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PROJET DE LOI

autorisant la ratification de la convention n° 188 de l’Organisation

internationale du travail relative au travail dans la pêche

NOR : MAEJ1400561L/Bleue-1

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ÉTUDE D’IMPACT

I. - SITUATION DE RÉFÉRENCE ET OBJECTIFS DE LA CONVENTION

L'Organisation internationale du Travail (OIT) a adopté le 14 juin 2007 lors de la 96ème session de la Conférence internationale du travail (CIT) la Convention (n° 188) relative au travail dans la pêche1, qui fait l'objet du présent projet de loi. Cette convention est accompagnée d'une Recommandation (n° 199).

Cette convention, dont l'élaboration et l'adoption ont été soutenues par la France, complète la convention du travail maritime (CTM) adoptée en 2006. Elle confirme l'évolution majeure pour l'évolution des normes internationales du travail qu'a constitué l'adoption de la CTM pour les gens de mer et la marine marchande. C'est ainsi que les pêcheurs, le secteur de la pêche, disposeront également d'un ensemble complet de normes couvrant les différents domaines du droit social.

Sont instituées des normes sociales minimales dans le secteur de la pêche avec, pour les pêcheurs, un véritable code du travail mondial traitant de l'ensemble des conditions de travail et de vie à bord, d'emploi, de santé et sécurité au travail, y compris la sécurité sociale.

L'élément humain pourra être intégré dans la gestion de la ressource, prenant ainsi en compte la perspective d'une pêche durable. La ratification de la Convention de l'OIT relative au travail dans la pêche fait d'ailleurs partie des engagements (n°44a) du Grenelle de la mer, de même que celle, engagée également, de la Convention STCW-F de l'Organisation maritime internationale (OMI) sur les normes de formation du personnel des navires de pêche, de délivrance des brevets et de veille.

Après la ratification de la convention de Torremolinos sur la sécurité des navires de pêche, autorisée par la loi n° 2007-1200 du 10 août 20072, c'est un ensemble cohérent de normes internationales concernant les pêcheurs et la pêche maritime qui sera ainsi conforté par la France.

La convention sur le travail dans la pêche résulte de la volonté commune des armateurs, des organisations représentant les pêcheurs et des gouvernements. Son adoption a donné lieu à un examen particulièrement approfondi au Bureau international du Travail (BIT) où, exceptionnellement, son examen au cours de trois sessions de la Conférence internationale du Travail (CIT) a permis d'aboutir à son adoption à une très large majorité.

Les représentants des armateurs français à la pêche et des organisations syndicales françaises représentatives des pêcheurs ont participé à Genève, à l'OIT, aux travaux préparatoires et aux conférences d'adoption de la convention.

La démarche entreprise pour la navigation maritime commerciale avec la CTM3 avait permis de consolider et de moderniser 68 conventions et recommandations maritimes de l'OIT en un seul instrument qui entrera en vigueur pour la France le 28 février 2014. La quasi-totalité des conventions concernant la marine marchande comportaient des dispositions permettant aux Etats, après consultation des organisations représentatives d'armateurs et de pêcheurs intéressées, de les étendre aux pêcheurs. La France a ainsi étendu à ses pêcheurs la quasi-totalité des conventions maritimes qu'elle a ratifiées.

Ce mécanisme explique que la pêche maritime commerciale ne relevait à l'OIT que de cinq conventions et deux recommandations. Désormais, sur le plan international et européen, les pêcheurs relèvent de dispositions spécifiques. Il s'agit d'une évolution notable. Il faut préciser que la convention n° 188 ne concerne pas exclusivement la pêche maritime, mais aussi celle pratiquée dans les eaux intérieures. Celle-ci ne représente toutefois en France que très peu de pêcheurs, travailleurs individuels indépendants.

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La Convention s'inscrit dans une logique de développement durable, en instaurant dans l'économie de la pêche maritime, à l’instar des règles de sécurité ou de lutte contre la pollution, des mécanismes de respect de la norme sociale. Tout comme la CTM, elle vise une large ratification. Elle comporte des dispositifs d'application et de contrôle éprouvés par ailleurs.


Sa structure répond aux préoccupations bien évidemment différentes de la pêche industrielle et de la pêche artisanale. Si elle concerne l'ensemble des navires de pêche, des prescriptions supplémentaires sont applicables à ceux de plus de 24 mètres. Par ailleurs, elle prévoit de soumettre les navires de pêche maritime aux dispositifs de contrôle des navires faisant escale dans les ports, dits de « contrôle de l'Etat du port ». A cet effet, ils devront être certifiés quant au respect des normes de la convention.

II. - CONSÉQUENCES ESTIMÉES DE LA MISE EN OEUVRE DE LA CONVENTION

La convention n° 188 prévoit un niveau de normes sociales minimales déjà respecté à bord des navires de pêche français. Elle ne bouleverse donc pas le droit social maritime français qui présente un niveau de garantie supérieur. Toutefois, sa mise en œuvre nécessite quelques ajustements de la législation concernant les pêcheurs.

Sa mise en œuvre s’inscrit dans le cadre de la modernisation du droit des gens de mer, traduite dans un premier temps par la codification du droit du travail maritime au sein du code des transports, qui s’est poursuivie avec la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine du développement durable. Cette loi a notamment pour objet d’une part, d'assurer la transposition de la Directive n° 2009/13/CE du Conseil du 16 février 2009 portant mise en œuvre de l'accord conclu par les Associations des armateurs de la Communauté européenne (ECSA) et la Fédération européenne des travailleurs des transports (ETF) concernant la convention du travail maritime, 2006, et modifiant la directive 1999/63/CE et, d’autre part, de procéder à un certain nombre de clarifications du droit des gens de mer en tenant compte des spécificités de la pêche.

Champ d'application de la Convention :

La Convention n° 188 sur le travail dans la pêche concerne la pêche commerciale, soit la pêche maritime commerciale, mais aussi les opérations de pêche dans les cours d'eau, les lacs ou les canaux, à l'exception de la pêche de subsistance et de la pêche de loisir.

En France, les activités de pêche autres que maritimes ne concernent que très peu de personnes. Les pêcheurs professionnels en lacs ou dans les cours d'eau intérieurs sont indépendants, non-salariés et ils ne sont à bord de leurs bateaux que pour de très courtes durées, à proximité du rivage. Compte tenu de cette situation, il sera fait application des dispositions de l'article 3 de la convention et fait exclusion de son application des navires de pêche engagés dans des opérations de pêche sur les cours d'eau, les lacs ou les canaux. Les conditions de l'activité des pêcheurs concernés feront l'objet d'un examen dans le cadre des dispositions prévues par le paragraphe 2 de son article 3, afin de déterminer quelles prescriptions de la convention pourraient éventuellement les concerner.


Au sens de la convention, les pêcheurs sont définis comme toute personne employée ou engagée à quelque titre que ce soit ou exerçant une activité professionnelle à bord d'un navire de pêche, y compris les personnes travaillant à bord et qui sont rémunérées à la part. Ne sont pas concernés les pilotes, les équipages de la flotte de guerre, les autres personnes au service permanent du gouvernement, celles basées à terre pour effectuer des travaux à bord d'un navire de pêche et les observateurs des pêches.

La prise en compte des pêcheurs rémunérés à la part relève d'une problématique particulière au sein de l'Union européenne. Cette modalité de rémunération, consistant en un partage du résultat de la vente du produit de la pêche amputé des frais communs, est une particularité et une constante dans le secteur de la pêche, ceci dans le monde entier et de tous temps. C'est l'évolution des systèmes sociaux de chaque pays qui a fait que les pêcheurs ont été considérés par les Etats comme salariés ou comme travailleurs indépendants. Lors des travaux préparatoires de la convention au Bureau international du Travail à Genève, il a été très clair qu'elle devrait couvrir tous les travailleurs à bord des navires de pêche, quels que soient leur statut, indépendants ou salariés.

En France, les pêcheurs à la part sont considérés comme salariés et relèvent d'un contrat de travail. Si la forme particulière de leur rémunération constitue une sorte d'intéressement et n'est pas liée au temps de travail, cela n'a pas pour effet de les transformer en travailleurs indépendants. D'ailleurs, la chambre sociale de la Cour de cassation a, par un arrêt du 1er avril 19924, tranché cette question en reconnaissant le droit au SMIC aux pêcheurs rémunérés à la part.

La prise en compte effective des pêcheurs à la part est un enjeu important dans la mise en œuvre de la convention au sein de l'Union européenne, où certains Etats membres, compte tenu de leur histoire propre, ne les considèrent pas comme salariés mais comme travailleurs indépendants. De ce fait, une partie des pêcheurs européens ne se voient pas appliquer les directives européennes concernant les pêcheurs, notamment en matière de temps de travail ou de santé et sécurité au travail. Il sera donc essentiel qu’à terme tous les pêcheurs soient pris en compte au niveau européen, quel que soit le statut que les Etats membres leur ont conféré.

Du fait de la dissociation du corpus juridique international entre marine marchande et pêche maritime, entérinée par les deux dernières conventions maritimes de l'OIT, il sera nécessaire, pour chaque mesure nationale de mise en œuvre, tant de la CTM que de la convention n°188 sur le travail dans la pêche, d'examiner s'il y a lieu de différencier le cas échéant les mesures concernant les pêcheurs de celles concernant les autres acteurs maritimes.

Dans le cadre de la ratification de CTM, les dispositions rendues antérieurement applicables aux pêcheurs, telle, par exemple, l'obligation de rapatriement, doivent le rester en application du principe de non régression posé tant au niveau de l'OIT que de l'Union européenne, en application duquel le niveau de protection des travailleurs ne peut être abaissé. Ceci a nécessité d'anticiper la ratification de la convention n° 188 et d'associer dès la préparation des mesures de mise en œuvre de la CTM, les organisations nationales représentatives d'armateurs à la pêche et de pêcheurs.

La convention relative au travail dans la pêche affirme, comme la CTM, la responsabilité générale de l'armateur en proposant une définition identique, assurant une certaine cohérence du droit social maritime. Elle le définit dans son article II comme celui qui a accepté les responsabilités de l'exploitation du navire et a accepté de se charger des tâches et responsabilités incombant aux armateurs aux termes de la convention, indépendamment du fait que d'autres entités ou personnes s'acquittent en son nom de certaines de ces tâches ou responsabilités.

Ceci implique notamment de conférer des pouvoirs particuliers au capitaine lui permettant d'agir dans ce cadre vis-à-vis des pêcheurs qui ne seraient pas directement salariés de l'armateur, tels les pêcheurs de pays tiers à l'Union européenne employés sur des navires français dans le cadre des accords de pêche conclus par l'UE avec ces pays et des protocoles liés. Il s'agit, par exemple de pouvoir demander leurs documents professionnels, tels que certificats d'aptitude médicale, brevets et livrets de marin.

La mise en œuvre de cette convention nécessitera de prendre en compte dans la législation les modalités particulières d'emploi de pêcheurs dans les cas évoqués ci-dessus ou similaires, notamment lorsqu'ils sont employés via des agences spécialisées dans la fourniture de main d'œuvre maritime, dans le cadre des accords mentionnés ci-dessus, de même qu’à bord des navires de pêche immatriculés aux Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF) où c’est la pratique.

Conséquences économiques :

Les navires français respectant d'ores et déjà les normes internationales du travail, la mise en œuvre de la convention n'entraînera aucune charge supplémentaire significative pour les armements français. La compétitivité des navires de pêche français vis-à-vis des navires battant pavillon étranger n'en sera pas affecté puisque ceux-ci seront soumis aux mêmes obligations.


La possibilité de lier l'application de cette convention aux accords de pêche ne peut avoir pour effet que de contribuer au relèvement du niveau de protection sociale à bord des navires ne battant pas pavillon français. A ce titre, notamment, elle s'inscrit dans une logique de développement durable par la prise en compte de l'élément humain dans la gestion et la préservation de la ressource.

La convention innove en prévoyant un contrôle de l'Etat du port tel que celui dont font l'objet les navires marchands. Il est encore trop tôt pour savoir si les différents dispositifs régionaux, comme le Mémorandum d'entente de Paris (Paris MoU)5, prendront en charge ces nouvelles obligations. Ce serait logique. Des lignes directrices de référence à l'attention des inspecteurs de l'Etat du port ont déjà été adoptées dans le cadre de groupes de travail tripartites au BIT afin de permettre aux Etats de disposer d'éléments permettant d'harmoniser les contrôles. En effet, si ce contrôle de l'Etat du port sur les normes sociales à la pêche ne peut que contribuer à diminuer le différentiel existant entre navires français et autres, ceci exige que ces contrôles soient harmonisés.

Conséquences financières :

1°) Conséquences financières pour les armements :

Concernant les pêcheurs, les exigences de formation professionnelle, d'aptitude médicale à la navigation et de contrat d'engagement, sont déjà satisfaites.

Les navires de pêche les plus importants, ceux de 24 m et plus, et ceux naviguant habituellement à plus de 200 milles nautiques de la côte de l'Etat du pavillon ou au-delà du rebord externe du plateau continental, si celui-ci est plus éloigné, devront disposer à bord d'un document valide délivré par l'autorité du pavillon, indiquant qu'ils ont été inspectés par l'autorité compétente ou en son nom, en vue de déterminer leur conformité avec les dispositions de la présente convention concernant les conditions de vie et de travail à bord.

Il s'agit d'un dispositif plus simple que celui prévu par la CTM concernant les navires marchands de plus de 500 et navigant à l’international ou entre deux ports d’un Etat qui n’est pas celui du pavillon. En France, ce document sera délivré par l'autorité maritime après synthèse des inspections et vérifications faites par les différentes autorités et services concernés : les centres de sécurité des navires, les commissions de sécurité, le service de santé des gens de mer, les services des directions départementales des territoires et de la mer en charge de la police du rôle d'équipage, les services de l'Inspection du travail. Il n’est pas proposé, actuellement, de déléguer cette mission qui restera de la compétence d'agents de l'Etat. Il sera gratuit, mais il appartiendra à l'armateur de prendre en charge le déplacement des inspecteurs lorsque le navire ne pourra être inspecté qu'à l'étranger.

Le défaut de tels certificats à bord desdits navires entraînerait le risque de contrôles approfondis et systématiques lors des escales dans les ports étrangers, avec des conséquences financières potentielles non négligeables pour les armements (pénalités, immobilisation prolongée du navire, perte de valeur de la cargaison).

La mise en œuvre de la convention exigera de la part des armateurs dont les navires devront détenir un tel certificat, un examen particulier de toutes ses prescriptions en vue d’en assurer le respect. Il ne s'agit toutefois que du respect de normes légales.

Dans certains cas d'emploi de pêcheurs non ressortissants français, l'armateur devra s'assurer qu'ils bénéficient de dispositions particulières leur assurant la protection sociale, telle que prévue par la convention.

2°) Conséquences financières pour les gens de mer :

La mise en œuvre de la Convention n'entraînera pas de charges financières pour les pêcheurs.

Les travailleurs indépendants non-salariés seront dorénavant couverts par la convention. Ils sont marins et la profession de marin étant réglementée en France, ils sont déjà concernés par la réglementation existante en matière d'aptitude médicale à la navigation et de qualifications professionnelles. Les examens médicaux leurs sont déjà assurés gratuitement, comme pour les marins salariés.

3°) Conséquences financières pour les établissements publics :

Les pêcheurs relèvent de la profession de marin et sont déjà affiliés au régime de l'Établissement national des Invalides de la Marine (ENIM). Aussi, la ratification de la convention n'a pas d'impact en termes de coûts pour cet établissement.

4°) Conséquences financières pour l'Etat :

En ce qui concerne la réalisation des examens médicaux il n'y a pas de changement au regard de la pratique actuelle avec le service de santé des gens de mer.

Le processus de certification des navires prévu à l'article 41 de la convention sera mené par la direction des Affaires maritimes (DAM), avec le concours des services mentionnés au 1° ci-dessus. S'agissant de la synthèse de visites d'inspection ou de contrôles déjà existants, la délivrance du document prévu n'entraînera pas de coût supplémentaire significatif. L’article L. 5514-3 du code des transports issu de la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 précitée a d’ailleurs déjà prévu cette certification.

Les coûts de réalisation de ces documents, les certificats médicaux, seront imputés sur le budget de fonctionnement de la direction des Affaires maritimes selon un format identique à celui des navires de commerce.

La mise en œuvre de la convention nécessite cependant d'inscrire les navires de pêche dans les travaux de développement des systèmes d'information de la direction des Affaires maritimes et de la direction générale du Travail déjà engagés au titre de la convention du travail maritime.

Conséquences sociales et environnementales :

Le respect des normes sociales dans la pêche maritime commerciale est une évolution complémentaire à la préoccupation d'une pêche durable. Le fait d'y disposer de facto d'un label social mondial garantissant le respect des normes de l'OIT devra être un critère déterminant dans la gestion de la ressource et dans la lutte contre la pêche illégale

A l'instar des gens de mer, les droits des pêcheurs seront renforcés par la mise en place de mécanismes de plainte, notamment lors d’escales.

Conséquences juridiques :

1°) Articulation de la convention n° 188 relative au travail dans la pêche avec les instruments internationaux et européens existants ou en cours d'élaboration :

Il y a une forte cohérence entre cette convention de l'OIT et, d'une part, la convention STCW-F de l'OMI sur les normes de formation du personnel des navires de pêche, de délivrance des brevets et de veille et, d'autre part, la convention de Torremolinos sur la sécurité des navires de pêche, de l'OMI, même si cette dernière n'est pas encore entrée en vigueur.

La France a engagé la ratification de la convention STCW-F et participe aux travaux préalables visant à introduire ses prescriptions dans la législation européenne dans le cadre d'une proposition de Directive.

La présente convention innove et prévoit le contrôle de l'Etat du port pour la pêche maritime. Ce principe permet le contrôle des navires faisant escale dans un port d'un pays ayant ratifié la convention, dont ils ne battent pas le pavillon. A ce jour, la convention n'étant pas en vigueur, les modalités de prise en compte des navires de pêche dans ce cadre ne sont pas encore décidées. Il conviendra certainement d'examiner l'opportunité de le prendre en compte dans le cadre du Paris MoU. Des lignes directrices à l'attention des inspecteurs de l'Etat du port ont cependant déjà été élaborées dans le cadre du BIT.

La convention prévoit également en son article 44 que les navires de pêche relèveront, comme c'est le cas pour la marine marchande, du principe dit du « traitement pas plus favorable », selon lequel l'Etat du port ne doit pas faire bénéficier d'un traitement plus favorable les navires d'Etats n'ayant pas ratifié la Convention que celui accordé aux navires battant pavillon de tout Membre l'ayant ratifiée.

Sur le plan européen, les pêcheurs sont déjà couverts notamment par l'article 21 de la Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, de même que par la directive 93/103/CE du Conseil du 23 novembre 1993 concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé au travail à bord des navires de pêche ou encore par la Directive 92/29/CEE du Conseil du 31 mars 1992 concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé pour promouvoir une meilleure assistance médicale à bord des navires.

Sur le plan européen les partenaires sociaux à la pêche, EUROPECHE et ETF (Fédération européenne des transports) ont engagé une négociation en vue de conclure un accord portant sur la mise en œuvre au niveau européen des dispositions de la convention, à l'exception des mécanismes de contrôle qui ne peuvent relever de la négociation collective. Lorsque cet accord sera conclu et la directive européenne permettant sa mise en œuvre adoptée, conformément à l'article 155 du Traité, les Etats membres devront la transposer dans leur droit interne.

Toutefois cet accord ne peut intervenir que pour les matières énoncées à l'article 155, et, selon la Commission, notamment celles relatives aux conditions de travail et à la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, considérés comme toute personne employée par un employeur.

L'accord, et la directive qui en découlerait, ne pourrait donc concerner ceux des pêcheurs à la part qui seraient considérés par les Etats membres comme travailleurs indépendants. Cet aspect constitue une difficulté qui explique le fait qu’il n’ait pas encore été signé. C'est d'ailleurs déjà le cas des directives mentionnées ci-dessus. Or, si la convention de l'OIT sur le travail dans la pêche représente une avancée considérable, il est indispensable que sur le plan européen l'on parvienne à une réelle harmonisation des conditions de travail, d'emploi et de vie à bord des navires de pêche pour tous les travailleurs quel que soit leur statut. La France a saisi la Commission sur cette question majeure.

Comme c'est le cas actuellement pour la mise en oeuvre de la Convention du travail maritime, et dans la mesure où cet accord sera conclu, il sera nécessaire également que la législation européenne prenne en compte les dispositions de la Convention relatives au contrôle et, d'une manière générale, les responsabilités de l'Etat du port et de l'Etat du pavillon, ne ressortissant pas de la compétence des partenaires sociaux, notamment.

2°) Conventions fondamentales / transversales :

Un grand nombre des autres conventions de l'OIT ratifiées par la France, hormis celles qui concernent par définition d'autres secteurs, sont également applicables à bord des navires de pêche.

Il s'agit, en premier lieu des conventions fondamentales mentionnées dans les visas de la convention relative au travail dans la pêche, toutes ratifiées par la France, qui sont les conventions n° 29 sur le travail forcé, 1930, n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, n° 98 sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, n° 100 sur l'égalité de rémunération (emploi et profession), 1951, n° 105 sur l'abolition du travail forcé, 1957, n° 111 concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, 138 sur l'âge minimum, 1973, n° 182 sur les pires formes de travail des enfants, 1999.

Il s'agit également, d'autres conventions telles que la convention n° 135 sur les représentants des travailleurs, 1971, ou de la convention n° 158 sur le licenciement, 1982, ratifiées par la France et qui s'appliquent à bord des navires.

3°) Directives de l'OIT pour les agents chargés du contrôle par l'Etat du port effectuant des inspections :

A la suite de l'adoption de la convention, des lignes directrices ont été préparées et adoptées par l'OIT à l'attention des inspecteurs de l'Etat du port. La France a participé à ces travaux qui permettent de disposer d'outils précis et pratiques relatifs à la mise en œuvre des dispositions de la convention en matière de contrôle.

4°) Articulation de la convention n° 188 relative au travail dans la pêche avec le droit interne

a) Définitions et champ d'application

Personnels concernés

La convention relative au travail dans la pêche a vocation à s'appliquer à l'ensemble des personnes employées à quelque titre que ce soit à bord d'un navire de pêche, à l'exception des pilotes, des équipages de la flotte de guerre, des autres personnes au service permanent du gouvernement, de celles basées à terre pour effectuer des travaux à bord d'un navire de pêche et des observateurs des pêches. Les pêcheurs, qui en France exercent la profession réglementée de marin, sont des gens de mer, en droit national, au sens de l'article L. 5511-1 du code des transports.

Il est nécessaire de préciser que dans les textes internationaux et européens, l'expression « gens de mer », qui n'a pas de singulier, ou le mot « marin », concernent les personnels travaillant à bord des navires effectuant de la navigation maritime commerciale. Les pêcheurs sont dénommés « pêcheurs ». En droit national, dans le code des transports, l'expression « gens de mer », recouvre l'ensemble des personnes travaillant à bord d’un navire, dont ceux qui exercent la profession de marin, y compris les pêcheurs.

Cas des travailleurs indépendants

Si, comme indiqué précédemment, en France les pêcheurs à la part sont considérés comme salariés et non comme indépendants, il n'en reste pas moins que la question de son application aux patrons indépendants se pose. La convention s'appliquera pour ce qui les concerne, l'article 19 de la convention prévoyant expressément les dispositions de celle-ci qui ne s'appliquent pas aux propriétaires de navire qui exploite celui-ci seul. A titre d'exemple, leur seront appliquées les dispositions de la convention concernant les temps de repos minima.

Définition et responsabilités de l'armateur (art. 1er d, et 8)

La définition de l'armateur (code des transports, art. L. 5511-1, 1°) a été modifiée par la loi n°2013-619, en reprenant la définition donnée par la convention, afin de prendre en compte sa responsabilité générale, à l'instar de ce que la CTM prévoit, y compris lorsque les personnes travaillant à bord ne sont pas ses salariés directs. Elle devra aussi prendre en compte l'article 8 de la convention qui précise cette responsabilité en indiquant que l'armateur a la responsabilité globale de veiller à ce que le patron dispose des ressources et moyens nécessaires pour s'acquitter des obligation de la convention. Il est également prévu que l'armateur à la pêche ne doive pas entraver la liberté du patron de prendre toute décision qui, de son avis professionnel, est nécessaire pour la sécurité du navire, de sa navigation ou de son exploitation, ou pour la sécurité des pêcheurs qui sont à son bord. Ce principe sera repris dans la législation nationale.

b) Age minimum (art.9)

Les règles relatives à l'âge minimum pour les personnes travaillant à bord d'un navire sont fixées par les articles L. 4153-1 à L. 4153-9 du code du travail et précisées pour les jeunes travailleurs à bord des navires par les articles L. 5544-26 à L. 5544-32 et L. 5621-6 du code des transports.

Si la CTM ne prévoit aucune dérogation à l'âge minimum de 16 ans, la convention relative au travail dans la pêche maintient en revanche une possibilité d'emploi des jeunes de 15 ans pour les jeunes qui ne sont plus soumis à la scolarité obligatoire et suivent une formation professionnelle en matière de pêche, de même que pour des travaux légers lors des vacances scolaires, ce qui est conforme au droit national (code du travail, art. L. 4153-1).

c) Examen médical (art. 10 à 12)

Les conditions d'aptitude physique à l'accès et à l'exercice de la profession de marin, dont le principe est fixé par le quatrième alinéa de l'article L.5521-1 du code des transports, sont précisées par l'arrêté du 16 avril 1986 modifié relatif aux conditions d'aptitude physique à la profession de marin. La France n'envisage pas d'utiliser la possibilité de dérogation prévue à l'article 10 de la convention.

A l'issue d'une visite d'aptitude périodique, le médecin des gens de mer remet au candidat à la profession de marin ou au marin un certificat d'aptitude médicale à la navigation maritime.

Le code des transports a été modifié de manière à ce que le capitaine (le « patron », à la pêche) s'assure que les gens de mer à son bord disposent d'un certificat médical valide (article L.5545-3-1).

d) Equipage et durée du repos (art.13)

La convention reprend l'exigence d'effectifs suffisants en nombre et en qualité pour assurer la sécurité de navigation et de fonctionnement du navire. Ce principe, affirmé par le code des transports (article L.5522-2), est mis en œuvre dans la législation nationale via la procédure de décision d'effectifs (décret n° 67-432 du 26 mai 1967 relatif aux effectifs à bord des navires de commerce, de pêche et de plaisance ; la notion de fonctionnement du navire de pêche devant être cependant prise en compte de manière spécifique).

Elle impose des périodes de repos suffisantes pour préserver la sécurité et la santé des pêcheurs. Il doit être noté que la convention ne retient que la limitation des temps de repos, ce qui est le choix fait par la France, dans la mise en œuvre des dispositions de la Directive 2003/88. Les normes de la convention sont par conséquent déjà respectées. Il n'est cependant pas exclu de recourir dans certains cas aux dispositions du paragraphe 3 de l'article 13 qui permet de prendre des dispositions équivalentes.

e) Liste d'équipage (art.15)

La convention prévoit la tenue à bord d'une liste d'équipage, conformément à l’article L. 5522-3 du code des transports du code des transports..

f) Accord d'engagement du pêcheur (16 à 20 et annexe II)

La convention prévoit l'exigence d'un accord d'engagement écrit, (en France le contrat d'engagement maritime), le droit pour le pêcheur d'examiner ses clauses avant de le signer, des mentions particulières, prévues dans l'annexe II. La législation nationale est conforme à ces prescriptions (code des transports, art. L.5542-3), excepté quelques mentions mineures à porter sur ce contrat, qui seront prises en compte, telles les vivres à allouer au pêcheur le cas échéant, ou les périodes minimales de repos.

g) Rapatriement (art. 21)

La convention introduit des dispositions concernant le rapatriement des pêcheurs. En France, les dispositions de la convention n° 166 de l'OIT sur le rapatriement ont déjà été étendues aux pêcheurs. Le code des transports a été modifié afin de prendre en compte l'obligation pour l'Etat du pavillon de rapatrier le pêcheur en cas de carence de l'armateur.

h) Recrutement et placement (art. 22)

La convention n° 179 sur le recrutement et le placement des gens de mer, reprise par la CTM, a été étendue par la France aux pêcheurs. Les dispositions de la convention en matière de recrutement et de placement des pêcheurs sont donc prises en compte dans le cadre de la mise en œuvre de la CTM.

Il sera nécessaire de prendre en compte certaines situations précises et limitées de recours à de la main d'œuvre non résidente par l'intermédiaire d'entreprises de travail maritime. Il s'agit des navires de pêche immatriculés au registre principal qui travaillent dans le cadre des accords de pêche conclus entre l'Union européenne et les pays tiers, de même que des navires de pêche immatriculés aux Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF).

i) Paiement des pêcheurs (art. 23 et 24)

L'obligation de paiement mensuel (ce qui ne signifie pas mensualisation), ou à d'autres intervalles réguliers, est pris en compte dans la législation nationale.

j) Logement et alimentation (Partie V – art. 25 à 28 et annexe III)

La convention prévoit des prescriptions concernant le logement, la nourriture et l'eau potable qui sont déjà prises en compte par la réglementation nationale.

L'article L. 5545-10 du code des transports a été modifié pour tenir compte des exigences de qualité et de quantité de la nourriture fournie (par conséquent, la division 215 du règlement annexé à l'arrêté du 23 novembre 1987 a également été modifiée).

k) Soins médicaux, protection de la santé et sécurité sociale (Partie VI)

Le Centre de Consultations Médicales Maritimes (CCMM) a été qualifié par l'arrêté du 10 mai 1995 comme centre de consultations et d'assistance télé-médicales maritimes dans le cadre de l'aide médicale en mer pour la France, en application de la directive 92/29/CEE du 31 mars 1992 concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé pour promouvoir une meilleure assistance médicale à bord des navires.

Le CCMM permet déjà de répondre aux obligations résultant, pour la France, des dispositions de la convention n° 164 de l'OIT sur la protection de la santé et des soins médicaux, ratifiée par la France et révisée par la CTM.

L'accès aux installations médicales à terre, prévu par le paragraphe 3 de la règle 4.1 de la convention, relève du fonctionnement général du système de santé français. Les marins sont dans ce cadre couverts conformément aux dispositions de la CTM.

Les articles L. 5542-21 à L. 5542-28 du code des transports déterminent les obligations de l'armateur envers le marin malade ou blessé au service du navire, notamment en ce qui concerne la prise en charge des soins. Il conviendra de prendre en compte la situation des pêcheurs non-résidents employés à bord de certains navires.

l) Protection de la santé et de la sécurité et prévention des accidents (art. 29 à 33)

En matière de prévention des risques professionnels, la réglementation nationale est d'ores et déjà conforme. Les articles L. 5545-1 et suivants du code des transports, qui organisent l'adaptation des dispositions du code du travail pour le travail à bord des navires, sont précisés par des mesures réglementaires spécifiques au travail maritime (décrets n° 98-332 du 29 avril 1998, n° 2000-564 du 16 juin 2000, n° 2005-748 du 4 juillet 2005, n° 2006-1044 du 23 août 2006 et n° 2007-1227 du 21 août 2007).

Concernant les accidents du travail maritime, le service de santé des gens de mer recueille depuis 1993 les données permettant au Bureau de la santé et de la sécurité au travail maritime (direction des Affaires maritimes) d'établir des statistiques annuelles concernant les accidents du travail maritime.

Le code des transports a été modifié de manière à ce que tout accident du travail survenu à bord ainsi que toute maladie professionnelle survenue ou contractée à bord soient enregistrés et déclarés

m) Logement et habitabilité (Annexe III)

La convention, notamment son annexe III sur le logement, prévoit des dispositions concernant les aménagements du navire. La législation nationale est conforme à ces prescriptions (code des transports, art. 5241-2 et L. 5545-9 ; décret n° 84-810 du 30 août 1984 modifié relatif à la sauvegarde de la vie humaine en mer, à l'habitabilité à bord des navires et à la prévention de la pollution, art. 51-1 ; règlement annexé à l'arrêté du 23 novembre 1987 modifié relatif à la sécurité des navires, divisions 226, 227 et 228).

n) Sécurité sociale

En matière de protection sociale, la réglementation nationale permet d'assurer le respect des dispositions de la convention pour les pêcheurs. Le code des transports, pour l’assurance vieillesse, et le décret du 17 juin 1938 relatif à l’assurance maladie, mettent en place une protection sociale pour les pêcheurs salariés et indépendants, comme pour tous les marins, à des conditions non moins favorables que celles qui s’appliquent aux autres travailleurs. La France est également signataire d’accords bilatéraux ou multilatéraux relatifs à la protection sociale des pêcheurs au sens de la convention. A titre d'exemple, on peut citer les accords franco-sénégalais de sécurité sociale du 5 mars 1965, les accords franco-tunisiens de sécurité sociale du 20 mars 1968, les accords franco-algériens de sécurité sociale du 23 janvier 1973 ou les accords franco-malgaches de sécurité sociale du 08 novembre 1969 concernant les marins.

La protection sociale applicable aux pêcheurs intègre l’assurance vieillesse, la maladie, les lésions, les accidents du travail et les décès. A ce titre, les pêcheurs bénéficient des soins appropriés et de l’indemnisation conformes à la réglementation nationale.

Il sera nécessaire de prendre des dispositions appropriées, qui pourraient être analogues à celles prévues par l'article L. 5631-3 du code des transports, pour ceux des pêcheurs non-résidents employés à bord des navires de pêche travaillant dans le cadre des accords de pêche conclus entre l'Union européenne et les pays tiers de même qu’à bord des navires immatriculés aux Terres Australes et Antarctiques Françaises.

En ce qui concerne ces derniers, des actions seront poursuivies et menées dans le cadre de la recherche d'accords bilatéraux ou multilatéraux, afin de donner effet aux dispositions de l'article 36 de la convention.

o) Responsabilités de l'Etat du pavillon (art. 40 à 43)

Les dispositifs d'inspection existants, d'une part de la sécurité des navires, relevant des Centres de Sécurité des Navires (CSN), et, d'autre part, de l'inspection du travail qui, depuis le 1er janvier 2009 a pris en charge le secteur maritime, concourent à la mise en œuvre des responsabilités de l'Etat du pavillon.

Outre ces services, il convient de mentionner les rôles du service de santé des gens de mer et du médecin des gens de mer, qui dispose de compétences en matière de contrôle (dotations médicales, habitabilité, hygiène à bord, conditions de travail).

La délivrance du document prévu par l'article 41, paragraphe 1 attestant que les navires de 24 mètres et plus ou qui naviguent habituellement à plus de 200 milles nautiques de la côte de l'Etat du pavillon ou au-delà du rebord externe du plateau continental, si celui-ci est plus éloigné, sera assurée par la direction des Affaires maritimes, sur la base des différentes inspections, vérifications et contrôles assurés par les services concernés. Il n'est pas envisagé de déléguer à des organismes privés la délivrance de ce document.

Les principes et système d'inspection du travail prévus par la convention n° 178 de l'OIT sur l'inspection des conditions de travail et de vie des gens de mer, ratifiée par la France par la loi n° 2004-146 du 16 février 2004 ont été étendus à l'ensemble des navires y compris les navires de pêche. En France, le contrôle de la réglementation du travail à bord des navires est réalisé, depuis la fusion des services d'inspection du travail en janvier 2009, par les agents de l'inspection du travail. La direction générale du travail est désignée par l'article R. 8121-13 du code du travail autorité centrale au sens de la convention n° 178 de l'OIT. L'inspection du travail comporte une composante maritime qui relève au sein des DIRECCTE, de la direction générale du travail. L'ensemble du littoral, y compris les départements d'outre-mer, est couvert par des sections d'inspection du travail à composante ou à dominante maritime, notamment dans les grands ports. Une quarantaine d'agents, inspecteurs et contrôleurs du travail, sont en charge du contrôle des conditions de travail et de vie des gens de mer à bord des navires.

Des dispositions de nature législative et réglementaire détermineront le champ de compétences des agents de l'autorité maritime en charge de missions relatives à l'inspection des navires et garantiront leur indépendance. Par cohérence, une mesure de nature réglementaire prévoira l'affichage d'une copie du rapport d'inspection à bord du navire.

L'obligation de traitement des plaintes prévu par le paragraphe 1er de l'article 43 pour les navires du pavillon sera assurée via les instructions qui seront données à l'attention des services concernés. Il sera nécessaire de prévoir une disposition législative permettant les échanges entre les services concernés dans le respect de l'obligation de confidentialité.

p) Responsabilités de l'Etat du port (art. 43, par. 2 à 5, art. 44)

Le fondement législatif du contrôle par l'Etat du port, sera étendu afin de prendre en compte les dispositions de la convention qui introduisent le principe du contrôle de l'Etat du port aux navires de pêche. Des mesures de nature réglementaire complèteront le dispositif de contrôle de l'Etat du port actuellement en vigueur et assuré par des inspecteurs de la sécurité des navires chargés de cette mission. Les inspecteurs du travail, à l'instar du dispositif actuel prévu par l'article L. 5548-2 du code des transports, apporteront aux inspecteurs de la sécurité des navires leur concours en tant que de besoin, pour ce qui relève du domaine social. Il en sera de même en ce qui concerne les modalités de plainte des pêcheurs auprès de l'Etat du Port.

Conséquences administratives :

Comme indiqué ci-dessus, la plupart des dispositions de la convention est déjà traitée et les conséquences administratives sont minimes. La mise en place du dispositif de délivrance des documents d'inspection prévu par l'article 41 sera organisée dans le cadre des moyens existants. Les services de l'Etat qui participent aux inspections des navires ou aux différentes vérifications correspondant aux prescriptions de la convention sont les suivants :

- Direction des affaires maritimes (DAM) ;

- Direction générale du travail (DGT) ;

- Service de santé des Gens de Mer (SSGM) ;

- Directions interrégionales de la mer (DIRM) ;

- Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) ;

- Directions départementales des territoires et de la mer (DTTM) ;

- Centres de sécurité des navires (CSN) ;

- Inspections du travail.

Application Outre-mer :

En application des déclarations de la France auprès du BIT des 10 août 2009 et du 3 août 2010, la convention n°188 sur le travail dans la pêche sera applicable de plein droit dans les territoires ayant été déclarés comme faisant partie du "territoire métropolitain" auprès du BIT, à savoir les départements et régions d'outre-mer de Guadeloupe, Guyane, Martinique et La Réunion, ainsi que dans les collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon. En effet, les conventions que la France ratifie sont considérées comme s'appliquant dans ces territoires, dès lors qu'elles sont en vigueur à l'égard de la République.

S'agissant des territoires non métropolitains relevant de l'article 35.4 de la constitution de l'OIT, à savoir la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie, pour lesquels les questions traitées par la convention n°188 entrent dans le cadre de leurs compétences propres, cette convention bien qu'étant susceptible de s'y appliquer, devra, une fois la convention ratifiée par la France, faire l'objet d'une consultation des gouvernements de la Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française afin de recueillir leur acceptation des obligations découlant de la convention. L'application de cette convention devra faire l'objet d'une déclaration expresse de la France au BIT.

Wallis et Futuna et Mayotte n'ont pas été déclarés au BIT, par conséquent les conventions de l'OIT ne s'y appliquent pas. Cette convention ne sera donc pas applicable  tant que la France ne fait pas une déclaration au BIT dans ce sens.

Il est envisagé d'étendre ultérieurement son application à Mayotte. La mise en œuvre de la convention se fera progressivement, dans le cadre des mesures de départementalisation. Il ne sera pas utile de consulter Mayotte pour y étendre l'application de cette convention dès lors que les questions traitées n'entrent pas dans son champ de compétence.

L'application de cette convention est également souhaitée à Wallis et Futuna. Etant en revanche compétente en matière de protection sociale, il conviendra de recueillir l'avis de Wallis et Futuna  portant acceptation des obligations liées à la convention pour la rendre applicable.

Concernant les Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF), où  ne sont plus immatriculés que des navires de pêche, il est envisagé de rendre la convention n° 188 sur le travail dans la pêche pleinement applicable. La France effectuera une déclaration en ce sens auprès de l'OIT, sans besoin de consulter ce territoire, placé sous l'autorité d'un représentant de l'Etat chef du territoire. Ceci permettra de moderniser les règles sociales applicables à bord de ces navires, notamment en ce qui concerne l'emploi des non-résidents, d'y dénoncer les conventions de l'OIT qui y étaient applicables, relatives à la marine marchande, devenues sans objet. Lorsque la portée de ces conventions a été étendue aux pêcheurs, le niveau de protection équivalent leur sera maintenu.

Enfin, cette ratification permettra d'intégrer les dispositions sociales de la convention n° 188 dans le cadre de la lutte contre la pêche illégale dans la zone  relevant des TAAF.

III. – HISTORIQUE DES NÉGOCIATIONS

Le secteur maritime bénéficie d'une place importante au sein du Bureau international du Travail (BIT) depuis sa création en 1919. Une « Commission paritaire maritime » y réunit les représentants des armateurs, de la Fédération internationale des armateurs (ISF) et des gens de mer, de la Fédération internationale des ouvriers des Transports (ITF). Le BIT a adopté dans les années 20 les premières conventions internationales du travail concernant le secteur maritime. Il a édifié tout au long du 20ème siècle un ensemble de normes maritimes très importantes au sein des normes du BIT où 70 conventions et recommandations concernent le travail maritime.

La plupart de ces conventions prévoyaient la possibilité pour les Etats d'étendre leurs dispositions aux pêcheurs, ce qui explique que la pêche n'était concernée au BIT que par cinq conventions (n° 112 sur l'âge minimum, 1959, n° 113, sur l'examen médical, 1959, n° 114 sur le contrat d'engagement, 1959, n° 125 sur le brevet de capacité, 1966 et n° 126 sur le logement, 1966) et deux recommandations (n° 7 sur la durée du travail et n° 126 sur la formation professionnelle).

La Conférence internationale du travail (CIT), qui est annuelle, se réunit en session maritime environ une fois par décennie. C'est en 1996, lors de son avant-dernière session maritime, que devait être adopté le dernier « paquet » de conventions maritimes, avant l'adoption de CTM dix ans après, en 2006.

Au cours des années 1996 à 2000 la commission paritaire maritime s'est inquiétée de la situation engendrée par la dégradation des conditions de travail et d'emploi des gens de mer dans la navigation maritime internationale. C'est ainsi que la 29ème session (22-26 janvier 2001) de cette commission adoptait des conclusions fortes à l'attention du conseil d'administration (CA) du BIT et partant, des gouvernements qui y sont représentés. Il en a résulté la création d'un groupe de travail tripartite de haut niveau sur les normes du travail maritime en vue de l'adoption d'un instrument-cadre. Cette décision est à apprécier dans le contexte de la nouvelle «approche intégrée» des normes internationales du travail, approuvée par la 279ème session de la CIT (novembre 2000), de même que dans celle de la notion de « travail décent » promue par l'OIT. Ces travaux ont abouti à l'adoption en février 2006 de la CTM, avec un large consensus.

En parallèle à cette démarche concernant la marine marchande, l'OIT devait décider en 2002 d'engager une démarche similaire concernant les pêcheurs qui ne devaient plus être pris en compte par la convention concernant la marine marchande.

Le texte de la Convention n° 188 a été débattu lors de trois sessions de la Conférence internationale du travail (CIT) pour finalement y être adopté en 2007 à une très forte majorité. Cet examen approfondi a permis au texte de mieux correspondre aux différentes activités et types de pêche, qu'il s'agisse de petits navires, de pêche artisanale ou de navires plus importants, et en fonction des particularités de ces navires qui sont très diverses selon les différentes parties du monde. Le BIT a complété ce texte en élaborant depuis des directives pour les agents chargés du contrôle par l'Etat du port effectuant des inspections en application de la convention (n° 188) relative au travail dans la pêche, 2007.

IV- ÉTAT DES SIGNATURES ET RATIFICATIONS

L'article 48 de la convention prévoit qu'elle entrera en vigueur 12 mois après que les ratifications de dix membres de l'OIT comprenant dix Etats côtiers ont été enregistrées par le Directeur Général du BIT. Quatre ratifications ont été enregistrées à ce jour (Bosnie-Herzégovine, Argentine, Maroc et Afrique du Sud).

Au niveau européen, le Conseil a, par décision du 7 juin 2010, autorisé les États membres à ratifier, dans l'intérêt de l'Union européenne, la convention n° 188 de l'Organisation internationale du travail relative au travail dans la pêche adoptée le 14 juin 2007.

En cas d'accord des partenaires sociaux européens à l’issue des négociations en cours de finalisation, et à l'instar de la directive 2009/13/CE du Conseil du 16/02/2009 pour la CTM, cette convention pourra être intégrée dans la législation européenne. De ce fait, outre la ratification directe de la Convention, les Etats membres devront s'y conformer, ce qui constitue une forte incitation directe à la ratifier, en accord avec l’engagement pris par décision du Conseil de juin 2010.

V. – DÉCLARATIONS OU RÉSERVES

L'article 35 de la constitution de l'OIT prévoit que chaque Etat membre qui ratifie une convention doit, dans le plus bref délai possible après ratification, communiquer au bureau international du travail (BIT) une déclaration faisant connaître l'état de la question de l'application de cette convention aux territoires non métropolitains de cet Etat membre. Une déclaration sera communiquée au BIT, le cas échéant, en fonction de la réponse des collectivités d'outre-mer consultées.

1 Texte de la convention n° 188 sur le travail dans la pêche (www.ilo.org).

2 Loi n° 2007-1200 du 10 août 2007 autorisant l'adhésion au protocole relatif à la convention internationale de Torremolinos sur la sécurité des navires de pêche (www.legifrance.gouv.fr).

3 Convention du travail maritime (www.ilo.org).

4 Cass. Soc, 1er avril 1992, pourvois n° 89-20.475, 89-20.476, 89-20.477 et 89-20.478 (www.legifrance.gouv.fr).

5 Protocole d'entente de Paris sur le contrôle des navires par l'Etat du port (www.parismou.org)


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