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N
° 969

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 17 avril 2013

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE LOI relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche (n° 835),

PAR M. Christophe BORGEL,

Député.

——

Voir le numéro : 835

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

I.— DYNAMISER LA RECHERCHE 7

A.— LA NÉCESSAIRE RELANCE DE L’ÉTAT STRATÈGE 7

1. Un mouvement européen 7

2. Le bilan contrasté de la première Stratégie nationale pour la recherche et l’innovation (SNRI) 9

B.— RECENTRER LES PRIORITÉS DE LA RECHERCHE 9

1. Une stratégie nationale de la recherche resserrée 9

2. Un outil de pilotage modernisé : le Conseil stratégique de la recherche 11

II.— RÉNOVER LE SYSTÈME D’ÉVALUATION DE LA RECHERCHE 13

A.— LA CRÉATION DE L’AERES : UNE RÉFORME OPPORTUNE MAIS INCOMPLÈTE 13

1. Une tradition d’évaluation sujette à caution 13

2. La création de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES) 14

B.— RESTAURER LA CONFIANCE DANS L’ÉVALUATION 15

1. Le fonctionnement de l’AERES : des critiques multiples 15

2. Une nouvelle instance : des missions précisées, une gouvernance rationalisée 16

III.— RENFORCER LE TRANSFERT DES RÉSULTATS DE LA RECHERCHE 19

A.— ASSURER LE CONTINUUM DE LA RECHERCHE A L’ENTREPRISE 19

1. La défiance dépassée entre la recherche et l’industrie 19

2. Surmonter les difficultés à atteindre le marché 20

B.— LE TRANSFERT, ÉTAPE INDISPENSABLE DU CONTINUUM 21

1. Consacrer le transfert comme véritable mission de service public 21

2. Diversifier les leviers 21

a) Encourager la recherche technologique 21

b) Soutenir les partenariats existants 22

c) Agir dans tous les domaines 25

TRAVAUX DE LA COMMISSION 27

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE 27

II.— EXAMEN DES ARTICLES 33

TITRE VI : DISPOSITIONS RELATIVES À LA RECHERCHE 33

Chapitre Ier : L’organisation générale de la recherche 33

Article 48 (section 2 du chapitre IV du titre Ier du Livre Ier du code de la recherche) : Remplacement de l’AERES par un Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur 33

Article 49 (article L. 114-3-1 du code de la recherche) : Missions du Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur 34

Article 50 (article L. 114-3-3 du code de la recherche) : Gouvernance du Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur 38

Article 51 (articles L. 114-3-2, L. 114-3-4, L. 114-3-5, L. 114-3-6, L. 114-3-7, L. 311-2 du code de la recherche) : Coordination juridique 41

Article 52 (articles L. 711-1, L. 711-4 du code de l’éducation) : Coordination juridique 42

Article 53 (article L. 120-1 [rétablissement] du code de la recherche) : Création du Conseil stratégique de la recherche 43

Article 54 (article L 311-1 du code de la recherche) : Renforcement de la transparence de la nomination des dirigeants d’organismes 45

Chapitre II : L’exercice des activités de transfert pour la création de valeur économique 46

Article 55 (article L. 329-7 du code de la recherche) : Transfert des résultats de la recherche vers les PME de l’Union européenne 46

Article additionnel après l’article 55 (article L. 342-2 du code de la recherche) : Fonctionnement en réseau des centres techniques industriels 48

Article additionnel après l’article 55 : Mandataire unique en cas de copropriété de brevets 49

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 51

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 55

MESDAMES, MESSIEURS,

Rendant hommage au prix Nobel, M. Serge Haroche, le Président de la République M. François Hollande a réaffirmé « Investir dans le savoir, c’est préparer la France de demain ». Développer un enseignement supérieur et une recherche de qualité, c’est un enjeu pour nos sociétés contemporaines tant les grandes questions auxquelles elles sont confrontées trouveront leurs réponses pour partie dans l’inventivité de nos chercheurs. C’est un enjeu pour notre jeunesse, pour l’élévation du niveau de connaissances, de qualification. C’est un enjeu enfin pour notre économie qui répondra à la concurrence internationale, notamment grâce à une recherche porteuse d’innovation.

C’est dans ce contexte que s’inscrit le projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche. Bien qu’il soit le septième texte « recherche » en cinquante ans, et surtout le troisième depuis 2006, ce projet de loi est novateur, tant par la façon dont il a été élaboré que dans les perspectives qu’il entend ouvrir.

Fruit de multiples consultations, menées pendant plusieurs mois entre juillet et novembre 2012 auprès de l’ensemble des acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche (1) et des citoyens, le texte soumis à votre examen s’inspire des propositions formulées lors des Assises de l’enseignement supérieur et de la recherche, ainsi que de celles formulées par notre collègue M. Jean-Yves Le Déaut, premier vice-président de l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, dans son rapport intitulé Refonder l’université, dynamiser la recherche, mieux coopérer pour réussir, remis en janvier 2013 à la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Geneviève Fioraso.

Ces Assises ont fait prendre conscience des dysfonctionnements du système d’enseignement supérieur et de recherche, et en particulier de la nécessité de simplifier ses structures tout en le recentrant sur une logique de coopération. En effet, la loi n° 2006-450 du 18 avril 2006 de programme pour la recherche et la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités ont empilé les structures au point d’en faire ce que certains qualifient de « mikado », tant la complexité le rendait illisible. Cette situation explique en partie les difficultés rencontrées pour transférer les résultats de recherche vers les entreprises, en particulier au niveau local, et surtout d’en permettre une exploitation économique pérenne.

Le projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche met l’accent sur la réussite des étudiants et vise à simplifier les structures de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il se fixe par ailleurs comme objectif de donner enfin à l’État son rôle de stratège dans la politique nationale de la recherche de manière à la rendre plus lisible et opérationnelle vis-à-vis des acteurs nationaux ainsi que des partenaires européens et internationaux.

La commission des affaires économiques de notre Assemblée s’est saisie pour avis sur le Titre VI du projet de loi, c’est-à-dire des articles 48 à 55 relatifs à la recherche. Il ressort de ces dispositions des évolutions positives qui vont dans le sens de la nouvelle ambition pour la recherche voulue par le Gouvernement.

Cette nouvelle ambition poursuit trois objectifs : une redéfinition plus resserrée et centralisée des priorités de la recherche sous la forme d’une stratégie nationale de la recherche, dont l’évaluation rénovée permettra de renforcer l’efficacité, et dont le développement du transfert des résultats vers les secteurs socio-économiques constitue une des mesures les plus emblématiques et porteuses pour l’avenir de la compétitivité française. Votre Rapporteur se réjouit donc de l’inscription de ce texte à l’ordre du jour de notre Assemblée, et s’il proposera quelques évolutions, émet un avis favorable à son adoption.

I.— DYNAMISER LA RECHERCHE

A.— LA NÉCESSAIRE RELANCE DE L’ÉTAT STRATÈGE

1. Un mouvement européen

À l’orée du XXIe siècle, alors que la croissance des États européens était déjà jugée insuffisante, le Conseil européen lançait un programme stratégique pour la décennie à venir, poursuivant l’objectif de bâtir « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et une plus grande cohésion sociale ». La Stratégie de Lisbonne visait ainsi à porter l’effort de recherche et de développement (R&D) de 2 % à 3 % du PIB des États membres. Si, dès 2004, le rapport du groupe de haut niveau présidé par M. Wim Kok (2) avait souligné les retards pris dans la réalisation des objectifs énoncés, force est de constater aujourd’hui l’échec de cette feuille de route ambitieuse. Certes, de nombreux progrès ont été réalisés, mais la crise économique et financière qui continue de secouer les États européens a annihilé les espoirs nourris en 2000, ou du moins a repoussé les objectifs. La France n’échappe évidemment pas à ce constat. Depuis la grande loi du 12 juillet 1999 sur l’innovation et la recherche, portée par le Gouvernement de Lionel Jospin, de trop timides avancées sont intervenues : à titre d’exemple, la naissance de l’Agence nationale de la recherche, qu’il convient de saluer, a développé la culture de financement sur projets. Cependant, en suivant la seule logique de financement de la recherche, certains laboratoires de recherche fondamentale, dont les programmes s’étalent sur plusieurs années, ont été confrontés à de sérieuses difficultés.

L’importance de la recherche comme pilier de l’économie est consacrée. C’est indispensable pour réussir le redressement du pays voulu par le Président de la République, d’autant plus dans un moment où l’économie reste atone. Il ne s’agit pas d’une recette magique ou d’une simple déclaration d’intention, mais bien de doter notre pays d’un agenda stratégique formalisé qui se trouve placé au cœur des politiques publiques de l’Union européenne comme de nos principaux partenaires.

Au niveau communautaire, la Commission a adopté le 30 novembre 2011 le programme-cadre Horizon 2020 qui prévoit un investissement de 80 milliards d’euros sur la période 2014-2020. Partie intégrante de la stratégie plus générale de l’Europe pour la croissance et l’emploi –  dénommée Europe 2020 – ce programme repose sur trois grandes priorités : l’excellence scientifique (24,6 M€), la primauté industrielle (17,9 M€), les défis de société afin de répondre aux six priorités stratégiques identifiées (31,7 M€) (3). La grande nouveauté de ce programme est de regrouper l’intégralité des financements destinés à la recherche et à l’innovation, alors que différents guichets se trouvaient auparavant éparpillés et gérés par une myriade de structures indépendantes les unes des autres. Dans ce contexte, Madame la ministre l’a souvent rappelé, il est essentiel que les acteurs français de la recherche se tournent davantage vers les financements européens, et bénéficient ainsi des fonds importants pour lesquels la France est un des premiers contributeurs. Au-delà, les principaux États membres ont décliné leur propre agenda stratégique, avec parfois une certaine avance sur l’initiative communautaire. Ainsi, en Allemagne, le Gouvernement fédéral a adopté le 14 juillet 2010 la High Tech Strategie 2020, c’est-à-dire le cadre stratégique de la recherche et de l’innovation pour la période 2010-2020. Dans la continuité de la stratégie allemande établie pour la période 2006-2009, les autorités allemandes ont choisi de focaliser l’effort de la recherche publique et privée sur cinq priorités : climat et énergie, santé et alimentation, mobilité, sécurité, communication (4). La mise en œuvre de cette stratégie sera pilotée par un groupe d’experts issus du monde de la recherche et de l’industrie – Forshungsunion – chargé d’élaborer les programmes structurants pour chaque priorité. En parallèle, des projets d’avenir – Zukunftsprojekte – qui s’étaleront sur plusieurs d’années, ont été définis afin de poursuivre des objectifs concrets : une ville neutre en CO2, un million de véhicules électriques d’ici 2020, etc. Dans ce contexte, votre Rapporteur note également que, malgré la crise, le ministère de la recherche allemand est l’un des seuls ministères à ne pas avoir subi de réductions budgétaires.

De même, au Royaume-Uni, le gouvernement de M. David Cameron a identifié à l’automne dernier Eight Great Technologies, qui bénéficieront d’un financement de 600 millions de livres : le numérique et en particulier le big data, le stockage de l’énergie, l’industrie satellitaire et les applications spatiales, la robotique, la science du génome et la biologie de synthèse, la médecine régénérative, les nanotechnologies, les technologies agricoles.

L’Europe n’est pas la seule à se préoccuper de la définition d’un agenda stratégique, comme l’illustre d’ailleurs l’initiative Rebirth portée par les autorités japonaises. Néanmoins, peut-être parce qu’elle est davantage frappée par la crise que d’autres économies régionales, l’Europe a pleinement replacé la recherche et l’innovation au cœur de ses priorités ; la France, malheureusement, semble pour l’instant avoir pris un léger retard.

2. Le bilan contrasté de la première Stratégie nationale pour la recherche et l’innovation (SNRI)

Notre pays n’est certes pas complètement resté en retrait de ces initiatives. Ainsi, le précédent gouvernement a défini en 2009 une stratégie nationale de la recherche et de l’innovation (SNRI) articulée autour de trois domaines prioritaires : santé, bien-être, alimentation et biotechnologies ; urgence environnementale et éco-technologies ; information, communication et nanotechnologies. Élaborée à la suite d’une phase de concertation ayant rassemblé près de 600 personnes, cette stratégie avait le mérite, votre Rapporteur le reconnaît, de renouer avec la volonté de mener à bien un exercice de prospective scientifique.

Toutefois, cette initiative a rapidement été dévoyée de son objectif premier. Initialement, la publication de la SNRI, comme la création de l’Agence nationale de la recherche (ANR), devaient permettre au ministère de la recherche de se recentrer sur la définition des axes stratégiques et des priorités, et aux fonds incitatifs d’être gérés avec plus d’efficacité et de souplesse. Pourtant, comme le souligne M. Jean-Yves le Déaut (5), l’État s’est au contraire dessaisi de son rôle de stratège, abandonnant ainsi quelque peu son rôle à diverses structures dont ce n’était pas la mission. Les priorités définies par la SNRI se sont peu à peu noyées au sein d’ensembles plus vastes, celle-ci devenant le répertoire de toute la recherche, tandis que l’ANR finançait toutes sortes d’activités et non plus seulement celles jugées les plus stratégiques et ainsi identifiées.

B.— RECENTRER LES PRIORITÉS DE LA RECHERCHE

1. Une stratégie nationale de la recherche resserrée

Comme le soulignait récemment la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Geneviève Fioraso, le projet de loi soumis à l’examen de l’Assemblée nationale vise donc « le retour de l’État stratège » (6). Bien qu’il échappe à la saisine de la commission des affaires économiques, votre Rapporteur souhaite insister sur l’importance de l’article 11 du projet de loi, qui modernise la procédure relative à la définition des orientations nationales en matière de recherche.

Ainsi, alors qu’à l’heure actuelle, l’article L. 111-6 du code de la recherche énonce simplement que les choix en matière de programmation et d’orientation des actions de recherche sont arrêtés après une concertation étroite avec la communauté scientifique, d’une part, et les partenaires sociaux et économiques, d’autre part, le présent projet de loi consacre la notion de stratégie nationale de recherche. Cette intégration dans le droit positif de la stratégie nationale de recherche témoigne de la volonté de la majorité de reprendre en main la programmation de la recherche et ainsi de « remédier au défaut de pilotage qui a pu être constaté au cours des dernières années » (7).

D’un point de vue strictement juridique, il est donc proposé de substituer aux actuelles dispositions de l’article L. 111-6 du code de la recherche cinq alinéas. Le premier alinéa pose le principe de l’élaboration – et de sa révision périodique – d’une stratégie nationale de la recherche, sous la responsabilité du ministre chargé de la recherche. Le deuxième alinéa rappelle le principe d’une concertation avec la communauté scientifique et les partenaires économiques et sociaux afin d’élaborer la stratégie, mais l’élargit aux ministères concernés et aux collectivités territoriales, et ce notamment afin de s’assurer de la cohérence des initiatives de recherche sur le territoire. Cette disposition est essentielle. On ne bâtira de stratégie nationale de la recherche sans le monde de la recherche. L’excellence de nos chercheurs justifie de leur faire confiance pour y participer. Le troisième et le cinquième alinéas assurent la participation des élus nationaux au processus, d’une part en prévoyant la remise d’un rapport biennal au Parlement, d’autre part en spécifiant le rôle de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) dans l’évaluation de cette stratégie. Enfin, le quatrième alinéa précise que les contrats conclus entre l’État et les organismes de recherche, les établissements d’enseignement supérieur comme la programmation de l’Agence nationale de la recherche concourent à la réalisation des objectifs définis dans la stratégie nationale de la recherche.

Bien évidemment, cette stratégie nationale devra s’inscrire dans le cadre des orientations fixées au niveau communautaire, afin de permettre à l’ensemble des États membres de mener une démarche cohérente, seule à même de sortir l’Europe de la crise. Madame la ministre l’a d’ailleurs rappelé récemment, en annonçant que « les organismes de recherche préparent déjà ce travail qui relèvera huit grands défis, harmonisés avec le programme européen Horizon 2020 : lutte contre le changement climatique et gestion sobre des ressources, transition énergétique, réindustrialisation, santé, systèmes urbains durables » (8) notamment. Cette articulation visera donc, selon le projet porté par le Gouvernement, « à favoriser une répartition de la dépense de recherche plus conforme aux priorités et plus efficace [et] une meilleure participation des équipes françaises aux programmes européens (9) ».

Votre Rapporteur se réjouit de l’initiative du Gouvernement. Néanmoins, parce qu’il considère que l’innovation ne peut être séparée de la recherche, sans quoi celle-ci se trouve privée d’une partie de sa raison d’être, il proposera des amendements en vue d’assurer l’insertion dans le droit positif d’une stratégie nationale de la recherche et de l’innovation.

Il ressort du resserrement de la stratégie nationale sur quelques grandes priorités un rapprochement avec les programmes des autres pays. Ainsi, de l’aveu même de l’une des personnes entendues par votre Rapporteur lors des auditions, ces priorités sont « un peu les mêmes à travers le monde ». Néanmoins, au-delà de l’identification des axes stratégiques assignés à la recherche, l’essentiel est de définir les meilleurs moyens de mettre en œuvre ces orientations. C’est en effet seulement en se distinguant sur la traduction concrète de l’agenda stratégique que celui-ci prendra toute sa valeur. Le Gouvernement a justement prévu de constituer une instance chargée de contribuer à l’élaboration de cette stratégie nationale, et de définir ses modalités d’application : le Conseil stratégique de la recherche.

2. Un outil de pilotage modernisé : le Conseil stratégique de la recherche

La création d’un Conseil stratégique de la recherche s’inspire directement du rapport de notre collègue M. Jean-Yves Le Déaut. Dans le rapport précité, celui-ci recommande ainsi de remplacer le Haut conseil de la science et de la technologie (HCST) par un nouveau Conseil stratégique restreint de la science et de la technologie, placé auprès du Premier ministre. Selon son président, entendu par votre Rapporteur à l’occasion des auditions, cette évolution est perçue plutôt favorablement par les vingt-et-un membres du Haut conseil.

Aux termes de l’article 53 du projet de loi, cette nouvelle instance, dont l’existence est consacrée par l’ajout d’un nouvel article L. 120-1 dans le code de la recherche, sera chargée de proposer les grandes orientations de la stratégie nationale de recherche et de participer à son évaluation. De manière concrète, ce Conseil stratégique s’appuiera sur un comité de pilotage composé notamment de chercheurs, de représentants des administrations et des milieux socio-économiques via le Conseil économique, social et environnemental (CESE), dont la mission sera de préfigurer la stratégie nationale. Il appartiendra ensuite au Conseil stratégique d’affiner les propositions formulées puis de valider les orientations à suivre.

Le rattachement de ce nouvel organe auprès du Premier ministre n’est pas anodin, en ce qu’il confère à l’élaboration de l’agenda stratégique de la France une dimension interministérielle. En effet, trop souvent « chaque ministère élabore sa stratégie dans son coin » selon les mots d’une personne auditionnée par votre Rapporteur : les priorités des ministères sont donc diverses, concurrentielles voire contradictoires. Dès lors, ce nouvel organe, que votre Rapporteur souhaite voir dénommer Conseil stratégique de la recherche et de l’innovation, permettra de coordonner l’action de l’ensemble des administrations vers un seul objectif : le développement de la recherche au service de la compétitivité et de l’emploi.

Mais parce qu’une recherche ne peut être totalement efficace sans une évaluation constructive lui permettant de progresser, le projet de loi assure également la rénovation du système d’évaluation de la recherche. Il s’agit du deuxième objectif du présent projet de loi.

II.— RÉNOVER LE SYSTÈME D’ÉVALUATION DE LA RECHERCHE

A.— LA CRÉATION DE L’AERES : UNE RÉFORME OPPORTUNE MAIS INCOMPLÈTE

1. Une tradition d’évaluation sujette à caution

Lors de l’examen du projet de loi de programme pour la recherche, devenu par la suite la loi n° 2006-450 du 18 avril 2006 pour la recherche, le rapporteur de la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, M. Jean-Michel Dubernard n’hésitait pas à qualifier la tradition française d’évaluation de « notoirement déficiente ». Si votre Rapporteur ne partage pas l’ensemble des positions politiques de notre ancien collègue, force est de constater qu’un système fondé sur « l’endo-évaluation plutôt que sur l’auto-évaluation », selon l’opinion de l’une des personnes auditionnées par votre Rapporteur, ne convenait pas à la majorité de la communauté des chercheurs, d’autant qu’elle plaçait la France dans une situation d’exceptionnel retard au regard des pratiques de la plupart des grands pays industrialisés.

L’évaluation était peu professionnelle, et surtout incomplète, en raison de l’insuffisance des évaluations a posteriori des projets. Au-delà, une très forte hétérogénéité perdurait entre les procédures d’évaluation appliquées en matière de recherche fondamentale et celles suivies lorsque la recherche était plus directement liée à la demande industrielle, tandis que les structures s’étaient empilées.

Le rapport (10) de nos collègues sénateurs de l’époque relevait par ailleurs que « s’agissant de la recherche, il exist[ait] pour l’essentiel neuf instances d’évaluation dont deux principales : le CNER (Comité national d’évaluation de la recherche), chargé par les pouvoirs publics d’évaluer la politique de la recherche et le CoNRS (Comité national de la recherche scientifique) placé auprès du CNRS, qui évalue les candidatures au recrutement et les promotions des chercheurs, les laboratoires, les projets, leur financement et leur suivi, et la stratégie de recherche (…) en outre, la Mission scientifique, technique et pédagogique (MSTP) est placée sous la responsabilité directe du ministre de l’éducation nationale et du ministre délégué à la recherche. Elle travaille au service de quatre directions opérationnelles ; ses évaluations et expertises sont élaborées au sein de dix départements scientifiques pédagogiques et techniques (DSPT), couvrant les différents champs disciplinaires ».

Malgré le tableau très sombre dressé par la majorité d’alors (11) le système d’évaluation français avait entamé sa mutation, notamment grâce à la mise en place de contrats quadriennaux entre l’État les universités ou des contrats d’objectifs et de moyens entre l’État et les établissements et organismes publics de recherche. Toutefois, la création de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES) a permis de rationaliser l’ensemble du dispositif d’évaluation de l’enseignement supérieur et de la recherche, et de doter la France d’une instance davantage conforme aux standards internationaux.

2. La création de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES)

La loi pour la recherche précitée a donc procédé à la création d’une nouvelle autorité administrative indépendante, l’AERES, qui a eu le mérite de « remédier à l’hétérogénéité du système français d’évaluation, à la fois en regroupant sous sa compétence les missions d’évaluation des établissements auparavant confiées à plusieurs instances, mais aussi progressivement en validant et rapprochant les différentes procédures existantes pour les autres niveaux d’évaluation » selon les mots de notre collègue M. Jean-Yves Le Déaut. L’AERES a ainsi atteint une partie des objectifs qui lui étaient assignés, tout en permettant de crédibiliser auprès de nos partenaires le processus d’évaluation de la recherche mis en place dans notre pays. Ainsi, sans bénéficier de la renommée de ses équivalents britannique ou américain, l’AERES a été accréditée au niveau européen, et a résolu une partie des difficultés rencontrées jusqu’à sa création.

Au cours de ses auditions, votre Rapporteur s’est ainsi vu exposer, et non par les équipes dirigeantes de l’instance d’évaluation, les avancées que l’AERES avait portées, par exemple en matière d’évaluation des unités mixtes de recherche. À ce sujet, il était par exemple commun que la décision relative à l’avenir d’une unité mixte soit prise de manière unilatérale par l’une des parties – en général l’établissement public scientifique et technologique partenaire d’une université – privant ainsi dans les faits l’autre de tout droit de regard. L’indépendance et l’externalisation des évaluations ont ainsi été saluées par la grande majorité des intervenants rencontrés par votre Rapporteur.

Si les objectifs de l’AERES ne sont pas remis en cause – elle a d’ailleurs procédé à un très grand nombre d’évaluations, puisque 250 établissements, 4 000 programmes universitaires et 3 000 unités de recherche auraient été évalués selon le président de l’Agence – la méthodologie adoptée pose en revanche un certain nombre de questions. Face à la violence des critiques, M. Jean-Yves Le Déaut reconnaissait ainsi dans son rapport vouloir « être plus ambitieux quant à ses objectifs, la réconcilier avec la communauté scientifique et universitaire, corriger les défauts dénoncés et même aller plus loin en redéfinissant complètement les missions et le fonctionnement de l’AERES ». C’est à partir de ce constat, et en plein accord avec les conclusions des Assises de la recherche, que le projet de loi propose la création d’une nouvelle instance d’évaluation.

B.— RESTAURER LA CONFIANCE DANS L’ÉVALUATION

1. Le fonctionnement de l’AERES : des critiques multiples

Contrairement à ce qu’il a souvent été souligné, les critiques à l’encontre de l’AERES n’émanent pas uniquement de la – faible – part des chercheurs partisans d’une endo-évaluation, c’est-à-dire d’un retour à la situation antérieure à la loi pour la recherche de 2006 précitée. Au cours de ses nombreuses auditions, votre Rapporteur a ainsi constaté un consensus sur la nécessité d’une évaluation indépendante, mais a également pu entendre que « l’AERES devrait se débureaucratiser », que « l’AERES n’a pas marché car elle a plutôt joué un rôle de sanction que d’accompagnement » ou encore que « la notation globale et sa publicité pouvaient laisser un tatouage indélébile ».

Ainsi, si chacun est prêt à reconnaître les progrès qu’elle a permis d’effectuer, l’AERES semble être la cible d’un flot de critiques important, portant davantage sur la méthode que sur le principe de l’évaluation. Pour cette raison, M. Jean-Yves Le Déaut s’est prononcé en faveur « d’une totale refondation de l’AERES ».

Votre Rapporteur a participé aux Assises nationales de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il a, à cette occasion, pu constater combien cette agence cristallise les rancœurs et les oppositions. Convaincu depuis des années de l’impérieuse nécessité de posséder un dispositif d’évaluation de l’enseignement supérieur et de la recherche indépendant, votre Rapporteur a souhaité préciser les reproches formulés. Aux termes des auditions, il y est en partie parvenu.

S’agissant ainsi de la nécessité de débureaucratiser l’agence, il est apparu lors des Assises que « les chercheurs et enseignants-chercheurs s’estiment victimes d’un trop plein d’évaluations et de tracasseries administratives qui leur interdisent de se consacrer à leur cœur de métier ». Ce sentiment est d’autant plus prégnant que les évaluations réalisées sous la houlette de l’agence ne sont pas les seules auxquelles ils doivent se soumettre, alors que toute subvention est aujourd’hui soumise à une évaluation a priori quand se développe également, sur le modèle anglo-saxon, la pratique du visiting comittee international.

À propos du dévoiement du rôle de l’AERES, nombre de chercheurs comme de dirigeants d’établissement pointent la tendance de l’AERES à outrepasser ses fonctions en se prononçant non pas sur les réalisations des équipes de recherche mais sur le projet stratégique d’une unité ou d’un établissement. Ainsi, au cours des auditions organisées par votre Rapporteur, il a été reproché à l’AERES de « préempter la prise de décision » alors que seules les équipes dirigeantes sont à même de faire un choix éclairé : par exemple, une unité jugée peu efficace par l’instance d’évaluation peut être essentielle dans le programme stratégique d’un EPST, auquel cas il appartiendrait de la renforcer et non de la fermer. C’est donc l’évolution de l’AERES vers une sorte de « Cour des comptes ou d’Inspection générale » selon les mots d’un autre intervenant qui concentre les critiques en l’espèce.

Concernant la publicité des rapports d’évaluations, s’il s’agit d’une initiative louable de transparence, elle est vécue comme un affront par de nombreux chercheurs qui y voient une humiliation publique en cas de mauvaise appréciation. Par ailleurs, compte tenu du temps qui sépare deux évaluations – quatre ou cinq ans en moyenne – la publicité des rapports est susceptible de pénaliser une unité de recherche, laissant « un tatouage indélébile » selon certains, alors même que cette unité aurait mis en œuvre les préconisations formulées. Par ailleurs, la publicité des rapports entre en vive contradiction avec la nécessaire protection de certains travaux sensibles pour la sécurité nationale ou la protection de l’innovation.

Au sujet de la notation globale, qui contient nécessairement un aspect réducteur, il est apparu que, couplée à la publicité, elle pouvait conduire à un effet inattendu : l’amélioration inexpliquée de certaines notes. Ainsi, selon l’une des personnes entendues par votre Rapporteur, la publicité a entraîné une baisse de la sévérité, la répartition des notes des équipes d’un établissement passant subitement de 10 % de A+ et 30 % de A à plus de 80 % de A et A+. Même si l’AERES a évolué d’elle-même à ce sujet, votre Rapporteur est convaincu que la notation doit être supprimée pour laisser la place à des avis motivés.

Compte tenu de ces critiques, c’est donc sans surprise que la proposition n° 131 des Assises consistait à redéfinir le système d’évaluation de l’enseignement supérieur et de la recherche. Conformément à ses engagements, le Gouvernement propose ainsi une évolution du dispositif d’évaluation de l’enseignement supérieur et de la recherche qui, tout en consacrant le principe de son indépendance, renouvelle en profondeur les missions et la gouvernance de l’instance chargée de cette mission.

2. Une nouvelle instance : des missions précisées, une gouvernance rationalisée

Les articles 48 à 52 du projet de loi visent donc à substituer à l’AERES un Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) chargé de nouvelles missions et à la gouvernance modernisée.

S’agissant des missions, la nouvelle instance d’évaluation respectera bien évidemment les grands principes reconnus par tous. Premièrement, l’évaluation doit être universelle, en ce qu’elle doit concerner les établissements, les unités de recherche, les formations et les personnels. Deuxièmement, l’évaluation doit être indépendante, de qualité et transparente ; ce dernier critère n’impliquant pas de publier l’intégralité des rapports d’évaluation, mais simplement de lever le voile sur les méthodologies retenues. Troisièmement, l’évaluation ne doit pas revêtir la forme d’une sanction mais bien celle d’un stimulant.

D’une manière générale, la nouvelle structure s’inspire des recommandations de M. Jean-Yves Le Déaut, qui proposait de « remplacer l’AERES par une nouvelle autorité administrative indépendante, qui s’inspire des meilleures pratiques internationales, et qui serait chargée soit de procéder directement aux évaluations des établissements d’enseignement supérieur et des organismes de recherche, soit de valider les procédures d’évaluation réalisées par d’autres instances, notamment pour les unités mixtes de recherche (12)». Ainsi, le Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur pourra exercer ses missions soit directement, soit en s’appuyant sur des évaluations réalisées par d’autres instances (voir Examen des articles).

S’agissant de la gouvernance, le HCERES sera administré par un conseil de trente membres respectant la parité des genres, et accordant une place plus importante aux membres élus et en assurant la représentation des étudiants. Ce conseil, garant de la qualité des travaux du Haut conseil sera chargé de la définition du programme annuel d’évaluation et, plus largement, de l’ensemble des tâches administratives et de gestion. À ses côtés, un conseil d’orientation scientifique, composé de personnalités qualifiées, dont un tiers au moins de nationalité étrangère, se verra chargé de l’élaboration de la méthodologie de l’évaluation. Cette dichotomie vise à mettre un terme à la confusion des rôles entre les missions administratives et scientifiques dont pâtissent les instances de l’AERES, tout en se calant sur les standards internationaux.

Votre Rapporteur partage les objectifs du projet de loi, la refonte du dispositif d’évaluation de la recherche constituant un préalable à la restauration de la confiance dans le secteur de la recherche. Néanmoins, il souhaite attirer l’attention sur plusieurs points.

En premier lieu, la mise en place de l’AERES a été un pas vers une évaluation indépendante correspondant aux standards internationaux. Elle a été aussi accréditée au niveau européen. La suppression de la « marque » qui connaît un début de reconnaissance internationale ne doit pas être perçue comme un retour en arrière ou un désaveu d’évaluation. Aussi votre Rapporteur déposera un amendement visant à renommer l’AERES en Haute Autorité, permettant ainsi de maintenir le sigle tout en réaffirmant le caractère indépendant de l’autorité.

En deuxième lieu, il convient de s’assurer de la précision des dispositions législatives adoptées par le Parlement. Il semble, à cet égard, que la rédaction du septième alinéa de l’article 49 du projet de loi doive être clarifiée, et votre Rapporteur s’y attachera autant que possible.

En troisième lieu, les évolutions législatives examinées, puis votées, par le Parlement devront s’accompagner d’ajustements réglementaires et méthodologiques. Ainsi, au-delà des sujets évoqués plus en amont, se pose la question de l’identité des experts missionnés pour réaliser les évaluations. À ce titre, votre Rapporteur encourage vivement la future instance à constituer un vivier d’experts réguliers d’origines diverses dans lequel il pourra puiser.

En somme, votre Rapporteur partage les objectifs du Gouvernement quant à la rénovation du dispositif français d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur. Néanmoins, pour donner pleinement son efficacité aux objectifs de la stratégie nationale de recherche, il ne suffit pas d’évaluer les structures ou personnes chargées de la mettre en œuvre, mais également d’encourager le transfert pour la création de valeur économique. Il s’agit du troisième objectif du présent projet de loi.

III.— RENFORCER LE TRANSFERT DES RÉSULTATS DE LA RECHERCHE

A.— ASSURER LE CONTINUUM DE LA RECHERCHE À L’ENTREPRISE

1. La défiance dépassée entre la recherche et l’industrie

Le hiatus idéologique entre le monde de la recherche et le monde des entreprises, et l’opposition entre recherche fondamentale et recherche appliquée ou technologique sont en partie dépassés en France. Cette barrière culturelle est bien franchie, comme en témoignent les diverses démarches partenariales public-privé qui visent à rapprocher le monde de la recherche académique de celui des entreprises, et à lisser les différences de culture entre acteurs privés et acteurs publics.

Le dispositif le plus emblématique est celui des soixante-et-onze pôles de compétitivité labellisés depuis 2004. Ces pôles rassemblent, dans une démarche partenariale sur un territoire donné, des entreprises, des laboratoires de recherche et des établissements de formation pour développer, avec l’association des pouvoirs publics, des coopérations autour de projets communs au caractère innovant, avec l’objectif d’atteindre une taille critique suffisante pour acquérir une visibilité internationale et des positions clés sur les marchés concernés. Sur la période 2008-2011, près de 70 % des organismes de recherche et des établissements d’enseignement supérieur et de recherche déclarent avoir mis en place de nouveaux partenariats avec les PME et plus de la moitié font état d’une augmentation sensible des projets de R&D collaborative et applicative. La troisième phase des pôles souhaitée par le Gouvernement pour les prochaines années devrait encore renforcer la coopération public-privé sur les territoires à condition de définir une classification plus claire entre les pôles de compétitivité à vocation stratégique et internationale, et les pôles territoriaux privilégiant le développement économique dans les régions.

Par ailleurs, la logique de financements sur projets, essentiellement portés par l’Agence nationale de la recherche (ANR), facilite la collaboration entre organismes publics, et entre organismes publics et structures privées par un mécanisme d’agrégation d’acteurs autour d’un objectif donné. Ainsi, dans le cadre des investissements d’avenir, en Picardie, le LABEX STORE-EX (stockage de l’énergie électrochimique) prévoit la mise en œuvre d’une politique de propriété intellectuelle innovante : le portefeuille de brevets issus du laboratoire sera mis au service des EPIC et partenaires industriels français (EDF, ARKEMA, SAFT, TOTAL, etc.). Madame la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche vient d’ailleurs d’annoncer cent nouveaux programmes de partenariat entre laboratoires publics et PME.

En outre, le nombre de laboratoires communs a augmenté de 50 % depuis 2005 et plusieurs accords majeurs de collaboration ont été signés, à l’instar de celui entre Renault et le CEA pour les batteries électriques, ou entre le laboratoire de Microsoft et l’INRIA. Le CNRS dénombre également une cinquantaine de laboratoires mixtes avec des acteurs industriels comme Airbus, Thalès ou Total.

Enfin, le statut de jeune entreprise universitaire (JEU), créé en 2008, qui encourage la création d’entreprises par les étudiants et les chercheurs en bénéficiant d’importantes exonérations sociales et d’allègements fiscaux est un autre exemple de cette imbrication.

Toutefois, malgré la réalité de cette collaboration public-privé, les résultats en terme de croissance restent limités du fait de difficultés pour les innovations à atteindre le marché.

2. Surmonter les difficultés à atteindre le marché

Ces difficultés peuvent d’abord s’expliquer par la faible part du financement privé dans la R&D en France par rapport au financement public. Malgré une dépense intérieure de recherche et développement (DIRD) en progression depuis plusieurs années, et une part majoritairement exécutée par les entreprises (62 % en 2010), la part de la recherche privée par rapport au PIB est plus faible en France que pour la moyenne des pays de l’OCDE : 1,39 % en France en 2009 contre 1,92 % en Allemagne et 2,55 % en Suède. Ceci s’explique en partie par la structure de l’économie française qui se caractérise par une part plus faible de l’industrie dans la valeur ajoutée brute totale : la DIRD s’en trouve contrainte mécaniquement car les efforts de R&D sont très majoritairement portés par l’industrie.

QU’EST-CE QUE LA DIRD ?

La dépense intérieure de recherche et développement (DIRD) correspond aux travaux de R&D exécutés sur le territoire national (métropole, DOM et COM) quelle que soit l’origine des fonds.

Elle est généralement couplée dans les analyses des activités de recherche et de développement (R&D) avec la dépense nationale de recherche et développement (DNRD) qui correspond au financement par des entreprises ou des administrations françaises des travaux de recherche réalisés en France ou à l’étranger.

De même, la France pâtit d’un certain retard pour les dépenses en faveur de la recherche technologique puisqu’il a été souligné à votre Rapporteur lors de ses auditions, que « sur les 40 % de la DIRD non consacrés à la recherche industrielle, 30 % sont destinés à la recherche fondamentale et 10 % à la recherche technologique alors que la répartition se fait en deux parts égales en Finlande ou en Allemagne ». Les effectifs français mobilisés pour la recherche technologique sont également inférieurs à ceux des autres pays européens, et notamment deux fois moins nombreux qu’en Allemagne.

Les partenariats de structure sont des solutions réelles mais il faudrait désormais parvenir à conclure également des partenariats de financements publics et privés, alors qu’aujourd’hui, la logique est trop orientée dans le sens de financements publics vers le privé.

B.— LE TRANSFERT, ÉTAPE INDISPENSABLE DU CONTINUUM

1. Consacrer le transfert comme véritable mission de service public

Les acteurs de la recherche et de l’enseignement supérieur comme les entreprises s’accordent sur le fait que le transfert est la clé pour transformer les résultats de la recherche française en réelles retombées économiques. Mais pour lancer un signal fort en faveur de la compétitivité française, il était nécessaire de l’inscrire dans la loi. C’est chose faite avec les articles 5 et 7 du projet de loi qui consacre la mission de transfert des résultats de la recherche vers les secteurs socio-économiques comme l’une des missions du service public de l’enseignement supérieur, définies au 2° de l’article L. 123-3 du code de l’éducation, et avec l’article 10 qui l’introduit comme mission de la politique de recherche définie à l’article L. 111-1 du code de la recherche, au même titre que la diffusion et la valorisation des résultats de la recherche.

La mission de transfert est, par ailleurs, renforcée dans son impact territorial par sa mention dans l’objet du nouveau dispositif de coopération et de regroupement des établissements d’enseignement supérieur et de recherche prévu à l’article 38 du projet de loi, qui dispose que sur un territoire donné, les établissements d’enseignement supérieur et de recherche « coordonnent leur offre de formation et leur stratégie de recherche et de transfert ». Cette coordination se fera par le biais de contrats pluriannuels, dits « contrats de site », pouvant notamment associer la région qui constitue l’échelon territorial le plus approprié en matière de développement économique et d’aménagement du territoire.

L’article 55 enfin, constitue l’application concrète de cette mission de transfert au travers de l’élargissement du champ d’application des dispositifs de brevets envers les PME de l’Union européenne (voir Examen des articles).

2. Diversifier les leviers

a) Encourager la recherche technologique

La recherche technologique est un maillon essentiel de la chaîne de l’innovation et une étape incontournable du processus de création de valeur.

Bien que la recherche technologique ne soit pas dissociable de la recherche scientifique fondamentale en tant que telle, il a été suggéré à votre Rapporteur lors de ses auditions d’organiser celle-ci autour de grands pôles technologiques à l’instar des plates-formes technologiques du CEAtech, qui rassemblent autour d’équipements partagés avec le monde industriel, une masse critique d’experts, des compétences et des méthodologies pluridisciplinaires, et des outils au meilleur niveau mondial. Fort du succès des plates-formes de Grenoble et Saclay, qui ont notamment permis de maintenir un niveau de recherche élevé en électronique en France, le Gouvernement a encouragé l’installation de trois nouvelles plates-formes régionales de transfert technologique à Toulouse, Bordeaux et Nantes. C’est notamment aux PME et ETI régionales que ce transfert doit bénéficier, au service de la compétitivité industrielle française.

Cependant, l’étape la plus cruciale en matière d’innovation n’est pas tant la recherche elle-même, mais son passage vers l’entreprise. Cela passe par des facilitateurs que sont les structures collaboratives.

b) Soutenir les partenariats existants

Ø Les partenariats des investissements d’avenir

Dans son évaluation du programme d’investissements d’avenir, remise au Premier ministre en février 2013, Louis Gallois souligne qu’il est encore trop tôt pour établir un réel bilan des nouveaux outils que sont les SATT, les IRT ou les IEED sur le processus de valorisation mais qu’ils n’en constituent pas moins des acteurs réels du continuum recherche – entreprise.

Les huit instituts de recherche technologique (IRT), dotés de 2 Md€ dans l’appel à projet des investissements d’avenir et les sept instituts d’excellence dans le domaine des énergies décarbonées (IEED) sont des outils qui s’inscrivent dans le cadre des pôles de compétitivité et s’articulent avec celui-ci afin d’aboutir à l’émergence de projets de R&D de rupture et favoriser la croissance économique des entreprises.

Que sont les IRT et les IEED ?

Les IRT et les IEED sont des instituts thématiques pluridisciplinaires rassemblant les compétences de l’industrie et de la recherche publique dans une logique de co-investissement public-privé et de collaboration étroite entre tous les acteurs », qui doivent permettre de renforcer les écosystèmes constitués par les pôles de compétitivité. Ces outils d’excellence, dont la finalité première est le développement industriel et/ou de services, couvriront l’ensemble du processus d’innovation, depuis l’idée jusqu’à la démonstration et le prototypage industriel. Ils piloteront des programmes de recherche couplés à des plates-formes technologiques. Enfin, les uns et les autres effectueront des travaux de R&D expérimentale au meilleur niveau international et veilleront à la valorisation économique de leurs travaux. Ils supposent une masse critique suffisante de moyens et de compétences situées sur un même lieu (de préférence).

L’IRT concerne tous les domaines d’activité à l’exception de ceux couverts par l’appel à projets IEED, c’est-à-dire les filières énergétiques porteuses d’avenir ayant un impact positif sur les émissions de gaz carbonique.

Les retombées économiques attendues sont considérables. Par leurs actions, les IRT et IEED contribuent au développement de nouveaux produits innovants et à l’insertion professionnelle des étudiants, et permettent de tisser des partenariats et d’accroître l’attractivité de la France pour les entreprises.

Parallèlement, parmi les structures de valorisation existantes, les onze sociétés d’accélération du transfert de technologies (SATT) instaurées dans le cadre des investissements d’avenir sont probablement l’outil le plus prometteur car elles agissent directement sur le transfert lui-même. Elles ont indéniablement participé au renforcement des partenariats public-privé et constitué une véritable porte d’entrée dans l’entreprise pour les universités.

Qu’est-ce qu’une SATT ?

Une SATT est une filiale créée par un ou plusieurs établissements (universités et organismes de recherche), chargée d’assurer l’interface entre les laboratoires publics et les entreprises et financent les phases de maturation des projets et de preuve de concept.

- sa mission : traduire les découvertes et compétences de la recherche publique en applications concrètes et répondre aux besoins des entreprises.

- son activité : dépôts de brevets, opérations de preuve de concept, créations de start-up, licensing.

Les SATT ont été créées grâce au programme Investissements d’avenir et bénéficient d’un fonds de 900 m€.

- ses objectifs : professionnaliser la valorisation de la recherche publique et renforcer les compétences ; stimuler les transferts vers le monde socio-économique ; dynamiser la maturation économique des projets de recherche les plus prometteurs ; accélérer le transfert technologique vers les entreprises afin de renforcer le potentiel d’innovation et la compétitivité de notre industrie ; favoriser la création d’entreprises innovantes et d’emplois hautement qualifiés.

L’exemple de la SATT Sud-Est (région PACA et Corse) témoigne de l’efficacité du dispositif : après huit mois d’existence, elle compte une centaine de projets de valorisation issus des laboratoires de recherche publique des régions PACA et Corse, 55 déclarations d’inventions, 45 titres de propriété intellectuelle déposés, 18 projets de maturation technologique dont 7 en collaboration avec les entreprises, le tout pour une enveloppe globale de 1,9 M€. Elle a aussi finalisé la signature de six contrats de licences d’exploitation et accompagne sept projets de création d’entreprises innovantes.

Dans le même esprit, certains organismes de recherche ont développé des sociétés dédiées au transfert : on peut citer Inserm-transfert, la filiale de l’Inserm dédiée à la valorisation des découvertes biomédicales issues de ses laboratoires, qui connaît un bilan très positif, ou INRA-transfert. Plus largement, l’Alliance Aviesan (Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé) a développé coVAlliance, comité permanent de coordination de la valorisation de la recherche d’Aviesan et réunissant les organismes membres de l’Alliance et leurs cellules de valorisation, dans l’objectif de favoriser les partenariats entre les opérateurs publics et les industries de santé, en créant les outils capables de simplifier la mise en place de partenariats public-privé.

Ces outils ont le mérite d’exister mais, pour les rendre pleinement efficaces au bénéfice de la compétitivité française, il convient de mieux définir leur articulation sur les territoires, en particulier entre CRITT (Centre régional d’innovation et de transfert de technologie) et IRT, ou entre pôle de compétitivité et IRT/IEED afin de ne pas générer une concurrence contre-productive entre structures.

Ø Les autres partenariats

Parmi les leviers de transfert qui ne relèvent pas des investissements d’avenir, le réseau des trente-quatre Instituts Carnot joue un rôle très bénéfique en matière de transfert de résultat de recherche puisque 17 % du chiffre d’affaires du réseau a été réalisé avec les entreprises entre 2010 et 2011, avec un effort particulier à destination des PME. Représentant 15 % des effectifs de la recherche publique pour un budget consolidé de 2 Md€, avec 80 sociétés essaimées par an et 880 brevets prioritaires déposés en 2011, l’impact des Instituts Carnot est directement mesurable sur le tissu économique : 360 M€ de contrats de recherche sont directement financés par les entreprises (dont 96 M€ – 27 % – avec des PME et ETI) ce qui signifie que plus de 50 % de la R&D est financée par les entreprises à la recherche publique française.

Qu’est-ce qu’un Institut Carnot ?

Un Institut Carnot est une structure de recherche qui s’engage à développer une recherche partenariale (la conduite de travaux de recherche menés par des laboratoires publics en partenariat avec des acteurs socio-économiques) de qualité. Il est reconnu pour ses compétences scientifiques et technologiques et sa capacité à répondre avec professionnalisme aux besoins de recherche et d’innovation des entreprises. Les Instituts Carnot mènent une politique volontariste en direction des entreprises, (de la PME aux grands groupes), en proposant un accompagnement R&D intégrant les contraintes de celles-ci.

Le partenariat entre un institut Carnot et une entreprise peut prendre plusieurs formes :

- les contrats de recherche : contrats directs bilatéraux ou contrats collaboratifs (ANR., FUI., PCRDT.…),

- l’encadrement de doctorants, notamment dans le cadre de thèses CIFRE,

- les laboratoires de recherche communs.

Les contrats de recherche bilatéraux permettent aux entreprises de bénéficier du doublement du crédit d’impôt recherche.

La force des Instituts Carnot réside dans le fait qu’ils sont fédérés en réseau couvrant la majeure partie du territoire et que celui-ci regroupe un ensemble de compétences scientifiques et technologiques de premier plan dans des domaines très variés (santé, nutrition, STIC, mécanique, matériaux, procédés, énergie, chimie...) et prépare les réponses scientifiques aux grands enjeux économiques et sociétaux de demain. Ainsi, ils jouent vraiment un rôle d’entraînement pour l’ensemble de la recherche publique, sur le modèle des instituts Fraunhofer en Allemagne.

Enfin, les pôles de compétitivité seront modernisés pour en faire de véritables écosystèmes d’innovation. En effet, d’après le Pacte pour la croissance, la compétitivité et l’emploi de novembre 2012, le Gouvernement entend « réorienter les pôles de compétitivité vers les produits et services à industrialiser ». Il s’agit d’une part de faire de certains pôles de compétitivité des pôles de référence mondiale dans des secteurs de pointe et dans les technologies clés. D’autre part, les autres pôles seront de dimension régionale et stimuleront l’innovation dans leurs territoires autour de leurs thématiques de spécialité. (13)

Le rôle des structures de partenariat est fondamental pour faciliter le transfert vers les entreprises, mais il est également important de toucher d’autres domaines.

c) Agir dans tous les domaines

Il est tout d’abord essentiel de maintenir autant que faire se peut le budget de l’ANR dans les années à venir afin d’atteindre les 1,5 Md€ de financements initialement prévus, et cela pour augmenter à 30 % la part des aides à l’accompagnement de projets comme les frais de gestion pour les établissements dans lesquels des projets sont sélectionnés. Votre Rapporteur a bien évidemment conscience des contraintes qui pèsent sur le budget de l’État mais un tel maintien permettrait de pérenniser les infrastructures de recherche pour l’ensemble des acteurs et de créer un environnement favorable d’entraînement pour d’autres initiatives. Il serait également envisageable de conditionner 5 % du budget de l’ANR à des projets de création de laboratoires de recherche communs avec des PME.

Votre Rapporteur s’interroge également sur la possibilité de lier davantage le bénéfice du crédit d’impôt recherche (CIR) à l’emploi de docteurs. La réforme de 2008 a simplifié et fortement amplifié le dispositif du CIR en terme de bénéficiaires et de montants accordés aux entreprises, et a ainsi eu un effet très positif sur les PME et l’industrie (création de 30 000 emplois par an). Elle a, en particulier, créé un dispositif particulièrement favorable à l’embauche de jeunes chercheurs. Néanmoins, pour en amplifier encore l’effet incitatif envers l’embauche de docteurs, votre Rapporteur proposera un amendement modifiant les dispositions du code général des impôts relatives au CIR.

Une dernière piste, et non des moindres, touche directement aux chercheurs. Concernant d’abord la question des effectifs, il existe une inertie préjudiciable dans le redéploiement des chercheurs et des postes sur les sujets nouveaux de recherche : ainsi, entre 2006 et 2013, il n’y a eu aucune évolution du nombre de projets en matière de stockage d’énergie alors qu’il s’agit d’un domaine d’avenir porteur d’innovation.

Mais la difficulté la plus lourde réside dans les barrières à la mobilité des chercheurs. Alors que les jeunes chercheurs sont désireux de diversifier leur parcours, il leur est très difficile, faute de réelle politique de ressources humaines dans l’enseignement supérieur et surtout de souplesse dans les statuts, de bénéficier d’une mobilité entre organismes de recherche et université, entre types d’établissements publics et surtout du secteur de la recherche publique vers le secteur privé.

Actuellement, les dispositions des articles L. 413-1 et suivants du code de la recherche permettent aux chercheurs de créer des entreprises ou d’apporter un concours scientifique ou financier à une entreprise déjà existante. Si cette disposition va dans le bon sens pour encourager la concrétisation de l’innovation sur le terrain économique, votre Rapporteur s’est vu confier lors des auditions, que le retour d’un chercheur dans son établissement d’origine est mal perçu et constitue un frein pour sa carrière : « un chercheur parti dans le privé est nécessairement mal évalué ». Parallèlement, les appels à projets aboutissent au recrutement de nombreux chercheurs en CDD sur des projets souvent d’excellence, mais qui renforcent leur précarité.

Il faut donc aller plus loin. Le projet de loi prévoit à l’article 47 la possibilité pour les docteurs d’accéder à certains corps de catégorie A de la fonction publique par un concours externe réservé sur titres. Cette mesure est positive puisqu’elle permet de mieux reconnaître et valoriser le doctorat mais pour aller au bout de la logique, il serait par exemple bénéfique d’encourager les entreprises à reconnaître les docteurs dans les conventions collectives.

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Pour toutes ces raisons, votre Rapporteur réaffirme son avis favorable à l’adoption de ce projet de loi qui permet de tirer tout le parti de l’excellence de notre recherche.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du 17 avril 2013, la commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Christophe Borgel, le projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche (n° 835).

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M. le président François Brottes. Le projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche étant essentiel pour notre Commission, compte tenu du lien entre recherche et industrie, j’ai demandé à ce que nous soyons saisis pour avis du titre VI du projet de loi.

M. Christophe Borgel, rapporteur pour avis. Le Président de la République, rendant hommage à M. Serge Haroche, prix Nobel de physique 2012, a affirmé, au Collège de France : « Investir dans le savoir, c’est préparer la France de demain. »

Disposer d’un enseignement supérieur et d’une recherche de qualité est un enjeu qui dépasse le périmètre académique et fait interagir toutes les composantes de la société. C’est nécessaire pour l’avenir des jeunes, car le renforcement de nos capacités de formation élèvera leur niveau de qualification et favorisera la réussite des étudiants, qui est l’une des priorités du projet de loi.

D’autre part, disposer d’un enseignement supérieur et d’une recherche de qualité n’a de sens que si la recherche fondamentale et technologique est transférée vers l’industrie. La recherche sert ainsi le développement et la compétitivité des entreprises, permet une meilleure compréhension du monde, car les innovations de rupture répondent aux défis du siècle, et aide à maintenir des emplois ou à en créer. C’est notre capacité à transférer la recherche vers l’industrie qui, dans un contexte marqué par les difficultés économiques, permettra de gagner la bataille de la croissance et de l’emploi. Au moment où nous débattons du texte, le rapport de MM. Beylat et Tambourin affirme d’ailleurs que ce transfert est une priorité.

Le texte a été élaboré de manière novatrice. Les Assises de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui se sont conclues en novembre au Collège de France, ont rassemblé, outre la communauté scientifique, de nombreuses composantes de la société. Par ailleurs, le Parlement a été associé au texte en amont, à travers le rapport de M. Jean-Yves Le Déaut, premier vice-président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Notre système d’enseignement supérieur et de recherche, particulièrement complexe, a pu être comparé à un mikado. De fait, par le passé, les textes législatifs ont empilé des structures, de sorte que la simplification est devenue une priorité. Même si celle-ci échappe au champ de notre saisine, je salue l’effort accompli pour rendre nos formations plus lisibles tant à l’étranger que dans tous les milieux sociaux. Le texte vise à améliorer la réussite des étudiants, à simplifier les structures, à programmer la recherche en fonction d’un agenda stratégique et à renforcer les moyens destinés à établir un continuum entre la recherche et l’économie.

Notre Commission est saisie pour avis des articles 48 à 55 du titre VI, qui tendent à redonner à l’État un rôle de stratège en matière de recherche. L’article 11 pose un cadre. La stratégie nationale de recherche sera resserrée. Elle obéira à huit priorités concrètes, sur lesquelles la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche s’est déjà exprimée. À l’empilement de décisions et de propositions, qui caractérise le dispositif actuel, nous substituons des priorités, qui nous rapprocheront des grands pays développés et nous aideront à adopter une stratégie nationale.

Aux termes de l’article 53, cette stratégie sera élaborée par le Conseil stratégique de la recherche, outil de pilotage interministériel présidé par le Premier ministre ou par le ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui la mettra en œuvre. Ce conseil, qui remplacera le Haut conseil de la science et de la technologie, redonnera à l’État son rôle de stratège. Par amendement, je vous proposerai d’insérer dans le texte le terme d’innovation, pour inscrire dans la loi le principe d’un Conseil stratégique de la recherche et de l’innovation.

L’évaluation est le deuxième enjeu du titre VI. La création, en 2006, de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES), a lancé notre pays sur la voie de l’évaluation indépendante. Lors des Assises, plusieurs voix se sont élevées pour demander qu’on améliore le dispositif actuel. À cette fin, le texte propose de créer un Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, dont la mission ne sera pas tant d’évaluer directement, même s’il pourra le faire ponctuellement, mais de garantir la qualité de l’évaluation et de l’auto-évaluation des organismes. Il sera régi par un conseil d’administration assisté d’un conseil d’orientation scientifique. Par amendement, je vous proposerai de lui donner le nom de Haute autorité, de clarifier l’article 49 qui définit ses missions et de faire du conseil d’orientation scientifique un comité d’orientation scientifique.

L’article 55 porte sur les activités de transfert. Tout chercheur qui aura fait une découverte dans le cadre d’un projet financé par des fonds publics devra la déclarer auprès de l’organisme employeur. Ensuite, au lieu de se perdre dans les laboratoires, les inventions devront remonter vers la direction des organismes et être sanctionnées par un brevet, première étape du transfert. L’employeur les valorisera d’abord auprès des PME de l’Union européenne. Je soutiendrai un amendement visant à faciliter le transfert en instaurant un mandataire unique quand le brevet peut avoir plusieurs propriétaires publics, ce qui arrive dans les unités mixtes.

Le transfert est essentiel pour que la recherche serve la compétitivité et aide notre économie à trouver sa place dans la compétition mondiale. Répéter que l’innovation est la clé de l’avenir ne suffit pas. Il faut passer de l’incantation à la réalité. C’est pourquoi le transfert doit devenir une des missions essentielles de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Ainsi, le titre VI du projet de loi rend toute sa place à l’articulation entre recherche fondamentale ou technologique, et développement économique. Il installe durablement dans notre pays, en réglant les problèmes que posait l’AERES, l’évaluation indépendante, indispensable pour faire reconnaître nos travaux à l’international. Enfin, il fait du transfert une mission clé de l’enseignement supérieur et de la recherche. Pour toutes ces raisons, je vous propose d’émettre un avis favorable à son adoption.

Mme Laure de La Raudière. La loi relative aux libertés et responsabilités des universités, qui a posé les bases de l’autonomie des universités, était une réforme fondamentale et courageuse du président Sarkozy. Si nous convenons qu’il faut en améliorer certains aspects, nous contestons qu’on la remette en cause, alors que, votée en 2007, elle n’est appliquée que depuis 2009-2010. C’est pourquoi nous resterons pragmatiques quand on nous proposera de la modifier. Le groupe UMP a mis en place un groupe de travail piloté par trois collègues, qui rendra ses conclusions avant l’examen du texte par la Commission saisie au fond. Pour l’heure, il n’a pas déposé d’amendement, et ne prendra pas part au vote.

Autant la recherche académique française a ses lettres de noblesse, car elle s’inscrit dans la continuité de l’école, qui valorise l’enseignement académique, autant, pour le numérique, notre mode d’apprentissage dans le primaire ou le secondaire n’est pas d’une grande aide, faute de laisser suffisamment de place à la créativité. Si vous voulez innover à l’université, pourquoi n’avez-vous pas utilisé le projet de loi sur la refondation de l’école pour modifier l’enseignement dispensé aux enfants ? En stimulant leur créativité, on leur permettrait à terme d’être plus performants dans le numérique.

M. Razzy Hammadi. Le rapporteur pour avis a résumé les enjeux du projet de loi, qui porte une nouvelle ambition. « Les mines du XXIe siècle, rappelait M. Jean-Yves Le Déaut, seront celles de la matière grise. » À cet égard, les articles dont nous sommes saisis apportent des avancées. Après la concertation lancée à l’été dernier, dont les conclusions, déposées en novembre, ont été largement approuvées, on ne peut que souscrire à l’objectif du rapporteur pour avis, qui veut tourner la recherche vers le monde socio-économique.

Si la recherche est un processus, l’innovation est une culture. Pour favoriser celle-ci, il faut remettre l’État stratège au cœur du monde de la recherche, afin qu’il oriente, simplifie, définisse des objectifs, dessinant un cap qui ne réduise pas l’autonomie des chercheurs. L’innovation doit être intégrée en tant que telle dans le processus de recherche. À cet égard, je salue la volonté du rapporteur pour avis d’inscrire dans le droit positif l’existence d’une stratégie nationale de recherche et d’innovation.

Il est grand temps de valoriser le produit de la recherche tant à travers les projets eux-mêmes que dans un cadre national. Le Premier ministre l’a rappelé en novembre 2012, en faisant de la stimulation de l’innovation un des huit axes du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi. Depuis, le rapport MM. Beylat et Tambourin a posé comme une priorité le soutien au transfert de la recherche publique vers le secteur économique. Le rapporteur pour avis a raison d’insister sur ce point et de vouloir compléter le nom du Conseil stratégique de la recherche pour en faire un Conseil stratégique de la recherche et de l’innovation. J’approuve ses initiatives pour aller plus loin et favoriser les partenariats en créant un cadre légal approprié.

Parce qu’une recherche efficace ne peut être que performante, le projet de loi assure la rénovation du système d’évaluation : la refonte de notre dispositif d’évaluation passe par le remplacement de l’AERES par le Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, chargé de nouvelles missions et doté d’une gouvernance modernisée et plus transparente. C’est ainsi qu’on restaurera la confiance dans ce secteur. Le système d’évaluation garantit en effet la qualité de la recherche, le suivi des partenariats et la convergence des énergies nécessaires pour faire de la recherche et de l’innovation un couple vertueux.

Mme Brigitte Allain. L’enseignement supérieur et la recherche jouent un rôle déterminant dans la formation, qui commence dès l’école primaire et que favorisent dès le plus jeune âge les activités périscolaires. La tradition d’excellence scientifique propre à notre pays est attestée par les cinquante-six prix Nobel et les onze médailles Fields qui lui ont été décernés.

À l’heure où la planète connaît des changements complexes, nous devons nous donner les moyens, tant sur le plan national qu’à l’échelon international, de mieux connaître pour mieux agir et d’ouvrir la recherche aux citoyens. Celle-ci ne saurait se limiter à une vision utilitariste, au seul service de l’économie, comme le sous-entend le texte. Elle doit être au service du monde et de l’émancipation de tous.

À ce titre, nous regrettons que, au sein du projet de loi, la compétitivité et la performance prennent le pas sur la coopération, la créativité collective et la solidarité. En faisant du transfert vers les entreprises une mission de service public de l’enseignement supérieur – sans revenir sur les sociétés d’accélération du transfert de technologie (SATT) mises en place grâce aux investissements d’avenir –, le projet de loi privatise en fait la recherche. Or celle-ci doit vivre pour elle-même et, bien qu’encadrée, laisser place à l’imaginaire, comme à la découverte de pistes inexplorées, qui peuvent éventuellement ne pas aboutir. Il suffit de faire confiance à nos meilleurs chercheurs et d’encadrer mieux leur carrière.

Pour créer un lien avec le monde économique, certains pôles de compétitivité ont fait leurs preuves, mais le lien entre recherche et société dépasse la relation avec l’entreprise. Les savoirs citoyens et le dialogue entre science et société sont fondamentaux, au même titre que les échanges entre scientifiques et décideurs publics, administratifs ou politiques. Dans un monde devenu extrêmement complexe, le savoir est un bien précieux, collectif, pour prendre des décisions qui nous aideront tous à mieux vivre ensemble.

Un des objectifs assumés – et louables – du projet de loi est de veiller au rayonnement international de la recherche française, mais c’est la qualité de nos publications scientifiques, plus que le nombre de brevets, qui déterminera notre attractivité, dont nul ne doute. Évitons d’ouvrir une course aux appels à projets, en vue d’attirer des étudiants et chercheurs étrangers sur notre territoire. S’il est bon d’assouplir l’obligation du français dans les formations, il faut avant tout améliorer l’accueil des étrangers comme leurs conditions d’étude et de travail. Or vous ne proposez rien pour réduire leur précarité, qui nous empêche d’être réellement attractifs.

Le projet de loi crée un Conseil stratégique de la recherche, mais il n’en fait pas un véritable lieu où débattre de manière démocratique des grandes orientations de la recherche. Il ne garantit pas non plus l’ouverture ni la transparence de sa composition.

M. le rapporteur pour avis. Madame de La Raudière, nous discuterons les amendements du groupe UMP lorsqu’ils nous parviendront. En attendant, je ne suis pas sûr de bien comprendre vos propos sur l’articulation de ce texte avec le projet de loi sur la refondation de l’école. Dois-je rappeler la stratégie du ministre de l’éducation nationale sur le numérique ?

Quant à l’articulation de l’innovation et de la créativité avec le développement économique, on ne peut nier que nos chercheurs aient moins d’allant que leurs homologues étrangers quand il s’agit de concrétiser leurs avancées.

Le texte permettra de réfléchir à la place à réserver aux docteurs dans la haute fonction publique comme dans la gouvernance des grandes entreprises, qui ne leur sont pas suffisamment ouvertes. Il me semble essentiel qu’ils irriguent davantage le monde politique et économique.

Mme Laure de La Raudière. Le problème vient du fonctionnement de notre école. Je regrette que le texte censé la refonder n’ait pas tenté de le résoudre.

M. le rapporteur pour avis. Je ne suis pas certain que l’école soit seule en cause.

Je remercie M. Hammadi de son soutien. Le projet de loi souligne en effet l’importance de l’innovation pour le développement économique, la mission de l’enseignement supérieur en matière de transfert et la nécessité d’une évaluation indépendante, qui corrige les défauts du système actuel.

J’avoue ne pas partager l’analyse de Mme Allain. Le texte ne réduit pas l’utilité de la recherche au développement économique. Relisez l’exposé des motifs : les pages 4 et 5 rappellent son importance pour l’ensemble de la société. D’ailleurs, dans le budget de l’Agence nationale de la recherche, le rééquilibrage entre les financements pérennes dédiés à la recherche fondamentale et les appels à projets se solde par le retour de 60 millions vers les grands organismes. La recherche fondamentale est indispensable au bien commun, précisément parce qu’elle répond à des questions qui échappent au marché économique. Mais pourquoi opposer les deux types de recherche ? Le projet de loi me semble équilibré à cet égard. Les conditions encadrant le transfert respectent les chercheurs, dont elles valorisent l’inventivité et protègent l’indépendance.

Certains pensent que la société civile doit être représentée dans le Conseil stratégique de la recherche. C’est pourquoi nous voulons que celui-ci réunisse des chercheurs, des organisations syndicales représentatives de l’enseignement supérieur et de la recherche, et des personnalités du monde scientifique. Pour l’heure, la stratégie nationale de recherche et d’innovation se contente de reprendre fidèlement les propositions des chercheurs sans faire aucune place à l’État stratège. Nous avons à cœur de corriger ce défaut.

II.— EXAMEN DES ARTICLES

TITRE VI

DISPOSITIONS RELATIVES À LA RECHERCHE

Chapitre Ier

L’ORGANISATION GÉNÉRALE DE LA RECHERCHE

Article 48

(section 2 du chapitre IV du titre Ier du Livre Ier du code de la recherche)

Remplacement de l’AERES par un Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur

L’alinéa unique de l’article 48 du projet de loi substitue à l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES) un Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur.

L’AERES avait été créée par l’article 9 de la loi de programme n° 2006-450 du 18 avril 2006 pour la recherche, qui avait inséré une nouvelle section au sein du chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code de la recherche relative à cette agence.

Votre Rapporteur a présenté un amendement visant à modifier le nom de cette nouvelle instance d’évaluation, en vue d’en faire une Haute Autorité de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur. Cette modification présente plusieurs intérêts, d’ordre juridique et pratique. D’un point de vue strictement juridique, elle permettrait de consacrer le statut d’autorité administrative indépendante de l’instance d’évaluation, en établissant un lien direct entre sa nature juridique et son appellation, sur le modèle de la Haute Autorité de santé, tout en clarifiant la rédaction des articles suivants du projet de loi. D’un point de vue pratique, cette évolution permet de conserver le sigle de l’Agence d’évaluation, alors que l’AERES a acquis une certaine renommée aux plans national, européen et international.

Suivant la proposition de votre Rapporteur, votre commission a adopté cette modification.

*

* *

La Commission examine l’amendement CE 1 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Conformément à la proposition de M. Le Déaut, je propose que nous donnions au Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur le nom de Haute autorité (HAERES), afin d’une part de témoigner de son statut d’autorité administrative indépendante, et d’autre part de ménager une certaine continuité avec l’AERES.

M. Razzy Hammadi. Il est dommage que nous abordions l’examen des articles sans représentant de l’opposition, et il serait bon que cela soit noté au compte rendu.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 48 modifié.

Article 49

(article L. 114-3-1 du code de la recherche)

Missions du Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur

A.— LE DISPOSITIF DU PROJET DE LOI

L’article 49 du projet de loi procède à la réécriture de l’article L. 114-3-1 relatif au statut juridique et aux missions de l’instance d’évaluation.

Le premier alinéa du nouvel article L. 114-3-1 confère au Haut conseil le statut d’autorité administrative indépendante (AAI), dans la continuité des dispositions législatives relatives à l’AERES. La qualification d’autorité administrative indépendante est apparue pour la première fois en 1978, à l’occasion de la création de la Commission nationale de l’informatique et des libertés par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Malgré quelques interrogations juridiques relatives à la compatibilité constitutionnelle du caractère indépendant d’une autorité administrative, ces structures se sont multiplié depuis les années 1980, au point que le rapport récent du comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale (14) consacré au sujet en listait plus de quarante en 2009. Si les AAI ne peuvent représenter une catégorie juridique à proprement parler en raison de leur très grande hétérogénéité, il existe néanmoins quelques critères communs à l’ensemble de ces structures, comme l’absence de personnalité morale.

Le deuxième alinéa du nouvel article L. 114-3-1 dispose que le Haut conseil est le garant de la qualité des évaluations, et lui impose le devoir de s’inspirer des standards internationaux en matière d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur. Par ailleurs, il est laissé à la discrétion du Haut Conseil le choix de procéder directement aux évaluations ou de déléguer à d’autres structures leurs réalisations.

Les alinéas 3 à 8 du nouvel article L. 114-3-1 énoncent les missions du Haut conseil :

Le le charge « d’évaluer les établissements d’enseignement supérieur et leurs regroupements définis à l’article L. 718-2-2 du code de l’éducation, les organismes de recherche, les fondations de coopération scientifique et l’Agence nationale de la recherche ou, le cas échéant, de s’assurer de la qualité des évaluations conduites par d’autres instances ». Si la liste des établissements d’enseignement supérieur est bien connue (15) de même que les organismes de recherche ou l’ANR, les regroupements constituent une novation du projet de loi.

Ainsi, l’article L. 718-2-2 du code de l’éducation est créé par l’article 38 du présent texte relatif à la mise en œuvre de la coordination territoriale, soit par la création d’un nouvel établissement d’enseignement supérieur par la fusion de plusieurs établissements, soit par une opération de regroupement - participation à une communauté d’universités et établissements ou rattachement d’établissements ou d’organismes publics ou privés concourant aux missions du service public de l’enseignement supérieur ou de la recherche à un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel autre qu’une communauté d’universités et établissements.

Le confie au Haut conseil la responsabilité « de valider les procédures d’évaluation des unités de recherche par d’autres instances ; lorsqu’une unité relève de plusieurs établissements, il est procédé à une seule évaluation  », c’est-à-dire de s’assurer de la qualité, du professionnalisme et de l’indépendance des évaluations qu’il délègue, et de veiller à ne pas multiplier les évaluations dans le cas spécifiques des unités mixtes.

Le le charge « d’évaluer lui-même ces unités s’il ne valide pas les procédures d’évaluation envisagées ou en l’absence de décision conjointe des établissements dont relèvent ces unités de recourir à une autre instance » conformément à la faculté qui lui est accordée de procéder directement à des opérations d’évaluations. Il semble regrettable à votre Rapporteur de ne prévoir une intervention directe de l’instance d’évaluation qu’en cas d’échec – absence de validation ou absence d’accord – alors que même les établissements publics scientifiques et technologiques comme la Conférence des présidents d’université ont manifesté le souhait de pouvoir solliciter directement le Haut conseil.

Le lui confère la responsabilité « d’évaluer les formations et diplômes des établissements d’enseignement supérieur ou, le cas échéant, de valider les procédures d’évaluation réalisées par d’autres instances ; lorsque ces formations font l’objet d’une demande d’accréditation prévue à l’article L. 613-1 du code de l’éducation, l’évaluation est préalable à l’accréditation ou à sa reconduction. Le Haut conseil s’assure de la conformité de la formation au cadre national des formations et de l’effectivité de la participation des étudiants à l’évaluation des enseignements ». L’évaluation des formations participe de la nécessité de disposer d’une évaluation universelle, c’est-à-dire qui touche les établissements, les unités de recherche, les formations et les personnels. Par ailleurs, la participation des étudiants à l’évaluation des enseignements constituait une proposition des Assises et sera également assurée par la représentation des étudiants au sein du conseil d’administration du Haut conseil. L’accréditation mentionnée à l’article L. 613-1 du code de l’éducation est également une novation du présent projet de loi, introduite en son article 20 en remplacement de la procédure d’habilitation actuellement en vigueur.

Le enjoint au Haut conseil « de s’assurer de la prise en compte dans les évaluations des personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche, de l’ensemble des missions qui leur sont assignées par la loi et leurs statuts particuliers » de manière à conforter l’exhaustivité des évaluations réalisées.

Enfin, le dernier alinéa de l’article reprend une disposition existante autorisant l’instance d’évaluation à prendre part, dans le cadre de programmes de coopération européens ou internationaux, à des opérations d’évaluation d’organismes de recherche et d’enseignement supérieur étrangers. C’est dans ce contexte que l’AERES avait effectué des missions au Liban, en Arménie, en Afrique du Sud, en Arabie Saoudite et plus récemment dans plusieurs pays d’Amérique latine.

B.— LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre Rapporteur a proposé à la commission des affaires économiques une clarification de la rédaction de cet article, qui poursuit essentiellement quatre objectifs.

En premier lieu, il souhaite modifier le nom de l’instance d’évaluation, en la qualifiant de Haute Autorité, conformément à ses préconisations précédentes.

En deuxième lieu, il lui apparaît nécessaire de clarifier les rôles respectifs du Haut conseil et des structures créées en son sein. Ainsi, alors que le deuxième alinéa du nouvel article L. 114-3-1 confie au Haut Conseil le rôle de garant de la qualité des évaluations, l’article 50 du projet de loi précise que le conseil d’administration du Haut conseil est garant de la qualité des travaux du Haut conseil. Bien qu’il y ait évidemment une identité entre le Haut conseil et son conseil d’administration, il semble à votre Rapporteur que les dispositions initiales du projet de loi prévoient un trop grand nombre de garants. Dans ces conditions, il propose une nouvelle rédaction de cet article.

En troisième lieu, la rédaction du 3° de l’article L. 114-3-1 mérite d’être précisé, en regroupant les dispositions relatives à l’évaluation des unités de recherche, et en distinguant le régime applicable aux unités mixtes et celui applicable aux unités relevant d’un seul établissement. Il en ressortirait une rédaction plus équilibrée, et plus claire, qui offre également la possibilité aux tutelles de solliciter directement la Haute autorité.

En quatrième lieu, il complète les dispositions relatives à l’évaluation des personnels, en précisant que la participation des personnels de la recherche à la création d’entreprises et aux activités des entreprises existantes devait être intégrée à l’évaluation. Trop souvent, un chercheur ayant effectué une mobilité dans le secteur privé sera mal évalué à son retour dans son organisme d’origine. Cette situation est préjudiciable à la mobilité des chercheurs et à la fluidité entre le secteur public et le monde de l’entreprise. Pourtant, comme l’ont montré les rapports de M. Jean-Yves Le Déaut et de MM. Tambourin et Beylat, cette mobilité est essentielle à l’acculturation du secteur privé à la recherche et au renforcement de la part de la recherche privée.

Votre commission a suivi les préconisations de votre Rapporteur et ainsi adopté un amendement de rédaction globale de cet article.

*

* *

La Commission étudie l’amendement CE 8 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Sur les cinq missions d’évaluation que l’article 49 attribue à l’instance d’évaluation, la deuxième et la troisième, qui concernent les unités de recherche, distinguent le cas où l’instance procède directement à l’évaluation de celui où elle évalue la qualité de l’évaluation. Je propose de les regrouper en ne conservant que quatre points, le premier portant sur l’évaluation des établissements, le deuxième, sur celle des unités, le troisième, sur celle des formations, et le quatrième, sur celle des personnels.

Dans ce quatrième point, je suggère de spécifier que l’évaluation des personnels devra prendre en compte la participation des chercheurs à la création ou aux activités d’une entreprise. Cela leur permettra de mieux valoriser, dans leur carrière ultérieure, l’expérience qu’ils auront acquise dans le monde de l’entreprise quand ils assurent le transfert de leurs inventions. Aujourd’hui, même si la loi de 1999 leur permet de retrouver leur poste après une période de disponibilité de deux fois deux ans, leur carrière ne prend pas en compte cette partie de leur cursus.

M. le président François Brottes. Il s’agit donc d’un amendement de clarification et de précision.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 49 modifié.

Article 50

(article L. 114-3-3 du code de la recherche)

Gouvernance du Haut conseil de l’évaluation de la recherche
et de l’enseignement supérieur

A.— LE DISPOSITIF DU PROJET DE LOI

L’article 50 du projet de loi procède à la réécriture de l’article L. 114-3-3 du code de la recherche relatif à la gouvernance de l’instance d’évaluation.

Si le nouveau dispositif conserve le principe d’un conseil d’administration, il en modifie la composition, et les missions, et lui adjoint un conseil d’orientation scientifique. L’objectif est ainsi de clarifier la répartition des rôles entre la gestion administrative et la définition des tâches scientifiques.

Le premier alinéa du nouvel article L. 114-3-3 expose les deux instances de gouvernance du Haut conseil : un conseil d’administration garant de la qualité des travaux du Haut conseil, un conseil d’orientation scientifique (COS) étant placé à ses côtés.

Le deuxième alinéa du nouvel article L. 114-3-3 confie au conseil d’administration la responsabilité d’arrêter le programme annuel d’évaluation et de définir, après avis du COS, les mesures propres à garantir la qualité, la transparence et la publicité des procédures d’évaluation. Ainsi, pour tenir compte des critiques formulées à l’encontre de la méthodologie retenue par l’AERES, les rapports d’évaluation réalisés par le Haut conseil ou sous sa tutelle ne seront pas forcément rendus publics.

Le troisième alinéa du nouvel article L. 114-3-3 précise que le président du Haut conseil, nommé parmi ses membres, a autorité sur ses personnels. Votre Rapporteur tient à ce stade à attirer l’attention du Gouvernement et du Parlement sur ce qui semble être un oubli susceptible de réduire les pouvoirs du Parlement.

La loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution prévoit, dans son annexe, que le président du conseil de l’AERES est nommé conformément à cette procédure, c’est-à-dire que « le pouvoir de nomination du Président de la République s’exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. » Le changement d’appellation de l’instance d’évaluation, couplée à une refonte de ses missions et de sa gouvernance, implique donc une modification de la loi organique pour que cette procédure s’applique à la nomination du président du conseil de la nouvelle instance d’évaluation.

En effet, les dispositions de la loi organique sont d’interprétation stricte : elles ne visent pas l’instance d’évaluation de l’enseignement supérieur et de la recherche de manière générique mais très précisément l’AERES. Si la mention du nouveau Haut Conseil – ou de la nouvelle Haute Autorité – ne s’y substitue pas, cette nomination sortira du champ de celles dont l’article 13 de la Constitution prévoit qu’elles sont soumises à un vote préalable du Parlement et il restera une référence non pertinente dans la loi organique.

Or, pour l’instant, aucun projet de loi organique n’a été déposé par le Gouvernement. Il importe donc d’être vigilant en rédigeant dès à présent une proposition de loi organique opérant cette modification. Il en va des prérogatives du Parlement.

Le quatrième alinéa du nouvel article L. 114-3-3 élargit le nombre des membres du conseil d’administration de 25 à 30 membres, en précisant que sa composition respecte le principe de parité entre les femmes et les hommes.

Les alinéas 5 à 10 du nouvel article L. 114-3-3 précisent la composition du conseil d’administration :

1. Neuf membres ayant la qualité de chercheurs, d’ingénieurs ou d’enseignants-chercheurs, nommés sur proposition des instances d’évaluation compétentes en matière d’enseignement supérieur et de recherche, dont au moins trois sur proposition de l’instance nationale mentionnée à l’article L. 952-6 du code de l’éducation et au moins trois sur proposition des instances d’évaluation mentionnées à l’article L. 321-2 ;

Si ces personnels siégeant déjà au conseil d’administration de l’AERES, votre Rapporteur constate que leur nombre s’accroît de 7 à 9 représentants.

2. Huit membres ayant la qualité de chercheurs, d’ingénieurs ou d’enseignants-chercheurs, dont trois sur proposition des présidents ou directeurs d’organismes de recherche et trois sur proposition des conférences de chefs d’établissements mentionnées à l’article L. 233-1 du code de l’éducation ;

Si ces personnels siégeant déjà au conseil d’administration de l’AERES, votre Rapporteur constate que leur nombre s’accroît de 7 à 8 représentants et que sont explicitement mentionnées les deux conférences composées, d’une part, des présidents d’université, des responsables des grands établissements et des directeurs d’écoles normales supérieures et, d’autre part, des responsables d’établissements d’enseignement supérieur, d’instituts ou écoles internes à ces établissements habilités à délivrer le diplôme d’ingénieur et des directeurs des écoles d’ingénieurs, autres que celles relevant du ministre chargé de l’enseignement supérieur, ayant, le cas échéant, reçu l’approbation de leur autorité de tutelle.

3. Deux membres représentant les étudiants, sur proposition des associations d’étudiants en fonction du nombre de voix obtenues par ces associations lors de l’élection des représentants des étudiants au Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche ;

Votre Rapporteur souligne le caractère novateur de l’association des représentants d’étudiants au processus d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur.

4. Neuf personnalités qualifiées françaises et étrangères, dont au moins deux issues du secteur de la recherche privée et trois appartenant à des agences d’accréditation ou d’évaluation étrangères ;

Votre Rapporteur constate que le nombre de personnalités qualifiées siégeant au sein du conseil d’administration de l’instance d’évaluation n’évolue pas, mais que la répartition des différents postes est quelque peu précisée.

5. Un député et un sénateur.

Si votre Rapporteur se réjouit de constater la pérennisation de la présence de parlementaires au sein du conseil d’administration du Haut conseil, il note toutefois que les dispositions actuellement en vigueur précisaient que les deux parlementaires devaient être membre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Enfin, le dernier alinéa de l’article, s’il renvoie la composition du conseil d’orientation scientifique au pouvoir réglementaire, précise que celui-ci est composé de personnalités qualifiées, dont un tiers au moins étrangères, reconnues pour leurs compétences scientifiques et leurs compétences en matière d’évaluation.

B.— LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Conformément à ses préconisations précédentes, votre Rapporteur propose de modifier le nom de l’instance d’évaluation, ce qui contribuera notamment à clarifier la rédaction des premiers alinéas de cet article. Suivant le même objectif, il propose de substituer aux termes « conseil d’orientation scientifique » ceux de « comité d’orientation scientifique ».

Votre commission a adopté cet amendement de précision et de clarification.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CE 3 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. L’article 50 stipule que le Haut conseil est administré « par un conseil, assisté d’un conseil d’orientation scientifique », garant de la qualité de ses travaux. Pour clarifier cette rédaction, je propose que ce « conseil d’orientation scientifique » soit plutôt un « comité d’orientation scientifique ».

L’amendement procède par ailleurs à des coordinations avec l’amendement CE 1.

Mme Frédérique Massat. Sur les trente membres du Haut conseil, qui doit comprendre autant de femmes que d’hommes, neuf ont la qualité de chercheurs, d’ingénieurs ou d’enseignants-chercheurs et neuf sont des personnalités qualifiées françaises ou étrangères. Ces nombres impairs ne facilitent pas le respect de la parité.

M. le rapporteur pour avis. Celle-ci s’entend globalement et non dans chaque collège.

Mme Frédérique Massat. Certes, mais la rédaction oblige les collèges à se concerter entre eux avant de désigner leurs membres.

M. le rapporteur pour avis. Un décret en Conseil d’État précisera le nombre et la répartition par sexe des candidats proposés par chacune des instances compétentes.

Mme Laure de La Raudière. On me signale que M. Hammadi a regretté l’absence de l’opposition, dont je suis l’unique représentante, quand la Commission a abordé l’examen des articles. Pendant quelques instants, j’ai été appelée à l’extérieur pour une urgence, ce qui nous arrive à tous. La remarque me semble d’autant plus déplacée que l’ordre du jour et le calendrier de travail de notre Commission ont fréquemment évolué ces derniers jours, ce qui ne favorise pas l’assiduité des députés. Je rappelle en outre qu’une motion de rejet préalable est actuellement défendue dans l’hémicycle par un membre de notre groupe.

M. le président François Brottes. Je prends acte de votre remarque, qui me paraît relativement fondée. En effet, la modification de l’agenda parlementaire nous a amenés à faire évoluer les horaires des Commissions.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 50 modifié.

Article 51

(articles L. 114-3-2, L. 114-3-4, L. 114-3-5, L. 114-3-6, L. 114-3-7, L. 311-2 du code de la recherche)

Coordination juridique

Cet article modifie les articles L. 114-3-2, L. 114-3-5, L. 114-3-6, L. 114-3-7 et L. 311-2 du code de la recherche pour prendre en compte le changement de nom de l’instance d’évaluation. Il procède par ailleurs à l’abrogation de l’article L. 114-3-4 du code de la recherche qui organisait l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur en différentes sections.

Suivant la proposition de votre Rapporteur, votre commission a adopté un amendement de coordination relatif à l’appellation de l’instance d’évaluation.

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La Commission adopte l’amendement de coordination CE 4 du rapporteur pour avis.

Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 51 modifié.

Article 52

(articles L. 711-1, L. 711-4 du code de l’éducation)

Coordination juridique

Cet article modifie les sixième et dernier alinéas de l’article L. 711-1 ainsi que les deuxième et quatrième alinéas de l’article L.711-4 du code de l’éducation pour prendre en compte le changement de nom de l’instance d’évaluation.

Il supprime, par ailleurs, le cinquième alinéa de l’article L.711-1 du code de l’éducation, ainsi qu’une phrase du sixième alinéa de cet article qui fait référence aux pôles de recherche et d’enseignement supérieur.

Suivant la proposition de votre Rapporteur, votre commission a adopté un amendement de coordination relatif à l’appellation de l’instance d’évaluation.

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La Commission adopte l’amendement de coordination CE 5 du rapporteur pour avis.

Puis elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 52 modifié.

Article 53

(article L. 120-1 [rétablissement] du code de la recherche)

Création du Conseil stratégique de la recherche

A.— LE DISPOSITIF DU PROJET DE LOI

Le projet de loi rétablit un chapitre préliminaire au titre II du livre Ier du code de la recherche composé d’un unique article L.120-1 qui prévoit la création d’un Conseil stratégique de la recherche chargé de définir les grandes orientations de la stratégie nationale de recherche et de participer à l’évaluation de leur mise en œuvre.

L’État affirme ainsi sa volonté de reprendre en main la stratégie de la recherche par un véritable organe dédié, et votre rapporteur ne peut que se réjouir de cette mesure.

Cette nouvelle instance se substitue au Haut conseil de la science et de la technologie (HCST) créé par la loi n°2006-450 du 18 avril 2006 de programme pour la recherche et organisé par le décret n° 2006-698 du 15 juin 2006, et au Conseil supérieur de la recherche et de la technologie. Elle poursuit l’évolution apportée au HCST par le décret n° 2009-309 du 19 mars 2009 qui avait placé cette instance auprès du Premier ministre (et non plus auprès du Président de la République) et avait modifié sa composition dans un sens de diversification des profils des membres.

1. Une composition adaptée

Bien que le dernier alinéa du nouvel article L. 120-1 du code de la recherche laisse au pouvoir réglementaire le soin de préciser les missions, l’organisation et le fonctionnement du Conseil stratégique de la recherche, certains éléments de sa composition sont mentionnés dans la loi, de manière à renforcer leur importance.

Le Conseil stratégique de la recherche est ainsi présidé par le Premier ministre ou, par délégation, par le ministre chargé de la recherche, – à la différence de l’instance qu’il remplace (HCST) dont le président était désigné parmi les membres –, ce qui tend à renforcer le rôle stratégique et surtout interministériel du Conseil.

Le Parlement est représenté par un député et un sénateur qui, à l’instar du HCST, seront membres de l’OPECST. Ce n’est pas mentionné dans le projet de loi, mais perdureront également les personnalités françaises et étrangères choisies pour leurs compétences, notamment au sein d’entreprises, afin de rendre le Conseil pleinement opérationnel.

Enfin, le projet affirme explicitement au premier alinéa le caractère paritaire entre les hommes et les femmes du Conseil stratégique, parité également inscrite dans le projet de loi, pour les élections aux différentes instances de gouvernance des universités et autres établissement d’enseignement supérieur, au CNESER, ou au conseil d’administration du nouveau Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur. Cette obligation de parité s’inscrit dans un plan d’action plus global destiné à rendre effective l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’enseignement supérieur et soutenu par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche en lien avec le ministère des droits des femmes. Votre rapporteur souscrit à cette mention législative dans la composition du Conseil stratégique.

En unifiant l’instance pilote de la recherche et en diversifiant sa composition autour du Premier ministre, la France se dote ainsi d’un organisme plus efficace.

2. Un rôle stratégique renforcé

Le deuxième alinéa du nouvel article L. 120-1 définit le rôle du Conseil stratégique de la recherche.

Celui-ci propose d’abord « les grandes orientations de la stratégie nationale de recherche définie à l’article L. 111-6 ». L’article L.111-6 est réécrit par le projet de loi dans son article 11 afin de poser le principe de la stratégie nationale de recherche et d’innovation, élaborée en concertation avec tous les acteurs de la recherche sous la coordination du ministre chargé de la recherche, ses moyens de mise en œuvre et son évaluation.

Le Conseil stratégique comporte un comité de pilotage interministériel élargi chargé d’organiser la programmation scientifique en s’appuyant sur les compétences des opérateurs de la recherche publique regroupés dans les cinq alliances thématiques de recherche (Aviesan, Allenvi, Ancre, Allistene et Athena), sur une mission transversale confiée au CNRS, présent dans toutes les alliances, et sur l’expertise de l’OPECST.

Le Conseil stratégique évalue ensuite la mise en œuvre des orientations de la stratégie nationale de recherche.

L’État affirme ainsi sa volonté de reprendre en main la stratégie de la recherche par un véritable organe dédié, et non plus par le biais de l’ANR, qui se retrouvait, par défaut, la programmatrice de la recherche, faisant des arbitrages entre thématiques.

B.— LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre Rapporteur ne peut qu’encourager la volonté de définir de réelles priorités de recherche par une véritable stratégie nationale. Cependant, afin que ces priorités soient vraiment porteuses pour la compétitivité de la France, la stratégie nationale de recherche se doit d’être également une stratégie nationale d’innovation. C’est le sens de l’amendement déposé par votre Rapporteur, qui vise à inscrire dans la loi le principe d’un Conseil stratégique de la recherche et de l’innovation, afin d’insister sur l’importance de la recherche et de la promotion de l’innovation dans les programmes de recherche. Bien évidemment, la recherche ne se réduit pas uniquement à la poursuite de l’innovation, mais il semble important de coupler ces deux notions, notamment en vue de renforcer le transfert des résultats de la recherche.

Suivant la recommandation de votre Rapporteur, votre commission a adopté cet amendement.

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* *

La Commission examine l’amendement CE 9 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à souligner l’articulation entre la recherche et l’innovation, et donc le développement économique.

La Commission adopte l’amendement.

Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 53 modifié.

Article 54

(article L 311-1 du code de la recherche)

Renforcement de la transparence de la nomination des dirigeants d’organismes

Dans un souci de rénovation des politiques publiques et de bonne pratique, l’article L. 311-1 du code de la recherche est complété par un alinéa qui vise à rendre la nomination des dirigeants des établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST) et du directeur de l’Agence nationale de la recherche (ANR) plus transparente, sans pour autant modifier le mode de désignation qui leur est applicable sur le fondement de leur statut respectif.

Actuellement, les dirigeants des huit établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST) que sont l’IRD, l’INSERM, l’INRIA, l’IFSTTAR, l’INRA, l’INED, le CNRS et l’IRSTEA, qui sont généralement présidents du Conseil d’administration et présidents de l’organisme, exerçant les fonctions de directeur général (sauf pour l’INED et l’IFSTTAR où il existe parallèlement un directeur général) sont nommés par décret sur proposition du ou des ministres de tutelle. Le directeur général de l’ANR est également nommé par décret en conseil des ministres sur proposition du ministre chargé de la recherche.

L’article 54 introduit une procédure d’appel public à candidature et un examen de ces candidatures par une commission dont les membres sont nommés par les ministres de tutelle, en amont de la nomination proprement dite du président de l’organisme.

Avec la création des commissions d’examen des candidatures, les ministres de tutelle ne sont donc plus instance de proposition directe du candidat. Ils gardent un droit de regard en nommant les membres de la commission, mais l’organisation de celle-ci reste à la discrétion de chaque organisme par le biais de ses statuts qui devront donc être modifiés (décret statutaire de chaque organisme de recherche).

Le principal intérêt de la mesure réside dans l’appel public à candidature qui permet d’élargir le vivier de choix des candidats et permet ainsi de faire émerger des profils plus diversifiés, tout en donnant une plus grande lisibilité à un processus souvent perçu comme opaque.

De manière générale, ce nouvel alinéa ne remet pas en cause la procédure de nomination prévue par l’article 13 de la Constitution. La nomination des dirigeants des trois EPST cités dans la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution (CNRS, INRA et INSERM) sera ainsi toujours soumise à l’avis des commissions permanentes compétentes du Parlement.

Suivant la proposition de votre Rapporteur, la commission a adopté cet article sans modification.

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* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 54 sans modification.

Chapitre II

L’EXERCICE DES ACTIVITÉS DE TRANSFERT POUR LA CRÉATION DE VALEUR ÉCONOMIQUE

Article 55

(article L. 329-7 du code de la recherche)

Transfert des résultats de la recherche vers les PME de l’Union européenne

Les quatre alinéas de l’article L.329-7 du code de la recherche sont modifiés par l’article 55 du projet de loi qui vient compléter le principe du transfert énoncé aux articles 5, 7 et 10 du projet de loi. Ce transfert intervient d’abord par la déclaration de l’invention par le chercheur auprès de son employeur. Si cette pratique est clairement entrée dans les mœurs pour les grands organismes de recherche, elle l’est moins pour les universités, et il est donc utile d’en inscrire le principe dans la loi.

1. Un assouplissement des conditions d’accès de l’invention à la valorisation

Dans l’actuel article L.329-7 du code de la recherche, les agents de l’État et de ses établissements publics, auteurs d’une invention, doivent en faire la déclaration auprès de leur employeur en vue de l’acquisition d’un titre de propriété intellectuelle (brevet). En rajoutant les agents des « personnes publiques investies d’une mission de recherche », à savoir ceux des collectivités territoriales, mais aussi des groupements d’intérêt public par exemple, le projet de loi élargit le panel des auteurs d’inventions.

De même, les projets de recherche concernés ne sont plus limités à ceux qui sont financés par l’ANR, mais étendus à tous ceux qui bénéficient d’un financement sur fonds publics, qu’ils proviennent de l’État, des collectivités territoriales ou d’agences de financement nationales (Oséo-BPI, Fonds unique interministériel, CDC) par exemple.

Enfin, le développement économique potentiel devient le seul critère pour déposer une demande de brevet puisque les inventions visées ne sont plus seulement les « inventions nouvelles ».

2. Une incitation renforcée du transfert vis-à-vis des PME

Le III contient l’objet essentiel de la mesure proposée puisqu’il incite les employeurs des agents auteurs des inventions, à valoriser l’invention d’abord auprès des petites et moyennes entreprises (moins de 250 salariés). Les autres entreprises ne sont pas exclues du dispositif, mais la priorité est donnée aux PME, qui constituent l’essentiel du tissu économique français et qui sont génératrices d’emploi. C’est pourquoi il est important, pour que le transfert porte tous ses fruits, de viser prioritairement les PME.

En outre, le projet prévoit que les entreprises s’engagent à une exploitation de l’invention sous la forme « d’une production industrielle ou de la création de service sur le territoire de l’Union européenne ». Ces deux conditions explicites témoignent bien de l’objectif économique de création d’emploi et partant, de compétitivité, liées au transfert des activités de recherche. La mention du territoire de l’Union européenne est tout aussi significative puisque la croissance doit être encouragée en Europe, dans une logique de concurrence internationale.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

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* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 55 sans modification.

Article additionnel après l’article 55

(article L. 342-2 du code de la recherche)

Fonctionnement en réseau des centres techniques industriels

Votre commission a également adopté un amendement portant article additionnel présenté par M. François Brottes, président de la commission. Cet amendement vise à renforcer le fonctionnement en réseau des centres techniques industriels en complétant l’article L. 342-2 du code de la recherche.

Les centres techniques industriels (CTI) ont été constitués à l’origine pour organiser des branches d’activité industrielle ou artisanale et ont acquis des compétences appréciées des entreprises. Cependant, les CTI restent trop méconnus des PME, et l’enjeu actuel est de renforcer leur organisation en réseau afin de conforter leur rôle de facilitateurs dans la valorisation des résultats de la recherche.

Cet amendement vise donc à institutionnaliser le fonctionnement en réseau des CTI de manière à faciliter la circulation et la diffusion des informations au sein du réseau. Cela passerait par une structure centralisatrice qui recevrait les informations et les transférerait à l’ensemble des CTI.

Bien évidemment, pour que ce système fonctionne, les CTI doivent respecter les secrets d’affaires qui pourraient leur être divulgués à l’origine.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CE 7 de M. François Brottes, portant article additionnel après l’article 55.

M. le président François Brottes. Il s’agit en quelque sorte d’un amendement de cohérence avec l’article précédent, puisqu’il vise lui aussi à valoriser l’innovation, en l’occurrence le travail considérable, quoique méconnu, des centres techniques industriels (CTI). L’objectif de cet amendement est de permettre aux PME de bénéficier de l’appui de l’ensemble du réseau des CTI dans le respect du secret des affaires. Il vise par ailleurs à conforter la dynamique issue de la pluridisciplinarité de la vingtaine de CTI répartis sur l’ensemble du territoire.

M. le rapporteur pour avis. Les chercheurs rappellent combien il est important qu’existent des lieux où les disciplines peuvent se confronter : c’est ce qu’ils appellent « l’effet cafétéria », à l’origine d’une dynamique collective. Tel est l’esprit de cet amendement. J’y suis d’autant plus favorable que j’ai le sentiment que notre pays n’exploite pas toutes les richesses des CTI.

M. Daniel Goldberg. Cette disposition vise à une meilleure reconnaissance du rôle des CTI en tant que « cafétérias dématérialisées », pour développer la métaphore utilisée par le rapporteur pour avis, ce qui devrait à terme conforter leur existence.

La Commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 55

Mandataire unique en cas de copropriété de brevets

Votre commission a adopté un amendement portant article additionnel présenté par votre Rapporteur, visant à consacrer dans le droit positif le régime du mandataire unique en cas de copropriété publique constatée au dépôt des titres de propriété intellectuelle.

Lorsque plusieurs établissements publics d’enseignement supérieur et de recherche ou organismes de recherche s’avèrent être copropriétaires d’une invention, il est parfois difficile pour les partenaires industriels de savoir quel est l’interlocuteur public approprié lors du processus de valorisation. Simplifier le dialogue avec les industriels afin d’être pleinement réactif pour conclure rapidement des partenariats stratégiques avec l’industrie constitue un facteur déterminant de compétitivité.

C’est pourquoi il est proposé de désigner un mandataire unique du titre de copropriété intellectuelle, qui sera chargé de la gestion, de l’exploitation et de la négociation du titre, afin d’assurer, dans les meilleures conditions, la protection et la valorisation des résultats issus des travaux de recherche menés en commun.

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* *

Elle examine ensuite l’amendement CE 6 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Lorsque plusieurs établissements publics d’enseignement supérieur et de recherche ou organismes de recherche partagent la propriété d’une invention, les partenaires industriels ont parfois du mal à identifier, lors du processus de valorisation, l’interlocuteur approprié. Or simplifier le dialogue avec les industriels afin d’être pleinement réactif pour conclure rapidement des partenariats stratégiques avec l’industrie constitue un facteur déterminant de compétitivité. C’est pourquoi je vous propose d’autoriser la désignation d’un mandataire unique du titre de copropriété intellectuelle, qui sera chargé de la gestion, de l’exploitation et de la négociation du titre, afin d’assurer, dans les meilleures conditions, la protection et la valorisation des résultats issus des travaux de recherche menés en commun.

La Commission adopte l’amendement.

Elle émet enfin un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, modifiées.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement CE 1 présenté par M. Christophe Borgel, rapporteur pour avis :

Article 48

Substituer aux mots : « Le Haut conseil », les mots : « La Haute autorité ».

Amendement CE 3 présenté par M. Christophe Borgel, rapporteur pour avis :

Article 50

1. Rédiger ainsi l’alinéa 2 :

« Art. L. 114-3-3. – La Haute Autorité est administrée par un conseil garant de la qualité de ses travaux, assisté d’un comité d’orientation scientifique. ».

2. À l’alinéa 3, substituer aux mots : « du Haut conseil », les mots : « de la Haute Autorité ».

3. À l’alinéa 3, substituer à la troisième occurrence du mot : « conseil », le mot : « comité ».

4. A l’alinéa 4, substituer aux mots : « le Haut conseil et a autorité sur », les mots : « la Haute autorité et dispose de ».

5. Au dernier alinéa, substituer à la première occurrence du mot : « conseil », le mot : « comité ».

6. Au dernier alinéa, substituer par deux fois aux mots : « du Haut conseil » les mots : « de la Haute Autorité ».

Amendement CE 4 présenté par M. Christophe Borgel, rapporteur pour avis :

Article 51

1. Aux premier et dernier alinéas, substituer aux mots : « Le Haut conseil », les mots : « La Haute autorité ».

2. Au deuxième alinéa, substituer aux mots : « au Haut conseil », les mots : « à la Haute autorité ».

3. Supprimer le quatrième alinéa.

4. À l’alinéa 5, substituer aux mots : « du Haut conseil », les mots : « de la Haute autorité ».

Amendement CE 5 présenté par M. Christophe Borgel, rapporteur pour avis :

Article 52

1. Aux alinéas 4 et 5, substituer aux mots : « au Haut conseil », les mots : « à la Haute autorité ».

2. Aux alinéas 5 et 9, substituer au mot « mentionné », le mot : « mentionnée ».

3. Aux alinéas 6, 9 et 10, substituer aux mots : « le Haut conseil », les mots : « la Haute autorité ».

4. À l’alinéa 9, après la quatrième occurrence du mot : « mots », rédiger ainsi la fin de l’alinéa : « : « La Haute Autorité. » ».

5. Après la deuxième occurrence du mot : « mots », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 10 : « : « la Haute autorité de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur mentionnée. » ».

Amendement CE 6 présenté par M. Christophe Borgel, rapporteur pour avis :

Article additionnel après l’article 55

Afin de simplifier et accélérer le transfert des titres de propriété intellectuelle acquis en application du II de l’article L. 329-7 du même code, dans les cas de copropriété publique constatée au dépôt des titres, un mandataire unique, chargé de la gestion, de l’exploitation et de la négociation de ces titres, sera désigné par les déposants avant leur publication. Les missions et conditions de désignation du mandataire seront définies par décret.

Amendement CE 7 présenté par M. François Brottes :

Article additionnel après l’article 55

L’article L. 342-2 du code de la recherche est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les centres techniques industriels fonctionnent en réseau et sont tenus de communiquer à l’instance de coordination des centres, avec l’accord des entreprises concernées par une demande de recherche et d’innovation, les informations susceptibles de contribuer à l’implication de tous les centres du réseau. À ce titre, ils veillent à ce que les secrets d’affaires dont ils ont connaissance ne soient pas divulgués, sauf dans les cas où la loi en dispose autrement. »

Amendement CE 8 présenté par M. Christophe Borgel, rapporteur pour avis :

Article 49

Rédiger ainsi cet article :

« L’article L. 114-3-1 du code de la recherche est ainsi rédigé :

« Art. L. 114-3-1 – La Haute autorité de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur est une autorité administrative indépendante.

« Pour l’exercice de ses missions, la Haute autorité s’inspire des meilleures pratiques internationales et peut conduire directement des évaluations ou s’assurer de la qualité des évaluations réalisées par d’autres instances en validant les procédures retenues.

« Elle est chargée :

« 1°D’évaluer les établissements d’enseignement supérieur et leurs regroupements, définis à l’article L. 718-2-2 du code de l’éducation, les organismes de recherche, les fondations de coopération scientifique et l’Agence nationale de la recherche ou, le cas échéant, de s’assurer de la qualité des évaluations conduites par d’autres instances ;

« 2°D’évaluer les unités de recherche à la demande de l’établissement dont elles relèvent, en l’absence de validation des procédures d’évaluation ou en l’absence de décision de l’établissement dont relèvent ces unités de recourir à une autre instance ou, le cas échéant, de valider les procédures d’évaluation des unités de recherche par d’autres instances.

Lorsqu’une unité relève de plusieurs établissements il n’est procédé qu’à une seule évaluation. La Haute autorité peut l’évaluer à la demande conjointe des établissements dont elle relève, en l’absence de validation des procédures d’évaluation ou en l’absence de décision des établissements dont relève cette unité de recourir à une autre instance. Le cas échéant, la Haute autorité peut aussi valider les procédures d’évaluation des unités de recherche par d’autres instances ;

« 3°D’évaluer les formations et diplômes des établissements d’enseignement supérieur ou, le cas échéant, de valider les procédures d’évaluation réalisées par d’autres instances.

Lorsque ces formations font l’objet d’une demande d’accréditation prévue à l’article L. 613-1 du code de l’éducation, l’évaluation est préalable à l’accréditation ou à sa reconduction. La Haute autorité s’assure de la conformité de la formation au cadre national des formations et de l’effectivité de la participation des étudiants à l’évaluation des enseignements ;

« 4°De s’assurer de la prise en compte dans les évaluations des personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche, de l’ensemble des missions qui leur sont assignées par la loi et leurs statuts particuliers. Les missions réalisées dans le cadre des dispositifs prévus au chapitre III du Titre Ier du Livre IV du code de la recherche sont intégrées à cette évaluation.

« Elle peut également participer, dans le cadre de programmes de coopération européens ou internationaux ou à la demande des autorités compétentes, à l’évaluation d’organismes étrangers ou internationaux de recherche et d’enseignement supérieur. ».

Amendement CE 9 présenté par M. Christophe Borgel, rapporteur pour avis :

Article 53

I. Compléter l’alinéa 3 par les mots : « et de l’innovation ».

II. En conséquence, aux alinéas 4, 5 et 8, après le mot : « recherche », insérer par quatre fois les mots : « et de l’innovation ».

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

M. Jean-Yves Le Déaut, député, vice-président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), auteur du rapport « Refonder l’université, dynamiser la recherche, mieux coopérer pour réussir ».

Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES)

M. Didier Houssin, président

Mme Laurence Pinson, secrétaire générale

Agence nationale de la recherche (ANR)

Mme Pascale Briand, directrice générale

M. Philippe Freyssinet, directeur général adjoint

Mme Charline Avenel, directrice ressources

Centre national d’études spatiales (CNES)

M. Jean-Yves Le Gall, président

Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

M. Joël Bertrand, directeur général délégué à la science

Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)

M. Bernard Bigot, administrateur général

M. Jean-Pierre Vigouroux, chef du service des affaires publiques

Institut national de la recherche agronomique (INRA)

M. François Houllier, président

M. Olivier Le Gall, directeur général délégué chargé des activités scientifiques

M. Jean-François Launay, directeur du cabinet du président

M. Antoine Momot, chargé de mission, cabinet du président

Institut national de la recherche en informatique et en automatique (INRIA)

M. Michel Cosnard, président-directeur général

Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM)

M. Thierry Damerval, directeur général délégué

M. Arnaud Benedetti, directeur du département information scientifique et communication

Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche

M. Roger Genet, directeur général pour la recherche et l’innovation

Conférence des présidents d’université

M. Jean-Loup Salzmann, président

M. Alain Abecassis, délégué général

© Assemblée nationale

1 () Établissements d’enseignement supérieur, organismes de recherche, collectivités territoriales, personnalités qualifiées, etc.

2 () Relever le défi. La stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi. Rapport du groupe de haut niveau présidé par M. Wim KOK (novembre 2004).

3 () Santé, évolution démographique et bien-être ; sécurité alimentaire, agriculture durable, recherche marine et maritime, bio-économie ; énergies sûres, propres et efficaces ; transports intelligents, verts et intégrés ; lutte contre le changement climatique et utilisation efficace des ressources et des matières premières ; sociétés inclusives, novatrices et sûres.

4 () Note de l’Ambassade de France en Allemagne, 20 juillet 2010, Berlin.

5 () Refonder l’Université, dynamiser la recherche. Mieux coopérer pour réussir. Jean-Yves Le Déaut, 14 mars 2013.

6 () http://www.lesechos.fr/opinions/points_vue/0202659124621-l-enseignement-et-la-recherche-nos-armes-pour-demain-552066.php

7 () Étude d’impact, p.7.

8 () http://www.lesechos.fr/opinions/points_vue/0202659124621-l-enseignement-et-la-recherche-nos-armes-pour-demain-552066.php .

9 () Étude d’impact, p.7.

10 () Rapport n° 121 (2005-2006) de MM. Maurice BLIN, Henri REVOL et Jacques VALADE, fait au nom de la commission spéciale, déposé le 8 décembre 2005.

11 () « Les déficiences du dispositif français en la matière sont bien connues. Une myriade d’acteurs qui n’empêche pas que des pans entiers du dispositif de recherche ne soient pas évalués (parmi lesquels les activités d’enseignement des enseignants-chercheurs ou les enseignants-chercheurs ne sollicitant pas d’avancement et ne travaillant pas dans une unité mixte de recherche). Une autre difficulté tient à la part excessive des « élus », représentants des chercheurs, au sein des instances d’évaluation qui conduit à ce que les meilleurs ne soient pas toujours reconnus selon leurs mérites. Enfin, une dernière faiblesse tient au manque d’effectivité de l’évaluation : in fine, en terme de financement aussi bien que d’avancement, les écarts restent faibles entre excellents chercheurs et chercheurs moins méritants. » Rapport n° 2888 déposé le 22 février 2006 par M. Jean-Michel Dubernard.

12 () Étude d’impact, p.59.

13 () Selon l’Agence nationale de la recherche, ces points préfigurent les grandes lignes de la future politique 3.0 des pôles de compétitivité. http://www.agence-nationale-recherche.fr/partenariats-public-prive/poles-de-competitivite/

14 () Les Autorités administratives indépendantes : pour une indépendance sous la garantie du Parlement. Rapport d’information n° 2925. MM. René Dosière et Christian Vanneste.

15 () 75 universités, grands établissements, écoles normales supérieures etc.