N° 2499
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 janvier 2015.
PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Yannick MOREAU,
député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L’article 39 de la Constitution dispose que : « Les projets de loi sont délibérés en conseil des ministres après avis du Conseil d'État et déposés sur le bureau de l'une des deux assemblées » et que : « Dans les conditions prévues par la loi, le président d'une assemblée peut soumettre pour avis au Conseil d'État, avant son examen en commission, une proposition de loi déposée par l'un des membres de cette assemblée, sauf si ce dernier s'y oppose. »
La récente affaire de la fuite de l’avis du Conseil d’État sur le projet de loi dit « Macron » soulève plusieurs interrogations :
– est-il normal dans notre démocratie au XXIe siècle que la transparence sur les avis du Conseil d’État ne soit pas la règle, et alors que même le secret de la défense nationale n’a plus de raison d’être un obstacle absolu à l’information de la Représentation nationale ?
– est-il normal que des avis rendu dans l’intérêt de l’État de droit soient délivrés par le Conseil d’État au profit exclusif du pouvoir exécutif, ne mettant pas le Parlement à « égalité des armes juridiques » avec le Gouvernement ?
– ce déséquilibre institutionnel est-il encore de mise alors même que le Parlement peut requérir des avis du Conseil d’État, dont prend alors connaissance le Gouvernement, si bien qu’on s’interroge sur la réciprocité ?
– enfin, les avis rendus publics par le Conseil d’État, ou, à tout le moins, communiqués au Parlement comme il devrait être de droit dans une démocratie moderne, ne conduiraient-ils pas à mieux garantir l’impartialité du Conseil d’État au service du droit ?
– le fait de maintenir secrets ces avis rendus au bénéfice exclusif du Gouvernement en place ne fait-il pas planer un doute ?
L’avis rendu public par des médias a permis de découvrir qu’un des co-rapporteurs du texte n’est autre que l’ancien directeur de cabinet de Jean-Marc Ayrault, prédécesseur de M. Valls. Certes, ce Conseiller d’État est certainement un juriste très compétent, mais aussi très engagé au PS (il était le directeur de campagne de Mme Royal aux élections présidentielles en 2007). Si l’avis sur le projet Macron émet quelques critiques sur ce texte, la Représentation nationale ignore si le choix de rapporteurs aussi engagés n’a pas eu pour effet de tempérer les critiques du Conseil d’État et d’amoindrir son objectivité ? La transparence aura aussi du bon pour le Conseil d’État.
Toutes ces raisons conduisent à mettre fin à l’omerta et obliger, par la modification qui vous est soumise, de rendre le Parlement destinataire des avis du Conseil d’État.
PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE
Le deuxième alinéa de l’article 39 de la Constitution est complété par une dernière phrase ainsi rédigée :
« Les avis du Conseil d'État sont transmis au Gouvernement et Parlement. »