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N
° 991 et N° 992

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 avril 2013.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR :

– LE PROJET DE LOI n° 91, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kosovo relatif à la réadmission des personnes en séjour irrégulier et de son protocole d’application,

ET

– LE PROJET DE LOI n° 92, autorisant l’approbation du protocole entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Serbie portant sur l’application de l’accord entre la Communauté européenne et la République de Serbie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier,

PAR M. Jean-Paul BACQUET

Député

——

ET

ANNEXE : TEXTES DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. DES ACCORDS DE RÉADMISSION BIENVENUS POUR ENCADRER LES PROCÉDURES DE RETOUR DES IMMIGRÉS EN SITUATION IRRÉGULIÈRES 7

A. L’immigration en provenance de la Serbie et du Kosovo 7

1. Les flux migratoires : des indicateurs en baisse 7

2. Les demandes d’asile 8

3. Des pays zones de transit pour les immigrants illégaux 10

4. Les filières d’immigration clandestine et la traite des êtres humains 10

B. La gestion des retours : de l’utilité des accords de réadmission 12

1. La négociation de l’accord puis du protocole avec la Serbie 12

1.1. La négociation européenne 12

1.2. La négociation du protocole d’application avec la France ou la nécessité de lever les blocages 15

2. La conclusion d’un accord avec le Kosovo 16

2.1. La position des autorités kosovares et la conclusion rapide d’un accord 16

2.2. La question des minorités du Kosovo 18

II. LE CONTENU DES ACCORDS OBJETS DES DEUX PROJETS DE LOI 23

A. Les dispositions de l’accord de réadmission conclu avec le Kosovo : un accord calqué sur le modèle des accords conclus par la Commission européenne 24

B. Les dispositions des deux protocoles d’application 28

C. Présentation et justification des particularités des accords 31

1.1. Particularités au regard des accords de réadmission conclus 31

1.2. Différences notables entre les accords conclus avec la Serbie et le Kosovo 32

CONCLUSION 35

EXAMEN EN COMMISSION 37

ANNEXE Déclaration entre la République française et la République du Kosovo relative à la coopération dans la lutte contre les filières d’immigration irrégulière et les filières de la traite des êtres humains 43

_____

ANNEXE – TEXTES DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES 45

INTRODUCTION

La conclusion d’accords de réadmission avec les pays tiers constitue l’un des aspects essentiels de la gestion des migrations par les Etats de l’Union européenne. Fondés sur l’article 63 du traité instituant la Communauté européenne, ils constituent l’un des axes de développement d’une politique extérieure dans le domaine de la justice et des affaires intérieures. Pour les pays des Balkans occidentaux, la nécessité de traiter les problèmes liés à l’immigration clandestine a été réaffirmée lors du sommet de Thessalonique du 21 juin 2003, qui a par ailleurs confirmé la perspective européenne ouverte à ces pays. L’« agenda de Thessalonique » a annoncé l’engagement de négociations en vue de la conclusion d’accords de réadmission avec l’ensemble des pays de la région.

Le Conseil a autorisé, le 13 novembre 2006, la Commission à débuter la négociation d’un accord de réadmission avec la Serbie, la Bosnie-et-Herzégovine, le Monténégro et l’ancienne République yougoslave de Macédoine. Ces négociations ont abouti le 8 novembre 2007 avec l’adoption par le Conseil d’une décision établissant la conclusion des accords (décision 2007/819/CE concernant la Serbie).

Ces accords de réadmission prévoient que les obligations de réadmission sont établies sur la base d’une réciprocité totale s’appliquant aux ressortissants nationaux, ainsi qu’aux ressortissants des pays tiers et aux apatrides. Les accords concernent les ressortissants de l’État requis, mais aussi tout individu qui s’est rendu illégalement dans l’État requérant à partir de l’État requis. Les obligations de réadmission couvrent également les enfants mineurs célibataires ainsi que les conjoints qui ont une nationalité autre que celle de la personne à réadmettre et qui ne disposent pas d’un droit de séjour autonome dans l’État requérant.

Les accords conclus préservent la faculté pour les États concernés de conclure des protocoles d’application bilatéraux avec les États membres en vue de l’application concrète de l’accord. Ces protocoles désignent les autorités compétentes en matière de réadmission et les points de passage frontaliers, établit les modalités applicables à la réadmission et au transit des ressortissants des Etats Parties et des pays tiers ainsi que les moyens de preuve et de présomption permettant de déterminer la nationalité des ressortissants de pays tiers et des apatrides et les conditions applicables à leur rapatriement et au transit sous escorte. Tel est précisément l’objet du protocole conclu avec la Serbie qui fait l’objet du projet de loi n° 92.

Par ailleurs, en l’absence de négociation européenne avec le Kosovo, la France a conclu directement avec ce pays un accord de réadmission sur le même modèle, accompagné également d’un protocole d’application. C’est l’accord et le protocole qui font l’objet du projet de loi n° 91.

Bien que le projet de loi n°92 ne porte pas sur l’accord de réadmission avec la Serbie mais uniquement sur le protocole d’application, le présent projet de rapport présente les deux accords de réadmission, eu égard à leurs grandes similitudes, et leurs deux protocoles d’application, aux fins notamment de mettre en exergue les quelques spécificités qui les caractérisent.

I. DES ACCORDS DE RÉADMISSION BIENVENUS POUR ENCADRER LES PROCÉDURES DE RETOUR DES IMMIGRÉS EN SITUATION IRRÉGULIÈRES

A. L’IMMIGRATION EN PROVENANCE DE LA SERBIE ET DU KOSOVO

1. Les flux migratoires : des indicateurs en baisse

La France est un pays de destination pour les migrants serbes. La communauté légale serbe, forte de quelques 35 000 individus (1), est plus particulièrement implantée dans les régions Ile-de-France, Rhône-Alpes et Alsace (respectivement 20 274, 3 191 et 2 015 selon les statistiques du Secrétariat général à l’immigration et à l’intégration pour 2012).

Concernant le régime de circulation, depuis le 15 décembre 2010, les ressortissants serbes détenteurs d’un passeport biométrique sont exemptés de visa pour entrer dans l’espace Schengen ; ils peuvent y séjourner pendant 90 jours par période de 6 mois. La libéralisation des visas a été suivie d’un afflux massif de ressortissants serbes, appartenant souvent à des populations non sédentaires, à destination, notamment, de l’Europe du Nord. Pour ceux-ci, le séjour irrégulier consiste essentiellement en un maintien sur le territoire de l’Union Européenne au-delà de la période autorisée.

Les indicateurs de la lutte contre l’immigration irrégulière serbe marquent une très légère baisse en 2012. En effet, le nombre des interpellations de Serbes en situation irrégulière diminue de 13,6 % avec 305 interpellations réalisées par la police aux frontières en 2012 contre 353 en 2011. Les éloignements et les réadmissions accélérées perdent respectivement 0,8 % et 18,4 % : 240 Serbes ont fait l’objet d’un éloignement forcé en 2012 (179 vers la Serbie et 61 vers d’autres Etats membres de l’Union Européenne), contre 238 en 2011 (184 à destination de la Serbie et 54 vers d’autres Etats membres de l’Union Européenne) et 62 Serbes en situation irrégulière ont fait l’objet d’une procédure de réadmission dite simplifiée à destination d’un autre Etat membre de l’Union Européenne, contre 76 en 2011.

En revanche, la pression migratoire à la frontière est en hausse modérée, le nombre de mesures de non admission visant des ressortissants serbes progressant de 16,4 %. 55 mesures de non-admission ont été prononcées en 2012 contre 46 en 2011.

Afin de rejoindre le territoire national, ces migrants irréguliers transitent fréquemment par l’Italie et l’Allemagne. Certains recourent aux documents falsifiés aux fins d’obtention indue de documents administratifs français. Ainsi, de nombreux permis de conduire bulgares ont été déposés par des ressortissants serbes dans différentes préfectures pour échange contre des permis de conduire français.

La France est aussi un pays de destination pour les migrants kosovars. Malgré une situation relativement stabilisée, depuis de nombreuses années, une partie de la population kosovare cherche à fuir un contexte politico-social difficile et à rejoindre la France qu’elle considère comme une terre d’asile. La proclamation d’indépendance du Kosovo a contribué à raviver les dissensions entre minorités et le pays est aujourd’hui classé non sûr par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) (cf. infra).

En 2012, la communauté légale kosovare était estimée à presque 11 000 personnes, en majorité recensées en Rhône-Alpes, Alsace et Bourgogne (respectivement 3 248, 1 368 et 1 061 personnes). Elle constitue un important soutien pour les réfugiés, mais aussi pour les immigrants illégaux.

Concernant le régime de circulation, bien qu’un projet de libéralisation soit à l’étude depuis plusieurs années, les ressortissants kosovars sont soumis à obligation de visa pour pénétrer dans l’espace Schengen.

Les indicateurs de la lutte contre l’immigration irrégulière révèlent un léger recul en 2012. En effet, la pression migratoire à la frontière décroît, le nombre de mesures de non admission visant des ressortissants kosovars régressant de 15,4 %, avec 236 mesures de non-admission prononcées en 2012 contre 279 en 2011.

Sur le territoire national, la tendance est également à la baisse. D’une part, le nombre des interpellations de Kosovars en situation irrégulière recule de 3 % avec 612 interpellations réalisées par la police aux frontières en 2012 contre 631 en 2011. D’autre part, les éloignements perdent 4,5 % : 402 Kosovars ont fait l’objet d’un éloignement forcé en 2012 (296 vers le Kosovo et 106 vers d’autres Etats membres de l’Union Européenne), contre 421 en 2011 (339 à destination du Kosovo et 82 vers d’autres Etats membres de l’Union Européenne). Enfin, les réadmissions accélérées accusent une baisse plus nette, avec - 21,8 % : 122 Kosovars en situation irrégulière ont ainsi fait l’objet d’une procédure de réadmission dite simplifiée à destination d’un autre Etat membre de l’Union Européenne, contre 156 en 2011.

2. Les demandes d’asile

Au préalable, il convient de rappeler que la loi prévoit que l’admission au séjour peut être refusée par les préfets si une personne est ressortissante d’un pays sûr, c’est à dire un pays qui veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l’état de droit, ainsi que des droits de l’homme et des libertés fondamentales. L’examen de leur demande d’asile par l’OFPRA se fait alors selon la procédure prioritaire dans un délai de quinze jours (voire 96 heures si le préfet décide de placer le demandeur en rétention administrative). Si le demandeur d’asile est entendu à l’Office, ce délai très court ne permet pas un examen exhaustif de la demande d’asile. Surtout, l’intéressé ne dispose pas d’un recours de plein droit suspensif devant la Cour nationale du droit d’asile. En outre, la loi prévoit que pour accéder dans un hébergement en Centre d’accueil des demandeurs d’asile (CADA) ou pour toucher l’allocation temporaire d’attente (ATA), le demandeur d’asile doit être muni d’une autorisation provisoire de séjour. Est donc interdite l’admission dans un centre d’accueil pour demandeurs d’asile et rendu difficile le bénéfice de l’ATA.

La Serbie figurant depuis le 13 novembre 2009 sur la liste des pays d’origine sûrs, l’examen de ces demandes peut se faire selon la procédure prioritaire, à savoir le refus d’admission provisoire au séjour et l’instruction prioritaire de la demande d’asile par l’OFPRA sans recours suspensif devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). Le Kosovo, placé sur la liste des pays d’origine sûre le 18 mars 2011, en a été retiré à la suite de l’annulation de cette décision par le Conseil d’Etat, le 26 mars 2012.

Concernant la demande d’asile serbe, 364 premières demandes (et 72 demandes de réexamen) ont été présentées en 2012, contre 280 premières demandes d’asiles en 2011, 344 en 2010 et 406 en 2009. Le taux d’admission à une protection par l’OFPRA s’élève à 6 % et le taux global d’admission (OFPRA/CNDA) est de 21,3 %. La demande d’asile serbe se compose à 75 % de demandeurs appartenant à la communauté Rom et de 25 % d’Albanais et de Bosniaques.

En 2009 et 2010, le Kosovo occupait le premier rang en matière de demandes d’asile (asile politique et protection subsidiaire) en France. 2 084 demandes d’asile kosovares ont été présentées à l’OFPRA en 2012 (et 527 demandes de réexamen). En 2011, 1 822 premières demandes avaient été présentées et 3 267 en 2010, (1ère position dans la liste des pays de provenance). Le taux d’admission à une protection par l’OFPRA s’élève, en 2012, à 3,7 % et le taux global d’admission (OFPRA/CNDA) à 38,6 %.

Il apparaît que 80 % des demandeurs d’asile kosovars sont d’ethnie albanaise, les autres appartenant à des minorités (essentiellement de Roms puis, dans une moindre mesure, de Goranis). Les Kosovars d’origine albanaise invoquent la crainte de persécutions de la part d’extrémistes qui les accusent de collaboration avec les Serbes à l’époque de la guerre de 1999. Un certain nombre de demandes se réfèrent aussi à des motifs familiaux (violences conjugales et mariages forcés) ou de droit coutumier (vendetta). Les Roms invoquent quant à eux des discriminations dans la vie quotidienne (exclusion sociale et racket), souvent de la part des autorités.

3. Des pays zones de transit pour les immigrants illégaux

La majorité des clandestins se dirigeant vers la Serbie proviennent d’Asie centrale, (Pakistan, Afghanistan). Des mouvements migratoires en provenance de Libye, Somalie et Palestine ont également été signalés à la frontière serbo-macédonienne. En quantité moindre, des migrants provenant du Maghreb traversent la Serbie pour se rendre en Roumanie.

L’itinéraire classique des immigrés illégaux les mène dans un premier temps en Turquie puis en Grèce. Des départs ont lieu depuis Patras et Serres, au sud de Thessalonique. Ils continuent ensuite leur voyage via la région balkanique et rejoignent la Serbie. L’accès à ce pays s’effectue généralement par la Macédoine et le Kosovo, par la voie terrestre, dans des caches aménagées à bord de poids lourds.

Localement, un arrangement conclu par la Serbie et le Kosovo en juillet 2011 a conduit les autorités serbes à accorder la libre circulation sur leur territoire à tous les citoyens du Kosovo. Cette levée des restrictions imposées depuis la proclamation d’indépendance du Kosovo donne, de fait, aux Kosovars, un accès direct à l’Europe occidentale, via la Serbie.

Comme la Serbie, le Kosovo est une plateforme pour de nombreux migrants en situation irrégulière originaires du Proche et du Moyen Orient comme de l’Asie centrale (Afghans, Pakistanais, Iraniens, Irakiens, Syriens, Turcs, Palestiniens…), du continent asiatique (Bangladais) mais aussi pour des ressortissants d’Afrique subsaharienne et occidentale (Nigérians, Congolais ou Ivoiriens). A cette immigration clandestine habituelle se sont ajoutés des flux plus récents, consécutifs aux révolutions arabes ou accentués par celles-ci.

4. Les filières d’immigration clandestine et la traite des êtres humains

Le Ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire, M. Eric Besson, s’est rendu le 2 décembre 2009 à Priština pour signer l’accord de réadmission, mais aussi pour approfondir la coopération bilatérale en matière de lutte contre l’immigration illégale. A été adopté, ce même jour, une déclaration conjointe relative à la coopération dans la lutte contre les filières d’immigration irrégulière et les filières de traite des êtres humains, qui prévoit la mise en œuvre d’un programme de coopération à partir de 2010, notamment, pour la Direction centrale de la police aux frontières (DCPAF) en matière de « techniques de collecte, d’analyse et de traitement judiciaire du renseignement » et de la « lutte contre la fraude documentaire ».

Les relations de coopération bilatérale avec les services kosovars ont effectivement débuté en 2010 avec une première mission d’audit des services kosovars réalisée par l’Office central pour la répression de l’immigration irrégulière et de l’emploi des étrangers sans titre (OCRIEST), de la DCPAF, du 20 au 24 septembre 2010.

En 2011, à l’occasion de sa venue en France au salon MILIPOL, un entretien a été organisé entre le DCPAF et le ministre de l’intérieur kosovar le 21 octobre. En 2012, du 12 au 16 mars, trois officiers kosovars ont effectué un stage au SPAF Lyon St-Exupéry dans le domaine de la sûreté aéroportuaire ; le 11 avril, deux responsables de la PAF kosovare ont visité un centre de coopération policière et douanière (CCPD) ; enfin, le coordonnateur du CCPD de Vintimille et le coordonnateur national français des CCPD ont participé du 29 au 31 mai à un séminaire régional sur les CCPD dans la zone des Balkans occidentaux. Pour 2013, une action a été programmée à l’issue de la réunion de programmation initiale des actions DCI, une mission de formation en matière de lutte contre les filières d’immigration clandestine au profit d’une dizaine de chefs de services de la PAF kosovare, programmée au second semestre 2013.

Par ailleurs, des fonctionnaires de la police aérienne aux frontières participent à la mission européenne de police et de justice EULEX, mission civile menée par l’UE dans le cadre de la politique européenne de sécurité et de défense ((European Union Rule of Law Mission), depuis son lancement en décembre 2008. Ces experts sont prioritairement déployés à l’aéroport international de Pristina.

S’agissant de la situation actuelle en termes de trafics d’êtres humains : les cibles de ce phénomène sont essentiellement des femmes et des jeunes filles (14 à 22 ans en moyenne) vendues à des fins sexuelles (prostitution, mariage forcé) ou, de plus en plus, de travail forcé. La traite exploite, en la détournant, l’immense attente exprimée d’une meilleure qualité de vie par certaines parties de la jeunesse balkanique, qui la pousse à accepter facilement des engagements qui sont faussement présentés comme des offres de travail excellentes. Sur cette question, le Kosovo apparaît comme un pays d’origine et de destination, mais aussi de transit, avec des victimes albanaises, serbes, macédoniennes et moldaves. La Serbie se présente sous les mêmes aspects.

La traite, qui est un problème majeur au Kosovo, est véritablement devenue un phénomène préoccupant en 1999, à l’issue de la guerre du Kosovo, qui a donné lieu à des flux humains et matériels très importants au sein du pays. Aux côtés de l’exploitation sexuelle se manifeste de plus en plus la question de la mendicité des enfants (le nombre d’enfants exploités dans les rues de Pristina, venant d’Albanie est grandissant).

Le nouveau code de procédure pénale kosovar durcit les peines encourues pour trafic d’êtres humains mais le nombre de poursuites et de condamnation reste faible. La Commission européenne a d’ailleurs estimé que le Kosovo pouvait encore renforcer son action dans ce domaine, tandis qu’EULEX considère toujours que la lutte contre le trafic d’êtres humains constitue une nécessité pour ce pays.

B. LA GESTION DES RETOURS : DE L’UTILITÉ DES ACCORDS DE RÉADMISSION

La Serbie comme le Kosovo pratiquent depuis plusieurs années déjà la réadmission de leurs nationaux. Soucieux d’établir de bonnes relations avec l’Union européenne et de faciliter aussi la libre-circulation de leurs ressortissants au sein de l’Union européenne par la négociation d’une exemption des visas, les deux pays ont conclu des accords de réadmission visant à encadrer juridiquement les procédures de retour.

Il convient de souligner que la réadmission de ressortissants d’Etats tiers est déjà pratiquée par ces deux pays, mais elle concerne essentiellement les familles binationales, dont l’unité est préservée lors de leur rapatriement. La question est d’autant plus aigüe dans cette région constituée d’une mosaïque d’Etats nés du fractionnement de l’ex-Yougoslavie. Au cours des trois dernières années, seuls trois ressortissants d’Etat tiers ont été réadmis par la Serbie (deux Kosovars en 2010 et un Roumain en 2012) et six par le Kosovo (un Albanais et un Serbe en 2010, un Macédonien et deux Serbes en 2011 et un Albanais en 2012).

1. La négociation de l’accord puis du protocole avec la Serbie

1.1. La négociation européenne

Le 13 novembre 2006, le Conseil Affaires générales et relations extérieures a officiellement autorisé la Commission à négocier un accord de réadmission avec les pays des Balkans occidentaux, parmi lesquels la Serbie. La Commission a alors transmis un projet d’accord entre la Communauté européenne et la Serbie aux autorités serbes. Les négociations ont été lancées le 30 novembre 2006 et le premier cycle officiel s’est déroulé à Bruxelles le 4 décembre 2006. Deux cycles de négociation supplémentaires ont eu lieu respectivement à Bruxelles et à Belgrade, parallèlement aux négociations concernant un accord CE-République de Serbie visant à faciliter la délivrance de visas. En outre, des réunions informelles d’experts ont parfois été tenues en vue de préparer les négociations officielles. En réalité, seule la question de la réadmission des ressortissants de pays tiers et des apatrides, finalement acceptée a nécessité des mises au point supplémentaires.

Le dernier cycle de négociations officielles s’est déroulé le 11 avril 2007 et a ainsi permis de trouver un accord sur toutes les questions restées en suspens, à l’exception d’une seule, et notamment sur la réadmission des anciens ressortissants de la République socialiste fédérative de Yougoslavie qui n’ont obtenu aucune autre nationalité. Pour la dernière question en suspens, qui concernait les conditions de la réadmission des ressortissants des pays tiers et des apatrides, la Commission a dû consulter les États membres et est parvenue le 16 mai à un accord avec les négociateurs serbes. Le texte définitif de l’accord a été paraphé par les négociateurs en chef des deux parties le même jour.

Le Conseil a adopté à la majorité qualifiée après consultation du Parlement européen la conclusion de l’accord. Sa décision précise notamment que la Commission représente la Communauté au sein du comité de réadmission mixte institué par l’article 18 de l’accord (cf infra).

L’accord de réadmission avec la République de Serbie est similaire à ceux concernant les autres pays des Balkans occidentaux. Il comporte huit sections, 23 articles, sept annexes, qui en font partie intégrante, et six déclarations communes. Ses principales dispositions sont les suivantes :

- les obligations en matière de réadmission énoncées dans l’accord (articles 2 à 5) sont établies sur la base d’une réciprocité totale, s’appliquant aux ressortissants nationaux (articles 2 et 4) ainsi qu’aux ressortissants des pays tiers et aux apatrides, y compris, pour la Serbie, aux anciens ressortissants de la République socialiste fédérative de Yougoslavie qui n’ont obtenu aucune autre nationalité (articles 3 et 5) ;

- l’obligation de réadmission des ressortissants nationaux englobe également les anciens ressortissants qui ont renoncé à leur nationalité ou en ont été déchus sans obtenir la nationalité d’un autre État ;

- l’obligation de réadmission des ressortissants nationaux couvre aussi les membres de la famille (c’est-à-dire le conjoint et les enfants mineurs célibataires) qui ont une autre nationalité que celle de la personne à réadmettre et qui ne disposent pas d’un droit de séjour autonome dans l’État requérant ;

- l’obligation de réadmettre les ressortissants des pays tiers et les apatrides (article 3) est liée aux conditions préalables suivantes: l’intéressé est ou était, au moment de son entrée, en possession d’un visa ou d’une autorisation de séjour en cours de validité délivré par l’État requis, ou l’intéressé est entré illégalement et directement sur le territoire de l’État requérant après avoir séjourné dans l’État requis ou transité par son territoire. Ces obligations ne s’appliquent pas aux personnes en transit aéroportuaire ni à l’ensemble des personnes auxquelles l’État requérant a délivré un visa ou une autorisation de séjour avant ou après leur entrée sur son territoire ;

- les anciens ressortissants de la République socialiste fédérative de Yougoslavie qui n’ont obtenu aucune autre nationalité ont été traités comme une catégorie distincte (article 3, paragraphe 3). Leur réadmission est acceptée par la Serbie pour autant que les deux conditions suivantes soient remplies: leur lieu de naissance se trouvait sur le territoire de la Serbie et leur lieu de résidence permanente à la date de l’indépendance de la Serbie (à savoir le 27 avril 1992) se trouvait sur le territoire de cet État. Les conditions particulières relatives à la réadmission de cette catégorie de personnes ont été appliquées horizontalement dans tous les accords de réadmission avec les pays des Balkans occidentaux ;

- qu’il s’agisse de ses propres ressortissants, en cas d’expiration du délai précisé, ou des ressortissants des pays tiers et des apatrides, dans tous les cas, la Serbie accepte l’utilisation du modèle type de document de voyage de l’UE établi à des fins d’éloignement (article 2, paragraphe 4 et article 3, paragraphe 4) ;

- la section III de l’accord (articles 6 à 9, en liaison avec les annexes 1 à 6) présente les modalités techniques nécessaires régissant la procédure de réadmission (formulaire et contenu de la demande de réadmission, moyens de preuve, délais, modalités de transfert et modes de transport). La procédure est appliquée avec une certaine souplesse, aucune demande de réadmission n’étant exigée lorsque la personne à réadmettre est en possession d’un passeport national en règle et, s’il s’agit d’un ressortissant d’un pays tiers, lorsqu’elle détient également un visa ou une autorisation de séjour valables de l’État qui doit la réadmettre (article 6, paragraphe 2). L’article 6, paragraphe 3 concerne un autre élément procédural important, à savoir la procédure accélérée convenue pour les personnes appréhendées dans la région frontalière. Dans le cadre de la procédure accélérée, la demande de réadmission et la réponse à celle-ci doivent être transmises dans un délai de 2 jours ouvrables, tandis que selon la procédure normale, le délai de réponse est de 10 jours calendrier, sous réserve d’un droit de prorogation sur demande pouvant aller jusqu’à 6 jours calendrier dans les cas dûment motivés ;

- l’accord contient aussi une section consacrée aux opérations de transit (articles 13 et 14, en liaison avec l’annexe 7) ;

- les articles 15 à 17 concernent les règles nécessaires en matière de coûts et de protection des données, ainsi que la relation entre l’accord et d’autres instruments internationaux ;

- l’article 18 traite de la composition du comité de réadmission mixte et de ses attributions et compétences ; en vue de l’application concrète de l’accord, l’article 19 prévoit la faculté, pour la Serbie et chacun des États membres, de conclure des protocoles d’application bilatéraux. L’article 20 précise la relation entre l’accord et les protocoles d’application bilatéraux ainsi qu’avec les autres accords de réadmission bilatéraux existant entre la Serbie et les États membres ;

- les dispositions finales (articles 21 à 23) régissent l’entrée en vigueur, la durée, les éventuelles modifications, la suspension et la dénonciation de l’accord et définissent le statut juridique de ses annexes ;

- la situation particulière du Danemark est prise en compte dans les considérants de l’accord, à l’article 1er, point d), à l’article 21, paragraphe 2 et dans une déclaration commune annexée à l’accord. L’association étroite de la Norvège, de l’Islande et de la Suisse à la mise en œuvre, à l’application et au développement de l’acquis de Schengen est également prise en compte dans des déclarations communes annexées à l’accord.

1.2. La négociation du protocole d’application avec la France ou la nécessité de lever les blocages

L’article 19 de l’accord communautaire prévoit la possibilité de signer un protocole d’application pour définir les règles relatives aux éléments suivants :

- la désignation des autorités compétentes, les points de passage frontaliers et l’échange des points de contact ;

- les modalités de retour dans le cadre de la procédure accélérée ;

- les conditions applicables au rapatriement sous escorte, y compris le transit sous escorte des ressortissants des pays tiers et des apatrides ;

- les moyens et documents s’ajoutant à ceux énumérés aux annexes 1 à 5 de l’accord communautaire.

Il n’entre en vigueur qu’après sa notification au comité de réadmission.

La décision de négocier un protocole bilatéral d’application d’un accord européen de réadmission est ainsi laissée à l’appréciation de chaque Etat membre ainsi que de l’Etat tiers concerné. Pour ce qui est des Balkans occidentaux, la France parachève actuellement la mise au point d’un protocole d’application avec l’Albanie (accord européen en 2005), la Bosnie-Herzégovine et la Macédoine (accord européen en 2007). Aucun élément, par contre, n’est venu jusqu’à présent justifier l’ouverture de négociations avec le Monténégro (accord européen en 2007), qu’il s’agisse des volumes de personnes concernées ou de la qualité de la coopération avec les autorités monténégrines. Pour information, il en est de même pour la Moldavie (accord européen en 2007), qui n’est habituellement pas classée dans la zone occidentale des Balkans.

Or, comme l’indique l’exposé des motifs du projet de loi, l’entrée en vigueur de l’accord communautaire, le 1er janvier 2008, a paradoxalement conduit à des difficultés de coopération avec les autorités serbes dans le domaine de la réadmission se traduisant par une diminution du taux d’exécution des mesures d’éloignement vers ce pays. La qualité de la coopération serbe en matière de délivrance de laissez-passer consulaires s’est en effet brutalement dégradée : sur 97 demandes de laissez-passer formulées auprès des consuls serbes en France au cours de l’année 2008, seules 9 ont donné lieu à la délivrance du document (et encore ne concernaient-elles que des Serbes achevant une peine de prison et désireux de revenir dans leur pays d’origine).

La première séance de négociation du protocole d’application est éclairante sur les causes de ce changement. En premier lieu, la Partie serbe a souligné la dimension politique de sa position : les menaces de rétorsion avancées en leur temps par le ministre de l’intérieur français à l’encontre de la Serbie qui désirait, elle, avancer rapidement sur le sujet de la libéralisation des visas, avaient conduit les autorités serbes à considérer que la pratique de la saisine des consulats serbes en France n’était plus qu’une « tolérance » (sic) qui devait cesser avec l’entrée en vigueur du texte communautaire. Celui-ci, en effet, prévoit des échanges entre autorités compétentes mais ne précise pas celles-ci.

En second lieu, la Partie serbe a avancé la qualité de la coopération existante avec d’autres pays, dont de nombreux Etats membres, sans pour autant reconnaître une compétence décisionnelle aux représentations consulaires serbes : les demandes de réadmission sont directement adressées au ministère de l’intérieur serbe, qui a d’ailleurs constitué un service central spécifiquement dédié à cet effet. Ce cadre de coopération, consacré dans des accords bilatéraux antérieurs à l’accord communautaire, fait systématiquement figurer le ministère de l’intérieur serbe comme autorité compétente pour le traitement des demandes de réadmission.

La négociation du protocole d’application, souhaitée par les Serbes, a servi d’issue à ce blocage car l’article 1er prévoit que le ministère de l’intérieur serbe est l’autorité compétente pour le traitement des demandes de réadmission et l’ambassade serbe à Paris n’a qu’une compétence résiduelle d’établissement du laissez-passer consulaire. Les procès-verbaux des séances de négociation (février et mai 2009) mettent en exergue des discussions portant principalement sur la désignation des autorités compétentes et le circuit de transmission et de traitement des demandes de réadmission, ainsi que sur la mise en place d’une expérimentation, sur cette question, pendant six mois.

Le protocole a été signé le 18 novembre 2009 à Paris. Conformément à l’article 19 §2 de l’accord communautaire, il n’entrera en vigueur qu’après sa notification au comité de réadmission.

2. La conclusion d’un accord avec le Kosovo

2.1. La position des autorités kosovares et la conclusion rapide d’un accord

En matière de retours forcés, la procédure définie initialement entre la Mission d’administration Intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) et le ministère des Affaires étrangères, puis le ministère de l’immigration, de l’identité nationale, de l’intégration et du développement solidaire (MIIINDS) prévoit que l’identification des ressortissants kosovars en séjour irrégulier se fait à partir d’un dossier renseigné par les préfectures et transmis aux autorités compétentes françaises qui centralisent l’ensemble des demandes préfectorales.

Dès la déclaration d’indépendance le 17 février 2008 (la France a reconnu l’indépendance du Kosovo dès le lendemain), les autorités kosovares ont été mises sous pression croissante par les Etats membres de l’Union Européenne pour accepter les personnes de retour. La MINUK a transmis progressivement ses compétences au ministère des Affaires internes du Kosovo. Jusqu’alors, les demandes de rapatriement des Etats occidentaux étaient contrôlées et freinées par la MINUK, qui évaluait le potentiel des risques encourus par les rapatriés et prévenait des processus de rapatriement intenables pour le pays ou des retours massifs. Depuis le 1er novembre 2008, date à laquelle le transfert de compétence a été effectif, les autorités kosovares acceptent les retours de tous leurs ressortissants, quelle que soit leur origine ethnique, dès lors qu’ils figurent sur les registres de l’état civil.

Des inquiétudes se sont au début manifestées sur les effets de ces retours pour les populations et pour le pays. On notera que dans son rapport au Conseil de sécurité d’avril 2010, le Secrétaire Général des Nations Unies a mis en garde les gouvernements européens en signalant que les retours forcés pouvaient avoir un impact négatif sur la situation sécuritaire générale du pays et pouvaient exacerber les tensions existantes. Thomas Hammarberg, alors Commissaire européen aux droits de l’homme, a exprimé en 2008 et 2010 ses préoccupations et a demandé que les gouvernements européens arrêtent les retours forcés, du moins jusqu’à ce que le gouvernement kosovar puisse garantir aux personnes de retour des conditions de vie adéquates.

Des accords de réadmission ont été signés avec de nombreux Etats dont l’Albanie, l’Autriche, la Belgique, la République Tchèque, le Danemark, la France, l’Allemagne, le Luxembourg, le Monténégro, les Pays-Bas, la Norvège, la Slovénie et la Suisse. Le 25 juin 2010, le Kosovo a également adopté une loi sur la réadmission couvrant tous les pays membres de l’UE qui n’ont pas signé d’accords bilatéraux de réadmission avec le pays. La loi oblige le Kosovo à reprendre ses citoyens résidant illégalement dans les pays de l’UE, ainsi que les ressortissants de pays tiers qui sont entrés dans l’UE en passant par le Kosovo.

Si le Kosovo a manifesté et manifeste une très grande coopération en matière de réadmission, c’est d’abord en vue d’obtenir la libéralisation des visas. Le dialogue pour l’ouverture des négociations avec la Commission européenne, entamées le 19 janvier 2012, nécessitait de remplir plusieurs conditions parmi lesquelles la réadmission et la réintégration des ressortissants kosovars séjournant illégalement sur sol européen. La question demeure cependant de la capacité du Kosovo à effectivement assurer la réinsertion des personnes de retour sur son sol et de garantir leur sécurité.

Concernant la conclusion de l’accord avec la France, la volonté de conclure un accord bilatéral de réadmission et son protocole d’application avec la France a été signifiée par les autorités kosovares à l’automne 2009. Le Directeur de l’immigration, M. Francis Etienne, s’est rendu au Kosovo le 18 novembre 2009 pour une première séance de négociations. Le Ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire, M. Eric Besson, s’est rendu le 2 décembre 2009 à Priština pour signer l’accord de réadmission. Le protocole a été paraphé à Paris le 18 février 2010, puis modifié à la demande des autorités kosovares sur des points tels que la désignation des autorités compétentes, qui n’ont pas conduit à remettre en cause les négociations menées sur le fond du texte.

Il convient donc de souligner la brièveté de la négociation (moins d’un mois) et le contexte de fort volontarisme politique dans lequel elle s’est inscrite. Les négociateurs kosovars ont fait preuve de beaucoup de flexibilité pour intégrer dans l’accord les contraintes de la législation française en matière de rétention d’étrangers et adapter ainsi leurs délais de réponse aux demandes de réadmission. Il n’y eu qu’une seule réunion formelle de travail, à Pristina (novembre 2009).

Il est nécessaire de préciser que ce rythme très soutenu, dicté par l’agenda politique d’alors, est la seule explication à la dissociation de la négociation du protocole d’application par rapport à celle de l’accord. Le protocole, négocié et paraphé peu de temps après (février 2010) n’a pas traduit une volonté de revenir sur des dispositions précédemment adoptées dans l’accord. L’intervention de ce texte-gigogne était prévue, dans son principe, par l’accord (Section VI, article 15) et son périmètre se trouvait également défini (même référence) : désignation des autorités compétentes, points de contacts, modalités opérationnelles etc.

Le Kosovo a d’ores et déjà accompli les procédures internes permettant l’entrée en vigueur de l’accord de réadmission et transmis son instrument d’approbation à la Partie française le 8 février 2010.

2.2. La question des minorités du Kosovo

La question des retours se pose naturellement avec plus d’acuité s’agissant des minorités ethniques du Kosovo, qu’il s’agisse de Serbes, de Roms, d’Askhalis, d’Egyptiens ou d’Albanais des zones à majorité serbe. En 2010, on estime que 13 % des retours depuis les pays européens concernaient des personnes des minorités Roms, Ashakalis ou Egyptiens (671 personnes sur 5198). Selon l’UNHCR, durant l’année 2011, 2 435 personnes ont été renvoyées sous contrainte au Kosovo depuis des pays d’Europe occidentale. Sur le nombre de retours forcés, 605 personnes étaient des membres de minorités (Roms, Ashkali, Egyptiens, Gorani, Bosniaques, Turcs, Serbes en situation minoritaire et Albanais en situation minoritaire), dont 300 Roms. S’y ajoutent 1 789 personnes rentrées au pays de façon « volontaire » avec l’assistance de l’OIM et 751 personnes, dont 166 appartenant à des minorités ethniques, rentrées au Kosovo après avoir signé un document de retour volontaire avec des pays tiers, pour la plupart d’Europe occidentale (retours volontaires « induits »). En juin 2010, l’UNHCR suggérait que jusqu’à 70 % des Roms de retour pourraient déjà avoir quitté le Kosovo. Selon le Roma Ashkali Documentation Center (RAD Center), au moins 50 % des Roms renvoyés de force auraient immédiatement quitté le Kosovo pour se rendre en Serbie, au Monténégro, ou pour retourner à nouveau dans les pays européens.

Il est vrai que le Kosovo a accompli des progrès notables en 2010 et 2011 au niveau du cadre législatif concernant la réintégration ainsi que dans l’établissement de différents mécanismes institutionnels. Ainsi, le gouvernement a tout d’abord adopté une Stratégie révisée pour la réintégration des personnes rapatriées en mai 2010 qui accorde une attention spéciale aux besoins des communautés minoritaires et des groupes vulnérables. Un Plan d’action définissant les mesures concrètes d’aide aux personnes rapatriées a ensuite été approuvé. Un Fonds de réintégration a été établi, avec un budget de 3,4 millions d’euros pour l’année 2011 pour l’assistance à la réintégration. Au niveau local, chaque municipalité a été sommée d’établir un Bureau municipal en charge des communautés et du retour avec des officiers en charge du retour chargés d’implémenter la Stratégie localement. Les autorités centrales ont en outre mené des actions de formation et de sensibilisation au sujet de la nouvelle Stratégie et du Plan d’action au niveau municipal et les municipalités ont reçu des directives écrites.

La Commission a présenté le 12 février 2012 le premier rapport sur les progrès accomplis par le Kosovo dans la mise en œuvre des exigences de la feuille de route sur la libéralisation du régime des visas qui atteste que le Kosovo a mis en place un cadre juridique et institutionnel dans les domaines suivants : la réadmission, la réintégration, la sécurité des documents, la gestion des frontières, les migrations, l’asile, la lutte contre la criminalité organisée et la corruption, la coopération policière et judiciaire, la protection des données et les droits fondamentaux liés à la liberté de circulation. Mais le bilan est en demi-teinte s’agissant de la mise en œuvre effective de la Stratégie et du Plan d’action, particulièrement s’agissant des minorités. Dans son rapport d’évaluation sur les droits des communautés publié en juillet 2012, l’OSCE souligne également que, malgré l’existence d’un cadre législatif avancé pour protéger et promouvoir les droits des communautés du Kosovo, la mise en œuvre a très peu progressé depuis 2010. L’OSCE a également publié une évaluation de la viabilité des retours et des problèmes de sécurité, qui demeurent importants.

En 2011, le Conseil de l’Europe, dans une résolution datée du 6 juillet (Résolution CM/ResCMN(2011)14 sur la mise en œuvre de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales au Kosovo), soulignait la vulnérabilité de la situation dans laquelle se trouvent les membres des communautés minoritaires. Le Conseil de l’Europe reconnaissait dans cette résolution les progrès accomplis, notamment que des projets avaient été lancés et des stratégies mises en place pour faciliter, y compris financièrement, le retour et la réintégration des personnes rentrées dans certaines localités. Il soulignait que la Stratégie pour l’intégration des Roms, des Ashkali et des Egyptiens, adoptée en 2008, instaurait un cadre pour les mesures à prendre afin d’améliorer la situation des personnes appartenant à ces groupes ethniques dans un certain nombre de domaines.

Mais « la situation des personnes appartenant aux communautés rom, ashkali et égyptienne suscite de graves inquiétudes. Nombre d’entre elles continuent de subir des discriminations dans l’accès au marché de l’emploi, au logement et à l’éducation et se heurtent souvent à des préjugés et des attitudes hostiles.» Une partie des difficultés est liée à l’absence de documents d’identité et d’enregistrement civil. Le logement est aussi un problème majeur, une minorité des personnes de retour pouvant effectivement retourner chez eux, soit qu’ils ne possèdent pas de titre de propriété, soit que leur habitation a été détruite pendant la guerre ou lors des troubles interethniques de 2004, soit qu’elle héberge d’autres personnes. Inutile de dire que la situation économique est quant à elle dramatique, le taux de chômage des minorités Roms, Ashkalis et Egyptiens se situant entre 90 et 100 %.

Concernant les retours forcés, la vulnérabilité des personnes une fois de retour au Kosovo nécessite, selon le Conseil de l’Europe, que le gouvernement kosovar agisse afin de répondre à cette situation : « Les personnes appartenant aux minorités, qui ont été renvoyées de force, sont dans une situation particulièrement vulnérable compte tenu des conditions économiques et sociales difficiles dans lesquelles elles vivent, n’ayant souvent pas accès aux soins de santé et aux services sociaux, à l’emploi et à l’éducation. S’il est vrai que la décision de procéder à des retours forcés est le fait des gouvernements des Etats d’où ces personnes ont été renvoyées, les autorités compétentes devraient répondre avec plus de détermination aux besoins des personnes concernées compte tenu de leur situation vulnérable. »

Concernant les politiques conduites par les Etats procédant aux expulsions, réaffirmant sa Résolution 1740 (2010) et sa Recommandation 1924 (2010) sur la situation des Roms en Europe et les activités pertinentes du Conseil de l’Europe, adoptées en juin 2010, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a précisé en ces termes sa position au point 15.3. de sa Résolution 1760 (2010) « La montée récente en Europe du discours sécuritaire au niveau national: le cas des Roms » : « en matière d’expulsion, [elle] appelle les Etats membres à respecter pleinement leurs obligations – y compris procédurales – au titre de la Convention européenne des droits de l’homme et de la jurisprudence pertinente de la Cour, à ne pas procéder à des expulsions collectives déguisées et, conformément aux recommandations du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, à ne pas renvoyer de Roms au Kosovo jusqu’à ce que la preuve soit faite que ces retours peuvent être entrepris en tenant pleinement compte de la sécurité et des futures conditions de vie des intéressés ».

Dans sa recommandation 2003 (2012) « Les migrants Roms en Europe », l’Assemblée demande, à nouveau, au Comité des Ministres, au point 7.1 « d’exhorter les Etats membres à mettre fin aux actes qui s’apparentent à des expulsions collectives de Roms et de revoir leurs politiques de renvois forcés des Roms au Kosovo, en suspendant ces renvois jusqu’à ce qu’il soit prouvé qu’ils sont sûrs et viables ».

Concernant la France (2), en matière d’asile, comme la CNCDH le notait déjà dans son étude de 2008, depuis l’entrée en vigueur, en mars 2005, de la loi sur les conditions d’entrée et de séjour des étrangers demandeurs d’asile, l’accès au droit d’asile s’est vu très limité pour les ressortissants des pays d’origine dits « sûrs », auxquels est appliquée une procédure rapide. Les Roms originaires des pays de l’ex-Yougoslavie hors Kosovo – Bosnie-Herzégovine, Croatie, Serbie et Macédoine – ne peuvent plus bénéficier d’une instruction individuelle approfondie de leur situation, ce qui aboutit presque toujours à des refus d’asile.

Dans son avis adopté le 22 mars 2012 sur le respect des droits des « gens du voyage » et des Roms migrants au regard des réponses récentes de la France aux instances internationales, la CNCDH rappelle ses recommandations de 2008 et demande à ce qu’il soit procédé à un examen individuel et approfondi de la situation des personnes demandant l’asile, tenant compte de la situation des populations Roms dans les pays dont elles sont originaires. Elle appelle à s’affranchir des règles applicables aux pays d’origine dits « sûrs ».

Par ailleurs et fort heureusement, par une décision du 26 mars 2012, les 9e et 10e sous-sections du Conseil d’Etat ont annulé la décision du 18 mars 2011 du Conseil d’administration de l’OFPRA inscrivant sur la liste des pays d’origine sûrs l’Albanie et le Kosovo.

Enfin, concernant la traite des êtres humains, la législation française, issue de la transposition, en 2006, de la directive du 29 avril 2004 relative « au titre de séjour délivré aux ressortissants de pays tiers qui sont victimes de la traite des êtres humains ou ont fait l’objet d’une aide à l’immigration clandestine et qui coopèrent avec les autorités compétentes », a créé la possibilité d’admettre au séjour en France des ressortissants étrangers dans le cadre de la lutte contre la traite des êtres humains. Sont notamment concernées les victimes de la prostitution, de l’esclavage domestique, du travail forcé, de la mendicité organisée ou du trafic d’organes. Ce dispositif est très soucieux d’assurer notamment la protection des enfants mineurs et la défense des droits des femmes.

II. LE CONTENU DES ACCORDS OBJETS DES DEUX PROJETS DE LOI

Les accords de réadmission conclus avec la Serbie et le Kosovo tendent à faciliter la coopération entre les deux pays en matière de réadmission des personnes en séjour irrégulier sur le territoire de l’une ou de l’autre partie. Le principe selon lequel un Etat doit réadmettre ses propres nationaux résulte du droit international, mais la conclusion de ce type d’accord permet de mettre en place des procédures particulières. En outre, ces accords couvrent également la réadmission des enfants mineurs et célibataires des personnes visées par la demande de réadmission ainsi que leur conjoint ressortissant d’un autre Etat s’ils ne disposent pas d’un droit de séjour autonome, ainsi que les ressortissants de pays tiers et les apatrides en séjour irrégulier.

La réadmission est néanmoins subordonnée à la double condition que l’intéressé soit, au moment de son entrée, en possession d’un visa ou d’un titre de séjour en cours de validité délivré par l’État requis et qu’il soit entré illégalement et directement sur le territoire de l’État requérant après avoir séjourné dans l’État requis ou transité par son territoire. Dans tous les cas, les États concernés s’engagent à accepter l’utilisation du modèle type de document de voyage de l’Union européenne établi à des fins d’éloignement. Ces accords prévoient, par ailleurs, les règles en matière de coûts – à la charge de l’État requérant –, de protection des données et de relations avec les autres instruments internationaux.

Chacun des protocole désigne les autorités compétentes en matière de réadmission et les points de passage frontaliers, et établit notamment les modalités applicables à la réadmission et au transit des ressortissants des Etats Parties et des pays tiers ainsi que les moyens de preuve et de présomption permettant de déterminer la nationalité des ressortissants de pays tiers et des apatrides et les conditions applicables à leur rapatriement et au transit sous escorte.

L’accord européen conclu avec la Serbie et déjà en vigueur a été précédemment présenté. Le projet de loi n°92 tend uniquement à ratifier son protocole d’application. Ce dernier entrera en vigueur une fois après notification au comité mixte de réadmission institué par l’accord européen (cf supra). Il n’est pas soumis à ratification du côté serbe.

Le projet de loi n°91 vise quant à lui à ratifier l’accord conclu avec le Kosovo ainsi que son protocole d’application. Les deux entreront en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant le jour de réception de la seconde notification relative à l’accomplissement des procédures internes adéquates, en l’espèce celui de la notification de l’achèvement de la procédure de ratification par la France, le Kosovo ayant déjà transmis son instrument d’approbation le 8 février 2010.

Il est à noter que les frais liés à la réadmission et au transit sont à la charge de la partie requérante, pour la France financés sur le programme 303, « Immigration et Asile », action 3 « Lutte contre l’immigration irrégulière ». La ratification des instruments juridiques objets des deux projets de loi n’induisent pas l’augmentation du volume des crédits.

Concernant la transmission de données, comme le soulignent les études d’impact des deux projets de loi, ni le Kosovo, qui n’est même pas lié par la Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, adoptée à Strasbourg le 28 janvier 1981, ni la Serbie, ne pourront se voir transférer des données à caractère personnel que s’ils assurent un niveau de protection suffisant de la vie privée et des libertés et droits fondamentaux des personnes à l’égard du traitement dont ces données font l’objet – comme le prévoit l’article 68 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978. Or, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés estime qu’ils ne disposent pas d’une législation adéquate en matière de protection des données à caractère personnel et à ce jour aucun des deux pays n’a fait l’objet d’une reconnaissance de protection adéquate par la Commission européenne. L’accord avec le Kosovo et son protocole et le protocole avec la Serbie permettront néanmoins à la France de développer dans le cadre de la coopération en matière de retour forcé l’échange de renseignements en matière d’immigration irrégulière, selon les modalités qu’ils fixent.

A. LES DISPOSITIONS DE L’ACCORD DE RÉADMISSION CONCLU AVEC LE KOSOVO : UN ACCORD CALQUÉ SUR LE MODÈLE DES ACCORDS CONCLUS PAR LA COMMISSION EUROPÉENNE

L’accord conclu avec le Kosovo reprend le modèle de ceux négociés par la Commission européenne. Il comporte deux annexes relatives respectivement à la demande de réadmission et à la demande de transit. Ces annexes énumèrent les données personnelles qui seront transmises aux autorités compétentes lors des procédures de réadmission et de transit. Le protocole comporte également deux annexes qui constituent les formulaires prévus dans la recommandation du Conseil de l’Union européenne du 30 novembre 1994 pour la délivrance de laissez-passer européens respectivement par la France et par le Kosovo.

Aux termes de l’article 2.1 de l’accord, chacune des Parties réadmet sur son territoire lesdits nationaux qui ne remplissent pas, ou ne remplissent plus les conditions d’entrée ou de séjour applicables sur le territoire de l’autre Partie, lorsqu’il est prouvé ou valablement présumé, que la personne est un ressortissant d’une des deux Parties.

La Partie requise réadmet également :

- les enfants mineurs célibataires des personnes mentionnées à l’article 2.1 de l’accord, quels que soient leur lieu de naissance ou leur nationalité, excepté lorsqu’ils disposent d’un droit de séjour autonome sur le territoire de la Partie requérante ;

- les conjoints des personnes mentionnées à l’article 2.1 de l’accord qui ont une autre nationalité, pour autant qu’ils aient ou obtiennent leur droit d’entrer ou de séjourner sur le territoire de la Partie requise, excepté lorsqu’ils disposent d’un droit de séjour autonome sur le territoire de la Partie requérante

Tout refus à une demande de réadmission doit être motivé par la Partie requise (article 2.4 de l’accord).

L’accord simplifie également les procédures de réadmission de ressortissants des Etats tiers ou apatrides : à ce titre, l’article 3.1 de l’accord stipule que chaque Partie contractante s’engage à réadmettre sur son territoire les ressortissants d’Etats tiers et apatrides qui ne remplissent pas, ou ne remplissent plus, les conditions d’entrée ou de séjour applicables sur le territoire de l’une ou l’autre Partie. L’article 3.2 de l’accord exclut certaines catégories de ressortissants d’Etats tiers ou apatrides de cette obligation de réadmission par les Parties ;

Enfin, il prévoit et simplifie une procédure d’autorisation de transit sur son territoire par une Partie contractante à la demande de l’autre Partie des ressortissants de pays tiers qui ont fait l’objet d’une mesure d’éloignement prise par la Partie requérante.

L’article 4 de l’accord est relatif à la demande de réadmission : qu’il s’agisse de la réadmission de nationaux ou de ressortissants d’Etats tiers ou apatrides, la demande est adressée par l’autorité compétente de la Partie requérante à l’autorité compétente de la Partie requise en utilisant le formulaire figurant à l’annexe 1 de l’accord.

L’article 5 de l’accord est relatif à l’établissement de la nationalité. Lorsque la personne concernée est en possession d’un passeport ou d’un document national d’identité, en cours de validité ou périmé, la Partie requérante met en œuvre la mesure d’éloignement sans solliciter une demande de réadmission.

Conformément aux termes de l’article 5.2 de l’accord, lorsque la personne concernée est en possession d’un des éléments de preuve de la nationalité ou d’un des éléments de présomption de la nationalité mentionnés à l’article 5 du protocole, les autorités compétentes de la Partie requérante adressent une demande de réadmission aux autorités compétentes de la Partie requise conformément à la procédure prévue à l’article 3 du protocole d’application.

Aux termes de l’article 5.3 de l’accord, en cas de doute sur les éléments fondant la présomption de nationalité ou en cas d’absence de ces éléments, les autorités diplomatiques et consulaires de la Partie requise procèdent, dans un délai de trois jours ouvrables, à l’audition de l’intéressé, conformément à la procédure décrite à l’article 3 du protocole.

L’article 6 de l’accord est relatif à la preuve des conditions de réadmission des ressortissants de pays tiers et des apatrides. Lorsque cette preuve est établie sur présentation des éléments mentionnés à l’article 6 du protocole, la Partie requérante adresse une demande de réadmission à la Partie requise conformément à la procédure prévue par l’article 4 du protocole.

L’article 7 de l’accord est relatif à la transmission des demandes de réadmission, qui doit être faite si possible par voie électronique.

L’article 8 de l’accord prévoit une procédure de réadmission accélérée dans le cas où une personne a été appréhendée dans un aéroport international de la Partie requérante, après avoir franchi illégalement la frontière en provenance directe du territoire de la Partie requise, la Partie requérante pouvant alors présenter une demande de réadmission dans un délai de deux jours ouvrables, à compter de l’interpellation de l’intéressé.

L’article 9 de l’accord est relatif aux délais de réponse à une demande de réadmission : dans le cas de la procédure normale, le délai est fixé à douze jours calendaires à compter de la date de la réception de la demande de réadmission, ce délai n’excédant pas quinze jours calendaires à titre exceptionnel. Le délai est de deux jours dans le cadre de la procédure accélérée.

L’article 10 de l’accord est relatif aux modalités de transfert et aux modes de transport. Avant le rapatriement d’une personne, les Parties prennent des dispositions par écrit en ce qui concerne la date du transfert, le point d’entrée, les escortes éventuelles. Le transport s’effectue par voie aérienne.

L’article 11 de l’accord est relatif à la réadmission par erreur. La Partie requérante reprend en charge toute personne réadmise par la Partie requise s’il est établi, dans un délai de trois mois après le transfert de l’intéressé, que les conditions fixées par l’accord n’étaient pas remplies au moment de la sortie du territoire de la Partie requérante.

L’article 12 de l’accord est relatif aux conditions du transit : chaque Partie, sur demande de l’autre Partie, autorise le transit sur son territoire des ressortissants des pays tiers qui font l’objet d’une mesure d’éloignement prise par la Partie requérante. Le transit s’effectue en principe par la voie aérienne.

En outre, conformément à l’article 12.4 de l’accord, la Partie requérante assume l’entière responsabilité de la poursuite du voyage de l’étranger vers son pays de destination et reprend en charge cet étranger si, la mesure d’éloignement ne peut être exécutée. Lorsque le transit doit s’effectuer sous escorte policière, celle-ci est assurée par la Partie requérante par la voie aérienne jusqu’aux aéroports de la Partie requise. Les Parties contractantes s’efforcent d’acheminer l’intéressé vers son pays d’origine. L’article 12.9 de l’accord prévoit les cas dans lesquels la Partie requérante s’engage à réadmettre immédiatement le ressortissant d’un pays tiers. L’article 12.11 de l’accord prévoit les cas dans lesquels le transit pour éloignement peut être refusé.

L’article 13 de l’accord est relatif aux coûts de la réadmission et du transit : les coûts liés à la réadmission de personnes conformément aux articles 2 et 3 de l’accord, y compris les frais de transit, jusqu’au moment de la remise de la personne par l’autorité compétente de la Partie requise, sont pris en charge par la Partie requérante. L’article 13.2 de l’accord est relatif aux coûts exceptionnels éventuellement encourus au cours de la réadmission : ils sont remboursés dans les trente jours par l’autorité compétente de la Partie requérante. Aux termes de l’article 13.3 de l’accord, tous les coûts liés à la réadmission par erreur encourus par la Partie requise, y compris les frais de transit, et pris en charge par la Partie requérante, sont remboursés dans les trente jours par l’autorité compétente de la Partie requise sur présentation de factures.

L’article 14 de l’accord est relatif à la protection des données personnelles. Les données personnelles nécessaires à l’exécution de l’accord et communiquées par les Parties doivent être traitées et protégées conformément aux législations sur la protection des données personnelles en vigueur dans chaque Etat.

L’article 15 de l’accord prévoit la conclusion du protocole d’application du présent accord et les règles définies par le protocole :

a) La désignation des autorités compétentes, des points de passage frontaliers et l’échange des points de contact ;

b) Les modalités de retour des nationaux, des ressortissants des pays tiers et des apatrides ;

c) Les éléments de preuve et de présomption de nationalité ;

d) Les éléments de preuve et de présomption des conditions de réadmission des ressortissants des pays tiers et apatrides.

L’article 16 de l’accord est relatif aux dispositions générales et fixe les dispositions juridiques, notamment les accords internationaux, les accords de Schengen du 19 juin 1990 et les autres dispositions pertinentes auxquelles le présent accord ne fait pas obstacle.

L’article 17 de l’accord est relatif à l’entrée en vigueur, à la durée et à la dénonciation de l’accord. L’accord a une durée de validité de trois ans, renouvelable par tacite reconduction.

L’annexe 1 de l’accord est relative à la demande de réadmission et définit les renseignements et indications à fournir dans le cadre d’une demande de réadmission.

L’annexe 2 de l’accord est relative à la demande de transit et définit les renseignements et indications à fournir dans le cadre d’une demande de transit.

B. LES DISPOSITIONS DES DEUX PROTOCOLES D’APPLICATION

Les articles 1er des protocoles d’application déterminent les autorités compétentes.

Les protocoles définissent les points de contact et de franchissement des frontières (article 2 avec le Kosovo, article 6 avec la Serbie).

Les articles 3 des protocoles sont relatifs aux modalités de réadmission des ressortissants nationaux et à la procédure à respecter. Le protocole signé avec le Kosovo prévoit qu’aucune demande de réadmission n’est requise lorsque le ressortissant à réadmettre est en possession d’une carte nationale d’identité en cours de validité ou périmée, d’un passeport en cours de validité ou périmé, ou encore d’une réponse positive, datant de moins d’un an, à une demande de réadmission. L’article 5 énumère les moyens de preuve et de présomption de nationalité permettant d’établir ou de présumer la nationalité.

Le protocole signé avec la Serbie prévoit que la preuve de la nationalité est établie sur présentation des documents figurant à l’annexe 1 du protocole, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une enquête complémentaire. Dans ce cas, l’autorité diplomatique ou consulaire de la Partie requise territorialement compétente délivre immédiatement, et au plus tard dans un délai de trois jours ouvrables, le laissez-passer consulaire. En l’absence de délivrance d’un nouveau document de voyage par la Serbie, la France délivre un laisser-passer européen (article 9 de l’accord).

En l’absence d’élément de preuve ou de présomption, les deux protocoles prévoient une audition dans les trois jours.

Les articles 4 des deux protocoles sont relatifs aux modalités de réadmission des ressortissants d’Etats tiers et des apatrides :

- avec le Kosovo, aucune demande de réadmission n’est requise lorsque le ressortissant d’un Etat tiers ou apatride à réadmettre est en possession d’un visa en cours de validité ou périmé ou d’une autorisation de séjour en cours de validité ou périmée. En cas de réadmission sur le territoire d’une ou l’autre Partie, les documents suivants sont respectivement aussitôt délivrés : un laissez-passer européen par l’autorité compétente française et le document de voyage requis par l’autorité compétente kosovare. L’article 6 du protocole énumère les moyens de preuve et de présomption permettant d’établir ou de présumer les conditions de la réadmission des ressortissants des pays tiers ou apatrides ;

- avec la Serbie, dans le cas où la réadmission des ressortissants des pays tiers et des apatrides est établie sur présentation des documents visés à l’annexe 3 de l’accord, la preuve des conditions de la réadmission des ressortissants des pays tiers et des apatrides est établie sans qu’il soit nécessaire de procéder à une enquête supplémentaire. Dans ce cas, les autorités compétentes de la Partie requérante délivrent sans délai un document de voyage nécessaire au retour de la personne concernée sur le territoire de la Partie requise. Ce document de voyage est délivré dans les mêmes conditions lorsque le commencement de preuve des conditions de réadmission des ressortissants des pays tiers et apatrides est fourni sur présentation des documents visés à l’annexe 5 de l’accord, les conditions de la réadmission étant présumées établies sauf preuve contraire. La preuve des conditions de réadmission des anciens ressortissants de la République socialiste fédérative de Yougoslavie est également facilitée. Lorsque la partie serbe admet la réadmission, les autorités compétentes de la partie française délivrent sans délai un document de voyage de l’Union européenne nécessaire au retour de la personne concernée sur le territoire de la République de Serbie. L’article 11 est relatif aux moyens supplémentaires de commencement de preuve des conditions de la réadmission des ressortissants de pays tiers et des apatrides. Pour autant, il faut souligner que le cham des données personnelles n’est pas élargi par rapport à celui prévu par l’accord. En l’absence de délivrance d’un nouveau document de voyage par la Serbie, la France délivre un laisser-passer européen (article 9 de l’accord).

Les délais font l’objet d’un article dédié dans le protocole avec la Serbie (article 5) pour raccourcir le délai prévu dans l’accord : le délai de réponse à la demande de réadmission est fixé à sept jours calendaires à compter de la réception de la demande, et en tout état de cause, n’excédera pas le délai de jours calendaires de l’accord communautaire (il est fixé par l’accord avec le Kosovo à 10 jours exceptionnellement portés à 15). La procédure accélérée prévue par l’accord est également précisée (article 7) avec un délai maximum de deux jours ouvrables à compter de la date de l’accusé de réception de la demande de réadmission par procédure accélérée.

Les articles 7 et 8 du protocole avec le Kosovo et l’article 8 du protocole avec la Serbie précisent les conditions de transit avec dans les deux cas une durée maximum de 24 heures.

L’article 9 du protocole avec le Kosovo et 10 du protocole avec la Serbie fixent les conditions applicables au retour sous escorte. Les Parties acceptent l’utilisation des escortes dans les procédures de transit ou de réadmission sur leurs territoires respectifs. Les autorités de l’Etat requis accordent aux membres de l’escorte de la Partie requérante dans l’exercice de leurs fonctions la même protection et la même assistance qu’à leurs propres agents. Les agents d’escorte de la Partie requérante sont assimilés aux agents de la Partie requise pour tout ce qui a trait aux infractions dont ils pourraient être victimes ou auteurs dans l’exercice de leurs fonctions au cours du transit par le territoire de la Partie requise. Ils sont soumis au régime de responsabilité civile et pénale établi par la législation de la Partie sur le territoire de laquelle ils ont pénétré. Les prérogatives des membres de l’escorte se limitent à la légitime défense durant l’opération de transit (3).

Tous les coûts encourus par la Partie requise liés à la réadmission et au transit sont à la charge de la Partie requérante. L’article 12 du protocole avec la Serbie précise qu’ils sont remboursés, dans un délai de trente jours, par l’autorité compétente de la Partie requérante après remise d’une facture détaillée.

Les langues de communication sont prévues aux articles 10 du protocole avec le Kosovo et 13 du protocole avec la Serbie.

Les dispositions finales sont prévues aux articles 11 du protocole avec le Kosovo et 14 du protocole avec la Serbie. Elles prévoient pour le Kosovo que le protocole entrera en vigueur en même temps que l’accord et qu’il pourra être modifié d’un commun accord par les Parties par échange de notes. Pour la Serbie, le protocole entre en vigueur après notification au comité mixte de réadmission et peut être amendé par consentement mutuel par un échange de notes entre les Parties contractantes.

Les deux protocoles comportent deux annexes :

- pour celui conclu avec le Kosovo, l’annexe 1 est un formulaire qu’il convient de remplir en cas de réadmission sur le territoire de la République du Kosovo et l’annexe 2 est un document de voyage pour les étrangers délivré en cas de réadmission sur le territoire de la République française par le ministère de l’intérieur du Kosovo ;

- pour celui conclu avec la Serbie, l’annexe 1 est le document de voyage de l’Union européenne établi à des fins d’éloignement qui servira de laissez-passer européen délivré par la France en cas de non-délivrance par la Partie serbe d’un nouveau document de voyage pour ses nationaux, ou délivré en cas d’accord de la France pour réadmettre sur son territoire un ressortissant de pays tiers ou un apatride et l’annexe 2 du protocole décrit le document type que les parties utiliseront aux fins de réponse à la demande de réadmission.

C. PRÉSENTATION ET JUSTIFICATION DES PARTICULARITÉS DES ACCORDS

1.1. Particularités au regard des accords de réadmission conclus

Il convient au préalable de souligner que le contenu des protocoles d’application est très encadré par l’accord de réadmission lui-même. Ils ne peuvent contenir que des dispositions concernant les points suivants : la désignation des autorités compétentes, les points de passage frontaliers, les modalités de retour, les conditions applicables au rapatriement sous escorte, les moyens et documents supplémentaires pouvant être considérés comme des preuves ou commencement de preuve de la nationalité. Il est donc permis de présumer que les protocoles d’application des accords européens en matière de réadmission sont semblables dans leur contenu. On notera que la Serbie par exemple a signé des protocoles d’application de l’accord européen en matière de réadmission avec L’Allemagne, l’Autriche, la Hongrie, l’Italie, Malte, et la Roumanie. Ces protocoles sont tous entrés en vigueur.

Concernant le protocole d’application franco-serbe, il n’y a pas de distinctions majeures avec le protocole franco-russe (seul texte de cette nature signé par la France à ce jour) dans la mesure où tous deux déclinent les accords communautaires de réadmission conformément aux dispositions prévues par ces derniers (article 19 de l’accord UE-Serbie) encadrant le champ des protocoles.

Certaines rubriques ont néanmoins été traitées différemment concernant la Serbie. Les négociateurs avaient, en effet, considéré opportun, étant donnée la durée de rétention légale en France qui constitue l’une des plus réduite d’Europe (32 jours maximum à l’époque), de prévoir dans le protocole des délais de réponses aux demandes de réadmission inférieurs à ceux prévus par l’accord. Le risque de différend avec la Commission, que pourrait entraîner cette ligne de négociation, est apparu après la signature du protocole franco-serbe, et a conduit les négociateurs à ne pas poursuivre les négociations avec la Bosnie-Herzégovine, l’Albanie et la Macédoine sur ce même modèle. Quant aux difficultés qui pourraient naître de cet état de fait, il apparaît tout d’abord, que l’accord primera sur le protocole en cas d’incompatibilité, ce qui fait apparaître le risque de différend comme purement théorique. Par ailleurs, la Commission ne devrait pas envisager de recours en manquement à l’encontre d’un texte qui constitue un cas d’espèce et non une position de principe.

Concernant l’accord de réadmission et son protocole d’application conclus avec le Kosovo, deux particularités doivent être signalées.

Tout d’abord quant à sa forme, le Kosovo, soucieux de démontrer son ouverture et d’instaurer de bonne relation avec l’Union européenne avait souhaité que ce texte bilatéral reprenne le format des accords européens de réadmission (un accord et un protocole d’application de ce dernier).

Quant à la procédure, les textes prévoient que, dès lors que les autorités kosovares ont reconnu l’identité de la personne à réadmettre, les autorités françaises établissent un laissez-passer européen (conformément à la recommandation du Conseil de l’UE du 30 novembre 1994) alors que dans les accords bilatéraux de facture classique, il revient généralement aux autorités de l’Etat tiers d’établir un laissez-passer consulaire. De plus, tandis que les instruments bilatéraux de même nature dispensent les autorités françaises de procéder à une demande de réadmission lorsque la personne concernée est en possession d’un passeport en cours de validité (ou périmée dans certains cas), le protocole conclu avec le Kosovo dispense d’une telle demande également lorsque l’intéressé(e) est en possession d’une carte nationale d’identité en cours de validité ou périmée.

Enfin, d’autres particularités, bien que non singulières, peuvent être signalées. Il s’agit de :

- la possibilité de réadmettre les enfants mineurs et célibataires des personnes visées par la réadmission ainsi que leur conjoint ressortissant d’un autre Etats s’ils ne disposent pas d’un droit de séjour autonome ;

- la procédure de réadmission accélérée pour les personnes appréhendées dans la zone d’un aéroport international.

1.2. Différences notables entre les accords conclus avec la Serbie et le Kosovo

S’agissant plus spécifiquement des différences, peu nombreuses, existant entre l’accord et son protocole avec la Serbie et ceux conclus avec le Kosovo, on notera les points suivants.

Concernant les personnes concernées, l’accord européen avec la Serbie prévoit le cas des apatrides ayant vécu en Serbie jusqu’en 1992. Cela tient aux circonstances géopolitiques liées aux conflits ayant suivi les déclarations d’indépendance des Républiques membres de l’ex-Yougoslavie.

Pour les délais, concernant d’abord le délai de réponse à une demande de réadmission, il s’agit d’une décision de compromis. Ainsi, la France proposait 12 jours, et les Kosovars en demandaient 15. Pour le délai de 10 jours prévu par l’accord européen avec la Serbie, il se rencontre également dans d’autres accords européens en matière de réadmission avec des Etats des Balkans, comme par exemple la Bosnie. Généralement, ces délais sont courts, en raison de la durée limitée de notre rétention administrative qui était de 32 jours maximum au moment des négociations (et passé à 45 jours depuis).

Quant au délai de réponse à la demande de transit : le délai de 5 jours prévu dans l’accord européen avec la Serbie est le délai commun aux autres Etats des Balkans ayant signé des accords européens de réadmission. Pour le Kosovo, ce délai est de deux jours. L’acceptation de ce délai très court par les Kosovars a témoigné de leur volonté de coopération en matière de réadmission.

Enfin s’agissant du délai de délivrance du laisser-passer consulaire, les représentants Kosovars ont accepté la proposition française d’une délivrance immédiate après la détermination de la nationalité.

Pour les éléments de preuve, les différences constatées tiennent aux particularités de chaque Etat, et notamment aux documents d’identité délivrés par chacun durant la période de conflit et de post conflit, comme par exemple les documents de voyage délivrés par la MINUK pour la République du Kosovo ou bien le passeport délivré entre avril 1992 et juillet 96 pour la Serbie.

Pour la protection des données à caractère personnel, l’accord européen avec la Serbie est beaucoup plus précis. S’agissant d’un accord européen, son contenu est plus standardisé et il est donc tenu de mentionner la directive européenne (directive 95/46/CE du 24 octobre 95) relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données.

Enfin, l’accord européen avec la Serbie prévoit un comité mixte de réadmission, ce qui n’est pas le cas de l’accord conclu par la France avec le Kosovo. En effet, l’institution d’un comité de réadmission mixte est une disposition de nature européenne. Les accords bilatéraux signés par la France ne comportent pas de telles clauses. Certains prévoient tout au plus des consultations facultatives en cas de différends (c’est notamment le cas de l’accord bilatéral avec la Dominique, l’Espagne, l’Allemagne).

CONCLUSION

Les deux projets de loi objet du présent rapport permettront d’encadrer les procédures de réadmission par la France et le Kosovo et de préciser les dispositions de l’accord européen déjà en vigueur avec la Serbie. Faciliter la mise en œuvre des procédures de réadmission répond à l’objectif d’une bonne coopération en matière de lutte contre l’immigration irrégulière. Cet objectif est d’autant plus important que la libre-circulation – et c’est heureux – est facilitée, depuis 2008 avec la Serbie, prochainement avec le Kosovo pour les séjours de moins de trois mois dans l’Union européenne.

Votre rapporteur souhaite insister sur le fait que la formalisation des procédures de réadmission ne préjuge pas des dispositions nationales en matière d’accueil, de séjour, d’asile et de naturalisation des immigrés, ni de leur mise en œuvre. A cet égard, tout en reconnaissant l’importance de l’accord signé avec le Kosovo, votre rapporteur rappelle les précautions qui doivent être prises s’agissant de retours dans un pays qui ne figure pas sur la liste des pays sûrs, particulièrement s’agissant des minorités, que le Kosovo éprouve bien du mal à intégrer.

Plus généralement, la politique des retours doit s’accompagner, si possible à l’échelle européenne, d’une assistance au retour et à l’intégration des populations réadmises, qui de toutes façons, à défaut de progrès au sein des pays dont elles sont originaires, seront à nouveau candidates au départ et rendues plus vulnérables encore aux trafics et aux abus. La lutte contre la traite des êtres humains et les filières d’immigration clandestine doit elle-même être encore intensifiée. Ce sont des impératifs de notre association aux pays des Balkans occidentaux dans le chemin qui les mènera à entrer dans l’Union européenne, à l’image de la Croatie que nous accueillerons dans notre Union le 1er juillet prochain. Je tiens à saluer à cet égard l’accord historique de normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie, conclu le 19 avril dernier, qui permettra d’avancer sur ce chemin.

C’est sous le bénéfice de ces observations que votre rapporteur vous propose d’adopter les deux projets de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission examine, sur le rapport de M. Jean-Paul Bacquet, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kosovo relatif à la réadmission des personnes en séjour irrégulier et de son protocole d'application (n° 91), et le projet de loi autorisant l'approbation du protocole entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Serbie portant sur l'application de l'accord entre la Communauté européenne et la République de Serbie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier (n° 92), au cours de sa première séance du 24 avril 2013.

Mme la présidente Elisabeth Guigou. Avant d’examiner ces accords, je pense que Jean-Paul Bacquet va évoquer l’accord historique qui a été signé le 19 avril entre la Serbie et le Kosovo sous l’égide de Mme Ashton, qui est un succès pour le service européen d’action extérieure et Mme Ashton, je le souligne car une fois n’est pas coutume. Cet accord a été examiné hier et avant-hier au conseil des ministres des Affaires étrangères et sera à l’ordre du jour du conseil européen de juin qui devra décider s’il y a ou non ouverture des négociations d’adhésion avec la Serbie et ouverture de négociations de pré-adhésion avec le Kosovo. Comme vous le savez, l’Union européenne avait fait de la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo une condition de ces ouvertures et nous l’avions d’ailleurs rappelé aux représentants serbes et kosovars à l’occasion de leurs auditions par notre commission.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a lieu.

Mme Odile Saugues, vice-présidente. Merci pour ce rapport extrêmement précis, détaillé et de grande qualité.

Mme Danielle Auroi. J’étais la semaine dernière à la tête d’une délégation qui s’est rendue en Serbie, à Belgrade, en compagnie de Christophe Caresche et Michel Herbillon, et je voudrais souligner ce qu’il s’y est passé. A notre retour, nous avons appris avec satisfaction l’ouverture prochaine des négociations d’adhésion entre la Serbie et l’Union européenne. Pourtant, lorsque nous étions avec nos collègues du Bundestag, ceux-ci expliquaient – je caricature – aux Serbes que les nazis aujourd’hui n’étaient plus les Allemands mais les Serbes et que la porte de l’Union européenne n’allait donc pas leur être ouverte si facilement. Nos amis allemands expliquaient dans le même temps qu’ils faisaient des affaires avec la Serbie, même mieux que nous, mais qu’ils ne voulaient pas les voir rentrer dans l’Union européenne. Quant à nous, nous avons plutôt arrondi les angles. Même si cette affaire s’est arrangée, je voudrais souligner que les Serbes se sentent les mal-aimés de l’Union européenne et de l’Europe et ont l’impression que l’on trouve aux Kosovars toutes les vertus et à eux tous les défauts. Malheureusement, vous savez comme moi que les choses ne sont pas si simples. Je remercie donc M. Jean-Paul Bacquet qui, dans son rapport, montre bien la complexité des deux côtés, en particulier du côté du Kosovo.

En Serbie, il me semble que les règles sont plus strictes. J’en veux pour preuve le débat que nous avons eu avec le représentant de l’Union européenne. Ce dernier indiquait que concernant le trafic d’êtres humains et les filières dont nous avons parlé, le travail était en train d’être correctement accompli par les Serbes tandis que, s’agissant du Kosovo, on y voyait beaucoup moins clair. C’est une des choses qu’il faut prendre en compte. Deuxièmement, nous avons rencontré en Serbie les ONG qui travaillent en particulier avec les Roms notamment « Les femmes en noir ». Cette ONG constate elle aussi que, malgré les difficultés, des efforts sont faits pour mieux les intégrer en Serbie.

Il est important, d’une part, de faire entendre que la Serbie et la France ont eu des liens historiques passés, d’autre part, qu’il faut faire très attention aux droits humains. La France a une responsabilité de ce point de vue, puisque c’est elle qui décidera au cas par cas des personnes à reconduire. Il ne faudrait pas que nous soyons dans une logique de forteresse –il me semble que le rapport de M. Bacquet démontre que ce n’est pas du tout l’état d’esprit de cet accord – mais il faut souligner cette prudence. Au fur et à mesure de l’ouverture des négociations aux pays des Balkans, nous ouvrons l’espace de paix que représente l’Union européenne, ce qui est tout de même un symbole fort.

Mme Marie-Louise Fort. Notre rapporteur, que je félicite pour son rapport dont j’ai écouté avec passion le résumé, terminait son discours en disant que cet accord n’était pas révolutionnaire. Ce type d’accord me paraît en effet presque dérisoire par rapport aux problèmes que nous avons à résoudre. Nous n’arrivons déjà pas à résoudre le problème des Roms au sein de l’Union européenne, notamment de Roumanie. A force de prendre énormément de précautions oratoires politiquement correctes, nous finissons par ne pas être opérant. Je suis allée récemment visiter des camps de Roms et je suis véritablement outrée. J’ai essayé de parler avec de très jeunes Roms, que l’on voit dans les métros. Il s’agit réellement d’enfants et cela me fait mal au cœur, car je considère que l’enfant est sacré. En conséquence, non pas contre le texte en lui-même mais plutôt pour l’approche que l’on en a et pour ce manque de courage, je m’abstiendrai. Ce n’est pas par défi politique, mais pour tenter de participer à la prise de conscience sur ce sujet. Je trouve que notre commission devrait se préoccuper de cette question, parce que ces problèmes humains sont tout près de nous.

M. Jean-Pierre Dufau. Je voudrais dire en toute amitié à Mme Auroi, à propos de son allusion aux députés du Bundestag, que l’histoire est permanente. Elle a ses réalités, même s’il faut savoir tourner les pages. En l’occurrence, il me semble qu’en termes de nazisme, les rapports étaient plus forts entre l’Allemagne et la Croatie qu’avec la Serbie. Il faut rappeler aux uns et aux autres la vérité historique et ne pas accepter les amalgames, ni se laisser déformer par ce que certains appellent des négationnismes.

Ceci étant, il faut se réjouir du fait que nous partions désormais sur d’autres bases dans ce domaine. Je voudrais féliciter M. Bacquet pour la qualité technique de son rapport, qui a une portée politique indéniable, eu égard à la sensibilité particulière lorsqu’il s’agit de la Serbie et du Kosovo.

Cet accord prend un relief particulier avec le protocole qui vient d’être signé entre la Serbie et le Kosovo, qui démontre que l’on peut malgré tout être optimiste, même si cela prend du temps, dans les démarches qui sont entamées au niveau européen. Cet accord donne l’occasion à Mme Ashton d’avoir un franc succès, ce dont nous nous réjouissons tous. Je déjeunais hier avec M. Bozidar Djelic, ancien premier vice-président de Serbie, actuellement dans la minorité, et président du groupe d’amitié France-Serbie. On arrive à un paradoxe: cet accord va être paraphé par le Président de la République, M. Tomislav Nicolić, qui était le chef du parti nationaliste le plus opposé à la normalisation des rapports avec la Serbie ! Comme quoi, parfois, le réalisme politique l’emporte sur les idéologies, ce qu’il faut voir plutôt de façon optimiste.

L’ensemble des Balkans est concerné par ces accords, bien que ce soient des accords bilatéraux. Comme cela a été souligné par le rapporteur, la réflexion englobe l’ensemble des Balkans et c’est dans ce cadre qu’il faudrait raisonner, notamment à l’échelle européenne.

Dans le cas particulier des minorités et des Roms, il est évident que ce problème ne peut pas être appréhendé seulement dans chaque Etat, au travers d’accords bilatéraux, mais bien dans un cadre de réflexion européen. On nous oppose alors l’impossibilité pour l’Europe d’intervenir globalement. J’ai l’impression que lorsqu’il y a une volonté politique, nous sommes capables de trouver les règles pour apporter des réponses, par exemple à travers l’intégration de ces populations qui vivent dans des conditions lamentables, à travers les aides à l’éducation – car tout commence par-là – pour permettre que ces populations soient éduquées, à travers des aides au travail, etc. On peut certainement, au niveau européen, intervenir indirectement, non pas dans chaque Etat, mais sur l’ensemble de cette région pour régler les problèmes. C’est une question de volonté politique et c’est une suggestion à faire pour parachever la première marche franchie par Mme Ashton.

M. Jacques Myard. Tout d’abord, je souhaiterais savoir si l’accord entre la France et le Kosovo emportera des conséquences sur le régime des visas : l’obligation de visa est-elle bien maintenue ? Ensuite, au sujet des déclarations de l’Allemagne qui viennent d’être évoquées par Danielle Auroi, je les trouve scandaleuses. Rappelons que la Croatie a joué un rôle dans le démantèlement de la Yougoslavie, et ce avec le soutien de milieux allemands, notamment bavarois. Ils ont à cette époque poussé le bouchon un peu loin et on a laissé faire. Concernant les projets de loi qui nous sont soumis, j’approuve bien évidemment le protocole avec la Serbie, mais je m’abstiens sur celui avec le Kosovo car je ne pense pas qu’on fasse avancer le débat européen en le ratifiant.

Mme Odile Saugues, vice-présidente. Pour faire suite aux propos de Mme Auroi, je donnerai l’exemple des Serbes présents à Clermont-Ferrand. Etant originaire d’Auvergne où j’ai travaillé chez Michelin, j’ai vu le travail très difficile que les Serbes faisaient à l’usine et il faut souligner qu’ils se sont très bien intégrés. Concernant les récents progrès enregistrés entre Belgrade et Pristina, pouvons-nous vraiment compter sur la solidité de l’accord conclu sous l’égide de Mme Ashton ? Je souhaiterais aussi m’exprimer sur les Roms. Sur les demandes d’asile, rappelons que les dépenses prévues par l’Union européenne pour l’intégration des Roms dans leurs pays ne sont jamais consommées. C’est un problème pour nous, je me demande où ces crédits passent. Nous pouvons déclarer que nous sommes indignés par cet état de fait.

M. Noël Mamère. Je partage ce qui a été dit par Danielle Auroy. Je souhaiterais demander des précisions à Jean-Paul Bacquet sur la protection des données personnelles. Il semble que la Serbie et le Kosovo ne sont pas liés par les conventions du Conseil de l’Europe, il n’y a donc pas de protection des données personnelles dans ces pays, ce qui est un réel problème.

M. François Loncle. Mme la Présidente, nous assistons avec amitié à la prise de pouvoir de la Commission des affaires étrangères par l’Auvergne ! Je remercie Danielle Auroy pour ses précisions historiques. Tout cela n’est pas étonnant quand on se rappelle les positions et soutiens des uns et des autres pendant la Seconde Guerre mondiale. Je serai bref car je rejoins les observations de Jacques Myard – cela peut m’arriver – et je vais plus loin : constatant qu’il va y avoir bientôt un accord d’association du Kosovo à l’Union européenne, je pense que cela va dénaturer encore un peu plus la construction et la belle idée européennes. Je le dis comme je le pense, le Kosovo est un Etat où prospère la mafia, on aura l’occasion de le vérifier dans les mois qui viennent.

M. Jean-Paul Bacquet. Premier point, le Kosovo n’est pas un Etat sûr, le Conseil d’Etat l’a confirmé, et c’est un Etat où la mafia a effectivement un rôle très important. Je n’ai pas dit que c’était un Etat mafieux, j’ai dit que c’était un pays totalement infiltré par la mafia. L’Etat de droit n’est pas le même au Kosovo et en France. Deuxième point, sur « les Serbes les mal-aimés ». Je rappelle que nous avons eu un Président de la République qui était mal-aimé car on lui reprochait d’être trop proche des Serbes. Il faut certes demeurer prudent, mais il y a aussi derrière tout cela une grande espérance.

Mme Faure, il est vrai que quand on regarde le terrain, cet accord apparaît dérisoire par rapport à ce qu’il reste à faire en matière de droits de l’Homme, en particulier de droits des enfants et de respect des minorités. Mais je pense qu’en matière de respect des minorités, nous ne sommes pas de très bons donneurs de leçon. Heureusement, en matière de droits de l’Homme, nous ne sommes pas au stade du Kosovo, mais concernant les Roms, nous ne sommes pas exemplaires.

Quant aux remarques de M. Dufau, il connaît très bien la Serbie et je me réjouis qu’il approuve l’accord de normalisation conclu entre la Serbie et le Kosovo. S’agissant des accords de réadmission avec les autres pays des Balkans, la Commission européenne a conclu des accords qui nous lient. La France négocie actuellement un protocole d’application avec l’Albanie (accord européen de 2005), ainsi qu’avec la Bosnie-Herzégovine et la Macédoine (accord européen de 2007). Aucun élément n’a toutefois jusqu’à présent justifié l’ouverture de négociations avec le Monténégro (accord européen de 2007) au vu des volumes de personnes concernés et de la qualité de la coopération avec les autorités monténégrines. Pour information, il en est de même avec la Moldavie.

Concernant la Croatie, on ne peut que partager ce qu’a dit M. Myard : il est évident que la reconnaissance anticipée par l’Allemagne de la Croatie est certainement à l’origine d’un certain nombre de problèmes que nous vivons actuellement.

Pour répondre à Mme Saugues, l’accord européen est un accord qui a nécessité de nombreux mois de négociations au plus haut niveau, ce n’est donc pas quelque chose qui a été improvisé. Concernant la sous-utilisation des crédits destinés aux Roms, vous avez raison, il s’agit d’un problème fréquemment dénoncé. Il faut toutefois prendre en compte – sans rien excuser – le fait que les structures de gestion administratives en sont à leur balbutiement dans ces pays. On comprend qu’il est très dur de gérer des crédits quand il n’y a pas encore d’Etat en bon ordre de fonctionnement.

Pour répondre enfin à M. Mamère sur la transmission des données personnelles, la Serbie a signé la convention du Conseil de l’Europe, ce qui n’est pas le cas du Kosovo. Il y a donc une différence incontestable des deux côtés. Néanmoins, la CNIL considère qu’aucun des deux pays ne remplit les conditions requises pour un échange automatique d’information

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification les projets de loi (n°s 91 et 92).

ANNEXE

Déclaration entre la République française et la République du Kosovo relative à la coopération dans la lutte contre les filières d’immigration irrégulière et les filières de la traite des êtres humains

Considérant que les filières d’immigration irrégulière et les filières de la traite des êtres humains constituent une menace tant pour la cohésion des sociétés des pays théâtres de ces trafics que pour la stabilité régionale et les intérêts du Kosovo et de ses partenaires internationaux, notamment la France,

Reconnaissant les liens entretenus entre les filières d’immigration irrégulière et les filières de la traite des êtres humains dans la réalisation de leurs activités criminelles transnationales,

Attachés à la protection de la dignité des victimes de ces filières, notamment la protection des personnes les plus vulnérables comme les femmes et les enfants,

Résolus à prévenir et à réprimer les activités de ces filières, dans le cadre de leurs efforts conjoints contre le crime organisé et conformément aux règles et aux principes de l’Etat de droit,

Soucieux de renforcer leur coopération opérationnelle contre ces filières, en liaison avec la mission Eulex de l’Union Européenne,

Déterminés à ce que cette coopération contribue à renforcer la vocation européenne du Kosovo, en particulier dans la perspective de l’ouverture d’un dialogue avec l’Union Européenne sur la facilitation des visas,

Se félicitant de la signature, le 2 décembre 2010, d’un accord relatif à la réadmission des personnes en séjour irrégulier, qui constitue le premier accord bilatéral conclu entre la République Française et la République du Kosovo :

1. La France et le Kosovo s’engagent à coordonner leurs efforts pour lutter contre les filières de l’immigration et les filières de la traite des êtres humains.

2. A cette fin :

a. La France et le Kosovo décident de généraliser les échanges d’informations, de personnel et d’experts entre leurs services spécialisés, conformément aux meilleures pratiques européennes.

b. En vue de réaliser cet objectif, la France et le Kosovo mettent en œuvre un programme de coopération qui comportera, dès 2010, les actions suivantes :

- Techniques de collecte, d’analyse et de traitement judiciaire du renseignement.

- Protection des victimes.

- Lutte contre la fraude documentaire.

Ces actions, financées en 2010 par le Ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire du Gouvernement de la République française, sont précisées en annexe.

Elles sont mises en œuvre, pour la France, par la Direction centrale de la police aux frontières, l’Office central pour la répression de l’immigration irrégulière et de l’emploi des étrangers sans titre et l’Office central pour la répression de la traite des êtres humains, sous la coordination du Service de coopération technique internationale de police.

3. Sur la base des échanges intervenus entre leurs services spécialisés dans le cadre de ce programme de coopération, la France et le Kosovo entendent conclure en 2010 un arrangement bilatéral formalisant leur coopération policière contre les différentes formes du crime organisé, en particulier la lutte contre les filières d’immigration irrégulière et les filières de la traite des êtres humains.

A Pristina, le 2 décembre 2009.

Pour la République Française

Eric BESSON

Ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale

et du Développement solidaire

Pour la République du Kosovo

ZENUN PAJZITI

Ministre de l’Intérieur

ANNEXE

TEXTES DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kosovo relatif à la réadmission des personnes en séjour irrégulier (ensemble deux annexes), signé à Pristina le 2 décembre 2009, et de son protocole d’application (ensemble deux annexes), signé à Pristina le 19 septembre 2011, et dont les textes sont annexés à la présente loi.

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation du protocole entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Serbie portant sur l’application de l’accord entre la Communauté européenne et la République de Serbie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier signé le 18 septembre 2007 à Bruxelles (ensemble deux annexes), signé à Paris le 18 novembre 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi.

NB : Le texte de l’accord et du protocole figure en annexe aux projets de loi (n°s 91 et 92).

© Assemblée nationale

1 () Dans ses études statistiques, l’administration française considère la Serbie et le Monténégro comme une seule communauté légale.

2 () La grande majorité des Français ayant une origine « Rom » est sédentaire et n’est ni facilement identifiable ni – fort heureusement – systématiquement discriminée. Leur nombre est estimé à 2 millions. Dans les années 1970, l’administration a forgé pour ceux qui restent itinérants la catégorie « gens du voyage » qui inclut des non Roms (environ 400 000 personnes de nationalité française). On compte par ailleurs en France environ 15 000 Roms migrants de nationalité roumaine, bulgare, tchèque, slovaque, hongroise, moldave ou des pays de l’ex Yougoslavie (Serbie, Croatie, Kosovo notamment). La plupart d’entre eux ont immigré dans les années 90, peu après la chute des régimes communistes. Bien que présents depuis de nombreuses années, ils sont considérés comme « illégaux » sur le territoire français et rencontrent de grandes difficultés pour réussir à s’insérer. Ils restent en marge de la société et vivent trop souvent dans des campements informels.

3 () Deux précisions sont nécessaires. D'une part, la notion de légitime défense est une notion fortement encadrée. En effet, l'article 3 de l'arrêté du 23 février 1999 qui détermine les modalités d'organisation et de fonctionnement de l'Unité Nationale d’Escorte, de Soutien et d’Intervention (UNESI) précise que les escortes « sont effectuées en civil, sans arme et à l'aide des seuls matériels autorisés... ». De même, concernant la coercition, l'article 3.2.3 du même arrêté prévoit que « la force et les moyens utilisés doivent être proportionnels à la résistance développée par l'étranger. » Implicitement, la notion de légitime défense est rappelée aux escorteurs qui doivent ainsi tenir compte du comportement du reconduit dans la mise en œuvre de la reconduite. Ce principe essentiel figure dans le programme de formation dispensé aux nouveaux escorteurs et les gestes techniques professionnels en intervention qui leur sont enseignés ont été conçus dans le respect de celui-ci.

D'autre part, la légitime défense fait l'objet d'une application mesurée. En effet, chaque mission peut se révéler dangereuse pour les escorteurs et les manifestations d’hostilité à leur égard sont fréquentes. Leur sélection, leur formation et leur expérience leur permet cependant de gérer la plupart des situations délicates avec un recours limité à la force. Les cas de légitime défense avérée sont donc rarissimes. Un exemple est, cependant, assez représentatif d’une telle situation : le 16 août 2007, lors d’une mission d’éloignement à destination de Conakry, 6 escorteurs de l'UNESI ont, à leur arrivée, été pris à partie par la foule dans l'aéroport de Conakry, sans aucune aide des policiers guinéens. Ils ont reçu de multiples coups et, face à ce danger immédiat, se sont défendus en faisant usage de la force strictement nécessaire.