N° 2422
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 décembre 2014.
PROPOSITION DE LOI
transférant à l’État l’intégralité des compétences
en matière d’incendie et de secours,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Jean-François MANCEL,
député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La protection de nos concitoyens face aux risques et aux accidents de tous ordres est l’une des responsabilités essentielles de la sécurité intérieure, au même rang que la sécurité publique. À ce titre, les catastrophes naturelles ou industrielles qui ont frappé notre pays ces dernières années ont révélé, dans des conditions souvent dramatiques, l’utilité de cette mission aux yeux de nos concitoyens.
Aussi, l’organisation collective de la sécurité de nos concitoyens en matière d’incendie et de secours est l’une des compétences pour laquelle il ne saurait être question de déroger au principe d’égalité de traitement pour tous.
Ce principe, inscrit dans le préambule de notre Constitution - « une même sécurité des citoyens face aux calamités » - est pourtant aujourd’hui mis en péril.
En effet le dispositif juridique échafaudé au fil des ans pour répondre à cet impératif se caractérise par un enchevêtrement complexe et ambigu des compétences au point de rendre leur exercice contradictoire.
Ainsi, si le maire et le préfet exercent leur autorité sur les services d’incendie et de secours dans le cadre de leurs pouvoirs respectifs de police, la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a transférée au département ,formellement, depuis le 1er janvier 2006 la totalité du financement des moyens humains, matériels et immobiliers des services d’incendie et de secours (SDIS) alors que la mise en œuvre opérationnelle de ces moyens lui échappe totalement, notamment en matière d’organisation, de choix des matériels ou de gestion des carrières.
Une seule voie peut permettre de corriger les imperfections que sont :
–la séparation entre le prescripteur des dépenses et le payeur, source de dilution des responsabilités ;
– la multiplicité des payeurs, source d’inflation des coûts ;
– l’inégalité de traitement pour le citoyen consécutive au mode de financement des services d’incendie et de secours.
Cette solution consiste à confier à l’État la responsabilité et l’exercice d’une compétence exclusivement régalienne.
Bien loin de contrer le mouvement de décentralisation, ce choix est celui d’une décentralisation bien comprise dans laquelle l’État se concentre sur son cœur de métier et peut ainsi transférer au profit des collectivités les domaines d’action qui n’engagent pas la cohésion nationale.
De plus, attribuer à l’État la compétence qui lui revient dans le domaine des services d’incendie et de secours permet d’offrir aux sapeurs-pompiers :
– un déroulement de carrière beaucoup plus valorisant au sein d’un corps national unique ;
– des conditions d’exercice mieux adaptées aux exigences de leur profession, en particulier dans les zones sensibles où ils sont parfois pris à partie au cours de leurs interventions ;
– la reconnaissance du risque inhérent à leur métier.
Cette réorganisation clarifierait enfin le système tout en garantissant l’égalité de traitement et l’efficacité du service que sont en droit d’attendre nos concitoyens.
En outre, elle permettrait de renforcer durablement les corps de sapeurs-pompiers volontaires qui pourraient être intégrés aux forces de réserve et bénéficier de contrats de volontariat aussi attractifs que ceux proposés par les armées.
Enfin, en ce qui concerne le financement de cette compétence, un dispositif transitoire organisera une sortie progressive du système actuel afin de ne pas entraîner une surcharge financière brutale pour l’État.
Les réformes actuelles en matière de décentralisation sont, de surcroît, l’occasion de mettre en œuvre cette proposition.
PROPOSITION DE LOI
Toutes les compétences en matière de protection et de secours contre l’incendie et les catastrophes naturelles ou industrielles sont transférées à l’État.
Les sapeurs-pompiers professionnels sont des fonctionnaires de l’État, régis par la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État.
Les modalités de leur intégration dans les cadres de la fonction publique de l’État sont fixées par décret en Conseil d’État.
Les modalités de dévolution à l’État des biens affectés aux services d’incendie et de secours sont fixées par décret en Conseil d’État.
Sont abrogées toutes les dispositions contraires à la présente loi.
Il est institué une période transitoire de dix ans à compter de l’adoption de la présente loi durant laquelle l’État est autorisé à prélever de manière dégressive sur les dotations aux départements et aux établissements publics intercommunaux les ressources nécessaires à l’exercice des compétences transférées aux termes de la présente loi. La dégressivité de ce prélèvement, liée dans son volume à l’indice des prix à la consommation, est fixée par décret en Conseil d’État.
Il est créé un comité départemental de la sécurité civile composé des élus locaux, des sapeurs-pompiers, de représentants de la sécurité sociale et des entreprises présentant un risque industriel. Ce comité est consulté par le préfet pour toutes les questions liées à l’organisation territoriale du service d’incendie et de secours et à la promotion du volontariat.
Les charges occasionnées pour l’État par la présente loi sont compensées à l’échéance du délai à l’article 4, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.