. Si vous aviez l’amabilité de respecter ma parole et de parler en votre nom et en celui de personne d’autre, cela suffirait à éclairer l’Assemblée.

Je tiens également à rassurer certains de mes collègues d’en face et leur dire que je n’ai pas de difficulté particulière avec le capital ou le patrimoine.

M. Philippe Gosselin. Ni avec la démocratie !

Mme Jacqueline Fraysse. Cela étant, certains patrimoines sont énormes et je rappelle qu’il y a même des gens qui se paient le luxe d’acheter une île entière. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Bernard Accoyer. Même avec un déplafonnement du PEA, on n’y arrive pas !

Mme la présidente. Mes chers collègues, vous vous êtes tous exprimés. Mme Fraysse a la parole, et elle seule.

Mme Jacqueline Fraysse. Je veux rappeler deux choses. Premièrement, la richesse accumulée, le capital, c’est le fruit du travail des hommes et des femmes de ce pays. Je considère donc que lorsque des personnes, dans des conditions sur lesquelles je ne m’étendrai pas, ont accumulé un niveau élevé de capital, il est normal qu’elles participent à la solidarité nationale et qu’elles cotisent pour offrir des prestations sociales à l’ensemble de nos concitoyens.

Autrement dit, il est normal que, puisque ceux qui ont des moyens financiers liés à leur travail cotisent, ceux qui ont des moyens financiers liés à leur capital, c’est-à-dire qui gagnent de l’argent en dormant, cotisent aussi, et au même niveau.

Je dis cela, rien de plus : dans un souci d’équité, ceux qui travaillent cotisent et ceux qui tirent leur revenu d’un capital, sans travailler, doivent cotiser aussi. C’est simple et je m’étonne qu’il y ait ici des personnes qui ne partagent pas ce souci.

M. Jean-Louis Borloo. Très bien !

(L’amendement n459 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 616 rectifié et 628 rectifié.

La parole est à Mme Sophie Errante, pour soutenir l’amendement n616 rectifié.

Mme Sophie Errante. Par cet amendement, nous demandons qu’à l’article L. 3261-2 du code du travail le mot « ou » soit remplacé par le mot « et », la perte de recettes pour les organismes de Sécurité sociale étant compensée à due concurrence par la création d’une contribution additionnelle à la contribution visée à l’article L. 136-7-1 du code de la Sécurité sociale.

Cet amendement vise à modifier une disposition introduite par le PLFSS de 2009 pour clarifier, en remplaçant le mot « ou » par le mot « et », la possibilité offerte au salarié de cumuler prise en charge d’un abonnement de transports en commun et d’un abonnement à un système public de location de vélos, dans le cadre de la participation de l’employeur à ses frais de déplacement domicile-travail.

L’économie causée à la Sécurité sociale par la pratique d’une activité physique telle le vélo est estimée à 1,21 euro par kilomètre parcouru selon une étude d’Atout France. L’Organisation mondiale de la santé estime qu’une pratique de 10 % de part modale vélo permet d’économiser 10 milliards d’euros par an. Le coût de gestion des infrastructures de transport est par ailleurs allégé par le report modal sur le vélo. Cette disposition est donc pertinente.

Elle permettra, en outre, à de nombreux employeurs qui hésitent encore à offrir cette prise en charge à leurs salariés de le faire, d’autant que le montant des sommes en jeu – une trentaine d’euros par an – sont faibles.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n628 rectifié.

M. Denis Baupin. Vous aurez remarqué que des amendements identiques sont défendus par des députés socialistes, UMP et écologistes,…

Mme Bérengère Poletti. Ce sont des Parisiens !

M. Denis Baupin. …car ils sont portés par le Club des parlementaires pour le vélo (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) qui veulent inciter nos concitoyens à utiliser le vélo pour leurs déplacements entre leur domicile et leur lieu de travail.

Il s’agit de corriger une lacune du PLFSS 2009, mes chers collègues, d’un PLFSS que vous avez donc dû voter, et qui disposait pour la première fois que les abonnements à des systèmes de location de vélo, comme le Vélib’ à Paris, puissent être en partie pris en charge. Nos concitoyens sont nombreux, je le répète, dans la capitale mais aussi dans beaucoup de villes où ces services se sont mis en place, à combiner transports collectifs et déplacements à vélo, en fonction de la météo, en fonction des distances, car, chacun le sait bien, les déplacements à vélo ne peuvent pas être aussi longs que certains autres déplacements. Le déplacement à vélo complète parfois le déplacement en transport collectif. Faisons donc en sorte que les deux dispositifs puissent se combiner.

Tel est l’objectif de cet amendement. Je me permets aussi de rappeler qu’en 2013, c’est-à-dire l’an dernier, ces amendements avaient été adoptés lors de l’examen du PLFSS au Sénat. Nos collègues sénateurs y sont donc eux aussi favorables.

S’ils pouvaient être adoptés par l’Assemblée nationale, ce serait, à faible coût, comme Mme Errante vient de le rappeler, une avancée, un signal positif adressé à nos concitoyens. Cela ne coûte pas beaucoup, mais c’est intéressant pour inciter à des modifications des modes de déplacements, bonnes pour la santé, donc pour la Sécurité sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, tout en approuvant son esprit. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Comme l’amicale cycliste parlementaire, nous pensons tous, sur tous les bancs, que la pratique du vélo est bonne pour la santé : elle protège de l’obésité, prévient le diabète, maintient la masse musculaire, peut-être même prévient-elle certaines formes de cancer.

M. Philippe Gosselin. Ah bon ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. L’objection de la commission est qu’il faudrait que l’employeur prenne en charge à la fois le coût du transport public et celui de la location du vélo.

M. Jean-Louis Borloo. Baupin a raison !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cela représenterait une charge supplémentaire pour l’employeur et aussi, puisqu’il y a exonération de cotisations sociales, une perte de recettes supplémentaire pour la Sécurité sociale. La commission a donc repoussé ces amendements identiques, tout en souscrivant à l’intention.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Vous avez bien noté, monsieur le rapporteur, la possibilité d’un surcoût, mais vous avez oublié de chiffrer le gain, alors que vous avez cité un nombre de maladies que la pratique régulière du vélo évite. Ce n’est pas nous qui le disons : comme l’a rappelé Mme Errante, c’est l’Organisation mondiale de la santé, qui chiffre le gain en milliards d’euros. S’il y a, vous l’avez souligné vous-même, moins de maladies, un expert tel que vous comprend tout de suite que cela fait des économies pour la Sécurité sociale. N’oublions pas, d’ailleurs, l’économie induite par une réduction du nombre de maladies cardio-vasculaires.

Contrairement à ce que certains prétendent mais comme le disent les médecins, ce n’est pas l’usage régulier du vélo qui est dangereux, c’est le non-usage du vélo. Je trouverais donc dommage que nous n’adressions pas ce signal en adoptant ces amendements.

Mme Véronique Massonneau. Très bien !

(Les amendements identiques nos 616 rectifié et 628 rectifié ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 618 rectifié et 636 rectifié.

La parole est à Mme Sophie Errante, pour soutenir l’amendement n618 rectifié.

Mme Sophie Errante. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n636 rectifié.

M. Denis Baupin. Il s’agit ici d’un autre dispositif. Nous avions déjà défendu cette actualisation l’an dernier, lors de l’examen du précédent PLFSS ; nous y revenons, parce qu’une étude a été faite par le ministère des transports, qui vise à la mise en place de ce dispositif, lequel est aujourd’hui en vigueur en Belgique et s’applique déjà à certains déplacements, comme entre le domicile et le travail, mais uniquement en voiture. Il s’agirait donc de le généraliser.

Si vous vous déplacez en voiture, le mode de déplacement qui pollue le plus, qui n’est pas une activité physique bonne pour la santé, c’est subventionné. En tout cas, une indemnité kilométrique est versée à ceux qui utilisent la voiture. En revanche, si vous vous déplacez à vélo, vous n’en recevez pas. Le signal implicite adressé au salarié est donc le suivant : prenez la voiture ! Voilà à quoi incitent les pouvoirs publics.

Nous demandons donc que soient appliqués aux déplacements à vélo les mêmes dispositifs incitatifs qu’aux déplacements en automobile. En une période où tout le monde s’inquiète de la pollution de l’air, de l’émission des gaz à effet de serre, de la consommation d’énergie, de la santé, il n’y a vraiment aucune raison pour que l’on continue de donner aux déplacements en automobile des avantages comparatifs par rapport aux déplacements à vélo.

M. Jean-Louis Borloo. Il a raison !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Il faut admettre que cet amendement, en quelque sorte un amendement de repli, offre une alternative…

M. Jean-Louis Borloo. Exactement !

M. Gérard Bapt, rapporteur. …entre la prise en charge des frais de déplacement en automobile et la prise en compte des déplacements à vélo. Bien entendu, il présente le même avantage du point de vue de la santé publique, et sans doute des dépenses futures suscitées par l’épidémie des maladies chroniques, que le précédent.

M. Jean-Louis Borloo. Vous n’allez pas encore humilier Baupin !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Une loi de santé publique doit être discutée dans cet hémicycle dans le courant de l’année 2014. (Exclamations sur les bancs des groupes écologiste et UMP.) Je pense que cet amendement aura tout à fait sa place dans ce cadre. Pour l’heure, je vous propose le repousser.

M. Jean-Louis Borloo. Le vélo, c’est maintenant !

Mme la présidente. Si vous voulez la parole, monsieur Borloo, je vous la donne. Prenez donc le micro et parlez.

M. Jean-Louis Borloo. Je vous confirme que je soutiens tout à fait M. Baupin. C’est bon pour le CO2, bon pour l’alternative, bon pour la santé. Je vous propose donc : « Le vélo, c’est maintenant ! » (Sourires.)

(Les amendements identiques nos 618 rectifié et 636 rectifié ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement n567.

M. Philippe Gosselin. Ici, point de Nutella, de vélo ou d’aspartame, mais une tentative de recherche de consensus, puisque tel était le souhait du ministre ce matin. Cela a été dit à l’ouverture de nos travaux à neuf heures et demie, lors de l’examen de l’amendement de notre collègue Germain : nous avons besoin de revoir en profondeur notre système de financement de la protection sociale. Il faut sortir du cadre actuel, et c’est à une révolution systémique que je vous appelle évidemment, pas à une surtaxation de telle ou telle boisson, ni à des colmatages de brèche plus ou moins réussis, en l’occurrence plutôt moins.

Nos comptes sociaux, vous le savez, accusent des déficits importants. De nouveaux défis sont apparus : le vieillissement de la population, la hausse du coût de soins toujours plus perfectionnés ; l’ouverture de nouveaux chantiers, tel celui de la dépendance. Or, au fur et à mesure que croissent les besoins, la part des salaires, principale assiette, dans le PIB se réduit. Depuis dix ans, elle a diminué de 9,3 points, ce qui est important. Cette situation ne me paraît pas tenable. Comment donc financer le social, les retraites et les différentes branches de la Sécurité sociale en se fondant sur une assiette qui se réduit ? N’espérons pas non plus le retour aux Trente Glorieuses, quelque peu mythiques, car cette perspective s’éloigne chaque jour davantage.

La solution, pour équilibrer les comptes sociaux, ne se réduit pas à une augmentation de prélèvements en tous genres, à ce qui est parfois un inventaire à la Prévert. Cela risque de fragiliser non seulement la consommation mais aussi l’emploi et l’investissement, moteurs de la croissance. Je le disais : il faut changer de braquet, il faut carrément changer de système.

L’amendement, qui repose sur les travaux de Jacques Pichelot, notamment l’un de ses ouvrages parus il y a quelques années, vise à l’instauration d’un plancher minimum de charges sociales, qui viendrait compléter l’assiette des salaires sans pénaliser ni le pouvoir d’achat ni l’emploi. Ce PMCS s’appliquerait sur le prix de vente de tout produit ou service, avant TVA. Si le poids des charges sociales dans ce prix était inférieur au plancher minimum de charges sociales, alors une contribution serait prélevée afin d’atteindre le seuil fixé.

Le PMCS s’appliquerait à tous les produits consommés en France, ce qui permettrait de viser aussi les produits importés au financement de la protection sociale, et l’ensemble de l’économie œuvrerait au financement de notre modèle social.

M. Jean-Louis Borloo et M. Dominique Tian. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement est passé par la procédure de l’article 88 du règlement. Il n’a donc pas été véritablement discuté. D’après ce que j’en comprends, ses auteurs se sont inspirés de l’ouvrage d’un économiste. Nous n’en avons pas vraiment débattu, mais ce que je note, c’est que nous aurions, après la progressivité de la CSG et la TVA sociale, une troisième voie, celle du PMCS.

Je vous propose, mon cher collègue, de retirer votre amendement, pour que nous l’examinions, avec l’amendement de M. Germain, dans le cadre de ce grand débat que nous aurons à la suite des conclusions du Haut Conseil pour le financement de la protection sociale. Si vous ne le retiriez pas, je proposerais bien entendu son rejet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. L’avis du Gouvernement est défavorable, car cet amendement aboutirait à un alourdissement des charges qui pèsent sur les entreprises, notamment celles qui investissent. Or, comme vous le savez, le Gouvernement propose un allégement net de charges, d’un montant de 10 milliards d’euros avec le CICE, destiné à accompagner les entreprises qui embauchent, les entreprises soumises à la concurrence internationale. En outre, avec le dispositif nouveau sur les jeunes entreprises innovantes et les plus-values mobilières, et le nouveau régime applicable à l’amortissement des dispositions fiscales, nous proposons des mesures destinées à accompagner la robotisation et l’innovation technologique. Inversement, l’amendement défendu par M. Gosselin pénaliserait énormément, par un alourdissement des charges, les entreprises qui investissent dans la robotisation.

Parce que nous ne sommes pas favorables, dans le contexte actuel, à un alourdissement des charges qui pèsent sur les entreprises, parce que nous souhaitons accompagner l’investissement dans l’innovation, et ce dans un pays dont l’appareil productif industriel compte beaucoup moins de robots innovants que celui de l’Allemagne, nous ne pouvons pas souscrire à cet amendement, et émettons un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. J’ai écouté M. Bapt, et je suis effectivement d’accord avec lui dès lors que sont évoqués les moyens de trouver de nouvelles sources de financement de la protection sociale. Étant donné que le Haut Conseil du financement de la protection sociale travaille, on pourra, dans le débat qui suivra, examiner ce genre d’amendement, d’autant plus que l’idée, monsieur le ministre, ne manque pas d’intelligence. Lisons l’exposé sommaire : il relève que plus de 40 % des produits sont fabriqués par des machines, des outils, et non plus le fruit du travail de l’homme. Peut-être cela vous rappelle-t-il certain film de Chaplin, où il visse des boulons avec ses outils et où l’on voit que les machines remplacent l’homme. Si l’on peut trouver des solutions, cela mérite d’être débattu.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Je répondrai en quelques mots à M. Cazeneuve.

Il ne s’agit pas d’un alourdissement de la fiscalité, puisque nous nous situons dans une réforme du système, réforme qui interviendrait à la place d’un certain nombre de colmatages. Cette remise à plat complète aurait pour effet, comme le soulignait Jean-Pierre Door, que les contributions sociales ne seraient pas essentiellement assises sur les salaires : contribueraient aussi un certain nombre de biens dont les prix n’ont cessé de baisser ces dernières années. Il y a vingt ans, un ordinateur représentait trois mois de salaire ; aujourd’hui, il représente vingt jours de salaire. De même, un écran plat qui coûtait quatre mois et demi de salaire coûte maintenant moins de cinquante heures.

Ces équipements sont fortement robotisés, ce qui est très bien, d’ailleurs, je partage votre souhait d’un plus grand alignement sur l’Allemagne, et leur coût a fortement diminué. Ils pourraient donc contribuer, sans dommage pour la consommation et le pouvoir d’achat, à ce financement de la Sécurité sociale. C’est donc une réforme de système.

J’entends bien ce qu’a dit le rapporteur. Le Haut Conseil du financement de la protection sociale travaille, et la MECSS participe également aux travaux sur la branche famille. Versons donc, si vous le voulez bien, ce plancher minimum des charges sociales dans le débat, qu’il puisse être étudié par le Haut Conseil comme une piste possible. Je ne prétends pas, évidemment, détenir la vérité ; nul ne pense la détenir, à ce stade, sur un tel sujet. Sinon, nous aurions trouvé depuis belle lurette la pierre philosophale.

Je maintiens tout de même mon amendement, à titre de produit d’appel, si je puis m’exprimer ainsi, et pour bien acter l’engagement qui pourrait être pris de l’intégrer aux travaux du Haut Conseil du financement de la protection sociale.

(L’amendement n567 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n574.

M. Francis Vercamer. Cet amendement est satisfait. J’ai voté pour celui de Jean-Marc Germain, qui a fait l’objet d’une modification en cours de séance. Or l’amendement de Jean-Marc Germain va dans le même sens que le mien. Je le retire donc : ce n’est pas la peine de demander un rapport de plus.

(L’amendement n574 est retiré.)

Article 16

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie, inscrite sur l’article 16.

Mme Véronique Louwagie. L’article 16 évoque les contrats de service civique et les contrats d’apprentissage. J’en profite pour faire un point sur le contrat de service civique, dont nous ne parlons pas souvent. Il a été instauré en 2010, et concerne des jeunes de 16 à 25 ans. Il permet à ces jeunes de travailler de six à douze mois dans une entreprise certifiée par l’État, pour une rémunération de 573 euros par mois.

Depuis sa création – assez récente – ce dispositif a séduit plus de 46 000 personnes, qui ont ainsi assuré une mission de service civique, se consacrant à des missions d’intérêt général reconnues prioritaires pour la nation. Je salue la réussite de ce dispositif, qui contraste avec l’échec du contrat du génération. L’engagement n33 du candidat François Hollande consistait en la création d’un « contrat de génération pour permettre l’embauche par les entreprises de jeunes, accompagnés par un salarié plus expérimenté ».

L’objectif était ambitieux : 500 000 embauches pendant le quinquennat, dont 75 000 en 2013. Cet objectif a déjà été réduit au printemps. Il a été divisé par trois, et s’établit à 25 000 contrats. Depuis la promulgation de la loi le 1er mars dernier, soit après huit mois et demi, un peu plus de 10 000 contrats seulement ont été signés. C’est dire l’ampleur de l’échec de ces contrats de génération, échec que nous avions d’ailleurs prédit, et sur lequel nous avions attiré votre attention lors des discussions sur ce dispositif. À l’inverse, il faut saluer la réussite du dispositif des contrats de service civique.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Cet article 16 évoque les contributions prises en charge pour les apprentis, les jeunes en service civique et les jeunes dans les chantiers d’insertion. Monsieur le ministre, je voudrais vous poser une question. Je suis un peu inquiet de voir que l’apprentissage patine dans notre pays alors qu’il se développe dans les pays voisins. Confirmez-vous qu’il y aura réellement des réductions d’indemnisation pour les petites entreprises qui prendraient des apprentis en alternance ? Ce bruit a couru dans la presse.

Deuxième question : les crédits versés par l’État et les régions pour alimenter l’amélioration des centres de formation des apprentis, les fameux CFA, seront-ils réduits ? Il y a deux ans, sous l’ancien gouvernement, une ligne budgétaire était consacrée aux CFA et à leur amélioration. J’ai l’impression qu’à présent, tout cela patine un peu. C’est pourquoi j’aimerais obtenir une réponse à ces questions.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Madame la présidente, monsieur le ministre, permettez-moi de revenir un instant sur la teneur générale de ce débat. J’exprime encore une fois mon profond désaccord avec la manière de faire de ce gouvernement. Les mesures néfastes pour nos concitoyens se multiplient, notamment celles qui touchent les épargnants, avec la refonte des prélèvements sociaux sur les produits de placement, ou encore celles qui concernent les travailleurs indépendants, avec la création d’une cotisation déplafonnée.

En accentuant comme vous le faites la pression fiscale sur nos concitoyens, je crois que vous créez un climat délétère. Les chiffres des personnes parties à l’étranger en 2011 ont été publiés – vous n’étiez pas, alors, majoritaires. Nous pourrons les comparer avec les chiffres des personnes parties en 2012 et 2013.

M. Jean-Marc Germain. Ce n’est pas la peine de comparer : vous êtes imbattables !

M. Thierry Mariani. Ce qui m’inquiète, dans ces chiffres, ce n’est pas leur valeur absolue : c’est la proportion de jeunes de moins de 30 ans, qui atteint 40 %. Ces 40 % de jeunes pensent que leur avenir n’est pas en France.

M. Jean-Marc Germain. Savez-vous au moins pourquoi ils partent ? Pas pour des raisons fiscales, mais pour des raisons professionnelles !

M. Thierry Mariani. Il ne s’agit pas de descendants de familles extrêmement riches. C’est ce dont je me rends compte – malheureusement – à l’étranger, avec un certain nombre de collègues.

Le nouveau mode de calcul des prélèvements sociaux que vous venez d’imaginer – je parle, bien entendu, des prélèvements sur les produits de placement comme l’assurance-vie, les PEL et les PEA – va donc augmenter les taxes de 600 millions d’euros, soit exactement – on l’a déjà dit – ce que coûte le budget de l’aide médicale d’État. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Marc Germain. C’est insupportable !

M. Thierry Mariani. Il faut bien prendre un terme de comparaison ! Parler de 600 millions d’euros, cela ne signifie rien dans l’absolu. Le montant que vous avez décidé, la nuit dernière, de prendre aux épargnants, est identique – à quelques millions près – à celui que l’on donne aux sans-papiers. Même si cela vous gêne, même si vous protestez, cela ne change rien : c’est une vérité mathématique. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)



Vous revendiquez des économies, mais où sont-elles ? Où sont les mesures d’économies… (Protestations persistantes sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. Seul M. Mariani a la parole !

M. Thierry Mariani. C’est quand même extraordinaire : dès que l’on parle de l’AME, cela vous énerve ! C’est vraiment une réaction pavlovienne. Je ne vois pas en quoi c’est choquant : je ne fais que décrire la réalité.

Vous revendiquez des économies, mais où sont-elles ? Où sont les mesures d’économie annoncées ?

J’en reviens enfin à l’article 16. Il procède entre autres à l’alignement sur le droit commun du prélèvement au titre de la protection sociale pour les jeunes ayant souscrit un contrat de service civique. Il ne s’agit pas des plus riches ! Jusqu’à présent les indemnités et les diverses prestations allouées bénéficiaient d’une exonération d’impôt sur le revenu. Je crois que cette disposition risque de fragiliser le dispositif de service civique, qui est ouvert à tous les jeunes de 16 à 25 ans sans condition de diplôme. C’est aussi un moyen, pour certains, de s’intégrer. Si la jeunesse était vraiment la priorité de votre gouvernement – comme vous l’avez annoncé pendant la campagne électorale – cet article 16 ne figurerait pas dans ce texte.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Je remercie Thierry Mariani d’avoir relancé le débat sur l’AME. Beaucoup de nos concitoyens se demandent pourquoi nous ne parlons pas de l’AME dans le cadre du débat sur le PLFSS. Il faut préciser que l’AME repose sur le budget de l’État, puisque l’État qui rembourse à la Sécurité sociale l’ensemble des dépenses qui y sont liées. Il les rembourse au prix fort, d’ailleurs, au prix le plus élevé que l’on puisse trouver dans les hôpitaux. Il faut savoir cela également : c’est une double escroquerie. C’est pour cela que nous en débattrons la semaine prochaine, dans le cadre de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2014.

Pour que nos concitoyens comprennent bien, ainsi que quelques députés fraîchement élus, je rappelle que, du temps de Nicolas Sarkozy, nous n’avions pas supprimé l’aide médicale d’État. Nous avions simplement instauré un droit de timbre pour que les bénéficiaires de l’AME paient à peu près la même somme que les assurés français. Ce droit de timbre n’était que de 30 euros par an : quel crime !

Surtout, nous avions décidé de ne plus rembourser certaines prestations. Par exemple, nous avions décidé de ne plus rembourser les cures thermales des personnes entrées illégalement sur le territoire national. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Gérard Sebaoun. C’est faux, il n’y avait rien de tel dans votre réforme de l’AME ! C’est scandaleux !

M. Jean-Marc Germain. Lamentable !

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales. Grotesque !

M. Dominique Tian. Nous avions décidé de ne plus rembourser les procréations médicalement assistées pour les personnes entrées illégalement sur le territoire national. (Nouvelles protestations sur les bancs du groupe SRC.) Eh bien oui !

M. Jérôme Guedj. Vous n’êtes même pas capables de dire combien il y en a eu !

M. Dominique Tian. Vous, une des premières mesures que vous avez prise, c’était une mesure à 600 millions d’euros. Vous avez dit oui aux cures thermales, oui au remboursement à 100 % des soins, oui aux procréations médicalement assistées. Même si les gens viennent spécialement pour cela dans les hôpitaux français, depuis la Chine ou ailleurs, on continuera à leur rembourser 5 000 euros. On continuera à rembourser ainsi toutes les personnes rentrées illégalement sur notre territoire national et qui éprouvent le besoin pressant d’y avoir un enfant. C’est une escroquerie organisée par des filières mafieuses au détriment de la Sécurité sociale française. Je suis content que Thierry Mariani l’ait relevé. Il fallait avoir ce débat. (Tumulte persistant sur les bancs du groupe SRC.)

M. Gérard Sebaoun. C’est lamentable !

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements, nos 444, 445 et 446, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. le rapporteur, pour les soutenir.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Ces trois amendements sont rédactionnels, madame la présidente.

(Les amendements nos 444, 445 et 456, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L’article 16, amendé, est adopté.)

Article 17

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie, inscrite sur l’article 17.

Mme Véronique Louwagie. L’article 17 est relatif au dispositif de compensation des réductions, exonérations ou abattements d’assiette de cotisations ou contributions de Sécurité sociale.

Il faut rappeler que ces mécanismes d’allégement et d’exonérations sont des mécanismes d’incitation à l’embauche et à la réalisation d’heures complémentaires et supplémentaires. Le rapport de M. Bapt comporte un tableau très instructif qui présente l’évolution du coût de l’exonération des heures supplémentaires. Cette mesure a été mise en place en 2007. On remarque que l’année où ces exonérations ont été les plus importantes est l’année 2011. Après la loi de finances rectificative de juillet 2012, par laquelle il a été décidé de mettre fin à ces exonérations, le coût du dispositif s’atténue logiquement.

Il convient de rappeler également, au sujet des heures supplémentaires, que le Gouvernement et la majorité ont privé les salariés d’une source importante de pouvoir d’achat. Neuf millions de salariés ont été touchés, nous l’avons dit ce matin. En outre, en recevant leur feuille d’impôt, un grand nombre d’entre eux ont eu la mauvaise surprise de constater qu’ils doivent payer un reliquat d’impôt sur les heures supplémentaires réalisées au cours des derniers mois de l’année 2012. Ils auront également une mauvaise surprise en 2014, puisque l’intégralité de la rémunération des heures supplémentaires réalisées au cours de l’année 2013 sera soumise à l’impôt sur le revenu.

Vous avez commis là une erreur importante. Cette nuit, vous avez à nouveau commis une erreur importante, quasiment de même nature, et qui marquera les Français : la taxation rétroactive à 15,5 % des contrats d’assurance-vie, des plans d’épargne logement et des plans d’épargne en actions. Les Français sont consternés. Un grand nombre de réactions nous parviennent depuis la fin de la matinée. J’espère que la majorité réagira et reviendra sur ce dispositif.

(L’article 17 est adopté.)

Article 18

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie, inscrite sur l’article 18.

Mme Véronique Louwagie. Au moment d’aborder cet article 18, je voudrais faire un point sur le crédit d’impôt compétitivité-emploi. Il n’a pas encore fêté son premier anniversaire, pas encore soufflé sa première bougie,…

M. Denys Robiliard. Laissez-le vivre !

Mme Véronique Louwagie. …mais déjà l’exécutif cherche des alternatives, des orientations pour le faire basculer vers une baisse des charges. On peut en effet comprendre la perplexité actuelle du Gouvernement envers ce dispositif. Le rapport Gallois avait parlé d’un choc de compétitivité, d’un choc de confiance : rien de tel ne s’est produit.

On s’aperçoit aujourd’hui que ce dispositif est compliqué et que les entreprises ne le mettent pas en œuvre. Le préfinancement est également compliqué, raison pour laquelle les entreprises n’y recourent pas. Ce dispositif est par ailleurs illisible, puisqu’il ne se traduit pas dans les comptes des entreprises par une diminution des charges sociales.

Vous faites un pas en avant, un pas en arrière : nous l’avons vu avec votre volte-face sur l’impôt sur l’excédent brut ou l’excédent net d’exploitation. Nous l’avons vu aussi avec le maintien du taux réduit de TVA à 5,5 % au lieu de 5 %, contrairement à ce qui était prévu. Vous multipliez les annonces pour tâter le terrain, avant de vous rétracter.

Aujourd’hui, ces volte-face ont le CICE pour objet. Cette mesure coûte cher : le coût de gestion est estimé à 20 % du coût total du dispositif. Vous remettez en cause ce dispositif un an après l’avoir mis en place : cela me rend très perplexe.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 613 et 309, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. le rapporteur, pour les soutenir.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Ces amendements sont rédactionnels, madame la présidente.

(Les amendements nos 613 et 309, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L’article 18, amendé, est adopté.)

Article 19

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 614 et 310, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. le rapporteur, pour les soutenir.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Ces amendements sont rédactionnels, madame la présidente.

(Les amendements nos 614 et 310, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L’article 19, amendé, est adopté.)

Article 20 et annexe C

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, inscrit sur l’article 20.

M. Bernard Accoyer. Au moment où la majorité va évidemment voter pour le tableau de financement du Fonds de solidarité vieillesse qui figure en annexe de l’article 20, nous voulons dire, d’une part, que ce dernier va rester en déficit, et, d’autre part, que les recettes qui lui sont attribuées sont pour une bonne part issues d’un détournement ou d’un « reroutement » – comme le disait hier M. le ministre du budget – de cotisations demandées aux retraités pour prendre en charge la dépendance.

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Je voudrais souligner la dégradation de la situation du solde prévisionnel du Fonds de solidarité vieillesse, que nous pouvons constater à l’occasion de la discussion de cet article 20 : 2,7 milliards d’euros en 2013 et 3,2 milliards d’euros en 2014. Cette aggravation est importante, même si elle est justifiée dans l’exposé des motifs par les effets de la crise sur l’emploi.

Je voudrais sur ce point réagir aux propos du ministre – qui est parti –, indiquant il y a quelques instants que l’un de ses objectifs premiers était l’amélioration de la protection sociale des Français. Je crois que nous y sommes tous favorables, mais, avant de parler de protection sociale, il faut parler de l’emploi. En l’occurrence, le ministre réagissait à une défense d’amendement faisant état de la suppression de 38 000 emplois à domicile.

Le premier objectif est, me semble-t-il, de favoriser l’emploi, tout en prenant en compte celui d’améliorer la protection sociale. Mais l’emploi reste le premier chantier dont on doive se préoccuper.

M. Michel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales. On a compris depuis longtemps !

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 615 et 311, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour les soutenir.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Ces amendements sont rédactionnels, madame la présidente.

(Les amendements nos 615 et 311, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L’article 20l’annexe C, modifiés, sont adoptés.)

Article 21 et annexe B

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, inscrit sur l’article 21.

M. Bernard Accoyer. Cet article 21 vise à faire approuver par la majorité le rapport pour les années 2014 à 2017, qui figure en annexe B.

À ce moment de nos débats, nous souhaitons à nouveau faire remarquer qu’en matière de recettes il s’agit, cette année particulièrement, de vider un certain nombre de fonds de tiroirs, de « rerouter » et de détourner des recettes prélevées sur les Français avec la promesse qu’elles seraient affectées à un autre but que celui-ci.

S’agissant des dépenses, nous voulons également dire qu’il n’y a dans ce PLFSS aucune réforme de structure susceptible d’assurer un retour durable à l’équilibre, ni même un simple retour à l’équilibre : on a en effet constaté que le déficit entre l’exercice 2012 et 2013 a cessé de se réduire alors que, sur les deux exercices précédents, il avait chaque année diminué respectivement de 7 et de 4 milliards d’euros.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Je vais compléter ce que dit Bernard Accoyer. L’annexe B décrit l’évolution des recettes et des dépenses pour la période 2014-2017. On sait bien qu’il y a eu un très fort impact de la crise sur les comptes sociaux, que les déficits s’accumulent et que les solutions que vous proposez sont sans ambition. Vos choix ne sont pas les nôtres.

M. Christian Paul, rapporteur de la commission des affaires sociales. Voilà qui nous rassure !

M. Jean-Pierre Door. Il s’agit de taxes, encore de taxes, toujours de taxes.

La fixation de l’ONDAM à 2,4 % est certes une bonne mesure,…

Mme Ségolène Neuville. Une excellente mesure !

M. Jean-Pierre Door. …qui avait d’ailleurs été prise par l’ancienne majorité, mais elle se fait pour plus de la moitié aux dépens du médicament, ce qui risque d’étouffer notre industrie pharmaceutique.

Vous supprimez par ailleurs la convergence tarifaire entre le public et le privé, ce qui vous prive d’économies substantielles : vous ne faites contribuer l’hôpital qu’à la hauteur de 400 millions d’euros. Vous renoncez à une vraie maîtrise de la dépense hospitalière, que vous avait pourtant recommandée la Cour des comptes.

Dans le domaine des retraites, la réforme votée il y a quelques jours est sous-calibrée, puisque vous vous fixez comme seul effort l’objectif de 7 milliards d’euros de déficit pour le régime général, alors qu’il faudrait trouver 20 milliards d’ici 2020. Qui plus est, cette réforme est assise sur des mesures qui contreviennent au pouvoir d’achat, plutôt que sur des mesures courageuses sur le travail.

Pour les retraités, cela se traduit par des impôts, encore des impôts, toujours des impôts : la nouvelle contribution additionnelle de solidarité sur les pensions sera de 0,15 % en 2013 et de 0,3 % en 2014. Pire encore, vous retardez la revalorisation des pensions de six mois.

Par ailleurs, vos mesures ont un impact défavorable sur de nombreuses familles, puisque vous abaissez à nouveau le quotient familial et le montant du complément de libre choix d’activité.

Je conclurai en répétant ce que j’avais déjà dit l’an dernier à votre prédécesseur, monsieur le ministre : les hypothèses économiques relèvent beaucoup plus du rêve que de la réalité. À quand un taux de croissance de 2 % dans notre pays ? À quand une croissance de 4 % de la masse salariale, alors que la courbe du chômage continue de décliner ? Il est regrettable que l’on n’entende pas les conseils de la Cour des comptes et que les prévisions ne soient pas plus raisonnables.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 231, 328, 601, tendant à supprimer l’article 21.

La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n231.

M. Dominique Tian. Je demande la suppression de cet article car fixer aujourd’hui un taux de progression de l’ONDAM de 2,4 %, soit plus que la croissance du PIB, signifie que l’on va dépenser encore 4 milliards d’euros de plus pour un système dont l’organisation et la gestion sont inefficientes.

Jean-Pierre Door vient de le dire : aucune réforme structurelle, pourtant réclamée par la Cour des comptes, n’aura lieu. La convergence est abandonnée, la réforme de l’hôpital reportée à plus tard, les soins ambulatoires à l’hôpital ne sont pas renforcés malgré les préconisations de la Cour des comptes, selon laquelle 5 milliards d’euros peuvent facilement être économisés de cette manière. La surconsommation médicale et les arrêts de travail injustifiés ne sont pas davantage abordés. Bref, l’ensemble des solutions connues est ignoré, ce qui nous amène à la catastrophe : 17 milliards d’euros de déficit cette année, soit un déficit cumulé de 150 milliards.

Je vais répéter ce que j’ai dit précédemment : pendant que nous débattons de ces 150 milliards d’euros de déficit, nos collègues du Bundestag discutent, eux, des excédents de la Sécurité sociale allemande. Nous touchons le fond d’un système à bout de souffle. C’est pourquoi nous ne pouvons voter pour cet article.

Mme Valérie Rabault, rapporteure pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. On va vous envoyer vous faire soigner en Allemagne !

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n328.

M. Bernard Accoyer. Il convient de supprimer cet article, qui retrace toutes les mesures, inefficaces ou à contresens selon nous, par lesquelles vous prétendez maîtriser les dépenses et assurer l’équilibre des comptes de la Sécurité sociale.

Les déficits reportés d’année en année sont autant de chèques tirés sur les jeunes générations. Maintenant que la dette de l’État va bientôt atteindre les 95 % du PIB, il est temps de comprendre qu’il est déraisonnable de cumuler 150 milliards de dettes liées aux dépenses sociales. Il suffirait d’une simple petite hausse des taux d’intérêt pour que nous soyons dans une situation intenable. Le Gouvernement est déjà obligé de chercher partout des recettes de substitution, d’augmenter les impôts et les cotisations au-delà du supportable, ce qui entraîne une baisse de la consommation des ménages et de la compétitivité des entreprises, une stagnation de notre économie et l’augmentation du chômage. La compétitivité est tout à fait insuffisante pour permettre un redressement, à un moment où l’état de l’économie mondiale et européenne devrait pourtant permettre d’améliorer la situation.

Dans ces conditions, il n’est pas possible d’accepter cet article. C’est pourquoi nous en demandons la suppression.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement n601.

M. Jean-Pierre Door. Je me suis déjà exprimé sur l’article, mais je voudrais dire au Gouvernement qu’il met à contribution de façon trop importante les entreprises, les PME, les TPE, les artisans, les commerçants et les épargnants de notre pays, à tel point que les faillites ont augmenté de plus de 7,5 % au troisième trimestre par rapport au trimestre précédent – comme en atteste une note que je viens de recevoir. Les TPE de moins de 10 salariés sont celles qui souffrent le plus : 90 % de défaillances.

Madame la ministre, puisque nous habitons la même région, je vous indique que nous accusons 16,2 % de fermeture et de défaillance de PME et TPE. C’est dramatique ! Je déplore que vous continuiez à les mettre à contribution. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a naturellement rejeté ces amendements, qui ont surtout un objectif politique, puisqu’ils permettent à ceux qui se sont déjà exprimés sur l’article de s’exprimer à nouveau. L’un d’entre eux me disait pourtant à l’instant qu’il fallait accélérer les débats…

Si ces faillites sont en augmentation, monsieur Door, nous le regrettons tous,…

M. Jean-Frédéric Poisson. Nous voilà soulagés !

M. Gérard Bapt, rapporteur. …mais les difficultés d’une entreprise qui fait faillite aujourd’hui ne datent pas de juillet 2012.

M. Jean-Pierre Door. Cela va s’aggraver !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Vous voulez supprimer les hypothèses macroéconomiques qui nous conduisent à respecter nos engagements européens d’ici 2017, que le président Hollande a d’ailleurs réussi à assouplir par rapport à ceux qui avaient été acceptés par le gouvernement que vous souteniez, sous la conduite de Nicolas Sarkozy. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Frédéric Poisson. Après avoir dit qu’il respecterait ces engagements !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cela a permis de retarder de deux ans les échéances du retour aux normes de Maastrich.

La dette cumulée prévisible des régimes sociaux en 2017 est de l’ordre de 27 milliards d’euros. Je vous rappelle qu’en dix ans vous avez accumulé 160 milliards de dette sociale, dont 90 milliards sous le seul quinquennat de Nicolas Sarkozy. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Bérengère Poletti. Reconnaissez qu’il y avait une crise !

M. Gérard Bapt, rapporteur. C’est pourquoi votre amendement de suppression sera naturellement rejeté par l’Assemblée nationale.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Véran.

M. Olivier Véran. Si je lis bien l’exposé des motifs, mes chers collègues, vous dites que la fixation de l’ONDAM à 2,4 % est une bonne mesure. Vous êtes donc d’accord avec les chiffres du Gouvernement, et c’est sur la façon d’y arriver que vous ne l’êtes pas.

Mme Bérengère Poletti. Sur la méthode !

M. Olivier Véran. Il faut rappeler aux Français comment vous avez tenté de maîtriser les dépenses d’assurance-maladie au cours des dix années précédentes : par les franchises médicales, les mesures de déremboursement des soins et de médicaments (Exclamations sur les bancs du groupe UMP),…

Mme Bérengère Poletti. Supprimez donc les franchises ! Pourquoi n’avez-vous pas déposé d’amendements en ce sens ?

M. Olivier Véran. …une idéologie de la gouvernance de l’hôpital public fondée sur la réduction des dépenses, ne prenant plus en compte la qualité des soins apportés aux malades mais uniquement les recettes obtenues à la fin de l’année.

Je suis très fier que nous parvenions à un ONDAM à 2,4 % sans aucune mesure affectant les droits des usagers,…

Mme Bérengère Poletti. Mais en maintenant les franchises !

M. Olivier Véran. …mais avec des mesures tendant à une efficience intelligente, cohérente et douce. Nous ne mettrons pas la pression sur l’hôpital comme vous l’avez fait avec la convergence tarifaire : il n’y aura ni guerre des tarifs, ni guerre contre la qualité des soins. (« Très bien ! »sur les bancs du groupe SRC.)

M. Bernard Accoyer. Ni réforme de structure !

(Les amendements identiques nos 231, 328 et 601 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 670 à 683, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. le rapporteur, pour les soutenir.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Ce sont des amendements rédactionnels ou de précision.

(Les amendements nos 670, 671, 672, 673, 674, 675, 676, 677, 678, 679, 680, 681 et 682, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n819.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement n’est pas simplement rédactionnel. Il précède une modification qui sera introduite par un amendement ultérieur. Il propose donc, à la deuxième phrase de l’alinéa 28 de l’annexe B, de substituer aux mots : « d’un répertoire » les mots : « d’une liste de référence ». Cet amendement adopté en commission concerne les produits biosimilaires.

(L’amendement n819, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je mets maintenant aux voix l’amendement n683, présenté précédemment par M. le rapporteur.

(L’amendement n683, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 21 et l’annexe B, modifiés, sont adoptés.)

Article 22

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie, inscrite sur l’article 22.

Mme Véronique Louwagie. L’article 22 traite de ce que l’on pourrait nommer la simplification du mode de calcul du RSI. Même si nous en avons, certes, beaucoup débattu hier soir, je tiens à revenir sur le RSI. Un grand nombre d’entre nous ont souligné les dysfonctionnements du régime RSI. Par ailleurs, nous n’avons pu obtenir que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l’état des dysfonctionnements ou l’amélioration de ce système. Je tiens à citer, ici, les augmentations des charges et des cotisations votées depuis dix-huit mois, lesquelles ont atteint 1 milliard d’euros l’année dernière et ce sera le cas chaque année, à partir de 2013. Cette année encore, une cotisation retraite déplafonnée a été créée. Elle sera de 0,30 %, pour financer la réforme des retraites. En vitesse de croisière, la cotisation déplafonnée atteindra 45 millions d’euros.

On nous parle ici, avec cet article 22, de la « simplification » du mode de calcul. Cela me laisse perplexe. En effet, cette simplification doit être lisible pour nos artisans, nos commerçants et les industriels relevant de ce régime. C’est pourquoi je serai amenée à vous proposer un amendement proposant la suppression de cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n324.

Mme Véronique Louwagie. Nos artisans, commerçants et industriels doivent pouvoir prévoir et organiser les décaissements des cotisations RSI. On sait que le mécanisme est quelque peu particulier. Ainsi, le calcul des cotisations provisionnelles de l’année N, à savoir, en l’occurrence, l’année 2013, s’effectue sur l’année N-2, donc en 2011, et lesdites cotisations sont régularisées en l’année N+1, c’est-à-dire en 2014. Cela entraîne des décalages. Il convient d’ajouter que le RSI a permis aux cotisants, qui ont opté pour cette solution, d’ajuster plus facilement leurs cotisations par une déclaration anticipée.

Actuellement, le mécanisme qui conduit à régler les cotisations provisionnelles sur l’année N-2 permet aux cotisants d’évaluer ce qu’ils devront payer l’année suivante. Ainsi, quand ils ont connaissance de leurs revenus de 2013, ils peuvent estimer le montant des cotisations qu’ils auront à verser en 2015. Revenir sur un tel dispositif et décider que les cotisations provisionnelles seront calculées à partir de l’année N, ils ne seront plus en mesure de prévoir les cotisations qu’ils devront payer puisqu’ils n’auront pas connaissance de leurs résultats.

Il est fondamental que les cotisants puissent connaître ces éléments. C’est pourquoi nous proposons de supprimer cet article.

M. Jean-Louis Borloo. Elle a raison !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement. Cette proposition de suppression de l’article 22 me surprend parce que les représentants des indépendants que j’ai rencontrés m’ont dit qu’ils étaient satisfaits par ce dispositif de simplification, en ce que la date de paiement des cotisations permet de faire mieux correspondre celles-ci au montant des revenus. Ils ne seront donc plus pénalisés, comme c’est le cas aujourd’hui, en cas de fluctuation de leur activité.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable. Les dispositions de cet article sont, en effet, favorables aux déclarants et aux assurés. Ils ont d’ailleurs donné eux-mêmes un avis positif sur cette mesure quand elle leur a été proposée. Il me semble que votre amendement est contraire aux positions que vous revendiquez.

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. J’entends vos observations. Les artisans et les commerçants que j’ai pu rencontrer ne partagent absolument pas cette vision. Ils sont aujourd’hui satisfaits de pouvoir prévoir, dès qu’ils auront connaissance de leurs revenus de 2013, les montants des cotisations qu’ils devront payer en 2015. Or, s’ils sont contraints de payer en 2015 leurs cotisations sur les revenus de l’année 2014, ils ne pourront pas faire de telles prévisions. Ce sera un vrai problème.

M. Jean-Louis Borloo. Bien sûr !

Mme Véronique Louwagie. J’appelle votre attention sur ce point. J’ai tenté de le faire en commission des affaires sociales. Il est essentiel de pouvoir établir des prévisions de trésorerie à douze, dix-huit et vingt-quatre mois. Le mécanisme que vous proposez ne le permettra pas.

(L’amendement n324 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis de deux amendements, nos 800 et 801, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour les soutenir.

M. Gérard Bapt, rapporteur. L’amendement n800 harmonise à compter du 1er janvier 2014, au lieu du 1er janvier 2015, le régime de la cotisation d’assurance maladie-maternité des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés avec celui des autres cotisations et contributions sociales dues par ces cotisants. Le maintien de l’entrée en vigueur de cette mesure au 1er janvier 2015 aurait, en effet, pour conséquence de continuer à maintenir, durant une année supplémentaire, le système actuel, source de complexité, car il conduit les praticiens à déclarer deux fois un même revenu et contraint les organismes de recouvrement à calculer séparément les cotisations selon qu’il s’agit de celles finançant le risque maladie ou des autres.

L’amendement n° 801 a le même objet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Je voudrais revenir sur cet article 22. Les travailleurs indépendants que nous avons rencontrés nous ont dit leur totale opposition à ce que vous proposez. Ces professionnels ne peuvent connaître que plus tard leur revenu net de l’année N. Ce décalage est dû entre autres aux retards de paiement de factures ou à des régularisations diverses. Il apparaît, par conséquent, clairement que ce changement de calendrier et d’assiette particulièrement ingérable pourra mettre en grande difficulté des professions déjà assommées par les hausses de cotisations et d’impôts majeures que vous leur avez imposées.

(L’amendement n800 est adopté.)

(L’amendement n801 est adopté.)

(L’article 22, amendé, est adopté.)

Article 23

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n447.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Rédactionnel.

(L’amendement n447, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements, nos 49, 190, 713, 168 et 385, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 49, 190 et 713 sont identiques, de même que les amendements nos 168 et 385.

La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement n49.

M. Jean-Pierre Door. Cet article 23 instaure, pour les petites et moyennes entreprises, une étape intermédiaire pour la généralisation de la déclaration sociale nominative et pour la déclaration du chèque emploi service, le fameux CESU. Vous avez fixé l’étape intermédiaire au 1er juillet 2015, pour éviter, avez-vous dit, un engorgement au moment de la généralisation prévue, quant à elle, au 1er janvier 2016. Vous avancez donc de six mois la date de bascule obligatoire. Nous considérons qu’il s’agit d’une complexité pour ces petites et moyennes entreprises. En effet, la dématérialisation sera difficile à mettre en œuvre en l’espace de quelques mois.

Nous sommes favorables à un choc de simplification. Mais nous pensons que l’on peut donner un tout petit peu de temps au temps à ces petites entreprises qui rencontrent, comme nous l’avons souligné lors de l’examen du précédent article, d’autres difficultés majeures, qui se traduisent par nombre de défaillances et de fermetures. Nous vous proposons, en conséquence, de fixer l’étape intermédiaire, par décret, à la date du 1er janvier 2017. Ce sera beaucoup plus simple pour elles.

M. Jean-Louis Borloo. Il a raison !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour soutenir l’amendement n190.

M. Jean-Pierre Barbier. Une simplification est nécessaire. Je me suis rendu sur la page d’accueil de la MSA des Alpes. Voici quelles sont les cotisations dont l’employeur est redevable. Je les cite : assurance maladie, assurance vieillesse, accidents du travail, allocations familiales, allocations logement, transport, assurance chômage, assurance garantie des salaires, formation CDD, formation plan, service de santé au travail, retraite complémentaire des non-cadres, prévoyance décès, prévoyance GIT, AFNCA PROVEA, complémentaire frais de soins, AGFF des non-cadres, contribution solidarité autonomie, contribution sociale généralisée, remboursement de la dette sociale, contribution épargne salariale, contribution sur avantages de préretraite, retraite complémentaire des cadres, AGFF des cadres, CET, GMP, taxe CMU, ASCPA, contribution aux retraites supplémentaires à prestations définies, formation annuelle, contribution indemnités de mise à la retraite, contribution au forfait social, contribution aux stock-options et actions gratuites, pénalités 1 % senior, contribution patronale additionnelle sur rentes, contributions salariales sur rentes.

Il est vrai qu’un employeur qui se rend sur la page d’accueil a un véritable choc. Il a par conséquent besoin d’une simplification !

Mme Bérengère Poletti et M. Jean-Louis Borloo. Très bien !

M. Jean-Pierre Barbier. Toutefois, la simplification que vous proposez complexifiera tout de même largement, dans un premier temps, le travail des petites et moyennes entreprises, comme l’a très bien expliqué mon collègue Jean-Pierre Door. De plus, vous avez introduit, dans votre texte sur la réforme des retraites, le compte pénibilité, qui va exiger des petites et moyennes entreprises la mise en place d’une gestion énorme.

Je comprends votre volonté de décaler cette date au 1er janvier 2016 pour éviter d’engorger les services administratifs. C’est tout à fait louable. Mais fixer cette date, pour des petites et moyennes entreprises qui auront déjà à gérer le compte pénibilité, ce sera très complexe. Nous vous l’avons dit et répété et je vous le redis aujourd’hui. Nous proposons de reporter la date au 1er janvier 2017 pour les petites et moyennes entreprises.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n713.

Mme Véronique Louwagie. Nous pouvons tous nous satisfaire du fait que l’on cherche à simplifier, par la généralisation de la déclaration sociale nominative. La date retenue est celle du 1er janvier 2016. Que l’on cherche une solution pour éviter d’éventuels engorgements, je suis d’accord. Il y avait deux possibilités : soit repousser la date pour donner du temps aux entreprises, soit l’avancer, ce qui les met en difficulté. Et vous choisissez celle qui consiste à mettre les entreprises en difficulté en anticipant.

Pourquoi ne pas retenir celle que nous vous proposons, qui permet de répondre au souci d’éviter un engorgement tout en laissant du temps aux entreprises, qui auront d’autres contraintes avec la mise en place du compte de pénibilité, des mutuelles complémentaires santé et d’un certain nombre d’autres dispositifs ?

Il me paraît important de tenir compte du souhait des entreprises et de ne pas les mettre en difficulté par une éventuelle désorganisation.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n168.

M. Dominique Tian. Je crois que Mme Louwagie a bien résumé la situation et Jean-Pierre Barbier s’est livré à un exercice pédagogique qui a semé l’effroi chez nos collègues du parti socialiste, qui n’ont pas souvent vu comment fonctionnait une entreprise. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Qu’est-ce que vous en savez ?

M. Dominique Tian. Je parle de la plupart d’entre eux.

L’exercice pédagogique de M. Barbier est intéressant et nous sommes d’autant plus prudents que nous avons l’exemple du RSI, dont nous avons beaucoup parlé cette nuit. C’est un échec absolu, une catastrophe, des lettres recommandées sont envoyées trois ou quatre fois à des personnes qui sont traînées devant le tribunal parce que le RSI est incapable de calculer ce que doivent les uns et les autres, et le Gouvernement refuse de remettre à l’Assemblée un rapport pour savoir pourquoi cela dysfonctionne depuis pratiquement sept ou huit ans. Vous comprendrez donc que nous ayons assez peur que les entreprises ne supportent pas ce choc de simplification.

Hier, un médecin du parti socialiste a expliqué qu’à l’hôpital, on allait enfin cesser de remplir des fiches administratives pour soigner à nouveau.

M. Christian Paul, rapporteur. C’est le changement !

M. Dominique Tian. Peut-être que, pour les chefs d’entreprise, on devrait utiliser la même méthode. Ce ne serait peut-être pas mal qu’ils aient moins d’obligations administratives pour mieux gérer leur entreprise.

Il est donc vraiment très important d’avoir une année pleine et de repousser la date d’exécution de ce texte. Sinon, c’est un saut dans l’inconnu.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n385.

M. Bernard Accoyer. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces différents amendements ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je souhaite d’abord rappeler le pourquoi de cet article. M. Barbier nous a lu une liste impressionnante,…

M. Dominique Tian. C’est le monde réel !

Plusieurs députés du groupe UMP. C’est la vraie vie !

M. Gérard Bapt, rapporteur. …stupéfiante, j’imagine, pour qui la découvre pour la première fois. Mais avouez que cela ne date pas de juillet 2012.

M. Jean-Pierre Barbier. Ce n’est pas ce que j’ai dit.

M. Jean-Louis Borloo. Il n’a pas dit cela, il a dit que cela s’aggravait !

M. Gérard Bapt, rapporteur. La meilleure preuve, c’est que, sans doute saisi d’effroi lui aussi en voyant cette liste, M. Warsmann avait été à l’origine du vote de la loi relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives du 22 mars 2012. La DSN était appelée à se substituer progressivement à la quasi-totalité des déclarations sociales. L’objectif de la majorité de l’époque était donc bien la simplification.

Mme Véronique Louwagie. Nous ne le contestons pas.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Ce que le Gouvernement propose, pour désengorger à la fois les organismes gestionnaires de paie et les services qui seront confrontés à ces nouvelles formulations, c’est d’avancer la date de six mois, non pour les petites entreprises mais pour celles dont les cotisations sociales dépassent 50 000 euros. Je pense qu’il est dans la même logique de simplification du travail des entreprises que la majorité précédente.

L’échéance est encore retardée et, si l’administration constate que vos inquiétudes étaient justifiées, nous pourrons toujours la modifier.

Mme Véronique Louwagie et M. Dominique Tian. Faites-le maintenant !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Jusqu’à cette date, les entreprises ont la possibilité de se préparer. Elles l’avaient d’ailleurs depuis mars 2012 – nous sommes en octobre 2013.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a voté contre ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable. M. Door l’a lui-même reconnu, la simplification est nécessaire, comme l’a montré la présentation de M. Barbier, qui se voulait humoristique.

Mme Véronique Louwagie et M. Dominique Tian. Elle n’était pas humoristique !

Mme Marisol Touraine, ministre. Elle l’était dans sa forme !

C’est un grand chantier qu’a engagé le Gouvernement, pour éviter aux entreprises ces obstacles au quotidien. Les petites et les moyennes entreprises ne sont pas concernées par ces dispositions. Cela va donc dans le sens de ce que vous recherchez.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier.

M. Jean-Pierre Barbier. Nous ne contestons pas du tout le fait qu’une simplification soit nécessaire, nous souhaitons qu’il y en ait une. Mais, avec le compte pénibilité, vous allez imposer aux entreprises une contrainte supplémentaire et il faut leur laisser du temps. Qu’il y ait une date butoir, soit. Cela ne veut d’ailleurs pas dire que les entreprises ne passeront pas à la DSN avant cette date : si elles y trouvent leur bonheur, tant mieux. Mais laissons-les faire, ne les contraignons pas six mois avant.

J’entends dire que l’entreprise pourra s’adapter si l’on rapproche la date butoir. Nous parlerons dans un article ultérieur de l’hôpital. Quand on dit qu’il ne peut pas mettre en place la facturation individualisée parce que c’est trop compliqué, vous repoussez la date de 2016 à 2018, en faisant preuve d’une grande mansuétude. Par contre, pour l’entreprise, vous réduisez les délais.

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Il y a un élément qui m’échappe, monsieur le rapporteur. Le seuil de 50 000 euros est-il annuel ou est-ce une autre périodicité ?

M. Jean-Pierre Barbier. Si c’est annuel, c’est zéro !

Mme Véronique Louwagie. Si c’est 50 000 euros par an, cela fait 4 166 euros de cotisations par mois, ce qui correspond, si l’on prend des salaires moyens, à une entreprise de cinq salariés. Le dispositif concernera donc bien les petites entreprises. Je suis un peu perturbée par ce seuil, mais peut-être n’est-il pas annuel. En tout cas si c’est le cas, c’est une catastrophe.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. L’article ne prévoit pas de seuil, madame la députée. Les conditions d’application de ces dispositions figureront dans un décret qui fera l’objet d’une concertation avec les acteurs concernés. S’il apparaissait que le seuil envisagé par le rapporteur était trop bas, il pourrait être relevé. L’objet de cet article, c’est le principe, l’engagement dans une démarche de simplification et la mise en place du mécanisme pour une partie des entreprises concernées.

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Je vous remercie, madame la ministre, de ces explications. J’insiste sur le fait qu’un seuil de 50 000 euros par an serait une catastrophe pour les entreprises puisque cela concernerait les très petites entreprises. Il est important de déterminer un seuil qui soit cohérent avec vos propos.

(Les amendements identiques nos 49, 190 et 713 ne sont pas adoptés.)

(Les amendements identiques nos 168 et 385 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je pense, monsieur le rapporteur, que les amendements, nos 448, 449, 450, 451 et 452, sont rédactionnels.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Ils sont purement rédactionnels, en effet.

(Les amendements nos 448, 449, 450, 451 et 452, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n72.

M. Gérard Bapt, rapporteur. C’est un amendement qui vise à étendre à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon la déduction majorée de cotisations et contributions sociales d’origine légale et conventionnelle des particuliers employeurs applicable aux DOM. Il ne s’agit pas d’un oubli, la procédure est simplement plus longue pour ces trois territoires. Cet amendement nous a été proposé notamment par Mme Orliac.

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. J’avais présenté cet amendement en commission, pensant qu’il s’agissait d’un oubli. Je vous remercie, monsieur le rapporteur.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable, et le Gouvernement lève le gage.

(L’amendement n72, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n834.

Mme Marisol Touraine, ministre. Cet amendement porte sur le CESU et vise à accroître la diffusion de ce dispositif, qui paraît adapté aux besoins des particuliers employeurs et performant en termes de recouvrement.

Il s’agit d’assouplir en particulier la gestion des congés payés. Je vous rappelle que la modernisation et l’extension de ce dispositif font partie des projets annoncés lors du dernier comité interministériel pour la modernisation de l’action publique. Nous retrouvons là des enjeux dont nous avons déjà discuté, la modernisation et la simplification de l’action publique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement. Il clarifie la portée juridique du chèque emploi service universel, et, par ailleurs, permet aux employés à domicile de percevoir une indemnité de congés payés au moment de la prise de congés. À titre personnel, j’y suis favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Le CESU est déjà relativement simple. Sur la dématérialisation, nous sommes tout à fait d’accord, mais comment peut-on simplifier encore plus le fonctionnement du chèque emploi services alors que ceux qui l’utilisent sont très satisfaits de la simplicité avec laquelle cela fonctionne ? Par ailleurs, les dates d’entrée en vigueur de cette disposition sont-elles les mêmes que celles dont nous venons de débattre, ou donnez-vous un peu de temps au temps ?

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Nous sommes évidemment favorables à toute simplification, mais, selon l’exposé sommaire de l’amendement, l’indemnité de congés payés pourra être versée lors de la prise effective du congé, ce qui n’était pas possible jusqu’à présent et alourdit plutôt le dispositif. Je me trompe peut-être et j’attends donc vos précisions mais, si une telle possibilité était vraiment offerte, ce serait une complexification, et l’on sait que cela favorise le travail non déclaré et, finalement, nuit d’abord et avant tout aux salariés et ensuite aux organismes de protection sociale.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Il s’agit vraiment de faciliter les choses, aussi bien pour l’employeur que pour le salarié, en assouplissant la gestion des congés payés.

Aujourd’hui, lorsque l’employeur – notamment le particulier employeur – déclare son salarié par le biais du CESU, il n’a pas le choix de la manière dont il va rémunérer les congés payés. Ces derniers sont automatiquement prépayés.

M. Jean-Pierre Door. Oui, c’est vrai.

Mme Marisol Touraine, ministre. Autrement dit, mois après mois, le salaire est augmenté de 10 %. On ne peut donc pas donner le choix de verser les congés payés tout au long de l’année, en majorant le salaire de 10 %, ou de le verser au moment où le salarié prend ses congés. Nous voulons permettre à l’employeur de verser les congés payés pendant que le salarié les prend, et non en majorant les versements mois après mois. Le fait que cette possibilité, aujourd’hui, n’existe pas, dissuade certains employeurs, qui n’ont pas adopté le dispositif du CESU, de le faire, car ils veulent pouvoir continuer à payer leur salarié pendant qu’il est effectivement en congés, et non pas en majorant de 10 % sa rémunération mensuelle.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Sauf que, madame la ministre, ce n’est pas ce qui est écrit dans l’exposé sommaire de votre amendement, où il est question « d’offrir la possibilité au salarié » : c’est lui qui en fait la demande à son employeur, qui devra donc en réalité faire un chèque supplémentaire. Ce chèque sera-t-il un chèque CESU sur lequel seront prélevées automatiquement les charges sociales ? Cela ne nous paraît pas, à franchement parler, une mesure de simplification. Comme l’a excellemment montré tout à l’heure notre collègue Barbier, l’ennemi, en matière d’emploi, c’est aussi la complexité, et tout particulièrement en matière d’emploi à la personne, auquel, on le sait, recourent souvent les personnes âgées. Ces dernières, d’ailleurs, ne bénéficieront pas toujours des avancées prévues en termes de dématérialisation. Il s’agit d’un facteur de complexification qui ne nous paraît ni aller dans le sens de ce qui est annoncé par le Gouvernement, ni aller dans le sens d’une plus grand efficacité.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je ne suis pas certaine qu’il faille poursuivre le débat sur ce sujet. Avez-vous déjà déclaré un salarié par le biais du CESU ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Bernard Accoyer. Et vous ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Oui, bien sûr, c’est ce que fais.

M. Bernard Accoyer. Alors, nous sommes deux ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Marisol Touraine, ministre. Nous sommes sans doute davantage que deux. Il faudra donc un accord entre le salarié et son employeur pour passer à un dispositif qui consiste, non pas à avoir une majoration mensuelle de la rémunération, mais le versement des congés payés pendant la prise effective des congés. C’est une simplification, puisque tout cela se fera évidemment en ligne, comme c’est aujourd’hui le cas pour la déclaration générale.

M. Gérard Sebaoun. C’est une amélioration !

(L’amendement n834 est adopté.)

(L’article 23, amendé, est adopté.)

Après l’article 23

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n214 portant article additionnel après l’article 23.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement a pour objet d’intégrer dans le code de la Sécurité sociale la possibilité pour le cotisant d’être invité, en cas de litige portant sur des cotisations de Sécurité sociale, des majorations de retard ou sur la contribution sociale généralisée, à se faire entendre devant la commission de recours amiable, ce qui, aujourd’hui, n’est pas possible. On sait que les commissions de recours amiable se tiennent en présence des URSSAF, mais le cotisant n’est pas invité à se faire entendre devant lesdites commissions. La solution proposée consiste à revaloriser le rôle de ces commissions, de renforcer la procédure contradictoire et de permettre aux cotisants de se faire entendre dans le cadre de ces procédures. Cela aurait plusieurs avantages : outre le renforcement de la procédure contradictoire, ce serait un message fort adressé à nos concitoyens, qui ne peuvent aujourd’hui y participer, et cela donnerait une meilleure image des relations qui peuvent exister entre les URSSAF et les cotisants. Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable. Les commissions de recours amiable n’étant pas des juridictions, l’application du principe du contradictoire n’y est pas obligatoire. Par ailleurs, il s’agit de commissions composées paritairement, par deux administrateurs de l’organisme appartenant à la même catégorie que l’auteur du recours et deux administrateurs choisis parmi les autres catégories. Si le demandeur était présent, cela romprait cet équilibre.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Je veux réagir aux propos du rapporteur. Vous indiquez que ce n’est pas obligatoire – je veux bien l’entendre – et affirmez que cette commission n’est pas une juridiction. Mais si le cotisant y est entendu et apporte à leurs membres des éléments qui contribuent à la lisibilité et les éclairent, cela permettrait de ne pas enclencher, par la suite, des procédures contentieuses. On rendrait service à la justice tout en permettant une meilleure organisation de la procédure, un renforcement des liens entre ses acteurs. C’est pourquoi je ne comprends vraiment pas vos arguments.

(L’amendement n214 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n786.

Mme Marisol Touraine, ministre. C’est un amendement qui a pour objet de donner compétence aux URSSAF pour l’ensemble de la procédure de recouvrement, alors qu’en l’état actuel des textes, elles ne sont compétentes que pour le recouvrement dit amiable des pénalités éventuelles. Dès lors que les délais de paiement ne sont pas respectés, un recouvrement contentieux forcé devient nécessaire, qui relève alors des comptables du Trésor public. Il est proposé par cet amendement de permettre que cette procédure de recouvrement contentieux incombe également aux URSSAF.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a accepté cet amendement. Il s’agit d’une mesure de simplification évidente.

(L’amendement n786 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Rabault, rapporteure pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l’amendement n770.

Mme Valérie Rabault, rapporteure pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Cet amendement, qui a été adopté par la commission des finances, vise à ce que les entreprises ne puissent bénéficier des allégements de cotisations et de contributions sociales que si elles sont à jour de leurs déclarations. Si les paiements n’ont pu être effectués, les entreprises doivent pouvoir bénéficier d’un étalement de ces derniers, négocié avec les URSSAF. Cet amendement a déjà été discuté l’an dernier. Nous l’avons à nouveau évoqué avec les URSSAF, que nous avons auditionnées cette année, pour préparer l’examen du PLFSS. Dans une logique de responsabilisation et de donnant-donnant, il nous paraît extrêmement important de conditionner le bénéfice des allégements prévus au fait d’être à jour de ses déclarations, j’y insiste, et non de ses paiements – nous ne passons pas sous silence le fait que les entreprises puissent, à un moment donné, connaître des difficultés financières.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Madame la rapporteure pour avis, le Gouvernement partage pleinement votre préoccupation et votre objectif, sans être certain, toutefois, que les dispositions que vous présentez permettent d’aboutir à l’objectif recherché. Aussi vous demanderai-je de retirer votre amendement au bénéfice d’un travail en commun avec le Gouvernement, qui nous permette d’avancer. En effet, que constate-t-on ? Aujourd’hui, le niveau des restes à recouvrer est assez faible, puisque 1 % seulement des employeurs, dans l’Hexagone, sont soumis à ces procédures. Par ailleurs, des pénalités, des sanctions existent déjà. Lorsqu’un employeur n’est pas à jour ou – cela peut arriver – n’est pas en situation de conclure un plan d’étalement de ses cotisations, c’est souvent parce qu’il a connu des difficultés économiques telles qu’il est réellement dans l’incapacité de payer. Une remise en cause des allégements généraux ne ferait qu’accentuer les difficultés auxquelles il est confronté. Pour autant, il ne s’agit pas de fermer les yeux sur ces situations. Il nous semble qu’un travail pourrait être réalisé à ce sujet, puisque l’on constate par ailleurs des disparités sur le territoire. Nous pourrions peut-être réfléchir aux moyens de progresser sur la voie d’un meilleur recouvrement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission des affaires sociales avait accepté cet amendement émanant de la commission des finances, arguant du fait que l’apurement prend en compte le fait que les entreprises soient en difficulté et que le plan d’apurement permet de remplir la condition pour bénéficier des allégements généraux. Mais je laisse Mme Rabault répondre à la demande de Mme la ministre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault, rapporteure pour avis. Je remercie beaucoup Mme la ministre de ses explications et je la rejoins sur le fait que l’on constate d’importantes disparités sur le territoire national. Il ne s’agit pas d’avoir une vision très généraliste mais de porter plus d’attention aux difficultés, là où elles apparaissent. Avec l’accord et l’engagement de pouvoir travailler sur ce sujet, je retire cet amendement.

(L’amendement n770 est retiré.)

Article 24

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, inscrit sur l’article 24.

M. Bernard Accoyer. Cet article va également racler les fonds de tiroir. Ce projet de loi de financement est caractérisé par toute une série de mesures – 100 millions par ci, 150 millions par là, 600 millions ailleurs – qui visent à masquer l’absence de réformes de structure et qui n’empêchent pas, néanmoins, le déficit de rester important. Il s’agit ici des excédents de la Caisse d’assurance maladie des industries électriques et gazières. Nous sommes donc au cœur d’un dispositif qui est celui des régimes spéciaux, auxquels le Gouvernement ne veut pas toucher. Et l’on se rend compte que, finalement, cette paralysie, cet immobilisme s’est négocié entre les représentants des industries gazières – c’est-à-dire des syndicats de salariés – et le Gouvernement : on vous pique vos excédents et on vous laisse votre régime spécial. Madame la ministre, nous aimerions que vous démentiez formellement ce scénario et que vous nous annonciez ici, ce soir, votre intention d’aller vers une convergence de tous les régimes de retraite, même si j’ai bien noté qu’il s’agissait de verser l’excédent de 170 millions d’euros dans le tonneau des Danaïdes que constitue le déficit de la branche maladie. Nous voudrions que vous nous confirmiez ce soir votre intention de suivre ce que vous appelez la priorité de justice. Car la justice consiste tout simplement à faire converger les régimes de retraite du régime général – les travailleurs salariés du secteur privé –, le régime des fonctionnaires et les régimes spéciaux. Ce simple engagement serait certainement une avancée très importante dans cette direction, qui vous est, semble-t-il, chère, en tout cas que vous répétez souvent : celle de la justice.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet article est assez particulier, car le Gouvernement va prélever au profit de la Caisse nationale d’assurance maladie des excédents accumulés par un régime spécial. Certes, c’est à titre exceptionnel, mais cela ne règle pas le problème de fond de la multiplicité des régimes, que vient d’évoquer Bernard Accoyer. J’ai souligné plusieurs fois dans le débat le fait que la justice fiscale ne pouvait que s’accompagner de la justice sociale.

Je comprends que vous ayez le souci de remettre à un niveau égal les cotisations des indépendants et d’un certain nombre de Français. Mais la justice fiscale s’entend comme une égalité de traitement pour tous les Français, et donc pour toutes les prestations versées. Que l’on fasse payer un peu plus les personnes fortunées au prorata de leur patrimoine, on peut le comprendre. Mais il n’est pas admissible que les Français n’aient pas des prestations égales. On touche là au cœur du système, puisque certains Français bénéficient d’un régime spécial de prestations.

À la lecture de l’exposé des motifs, on est encore plus surpris : le régime spécial concerné dégageant structurellement des excédents, il a été décidé à l’issue d’échanges avec les partenaires sociaux du secteur, d’une part, d’augmenter le niveau des prestations et, d’autre part, de baisser les cotisations. Or, dans le même temps, on augmente les cotisations et on baisse les prestations pour d’autres régimes ; c’est tout de même ahurissant !

M. Bernard Accoyer. Eh oui !

M. Francis Vercamer. Si telle est votre conception de la justice sociale et fiscale, je n’y adhère pas du tout. C’est la raison pour laquelle je souhaitais intervenir sur ce sujet. Certes, l’article a simplement pour objet de transférer des fonds de manière conjoncturelle, et je peux comprendre qu’on puise dans les excédents d’une caisse pour abonder celle du régime général, au bénéfice de l’intérêt général. Toutefois, une réforme structurelle serait nécessaire. Nous y reviendrons après l’article 24, puisque j’ai déposé des amendements sur le sujet.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n513 tendant à la suppression de l’article 24.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet article nous pose problème. Il entend imposer un prélèvement de 65 % des réserves du compte actif de la Caisse d’assurance maladie des industries électriques et gazières. En contrepartie de ce prélèvement, il serait procédé à une revalorisation du niveau des prestations et à une baisse des cotisations des salariés et des employeurs. Nous sommes opposés à ce détournement d’excédents principalement constitué par les cotisations des salariés et des pensionnés.

La CAMIEG est un organisme de sécurité sociale de droit privé chargé d’une mission de service public. Elle couvre 514 000 personnes. Elle assure à la fois le traitement des prestations du régime général de l’assurance maladie et les prestations de la part complémentaire. Deux comptes distincts sont ouverts : un compte actif, pour les salariés, et un compte inactif, pour les pensionnés. Les recettes de ces deux comptes reposent sur des cotisations payées jusqu’à une première réforme en 2007 à parts égales entre salariés et pensionnés d’une part, employeurs d’autre part. Il existait également une cotisation employeurs sur les pensions ; elle a été supprimée en 2005. Ainsi, depuis 2007, les cotisations sont supportées à 83 % par les salariés et pensionnés et à 27 % par les employeurs.

Après la réforme que vous proposez et la baisse de 25 % des cotisations des salariés et des employeurs, la répartition serait de 87 % pour les salariés et pensionnés et de 23 % pour les employeurs. Par conséquent, la baisse des cotisations proposée par le Gouvernement en contrepartie de ce prélèvement va accentuer le désengagement des employeurs dans le financement de la CAMIEG. Parallèlement, limiter aux seuls salariés et employeurs la baisse des cotisations aboutira à ce que les retraités cotiseront plus dans le régime de Sécurité sociale, ce qui est inacceptable et contraire aux principes mêmes de la Sécurité sociale.

Mme la présidente. Veuillez conclure, chère collègue.

Mme Jacqueline Fraysse. Je conclus, madame la présidente. L’exposé des motifs précise que cette décision a été prise à l’issue d’échanges avec les partenaires sociaux du secteur. Or l’étude d’impact indique que le conseil d’administration de la CAMIEG n’a pas été consulté, par crainte de réactions négatives.

M. Rémi Delatte. C’est de la bonne concertation ! Cela évite les conflits ! C’est être diplomate !

M. Bernard Accoyer. Et qu’en est-il du régime spécial des retraites ? Ce n’est vraiment pas clair !

Mme Jacqueline Fraysse. Il semble donc que tout le monde ait été consulté sauf les principaux intéressés, ce qui est un argument de plus pour demander la suppression de cet article, qui n’a pas été géré avec les intéressés eux-mêmes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur cet amendement de suppression ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable. Madame Fraysse, l’ensemble des fédérations qui relèvent de cette caisse ont été reçues à plusieurs reprises par mon cabinet et celui du ministre du budget. Une concertation a donc bien été engagée.

Par ailleurs, je rappelle que c’est sous l’ancienne majorité qu’a été mis en place ce régime spécial des industries électriques et gazières. Le taux de cotisation qui a été fixé s’est révélé mal adapté et mal calibré, ce qui a généré des excédents et des réserves importants, qui ne se justifient pas. La Cour des comptes a d’ailleurs appelé l’attention à plusieurs reprises sur ce sujet. Pour reprendre la formule qui a été employée, c’est donc une mesure d’équité qui est ici proposée.

(L’amendement n513 n’est pas adopté.)

(L’article 24 est adopté.)

Après l’article 24

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements, nos 579, 575 et 577, portant article additionnel après l’article 24, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

Avant de donner la parole à M. Francis Vercamer, pour les soutenir, j’indique que sur les amendements nos 579 et 575, je suis saisie par le groupe de l’Union des démocrates et indépendants d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Vous avez la parole, cher collègue.

M. Francis Vercamer. Ainsi que je le disais il y a quelques instants, justice fiscale et justice sociale doivent aller de pair. Plusieurs fois, nous avons évoqué le problème de la progressivité de l’impôt et de la taxation en fonction des revenus et du patrimoine. Sur ce sujet, nous acceptons de considérer que ceux qui disposent d’un peu plus de moyens participent un peu plus à la solidarité nationale, sous réserve que les écarts ne soient pas trop importants.

Cependant, le fond du problème c’est que les Français acceptent d’être taxés ou imposés à condition d’être traités de manière équitable, et de manière égale. Pour les prestations sociales, un certain nombre de régimes coexistent avec des prestations et des cotisations différentes. Pour des raisons de justice sociale, qui va de pair avec la justice fiscale, il me paraît important de réformer ce système de manière structurelle, de façon à éviter que certains régimes soient structurellement bénéficiaires ou excédentaires, comme celui dont il est question à l’article 24, alors que le régime général, sur lequel repose la solidarité nationale, est déficitaire. Et l’on procède ensuite à des tours de passe-passe entre les caisses en diminuant ou en augmentant les prestations des uns et des autres en fonction des besoins ou au gré du temps.

Il me paraît important que les Français soient tous traités de la même façon, car c’est à cette condition qu’ils accepteront de financer le régime de solidarité.

Le premier amendement, n579, vise à mettre en extinction les régimes spéciaux. À partir du 1er janvier 2015, tous les entrants seraient affiliés au régime général et bénéficieraient des mêmes prestations en s’acquittant de cotisations proportionnelles aux revenus, à condition d’augmenter un certain nombre de cotisations dans le cadre de la future réforme du financement de la protection sociale. Quant à ceux qui relèvent de régimes spéciaux aujourd’hui, ils continueraient d’y être affiliés, afin de ne pas changer les règles du jeu en cours de route et d’éviter la rétroactivité, contrairement à ce qu’a fait le Gouvernement avec l’épargne.

Le deuxième amendement, n575, vise à ce que, au 31 décembre 2017, l’ensemble des régimes spéciaux convergent vers le régime général, et ce dans un souci de simplification et de rationalisation. Il s’agit donc d’aligner tous les régimes. Cet amendement diffère du précédent ; je pourrais comprendre qu’on vote l’un et pas l’autre, ou l’autre mais pas l’un. Il est également possible d’accepter les deux.

Le troisième amendement, n577, est un amendement de repli. Dans le cas où les deux propositions précédentes seraient rejetées, ce dont je doute puisque tout le monde parle de justice sociale et de justice fiscale dans cet hémicycle, je propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport permettant de déterminer les conditions, les coûts et les conséquences de la mise en extinction progressive de ces régimes. Je souhaiterais en effet que le Gouvernement nous indique comment il entend rapprocher les régimes dans le cadre d’une véritable réforme structurelle de la protection sociale en France, non seulement en termes de financement, mais également en termes de prestations.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable. Il est inutile de refaire dans un rapport un débat qui a déjà eu lieu à l’occasion de l’examen du projet de loi sur la réforme des retraites. Sur l’initiative de la précédente majorité, les régimes spéciaux ont déjà fait l’objet en 2008 d’une réforme, qui est en cours de montée en charge.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable, pour les mêmes raisons : nous avons eu ce débat pendant la discussion sur le projet de loi de réforme des retraites.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Je précise que je ne parle pas seulement du régime des retraites, mais bien de la Sécurité sociale. Je souhaite simplement que tous les Français bénéficient du même régime de prestations sociales. Par exemple, certains ne bénéficient d’aucun jour de carence tandis que d’autres en ont sept. Et je pourrais donner beaucoup d’autres exemples de prestations qui diffèrent selon les régimes et les statuts.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n579.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants52
Nombre de suffrages exprimés52
Majorité absolue27
Pour l’adoption14
contre38

(L’amendement n579 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n575.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants52
Nombre de suffrages exprimés52
Majorité absolue27
Pour l’adoption14
contre38

(L’amendement n575 n’est pas adopté.)

(L’amendement n577 n’est pas adopté.)

Article 25

Mme la présidente. La parole est à Mme Paola Zanetti, inscrite sur l’article.

Mme Paola Zanetti. À travers cet article 25, qui prévoit de prolonger de 2014 à 2017 l’avance de trésorerie consentie par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale à la Caisse autonome nationale de la Sécurité sociale, dans la limite de 250 millions d’euros, il ne s’agit pas pour notre majorité de reconduire simplement une ligne de trésorerie à un régime que d’aucuns qualifieraient, là encore, de régime spécial. Non, pour notre majorité, il s’agit de tenir la parole politique qui a été donnée à la corporation minière.

Madame la ministre, je tiens à rappeler que le 7 août 2012, vous vous êtes engagée, comme l’avait fait d’ailleurs le Premier ministre, à maintenir le régime spécifique de sécurité sociale pour les mineurs jusqu’au dernier affilié.

Cet engagement, c’est la reconnaissance que portent le groupe socialiste et le Gouvernement à l’endroit de la corporation minière, qui a contribué à faire l’essor économique de notre pays, et des mineurs, que nous avons souvent qualifiés comme étant les premiers ouvriers de France. Cet engagement, c’est aussi la reconnaissance de la gauche à l’endroit de la corporation professionnelle qui a connu les taux les plus importants d’accidents du travail, de maladies professionnelles, d’invalidité et de mortalité.

Et à ce sujet, je ne peux parler que de la gauche car, rappelons-le, le 30 août 2011, en catimini, le gouvernement de François Fillon est venu malgré les promesses porter un coup de grâce aux mineurs en fixant la disparition de ce régime au 31 décembre 2013.

Ce régime minier n’est pas spécial ; il est spécifique, il est unique, il est singulier. Il est singulier car il est l’héritage emblématique de la solidarité et de la justice telles qu’elles s’expriment dans notre pays.

Il est spécifique car il est surtout un réseau de soins de proximité unique, ouvert à toute la population, fondé sur une médecine salariée et qui pratique déjà le tiers payant pour tous. C’est un réseau de soins qui peut dès aujourd’hui, avec ses centres santé et ses hôpitaux, apporter une réponse complémentaire aux politiques de santé publique, notamment au sein des territoires pour réduire les inégalités d’accès aux soins.

Cela dit, pour préserver ce caractère spécifique et singulier, encore faut-il le sécuriser. C’est le travail que vous avez engagé, madame la ministre, et qui devra encore se poursuivre dans le cadre de l’élaboration de la prochaine convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la Caisse autonome de la sécurité sociale dans les mines pour les quatre ans qui viennent.

Le régime minier, tout le monde en fera le constat, connaît de réelles difficultés. Une nouvelle organisation doit être mise en place pour assurer sa pérennité, dans le strict respect de la garantie des droits spécifiques des mineurs et de leurs ayants droit, jusqu’au dernier affilié.

C’est tout le sens de l’amendement que vous allez nous présenter dans quelques instants, madame la ministre, lequel vise à sécuriser la situation des salariés affiliés au régime en leur assurant la continuité de leurs droits et de leur statut. Cet amendement représente donc un acte nouveau et fort qui conforte l’engagement pris par la gauche et par le Gouvernement de maintenir le régime minier jusqu’au dernier affilié ; le groupe socialiste le soutiendra naturellement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. Sur l’article 25, je suis saisie d’un amendement n787 rectifié.

La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.

Mme Marisol Touraine, ministre. Madame Zanetti, je m’adresse plus particulièrement à vous, puisque vous venez de prendre la parole et que vous êtes personnellement très engagée pour garantir une perspective au régime minier. Je salue également l’ensemble des parlementaires qui se sont impliqués pour faire en sorte que la spécificité de cette caisse autonome de sécurité sociale des mines soit reconnue. En effet – vous l’avez fort bien dit, madame la députée –, c’est une partie de notre histoire, de notre patrimoine économique et industriel qui est en jeu. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement s’est mobilisé dès son arrivée aux responsabilités pour faire en sorte que des perspectives soient garanties pour ce régime, alors même que le précédent gouvernement avait prévu, comme vous l’avez rappelé, sa disparition pure et simple.

C’est ainsi que, au-delà de l’abrogation des mesures qui étaient préoccupantes, une concertation s’est mise en place ; elle a abouti il y a quelques jours. Cette concertation s’est faite dans un cadre large, sous la responsabilité du préfet Ritter. Vous avez participé à cette concertation, Mme Zanetti, ainsi que Michel Lefait. J’ai moi-même rencontré il y a quelques jours l’ensemble des fédérations syndicales représentatives de ce régime.

Je veux le dire très fermement : pour nous, ce régime doit vivre et garantir les droits de ses affiliés jusqu’au dernier mineur. C’est un principe auquel nous ne dérogerons pas. L’article dont nous débattons permet d’inscrire une perspective dans le temps, d’en finir avec les mesures qui se reproduisent année après année. Dans le cadre de cet amendement, il s’agit de tirer les conséquences du fait que le statu quo n’est pas possible, ce que chacun reconnaît aujourd’hui. Nous voulons garantir l’avenir de ce régime, mais, dans le même temps, nous devons reconnaître que des évolutions doivent intervenir, notamment pour ce qui est de l’offre de soins. Nous devons évidemment tenir compte de la réalité des besoins de la population, mais il faut aussi adapter l’offre de soins pour qu’elle soit plus efficace, plus pertinente et qu’elle prenne mieux en compte les besoins des mineurs.

Dans cette perspective, certains salariés pourront être amenés à changer de travail. Se posera alors la question de leur affiliation. Le présent amendement vise à leur donner un droit d’option, c’est-à-dire à respecter la volonté des mineurs : ceux qui voudront rester rattachés au régime des mines le pourront, mais ceux qui, prenant en considération le fait que ce régime est en voie d’extinction, même si le terme en est lointain, souhaiteraient changer de régime à l’occasion d’une évolution professionnelle, pourront le faire dans de bonnes conditions.

En offrant ce droit d’option, le Gouvernement tient à manifester son attention aux mineurs, sa volonté d’accompagner les évolutions nécessaires et de faire en sorte que la transition qui est engagée se déroule dans les meilleures conditions possible. Nous avons là de belles perspectives et je vous remercie encore une fois, madame Zanetti, de même que M. Lefait pour la contribution active que vous avez apportée à ce travail important pour l’ensemble des mineurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(L’amendement n787 rectifié, accepté par la commission, est adopté.)

(L’article 25, amendé, est adopté.)

Article 26

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l’article 26.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet article liste les organismes habilités à recourir à des ressources non permanentes en 2014 et plafonne leur montant. Pour l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, ce plafond d’emprunt est relevé significativement, puisqu’il est porté à 34,5 milliards d’euros pour 2014. Or l’ACOSS n’a pas vocation à porter la dette à long terme de la Sécurité sociale. Je me demande donc pourquoi le plafond d’emprunt est relevé et je souhaiterais, madame la ministre, que vous puissiez nous éclairer sur ce point.

Je regrette que M. le ministre délégué chargé du budget ne soit plus parmi nous, car il aurait sans doute pu répondre à ma question concernant les recettes de la Caisse d’amortissement de la dette sociale. Je me demande en effet pourquoi cet organisme ne peut pas emprunter directement auprès de la BCE, via la Caisse des dépôts et consignations, ce qui lui permettrait de bénéficier de taux d’intérêt très inférieurs à ceux qu’elle subit actuellement. J’ai déjà posé la question hier soir, mais le ministre s’était absenté. Il devait m’en parler aujourd’hui, mais ne l’a pas fait. Je réitère ma demande, parce que les taux d’intérêt sur les marchés financiers sont très élevés et pénalisent cette caisse. Selon moi, la Caisse des dépôts devrait pouvoir recevoir les prêts à taux très bas – 1 % – qu’offre la BCE aux banques privées et en faire bénéficier la CADES.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n791.

Mme Marisol Touraine, ministre. Madame Fraysse, je rappellerai votre préoccupation au ministre délégué chargé du budget. Nous vous ferons une réponse écrite. Selon moi, l’explication doit tenir au fait que les statuts de la BCE, fixés par les traités européens, ne l’autorisent pas à prêter à des organismes publics. Cependant, une réponse plus précise vous sera fournie.

Pour ce qui est de l’amendement n° 791, il s’agit de tenir compte des mesures qui ont été prises concernant les retraites agricoles, qui amènent à revoir le plafond du régime des exploitants agricoles. La mesure permettra à ce régime de négocier ses emprunts dans de meilleures conditions.

(L’amendement n791, accepté par la commission, est adopté.)

(L’article 26, amendé, est adopté.)

Vote sur l’ensemble de la troisième partie

Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble de la troisième partie du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014.

(L’ensemble de la troisième partie du projet de loi est adopté.)

Mme la présidente. Avant d’aborder la quatrième partie du projet de loi, je suspends la séance.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit heures dix.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Quatrième partie

Mme la présidente. Nous abordons la quatrième partie du projet de loi, concernant les dispositions relatives aux dépenses pour l’année 2014.

À la demande du Gouvernement, la discussion de la quatrième partie commencera par l’article 65 jusqu’aux amendements portant article additionnel après l’article 68. Nous reprendrons ensuite aux amendements portant article additionnel avant l’article 27.

Article 65

Mme la présidente. Sur l’article 65, je suis saisie de six amendements rédactionnels de M. Gérard Bapt, nos 315, 316, 314, 369, 318 et 320.

(Les amendements nos  315, 316, 314, 369, 318 et 320, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt pour soutenir l’amendement n370.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé, les donneurs d’ordre sont soumis à une obligation de vigilance vis-à-vis de leurs sous-traitants. Une attestation de vigilance est remise au donneur d’ordre par l’organisme de recouvrement compétent. Or, le texte ne mentionne pas les caisses du régime social des indépendants – RSI – au nombre des organismes compétents pour délivrer une telle attestation. Aussi cet amendement tend-il à le mentionner expressément.

(L’amendement n370, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 65, amendé, est adopté.)

Article 66

(L’article 66 est adopté.)

Article 67

Mme la présidente. Sur l’article 67, je suis saisie d’un amendement rédactionnel de M. Gérard Bapt, n354.

(L’amendement n354, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement de coordination de M. Gérard Bapt, n360.

(L’amendement n360, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 67, amendé, est adopté.)

Article 68

Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements rédactionnels, nos 409 rectifié, 407, 359 rectifié, 364, 365, 367 et 376, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

(Les amendements nos 409 rectifié, 407, 359 rectifié, 364, 365, 367 et 376, acceptés par la commission et le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L’article 68, amendé, est adopté.)

Après l’article 68

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n217.

M. Patrick Hetzel. Cet amendement a pour objectif de limiter la durée des contrôles effectués par les URSSAF dans les petites entreprises dont le chiffre d’affaires est peu important. Vous le savez en effet, un contrôle perturbe naturellement une entreprise, et il convient aussi d’éviter un fractionnement de la vérification, surtout pour les petites entreprises qui, dans ce cas, sont particulièrement gênées. Une telle limite existe d’ailleurs en matière fiscale ; il serait pertinent qu’une procédure identique existe en matière sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. Il serait excessif de limiter les pouvoirs de contrôle des URSSAF en les faisant cesser à l’issue du délai prévu.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n217 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n346.

Mme Bérengère Poletti. Je voudrais avant toute chose constater que la plupart des amendements au PLFSS qui faisaient suite aux travaux conduits par la MECSS – et dont certains ont d’ailleurs été adoptés en commission – ont été rejetés par la commission des finances, qui les a considérés comme des cavaliers sociaux. La situation à cet égard est, semble-t-il, devenue beaucoup plus contraignante cette année. Je le regrette, car les propositions de la MECSS concernant la question des indemnité journalières et des arrêts de travail ont donné lieu à un vote unanimement favorable de ses membres, ainsi qu’à une autorisation – unanime également – de publication par la commission. Elles comportaient de nombreuses possibilités de mieux connaître et de mieux contrôler les arrêts de travail et les indemnités journalières.

Le présent amendement fait donc suite aux travaux de la MECSS. Il vise à privilégier des contrôles plus ciblés, en prévoyant d’assurer une transmission systématique des caisses primaires vers les services médicaux, des arrêts pour lesquels une obligation administrative n’a pas été respectée, pour un contrôle médical, et de concentrer l’activité des services médicaux de l’assurance maladie sur le contrôle médical sur examen.

Ces dispositions ont déjà été expérimentées dans des caisses primaires, notamment celle de Bayonne, où des référentiels ont été établis concernant les types d’arrêts de travail en fonction des pathologies. Tous les cas de figure non prévus dans les référentiels peuvent faire l’objet de contrôles médicaux, qui auraient lieu de manière plus précoce, s’agissant notamment de l’évaluation thérapeutique de l’arrêt.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement a été repoussé par la commission. Il vise à rendre systématique l’évaluation thérapeutique de l’arrêt de travail dans les trois cas suivants : lorsque la durée de l’arrêt prescrit apparaît anormalement élevée – le caractère systématique est alors déjà prévu par l’article L. 315-1 du code de la Sécurité sociale ; lorsque les horaires de sortie ne sont pas respectés – ce qui signifie que le cas a été constaté et que le versement de l’indemnité journalière est alors purement et simplement suspendu ; enfin, sur simple signalement de l’employeur – cela consisterait à mettre le contrôle médical de la Sécurité sociale à disposition de l’employeur. C’est pour toutes ces raisons, particulièrement la deuxième, que la commission a repoussé l’amendement. Cela étant dit, rien n’empêche naturellement les caisses primaires et la CNAM d’établir les référentiels auxquels vous faisiez allusion, qui sont les bienvenus.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Mme Poletti a raison : chacun conviendra que la MECSS fait du bon travail, et ce depuis des années. Elle est coprésidée par un membre du groupe socialiste et un membre du groupe UMP, et ses travaux sont acceptés à l’unanimité. Il est donc regrettable que ses recommandations ne soient pas suivies.

M. Denys Robiliard. Elles le sont !

M. Dominique Tian. Je reviens sur le petit absentéisme et le jour de carence. Sur ce point, les résultats sont spectaculaires.

M. Patrick Hetzel. Eh oui !

M. Dominique Tian. Le Gouvernement va faire une grave erreur en supprimant le jour de carence. Cela coûtera 80 millions d’euros de plus aux hôpitaux publics. Ce n’est pas nous qui le disons, mais les directeurs de ces hôpitaux ! Ces 80 millions vont être donnés aux sociétés d’intérim et creuseront le déficit des hôpitaux publics, ce qui est inacceptable. De surcroît, ce ne serait que justice que les fonctionnaires participent un peu à l ’effort national.

M. Gérard Sebaoun. Cela n’a rien à voir !

M. Dominique Tian. Voyez les arrêts de travail dans les collectivités territoriales : le tableau est impressionnant ! L’ensemble de la presse, une presse très sérieuse, Les Échos par exemple, en a d’ailleurs fait état. La tendance est à une baisse très forte du nombre de courts arrêts de travail. Une étude montre notamment qu’entre 2011 et 2012, la part des arrêts d’une journée a chuté de 43 % et celle des arrêts de trois jours de 18 % dans la fonction publique territoriale ! Voilà des résultats extrêmement importants ! Chacun sait que la fonction publique territoriale dérapait chaque année d’un ou deux jours supplémentaires d’arrêts de travail par an. Les agents de la fonction publique hospitalière et ceux de la fonction publique d’État, notamment les enseignants, n’échappaient pas non plus à cette tendance lourde. La situation en Allemagne est sans comparaison possible : les arrêts de travail y sont beaucoup moins nombreux qu’en France, et les gens n’y sont pas moins bien soignés ou moins bien traités pour autant.

La suppression de ce jour de carence est hélas un très mauvais signal pour les finances publiques, même si l’on comprend bien que cela arrange Mme Lebranchu dans sa négociation avec les syndicats. Ce n’est pas une décision responsable.

(L’amendement n346 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n347.

Mme Bérengère Poletti. Cet amendement vise à exercer une contrainte plus forte pour déclencher le contrôle lorsque l’arrêt maladie peut sembler anormal ou peut présenter des anomalies par rapport aux référentiels. Il est donc proposé de remplacer, à l’article L. 315-2-1 du code de la Sécurité sociale, les mots : « peut convoquer » par le mot : « convoque ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. Transformer la possibilité de convoquer en obligation pose le problème de la définition de la dépense élevée justifiant la convocation.

M. Dominique Tian. Mais non !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Dans le cas d’une hémophilie, par exemple, comment allez-vous déterminer si une dépense est trop élevée ou pas ?

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Il ne faut pas que l’on se cache derrière son petit doigt. S’appuyant sur les travaux de la MECSS, Mme Poletti a estimé qu’il y a beaucoup d’arrêts de travail et beaucoup d’indemnités journalières, dont on constate en effet l’explosion chaque année. D’autre part, nous avons également constaté une fréquence accrue des arrêts de travail. Certaines personnes, en particulier, sont des usagers des arrêts de travail. Il est donc normal et logique qu’un service médical de l’assurance maladie puisse contrôler ces arrêts de travail.

Il n’est naturellement pas question, monsieur le rapporteur, de contrôler les personnes qui ont des pathologies graves, connues et reconnues. En revanche, il faut contrôler celles et ceux qui abusent de ces arrêts de travail, parfois même sur deux ou trois jours. Un seul exemple : la semaine dernière, l’un des employés de ma mairie est allé voir la personne responsable des ressources humaines pour lui demander à combien de jours d’arrêt de travail il avait droit cette année ! Quand vous entendez une chose pareille, vous vous retournez et vous faites la réponse suivante : « À rien ». (Murmures d’approbation sur les bancs du groupe UMP.)

Face à ces arrêts de travail exagérés, le fait de prévoir que le service médical – et non l’administration – convoque l’intéressé paraît logique, plutôt que de n’en faire qu’une simple possibilité.

Mme la présidente. La parole est à M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Je passe sur les préjugés qui s’expriment au fil de cette discussion pour en venir directement à la mesure proposée. Je rappelle qu’en droit, l’indicatif est impératif. Il faudrait donc que les services médicaux procèdent à des convocations systématiques ; ils n’en ont pas les moyens.

M. Dominique Tian. Qu’on les leur donne !

M. Denys Robiliard. Nous faisons un travail de simplification, comme vous nous le demandez d’ailleurs à longueur de temps, et voilà que vous voulez tout compliquer ! Laissez donc un peu de souplesse et de capacité de discernement aux services.

M. Jean-Pierre Door. La souplesse ne marche pas !

M. Denys Robiliard. Surtout, n’adoptez pas dans la loi une disposition qui ne pourra de toute façon pas être mise en œuvre !

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. On ne peut pas dire cela. Il va de soi que le contrôle ne se fera pas systématiquement. Il ne se fera que dans les cas qui semblent anormaux. Des expérimentations ont déjà eu lieu à Bayonne et dans la Marne, et elles ont donné de bons résultats. En effet, il arrive que certaines choses se fassent de manière anormale : certains médecins prescrivent beaucoup, certains patients sont très souvent malades. Vous ne pouvez pas tout refuser en même temps : refuser qu’il y ait des sanctions financières – ce que je peux comprendre car il serait injuste de les appliquer systématiquement à tout le monde au seul motif que l’on ne peut pas gérer les situations d’abus – et refuser d’autre part les contrôles qui servent à dépister ces mêmes situations d’abus !

M. Denys Robiliard. Mais nous ne les refusons pas puisqu’ils sont possibles !

Mme Bérengère Poletti. Les gens qui sont arrêtés pour des raisons médicales patentes et normales comprennent tout à fait que des contrôles puissent s’exercer. Vous ne pouvez tout de même pas tout accepter : il s’agit d’argent public ! Je ne comprends pas votre raisonnement. Ce n’est pas jeter l’anathème sur les gens que d’exercer un contrôle sur une dépense visiblement mal maîtrisée, qui augmente et qui montre qu’il existe à l’évidence des situations d’abus !

M. Gérard Sebaoun. Nous ne voulons pas que le contrôle soit impératif, voilà tout.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement est fermement et fortement engagé dans la lutte contre la fraude. Il n’est pas question d’accepter que par des comportements certes limités, mais néanmoins contraires au droit et à l’équité, on jette la suspicion sur l’ensemble de notre système de Sécurité sociale. Ce ne serait pas acceptable et le Gouvernement ne l’acceptera pas ; telle est sa position. Le Gouvernement est engagé dans une lutte contre la fraude.

Est-ce que la mesure que vous proposez est une mesure efficace et tenable ? La réponse est non. En effet, à utiliser les moyens sur l’ensemble des arrêts maladie, nous disperserions les ressources dont nous disposons puisque, contrairement à ce que vous dites, votre amendement aboutirait à des contrôles systématiques.

Mme Bérengère Poletti. Mais non !

Mme Marisol Touraine, ministre. L’assurance maladie a engagé un processus d’amélioration des contrôles auxquels elle procède, et le Gouvernement y veille très attentivement. Il s’agit cependant de cibler les situations dont nous savons qu’elles sont, plus que d’autres, génératrices d’abus. C’est dans cette perspective que nous continuons à lutter contre une fraude qui, je le répète, est inacceptable.

Mme Bérengère Poletti. C’est incroyable !

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Je crois au contraire que l’amendement de Mme Poletti est très précis.

M. Patrick Hetzel. Évidemment !

M. Dominique Tian. Il cible en effet certaines situations. Il ne s’agit aucunement d’une mesure générale qui obligerait les organismes de la Sécurité sociale à vérifier chaque arrêt maladie, car chacun comprend bien que ce n’est pas possible.

Soyons de bonne foi : dans la fonction publique territoriale, les arrêts de travail ont augmenté de 14 % depuis 2007 : voilà les statistiques ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Les arrêts de travail de plus de quinze jours ont augmenté de 18 % depuis 2007 également. Il y a donc bien un glissement.

Mme Poletti propose de cibler les sujets, et elle a raison – c’est d’ailleurs préconisé dans le rapport de la MECSS, adopté à l’unanimité. Tout le monde sait très bien comment cela se passe : c’est très souvent le vendredi et le lundi, avant et après les vacances scolaires. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Toutes les statistiques le montrent, il s’agit d’arrêts réitératifs et de médecins qui hyperprescrivent !

Je disais lors de la discussion générale que tous les journalistes se régalent avec cela : ils vont voir des médecins avec des caméras cachées et demandent des arrêts de travail. Il est très facile d’en obtenir dans notre pays.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Ça dépend des médecins !

M. Dominique Tian. On sait parfaitement quels sont les médecins hyperprescripteurs et quels sont les usagers qui sont systématiquement arrêtés. Quand vous amenez vos enfants à l’école, vous savez quel instituteur ou quel professeur ne sera pas là au moment des vacances, parce que c’est archiconnu ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)



En tant qu’élu local, Jean-Pierre Door l’a dit, vous connaissez précisément les fonctionnaires qui abusent de ce genre d’arrêt de travail.

M. Gérard Sebaoun. Assez ! Assez !

M. Dominique Tian. Il ne faut pas caricaturer les propos de Mme Poletti. Elle dit que, dans un certain nombre de cas, il est normal que celui qui dirige la collectivité locale, notamment, prenne contact avec les organismes de Sécurité sociale pour dire que telle personne abuse et que ce n’est pas normal. Voilà, c’est tout. Il ne faut pas caricaturer.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas croyable d’entendre cela !

M. Dominique Tian. Le jour de carence avait permis de faire des économies, et vous allez le supprimer. Avec cet amendement, nous voulons au moins que l’on permette aux organismes de Sécurité sociale d’être saisis et de mener obligatoirement une enquête quand les gens abusent du système.

(L’amendement n347 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n349.

Mme Bérengère Poletti. Il s’agit d’une mesure concernant le déclenchement du contrôle médical ciblé sur les arrêts longs. Cette mesure est plutôt dans l’intérêt des assurés puisqu’il s’agit de favoriser la réinsertion professionnelle de ceux qui souffrent d’une pathologie longue. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)



Arrêtez de diaboliser nos discours quand nous parlons de cela ! C’est incroyable ! Il y a des sujets tabous ici ? C’est quand même invraisemblable !

M. Gérard Sebaoun. Ce qui est invraisemblable, c’est ce que vous dites !

Mme Bérengère Poletti. Imposer des tabous, ce n’est pas le rôle des politiques !

M. Bernard Accoyer. Oui, est-ce qu’on a le droit de parler ?

M. Gérard Sebaoun. Absolument !

Mme Jacqueline Fraysse. On a aussi le droit de la fermer.

Mme la présidente. Madame Poletti, vous avez la parole. Poursuivez !

Mme Bérengère Poletti. Quand des personnes sont en arrêt maladie de longue durée, on sait fort bien que si cet arrêt dure très longtemps, leur réinsertion professionnelle est plus compliquée. Actuellement, on met en place un contrôle médical qui est un contrôle de la santé du patient, ciblé, à partir de trois mois. Mais on constate que, parfois, dans certaines pathologies, c’est un peu tard et qu’il vaut mieux s’y prendre plus tôt.

Nous proposons donc de remplacer le mot : « trois » par le mot : « deux », pour déclencher ce contrôle un peu plus tôt.

M. Dominique Tian. Mais oui, il faut donner des signaux !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement a été rejeté par la commission. Pourquoi deux ? Pourquoi pas moins ? Ou un peu plus ? Deux et demi ? Cela n’a pas de sens.

Mme Bérengère Poletti. C’est mesquin !

M. Bernard Accoyer. Incroyable !

M. Dominique Tian. Que faites-vous du rapport de la MECSS ?

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Monsieur le rapporteur, vous ne pouvez pas nous dire que cet amendement a été « rejeté par la commission », et que, par conséquent, on l’écarte d’office. Dans ce cas, ce n’est plus la peine de nous réunir dans cet hémicycle. Tout se passe en commission et il n’y a plus lieu de débattre ici, en séance publique ! S’agissant de cet amendement, en tout cas, votre argument ne tient pas.

(L’amendement n349 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 186, 195, 344 et 408.

La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n186.

M. Dominique Tian. Dans le rapport de la MECSS sur la fraude sociale, qui a été signé à l’unanimité, il y a un certain nombre de préconisations, qui ont ensuite été quasiment toutes rejetées.

Le problème, c’est que l’on peut se demander si le Parlement sert à quelque chose, monsieur le rapporteur. Est-il nécessaire de faire des centaines d’auditions, pendant un an, tous les jeudis matins, de se déplacer à droite et à gauche et d’adopter des conclusions à l’unanimité pour, ensuite, ne pas en tenir compte en séance publique ? Il y a là un vrai problème.

En outre, ces sujets ne devraient pas faire l’objet d’un clivage. Nous avons examiné la question de la fraude. Nous aurions pu, les uns et les autres, en faire des tonnes en disant que vous n’étiez pas assez efficaces, etc. Nous nous sommes abstenus d’agir ainsi, parce que les quelques mesures que vous avez votées vont plutôt dans le bon sens, même si ce n’est pas suffisant.

Madame la ministre, vous dites votre volonté de lutter avec force contre la fraude. À l’UMP, cela nous va presque bien. Nous avons été tellement caricaturés que nous nous disons aujourd’hui qu’il y a tout de même un petit espoir : « Ils parlent de lutte contre la fraude, c’est déjà pas mal ». Donc, nous n’en faisons pas trop. Mais, s’agissant du rapport de la MECSS et de l’amendement défendu par Mme Poletti, c’est presque insultant !

Nous avons passé des mois à travailler, nous avons adopté des conclusions à l’unanimité et nous ne vous demandons que des mesures portant sur des points de détail.

Vous savez tous individuellement que ce que nous disons est vrai. Vous êtes tous élus de collectivités locales et vous voyez cela tous les jours : les tire-au-flanc, ceux qui abusent du système, les médecins qui prescrivent trop, les fonctionnaires qui en abusent, ceux qui ne sont jamais là le vendredi, ceux qui sont toujours blessés le lundi ! Vous savez tout cela ! Vous n’allez pas désespérer les fonctionnaires ! Vous voyez très bien que ce n’est pas vrai ! Par conséquent, vous ne devriez pas en faire un sujet politique.

Le système va très mal, la Sécurité sociale ne peut plus payer, on rembourse le moins possible. Faites en sorte qu’il y ait au moins un peu de justice entre les uns et les autres ! Ce n’est pas de la surenchère.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour soutenir l’amendement n195.

M. Jean-Pierre Barbier. Je vais demander à nos collègues de la majorité d’éviter de caricaturer tout ce que nous disons. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Il n’est pas question de stigmatiser ceux qui sont en arrêt de travail. Ce n’est pas du tout le sujet.

M. Denys Robiliard. Ah non ?

M. Jean-Pierre Barbier. Nous avons un système remarquable, qui permet à la solidarité nationale de s’exprimer. Quand quelqu’un est malade, il est pris en charge. C’est un système remarquable, je le répète, et nous devons tout faire pour le préserver.

Ce que nous disons, tous les gestionnaires de collectivités vous le diront. Je reprends cet exemple : dès lors qu’il y a eu un jour de carence dans la fonction publique, les arrêts de travail ont baissé. C’est un fait, et il n’est pas contestable.

Pour le reste, la confiance n’exclut pas le contrôle. Cela aussi est important.

Concernant l’amendement que je propose, madame la ministre, je pense que vous serez d’accord avec moi : on ne peut pas contrôler tous les arrêts de travail. Cet amendement propose simplement que la CNAM, la MSA, la caisse des indépendants et les sociétés de contrôle puissent travailler de manière coordonnée, croiser leurs informations et chasser le fraudeur, celui qui abuse et met en péril le système. Elles doivent pouvoir faire des contrôles ciblés.

Mon amendement propose la coordination de l’ensemble des acteurs qui vont contrôler les arrêts maladie. Il n’est absolument pas question d’attaquer tous ceux qui sont en arrêt maladie, mais simplement de cibler ceux qui abusent.

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n344.

Mme Bérengère Poletti. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n408.

M. Bernard Accoyer. Pourquoi ne pas accepter les contrôles, monsieur le rapporteur ? Vous connaissez bien le sujet, vous savez que la MECSS a fait ces préconisations de façon unanime, et uniquement dans le but de protéger l’assurance maladie des dérapages et des excès. Dans le droit-fil de votre refus, pourquoi ne pas supprimer les radars sur les routes, ou même la police, pendant que vous y êtes ?

Tout système ne peut fonctionner et survivre que s’il y a un contrôle, c’est une constante dans tous les domaines. Aussi, refuser, de façon idéologique, dogmatique, comme vous le faites, de mettre en place un système plus efficient pour les contrôles d’arrêts maladie me paraît totalement injustifiable.

Je voudrais, madame la ministre, vous poser une question très précise, une seule. Pourquoi le Gouvernement a-t-il supprimé la journée de carence dans la fonction publique ?

M. Denys Robiliard. Ça n’a rien à voir !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement parce qu’elle a jugé qu’il n’y avait pas besoin d’une loi pour que les régimes cités engagent une coordination entre eux…

M. Dominique Tian. Si ! la preuve !

M. Gérard Bapt, rapporteur. …afin d’améliorer le système de contrôle. Après tout, les coprésidents de la MECSS peuvent réunir ces organismes et leur conseiller d’établir une convention. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Dominique Tian. Ça ne marche pas comme ça !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Vous voulez tout faire passer par la loi…

M. Bernard Accoyer. Madame la présidente, au secours, on n’a plus besoin des députés !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable. Je ne veux pas prolonger inutilement un débat manifestement caricatural…

M. Dominique Tian. Ce n’est pas caricatural !

Mme Marisol Touraine, ministre. Je le répète, le Gouvernement est engagé dans une politique de lutte contre les fraudes, y compris en matière d’indemnités journalières.

En 2012, il y a eu 2 200 000 arrêts de travail contrôlés,…

M. Pierre Lellouche. Sur combien ?

Mme Marisol Touraine, ministre. …dont 1 800 000 arrêts maladie et 400 000 arrêts pour AT-MP. Cela a permis de générer une économie de près de 450 millions d’euros.

M. Bernard Accoyer. Vous voyez bien que cela sert à quelque chose !

Mme Marisol Touraine, ministre. Il faut donc poursuivre cette politique et c’est ce que nous faisons. C’est une ligne politique très claire pour le Gouvernement : poursuivre les contrôles et lutter contre la fraude, mais en mettant en place les instruments appropriés, et nous n’avons aucun état d’âme en la matière. Avis défavorable.

M. Bernard Accoyer. Et la question très précise que je vous ai posée ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Je voudrais revenir sur les arguments de M. le rapporteur. Selon lui, une loi n’est pas nécessaire. Je crois qu’il est important de pouvoir déterminer les conditions dans lesquelles les caisses peuvent exercer leur contrôle et coordonner des actions.

Monsieur le rapporteur, vous en êtes resté à cet argument selon lequel une loi n’était pas nécessaire, sans répondre sur le fond. C’est regrettable.

Madame la ministre, vous indiquez des résultats satisfaisants : 450 millions d’économies pour 2 200 000 arrêts contrôlés. Cela veut donc dire qu’il faut poursuivre les contrôles puisqu’ils ont un impact. Aussi, je ne vois pas pourquoi vous refuseriez l’amendement que nous proposons puisqu’il prévoit une coordination des caisses qui ont les mêmes objectifs et qui travaillent sur les mêmes territoires.

Il est toujours intéressant de faire travailler ensemble des entités qui ont les mêmes objectifs. Cela permet à chacune d’entre elles de bénéficier des expériences des autres et d’être beaucoup plus efficaces et performantes. Je ne vois pas du tout pourquoi vous vous opposez à une telle collaboration entre ces organismes.

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Je retiens votre proposition, monsieur Bapt, et je vais m’adresser à M. Jean-Marc Germain, ici présent, qui copréside la MECSS avec Pierre Morange, avec qui nous avons remarquablement bien travaillé – nous avons auditionné tous ces gens-là. Si vous le voulez bien, cher collègue, nous allons convoquer tous les partenaires et nous allons leur demander de faire un protocole d’accord…C’est invraisemblable de proposer une chose pareille ! Ces gens-là ne se parlent pas et il faut formaliser les choses de façon à pouvoir avoir un protocole officiel. Ce n’est tout de même pas le rôle de la MECSS que de pouvoir obtenir cela !

M. Bernard Accoyer. Évidemment !

Mme Bérengère Poletti. Je voudrais également corriger les termes que vous avez employés, madame la ministre, lorsque vous avez parlé de fraude. Avec la MECSS, nous avons évidemment travaillé sur les fraudes, mais aussi sur les situations d’abus. Or les abus ne sont pas forcément des fraudes.

Les abus sont le fait de médecins qui, parfois, surprescrivent et qui ont été mis sous entente préalable par les caisses d’assurance maladie. Dès qu’ils ont été mis sous entente préalable, on a vu baisser le nombre d’arrêts maladie. Les arrêts maladie contrôlés sont très majoritairement, pour le moment, des arrêts maladie de longue durée. Pour l’instant, il est impossible pour les caisses de contrôler les petits arrêts.

M. Dominique Tian. Bien sûr !

Mme Bérengère Poletti. Car ceux-ci n’arrivent à la caisse que trop tard. Pour les autres petits arrêts, les caisses considèrent que, finalement, cela ne coûte pas très cher et qu’il vaut mieux concentrer les contrôles sur les longs arrêts. C’est pourquoi il est absolument essentiel que tous ces gens puissent se parler. Il faut dépister les gens qui abusent, parce que ce sont eux, et pas nous, qui jettent le discrédit sur la maladie et sur la manière dont on la prend en charge.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

M. Dominique Tian. Bravo !

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Il faut réunir la MECSS d’urgence, ou à tout le moins que M. Germain, qui est un peu absent du débat, y entre pour expliquer pourquoi on travaille, pourquoi elle ne sert à rien et pourquoi M. le rapporteur n’en lit pas les rapports.

Quand on contrôle, madame la ministre, on trouve. En matière d’allocations familiales, on a découvert 20 % de fraudes de plus que l’année dernière. Non qu’elles aient augmenté de 20 %, mais quand on cherche, on trouve. Les services de contrôle des caisses d’allocations familiales se sont mis au boulot à la suite d’un rapport célèbre sur la fraude sociale. Ils ont constaté qu’un comportement suspect sur deux, en cas de contrôle, cache en effet une situation anormale. Un cas sur deux !

Mme Marie-Françoise Clergeau. Fraudes et indus, ce n’est pas la même chose !

M. Dominique Tian. Les services de contrôle des caisses d’allocations familiales ont fait un peu de boulot et ont réussi à trouver des solutions. Malheureusement, en matière d’arrêts de travail, on ne fait que reculer. Je ne reviens pas sur l’exemple allemand, on en a parlé tout à l’heure. Pourquoi les Allemands sont-ils moins malades que nous ? Faut-il en conclure que la Sécurité sociale allemande est plus rigoureuse ? Ou que les Allemands sont en meilleure santé que nous ? En tout cas, il y a là un vrai problème. Allons jusqu’au bout : pourquoi les Allemands ne sont-ils pas malades et les Français toujours ? Est-ce un problème de santé publique, auquel cas il faut d’urgence s’interroger sur ce phénomène ? De même, pourquoi est-on malade beaucoup plus souvent dans la fonction publique territoriale que dans les entreprises privées ? Si on adhère vraiment au raisonnement de M. le rapporteur, ce n’est pas le Red Bull qu’il faut interdire mais plutôt la fonction publique, au motif qu’elle rend malade ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Bernard Accoyer. Eh oui !

M. Olivier Véran. Ce n’est plus de la caricature, monsieur Tian, c’est de l’injure !

Mme Ségolène Neuville. Voilà donc le fond de votre pensée !

M. Dominique Tian. On nage dans l’absurdité la plus complète ! Vous niez la situation avec un aplomb impressionnant ! J’évoquerai pour finir la fédération des hôpitaux publics, dont le président a reconnu l’autre jour sur RTL que l’abandon du jour de carence coûte 75 millions d’euros supplémentaires. Si la suppression d’un jour de carence induit un coût supplémentaire, c’est bien qu’il y a des abus ! Ça ne peut pas être autre chose, c’est mathématique ! Ces 75 millions d’euros, on pourrait peut-être les récupérer, ne serait-ce que pour les hôpitaux publics. La situation est absurde, monsieur le rapporteur !

Mme la présidente. Sur les amendements identiques nos 186, 195, 344 et 408, je suis saisie par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Gérard Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. À un moment donné, cette stigmatisation systématique… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Dominique Tian. Ce n’est pas de la stigmatisation ! Et vous donnez dans l’électoralisme !

M. Gérard Sebaoun. Vous permettez, monsieur Tian, j’ai la parole ! Vous avez dit des horreurs tout à l’heure sur l’exclusion de la PMA et des frais thermaux du champ de l’AME. Cette décision, je vous le rappelle, a été prise par MM. Bertrand et Fillon en 2011.

M. Dominique Tian. Et le rapport de la MECSS ?

M. Gérard Sebaoun. Arrêtez de proférer des mensonges en permanence ! J’ai le décret ici même ! Arrêtez de dire n’importe quoi et laissez-moi parler !

Si vous voulez contrôler, contrôlez les médecins hyperprescripteurs. Voilà la réalité. Arrêtez de stigmatiser les salariés et allez droit au but ! (Mêmes mouvements.) Il y a en effet dans ce pays, comme le montre un rapport de la Cour des comptes daté de septembre 2012, …

Mme la présidente. Il y a trop de bruit ! M. Sebaoun a seul la parole, laissez-le parler, mes chers collègues.

M. Céleste Lett. C’est lui qui s’emporte !

M. Bernard Accoyer. Calmez-le, madame la présidente !

Mme la présidente. Si vous criez sur monsieur Sebaoun, on ne vous entend pas.

Mme Bérengère Poletti. C’est lui qui nous crie dessus !

Mme la présidente. Poursuivez, monsieur Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. D’après un rapport de la Cour des comptes daté de septembre 2012, chaque médecin prescrit en moyenne 2 700 IJ par an. Un tiers d’entre eux en prescrivent moins de 1 100 par an et mille médecins – je dis bien : mille médecins – en prescrivent plus de 10 000 ! Il y a donc bien des hyperprescripteurs dans ce pays. Attachez-vous à ceux-là et nous serons d’accord. Arrêtez de stigmatiser systématiquement les salariés !

Mme Ségolène Neuville. Bravo !

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Attaquer les familles sans arrêt, ça suffit !

Mme Bérengère Poletti. Nous n’avons pas attaqué les familles, contrairement à vous !

Mme Marie-Françoise Clergeau. Vous savez très bien, monsieur Tian, que les fraudes aux prestations familiales dont vous parlez n’en sont pas réellement, car vos chiffres incluent les indus, qui sont recouvrés à 90 %. Alors, ça suffit ! Arrêtez de stigmatiser les familles dans cet hémicycle, c’est honteux ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Bérengère Poletti. Honte à vous, qui attaquez les familles !

Mme la présidente. Vous vous êtes exprimés, mes chers collègues de l’opposition. Vous avez présenté des amendements et vous les avez commentés. Chacun peut prendre la parole au fur et à mesure, tout est noté et figurera au compte rendu. Il est inutile de hurler.

M. Bernard Accoyer. C’est à M. Sebaoun qu’il faut le dire !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 186, 195, 344 et 408.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants60
Nombre de suffrages exprimés58
Majorité absolue30
Pour l’adoption19
contre39

(Les amendements identiques nos 186, 195, 344 et 408 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 340 et 611.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n340.

M. Bernard Accoyer. Cet amendement prévoit que le Gouvernement remettra un rapport au Parlement avant le 1er septembre 2014. Mme Poletti développera les nombreux arguments qui justifient cet amendement important.

Je n’ai pour ma part qu’une question à poser à Mme la ministre, toujours la même : pourquoi le Gouvernement a-t-il supprimé la journée de carence dans la fonction publique ? Les millions de Français affiliés au régime général et aux régimes alignés se posent la question, madame la ministre. (Exclamations sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. Dominique Tian. Exactement !

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n611.

Mme Bérengère Poletti. Dans les trois fonctions publiques, le contrôle de l’assuré est tout à fait exceptionnel. Il n’est en général déclenché qu’à la demande de son supérieur hiérarchique et non par la caisse d’assurance maladie, en fonction de l’analyse qu’elle fait de l’arrêt de travail. Il a donc été proposé en décembre 2009, dans le projet de loi de finances pour 2010, de mettre en place une expérimentation afin de tester le contrôle dans la fonction publique territoriale, dans la fonction publique hospitalière et parmi les fonctionnaires de l’État. La mise en place de l’expérimentation a été très longue, parce que personne n’était volontaire, en particulier dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière – s’agissant des fonctionnaires de l’État, les choses étaient un peu plus simples. Par conséquent, l’expérimentation a commencé très tardivement. Dès lors, entendre Mme la ministre de la fonction publique dire qu’elle se fonde dessus pour mettre fin à la journée de carence ne correspond en rien à la réalité. L’expérimentation a été très brève, ce qui rend tout bilan impossible.

M. Matthias Fekl. Un peu comme celle des rythmes scolaires…

Mme Bérengère Poletti. Nous souhaitons donc, à défaut de pouvoir prolonger l’expérimentation, disposer d’un rapport analysant les difficultés en raison desquelles elle n’a pu être menée correctement, en vue de pouvoir, un jour, éventuellement, remettre en place cette journée de carence.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Ces amendements ont été repoussés par la commission. Il s’agit d’une expérimentation lancée en 2009.

Mme Bérengère Poletti. Oui, mais mise en œuvre très tard !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Elle a été prolongée de deux ans en 2011 et vous nous proposez là, chers collègues, de la prolonger à nouveau. Ou bien les éléments sont impossibles à réunir – la ministre va nous le dire –, ou bien nous les avons en main.

Mme Bérengère Poletti. Justement ! C’est bien pourquoi il nous faut un rapport !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Ces amendements sont donc inutiles et nous les avons repoussés.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable. Tout d’abord, un rapport est déjà prévu par la loi. Dans le cadre du PLF, les dispositions relatives à l’expérimentation ont été précisées et un rapport doit être remis six mois avant son terme. Un rapport supplémentaire ne paraît donc pas nécessaire dans l’intervalle.

Quant aux questions posées sur l’abrogation du jour de carence, je me contenterai de rappeler, comme nous l’avons déjà fait à de très nombreuses reprises dans cet hémicycle et ailleurs, que les données dont nous disposons depuis l’abrogation du jour de carence ne montrent pas un impact significatif sur les arrêts maladie.

Mme Bérengère Poletti et M. Dominique Tian. C’est faux !

M. Bernard Accoyer. Ce n’est pas ce que l’on entend dans les hôpitaux et les collectivités !

Mme Marisol Touraine, ministre. En outre, un rapport de l’institut de recherche et de documentation en économie de la santé, l’IRDES, constate que 64 % des salariés du secteur privé et 75 % de ceux qui travaillent dans des entreprises de plus de 250 salariés bénéficient d’une couverture complémentaire leur permettant de neutraliser le délai de carence. Vous voyez donc que l’équité, puisque vous avez sans cesse ce mot à la bouche, ne va pas nécessairement dans le sens que vous indiquez.

M. Jean-Pierre Barbier. Plutôt l’équité que l’égalité !

Mme Bérengère Poletti. Le problème est plus compliqué que cela !

M. Patrick Hetzel. Et nous n’avons toujours pas la réponse à notre question !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Avec calme, je voudrais dire à la majorité ici présente qu’elle vit tout de même dans un certain déni de réalité.

M. Gérard Sebaoun. Lequel ?

M. Jean-Pierre Door. Je ne sais pas si nous vivons dans le même monde.

Mme Bérengère Poletti. Eux vivent dans celui des Bisounours !

M. Jean-Pierre Door. Il suffit de voir, à la télévision, les émissions d’actualité et leurs fameuses caméras cachées montrant les abus en matière d’arrêts de travail comme l’absence de contrôle et les trafics de papiers pour obtenir des arrêts de travail.

M. Christian Paul, rapporteur. Mais oui ! Avec la caméra cachée, traquons aussi les députés et les lobbys !

M. Jean-Pierre Door. Mme la ministre évoque deux millions de contrôles, mais sur combien d’arrêts de travail ? Six ou sept millions, soit moins de 30 %, faute de moyens ! La MECSS a réalisé une analyse parfaite et livré des préconisations, vous les balayez toutes et tous d’un revers de main. La MECSS comptait pourtant des députés de la majorité, dont M. Germain qui en était coprésident avec M. Morange. Le rapport a été présenté par Mme Poletti. Mais vous persistez, à gauche, à nier le caractère indispensable des contrôles.

Je vais encore vous donner un autre exemple. L’un de mes employés du service des espaces verts est en arrêt de travail depuis dix-huit mois. Il a été pris en flagrant délit de travail dans l’entreprise familiale sur les routes. Nous avons fait des photos, fait venir un huissier et déposé plainte auprès de la commission administrative et du CTP. Un rapport a été rédigé. Mais que nous a dit l’avocat ? Qu’on ne peut rien faire et qu’il faut le garder. Il est donc toujours salarié, en arrêt de travail, et nous dit qu’il reviendra peut-être travailler, quand il le pourra.

M. Jean-Pierre Barbier. Et voilà !

M. Jean-Pierre Door. Des individus de ce genre, il y en a beaucoup et je puis vous assurer que ses collègues, y compris ceux qui sont syndiqués, que j’ai rencontrés, sont contre lui. « C’est scandaleux, disent-ils, parce que cela nous pénalise tous ». Voilà pourquoi je parle de déni. Je ne sais pas où vous habitez, ni si vous êtes confrontés à de tels problèmes, mais nous, nous le sommes. Et les gens qui se lèvent, eux, pour aller travailler, en ont ras le bol de constater qu’à côté d’eux il y en a qui ne foutent rien parce qu’ils sont en arrêt de travail, parfois sans justification. Ce que nous demandons donc, madame la ministre, c’est simplement le renforcement des contrôles. Rien de plus. Qu’est-il écrit dans ces amendements ? Rien de dramatique. Personne n’est stigmatisé. Nous demandons simplement un rapport, des contrôles un peu plus fréquents et une durée d’arrêt de deux mois au lieu de trois. Ce n’est vraiment pas grand-chose. Vous refusez tout. Mais je vois que finalement, les arrêts de travail, vous vous en fichez complètement.

(Les amendements identiques nos 340 et 611 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n216.

M. Patrick Hetzel. Peut-être allons-nous trouver, avec l’amendement n216, un point d’accord avec M. Sebaoun. Il a été dit, tout à l’heure, que les dérapages étaient essentiellement concentrés sur certains professionnels de santé. Notre amendement vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 30 juin 2014, un rapport visant à simplifier, à uniformiser et à rendre plus efficaces les sanctions prises à l’encontre des professionnels de santé en cas de fautes, d’abus ou de fraudes de leur part. L’excellent rapport de notre collègue Dominique Tian insistait sur le rôle des professionnels de santé. Les spécialistes de la question, en particulier les juristes, considèrent pour leur part que les mesures de sanctions prévues sont l’œuvre d’un « législateur désabusé », laissant aux ordres professionnels le soin de sanctionner, ce qui est à l’origine d’un « laxisme corporatiste ».

Ce que nous souhaitons, c’est que le problème qui se pose soit réglé au moyen de propositions gouvernementales : comme vous le voyez, nous ne préjugeons de rien, mais souhaitons que le Gouvernement prenne le problème à bras-le-corps. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, considérant que le rapport demandé existe déjà : c’est celui établi par M. Tian – dont il n’a d’ailleurs été tiré aucune conséquence sous la précédente législature.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable : toutes les données demandées figurent dans le rapport annuel de la CNAM.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Je remercie M. Bapt de reconnaître la qualité du rapport que nous avons remis. J’en profite pour rendre hommage à nos collègues Pierre Morange et Jean Mallot, qui avaient également participé à sa rédaction. Au sein de la commission des affaires sociales, nous sommes nombreux à regretter M. Mallot, en particulier le rôle éminent qu’il a joué dans le fonctionnement de la mission d’évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale – en son temps, la MECSS avait atteint un niveau d’efficacité qu’elle a, depuis, un peu de mal à retrouver.

M. Bernard Accoyer. Ses amis socialistes lui ont rendu hommage à leur façon, en supprimant sa circonscription ! (Rires sur les bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Dominique Tian. Effectivement, M. Mallot a été sanctionné par ses camarades socialistes, qui ont supprimé sa circonscription – sans doute a-t-il été trop courageux ! Quoi qu’il en soit, je tenais à lui rendre hommage.

(L’amendement n216 n’est pas adopté.)

Avant l’article 27 (amendements précédemment réservés)

Mme la présidente. Nous en revenons aux amendements portant articles additionnels avant l’article 27.

Je suis saisie d’un amendement n73 de la commission des affaires sociales, qui fait l’objet d’un sous-amendement n820.

La parole est à M. Christian Paul, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance maladie, pour soutenir l’amendement n° 73.

M. Christian Paul, rapporteur de la commission des affaires sociales. L’amendement n73, que j’ai présenté devant la commission des affaires sociales, a été accepté par elle. À l’initiative de Mme la ministre de la santé, nous allons voir se mettre en place, dans les mois et les années qui viennent, un grand nombre d’expérimentations ayant pour objet de tester de nouveaux modèles d’organisation et de financement des soins. La multiplication des expérimentations s’est, jusqu’à présent – c’est encore le cas dans ce PLFSS – traduite par la présence d’articles permettant de donner une base légale à ces expérimentations effectuées dans de multiples domaines, par exemple dans celui de la télémédecine ou des parcours de santé.

La proposition que je souhaite faire au moyen de l’amendement n73 constitue, en quelque sorte, une illustration du choc de simplification (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP) qui me paraît nécessaire dans ce domaine comme dans d’autres. Je vous propose donc la définition d’un cadre générique, applicable à l’ensemble des actions expérimentales, qui permet de poser un principe général d’expérimentation des parcours de santé, tout en renvoyant à un décret en Conseil d’État le soin d’en définir les modalités à chaque étape, en fonction de chaque sujet. Ce dispositif doit permettre d’imprimer un rythme plus rapide à la mise en œuvre de la stratégie nationale de santé, qui repose sur des expérimentations – ce qui me paraît être une bonne méthode. Le temps de la décision de l’expérimentation, l’expérimentation elle-même, puis le bilan et l’éventuelle transposition législative consécutive à cette expérimentation ne doivent pas ralentir de plusieurs années le passage d’une bonne idée à sa réalisation. Il sera bien sûr rendu compte annuellement au Parlement de la mise en œuvre de ces expérimentations

Mme la présidente. La parole est Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir le sous-amendement n820.

Mme Jacqueline Fraysse. L’amendement que vient de présenter notre collègue Christian Paul vise à définir un cadre législatif commun pour toutes les futures expérimentations de nouveaux modes de rémunération. Il s’agit d’un très bon amendement, qui ne peut être combattu que par les partisans acharnés et dogmatiques du seul paiement à l’acte – un mode de paiement de plus en plus remis en cause par les médecins, en particulier les plus jeunes d’entre eux.

Quant au sous-amendement n820, il vise à corriger ce qui n’est sans doute qu’un oubli : l’amendement n73 prévoit que les expérimentations seront mises en œuvre par le biais de conventions signées entre les ARS, les organismes locaux d’assurance maladie, les professionnels de santé, les établissements de santé, les établissements sociaux et médico-sociaux, les collectivités et les organismes complémentaires – une énumération dans laquelle il ne manque personne, à l’exception des centres de santé. En dépit du rôle important qu’ils jouent, ces centres sont, malheureusement, souvent oubliés, ce qui n’est pas sans poser certaines difficultés. Le sous-amendement n° 820 a donc pour objet d’ajouter les centres de santé à la liste des signataires des conventions d’expérimentation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n820 ?

M. Christian Paul, rapporteur. Ce sous-amendement n’a pas été examiné par la commission mais, à titre personnel, j’y suis tout à fait favorable. L’expression « les professionnels de santé » sous-entendait, pour nous, les centres de santé, car nous avons le souci que ces centres soient traités à parité de droits et de devoirs avec les autres formes d’exercice de la médecine – comme nous aurons d’ailleurs l’occasion de le démontrer avec d’autres amendements relatifs à cette partie du PLFSS.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n73 et le sous-amendement n° 820 ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Je salue la démarche proposée par l’amendement n73, qui s’inscrit dans le cadre de ce qui a été engagé avec la stratégie nationale de santé. Comme l’ont indiqué M. Paul et Mme Fraysse, le Gouvernement a la volonté de mettre en œuvre des expérimentations portant notamment sur les modes de rémunération : il ne s’agit pas seulement de valoriser d’autres modes de rémunération que le paiement à l’acte, mais aussi de favoriser la coopération entre les professionnels de santé, entre les structures et dans les territoires.

Je veux néanmoins attirer votre attention sur le fait que l’amendement n73 et le sous-amendement n820 constituent une délégation de compétence très large du législateur à l’endroit du Gouvernement. Si, en tant que représentante du Gouvernement, je suis évidemment très sensible à cette marque de confiance, je me dois de souligner qu’elle pourrait être interprétée comme une méconnaissance des obligations de l’article 34 de la Constitution, relatives à la compétence du législateur. En effet, l’amendement dont il est question ne cadre pas l’objet, le champ et la durée des expérimentations, qui pourraient être fixés par décret. Je souscris à la démarche des auteurs de cet amendement, mais attire votre attention sur les risques d’inconstitutionnalité d’une telle mesure et m’en remets donc à la sagesse du législateur.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. L’amendement n73 de M. Paul, sous-amendé par Mme Fraysse, permet d’aborder un sujet sous-tendu dans la politique du Gouvernement et dont notre rapporteur est un militant zélé…

M. Christian Paul, rapporteur. La santé des Français ?

M. Bernard Accoyer. …à savoir la volonté d’étatisation du système de soins. L’intervention que vient de faire Mme la ministre faisait clairement apparaître la volonté de remettre en cause le paiement à l’acte, un mode de rémunération qui constitue l’une des caractéristiques de la médecine française. Au lieu du décloisonnement – pour reprendre le mot utilisé par le rapporteur – et du choc de simplification promis, on a droit, en fait, à un choc d’improvisation ! D’autre part, on fait un pas dans une direction qui, et vous devez l’assumer, modifierait en profondeur le système de soins français.

Quant au sous-amendement de Mme Fraysse relatif aux centres de santé, reçu à bras ouverts par M. Paul et Mme la ministre, il me conduit à rappeler ce que sont les centres de santé, au sujet desquels les pouvoirs publics ont dû demander à l’IGAS une enquête approfondie, qui a mis en évidence toutes les insuffisances d’un dispositif qui, au demeurant, peut rendre service dans certains cas. Au premier rang de ces insuffisances figure un déséquilibre financier extrêmement lourd qui pose un vrai problème. Or, dans le cadre de l’examen d’un PLFSS où nous sommes censés rechercher des solutions afin d’équilibrer les comptes de l’assurance maladie, il me paraît difficile d’accepter des mesures tendant à accroître le déficit. Pour toutes ces raisons tenant à l’organisation, au principe même du système de soins français, nous ne pouvons que nous opposer à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Pour ma part, je considère que l’amendement n73 a toute sa place dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale que nous examinons. Les propos qu’a tenus M. Accoyer au sujet des centres de santé ne m’étonnent guère de sa part. Il est à peine besoin que je les commente, sinon pour dire que finalement, ils sont assez rassurants, à mes yeux…

Je veux insister sur le fait que les centres de santé de proximité jouent un rôle tout à fait essentiel pour les familles modestes, mais aussi pour toutes les familles qui les fréquentent. Si notre collègue ne mesure pas toute l’importance de ces centres, peut-être est-ce parce qu’il n’évolue pas dans les milieux modestes. Pour ma part, je peux témoigner de l’importance du rôle joué par les centres de santé dans l’accès aux soins de proximité, qui constitue une grande préoccupation pour la majorité, que ne semble pas partager l’opposition de droite – mais, je le répète, je n’en suis guère surprise. Quant au déséquilibre que vous évoquez, monsieur Accoyer, il est justement lié à des mécanismes de financement qui méritent d’être revus, dans le cadre d’une réflexion globale. La proposition formulée par l’amendement de M. Paul s’inscrit d’ailleurs dans cette démarche.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Je voudrais rappeler à M. Paul un point dont nous avons déjà débattu en commission, à savoir le fait qu’il existe une convention médicale, conclue entre les différentes caisses d’assurance maladie et les syndicats médicaux représentatifs – le système conventionnel existe d’ailleurs depuis des dizaines d’années, et Mme la ministre ne manque pas de le défendre devant les assemblées générales des syndicats. Personne ne remet en cause la convention, valable jusqu’en 2016, et qui donnera lieu à de nouvelles négociations à partir de 2014-2015 entre les partenaires professionnels et les caisses.

Les précédentes lois de financement de la Sécurité sociale avaient favorisé l’émergence de nouvelles formes de rémunération, qu’il s’agisse du forfait ou du système des réseaux de santé, en particulier dans le cas de certaines pathologies chroniques – qu’il s’agisse du diabète, avec l’expérience SOPHIA, ou d’autres pathologies. Avec cet amendement, vous voulez vous livrer à de l’ingérence, vous cherchez à forcer la porte des accords conventionnels, en y ajoutant des organismes locaux, l’Agence régionale de santé ou encore les établissements de santé.

Vous allez trop loin, il y a des accords conventionnels. Ou alors il faut dire que les conventions n’existent plus et on repart à zéro. Ainsi, ce sera bien comme l’a dit Bernard Accoyer : on change totalement de paradigme, on n’est plus dans un système de médecine contractuelle entre les professionnels libéraux, les caisses d’assurance maladie et bien entendu l’État, dans le rôle de contrôleur général. Là, vous faites de l’ingérence : nous ne pouvons donc accepter cet amendement.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Paul, rapporteur.

M. Christian Paul, rapporteur. Les sujets qu’a soulevés Mme la ministre me paraissent importants. Par contre, je ne reviendrai pas sur le mépris chronique de l’opposition pour les centres de santé, ni sur cette affection de longue durée qu’est le fantasme de l’étatisation, qui sera son élément de langage pendant au moins encore une journée.

M. Bernard Accoyer. Ce n’est donc pas une affection de longue durée, mais une journée. Mais pas une journée de carence !

M. Christian Paul, rapporteur. La question essentielle, c’est de savoir si le cadre proposé ici est suffisant pour organiser l’expérimentation, c’est-à-dire si le texte est assez précis, ce que je crois, et la commission, je le rappelle, a adopté cet amendement. Il s’agit bien d’expérimentation, comme dans d’autres domaines ces dernières années. Vous aimez, monsieur Door, souligner la continuité : il s’agit bien ici de continuité. Vous avez lancé des expérimentations, nous allons en lancer, certainement en plus grand nombre, non pour étatiser mais pour dynamiser le système de santé, son organisation, les parcours de soins.

Avec cette proposition, les expérimentations pourront être lancées de façon plus simple. Quand le cadre conventionnel devra être sollicité, il le sera évidemment, monsieur Door, dans les conditions normales. Nous respectons le cadre conventionnel.

(Le sous-amendement n820 est adopté.)

(L’amendement n73, sous-amendé, est adopté.)

Article 27

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, inscrit sur l’article 27.

M. Bernard Accoyer. Cet article 27, je veux le préciser à l’attention du rapporteur, confirme ce que j’ai avancé. En effet, il est précisé, dans son exposé des motifs, qui traite des dispositifs relatifs au forfait en matière d’objectifs de santé publique : « Si la négociation conventionnelle est la voie privilégiée pour la généralisation de la rémunération d’équipe, la présente mesure prévoit, en cas d’échec de cette négociation, la possibilité d’un règlement arbitral approuvé par les ministres. » Voilà ! Le mécanisme pour conduire, sans l’accord des professionnels, c’est-à-dire en tournant le dos au système conventionnel, vers toujours plus de collectivisation et d’étatisation est bien inscrit dans ce PLFSS, ainsi que nous le dénonçons depuis le début de son examen.

Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que vous entretenez la confusion entre les centres de santé et les maisons de santé, les maisons de santé que nous soutenons et les centres de santé…

M. Christian Paul, rapporteur. Que vous méprisez !

M. Bernard Accoyer. …dont nous disons qu’à l’exception de certains d’entre eux, dans des conditions ou des quartiers très particuliers, ils constituent un dispositif extrêmement coûteux dont le rendement n’est pas compatible avec l’objectif d’équilibre des comptes sociaux. En tout état de cause, nous souhaitons que cet article 27 ne soit pas adopté, car il constitue, avec le règlement arbitral, le moyen de changer en profondeur le système de soins de la médecine française.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Cet article 27 permet de prolonger les expérimentations de nouveaux modes de rémunération pour les structures de premier recours. Il permet notamment de financer les équipes pluriprofessionnelles, dans un souci d’efficacité. Le paiement à l’acte a ses limites quant à la rémunération des activités de prévention, d’éducation thérapeutique et de suivi des patients atteints de pathologies chroniques. Le paiement à l’acte n’est pas toujours adapté aux nouvelles formes d’exercice, notamment au sein des maisons de santé, pôles de santé et centres de santé, cela a été dit. Je salue la prolongation des expérimentations de nouveaux modes de rémunération mais il est aussi nécessaire d’assurer la pérennité des financements accordés dans ce cadre, afin de sécuriser durablement ces nouveaux modes d’exercice. La négociation conventionnelle est la voie privilégiée pour la rémunération d’équipe ; souhaitons qu’elle se développe et se concrétise effectivement.

J’en profite pour signaler que la démographie médicale, dans certaines zones rurales ou urbaines, reste préoccupante et qu’il nous faut trouver des réponses. C’en est une. Les collectivités s’engagent avec vous, madame la ministre, ainsi que les professionnels de santé, dans le pacte territorial de santé. Elles accompagnent les projets de création des maisons de santé mais, sans médecin, il ne peut y avoir de projet de santé. La venue de médecins d’autres pays, nombreux dans certaines régions, n’est pas une solution pour la France, et encore moins pour les pays d’origine qui ont fait l’effort de bien former leurs médecins et voient ceux-ci ne pas se mettre au service de leur propre pays.

Nous devons intégrer et développer dans nos parcours de formation une pratique obligatoire en zone déficitaire. Cette pratique est de nature à favoriser les vocations à exercer en milieu rural, notamment. Elle lève les a priori et confirme un exercice collectif, en lien avec des établissements hospitaliers de proximité mais aussi de grande qualité, dans la prise en charge des patients, de tous les patients. Cette mesure de financement d’un exercice plus collectif de la médecine contribue à faciliter l’accès aux soins partout et pour tous. C’est aussi une mesure favorable à l’emploi. Elle facilite le recrutement de professionnels de santé sur des postes de coordination ou de coopération avec les différents acteurs de la santé sur un même territoire.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n27, de suppression de l’article.

M. Francis Vercamer. Le groupe UDI n’est pas contre les expérimentations ni contre les nouveaux modes de rémunération. Néanmoins, la prolongation l’an dernier, et jusqu’à la fin de cette année, d’une expérimentation mise en place en 2008 me paraît déjà suffisante. Je propose donc d’y mettre fin. Que le Gouvernement tranche. Une expérimentation sert à tester un dispositif avant de prendre une décision. Depuis le 1er janvier 2011, où l’expérimentation s’est véritablement mise en place, je pense que le Gouvernement a pu se faire une idée. On pouvait comprendre qu’il prévoie une prolongation l’an dernier, car Mme la ministre venait de prendre son poste et il fallait qu’elle se plonge dans le dossier, mais reconduire encore une année me paraît de trop. D’autant que l’article 37-1 de la Constitution dispose que ces mesures doivent avoir une durée limitée. Dans la mesure où l’expérimentation a été décidée en 2008, cela dépasserait, à mon avis, les délais raisonnables.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. J’invite nos collègues à sortir de l’opposition systématique, notamment sur cet article, parce que cela heurte le bon sens. Vous en conviendrez, monsieur Accoyer. On ne peut pas être à la fois favorable aux nouveaux modes de rémunération, aux expérimentations et souhaiter maintenant interrompre ces expérimentations alors que les négociations conventionnelles auxquelles vous êtes attachés, tout comme nous, n’ont pas encore commencé.

Imaginez que l’on vous suive : nous interrompons les expérimentations et nous ne poussons pas à intensifier les négociations conventionnelles. Cela veut dire que des expérimentations que vous avez vous-mêmes souhaitées il y a quatre ans resteraient totalement lettre morte. Je pense c’est un petit jeu d’opposition systématique ; le sujet de l’assurance maladie mérite mieux. Je peux comprendre qu’il y ait de vrais désaccords de fond, et ils viendront sans doute dans le cours du débat, mais cet amendement heurte le bon sens. L’avis est donc défavorable.

Le point central n’est d’ailleurs pas la prolongation de l’expérimentation mais le renvoi à un règlement arbitral en cas d’échec des négociations, pour que nous puissions enfin faire avancer cette affaire très importante de la rémunération du travail en équipe.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable. Je voudrais profiter de la discussion de cet amendement pour faire trois observations. Nous aurons l’occasion d’y revenir dans la suite du débat.

La première observation, c’est que la politique engagée par le Gouvernement a pour objectif de prendre en compte l’évolution des besoins de la population mais aussi celle de l’offre de soins, telle qu’elle existe aujourd’hui, de la part des professionnels de santé. Mme Le Houerou a insisté sur la nécessité de lutter contre les déserts médicaux ; je veux vous assurer tous de la totale détermination du Gouvernement dans cette direction. C’est ainsi que j’ai lancé, il y a un peu moins d’un an, un pacte territoire santé qui fait de la création de maisons pluridisciplinaires de santé, c’est-à-dire d’équipes pluriprofessionnelles, un des leviers pour lutter contre ces déserts médicaux, parce qu’aujourd’hui les professionnels de santé ne veulent plus travailler, comme autrefois, de manière isolée. Plus d’une centaine de maisons de santé se sont ouvertes depuis que j’ai pris en charge ce département ministériel. Au 4 septembre, nous comptions 360 projets nouveaux.

Pour favoriser ces projets, nous avons besoin – c’est le deuxième point – de renforcer des financements nouveaux qui permettent de valoriser la coopération entre les différents professionnels et reconnaissent l’existence de ces équipes. Nous devons accélérer. Ces expérimentations, qui donnent d’ailleurs de bons résultats, ne vont pas encore assez loin. C’est pourquoi, dans le cadre de cet article, nous proposons d’étendre le nombre d’équipes qui pourront bénéficier de ces financements.

Comme je l’ai dit au directeur général de la Caisse nationale d’assurance maladie, je souhaite que ces expérimentations soient désormais généralisées. L’année 2014 doit être l’année de la généralisation, par le biais de la négociation entre les différents partenaires conventionnels. C’est vrai que cette négociation aurait dû intervenir plus tôt, mais d’autres agendas ont mobilisé les professionnels, tout comme la CNAM. L’année 2014 doit nous permettre d’aller de l’avant. Je souhaite, je l’ai dit, que les choses aillent aussi vite que possible.

Votre préoccupation, monsieur Paul, a d’ores et déjà été entendue puisque M. Frédéric Van Roekeghem a annoncé que ces négociations devaient commencer début 2014 et qu’il fallait qu’elles aillent le plus loin possible.

Faut-il – et c’est ma troisième observation –, dans le cadre de la loi, contraindre d’ores et déjà le calendrier de cette négociation ? Je comprends bien votre préoccupation, mais les choses doivent intervenir en temps et en heure. Pour autant, nous verrons, lorsque vous présenterez votre amendement, comment nous avançons. Je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée.

Tel est le chemin qui a été emprunté. Nous croyons à la nécessité de valoriser de nouveaux modes de rémunération en tant que levier pour favoriser le travail en équipe des professionnels. Ce travail en équipe est un des moyens, même si ce n’est pas le seul – je pourrais également parler des praticiens territoriaux de médecine générale –, pour attacher à nos territoires des professionnels de santé. Renoncer à ces expérimentations, c’est renoncer à lutter contre les déserts médicaux.

M. Christian Paul, rapporteur. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. J’entends bien, madame la ministre, qu’il faut laisser se dérouler les négociations. Néanmoins, je voudrais faire un parallèle. Vous avez fait la déclaration sur les déserts médicaux à la même époque l’année dernière. Le Président de la République en a fait une sur les mutuelles quinze jours après, en prônant également le dialogue social. Depuis lors, la disposition relatives aux mutuelles a été censurée par le Conseil constitutionnel, mais vous l’avez faites passer de nouveau hier par voie d’amendement. Mais ici, avec cet article, vous proposez de reconduire l’expérimentation. Deux poids, deux mesures ! Il y avait une volonté politique en ce qui concerne les mutuelles – que l’on soit ou non d’accord –, mais il n’y en a pas pour pérenniser cette expérimentation, puisque les négociations n’ont même pas encore commencé.

(L’amendement n27 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 45 et 170.

La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement n45.

M. Jean-Pierre Door. Nous sommes évidemment favorables à ces nouveaux modes de rémunération. Dès 2008, nous avons essayé de mettre en œuvre ces expérimentations pour cinq ans. En 2012, nous les avons prolongées jusqu’en 2013 et aujourd’hui il faut continuer de le faire. C’est ce que vous proposez. Nous sommes d’accord avec cette idée de vouloir financer les équipes pluridisciplinaires et pluriprofessionnelles et, sur nos territoires, nous avons tous créé soit une maison médicale de garde, soit des maisons de santé. Il est donc logique que l’on expérimente ces nouveaux modes.

Toutefois, se pose une question – qui n’en est même pas une. Vous dites, dans votre exposé des motifs et dans le règlement, que vous allez essayer de garder des relations conventionnelles et d’avoir une négociation conventionnelle privilégiée. Cela se fera, je l’espère, en accord avec les professionnels de santé. Mais il y a un hic, une provocation. On n’entre pas dans une négociation ou dans une concertation avec qui que ce soit – professionnels ou syndicats – avec un bazooka. Or vous arrivez avec un bazooka, en disant textuellement, dans cet article, qu’en cas d’échec, vous auriez recours au règlement arbitral. Qu’est-ce qu’un règlement arbitral sinon une décision que l’on prend en dehors des professionnels de santé ? J’avais pourtant cru comprendre que le parti socialiste n’aimait pas trop les tribunaux arbitraux – mais dans d’autres domaines, il est vrai. Je trouve dommage que vous y ayez recours ici. C’est pour cette raison que je demande à supprimer les alinéas 2 et 4.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n170.

M. Dominique Tian. Dans une négociation, il existe toujours des côtés objectifs et des côtés plus subjectifs. Comme l’a dit Jean-Pierre Door, prévoir que des partenaires doivent négocier sous la menace d’un règlement arbitral, ce n’est sans doute pas la meilleure manière de faire en sorte qu’ils abordent ces négociations dans les meilleures dispositions. C’est d’autant plus surprenant que vous êtes plutôt opposés en principe aux jugements arbitraux, n’est-ce pas ?

On ne peut donc que déconseiller cette démarche. C’est pourquoi je propose de supprimer les alinéas 2 et 4, qui sont inutilement blessants et qui mettent une pression qui n’a pas lieu d’être dans les relations, en principe de bonne qualité, qui doivent exister entre la Sécurité sociale et les organisations professionnelles des médecins.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?

M. Christian Paul, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements. Chers collègues, vous malmenez une nouvelle fois le bon sens. Il ne s’agit pas d’une affaire de bazooka ! Peut-être M. Tian ignore-t-il que le recours au règlement arbitral existe déjà en matière conventionnelle.

M. Dominique Tian. Non ! Mais vous êtes plutôt contre !

M. Christian Paul, rapporteur. Je suis surpris en revanche que M. Door l’ignore.

M. Jean-Pierre Door. Je sais bien qu’il existe, mais il faut le supprimer !

M. Christian Paul, rapporteur. Non ! Nous l’étendons aux accords conventionnels interprofessionnels qui sont nécessaires dans cette matière, qui concerne les parcours de soins. Le Gouvernement, que nous approuvons, se contente très modestement – cela n’a rien à voir avec un bazooka ! – d’étendre le recours au règlement arbitral qui existe déjà en matière conventionnelle. C’est donc tout sauf nouveau !

M. Jean-Pierre Door. Je ne dis pas que c’est nouveau, je dis que c’est mauvais.

M. Christian Paul, rapporteur. Vous êtes favorables au nouveau mode de rémunération, aux expérimentations et à ce que l’on en vienne par la suite à une discussion conventionnelle ; or celles-ci peuvent se terminer par des règlements arbitraux.

M. Jean-Pierre Door. Ce n’est pas bon !

M. Christian Paul, rapporteur. Mais c’est déjà dans la loi la République !

M. Jean-Pierre Door. Tout n’est pas bon dans les lois !

M. Christian Paul, rapporteur. Comme il s’agit de discussions interprofessionnelles, il est proposé d’étendre cette faculté de règlement arbitral aux négociations interprofessionnelles. Avant de parler d’artillerie, il faudrait tout simplement relire le code et les lois de la République.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable. Les positions sont parfaitement claires. Si je comprends bien l’analyse de M. Door, il s’agit de dire que les règlements arbitraux, qui existent déjà, doivent être supprimés…

M. Jean-Pierre Door. Oui !

Mme Marisol Touraine, ministre. …et donc qu’il faut, y compris là où des règlements arbitraux sont prévus, ne plus permettre d’y recourir, ce qui revient à considérer que, dans un domaine comme celui de l’assurance maladie et des relations avec les professionnels de santé, qui intéressent quand même un tout petit peu le Gouvernement et la Sécurité sociale, la représentation nationale accepterait de se dessaisir totalement de tout contrôle et de toute analyse : cela n’est évidemment – pour notre part, en tout cas – pas envisageable une seule seconde.

La deuxième position, celle qui est défendue par ce texte, c’est de considérer que, puisque le règlement arbitral existe, par exemple en cas de faillite d’une négociation, il faut faire en sorte que, pour ces expérimentations, la possibilité d’un recours au règlement arbitral soit inscrite dans la loi. Ces amendements de suppression témoignent d’une profonde différence de conception entre nous.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Je sais bien que le règlement arbitral existe,…

M. Christian Paul, rapporteur. Monsieur Tian, lui, ne le savait pas, je pense.

M. Jean-Pierre Door. …mais cette disposition est mauvaise – et je l’ai toujours dit, y compris en 2008 lors de la précédente convention, même si je n’avais pas obtenu satisfaction à l’époque. Ces règlements arbitraux suscitent des difficultés de négociation entre les partenaires. Il vaut mieux un très bon accord qu’un mauvais procès. Or dès l’instant où le règlement arbitral entrera en jeu, il n’y aura plus d’accord possible et les solutions espérées ne se présenteront plus : ce sera un échec. Il faut entrer dans les négociations avec douceur et non pas avec un bazooka.

(Les amendements identiques nos 45 et 170 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Paul, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour soutenir l’amendement n74 rectifié.

M. Dominique Tian. Je crains le pire !

M. Christian Paul, rapporteur. Dans le souci, qui nous anime tous, que puissent se mettre en œuvre ces expérimentations sur les nouveaux modes de rémunération, qui préparent notamment les parcours de soins ou le travail en équipe – soit des choses importantes que nous voulons booster par le biais de la stratégie nationale de santé –, j’ai proposé à la commission, qui l’a adoptée, la possibilité de donner un délai de trois mois, à compter de la promulgation de la présente loi, pour que débutent les négociations entre l’assurance maladie et les organisations habilitées, aussi bien pour les professionnels que pour les centres de santé, afin que cet exercice pluriprofessionnel débouche rapidement sur un accord conventionnel. Ce n’est pas une pression, c’est une indication de calendrier pour l’assurance maladie, dans un secteur stratégique – c’est l’un des moteurs de la stratégie nationale de santé. M. Vercamer l’a d’ailleurs dit tout à l’heure à sa façon, peut-être un peu imprécise : il faut un calendrier pour ces réformes. Vous voulez des réformes, monsieur Door, mais contrairement à vous nous pensons qu’il y a une forte volonté pour les mener ainsi qu’une philosophie d’action, qui s’appelle la stratégie nationale de santé. Nous devons désormais passer à l’acte. Donc, aidez-nous à le faire le plus rapidement possible !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Des négociations vont s’engager au début de l’année 2014 pour la généralisation de ces nouveaux modes d’expérimentation. C’est un point extrêmement important et, comme je le disais tout à l’heure, le directeur général de l’assurance maladie a annoncé qu’il faisait de cette négociation une priorité. Je crois donc, monsieur le rapporteur, qu’il a entendu votre préoccupation avant même que vous ne la formuliez.

Je suis absolument déterminée à faire en sorte que nous puissions avancer, et je souhaite d’ailleurs que ces négociations aboutissent, sans quoi nous serions amenés à passer par le règlement arbitral. À ce propos, je rappelle à M. Door, qui fait preuve de constance…

M. Christian Paul, rapporteur. Il ne vous écoute pas !

M. Gérard Bapt, rapporteur. C’est que M. Guaino est arrivé !

Mme Marisol Touraine, ministre. Il ne m’écoute pas, mais il fait preuve de constance dans sa position. Cela étant, il s’agit d’une position personnelle, parce c’est la majorité que vous avez soutenue sans défaillir, monsieur Door, qui a introduit en 2004 la possibilité du règlement arbitral. Vous êtes aujourd’hui suivi par vos collègues de l’opposition, mais est-ce à dire qu’aujourd’hui, dans l’opposition, c’est l’ensemble de l’UMP qui refuse ce qui a été le cœur de sa politique entre 2004 et 2012 ?

Monsieur Paul, l’esprit de votre amendement est tout à fait conforme au contenu de la politique que je mène et que mène le Gouvernement, mais je ne voudrais pas que la fixation d’un délai de trois mois puisse être interprétée comme une injonction donnée par le législateur au Gouvernement, ou en tout cas à la Sécurité sociale. Cela me préoccupe un peu, c’est pourquoi je vous demanderais volontiers de retirer votre amendement, puisqu’il est repris à son compte par le Gouvernement, dans la manière dont je définis les relations avec la caisse nationale d’assurance maladie. Si vous souhaitiez le maintenir, je m’en remettrais à la sagesse du législateur.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Paul, rapporteur.

M. Christian Paul, rapporteur. Je prends acte de votre engagement, dont je mesure la fermeté. Je connais, comme mes collègues de la commission, le calendrier annoncé par le directeur général de la caisse nationale d’assurance maladie. Je pense donc que nous pouvons retirer cet amendement.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je vous en remercie.

(L’amendement n74 rectifié est retiré.)

(L’article 27 est adopté.)

Après l’article 27 (amendements précédemment réservés)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 232 rectifié et 602, portant article additionnel après l’article 27.

La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n232 rectifié.

M. Dominique Tian. Le cumul emploi-retraite devrait permettre de répondre au défi de la pénurie médicale. S’il commence à porter ses fruits, le gisement demeure considérable, parce que beaucoup de médecins sont rebutés par le paiement de cotisations à la CARMF n’ouvrant pas droit à des prestations. Aujourd’hui, ce sont 10 578 médecins retraités âgés de 65 à 70 ans, sans activité professionnelle, qui pourraient participer à l’offre de soins. Cet amendement, identique à celui qui a été cosigné par Jean-Pierre Door et une grande partie du groupe UMP, vise donc à exonérer partiellement de cotisations retraite les médecins qui exerceraient en zones sous-denses.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement n602.

M. Jean-Pierre Door. Madame la ministre, je suis en effet constant dans mes déclarations. J’étais contre le règlement arbitral, je le répète, et je m’étais opposé au directeur de la caisse d’assurance maladie qui avait voulu l’imposer à l’époque. Il y était parvenu, et la ministre l’avait inscrit dans la loi. Je m’y étais opposé et j’avais perdu, voilà tout. J’imagine que vous avez aussi, au sein de votre groupe, parfois, quelques divergences.

Ma deuxième position constante – madame la ministre la connaît car j’en ai souvent parlé –, c’est que je souhaiterais que l’on puisse autoriser le cumul emploi-retraite pour de nombreux médecins qui sont à la retraite et qui ont encore envie de participer à la vie professionnelle. Mais ils souhaitent pour ce faire être exonérés de la cotisation de retraite qui ne leur rapporte plus rien, puisqu’ils ont liquidé leur retraite. Payer une cotisation à perte, c’est ridicule…

M. Gérard Bapt, rapporteur. C’est faire preuve de solidarité !

M. Jean-Pierre Door. …et cela ampute dans une certaine mesure leur rémunération, qui resterait modeste puisqu’ils travailleraient par intermittence, soit dans des endroits sous-dotés, soit pour des remplacements, soit pour exercer dans une maison de santé ou – pourquoi pas ? – dans un centre de santé. Près de 10 000 médecins retraités sont aptes à continuer de travailler, et en ont envie. Beaucoup d’entre eux sont demandeurs parce qu’ils n’ont pas envie de rester chez eux à ne rien faire. Cette proposition simple permettrait de réduire la désertification médicale dans certains endroits, et chacun en connaît autour de soi.

Je sais que ma cause n’est pas encore gagnée, mais peut-être que ce sera le cas avec cet amendement, sait-on jamais ? Je reste constant.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?

M. Christian Paul, rapporteur. Nous venons, monsieur Door, de voter un texte de loi réformant le système de retraites, on ne va pas rouvrir ce débat à l’occasion d’un PLFSS.

Mme Véronique Louwagie. Vous l’aviez pourtant fait l’année dernière !

M. Christian Paul, rapporteur. Il est vrai que des milliers de médecins à la retraite continuent à participer à l’offre de soins, et je veux leur rendre hommage – ils n’ont d’ailleurs pas attendu les modifications que vous proposez pour le faire. La priorité du Gouvernement et de la majorité pour lutter contre les déserts médicaux, c’est vraiment de renforcer l’attractivité de ces territoires par toutes les mesures déjà évoquées : les maisons de santé pluridisciplinaires, le travail en équipe, la bonne organisation des urgences, qui permet aussi de soulager la vie quotidienne des médecins installés… Le pacte territoire santé a ce but et il est aujourd’hui à l’œuvre dans beaucoup de territoires. Les directeurs généraux des ARS interviennent avec ces objectifs et avec ces outils. Nous ne pensons pas utile d’en rajouter. Avis défavorable.

M. Dominique Tian. Votre réponse est hors sujet !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur Door, oui, vous êtes constant… et je vais vous répondre avec la même constance : je donne un avis défavorable à cet amendement. Tout d’abord, je rappelle que le statut de retraité a ses propres règles, qui s’imposent à l’intéressé. Les revenus que celui-ci peut acquérir en exerçant toujours une activité doivent lui permettre de contribuer, par le biais des cotisations, à la solidarité nationale et donc à notre système de retraites. Il paraît juste, nous l’avons déjà vu lors de l’examen du projet de loi sur les retraites, que toute activité contribue à l’équilibre de nos régimes de retraites.

La deuxième chose que je veux vous dire, c’est que d’ores et déjà, les médecins en situation de cumul emploi-retraite bénéficient d’avantages en termes de cotisations et de fiscalité, et qu’il y a donc une prise en compte de leur situation.

Troisième point : il y a aujourd’hui environ, M. Paul l’a indiqué, 20 % des médecins âgés de soixante-cinq ans à soixante-dix ans qui sont en situation de cumul emploi-retraite,…

Mme Marie-Noëlle Battistel. C’est très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre. …ce qui prouve qu’ils trouvent les incitations nécessaires à une activité, y compris dans le cadre tel qu’il existe aujourd’hui.

(Les amendements identiques nos 232 rectifié et 602 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n795 rectifié qui fait l’objet d’un sous-amendement n831.

La parole est à M. Christian Paul, rapporteur, pour soutenir l’amendement.

M. Christian Paul, rapporteur. C’est un amendement important, mes chers collègues, puisqu’il a pour objectif d’introduire dans la loi une équité de traitement entre les professionnels de santé qui exercent en mode libéral et les centres de santé, principe auquel la ministre s’était dite favorable devant notre commission il y a quelques semaines.

Il y a eu un rapport de l’IGAS sur les centres de santé, et qui ne les pas diabolisés comme faisait semblant de le penser M. Accoyer. Au contraire, ce rapport nous enjoint plutôt à améliorer leur situation en les plaçant en position d’égalité, sur la ligne de départ, avec les autres modes d’exercice afin qu’ils puissent bénéficier des nouvelles dispositions, notamment celle sur la rémunération du travail en équipe, qui serait particulièrement intéressante dans ce cadre.

Plus généralement, la négociation conventionnelle, en tout cas la négociation avec l’assurance maladie, a largement oublié les centres de santé depuis de nombreuses années – ce que vous n’avez pas dû rappeler très souvent ici, monsieur Door.

L’objet de l’amendement est double : établir un principe d’équité de rémunération pour que ceux qui exercent dans les centres de santé bénéficient des mêmes avantages que les médecins libéraux ; prévoir un délai de négociation pour que l’accord de 2003 soit renégocié à cet effet.

Mme la présidente. La parole est Mme la ministre, pour soutenir le sous-amendement n831 et pour donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement.

Mme Marisol Touraine, ministre. C’est un sous-amendement de précision.

Je veux réaffirmer ici l’importance que j’accorde à la place des centres de santé dans l’offre de soins, à leur rôle spécifique dans nos territoires, en particulier vis-à-vis des populations les plus précaires, les plus fragiles, les plus en difficulté, mais pas uniquement. Je crois important que nous profitions de la dynamique qui a été créée par le rapport de l’IGAS sur l’avenir des centres de santé.

Monsieur le rapporteur, j’entends par conséquent votre préoccupation. Elle est aussi celle du Gouvernement. Il est nécessaire, en effet, que la Caisse nationale d’assurance maladie enclenche des négociations avec les centres de santé. C’est pourquoi je donne un avis favorable à votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Je veux réaffirmer très fortement le soutien du groupe socialiste à cet amendement et, plus largement, au projet des centres de santé. Nous sommes extrêmement satisfaits de voir qu’une disposition législative va permettre de remédier à une injustice de rémunération qui contribue à déstabiliser le modèle économique des centres de santé.

Au-delà de ce qui a été dit sur leur rôle dans la lutte contre les déserts médicaux et pour l’accès aux soins des personnes les plus défavorisées – ce qu’a rappelé notamment Mme Fraysse –, ils ont également une place majeure, dans les territoires, en matière de prévention et d’éducation thérapeutique, mais jouent également, je le souligne, un rôle anticipateur et novateur puisqu’il faut se rappeler qu’ils pratiquent, depuis longtemps, la généralisation systématique du tiers payant de même que l’exercice coordonné. Encore une fois, je salue cet amendement.

Mme Marie-Françoise Clergeau et M. Gérard Sebaoun. Très bien !

(Le sous-amendement n831 est adopté.)

(L’amendement n795 rectifié, sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. Vous demandez grâce, monsieur Door… Vous êtes exaucé. (Sourires.)



La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance



de l’Assemblée nationale



Nicolas Véron