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Commission des affaires européennes

mercredi 11 juin 2014

16 h 15

Compte rendu n° 138

Présidence de Mme Danielle Auroi Présidente

I. Audition de M. Jean-Jacques Dordain, Directeur général de l'Agence spatiale européenne

II. Communication de la présidente Danielle Auroi sur les conditions de mise en culture des OGM (proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2001/18/CE en ce qui concerne la possibilité pour les États membres de restreindre ou d’interdire la culture d’OGM sur leur territoire. COM(2010) 375 – E 5513)

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 11 juin 2014

Présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 16 h 15

I. Audition de M. Jean-Jacques Dordain, Directeur général de l'Agence spatiale européenne

La Présidente Danielle Auroi. Monsieur le directeur général, nous sommes très heureux de vous recevoir pour la première fois au sein de cette commission, et de pouvoir, à cette occasion, parler de l’Europe d’une manière particulièrement positive en abordant la seule politique industrielle conduite et financée par l’Union européenne. N’oublions pas que la France, qui représente, avec 24 000 salariés, près de la moitié de l’industrie spatiale européenne, profite très largement de cette politique.

L’Europe spatiale est une évidence : les pays européens n’ont plus, depuis de longues années, les moyens d’agir seuls dans ce domaine. Le coût des programmes spatiaux impose une dimension continentale, voire mondiale, notamment dans le domaine de la recherche. L’autonomie de décision de l’Europe impose la maîtrise d’une technologie qui se décline dans nos usages les plus quotidiens : télécommunications, télévision, géolocalisation.

Paradoxalement, cette politique ne résulte pas de la méthode communautaire, mais d’une coopération entre États, initiée par la France, avec un outil principal, l’Agence spatiale européenne – l’ESA –, qui n’appartient pas aux institutions européennes. Cette situation rend parfois un peu compliquée la lecture de la politique spatiale européenne. Vous allez donc nous aider à la décrypter, en nous en exposant les principaux éléments et les perspectives d’avenir.

Le traité de Lisbonne a prévu de conférer une compétence partagée à l’Union Européenne dans le domaine spatial. Afin de favoriser le progrès scientifique et technique, la compétitivité industrielle et la mise en œuvre de ses politiques, l’Union prévoit l’élaboration d’une « politique spatiale européenne » ainsi que sa mise en œuvre.

Au niveau des institutions, une démarche de clarification des responsabilités entre la Commission européenne et l’Agence spatiale européenne a été engagée. Elle vise à obtenir une meilleure efficacité dans la gestion des futurs programmes. Nous serions heureux de vous entendre à ce propos, pour savoir où en sont les relations entre l’ESA et l’Union, notamment en ce qui concerne vos relations avec la Commission.

La Cour des comptes européenne a relevé à propos de Galileo que l’Union n’était pas équipée pour conduire directement de grands projets industriels. Pensez-vous que l’ESA a vocation à devenir le bras armé de l’Union européenne dans ce domaine ?

S’agissant des lanceurs, nous avons des inquiétudes sur la lignée des Ariane, qui doit aujourd’hui faire face à une concurrence accrue, du fait du retour dans la course des Américains. Comment envisagez-vous l’avenir à cet égard ? Le programme Ariane 6 doit-il être engagé le plus rapidement possible ?

Enfin, dans la période compliquée que nous vivons sur nos confins orientaux, j’aimerais que vous nous disiez quelques mots de la coopération spatiale entre l’Europe et la Russie.

M. Jean-Jacques Dordain, directeur général de l’Agence spatiale européenne. Nous avons toutes les raisons d’être fiers de la coopération européenne dans l’espace. Cette coopération fête cette année ses cinquante ans, ce qui est l’occasion d’un bilan : s’il nous reste beaucoup à accomplir, nous avons à notre actif des réalisations remarquables, qui ont des répercussions concrètes dans la vie des citoyens européens – il n’est pas inutile de le rappeler à une époque où la critique de l’Europe est un sport en vogue.

L’ESA a ainsi été créée à partir de deux organisations distinctes mises en place en 1964 : d’une part, une organisation scientifique, l’ESRO – European Space Research Organisation –, et, d’autre part, une organisation destinée à développer des lanceurs, l’ELDO – European Launcher Development Organisation –, ces deux organismes constituant les deux racines de la coopération européenne dans l’espace : d’un côté, la science et la connaissance ; de l’autre, les lanceurs et l’accès à l’espace.

En 1975, après onze ans, soit un cycle solaire, l’ESRO et l’ELDO ont été réunies en une seule Agence spatiale européenne, dont les compétences ont alors été étendues à la recherche sur les applications spatiales au service des citoyens.

L’ESA dispose d’un budget cinq fois inférieur à celui de la NASA et dix fois inférieur à celui de la NASA et du Département de la Défense américain réunis. Cela ne l’empêche pas de faire la course en tête en matière de recherche scientifique, qu’il s’agisse des sciences de la terre, du système solaire ou de l’univers. Nous avons été les premiers à dévoiler la première lumière après le Big Bang et les premiers à nous être posés sur Titan, une lune de Saturne assez similaire à la Terre dans son état originel. En novembre prochain, nous serons les premiers à nous poser sur une comète, l’un de ces corps à l’origine du système solaire.

Nous faisons également la course en tête en matière de compétitivité industrielle : malgré le déséquilibre des budgets publics entre l’Europe et les États-Unis, nous détenons près de 40 % du marché mondial des télécommunications et plus de 50 % du marché des lancements. Aujourd’hui, l’industrie européenne est donc compétitive.

Dans le domaine des services, la météorologie spatiale européenne est la meilleure du monde. Il y a plus de douze ans, nous avons initié avec le CNES (l’agence française de l’espace), la charte sur les catastrophes naturelles, aux termes de laquelle nous mettons à disposition de tous les organismes ayant à gérer des catastrophes naturelles les données de nos satellites. En matière de géolocalisation, les premiers résultats des satellites Galileo mis en orbite montrent qu’ils ont une précision au moins dix fois supérieure à celle de la version actuelle du GPS américain.

Enfin, nous sommes considérés comme les partenaires les plus fiables et les plus recherchés au monde. Toutes les puissances spatiales cherchent à coopérer avec l’ESA, que ce soit les Américains, les Russes, les Chinois ou les Japonais, mais aussi les pays qui ont besoin de données spatiales, notamment les pays d’Afrique, auxquels nous fournissons les données nécessaires pour la gestion de l’eau dans les zones subsahariennes.

J’arrêterai là ce panégyrique, mais il montre que nous pouvons être fiers de ce que nous avons accompli en cinquante ans. Je vois à ces succès quatre raisons majeures. En premier lieu, la recherche spatiale est le domaine dans lequel les activités scientifiques sont les plus intégrées au niveau européen : plus de 50 % des programmes spatiaux en Europe sont des programmes européens. La seconde raison de ce succès, c’est la flexibilité de la coopération européenne : la plupart des programmes de l’ESA sont facultatifs, les États membres ne sont pas obligés d’y participer. Nous pouvons, en troisième lieu, nous appuyer sur une politique industrielle qui a fait ses preuves et qui a permis à l’industrie européenne d’être compétitive, comme nous pouvons nous appuyer, et c’est notre quatrième force, sur l’expertise technique et programmatique de l’ESA.

L’ESA se compose aujourd’hui de vingt États membres : les quinze pays qui formaient l’Union européenne avant l’élargissement de 2004, la République tchèque, la Roumanie et la Pologne, auxquels s’ajoutent deux pays non membres de l’Union, la Suisse et la Norvège. Des négociations sont en cours avec la Hongrie, qui devrait nous rejoindre avant la fin de l’année, et avec l’Estonie. Il faut également citer le Canada, avec lequel nous avons un accord particulier puisque, sans être membre de l’ESA, il assiste à toutes les réunions du Conseil et peut participer à nos programmes. J’évoquerai enfin la relation privilégiée que l’ESA a entretenu dans ses premières années avec l’Australie, d’où ont eu lieu nos premiers tirs de lanceurs.

L’importance prise progressivement par la recherche spatiale du fait de toutes ses implications dans la vie quotidienne nous a confortés dans l’idée qu’un rapprochement était nécessaire entre l’ESA et l’Union européenne, rapprochement dont l’ESA a pris l’initiative à partir de 1998 avec pour objectif premier de construire une coopération qui intègre l’espace dans les politiques sectorielles européennes.

Dans cette perspective, un document commun définissant la stratégie spatiale européenne a été signé en 2000 par l’Union européenne et l’ESA. En 2003 a été lancé le programme Galileo, cofinancé par les États membres de l’ESA et de l’Union européenne. En 2004 a été signé un accord-cadre toujours en vigueur, qui a permis la création d’un conseil Espace, formation conjointe du conseil de l’ESA et du Conseil de l’Union européenne. En 2005 enfin, le programme GMES – Global Monitoring for Environment and Security – est né d’une coopération entre l’ESA et l’Union européenne, avant la signature, en 2009, du traité de Lisbonne, qui donne à l’espace un nouvel essor politique dans l’Union Européenne.

L’objectif essentiel de cette coopération est moins de parvenir à une gestion efficace que de nous permettre d’adapter au mieux nos programmes spatiaux aux attentes de la société civile. Il ne suffit pas que l’ESA dispose des meilleurs satellites et des meilleurs lanceurs, elle doit également les mettre au service de nos concitoyens. Dans cette optique, avant d’être des programmes spatiaux, Galileo – lancé, rappelons-le, alors que Jacques Barrot, commissaire aux transports, était vice-président de la Commission européenne – et Copernicus sont d’abord des programmes dédiés aux transports pour l’un et à l’environnement et la sécurité pour l’autre.

Ces deux programmes, inscrits dans le cadre financier pour 2014-2020 sont au cœur de la coopération entre l’ESA et l’Union européenne. Je soumettrai la semaine prochaine au Conseil de l’ESA les accords de délégation entre la Commission et l’ESA sur la gestion du programme Galileo jusqu’en 2020, et espère pouvoir obtenir en octobre l’approbation du Conseil sur l’accord de gestion de Copernicus jusqu’en 2020. Pour le futur, je souhaite approfondir encore les liens entre les infrastructures spatiales développées dans le cadre de l’ESA et les politiques sectorielles soutenues par l’Union européenne.

La question des lanceurs recouvre deux aspects. Des enjeux stratégiques : il s’agit de garantir à la puissance publique un accès sans contrainte à l’espace ; toutes les puissances spatiales ont ainsi commencé par fabriquer leurs propres lanceurs pour éviter de dépendre d’autrui dans le développement de leurs activités. Viennent ensuite les enjeux économiques ou, en d’autres termes, la commercialisation de ces lanceurs.

Tout l’objectif de notre politique en matière de lanceurs consiste à concilier ces deux enjeux, ce qui n’est malheureusement pas le cas aujourd’hui avec les lanceurs dont nous disposons. Pour des raisons qui tiennent à l’histoire, Ariane 5 est un lanceur voué pour l’essentiel aux missions commerciales, tandis que la plupart de nos missions gouvernementales (nationales, celles de l’ESA ou celles de l’Union Européenne), dépendent de Soyouz qui, même s’il est lancé à partir de la Guyane française, n’en reste pas moins fabriqué en Russie.

C’est la raison pour laquelle nous voulons faire d’Ariane 6 un lanceur qui, tout en servant nos missions institutionnelles, puisse également être conquérant sur le marché commercial international. Cela requiert d’avoir un lanceur très compétitif, ce qui passe nécessairement par une nouvelle forme de gouvernance. Nous y travaillons. Des décisions devraient être prises d’ici la fin de l’année, car nous avons besoin d’un lanceur compétitif le plus rapidement, si possible avant 2020.

Pour qu’Ariane 6 soit un succès, il faut non seulement qu’elle soit compétitive mais que lui soit garanti l’accès à des marchés gouvernementaux. Les quatre lanceurs américains – Atlas, Delta, Falcon et Antares –, comme le Proton russe ou les lanceurs chinois et japonais, peuvent miser sur un « marché gouvernemental garanti », ce n’est aujourd’hui pas le cas d’Ariane 5, ce qui s’explique à la fois par des raisons de performance mais également par l’absence totale de stratégie européenne en la matière. Les deux seuls fidèles à Ariane, ce sont l’ESA et la France. Quant à l’Union européenne, elle n’a pas de politique de préférence européenne, là où les Américains affichent clairement la leur pour les lanceurs américains.

En ce qui concerne la Russie, elle est un partenaire important de l’ESA, au moins sur trois grands programmes. Elle est d’abord l’un des cinq partenaires de la Station spatiale internationale, avec les Etats-Unis, le Japon, le Canada et l’ESA. Nous avons besoin d’elle pour y envoyer nos astronautes : aucun astronaute au monde ne peut aujourd’hui rejoindre la station sans les Russes. Nous avons également besoin des Russes pour lancer nos satellites sur Soyouz en Guyane Française. Nous coopérons enfin avec eux dans le cadre du grand programme d’exploration de Mars, notamment au sein du programme ExoMars. Je rappelle néanmoins que la Russie n’est pas le seul partenaire de l’ESA, puisque nous coopérons avec toutes les puissances spatiales, à commencer par les Etats-Unis, qui restent notre partenaire historique, le plus important.

Je ne dispose aujourd’hui d’aucun élément pour affirmer que cette coopération avec la Russie comporte des risques. Aucun de nos États membres n’a jugé bon de nous appeler à la réserve et la Russie elle-même ne manifeste aucun signe d’atermoiement. Pas plus tard qu’il y a dix jours, j’assistais à Baïkonour au lancement d’un vaisseau emmenant vers la Station spatiale un Américain, un Russe et un Allemand membre de l’ESA, preuve s’il en était besoin que les problèmes politiques de la planète ne s’exportent pas dans l’espace. Le 25 juillet sera lancé sur Ariane 5 le dernier véhicule automatique de transport européen, ou ATV, en direction de la Station spatiale internationale, à laquelle il s’arrimera sur le côté russe. Enfin, le 21 août prochain, nous allons lancer depuis la Guyane française les deux prochains satellites Galileo, sur un Soyouz.

Le seul élément concret que je puisse rapporter à la situation politique actuelle concerne le ralentissement que marque l’attribution des autorisations d’exportation de technologie américaine. Tous les satellites du monde comportent des composants américains et nécessitent donc une autorisation d’exportation pour pouvoir être lancés. Nous avons obtenu à l’heure actuelle ces autorisations pour le lancement de nos quatorze prochains satellites Galileo et sommes en train de négocier avec les Etats-Unis l’autorisation de lancer, sur des lanceurs russes et à partir du sol russe, les prochains satellites Sentinel qui font partie de la constellation Copernicus. Rien ne laisse penser que ces autorisations pourraient nous être refusées, la lenteur des procédures n’étant manifestement due qu’au fait que les services américains sont quelque peu débordés.

M. Joaquim Pueyo. Membre de la commission de la défense, j’ai travaillé avec Yves Fromion à l’élaboration d’une résolution sur l’Europe de la défense. J’ai donc été particulièrement intéressé par vos propos concernant l’absence – regrettable – de préférence européenne pour nos lanceurs.

Les conclusions du dernier Conseil européen consacré à l’Europe de la défense mettent l’accent sur les « travaux préparatoires en vue de la prochaine génération de télécommunications gouvernementales par satellite, dans le cadre d’une étroite coopération entre les États membres, la Commission et l’Agence spatiale européenne » ainsi que sur la « création d’un groupe d’utilisateurs en 2014 ». Il est donc primordial que l’Agence spatiale européenne prenne en compte les enjeux de sécurité et de défense de l’Union. En tant qu’acteur important du dialogue qui s’est établi entre le Conseil de l’Union européenne, la Commission et l’agence européenne de défense, que pouvez-vous nous dire sur cette coopération et sur les réalisations et projets de l’ESA en matière de défense ?

M. Arnaud Richard. La conférence ministérielle de l’ESA de décembre prochain décidera de l’architecture du nouveau lanceur Ariane 6, qui doit permettre de faire face à la concurrence de plus en plus agressive des lanceurs américains, russes, indiens et peut-être japonais. Alors que les autres lanceurs peuvent, pour la plupart, compter sur des commandes institutionnelles garanties, quels sont les gages donnés par l’Europe au lanceur européen pour son carnet de commandes, sachant que seules l’ESA et la France jouent pour l’instant le jeu ?

Quelle est la position de l’ESA sur la prolongation de la station spatiale internationale annoncée par la NASA, dont l’objectif est d’assurer le carnet de commande du Falcon 9 ? Les autorités russes semblent pour leur part vouloir interrompre leur participation en 2020.

Les tensions internationales actuelles dues au conflit en Ukraine sont-elles susceptibles de remettre en cause les coopérations entre l’ESA et la Russie ?

M. Philippe Martin. Que répondez-vous à ceux qui considèrent que dans cette période de contrainte budgétaire, les moyens alloués à la recherche spatiale ne sont pas prioritaires ?

Peut-on imaginer une politique spatiale internationale qui permette de valoriser les compétences respectives et ne nourrisse pas une compétition inutile ?

Quels sont les formes et le degré de coopération entre l’ESA et les états-majors européens en matière d’observation satellitaire ?

M. Charles de La Verpillière. Une modification du mode de propulsion est envisagée dans le programme dit Ariane 6 PPH, qui, au-delà de l’aspect technique, n’est pas sans incidences industrielles. Alors qu’Ariane 5 comporte deux étages à propulsion cryogénique et des boosters à propergols solide, Ariane 6 aurait deux étages à propulsion solide et un étage à propulsion cryogénique. Certains mettent en doute la pertinence technique de ce choix, qui menace de surcroît la survie de la filière cryogénique en France puisque le seul étage à propergols liquides serait probablement produit en Allemagne, au détriment du site de Sassenage dans l’Isère, qui emploie 700 personnes. Qu’en pensez-vous ?

M. Pierre Lequiller. Contrairement aux Américains, les Européens ne garantissent pas de commandes de lancements. Peut-on espérer surmonter les réticences des uns et l’indifférence des autres pour faire évoluer cette doctrine ?

Doit-on craindre un désengagement allemand, italien et même français de la station spatiale internationale, faute de retour industriel ?

M. Arnaud Richard. Où en est le programme Galileo ? La possibilité d’un vol habité lancé par les futures Ariane est-elle envisagée ?

La Présidente Danielle Auroi. Vous n’avez pas répondu à ma question sur la concurrence nouvelle des États-Unis en matière de lanceurs.

M. Jean-Jacques Dordain. Le sujet de la défense me tient à cœur. Lors de ma nomination à la direction de l’ESA, je m’étais fixé l’objectif de rapprocher l’ESA de l’Union européenne, de l’industrie, et du secteur de la défense. Contrairement à la légende, l’ESA n’est pas un organisme civil mais, selon les termes de sa Convention, une agence qui travaille à des fins pacifiques. Or « pacifique » ne veut pas dire « civil », et il n’y a pas plus pacifique que les politiques de défense européenne. Je crois avoir réussi à faire admettre que l’ESA pouvait travailler pour le secteur de la défense. Pour autant, les ressources que nous allouent les États membres demeurent presque exclusivement d’origine civile.

Nous sommes en mesure de satisfaire aux standards militaires, notamment pour le programme Galileo, sur lequel une charge utile est réservée à la défense, ainsi que pour le programme Copernicus. Nous avons du personnel habilité défense, des établissements protégés, nous pouvons échanger des données. En outre, j’ai signé un accord avec l’Agence de défense européenne en vertu duquel nous développons des activités communes, notamment sur la navigation des drones dans le trafic aérien.

La faiblesse des activités liées à la défense constitue une lacune de la politique spatiale européenne au regard de toutes les autres grandes puissances spatiales : le budget spatial du département de la défense américain est très largement supérieur à celui de la NASA ; il en est de même en Russie et il serait surprenant que ce ne soit pas le cas en Chine. Il est impératif que l’ESA s’implique davantage dans ce secteur. À cet égard, je me félicite des conclusions du dernier conseil européen dans lesquelles le nom de l’ESA est cité en matière de télécommunications. Les États-Unis utilisent de plus en plus des satellites de télécommunication civils pour transmettre des données militaires.

Le marché des lanceurs est en effet modifié par l’arrivée de nouveaux concurrents.

La concurrence américaine est la plus sérieuse. Le lanceur Falcon 9 de SpaceX est très compétitif, d’autant qu’il bénéficie de cinq lancements garantis par an vers la station spatiale internationale. Il en est de même du lanceur Antares d’Orbital Sciences qui tire également profit d’un marché garanti. Conséquence des problèmes politiques actuels, les États-Unis cherchent à réduire leur dépendance dans le domaine des moteurs : des discussions sont en cours pour trouver le moyen de remplacer les RD-180 russes dont sont équipés les Atlas, de même que les moteurs ukrainiens qui propulsent Antares.

Mais les États-Unis ne sont pas les seuls concurrents. Les Russes présenteront avant la fin du mois de juin, pour la première fois depuis trente-cinq ans, un nouveau lanceur Angara. Soyouz date de soixante ans et Proton de quarante ans. Il ne faut pas oublier les lanceurs indiens. En revanche, les restrictions à l’export américaines nous protègent heureusement des lanceurs chinois.

Le marché commercial des satellites représente en gros vingt satellites par an, pour dix lanceurs, dont Ariane. Il n’y a pas de place pour tout le monde.

M. Pierre Lequiller.  Combien de lancements pour Ariane ?

M. Jean-Jacques Dordain. Ariane lance dix satellites par an, soit 50 % du marché. C’est une bonne chose, mais Ariane 5 est subventionnée. Nous comptons sur Ariane 6 pour que cela ne soit plus le cas.

S’agissant du mode de propulsion d’Ariane 6, l’équilibre optimal reste à trouver entre la compétitivité et le maintien des sites industriels. La production d’Ariane 5 est aujourd’hui répartie sur vingt et un sites industriels dans douze États membres. Disons-le clairement : être compétitif dans ces conditions, ce n’est pas possible. Si l’on veut être compétitif, il faut restructurer l’industrie, autrement dit faire des choix. Si l’on me demande de préserver tous les sites industriels, je pourrai faire un lanceur : la preuve est que nous y arrivons, et ils sont très fiables, et nous pouvons en être fiers. Mais ne me demandez pas en plus d’être compétitif. Le secret de la réussite de SpaceX tient à son site industriel unique en Californie. Cela n’est pas transposable en Europe – tout le monde est d’accord pour qu’il n’y ait qu’un site, mais à condition que ce soit chez lui ! Nous sommes obligés d’en avoir plusieurs, je ne peux pas faire autrement ; mais on ne peut pas les garder tous. Il reviendra aux États membres de faire des choix, sur la base des propositions que je leur soumettrai pour faire d’Ariane 6 un lanceur compétitif. Nous n’avons pas d’autre solution.

Afin d’être compétitif, un lanceur doit également pouvoir compter sur un marché gouvernemental garanti. On ne peut pas s’en sortir autrement. Je négocie actuellement avec les industriels pour leur garantir quatre à six lancements par an de missions gouvernementales. L’ESA peut en faire deux ou trois, quatre avec la France. Cela ne suffit pas. Je mène donc des discussions avec l’Union européenne, qui est un client non négligeable du fait du renouvellement des constellations Galileo et Copernicus. Si l’Union européenne acceptait de se lier au lanceur européen, nous aurions fait un grand pas vers un marché institutionnel. C’est l’objectif que je me suis fixé.

Faire d’Ariane un lanceur habité ne fait partie de nos projets.

Je suis favorable à la coopération globale. L’ESA peut être un modèle en la matière grâce à son fonctionnement très flexible. Il faut mettre en place des coopérations à géométrie variable à l’échelle mondiale. Tous les domaines ne sont néanmoins pas propices à une coopération globale. Il faut ainsi tenir compte des problèmes de défense et des aspects commerciaux – les télécommunications spatiales permettent de faire de l’argent, ce qui favorise plutôt la compétition que la coopération. En revanche, l’exploration spatiale pourrait être le premier sujet de coopération : aller sur la Lune ou sur Mars ne peut être l’affaire d’une nation, ni même de deux ou trois ; c’est un objectif global.

La station spatiale internationale offre un exemple de coopération puisqu’elle réunit cinq pays. Ceux qui étaient les plus grands compétiteurs dans les années soixante, les Américains et les Russes, ont abandonné leurs programmes de vol habité et sont devenus partenaires au sein de la station. Quel exploit ! Il faut maintenant élargir ce partenariat à d’autres. Je suis très partisan de l’ouvrir à la Chine – pour ce qui touche à l’exploration, s’entend, pas sur les télécoms et le reste… – à l’Inde ou la Corée du Sud. C’est dans le cadre de cette coopération globale qu’il faut se poser la question du système de transport pour l’exploration. On n’a pas besoin de trois ou quatre véhicules habités : deux suffisent, pour éviter le point de panne unique. Il ne sert donc à rien de disposer de plusieurs lanceurs habités.

S’agissant de la station, nous avons franchi une étape formidable. Pour la première fois, l’Europe va fournir le module de service du système de transport vers la Lune ; Orion. Pour la première fois, les États-Unis acceptent de confier à autre agence le soin de s’engager dans le chemin critique d’un système de transport d’équipage. Fin 2017, une partie du véhicule qui emportera les six astronautes vers la Lune sera européenne. Avec ce module, nous nous acquittons en quelque sorte de notre part des charges de copropriété de la station. Grâce au module de service Orion, l’ESA paiera sa quote-part, non pas en dollars, mais en hardware.

Les contraintes budgétaires – je ne les connais que trop bien – ne justifient pas la baisse des investissements spatiaux. Investir dans l’espace, c’est investir dans la croissance et l’économie. L’économie des activités spatiales réside dans les services qui sont associés aux infrastructures spatiales. Le rapport est de quatre à vingt, selon les services, entre un euro investi dans une infrastructure spatiale et l’économie associée. J’ai réussi à en convaincre les Britanniques qui ne sont pas les plus laxistes en matière budgétaire. À l’occasion du dernier conseil ministériel de l’ESA, George Osborne lui-même a annoncé une hausse de 25 % de la contribution britannique. Un ministre des finances content de dépenser plus, c’est bien la preuve de leur confiance dans les vertus de l’investissement spatial !

En outre, les activités industrielles dans le domaine spatial réclament de la continuité. Il faut dix ans pour développer une compétence industrielle ; il suffit de six mois pour la détruire. Diminuer les investissements spatiaux revient à détruire des compétences. Dans le cas d’Ariane, les choix qui seront faits auront pour conséquence de faire disparaître certaines compétences, qu’il faudra remplacer par de nouvelles. Peut-être ne me trouverez-vous pas toujours objectif, mais je maintiens, nonobstant les contraintes budgétaires que je comprends parfaitement en tant que citoyen, qu’investir dans l’espace, c’est investir dans la croissance.

J’ai fait valoir aux Américains que la prolongation de la station spatiale au-delà de 2020 ne serait pas favorable aux lanceurs européens dans la mesure où elle garantira un marché institutionnel à SpaceX. Il n’est pour moi pas question de demander quoi que ce soit au-delà de 2020 : si prolongation il doit y avoir, je suis prêt à en discuter, mais cela ne se fera pas sans contrepartie pour nos lanceurs.

Quant à Galileo, quatre satellites sont aujourd’hui en orbite. Leurs performances sont remarquables. En matière de localisation et de datation, elles sont quatre fois plus précises que ce qui nous avait été demandé, et nettement meilleures que celles du GPS. Mais avec quatre satellites seulement, la visibilité est pour l’instant limitée à une heure par jour.

Deux autres satellites sont prêts à être lancés ; ils devraient l’être en août. Un troisième est en phase d’essai final aux Pays-Bas tandis qu’un quatrième sera livré au cours de l’été. Nous aurons huit satellites en orbite d’ici à la fin de l’année. Ensuite, nous souhaitons lancer deux satellites tous les trois mois. Trente satellites – dix par plan d’orbite – sont nécessaires pour un fonctionnement optimal.

M. Pierre Lequiller.  Quand Galileo sera-t-il utilisable ?

M. Jean-Jacques Dordain. Avec huit satellites opérationnels, on peut commencer à offrir des services. Tout dépend de l’utilisation.

Il faut distinguer les services indépendants – dans le domaine de la défense – et le service à l’usager. L’utilisateur d’un terminal ne peut pas savoir si le signal provient de Galileo ou de GPS. Ce qui est certain, c’est que plus les satellites Galileo seront nombreux, plus la précision sera importante en combinant GPS et Galileo.

GPS et Galileo sont complémentaires : le premier est sous le contrôle de la US Navy, c’est un système militaire utilisé par des civils ; Galileo est un système civil qui sera utilisé par les militaires. Voilà leur grande différence.

La Présidente Danielle Auroi. Monsieur le directeur général, nous vous remercions d’avoir répondu aussi précisément à nos questions. Nous espérons vous revoir dans quelque temps ; nous avons énormément d’autres questions à vous poser.

II. Communication de la présidente Danielle Auroi sur les conditions de mise en culture des OGM (proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2001/18/CE en ce qui concerne la possibilité pour les États membres de restreindre ou d’interdire la culture d’OGM sur leur territoire. COM(2010) 375 – E 5513)

La Présidente Danielle Auroi. Alors que le Conseil constitutionnel a validé le 28 mai dernier la loi interdisant de façon pérenne la culture du maïs OGM Monsanto 810 sur le territoire français, le dossier de la modification du cadre juridique européen des autorisations de mise en culture des OGM qui se négocie depuis 2010, semble être arrivé à un point de compromis entre les États. Rappelons qu’en décembre 2008, la présidence française de l’Union européenne avait fait adopter par le Conseil environnement, des conclusions qui demandaient à la Commission européenne de réviser les lignes directrices d’évaluation environnementale et sanitaire régissant la procédure d’autorisation de mise en culture des OGM. 

Face aux difficultés dues aux divergences entre États membres sur les OGM qui se sont traduites par l’absence de majorité qualifiée lors de votes sur les autorisations et la multiplication des clauses de sauvegarde nationales non sécurisées juridiquement, la Commission européenne avait élaboré en 2010 une proposition législative qui devaient permettre aux États membres de restreindre ou d’interdire la culture des OGM sur tout ou partie de leur territoire. Depuis, cette proposition, présentée sous différentes versions par les présidences successives de l’Union, s’est toujours heurtée à une minorité de blocage dont la France, l’Allemagne quant à elle ne participant pas aux négociations car elle n’a pas pu définir une position gouvernementale commune sur le sujet très controversé dans ce pays. La France estimait notamment qu’elle n’apportait pas suffisamment de garanties juridiques sur les motifs d’interdiction pouvant être invoqués.

Alors que la Commission européenne se prépare à autoriser à la culture un nouvel OGM très controversé – le maïs TC1507 – malgré l’opposition de 19 États membres et du Parlement européen, elle a mis sur la table un nouveau projet de règlement de compromis adopté le 28 mai en COREPER. L’accord politique doit être formalisé le 12 juin par les ministres de l’environnement. Il ira ensuite en seconde lecture devant le Parlement européen. Le texte n’est donc pas figé et des évolutions sont possibles et souhaitables…

La nouvelle procédure comprendrait deux phases. Les États membres demanderont – par l’intermédiaire de la Commission européenne – aux semenciers candidats à la mise en culture dans l’Union européenne d’être exemptés du champ d’application de leurs demandes. Dans une seconde phase, si l’entreprise refuse ces restrictions, un État membre pourra s’exclure pour des raisons autres que la santé et l’environnement, de la culture d’OGM sans avoir à recourir à des clauses de sauvegarde. Le projet contient une liste non exhaustive de ces raisons : objectifs de politique environnementale, raisons d’aménagement urbain ou rural, impacts socio- économiques, nécessité d’éviter la présence d’OGM dans d’autres produits, objectifs de politique agricole ou raisons d’ordre public.

S’il est indispensable de donner aux États membres la possibilité juridique de protéger leur territoire et leur agriculture, ce texte apparait comme un cadeau empoisonné et ne respecte ni les conclusions unanimes du Conseil environnement de décembre 2008, ni la position du Parlement européen dans ses résolutions 5 juillet 2011 et du 16 janvier 2014.

Certes, le projet a intégré un certain nombre de demandes de la France qui lui fait accepter ce texte comme un point d’équilibre entre les États pro OGM et les États opposés à la culture des OGM. Des nouveaux motifs d’interdiction ont été élargis et explicitement mentionnés. Le rôle de la Commission est renforcé : alors que dans les premières versions de la proposition, il était prévu que les entreprises de biotechnologie négocient directement avec les États membres – ce qui leur aurait conféré des pouvoirs exorbitants – la Commission européenne fera l’intermédiaire entre l’État membre et l’entreprise « pétitionnaire ». Par ailleurs, une procédure de silence est mise en place, ce qui renforce les pouvoirs des États membres à l’égard des entreprises pétitionnaires .les États membres auront la possibilité d’agir en fin de procédure d’autorisation si les circonstances nationales ont évolué, c’est-à-dire qu’ils pourront interdire a posteriori un OGM sur le territoire même si, au moment de l’autorisation, l’État concerné n’avait pas demandé d’être retiré du périmètre de la demande . La procédure assure la possibilité pour un État membre d’interdire un OGM dès le jour de son autorisation . Enfin, une clause de révision de la directive est incluse en fonction du retour d’expériences, ce qui permettra d’en corriger les dispositions si elles se révélaient inefficaces.

Pour autant, ce projet ne nous apparait pas acceptable en l’état. Concrètement , la procédure d’autorisation sera facilitée et de ce fait, ouvrira les terres de l’Union européenne à la culture des OGM alors que l’agriculture et les grands semenciers américains dont il faut rappeler qu’ils ont le quasi-monopole des semences OGM avec 40 % de la production des OGM mondiaux, frappent à la porte de l’Europe avec le projet d’accord transatlantique. Derrière cette modification de procédure, se profile le risque indirect induit par les négociations sur le TAFTA : que vaudront alors les lignes rouges que nous avons tracées sur le mandat de négociation si l’Europe elle-même facilite la culture des OGM ?

De plus, alors que les conclusions du Conseil européen de décembre 2008 et les résolutions du Parlement européen de juillet 2011 et janvier 2014 en faisait la pierre angulaire du système, l’indispensable amélioration de l’évaluation des risques des OGM n’est mentionné que dans un considérant de la proposition indiquant que la Commission devra faire un rapport sur les progrès afin de donner un statut normatif au renforcement des lignes directrices de l’EFSA . On est loin de ce que préconisaient le Conseil environnement de 2008 et le Parlement européen, à savoir la nécessité d’une évaluation plus rigoureuse des effets à long terme des OGM ainsi que d’une recherche indépendante sur les risques potentiels qu’impliquent la dissémination volontaire ou la mise sur le marché d’OMG, y compris de la nécessité de permettre à des chercheurs indépendants d’accéder à toutes les informations nécessaires. Dans sa résolution de juillet 2011, le Parlement européen indiquait notamment que les lignes directrices ne devaient pas reposer uniquement sur le principe dit d’équivalence substantielle. Cette recommandation résonne particulièrement alors qu’une étude récente d’une université norvégienne pourrait remettre en cause le principe d’équivalence en substance entre les OGM et les autres aliments. Au nom de ce principe et dans la mesure où ils sont considérés comme essentiellement semblables à d’autres aliments, les OGM ne nécessitent pas de normes de sécurité supplémentaires. Cette étude affirme qu’une semence OGM ne serait pas sensiblement identique à une semence non OGM, contrairement à ce qu’affirme Monsanto ou Syngenta. Par ailleurs, les questions majeures de contamination génétique transfrontalière et de responsabilité en cas de pollution génétique ne sont pas évoquées dans la proposition. Les États ne pourront pas interdire le transit sur leur territoire des OGM. Le Parlement européen avait demandé à ce que soit institué un système de responsabilité et de garanties afin que le pollueur assume les effets ou les dommages accidentels qui pourraient subvenir à l’occasion de la dissémination volontaire ou de la mise sur le marché d’OGM. Plus fondamentalement, cette proposition signifie la fin du cadre communautaire des procédures d’autorisation. Bien au-delà des risques de distorsions de concurrence au sein du marché unique, à l’heure de la montée de l’euroscepticisme et des discours anti européens, cette renationalisation qui ne dit pas son nom ne va-t-elle pas privilégier les égoïsmes nationaux alors que l’Europe, dans un souci de solidarité , devrait protéger ses citoyens et tenir compte de leur refus massif des OGM ?

Pour l’ensemble de ces raisons, je vous propose les conclusions suivantes.

M. Charles de la Verpillère. Tout en reconnaissant à la présidente sa parfaite connaissance du dossier , je regrette toutefois une position que l’on pourrait qualifiée de dogmatique sur ce sujet. Ces conclusions ne prennent pas en compte la nécessité de poursuivre la recherche en matière d’OGM et on peut craindre que ce soit finalement la France qui soit perdante. J’espère que le Parlement et le Conseil européen trouveront une solution acceptable. Notre groupe s’abstiendra.

M. Pierre Lequiller. Je partage ces remarques concernant la recherche.

M. Joaquim Pueyo. Il est effectivement fondamental de poursuivre la recherche en laboratoire .

La Présidente Danielle Auroi. Ces conclusions sont conformes au principe de précaution inscrit dans notre Constitution. La pollution génétique est inévitable , notamment par le biais des insectes pollinisateurs. Je reconnais , comme vous le mentionnez, la nécessité de poursuivre les recherches, sous contrôle, en laboratoire et il me semble justifié d’ajouter un point le précisant dans les conclusions. Je note l’abstention du groupe UMP.

Puis, la Commission a ensuite adopté les conclusions suivantes :

La Commission des affaires européennes,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 114, 169, 191, 192 et 193 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement,

Vu le règlement (CE) no 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2003 concernant les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés,

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2001/18/CE en ce qui concerne la possibilité pour les États membres de restreindre ou d’interdire la culture d’organismes génétiquement modifiés sur leur territoire (COM(2010) 0375) ;

Vu les conclusions du Conseil européen « Environnement » du 4 décembre 2008 au sujet des organismes génétiquement modifiés,

Vu la résolution législative du Parlement européen du 5 juillet sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2001/18/CE en ce qui concerne la possibilité pour les États membres de restreindre ou d’interdire la culture d’organismes génétiquement modifiés sur leur territoire,

Vu la résolution du Parlement européen du 16 janvier 2014 sur la proposition de décision du Conseil concernant la mise sur le marché à des fins de culture d’un maïs génétiquement modifié TC 1507,

1. Considère, compte tenu des risques potentiels que présentent les organismes génétiquement modifiés, que l’Union européenne et ses États membres doivent assurer un niveau élevé de protection de la santé publique, de l’environnement et des intérêts des consommateurs, dans le respect du principe de précaution, sans pour autant obérer les possibilités de développement de la recherche sous contrôle en laboratoire,

2. Regrette que, sous couvert de défendre la possibilité légitime pour chaque État membre d’interdire la culture d’organismes génétiquement modifiés afin de protéger leur territoire , leur agriculture et leurs citoyens , l’accord intervenu le 28 mai 2014 au sein du COREPER aille à l’encontre d’un cadre européen harmonisé, seul protecteur de l’ensemble des citoyens européens,

3. Demande au Conseil des ministres de l’environnement du 12 juin prochain de rejeter la proposition de la Commission européenne de modification de la directive 2001/18/CE,

4. Réaffirme, compte tenu des risques sanitaires et environnementaux, sa demande de renforcement du cadre juridique communautaire d’évaluation des risques directs et indirects, à court et long terme , d’autorisation et de contrôle des organismes génétiquement modifiés ainsi que la nécessité de permettre à des chercheurs indépendants d’accéder à toutes les informations nécessaires,

5. Estime que les questions de contamination génétique transfrontalière et de responsabilité en cas de dissémination volontaire ou de mise sur le marché d’organismes génétiquement modifiés doivent être traitées dans le cadre de la réforme de la directive 2001/18/CE,

6. Demande à la Commission européenne de ne pas proposer l’autorisation de nouvelles variétés d’organismes génétiquement modifiés et de ne pas renouveler les autorisations tant que les méthodes d’évaluation des risques n’auront pas été nettement améliorées,

7. Appelle la Commission européenne à défendre fermement les préférences collectives des citoyens européens en matière d’organismes génétiquement modifiés lors des négociations de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis.

La séance est levée à 17 h 30

Membres présents ou excusés

Commission des affaires européennes

Réunion du mercredi 11 juin 2014 à 16 h 15

Présents. - Mme Danielle Auroi, M. Jean-Luc Bleunven, M. Charles de La Verpillière, M. Pierre Lequiller, M. Philippe Armand Martin, M. Joaquim Pueyo, M. Arnaud Richard

Excusés. - Mme Seybah Dagoma, M. Bernard Deflesselles