PROJET DE LOI
PORTANT REFORME FERROVIAIRE
NOR : TRAX1320370L/Bleue-1
ETUDE D'IMPACT
15 octobre 2013
SOMMAIRE
I. ELEMENTS TRANSVERSAUX 4
I.1. Objectifs généraux poursuivis par le projet de loi 4
I.2. Options possibles en dehors de l'intervention de règles de droit nouvelles et motifs du recours à une nouvelle législation 5
I.3. Impact en termes d'égalité entre les femmes et les hommes 7
I.4. Impact sur les personnes en situation de handicap 7
I.5. Consultations menées 7
I.5.1. Concertation préalable à l'élaboration du projet de loi 7
I.5.2. Consultations obligatoires sur l'avant-projet 7
I.6. Modalités d'application dans le temps des dispositions envisagées, textes législatifs et réglementaires à abroger et mesures transitoires proposées 8
I.6.1. Application dans le temps 8
I.6.2. Mesures transitoires 8
I.6.3. Lois et ordonnances ultérieures 8
I.6.4. Liste prévisionnelle des textes d'application nécessaires 9
I.7. Modalités d'application outre-mer des dispositions envisagées 13
II. LA CRÉATION DU GROUPE PUBLIC FERROVIAIRE 14
II.1. Le diagnostic et la justification de la disposition 14
II.2. La description des objectifs poursuivis 14
II.3. Les options possibles 15
II.4. L’analyse des impacts de la disposition envisagée 18
II.5. La mise en œuvre de la disposition 19
III. LA CONSTITUTION D’UN GESTIONNAIRE D’INFRASTRUCTURE UNIFIÉ AU SEIN DU GROUPE PUBLIC 20
III.1. Le diagnostic et la justification de la disposition 20
III.2. La description des objectifs poursuivis 21
III.3. Les options possibles 21
III.4. L’analyse des impacts de la disposition envisagée 22
III.5. La mise en œuvre de la disposition 23
IV. LA CONSTITUTION D’UN FOURNISSEUR INTÉGRÉ DE MOBILITÉ AU SEIN DU GROUPE PUBLIC 24
IV.1. Le diagnostic et la justification de la disposition 24
IV.2. La description des objectifs poursuivis 24
IV.3. Les options possibles 24
IV.4. L’analyse des impacts de la disposition envisagée 25
IV.5. La mise en œuvre de la disposition 26
V. LE RÉTABLISSEMENT DES ÉQUILIBRES ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS 27
V.1. Le diagnostic et la justification de la disposition 27
V.2. La description des objectifs poursuivis 28
V.3. Les options possibles 28
V.4. L’analyse des impacts de la disposition envisagée 30
V.5. La mise en œuvre de la disposition 31
VI. UN RÉGULATEUR SECTORIEL RENFORCÉ ET DOTÉ DE COMPÉTENCES NOUVELLES 33
VI.1. Le diagnostic et la justification de la disposition 33
VI.2. La description des objectifs poursuivis 34
VI.3. Les options possibles 35
VI.4. L’analyse des impacts de la disposition envisagée 37
VI.5. La mise en œuvre de la disposition 37
VII. LE VOLET SOCIAL DE LA RÉFORME 39
VII.1. Constitution de l’unité sociale au sein du groupe public ferroviaire 39
VII.1.1. Le diagnostic et la justification de la disposition 39
VII.1.2. La description des objectifs poursuivis 39
VII.1.3. Les options possibles 40
VII.1.4. L’analyse des impacts de la disposition envisagée 40
VII.1.5. La mise en œuvre de la disposition 40
VII.2. Mise en place d'une branche ferroviaire 41
VII.2.1. Le diagnostic et la justification de la disposition 41
VII.2.2. La description des objectifs poursuivis 41
VII.2.3. Les options possibles 41
VII.2.4. L’analyse des impacts de la disposition envisagée 42
VII.2.5. La mise en œuvre de la disposition 42
VII.3. Adoption, pour des raisons de sécurité et de continuité de service, d'une réglementation de la durée du travail commune au sein de la branche 42
VII.3.1. Le diagnostic et la justification de l'intervention 42
VII.3.2. La description des objectifs poursuivis 42
VII.3.3. Les options possibles 43
VII.3.4. L’analyse de l’impact des dispositions envisagées 43
VII.3.5. La mise en œuvre de la disposition 44
VIII. LES AUTRES DISPOSITIONS 45
VIII.1. Le diagnostic et la justification de la disposition 45
VIII.2. La description des objectifs poursuivis 45
VIII.3. Les options possibles 45
VIII.4. L’analyse des impacts de la disposition envisagée 46
VIII.5. La mise en œuvre de la disposition 46
IX. ARTICULATION DU PROJET AVEC LE DROIT EUROPEEN ACTUEL ET EN PREPARATION 48
IX.1. La réforme ferroviaire est conforme au droit européen sectoriel en vigueur 48
IX.1.1. L’accès équitable et non discriminatoire à l'infrastructure ferroviaire est renforcé par la réforme ferroviaire 49
IX.1.2. La réforme ferroviaire renforce le rôle de l’ARAF quant à la vérification des flux financiers 51
IX.2. La réforme ferroviaire tient le plus grand compte de la proposition législative de quatrième paquet ferroviaire 51
La structuration actuelle du système ferroviaire s'avère source de dysfonctionnements : la gestion du réseau ferré national est éclatée entre trois entités distinctes – Réseau ferré de France (RFF) et deux services de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), SNCF Infra et la Direction des circulations ferroviaires (DCF) – dont les responsabilités respectives sont fortement imbriquées et dont les interfaces sont nombreuses, complexes et sources de surcoûts. Il en résulte une dilution des responsabilités et une incohérence de l’organisation. Le système public ferroviaire, aujourd’hui constitué de RFF et de la SNCF, ne produit pas la qualité de service, l’efficacité, l’efficience qui sont légitimement attendues par les voyageurs, les entreprises, les autorités organisatrices, et l’ensemble de la Nation.
Dans ce contexte, il apparaît nécessaire de revoir l'organisation du système en unifiant les fonctions de gestionnaire d'infrastructure du réseau ferré national dans une entité unique, le gestionnaire d’infrastructure unifié, et en rattachant ce gestionnaire à l'exploitant historique au sein d'un groupe public ferroviaire, dans le respect de l’exigence d’un accès non discriminatoire à l’infrastructure ferroviaire. Ceci permettra de redonner une cohérence industrielle au système ferroviaire, dans la mesure où l’ensemble des services concourant à la production de sillons seront regroupés sous une chaîne de commandement unique et de préserver la compétence et l’approche systémique du secteur. Le groupe public ferroviaire constituera un pôle d’expertise au service de l’ensemble des parties prenantes, permettra de mutualiser certaines compétences et fonctions, contribuera à améliorer la performance du système et mettra en œuvre plus efficacement la stratégie de développement industriel souhaitée par les pouvoirs publics.
La dette du système ferroviaire, qui s’élève à plus de 40 milliards d’euros, se creusera de 1,5 milliard d’euros par an, hors projets de développement, si rien n’est fait. Ce déséquilibre financier du système, sans perspective de retour à l’équilibre en l’absence de réforme, est dû notamment à l’inflation des coûts de production, à la nécessité de rattraper le retard accumulé dans la rénovation du réseau et aux frais financiers des emprunts correspondants (notamment issus de la dette historique du secteur). En l’absence d’une maîtrise des coûts, le déséquilibre financier du secteur continuera de s’aggraver et sera tôt ou tard préjudiciable aussi bien pour l’opérateur de transport, à mesure que celui-ci sera soumis à la concurrence sur son cœur de métier, que pour les finances publiques. La gouvernance du futur gestionnaire d’infrastructure ainsi que les synergies et les liens entre ce gestionnaire d’infrastructure et les autres entités du groupe public devront donc constituer l’un des leviers majeurs pour améliorer la performance économique du système ferroviaire et pour lui permettre de retrouver une trajectoire financière soutenable.
Depuis l’ouverture à la concurrence du transport du fret ferroviaire, coexistent, dans le secteur ferroviaire, deux régimes distincts de durée du travail : celui qui est applicable aux seuls agents de la SNCF, les cheminots, et celui, fondé sur le code du travail, dont relèvent les agents des autres entreprises ferroviaires qui opèrent dans le secteur du fret. Il s’ensuit des écarts importants, notamment sur l’organisation du travail. Tout en maintenant le statut des cheminots, la réforme ferroviaire sera l’occasion de mettre en œuvre un cadre social commun à tous les travailleurs de la branche ferroviaire tout en veillant à préserver la compétitivité du mode ferroviaire vis-à-vis des autres modes de transport, dont notamment le mode routier.
Cette réforme du système ferroviaire est donc indispensable. Il faut donner au pays et au système ferroviaire tous les outils nécessaires pour relever avec succès le grand défi auquel le secteur est confronté. Il s’agit de moderniser le service public ferroviaire français en bâtissant avec l’ensemble des parties prenantes un modèle qui réponde aux besoins des usagers et à l’aménagement du territoire, qui rétablisse l’équilibre économique du système, qui refonde le pacte social en consolidant l’unité sociale du système ferroviaire, et qui permette la création d’un groupe public industriel intégré, pleinement inséré dans l’Europe du rail.
A cette fin, le groupe public ferroviaire prendra la dénomination de « SNCF », symbole de l’unité, de la cohérence et de la cohésion du système public ferroviaire. Le gestionnaire d’infrastructure unifié « SNCF Réseau » et l’opérateur « SNCF Mobilités » constitueront les deux entités opérationnelles du groupe public ferroviaire.
1.2. Options possibles en dehors de l'intervention de règles de droit nouvelles et motifs du recours à une nouvelle législation
L’intervention publique, par de nouvelles règles de droit, est nécessaire à un quadruple titre : créer un gestionnaire unifié de l’infrastructure de plein exercice, organiser le nouveau pôle public ferroviaire dans le respect du droit communautaire, inscrire les modalités de redressement économique du système ferroviaire dans la loi, et mettre en place les bases d’un cadre social harmonisé entre tous les acteurs du secteur.
Une simple amélioration des interfaces entre les trois entités qui concourent à la gestion de l’infrastructure – RFF, SNCF Infra et la DCF – ne serait pas suffisante pour augmenter significativement la qualité de service du ferroviaire. L’exemple du « plateau commun » entre RFF et SNCF Infra montre que cette approche peut être productive à certains égards, mais que cela reste insuffisant pour créer une synergie durable, indispensable pour un véritable pilotage opérationnel de l’infrastructure, les intérêts structurellement divergents des entités les empêchant de mettre en œuvre durablement des solutions unanimement considérées comme bénéfiques. Pour y parvenir, il faut une répartition claire des responsabilités que seule la loi peut organiser.
Dans la mesure où la constitution de SNCF Réseau nécessite de regrouper RFF, établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) dont les missions et le fonctionnement sont décrites à la section 2 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code des transports, SNCF Infra, branche de la SNCF sous sa forme actuelle, dont les missions et le fonctionnement sont décrites à la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code des transports, et la DCF, service de la SNCF actuelle à statut particulier décrit à la section 3 du chapitre II du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code des transports, il est nécessaire de modifier le code des transports pour le mettre en conformité avec la nouvelle organisation de la gestion de l’infrastructure ferroviaire.
SNCF Réseau assurera la continuité de la personnalité de RFF, et SNCF Mobilités, celle de la SNCF actuelle en tant qu’opérateur de transport. SNCF Réseau et SNCF Mobilités conserveront le statut d’établissement public à caractère industriel et commercial (article 9 du projet de loi). Les trois entités du groupe public ferroviaire seront donc des EPIC : l’établissement « mère », la SNCF, étant doté d’attributions apparentées à celles d’une société détentrice classique à l’égard des deux établissements « filles » que sont SNCF Réseau et SNCF Mobilités (nouvel article L. 2102-2 du code des transports). La SNCF assurera donc le contrôle et le pilotage stratégiques, la cohérence économique, l’intégration industrielle et l’unité sociale du groupe public ferroviaire (nouvel article L. 2102-1) ; les deux membres de son directoire seront présidents des conseils d’administration de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités (nouvel article L. 2102-6) ; la SNCF sera représentée à hauteur du tiers des membres des conseils d’administration de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités (articles L. 2111-15 et L. 2141-6 modifiés).
En outre, de manière à respecter les exigences communautaires d’un fonctionnement impartial de SNCF Réseau, et d’accès non discriminatoire au réseau ferré national, il est nécessaire d’organiser le groupe public ferroviaire pour atteindre cet objectif.
Dans la mesure où la constitution d’un groupe de trois EPIC a un caractère inédit, il est nécessaire de préciser dans la loi les attributions de la SNCF à l’égard de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités, les règles de fonctionnement du groupe public ferroviaire et les garanties d’impartialité dont bénéficiera SNCF Réseau. Par ailleurs, la loi créera un nouveau chapitre II dans un titre préliminaire du livre Ier de la deuxième partie du code des transports, relatif à la SNCF, et modifiera la section 2 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code des transports, relative à SNCF Réseau, et le chapitre Ier du titre IV du livre Ier de la deuxième partie du code des transports, relatif à SNCF Mobilités. En outre, les compétences de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF), autorité publique indépendante dont le rôle, les missions et le fonctionnement sont décrits au titre III du livre Ier de la deuxième partie du code des transports, seront étendues et clarifiées. La gouvernance sectorielle sera également améliorée avec l’instauration d’un Haut comité du ferroviaire, instance d’information et de concertation des acteurs du système ferroviaire (nouvel article L. 2100-3) et l’élaboration d’une « charte du réseau » destinée à faciliter les relations entre les différentes parties prenantes du système de transport ferroviaire national.
Si la constitution du gestionnaire d’infrastructure unifié (GIU) doit permettre la réalisation d’un certain nombre de synergies, le rétablissement des équilibres économiques et financiers du secteur nécessite un effort beaucoup plus grand, et, jusqu’ici, jamais réalisé de la part de l’ensemble des parties prenantes au système ferroviaire, y compris de l’Etat.
Le plan de retour à l’équilibre du système ferroviaire se matérialisera par trois contrats pluriannuels passés entre l’Etat et chacune des entités du groupe public ferroviaire (nouvel article L. 2102-2 et articles L. 2111-10 et L. 2141-3 modifiés). De manière à souligner l’importance pour la Nation de ce retour à l’équilibre économique et financier, les grands principes de ces contrats, et notamment celui entre l’Etat et le GIU, à caractère glissant, seront précisés dans la loi (article L. 2111-10 modifié). Il s’agit de viser, à une échéance de dix ans, la couverture du coût complet du réseau, c’est-à-dire l’équilibre entre les dépenses de toute nature du GIU (développement, maintenance et exploitation du réseau) avec ses recettes (péages et subventions), ainsi que le respect de ratios, fixés par décret, représentatifs de la capacité de l’établissement à mener durablement les missions qui sont les siennes.
De manière à pouvoir jeter les bases du cadre social commun à tous les travailleurs de la branche ferroviaire, notamment pour donner un fondement législatif au « décret-socle » qui précisera les principaux aspects du temps de travail et les notions indispensables notamment au respect des exigences de sécurité et de continuité du service public (nouveaux articles L. 2161-1 et 2) et pour permettre de mener des négociations collectives associant l’intégralité de la branche ferroviaire (nouveaux articles L. 2162-1 et 2), il est nécessaire de procéder à quelques ajustements législatifs des dispositions sociales s’appliquant aux entreprises de la branche ferroviaire à venir.
Le projet global de réforme ferroviaire concerne avant tout la création du GIU et la constitution du groupe public ferroviaire, la description des règles de fonctionnement de ce groupe public, et la mise en place d’un cadre social commun à toutes les entreprises de la branche ferroviaire. En soi, ces modifications apportées au code des transports n’affectent pas l’égalité entre les femmes et les hommes.
Pour autant, plusieurs des dispositions du projet de loi touchent à la composition des instances de gouvernance au sein des trois établissements publics composant le groupe public ferroviaire. Conformément aux dispositions de la loi n° 83-675 relative à la démocratisation du secteur public, à l’exception des membres des conseils d’administration ou de surveillance représentant les salariés, la proportion des membres de chaque sexe ne pourra être inférieure à 40%.
Le nouvel article L. 2132-7 prévoit par ailleurs une représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein du collège de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF).
Le projet global de réforme ferroviaire concerne avant tout la création du GIU et la constitution du groupe public ferroviaire, la description des règles de fonctionnement de ce groupe public, et la mise en place d’un cadre social commun à toutes les entreprises de la branche ferroviaire. En soi, ces modifications apportées au code des transports n’affectent pas les personnes en situation de handicap.
L’élaboration des modalités de cette réforme a fait l’objet d’une mission de concertation confiée par les ministres en charge des transports, de l’économie et du travail à M. Jean-Louis Bianco, ancien ministre. Cette mission de concertation, qui s’est déroulée entre novembre 2012 et avril 2013, a donné lieu à près de 200 auditions de l’ensemble des parties prenantes au système ferroviaire.
Jacques Auxiette, président du conseil régional de la région Pays-de-la-Loire et vice-président de l’Association des régions de France (ARF), a été chargé par le ministre en charge des transports de mener parallèlement une réflexion sur les relations entre le futur groupe public ferroviaire et les régions, selon la même temporalité.
Jean-Louis Bianco et Jacques Auxiette ont remis leurs recommandations pour réussir la réforme ferroviaire au Gouvernement le 22 avril 2013.
Si aucune consultation obligatoire sur l’avant-projet de loi n’a été recensée, compte-tenu des impacts importants de la réforme sur les marchés ferroviaires, notamment celui du fret, le Gouvernement a décidé de solliciter l’avis de l’Autorité de la concurrence Dans ses conclusions, cette dernière « est consciente du défi pour le gouvernement de concilier logique d’intégration industrielle et sauvegarde de l’équité concurrentielle dans la réforme du secteur ferroviaire » et formule un certain nombre de recommandations pour la mise en œuvre du projet qu’il appartiendra au législateur ou au pouvoir réglementaire de suivre en tout ou partie..
1.6. Modalités d'application dans le temps des dispositions envisagées, textes législatifs et réglementaires à abroger et mesures transitoires proposées
A l’exception de la création de l’établissement public « mère » qui, pour des raisons fiscales, sera créé au 1er décembre 2014, et des dispositions relatives au renouvellement du collège de l’ARAF, compte tenu de leur mise en œuvre progressive dans le temps, l’ensemble des dispositions de la loi portant réforme ferroviaire seront applicables à compter du 1er janvier 2015.
L’établissement d’un cadre social commun à l’ensemble des travailleurs de la branche ferroviaire suivra son calendrier propre. Si les dispositions législatives permettant sa mise en œuvre seront bien applicables à compter du 1er janvier 2015, la concertation sur le « décret-socle » et la négociation de certains volets de la convention collective de branche pourront débuter dès la présentation de la loi en conseil des ministres.
Outre les transferts de biens entre les trois entités constitutives du groupe public ferroviaire qui auront lieu au 1er janvier 2015, des mesures transitoires spécifiques sont prévues pour le renouvellement du collège de l’ARAF d’une part et pour les dispositions sociales de la réforme d’autre part. En effet, dans la mesure où la composition du collège du régulateur est modifiée par cette loi, il est nécessaire de prévoir le remplacement progressif des membres du collège. Par ailleurs, pour ce qui concerne l’élaboration du cadre social modernisé, la concertation sur le décret dit « socle », puis la négociation de la convention collective de branche et le cas échéant des accords d’entreprises, risquant de suivre un calendrier distinct de celui de la réforme organisationnelle du secteur, il est nécessaire de prévoir des mesures spécifiques afin d’éviter tout vide juridique quant au cadre social applicable aux salariés de la SNCF.
Le projet de loi portant réforme ferroviaire prévoit une ordonnance pour mettre en cohérence l’ensemble des dispositions législatives autres que le code des transports avec la présente loi. En effet, la constitution du groupe public ferroviaire nécessitera des changements de dénominations, pour faire référence à la SNCF, SNCF Réseau ou SNCF Mobilités, et l’abrogation de dispositions devenues sans objet.
Par ailleurs, de manière à permettre au groupe public ferroviaire de fonctionner d’une manière analogue à celle d’un groupe de sociétés sur le plan fiscal, et notamment pour permettre aux dividendes versés par SNCF Mobilités de contribuer au désendettement de SNCF Réseau, il est nécessaire de réaliser deux modifications législatives qui doivent obligatoirement faire l’objet de dispositions en loi de finances. Il s’agit, d’une part, de modifier le code général des impôts pour permettre à la SNCF de se constituer comme seule entreprise redevable de l’impôt sur les sociétés dû sur l’ensemble du groupe public ferroviaire et, d’autre part, de modifier la loi de finances rectificative pour 2001 pour permettre à SNCF Mobilités de verser des dividendes à la SNCF. Ces deux dispositions pourraient être intégrées dans la loi de finances pour 2015, de manière à prendre effet dès la constitution effective du groupe public ferroviaire au 1er janvier 2015.
Enfin, cette loi ne transpose dans le droit national qu’une première série de mesures de la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen (refonte), dont la date limite de transposition est fixée au 16 juin 2015. Pour des raisons de calendrier et de lisibilité de la réforme ferroviaire, et dans la mesure où l’ensemble des actes d’exécution n’a pas encore été publié par la Commission européenne, le Gouvernement a décidé de ne pas procéder à la transposition complète de cette directive par l’intermédiaire de ce vecteur législatif. Par conséquent, une intervention ultérieure du législateur sera nécessaire pour mettre en conformité le droit national avec la directive 2012/34.
La majorité des textes d’applications listés dans cette section sont en cours de codification dans la partie réglementaire du code des transports. Cet exercice devra s’articuler avec les modifications des textes réglementaires rendues nécessaires par la loi portant réforme ferroviaire.
Textes à abroger
L’application de la réforme devrait se traduire par l’abrogation des textes listés ci-dessous :
- Décret n° 97-444 du 5 mai 1997 relatif aux missions et aux statuts de Réseau ferré de France : pour tenir compte de la nouvelle organisation du secteur ferroviaire
- Décret n° 2011-891 du 26 juillet 2011 relatif au service gestionnaire du trafic et des circulations et portant diverses dispositions en matière ferroviaire : pour tenir compte de la nouvelle organisation du secteur ferroviaire
- Décret n°99-1161 du 29 décembre 1999 relatif à la durée du travail du personnel de la Société nationale des chemins de fer français : pour permettre la mise en œuvre du cadre social commun à toutes les entreprises du secteur ferroviaire
- Décret n° 2010-404 du 27 avril 2010 relatif au régime de la durée du travail du personnel de certaines entreprises de transport ferroviaire : pour permettre la mise en œuvre du cadre social commun à toutes les entreprises du secteur ferroviaire
Textes à modifier
Des textes réglementaires actuels devront être modifiés substantiellement pour prendre en compte la nouvelle organisation du secteur ferroviaire :
- Décret n° 83-38 du 24 janvier 1983 fixant les modalités de désignation des membres du conseil d’administration de la Société nationale des chemins de fer français : nouvelle composition du conseil d’administration de SNCF Mobilités (L. 2141-6)
- Décret n° 83-109 du 18 février 1983 relatif aux statuts de la Société nationale des chemins de fer français : nouvelle organisation de SNCF Mobilités (L. 2141-1 à 19)
- Décret n°83-817 du 13 septembre 1983 portant approbation du cahier des charges de la Société nationale des chemins de fer français : nouvelle organisation de SNCF Mobilités (L. 2141-1 à 19)
- Décret n° 97-446 du 5 mai 1997 relatif aux redevances d'utilisation du réseau ferré national perçues au profit de Réseau ferré de France : intégration dans le décret de l’articulation entre la trajectoire de redevance fixée par le contrat entre l’Etat et SNCF Réseau (L. 2111-10), prise en compte des critères d’évolution des redevances fixés par la loi (L. 2111-25 : soutenabilité, prise en compte de la productivité), modifications liées au changement de nature de l’avis exprimé par l’ARAF sur la tarification applicable au réseau ferré national (L. 2133-5)
- Décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 relatif à l'utilisation du réseau ferré national : suppression des dispositions relatives à la DCF (IV de l’article 3) et aux conventions entre RFF, SNCF-Infra et la DCF (au e de l’article 17), intégration des dispositions relatives à la « charte du réseau » (titre IV, application du L. 2100-4 nouvellement créé dans le code des transports)
- Décret n° 2006-1534 du 6 décembre 2006 pris pour l'application des articles 1er, 1er-1 et 1er-2 de la loi n° 97-135 du 13 février 1997 portant création de l'établissement public « Réseau ferré de France » en vue du renouveau du transport ferroviaire : mise à jour des missions pouvant être confiées au cocontractant et des modalités garantissant leur cohérence avec les missions qui incombent à SNCF Réseau
- Décret n° 2010-1023 du 1er septembre 2010 relatif à l'organisation et au fonctionnement de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et portant diverses dispositions relatives au secteur ferroviaire : contenu du rapport annuel d’activité de l’ARAF (L. 2131-2), conditions de désignation du commissaire du Gouvernement auprès de l’ARAF (L. 2132-8-1)
D’autres textes réglementaires nécessiteront des modifications, essentiellement par cohérence rédactionnelle (mise en conformité avec les nouvelles dénominations notamment) :
- Décret n° 49-996 du 26 juillet 1949 modifiant les conditions d’exercice du contrôle financier de l’Etat sur les chemins de fer et les transports par route et par eau
- Décret n° 50-637 du 1er juin 1950 modifiant les attributions du conseil d'administration de la Société nationale des chemins de fer français en matière de personnel
- Décret n°53-707 du 9 août 1953 modifié relatif au contrôle de l'Etat sur les entreprises publiques nationales et certains organismes ayant un objet d'ordre économique ou social
- Décret n°60-965 du 9 septembre 1960 portant application de la loi n. 55-292 du 15 mars 1955 étendant a la société nationale des chemins de fer français les dispositions de l'article 1er de la loi n. 46-2195 du 11 octobre 1946
- Décret n° 81-1222 du 30 décembre 1981 autorisant le rattachement par voie de fonds de concours du produit de diverses recettes de caractère non fiscal au budget de l’environnement et du cadre de vie
- Décret n° 83-3 du 5 janvier 1983 fixant les modalités d’élection des représentants des salariés au conseil d’administration de la Société nationale des chemins de fer français
- Décret n° 83-110 du 18 février 1983 organisant un contrôle économique et financier de l’Etat sur la Société nationale des chemins de fer français
- Décret n° 83-816 du 13 septembre 1983 relatif au domaine confié à la Société nationale des chemins de fer français
- Décret n° 97-445 du 5 mai 1997 portant constitution du patrimoine initial de l’établissement public Réseau ferré de France
- Décret n° 2000-1135 du 24 novembre 2000 adaptant les modalités d'application à la SNCF et à la RATP de la loi no 83-629 du 12 juillet 1983
- Décret n° 2001-1116 du 27 novembre 2001 relatif au transfert de compétences en matière de transports collectifs d'intérêt régional
- Décret n° 2002-1359 du 13 novembre 2002 fixant la consistance du réseau ferré national
- Décret n° 2010-708 du 29 juin 2010 relatif à la certification des conducteurs de trains
- Décret-loi du 19 avril 1934 modifiant le régime de retraites des chemins de fer
- Décret-loi du 31 août 1937 modifié portant approbation et publication de la convention du 31 août 1937 réorganisant le régime des chemins de fer
- Décret du 6 août 1938 fixant le régime d'assurances du personnel de la Société nationale des chemins de fer français autres que ceux de l'ancien réseau d'Alsace et de Lorraine
- Décret n° 50-637 du 1er juin 1950 modifiant les attributions du conseil d'administration de la Société nationale des chemins de fer français en matière de personnel
- Décret n° 91-613 du 28 juin 1991 modifié fixant les taux des cotisations de divers régimes spéciaux de sécurité sociale
- Décret n° 2007-353 du 17 mars 2007 relatif à la durée quotidienne du travail des travailleurs de nuit et au repos hebdomadaire applicables à certains salariés du secteur des transports et modifiant le code du travail
- Décret n° 2007-730 du 7 mai 2007 modifié relatif à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français
- Décret n°2007-1056 du 28 juin 2007 relatif aux ressources de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français
- Décret n° 2008-639 du 30 juin 2008 modifié relatif au régime spécial de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français
- Décret n° 2008-640 du 30 juin 2008 relatif à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français et à son financement
- Décret n° 2008-680 du 9 juillet 2008 modifié portant organisation de l'administration centrale du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire
- Décret n° 2009-620 du 6 juin 2009 modifié relatif à certaines commissions administratives à caractère consultatif relevant du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire
- Décret n° 2010-105 du 28 janvier 2010 relatif à la limite d'âge des agents de la Société nationale des chemins de fer français et de la Régie autonome des transports parisiens
- Décret n° 2010-1362 du 10 novembre 2010 relatif au régime de prévoyance du personnel de la Société nationale des chemins de fer français
- Décret n° 2011-288 du 18 mars 2011 relatif à la limite d'âge des agents de la Société nationale des chemins de fer français et de la Régie autonome des transports parisiens
- Articles R. 711-1, D 173-21, D412-79, D133-9-2, D134-11, D134-12, D212-4 du code de la sécurité sociale
- Articles D268 et D312 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre
- Articles R3261-2 et D741-1 du code du travail
Textes nouveaux
Au-delà de la modification des textes réglementaires existants, la loi portant réforme ferroviaire appelle des textes nouveaux :
- Décret relatif au haut comité du ferroviaire qui contiendra les mesures d’application de prévues à l’article L. 2100-4
- Décret relatif au fonctionnement des institutions représentatives du personnel au sein du groupe public ferroviaire qui contiendra les mesures d’application de l’article L. 2101-5
- Décret relatif au régime de la durée du travail commun aux entreprises de la branche ferroviaire (« décret socle » au cadre social modernisé) qui contiendra les mesures d’application des articles L. 2161-1 et 2.
- Décret relatif aux missions et aux statuts de la SNCF en tant qu’établissement mère du groupe public ferroviaire, qui contiendra les mesures d’application des articles suivants :
- L. 2102-4 : modalités de fonctionnement du conseil de surveillance de la SNCF
- L. 2102-6 : durée des mandats des membres du directoire de la SNCF
- L. 2102-7 : pouvoirs du conseil de surveillance de la SNCF
- L. 2102-12 : règles de gestion financière et comptable applicables à la SNCF
- L. 2102-14 : règles de gestion domaniale applicables à la SNCF
- L. 2102-15 : conditions du contrôle économique, financier et technique de la SNCF par l’Etat
- Décret relatif aux missions et aux statuts de SNCF Réseau, qui contiendra les mesures d’application des articles suivants :
- L. 2111-1 : consistance et caractéristiques principales du réseau ferré national (figure aujourd’hui dans le décret n° 97-444)
- L. 2111-10 : mesures d’application relatives au contenu et à la conclusion du contrat entre l’Etat et SNCF Réseau et définition des ratios au-delà desquels les concours publics doivent couvrir l’intégralité des coûts d’un investissement sur le réseau ferré national
- L. 2111-12 : rapports entre l’Etat et RFF en ce qui concerne les projets d’investissement sur le réseau ferré national (figure aujourd’hui dans le décret n° 97-444)
- L. 2111-15 : statuts de SNCF Réseau, notamment les modalités d’élection ou de nomination des membres de son conseil d’administration
- L. 2111-16 : délai et conditions dans lesquels l’ARAF peut s’opposer à la nomination, la reconduction ou la révocation du président de SNCF Réseau
- L.2111-16-1 : condition d’arrêt par le conseil d’administration et de communication à l’ARAF de la liste des emplois de dirigeants de SNCF Réseau
- L. 2111-19 : règles de gestion financière et comptable applicables à SNCF Réseau (figure aujourd’hui dans le décret n° 97-444)
- L. 2111-22 : règles de gestion domaniale applicables à SNCF Réseau (figure aujourd’hui dans le décret n° 97-444)
- L. 2111-23 : conditions du contrôle économique, financier et technique de SNCF Réseau par l’Etat (figure aujourd’hui dans le décret n° 97-444)
- L. 2133-8-1 : valeur des projets d’investissement au-delà de laquelle l’ARAF devra rendre un avis sur le montant des concours publics apportés à SNCF Réseau
- Décret relatif à l’indépendance des fonctions d’accès à l’infrastructure sera également nécessaire. Il contiendra les mesures d’application des articles suivants, reprises en partie de l’actuel décret n° 2011-891 :
- L. 2111-16-2 : application des dispositions relatives à la commission de déontologie du ferroviaire
- L. 2111-16-3 : exigences matérielles d’indépendance auxquelles doivent satisfaire les services responsables de l’accès au réseau ferré national
- L. 2122-4-1 : liste des informations dont la divulgation serait de nature à porter atteinte aux règles de non-discrimination
Le cas échéant, d’autres textes réglementaires pourraient devoir être pris, notamment pour préciser les biens et la dette transférés de SNCF Mobilités à SNCF Réseau et de SNCF Réseau et SNCF Mobilités à la SNCF.
Le projet global de réforme ferroviaire concerne avant tout la création du GIU et la constitution du groupe public ferroviaire, la description des règles de fonctionnement de ce groupe public, et la mise en place d’un cadre social commun à toutes les entreprises de la branche ferroviaire. Le périmètre d’application de ce projet de réforme est celui du système fondé sur le réseau ferroviaire défini à l’article L. 2122-1 du code des transports. Ce réseau ferroviaire ne s’étendant dans aucune collectivité territoriale d’outre-mer, les dispositions envisagées ne comportent pas de modalité d’application outre-mer.
La séparation en 1997 entre RFF, propriétaire de l’infrastructure, et la SNCF, notamment gestionnaire d’infrastructure délégué, a engendré un manque de coordination, de lourds dysfonctionnements et une augmentation des coûts de transaction, au détriment de la qualité de service offerte aux utilisateurs du réseau ferroviaire. La nouvelle organisation du secteur ferroviaire vise à instaurer une nouvelle cohérence et une nouvelle gouvernance qui permettront de pallier les défauts constatés.
La nature du lien entre le gestionnaire d’infrastructure unifié, en charge de la gestion de l’ensemble du réseau ferré national, et l’opérateur historique, qui réalise une grande majorité des trafics sur le réseau, doit être soigneusement conçue, notamment dans les zones denses, de manière à permettre un fonctionnement systémique optimal. En effet, il convient de s’assurer que les intérêts des différents acteurs du système ferroviaire ne sont pas fondamentalement divergents, et que le gestionnaire d’infrastructure est incité à coopérer avec l’ensemble des entreprises ferroviaires opérant sur le réseau, notamment l’opérateur historique, de manière à corriger les dysfonctionnements actuellement constatés du système ferroviaire.
La recherche d’optimisation dans le fonctionnement d’un système aussi complexe que le ferroviaire nécessite l’assurance d’une cohérence dans les choix techniques réalisés par les différents acteurs, la mise en œuvre d’une logique industrielle du ferroviaire et le développement d’une culture systémique de ce mode de transport. Cela nécessite de créer un groupe public unifié, coordonné, au service du système ferroviaire.
Dans la mesure où différentes entreprises ferroviaires assurent des circulations sur le réseau ferré national, les règles d’accès à l’infrastructure doivent être transparentes, équitables et non discriminatoires pour l’ensemble des parties prenantes. Pour atteindre cet objectif, le droit communautaire existant impose une indépendance juridique, décisionnelle et organisationnelle vis-à-vis de toute entreprise ferroviaire pour l’exercice de certaines des fonctions de gestion du réseau ferré national, à savoir les fonctions essentielles (la tarification de l’infrastructure et la répartition des capacités).
Au-delà des bénéfices attendus par la constitution du gestionnaire d’infrastructure unifié, la réforme du système ferroviaire doit permettre de répondre aux enjeux identifiés dans le diagnostic ci-dessus :
- s’appuyer sur des relations clarifiées entre les différentes parties prenantes, sur une mutualisation de missions pouvant être exercées au bénéfice de l’ensemble des acteurs du système ferroviaire pour améliorer la qualité de service, renforcer la capacité d’innovation du système et redresser la trajectoire financière du gestionnaire d’infrastructure ;
- éviter que les problématiques d’entretien de l’infrastructure et de circulation sur le réseau soient disjointes des contraintes de l’exploitation des services de transport ;
- s’inscrire dans une logique systémique et favoriser, au sein d’une même structure, une communauté d’intérêts et une unité sociale des personnels travaillant pour le secteur ferroviaire ;
- répondre à l’exigence issue du droit européen d’indépendance décisionnelle du gestionnaire d’infrastructure unifié au sein du groupe public ferroviaire pour ce qui concerne l’exercice des fonctions essentielles (la tarification de l’infrastructure et la répartition des capacités).
Si le droit communautaire exige une indépendance juridique, organisationnelle et décisionnelle du gestionnaire d’infrastructure pour ce qui concerne l’exercice des fonctions dites essentielles, aucun modèle d’organisation du secteur ferroviaire n’est imposé. Quelles que soient les mesures décidées par les Etats membres, celles-ci doivent permettre d’atteindre ces exigences d’indépendance de manière probante.
Trois options principales étaient envisageables :
- séparation totale entre le gestionnaire d’infrastructure unifié et l’opérateur historique ;
- filialisation du gestionnaire d’infrastructure unifié, sous forme de société possédée par l’opérateur historique ;
- constitution d’un groupe public ferroviaire constitué d’établissements publics, regroupant en son sein le gestionnaire d’infrastructure unifié et l’opérateur historique.
La première option présente l’inconvénient de scinder le système ferroviaire, en séparant les 50 000 agents travaillant pour le gestionnaire d’infrastructure unifié des 100 000 agents exerçant leurs fonctions pour le compte de l’opérateur historique. Il présente également le risque de perte d’un certain nombre de synergies commerciales, opérationnelles (notamment, de la cohérence industrielle globale d’un système où la frontière roue/rail n’est pas nécessairement pertinente) et de savoir-faire des personnels. Enfin, la constitution d’un monopole d’infrastructure déconnecté des contraintes de l’exploitation des services de transport risquerait d’entraîner de sérieuses lourdeurs dans le fonctionnement opérationnel du système.
La deuxième option s’inspire du fonctionnement du secteur de l’électricité, où EDF, en charge des activités de production et de commercialisation, possède deux filiales, RTE et ERDF, en charge des activités de transport et de distribution. Cette solution, transposée au secteur ferroviaire, présente toutefois l’inconvénient de ne pas placer les deux entités opérationnelles du groupe public ferroviaire, SNCF Réseau et SNCF Mobilités, sur un pied d’égalité. Elle nécessite également la transformation de SNCF Réseau en société anonyme, alors même que la mission qu’il exerce relève naturellement d’un établissement public.
La troisième option a donc été retenue par le Gouvernement, à la suite de la recommandation formulée en ce sens par M. Jean-Louis Bianco en avril 2013. Elle consiste à constituer un groupe public ferroviaire autour de trois entités : les deux entités opérationnelles que sont SNCF Réseau, gestionnaire d’infrastructure unifié, et SNCF Mobilité, opérateur historique, ainsi qu’une entité mère, qui reprendra la dénomination SNCF. Cette option présente les avantages de préserver l’unité sociale du système ferroviaire public, de clarifier, sur le plan de la gouvernance, les règles de fonctionnement interne du groupe public ferroviaire pour respecter les exigences communautaires, de permettre, au sein du groupe, une mutualisation de certaines fonctions pouvant bénéficier à l’ensemble des entités le constituant, et de faire bénéficier le gestionnaire d’infrastructure unifié des excédents éventuels que pourrait dégager l’opérateur historique.
L’établissement mère se verra confier les quatre grandes fonctions mentionnées au nouvel article L. 2102-1. Premièrement, il assurera le contrôle et le pilotage stratégiques, la cohérence économique, l’intégration industrielle et l’unité sociale du groupe public ferroviaire. A titre d’illustration, cette fonction pourra se matérialiser par :
- la formulation d’un avis sur les contrats de performance, notamment sur la crédibilité et la bonne articulation des trajectoires financières de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités ;
- l’établissement et l’approbation des comptes consolidés du groupe public ferroviaire ;
- la définition des hypothèses socio-économiques utilisées dans les plans stratégiques et la déclinaison annuelle des contrats des deux entités filles ;
- l’approbation du plan stratégique du groupe et de son budget tels qu’ils résultent du plan stratégique et du budget de ses différentes entités ;
- la prospective et la veille sur le système ferroviaire ;
- la cohérence entre SNCF Réseau et SNCF Mobilités sur les sujets techniques et opérationnels : principaux paramètres techniques caractérisant la compatibilité opérationnelle entre le matériel roulant et le réseau; optimisation des projets à forte dimension technique concernant le matériel roulant et le réseau ; cohérence et optimisation de projets à forte dimension systémique, notamment tous les projets sol/bord à fort enjeux ;
- la stratégie de développement international et la fonction d’ensemblier sur les grands projets à composante ferroviaire ;
- la réalisation d’audits sur des dossiers d’intérêt commun aux deux établissements filles ;
Deuxièmement, l’établissement mère assurera l’unité sociale du groupe, c’est-à-dire :
- la définition et l’animation des politiques RH transversales (réglementations transversales, mobilités, parcours professionnels) ;
- la conduite des relations sociales au niveau du groupe et l’animation des instances représentatives du personnel relevant de ce même niveau ;
- l’animation et la professionnalisation des politiques RH.
Troisièmement, l’établissement mère assurera des missions mutualisées pour le compte du groupe avec, à titre d’exemple :
- la gestion administrative des ressources humaines : paye, assurance maladie, prévoyance, prestations sociales ;
- le cas échéant, et sans préjudice des besoins propres à SNCF Réseau et SNCF Mobilités, des services juridiques;
- l’organisation et le pilotage de la politique d'achats généraux ;
- la gestion du foncier et de l’immobilier : mutualisation des compétences spécialisées du groupe pour la gestion immobilière, tant pour l’immobilier tertiaire que pour la valorisation (cessions ou location) des actifs qui ne sont pas utiles à l’activité ferroviaire.
Enfin, l’établissement mère assurera des missions utiles au bon fonctionnement du système ferroviaire, comme par exemple :
- la constitution d’entités programmes ou de projets en fonction de solutions à trouver et valider sur des sujets système (projet global d’amélioration de l’accessibilité au sens de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, programme de réduction des nuisances sonores ferroviaires à moindre coût, amélioration de la performance énergétique…) ;
- la définition et la coordination de la politique de sûreté ferroviaire, dont l’exercice est assuré par SNCF Réseau et SNCF Mobilités (protection des personnes et des biens) ;
- la définition et la coordination des actions de sécurité, dans le respect des responsabilités propres à SNCF Réseau et SNCF Mobilités en matière de sécurité et sous réserve des responsabilités confiées à l’établissement public de sécurité ferroviaire ;
- la coordination de la gestion des situations perturbées et des situations de crise ;
- l’impulsion de la politique en matière de recherche et d’innovation.
Dans la mesure où il convenait de garantir la continuité des personnalités de la Société nationale des chemins de fer français et de Réseau ferré de France, tous deux établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC), et en cohérence avec les missions de service public exercées, le choix a été fait de constituer le groupe public ferroviaire autour de trois EPIC : SNCF Réseau assurera la continuité de la personnalité de Réseau ferré de France, et SNCF Mobilités celle de la Société nationale des chemins de fer français en tant qu’opérateur de transport. L’établissement « mère » du groupe, la SNCF, sera un nouvel EPIC auquel le code des transports confiera à l’égard des deux établissements « filles » que sont SNCF Réseau et SNCF Mobilités des attributions apparentées à celles d’une société détentrice, de manière à instituer un fonctionnement de groupe (nouvel article L. 2102-2). La SNCF assurera à ce titre le contrôle et le pilotage stratégiques, la cohérence économique, l’intégration industrielle et l’unité sociale du groupe public ferroviaire (nouvel article L. 2102-1) ; les deux membres de son directoire seront présidents des conseils d’administration de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités (nouvel article L. 2102-6) ; la SNCF sera enfin représentée à hauteur du tiers des membres des conseils d’administration de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités (articles L. 2111-15 et L. 2141-6 modifiés).
L’Etat assumera son rôle de stratège : majoritaire dans le conseil de surveillance, (nouvel article L. 2102-4) où seront également représentés les régions et le parlement, il sera le garant de la cohérence économique et du pilotage stratégique du groupe public.
Des règles d’impartialité, venant garantir l’accès libre et non discriminatoire au réseau seront nécessaires pour respecter les exigences communautaires. Outre la présence majoritaire des représentants de l’Etat dans le conseil de surveillance de la SNCF, ces règles d’impartialité sont les suivantes :
- Le directoire de la SNCF sera constitué uniquement des présidents des deux conseils d’administration de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités (nouvel article L. 2102-6). Il prendra ses décisions à l’unanimité. En cas de désaccord entre les deux dirigeants, le président du conseil de surveillance de la SNCF, nommé par l’Etat, rendra un arbitrage (nouvel article L. 2102-9). De cette manière, le président de SNCF Mobilités ne pourra pas imposer ses vues au président de SNCF Réseau dans la prise de décision au sein de la SNCF. Il s’agit là d’une forme de garantie supplémentaire de l’indépendance décisionnelle du gestionnaire d’infrastructure vis-à-vis de l’opérateur historique.
- Les représentants de la SNCF au conseil d’administration de SNCF Réseau seront nommés par décret, sur proposition du conseil de surveillance de la SNCF, où l’Etat sera majoritaire (article L. 2111-15 modifié). Ils ne dépasseront pas le tiers des membres du conseil d’administration de SNCF Réseau. Parmi les personnalités qualifiées présentes au conseil d’administration de SNCF Réseau, un représentant des entreprises ferroviaires opérant sur le réseau ferré national autre que SNCF Mobilités sera désigné. Préalablement à sa nomination , l’ARAF pourra s’opposer au choix de la personne pressentie pour être nommée comme président du conseil d’administration du gestionnaire d’infrastructure si cette personne ne présente pas les garanties d’indépendance prévues par le projet de loi. L’ARAF pourra s’opposer à sa révocation, si elle estime qu’elle est due à l’indépendance dont le président aurait fait preuve dans ses fonctions (article L. 2111-16 modifié).
- Pendant l’exercice de leurs fonctions, tous les dirigeants de SNCF Réseau ne pourront exercer de fonctions pour le compte de l’établissement de tête ou d’une quelconque entreprise ferroviaire, et la part variable de leur rémunération sera indexée uniquement sur les performances de SNCF Réseau (nouvel article L. 2111-16-1).
- Une commission de déontologie du ferroviaire sera consultée lorsque le président du conseil d’administration de SNCF Réseau, un dirigeant en charge des fonctions essentielles ou un salarié de SNCF Réseau ayant eu à connaître des informations sensibles souhaitera, dans les trois ans qui suivent la cessation de ses fonctions, exercer des activités pour le compte d’une quelconque entreprise ferroviaire (nouvel article L. 2111-16-2).
- Des exigences matérielles d’indépendance, s’agissant des fonctions essentielles, seront précisées par décret en Conseil d’Etat, notamment en matière de sécurité, d’accès aux locaux et aux systèmes d’informations (nouvel article L. 2111-16-3).
- L’ARAF rendra un avis public sur les mesures d’organisation interne prises par SNCF Réseau pour prévenir les risques de pratiques discriminatoires entre entreprises ferroviaires et pour respecter les règles d’impartialité introduites par la loi (nouvel article L. 2111-16-4).
Impacts opérationnels
Les compétences utiles au bon fonctionnement du système ferroviaire pourront être mutualisées, et l’efficacité du système s’en trouvera améliorée. Les synergies et les liens entre les différentes entités du groupe public constitueront un levier majeur pour améliorer la performance industrielle, économique et sociale du système ferroviaire. La SNCF, en tant qu’établissement mère, constituera la garantie d’un développement harmonieux de SNCF Réseau et SNCF Mobilités, mobilisés autour du projet commun que constitue le bon fonctionnement du système ferroviaire.
Les synergies développées par le groupe public ferroviaire bénéficieront à l’ensemble du secteur ferroviaire, et notamment aux autres entreprises ferroviaires. Les règles d’impartialité de SNCF Réseau permettront de s’assurer que les décisions du gestionnaire d’infrastructure unifié soient prises avec les garanties d’indépendance nécessaires. SNCF Réseau sera l’interlocuteur direct des entreprises ferroviaires, tout comme SNCF Mobilités sera l’interlocuteur privilégié des autorités organisatrices du transport.
Au sein du groupe public ferroviaire, les règles de fonctionnement, clarifiées entre la SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités, permettront aux agents du groupe d’œuvrer à l’amélioration de la qualité du service offert aux utilisateurs du transport ferroviaire, voyageurs et chargeurs, dans un contexte favorable et sans avoir à prendre en charge la gestion, complexe et productrice de surcoûts, des interfaces existant actuellement entre la Société nationale des chemins de fer français et Réseau ferré de France.
Impacts économiques, financiers, sociaux et budgétaires
Voir les autres sections de l’étude d’impact.
Il peut être noté que le projet de loi évite un coût pour l’Etat. En effet, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé, dans son arrêt C-625/10 du 18 avril 2013, que l’organisation actuelle du système ferroviaire français méconnaissait les dispositions directive 91/440/CEE telle que modifiée par la directive 2001/12/CE, et de la directive 2001/14/CE car RFF sous-traite à la DCF les travaux préparatoires à l’allocation des sillons. La réforme ferroviaire permettra, en assurant une indépendance juridique, décisionnelle et organisationnelle entre SNCF Réseau et SNCF Mobilités de se conformer en tout point aux exigences communautaires et par suite, d’éviter à l’État français de payer des amendes à la suite de sa condamnation par la CJUE.
La mise en œuvre d’une telle réforme suppose une période de transition suffisamment étendue pour :
- permettre aux deux établissements actuels, Réseau ferré de France et la Société nationale des chemins de fer français, de préfigurer l’organisation future du groupe public ferroviaire, afin que celui-ci soit pleinement opérationnel dès sa création ; cette préfiguration a commencé dès le premier semestre de l’année 2013.
- permettre la définition et l’adoption des nombreux textes d’application nécessaires.
A cette fin, la constitution du groupe public ferroviaire interviendra au 1er janvier 2015. A cette date, les biens, droits, obligations, contrats, conventions et autorisations seront attribués à la SNCF, à SNCF Réseau ou à SNCF Mobilité, en fonction de la mission à laquelle ils seront attachés. De la même manière, à cette date, les contrats de travail des salariés se poursuivront avec l’établissement public aux missions duquel ils concourent à titre exclusif ou principal. Toutefois, pour des raisons d’ordre fiscal, l’établissement public « mère » sera créé au 1er décembre 2014.
Lors de la séparation en 1997 de RFF, propriétaire et gestionnaire de l’infrastructure, de la SNCF, la SNCF, en tant que gestionnaire d’infrastructure délégué a conservé la majorité des compétences techniques s’est traduite par la mise en place de relations client-fournisseur dans de nombreux domaines (maîtrise d’ouvrage, maîtrise d’œuvre, maintenance, exploitation, travaux, prestations connexes aux travaux, achats, approvisionnements et logistique…) formalisée par de nombreux contrats. Cette mécanique contractuelle complexe s’est traduite par de nombreuses interfaces entre le gestionnaire d’infrastructure et son gestionnaire d’infrastructure délégué. De telles interfaces ne sont pas rares entre services d’une même structure, et il peut même avoir des effets bénéfiques en favorisant une remise en question, propice à l’innovation, de méthodes et réponses techniques dont la justification s’est perdue. Cependant, la séparation entre deux structures juridiques distinctes n’a pas permis d’éviter d’une part une certaine dilution de la responsabilité économique et financière des acteurs, et d’autre part le développement excessif d’interfaces contractuelles et opérationnelles, générateur de surcouts et de délais d’exécution.
Le constat de difficultés dans de nombreux domaines a pu être dressé : importantes perturbations des circulations du fait des travaux, liées à la définition et à la prise en compte trop tardive des conditions de réalisation des chantiers (parfois en cours d’année alors qu’une bonne planification requiert plusieurs années d’anticipation) ; incapacité des deux établissements à mettre en œuvre des solutions techniques unanimement reconnues comme bénéfiques pour la productivité de la maintenance et la qualité de service du réseau en l’absence d’accord sur la répartition et la formalisation des coûts et des bénéfices attendus ; impossibilité pour RFF de prendre vis-à-vis de ses clients (autorités organisatrices, entreprises ferroviaires) des engagements fermes et ambitieux en matière de qualité de service en l’absence de possibilité d’associer utilement le gestionnaire d’infrastructure délégué à leur définition et à l’évaluation des moyens nécessaires ; difficultés comptables et financières liées à des délais extrêmement longs de clôture des opérations…
En ce qui concerne plus spécialement l’exploitation de l’infrastructure, la création récente de la DCF à la suite de la loi dite « ORTF » de décembre 2009 a constitué une première évolution. La totale autonomie de cette direction au sein de la SNCF, telle qu’organisée par la loi, a créé les conditions d’un rapprochement avec RFF. Celui-ci s’est concrétisé d’autant plus rapidement que la très forte désorganisation de l’ensemble de la chaîne de production horaire, sensible depuis le milieu des années 2000 et apparue au grand jour avec la mise en vente par la SNCF de trains à horaires non garantis durant l’été 2011, imposait une obligation de résultat dont le rapprochement des équipes était l’une des clés. En effet, les nombreux allers retours entre services que supposait la répartition des tâches entre RFF (contacts avec les entreprises ferroviaires et études préliminaires) et la DCF (études détaillées) nuisaient tant à la qualité du travail produit qu’à son efficacité. Toutefois, malgré l’autonomie totale organisée par la loi et au motif que les directives en vigueur depuis 2001 imposaient une séparation juridique que l’intégration de la DCF au sein de la personne morale SNCF ne remplissait pas, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé, dans son arrêt C-625/10 du 18 avril 2013, que la situation de la DCF méconnaissait les dispositions communautaires relatives à l’indépendance des fonctions essentielles. Celles-ci prévoient en effet que les fonctions de tarification et d’allocation des capacités doivent être exercées par des entités indépendantes de façon organisationnelle, décisionnelle et juridique de toute entreprise ferroviaire.
Parallèlement, l’ensemble du système ferroviaire connaît un déficit structurel annuel de l’ordre de 1,5 milliard d’euros par an qui pourrait, en l’absence de réforme, atteindre rapidement 2 milliards d’euros. Ce déficit accroît chaque année la dette du système ferroviaire alors que les besoins de financement nécessaires pour entretenir, moderniser et développer le réseau ferré et les installations de service sont supérieurs aux moyens disponibles. Les dysfonctionnements évoqués contribuent à ce déséquilibre financier.
La réforme de la fonction de gestion d’infrastructure doit permettre de répondre aux trois enjeux identifiés dans le diagnostic ci-dessus :
- mettre fin aux dysfonctionnements opérationnels liés à la répartition des compétences et fonctions de gestion de l’infrastructure entre RFF, SNCF-Infra et la DCF ;
- s’appuyer sur l’amélioration de la qualité de service, la disparition des interfaces artificielles et la capacité d’innovation du système reconfiguré pour redresser la trajectoire financière du gestionnaire d’infrastructure ;
- répondre à l’exigence issue du droit européen d’indépendance juridique des services chargés des fonctions essentielles, l’indépendance décisionnelle et organisationnelle étant d’ores et déjà acquise dans la situation actuelle.
A titre liminaire, il convient de remarquer que la condamnation de la France par la CJUE interdit le statu quo. En effet, la situation des services de la DCF intervenant dans la procédure d’allocation des capacités doit nécessairement évoluer suite à l’arrêt de la CJUE. Le cadre juridique applicable à la DCF étant en grande partie directement inscrit dans la loi (articles L.2123-4 et suivants du code des transports), une évolution législative est inévitable.
Trois options principales étaient envisageables :
- amélioration des relations entre les deux établissements, à cadre juridique non substantiellement modifié ;
- regroupement des services chargés de la gestion d’infrastructure (RFF, SNCF-Infra, DCF) au sein de la SNCF en isolant les fonctions essentielles dans une structure dédiée pour remplir les conditions d’indépendance fixées par le droit européen ;
- regroupement des services chargés de la gestion d’infrastructure dans un établissement public au sein d’un groupe public ferroviaire.
La première option souffre de deux faiblesses rédhibitoires :
- l’historique des relations entre les deux établissements et les échecs successifs des tentatives d’amélioration de ces relations laissent peu d’espoir qu’une telle solution puisse réellement prospérer. A cet égard, la récente amélioration des relations n’a été rendue possible que par la perspective d’un regroupement rapide, fédératrice et motivante pour l’ensemble des équipes, mais qui doit maintenant être inscrite dans la loi ;
- la modification a minima du cadre juridique, pour régler la seule question de l’indépendance juridique des services de la DCF intervenant dans la procédure d’allocation des capacités, prendrait la forme d’un démembrement de la SNCF qui n’apparaît pas souhaitable.
La deuxième option n’offre de fait aucune véritable perspective. En effet, loin de regrouper réellement l’ensemble des services chargés de la gestion d’infrastructure, elle ne laisserait au sein de la SNCF qu’un gestionnaire d’infrastructure réduit, amputé des fonctions stratégiques que sont la tarification et la répartition des capacités. Une telle option éparpillerait entre le gestionnaire d’infrastructure intégré à la SNCF et l’organisme de tarification et de répartition des capacités nouvellement créé les responsabilités sur les deux enjeux clés que sont la qualité de service et l’équilibre financier du réseau, organisant ainsi une incapacité structurelle des acteurs publics à traiter ces enjeux. Elle serait susceptible d’engendrer, en outre, les mêmes difficultés que celles occasionnées par la séparation réalisée en 1997 et qui ont nécessité cette réforme. Elle ne saurait donc être poursuivie.
La troisième option a donc été retenue par le Gouvernement, à la suite de la recommandation formulée en ce sens par M. Jean-Louis Bianco en avril 2013. Elle consiste à regrouper RFF, SNCF Infra et la DCF au sein d’un gestionnaire d’infrastructure unifié, SNCF Réseau, lui-même intégré aux côtés de l’opérateur ferroviaire historique dans un groupe public ferroviaire. Le gestionnaire d’infrastructure unifié a la pleine responsabilité de l’ensemble des fonctions de gestion de l’infrastructure et les assume en toute impartialité (articles L. 2111-9 et suivants modifiés). Comme RFF avant lui, il est propriétaire du réseau ferré national et porte la dette liée à ce réseau. Il dispose de l’ensemble des leviers managériaux et économiques pour mettre fin aux dysfonctionnements opérationnels actuels et redresser l’équilibre financier du réseau. En tant qu’établissement public, il dispose de la séparation juridique requise par le droit européen.
Impacts opérationnels
En rassemblant l’ensemble des services chargés de la gestion de l’infrastructure sous une même autorité, la création du SNCF Réseau permettra de mettre un terme aux dysfonctionnements opérationnels observés. L’établissement de liens de coopération entre les entités anciennement séparées permettra une meilleure maîtrise des coûts et des délais des projets et une meilleure capacité d’anticipation et de planification de toutes les ressources rares (capacité sur le réseau pour réaliser les travaux, spécialités techniques à effectif contraint,…). Il permettra également de mettre en œuvre les évolutions des méthodes de travail et d’organisation identifiées comme bénéfiques. Il permettra de mieux utiliser la considérable force de travail aujourd’hui gaspillée dans la gestion des interfaces entre les deux établissements. Débarrassé de la gestion des relations internes conflictuelles, SNCF Réseau sera en mesure de prendre vis-à-vis de toutes les entreprises ferroviaires les engagements fermes et ambitieux dont elles ont besoin pour développer leurs activités.
L’intégration de SNCF Réseau dans le groupe public ferroviaire permettra notamment de ne pas déconnecter les missions de gestion de l’infrastructure de celles d’exploitation des services de transport. La constitution du groupe public ferroviaire obéit à une logique de performance industrielle du secteur ferroviaire, qui nécessite une coopération étroite entre les deux opérateurs publics, SNCF Réseau et SNCF Mobilités, au bénéfice de l’ensemble des parties prenantes. Au sein de la future SNCF et contrairement à la situation actuelle, les interfaces entre les différentes entités et les responsabilités seront clairement identifiées et délimitées. La répartition répondra à ce besoin d’organisation industrielle et s’effectuera en fonction des tâches accomplies par les agents, dans un souci de fluidité opérationnelle.
La création de SNCF Réseau sera réalisée par le transfert du personnel et du patrimoine de la branche SNCF-Infra et de la DCF à RFF et le changement de nom de RFF en SNCF Réseau. Le patrimoine concerné couvre l’ensemble des biens de toute nature attachés à l’activité de gestion de l’infrastructure, y compris les droits de propriété intellectuelle détenus par la SNCF en matière de recherche ou de systèmes d’informations liés à la gestion d’infrastructure ferroviaire ainsi que les filiales de la SNCF ayant un objet principal relatif à la gestion d’infrastructure (surveillance des voies, réalisation de travaux…). Ces transferts seront également l’occasion de clarifier le régime patrimonial de certains biens immobiliers utiles aux transports réalisés pour les besoins de la Défense.
Impacts économiques, financiers, sociaux et budgétaires.
Voir les autres sections de l’étude d’impact.
La mise en œuvre d’une telle réforme suppose une période de transition suffisamment étendue pour :
- permettre aux établissements de préfigurer l’organisation future de SNCF Réseau afin que celui-ci soit pleinement opérationnel dès sa création ; cette préfiguration a commencé dès le premier semestre de l’année 2013 ;
- permettre la définition et l’adoption des nombreux textes d’application nécessaires.
A cette fin, la constitution effective de SNCF Réseau prendra effet au 1er janvier 2015.
La création du groupe public ferroviaire et la constitution du gestionnaire d’infrastructure unifié constituent deux évolutions majeures du système ferroviaire qui permettront une clarification des responsabilités et des missions de chacun des acteurs. Cette nouvelle structuration, qui sera bénéfique pour l’ensemble des parties prenantes au système ferroviaire, ne doit cependant pas venir desservir l’opérateur historique, notamment pour ce qui concerne ses missions de service public.
La SNCF en tant que transporteur de marchandises et de personnes doit, compte tenu de son importance passée, présente et future pour le système ferroviaire français, voir son rôle de fournisseur de mobilités réaffirmé au sien du groupe public ferroviaire. La constitution de SNCF Mobilités permettra de lui donner tous les atouts pour continuer à servir le système ferroviaire public, à œuvrer pour une meilleure qualité de service offert aux voyageurs et aux chargeurs et à se préparer, d’ici quelques années, à une éventuelle ouverture à la concurrence des activités de transport ferroviaire domestique de voyageurs.
La réforme doit permettre de répondre aux enjeux identifiés dans le diagnostic ci-dessus :
- tirer parti des atouts du système ferroviaire, conserver ce qui fonctionne et ne venir corriger que les points faisant l’objet d’un dysfonctionnement ;
- permettre au système ferroviaire public de continuer à assurer ses missions de manière efficace et efficiente tout en offrant une haute qualité de service ;
- faire bénéficier au système ferroviaire des ressources financières dégagées par SNCF Mobilités tout en ayant pour objectif l’assainissement de sa structure financière ;
- reconnaître la spécificité de l’opérateur historique SNCF qui ne peut, pour de multiples raisons, être considéré comme une entreprise ferroviaire parmi d’autres.
Au-delà du transfert de SNCF Infra et de la DCF au futur gestionnaire d’infrastructure unifié, trois options principales étaient envisageables :
- éclatement de l’opérateur historique en plusieurs entreprises spécialisées dans chaque domaine d’activité (transport de marchandises, transport de voyageurs conventionné, transport de voyageurs à grande vitesse, gestion des gares…) ;
- dissociation de l’activité d’entreprise ferroviaire de celle de gestionnaire de gares, c’est-à-dire rattachement de Gares & Connexions au gestionnaire d’infrastructure unifié ;
- confirmation de l’opérateur historique en tant que fournisseur de mobilités, entreprise ferroviaire publique unique assurant également la fonction de gestionnaire de gares.
La première option, en optant pour le morcellement du système ferroviaire public, va à l’encontre de l’esprit de la réforme ferroviaire. En constituant un groupe public ferroviaire, il s’agit de mettre en œuvre une structuration du système ferroviaire qui réponde à une logique industrielle et opérationnelle : la mission première de SNCF Réseau consiste à produire des sillons, et celle de SNCF Mobilités à produire des services de transport de qualité ; leur intégration au sein du groupe public ferroviaire permet de s’assurer que les intérêts de ces deux entités seront effectivement alignés au service des voyageurs et des chargeurs. Par conséquent, l’éclatement de l’opérateur historique en plusieurs entreprises spécialisées va à l’encontre de la logique industrielle et opérationnelle, qui doit permettre au groupe public ferroviaire d’offrir à ses clients (voyageurs, chargeurs, autorités organisatrices, entreprises…) des solutions de mobilités de meilleure qualité au meilleur prix. Cette première option n’a donc pas été retenue.
La deuxième option s’inscrit dans la logique qui consiste à donner au gestionnaire d’infrastructure unifié la gestion du réseau ferré national comme des infrastructures de service, notamment des gares, en raison du caractère monopolistique de ces activités. Il convient cependant de noter que le métier de gestionnaire de gares, qui s’occupe de flux humains et de voyageurs individuels, est fondamentalement différent de celui de gestionnaire du réseau, qui gère des circulations de trains et est en contact avec les entreprises ferroviaires. Cette option n’a pas été retenue.
La troisième solution, qui a été retenue par le Gouvernement, consiste à maintenir au sein du fournisseur de mobilités la gestion des gares, dont le fonctionnement est attaché aux relations avec les voyageurs. Cette solution permet ainsi à l’opérateur historique de s’affirmer clairement en tant que fournisseur de mobilités au service des clients du système ferroviaire, leur offrant des solutions multimodales intégrées. Elle présente également l’avantage de ne pas venir déstabiliser l’organisation de la SNCF actuelle au-delà de ce qui est nécessaire pour la mise en œuvre de la réforme ferroviaire et la constitution du groupe public ferroviaire (articles L. 2141-1 et suivants modifiés). L’indépendance décisionnelle existant dans le droit actuel sera maintenue, dans la mesure où elle s’avère suffisante, car proportionnée aux besoins.
Impacts opérationnels
SNCF Mobilités sera issue de la SNCF actuelle, après transfert de SNCF Infra et de la DCF à SNCF Réseau, et des fonctions communes à l’établissement mère. Les quatre autres branches actuelles de la SNCF (SNCF Voyages, SNCF Proximité, SNCF Geodis et Gares & Connexions) constitueront le cœur de l’activité de SNCF Mobilités.
Au sein du groupe public ferroviaire, la proximité de SNCF Mobilités et de SNCF Réseau permettra notamment de ne pas déconnecter les missions de gestion de l’infrastructure de celles d’exploitation des services de transport. La constitution du groupe public ferroviaire obéit à une logique de performance industrielle du secteur ferroviaire, qui nécessite une coopération étroite et fluide des deux opérateurs publics, SNCF Réseau et SNCF Mobilités, au bénéfice de l’ensemble des parties prenantes.
Impacts économiques, financiers, sociaux et budgétaires.
Voir les autres sections de l’étude d’impact.
La mise en œuvre d’une telle réforme suppose une période de transition suffisamment étendue pour :
- permettre aux établissements de préfigurer l’organisation future de SNCF Mobilités en parallèle de celle de SNCF Réseau et de l’établissement mère, afin que le groupe public ferroviaire soit pleinement opérationnel dès sa constitution ; cette préfiguration a commencé dès le premier semestre de l’année 2013 ;
- permettre la définition et l’adoption des nombreux textes d’application nécessaires.
A cette fin, la constitution effective de SNCF Mobilités prendra effet au 1er janvier 2015.
En dépit d’incontestables avancées, notamment l’identification d’un gestionnaire d’infrastructure à part entière, la réforme réalisée en 1997 a largement laissé de côté la question du diagnostic et de la redéfinition du modèle économique du secteur ferroviaire. Elle n’a pas résolu, en particulier, les contradictions entretenues entre les objectifs fixés et les moyens donnés au système ferroviaire par l’Etat, notamment en raison de l’orientation des financements vers les projets de développement des lignes à grande vitesse (LGV) au détriment de l’entretien et de la rénovation du réseau existant.
L’impression a ainsi pu être donnée en 1997 qu’avait été opérée une vraie réforme structurelle alors que la trajectoire financière du système ferroviaire n’a cessé de se dégrader par la suite.
La croissance soutenue du transport ferroviaire tout au long de la dernière décennie a retardé, il est vrai, la prise de conscience : la forte augmentation des trafics TGV, rentables pour la majeure partie d’entre eux, et le dynamisme affiché par les régions à la suite de la décentralisation des transports régionaux de voyageurs ont pu occulter, un certain temps, la fragilité des équilibres financiers.
Commandé conjointement par RFF et la SNCF et publié en 2005, l’audit sur l’état du réseau ferré national, mieux connu sous le nom d’« audit Rivier », a constitué le premier signe d’alerte en attirant l’attention sur le vieillissement des infrastructures ferroviaires. La faiblesse des ressources allouées à l’entretien au cours des trois dernières décennies explique la vétusté actuelle du réseau et justifie la décision prise par le Gouvernement d’accroitre les efforts en faveur du réseau actuel
Par ailleurs, le secteur ferroviaire doit faire face à deux sujets de préoccupation pour l’avenir :
- le développement du réseau TGV prévu dans le Grenelle de l’environnement, et repris par la suite dans le projet de schéma national des infrastructures de transport (SNIT), qui fait peser une hypothèque financièrement lourde sur le système et sa capacité à assurer le maintien en état du réseau ;
- le modèle économique de l’offre de transport ferroviaire dans ses différents segments, avec des interrogations lourdes sur le ralentissement de la croissance des trafics TGV dans un contexte marqué par la contraction du budget des ménages, la poursuite du relèvement du niveau des péages, et des contraintes budgétaires qui pèsent de plus en plus sur la politique de transport des autorités organisatrices pour les trains d’équilibre du territoire et les services TER.
L’ensemble de ces déséquilibres se traduisait par une impasse financière évaluée, pour le seul déficit de financement de l’infrastructure, à 1 Md€ par an en 2010, malgré le versement de concours publics importants (2,2 Md€) et des recettes de péages en très forte progression (3,3 Md€). Plus globalement, le déséquilibre du secteur atteignait de l’ordre de 1,5 Md€ par an, en dehors de tout nouveau projet TGV, si l’on y ajoutait le coût des activités de transport aujourd’hui en perte dont, en particulier, le fret ferroviaire.
Des projections financières plus récentes confortent ce diagnostic en apportant un éclairage encore un peu plus préoccupant sur la trajectoire financière « au fil de l’eau » du secteur et ce, en dépit de la prise en compte d’un jeu d’hypothèses traduisant d’ores et déjà un certain nombre d’efforts jusqu’ici jamais vus par rapport aux tendances historiques (gains de productivité supérieurs sur la gestion de l’infrastructure, amélioration de la rentabilité du transporteur et taux de financement à des niveaux durablement bas notamment).
Les travaux menés aboutissent à une trajectoire financière qui fait apparaître une forte augmentation de l’endettement du système à 68 Md€ en 2025 (contre 41,5 Md€ en 2012), avec un rythme annuel de progression de la dette de 2,3 Md€ sur la gestion du réseau, en dehors même de tout nouveau grand projet si ce n’est les quatre LGV en cours de construction.
La dérive alarmante de la trajectoire financière du secteur ferroviaire rend impossible tout statu quo qui menacerait la viabilité même des acteurs du système :
- le gestionnaire du réseau, qui ne serait plus en mesure de faire face à ses engagements vis-à-vis des entreprises ferroviaires, faute d’un maintien en bon état de l’infrastructure ;
- les entreprises ferroviaires, qui, faute de visibilité sur l’évolution du secteur et, notamment, des péages, ne pourraient développer une stratégie de développement adaptée. La situation de celles-ci serait d’autant plus pénalisée que la Commission européenne, même si les négociations sont loin d’être achevées au niveau communautaire, souhaite l’achèvement de l’ouverture à la concurrence à compter de 2019 ;
- les industriels de la filière ferroviaire française, dont les commandes seraient compromises par l’absence de perspective des entreprises ferroviaires et/ou des autorités organisatrices de transport, avec des conséquences particulièrement défavorables sur l’emploi et la pérennité des sites de production.
Sans redressement de l’équilibre économique et financier du secteur ferroviaire, il ne saurait donc y avoir de réforme durable.
Pour viser le rétablissement des équilibres du système ferroviaire, deux options peuvent a priori être envisagées :
- la définition d’objectifs et leur déclinaison en plan d’actions dans le cadre de la gouvernance propre à chaque entité : les dirigeants des établissements publics seraient ainsi responsables d’objectifs, chacun pour ce qui le concerne, déterminés par leurs organes de gouvernance, sous le contrôle des pouvoirs publics ;
- la définition d’objectifs contractualisés entre les entreprises et l’Etat, dans le cadre de contrats pluriannuels qui engagent chacune des deux parties et selon des règles de niveau législatif ou réglementaire qui renforcent le contrôle de leur exécution.
La première option n’apporterait guère de différence par rapport à la situation existante, notamment par l’absence de garantie offerte sur les engagements des dirigeants et la rigidité du cadre édictant les objectifs.
Pour cette raison, il a été privilégié le principe d’une contractualisation à caractère glissant entre l’Etat et chacune des entités constituant le groupe ferroviaire, qui permette un diagnostic partagé au préalable ainsi que la fixation en commun d’objectifs dont la réalisation repose sur des engagements pris sur la durée par chacune des parties, tout en prévoyant des actualisations à intervalles réguliers, et qui associent, à la fois dans leur définition et leur mise en œuvre, des tiers objectifs extérieurs.
Le projet de loi prévoit ainsi le principe d’un contrat d’une durée de dix ans, réactualisé tous les trois ans, entre l’Etat et respectivement la SNCF (nouvel article L. 2102-3), SNCF Réseau (nouvel article L. 2111-10) et SNCF Mobilités (nouvel article L. 2141-3), avec pour ces deux derniers, la référence explicitement faite à la définition d’une trajectoire financière.
La réaffirmation du rôle de l’Etat dans la définition de la stratégie du secteur ferroviaire donne ainsi toute sa cohérence au dispositif contractuel mis en place avec les trois entités du groupe public, à travers la responsabilité qui lui est explicitement confiée de « veiller à la cohérence et au bon fonctionnement du système de transport ferroviaire national » et, en particulier, à « la cohérence de l’offre offerte aux voyageurs, la coordination des autorités organisatrices de transport ferroviaire et l’optimisation de la qualité de service délivrée aux usagers du système de transport ferroviaire national » (nouvel article L. 2100-2).
Dans ce dispositif, le contrat passé avec SNCF Réseau occupe une place de première importance. Prévu par la directive 2012/34 comme un des instruments principaux de la régulation économique du gestionnaire d’infrastructure et devant notamment décrire à ce titre les mécanismes d’incitation à la réduction des coûts et des redevances mis en place, ce contrat qui viendra à la suite du contrat de performance de RFF sera le principal outil de pilotage du redressement de la trajectoire économique du gestionnaire d’infrastructure.
En premier lieu, le contrat fixe les objectifs de performance du réseau, assortis d’objectifs de qualité et de sécurité, dans le respect des grandes orientations définies par l’Etat relatives à la politique de gestion du réseau et à sa stratégie de développement.
En second lieu, le contrat définit la trajectoire financière de SNCF Réseau en précisant, de manière détaillée, les concours publics alloués à ses différentes missions, la chronique d’évolution maximale des redevances d’infrastructure, dans un souci de visibilité pour l’ensemble des acteurs du secteur, et l’évolution des dépenses de gestion de l’infrastructure. Sont également assortis, en synthèse, des objectifs sur la chronique de taux de couverture du coût complet à atteindre annuellement ainsi que sur le rapport plafond entre la dette nette de SNCF Réseau et sa marge opérationnelle.
L’ensemble des éléments figurant dans ce contrat est la traduction des moyens mis en œuvre en regard de l’objectif d’« une utilisation optimale du réseau, dans un objectif de qualité de service et de maîtrise des coûts » qu’assigne explicitement à SNCF Réseau le nouvel article L. 2111-9.
L’identification dans le contrat de mesures destinées à corriger d’éventuels écarts à la trajectoire financière figure parmi les novations introduites par le projet de loi pour conforter la réalisation des objectifs définis dans le contrat. De la même façon, il est prévu que le contrat prévoie des modalités de renégociation lorsque des circonstances exceptionnelles ont une incidence sur la disponibilité des financements publics ou sur la trajectoire financière de SNCF Réseau.
Pour renforcer la portée du contrat, le projet de contrat et ses actualisations sont soumis à l’avis de l’ARAF. Il est prévu que cet avis soit rendu public pour assurer la meilleure prise en compte des observations susceptibles d’être faites, sans pour autant en faire un facteur de blocage qui s’avèrerait inutilement pénalisant.
Pour prévenir autant que possible de futurs contentieux, qui iraient à l’encontre de la recherche de la plus grande visibilité souhaitée par les entreprises ferroviaires, l’avis simple demandé à l’ARAF porte, en particulier, sur le niveau et la soutenabilité de l’évolution des péages de l’infrastructure. L’ARAF est également appelée à se prononcer, compte tenu de son objectivité et de son expertise du secteur, sur la cohérence de la trajectoire financière de SNCF Réseau au regard des objectifs de performance et de qualité fixés dans le contrat ainsi qu’au regard de l’objectif d’équilibre économique et financier de SNCF Réseau.
Dans le prolongement de sa consultation préalablement à l’adoption du contrat, le régulateur se voit confier le soin d’émettre un avis motivé sur le projet de budget de SNCF Réseau avant son examen par le conseil d’administration et, à cette occasion, de se prononcer sur le respect de la trajectoire financière définie par le contrat conclu avec l’Etat. En cas d’écart, l’ARAF peut ainsi recommander la mise en œuvre des mesures correctives prévues par le contrat (nouvel article L. 2133-5-1).
Par exception à la logique contractuelle du nouveau dispositif, le projet de loi prévoit de renforcer l’encadrement de la contribution de SNCF Réseau, sur ses fonds propres, au financement de projets de développement portés par des collectivités publiques, en posant le principe de la fixation par décret de ratios à respecter..
En cas de dépassement d’un de ces ratios, le projet d’investissement devrait faire l’objet d’un financement exclusivement à la charge des collectivités publiques qui en sont à l’initiative, c’est-à-dire sans concours financier de SNCF Réseau. Dans le cas contraire, il est conservé le principe d’une participation possible de SNCF Réseau déterminée de telle manière à ce que les concours versés par les autres cofinanceurs permettent qu’il n’y ait aucune conséquence négative sur les comptes de SNCF Réseau au terme de la période d’investissements.
Le projet de loi apporte une autre différence par rapport à la situation actuelle, en prévoyant un avis du régulateur sur l’évaluation du montant des financements publics nécessaires à la couverture du coût de l’investissement projeté et, si les ratios évoqués ci-dessus sont respectés, de celui de la participation de SNCF Réseau, pour garantir le bien-fondé des calculs auprès de toutes les parties (nouvel article L. 2133-8-1).
L’ensemble des mesures proposées dans le projet de loi pour améliorer la gouvernance économique et financière du secteur doit créer les bases d’un retour à l’équilibre à un horizon de dix ans. C’est à cette échéance qu’est en particulier visé l’objectif d’une couverture du coût complet du réseau dans le contrat prévu entre l’Etat et SNCF Réseau (nouvel article L. 2111-10), gage de la fin d’un recours sans fin à l’emprunt pour maintenir en état l’infrastructure ferroviaire et, donc, d’une stabilisation de la dette ferroviaire.
Compte tenu de la nature contractuelle des engagements qui doivent être conclus entre la puissance publique et chacune des trois entités du futur groupe ferroviaire, il ne peut être donné, à ce stade, d’indication précise sur le contenu des actions qui seront mises en œuvre pour réaliser l’objectif de redressement économique et financier du système. Pour autant, certaines décisions récentes prises par le gouvernement et des déclarations publiques faites par les dirigeants de RFF et de la SNCF peuvent apporter un premier éclairage sur les moyens pour y parvenir.
L’unification du gestionnaire d’infrastructure, au cœur des annonces qui ont été faites dans le cadre de la réforme, contribuera à améliorer la trajectoire financière du secteur, grâce à la réduction des doublons, aux synergies qui peuvent être réalisées sur la fonction achat ainsi qu’à des efforts de productivité plus importants que par le passé.
Les économies envisageables avec la création de SNCF Réseau vont de pair avec les améliorations attendues de la clarification que le gouvernement vient d’apporter sur les priorités d’investissement à l’horizon 2030 et, en particulier, de la réorientation de l’effort sur la rénovation du réseau existant. Une enveloppe moyenne de 2,5 Md€ par an doit ainsi être consacrée, sur la durée, à la mise en œuvre d’une stratégie de modernisation du réseau, déclinée dans les territoires en lien avec les collectivités et articulée autour des objectifs de sécurité, de pérennité, de capacité et de régularité. Au-delà des progrès qui en résulteront sur la qualité du service, les économies qui seront dégagées sur la baisse des besoins en réparation et l’amélioration de la disponibilité du réseau contribueront également à une performance accrue de l’infrastructure.
Une autre source importante d’économies porte sur l’amélioration de l’efficience des organisations. Outre les gains déjà évoqués avec l’unification du gestionnaire de l’infrastructure, la constitution d’un groupe ferroviaire intégré, sous les réserves des exigences attachées à l’exercice des fonctions essentielles, est porteuse de synergies, d’une part à travers la responsabilité expressément confiée à la SNCF du contrôle et du pilotage stratégiques et de la cohérence économique du groupe, d’autre part grâce à la mutualisation de fonctions au bénéfice de l’ensemble du groupe.
La négociation collective à conduire en vue de définir un cadre social applicable à l’ensemble de la branche ferroviaire doit également offrir l’occasion d’une réflexion partagée sur l’amélioration de l’organisation du travail, sans remise en cause de l’exigence d’un haut niveau de sécurité qui doit être garanti aux agents et aux usagers.
La démarche d’amélioration de la trajectoire financière ne peut cependant exclusivement porter sur l’effort propre au futur groupe ferroviaire. Les collectivités publiques ont notamment tout leur rôle à jouer, en tant qu’autorités organisatrices de transport, pour améliorer la pertinence et la cohérence de l’offre ferroviaire qu’elles organisent aujourd’hui de manière insuffisamment coordonnée. Des outils, comme le schéma régional de l’intermodalité prévu dans le projet de loi de décentralisation en cours d’examen au Parlement, peuvent y concourir. Ils n’excluent toutefois pas un dialogue au niveau national, complémentaire, pour mieux coordonner les services TGV, TET et TER.
Au total, le redressement du secteur ferroviaire repose donc sur des efforts partagés par l’ensemble des acteurs, entreprises, usagers et collectivités publiques. L’ensemble des parties prenantes du système ferroviaire, y compris l’Etat, sera appelé à contribuer à ce redressement qui est nécessaire à la pérennisation du nouveau modèle ferroviaire français.
Dans ce cadre, l’effort de l’Etat se matérialise par l’affectation d’une partie des résultats de SNCF Mobilités et de ses filiales au profit du redressement du gestionnaire d’infrastructure. Ainsi les dispositions introduites aux articles L.2102-16, L. 2102-17 et L. 2111-24 permettront le reversement de la SNCF à SNCF Réseau, sous forme de dotation, de dividendes que lui versera SNCF Mobilités. De même, une loi de finances permettra à la SNCF d’intégrer fiscalement les résultats de SNCF Mobilités et de SNCF Réseau, tirant les conséquences des liens économiques existant au sein du groupe, et permettant ainsi d’augmenter ainsi les capacités du groupe à réinvestir une partie du résultat de SNCF Mobilités.
Les contrats à conclure entre l’Etat et SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités devront faire l’objet de négociations avec les futures entités du groupe ferroviaire créées par la loi, puis être soumises à la consultation des organismes éventuellement prévue avant d’être formellement adoptés.
Des travaux préparatoires seront menés avec les entreprises pour anticiper autant que possible les échéances et permettre la conclusion des contrats dans les délais les plus brefs après la constitution juridique du groupe.
L’ARAF, dont les règles constitutives, une bonne partie des attributions et les moyens d’action sont fixées au titre III du livre Ier de la deuxième partie du code des transports, est une autorité publique indépendante qui concourt au bon fonctionnement du service public et des activités concurrentielles de transport ferroviaire et qui est chargée de veiller à ce que les conditions d’accès au réseau ferroviaire par les entreprises ferroviaires n’entravent pas le développement de la concurrence. L’ARAF constitue l’organisme de contrôle prévu par l’article 30 de la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2001 concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire.
Les modifications proposées ont pour objet de faire évoluer les compétences, les moyens d’actions et les garanties d’indépendance de l’ARAF, selon deux orientations principales.
En premier lieu, les modifications proposées visent à conforter le rôle de l’ARAF en matière de contrôle de l’accès non discriminatoire au réseau.
Les trois paquets ferroviaires ont progressivement libéralisé les services de transport ferroviaire en Europe (à l’exception, à ce jour, des services intérieurs de voyageurs, pour lesquels les États membres demeurent libres de maintenir les monopoles des opérateurs historiques) et renforcé l’obligation de séparation de la gestion de l’infrastructure ferroviaire et de l’exploitation des services de transport ferroviaire, afin d’assurer une concurrence équitable entre les entreprises ferroviaires et leur accès non discriminatoire au réseau ferroviaire.
Dans ces conditions, le rapprochement, dans le cadre de la constitution du groupe public ferroviaire, entre les activités de gestion de l’infrastructure, relevant de SNCF Réseau, et les activités de transport ferroviaire, relevant de SNCF Mobilités, doit s’effectuer dans le respect des règles communautaires, et notamment du principe d’indépendance juridique, organisationnelle et décisionnelle des fonctions essentielles (répartition des capacités et tarification) défini à l’article 6 de la directive 91/440/CEE du Conseil du 29 juillet 1991 relative au développement de chemins de fer communautaires et aux articles 4 et 14 de la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2001 concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire.
L’indépendance juridique des fonctions essentielles est assurée par l’unification des fonctions de la gestion de l’infrastructure du réseau ferré national au sein de SNCF Réseau, doté de la personnalité morale en tant qu’EPIC, qui regroupe en une entité unique RFF, la SNCF Infra et la DCF, cette direction étant notamment chargée de l’allocation des sillons, comme l’explicite la partie 3 « création du groupe public ferroviaire ».
Cette mesure est en tout état de cause nécessaire pour permettre à la France de se conformer à l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 18 avril 2013, rendu dans l'affaire C-625/10 et relatif au manquement aux obligations qui incombent à la République Française en vertu de la directive 91/440/CEE telle que modifiée par la directive 2001/12/CE, et de la directive 2001/14/CE.
C’est vis-à-vis de SNCF Mobilités et de la SNCF, en ce que cette dernière est dotée, à l’égard de SNCF Mobilités, d’attributions apparentées à celles d’une société détentrice, que l’indépendance organisationnelle et décisionnelle des fonctions exercées par SNCF Réseau doit être garantie. À cet effet, des règles d’impartialité de SNCF Réseau sont introduites et d’autres mesures destinées à renforcer les conditions d’un accès non discriminatoire au réseau sont prévues par le projet de loi (Haut comité du ferroviaire, règles d’impartialité prévues pour l’ensemble des gestionnaires d’infrastructure).
L’ARAF, du fait de ses attributions en matière de contrôle de l’accès non discriminatoire au réseau et de son indépendance, se doit de jouer un rôle central dans la mise en œuvre et le contrôle des règles d’impartialité de SNCF Réseau et des autres mesures prévues.
En deuxième lieu, les modifications proposées visent à confier à l’ARAF un rôle nouveau en matière de rétablissement des équilibres financiers du système de transport ferroviaire national.
La connaissance du système de transport ferroviaire national dont elle dispose, sa compétence économique et financière et son indépendance font de l’ARAF l’acteur le plus à même de concourir au rétablissement progressif des équilibres économiques du système de transport ferroviaire national, s’agissant tant des mesures destinées à améliorer sa performance économique que des mesures visant à maîtriser son endettement, présentées en partie V « rétablissement des équilibres économiques et financiers ».
Enfin, le projet de loi ferroviaire vise à mettre en conformité l’organisation de l’ARAF par rapport aux exigences issues du principe de séparation des fonctions d’instruction et de sanction. Il est institué, au sein de l’Autorité, un rapporteur chargé des fonctions de poursuite et d’instruction, le jugement et la sanction relevant de la compétence du collège de l’Autorité. Il sera amené à décider en toute indépendance si les faits dont il a connaissance justifient de saisir le collège de l’ARAF. Il est nommé par le ministre chargé des transports, après avis de l’ARAF, pour une durée quatre ans renouvelable une fois.
Les modifications proposées visent, d’une part, à conforter le rôle de l’ARAF en matière de contrôle de l’accès non discriminatoire au réseau et, d’autre part, à lui confier un rôle nouveau en matière de rétablissement des équilibres financiers du système de transport ferroviaire national. Ces objectifs reposent sur des évolutions portant sur les compétences de l’ARAF, sur ses garanties d’indépendance et sur ses moyens d’action.
À cet effet, le projet de loi reprend et complète plusieurs des exigences de la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen (refonte), la directive de refonte du premier paquet ferroviaire, dont il transpose plusieurs dispositions relatives à l’organisme de contrôle.
Premièrement, les modifications proposées vont dans le sens d’une extension et d’une clarification des compétences de l’ARAF.
Ainsi, l’ARAF se voit reconnaître des compétences supplémentaires relatives :
- aux règles d’impartialité de SNCF Réseau (article L. 2111-16 modifié et nouveaux articles L. 2111-16-1 à L. 2111-16-4), avec l’examen de l’indépendance du président de SNCF Réseau (examinée à l’occasion de sa nomination, de sa reconduction ou de sa révocation) et des mesures d’organisation interne de SNCF Réseau ;
- à l’accès au réseau : l’ARAF procèdera à la vérification de l’absence de clauses discriminatoires dans le document de référence du réseau (article L. 2131-4 modifié). Elle rendra un avis simple sur les projets de modification des modalités de fixation des redevances pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire (article L. 2133-5 modifié), en veillant à leur soutenabilité pour les opérateurs de transports ;
- au suivi du système de transport ferroviaire national, notamment s’agissant de ses enjeux financiers, de l’objectif d’équilibre économique et financier de SNCF Réseau présenté à la partie V « rétablissement des équilibres économiques et financiers ». Cette nouvelle compétence implique notamment de préciser en conséquence la qualité des membres du collège de l’ARAF et leurs conditions de nomination (article L. 2132-7 modifié), de permettre au Gouvernement de faire connaître à l’ARAF ses analyses en ce qui concerne les enjeux et les contraintes du système de transport ferroviaire national (nouvel article L. 2132-8-1) et de soumettre à l’examen de l’ARAF, sous forme d’avis simple, le projet de contrat entre l’État et SNCF Réseau (article L. 2111-10 modifié), le montant des concours publics devant être apportés à SNCF Réseau pour les projets d’investissement (nouvel article L. 2133-8-1) et le projet de budget de SNCF Réseau (nouvel article L. 2133-5-1).
Afin de clarifier les compétences de l’ARAF et les responsabilités des acteurs du système de transport ferroviaire national, notamment celles de SNCF Réseau vis-à-vis des engagements contractuels qu’il aura souscrits auprès de l’Etat, , il convient d’éviter que l’ARAF ne se trouve, au travers d’avis conformes sur la tarification du réseau en position de codécision. En revanche, les attributions de l’ARAF en matière de contrôle et de sanction des décisions ou des comportements qui contreviendraient aux exigences de non-discrimination sont consacrées et son avis préalable sera étendu aux décisions affectant la situation économique et financière du gestionnaire du réseau ferré national.
Ensuite, les modifications proposées conduisent à accroître l’indépendance et les capacités d’intervention de l’ARAF, avec l’exercice à temps plein des fonctions de membre du collège de l’ARAF, le renforcement du régime des incompatibilités applicable aux membres de l’ARAF et la définition d’une période d’attente pour ses membres (article L. 2132-8 modifié).
Enfin, les modifications proposées dotent l’ARAF de moyens d’action supplémentaires, notamment en matière d’accès aux informations comptables (article L. 2133-4 modifié).
Du fait des modifications de l’organisation du système ferroviaire et de l’extension des compétences de l’ARAF, son collège, qui sera réduit à cinq membres du fait du passage à l’exercice à temps plein des fonctions de ses membres, devra rassembler des experts de différentes spécialités : il sera désormais composé de personnalités choisies en raison de leur compétence juridique, de leur compétence économique, financière ou comptable, et de leur compétence technique dans le domaine ferroviaire ou de leur expertise en matière de concurrence, notamment dans le domaine des industries de réseau.
L’option retenue, pour les modifications proposées, consiste à modifier le titre III du livre Ier de la deuxième partie du code des transports, ainsi que quelques-uns des articles des titres préliminaire et Ier de ce même livre, non seulement pour conforter le rôle de l’ARAF en matière de contrôle de l’accès non discriminatoire au réseau, mais aussi pour lui confier un rôle nouveau en matière de rétablissement des équilibres financiers du système de transport ferroviaire national.
D’autres options envisagées ont dû être écartées. Ces options concernent, d’une part, le recours au pouvoir règlementaire et, d’autre part, le périmètre des compétences de l’ARAF.
Tout d’abord, le recours au pouvoir règlementaire ne peut être envisagé qu’à la marge étant donné que l’essentiel des dispositions applicables à l’ARAF est de niveau législatif. Figure cependant, parmi les modifications proposées, l’abrogation des dispositions relevant de l’article 37 de la Constitution, relatives au contenu du rapport annuel d’activité prévu à l’article L. 2131-2 du code des transports. Celui-ci pourra en effet être repris et complété par le pouvoir règlementaire.
Par ailleurs, pour ce qui est du périmètre des compétences à confier à l’ARAF, les spécificités du secteur ferroviaire ne permettent pas d’envisager d’attribuer à l’ARAF des compétences dont disposent les organismes de contrôle d’autres industries de réseau, notamment en matière de fixation des tarifs.
En effet, la situation financière du service public ferroviaire, structurellement déficitaire, repose sur un effort financier très important des collectivités publiques (État et régions), qu’il s’agisse de la gestion de l’infrastructure ou de celle des services de transport. L’importance des enjeux économiques et sociaux du système de transport ferroviaire national, en termes de développement économique, d’équité sociale et de solidarité territoriale, d’aménagement et de développement durables exige de conserver à la puissance publique un rôle central dans la décision et la fixation des règles du jeu relatives à l’organisation, au fonctionnement et au financement du système ferroviaire.
Dans ces conditions, le renforcement des compétences de l’ARAF ne doit être entrepris ni au détriment des compétences de SNCF Réseau, à qui il revient, en application de l’article 4 de la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2001 concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire, de déterminer les redevances pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire dans le cadre et selon les règles spécifiques de tarification définies par l’État, ni des compétences de l’État, notamment s’agissant de la définition de la trajectoire financière du secteur ferroviaire.
Pour sa part, l’ARAF doit avant tout s’attacher à contrôler et sanctionner le respect par les acteurs des règles en faveur d’une concurrence transparente, équitable et non discriminatoire.
S’agissant du rôle en matière de rétablissement des équilibres financiers du système de transport ferroviaire national, le recours à d’autres entités que l’ARAF, dotées de compétences économiques ou financières, aurait pu être envisagé. Néanmoins, cette option aurait privé les acteurs du secteur ferroviaire des connaissances techniques, économiques et comptables du système de transport ferroviaire national que développe l’ARAF peu à peu. De plus, confier une mission en matière financière à cette autorité, relativement jeune, ne peut que la conduire à élargir son approche, sa vision et sa connaissance du secteur ferroviaire, indispensables pour organiser une régulation efficace et juste du système de transport ferroviaire national.
Les impacts attendus des modifications proposées en matière d’évolution des compétences, des moyens d’actions et des garanties d’indépendance de l’ARAF sont de natures différentes.
Les impacts attendus sont d’abord de nature financière et budgétaire.
D’un côté, les modifications proposées font partie d’un ensemble de mesures destinées à rétablir l’équilibre financier du système de transport ferroviaire national, comme explicité à la partie V « rétablissement des équilibres économiques et financiers ».
De l’autre, les modifications proposées devraient entraîner une augmentation non négligeable de l’activité, et donc des dépenses, de l’ARAF. Le coût de la mesure relative à l’exercice à plein temps des fonctions des membres du collège autres que le président, bien que relativement limité grâce au resserrement de la composition du collège, serait d’environ 1 million d’euros par an. Ces impacts négatifs ne sont toutefois pas à la hauteur des bénéfices attendus en matière de rétablissement de l’équilibre financier du système de transport ferroviaire. De surcroît, l’ARAF dispose de ressources propres, issues du droit fixe dû par les entreprises ferroviaires qui utilisent le réseau ferré national prévu à l’article L. 2132-13 du code des transports. Ce droit, qui contribue à garantir l’indépendance de l’ARAF, permet aussi d’éviter de faire peser l’activité de l’ARAF sur le budget de l’État.
Les impacts attendus sont aussi de nature économique, sociale et, dans une moindre mesure, environnementale. En effet, les modifications proposées, en améliorant les conditions de régulation du secteur ferroviaire, concourent au bon fonctionnement du système de transport ferroviaire national, au bénéfice des usagers et utilisateurs des services de transport de voyageurs et de marchandises, de même qu’à l’accroissement des trafics ferroviaires, favorisant ainsi le report modal.
Sur un plan juridique, les modifications proposées contribuent à réduire un risque contentieux en transposant, par anticipation, plusieurs dispositions de la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen (refonte).
Pour finir, seront au premier chef concernés par les modifications proposées les acteurs du groupe public, notamment la SNCF, SNCF Mobilités et SNCF Réseau. Bien que le projet de loi propose un ensemble cohérent de mesures permettant d’accompagner la création du groupe public ferroviaire de la garantie d’un accès non discriminatoire au réseau, les trois EPIC seront, en tout état de cause, comptables de leurs pratiques et comportements devant l’ARAF. Les membres du collège et les services de l’ARAF font également partie des personnes directement concernées par les mesures proposées. Ils devront poursuivre, dans de nouveaux domaines, les efforts entrepris depuis la récente création de l’ARAF pour bâtir une expertise et faire reconnaître la légitimité de l’autorité.
Afin de garantir son indépendance, les textes régissant l’ARAF sont très peu prescriptifs et la laissent libre de son organisation pour assurer les missions qui lui sont confiées, comme l’illustrent, par exemple, l’article L. 2132-2 du code des transports relatif à son règlement intérieur ou l’article L.2132-12 relatif à son autonomie financière, de sorte qu’il appartiendra à l’ARAF seule de définir les moyens et l’organisation à mettre en œuvre pour assurer les nouvelles compétences qui lui sont confiées.
Le suivi de la mise en œuvre par l’ARAF de ses nouvelles compétences est largement facilité par le rapport d’activité annuel de l’ARAF, prévu à l’article L. 2131-2 du code des transports, qui est adressé au Parlement et rendu public, comme c’est le cas pour une part importante de la production de l’ARAF.
La nouvelle organisation du secteur ferroviaire ne peut réussir durablement que si elle s'accompagne de mesures ambitieuses sur le plan social.
Le projet de loi garantit l'unité sociale au sein du groupe public ferroviaire en adaptant les dispositions législatives en vigueur pour tenir compte de la création du groupe public ferroviaire (VII.1).
Pour l'ensemble de la filière, il crée le cadre juridique permettant l'adoption d'une convention collective structurant les relations entre partenaires sociaux (VII.2).
Dans le même esprit, il pose les fondements d'un régime du travail garantissant la sécurité des personnes et la continuité du service, applicable aux salariés relevant de la future convention collective (VII.3).
Le volet organisationnel de la réforme ferroviaire doit être complété par un volet social afin d'assurer la cohérence sociale du groupe. Or les dispositions législatives actuelles sont inadaptées au déploiement de la nouvelle organisation.
La réglementation sociale des transports, prévue au livre III de la première partie du code des transports, doit être modifiée afin de pouvoir s'appliquer à l'ensemble des entreprises intervenant dans le champ du transport ferroviaire. En effet, ce livre s'applique aujourd'hui de façon inégale aux entreprises intervenant dans le champ du transport ferroviaire et exclut pour partie la SNCF.
De même, un nouveau dispositif doit se substituer à l'actuel article L. 2141-9 du code des transports relatif à l'adaptation des règles du code du travail en matière d'institutions représentatives du personnel, qui ne s'applique qu'à la SNCF et à ses filiales.
Enfin, les contrats de travail des personnels actuellement employés par la SNCF et RFF devront se poursuivre avec les nouveaux employeurs que seront les trois établissements publics prévus par la loi. Cela nécessitera notamment d'étendre aux trois établissements la possibilité d'employer du personnel sous statut. Actuellement, l'effectif d'agents sous statut à la SNCF est légèrement inférieur à 150 000. Les salariés non statutaires de la SNCF représentent quant à eux environ 10 000 agents. Les salariés de RFF, non soumis à un statut, sont au nombre de 1400.
Pour tirer les conséquences de la mise en place du groupe public ferroviaire, la réforme ferroviaire doit permettre d’atteindre les objectifs suivants :
- harmoniser l'application de la « réglementation sociale du transport » (articles L. 1311-1 et suivants du code des transports) au sein du groupe public ferroviaire (nouveaux articles L. 2102-18 et L. 2111-26) ;
- confirmer l'application des dispositions du code du travail pour les institutions représentatives du personnel, à la seule réserve du positionnement du comité de groupe et du comité d'entreprise européen au niveau de l’établissement mère SNCF (nouveaux articles L. 2101-4 et L. 2101-5) ;
- assurer le transfert des contrats de travail des salariés ainsi que la continuité de leur contrat de travail ; les contrats de travail d’environ 50 000 salariés de la DCF et de SNCF infra seront transférés à SNCF Réseau, et quelques milliers de la SNCF et de RFF seront transférés à l’établissement « mère » SNCF (article 11 du projet de loi) ;
Les mesures envisagées sont de nature législative dès lors qu'elles touchent aux principes fondamentaux du droit du travail et du droit syndical, et qu'elles conduisent à adapter des dispositions codifiées dans la partie législative du code des transports. Il n’est pas possible d’envisager de variante pour atteindre les objectifs poursuivis.
Impacts économiques, financiers, sociaux et environnementaux
L'application homogène de la réglementation sociale du transport permet d'unifier les règles applicables au sein du groupe public ferroviaire, s'agissant notamment des dispositions législatives relatives à la durée du travail et celles relatives au dialogue social.
Impact sur les personnes physiques et morales
Tous les salariés bénéficieront des règles sociales prévues par le code des transports.
Le positionnement du comité de groupe et du comité d'entreprise européen est justifié par le lien spécifique existant entre les EPIC, et ne remet pas en cause le droit constitutionnel des salariés à participer, par leurs délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises.
Les situations contractuelles des salariés en place seront préservées à l'identique.
Les dispositions relatives à l'emploi de salariés sous statut prennent en compte la création du groupe public mais ne modifient pas les équilibres existants. Il n'y a pas d'incidence sur le régime spécial de retraite et le régime spécial de prévoyance gérés par la caisse de retraite et de prévoyance de la SNCF ni sur le déroulement de carrière et la garantie de l'emploi des cheminots.
Des décrets en Conseil d'Etat sont prévus pour fixer les modalités d'élaboration du statut et pour fixer les mesures d'adaptation du comité de groupe.
Des négociations ont été engagées dès 2006 par les partenaires sociaux des entreprises ferroviaires de transport de marchandises, hors la SNCF. La signature d’une convention collective n’a pas abouti.
Dans le contexte de la mise en place du groupe public ferroviaire, les conditions sont réunies pour que ce projet soit relancé et élargi à l'ensemble des acteurs.
En principe, c'est la convention collective qui fixe son champ d'application professionnel (article L.2222-1 du code du travail). La convention collective est négociée au sein d'une commission paritaire réunissant les partenaires sociaux. La convention collective doit être négociée par des organisations syndicales de salariés représentatives dans son champ. Or avant la constitution de la branche et la détermination de son champ d’application, il n’est pas possible d’apprécier l’audience des organisations syndicales qui permettrait de définir leur représentativité, ni la liste des organisations syndicales qui seront légitimes à signer la convention collective.
Dans ces conditions, la volonté du Gouvernement d'associer pleinement les partenaires sociaux du secteur ferroviaire aux discussions et négociations sur la convention collective nécessite la mise en place d'un cadre spécifique.
Il s’agit de s'assurer que toutes les parties prenantes, issues tant de l'opérateur historique que des entreprises privées de transport ferroviaire ou de gestion, d'exploitation ou de maintenance sous exploitation des lignes et installations fixes d'infrastructures ferroviaires, participeront à la négociation ; une fois cette négociation terminée, la représentativité pourra être déterminée à partir, notamment, de la mesure de l'audience afin de s'assurer de la validité de la convention collective conformément aux dispositions de l'article L.2232-6 du code du travail.
Le projet de loi fixe le périmètre de la future convention collective du secteur ferroviaire (nouveaux articles L. 2162-1 et 2). L’ensemble des entreprises dont l’activité principale est une activité de transport de marchandises et de voyageurs, d’infrastructure, de maintenance est dans le champ ; en outre, le volet de la convention relatif à la durée du travail s’appliquera également aux salariés affectés à ces activités, quelle que soit l’activité principale de leur entreprise. Ces dispositions permettront la mise en place d'un cadre social homogène en matière de durée du travail applicable à l’ensemble des salariés exerçant une même activité, de nature ferroviaire (cf. ci-après, point VII.3). Le nombre de salariés dans le champ de la future convention collective ferroviaire peut être estimé à 190 000.
Le droit commun ne prévoyant pas de disposition assurant la détermination des organisations amenées à participer aux négociations de mise en place d'une convention collective, une intervention législative est nécessaire (article 15 du projet de loi).
Une possibilité aurait été, en appliquant le code du travail, de laisser les partenaires sociaux s’organiser pour négocier et définir le champ d'application de leurs accords. Cependant, la seule application du code du travail ne permettait pas de garantir la participation de l'ensemble des parties prenantes à la négociation de la convention collective, alors qu'à l'inverse, la participation la plus large des organisations représentatives des salariés est gage d'une plus grande acceptabilité sociale.
Impact sur les personnes physiques et morales
Seules les entreprises et les organisations syndicales de ces dernières sont concernées par ces dispositions.
La procédure d’extension de la convention ou de l'accord nécessitera un arrêté ministériel après avis de la commission nationale de la négociation collective.
7.3. Adoption, pour des raisons de sécurité et de continuité de service, d'une réglementation de la durée du travail commune au sein de la branche
La réglementation sur la durée du travail actuellement applicable aux entreprises de transport ferroviaire notamment est éclatée entre deux textes, l'un applicable uniquement à l'opérateur historique, l'autre applicable à toutes les autres entreprises de transport ferroviaire de marchandises. Pour les salariés de la SNCF, les règles relatives à la durée du travail sont fixées par le décret n°99-1161 du 29 décembre 1999 relatif à la durée du travail du personnel de la Société nationale des chemins de fer français, pris sur le fondement de l'acte dit loi du 3 octobre 1940. Pour les salariés des autres entreprises ferroviaires intervenant dans le secteur du transport de marchandises, les règles de la durée du travail procèdent du décret n°2010-404 du 27 avril 2010 relatif au régime de la durée du travail du personnel de certaines entreprises de transport ferroviaire.
Par ailleurs, pour les entreprises publiques, les EPIC et certains autres établissements publics, le code du travail (art. L. 2233-1 et suivants) ne permet pas à une convention collective de compléter les dispositions applicables aux catégories de personnel « soumises à un statut particulier ». C'est le cas aujourd'hui de la majeure partie du personnel de la SNCF.
Enfin, le code des transports autorise sous certaines conditions à déroger par voie conventionnelle aux dispositions réglementaires relatives à la durée du travail.
Il est souhaitable que la branche ferroviaire dispose, afin d'écarter tout risque de moins disant social, d'un régime homogène de durée et d'organisation du travail applicable à toutes les entreprises, y compris le groupe public ferroviaire.
Ce régime doit laisser aux partenaires sociaux la possibilité de fixer eux-mêmes les règles de durée du travail qu'ils estimeront adaptées, au-delà d'un socle réglementaire, tant au niveau de la branche qu'au niveau des entreprises.
Il convient pour cela que le pouvoir réglementaire n’intervienne que pour fixer les règles indispensables permettant de garantir la sécurité des travailleurs et la continuité de service. Il convient aussi de s'assurer, compte tenu de leur nature de ces dispositions, qu'il ne sera pas possible d'y déroger dans un sens moins favorable aux salariés.
Les partenaires sociaux pourront alors, dans le cadre de la négociation collective, compléter et adapter ces dispositions. Dans la même logique que pour les dispositions réglementaires, il convient, afin de disposer d'un cadre homogène et protecteur des salariés de toutes les entreprises, de s'assurer que les accords d'entreprise ne peuvent pas déroger à l'accord de branche.
Le dispositif ainsi proposé a pour ambition de mettre en place un socle protecteur pour les salariés, à charge pour les partenaires sociaux de le développer et de l'enrichir au regard des spécificités de la branche ferroviaire.
Les mesures envisagées sont de nature législative dès lors qu’elles conduisent, d’une part, à adapter plusieurs dispositions législatives du code du travail et du code des transports et, d’autre part, en tant qu’elles touchent aux principes fondamentaux du droit du travail.
L'option consistant à appliquer en l'état les règles du code des transports, donc en conservant la possibilité de déroger par voie conventionnelle aux dispositions réglementaires relatives à la durée du travail, a été écartée dès lors qu'elle ne permettait pas d'atteindre l'objectif d'un nouveau cadre social pour les salariés de la future branche.
La mise en place de dispositions réglementaires obligatoires en matière de durée du travail dans la future branche ferroviaire est limitée aux règles d’ordre public nécessaires pour des raisons attachées à la sécurité et à la continuité de service, de façon à ne pas priver les partenaires sociaux de la possibilité de fixer eux-mêmes les règles de durée du travail qu'ils estimeront adaptées, au-delà du socle réglementaire, tant au niveau de la branche qu'au niveau des entreprises.
La modification des articles L. 1321-1, L. 1321-3 et la création de l'article L. 1321-3-1 du code des transports tirent les conséquences de la négociation d'une convention collective de branche ainsi que de la mise en place du groupe public ferroviaire sur les règles de durée du travail. Par ces dispositions, l'ensemble des entreprises et établissements entrant dans le champ de la convention collective seront ainsi soumis un régime homogène, en matière de durée du travail notamment. Il ne sera pas possible à l'accord d'entreprise de déroger, dans un sens moins favorable aux salariés, à l'accord de branche, ni à l'accord de branche de déroger aux dispositions réglementaires. Cette mesure consacrant l’ordre public social devrait permettre d'écarter tout risque de dumping social.
La mise en place du groupe public ferroviaire, constitué des trois établissements publics, rendra sans objet le décret n°99-116 du 26 décembre 1999, qui au demeurant sera privé de base légale du fait de l'abrogation nécessaire de l'article 1er de l'acte dit loi du 3 octobre 1940. Or, même si le décret socle est publié avant la mise en place des EPIC, il est vraisemblable que la négociation de la convention collective et a fortiori celle d'accords d'entreprise -nécessaires au parachèvement du dispositif d'encadrement de la durée du travail - prendra encore quelques mois. C'est la raison pour laquelle un dispositif transitoire, comportant le maintien par la loi des règles du décret du 26 décembre 1999, a paru nécessaire (article 14 du projet de loi).
Un décret en Conseil d’Etat est prévu afin d'établir une réglementation de la durée du travail constituant un « socle » applicable à l’ensemble des salariés travaillant dans la branche ferroviaire, pour des raisons de sécurité et de continuité de service (nouvel article L. 2161-1).
En une quinzaine d’années, le paysage ferroviaire est passé d’une entité unique, gérant le fonctionnement du système dans sa totalité, à de nombreux acteurs indépendants qui, spontanément, n’ont aucune raison d’avoir des intérêts convergents. Pour autant, la nature systémique du ferroviaire impose de partager un certain nombre de méthodes, comportements et règles, sans forcément avoir les mêmes fins.
La réforme ferroviaire ayant pour ambition de jeter les bases d’une organisation durable et pérenne de l’ensemble du système ferroviaire, il s’agit de permettre à chaque acteur du système, et notamment au groupe public ferroviaire, de trouver la place qui est la sienne dans le cadre d’un fonctionnement multi-acteurs du secteur (gestionnaires d’infrastructure, entreprises ferroviaires, autorités organisatrices, voyageurs, chargeurs…). Dans la mesure où leur nombre est susceptible d’augmenter dans les prochaines années, la gouvernance sectorielle au-delà du seul groupe public doit être améliorée.
Il s’agit de :
- permettre d’associer pleinement toutes les parties prenantes aux réflexions sur l’organisation, le fonctionnement et l’évolution du système ferroviaire ;
- permettre au groupe public ferroviaire de jouer pleinement son rôle de groupe pivot, au service du système ferroviaire.
A cette fin, un Haut comité du ferroviaire, constitué de l’ensemble des parties prenantes, sera instauré (nouvel article L. 2100-3). Il s’agira d’une une instance d’information et de concertation des acteurs, qui favorisera leur coopération opérationnelle et constituera un lieu de débat sur les grandes évolutions du système ferroviaire national.
Il est également nécessaire de formaliser les processus permettant de préciser les modalités selon lesquelles sont organisées les relations entre les acteurs du système ferroviaire. Dans cet esprit, une « charte du réseau », élaborée selon des modalités définies par décret en Conseil d’Etat, sera adoptée en vue de faciliter les relations entre les différentes parties prenantes du système de transport ferroviaire national (nouvel article L. 2100-4).
Le service interne de sécurité de la SNCF, la Sûreté Générale (SUGE), sera rattaché à l’établissement mère du groupe public ferroviaire (articles L. 2251-1 à L. 2251-5 modifiés). De cette manière, il pourra, par le biais de contrats spécifiques, être mis à disposition de SNCF Réseau pour les interventions sur le réseau ferré national, de SNCF Mobilité pour les interventions à bord des trains exploités par l’opérateur historique.
Une alternative envisageable à la création du haut comité du ferroviaire aurait pu consister à confier le rôle d’information et de concertation des acteurs du système ferroviaire à SNCF Réseau, en tant que gestionnaire du réseau ferré national. Pour autant, cette solution ne pouvait être que partiellement satisfaisante, dans la mesure où SNCF Réseau est un acteur opérationnel complètement intégré dans le fonctionnement du système ferroviaire. En effet, à travers sa position monopolistique, le gestionnaire d’infrastructure pourrait être tenté de ne pas prendre en considération les demandes des entreprises ferroviaires. Si le rattachement de SNCF Réseau au groupe public ferroviaire peut l’inciter à intégrer les contraintes de l’exploitation des services ferroviaires dans le cadre de l’exercice de ses missions, le haut comité constitue un autre vecteur pour permettre aux parties prenantes de voir leurs intérêts pris en compte.
Une option possible à la rédaction de la «charte du réseau » pourrait être l’amélioration du processus d’élaboration du DRR. Celui-ci est actuellement adopté par le gestionnaire d’infrastructure après une phase de consultation des parties prenantes. Toutefois, les entreprises ferroviaires regrettent unanimement que les remarques qu’elles émettent soient insuffisamment prises en compte, dans la mesure où le gestionnaire d’infrastructure n’est pas tenu de les intégrer pour adopter le DRR. Pour éviter d’allonger les délais d’élaboration du DRR, cette option n’a pas été retenue. La « charte du réseau » viendra donc « en aval », en tant que charte de bonne conduite explicitant l’application du DRR par les parties prenantes. Cette formule permettra d’associer pleinement les parties prenantes à la production des règles de fonctionnement et des relations entre les différents acteurs et utilisateurs du réseau.
Les exemples étrangers montrent que ce type de dispositif permet une amélioration substantielle des relations entre les acteurs et, partant, du fonctionnement du système ferroviaire.
Pour le rattachement de la SUGE au sein du groupe ferroviaire public, plusieurs options auraient été possibles : la disposer au sein d’un des deux établissements opérationnels, SNCF Réseau ou SNCF Mobilités, la rattacher à la SNCF, établissement de tête du groupe au titre des missions transversales. Cette dernière option est apparue la plus pertinente compte tenu du rôle de cette entité dans la sécurisation des prestations de transports et dans celle des infrastructures.
Impacts opérationnels
Le fonctionnement opérationnel du système ferroviaire dans son ensemble sera amélioré. Ces mesures permettront de fluidifier les relations entre les parties prenantes du système ferroviaire. Les intérêts, les contraintes et les problématiques de chaque entreprise ferroviaire pourront être explicitées, et l’organisation future permettra d’identifier des solutions qui pourront être considérées comme bénéfiques aux bornes du système ferroviaire.
Impacts économiques, financiers, sociaux et environnementaux
Ces dispositions, qui permettront de contribuer au renforcement de la fiabilité du mode de transport ferroviaire, auront des impacts positifs, tant au plan économique et financier qu’aux plans social et environnemental, dans la mesure où elles contribueront à son développement.
Les parties prenantes ont déjà commencé à mettre en œuvre des chantiers visant cette amélioration de la gouvernance sectorielle, sans attendre les dispositions législatives et réglementaires adéquates : RFF et les entreprises ferroviaires, représentées par l’union des transporteurs publics et ferroviaires (UTP), ont commencé à établir le contenu de la « charte du réseau ».
Quant au rattachement de la SUGE à l’établissement mère, celui-ci prendra effet lors de la constitution du groupe public ferroviaire au 1er janvier 2015.
Plusieurs textes européens sont successivement venus encadrer l’organisation et la gouvernance du système ferroviaire, en définissant les règles applicables à la gestion de l'infrastructure ferroviaire et aux activités de transport des entreprises ferroviaires :
- la directive 91/440/CEE du Conseil du 29 juillet 1991 relative au développement de chemins de fer communautaires (ci-après la directive 91/440) ;
- la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2001 concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire (ci-après la directive 2001/14) ;
- la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen (refonte) (ci-après la directive 2012/34). Ce texte, publié le 14 décembre 2012, reprend, précise et complète les directives 91/440 et 2011/14. Il doit être transposé en droit interne au plus tard le 16 juin 2015.
En outre, la Commission européenne a adopté, le 30 janvier dernier, un paquet de mesures appelé « quatrième paquet ferroviaire » comprenant six propositions législatives, dont l’une porte sur la révision de la directive 2012/34 (COM(2013) 29/2). La première version de la proposition de révision de la directive 2012/34 est appelée à évoluer significativement au cours de sa procédure d’adoption par le législateur européen. Toutefois, elle propose des grandes orientations sur lesquelles il est possible de se pencher dès à présent, bien que très en amont de l’entrée en vigueur de sa version définitive.
La réforme ferroviaire n’entraîne pas d’évolution au regard des dispositions de ces directives relatives :
- à l’accès non discriminatoire, pour toutes les entreprises ferroviaires, aux prestations minimales (article 5 et annexe II de la directive 2001/14 et article 13 et annexe II de la directive 2012/34). La réforme est en effet sans impact sur les dispositions de l’article 3 du décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 relatif à l’utilisation du réseau ferré national. Elle conforte même le caractère non discriminatoire de l’accès à la prestation minimale de gestion des circulations, en prévoyant le transfert à SNCF Réseau de l’ensemble des biens, droits et obligations attachés aux missions de gestion opérationnelle des circulations sur le réseau ferré national ;
- à l’indépendance de gestion des entreprises ferroviaires et des gestionnaires de l’infrastructure vis à vis de l’État (articles 4 de la directive 91/440 et de la directive 2012/34). En effet, la réforme ferroviaire ne vise à faire évoluer ni le statut d’établissement public du gestionnaire du réseau ferré national et de l’entreprise ferroviaire historique, ni les règles actuellement applicables à la Société nationale des chemins de fer et à RFF en matière d’organisation, de gestion et de contrôle, qui seront reprises de manière similaire pour la SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités. Ces dispositions ne sont pas incompatibles avec le renforcement du rôle de stratège de l’État, qui repose sur sa participation (non majoritaire) aux instances de gouvernance des deux établissements publics opérationnels, mais surtout sur les contrats équilibrés passés entre l’Etat et chacune des entités du groupe public ferroviaire (articles L. 2102-3, L. 2111-10 et L. 2141-3) ;
- à la gestion des entreprises ferroviaires selon des principes commerciaux (articles 5 de la directive 91/440 et de la directive 2012/34), reflétée grâce à la nature industrielle et commerciale de l’établissement public SNCF Mobilités inscrite à l’article L. 2141-1, ainsi qu’avec, outre les éléments détaillés au point précédent, l’article 54 de l’annexe au décret n° 83-817 du 13 septembre 1983 portant approbation du cahier des charges de la Société nationale des chemins de fer français, dont le contenu n’est pas remis en cause par la réforme ferroviaire. La nouveauté introduite par la directive 2012/34 (cinquième alinéa de son cinquième article, relatif aux pouvoirs des actionnaires d’entreprises ferroviaires détenues ou contrôlées par l’État) ne trouve pas à s’appliquer compte tenu du statut d’établissement public de SNCF Mobilités.
- à la séparation comptable (articles 6 de la directive 91/440 et de la directive 2012/34 ), dans la mesure où le projet de loi ne modifie pas ou qu’à la marge les articles L. 2122-4, L. 2144-1 et L. 2144-2 ;
- au rôle de l’État dans le développement de l’infrastructure ferroviaire nationale et le financement du gestionnaire de l’infrastructure (articles 7 de la directive 91/440 et 8 de la directive 2012/34), qui est confirmé aux articles L. 2111-10 et L. 2111-24.
En revanche, deux points méritent un éclairage particulier.
9.1.1. L’accès équitable et non discriminatoire à l'infrastructure ferroviaire est renforcé par la réforme ferroviaire
La réforme ferroviaire permet à la France de se conformer à l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 18 avril 2013 quant à l’exigence d’indépendance juridique, organisationnelle et décisionnelle des fonctions essentielles en vue de garantir un accès équitable et non discriminatoire à l’infrastructure (répartition des sillons et tarification de l’infrastructure), définie aux articles 6 de la directive 91/440, 4 et 14 de la directive 2001/14 et 7 de la directive 2012/34. L’indépendance juridique de l’ensemble des fonctions essentielles est en effet assurée par l’unification des fonctions de la gestion de l’infrastructure du réseau ferré national au sein de SNCF Réseau. Celui-ci est doté de la personnalité morale en tant qu’établissement public et regroupe en une entité unique RFF, la branche Infra de la SNCF et la direction de la circulation ferroviaire (DCF), actuellement chargée d’une partie de la fonction de répartition des sillons.
Concernant l’indépendance organisationnelle des fonctions essentielles, SNCF Réseau disposera de moyens et de services spécifiques, ainsi que d’une comptabilité propre. En matière de ressources humaines, les dispositions transitoires (article 11) prévoient le transfert et la poursuite des contrats de travail auprès de chacune des entités du groupe public ferroviaire. De plus, chaque structure sera dotée, à l’issue des transferts de propriété inhérents à la modification des périmètres d’activité, des actifs requis pour la mise en œuvre de leurs nouvelles compétences.
Enfin, l’indépendance décisionnelle de SNCF Réseau vis à vis de la SNCF et de SNCF Mobilités est organisée de plusieurs manières :
- Tout d’abord, les missions de chacune des entités du groupe public ferroviaire ont été définies précisément et sont bien distinctes. Le principe de spécialité des établissements publics interdira ainsi à la SNCF ou à SNCF Mobilités d’exercer les missions relevant de SNCF Réseau.
- De plus, les représentants de la SNCF au sein du conseil d’administration de SNCF Réseau ne sont pas majoritaires.
- Ensuite, afin d’éviter tout risque de dérive, les présidents de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités, tous deux membres du directoire de la SNCF, n’exercent pas d’autorité l’un sur l’autre. La composition du directoire de la SNCF a en effet été conçue pour qu’aucun des présidents des deux établissements publics qui lui sont rattachés ne puisse faire prévaloir sur l’autre ses intérêts dans la gestion de la SNCF. Cette composition permet d’éviter que le membre du directoire par ailleurs président de SNCF Réseau puisse être mis en minorité au sein du directoire. Et si l’intervention du président du conseil de surveillance de la SNCF est nécessaire, en cas de désaccord entre les deux membres de son directoire, elle fait l’objet d’une certaine forme de publicité, au sein du conseil de surveillance (dans la mesure où il ne peut plus prendre part aux délibérations relatives à cette décision), qui est de nature à conforter l’indépendance du président de SNCF Réseau vis-à-vis du président de SNCF Mobilités, s’agissant des décisions relevant de la SNCF. En outre, l’ARAF pouvant s’opposer à la révocation du président de SNCF Réseau, ce dernier se trouve conforté dans son action au sein du groupe public ferroviaire.
- En outre, au-delà des règles d’impartialité applicables à l’ensemble des gestionnaires d’infrastructure (l’interdiction de divulgation des informations protégées en-dehors des services chargés des fonctions essentielles de l’article L. 2122-4-1), des règles d’impartialité ont été spécialement définies pour SNCF Réseau, mises en œuvre sous le contrôle de l’ARAF ou de la commission de déontologie du ferroviaire, aux articles L. 2111-16 à L. 2111-16-4. Ainsi,
- l’ARAF pourra s’opposer à la nomination ou à la reconduction du président du conseil d’administration de SNCF Réseau, si elle estime que la personne proposée ne présente pas les garanties nécessaires, ainsi qu’à sa révocation, si elle estime que celle-ci est motivée par l’indépendance dont il a fait preuve à l’égard des intérêts de SNCF Mobilités ;
- les responsables de la direction générale et le président du conseil d’administration (les dirigeants de SNCF Réseau) ne devront avoir aucun lien d’intérêt ni lien financier avec une entreprise exerçant directement ou par l’intermédiaire d’une filiale une activité d’entreprise ferroviaire, à l’exception du président du conseil d’administration, en ce qu’il sera aussi vice-président du directoire de la SNCF ;
- la rémunération des dirigeants de SNCF Réseau ne pourra dépendre que d’indicateurs propres au seul SNCF Réseau ;
- le président du conseil d’administration de SNCF Réseau, les anciens dirigeants de SNCF Réseau en charge des fonctions essentielles et les personnels de SNCF Réseau ayant eu à connaître, dans l’exercice de leurs fonctions, des informations dont la diffusion est prohibée seront soumis, pendant trois ans, à l’avis de la commission de déontologie lorsqu’ils quitteront leurs fonctions tout en restant dans le secteur ferroviaire ;
- l’ARAF pourra examiner les mesures d’organisation interne de SNCF Réseau pour se conformer aux règles d’impartialité.
- En tout état de cause, l’ARAF conserve ses pouvoirs d’enquête (articles L. 2135-1 et suivants) et de sanction des cas de manquement d’un gestionnaire d’infrastructure au titre de l’accès au réseau ou de son utilisation (article L. 2135-7), dont elle peut se saisir d’office.
9.1.2. La réforme ferroviaire renforce le rôle de l’ARAF quant à la vérification des flux financiers
La réforme ferroviaire permettra à l’ARAF d’être dotée d’outils supplémentaires pour vérifier l’absence de subvention croisée puisqu’elle sera en mesure, au-delà des compétences dont elle dispose déjà et une fois transposé l’article 56§12 de la directive 2012/34, d’effectuer des audits ou de commander des audits externes auprès des gestionnaires de l'infrastructure, des exploitants d'installations de service et des entreprises ferroviaires. Elle sera notamment habilitée à demander aux gestionnaires de l'infrastructure, aux exploitants d'installations de service et à toutes les entreprises ou autres entités qui assurent ou intègrent différents types de services de transport ferroviaire ou de gestion de l'infrastructure, « des informations détaillées sur chaque source et utilisation de fonds publics et d'autres formes de compensation, présentées d'une manière transparente et précise, y compris une analyse détaillée des flux de trésorerie des entreprises permettant de déterminer de quelle manière ces fonds publics et ces autres formes de compensation ont été utilisés » (annexe VIII de la directive 2012/34).
Le principe de l’affectation d’une partie des résultats de SNCF Mobilités au profit du redressement du gestionnaire d’infrastructure , prévu par la réforme ferroviaire, est quant à lui conforme à l’article 8§4 de la directive 2012/34 qui mentionne dorénavant explicitement, au titre des revenus du gestionnaire de l’infrastructure, « les revenus non remboursables de source privée ».
9.2. La réforme ferroviaire tient le plus grand compte de la proposition législative de quatrième paquet ferroviaire
La proposition de la Commission européenne de révision de la directive 2012/34, dont les termes de l’adoption définitive sont encore difficiles à anticiper, prévoit, en matière de gouvernance sectorielle, que :
- les compétences des gestionnaires d’infrastructure devraient être renforcées de sorte qu’ils contrôlent l’ensemble des fonctions du réseau ferroviaire (le développement, l’exploitation et l’entretien, y compris la programmation des investissements) ;
- les gestionnaires de l’infrastructure devraient jouir d’une indépendance opérationnelle et financière totale par rapport aux entreprises ferroviaires. À cet effet, la séparation institutionnelle deviendrait la règle pour parvenir à ce résultat. Les organisations sous forme de structure verticalement intégrée (holding) existantes pourraient être maintenues, mais sous réserve de la mise en place de « murailles de Chine » strictes. Pour garantir cette indépendance dans le contexte de l’ouverture totale du marché du transport de voyageurs à l’horizon 2019, des États membres pourraient, après accord de la Commission, interdire leur territoire à des entreprises ferroviaires appartenant à une structure verticalement intégrée d’un autre État membre, dès lors que les mesures destinées à assurer un accès non discriminatoire des autres opérateurs ne sont pas mises en œuvre.
La discussion de ce texte a tout juste débuté, avec les premiers résultats des travaux de la commission des transports et du tourisme du Parlement européen. Ils reflètent les importantes perspectives d’évolution du texte, notamment dans le but de laisser les États membres libres de choisir leur modèle d’organisation sectorielle, de favoriser les synergies opérationnelles entre gestionnaire de l’infrastructure et entreprises ferroviaires et de rendre plus proportionnées les mesures de sauvegarde.
En tout état de cause, le Gouvernement a fait le choix d’anticiper la proposition de révision de la directive 2012/34 lors de l’élaboration du projet de loi, de deux manières.
En premier lieu, même si cette proposition législative n’est qu’à l’état d’ébauche, elle a permis au gouvernement de constater que le projet de loi s’inscrit déjà, dans l’esprit, en parfaite cohérence avec de nombreux principes déterminants de celle-ci.
Il en est ainsi :
- de l’unification des fonctions de gestion de l’infrastructure au sein de SNCF Réseau (article 3, point 2, de la directive révisée) ;
- de la mise en place de mesures de sauvegarde au sein du groupe public ferroviaire destinées à garantir l’accès non discriminatoire au réseau (articles 7 bis et 7 ter de la directive révisée) ;
- du pouvoir d’opposition donné à l’ARAF quant à la nomination, la reconduction ou la révocation du président de SNCF Réseau (article 7 ter§3 de la directive modifiée) ;
- du pouvoir de nomination dévolu à l’État, propriétaire ultime de l’entreprise verticalement intégrée (article 7 ter§3) ;
- du Haut comité du ferroviaire, qui associe les différentes entreprises ferroviaires (article 7 quinquies de la directive modifiée), etc.
C’est sur la base de cette proposition législative, et plus particulièrement de ses dispositions relatives aux entreprises verticalement intégrées, définies au point 31 de l’article 3 de la directive modifiée, que le projet de loi portant réforme ferroviaire prévoit de doter l’établissement public SNCF, à l’égard de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités, d’attributions apparentées à celles d’une société détentrice au sens de l’article L. 233-1 du code de commerce.
En second lieu, l’étude approfondie de la proposition législative de la Commission, lors de la mise au point du projet de loi portant réforme ferroviaire a permis d’identifier plusieurs points sur lesquels il conviendra de faire évoluer la proposition, durant sa discussion au Parlement européen et au Conseil.