N° 965
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 avril 2013.
PROPOSITION DE LOI
visant à réglementer le rachat de l’or
et des métaux précieux et sa publicité,
(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par Mesdames et Messieurs
Valérie BOYER, Franck MARLIN, Christophe GUILLOTEAU, Guy TEISSIER, Alain MOYNE-BRESSAND, Jérôme CHARTIER, Thierry LAZARO, Patrice VERCHÈRE, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Jean-Marie SERMIER, Dominique TIAN, Fernand SIRÉ, Christian ESTROSI, Laurent FURST, Jean-Pierre VIGIER, Dominique NACHURY, Alain MARTY, Marie-Jo ZIMMERMANN, Bernard PERRUT, Dominique DORD, Véronique LOUWAGIE, Jean-Claude GUIBAL, Patrice MARTIN-LALANDE, François SCELLIER, Olivier MARLEIX, Bernard BROCHAND, Valérie LACROUTE, Annie GENEVARD, Michel HERBILLON, Bérengère POLETTI et Jean-Pierre BARBIER,
députés.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Depuis cinq ans, les cours des métaux précieux ont connu une hausse spectaculaire, l’or a ainsi vu son cours plus que tripler. Ce fort accroissement de valeur attise les convoitises de certains. Les vols d’or dont sont victimes les particuliers ou les professionnels dans leurs bijouteries sont en recrudescence. Les services de police de nombreux départements appellent la population à la vigilance, concernant ces actes délictueux.
En parallèle, l’on observe une multiplication des publicités pour le rachat d’or, qui proposent aux particuliers de vendre leurs bijoux en profitant de la hausse des cours. La prise de conscience publique de la situation des marchés de l’or, et des métaux précieux en général, favorisée par cette publicité désormais diffusée via de nombreux médias (télévision, presse, internet…), entraîne le développement de commerces dont les pratiques ne sont pas réglementées et permettent certains abus auprès des personnes les plus vulnérables.
Il convient désormais de mettre fin à ces pratiques. Des exigences doivent donc s’imposer à ces activités dans le but de faire obstacle à l’augmentation des vols de métaux précieux devenus très rentables pour les délinquants et hautement préjudiciables pour la société dans son ensemble.
Si une interdiction générale de publicité se révèle très difficile à justifier, une réglementation stricte peut néanmoins être mise en œuvre. D’autres secteurs commerciaux, à l’image des armes à feu, ont vu leurs droits à la publicité encadrés dans le but de protéger le consommateur.
Cette protection est aujourd’hui nécessaire. La publicité pour le rachat d’or peut, en effet, être de nature à attiser les convoitises et augmenter le risque d’occurrence des délits liés à la valeur des métaux précieux.
Un agrément de ces commerçants par une autorité reconnue, ainsi que l’établissement de dispositions visant à protéger le consommateur permettront également d’instaurer des règles de bonne conduite, de mettre fin à certaines pratiques, et de rétablir l’image de ce secteur d’activités commerciales.
Pour finir, la tenue d’un registre des transactions effectuées au sein des comptoirs de l’or et autres boutiques spécialisées permettra de réinstaurer un minimum de transparence et d’assurer la traçabilité des échanges.
Tel est l’objet de la présente proposition de loi que je vous propose d’adopter.
PROPOSITION DE LOI
Règlementation de l’exercice du rachat de métaux précieux
Les commerçants dont une part de l’activité est l’achat d’or à des particuliers doivent obtenir un agrément délivré par l’autorité préfectorale du siège de leur exercice pour pouvoir exercer cette activité.
L’achat de métaux précieux doit faire l’objet d’un contrat bipartite fixant les obligations réciproques de l’acheteur et du vendeur. Ce contrat doit respecter les dispositions prévues au titre III du livre III du code civil.
Les conditions générales de vente et d’achat doivent être affichées de manière visible pour la clientèle sur le lieu où se déroule l’opération.
I. – Une attestation sur l’honneur relative à l’origine des pièces ou objets faisant l’objet de la transaction est exigée pour les particuliers vendeurs de métaux précieux.
II. – Une copie de la carte nationale d’identité ou d’un titre de séjour en cours de validité ainsi qu’un justificatif de domicile du particulier vendeur sont exigés au moment de la transaction et transmis par l’entreprise acheteuse à l’organisme responsable de la tenue du registre visé au V du présent article.
III. – Une copie du certificat d’assurance des pièces échangées est exigée pour les transactions d’un montant supérieur à une somme fixée par décret et est transmise par l’entreprise acheteuse à l’organisme responsable de la tenue du registre.
IV. – Un certificat de propriété ainsi qu’un certificat d’authenticité doivent être délivrés par le professionnel vendeur au moment de la transaction.
V. – Il est créé un registre national des transactions de métaux précieux physiques entre les vendeurs particuliers et les acheteurs professionnels sous réserve de conformité aux obligations édictées par la Commission nationale de l’informatique et des libertés auprès de laquelle ce registre fait l’objet d’une déclaration préalable à sa constitution.
Ce registre est tenu au ministère de l’économie des finances et de l’industrie et n’est accessible qu’aux services de ce ministère et aux organismes d’application de la loi accrédités par le ministre.
Ce registre consigne :
– La date de chacune des transactions ;
– Les nom(s) et prénom(s) des vendeurs ;
– Les domiciles des vendeurs ;
– Le numéro d’immatriculation au registre du commerce de l’acheteur ;
– Le numéro d’identification SIREN de l’acheteur ;
– Le siège social de l’acheteur ;
– Le descriptif des pièces faisant l’objet de chacune des transactions (matière, pureté, poids, forme) ;
– Le prix convenu au moment de chacune des transactions.
Il appartient aux entreprises acheteuses de communiquer mensuellement au service compétent les informations mentionnées aux huit alinéas précédents.
Toute déclaration frauduleuse réalisée en application de l’article 4 de la présente loi est sanctionnée conformément aux dispositions énoncées au chapitre premier du titre IV du livre IV du code pénal.
Dispositions relatives à la publicité
I. – La publicité relative au rachat d’or et des métaux précieux (or, argent et platinoïdes) est règlementée sur les médias suivants :
1° Presse ;
2° Télévision ;
3° Prospectus ;
4° Publications périodiques ;
5° Internet ;
6° Tout autre support de l’écrit, de la parole ou de l’image.
Cette réglementation établie par décret doit prévoir une indication claire des conditions de formation du prix d’acquisition et des conditions générales d’achat relatives aux transferts de propriété. Elle s’applique à tous les commerçants de métaux précieux qu’ils soient sédentaires ou non, ainsi qu’aux bijoutiers rachetant des métaux précieux d’occasion.
II. – Dans la publicité relative au rachat d’or et des métaux précieux (or, argent et platinoïdes) :
1° La mention du prix de rachat au gramme de l’or, de l’argent et des autres métaux précieux est interdite sur les publicités indiquées compte tenu des fluctuations journalières des cours ;
2° La mention lisible de la déduction de la taxe fiscale de 8 % sur le prix de rachat est obligatoire ;
3° La promesse d’une réduction selon le montant de la transaction ou la promesse d’un cadeau, gain ou service est apparentée au démarchage à domicile ;
4° La transmission d’une publicité sous la forme d’un courrier personnalisé est assimilée au démarchage à domicile ;
5° Le consommateur doit pouvoir identifier lisiblement et immédiatement la société émettrice des publicités indiquée par son nom, son nom commercial, son siège et les informations relatives à son inscription au registre du commerce et au bureau de la garantie.
Les conditions générales d’achat des métaux précieux par correspondance ou par internet doivent lisiblement indiquer les modalités des délais d’envois, le délai précis d’évaluation des métaux précieux et le retour aux frais de l’acheteur en métaux précieux en cas de contestation.
Les documents publicitaires, catalogues ou périodiques relatifs au rachat de métaux précieux ne peuvent être envoyés qu’aux personnes qui en ont fait la demande et ces envois sont considérés comme du démarchage à domicile.
Toute infraction aux dispositions des articles 6 et 7 de la présente loi est punie d’une amende de 45 000 euros.
En cas de récidive, le tribunal peut ordonner, aux frais du condamné, la publication de sa décision, intégralement ou par extraits, dans un ou plusieurs journaux qu’il désigne. Il peut également ordonner l’affichage de sa décision dans les conditions prévues à l’article 131-35 du code pénal.
Les officiers de police judiciaire peuvent, avant toute poursuite, saisir les documents publicitaires, à l’exception des publications périodiques, édités ou diffusés en infraction des dispositions de la présente loi.
En cas de condamnation, le tribunal ordonne la destruction des exemplaires saisis.