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N° 3913

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er juillet 2016.

PROPOSITION DE LOI

relative au renforcement de la protection des poissons grands migrateurs et à la restauration des continuités écologiques aquatiques,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut
de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Pierre VIGIER, Élie ABOUD, Sylvain BERRIOS, Marc-Philippe DAUBRESSE, Jean-Pierre DOOR, Virginie DUBY-MULLER, Marc FRANCINA, Laurent FURST, Annie GENEVARD, Françoise GUÉGOT, Alain MOYNE-BRESSAND, Alain SUGUENOT, Guy TEISSIER, Jean-Marie TÉTART, Marie-Jo ZIMMERMANN et Michel HEINRICH,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Seules 43,4 % des masses d’eau en France sont en bon ou très bon état écologique. Notre pays reste donc encore loin de l’objectif des 66 % des masses d’eau qu’elle s’était fixées pour 2015.

La continuité écologique des cours d’eau est un élément essentiel pour l’atteinte du bon état, voire du très bon état écologique des milieux aquatiques fixé par la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau, dite directive-cadre sur l’eau (DCE). Elle se caractérise par la libre circulation des espèces aquatiques et par le bon déroulement du transport des sédiments.

Ainsi assurer la circulation et la conservation des espèces aquatiques constitue une garantie d’un très bon état écologique des milieux aquatiques et, par conséquent, d’une bonne continuité écologique de nos cours d’eau.

Ce constat a été clairement mis en évidence dans le rapport d’information « Un nouvel élan pour la politique de restauration des continuités écologiques aquatiques » publié en janvier 2016 par les députés Françoise Dubois et Jean-Pierre Vigier.

Prenant acte que l’objectif de restauration des continuités écologiques aquatiques est loin d’être atteint à l’aune des objectifs fixés, le rapport relève qu’il est essentiel de prioriser les actions et de prioriser encore plus les cours d’eau sur lesquels la restauration sera effective dans les années à venir. De par l’urgence à agir afin de préserver notre biodiversité, les poissons grands migrateurs, menacés de disparition, constituent un paramètre de priorité. Leur préservation serait emblématique de la réussite de la restauration de la continuité écologique des cours d’eau.

Il est ainsi proposé que les cours d’eau sur lesquels sont présents des poissons grands migrateurs fassent l’objet d’un niveau de classement supplémentaire.

En effet, le classement des cours d’eau constitue un outil réglementaire établi afin de limiter l’impact des ouvrages sur les écosystèmes aquatiques. L’autorité administrative est chargée d’élaborer deux listes distinctes de cours d’eau pour chaque bassin ou sous-bassin :

– la liste 1, sur laquelle sont classés trois types de cours d’eau : les cours d’eau en très bon état écologique, ceux qui sont identifiés par les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux, comme jouant le rôle de réservoir biologique nécessaire au maintien ou à l’atteinte du bon état écologique des cours d’eau et enfin ceux dans lesquels une protection complète des poissons migrateurs est nécessaire.

Le classement sur la liste 1 interdit la construction de nouveaux ouvrages dès lors qu’ils constituent un obstacle à la continuité écologique aquatique et subordonne le renouvellement des concessions ou des autorisations au respect de prescriptions destinées à maintenir le très bon état écologique, à atteindre le bon état écologique ou à protéger les poissons grands migrateurs ;

– la liste 2, qui concerne les cours d’eau, parties de cours d’eau ou canaux sur lesquels il est nécessaire de rétablir le transport sédimentaire et la circulation des poissons migrateurs. En pratique, les ouvrages existants situés sur des cours d’eau classés sur la liste 2 doivent être gérés, entretenus et équipés selon des règles définies par le préfet coordinateur de bassin, en concertation avec le propriétaire de l’ouvrage ou, à défaut, avec l’exploitant. Les propriétaires ou exploitants disposent d’un délai de cinq ans à compter de la publication de l’arrêté de classement pour mettre leur ouvrage en conformité avec ces règles.

Son objectif est d’accélérer le rythme de restauration des fonctions écologiques ou hydrologiques des cours d’eau sans attendre l’échéance des concessions ou des autorisations.

Ainsi, l’article 1er de la présente proposition de loi vise à créer une troisième liste de cours d’eau classés « grands migrateurs », qui seraient prioritaires par rapport aux autres cours d’eau pour le déploiement des opérations d’aménagement d’ouvrages.

Aller à contre-courant de la menace d’extinction de grands migrateurs serait une double victoire pour notre biodiversité avec l’assurance de l’atteinte d’un très bon état écologique des cours d’eau où ces poissons sont encore présents et la sauvegarde d’une espèce.

Cette proposition de classement supplémentaire se veut pragmatique face à l’ouvrage dense d’obtenir un bon état écologique des cours d’eau. Elle veut prioriser pour obtenir des résultats probants. Sélectionner les cours d’eau permettra de se rapprocher de manière plus efficace de l’objectif fixé.

De plus, cet article prévoit, qu’afin de se donner les moyens de restaurer la continuité écologique sur ces cours d’eau, il est essentiel que l’aménagement des ouvrages soient prioritairement financés, voire intégralement.

Par ailleurs, l’article 2 prévoit, qu’afin de se donner les moyens de restaurer la continuité écologique sur ces cours d’eau grands migrateurs, il semble essentiel de mettre en place, spécifiquement sur ces cours d’eau, une politique de la pêche compatible avec la protection et la valorisation des populations de migrateurs et qui limite les méthodes susceptibles d’entraîner des captures accidentelles. Cela est aussi nécessaire concernant la mise en place d’une politique de gestion des prédateurs compatibles avec la présence des migrateurs, notamment le silure et le cormoran.

PROPOSITION DE LOI

TITRE IER

DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES À LA PROTECTION
DES POISSONS GRANDS MIGRATEURS

Article 1er


L’article L. 214-17 du code de l’environnement est ainsi modifié :


1° Le I est complété par un 3° ainsi rédigé :


« 3° Une liste de cours d’eau, parties de cours ou canaux dans lesquels il est nécessaire de protéger les poissons grands migrateurs présents sur ces les cours d’eau et qui se reproduisent naturellement. Les cours d’eau et les ouvrages sont gérés, entretenus et équipés selon des règles définies par l’autorité administrative dans le but de protéger et de restaurer les espèces menacées. Ces règles peuvent porter sur l’amélioration de la qualité de l’eau, la circulation piscicole et le transit sédimentaire. » ;


2° À la première phrase du II, les mots : « et 2° » sont remplacés par les mots : « à 3° » ;


3° À la seconde phrase du premier alinéa du III, après la référence : « 2° », sont insérés les mots : « et du 3° » ;


4° Le dernier alinéa du III est ainsi modifié :


a) 
À la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « du 2° » sont remplacés par les mots : « des 1° et 2° » ;


b) 
Il est complété par une phrase ainsi rédigée :


« Les obligations résultant du 3° peuvent ouvrir droit, sur décision de l’autorité administrative, à une indemnisation partielle ou intégrale. »

Article 2


La section 2 du chapitre II du titre III du livre IV du même code est complétée par un article L. 432-4 ainsi rédigé :


« Art. L. 432-4. – Un décret détermine les règles particulières applicables à la pêche et à la gestion des prédateurs des poissons migrateurs dans les cours d’eau mentionnés au 3° du I de l’article L. 214-17. »

TITRE II

DISPOSITIONS DIVERSES, TRANSITOIRES ET FINALES

Article 3

Les charges pour l’État sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


© Assemblée nationale