SOMMAIRE
1. Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017 (suite)
M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics
Amendement no 882
M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales
Amendements nos 883 , 634 , 760 , 843 , 635 , 765 rectifié , 854 , 636 , 768 , 885 , 886
Suspension et reprise de la séance
Mme Michèle Delaunay, rapporteure de la commission des affaires sociales
Amendements nos 57 , 216 , 361 , 466 , 290 , 305 , 5, 4
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales
Amendements nos 839, 840 , 137 , 138 , 841, 842 , 139 , 681
Amendements nos 253 , 349 , 455 , 806 rectifié , 78 , 517 , 672
Suspension et reprise de la séance
Mme Annie Le Houerou, rapporteure de la commission des affaires sociales
Amendements nos 407 , 838 , 845 , 914 , 846 , 847 , 906 , 848 , 678 , 916 , 199 , 605 , 850 , 851 , 724 rectifié
Amendements nos 183 , 273 , 606 , 184 , 207 , 274 , 185 , 208 , 275
Suspension et reprise de la séance
Amendements nos 186 , 209 , 276
Amendements nos 1 , 3 (sous-amendement) , 2 (sous-amendement) , 4 (sous-amendement) , 7, 8
Suspension et reprise de la séance
Amendement no 9
Vote sur l’ensemble de la troisième partie
Dispositions communes aux différentes branches
Article 58 (appelé par priorité)
Amendement no 763
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé
Amendement no 772
Article 59 (appelé par priorité)
Amendement no 887
Après l’article 44 (amendements appelés par priorité)
Amendement no 446 rectifié
Amendement no 682
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales
Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes
Amendements nos 684 , 683 , 899 , 686 , 487 , 687 , 688 , 488 , 689 , 489 , 690 , 691 , 490 , 692 , 720 , 697 , 698 , 658 , 699 , 491 , 141 , 492 , 700 , 701 , 493 , 702
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017 (nos 4072, 4151, 4150).
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Pierre Door. Mon intervention se fonde sur l’article 58, alinéa 1, du règlement.
Monsieur le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics, une rumeur court dans l’Assemblée nationale selon laquelle une seconde délibération aurait lieu sur l’article 10.
Nous nous en étonnons et souhaiterions obtenir une réponse de votre part, car il s’agit d’un article dont nous avons débattu pendant plus d’une heure la nuit dernière, et il n’y a pas eu de problème entre nous. Une seconde délibération reviendrait à bafouer le travail du Parlement, d’autant que le vote a eu lieu à une heure du matin et que chacun de nous était conscient de son vote. Personne ne s’est trompé lorsqu’il s’est agi d’appuyer sur la touche de son choix – oui, non ou abstention.
Monsieur le secrétaire d’État, devons-nous balayer cette rumeur d’un revers de main ou la confirmez-vous ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics.
M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. Monsieur le député, je ne suis pas sûr qu’à une heure du matin les députés soient aussi attentifs et conscients que vous semblez le croire.
Mme Isabelle Le Callennec. Dans ce cas, il ne faut pas siéger jusqu’à une heure du matin ! Il faut changer le règlement de l’Assemblée !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ce n’est pas moi qui organise les séances, madame la députée ! En disant cela, vous contestez la présidence. C’est la Conférence des présidents qui fixe les horaires de travail, et le Gouvernement est à la disposition du Parlement, comme il le montre tous les jours.
Monsieur Door, la discussion était nourrie, le débat riche et intéressant,…
M. Francis Vercamer. Et de qualité !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. …ce dont nous devons nous féliciter, mais nous examinions un amendement de suppression. Dans la confusion de la nuit et peut-être du fait de la fatigue (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains)…
M. Dominique Tian. Vous nous prenez pour des gens de gauche ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Il serait sympathique de votre part de me laisser aller au bout de mon propos. Si vous ne voulez pas vous coucher ce soir à une heure du matin, continuez ainsi ! Je pourrais ne pas vous répondre, pourtant je vais le faire.
Le vote a été acquis par dix-huit voix contre quatorze.
M. Dominique Tian. C’est bien !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Deux députés ont immédiatement fait savoir qu’ils souhaitaient rectifier leur vote. C’est une procédure que vous connaissez. Et une troisième députée, qui avait quitté l’hémicycle, a fait la même demande ce matin, dès son arrivée à l’Assemblée. Ces trois députés, qui avaient voté les amendements de suppression, ont donc dit qu’ils avaient en fait souhaité voter contre. Toutefois, je sais bien que même si des rectifications de vote sont possibles, elles ne peuvent pas inverser le résultat du vote. Je vous confirme donc que, sur l’article 10, le Gouvernement demandera qu’il soit procédé à une seconde délibération.
Mme Isabelle Le Callennec. Pour rendre service, en quelque sorte !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je vous indique même, pour que vous soyez parfaitement éclairés et que vous puissiez vous y préparer, que la rédaction que vous proposera le Gouvernement intégrera la modification souhaitée par la commission visant à doubler le seuil prévu pour la location des valeurs mobilières, qui de mémoire, avoisine les 3 600 euros. J’avais d’ailleurs indiqué dès le début du débat que le Gouvernement était favorable à cette modification.
Les choses sont claires. Le Gouvernement prend ses responsabilités et demandera sur ce point une seconde délibération.
M. le président. Mes chers collègues, je vous indique qu’il nous reste 511 amendements à examiner.
Il est inutile de vous rappeler que la seconde délibération est de droit dès lors qu’elle est demandée par le Gouvernement et que cette disposition a été utilisée par tous les gouvernements.
La parole est à M. Arnaud Viala.
M. Arnaud Viala. Je voudrais souligner, monsieur le secrétaire d’État, que nous étions tous très conscients lorsque le vote dont nous parlons est intervenu la nuit dernière, non seulement en raison de l’importance des débats, mais aussi parce que nous revenions d’une suspension de séance, que vous aviez sollicitée, au cours de laquelle chacun avait eu le temps de réfléchir à la décision qu’il souhaitait prendre. Nous trouvons donc très suspect que certains de nos collègues aient choisi, à l’issue de cette suspension de séance, de revenir sur la position qu’ils avaient prise.
M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales. Ce choix leur appartient !
M. Arnaud Viala. Par ailleurs, cela signifie que vous passez en force sur un sujet qui sera lourd de conséquences. J’ajoute qu’au cours de la séance d’hier après-midi, le rejet par scrutin public d’un amendement que nous défendions concernant les producteurs laitiers de montagne s’est fait à une voix d’écart. Le parallélisme des formes exigerait que vous reveniez également sur ce vote ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Enfin, à quelle heure cette seconde délibération interviendra-t-elle ?
M. le président. Ce matin, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la troisième partie du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 882 à l’article 16.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour les recettes et l’équilibre général, pour soutenir l’amendement no 882.
M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales. C’est un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Favorable.
(L’amendement no 882 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 883.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Il est également rédactionnel.
(L’amendement no 883, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 634, 760 et 843.
La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 634.
M. Dominique Tian. Monsieur le secrétaire d’État, à quelle heure comptez-vous parler de l’économie collaborative ? La moindre des choses serait de nous en informer. Je constate qu’un groupe est peu représenté alors qu’hier soir il s’est exprimé contre de manière extrêmement forte. Il est normal que les parlementaires qui sont intéressés par le sujet sachent à peu près à quelle heure le débat aura lieu pour ne pas être pris de court. C’est la moindre des courtoisies. Il ne serait pas acceptable de prendre tout le monde par surprise !
L’amendement que je vous propose vise à prendre en compte les différents coûts de distribution pour un même fournisseur agréé selon les catégories des produits du tabac – cigarettes, tabac à rouler, cigares et cigarillos.
La commission de distribution des cigares et cigarillos, tabacs à pipe, tabacs à priser et tabac à mâcher, qui ne sont pas considérés comme des produits d’entrée dans le tabagisme pour les jeunes, est deux à cinq fois plus élevée que la commission de distribution des cigarettes en raison du volume distribué. C’est un débat utile que nous devons engager sur ce sujet et je vois M. Bapt opiner du chef.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 760.
M. Jean-Pierre Door. Il est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement no 843.
Mme Véronique Massonneau. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a repoussé ces amendements. L’assiette de la contribution est constituée du chiffre d’affaires des fournisseurs dont sont retranchés la TVA, la remise consentie aux débitants, c’est-à-dire leur rémunération, et le droit de consommation. Vous proposez d’ajouter à cette liste la commission de distribution, mais cette notion n’étant définie nulle part, nous ne pouvons accepter ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je veux d’abord indiquer à M. Tian, qui souhaite savoir à quelle heure pourrait intervenir la seconde délibération, que je ne peux pas répondre à cette question. Réglementairement, cette seconde délibération ne peut en effet intervenir qu’à la fin de l’examen de la troisième partie du texte.
Mme Isabelle Le Callennec. Il sera cinq heures du matin. Ce sera pire !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cela dépendra donc du rythme auquel avanceront nos travaux.
S’agissant des amendements, le Gouvernement partage l’avis du rapporteur, qui a donné tous les arguments nécessaires pour que l’Assemblée les repousse. Avis défavorable.
(Les amendements identiques nos 634, 760 et 843 ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 635, 765 rectifié et 854.
La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 635.
M. Dominique Tian. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 765 rectifié.
M. Jean-Pierre Door. Il est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement no 854.
Mme Véronique Massonneau. Il est défendu.
(Les amendements identiques nos 635, 765 rectifié et 854, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 636 et 768.
La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 636.
M. Dominique Tian. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 768.
M. Jean-Pierre Door. Il est défendu.
(Les amendements identiques nos 636 et 768, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de l’amendement de précision, no 885, de M. Gérard Bapt, rapporteur.
(L’amendement no 885, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de l’amendement rédactionnel, no 886, de M. Gérard Bapt, rapporteur.
(L’amendement no 886, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L’article 16, amendé, est adopté.)
M. le président. Je vous informe qu’à la demande du Gouvernement, l’Assemblée examinera par priorité, dès le début de la quatrième partie du projet de loi, les articles 58 à 59 et les amendements portant articles additionnels après l’article 59, ainsi que l’amendement no 446 de Mme Laclais portant article additionnel après l’article 44.
M. le président. Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Sauveur Gandolfi-Scheit.
M. Sauveur Gandolfi-Scheit. Madame Delaunay, cela fait dix ans qu’un député du continent propose une mise à niveau de la fiscalité du tabac et du tabac à rouler en Corse. Je défends cette fiscalité insulaire depuis 2010. Je ne lâcherai pas, surtout dans le contexte économique actuel avec la baisse du nombre de touristes que la Corse a connue cette année.
Madame, nous pouvons nous accorder sur l’égalité des territoires en matière sanitaire, mais je ne suis pas d’accord sur la manière de mettre en place cette égalité. La méthode de l’augmentation fiscale n’est pas forcément la bonne.
Comme huit autres territoires de l’Union européenne, la Corse bénéficie d’un cadre fiscal dérogatoire sur le tabac. Les emplois, le tissu social et la concurrence ne sont pas les mêmes que sur le continent. La Corse est une île et nous avons tendance à l’oublier.
Les 1 500 emplois liés, directement ou indirectement, à la production et à la vente du tabac ne sont pas facilement substituables. La disposition que vous proposez aurait des conséquences non seulement pour la sauvegarde du tissu rural, les bureaux de tabac étant les derniers commerces de proximité dans de nombreux villages, mais aussi en termes de concurrence. En cas de hausse de la fiscalité, la Corse serait en effet menacée par le développement d’un marché parallèle entretenu par la proximité de l’Italie et de l’Espagne.
De plus, une réduction de la vente du tabac aurait un impact certain, que l’on peut évaluer à 64 millions annuels, sur les financements de la collectivité territoriale de Corse. Il faudrait alors non seulement trouver des emplois de substitution, mais créer une taxe spéciale pour abonder le budget de la collectivité territoriale.
S’il adopte l’amendement de Mme Delaunay, le Parlement touchera à cette recette et causera une perte de l’ordre de 15 à 20 millions d’euros par an, qui ne sera pas compensée et entraînera donc forcément une hausse de toutes les taxes indirectes.
Nous sommes en faveur d’une prorogation du régime actuel jusqu’au 31 décembre 2020.
Pour toutes ces raisons, et surtout pour ne pas ajouter des difficultés supplémentaires aux insulaires, je vous demande, chers collègues, de ne pas voter l’amendement de Mme Delaunay.
M. Yves Albarello. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Paul Giacobbi.
M. Paul Giacobbi. Je voudrais que l’on aborde ces questions relatives à la Corse avec un peu de sérénité.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure de la commission des affaires sociales. Moi aussi !
M. Paul Giacobbi. Monsieur le secrétaire d’État, il y a quelques jours, à la suite d’un débat finalement serein et sérieux, il a été convenu à propos de la fiscalité de la Corse ni d’un statu quo ni d’un alignement immédiat, mais de l’ouverture rapide d’un chantier qui doit permettre d’examiner les particularités fiscales de la Corse et de procéder – pardonnez-moi cet italianisme – à un aggiornamento.
Il s’agit de mettre fin à ce qui ne se justifie pas, ou plus, et qui comporte souvent plus d’effets négatifs que positifs, de conforter en droit ce qui mérite de l’être, d’organiser cependant les sorties progressives qui minimisent le dommage économique et peut-être de mettre en chantier des dispositions fiscales utiles, qui prennent en compte l’insularité et dynamisent un véritable développement économique. Je pense en particulier aux mesures relatives à la recherche et au développement.
Il faut que les choses soient claires. Les Corses paient des impôts, des taxes, des cotisations et d’ailleurs, je le signale au passage, spectaculairement plus qu’il y a quelques années, car les progrès concernant le taux de recouvrement ou l’assiette, sont tout à fait remarquables.
Il faut également rendre l’économie corse encore plus dynamique en mettant fin à des dispositions obsolètes au profit de mesures d’incitation intelligentes. Dans ces conditions, non seulement la recette fiscale ne diminuera pas, mais elle pourra augmenter pour la collectivité nationale.
Sur la fiscalité du tabac en Corse,…
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Paul Giacobbi. …on a tout dit. La collectivité territoriale de Corse va se créer dans un an. Il serait catastrophique d’augmenter la taxe à ce stade, parce que cela entraînerait une diminution colossale de l’assiette et des ressources. On ne peut improviser de telles mesures.
Enfin, j’entends dire qu’on constate sur l’île une surmortalité de 25 % par cancer du poumon. Je n’ai pas examiné ce chiffre, mais, si je ne suis pas médecin,…
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. C’est bien dommage !
M. Paul Giacobbi. …je connais la statistique. En matière de maladie, on ne doit pas confondre l’incidence et la mortalité. Celle-ci peut être la conséquence d’une moins bonne qualité de prise en charge ou d’un âge moyen de la population plus élevé. En tout état de cause, il est peu vraisemblable qu’une augmentation de 20 % du prix du tabac fasse mécaniquement baisser la mortalité de 20 %.
M. le président. La parole est à Mme Monique Orphé.
Mme Monique Orphé. Je profiterai de la discussion sur cet article pour parler d’un autre problème, tout aussi grave, de santé publique : la consommation excessive d’alcool.
M. Dominique Tian. On n’en est pas là !
Mme Monique Orphé. Après l’article 17, je serai amenée à défendre un amendement adopté en commission des affaires sociales, qui vise à relever la fiscalité de l’alcool de plus de 18 degrés. Menant ce combat depuis l’an dernier, j’ai constaté l’assouplissement de l’encadrement de la publicité sur les alcools. J’ai mesuré aussi la difficulté que nous avons à augmenter même de quelques centimes la fiscalité sur les alcools, notamment les alcools forts.
À titre d’illustration, je citerai quelques phrases d’un rapport de la Cour des comptes, qui a tiré la sonnette d’alarme en juin 2016 : « La place très particulière qu’occupe en France l’alcool dans l’histoire, la culture, l’économie et la vie sociale explique une certaine tolérance vis-à-vis de la consommation de boissons alcoolisées, dont les effets négatifs sont largement sous-estimés. […] Il n’existe pas de consensus sur la nécessité de développer une politique publique spécifique en matière d’alcool. La filière de production met en avant son rôle dans l’économie et la vie en société, et les autorités sanitaires les risques liés aux consommations nocives. »
Dans ce contexte, les acteurs publics sont en position de faiblesse face au secteur des boissons alcoolisés, très présent auprès des institutions européennes et nationales.
Voilà pourquoi je défendrai l’amendement no 681, dont je rappelle qu’il a été adopté en commission. Il propose une augmentation minime : il s’agit de relever de 4 centimes par litre le montant de la cotisation sur les alcools applicable aux boissons titrant plus de 18 %. Je souhaite que le produit de cette augmentation serve à la prévention.
Mon amendement est le fruit d’une conviction. La consommation excessive d’alcool tue. Elle entraîne des décès prématurés. Les chiffres sont là : tous les ans, 49 000 personnes meurent de maladies liées à l’alcool, 22 % de ces décès concernent les jeunes de quinze à trente-quatre ans et 18 % les jeunes de trente-cinq à soixante-quatre ans. La France compte 3,4 millions de consommateurs à risque. Voilà pourquoi je soutiendrai tout à l’heure cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.
M. Francis Vercamer. Loin de moi, loin du groupe UDI, l’idée de contester l’importance de la lutte contre le tabagisme, ou de nier que l’augmentation du prix du tabac contribue à cette lutte.
Néanmoins, cette disposition a ses limites. La France a plusieurs centaines de kilomètres de frontières. Or, on le sait, les Français qui se trouvent à proximité de l’une d’elles la traversent volontiers pour acheter à l’étranger leurs cigarettes ou leur tabac. Dans ce cas, non seulement ils ne contribuent pas au financement de la Sécurité sociale, mais ils ne sont pas concernés par les mesures de lutte contre le tabagisme.
Depuis cinq ans, monsieur le secrétaire d’État, nous vous interrogeons, M. Richard et moi-même, sur l’harmonisation européenne des taxes sur le tabac, qui éviterait la fuite vers les pays étrangers des Français qui veulent utiliser le tabac pour se détruire la santé.
Depuis cinq ans, nous vous posons la même question lors de l’examen du PLFSS. Arnaud Richard l’a également posée lors de l’examen de la loi santé. À ce jour, nous n’avons obtenu aucune réponse, et rien ne nous porte à croire que le sujet ait avancé d’un pouce.
M. le président. La parole est à M. Yves Albarello.
M. Yves Albarello. Je joins ma voix à celle de mes amis députés de Corse pour m’adresser à Mme Delaunay. Je ne vous ferai pas l’affront, madame la rapporteure, de vous demander si vous vous êtes déjà rendue en Corse. Si c’est le cas, avez-vous remarqué qu’il existe une discontinuité territoriale très forte entre le continent et l’île de beauté ?
Pour adoucir la vie des Corses, parce que la vie est dure…
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. La mort aussi !
M. Yves Albarello. …en Corse, ce qu’on ne mesure pas quand on s’y rend seulement en juillet ou en août, il me paraît normal qu’on leur permette de bénéficier de certains avantages fiscaux. Voilà la réalité.
Aujourd’hui, il existe sept ou huit régions auxquelles on accorde des avantages fiscaux. Pourquoi vouloir les supprimer en Corse ?
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. C’est incroyable !
M. Yves Albarello. Enfin, je reprends les propos de M. Vercamer. On va réhabiliter la contrebande sur l’île de beauté.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Vous l’alimentez !
M. Yves Albarello. La Sardaigne, l’Italie, où le tabac est moins cher, sont à une demi-heure en bateau. Votre objectif est-il de rétablir la contrebande ?
Voilà pourquoi je demande à tous mes collègues ici présents de rejeter votre amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Issindou.
M. Michel Issindou. Monsieur le président, je vous demande une brève suspension de séance.
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. Jean-Louis Dumont.
M. Jean-Louis Dumont. J’ai raté une partie de la discussion relative à l’article 16, sur lequel je souhaitais défendre un amendement de suppression, mais j’ai cru comprendre que le décompte des votes avait été effectué d’une façon très rigoureuse, ce qui me rassure.
Depuis des années, je défends des amendements sur le chiffre d’affaires, les augmentations de taxes et les moyens de maîtriser les recettes de l’État – car c’est bien ça l’essentiel. Nous avons eu des échanges à ce sujet, monsieur le secrétaire d’État. Bien sûr, après je parlerai de la prévention, car il faut bien un habillage ! Mais, comme Mme la ministre de la santé n’est pas là, c’est que, manifestement, la question du tabac ou de l’alcool ne l’intéresse que très peu.
M. Dominique Tian. Bravo !
M. Gilles Lurton. Ce n’est pas gentil !
M. Jean-Louis Dumont. Dans cet hémicycle, mes chers collègues, la parole est libre, y compris dans la majorité (« Ah ! » sur quelques bancs du groupe Les Républicains)…
Mme Isabelle Le Callennec. Mais pas le vote !
M. Jean-Louis Dumont. …et j’ai l’habitude, depuis trente ans, de dire ce que je pense. Ce qui intéresse le secrétaire d’État chargé du budget, et pour cause, ce sont les recettes. Mais les recettes peuvent chuter lorsque l’on passe du commerce légal, du commerce de proximité, à l’illégalité. On connaît un pays, dans l’est de l’Europe, qui sait pratiquer la contrefaçon, qui sait organiser les ventes illégalement au cul du camion. Pis encore, depuis un certain temps, est commercialisé un produit low cost, dont personne ne parle. Je pense qu’il serait intéressant que l’on ait un vrai débat sur certaines marchandises. Si un produit est ultra-dangereux, on doit l’interdire. Mais sinon, si l’on fait preuve de mesure dans la consommation de tabac ou d’alcool, si l’on choisit de bons produits, bien de chez nous, les choses vont bien et le secrétaire d’État chargé du budget est content ! Or, on assiste à une bataille idéologique pour savoir qui va avoir raison, et surtout raison d’interdire.
M. le président. Monsieur Dumont, veuillez conclure !
M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le président, vous êtes trop jeune pour avoir connu mai 68 !
M. le président. Oui, merci de me le rappeler !
M. Jean-Louis Dumont. Mai 68 était quand même le moment de la libération des idées !
M. le président. Monsieur Dumont, parce que je suis jeune, je me permets de vous couper la parole. Je vous rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes.
La parole est à M. Frédéric Reiss.
M. Frédéric Reiss. Le réseau des buralistes va connaître, au 1er janvier 2017, une évolution majeure de son activité avec, notamment, l’arrivée définitive, dans les points de vente, du paquet neutre et l’interdiction de la vente de cigarettes à capsules. Or, les prix du tabac à rouler, en France, sont d’ores et déjà les plus élevés d’Europe continentale. La mise en œuvre de cette hausse de la fiscalité ferait exploser les écarts de prix : de fait, les prix en France seraient supérieurs de 5 euros à ceux de produits similaires disponibles dans d’autres États membres de l’Union européenne. Par ailleurs, l’impact de cette mesure est très incertain en termes de santé publique. Monsieur le secrétaire d’État, vous savez bien que, dans les régions frontalières – c’est une réelle difficulté, qui pénalise nos buralistes –, la contrebande en sera démultipliée, pas seulement en Corse, mais également en Lorraine ou en Alsace. C’est pourquoi je suis favorable à la suppression de l’article 17.
M. le président. La parole est à Mme Michèle Delaunay, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour l’assurance maladie.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure de la commission des affaires sociales. Je voudrais, comme cela a été demandé, que nous nous exprimions sereinement sur ce sujet. Quelle est, actuellement, la situation ? Premièrement, la fiscalité du tabac est telle que les cigarettes – je simplifie – sont 25 % moins chères en Corse que sur le continent. Deuxièmement, le produit de la fiscalité du tabac va aux collectivités corses. Troisièmement, il n’y a, dans mes propositions, aucune improvisation, ne serait-ce que parce que, depuis cinq ans, l’Europe nous dit qu’au 1er janvier 2016, nous aurons à payer une amende en raison de l’absence de continuité territoriale. En vertu du principe de continuité territoriale, en effet, le tabac doit être au même prix en tout point du territoire national. J’ai interrogé M. Moscovici, qui n’est pas corse ; il m’a répondu qu’il n’était pas possible, pour l’heure, de connaître le montant de l’amende, mais que celle-ci était certaine et qu’elle serait à payer par l’État français. Vous avez raison de souligner que la différence de fiscalité entre la Corse et le continent est ancienne, puisqu’elle remonte à Napoléon, lequel n’était nullement au courant des dangers du tabac qui, comme vous le savez, tue un fumeur sur deux.
M. François Pupponi. Vous n’en savez rien, Napoléon connaissait beaucoup de choses !
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Oui, mais je m’autorise à parler en son nom, aujourd’hui, pour défendre les Corses. Que constate-t-on, en effet ? La mortalité par cancer épidermoïde du poumon, qui est liée, dans 100 % des cas, au tabac, est de 25 % plus élevée en Corse – je parle bien de la mortalité. Cela ne s’explique pas par une différence de traitement, car les cancers pulmonaires du poumon sont généralement traités à Marseille.
M. Dominique Tian. Absolument !
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. En revanche, ils sont comptabilisés au titre de la mortalité en Corse.
J’en viens à mon amendement, que vous n’avez manifestement pas lu. Il porte sur l’harmonisation du taux de fiscalité en Corse et sur le continent…
M. le président. Veuillez conclure, madame la rapporteure !
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Il a pour objet de sauvegarder l’état de santé des Corses – c’est ma première préoccupation – et de nous éviter d’avoir à payer une amende. Je n’ai aucunement demandé que le produit de la fiscalité revienne, ex abrupto, à l’État, car je veux, comme vous, assurer une sortie intelligente, en biseau. Finalement, je crois que nous sommes d’accord sur tout, et que nous pourrions sereinement décider de cette augmentation de la fiscalité.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 57, 216, 361 et 466, tendant à la suppression de l’article 17.
La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 57.
M. Dominique Tian. Cet amendement a en effet pour objet de supprimer l’article 17, qui vise à aligner la fiscalité pesant sur le tabac à rouler sur celle s’appliquant aux cigarettes. Allons à l’essentiel : monsieur le secrétaire d’État, quand on négocie avec les buralistes, encore faut-il que l’on tienne ses engagements. Les négociations sont entamées depuis longtemps ; des plannings ont été fixés, des engagements ont été pris sur le prochain contrat d’avenir. Il n’est donc pas possible de changer les règles. Le paquet neutre a déjà été négocié. Maintenant survient cette modification inattendue et soudaine. Ce n’est pas parce que vous avez porté cet amendement depuis des années, madame Delaunay, qu’il était officiel. En tout cas, le Gouvernement s’était engagé à ne pas changer le résultat des négociations sur le contrat d’avenir. Laissons le temps aux buralistes, respectons les engagements de l’État et, partant, supprimons cet article.
M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement identique no 216.
M. Gilles Lurton. Cet amendement vise également à supprimer l’augmentation de la fiscalité du tabac à rouler. Beaucoup l’ont rappelé, l’augmentation de cette fiscalité ne fera que favoriser les achats transfrontaliers et la contrebande. Madame Delaunay, l’expérience nous a toujours montré que toute hausse de la fiscalité du tabac débouchait tôt ou tard sur une augmentation des prix, qui menait inéluctablement à une augmentation du marché parallèle. Quand, en France, la blague de trente grammes de tabac à rouler coûte 7,40 euros, elle vaut 2,85 euros au Luxembourg, 3,60 euros en Belgique, 4,50 euros en Allemagne, 4,70 euros en Espagne et 5,40 euros en Italie. Enfin, les buralistes ne vous comprennent plus : alors que les négociations relatives au contrat d’avenir battent leur plein et que Bercy a annoncé, le 18 septembre, qu’il n’y aurait pas de hausse des prix du tabac, une nouvelle hausse de la fiscalité sur le tabac à rouler survient brutalement dans ce PLFSS. Plus personne n’y comprend rien. Je vous assure que la mise en place du paquet neutre est déjà une question délicate à traiter pour les buralistes. Il conviendrait, pour le moment, de s’en tenir là.
M. le président. La parole est à M. Paul Giacobbi, pour soutenir l’amendement identique no 361.
M. Paul Giacobbi. Il est défendu. Je ne veux pas aggraver mon cas ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour soutenir l’amendement identique no 466.
M. Jean-Louis Dumont. Il est également défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission n’a pas adopté ces amendements. Les chiffres montrent en effet que la consommation de tabac à rouler progresse de manière très dynamique, de l’ordre de 5 % par an, et que ce mode de consommation est privilégié par les jeunes ; il s’agit donc d’une porte d’entrée dans le tabagisme. Si les chiffres globaux permettent de noter une diminution du tabagisme dans certains secteurs de la population, ce n’est pas le cas chez les jeunes et les adolescents – qui souvent, qui plus est, mélangent le tabac à rouler avec d’autres substances. C’est donc au vu d’observations sanitaires que la commission soutient l’article et émet un avis défavorable sur les amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Pour qu’il n’y ait pas de confusion, je signale que nous en sommes à l’article 17, c’est-à-dire à l’augmentation du prix du tabac à rouler, et non à la situation en Corse, question que certains ont pourtant évoquée – ce que je peux comprendre vu qu’il fallait s’inscrire sur l’article 17 pour pouvoir parler des amendements portant articles additionnels après l’article 17, qui seront examinés tout à l’heure. Là, il s’agit de savoir si l’on adopte, ou non, la proposition faite par le Gouvernement d’augmenter le prix du tabac à rouler. Beaucoup de questions se posent.
La ministre de la santé, qui s’était efforcée, compte tenu de contraintes très importantes que je n’ai pas à dévoiler ici, d’être présente ce matin pour discuter du prix des médicaments, et qui va nous rejoindre normalement d’ici à quelques dizaines de minutes tout au plus, n’a marqué aucun mépris pour ce sujet – compte tenu de ses positions, qui sont bien connues, je crois qu’on ne peut pas dire qu’elle méprise le sujet ! C’est une simple question d’organisation qui fait que c’est votre serviteur qui se trouve actuellement au banc du Gouvernement plutôt que la ministre – qui devrait revenir bientôt.
S’agissant de l’harmonisation européenne – certains d’entre vous en ont parlé –, la ministre de la santé et d’autres ministres ont cosigné il y a quelques mois une lettre à la Commission européenne afin de se battre et demander l’harmonisation de la fiscalité sur le tabac ; c’est une nécessité, mais, sur ce point, on ne peut que constater que les choses n’avancent pas très vite – c’est vrai aussi dans d’autres domaines. La France a fait la demande, régulièrement réitérée, d’avancées en matière d’harmonisation des fiscalités européennes sur le tabac. C’est la position du Gouvernement, et il l’a manifestée très souvent.
S’agissant des recettes liées à la fiscalité du tabac, évidemment le secrétaire d’État au budget y est sensible ; cependant, nous avons déjà constaté qu’une augmentation des prix n’entraînait pas nécessairement une augmentation des recettes. À partir d’un certain niveau, la baisse soit de la consommation, soit des ventes dans le circuit légal, fait que, in fine, on va certes gagner davantage sur un paquet, mais comme moins de paquets sont échangés dans le circuit légal, les recettes s’en trouvent affectées. Cela dit, nous n’en faisons pas un problème ! Ce que je tiens à dire ici, c’est que ce sont les questions de santé qui sont prioritaires.
M. Michel Issindou. Très bien !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je n’ai jamais dit qu’il fallait augmenter les prix pour avoir plus de recettes – mais j’aurais dit le contraire, cela aurait été un peu ridicule... Voilà donc pour ce qui est de ma position concernant les prix et leurs effets sur les recettes du budget de l’État ou de la sécurité sociale.
S’agissant du contrat d’avenir avec les buralistes, vous dites : « Il y avait des engagements, vous ne les tenez pas ». Vous savez, si le Gouvernement n’en voulait pas, ce serait très simple : il dirait, le contrat d’avenir, il s’arrête à la fin de l’année, c’est terminé, la Cour des comptes et d’autres ont dit que c’était scandaleux, on ne le renouvelle pas. Mon souci, à moi, est de le renouveler, de façon à disposer d’une organisation des choses qui soit la plus favorable. Je n’accepte pas l’argument qui consiste à dire que cela va à contre-courant de nos engagements. Je tiens à discuter jusqu’au bout, et à essayer de trouver un accord.
Il reste que les ventes de tabac à rouler ont augmenté, en volume, de 5,6 % en 2015. Sur les huit premiers mois de l’année 2016, on constate encore une augmentation, en volume, de l’ordre de 2,5 %. Si vous le souhaitez, je peux vous donner des chiffres plus anciens : depuis 1990, les ventes de tabac à rouler ont augmenté, en volume, de 84 %, alors que celles des cigarettes diminuaient de moitié. On voit bien qu’il y a là une distorsion et que le tabac à rouler constitue ce que beaucoup appellent une porte d’entrée vers l’addiction à l’usage du tabac.
Le Gouvernement vous propose donc cette disposition dans un objectif de santé public et pour aller vers une harmonisation de la fiscalité du tabac à rouler et de celle des cigarettes.
M. Frédéric Reiss. On ira acheter le tabac à rouler à l’étranger ! Comme les cigarettes !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. C’est pourquoi le Gouvernement demande à l’Assemblée de repousser les amendements de suppression de l’article 17 – qui, je le répète, porte sur l’augmentation du prix du tabac à rouler et non sur la situation en Corse, qui nous occupera tout à l’heure.
M. le président. Avant de passer au vote sur les amendements de suppression, je vais donner la parole aux différents orateurs qui me l’ont demandée. Je rappelle cependant que nous avons un règlement et que mon rôle est de l’appliquer.
Je souhaite que le débat puisse se dérouler correctement, car il s’agit d’un sujet important. Les demandes de parole sont au nombre de cinq ; je n’en accepterai aucune autre. Mme Le Callennec sera donc la dernière oratrice à s’exprimer.
La parole est à M. François Pupponi.
M. François Pupponi. Je voudrais pour ma part revenir sur le sujet qui fera ultérieurement l’objet d’amendements. (Exclamations sur divers bancs.)
Je veux bien en parler tout à l’heure, monsieur le président. Si vous voulez, votons sur ces amendements de suppression et je m’exprimerai à une autre occasion.
M. le président. Voilà, faisons ainsi !
La parole est à M. Michel Issindou.
M. Michel Issindou. Ce débat revient tous les ans, depuis de nombreuses années. C’est un vrai sujet : alcool et tabac font partie, fort légitimement, des préoccupations d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je rappelle d’ailleurs que notre discussion s’inscrit dans ce cadre ; c’est donc qu’à travers les diverses mesures que nous prenons, nous essayons d’améliorer la santé de nos concitoyens.
Je crois que personne ne peut contester la liberté de chacun de « succomber à ses vices », ou plutôt à ses « plaisirs », mais personne ne conteste aujourd’hui le coût du tabagisme des jeunes et des moins jeunes – je ne citerai pas de nouveau des chiffres que vous connaissez. Objectivement, je ne vois pas ce qui pourrait justifier aujourd’hui que la taxe sur le tabac à rouler soit de 30 % inférieure à celle sur le tabac sous forme de cigarettes. Je rappelle que nous nous sommes engagés dans un plan national de lutte contre le tabagisme – et si la ministre n’est pas là, on ne peut pas lui faire le procès de ne pas s’y intéresser, car elle est très impliquée dans ces sujets !
Il me paraît assez naturel et légitime de nous diriger tout doucement vers une harmonisation de la fiscalité. Cela ne me scandalise pas ; bien au contraire, ce serait plutôt la situation actuelle qui me scandaliserait.
Je vous propose donc de voter contre la suppression de l’article 17.
M. le président. La parole est à M. Philip Cordery.
M. Philip Cordery. Certains ici invoquent, comme à chaque débat, les distorsions transfrontalières qui peuvent exister – et il est vrai qu’elles existent. À partir du moment où l’on a fait ce constat, il y a deux solutions : soit votre attitude, qui est fataliste – si l’on vous écoutait, on procéderait, en Europe, à un alignement vers le bas ; soit notre attitude, qui est volontariste.
Nous disons : oui, il faut agir sur la santé publique. C’est ce que nous faisons en France : c’est ce que nous avons fait avec le paquet neutre, et c’est ce que nous voulons faire aujourd’hui avec la fiscalité. Et nous agissons aussi à l’échelon européen. C’est précisément pourquoi nous avons, ici même, voté il y a un an une proposition de résolution européenne appelant à un alignement vers le haut de la fiscalité sur le tabac en Europe, que la ministre de la santé s’est entretenue avec ses homologues européens pour obtenir une augmentation de la fiscalité sur le tabac, et que nous avons, il n’y a pas plus de quelques semaines, posé la question au commissaire européen à la santé, à l’occasion de son audition. Les choses avancent donc à l’échelon européen aussi.
Par conséquent, je préfère notre attitude volontariste, qui vise à améliorer la santé publique, à votre attitude fataliste, qui tend à aligner vers le bas la fiscalité du tabac, donc à aggraver les problèmes liés au tabagisme que nous rencontrons dans notre pays.
M. le président. La parole est à Mme Michèle Delaunay, rapporteure.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Je veux saluer le Gouvernement, qui nous propose cette mesure, et qui le fait au nom de la santé publique et non au nom des recettes fiscales, puisque, justement, les revenus du tabac à rouler augmentaient. Nous allons, je l’espère, stopper cette augmentation. Il s’agit en effet du prix d’appel pour l’entrée en addiction ; jusqu’alors, aucun gouvernement n’avait voulu affronter le défi de l’harmonisation des prix du tabac. C’est une stricte question de santé publique – qui ne devrait avoir aucun effet, ou en tout cas dans des proportions moindres que ce que vous semblez croire, sur la contrebande.
M. Dominique Tian. Mais si !
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. L’objectif est d’empêcher les jeunes d’entrer en addiction : s’ils n’achètent pas de tabac à rouler, ils ne l’achèteront ni en France ni ailleurs.
M. Frédéric Reiss. Tu parles !
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. C’est un sujet majeur de santé publique.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.
Mme Isabelle Le Callennec. Moi, je partage totalement l’objectif de santé publique qui vient d’être rappelé.
M. Gérard Sebaoun. Tant mieux ! Bravo !
Mme Isabelle Le Callennec. Je voudrais juste, monsieur le secrétaire d’État, vous interroger sur les propos qu’a tenus tout à l’heure la ministre de la santé. Elle semblait nous dire que le plan de lutte contre le tabagisme commençait à porter ses fruits ; mais le paquet neutre ne peut encore avoir eu d’effets, car il vient tout juste d’être mis en œuvre. Je ne demande qu’à être convaincue de l’efficacité des actions tendant à réduire la consommation de tabac, dont on connaît les conséquences sur la santé, mais, pour le moment, rien n’a réellement été prouvé – en tout cas, pour ce qui est du paquet neutre, ce n’est pas prouvé.
Vous disiez tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, que l’on notait plutôt une augmentation du chiffre d’affaires et des ventes des buralistes. C’est contradictoire avec ce que disait la ministre, à savoir que l’on commençait à voir la consommation baisser !
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Elle n’a pas dit ça !
Mme Isabelle Le Callennec. Alors, êtes-vous en phase ou pas ? Quelles sont les mesures qui sont efficaces et celles qui ne le sont pas ?
S’agissant de l’harmonisation, je rappelle que l’année dernière, avec Bérengère Poletti, nous avions déposé un amendement visant précisément à demander une harmonisation à l’échelle européenne. Je crois savoir qu’en la matière, la règle de l’unanimité s’applique : nous ne sommes pas au bout de nos peines ! Il faut mener le combat, mais ce n’est pas ce qui résoudra au quotidien le problème qui nous est posé.
Mais j’en reviens à ma question, monsieur le secrétaire d’État : quid de cette contradiction entre ce que vous avez dit, à savoir que la consommation et les ventes de tabac continuent d’augmenter, et ce qu’a dit la ministre, à savoir que les mesures appliquées ont prouvé leur efficacité ?
M. Gérard Sebaoun. Chez les jeunes !
M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements de suppression.
(Les amendements identiques nos 57, 216, 361 et 466 ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 290 et 305.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 290.
M. Jean-Pierre Door. Il convient de rappeler que la politique de lutte contre le tabagisme se fait sur tous les bancs de cette assemblée, depuis de nombreuses années. Avant même cette législature, on menait déjà une politique de lutte contre ce fléau – souvenez-vous des débats qu’il y avait eu à l’époque. On ne peut donc pas taxer les uns ou les autres d’être pour ou contre le tabac. Cela concerne tout l’hémicycle.
L’article 17 vise à augmenter la fiscalité sur le tabac à rouler. Ce que l’on pourrait faire, pour que ce soit beaucoup plus efficace et pour éviter de nourrir le marché parallèle et les trafics, ce serait effectuer une sorte de lissage, avec une augmentation de la fiscalité sur trois ans, en 2017, en 2018 et en 2019. Cela laisserait du temps pour lutter contre les trafics – il a été rappelé qu’une telle lutte devait impérativement être menée –, pour obtenir une véritable volonté d’harmonisation à l’échelle européenne, et aussi pour négocier un nouveau contrat d’avenir avec les buralistes, comme l’a indiqué le secrétaire d’État ce matin. Tout cela peut se faire en lissant sur trois ans la hausse de la fiscalité. Ne faisons pas des politiques à coups de hache : donnons-nous un peu de temps !
M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 305.
M. Bernard Accoyer. Sans vouloir contredire notre collègue Cordery, je rappelle que la politique de lutte contre le tabagisme ne saurait être menée exclusivement dans un pays de l’Union européenne. Nos frontières sont des lieux de passage par lesquels transitent tous les jours plusieurs centaines de milliers de véhicules et de citoyens de tous les pays d’Europe. Contrebande et achats dans les pays taxant moins le tabac et le papier à rouler appellent un sursaut des gouvernements nationaux afin de négocier pour faire converger les politiques de lutte contre le tabagisme que nous menons et dont la plupart partagent les objectifs.
Il faudrait donc que le Gouvernement se rallie à ces amendements qui laissent le temps aux autorités, au moyen d’un lissage de l’évolution de la taxation, de se rapprocher des autres États membres afin de trouver une solution commune sans laquelle il ne peut exister de véritable politique de lutte contre le tabagisme en Europe. Sur ce point, je ne crois pas qu’il existe beaucoup d’observateurs susceptibles de défendre un point de vue différent. Tels sont les arguments qui fondent cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a repoussé ces amendements qui prévoient un lissage sur trois ans de l’augmentation de la fiscalité du tabac à rouler. L’article 17 prévoit bien une augmentation progressive, mais il augmente le taux proportionnel de la taxe et non la part spécifique du droit de consommation, alors que ces amendements visent à augmenter les deux. On pourrait naïvement croire que leurs effets se compensent, mais tel n’est pas le cas. Seule l’augmentation du taux proportionnel permet de combler in fine l’écart relatif du poids de la fiscalité entre les cigarettes et le tabac à rouler. En effet, le taux proportionnel frappe le prix de vente toutes taxes comprises alors que la part spécifique du droit de consommation est calculée en dedans du prix.
En résumé, le lissage que vous proposez, chers collègues, ne saurait combler l’écart relatif de la fiscalité entre cigarettes et tabac à rouler. L’unique solution consiste à augmenter le taux proportionnel dans les conditions prévues par l’article 17. Vos amendements, tels qu’ils sont rédigés, ne répondent pas à l’objectif que vous vous proposez d’atteindre en trois ans. La commission les a repoussés, car ils sont contraires à l’objectif du Gouvernement et de la majorité.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je voudrais apporter quelques éléments de réponse aux questions qui m’ont été posées. Vous m’interrogez, madame la députée Le Callennec, sur une prétendue contradiction entre les propos tenus par deux membres du Gouvernement. Je puis vous assurer que la concertation sur ce sujet entre Bercy – comme il est malheureusement convenu de dire – et le ministère des affaires sociales et de la santé, conduite sous l’autorité du chef du Gouvernement bien entendu, est pleine et entière, comme elle ne l’a d’ailleurs pas souvent été. Nos positions sont communes et il ne faut pas chercher plus loin.
Mme Isabelle Le Callennec. J’essaie de comprendre !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Certes, mais je tenais à signaler cet état de fait, car tel n’a pas toujours été le cas, ou du moins l’a-t-on prétendu. Vous pointez du doigt une difficulté. Constate-t-on, oui ou non, une augmentation de la consommation et des ventes légales ? Sur le deuxième point, j’ai dit clairement que les ventes dans le circuit légal augmentaient à nouveau après des années de baisse consécutives. Il s’agit d’une donnée. Est-ce dû à une augmentation de la consommation ou à une diminution des ventes illégales et des achats à l’étranger ? Il est toujours difficile de le dire !
Le paysage présente plusieurs caractéristiques. Le nombre de Français augmente tous les ans. Cette donnée, il faut parfois l’avoir à l’esprit, y compris sur d’autres sujets. Par ailleurs, l’Euro a fait venir en France des millions de touristes pendant quelques jours, voire quelques semaines. Tous ne sont probablement pas venus avec leur réserve de cigarettes ! Telles sont les explications qu’on nous a données. Les spécialistes et les professionnels mentionnent également le beau temps qui a régné récemment.
Mme Isabelle Le Callennec. Quand il fait beau, on fume plus !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je l’ai dit hier avec le sourire, car cette explication m’a intrigué aussi, mais ce genre d’explication nous est donné par les professionnels ! Quant à la lutte contre la fraude, je rappelle tout de même que nous avons publié une circulaire diminuant le nombre de paquets autorisés à l’importation lors de voyages à l’étranger ; que les saisies aux frontières connaissent des augmentations considérables, dont les chiffres, que je n’ai pas avec moi à cet instant, se trouvent dans tous les documents disponibles ; que nous avons interdit non pas la vente sur internet, qui était déjà interdite, mais l’achat sur internet, en prévoyant la possibilité de poursuivre les contrevenants ; que nous avons travaillé avec les expressistes, y compris dans les ports et les aéroports où je me suis rendu, afin qu’ils décèlent les transferts d’achats illégaux par colis express, dont bien sûr le tabac.
Ces mesures et d’autres ont contribué, me semble-t-il, à dissuader plus encore l’importation de produits. Je suis donc un peu surpris par ces amendements, qui proposent de ralentir le rythme. Tant les spécialistes que mes services, notamment la douane qui traite ce genre de sujets, ainsi que les professions médicales, estiment que les augmentations lentes et continues de la fiscalité sont sans effet et qu’au contraire les augmentations soudaines et brutales provoquent des changements de comportement.
Mme Isabelle Le Callennec. Comme l’affirme Mme Delaunay !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Beaucoup, pas seulement Mme Delaunay, dressent ce constat que renforce le parallélisme des courbes du prix et de la consommation légale. Ces questions ne font pas forcément l’objet d’une réponse binaire. Je fais état des informations dont je dispose et suis un peu surpris que des amendements visent à ralentir le rythme en lissant l’augmentation de la fiscalité sur trois ans. Il me semble que le dispositif prévu par l’article 17 est plus équilibré. Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Costes.
M. Jean-Louis Costes. Il me semble au contraire qu’il s’agit de bons amendements, car ils lissent l’augmentation de la fiscalité sur trois ans. Contrairement à vous, monsieur le secrétaire d’État, je pense qu’une augmentation rapide peut avoir des effets dramatiques, notamment parmi les consommateurs de tabac à rouler qui, pour l’essentiel, sont des jeunes. Il ne faudrait pas qu’une augmentation massive et brutale provoque une ruée, ou à tout le moins un transfert de consommation, vers d’autres substances assez faciles d’accès dans ce pays. Le remède serait alors pire que le mal. Il faut faire attention. Vous évoquiez des changements de comportement. Une augmentation rapide de la fiscalité pourrait en provoquer.
M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun.
M. Gérard Sebaoun. J’évoquerai, d’une part, la santé publique et, d’autre part, la contradiction du discours de l’opposition. Lorsque nous avons débattu du paquet neutre, on entendait dire que l’Australie avait connu un certain succès en raison de l’effet prix et non de la mise en place du paquet neutre. Et voilà que vous préférez à l’effet prix un lissage tranquille, chers collègues de l’opposition ! Deux types de consommation augmentent beaucoup parmi les jeunes actuellement : la chicha et le tabac à rouler, qui est bien moins cher que le tabac manufacturé. L’efficacité suppose un effet prix. Celui-ci est important, comme l’a montré l’effondrement significatif de la consommation de tabac en 2005 consécutif à l’augmentation significative de son prix sous l’impulsion de Jacques Chirac. Par ailleurs, personne ici n’ignore, du moins je l’espère, que le tabac à rouler est plus dangereux que le tabac manufacturé selon toutes les études disponibles. Le papier lui-même est plus ou moins dangereux en fonction de son épaisseur.
M. François Pupponi. Alors qu’on l’interdise !
M. Gérard Sebaoun. Arrêtons donc d’affirmer que le tabac à rouler et le tabac manufacturé, c’est la même chose ! Les deux sont dangereux, mais il s’agit ici d’obtenir un effet prix sur le tabac à rouler, qui l’est plus. Je suis donc favorable à l’adoption de l’article 17 en l’état.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard.
M. Arnaud Richard. Selon vous, monsieur le secrétaire d’État, la relation entre Bercy et le ministère des affaires sociales et de la santé est bonne, pour plusieurs raisons dont une que vous oubliez de mentionner : outre la qualité des relations entre les deux membres du Gouvernement, il en est ainsi car le Parlement l’a souhaité. Nous avons voté ici un amendement, à quelques-uns, contre l’avis du Gouvernement et de tous ceux qui défendent l’industrie du tabac – et ils sont nombreux – rendant obligatoire, pour la fixation du prix, un arrêté conjoint du secrétaire d’État au budget et du ministre de la santé. La qualité de votre relation avec Mme la ministre de la santé au sujet du tabac tient aussi à cet arrêté qui vous enjoint d’adopter une position commune.
(Les amendements identiques nos 290 et 305 ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 5 et 4, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour les soutenir.
M. Jean-Louis Dumont. Merci de me laisser le droit à la parole, monsieur le président ! Vous conviendrez, monsieur le secrétaire d’État, que j’essaie chaque année, lorsque nous discutons du tabac, d’être très attentif à la ressource fiscale qu’il constitue pour l’État. Celle-ci fait d’ailleurs l’objet de ces amendements, qui portent respectivement sur les alinéas 4 et 5 de l’article 17 et visent à relever le niveau du minimum de perception de 210 à 215 euros et de 167 à 175 euros. En effet, on constate actuellement qu’une bataille des prix s’engage. L’application d’un pourcentage au prix de vente risque de faire diminuer la ressource. Cette bataille des prix – j’ose le dire avec la plus extrême prudence – mènera peut-être à une nouvelle identification du paquet neutre, par le prix au lieu de la marque. Il faut être très attentif à ce genre de phénomène.
Je souhaite donc au moins garantir les ressources de l’État. Je souhaite aussi que l’on ne se contente pas de discuter de prévention à l’occasion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale ou d’un projet de loi de finances rectificative, mais que l’on se préoccupe quotidiennement non seulement du tabac mais de certains produits que les gens absorbent et qui font manifestement défaut dans nos débats. On sait qu’il est possible, dans le moindre des villages ruraux, de consommer de la coke, en général d’assez bonne qualité d’ailleurs, à des prix défiant toute concurrence. Il s’agit donc bien d’un enjeu national !
Cela fait peut-être rire les spécialistes, mais je ne suis qu’un élu, un militant. Compte tenu de ce que consomme la jeunesse, notamment les produits de substitution, il me semble que nous avons intérêt à faire attention aux produits vendus dans l’illégalité, qu’il s’agisse de tabac ou d’autre chose, ainsi qu’à la contrefaçon. Au lieu de chanter les louanges de certains pays européens qui envoient leurs produits chez nous, on pourrait peut-être avoir des débats moins passionnés et s’écouter. J’ai pour ma part beaucoup de respect pour les spécialistes qui s’expriment sur les dangers pesant sur la santé, car on apprend toujours quelque chose. Que l’on interdise ces produits, et si l’on ne veut pas le faire, il faut maîtriser la recette de l’État, qui a besoin d’argent !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Nous ne sommes pas là pour régler les différends entre majors du tabac, monsieur Dumont.
M. Jean-Louis Dumont. Je parle des produits, pas des majors !
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. On sait très bien ce qui motive ces amendements ! J’aimerais rappeler que l’Organisation mondiale de la Santé – OMS – rassemble des pays entre lesquels il existe un consensus pour lutter contre les problèmes de santé publique. La convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac admet expressément que l’augmentation des taxes sur le tabac réduit la consommation de celui-ci, qu’il s’agisse de cigarettes ou de tabac à rouler. Je pense qu’il faut écouter l’OMS.
M. Philip Cordery. Très bien !
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Par ailleurs, on ne peut pas être spécialiste de tout, mais il vaut mieux ne pas agiter le thème de la prévention quand on n’a pas suivi ce qui s’est fait dans le cadre du texte qui a été voté en janvier 2016, monsieur Dumont !
M. Jean-Louis Dumont. Je constate, c’est tout !
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Vous reprochez à ceux qui s’occupent de ce sujet de ne rien faire en matière de prévention des substances illicites !
Vous a-t-il échappé que nous avons voté l’installation de consultations jeunes consommateurs partout sur le territoire ? Voilà une politique de prévention ! Comme rien n’avait été fait avant, il nous est revenu, à nous, d’agir. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.) Il est faux de dire que rien n’a été fait contre les substances illicites.
M. Arnaud Richard. N’en faites pas trop !
M. Bernard Accoyer. Qu’avez-vous fait contre le cannabis ?
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Pour avoir travaillé longtemps dans des réseaux de lutte contre l’addiction, je souhaite rappeler que les addictions sont rarement uniques, que l’on parle plutôt de conduites poly-addictives, où alcool, tabac et autres substances sont consommés. Lorsqu’un jeune entre dans le tabac, c’est le plus souvent par la cigarette. Mais comme les paquets sont chers, il se déporte sur le tabac à rouler. Puis quand ça ne va pas trop bien dans sa vie, il commence à boire un peu plus que ce que la convenance sociale admet, et ajoute du cannabis dans son tabac à rouler. Voilà la réalité du comportement des jeunes ! Avis défavorable de la commission sur les deux amendements.
Mme Isabelle Le Callennec. C’est pour cela qu’il serait préférable d’avoir un débat sur le cannabis !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Défavorable.
M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.
M. Gilles Lurton. Lorsque j’ai dit hier à M. Bapt qu’il était intervenu l’année dernière sur l’ACCRE et qu’il était revenu sur sa position, je me suis trompé. Je lui demande de bien vouloir m’en excuser. En revanche, je me souviens très bien que Mme Delaunay avait déposé l’an dernier des amendements similaires ! Mme la ministre de la santé lui avait alors clairement répondu qu’elle ne souhaitait pas que l’on adopte des dispositions portant sur le prix du tabac car elle avait proposé, dans le cadre de la loi de modernisation du système de santé, la mise en place du paquet neutre.
Aujourd’hui, le paquet neutre commence, doucement, à entrer dans les bureaux de tabac. Cela ne va pas sans difficultés. J’ai participé à l’assemblée générale des débitants de tabac de ma circonscription, et je vous assure que ce n’est pas simple. Je pense qu’il aurait fallu, au préalable, passer cette étape. Mais bien sûr, nous sommes tous préoccupés par les dangers que le tabac présente pour la santé et sommes favorables aux mesures qui permettent de les éviter.
(Les amendements nos 5 et 4, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(L’article 17 est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 839 et 840, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, pour les soutenir.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. L’amendement no 839 vise à réserver aux buralistes la vente du tabac. En effet, le tabac vendu dans d’autres lieux, comme les brasseries ou les boîtes de nuit, touche un public souvent jeune, ayant parfois bu autre chose que du jus de fruits et donc particulièrement enclin à entrer dans l’addiction.
En outre, ces autres lieux de vente participent de la banalisation du tabac. Les buralistes qui y étaient autrefois favorables – en fin de compte, ces débits faisaient augmenter leurs profits – commencent à se gratter la tête. Certains points H, dans les gares, ayant été achetés par Monoprix et Casino, ils découvrent que cela peut être une porte d’entrée du tabac dans la grande distribution. Je partage leur inquiétude : on se dit qu’un produit qui est vendu au côté de camemberts et de bouteilles de shampoing dans un ancien point H rebaptisé monop’daily ou Casino shop ne peut pas être bien méchant. Voilà pourquoi, relayant cette fois leurs préoccupations, je souhaite que nous réservions la vente du tabac aux buralistes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. Hélas, la rédaction qui nous est proposée supprime la quasi-totalité des dispositions prévoyant les modalités de liquidation du droit de licence. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Mme Delaunay a retiré cet amendement en commission, à ma demande. Je souhaite donc qu’elle le retire à nouveau ; à défaut, je demanderai à l’Assemblée de le rejeter.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Monsieur Richard, l’arrêté ne fixe pas les prix, il les homologue. Contrairement à ce que l’opinion croit, nous ne fixons pas les prix, nous nous assurons que les prix de vente sont les mêmes dans tous les endroits du territoire – du moins dans l’Hexagone. (Sourires.)
M. Arnaud Richard. C’est que nous ne sommes pas allés assez loin !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. S’agissant des bureaux de tabac « spéciaux », le rachat de relais H par une enseigne, dans le cadre d’une concession d’utilisation du domaine public, a fait récemment l’actualité. C’était à Epinal.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. C’est le cas également à Libourne !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je ne pouvais m’y opposer, puisque le droit à la licence faisait partie des actifs rachetés. S’y opposer aurait été contraire à la règle, la décision aurait été attaquée et nous aurions été condamnés, de façon quasi certaine.
Nous souhaitons limiter le nombre de points de vente qui n’appartiennent pas au réseau des buralistes. Cela étant, ils sont soumis à autorisation du directeur interrégional des douanes et les supprimer encouragerait, là encore, des ventes illégales. Je rappelle que les produits commercialisés dans ces débits exceptionnels – parfois dans des prisons – doivent être achetés au bureau de tabac le plus proche et être revendus à un prix au moins égal à celui homologué par les arrêtés.
J’ai donné des instructions pour que le nombre de ces points de vente soit le plus limité possible. En revanche, je ne peux m’opposer aux reprises de concessions par d’autres enseignes que les relais H. Je considère qu’il faudra, à l’avenir, limiter les créations de nouveaux points de vente – j’ai donné des instructions en ce sens – dans le cadre de concessions d’utilisation du domaine public.
M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.
M. Bernard Accoyer. Quelques mots pour exprimer, bien sûr, une communauté de vues dans la lutte contre le tabagisme, mais m’étonner aussi que l’on ne prenne pas en compte le problème numéro 1, le cannabis. On sait très bien en effet que, dans les boîtes de nuit et autres lieux de divertissement, c’est moins la consommation de tabac que celle de cannabis et autres substances addictives qui pose problème.
Je veux dire très simplement à nos collègues que s’il est bon de multiplier les mesures anti-tabac, il ne faut pas perdre de vue les ravages que cause la consommation de cannabis dans notre pays, une des plus élevées d’Europe chez les jeunes. Je ne défends en aucune façon la consommation de tabac, mais cette stigmatisation du tabac freine ce que nous devrions faire pour protéger ces jeunes cerveaux en devenir, qui devront supporter les conséquences abominables, sur le plan psychologique – et parfois psychiatrique –, de la consommation de cannabis.
M. le président. La parole est à Mme Michèle Delaunay, rapporteure.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. L’amendement no 840 traite d’un problème tout à fait différent, celui des prix réduits. Il vise en effet les magasins en duty free des aéroports français, qui relèvent de la loi française, et dans lesquels, pourtant, les cartouches de tabac peuvent se trouver en promotion
M. Bernard Accoyer. Comment faites-vous dans les aéroports internationaux ?
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Ce sont des manquements aux règles françaises. Je serais très heureuse que nous légiférions sur ce sujet. Monsieur Accoyer, je suis certaine que vous serez d’accord, car vous ne négligez pas la question du tabac. Je vous remercie d’avoir approuvé l’augmentation du prix du tabac à rouler. Vous savez bien que lorsque l’on roule une cigarette, on a tendance à y mettre des vitamines… qui s’appellent le cannabis !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Madame Delaunay, je vous rappelle que vous avez retiré cet amendement en commission. En effet, on ne peut modifier ici le régime de vente en duty free, qui dépend d’accords fiscaux internationaux. Je souhaite donc que cet amendement soit à nouveau retiré, faute de quoi nous devrons voter contre !
(Les amendements nos 839 et 840, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Michèle Delaunay, pour soutenir l’amendement no 137.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. J’ajouterai deux points à mes propos précédents. Vous avez brandi la menace d’une explosion de la contrebande pour vous opposer à la hausse du prix du tabac en Corse. Or, très curieusement, personne n’a évoqué la question d’une contrebande qui viendrait de la Corse elle-même, alors que, vous le savez, c’est par bateaux entiers que le tabac corse arrive sur le continent.
M. Jean-Pierre Door. La Corse est en France !
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Monsieur Lurton, je vous apprécie tout particulièrement puisque vous êtes Bordelais, mais je m’étonne que vous ne vous éleviez pas le moins du monde, comme les buralistes, contre l’arrivée de tabac sur le continent quand il vient de la Corse, alors même qu’il échappe à la taxation du ministère des finances.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a adopté cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Le Gouvernement, qui ne s’est pas encore exprimé sur le sujet corse, voudrait vous donner quelques explications. Un premier mouvement a été amorcé en 2013 puisque nous avions alors relevé de cinq points la fiscalité applicable en Corse, dans un objectif de rapprochement, même si nous ne sommes pas encore parvenus à l’égalité.
Par ailleurs, monsieur Giacobbi, je suis suffisamment au courant des échanges entre le Gouvernement et les élus corses en général – les nationalistes comme les autres –, pour savoir qu’il existe des spécificités. Vous n’avez d’ailleurs pas manqué de les rappeler au détour de quelques amendements et nous y reviendrons sans aucun doute au moment d’aborder les mesures sociales.
La question des cotisations MSA a été soulevée. Celle des arrêtés Miot, qui est essentielle, est abordée dans une proposition de loi déposée récemment, qui, je pense, permettra d’avancer. Nous devons aborder le sujet dans sa globalité, M. Giacobbi a raison. Le problème est complexe, et se décompose en un ensemble de sujets d’importances variables, le plus conséquent, du moins en volume financier, étant celui des arrêtés Miot.
Nous avons engagé une démarche sur certaines questions, et sommes vraiment proches d’une solution pour d’autres. Nous préférons traiter l’ensemble des sujets de manière plus globale, coordonnée et progressive. C’est pourquoi le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.
Un premier mouvement a été amorcé en 2013. Il pourrait être suivi d’autres, mais nous devons avoir une vue d’ensemble de toutes les spécificités de l’île corse.
M. Bernard Accoyer. Qui est française !
M. le président. La parole est à M. François Pupponi.
M. François Pupponi. Je voudrais saluer les propos du secrétaire d’État qui a raison de vouloir aborder les problèmes de la Corse de manière globale, comme le fait d’ailleurs le Gouvernement depuis quatre ans. S’agissant de l’amendement de Mme Delaunay, adopté par la commission des affaires sociales, le sujet est triple. Il s’agit tout d’abord de la santé publique en Corse et du taux de mortalité lié au cancer du poumon, supérieur de 25 % à la moyenne continentale. Nous devons étudier les causes de cet écart.
M. Bernard Accoyer. Mais oui !
M. François Pupponi. Depuis deux ans, je demande la création d’une commission en ce sens. Peut-être le prix du tabac est-il une première explication, mais il y en a sûrement d’autres.
Madame Delaunay, vous avez déclaré qu’un Corse souffrant d’un cancer pouvait venir se faire soigner à Marseille. Vous rendez-vous compte de ce que vous avez dit ? Quel Français du continent serait obligé de prendre un avion ou un bateau pour aller se soigner loin de chez lui ? Et quand la famille n’a pas les moyens de l’accompagner, que se passe-t-il ?
Malheureusement, madame Delaunay, j’ai été confronté personnellement à cette situation où il a fallu amener quelqu’un sur le continent pour le faire soigner. Mais quand la famille veut l’accompagner, il faut payer le bateau, l’avion. Est-il normal que l’on ne puisse pas soigner les gens là où ils vivent ? Pourquoi la Corse serait-elle la seule région de France où cette prise en charge n’existe pas ? Pourquoi les Corses seraient-ils obligés de se rendre à Marseille, Lyon ou Paris pour recevoir les soins qu’ils méritent ?
Oui, il y a des différences entre le continent et la Corse, y compris au désavantage des Corses, en l’espèce sur la délivrance des soins !
Savez-vous qu’il n’existe qu’une seule IRM, à Ajaccio ? Une deuxième a été demandée, mais en attendant, si celle-ci tombe en panne, il n’y aura plus d’IRM sur un département de 150 000 habitants ! Est-ce normal ?
M. Bernard Accoyer. Incroyable !
M. François Pupponi. Que veulent les Corses ? Qu’il soit tenu compte de leur spécificité. Le Gouvernement va dans le bon sens lorsqu’il appréhende les solutions dans leur globalité. Pour en revenir à cet amendement, je demande officiellement que soit créée une commission pour comprendre pourquoi il y a 25 % de décès par cancer du poumon de plus en Corse que sur le continent. C’est un problème de santé publique et nous devons y faire face.
Deuxième sujet : les enjeux économiques. Un nombre important de personnes, c’est vrai, travaillent dans ce secteur, et c’est une donnée que l’on ne saurait négliger.
Troisième sujet : les recettes sont versées à la collectivité territoriale. Si on les supprime, il faudra les remplacer.
M. Jean-Pierre Door. Eh oui !
M. François Pupponi. Vous avez parlé de 70 millions d’euros. Trouvons une solution qui soit une sortie honorable pour tout le monde, en sifflet. Arrêtez de nous présenter du jour au lendemain des amendements aussi abrupts.
M. Bernard Accoyer. Corsophobes !
M. François Pupponi. Je propose à Mme Delaunay que nous travaillions ensemble pour trouver cette solution le plus rapidement possible, car la situation aujourd’hui n’est plus acceptable en termes de santé publique. Agissons de manière constructive, ensemble.
M. le président. La parole est à M. Paul Giacobbi.
M. Paul Giacobbi. Je voudrais rappeler que les mots ont une valeur. Le tabac acheté en Corse, partie intégrante de la République française, n’est pas du tabac de contrebande ; c’est du tabac acheté sur une partie du territoire français. Il se trouve qu’en effet, un certain nombre de personnes qui se rendent en Corse achètent du tabac, mais cela représente une portion infime par rapport au tabac acheté en toute légalité par des résidents français hors de France, dans des quantités considérables. En effet, selon la jurisprudence en vigueur, l’on peut emporter autant de tabac que l’on veut dès lors que le l’on peut raisonnablement estimer qu’il est destiné à une consommation personnelle et non à la revente.
Par ailleurs, nous sommes à la veille, et je remercie le secrétaire d’État de l’avoir rappelé, d’un aggiornamento de la fiscalité de la Corse. Ce n’est pas une mesure dilatoire, car il faudra avoir réglé à compter du 1er janvier 2018 la question des ressources fiscales de la collectivité unique qui sera créée en 2018. De toute façon, il y a aussi urgence parce qu’il faut se mettre en conformité avec les règles européennes.
Enfin, quand on aura encore augmenté les taxes sur le tabac, on aura diminué par ricochet les recettes de la collectivité, car la hausse des prix induira une baisse massive, non pas de la consommation des Corses, mais de la consommation de ceux qui ont l’opportunité d’acheter du tabac en Corse parce qu’ils s’y rendent, opportunité infiniment plus faible que le nombre gigantesque de tous ceux qui achètent du tabac à l’étranger ou dans les zones douanières.
M. le président. La parole est à M. Michel Issindou.
M. Michel Issindou. Nous sommes toujours sur une question majeure de santé publique et je comprends la conviction renouvelée de Michèle Delaunay sur ce sujet qui lui tient à cœur. Je salue d’ailleurs le combat respectable qu’elle mène.
Pour autant, j’entends que le Gouvernement est prêt à évoluer. De toute manière, il faudra bien régler ce problème puisque la Commission européenne nous demande d’harmoniser. J’entends aussi François Pupponi qui appelle à la discussion et à une sortie progressive de cette situation, en sifflet, comme on dit trivialement.
Je serais d’avis que Michèle Delaunay retire son amendement, mais je pense qu’elle aura du mal à s’y résoudre. Si elle ne le fait pas, je suivrai les préconisations du Gouvernement et je voterai contre, en invitant la majorité à en faire de même.
M. le président. La parole est à M. Sauveur Gandolfi-Scheit.
M. Sauveur Gandolfi-Scheit. Je voudrais tout d’abord remercier M. le secrétaire d’État pour ses propos, ainsi que M. François Pupponi et M. Paul Giacobbi. Nous sommes tous d’accord, madame Delaunay, pour sortir de cette situation dans les trois ou quatre ans, en sifflet. Je suis moi aussi médecin, vous le savez, et je peux attester que les Corses rencontrent des problèmes à tous les niveaux, même pour se faire rembourser leur trajet vers le continent. Non, je ne suis pas fou ! Soyez polie, madame ! Depuis tout à l’heure, vous insultez les Corses et un peu tout le monde ! Vous avez fait un geste, je vous ai bien vue.
En tout cas, je remercie encore une fois M. le secrétaire d’État. Nous allons voter dans quelques instants et j’espère que tout se passera bien.
M. Bernard Accoyer. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Yves Albarello.
M. Yves Albarello. Je ne vais pas en rajouter, mais je voudrais simplement corroborer les propos de M. François Pupponi concernant l’augmentation de 25 % des décès dus au cancer du poumon en Corse, mise en évidence par l’agence régionale de santé. Il me semble en effet que l’ARS devrait mener une expertise plus poussée.
Je compte beaucoup d’amis sur l’île de Beauté. Cet été, l’une d’elles, de Porto Vecchio, a été frappée par le cancer du poumon, alors qu’elle n’avait jamais fumé une seule cigarette de sa vie. Elle a dû prendre un avion pour être opérée à l’hôpital de Marseille, et sa famille a dû loger à l’hôtel pour pouvoir aller la voir. C’est une fracture dont le peuple corse souffre, mais que vous semblez ignorer, madame. Voilà pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de rejeter cet amendement.
M. Alain Ballay. Ce n’est pas le sujet !
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. S’agissant des éléments médicaux, le cancer épidermoïde du poumon…
M. Bernard Accoyer. Nous ne sommes pas dans un amphithéâtre !
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. … qui est en cause, représente 90 % des cancers du poumon, et il est possible que votre amie soit dans les 10 % restants. Mais pour les autres, le lien avec la consommation du tabac est scientifiquement prouvé ! La mortalité par cancer épidermoïde du poumon est clairement due au tabac.
Par ailleurs, monsieur Pupponi et monsieur Gandolfi, j’ai travaillé « seulement » quarante-cinq ans en CHU, en centre spécialisé de lutte contre le cancer. Tous les patients qui viennent sont remboursés de leurs frais de transport.
M. François Pupponi. Pas les familles !
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Certes, mais celles des Périgourdins non plus ! Ils prennent un hôtel ! Il n’y a, en revanche, pas un malade qui ne soit totalement pris en charge. C’est sur ce point que j’ai marqué mon étonnement. Si vous me donnez le cas d’un malade atteint d’un cancer pulmonaire dont la prise en charge au CHU de Marseille ou au centre de lutte anticancéreux a été refusée, j’en aviserai la ministre de la santé qui prendra les mesures nécessaires.
M. le président. Merci, madame la rapporteure.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Encore une phrase !
M. le président. Vous avez déjà largement abusé…
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Personne n’a évoqué la question de l’amende que l’État français paiera, et qui pèsera sans doute sur les collectivités corses.
M. le président. Sur l’amendement no 137, je suis saisi par le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.
Mme Isabelle Le Callennec. Comme l’a rappelé François Pupponi, le produit de la fiscalité du tabac est affecté à la collectivité territoriale corse, pour des travaux de mise en valeur de la région.
Vous proposez, madame Delaunay, que la perte de recettes pour les collectivités territoriales qu’entraînera cette hausse en Corse soit compensée à due concurrence par la création de la taxe additionnelle aux droits mentionnés, c’est-à-dire, de nouveau, l’alcool et le tabac. Il me semble pourtant que vous aviez évoqué le FIR, le fonds d’intervention régional. Je profite donc de la présence du secrétaire d’État chargé du budget pour lui demander s’il est d’accord avec le chiffre produit par notre collègue, à savoir une perte de l’ordre de 70 millions d’euros.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Non : c’est 27 millions.
Mme Isabelle Le Callennec. Ce qui fait une différence, madame la rapporteure !
Bref, nous devons disposer de tous les éléments pour pouvoir prendre position, y compris le montant de l’amende infligée à la France si nous continuons en l’état, puisque nous sommes soumis à sanction depuis le 1er janvier 2016.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. On n’a pas pu le savoir.
M. le président. Puisque la demande de scrutin public nous laisse un peu plus de temps, je vous invite, monsieur à M. Accoyer, à ne pas respecter le règlement dont vous avez été vous-même le gardien… (Sourires.)
M. Bernard Accoyer. Je voudrais apporter une proposition constructive en faveur de la santé de nos compatriotes insulaires. Dans l’exposé sommaire, Mme Delaunay met en exergue une surmortalité de 25,7 % par cancer du poumon en Corse. Monsieur le secrétaire d’État, puisque vous représentez le Gouvernement à cet instant, je pense que ce qui a été avancé par M. Pupponi et soutenu par Sauveur Gandolfi-Scheit et par le président Giacobbi est une nécessité et une urgence. Il faut avant tout parler de santé, puisque c’est du PLFSS que nous débattons, et mettre en place une commission pour comprendre les raisons de cette surmortalité,…
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. La surmortalité est un marqueur direct.
M. Bernard Accoyer. …laquelle pourrait bien être due, madame la rapporteure, à l’insuffisance des moyens de dépistage et de traitement sur l’île. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.) Cette question me paraît infiniment plus urgente que l’amendement que vous souhaitez nous faire adopter !
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Mensonge !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 137.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants | 35 |
Nombre de suffrages exprimés | 32 |
Majorité absolue | 17 |
Pour l’adoption | 6 |
contre | 26 |
(L’amendement no 137 n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 138.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Il s’agit de la même disposition que pour les cigarettes, mais concernant cette fois le tabac à rouler. Le débat a déjà eu lieu.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Défavorable. Le débat a en effet eu lieu puisque le sujet est parallèle à celui de l’amendement précédent.
(L’amendement no 138 n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 841 et 842, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Il s’agit, là encore, de la fiscalité du tabac en Corse. Pouvons-nous considérer, madame Delaunay, que nous avons déjà fait le tour de la question ?
M. Bernard Accoyer. Oui, c’est la même chose !
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Je remercie les collègues qui ont demandé un scrutin public sur l’amendement no 137. Il s’agissait d’harmoniser la fiscalité sans rien faire perdre aux collectivités corses. On pourra se référer à ce vote nominatif dans quelques années, quand la question du tabac sera – car cela est inéluctable – en passe de se régler.
(Les amendements nos 841 et 842, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. Bernard Accoyer. Et voilà : on en a terminé avec la Corse, M. Pupponi s’en va ! (Rires.)
M. le président. Ne perturbez pas M. Pupponi, mes chers collègues !
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 139 et 681.
La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 139.
M. Gérard Bapt, rapporteur. J’aurais préféré que Mme Orphé présente ces amendements, mais elle a dû partir. Il est proposé de relever de 4 euros par hectolitre le montant de la taxe sur les alcools forts. Dans une logique de santé publique, la commission les a adoptés, en attendant l’avis du Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales, pour soutenir l’amendement no 681.
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Je parlerai au nom de Mme Orphé, première signataire de cet amendement.
Quand, un lundi après-midi, notre commission a procédé à l’examen pour avis du projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer, les parlementaires des DOM étaient présents. Mme Orphé, rapporteure pour avis, a fait le bilan de l’alcoolisation massive qui, dans les outre-mer, touche de manière significative nos jeunes compatriotes.
Ces amendements prévoient une augmentation de 4 euros par hectolitre, soit 4 centimes par litre. S’agissant d’alcools forts, on devrait s’en sortir ! En outre, cela permettra de dégager des moyens pour accompagner ces jeunes et pour développer une prévention que, me semble-t-il, vous appelez toutes et tous de vœux. Car le relèvement de cette taxe sur les alcools forts est également un levier de prévention.
Je sens, monsieur le président, que j’aurai à reprendre la parole sur ce sujet – allez savoir pourquoi ! (Sourires.) Lorsque l’on veut réguler la consommation de vin, on nous oppose un refus formel : attention à l’œnotourisme, et puis, de toute façon, les jeunes ne s’alcoolisent pas au vin ! Très bien – je dis « très bien », mais vous connaissez mes positions… Et quand, en l’espèce, nous proposons d’augmenter une taxe sur les alcools forts, on va nous dire sans doute que les alcools ne sont pas alcoolisants. Or, justement, les jeunes tombent aussi dans l’addiction à cause des alcools forts, et je passe sur la bière car c’est bien connu.
Mes chers collègues, je vous rappelle qu’au mois de novembre nous avons reculé, en termes de santé publique, sur la loi Évin. C’est évident, tout le monde l’a reconnu. Les autres pays nous ont regardés avec étonnement. Mais c’est ainsi : nous sommes en démocratie et l’Assemblée a tranché. Je souhaiterais maintenant que s’agissant de ces amendements, pour Mme Orphé et pour ses collègues des DOM-TOM, nous envoyions enfin, au nom de la santé publique, un signe à tous ces jeunes qui sont dans l’addiction à l’alcool, mais pas seulement.
Mme Annick Lepetit et Mme Annie Le Houerou, rapporteure de la commission des affaires sociales. Bravo !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Tout d’abord, ils ne concernent pas seulement les outre-mer,…
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Évidemment !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. …mais l’ensemble du territoire national et portent sur toutes les boissons titrant plus de 18 degrés. Une hausse de 4 euros par hectolitre se traduit par un relèvement de 2 centimes du litre d’alcool à 50 degrés. Pense-t-on vraiment que c’est là une mesure de nature à changer les comportements ? Nous avons eu un débat similaire sur le tabac tout à l’heure.
Une augmentation de 2 centimes est évidemment très faible. Néanmoins, le Gouvernement ne souhaite pas donner des signes d’augmentation de la fiscalité en matière alimentaire.
M. Gilles Lurton. Très bien !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Nous avons parlé de l’huile de palme, nous parlerons de la farine, des boissons sucrées et de bien d’autres sujets. En tout état de cause, le Gouvernement est clairement défavorable à cet amendement, qui ne concerne pas les outre-mer mais l’ensemble du territoire national.
M. Jean-Louis Dumont. Et même la mirabelle !
M. Bernard Accoyer. Je suis d’accord avec vous, monsieur le secrétaire d’État !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Quéré.
Mme Catherine Quéré. Je dirai brièvement quatre choses.
Premièrement, la hausse des taxes sur les alcools n’a jamais fait reculer l’alcoolisme, qui est certes un vrai fléau.
Deuxièmement, aucun secteur n’a subi autant de hausses dans les cinq dernières années, puisque l’augmentation a été de 20 %.
Troisièmement, je vous rappelle – ou peut-être vais-je vous l’apprendre – que la part des taxes dans le prix de vente d’une bouteille de spiritueux est de 87,30 %. Certains collègues à qui j’ai indiqué ce chiffre m’ont répondu que je me trompais, que c’était 8,7 %. Eh bien non !
Enfin, si vous vous faites plaisir avec une hausse qui ne répond en rien à votre objectif – en soi très respectable –, le ressenti de la filière viticole et des producteurs d’alcools sera, lui, dévastateur. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Plisson.
M. Philippe Plisson. Une hausse de 2 centimes d’euros sur une bouteille, c’est insignifiant. En revanche, comme l’a dit le secrétaire d’État, c’est un très mauvais signal, en particulier pour toutes les régions qui produisent ces alcools : le cognac, l’armagnac – je pense à mon ami Philippe Martin, qui serait obligé de s’arrêter de boire… (Sourires.)
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Et allez donc ! Déroulez toute la liste, on a l’habitude !
M. Bernard Accoyer. Le genépi !
M. Philippe Plisson. Oui, c’est un mauvais signal adressé aux agriculteurs. Dans ces conditions, je ne vois pas l’intérêt de cette posture, car on est bien là au niveau de la posture.
M. le président. La parole est à M. Michel Issindou.
M. Michel Issindou. La commission a examiné ces amendements et les a adoptés. Nous avons été sensibles aux arguments développés par Monique Orphé, qui a dû nous quitter pour retourner dans son territoire. On le sait, il est nécessaire de lutter dans ce domaine, comme on le fait contre le tabac. Or, j’ai le sentiment que nous commençons tous nos phrases en affirmant que nous sommes contre le tabagisme, contre l’alcoolisme, etc., et puis le « mais » arrive immédiatement. Il est temps de sortir du « mais » sur ce sujet, et je sais gré à Catherine Lemorton d’avoir défendu avec conviction l’amendement de Monique Orphé.
La mesure ne causera pas la ruine des producteurs : comme l’a rappelé Philippe Plisson, 2 centimes sur une bouteille d’alcool fort, ce n’est presque rien. Pour autant, cela fait 130 millions d’euros que l’on pourrait consacrer à la nécessaire prévention de l’alcoolisme. Pour quelques centimes, je crois que cela vaut le coup de voter cet amendement.
Mme Bernadette Laclais et Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales. Très bien !
(Les amendements identiques nos 139 et 681 ne sont pas adoptés.)
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Bravo, mes chers collègues, vous pouvez partir maintenant ! Bon week-end au groupe viticulture !
(L’article 19 est adopté.)
M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 19.
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 253, 349 et 455.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 253.
M. Denys Robiliard. Cet amendement vise à permettre la mutualisation de la couverture des risques en prévoyance, en l’occurrence des risques décès, incapacité, invalidité ou inaptitude, au niveau d’une branche professionnelle. À cette fin, il prévoit que la branche puisse sélectionner dans le cadre d’un accord collectif au moins deux organismes parmi les institutions de prévoyance, les mutuelles et les compagnies d’assurances, pour renforcer les garanties offertes aux personnes assurées, à savoir les salariés des entreprises concernées, dans le cadre de la mutualisation d’un socle commune de garanties défini par l’accord à travers des contrats de référence. Les entreprises qui entreraient dans le champ d’application de l’accord auraient l’obligation de souscrire un de ces contrats.
Il s’agit de permettre la mutualisation en matière de prévoyance dans le respect de la décision du 13 juin 2013 par laquelle le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la loi relative à la sécurisation de l’emploi.
Je rappelle qu’à cette occasion le Conseil, vérifiant la constitutionnalité de l’article L. 912-1 du code de la Sécurité sociale, avait considéré qu’il n’était pas possible d’imposer à une entreprise d’être lié à un cocontractant déjà désigné par un contrat négocié au niveau de la branche.
Le pluralisme qui est introduit par cet amendement me paraît dès lors répondre aux exigences constitutionnelles.
C’est un amendement important compte tenu de la nature des risques en cause, qui viennent en complément de ceux pour lesquels les salariés bénéficient aujourd’hui d’une assurance aux termes de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 et de la loi relative à la sécurisation de l’emploi.
M. le président. La parole est à M. Paul Giacobbi, pour soutenir l’amendement no 349.
M. Paul Giacobbi. L’amendement a pour objectif de permettre de concilier la liberté contractuelle de l’entreprise et la mutualisation des risques en prévoyance, dans le respect de la décision du Conseil constitutionnel du 13 juin 2013. Il permet d’offrir une prévoyance à toutes les entreprises et à tous les salariés. On sait que dans ce domaine la mutualisation est le seul moyen de garantir l’égalité de traitement de l’ensemble des salariés et des employeurs d’une branche.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 455.
Mme Jacqueline Fraysse. Je partage la préoccupation de mon collègue Denys Robiliard. Cet amendement vise à permettre la mutualisation de la couverture des risques et est une conséquence de la loi relative à la sécurisation de l’emploi adoptée en 2013.
Saisi de ce texte, le Conseil constitutionnel a effectivement supprimé la possibilité de mutualiser au sein d’une même branche professionnelle la protection sociale complémentaire, tant pour les risques de santé que pour les risques couverts par à la prévoyance, c’est-à-dire l’incapacité, l’invalidité ou le décès, en censurant les clauses de désignation.
L’ensemble des organisations syndicales représentatives nous ont fait observer que cette mutualisation est tout à fait essentielle pour couvrir les risques les plus lourds, tels que, je le répète, l’incapacité, l’invalidité ou le décès. Ces risques font peser sur le salarié et sa famille la menace d’une perte de ressources importante et durable. Si la fréquence de réalisation de ces risques n’est pas très importante, les conséquences financières, elles, le sont, au point que rares sont les salariés qui peuvent y faire face en s’assurant individuellement.
Le seul levier pour offrir une prévoyance à un coût raisonnable, prenant donc aussi en compte les risques lourds, consiste à mutualiser la couverture de ces risques, c’est-à-dire à les faire supporter par une population d’assurés aussi importante que possible. Plus le nombre des assurés sera important et stable sur la durée, plus le coût des primes d’assurance sera maîtrisé. Ce mécanisme de la mutualisation est donc le seul à pouvoir garantir une prévoyance à un tarif unique, offrant des garanties identiques à tous les salariés d’une même branche.
Tel est, monsieur le président, l’objet de cet amendement, que je crois très important pour nos concitoyens.
M. le président. Sur les amendements identiques nos 253, 349 et 455, je suis saisi par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. La commission a rejeté ces amendements parce qu’ils n’avaient pas été défendus. À titre personnel, j’y suis favorable, au bénéfice des explications de la ministre.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Comme vous l’avez indiqué, monsieur Robiliard et madame Fraysse, cette histoire des clauses de désignation est ancienne. Nous nous sommes entretenus de cette question à de nombreuses reprises et ce que nous avions proposé a été censuré par le Conseil constitutionnel.
A la suite de cette censure, le Gouvernement a chargé M. Libault, ancien directeur de la Sécurité sociale, de déterminer dans quelles conditions nous pourrions favoriser des mécanismes de co-désignation en matière notamment de prévoyance. Il apparaît en effet que, indépendamment des risques de santé, ce sont désormais les enjeux de prévoyance, et de prévoyance lourde, qui pèsent en matière d’assurance complémentaire. L’idée de permettre une mutualisation, c’est-à-dire de co-désigner des organismes au sein d’une branche pour ce qui est de la prévoyance lourde, et uniquement pour cela, a fait son chemin.
A l’évidence les amendements que vous présentez s’inspirent, au moins en partie, du rapport de M. Libault. Il y a là, je le crois, des éléments tout à fait utiles et intéressants.
Je ne vais pas pour ma part vous cacher les difficultés de mise en œuvre : nous savons qu’il y a eu dans le passé des contraintes juridiques fortes. Néanmoins l’objectif me semble devoir être défendu parce que si nous n’avançons pas en termes de mutualisation pour ce qui est de la prévoyance lourde, alors les inégalités entre les différentes prises en charge proposées aux salariés continueront de se creuser.
Sans nier les difficultés que nous avons rencontrées et compte tenu que leur rédaction me semble ciblée et de nature à répondre aux interrogations qui ont pu exister, je donne un avis favorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.
M. Jean-Pierre Door. Ces amendements visent à réintroduire les clauses de désignation permettant aux branches d’imposer aux entreprises des organismes de prévoyance pour la couverture complémentaire de leurs salariés. Ce que vous appelez « co-désignation » n’est rien d’autre qu’un déguisement de ces clauses de désignation qui ont été censurées à deux reprises par le Conseil constitutionnel. On maquille ainsi ce qui constitue une atteinte manifeste à la liberté contractuelle et à la liberté d’entreprendre et qui a déjà été censuré plusieurs fois à ce titre. C’est aussi une atteinte à la concurrence.
Vous comprendrez que le groupe Les Républicains, fidèle à sa conviction qu’il ne faut pas porter atteindre à la concurrence entre les institutions de prévoyance, les assureurs et les mutuelles, et à son refus des clauses de désignation, votera contre ces amendements. C’est la raison pour laquelle nous avons demandé un scrutin public.
M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.
M. Bernard Accoyer. Je soulignerai, pour compléter les propos de Jean-Pierre Door, que nous sommes en train d’assister à une de ces manœuvres de lobbying qui en d’autres circonstances feraient hurler certains d’entre nous.
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. C’est pas du tout du lobbying !
M. Bernard Accoyer. Les associations d’employeurs et les syndicats de salariés se sont mis d’accord pour essayer de tordre le bras au droit, qui a déjà été dit deux fois par le Conseil constitutionnel.
Vous savez très bien que l’Accord national interprofessionnel conduit à une réduction de la couverture par les assurances complémentaires qui protègent un très grand nombre de salariés, désormais très inférieure à celle dont disposaient auparavant ces mêmes salariés – nous sommes assaillis de courriers et de sollicitations d’employés et de salariés de toutes les entreprises et de toutes les branches à ce sujet. En conséquence de quoi ceux qui le peuvent sont conduits à contracter une assurance sur-complémentaire.
En enfermant le secteur complémentaire comme vous souhaitez le faire dans de très grandes mutualisations, notamment de groupe, vous tuez l’émulation, vous tuez la concurrence dans ce secteur essentiel qu’est l’assurance complémentaire, où il y a trois types d’assurance : les mutuelles, les organismes de prévoyance et les assurances privées.
Il est vrai que cela n’est pas conforme à la philosophie socialiste que de s’appuyer sur la libre concurrence pour faire en sorte que le consommateur, en l’occurrence le patient, s’en sorte de la meilleure façon.
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Parce que le patient est un consommateur ? Bravo !
M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.
M. Francis Vercamer. Le groupe de l’ UDI ne votera pas non plus ces amendements. Nous étions le fer de lance de l’opposition à l’introduction de ces clauses de désignation dans la loi. Nous estimions en effet que, outre qu’elles faussaient la concurrence, elles étaient anticonstitutionnelles puisque cela contraignait les entreprises à choisir une entreprise déjà désignée par la branche.
Cet amendement vise à réintroduire la disposition que nous avions combattue à l’époque. Nous resterons donc constants dans notre décision en votant contre ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.
M. Dominique Tian. Mes collègues ont été extrêmement clairs : il faut rejeter ces amendements.
Le plus choquant c’est l’atteinte à la liberté du chef d’entreprise. Ce qui est vraiment consternant, c’est qu’il y a déjà eu deux ou trois décisions qui ont prouvé que ce n’était pas constitutionnel. Le Conseil constitutionnel s’est prononcé plusieurs fois en ce sens.
C’est donc un exemple unique d’acharnement qui ne sert incontestablement que certains lobbies et intérêts économiques que nous connaissons bien. Il est choquant que nous soyons aujourd’hui dans cet hémicycle en train d’essayer de contourner des décisions de justice, qui pourtant s’imposent à tous.
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard.
M. Denys Robiliard. Deux observations.
D’abord je constate que cet amendement traduit un accord entre organisations patronales et organisations représentatives de salariés. Cela veut dire que quand M. Accoyer parle d’une logique socialiste, il s’agit d’une évolution extrêmement sensible des organisations patronales... (Sourires.) Voilà pour ma première observation.
La deuxième observation, c’est que seuls certains acteurs de la prévoyance se sont opposés à cette possibilité de mutualisation. Mais évidemment vous ne faites pas de lobbying quand vous soutenez leur point de vue...
J’ajoute qu’il faut citer la décision du Conseil constitutionnel dans son intégralité, sans omettre son dixième considérant, qui rappelle que le législateur peut, afin « d’assurer un régime de mutualisation des risques, [renvoyer] à des accords professionnels et interprofessionnels le soin d’organiser la couverture de ces risques auprès d’un ou plusieurs organismes de prévoyance ». C’est ce que nous faisons.
Quant au onzième considérant, il y est dit que « […] le législateur peut porter atteinte à la liberté d’entreprendre et à la liberté contractuelle dans un but de mutualisation des risques […] ». Il prévoit deux modalités : la recommandation et la désignation, puisqu’il indique expressément : « […] en offrant la possibilité que soient désignés au niveau de la branche plusieurs organismes de prévoyance proposant au moins de tels contrats de référence […] »
Mais il pose une limite : cette atteinte doit être proportionnée à l’objectif poursuivi. Il dit que le législateur « ne saurait porter à ces libertés une atteinte d’une nature telle que l’entreprise soit liée avec un co-contractant déjà désigné par un contrat négocié au niveau de la branche et au contenu totalement prédéfini […] »
Il me semble que l’amendement tel qu’il est rédigé respecte cette limite. Il satisfait le critère de proportionnalité dont le respect est exigé par le Conseil constitutionnel et dont le défaut avait conduit à la censure des propositions précédentes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 253, 349 et 455.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants | 30 |
Nombre de suffrages exprimés | 30 |
Majorité absolue | 16 |
Pour l’adoption | 19 |
contre | 11 |
(Les amendements identiques nos 253, 349 et 455 sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 806 rectifié, 78, 517 et 672, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 517 et 672 sont identiques.
La parole est à Mme Michèle Delaunay, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 806 rectifié.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Il vise à pérenniser le chèque santé institué par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016, par lequel l’employeur finance la couverture complémentaire santé de certains salariés.
Ce versement santé peut être mis en place par accord de branche ou, à défaut, par accord d’entreprise jusqu’au 31 décembre 2016. Il peut aussi être mis en place par décision unilatérale de l’employeur.
Cet amendement vise à pérenniser cette dernière possibilité au-delà du 31 décembre 2016, afin de permettre aux petites entreprises, dépourvues de représentants du personnel ou de délégués syndicaux, de recourir à ce versement.
L’avis de la commission a été favorable.
M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 78.
M. Dominique Tian. Cet amendement vise à pérenniser la possibilité pour l’employeur de mettre en place par décision unilatérale le versement santé au bénéfice des salariés en contrats courts ou en temps très partiel au-delà du 31 décembre 2016.
En effet, cela permettrait aux TPE et aux PME qui n’ont pas la possibilité de signer un accord collectif, faute de représentants du personnel ou de délégués syndicaux, de prendre cette décision de manière unilatérale.
M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement no 517.
M. Frédéric Reiss. L’article 34 de la loi de finances pour 2016 prévoit la possibilité de mettre en place le versement santé par décision unilatérale de l’employeur, mais la limite dans le temps en fixant une date-butoir au 31 décembre 2016.
Il s’agit de permettre aux TPE et aux PME de recourir au versement santé alors qu’elles n’ont pas, faute de représentants du personnel ou de délégués syndicaux, la possibilité de signer un accord collectif.
M. le président. La parole est à M. Vincent Ledoux, pour soutenir l’amendement identique no 672.
M. Vincent Ledoux. Dans le même sens que mes deux collègues, je souhaite aider les entreprises qui ont des difficultés à mettre en œuvre le versement santé avant la date-butoir du 31 décembre 2016. Il s’agit de pérenniser ce dispositif qui est plutôt bien vu par les entreprises : il est indispensable de le maintenir au-delà de cette date.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Comme je l’avais indiqué en commission à M. Tian, je suis favorable à la moitié de son amendement, qui se retrouve dans l’amendement no 806 rectifié.
S’agissant de la mise en place du chèque santé par accord ratifié à la majorité, je n’y suis toujours pas favorable, puisque cette mesure est redondante avec la décision unilatérale de l’employeur. Elle pose par ailleurs un problème rédactionnel.
Je vous propose donc de retirer votre amendement, sinon j’émettrai un avis défavorable.
Quant aux autres amendements, ils sont satisfaits par mon amendement no 806 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Avis favorable à l’amendement no 806 rectifié. Je demande le retrait des autres amendements dans lesquels se pose un problème rédactionnel de référence au code.
À l’exception de celui de M. Tian, ces amendements sont en outre satisfaits par celui de Mme Delaunay.
Dans celui de M. Tian, une partie est satisfaite. Il comporte par ailleurs une possibilité de référendum au sein de l’entreprise qui nous semble inopportune dans la situation actuelle et lourde compte tenu de l’enjeu. Je demande son retrait, sinon j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.
M. Dominique Tian. Je demande une suspension de séance, monsieur le président.
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. Dominique Tian.
M. Dominique Tian. Je maintiens mon amendement no 78. Comme l’a dit Mme Delaunay, il est différent de ceux de mes collègues puisqu’il prévoit la mise en place par une décision unilatérale du chef d’entreprise « ou par accord ratifié à la majorité des intéressés », ce qui paraît être le fondement même de la démocratie. Or, nous sommes pour la démocratie dans l’entreprise.
M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.
M. Frédéric Reiss. Je retire mon amendement no 517 au profit de celui de M. Tian.
(L’amendement no 517 est retiré.)
(L’amendement no 806 rectifié est adopté et les amendements nos78 et 672 tombent.)
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse.
Mme Annie Le Houerou, rapporteure de la commission des affaires sociales. Sur cet article qui tend à réorganiser les circuits de financement dans le sens d’une plus grande transparence, je voudrais faire un commentaire concernant le Fonds de solidarité vieillesse – le FSV. Il a vocation à financer des mesures de solidarité nationale pour les retraites, les mesures en faveur des jeunes, des apprentis, des femmes, pour compenser les années de chômage, mais aussi à financer la branche vieillesse du régime de protection sociale des non-salariés agricoles.
Ses produits ont diminué alors que les charges ont augmenté : l’augmentation de la fraction de taxe sur les salaires n’a pas compensé la baisse des parts de CSG et de contribution sociale de solidarité des sociétés affectées à ce fonds.
Mme Annie Le Houerou. Le FSV finance le minimum contributif qui relève plutôt de la prestation de base à prendre en charge par les régimes de base – c’est ce que propose le Gouvernement.
J’en profite pour indiquer que le déficit du FSV devrait être stabilisé en 2016, surtout si le nombre de chômeurs est maîtrisé. Le rétablissement de l’équilibre du Fonds sera facilité par le transfert du financement du minimum contributif au régime de base conduisant à la réduction des dépenses du fonds à hauteur de 3,6 % en 2017. La perspective d’un retour à l’équilibre du régime général et du FSV consolidé est prévue pour 2020.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales pour la famille, pour soutenir l’amendement no 407.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales. Cet amendement, mes chers collègues, vise à neutraliser pour les régimes d’assurance maladie dont les comptes ne sont pas intégrés à ceux de la caisse nationale d’assurance maladie les effets d’une affectation à cette caisse de la CSG assise sur les revenus de remplacement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Il s’agit d’ajustements mineurs afin de ne pas perturber l’équilibre de ces quelques régimes. Le Gouvernement est favorable à l’adoption de cet amendement.
(L’amendement no 407 est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 838.
Mme Marisol Touraine, ministre. Cet amendement vise à ne permettre l’affectation des excédents prévisionnels au fonds de réserve pour les retraites, le FRR, qu’en cas de solde positif de la trésorerie du régime général.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission est favorable à l’adoption de cet amendement car les besoins du FRR étant nul en l’état, il était logique de prévoir une affectation des excédents à la résorption du déficit portée par l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
(L’amendement no 838 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 845.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Amendement rédactionnel.
(L’amendement no 845, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 914.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Il est également rédactionnel.
(L’amendement no 914, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 846.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Amendement de coordination.
(L’amendement no 846, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 847.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Il est de conséquence.
(L’amendement no 847, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 906.
Mme Marisol Touraine, ministre. Cet amendement vise à rétablir les mécanismes d’affectation de fractions de prélèvements sociaux à la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, et à assurer une neutralité absolue des transferts pour le régime complémentaire obligatoire agricole.
Par ailleurs, il répond aux préoccupations exprimées par Mme Huillier notamment quant aux réserves de la CNSA. Je vous invite donc à l’adopter.
(L’amendement no 906, accepté par la commission, est adopté et l’amendement no514 tombe.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.
M. Jean-Pierre Door. Je regrette que cet amendement no 514, qui est important, soit tombé. Il concernait les petites retraites agricoles, en particulier le régime complémentaire obligatoire pour les agriculteurs. Il faudra en prendre note.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 848.
M. Gérard Bapt, rapporteur. C’est un amendement de conséquence.
(L’amendement no 848, accepté par le Gouvernement, est adopté et l’amendement no722 tombe.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 678.
M. Jean-Pierre Door. Il est défendu.
(L’amendement no 678, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 916.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Il vise à corriger une erreur rédactionnelle.
(L’amendement no 916, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 199 et 605.
La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 199.
M. Bernard Accoyer. Cet article dont vous accélérez la discussion car le temps passe – nous vous comprenons et approuvons, monsieur le président – n’en reste pas moins un chef-d’œuvre de tuyauteries infernales, de celles qui prévalent années après années dans l’élaboration des PLFSS.
Nous demandons en l’occurrence la suppression de l’alinéa 102. Nous ne voulons pas que se pérennisent de tels mécanismes particulièrement opaques à partir desquels le Gouvernement fait ce qu’il veut parce que nous n’avons pas le temps de les examiner, surtout lorsque des amendements apparaissent dans la liasse alors qu’ils n’avaient pas été initialement prévus. C’est là une méthode tout à fait détestable.
M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 605.
M. Francis Vercamer. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. Ce n’est ni une méthode détestable ni une simple mesure de tuyauterie, monsieur Accoyer. Votre amendement propose de supprimer le transfert progressif vers le régime général des prestations aujourd’hui prises en charge par la deuxième section du FSV, c’est-à-dire le MICO, le minimum contributif. Il s’agit d’un montant plancher de la retraite de base servie aux retraités modestes ayant cotisé pendant la durée légale minimale ouvrant droit au taux plein.
M. Bernard Accoyer. C’est bien un tuyau !
M. Gérard Bapt, rapporteur. Il n’y a pas à proprement parler de prestation de solidarité mais plutôt un accessoire d’une prestation contributive qu’il n’est donc pas illogique de faire prendre en charge par le régime général. Le mécanisme de tuyauterie…
M. Bernard Accoyer. Je suis heureux que vous le reconnaissiez !
M. Gérard Bapt, rapporteur. …est motivé par une raison de fond. Voilà pourquoi je suis défavorable à votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable. Chacun devrait se réjouir que les dispositifs sociaux soient ainsi plus lisibles.
(Les amendements identiques nos 199 et 605 ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 850.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Il vise à corriger une erreur de référence.
(L’amendement no 850, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 851.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Rédactionnel.
(L’amendement no 851, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 724 rectifié.
Mme Marisol Touraine, ministre. Cet amendement important s’inscrit dans la continuité de la loi d’adaptation de la société au vieillissement. Il s’agit d’offrir aux publics fragiles les moyens d’une autonomie renforcée en favorisant l’aide à domicile. Nous installons donc un nouveau fonds d’aide à ce secteur qui sera doté de 50 millions en 2017.
Nous voulons ainsi soutenir les services d’aide à domicile qui rencontrent aujourd’hui des difficultés – vous en connaissez tous dans vos territoires. Il s’agit également de permettre à ces associations de développer de bonnes pratiques telles que les préconise le guide qui a été élaboré en concertation avec l’ensemble des acteurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis favorable. Cela fait aussi écho aux sollicitations de Mme Huillier quant aux problèmes rencontrés par les associations en difficulté.
M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.
M. Bernard Accoyer. Si je comprends bien, ces 50 millions proviennent de la CNSA ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. C’est écrit !
Mme Marisol Touraine, ministre. En effet.
M. Bernard Accoyer. Je reviens sur ce problème majeur qu’est celui de l’insuffisance des moyens – c’est ce qu’avancent les ARS pour expliquer qu’il n’est plus possible d’autoriser ni de financer de nouvelles places en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. De très nombreux départements et régions connaissent des situations terribles qui conduisent à des drames personnels.
Pourquoi, alors que les fonds de la CNSA sont insuffisants pour répondre à de très nombreux besoins y soustrait-on 50 millions qui pourraient lui être fort utiles ? La gauche s’est d’ailleurs élevée contre cette caisse abondée par la journée de solidarité du lundi de Pentecôte et, maintenant, elle en détourne la première priorité ! Nous ne sommes donc pas favorables à cette disposition.
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Huillier.
Mme Joëlle Huillier. Je remercie vraiment Mme la ministre pour l’effort réalisé en faveur du secteur de l’aide à domicile. En effet, la loi d’adaptation de la société au vieillissement a mis en évidence les besoins des personnes âgées qui demeurent chez elles – cette politique est extrêmement importante.
Il est absolument faux de prétendre que ce n’est pas à la CNSA de payer, monsieur Accoyer : cette caisse n’est pas seulement financée par la journée de solidarité du lundi de Pentecôte ou d’autres mais, aussi, par la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA – les réserves actuellement disponibles de la CNSA en sont principalement constituées.
M. Bernard Accoyer. Ses fonds sont détournés.
Mme Joëlle Huillier. Étant entendu que la loi d’adaptation de la société au vieillissement a prévu que les services d’aide à domicile bénéficient de financements, j’estime que l’affectation de ces recettes au maintien à domicile et au service d’aide à domicile sont particulièrement opportunes.
Je remercie à nouveau Mme la ministre et M. le secrétaire d’État d’avoir eu cette excellente idée.
M. Michel Issindou. Très bien !
(L’amendement no 724 rectifié est adopté.)
(L’article 20, amendé, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Mme Jacqueline Fraysse. À l’occasion de cet article, je souhaite revenir sur les exonérations de cotisations sociales patronales qui, avec 40 millions, atteignent aujourd’hui des niveaux extrêmement importants.
Cet article 21 fixe la compensation des exonérations sociales par l’État, qui en a l’obligation. Pour 2017, l’État devrait verser 6,1 milliards au budget de la Sécurité sociale, dont 3,7 milliards pour compenser de nouvelles exonérations, ce que je regrette. De telles exonérations, instaurées depuis longtemps – nous avons le recul nécessaire – n’ont pas d’effets particulièrement marquants sur l’économie. Il est donc possible de s’interroger sur une utilité qui, en tout cas, n’a jamais été vraiment démontrée. Or, nous continuons, nous les maintenons et, même, nous les élargissons ! Dans un référé du 5 février 2015, la Cour des comptes pointait déjà l’incohérence de cette politique d’empilement des allégements de charges sociales.
Au-delà de cette incohérence et de cette inefficacité, j’insiste sur le fait que le dogme de la baisse du coût du travail limite considérablement les moyens financiers de l’État. Si ces compensations sont nécessaires pour la protection sociale, ce sont autant de ressources en moins pour financer des politiques publiques de l’État dans des domaines aussi essentiels que l’éducation, le logement, la culture, l’emploi, etc.
Une nouvelle fois, nous considérons qu’il est plus que temps d’arrêter cette fuite en avant qui, certes, répond aux demandes du MEDEF mais qui ne se traduit pas par des retombées économiques significatives et qui remet fondamentalement en cause le principe de solidarité auquel, pourtant, tout le monde se déclare très attaché.
(L’article 21 est adopté.)
(Les articles 22 et 23 sont successivement adoptés.)
(L’article 24 et l’annexe C sont adoptés.)
(L’article 25 est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 183, 273 et 606, tendant à supprimer l’article 26.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 183.
M. Jean-Pierre Door. Il est logique, dans le prolongement des débats d’avant-hier, que nous demandions la suppression de cet article car, malgré les déclarations d’autosatisfaction de Mme la ministre, la situation des comptes sociaux reste critique. Des réformes s’imposent pour que le système soit soutenable dans la durée.
S’agissant de l’exercice 2017, sur lequel porte cet article, vos prévisions de recettes se fondent sur une croissance de 1,5 % et une augmentation de la masse salariale de 2,7 %. Ces prévisions macroéconomiques étant très hypothétiques et sans doute trop optimistes, nous sommes très inquiets et estimons que la réalisation de vos objectifs est très incertaine. C’est pour cette raison que nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 273.
M. Bernard Accoyer. On voit bien, à la lecture de l’exposé des motifs, que le Gouvernement n’a opéré aucune réforme de structure. Même s’il se prévaut d’avoir réduit le déficit, en particulier de la branche vieillesse, ce dont on ne peut que se féliciter, il est bon de rappeler que ce sont les réformes Balladur de 1993, Fillon de 2004 et Wœrth de 2010…
M. Michel Issindou. Et celle de 2014 !
M. Bernard Accoyer. …qui sont à l’origine du redressement des comptes. Ceux-ci avaient été mis à mal par le refus de toute réforme structurelle de la branche vieillesse, qui a toujours été la posture de l’opposition de gauche.
Madame la ministre, vous n’étiez pas la dernière à manifester avec violence votre opposition à ces réformes. On se rappelle ce qui s’est passé dans cet hémicycle lors du vote de la loi de 2010, qui restera dans les mémoires comme un moment d’obstruction caricaturale, et qui symbolise le refus obstiné de la gauche de conduire toute réforme de structure pour faire que notre protection sociale, le pacte de 1945, puisse résister aux mutations du temps.
Mme Sylviane Bulteau et Mme Joëlle Huillier. Et votre amendement ?
M. Bernard Accoyer. Vous pouvez vous prévaloir de ces résultats, mais il serait quand même plus honnête de reconnaître que vous vous êtes toujours opposés à toutes les réformes dont tous les observateurs disent qu’elles sont à l’origine du rétablissement des comptes. Quant à vous, vous n’avez fait que deux choses : rétablir la retraite à 60 ans – ce qui fait qu’un retraité sur quatre part à la retraite à 60 ans – au lieu d’améliorer les comptes, et peut-être même le déficit global ; et ajouter le compte pénibilité, dont absolument personne ne reconnaît l’applicabilité.
M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement no 606.
M. Francis Vercamer. Le groupe de l’Union des démocrates et indépendants présente également un amendement tendant à supprimer l’article 26, parce qu’il suffit de lire l’annexe B, particulièrement son alinéa 6, pour voir que les prévisions du Gouvernement sont fausses. Il est indiqué clairement que la prévision de croissance est conforme à celle de 2016, à savoir 1,5 %. Or, il y a quelques semaines, l’INSEE, qui est quand même un organisme qui dépend de l’État, a annoncé que la croissance pour 2016 se situerait plutôt aux alentours de 1,3 %. La croissance annoncée dans cette annexe B ne correspond donc pas à la réalité.
Le Gouvernement prévoit par ailleurs une augmentation de la masse salariale. Or, on voit bien que la courbe du chômage est loin de s’être inversée et qu’elle joue plutôt au yo-yo ces derniers temps. Même si la situation s’améliorait, prévoir une telle augmentation de la masse salariale est illusoire. La croissance et la masse salariale étant deux éléments clés du financement de la Sécurité sociale, il est clair que les recettes ne seront pas au rendez-vous.
La Cour des comptes, du reste, a rappelé que le déficit résultait, non pas de la conjoncture, mais de causes structurelles. Or le Gouvernement n’a pas engagé les réformes structurelles qui s’imposaient, comme nous le déplorons chaque année : la Cour des comptes l’a elle-même fait remarquer et je pense que nous pouvons lui faire confiance.
Je le répète : les prévisions du Gouvernement détaillées dans l’annexe B ne seront pas conformes à la réalité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. Monsieur le président, mes remarques vaudront également pour les autres amendements déposés à cet article 26, qui sont tous des amendements de posture. Ils visent à supprimer tout ou partie de l’article 26 ou de l’annexe B.
Je ne peux qu’être défavorable à la suppression d’un article approuvant une annexe qui trace les perspectives pluriannuelles de nos finances sociales. Même si l’on peut évidemment discuter de la pertinence de l’une ou l’autre de nos prévisions, projeter ainsi dans l’avenir l’évolution du financement de notre protection sociale est en effet un vrai progrès.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement est défavorable à tous ces amendements, qui s’inscrivent en effet dans la droite ligne des débats que nous avons eus il y a deux jours, et hier encore, sur l’équilibre d’ensemble des comptes de la Sécurité sociale. Je ne reviens pas sur ces débats et sur ce qui nous oppose.
Je veux seulement souligner l’obsession punitive qui est la vôtre, et qui ressort de manière spectaculaire de l’intervention de M. Bernard Accoyer. Vous dites que nous n’avons pas fait de réformes structurelles.
M. Francis Vercamer. C’est la Cour des comptes qui le dit !
Mme Marisol Touraine, ministre. Mais, en vous écoutant, on se demande ce que vous entendez par « réformes structurelles ». Vous nous avez expliqué, à moi en particulier, et au Gouvernement, que nous avions eu tort de garantir à ceux qui ont eu des métiers difficiles, à ceux qui ont commencé à travailler jeunes, de partir à la retraite à 60 ans.
Mme Isabelle Le Callennec. La réforme de 2003 le proposait déjà, mais vous ne l’avez pas votée ! Ayez au moins l’honnêteté de le reconnaître !
Mme Marisol Touraine, ministre. Nous avons fait cela, tout en rétablissant les comptes de la branche vieillesse, ce qui signifie que l’on peut à la fois rétablir la situation financière et prendre des mesures de justice et de progrès. Mais votre obsession punitive, qu’exprime d’ailleurs, discours après discours, chacun de vos candidats à la primaire, montre que ce n’est pas le rétablissement des comptes que vous recherchez. Ce que vous voulez, c’est faire travailler plus longtemps les Français, par principe. Pourquoi vous obstiner à repousser l’âge légal de départ à la retraite, si les comptes sont à l’équilibre, comme vous venez vous-même de le reconnaître, en expliquant que ce n’était pas à nous, mais à vous et à nos prédécesseurs, qu’il fallait attribuer ce bon résultat ?
De deux choses l’une : ou bien les comptes sont rétablis et, dans ce cas, on ne voit pas pourquoi vous vous obstinez à vouloir imposer aux Français de travailler plus dur et plus longtemps, par principe, comme si vous aviez envie de multiplier les contraintes ; ou bien les comptes ne sont pas rétablis, et cela signifie que vos réformes n’ont pas arrangé les choses. Il faut choisir !
En tout cas, j’invite l’Assemblée à repousser ces amendements, en alertant tous les députés et, au-delà, l’ensemble des Français, sur le fait que vos discours trahissent votre volonté. En fait de réformes structurelles, ce que vous préconisez, si je vous entends bien, c’est l’augmentation des dépenses de médicament – je ne suis pas sûre que ce soit là une réforme structurelle extrêmement porteuse – et des contraintes supplémentaires pour les salariés qui ont connu des carrières difficiles. Effectivement, nous n’avons pas la même conception des réformes structurelles et, en matière de santé, je crains que dans votre esprit, la réforme structurelle se limite à la fermeture des hôpitaux, en particulier des hôpitaux de proximité. Or ce n’est pas ce que nous voulons. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Mme Isabelle Le Callennec. Ce n’est pas de votre niveau, madame la ministre !
M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.
M. Bernard Accoyer. Madame la ministre, vous n’avez jamais accepté le constat simple que l’espérance de vie avait augmenté. Vous n’avez jamais accepté que la pyramide des âges, en France, avait été bouleversée et que le nombre d’actifs et d’inactifs était désormais très déséquilibré. Et vous vous êtes donc constamment opposée à ce que l’on augmente l’âge de référence de départ à la retraite. Cela a été chez vous une posture absolue, comme d’ailleurs chez le Président de la République. C’était même un de ses arguments de campagne : on voit ce qu’il en est advenu depuis.
Vous avez toujours refusé que l’on augmente la durée de cotisation, alors que tous les pays du monde l’ont fait, madame la ministre. Vous le savez bien : c’est juste un calcul actuariel, et le professeur agrégé de mathématiques qui est à quelques mètres de vous pourrait vous l’expliquer en deux minutes. La mauvaise foi ne change rien aux chiffres.
Vous ne pouvez pas ne pas remercier ceux qui ont eu le courage de faire ces réformes, et je ne vous laisserai pas occulter le fait que vous vous y êtes opposée constamment, avec une grande violence.
Mme Isabelle Le Callennec. En effet !
M. Bernard Accoyer. Il est facile d’avoir des propos démagogiques…
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Oh !
M. Bernard Accoyer. …et d’expliquer qu’avec vous, tout va bien, alors que le travail a été fait par d’autres – car c’est ainsi que les choses se sont passées en ce qui concerne le rééquilibrage des comptes de la branche vieillesse.
Enfin, comment pouvez-vous, madame la ministre, caricaturer à ce point nos propos sur la branche famille et sur la réforme de l’hôpital, alors que votre politique en matière de santé n’a consisté qu’à faire des coupes claires et aveugles – même si vous avez tout de même consenti, ce matin, un petit rattrapage, en acceptant de prendre en compte l’évolution des chiffres d’affaires bruts des entreprises, et non plus nets, dans le calcul de la lettre de régulation L – et à vous en prendre aux tarifs de l’hospitalisation privée ? Quand on demande à des observateurs de résumer votre politique, ils ne peuvent citer que ces deux mesures, qui ont eu des conséquences terribles.
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cette intervention ne dure pas deux minutes, mais deux heures !
M. le président. Vous frisez l’obstruction, cher collègue.
M. Bernard Accoyer. Vous pourriez faire des économies en réduisant le temps d’hospitalisation et en transformant les lits ainsi libérés en lits de suite et de réadaptation ou d’accueil de personnes âgées, en utilisant des progrès médicaux et médicamenteux exceptionnels.
M. le président. La parole est à M. Michel Issindou.
M. Michel Issindou. M. Bernard Accoyer vante à l’excès la réforme de 2010. Nous l’avons combattue, même si nous reconnaissons – nous n’avons pas cessé de le dire et de l’écrire – qu’elle a eu des effets en termes de produit financier, qui étaient sans doute nécessaires. Ce que nous avons contesté, c’est son contenu. Vous avez fait des choses que nous ne pouvons pas accepter, que nous n’acceptons pas : la preuve, nous les avons rectifiées en 2014.
Vous avez voulu nous vendre la prise en charge de la pénibilité, alors que vous avez tout au plus reconnu l’incapacité et l’invalidité, qui n’ont concerné que 3 000 à 4 000 personnes – rien à voir avec ce que nous avons fait, et dont nous sommes plutôt fiers. Nous avons fait un choix de justice. Vous dites que nous n’avons pas touché à l’âge légal, ce qui est vrai, mais nous avons bien pris en compte l’évolution de l’espérance de vie, puisque nous avons allongé progressivement la durée d’assurance pour arriver à 43 annuités en 2035 pour la génération de 1973. Cela nous paraît beaucoup plus juste, et cela permettra à ceux qui ont commencé à travailler très jeunes de partir un peu plus tôt, à l’âge légal qui est aujourd’hui fixé à 62 ans, et aux autres de continuer un peu plus longtemps. On estime que, dans une vingtaine d’années, l’âge de départ moyen se situera autour de 64 ans : le Conseil d’orientation des retraites, le COR, l’a clairement dit.
Alors, ne vous attribuez pas tous le mérite s’agissant de la réforme des retraites. Vous avez fait la vôtre, qui n’était pas la nôtre, et c’est pour cela que nous l’avons combattue avec conviction, la nôtre nous paraissant beaucoup plus juste.
Quant aux comptes généraux, c’est toujours la même histoire : vous nous dites que ces comptes sont insincères, qu’une croissance de 1,5 % est inaccessible, mais j’espère bien que nous l’atteindrons. Nous faisons tout pour, et nous n’en sommes pas très loin ces derniers temps, avec des taux à 1,3 ou 1,4 %. Vous ne pouvez pas nous dire qu’une prévision de 1,5 % est totalement insincère et utopique. Nous espérons que les mesures que nous avons mises en œuvre, avec cette loi et par le passé, seront bénéfiques.
Cet article 26 ne mérite pas d’être supprimé. Il est au contraire très justement établi et il se rapproche de la réalité. Tous les ans, vous nous racontez la même histoire et, tous les ans, nous vous démontrons le contraire.
M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.
M. Francis Vercamer. Madame la ministre, c’est la Cour des comptes qui indique que 40 % du déficit résulte, non pas de la conjoncture, mais de causes structurelles. Nous ne faisons que rappeler ce que la Cour des comptes répète chaque année.
Je vais vous énoncer quelques-uns des réformes de structure que nous proposons, puisque vous avez l’air de dire que nous ne faisons pas de propositions : la réforme des régimes spéciaux, de façon à faire converger les régimes et à en finir avec cette France à deux vitesses, où certains sont plus protégés que d’autres ; la réforme du financement de la protection sociale ; la réforme, enfin, de la carte hospitalière, parce que les groupements hospitaliers de territoire – GHT – ne vont pas tout régler et qu’il importe de spécialiser les hôpitaux. Il faut aller vite, et nous avons de nombreuses propositions qui permettraient à la fois de faire des économies et de modifier le mode de financement de notre protection sociale.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Monsieur Vercamer, vous avez dit que l’INSEE est un organisme qui dépend de l’État. Je vous invite à regarder ses statuts : y compris pour des questions de comptabilité européenne, l’INSEE est un organisme indépendant.
(Les amendements identiques nos 183, 273 et 606 ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 184, 207 et 274.
La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement no 184.
M. Gilles Lurton. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 21 à 26 de l’annexe B de l’article 26, qui détaillent les prévisions relatives aux comptes de la branche famille. J’ai eu l’occasion de m’exprimer longuement lors de la discussion générale sur la situation de la branche famille, dont vous n’arrêtez pas de nous répéter qu’elle serait revenue à l’équilibre. S’il était confirmé, cet équilibre aura été obtenu à grands coups de rabots sur la politique familiale. Je ne vais pas répéter la liste des prestations qui ont diminué pour les familles depuis le début de ce quinquennat, mais cela se compte en milliards d’euros !
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Vous ne parlez pas de celles qui ont augmenté !
M. Gilles Lurton. Selon la commission de comptes de la Sécurité sociale, la dépense globale de prestations familiales aurait diminué en 2016 de 0,5 %. La dépense consacrée aux prestations d’entretien en faveur de la famille aurait baissé de 0,7 %. C’est donc bien sur le dos des familles que toutes ces économies ont été faites.
Je le répète, il ne s’agit en rien d’une simple réorientation des aides vers les familles les plus pauvres. Ce n’est pas moi qui le dis, mais l’Union nationale des associations familiales – l’UNAF –, laquelle a récemment démontré que les familles les plus pauvres avaient également été victimes de cette politique, notamment en raison de la baisse de la prestation d’accueil du jeune enfant. Le Gouvernement fait montre de triomphalisme sur le bilan de la politique familiale, alors que ce sont les familles qui ont le plus souffert de ses décisions.
Mme Véronique Louwagie. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 207.
M. Dominique Tian. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 274.
M. Bernard Accoyer. Au risque de relancer les échanges d’amabilité avec Mme la ministre, je tiens à ajouter que les mesures prises contre les familles françaises, notamment les familles nombreuses, ont très certainement contribué à amorcer une baisse de la natalité en France. Les familles sont confrontées à des difficultés budgétaires, comme en atteste le nombre des familles avec enfants qui sollicitent les élus car elles ne peuvent plus payer leurs impôts. C’est évidemment extrêmement inquiétant, dans un système fondé sur la solidarité entre les générations. Voilà l’un des résultats de votre politique, madame la ministre !
(Les amendements identiques nos 184, 207 et 274, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) (Murmures sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 185, 208 et 275.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 185.
Mme Véronique Louwagie. Les familles ont été particulièrement malmenées sous ce quinquennat. La baisse des prestations a touché 3,2 millions de familles avec enfants, issues principalement des classes moyennes ou pauvres. Ce n’est pas moi qui le dis, mais l’UNAF, selon laquelle 160 000 familles vivant sous le seuil de pauvreté seraient affectées par la non-revalorisation du montant de la prestation d’accueil du jeune enfant et par la réforme de la prime de naissance. Le montant de cette dernière a été divisé par deux et son versement est désormais effectué deux mois après la naissance, alors que les familles en ont besoin avant. C’est en milliards d’euros que se comptent les économies qui auront été faites sur le dos des familles.
D’après les chiffres de l’INSEE du 1er janvier 2016, le taux de natalité a baissé en 2015, ce qui augure mal de l’année 2016. Entre 2013 et 2015, 17 960 places en crèches ont été créées, soit moins de 20 % de celles promises. Pendant ce temps, le nombre d’enfants gardés par une assistante maternelle a reculé de 16 500. La baisse des aides financières pour les autres modes de garde incite les parents à avoir recours à la crèche, qui est pourtant le mode le garde le plus coûteux pour la collectivité. En définitive, ce sont encore les familles qui ont trinqué sous ce quinquennat.
Enfin, je ne sais pas si l’on peut parler de réussite, lorsque les conséquences de la politique familiale se font sentir sur la natalité. Dans tous ces domaines, madame la ministre, votre politique ne correspond pas à la vision que nous nous faisons des familles.
M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 208.
M. Dominique Tian. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 275.
M. Bernard Accoyer. Je tiens à compléter l’excellente présentation de Mme Louwagie en précisant qu’aux baisses importantes du montant des prestations s’est ajouté le matraquage fiscal, qui a affecté tout particulièrement les familles avec enfants : je pense notamment à la diminution de l’aide à la garde d’enfants et à la baisse du plafond du quotient familial. Mme la ministre, qui connaît bien l’histoire politique, doit se souvenir que c’est Laurent Fabius, ministre délégué au budget au début des années quatre-vingt, qui a commencé à s’en prendre aux familles. Les effets de ces décisions, qui affectent la dynamique d’une nation, seront longs à constater. Mais tel sera le résultat de bientôt quarante ans de vie socialiste.
Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. On aurait bien aimé être au pouvoir pendant quarante ans !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme la ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes des familles, de l’enfance et des droits des femmes, pour donner l’avis du Gouvernement.
Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes. Nous ne sommes pas d’accord sur la politique familiale. Je comprends que vous appeliez à des réformes de structures, mais, dans les différents programmes des candidats de droite, que j’ai lus attentivement, je n’ai trouvé aucune proposition de réformes structurelles. Ils n’ont même pas une position commune sur la suppression de la modulation des allocations familiales ! À ma connaissance, personne ne s’engage à la supprimer.
M. Gilles Lurton et Mme Véronique Louwagie. C’est faux !
Mme Laurence Rossignol, ministre. Par ailleurs, je tiens à vous dire deux choses, madame Louwagie. Premièrement, la modulation des allocations n’a touché que 9 % des familles, c’est-à-dire celles qui perçoivent plus de 6 000 euros par mois.
Mme Véronique Louwagie. C’est un mauvais signal !
Mme Laurence Rossignol, ministre. De plus, cette mesure nous a permis de ramener la branche famille à l’équilibre, ce qui est un fait avéré, et de redéployer nombre de prestations en faveur des familles les plus défavorisées et des familles mono-parentales.
Deuxièmement, vos propos sur la prime de naissance ne relèvent pas du débat d’idées, car ils sont faux : cette prime a été maintenue dans sa totalité, au même niveau, c’est-à-dire à plus de 900 euros par enfant, qu’il s’agisse du premier, du deuxième ou du troisième enfant. Son versement a été décalé après la naissance de l’enfant. Comme cette prestation concerne un nombre important de familles, parce que le plafond de ressources qui conditionne son versement est relativement élevé, les caisses d’allocations familiales ont décidé, sur délibération du bureau national de la CNAF, que seraient mises en place dans chaque CAF des procédures spécifiques permettant aux familles les plus en difficulté de bénéficier d’avances sur versement. Pour ces familles, la prime est donc versée à la même date qu’auparavant, sous forme de prêts. On peut avoir des débats, mais on ne peut pas dire des choses fausses.
M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.
M. Gilles Lurton. En effet, madame la ministre, il s’agit de deux conceptions totalement opposées de la politique familiale. Je vais vous répondre en trois points. Premièrement, s’agissant des programmes des candidats à la primaire, je vous assure que certains candidats ont proposé très clairement de revenir sur la modulation des allocations familiales.
Mme Véronique Louwagie. Ils l’ont même écrit !
M. Gérard Bapt, rapporteur. Des noms !
M. Gilles Lurton. Deuxièmement, la décision de verser la prime de naissance deux mois après la naissance a été prise en 2015 pour des raisons de trésorerie, pour gagner un peu d’argent et un peu de temps.
Mme Isabelle Le Callennec. Ce n’est pas très glorieux !
M. Gilles Lurton. Vous dites que les familles peuvent demander aux CAF une avance sur versement lorsqu’elles sont en difficultés. Je suis opposé à l’idée qu’il faille toujours réclamer pour obtenir une prestation.
Mme Isabelle Le Callennec. Exactement !
M. Gilles Lurton. Vous imaginez ce que peut coûter une telle démarche à ces familles !
Troisièmement, la politique de la famille a toujours reposé sur un principe de compensation de l’arrivée d’un enfant dans un foyer – je l’ai expliqué longuement lors de la discussion générale. La politique familiale n’a pas à redistribuer les richesses, c’est à l’impôt de le faire ! Si vous vouliez agir sur les hauts revenus, il fallait le faire par l’impôt. La politique familiale repose sur un principe de redistribution horizontale, auquel nous tenons beaucoup. C’est cela qui nous oppose, madame la ministre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Je tiens à rassurer toutes les familles, car elles continuent bien à toucher des prestations familiales. Ne laissez pas croire le contraire ! Il faut dire la vérité et ne pas essayer de faire peur aux familles, car cela ne présente d’intérêt pour personne.
Depuis 2012, nous avons fortement aidé les familles modestes et les plus vulnérables en augmentant certaines prestations. Je pense notamment à l’augmentation de 25 % de la prime de rentrée scolaire, à la mise en œuvre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, à la revalorisation du complément familial et à la majoration de l’allocation de soutien familial, dont bénéficient en majorité les mères élevant seules leurs enfants.
Je ne continuerai pas la litanie de toutes les mesures visant à consolider la politique familiale, mais je rappelle que les dispositions en faveur des familles ne sont pas toutes contenues dans la branche famille. D’autres mesures les ont beaucoup aidées : je pense notamment à la scolarisation des enfants de moins de trois ans, que vous avez fortement affaiblie. Malgré tous nos efforts, il est difficile de remettre en marche une machine que vous avez cassée. L’augmentation du nombre d’enseignants de l’éducation nationale concourt également au bien-être des enfants et de leur famille.
En tant que rapporteure de la branche famille, je tiens à dire qu’à la suite de l’adoption de la modulation des allocations familiales, je n’ai reçu aucun courriel ou coup de téléphone de personnes niant que ce soit une mesure de justice sociale.
Mme Isabelle Le Callennec. Tout le monde n’a pas forcément votre adresse de courrier électronique ou votre numéro de téléphone !
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Les familles de deux enfants concernées recevaient auparavant 133 euros par mois.
M. Bernard Accoyer. La rapporteure parle depuis cinq minutes !
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Aujourd’hui, elles perçoivent un peu plus de 60 euros. Je crois que cela leur permet de continuer à vivre, ce qui n’est pas le cas des familles qui perçoivent les minima sociaux.
M. Michel Issindou. Je demande une suspension de séance de dix minutes. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. Elle est de droit.
Je précise aux membres du groupe Les Républicains que j’ai été extrêmement attentif à l’égalité des temps de parole : Mme Clergeau a parlé dix secondes de moins que M. Accoyer...
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures vingt-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.
Mme Isabelle Le Callennec. M. Lurton a insisté sur la question de la prime de naissance : je voudrais savoir pourquoi celle-ci n’est plus versée avant la naissance de l’enfant, comme elle devrait l’être logiquement et comme, du reste, le code le prévoit. Les couples qui attendent leur premier enfant s’équipent naturellement avant l’arrivée de celui-ci. J’aimerais vous convaincre de verser la prime de naissance avant la naissance.
De plus, comme l’a souligné M. Lurton, elle devrait être versée de droit : or, en raison du décret que vous avez pris, il faut en demander le versement à la CAF – vous l’avez vous-même reconnu. Or toutes les CAF ne répondent pas immédiatement : elles traînent parfois à le faire.
Si des problèmes de trésorerie vous ont amenés à décaler le versement de la prime une fois, il convient désormais de rétablir l’ordre des choses : une prime de naissance, je le répète, se verse avant la naissance. Outre que c’est la logique, cela ne mettrait pas en péril le budget de la Sécurité sociale.
(Les amendements identiques nos 185, 208 et 275 ne sont pas adoptés.)
M. Yves Censi. Il faut voter par assis et levé.
M. le président. N’ayez aucune inquiétude, monsieur Censi, on sait compter en Béarn.
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 186, 209 et 276.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement no 186.
M. Jean-Pierre Door. Les alinéas 23 à 26, qui présentent les perspectives de la branche vieillesse et que cet amendement vise à supprimer, prévoient un excédent pour 2017.
Nous tenons à rappeler que c’est le report progressif de l’âge de la retraite, inscrit dans la loi Woerth de 2010 qui, en se déployant, est à l’origine de cet excédent.
M. Michel Issindou. Non.
M. Jean-Pierre Door. Il ne faut pas s’endormir, chers collègues, car la Cour des comptes indique que, si nous en restions là, les perspectives pour 2025 risqueraient d’être très problématiques.
Telle est la raison pour laquelle cet amendement demande la suppression des trois alinéas 23 à 26.
M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 209.
M. Dominique Tian. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement no 276.
M. Bernard Accoyer. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.
(Les amendements identiques nos 186, 209 et 276 ne sont pas adoptés.)
(L’article 26 et l’annexe B sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l’examen de la troisième partie du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017.
M. le président. Toutefois, avant de mettre aux voix l’ensemble de la troisième partie, je vous informe qu’en application de l’article 121-3 du Règlement, le Gouvernement demande qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article 10.
Je suis saisi de quatre amendements, nos 1, 7, 8 et 9, pouvant être soumis à une discussion commune. L’amendement no 1 fait l’objet de plusieurs sous-amendements, nos 3, 2 et 4.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 1.
Mme Isabelle Le Callennec. C’est un déni de démocratie !
M. Marc Le Fur. Nous avons déjà voté : il n’est pas besoin de délibérer une seconde fois !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Le Gouvernement vous demande, par l’amendement no 1, de rétablir l’article 10 tel qu’il avait été rédigé, à une exception près, sur laquelle je souhaite appeler votre attention. Conformément à nos débats, qui ont été longs et riches, le Gouvernement propose d’y intégrer l’amendement voté par la commission des affaires sociales, visant à porter le seuil relatif à la location de biens meubles de 3 360 à 7 720 euros.
Le débat s’est prolongé et s’est terminé tardivement. Cependant, pour toutes les raisons que j’ai indiquées, le Gouvernement souhaite avancer sur ces questions,…
M. Marc Le Fur. Non, il souhaite reculer !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. …clarifier la situation et renseigner les contribuables, notamment les utilisateurs de l’économie collaborative.
Des progrès pourront être faits au cours de la navette. J’ai bien entendu ce qui a été dit au sujet des gîtes ruraux, des chambres d’hôtes et des modalités d’affiliation au RSI, le régime social des indépendants. Au Sénat et en nouvelle lecture, le Gouvernement s’est engagé à enrichir ces dispositions, qui constituent à l’évidence un progrès.
M. le président. Je suis saisi de trois sous-amendements, nos 3, 2 et 4, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir le sous-amendement no 3.
M. Bernard Accoyer. Rappel au règlement, monsieur le président !
M. le président. Je vous donnerai la parole ultérieurement, monsieur Accoyer.
M. Marc Le Fur. Un rappel au règlement interrompt les débats !
M. le président. S’il vous plaît, monsieur Le Fur, n’interrompez pas M. Tian !
M. Dominique Tian. Monsieur le président, nous regrettons les conditions dans lesquelles ce débat est rouvert. Hier soir, l’article 10 a été supprimé par dix-huit voix contre quatorze : le vote était assez clair ! L’Assemblée nationale s’est exprimée de manière extrêmement claire.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Non, ce n’était pas clair du tout !
M. Dominique Tian. Tout à l’heure, monsieur Eckert, vous avez affirmé que les députés n’étaient plus lucides, et qu’à une heure du matin nous n’étions plus en possession de nos moyens…
M. Gérard Bapt, rapporteur. Vous nous aviez saoulés ! (Sourires.)
Mme Isabelle Le Callennec. Il a également dit que certains s’étaient trompés de bouton !
M. Dominique Tian. Je suis désolé, mais ce débat important sur l’économie collaborative a duré une heure ou une heure et demie. Évidemment, nous étions clairs lors du vote ! Si des députés de gauche ont voté en conscience la suppression de l’article, il faut respecter leur vote au lieu de vous livrer à des actions de police politique.
Mme Isabelle Le Callennec. De police de la pensée !
M. Marc Le Fur. Nous ne sommes pas des députés oreillettes !
M. Dominique Tian. Par ailleurs, hier soir, les députés écologistes se sont exprimés contre l’article 10 ; or ils sont peu représentés cet après-midi. C’est assez scandaleux ! Le débat est complètement escamoté.
Nous avons souligné hier un effet de seuil tout à fait dramatique, sur lequel nous allons probablement revenir.
M. Michel Issindou. Oh non, ça recommence…
M. Dominique Tian. Lorsqu’on loue sa voiture, sa tondeuse, son bateau ou sa caravane, par exemple, le choix d’un tel seuil – 3 860 euros – pose un problème. C’est une somme ridicule… Cet effet de seuil doit donc faire l’objet d’un débat.
Nous nous opposons à cet article 10 pour une deuxième raison, très importante également : vous obligez toute personne ayant des revenus collaboratifs supérieurs à cette somme à s’affilier au RSI. Monsieur le secrétaire d’État, nous vous avons demandé hier si tout le monde avait le droit de s’affilier à ce régime. Une personne ayant une profession relevant du régime général, un fonctionnaire d’État, un fonctionnaire territorial, un retraité ou un chômeur a-t-il le droit d’adhérer au RSI ?
M. Gérard Sebaoun. Oui !
M. Dominique Tian. Probablement pas. Vous n’avez pas répondu clairement, monsieur le secrétaire d’État : vous ne vous êtes pas engagé. Vous risquez de priver des millions de personnes de revenus complémentaires au seul motif que vous n’êtes pas capable de répondre à cette simple question.
M. Bernard Accoyer. Bravo !
M. le président. Sur l’amendement no 1, je suis saisi par le groupe Les Républicains et par le groupe de l’Union des démocrates et indépendants d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir le sous-amendement no 2.
M. Francis Vercamer. Il s’agit de modifier l’alinéa 5 de l’amendement du Gouvernement afin de revenir à la définition du loueur en meublé professionnel prévue par l’article 155 du code général des impôts. Cette définition intègre trois conditions : il faut qu’un membre du foyer fiscal au moins soit inscrit au registre du commerce et des sociétés en qualité de loueur professionnel ; que les recettes annuelles retirées de la location excèdent 23 000 euros ; qu’elles excèdent les revenus du foyer fiscal soumis à l’impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires au sens de l’article 79 du code général des impôts. Le retour à cette définition traditionnelle du loueur en meublé professionnel me semble un minimum !
M. le président. L’amendement no 1 fait encore l’objet d’un sous-amendement no 4.
Peut-être, monsieur Tian, pouvez-vous le présenter en même temps que vos amendements nos 7 et 8, soumis à une discussion commune avec l’amendement no 1 du Gouvernement ?
M. Dominique Tian. Volontiers, monsieur le président, mais je vérifie que je suis lucide, sinon M. le secrétaire d’État va encore contester notre vote ! (Sourires sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)
L’argumentation est la même : l’institution d’une obligation d’affiliation au régime des travailleurs indépendants pour la location de biens au-delà de 3 860 euros serait une erreur considérable. Je propose donc de supprimer au moins les alinéas 6 et 7 de l’amendement du Gouvernement : c’est l’objet du sous-amendement no 4.
Pour défendre les amendements nos 7 et 8, que j’ai déposés avec d’autres collègues du groupe Les Républicains, permettez-moi de faire un petit retour en arrière. Le Gouvernement a commandé un rapport à M. Terrasse – rapport de grande qualité, d’ailleurs, comme M. Bapt l’a rappelé.
M. Gilles Lurton. M. Terrasse n’est pas là cet après-midi…
M. Dominique Tian. Il est sans doute ailleurs ! Ce rapport n’évoquait pas une obligation d’adhésion des loueurs au RSI ; au contraire, il proposait une modulation de la CSG. Vous savez bien, monsieur le secrétaire d’État, que les biens dont il s’agit sont souvent de faible valeur – un bateau, un camping-car, une caravane, une tondeuse ou toutes sortes de petit matériel. Nous parlons de revenus équivalents à 320 euros par mois ; dès lors que les loueurs paient déjà des impôts, sans doute n’est-il pas utile de les considérer comme des professionnels ! Au lieu de les inscrire de force au RSI, il conviendrait de leur appliquer une modulation de la CSG. C’est le sens des amendements nos 7 et 8.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements et sous-amendements ?
M. Gérard Bapt, rapporteur. À titre personnel, je donne un avis favorable à l’amendement no 1 du Gouvernement, puisqu’il intègre désormais l’amendement adopté par la commission visant à porter de 10 % à 20 % du plafond annuel de la Sécurité sociale – PASS – le seuil à partir duquel les locations de biens et de services passeront du statut d’activité accessoire à celui d’activité professionnelle.
Bien entendu, je suis globalement défavorable aux autres amendements et aux sous-amendements. Nous avons déjà largement débattu de ces sujets hier. Le sous-amendement no 2 de M. Vercamer ne change rien au seuil. Il vise à revenir à la définition fiscale du loueur en meublé professionnel, mais c’est déjà cette définition qui s’applique : il est donc sans objet. Quant au débat sur l’affiliation au RSI, nous l’avons déjà eu hier. À titre personnel, je propose donc à l’Assemblée de repousser les sous-amendements nos 3, 2 et 4, ainsi que les amendements nos 7 et 8.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je confirme que le sous-amendement no 2 de M. Vercamer est satisfait par l’amendement du Gouvernement. Sans objet, il pourrait être utilement retiré.
Quant au rapport Terrasse, je rappelle, monsieur Tian, que sa proposition no 12 relative à l’affiliation est reprise par le Gouvernement. Il s’agissait en effet de clarifier la doctrine de l’administration fiscale en remplaçant par un seuil de revenus la distinction traditionnelle entre activité occasionnelle et activité régulière.
Ainsi, le Gouvernement considère que le sous-amendement no 2, satisfait, pourrait être retiré ; à défaut, il y sera défavorable. Il est également défavorable aux sous-amendements nos 3 et 4, ainsi qu’aux amendements nos 7 et 8.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Viala.
M. Arnaud Viala. Monsieur le secrétaire d’État, le tour de passe-passe que constitue cette seconde délibération témoigne de votre acharnement à vouloir à tout prix soumettre à des charges sociales des particuliers qui louent très souvent leurs biens pour s’assurer un complément de rémunération. Hier, d’ailleurs, j’ai été très surpris d’entendre citer dans cet hémicycle des noms de plates-formes, y compris par vous, monsieur le secrétaire d’État – ce n’est peut-être pas la meilleure manière de faire… On a tout bonnement ignoré le nombre très important de particuliers pour lesquels cette activité n’est pas du tout l’activité principale.
Nous avons par ailleurs débattu du RSI et de ce que nous avons qualifié de « dysfonctionnements », malgré votre acharnement, là encore, à démontrer que tout va bien… Cela me fait penser à votre choc de simplification. Je lisais mardi matin dans le Figaro les propos de Françoise Holder, coprésidente du Conseil de la simplification pour les entreprises : « On est dans une baignoire et on essaie de la vider, même si l’eau continue de nous couler sur la tête » – et les robinets sont ouverts à fond ! Les particuliers qui devront engager toutes les démarches d’affiliation au RSI et s’acquitter des charges sociales qui en découlent apprécieront la simplification à laquelle vous les soumettez !
M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson. Mes chers collègues, contrairement à ce que vient d’affirmer M. le secrétaire d’État, l’amendement no 1 modifie les règles d’affiliation des loueurs professionnels.
Nous avons déjà beaucoup discuté de ce sujet. Dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012, nous avions retenu trois critères cumulatifs pour distinguer les loueurs professionnels de ceux qui ne les sont pas.
M. Arnaud Viala. Exactement !
M. Charles de Courson. Tout d’abord, les recettes annuelles retirées de cette activité devaient dépasser 23 000 euros. Ensuite, l’individu devait être inscrit au registre du commerce et des sociétés en qualité de loueur professionnel. Enfin, pour faire simple, les recettes tirées de ces locations immobilières devaient représenter plus de la moitié des revenus de cette personne.
Or, si vous lisez bien l’amendement du Gouvernement, il propose de supprimer ce dernier critère des 50 %, ce qui est grave, car de nombreux individus qui perçoivent des petites retraites, qui ont mis de l’argent de côté et qui louent un immeuble ou un appartement pour un loyer représentant plus de la moitié de leurs recettes totales vont basculer du côté des loueurs professionnels. Pensez notamment aux commerçants, aux artisans et à leurs veufs ou veuves ! Quant aux deux autres critères, ils ne sont plus cumulatifs, mais alternatifs. Lisez bien l’alinéa 5 : il n’est pas écrit « et », mais « ou » !
Monsieur le secrétaire d’État, combien de dizaines de milliers de personnes vont-elles basculer du statut de non-professionnel vers celui de professionnel ? J’essaie de trouver le chiffre : personne ne semble capable de me le donner. Cela concernera sans doute plusieurs centaines de milliers de personnes !
M. Yves Censi. On peut l’imaginer…
M. Charles de Courson. Quelle sera la conséquence de cette modification ? C’est très simple. Si vous n’êtes pas loueur professionnel, vous payez la CSG, la CRDS et « toute la sauce », comme on dit, c’est-à-dire 15,5 % de charges. Si vous devenez loueur professionnel, vous payez, en plus de ces 15,5 %, 30 % de cotisations au RSI,…
M. Yves Censi. Eh oui !
M. Charles de Courson. …et sur ce qui reste, vous paierez encore l’impôt sur le revenu si vous êtes imposable. De toute façon, que vous soyez imposable ou non, vous payez 45 % de charges avant impôt sur le revenu. Pour ces centaines de milliers de personnes, souvent modestes – les loueurs les plus aisés ont déjà le statut de professionnel –, que va-t-il se passer ? Une partie exercera ces activités au noir, tandis qu’une autre partie se retirera du marché de la location, augmentant ainsi le nombre de logements vacants.
Hier soir, M. le secrétaire d’État avait été prudent : il avait admis que l’article 10 était imparfait mais nous avait assuré qu’il essaierait de l’améliorer. Mais c’est une énorme erreur de voter cela !
M. Marc Le Fur. Bien sûr !
M. Charles de Courson. Si, par malheur, l’amendement du Gouvernement est adopté ce soir, ceux qui l’auront voté verront les conséquences de cette mesure sur les ménages modestes. C’est pour cela que le débat a été torride hier soir et qu’une majorité s’est prononcée contre l’article 10, préférant trouver une autre solution.
M. le président. La parole est à M. Michel Issindou.
M. Michel Issindou. Monsieur le président, je vous demande une suspension de séance de deux minutes. (« Ah ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. Mes chers collègues, une demande de rappel au règlement a été exprimée.
M. Marc Le Fur. Depuis longtemps !
M. le président. Je l’avais oubliée – cela arrive…
M. le président. Je donne donc la parole à M. Bernard Accoyer, pour un rappel au règlement.
M. Bernard Accoyer. Monsieur le président, compte tenu de la confusion que le Gouvernement a introduite dans cette discussion, je comprends très bien qu’il vous soit difficile de diriger nos débats ! Nous vous savons gré d’être aussi attentif.
Ce rappel au règlement se fonde sur l’article 58, alinéa 1 relatif au déroulement de la séance. Il s’adresse au Gouvernement.
Mesdames les ministres, monsieur le secrétaire d’État, nous vous demandons de respecter l’Assemblée nationale et le Parlement. Dans notre système institutionnel, en effet le Gouvernement est à la disposition du Parlement. Or, ce matin, sur une simple exigence de sa part, nous sommes passés de l’examen de l’article 10 à celui l’article 18. De nombreux collègues avaient pourtant aménagé leur emploi du temps pour pouvoir débattre de tel ou tel article, sur tel ou tel sujet ; peu importe, le Gouvernement, toutes affaires cessantes, en a décidé autrement. Tant pis pour les parlementaires, qui ont dû s’en accommoder.
Par ailleurs, la nuit dernière, le Gouvernement, mis en minorité, a été battu par dix-huit voix contre quatorze. Cet après-midi, nous voyons revenir le secrétaire d’État au budget et, tout à coup, on nous apprend que l’on va procéder à une seconde délibération alors que le Gouvernement a été largement battu sur l’article 10. Pourtant, il est de coutume que les secondes délibérations interviennent en fin de débat…
M. Marc Le Fur. Tout à fait.
M. Bernard Accoyer. …afin de respecter le travail du Parlement. Tout cela démontre non seulement que le Gouvernement et sa majorité sont aux abois, mais de surcroît qu’ils ne portent pas le minimum de respect dû à la représentation nationale.
M. Frédéric Reiss. Honteux !
M. Bernard Accoyer. Nous voulions le dénoncer solennellement et nous vous demandons, monsieur le président, de bien vouloir informer M. le président de l’Assemblée nationale que nous ne pouvons pas accepter de continuer à travailler dans de telles conditions. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. Cher président Accoyer, permettez-moi une séquence de nostalgie en vous donnant lecture de l’article 121-3 de notre règlement.
« À l’issue de l’examen des articles d’une partie du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, et avant de passer à l’examen de la suivante, il peut être procédé, dans les conditions prévues à l’article 101, à une seconde délibération. » En marge de cet article, figurent au crayon les initiales de l’auteur de cet alinéa : BA. (Sourires.) Je cherche à savoir à qui appartiennent ces initiales !
M. Bernard Accoyer. Vous êtes mal entouré, monsieur le président. (Sourires.)
M. le président. Sans doute. Mais admettez qu’à l’époque, vous bénéficiiez du même entourage. (Sourires.)
M. le président. M. Issindou a demandé une suspension de séance. Elle est de droit.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante.)
M. le président. La séance est reprise.
M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement no 9.
M. Dominique Tian. Laissez-moi quelques secondes, monsieur le président, car l’amendement vient seulement d’être distribué.
M. le président. Parce que vous l’avez déposé il y a trente secondes.
M. Dominique Tian. Compte tenu de l’urgence dans laquelle nous sommes, je n’ai pas pu faire autrement. Le vote étant intervenu hier soir, il n’y avait pas de raison qu’on y revienne.
Cela dit, je dénonce l’affiliation forcée au RSI pour des personnes exerçant une activité de location pour compléter leurs revenus. Ces personnes ne devraient pas être obligées d’adhérer à ce régime, la location n’étant pas leur profession. Il conviendrait que ces personnes soient assujetties à la CSG et non pas au RSI. C’est un amendement de repli que je propose là.
M. Bernard Accoyer. Le Gouvernement devrait saisir cette chance.
M. le président. M. Bapt m’a fait savoir que la commission était défavorable à cet amendement.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Défavorable.
M. le président. Nous allons procéder au vote des sous-amendements à l’amendement du Gouvernement.
(Les sous-amendements nos 3, 2 et 4, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 1.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants | 50 |
Nombre de suffrages exprimés | 50 |
Majorité absolue | 26 |
Pour l’adoption | 30 |
contre | 20 |
(L’amendement no 1, modifiant l’article 10, est adopté et les amendements nos 7, 8 et 9 tombent.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de la troisième partie du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017.
(L’ensemble de la troisième partie du projet de loi est adopté.)
M. le président. Nous abordons la quatrième partie du projet de loi, concernant les dispositions relatives aux dépenses pour l’année 2017
M. Bernard Accoyer. Et ça continue !
M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour un rappel au règlement.
Je vous indique d’ores et déjà que l’annonce de l’examen prioritaire avait déjà été faite. Ceux qui étaient présents dans l’hémicycle l’ont entendue clairement.
M. Bernard Accoyer. C’était avant l’annonce de la deuxième délibération !
M. Frédéric Lefebvre. Je veux dénoncer les conditions dans lesquelles nous travaillons. Nous passons notre temps entre examens prioritaires et secondes délibérations. Quel mépris pour le Parlement !(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Je note que la seconde délibération sur l’article 10 s’est faite en l’absence de Mme la rapporteure générale du budget. Je rappelle que celle-ci est intervenue hier soir pour dire combien le dispositif proposé par le Gouvernement était dangereux pour l’avenir. Le Gouvernement profite de l’absence d’un certain nombre de parlementaires, notamment de sa majorité, pour procéder à une seconde délibération. De la même façon, il demande des réserves de vote ou des examens prioritaires dans le seul but d’essayer d’avoir une majorité dans cet hémicycle. C’est absolument intolérable.
En signe de protestation, nous allons quitter cet hémicycle…
M. Bernard Accoyer. Non, pas du tout.
M. Frédéric Lefebvre. …du moins, certains d’entre nous. Et pour ma part, c’est ce que je vais faire. (Rires sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
M. Bernard Accoyer. Ne vous inquiétez pas, on va rester !
M. Thierry Benoit. C’est M. le secrétaire d’État qui s’en va !
M. le président. Vous êtes irremplaçable, monsieur Lefebvre !
M. Frédéric Lefebvre. Je sais bien.
Je suis surtout très heureux de constater que le premier qui répond à mon appel est M. le secrétaire d’État au budget, parce qu’il est parfaitement conscient de ce qu’il fait depuis hier.
Ne l’obligez pas à revenir, monsieur Lefebvre. (Sourires.)
M. le président. Nous abordons les dispositions relatives communes aux différentes branches.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement rédactionnel no 763.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Certes, monsieur le président, il s’agit d’un amendement rédactionnel, mais je souhaiterais faire une remarque. Autant l’opposition est fondée à protester s’agissant de la seconde délibération, autant elle doit admettre que les articles placés à la fin du PLFSS, mais dont le contenu doit être rattaché à ceux dont nous venons de discuter soient examinés avant le passage à la partie consacrée aux dépenses. C’est l’usage et nous procédons ainsi chaque année – je vois du reste que M. Door m’approuve.
M. Jean-Pierre Door. Oui.
M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, pour donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement no 763.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. L’avis est favorable.
(L’amendement no 763 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 772.
M. Gérard Bapt, rapporteur. Rédactionnel.
(L’amendement no 772, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L’article 58, amendé, est adopté.)
M. Bernard Accoyer. Ça va trop vite, on ne peut plus suivre !
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l’article.
Mme Jacqueline Fraysse. L’examen de l’article 59 me donne l’occasion de souligner l’importance de la lutte contre la fraude aux cotisations sociales, à laquelle sont consacrés plusieurs articles du PLFSS.
L’intention est louable et nous la partageons. Depuis longtemps, en effet, nous dénonçons la fraude patronale aux cotisations sociales qui peut prendre plusieurs formes : travail au noir, non-paiement des heures supplémentaires, fraude au détachement, etc. Les sommes en jeu sont très importantes, pour ne pas dire colossales, puisque selon la Cour des comptes, la perte pour la protection sociale liée à cette fraude représentait en 2012 entre 16 et 20 milliards d’euros – et le montant est probablement du même ordre chaque année.
Pourtant, force est de constater que les résultats des efforts annoncés pour lutter contre ce fléau ne sont pas à la hauteur des enjeux. En effet, en 2015, selon un rapport de l’ACCOS – agence centrale des organismes de Sécurité sociale –, les redressements notifiés représentaient 1,3 milliard d’euros, mais sur cette somme, seulement 189 millions d’euros ont été effectivement récupérés au profit des organismes de Sécurité sociale.
C’est pourquoi, si nous prenons acte avec intérêt des efforts réalisés dans le cadre de ce PLFSS sur ce point – amélioration des outils de recouvrement et des systèmes d’information utilisés par les acteurs publics –, je m’interroge sur la faiblesse des montants recouvrés. Il convient d’en rechercher les raisons, tant nous sommes encore loin du compte. Pourquoi ne sommes-nous pas capables de recouvrer davantage ?
Je pose donc de nouveau la question des moyens mis à la disposition des URSSAF pour intensifier la lutte contre la fraude aux cotisations sociales. Des dispositions législatives sont évidemment nécessaires, mais il faut aussi des moyens permettant d’appliquer les dispositions que nous votons.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 887.
M. Gérard Bapt, rapporteur. C’est un amendement de précision.
Madame Fraysse, l’article 59 vise précisément à améliorer le recouvrement sur le plan des échanges d’informations entre organismes de sécurité sociale, qu’il s’agisse de la gestion des prestations ou du recouvrement des cotisations sociales. Cet article et le suivant vont donc tout à fait dans le sens souhaité, qui consiste non seulement à identifier, mais également à mieux recouvrer les sommes indûment soustraites à nos organismes de sécurité sociale.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame Fraysse, si la récupération de sommes qui devraient aller au financement de la Sécurité sociale n’augmente pas plus rapidement, c’est parce que bon nombre des entreprises qui veulent se soustraire à leurs obligations se déclarent en faillite. Dans les premiers articles que nous avons examinés ont été adoptés des dispositifs qui nous permettent de mieux identifier ces situations et de mieux recouvrer les sommes concernées.
Avis favorable à cet amendement rédactionnel no 887.
(L’amendement no 887 est adopté.)
(L’article 59, amendé, est adopté.)
M. le président. Nous en venons aux dispositions relatives aux dépenses d’assurance maladie.
M. le président. La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour soutenir l’amendement no 446 rectifié, portant article additionnel après l’article 44.
Mme Bernadette Laclais. Cet amendement, proposé par mon M. Gérard Bapt et par moi-même, tend à prendre en compte les recommandations formulées dans le rapport de notre collègue Pierre Morange en conclusion des travaux menés par la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la Sécurité sociale – MECSS – sur les transports sanitaires.
Comme vous le savez, en effet, les dépenses de transport ont augmenté fortement et de manière continue au cours des dernières années. Nos travaux ont fait apparaître que ces frais s’élevaient à 2,3 milliards d’euros en 2003 et à 4 milliards d’euros en 2013, et qu’ils représentaient 3,9 % de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie – ONDAM – en 2003 et 5 % en 2013.
Il ne s’agit évidemment pas de stigmatiser les transports sanitaires, mais de nous efforcer de conserver des transports de qualité et de mieux les organiser. Cela va dans le sens de l’intérêt des patients et de l’ensemble de la collectivité, mais aussi de celui des ambulanciers, car le dispositif proposé vise également à mieux gérer les flux et peut-être, de la sorte, à mieux rentabiliser les investissements réalisés par les ambulanciers.
Cet amendement tend à ce que les transports interétablissements soient financés par les établissements. À cette fin, conformément à la recommandation no 11 du rapport, il prévoit de laisser le temps nécessaire au dialogue et à l’élaboration du décret que nous suggérons. Il s’agit ainsi de permettre une avancée tout en veillant à garantir la qualité et à réguler la situation en bonne intelligence. Les établissements hospitaliers, qui sont à l’origine de la commande, sont sans doute les mieux placés pour piloter les flux interhospitaliers et intra-hospitaliers.
M. le président. Monsieur le rapporteur, étant donné que vous êtes cosignataire de cet amendement, je présume que votre avis est favorable.
M. Gérard Bapt, rapporteur. En effet, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement est préoccupant. Il porte en effet sur 125 millions d’euros, ce qui n’est pas un détail, et tend à opérer, si je ne me trompe, un allégement de la charge des dépenses de la branche maladie au détriment – ou, du moins, à la charge – des budgets hospitaliers, lesquels connaissent déjà, du moins pour ce qui concerne les hôpitaux publics, des difficultés.
Je suis donc gênée par cet amendement. De fait, j’ai bien entendu les explications qui ont été données, mais je ne suis pas certaine que ce transfert de charges de la branche maladie sur les budgets hospitaliers soit une bonne mesure. Pouvez-vous donc préciser ce qu’il en est ?
M. le président. La parole est à Mme Michèle Delaunay, rapporteure.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Avis favorable, car cette mesure va dans le sens de la responsabilisation et de l’identification des prescripteurs, nécessaire pour parvenir à une certaine maîtrise des coûts du transport sanitaire.
M. le président. Madame la rapporteure, monsieur Bapt avait déjà exprimé un avis favorable.
Mme Michèle Delaunay, rapporteure. Ce n’est pas grave ! L’avis en sera doublement favorable. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.
M. Jean-Pierre Door. Nous sommes également favorables à cet amendement. En effet, lorsque nous avons étudié la question des transports sanitaires dans le cadre de la MECSS, il est apparu que l’on ignorait parfois qui rémunérait certains transports sortant de l’hôpital – on ne savait notamment pas s’il s’agissait de l’assurance maladie. Avec le dispositif proposé, ce sera le prescripteur hospitalier, à l’intérieur des hôpitaux, qui sera chargé du paiement de transports hospitaliers ou interhospitaliers, et non pas un intervenant extérieur. Ces montants figureront donc dans l’enveloppe hospitalière, et non pas dans d’autres enveloppes. La mesure proposée est logique et il l’amendement no 446 rectifié est donc un bon amendement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame Fraysse, je tiens à vous rassurer : il ne s’agit pas de demander aux hôpitaux d’assumer sur leurs crédits actuels la charge supplémentaire des transports, et donc de transférer une charge de l’assurance maladie aux budgets hospitaliers sans transférer les recettes correspondantes. Les ressources qui figurent aujourd’hui dans l’ONDAM de ville seront donc évidemment affectées à la prise en charge de ces dépenses par les hôpitaux.
M. le président. Monsieur Vercamer, vous aviez demandé la parole.
M. Francis Vercamer. Je viens d’entendre la réponse à la question que je voulais poser, monsieur le président.
(L’amendement no 446 rectifié est adopté à l’unanimité.)
M. le président. Nous abordons les articles relatifs à la famille.
M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 27.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Mme Jacqueline Fraysse. Lors de l’examen du PLFSS pour 2016, nous avions déjà exprimé notre soutien à la généralisation du dispositif de garantie contre les impayés de pension alimentaire. L’article 27 prolonge ce dispositif en créant une agence de recouvrement des pensions alimentaires, qui assurera ce recouvrement dès le premier mois d’impayé et jouera un rôle d’intermédiation, sur décision d’un juge, en cas de violences ou de menaces envers le créancier. Ces dispositions sont importantes et utiles. Nous les soutenons, car elles répondent à une réalité difficile pour de nombreuses familles.
Je rappelle que, selon le Haut conseil de la famille, le phénomène des impayés concerne un tiers des cas et contribue largement à la précarité les familles monoparentales, ce que confirme l’INSEE en soulignant que la pension alimentaire représente en moyenne un cinquième du revenu de ces familles. C’est un élément qu’il importe de garder présent à l’esprit. Nous soutenons donc avec beaucoup d’intérêt cette mesure qui accorde de nouveaux droits aux personnes concernées.
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard.
M. Denys Robiliard. Mme Fraysse vient de dire une partie de ce que je voulais exprimer. Les pensions alimentaires touchent au quotidien d’un grand nombre de familles, que ce soit du côté du créancier ou de celui du débiteur – à la situation duquel il convient aussi de prêter attention.
À la suite d’un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales – IGAS – auquel avait participé notre ancien collègue Jérôme Guedj, nous construisons actuellement un bon système de recouvrement des pensions alimentaires, la création de l’agence venant compléter sur ce plan la garantie des impayés de pension alimentaire. On parvient ainsi à une bonne articulation du recouvrement par les caisses d’allocations familiales, confiée à une agence, avec le système de garantie, et donc avec l’allocation de soutien familial – ASF – et l’ASF complémentaire. De la sorte, cette construction intéressante n’est pas inscrite dans le code civil mais, mais dans le code de la sécurité sociale, à la faveur du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Je tiens par ailleurs à souligner que, contrairement à ce que l’on pense, les caisses d’allocations familiales recouvrent effectivement les pensions alimentaires. Ainsi, la CAF de mon département du Loir-et-Cher, mutualisée avec d’autres CAF de la région Centre-Val de Loire, recouvre effectivement, au bout du compte, les deux tiers des pensions. Compte tenu de la réalité quotidienne des pensions alimentaires et du nombre de celles qui ne sont pas recouvrées, ce chiffre mérite d’être connu, car il illustre l’efficacité du recouvrement par les CAF – et, demain, par l’agence de recouvrement.
J’ai en outre déposé plusieurs amendements qui nous permettront d’aller plus loin, mais je me félicite déjà que cette question soit examinée dans le cadre du présent PLFSS et que nous progressions dans l’intérêt des familles.
M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.
M. Gilles Lurton. Madame la ministre, je vous ai dit voilà quelques instants combien nous étions opposés à votre politique familiale, mais il faut aussi, lorsqu’une mesure nous convient, savoir le dire. Nous avons approuvé l’an dernier la création de la garantie contre les impayés de pension alimentaire – GIPA –, qui nous paraît répondre aux besoins de ces femmes et – parfois aussi – de ces hommes seuls avec leurs enfants qui ne parviennent pas à obtenir le paiement de la pension alimentaire qui leur est due et qui se trouvent dans un véritable désarroi. Ces personnes peuvent certes saisir le juge d’application des peines, mais les délais de cette procédure demeurent très longs et cela ne diminue en rien les difficultés auxquelles ils doivent faire face. Dans nos permanences, nous sommes tous régulièrement confrontés à de telles situations et dépourvus de moyens pour répondre aux attentes des personnes qui nous en saisissent.
La création d’une agence de recouvrement des pensions alimentaires, qui délivrera la GIPA, nous paraît donc une bonne solution et il paraissait normal que sa gestion soit confiée aux caisses d’allocations familiales.
Tout en souscrivant à ce choix, je souligne néanmoins un petit problème : ce dispositif se traduira pour les CAF par un travail supplémentaire, même si, comme nous l’avons constaté lors des auditions auxquelles nous avons procédé, elles se montrent très volontaires pour accomplir ce travail – qui fait du reste partie de leur mission première. L’excellent rapport rendu voilà environ deux ans par nos collègues Vercamer et Hutin sur le fonctionnement des CAF montre bien que, dans certains départements, la situation reste très tendue. Les CAF disposeront-elles des ressources humaines et du temps nécessaires pour traiter toutes ces demandes ? Nous sommes prêts à voter cette réforme, mais nous voulons avoir connaissance de son application réelle sur le terrain.
Je souhaite également exprimer une inquiétude relative aux mutualités sociales agricoles, qui nous ont fait part des difficultés de fonctionnement auxquelles elles sont confrontées, des demandes qui leur sont adressées de diminuer leurs frais de fonctionnement et des besoins de personnel qu’elles rencontrent pour réaliser ce travail.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 682.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. La parole est à Mme la ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes, pour donner l’avis du Gouvernement.
Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes. Avis favorable.
Je tiens par ailleurs à dire combien je me félicite des interventions qui viennent de se succéder et du soutien collectif manifesté par l’Assemblée à cette disposition. Je rappelle que la loi du 22 décembre 1984 avait donné aux caisses d’allocations familiales une mission d’ordre général pour le recouvrement des pensions alimentaires et que nous avons mis en place en 2016 une garantie généralisée des impayés de pensions alimentaires. Il fallait encore disposer d’un outil supérieur pour mettre en œuvre cette délégation générale donnée aux CAF.
La nouvelle architecture, qui instaure l’agence de recouvrement, permettra de faire en sorte que ce dispositif soit mieux connu des allocataires, encore trop peu nombreux à savoir qu’ils peuvent saisir leur caisse d’allocations familiales pour obtenir le recouvrement et la GIPA.
Nous pourrons étendre le nombre et la nature des familles bénéficiaires puisque la garantie s’adressera maintenant à tous les créanciers – ce n’était pas le cas auparavant –, particulièrement les créanciers remis en couple, qui étaient auparavant tenus d’avoir épuisé toutes les voies de recours préalables. Elle sera également étendue aux couples se séparant à l’amiable qui, en l’état du droit, doivent faire homologuer leur convention par le juge. Enfin, le dispositif actuel ne permettant pas d’apporter un accompagnement suffisant aux créanciers victimes de violence, l’Agence aura aussi un rôle d’intermédiation.
Je considère pour ma part que le non-paiement des pensions alimentaires est une violence économique à l’encontre des femmes – ce point a été très bien développé par le député Denys Robiliard – et s’inscrit donc dans les violences faites aux femmes. À cet égard, l’agence de recouvrement offre une garantie nouvelle aux femmes et aux familles les plus modestes.
Pour répondre à la question des moyens, qui m’avait déjà été posée en commission, lorsque nous avons mis en place la GIPA, nous nous sommes appuyés sur des caisses pivots, en l’occurrence les CAF et la MSA – Mutualité sociale agricole. Nous poursuivrons donc la mutualisation des procédures ainsi mise en place.
Pour être claire, il s’agit d’un service au sein des caisses d’allocations familiales et de la MSA, et non d’un bâtiment arborant à son fronton « Agence de recouvrement des impayés des pensions alimentaires ». Ce service peut selon nous fonctionner avec les moyens existants. Nous observerons, tout au long de l’année 2017, la manière dont la montée en charge se fera mais, pour l’instant, nous pensons que les moyens sont suffisants, justement grâce à la mutualisation. Si, par la suite, les missions de l’agence doivent être étendues – le député Denys Robiliard en a proposé de nouvelles –, et si des besoins supplémentaires apparaissent, alors nous prendrons les mesures nécessaires.
(L’amendement no 682 est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 684.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel.
(L’amendement no 684, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 683.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel de précision.
(L’amendement no 683, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 899.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel.
(L’amendement no 899, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 686.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel.
(L’amendement no 686, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 487.
M. Denys Robiliard. Il s’agit d’élargir le domaine d’application de ce dispositif. Celui-ci est en effet limité aux cas de rupture de concubinage et de dissolution de pacte civil de solidarité. Je trouve cela dommage car ce titre exécutoire pourrait convenir à n’importe quel accord entre deux parents, qu’ils aient été mariés ou non. Par conséquent, pourquoi en refuser le bénéfice aux parents mariés ?
Un accord peut intervenir avant le divorce, quand les époux sont séparés de fait, ou après le divorce, quand les parents se mettent d’accord sur un changement de résidence de l’enfant : dans ce cas, sans repasser devant le juge, ils conviennent ensemble du lieu de résidence de l’enfant, des modalités d’exercice du droit de visite et d’hébergement ainsi que d’une pension alimentaire ou, du moins, de la contribution du parent chez lequel les enfants ne résident pas principalement à l’éducation et à l’entretien de l’enfant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. La possibilité de donner force exécutoire aux accords amiables conclus entre parents constitue une compétence nouvelle pour les caisses d’allocations familiales. C’est pourquoi il me semble préférable, dans un premier temps, de limiter cette mesure aux parents mettant fin à une vie en concubinage ou procédant à la dissolution du pacte civil de solidarité qui les liait. Il est en effet souhaitable que la montée en charge de cette nouvelle mission soit progressive pour les caisses d’allocations familiales, qui sont déjà sous tension.
Je pense néanmoins, comme vous, qu’une extension du public concerné par la possibilité de bénéficier d’un titre exécutoire délivré par l’agence pourrait être envisagée, mais seulement une fois que le dispositif sera arrivé à maturité. C’est la raison pour laquelle je donne aujourd’hui un avis défavorable à votre amendement, monsieur Robiliard.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Laurence Rossignol, ministre. Avis défavorable pour les mêmes raisons. Il n’est pas exclu, monsieur Robiliard, que l’histoire finisse par vous donner raison sur cet amendement et que, dans un an ou deux, cette disposition soit finalement adoptée, le cas échéant sur proposition du Gouvernement. Cela étant, à ce stade du développement de l’agence de recouvrement, nous avançons marche par marche.
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard.
M. Denys Robiliard. Je retire cet amendement pour faire preuve de bonne volonté. Cela étant, je crains que les parents ne se précipitent pas sur ce dispositif. En effet, quand les parents concluent un accord à l’amiable, leur première préoccupation n’est pas, par définition, d’obtenir un titre exécutoire. Il existe effectivement un cas dans lequel ils le demanderont : quand il sera la condition pour obtenir une allocation, de type ASF ou ASF complémentaire. Mais je ne crois pas que les CAF seront submergées par la création de ce mécanisme, qu’il faudra faire monter en puissance. Voilà pourquoi je pense qu’il doit pouvoir être ouvert à tous les accords. Il faut réserver le titre exécutoire aux accords et laisser le juge trancher les litiges : en l’absence de litige, il est dommage d’obliger les parents à saisir le juge.
(L’amendement no 487 est retiré.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 687.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel.
(L’amendement no 687, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 688.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel.
(L’amendement no 688, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 488.
M. Denys Robiliard. Le présent amendement vise à supprimer l’alinéa 28, qui exige, pour la délivrance d’un titre exécutoire, qu’aucun des parents ne soit titulaire d’une créance fixée pour l’enfant concerné par une décision de justice ou n’ait engagé de démarche pour l’obtenir. Encore une fois, je trouve cela dommage.
Prenons l’exemple de parents qui divorcent, sur requête conjointe ou selon tout autre mode. Puis, cinq ans, six ans ou dix ans plus tard, ils modifient leur accord parce que l’enfant a grandi. L’on constate souvent que, pour des raisons matérielles ou éducatives, les parents décident entre eux que l’enfant résidera désormais chez son père alors qu’il résidait jusque-là chez sa mère. Dans ce cas, il faut convenir d’une nouvelle pension alimentaire. Pourquoi obliger les parties, si elles veulent un titre exécutoire ou si elles en ont besoin, à saisir le juge ?
Par ailleurs, l’alinéa 28 pose la condition suivante : « Aucun des parents […] n’a engagé de démarche pour l’obtenir ». Cela signifie qu’en l’absence de décision judiciaire, si l’un des parents a saisi le juge, il ne sera plus possible d’obtenir un titre exécutoire en raison de la démarche engagée à cette fin. Or, quand un parent saisit le juge, il s’aperçoit souvent qu’il faut plusieurs mois, voire plus d’une année, pour obtenir un jugement. Parfois, les parents se mettent d’accord tout simplement parce qu’il y a urgence. Je trouve dommage de fermer cette porte. Voilà pourquoi j’ai déposé cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Vous proposez de supprimer l’alinéa 28 qui précise que l’agence donne force exécutoire à l’accord amiable des parents seulement si ces derniers ne sont pas déjà titulaires d’une créance fixée par décision de justice pour le même enfant. Cette précision me paraît pourtant utile : l’alinéa 28 permet en effet de clarifier les conditions de recours au nouveau dispositif, ainsi que les champs de compétence respectifs de l’agence, d’une part, et du juge, d’autre part.
Deux situations peuvent être distinguées. Si les parents signent un accord, alors le parent créditeur ne peut être également bénéficiaire d’une pension alimentaire fixée par décision de justice ; c’est une condition pour que l’agence donne force exécutoire à l’accord. Si les parents ne s’entendent pas, le montant de la pension est fixé par le juge. Je donne donc un avis défavorable à votre amendement, en précisant que je propose un amendement rédactionnel réécrivant l’alinéa 28 afin de le rendre plus clair.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Laurence Rossignol, ministre. Votre amendement pose problème car il aboutirait à donner à l’agence compétence pour réviser partiellement une décision judiciaire, exercice aujourd’hui totalement improbable et qui pourrait en outre créer des contradictions entre diverses parties du jugement. En effet, un jugement de divorce contient à la fois les mesures concernant la résidence des enfants, l’exercice de l’autorité parentale – ce que l’on appelle la « garde » – et la fixation de la pension alimentaire. Permettre à l’agence de réviser le montant qui avait fait l’objet d’une décision exécutoire aboutirait en fait à dissocier résidence et pension alimentaire.
De plus, il existe souvent une conflictualité entre les parents puisque, dans les trois quarts des cas, les parents sont accompagnés d’un avocat, alors que le ministère d’un avocat n’est pas obligatoire. Les situations sont donc tendues. Nous pensons à cet instant qu’il vaut mieux éviter de dissocier le jugement exécutoire du juge aux affaires familiales.
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard.
M. Denys Robiliard. Pour des raisons techniques, je ne suis pas d’accord avec l’argumentation que vous avez développée, madame la ministre. L’agence ne révisera pas la décision du juge : c’est l’accord des parents qui changera. Alors qu’il existe un jugement fixant la pension alimentaire, les parents conviennent de renoncer à la décision judiciaire pour lui substituer un accord. Sans cet accord, l’agence ne peut rien faire, fort heureusement ! Il ne s’agit évidemment pas de faire de la CAF un organe d’appel du jugement : à la CAF les accords, au juge le soin de trancher les litiges ! Mais quand il n’y a pas de litige, pourquoi vouloir repasser devant le juge ?
On constate fréquemment que, alors que les parents n’étaient initialement pas d’accord, le temps qui passe permet d’effacer partiellement l’acrimonie – parfois elle se développe, mais pas souvent. Ils retrouvent alors les chemins du dialogue et la capacité à conclure des accords. Voilà la raison pour laquelle je maintiens le présent amendement.
J’ajoute – réflexion purement corporatiste – que si la présence de l’avocat peut être le signe d’une conflictualité, elle n’est pas facteur de conflictualité. L’avocat permet parfois de réduire la tension et de trouver l’accord.
(L’amendement no 488 n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 689.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il s’agit de l’amendement de clarification dont j’ai parlé tout à l’heure. Je propose une nouvelle rédaction de l’alinéa 28 : pour bénéficier du titre exécutoire délivré par l’agence, « les parents attestent qu’aucun d’entre eux n’est titulaire d’une créance fixée pour cet enfant par une décision de justice ou n’a engagé de démarche en ce sens. »
(L’amendement no 689, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 489.
M. Denys Robiliard. Le texte prévoit que pour qu’un titre exécutoire soit délivré sur la base d’un accord entre les parents, il faut qu’un minimum de pension alimentaire ait été respecté, apprécié selon un barème. S’il est prévu de prendre en considération les enfants à charge, ce que je trouve bien normal, il n’est pas prévu en revanche de prendre en compte les pensions alimentaires que peut devoir un des parents. Il me paraît nécessaire de le prendre en considération, raison pour laquelle je propose d’ajouter à l’alinéa 29 les mots « ou qu’il contribue à l’entretien et l’éducation d’un enfant. » Cet élément est très important pour déterminer la faculté contributive du parent qui sera débiteur de la pension.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. J’en suis désolée pour mon collègue Robiliard, mais je vais devoir émettre à nouveau un avis défavorable, pour trois raisons. Tout d’abord, la notion d’enfant à charge est difficile à apprécier : elle peut varier entre le droit de la famille, le droit fiscal et le droit de la Sécurité sociale. C’est pourquoi il est préférable de maintenir la rédaction actuelle de l’alinéa 29.
De plus, la liste des éléments à prendre en compte pour fixer le montant de la contribution n’est pas exclusive, comme en témoigne l’utilisation de l’adverbe « notamment ». La précision que vous proposez d’introduire pourra donc être prise en compte sans qu’elle figure explicitement à l’alinéa 29.
Enfin, il est précisé que le montant de la contribution sera établi selon des conditions fixées par décret. La précision que vous souhaitez introduire pourra donc y figurer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Laurence Rossignol, ministre. Il me semble, monsieur le député, que votre amendement est satisfait. En effet, le nombre d’enfants retenu pour déterminer le montant de la contribution est le nombre total des enfants à la charge du débiteur, c’est-à-dire ceux à l’éducation et à l’entretien desquels il contribue. La rédaction proposée ferait coexister dans la même phrase deux notions identiques et pourrait être une source d’interrogations pour le juge ou toute personne ayant à interpréter l’article, alors que la rédaction de ce dernier est, dans l’état actuel, relativement claire.
Je le redis à l’attention du législateur, il n’est pas nécessaire de voter votre amendement pour que tous les enfants à la charge du débiteur soient pris en compte. Je vous suggère donc de le retirer, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard.
M. Denys Robiliard. Madame la ministre, votre interprétation de la notion d’enfant à charge m’étonne, mais à partir du moment où vous considérez que contribuer à l’entretien et à l’éducation d’un enfant revient à avoir un enfant à charge et que c’est dans cette acception qu’il faut comprendre l’alinéa 29, je suis prêt à retirer mon amendement au bénéfice de cette interprétation.
(L’amendement no 489 est retiré.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 690.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel.
(L’amendement no 690, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de l’amendement rédactionnel no 691 de Mme Marie-Françoise Clergeau.
(L’amendement no 691, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement de cohérence no 490.
M. Denys Robiliard. Je le retire.
(L’amendement no 490 est retiré.)
M. le président. Je suis saisi de l’amendement rédactionnel no 692 de Mme Marie-Françoise Clergeau.
(L’amendement no 692, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de l’amendement rédactionnel no 720 de M. Denys Robiliard.
M. Denys Robiliard. Je le retire au bénéfice d’un amendement que nous examinerons ultérieurement.
(L’amendement no 720 est retiré.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 697.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel.
(L’amendement no 697, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. L’amendement no 698 de Mme Marie-Françoise Clergeau est également rédactionnel.
(L’amendement no 698, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 658.
M. Denys Robiliard. L’alinéa 35 dispose que l’agence transmettra à l’administration fiscale les titres exécutoires qu’elle émettra, ce qui me pose deux problèmes.
Tout d’abord, cela crée une différence de traitement avec les parents dont la pension alimentaire est fixée par le juge. En effet, lorsqu’un juge fixe le montant d’une pension alimentaire, que ce soit par le biais d’une ordonnance de conciliation, un jugement de divorce ou un jugement rendu après le divorce, ou lorsque deux parents qui, n’étant pas mariés, ont rompu leur concubinage ou leur Pacs, il ne transmet pas son ordonnance ou son jugement à l’administration fiscale.
Il y a un autre problème, plus fondamental : ce n’est pas parce que vous demandez que soit donnée force exécutoire à un accord que celui-ci sera effectivement exécuté. L’administration fiscale est certes en droit de penser que, si un titre exécutoire a été délivré pour le versement d’une pension, celle-ci est réellement versée et son montant apparaît donc au débit des revenus du parent débiteur de la pension et au crédit du parent créancier. Mais dans la réalité, cela peut se passer de façon totalement différente : un accord, bien qu’ayant fait l’objet d’un titre exécutoire, peut ne pas avoir été exécuté. Et le parent créancier qui n’a pas perçu la pension ne le signale pas nécessairement afin d’en obtenir le paiement.
Avec cette disposition, on court le risque que soient délivrées des informations incomplètes ou erronées et de causer plus de problèmes qu’on n’en résout. Voilà pourquoi je propose de remplacer le mot : « transmettent» par les mots : « peuvent transmettre ». Si l’administration veut savoir si un titre existe, il faut pouvoir lui répondre. Mais en faire une obligation me paraît plutôt de nature à induire en erreur l’administration fiscale, ce que je ne voudrais pour rien au monde.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il est important de préciser qu’en cas de changement de situation, les parents transmettent un nouvel accord qui, dès lors qu’il aura reçu force exécutoire, permettra à la caisse d’allocations familiales d’ajuster le montant de l’ASF différentielle.
Je suis d’accord avec vous, monsieur Robiliard, il n’est pas certain que les deux parents s’accordent sur le nouveau montant de la contribution alimentaire, mais dans ce cas ils pourront toujours saisir le juge aux affaires familiales. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable à votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Laurence Rossignol, ministre. Je vais essayer de mettre un peu ordre. Il me semble, monsieur Robiliard, que vous avez défendu l’amendement no 493 et non le no 658, mais Mme la rapporteure a bien donné l’avis de la commission sur le no 658.
M. Arnaud Richard. Le Gouvernement suit !
Mme Laurence Rossignol, ministre. En ce qui concerne cet amendement, je suis d’accord avec Mme la rapporteure et j’émets le même avis défavorable. S’agissant du no 493, j’émets par avance un avis également défavorable.
(L’amendement no 658 n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement no 699 de Mme Marie-Françoise Clergeau est rédactionnel.
(L’amendement no 699, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 491.
M. Denys Robiliard. Il est défendu.
(L’amendement no 491, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 141 et 492.
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 141.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Je vais laisser M. Robiliard présenter son amendement, qui est identique.
M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 492.
M. Denys Robiliard. Cet amendement, hélas, présente moins d’intérêt que beaucoup de ceux que j’ai déposés… Cela dit, il vise à gérer l’articulation entre une nouvelle décision judiciaire et le titre exécutoire. Il me paraissait opportun de préciser dans la loi ce qui se passe quand une décision judiciaire intervient a posteriori de la délivrance d’un tel titre.
(Les amendements identiques nos 141 et 492, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 700.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il est rédactionnel.
(L’amendement no 700, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Est-ce également le cas de l’amendement no 701, madame Clergeau ?
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Oui.
(L’amendement no 701, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de l’amendement no 493 de M. Denys Robiliard, précédemment défendu.
(L’amendement no 493, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement no 702 de Mme Marie-Françoise Clergeau est rédactionnel.
(L’amendement no 702, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L’article 27, amendé, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, inscrit sur l’article.
M. Gilles Lurton. L’article 28 vise, en réalité, la mise en place du prélèvement à la source pour les salariés de particuliers employeurs.
Dans sa première partie, il est proposé d’instaurer la généralisation du crédit d’impôt à l’ensemble des particuliers employeurs. Cette mesure est réclamée depuis de nombreuses années par la Fédération des particuliers employeurs, qui estime que l’emploi à domicile est enfin devenu l’objet d’un consensus politique.
Mais la deuxième partie de l’article est un paradoxe. Alors que de nombreuses TPE craignent la mise en place du prélèvement à la source, y voyant une source de complexité supplémentaire, vous proposez de l’étendre aux particuliers employeurs et à leurs salariés.
Cette réforme présente de nombreuses difficultés que vous n’ignorez pas, en particulier dans un secteur où le salarié et son employeur se mettent d’accord sur un salaire net et non sur un montant brut. Ainsi toute augmentation de cotisations est généralement compensée par l’employeur de façon à ce qu’elle soit indolore en termes de salaire net, quitte à ce que le nombre d’heures déclarées servent de variable d’ajustement.
Nous comprenons qu’intégrer l’impôt dans la fiche de salaire a pour but d’éviter que le particulier employeur ne se retrouve à payer l’impôt de son salarié – lorsque ce dernier est imposable – mais cette mesure ne concerne que les 30 % des salariés à domicile redevables à l’impôt sur le revenu, les autres ne l’étant pas.
Certes, vous proposez de déléguer la collecte au centre Pajemploi ou CESU – chèque emploi service universel – qui servirait d’intermédiaire entre le particulier employeur et son employé pour le paiement du salaire. Mais cette intermédiation deviendra très vite une véritable usine à gaz, du moins c’est ce que nous pensons. À défaut, c’est le particulier employeur qui devra lui-même retirer le montant correspondant au taux d’imposition à appliquer du salaire net versé à son salarié. C’est un peu ce qu’il fait actuellement, mais ce sera beaucoup complexe.
Enfin, madame la ministre, la contrepartie de cette réforme sera sans aucun doute une perte de souplesse s’agissant des délais dans lesquels les particuliers employeurs doivent déclarer les heures effectuées par leurs salariés à domicile. D’après les données de Pajemploi, près de 70 000 volets sociaux sont remplis dans un délai de trois à six mois après la date à laquelle les heures ont été effectuées. Il est évident que dans le cadre du prélèvement de l’impôt à la source, cela créera encore plus de difficultés pour le Trésor public.
M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.
M. Marc Le Fur. Je suis extrêmement surpris par cet article qui anticipe sur l’adoption du prélèvement de l’impôt à la source alors même que nous n’en avons pas encore débattu. La mesure sera examinée en commission le 10 novembre et débattue en séance publique le 17 novembre. J’invite d’ailleurs tous mes collègues à assister aux débats parce que le prélèvement à la source va compliquer la vie des Français.
Ce sera particulièrement le cas des assistantes maternelles, dont je voudrais évoquer ici l’inquiétude. Elles méritent pourtant toute notre attention car elles rendent énormément de services aux familles. Au cours du mandat précédent, beaucoup s’en souviennent ici, nous avons progressé : le statut d’assistant maternel a été créé et une convention collective a été adoptée. Mais nous sommes en train de régresser en organisant une véritable usine à gaz qui nous est présentée dans un document de cinq pages, que je vous invite à lire.
Il est impossible d’imposer le prélèvement à la source pour la profession des assistantes maternelles.
M. Bernard Accoyer. Impossible, en effet !
M. Marc Le Fur. Pourquoi ? Parce qu’une assistante maternelle garde plusieurs enfants et de ce fait a plusieurs employeurs en même temps.
Votre logique du prélèvement à la source implique que chacun des employeurs paie une partie de l’impôt sur le revenu. Dans le cas où il n’y a qu’un seul employeur, c’est déjà compliqué, mais dès lors qu’il y en a plusieurs, comment faire ? Ce n’est pas possible.
En outre, l’article 28 tend à tuer une disposition à laquelle les assistantes maternelles sont très attachées et qu’il faudrait au contraire absolument conserver. Elle permet à chaque assistante maternelle de bénéficier, dans le cadre de l’impôt sur le revenu, d’un abattement de trois heures de SMIC par enfant gardé et par jour. Or ce n’est pas jouable ici puisque l’employeur, par définition, ne sait pas combien d’enfants sont gardés par son employée – il sait qu’elle garde le sien, mais il ne peut savoir si elle en garde d’autres. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
C’est la réalité ! Parlez avec les assistantes maternelles et vous verrez qu’elles sont extrêmement inquiètes. Votre proposition est réellement surprenante. Je suis également étonné de l’absence du ministre en charge du budget car il s’agit d’une disposition de nature fiscale et qui doit être traitée comme telle.
M. Bernard Accoyer. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement no 291.
M. Gilles Lurton. Il vise à supprimer l’article 28. Je voudrais insister sur les difficultés que vous allez créer avec cet article et l’intermédiation qu’il prévoit.
Cette intermédiation ne sera mise en place par le particulier employeur que si le salarié l’accepte. Dès lors, Pajemploi ou le CESU prélèveront le salaire sur le compte de l’employeur pour le reverser au salarié. Mais si le salarié refuse, l’employeur devra gérer le prélèvement de l’impôt de son salarié, ce qui n’est certainement pas de nature à favoriser l’emploi déclaré. C’est dommage, à l’heure où l’évolution du taux d’emplois déclarés parmi les emplois à domicile allait justement dans le bon sens. Nous risquons d’observer une régression.
J’en viens à ce qui est à mon avis la pire des difficultés, sur laquelle j’aurais aimé que M. Eckert me réponde s’il avait été présent. Je m’en suis entretenu avec lui en commission mais je n’ai pas compris l’explication qu’il m’a donnée.
Le mécanisme du prélèvement à la source, que nous examinerons dans le cadre du projet de loi de finances dans quelques jours – car nous ne l’avons toujours pas abordé, comme l’a indiqué notre collègue Marc Le Fur – prévoit que les crédits d’impôt pour les particuliers seront toujours perçus avec un an de décalage. Imaginez qu’en janvier 2018 les ménages verront leurs impôts augmenter brusquement, après une année sans paiement, pour ne percevoir le remboursement qu’en septembre ? Je suis prêt à parier que tous ceux qui avaient commencé à déclarer leur emploi à domicile abandonneront très rapidement cette démarche.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Mieux vaudrait raison garder, au lieu d’essayer de faire peur à ceux qui nous écoutent ! Je pense que vous vous trompez, monsieur Le Fur. Souvent, vous affirmez souvent des choses qu’on serait tenté de croire, mais il faut parfois creuser un peu. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.) Je pense à un événement qui s’est passé cette semaine et lors duquel vos propos ne reflétaient pas la réalité. Il faut toujours prendre des précautions et se montrer respectueux des autres.
À mon sens, vous vous êtes trompé de texte lorsque vous êtes intervenu sur l’article. Ce n’est pas l’article 28 du PLFSS, mais l’article 38 du projet de loi de finances, qui met en place le prélèvement à la source. La suppression de l’article 28 ne résoudrait en rien les difficultés que vous avez évoquées.
Cet article tend à simplifier le prélèvement à la source pour les particuliers employeurs, puisqu’il prévoit que ceux-ci pourront déléguer aux centres Pajemploi et CESU la gestion du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu de leurs salariés.
Par ailleurs, en supprimant l’article 28, on supprimerait aussi tout le dispositif de simplification du versement du complément de libre choix de mode de garde. Dans ces conditions, je suggère à M. Lurton de retirer son amendement, qui ne concerne pas notre texte…
M. Gilles Lurton. Non !
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Laurence Rossignol, ministre. Lorsque les mesures de simplification deviennent concrètes, parce qu’on sort du concept abstrait de simplification, elles rencontrent généralement beaucoup moins de supporteurs. En l’espèce, c’est bien une mesure de simplification que vous combattez avec des arguments qui me semblent, certains, fallacieux, d’autres, erronés.
L’article n’est pas totalement dépendant de la mise en place du prélèvement à la source, mais je rassure tout le monde sur un point : la date d’application des deux mesures est la même.
Toutefois, l’article peut s’appliquer sans le prélèvement à la source, puisqu’il vise d’abord à simplifier les circuits de versement du complément de libre choix du mode de garde.
Je rassure également M. Le Fur sur un autre point : l’abattement dont bénéficient les assistantes maternelles sera maintenu. Nous en avons débattu avec le secrétaire d’État au budget, qui n’y voit aucun inconvénient. À ses yeux, l’application de la mesure ne se heurte à aucune difficulté technique.
Enfin, je connais peu de parents qui confient leur enfant à une assistante maternelle sans savoir combien d’autres enfants resteront avec le leur, qui ne connaissent pas ces enfants, ignorent leur âge et ne s’intéressent pas aux conditions dans lesquelles s’effectuera la garde.
Mme Isabelle Le Callennec. Ils peuvent très bien ne jamais croiser les autres parents !
Mme Laurence Rossignol, ministre. Le plus souvent, les parents – du moins, ceux que je défends –, les familles que je défends – on sait que vous aussi, vous défendez souvent la famille – sont très attentifs à leurs enfants et aux assistantes maternelles auxquelles ils les confient.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable à l’amendement no 291.
M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.
M. Bernard Accoyer. Madame la ministre, nous défendons tous les mêmes familles, car je ne veux pas imaginer qu’une ministre de la République puisse opérer une sélection entre elles !
L’article, qui comporte trente-huit alinéas, est d’une complexité extrême. On découvre ce qu’il y a de pire dans votre idéal, qui consiste à planifier, infantiliser, complexifier… Le plus grave est que le prélèvement à la source sera totalement ingérable pour les raisons qu’a excellemment détaillées notre collègue Marc Le Fur, membre éminent de la commission des finances de notre assemblée, et que vous seriez bien inspirée d’écouter, car, contrairement à ce qu’ont prétendu certains de nos collègues de la majorité, c’est un des députés les plus compétents et l’un des plus fins connaisseurs des problèmes de la famille.
M. Michel Issindou. Un peu de pommade, ça fait toujours du bien !
M. Bernard Accoyer. Écoutons-le donc, et votons cet amendement de suppression !
M. le président. Tout le groupe Les Républicains ne pourra pas s’exprimer.
Je donne la parole est à M. Marc Le Fur, qui l’a demandée instamment.
Enfin, chers collègues, je vous engage à ne pas parler aussi négativement d’usine à gaz en ma présence. (Sourires.)
M. Marc Le Fur. Mille excuses, monsieur le président. Nous savons que vous êtes favorable aux usines à gaz, mais peut-être êtes-vous le seul dans l’hémicycle.
Cette affaire est fiscale. C’est pourquoi je regrette l’absence du ministre responsable de la fiscalité. Vous ne pouvez pas imaginer de faire appliquer le prélèvement à la source par un employeur,…
M. Bernard Accoyer. Bien entendu !
M. Marc Le Fur. …dont le salarié travaille également pour d’autres. La particularité des assistantes maternelles est de s’occuper de plusieurs enfants, par conséquent de dépendre de plusieurs employeurs.
Le prélèvement à la source est déjà compliqué quand le salarié n’a qu’un employeur, mais, je le répète, ce n’est pas le cas des assistantes maternelles.
Vous nous expliquez que l’employeur transmettra directement au CESU les horaires effectués par l’assistante maternelle et le montant qu’il lui a versé, sans que celle-ci voie ces informations. Aujourd’hui, elle reçoit un chèque ou un virement, après quoi elle rédige sa déclaration.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Non ! C’est l’employeur qui établit la déclaration !
M. Marc Le Fur. Là, elle n’aura pas vu ces informations. De ce fait, la situation sera paradoxale : l’employeur établira une déclaration de l’impôt pour sa salariée, sans que celle-ci ait connaissance des horaires mentionnés. Or il peut y avoir des incertitudes sur ce point. L’assistante maternelle peut affirmer qu’elle a gardé l’enfant pendant six heures, alors que le papa ou la maman prétend ne lui avoir laissé que quatre ! On ne saura pas la vérité, puisqu’on disposera de la seule déclaration de l’employeur.
D’autre part, la singularité que constitue l’abattement de trois heures de SMIC par enfant gardé est très difficile à gérer. Selon vous, la maman sait qui est avec son petit garçon ou sa petite fille.
Mme Laurence Rossignol, ministre. Le papa aussi le sait, parfois !
M. Marc Le Fur. Mais c’est impossible, car cela change tout le temps ! Certains enfants sont gardés quatre jours par semaine, d’autres, trois, d’autres seulement à certaines heures. C’est la vie quotidienne des assistantes maternelles. Interrogez-les ! Vous n’avez pas négocié avec elles. En voilà la démonstration. Vous êtes en train de planter tout un système essentiel pour les familles.
M. le président. Je donne la parole à M. Jean-Louis Costes, qui s’est moins exprimé que d’autres orateurs de son groupe, et auquel je considère que Mme Le Callennec a concédé son temps de parole.
M. Jean-Louis Costes. L’emploi à domicile est un sujet auquel il faut être très attentif, car dans ce domaine, il y a beaucoup d’emploi dissimulé. Malheureusement, nombre d’employeurs, notamment parmi les personnes âgées, n’établissent pas de déclaration, effrayés qu’ils sont par la complexité du système. Je vous mets en garde : si vous le compliquez encore, vous encouragerez le travail au noir, contre lequel nous luttons depuis des années.
(L’amendement no 291 n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 714.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. C’est un amendement rédactionnel.
(L’amendement no 714, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 719.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement de précision.
(L’amendement no 719, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 894.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Rédactionnel.
(L’amendement no 894, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l’amendement no 729.
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Rédactionnel également.
(L’amendement no 729, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 28…
M. Marc Le Fur. Mme Le Callennec a demandé la parole au titre d’une explication de vote sur l’article.
M. le président. Monsieur Le Fur, je ne vous savais pas si soucieux de donner la parole est à votre collègue.
Nous écoutons Mme Isabelle Le Callennec.
Mme Isabelle Le Callennec. Je vous remercie, monsieur le président.
Madame la ministre, je veux bien vous donner acte que l’article 28 apporte une simplification.
M. Bernard Accoyer. Non ! Il ne simplifie pas !
Mme Isabelle Le Callennec. Alors, il ne simplifie pas, mais ce n’est pas ce point qui m’intéresse. Je me demande pourquoi vous y avez introduit la retenue à la source pour les assistantes maternelles. S’agit-il d’ailleurs d’une possibilité ou d’une obligation ?
Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. D’une possibilité.
Mme Isabelle Le Callennec. Il faut savoir que, dans ce système – c’est une des raisons pour lesquelles le groupe Les Républicains y est opposé –, compte tenu de la différence entre le brut et le net, auquel on retranche encore la retenue à la source, l’employé voit diminuer le montant de sa fiche de paie.
M. Michel Issindou. Bien entendu !
Mme Isabelle Le Callennec. Les associations d’assistantes maternelles l’ont-elles compris ?
M. Gérard Sebaoun. Elles ne sont pas bêtes !
Mme Isabelle Le Callennec. Le leur avez-vous expliqué ? Pourquoi, alors que le principe de la retenue à la source sera examiné dans un autre texte, avez-vous isolé leur cas dans ce PLFSS ? C’est ce que l’on ne comprend pas, d’autant que, par cet article, vous affirmez vouloir apporter une simplification, apparemment illusoire !
Je vous répète mes questions. Pourquoi avoir introduit cette disposition dans cet article ? Pourquoi avoir ciblé les assistantes maternelles ? Enfin, la retenue à la source sera-t-elle une possibilité ou une obligation ?
Monsieur le président, je vous remercie de m’avoir laissée m’exprimer.
M. le président. Je rappelle qu’il s’agissait d’une explication de vote sur l’article 28.
(L’article 28, amendé, est adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly