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Amendements  sur le projet ou la proposition


N
° 1925

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 7 mai 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE LOI (n° 1856) DE M. BRUNO LE ROUX, MME MARIE-ANNE CHAPDELAINE, M. ERWANN BINET, MME BARBARA POMPILI, M. FRANÇOIS DE RUGY ET MME VÉRONIQUE MASSONNEAU ET LES MEMBRES DU GROUPE SOCIALISTE, RÉPUBLICAIN ET CITOYEN ET APPARENTÉS, relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant,

PAR Mme Marie-Anne CHAPDELAINE

Députée

——

SOMMAIRE

___

Pages

LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES À LA PROPOSITION DE LOI PAR LA COMMISSION DES LOIS 7

INTRODUCTION 9

I. RENFORCER L’EXERCICE CONJOINT DE L’AUTORITÉ PARENTALE EN CAS DE SÉPARATION DES PARENTS 11

A. L’EXERCICE CONJOINT DE L’AUTORITÉ PARENTALE EST UN PRINCIPE PARFOIS MÉCONNU 11

1. Le code civil fait de l’exercice conjoint de l’autorité parentale le principe, même en cas séparation des parents 11

2. Les difficultés rencontrées 12

B. LES MESURES PROPOSÉES 12

1. Des parents mieux informés sur leurs droits et leurs devoirs 12

2. La codification des règles applicables à l’exercice conjoint de l’autorité parentale 13

a. La définition de l’exercice conjoint de l’autorité parentale 13

b. La définition de l’acte important 14

c. La qualification des changements de résidence et d’établissement scolaire d’actes importants 14

3. Le renforcement de l’effectivité des règles relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale 15

a. L’astreinte 15

b. L’amende civile 15

c. L’ajustement du montant de la pension alimentaire 16

d. La réforme du délit de non-représentation d’enfant 16

e. L’exécution forcée des décisions de justice rendues en matière civile 17

4. La réforme des règles applicables à la détermination de la résidence de l’enfant en cas de séparation 17

II. LA RECONNAISSANCE DE LA PLACE FAMILIALE DES BEAUX-PARENTS 18

A. L’EXTENSION AUX TIERS DE LA PRÉSOMPTION D’ACCORD POUR LES ACTES USUELS 19

B. LE MANDAT D’ÉDUCATION QUOTIDIENNE 20

C. LE RENFORCEMENT DES POUVOIRS DU TIERS AUQUEL L’ENFANT A ÉTÉ CONFIÉ 21

D. LA RÉFORME DE LA DÉLÉGATION ET DU PARTAGE DE L’EXERCICE DE L’AUTORITÉ PARENTALE 21

III. LE DÉVELOPPEMENT DE LA MÉDIATION FAMILIALE 22

A. UN RECOURS À LA MÉDIATION FAMILIALE ENCOURAGÉ PAR LA PROPOSITION DE LOI 22

B. UN ENCADREMENT JURIDIQUE RENFORCÉ PAR LA COMMISSION DES LOIS 22

1. Des précisions sur le nombre de séances de médiation pouvant faire l’objet d’une injonction 23

2. Une exception en cas de violences 23

IV. LA MEILLEURE PRISE EN COMPTE DE LA PAROLE DE L’ENFANT 23

A. UNE ÉCOUTE DE L’ENFANT ADAPTÉE À SON DEGRÉ DE MATURITÉ 23

B. LES NOUVELLES AVANCÉES RÉALISÉES PAR LA COMMISSION DES LOIS 24

1. L’extension des possibilités d’audition des mineurs 24

2. L’émancipation à la demande du mineur 24

CONTRIBUTION DE M. PHILIPPE GOSSELIN, CO-RAPPORTEUR SUR LA MISE EN APPLICATION DE LA LOI 25

DISCUSSION GÉNÉRALE 29

EXAMEN DES ARTICLES 45

Chapitre Ier – Dispositions relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale 45

Avant l’article 1er 45

Article 1er (art. 62 du code civil) : Information de l’auteur d’une reconnaissance d’enfant sur ses droits et ses devoirs en tant que parent 46

Article 2 (art. 101-1 et 101-2 [nouveaux] du code civil) : Règles de publicité des actes de l’état civil et livret de famille 48

Article 3 (art. 372 du code civil) : Définition de l’exercice conjoint de l’autorité parentale 52

Article 4 (art. 372-1 du code civil) : Définition de l’acte important et régime juridique du changement de résidence et d’établissement scolaire de l’enfant 58

Après l’article 4 69

Article 5 (art. 373-2-6 du code civil) : Confirmation du pouvoir d’astreinte du juge aux affaires familiales et création d’un mécanisme d’amende civile en cas de manquement grave et renouvelé aux règles de l’exercice conjoint de l’autorité parentale 69

Article 6 (art. 373-2-1 du code civil) : Résidence de l’enfant en cas d’exercice unilatéral de l’autorité parentale 74

Article 6 bis (nouveau) : (art. 373-2-2 du code civil) Révision du montant de la contribution à l’éducation et à l’entretien de l’enfant si le manquement de l’un des parents à ses obligations a pour effet de modifier la répartition de la charge effective d’entretien et d’éducation de l’enfant 75

Article 7 (art. 373-2-9 du code civil) : Résidence de l’enfant en cas d’exercice conjoint de l’autorité parentale 76

Article 7 bis (nouveau) : (art. 373-2-12 du code civil) Pouvoir du juge aux affaires familiales d’ordonner une expertise en vue de recueillir des éléments médicaux ou psychologiques 82

Article 8 (art. 227-5 du code pénal) : Transformation du délit de non-représentation d’enfant en contravention de la quatrième classe lors de la première infraction 83

Après l’article 8 89

Article 8 bis (nouveau) (art. 34-1 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative) : Réquisition de la force publique par le ministère public pour faire exécuter les décisions de justice rendues en matière civile 94

Chapitre II – Dispositions relatives aux droits et aux devoirs des tiers qui concourent à l’éducation de l’enfant 95

Avant l’article 9 96

Article 9 (art. 372-2 du code civil) : Extension de la présomption d’accord de l’autre parent à l’égard des tiers de bonne foi aux actes usuels qu’un parent a autorisé un tiers à accomplir 97

Article 10 (art. 373-2-1-1 [nouveau] du code civil) : Création d’un mandat d’éducation quotidienne 97

Article 11 (art. 373-3 du code civil) : Assouplissement de la possibilité de confier l’enfant à un tiers 100

Article 12 (art. 373-4 du code civil) : Renforcement des droits du tiers auquel l’enfant a été confié 102

Article 13 (section 3 du chapitre Ier du titre IX du livre Ier du code civil) : Réforme de la délégation de l’exercice de l’autorité parentale 103

Article 14 (art. 377 et 377-1 du code civil) : Réforme du partage de l’exercice de l’autorité parentale 106

Article 15 (art. 377-2 du code civil) : Création d’un nouveau cas d’ouverture de la délégation de l’exercice de l’autorité parentale 107

Chapitre III – Dispositions relatives à la médiation familiale 109

Article 16 (chapitre Ier du titre II de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative, art. 75 du code civil) : Définition de la médiation familiale 109

Article 17 (art. 373-2-10 du code civil) : Injonction par le juge de prendre part à des séances de médiation familiale avant une décision statuant sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale 114

Article 18 (art. 373-2-13 du code civil) : Injonction par le juge, dans le cadre d’instances modificatives, de prendre part à des séances de médiation familiale 117

Chapitre IV – Dispositions relatives à la prise en compte de la parole de l’enfant 120

Article 19 (art. 388-1 du code civil) : Audition du mineur d’une façon adaptée à son degré de maturité 120

Après l’article 19 126

Article 19 bis (nouveau) : (art. 413-2 et 413-3 du code civil) Émancipation à la demande du mineur 128

Chapitre V – Dispositions finales 129

Article 20 : Gage de la présente proposition de loi 129

Titre de la proposition de loi 129

TABLEAU COMPARATIF 130

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 147

PERSONNES ENTENDUES PAR LA RAPPORTEURE 151

DÉPLACEMENT DE LA RAPPORTEURE 155

LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES
À LA PROPOSITION DE LOI
PAR LA COMMISSION DES LOIS

Au cours de sa réunion du mardi 6 mai 2014, la commission des Lois a adopté la proposition de loi relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant, en y apportant les principales modifications suivantes.

—  À l’article 2, la Commission, sur l’initiative de M. Philippe Gosselin, a adopté un amendement renvoyant la totalité de la définition du contenu du livret de famille à un décret en Conseil d’État, et ajoutant la sécurisation du livret de famille aux conditions qui devront être fixées par ledit décret ;

—  À l’article 4, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure précisant le mécanisme de résolution des éventuels désaccords susceptibles d’apparaître entre les parents dans le cadre de l’exercice conjoint de l’autorité parentale ;

—  À l’article 5, sur l’initiative de la rapporteure, la Commission a précisé que le juge aux affaires familiales pouvait assortir sa décision d’une astreinte, afin d’en assurer le respect ;

—  Sur la proposition de M. Erwann Binet, la Commission a ajouté un article 6 bis permettant d’ajuster la pension alimentaire versée pour contribuer à l’éducation et à l’entretien de l’enfant lorsque le non-respect par l’un des parents de la convention homologuée ou de la décision du juge aux affaires familiales a pour effet de modifier la répartition de la charge effective d’entretien et d’éducation de l’enfant ;

—  Sur l’initiative de la rapporteure, la Commission a ajouté un article 7 bis modifiant l’article 373-2-12 du code civil afin de prévoir expressément que le juge aux affaires familiales peut ordonner une expertise en vue de recueillir des éléments médicaux ou psychologiques ;

—  À l’article 8, la Commission, sur l’initiative de la rapporteure, a prévu des faits justificatifs à la non-représentation d’un enfant réprimé par l’article 227-5 du code pénal. Ne pourront ainsi donner lieu à poursuites pénales le fait de refuser de représenter un enfant à la personne qui a le droit de le réclamer si la représentation de l’enfant ferait courir un danger à celui-ci ou en cas de manquement grave et habituel du titulaire du droit de réclamer l’enfant à l’obligation de maintenir des relations personnelles avec l’enfant qui lui incombe en application du deuxième alinéa de l’article 373-2 du code civil ;

—  Au même article 8, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure visant à garantir que l’aggravation des peines prévue par l’article 227-9 du code pénal lorsque l’enfant est retenu au-delà de cinq jours sans que ceux qui ont le droit de réclamer qu’il leur soit représenté sachent où il se trouve ou si l’enfant mineur est retenu indûment à l’étranger reste applicable dès la première infraction ;

—  La Commission a ajouté un article 8 bis, à l’initiative de la rapporteure, prévoyant que le procureur de la République doit veiller à l’exécution des décisions rendues en matière civile et qu’il peut requérir directement la force publique à cette fin ;

—  à l’article 17, elle a précisé que la faculté donnée au juge d’enjoindre aux parties de prendre part à des séances de médiation familiale ne pouvait porter que sur « une ou deux » séances au maximum ;

—  à ce même article 17, la Commission a adopté un amendement visant à écarter toute possibilité d’injonction de participer à des séances de médiation lorsque des violences ont été commises par l’un des parents sur la personne de l’autre parent ou sur la personne de l’enfant ;

—  à l’article 18, la Commission a précisé que le pouvoir d’injonction du juge, dans le cadre des instances modificatives, ne pouvait là encore porter que sur « une ou deux » séances au plus ;

—  à l’article 19, elle a adopté un amendement supprimant la précision qui figure actuellement à l’article 388-1 du code civil et qui fait de la capacité de discernement du mineur une condition préalable à son audition par le juge ;

—  après ce même article 19, la Commission a adopté un amendement présenté par M. Sergio Coronado, portant article additionnel (article 19 bis [nouveau]) et octroyant au mineur âgé de seize ans révolus la possibilité de solliciter lui-même son émancipation auprès du juge des tutelles ;

—  elle a enfin adopté un amendement de suppression de l’article 20 présenté par le Gouvernement, celui-ci ayant exprimé par cet amendement son acceptation des conséquences financières, en termes d’aggravation des charges publiques, des mesures prévues par la proposition de loi et son soutien à ses dispositions.

Mesdames, messieurs,

La famille a connu des évolutions considérables au cours des dernières années. L’augmentation du nombre des divorces et des séparations, ainsi que des familles recomposées, constitue une réalité incontestable. En 2012, près de 130 000 divorces ont été prononcés et plus de 27 000 Pacs ont été dissous à la suite d’une séparation. D’après l’INSEE, 1,5 million d’enfants, soit plus d’un sur dix, vivent dans 720 000 familles recomposées. Près d’un million de ces enfants vivent avec un parent et un beau-parent (1).

Le droit de la famille doit s’adapter à ces nouvelles configurations familiales, dans l’intérêt de l’enfant qui est la pierre angulaire de la proposition de loi. Il n’y a plus un modèle familial unique, mais une pluralité de modèles familiaux. Le titre du code civil consacré à l’autorité parentale doit dès lors être réformé pour tenir compte de cette diversité, afin de sécuriser et de faciliter le quotidien des parents, des enfants et des tiers qui ont noué des liens affectifs forts avec eux et concourent à leur éducation.

La présente proposition de loi, qui s’est substituée à une initiative gouvernementale envisagée sur le même sujet, s’appuie sur les travaux des quatre groupes de réflexion mis en place en octobre 2013 par la ministre déléguée à la Famille du précédent gouvernement, Mme Dominique Bertinotti. Les rapports de ces groupes, constitués d’intellectuels, de personnalités qualifiées et de praticiens spécialistes du droit de la famille et présidés par des magistrats – M. Marc Juston, président du tribunal de grande instance de Tarascon (2) et M. Jean-Pierre Rosenczveig, président du tribunal pour enfants de Bobigny (3) – ou des universitaires – la professeure Adeline Gouttenoire (4) et la sociologue Irène Théry (5) – et celui du groupe de travail créé par les ministères de la Famille et de la Justice sur l’exercice de la coparentalité après séparation (6) ont fourni un éclairage et une base précieux. Beaucoup des dispositions proposées s’inspirent directement de ces réflexions et propositions.

Le texte poursuit quatre objectifs principaux, qui font l’objet de quatre chapitres distincts.

Le premier de ces objectifs est de renforcer l’exercice conjoint de l’autorité parentale en cas de séparation des parents, afin que l’enfant conserve des relations équilibrées et régulières avec chacun de ses parents (I).

Le deuxième est de reconnaître la place croissante prise par certains tiers, les beaux-parents en particulier, dans l’éducation et la vie quotidienne des enfants, avec lesquels ils nouent des liens affectifs étroits et durables (II).

Le troisième objectif est de développer le recours à la médiation familiale (III).

Le quatrième est enfin de mieux prendre en compte la parole de l’enfant (IV).

I. RENFORCER L’EXERCICE CONJOINT DE L’AUTORITÉ PARENTALE EN CAS DE SÉPARATION DES PARENTS

Le premier chapitre de la présente proposition de loi vise à assurer le respect des règles relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale, afin que chaque enfant puisse conserver, y compris après la séparation de ses parents, des relations équilibrées et régulières avec chacun d’entre eux, conformément à l’article 9, paragraphe 3, de la convention internationale relative aux droits de l’enfant de 1989 (7).

L’exercice conjoint de l’autorité parentale est le principe, y compris en cas de séparation des parents, mais ce principe est parfois méconnu (A) et son respect doit donc être mieux assuré (B).

A. L’EXERCICE CONJOINT DE L’AUTORITÉ PARENTALE EST UN PRINCIPE PARFOIS MÉCONNU

1. Le code civil fait de l’exercice conjoint de l’autorité parentale le principe, même en cas séparation des parents

L’autorité parentale a remplacé la « puissance paternelle » du Code Napoléon avec la loi n° 70-459 du 4 juin 1970 relative à l’autorité parentale. C’est la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale qui a ensuite définitivement généralisé la coparentalité, c’est-à-dire l’exercice en commun par les deux parents de l’autorité parentale, conformément aux recommandations formulées dans les rapports de Mme Irène Théry de 1998 (8) et de la commission présidée par le professeur Françoise Dekeuwer-Défossez de 1999 (9), en affirmant que les deux parents exercent l’autorité parentale (article 372 du code civil).

L’autorité parentale est définie par l’article 371-1 du code civil comme « un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant ». Elle appartient aux parents pour protéger l’enfant « dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne » et implique un dialogue avec l’enfant, que « les parents associent […] aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité ».

L’exercice conjoint de l’autorité parentale reste le principe même après la séparation des parents : le lien de filiation est indissoluble, à la différence du couple parental. L’article 372-2 du code civil précise ainsi que « la séparation des parents est sans incidence sur les règles de dévolution de l’exercice de l’autorité parentale » et que « chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l’enfant et respecter les liens de celui-ci avec l’autre parent ».

2. Les difficultés rencontrées

Le code civil fait de l’exercice conjoint de l’autorité parentale le principe, mais ne le définit nulle part. Cette absence de définition précise contribue sans doute à la méconnaissance, par certains parents séparés, de ce principe et de ce qu’il implique au quotidien.

Ainsi, il arrive que le parent qui vit avec l’enfant prenne des décisions seul et en avise a posteriori l’autre parent, qui est ainsi mis devant le fait accompli. S’il souhaite contester cette décision, ce dernier soit alors saisir le juge. Une telle situation est source de tensions et d’une multiplication des procédures entre les parents, et à terme, est contraire à l’intérêt de l’enfant.

Il arrive également que le parent chez qui l’enfant ne réside pas se désinvestisse de l’éducation de ce dernier, pour des raisons diverses, alors que le maintien de relations personnelles avec son enfant constitue non pas une faculté, mais une obligation, comme le rappelle expressément le deuxième alinéa de l’article 373-2 du code civil.

Les articles 1er à 8 bis de la proposition de loi visent à résoudre ces difficultés.

B. LES MESURES PROPOSÉES

Les mesures proposées par le chapitre premier de la proposition de loi visent à assurer le respect des règles relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale. Elles améliorent l’information des parents sur leurs devoirs et leurs obligations (1), clarifient la signification concrète de l’exercice conjoint de l’autorité parentale (2), renforcent l’effectivité de ces règles en prévoyant de nouvelles possibilités de sanctionner leur méconnaissance (3) et réforment les règles applicables à la détermination de la résidence de l’enfant (4).

Tous ces dispositifs sont symétriques et peuvent s’appliquer de manière indifférenciée aux deux parents, qu’il s’agisse du parent chez qui l’enfant réside le plus souvent ou de l’autre parent.

1. Des parents mieux informés sur leurs droits et leurs devoirs

L’article premier vise à renforcer l’information du parent auteur d’une reconnaissance d’enfant, en complétant la liste des articles du code civil qui doivent lui être lus lors de l’établissement de l’acte de reconnaissance.

L’article 2 consacre dans le code civil l’existence du livret de famille, qui est actuellement mentionné par un article, sans qu’aucune disposition ne lui soit expressément consacrée. Le livret de famille remplit une double fonction : il assure la publicité des actes de l’état civil, et joue à ce titre un rôle essentiel dans les démarches administratives des familles, et informe les parents ou les futurs parent sur leurs droits et leurs devoirs, car il comporte une synthèse précieuse du droit de la famille. La mention de cette deuxième fonction, qu’il était proposé de consacrer expressément dans le code civil, a cependant été supprimée à la suite de l’adoption par la Commission d’un amendement de M. Philippe Gosselin.

2. La codification des règles applicables à l’exercice conjoint de l’autorité parentale

Les articles 3 et 4 visent à codifier les règles, aujourd’hui essentiellement jurisprudentielles, applicables à l’exercice conjoint de l’autorité parentale.

a. La définition de l’exercice conjoint de l’autorité parentale

L’article 3 rappelle expressément que l’exercice conjoint de l’autorité parentale signifie que les parents doivent s’informer réciproquement de l’organisation de la vie de l’enfant et prendre ensemble les décisions qui le concernent.

Dans le prolongement de cet article, l’article 4 affirme, au premier alinéa du nouvel article 372-1 du code civil, que tout acte de l’autorité parentale, qu’il ait un caractère usuel ou important, requiert l’accord de chacun des parents lorsqu’ils exercent en commun l’autorité parentale.

Cette règle correspond à l’état du droit actuellement en vigueur, mais constitue une clarification nécessaire, car beaucoup de parents interprètent à tort l’article 372-2 du code civil comme signifiant que l’accord des deux parents ne serait pas nécessaire pour accomplir un acte usuel. Rappelons qu’aux termes de cet article, « à l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre, quand il fait seul un acte usuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant ». Cette présomption d’accord concernant les actes usuels signifie que les tiers de bonne foi n’ont pas à exiger une preuve de l’accord des deux parents (en demandant une double signature, par exemple) et qu’ils ne risquent pas de voir leur responsabilité engagée si l’acte passé par un seul des parents est ensuite contesté par l’autre. En d’autres termes, la présomption légale vaut dispense de preuve de l’accord des deux parents et décharge de responsabilité au bénéfice des tiers de bonne foi. La présomption, qui est simple, tombe naturellement si l’autre parent a exprimé son désaccord. Il faut souligner que cet article ne dispense donc nullement aujourd’hui les parents d’une concertation et d’un accord, même pour les actes usuels.

Ce même article 4 rappelle que l’accord doit être exprès pour les actes importants. Cette règle constitue, sur ce point également, une explicitation de l’état du droit, car elle découle d’une lecture a contrario de l’article 372-2 du code civil : la présomption d’accord à l’égard des tiers de bonne foi ne valant que pour les actes usuels, un accord exprès est nécessaire pour les actes importants.

b. La définition de l’acte important

L’article 4 définit également, au deuxième alinéa du nouvel article 372-1 du code civil, ce qu’est un acte important, à savoir un acte qui rompt avec le passé et engage l’avenir de l’enfant ou qui touche à ses droits fondamentaux. Cette définition correspond à celle donnée par la jurisprudence, qui est ici simplement codifiée afin d’accroître sa visibilité et son accessibilité.

Sur l’initiative de votre rapporteure, la Commission a inséré un nouvel alinéa à cet article précisant le mode de règlement d’éventuels désaccords entre les parents. Dans ces situations, le parent le plus diligent devra saisir le juge aux affaires familiales, en référé le cas échéant. Celui-ci statuera selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant et en prenant en considération les éléments mentionnés à l’article 373-2-11 du code civil (10).

c. La qualification des changements de résidence et d’établissement scolaire d’actes importants

L’article 4 qualifie également, au quatrième alinéa de l’article 372-1 du code civil, d’actes importants le changement de résidence de l’enfant, s’il modifie les modalités d’accueil de l’enfant par l’autre parent, et le changement d’établissement scolaire.

Le droit en vigueur prévoit déjà que le changement de résidence du parent, dès lors qu’il modifie les modalités d’exercice de l’autorité parentale, doit faire l’objet d’une information préalable et en temps utile de l’autre parent et que, en cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales qui statue selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant (article 373-2 du code civil).

La qualification d’acte important ne constitue donc qu’une clarification, sur ce point également. Elle ne signifie pas que l’un des parents pourra faire obstacle au déménagement de l’autre parent, mais simplement que, en cas de désaccord entre les parents à ce sujet, le juge aux affaires familiales devra être saisi et qu’il réexaminera les modalités d’exercice de l’autorité parentale. Que cette règle figure désormais expressément dans le code civil permettra à chacun des parents de mieux prendre connaissance et donc conscience de ses obligations en la matière.

En revanche, en l’état du droit, le changement d’établissement scolaire ne constitue un acte important que dans certaines situations. Tel est le cas pour une inscription dans un établissement d’enseignement privé (11), lorsque l’un des parents retire l’enfant d’un établissement religieux où il avait été préalablement inscrit pour le mettre dans un établissement laïque (12) ou en cas de changement d’orientation (13). La qualification de tout changement d’établissement scolaire d’acte important constitue donc une novation par rapport au droit existant.

Afin de tenir compte des situations de violences, une exception est prévue lorsque l’un des parents a été condamné soit comme auteur, coauteur ou complice d’un crime ou d’un délit sur la personne du parent qui souhaite changer la résidence ou l’établissement scolaire de l’enfant. Dans cette hypothèse, l’accord de l’autre parent n’est pas requis. On en comprendra aisément la raison.

3. Le renforcement de l’effectivité des règles relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale

Les articles 5, 6 bis, 8 et 8 bis visent à renforcer l’effectivité des règles relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale. Les atteintes à ces règles et, en particulier, aux décisions des juges aux affaires familiales, ne sont en effet pas systématiquement sanctionnées, la voie pénale apparaissant, en pratique, peu efficace en l’état du droit.

a. L’astreinte

L’article 5 rappelle, en premier lieu, la possibilité pour le juge aux affaires familiales d’assortir sa décision d’une astreinte, à la suite de l’adoption par la Commission d’un amendement de votre rapporteure. Cette possibilité existe déjà, mais elle est rarement utilisée en pratique alors que l’astreinte peut être un instrument efficace dans certaines situations. Son inscription dans le code civil devrait inciter les praticiens – avocats et magistrats – à y recourir davantage.

b. L’amende civile

Ce même article 5 crée, en second lieu, un mécanisme d’amende civile. L’amende prévue pourra être prononcée, par décision spécialement motivée :

– soit lorsqu’un parent fait délibérément obstacle de façon grave ou renouvelée aux règles de l’exercice conjoint de l’autorité parentale prévues à l’article 372-1 du code civil en empêchant l’autre parent d’exercer ses prérogatives ;

– soit lorsqu’un parent ne respecte pas une décision ou la convention homologuée fixant les modalités de l’exercice de l’autorité parentale.

Le montant de l’amende est plafonné à 10 000 euros et devra être proportionné à la gravité de l’atteinte aux règles de l’exercice conjoint de l’autorité parentale et aux facultés contributives du parent.

c. L’ajustement du montant de la pension alimentaire

Issu d’un amendement de M. Erwann Binet adopté par la Commission, le nouvel article 6 bis prévoit que la pension alimentaire versée pour contribuer à l’éducation et à l’entretien de l’enfant peut être ajustée lorsque le non-respect par l’un des parents de la convention homologuée ou de la décision du juge aux affaires familiales a pour effet de modifier la répartition de la charge effective d’entretien et d’éducation de l’enfant.

Il ne s’agit pas d’une sanction, mais de tirer les conséquences financières du non-exercice du droit de visite et d’hébergement ou du non-respect des périodes de résidence au domicile de chacun des parents fixées par la décision du juge ou la convention homologuée. Il est clair que lorsque l’un des parents néglige de s’occuper de son enfant dans les conditions prévues par la convention homologuée ou par le juge, l’autre parent doit corrélativement assumer des frais supplémentaires ; il est juste que le parent défaillant contribue alors à cette charge supplémentaire née de sa négligence.

d. La réforme du délit de non-représentation d’enfant

L’article 8 transforme, en premier lieu, le délit de non-représentation d’enfant en contravention de la quatrième classe, lors de la première infraction, punie par des amendes forfaitisées de 135 ou 375 euros. En effet, ce délit, prévu par l’article 227-5 du code pénal, fait actuellement fréquemment l’objet d’un classement sans suite et paraît rarement sanctionné. Sa « contraventionnalisation » permettra une verbalisation immédiate, sans passage devant un tribunal, qui devrait être en pratique plus dissuasive : mieux vaut une contravention effectivement appliquée qu’un délit rarement poursuivi. Cependant en cas de réitération dans un délai de deux ans, la non-représentation d’enfant restera un délit, passible d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros.

Ce même article crée, en second lieu, deux faits justificatifs à la non-représentation d’un enfant mineur. La non-représentation d’enfant ne pourra ainsi donner lieu à poursuites pénales si la représentation de l’enfant ferait courir un danger à ce dernier ou si le titulaire du droit de réclamer l’enfant a manqué gravement et de manière habituelle aux obligations qui lui incombent en application du deuxième alinéa de l’article 373-2 du code civil, c’est-à-dire à son devoir de maintenir des relations personnelles avec l’enfant et de respecter les liens de celui-ci avec l’autre parent.

e. L’exécution forcée des décisions de justice rendues en matière civile

Issu d’un amendement de votre rapporteure adopté par la Commission, l’article 8 bis confie au parquet la mission de veiller à l’exécution des décisions de justice rendues en matière civile et autorise le procureur de la République de requérir directement la force publique pour faire exécuter ces décisions. Cette disposition permettra de donner plus de force à ces décisions de justice.

4. La réforme des règles applicables à la détermination de la résidence de l’enfant en cas de séparation

Les articles 6 et 7 réforment les règles applicables à la résidence de l’enfant en cas de séparation.

Condamnée par la Cour de cassation dans un arrêt du 2 mai 1984 (14) puis finalement insérée dans le code civil par la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, la résidence alternée fait débat, en France, depuis plusieurs décennies.

Ses partisans font valoir qu’elle est le seul mode de résidence permettant à l’enfant de conserver des liens équilibrés avec chacun de ses parents et assurant l’égalité des parents.

Ses adversaires avancent que l’alternance de l’hébergement risque de déstabiliser l’enfant, ballotté d’un parent à l’autre au fil des jours et des semaines, et que ce mode de résidence privilégie l’intérêt des parents ou de l’un d’entre eux, au détriment de celui de l’enfant.

La réforme proposée entend dépasser ces clivages et à recentrer le débat, dans chaque situation familiale, sur le choix de l’organisation pratique la plus conforme à l’intérêt de l’enfant. Elle fait disparaître la notion de résidence alternée du code civil et met ainsi fin à l’alternative binaire ouverte, en cas de séparation des parents, entre la résidence alternée ou la résidence au domicile de l’un des parents.

L’article 7, alinéa 3, pose pour principe que la résidence de l’enfant est fixée au domicile de chacun de ses parents, selon des modalités de fréquence et de durée déterminées d’un commun accord entre les parents ou à défaut par le juge. La réforme proposée supprime ainsi la référence à une dénomination particulière, sans influer pour autant sur la répartition effective des temps passés au domicile de chacun des parents. La résidence au domicile de chacun des parents n’implique en effet pas une répartition égale des temps de présence chez chacun d’entre eux. Il importe de souligner particulièrement ce point pour éviter ces interprétations trop rapides qui ont pu avoir cours à propos de cette disposition.

Pour prendre un exemple concret, des parents qui souhaiteraient fixer, en application du droit en vigueur, la résidence de l’enfant chez l’un d’entre eux et que l’enfant se rende au domicile de l’autre parent les fins de semaines des semaines paires et la moitié des vacances scolaires pourront retenir exactement la même organisation pratique avec le dispositif proposé. La seule différence sera que, au lieu de fixer la résidence au domicile de l’un des parents tandis que l’autre ne disposerait que d’un droit de visite et d’hébergement, l’enfant aura sa résidence au domicile de chacun d’entre eux, même si, en pratique, le temps passé au domicile de l’un de ses deux parents sera bien inférieur au temps passé chez l’autre.

En cas d’exercice unilatéral de l’autorité parentale, la résidence de l’enfant est évidemment fixée au domicile du parent qui exerce cette autorité (article 6).

En cas d’exercice conjoint de l’autorité parentale, cette possibilité de fixer la résidence de l’enfant chez un seul des deux parents n’est maintenue qu’à titre exceptionnel, en cas d’impossibilité matérielle de l’un des parents d’accueillir l’enfant à son domicile (article 7, alinéa 4).

Sur le plan terminologique, la réforme a pour effet de supprimer la notion de droit d’hébergement dans le cadre de l’exercice conjoint de l’autorité parentale, et de rendre exceptionnel le recours au droit de visite. Ces deux termes étaient souvent mal ressentis par les parents concernés, qui considéraient que le droit « d’héberger » et de « visiter » son enfant ne reflète pas leurs responsabilités parentales.

II. LA RECONNAISSANCE DE LA PLACE FAMILIALE DES BEAUX-PARENTS

Le chapitre II de la proposition de loi vise à reconnaître la place croissante prise par les tiers, les beaux-parents en particulier, dans l’éducation et la vie quotidienne des enfants. Son objet n’est pas d’instituer un « statut du beau-parent », qui serait rigide et ne correspondrait pas à la diversité des situations et des attentes, mais d’offrir aux familles une palette d’instruments, souples, évolutifs et adaptables à chaque configuration. Ces instruments permettront aux beaux-parents d’exercer en droit les responsabilités qu’ils assument déjà en fait, dans l’intérêt de l’enfant.

Les dispositifs proposés tiennent compte et parfois s’inspirent des travaux et réflexions menés depuis une dizaine d’années sur ce sujet, qui ne s’étaient jamais concrétisés jusqu’à présent. Peuvent notamment être cités :

– le rapport de la commission présidée par la professeure Françoise Dekeuwer-Défossez de 1999 (15) ;

– le rapport de la Défenseure des enfants, Mme Dominique Versini, présenté en 2006 (16) ;

– l’avant-projet de loi sur l’autorité parentale et les droits des tiers présenté en 2009 par la secrétaire d’État chargée de la famille et de la solidarité, Mme Nadine Morano ;

– le rapport de M. Jean Léonetti, remis au Premier ministre le 7 octobre 2009 (17) ;

– plus récemment, le rapport du groupe de travail sur la filiation, les origines et la parentalité mis en place par la ministre déléguée chargée de la famille en 2013 et présidé par Mme Irène Théry (18).

Cette reconnaissance de la place familiale des beaux-parents n’est en rien antinomique ou en contradiction avec le renforcement de la coparentalité post-séparation poursuivi par le premier chapitre de la proposition de loi. Comme le souligne le rapport de Mme Irène Théry, précité, « valoriser la coparentalité et reconnaître une place familiale au beau-parent vont ensemble : de fait, il s’agit d’un seul et même objectif » (19). Les beaux-parents ne sont ni des rivaux, ni des substituts des parents, mais des figures familiales originales, dont la valeur est justement de s’ajouter aux parents, sans contester leur place.

Dans les faits, cette reconnaissance permettra d’apporter des solutions à des situations de plus en plus courantes, comme nous l’avons rappelé au début de ce rapport. Que le droit saisisse le réel en offrant des réponses aux questions concrètes qui sont posées aujourd’hui quotidiennement à des milliers de familles, chacun doit s’en satisfaire, d’autant plus que la préoccupation finale qui nous réunit tous est bien l’intérêt de l’enfant.

A. L’EXTENSION AUX TIERS DE LA PRÉSOMPTION D’ACCORD POUR LES ACTES USUELS

L’article 9 étend la présomption d’accord de l’autre parent à l’égard des tiers de bonne foi prévue par l’article 373-2 du code civil pour les actes usuels qu’un parent accomplit seul, aux actes usuels qu’un parent a autorisé un tiers à accomplir.

La présomption d’accord prévue par l’article 373-2 du code civil vaut dispense de preuve de l’accord de l’autre parent et décharge de responsabilité pour les tiers de bonne foi (s’il apparaissait ensuite que les parents étaient en désaccord). Son extension aux actes usuels accomplis par un tiers que l’un des parents a autorisé à cette fin, permettra de sécuriser le régime juridique des autorisations ponctuelles que les tiers et, en particulier, les beaux-parents auront reçues de l’un des parents. Elle devrait faciliter considérablement la vie quotidienne des familles recomposées, en clarifiant le statut des autorisations ponctuelles qu’un parent donne à un tiers pour accomplir un acte usuel concernant l’enfant, comme aller le chercher à l’école ou justifier d’une absence scolaire.

Certaines familles souhaiteront cependant pouvoir aller plus loin que de simples autorisations ponctuelles. Tel est l’objet du mandat d’éducation quotidienne.

B. LE MANDAT D’ÉDUCATION QUOTIDIENNE

L’article 10 crée un « mandat d’éducation quotidienne » qui permettra à un tiers vivant de manière stable – conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité – avec l’un des parents d’accomplir les actes usuels de l’autorité parentale pour la durée de la vie commune. Ce mandat pourra être rédigé par acte sous seing privé ou en la forme authentique, et nécessitera l’accord de l’autre parent.

Il pourra être révoqué à tout moment par le mandant et prendra fin de plein droit en cas de rupture de la vie commune, de décès du mandant ou de renonciation de ce dernier à son mandat.

Ce mandat permettra aux familles qui le désirent de délivrer aux beaux-parents une autorisation plus générale d’accomplir les actes usuels de l’autorité parentale. Cette autorisation générale permettrait notamment de faire face aux situations imprévues et urgentes, telles qu’une fracture dont aurait été victime l’enfant et qui aurait conduit à une brève hospitalisation en urgence, pour lesquelles, si le parent avec lequel vit l’enfant est absent ou indisponible, une autorisation ponctuelle n’a pu être délivrée. Il est fréquent que, dans de telles situations, l’établissement hospitalier n’autorise pas la sortie du mineur de l’établissement avec son beau-parent, alors qu’il s’agit d’un acte usuel. Le mandat d’éducation quotidienne permettrait de répondre à ces difficultés.

Le dispositif proposé s’inspire des recommandations formulées dans plusieurs rapports, notamment celui de Mme Dominique Versini (20) et de Mme Irène Théry (21).

C. LE RENFORCEMENT DES POUVOIRS DU TIERS AUQUEL L’ENFANT A ÉTÉ CONFIÉ

L’article 11 de la proposition de loi assouplit la possibilité pour le juge de confier, à titre exceptionnel et si l’intérêt de l’enfant l’exige, l’enfant à un tiers. La rédaction actuelle de l’article 373-3 du code civil accorde une préférence à l’un des membres de la famille de l’enfant. Il est proposé de supprimer cette priorité, afin de mieux tenir compte des situations dans lesquelles un enfant a noué des liens affectifs forts avec un tiers, non parent, qui l’a élevé par exemple.

L’article 12 étend par ailleurs les pouvoirs du tiers auquel l’enfant a été confié, puisqu’il pourra désormais accomplir tous les actes usuels (et non plus seulement relatifs à la surveillance et l’éducation de l’enfant) et être autorisé à titre exceptionnel par le juge à accomplir un acte important.

D. LA RÉFORME DE LA DÉLÉGATION ET DU PARTAGE DE L’EXERCICE DE L’AUTORITÉ PARENTALE

Les articles 13 à 15 réforment le régime juridique de la délégation et du partage de l’exercice de l’autorité parentale.

L’article 13 opère plusieurs modifications rédactionnelles au sein de la section 3 du chapitre 1er du titre IX du livre Ier du code civil, actuellement intitulée « la délégation de l’autorité parentale » afin de distinguer clairement la délégation et le partage (parfois appelé « délégation-partage ») de l’exercice de l’autorité parentale. La rédaction actuelle des articles 376 à 377-3 de ce code ne les distingue en effet pas nettement, alors que la délégation entraîne un transfert de tout ou partie de l’exercice de l’autorité parentale, tandis que dans l’autre, celui-ci n’est que partagé avec les parents.

L’article 14 réforme la procédure de partage de l’exercice de l’autorité parentale, qu’il assouplit. Le partage pourra désormais être effectué par la voie d’une convention soumise à homologation du juge aux affaires familiales. La condition liée à l’existence de circonstances exceptionnelles, trop restrictive, est supprimée. L’homologation judiciaire sera encadrée, le juge devant s’assurer que la convention est conforme à l’intérêt de l’enfant et que le consentement du ou des parents a été donné librement. L’accord des deux parents est requis en cas d’exercice conjoint de l’exercice de l’autorité parentale. En cas d’exercice unilatéral de l’autorité parentale, l’avis de l’autre parent devra être recueilli.

L’article 15 crée un nouveau cas d’ouverture de la délégation de l’exercice de l’autorité parentale à l’initiative du particulier, de l’établissement ou du service départemental de l’aide sociale à l’enfance (ASE) qui a recueilli l’enfant ou d’un membre de l’enfant. Ce nouveau cas d’ouverture, qui vise les cas de grave défaillance des parents, est l’accomplissement répété d’actes non usuels par la personne, le service ou l’établissement à qui est confié l’enfant avec l’autorisation du juge des enfants, en raison de refus abusifs ou injustifiés ou en cas de négligence des détenteurs de l’autorité parentale, en application du deuxième alinéa de l’article 375-7 du code civil. Sa rédaction a été clarifiée par un amendement adopté par la Commission sur l’initiative de votre rapporteure.

III. LE DÉVELOPPEMENT DE LA MÉDIATION FAMILIALE

Le chapitre III de la présente proposition de loi a pour ambition de donner plus de place à la médiation familiale. Insuffisamment connue et pratiquée, celle-ci obtient pourtant des résultats notables dans l’apaisement des conflits et dans la recherche d’accords, en particulier sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale après une séparation. Elle constitue donc, par excellence, un outil au service de l’intérêt de l’enfant.

A. UN RECOURS À LA MÉDIATION FAMILIALE ENCOURAGÉ PAR LA PROPOSITION DE LOI

Les trois premiers articles du chapitre III de la proposition de loi mettent en place plusieurs mécanismes destinés à inciter les parties à recourir à la médiation familiale.

L’article 16 insère dans la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative un article nouveau rappelant aux époux et aux parents qu’ils peuvent recourir à la médiation en cas de conflits familiaux, un deuxième article consacré à la définition de la médiation familiale et un troisième portant sur le régime juridique qui lui est applicable. L’article 16 prévoit aussi la lecture du premier de ces trois articles par l’officier d’état civil le jour du mariage.

L’article 17 octroie au juge aux affaires familiales, dans le cadre de la fixation des modalités d’exercice de l’autorité parentale (article 373-2-10 du code civil), la faculté d’enjoindre aux parents de participer à des séances de médiation familiale.

L’article 18 donne la même compétence à ce juge dans le cadre des instances portant sur les modifications à apporter à une convention homologuée ou à une décision relative à l’exercice de l’autorité parentale (article 373-2-13 du même code).

B. UN ENCADREMENT JURIDIQUE RENFORCÉ PAR LA COMMISSION DES LOIS

La commission des Lois a adopté plusieurs amendements qui tendent à assurer toute la rigueur nécessaire au dispositif mis en place par la proposition de loi.

1. Des précisions sur le nombre de séances de médiation pouvant faire l’objet d’une injonction

La commission des Lois a adopté deux amendements de votre rapporteure, précisant que le pouvoir d’injonction donné au juge, aussi bien par l’article 17 que par l’article 18 de la proposition de loi, porte sur la participation à « une ou deux » séances de médiation familiale au maximum. En aucun cas, par conséquent, le juge ne pourra contraindre une personne à prendre part contre son gré à la totalité d’un processus de médiation.

2. Une exception en cas de violences

La commission des Lois a adopté un amendement de votre rapporteure visant à écarter toute possibilité d’injonction par le juge de participer à des séances de médiation lorsque des violences ont été commises par l’un des parents sur la personne de l’autre parent ou sur la personne de l’enfant. Un parent victime de violences, quelle que soit leur nature (physique ou psychologique) ou leur ancienneté, ne pourra ainsi jamais se voir contraint par le juge à prendre part à la moindre séance de médiation familiale.

IV. LA MEILLEURE PRISE EN COMPTE DE LA PAROLE DE L’ENFANT

Le chapitre IV de la présente proposition de loi vise à mieux prendre en considération la parole de l’enfant, en particulier dans le cadre des procédures judiciaires.

A. UNE ÉCOUTE DE L’ENFANT ADAPTÉE À SON DEGRÉ DE MATURITÉ

L’article 19 a pour objet de garantir que le recueil de la parole de l’enfant, dans toute procédure le concernant, se déroule dans les meilleures conditions. Cet article s’inscrit dans un vaste mouvement, législatif et doctrinal, aussi bien français qu’international, qui ambitionne d’accorder plus d’attention aux points de vue exprimés par l’enfant et d’assurer ainsi plus efficacement la défense de ses droits.

À cet effet, l’article 19 complète le premier alinéa de l’article 388-1 du code civil, relatif à l’audition du mineur par le juge, en précisant que « le mineur est entendu d’une manière adaptée à son degré de maturité. »

B. LES NOUVELLES AVANCÉES RÉALISÉES PAR LA COMMISSION DES LOIS

La commission des Lois a adopté deux amendements, qui introduisent des innovations remarquables dans le droit des mineurs.

1. L’extension des possibilités d’audition des mineurs

À l’article 19, la commission des Lois a adopté un amendement de votre rapporteure, supprimant la condition posée par l’article 388-1 du code civil faisant de la capacité de discernement du mineur un préalable à son audition par le juge. Cet amendement confirme que l’audition est de droit dès lors que le mineur en fait la demande mais, dans un souci d’équilibre, prévoit une exception à ce principe si l’intérêt de l’enfant l’exige. Le juge doit dans ce cas motiver spécialement sa décision. L’article 388-1 est par ailleurs réaménagé pour plus de lisibilité.

L’objet de cet amendement est avant tout d’étendre les auditions de mineurs dans toutes les procédures qui les concernent. Actuellement en effet, les juridictions tendent à apprécier différemment la notion de « capacité de discernement » si bien que certains juges entendent les mineurs à partir de sept ans, d’autres à partir de dix ans, et d’autres encore à compter de treize ans. L’amendement adopté contribuera à unifier la pratique suivie dans les différents tribunaux. Il écartera de tel ou tel juge, si nécessaire, la tentation de s’abriter derrière cette même notion pour s’abstenir d’auditionner un mineur. De manière générale, il encouragera le recueil plus fréquent de la parole des enfants, même âgés de moins de sept ans, sous réserve, comme le prévoit déjà l’article 19, que ce recueil se fasse selon des modalités adaptées à son degré de maturité.

2. L’émancipation à la demande du mineur

La commission des Lois a adopté un amendement de M. Sergio Coronado et de Mme Véronique Massonneau, portant article additionnel après l’article 19 et tendant à élargir à un autre domaine la portée croissante donnée à la parole du mineur.

Le nouvel article 19 bis ainsi créé modifie en effet les articles 413-2 et 413-3 du code civil afin de donner au mineur âgé de seize ans révolus la faculté de solliciter lui-même son émancipation auprès du juge des tutelles.

CONTRIBUTION DE M. PHILIPPE GOSSELIN,
CO-RAPPORTEUR SUR LA MISE EN APPLICATION DE LA LOI
QUI SERAIT ISSUE DE L’ADOPTION DÉFINITIVE DE LA PROPOSITION DE LOI (nommé en application de l’article 145-7 du Règlement)

Pendant de longs mois, le débat politique a été occupé, fin 2012-début 2013, par la question du mariage dit « pour tous », mariage et adoption pour les couples de même sexe.

Longtemps, le gouvernement a souhaité y inclure la PMA et la GPA, la procréation médicalement assistée et la gestation pour autrui. Sous la pression de nombreux manifestants réunis dans les rues de Paris, Lyon, Rennes et d’autres villes, face à une opinion publique mobilisée, le gouvernement avait alors reculé. Il renvoyait cette question à une grande loi « famille » qui aborderait aussi d’autres sujets comme un éventuel statut de tiers ou de beaux-parents, le réexamen du contenu, et du partage entre les parents, de l’autorité parentale, la question de l’accès aux origines pour les enfants nés sous X notamment.

Le 2 février 2014, au lendemain d’une nouvelle « Manif pour Tous », au succès remarqué car la mobilisation n’avait pas faibli, le Premier Ministre, Jean-Marc Ayrault annonçait que le projet de loi famille ne serait pas débattu cette année. Le projet de loi devait être présenté en Conseil des Ministres en avril, avant d’être examiné au Parlement au cours du 2ème semestre et dans tous les cas avant l’été. C’est ce que souhaitait avec beaucoup d’insistance la Ministre de la famille d’alors, Dominique Bertinotti. Matignon voulait au contraire éviter de voir monter les contestations et les crispations autour de la PMA et de la GPA à la veille des élections municipales et européennes. La ligne Matignon s’imposait dès le 3 février. Passée la stupeur, voire la colère de certains élus de la majorité, le groupe SRC de l’Assemblée Nationale prenait l’engagement de déposer plusieurs propositions de lois pour compenser l’engagement non tenu du Gouvernement de déposer un projet de loi famille « global ».

La présente proposition relative à « l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant », déposée par l’ensemble du groupe SRC et les écologistes, est l’une d’elles. Elle appelle plusieurs critiques et remarques sur la forme et le fond.

Bien évidemment, nul ne conteste que les députés puissent déposer des propositions de loi, comme le reconnait l’article 39 de notre constitution. C’est un droit essentiel que je revendique bien entendu !

Cependant sur un certain nombre de sujets, qui pourraient être qualifiés de lourds et délicats, qui impactent le droit de façon substantielle, la voie parlementaire semble beaucoup moins appropriée, voire inopportune. Contrairement aux voies suivies lors d’un projet gouvernemental, les garanties procédurales en cas de proposition de loi sont bien minces. Démonstration en est faite ici.

Le texte, s’il est adopté, sans parler des amendements qui ne manqueront pas de le compléter, voire de le contredire sur tel ou tel point, et alors même qu’il va modifier le droit civil de la famille, le sera sans étude d’impact, sans le recueil de l’avis d’aucune des instances nationales de concertation et sans l’avis juridique du Conseil d’État.

Certes, les études d’impact sont parfois « légères » et ne répondent souvent que bien formellement aux exigences que la loi organique du 15 avril 2009 pose à leur sujet. Mais c’est au moins une aide à la décision, un éclairage qui permet, justement, de soulever d’autres questions.

On peut regretter, par ailleurs, l’absence des avis d’organismes consultatifs, avis qui auraient été obligatoires, pour certains d’entre eux, s’il s’était agi d’un projet de loi. Certes, la rapporteur, Mme Chapdelaine, a auditionné un certain nombre d’acteurs et nul ne conteste sa bonne volonté. Mais où sont les auditions des associations familiales ? Enfin, les avis formels de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), celui du Conseil supérieur de l’adoption, ou encore du Haut conseil à la famille, eussent été de précieuses contributions versées à la proposition de loi.

Enfin, l’absence d’avis, même jalousement gardé secret, du Conseil d’État est à déplorer sur des matières aussi juridiques et sensibles que le droit de la famille et le code civil.

Il est sans doute peu probable – encore que ?! – que le Conseil ait adressé un avis de rejet au Gouvernement, mais, au moins, il aurait pu améliorer des rédactions maladroites ou ambigües (et le texte en contient !), mettre en garde contre les imperfections, bref, améliorer le texte initial.

Ce regret est d’autant plus marqué que la majorité n’a pas souhaité saisir ledit Conseil d’État d’un examen particulier comme le lui permet la révision constitutionnelle depuis 2008 ! Exit donc l’avis juridique de cette haute assemblée, ce qui est fort préjudiciable.

Sur le fond, d’autres critiques sont à soulever.

Nul ne conteste que la famille, comme le rappelle l’exposé des motifs, a connu des évolutions importantes au cours des dernières années. Divorces, séparations, recomposition des familles, sont des faits établis. Et sans doute le droit de la famille doit-il s’adapter à ces « nouvelles configurations familiales », et ce, dans l’intérêt de l’enfant. On notera d’ailleurs que cette dernière décennie, le droit de la famille a été ponctué d’évolutions législatives majeures, en 1999, avec le PACS, en 2002, avec la loi qui a consacré juridiquement le principe de coparentalité, la place de la médiation familiale et la possibilité de résidence alternée, sans oublier la loi relative au nom de famille, celle relative à l’accès aux origines personnelles ou, bien sûr, la loi dite « Taubira » de 2013 avec le mariage et l’adoption pour les personnes de même sexe.

Mais si la famille, les familles, évoluent, il ne faut quand même pas oublier que près de 90 % des enfants ne vivent pas dans une famille recomposée et que près de 75 % d’entre eux vivent avec leur père et mère. L’évolution de la famille est certes là mais il y a quand même lieu de la relativiser au vu de ces chiffres.

C’est ce qui doit donc nous amener à modifier avec une grande prudence le droit existant. Là, le bât blesse.

Sous couvert de modifications pragmatiques – et certaines le sont, en effet, reconnaissons-le sans difficultés – des orientations majeures sont données.

La proposition de loi doit s’analyser au regard des rapports existants, depuis 2008, au début du débat sur le statut du beau-parent – on pense au rapport Versini – en passant par celui du groupe de travail présidé par la sociologue Irène Théry, qui a été rendu public le 9 avril 2014.

Or, celle-ci n’a jamais caché son militantisme pour la reconnaissance d’une pluri-parentalité et d’une recomposition du modèle familial actuel.

Ainsi, par exemple, en supprimant la notion « de préférence dans sa parenté » à l’article 11, un de ceux relatifs à l’autorité parentale, le texte affirme bien l’emprise du lien social sur le lien biologique. Désormais, le juge pourra confier un enfant à un adulte tiers de façon « ordinaire », sans même chercher à privilégier la famille existante. Ce qui est une exception, légitime aujourd’hui, pourrait devenir le droit commun demain.

Oui, pourquoi exclure cette préférence, cette référence familiale, alors même que le droit actuel permet déjà le recours à un tiers, si ce n’est une volonté délibérée d’afficher un changement ? Car, en effet, si cela ne change rien, comme je l’ai entendu, pourquoi persister dans la voie de ce changement signalé à l’article 11 ? Sauf à bien entendre ce que nous a dit notre collègue Erwann Binet, en commission des lois, le mardi 6 mai : « ce texte s’inscrit dans la suite logique de la loi Taubira de 2013 sur le mariage » ? Sommes-nous alors toujours dans l’intérêt de l’enfant, comme l’affiche la proposition de loi, ou plus dans l’intérêt des adultes qui parfois sont parents, parfois sont beaux-parents, parfois sont des tiers ?...

On a bien là l’esquisse d’un nouveau modèle familial, déjà présenté au cours des débats de 2013 sur le mariage des couples de même sexe.

Des outils juridiques seront proposés, par ailleurs, comme le « Mandat d’éducation quotidienne » (MEQ). Très bien. Mais faut-il rappeler qu’il est déjà possible pour un parent, dès aujourd’hui, d’autoriser un tiers de bonne foi à accomplir un acte concernant son enfant (aller à l’école, chez le médecin…) et que la loi de 2002 a déjà instauré une « délégation-partage » ?

Avant de créer du droit, du droit nouveau, ne pourrait-on pas mieux faire connaître l’existant mais en évitant quelques lectures inutiles que le texte vise à rajouter lors de la cérémonie du mariage civil ? D’autres points mériteront d’être éclaircis au cours des débats, ou précisés comme ceux qui portent sur la médiation familiale. Ils ne font l’objet d’aucun refus de principe dans tous les cas. Bien au contraire. Veillons cependant à rendre efficace le dispositif sans en attendre La solution à toutes les questions posées entre le couple et les parents. Veillons, enfin, à faire confiance à nos magistrats et aux différents juges. Ils doivent garder toute leur place dans les procédures.

En conclusion, les bonnes intentions affichées sont reconnues au texte. Mais, en creusant et au vu des premiers débats en commission des lois, on peut s’inquiéter d’une fragilisation de l’autorité parentale.

Nous verrons alors en séance publique, dans l’hémicycle, quel sort sera réservé à nos amendements, la teneur des débats, pour arrêter définitivement notre vote avec pour seul objectif que l’intérêt de l’enfant soit respecté.

S’il importe de faciliter la vie des parents, des adultes, c’est le critère de l’intérêt supérieur de l’enfant qui doit en, en effet, en l’espèce, ici, nous guider.

DISCUSSION GÉNÉRALE

Au cours de sa séance du mardi 6 mai 2014, la Commission a examiné la proposition de loi de M. Bruno Le Roux, Mme Marie-Anne Chapdelaine, M. Erwann Binet, Mme Barbara Pompili, M. François de Rugy et Mme Véronique Massonneau et les membres du groupe Socialiste, républicain et citoyen et apparentés relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant (n° 1856).

Après l’exposé de la rapporteure, une discussion générale s’est engagée.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie. Je suis heureuse d’être accueillie par votre Commission pour l’examen d’un texte qui comporte des avancées importantes. Je tiens à saluer le travail effectué par la rapporteure et à rappeler celui qu’a accompli Mme Bertinotti, ma prédécesseure, dans la continuité de laquelle je m’inscris.

Cette proposition de loi est centrée sur l’intérêt de l’enfant, ce qui est, j’en suis convaincue, la bonne porte d’entrée. Les décisions relatives à l’autorité parentale après une séparation devraient toujours être prises dans l’intérêt de l’enfant, cet intérêt que notre Constitution reconnaît comme « supérieur ». Pourtant, le droit existant organise surtout l’autorité des parents. Or l’autorité est sans doute un droit, mais d’abord et avant tout un devoir et une responsabilité des parents envers leurs enfants – responsabilité éducative et financière, mais aussi responsabilité de maintenir le lien avec les enfants après la séparation du couple conjugal et responsabilité de se parler pour prendre les grandes décisions.

Dès ma prise de fonctions, j’ai procédé, en lien étroit avec la garde des Sceaux et tous mes collègues du Gouvernement, à un examen attentif de ce texte. J’ai rencontré et écouté les acteurs institutionnels et les associations qui représentent celles et ceux auxquels s’appliqueront ses dispositions, notamment le président de l’Union nationale des associations familiales (UNAF), puis l’ensemble des fédérations qui composent l’UNAF et la quasi-totalité des associations qui agissent dans le champ familial, de l’Association des parents gays et lesbiens à la Manif pour tous, de l’Inter-LGBT à la Fédération syndicale des familles monoparentales, du collectif Avenir pour tous à SOS mamans et à Abandon de famille. J’ai cherché avec eux à prolonger le travail que vous avez fait, madame la rapporteure, pour dégager des convergences sur ce texte.

C’est pourquoi je souhaite que nous travaillions ensemble à l’enrichissement et à la clarification de certaines dispositions. Permettez-moi d’esquisser quelques axes autour desquels nous pourrons avancer et qui sont pour vous, je le sais, des priorités.

Tout d’abord, la situation des femmes victimes de violences doit être prise en compte dans presque chaque article. Ce texte doit aider les parents sans créer de difficulté supplémentaire pour ces femmes et pour leurs enfants. J’accueille très positivement les amendements que vous avez déposés à ce sujet et souhaite que toute l’attention nécessaire leur soit portée.

Ensuite, il convient d’assurer l’équilibre du texte. Si l’on crée de nouvelles sanctions, elles doivent être symétriques et s’appliquer aux deux parents. Ainsi, l’article 5 prévoit une amende civile qui sanctionnera le parent qui fait obstacle à l’exercice conjoint de l’autorité parentale ou celui qui ne respecte pas les décisions concernant le temps d’accueil. On pourra ainsi sanctionner les non-représentations d’enfant, mais aussi les comportements consistant à ne pas exercer ce qu’on appelle aujourd’hui le droit de visite et d’hébergement. Je me réfère à ce que Mme Chapdelaine appelle « les enfants à la fenêtre », ces enfants qui attendent en vain, week-end après week-end, que leur père – car c’est souvent du père qu’il s’agit – vienne les chercher. Venir chercher son enfant un week-end sur deux, comme cela est prévu dans la majorité des organisations familiales après une séparation, n’est ni une faculté, ni une option, ni un droit : c’est un devoir. Nous aurons l’occasion d’y revenir plus en détail au cours de l’examen du texte.

Je suis très favorable au principe de la double résidence et du double domicile. C’est un acte fort que de poser qu’un enfant est chez lui chez chacun de ses parents. Mais ce principe n’est pas sans soulever quelques questions. D’abord, comme l’a indiqué la rapporteure, il faut rappeler qu’il ne s’agit en aucun cas d’imposer la résidence alternée paritaire par défaut. C’est une évidence pour nous, qui travaillons sur ces mesures depuis un certain temps, mais c’est un sujet d’inquiétude pour plusieurs associations que j’ai rencontrée. On peut nourrir des doutes sur la bonne compréhension du dispositif par tous les acteurs concernés. Nous ne devons donc pas hésiter à apporter les clarifications nécessaires. L’intention du législateur devra être très claire tout au long de la discussion du texte.

L’article 4 rend nécessaire l’accord exprès de l’autre parent pour le changement d’établissement scolaire ou de domicile de l’enfant, dans la mesure où ce changement a un impact sur les modalités d’accueil par l’autre parent. Il faut rappeler qu’il revient toujours au juge, en cas de désaccord, d’arbitrer et de statuer dans l’intérêt de l’enfant. J’ajoute que le changement de domicile visé n’est pas seulement celui du parent chez qui l’enfant réside le plus de temps : le changement de domicile du parent qui a le droit de visite et d’hébergement est aussi concerné. Quand un parent qui accueille l’enfant le week-end déménage loin du parent chez qui l’enfant est le plus souvent hébergé, cela a une conséquence sur sa capacité à exercer ledit droit. Nous entendons bien inclure dans le champ du texte les deux types de déménagement.

Enfin, je partage la volonté de la rapporteure de développer la médiation familiale pour apaiser les conflits et parvenir à des solutions consensuelles. Dans cet esprit, je suis favorable aux articles 17 et 18, qui autorisent le juge à enjoindre aux parents de se rendre à des séances de médiation familiale. Toutefois, le texte doit affirmer clairement que la médiation n’est pas appropriée dès lors qu’il y a eu violence à l’encontre d’un des parents – les victimes étant, dans la quasi-totalité des cas, des femmes. Nous devons aussi veiller à ce que le nombre de séances imposées par le juge soit limité, pour ne pas retarder indûment le dénouement de situations souvent difficiles pour les familles.

Je tiens ce texte pour un texte d’apaisement : apaisement des parents après une rupture conjugale, apaisement autour de l’intérêt de l’enfant, apaisement du Parlement et du pays sur un sujet commun à tous les individus, la famille.

M. Jean-Frédéric Poisson. M. Alain Vidalies, de retour parmi nous, se souvient certainement de l’échange que nous avions eu dans l’hémicycle au sujet de l’utilisation du véhicule de la proposition de loi pour présenter des textes importants. On nous avait promis un grand projet de loi sur la famille, avec un rapport à la clé pour nourrir les débats du Parlement – ledit rapport a du reste été publié et son auteur a reçu récemment la Légion d’honneur –, mais ce projet, on est en train de nous le vendre à la découpe et le présent texte est apparemment la première traduction de ces grandes intentions familiales.

La première utilité du véhicule de la proposition de loi est de l’exonérer de différents avis qui nous auraient été précieux : le Conseil d’État ne s’est pas prononcé, aucune étude d’impact n’a été réalisée. Je ne remets pas en cause le travail de la rapporteure et de la secrétaire d’État, mais il aurait été intéressant que nos débats soient alimentés par les expertises généralement effectuées dans le cadre de l’étude d’impact. J’aimerais savoir ce que seront les conséquences effectives du texte sur la vie quotidienne. Aujourd’hui encore, je ne le vois pas très bien !

Mais la proposition de loi me semble être dans la ligne de ce que votre Gouvernement défend depuis le début de la législature, madame la secrétaire d’État, à savoir une forme de prépondérance accordée à la permanence des liens sociaux et affectifs par rapport aux liens biologiques, une volonté de faire droit aux liens affectifs et de l’écrire dans la loi, avec tout le formalisme – et, partant, toute la difficulté – que cela suppose. Lorsque l’on cherche à écrire le droit en « collant » de façon trop précise aux situations particulières, il perd de sa puissance ou se complexifie. Nous le verrons lors de l’examen des articles. La notion d’« acte important », à l’article 4, me semble notamment plus susceptible de nourrir des contentieux à répétition que de clarifier quelque situation que ce soit.

Au surplus, la très grande majorité des situations visées par le texte sont déjà réglées par les conventions entre les personnes. Je ne nie pas que des difficultés se posent à telle ou telle occasion, mais nous devons faire très attention à toute modification du code civil en la matière. Beaucoup de familles vivent sous le régime de ces conventions qui organisent le partage ou la délégation de l’autorité parentale et qui sont d’une grande simplicité – les écoles, les centres aérés, les hôpitaux le savent bien. Je doute de l’utilité d’une formalisation de ces questions. On créera probablement davantage de complexité, soit le contraire du but poursuivi.

M. Erwann Binet. Cette proposition de loi doit s’entendre comme un prolongement des transformations législatives qui ont déjà accompagné les évolutions des familles en France.

Le couple lui-même, et l’égalité de droit instaurée en son sein, est un des axes essentiels de ces transformations. Le mouvement commence en 1938, avec la suppression de la puissance maritale – l’autorité du mari sur son épouse –, de l’incapacité juridique de la femme mariée ainsi que de son devoir d’obéissance. Il se poursuit en 1965 avec la réforme des régimes matrimoniaux, qui permet aux Françaises de choisir une profession ou d’ouvrir un compte en banque sans le consentement de leur mari. La loi du 4 juillet 1970 supprime les notions de « chef de famille » et de « puissance paternelle » au profit de celle d’« autorité parentale ». En 1975, le droit au divorce est véritablement consacré, avec l’adjonction, au divorce pour faute, du divorce par rupture de la vie commune et du divorce par consentement mutuel. L’évolution du divorce repose sur l’idée maîtresse que l’on ne peut forcer un époux à rester dans le mariage mais que, au-delà du couple conjugal, le couple parental continue à exister. Le principe de coparentalité est instauré en 1987. La loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale pose le principe de l’exercice commun de l’autorité parentale, en instaurant notamment la résidence alternée.

L’autre axe d’évolution est celui de la filiation. Les réformes successives ont imposé l’émergence de l’intérêt de l’enfant à l’encontre des inégalités et des pénalités que devaient parfois subir les enfants – dits « adultérins », puis « naturels » – lorsque ceux-ci n’avaient pas l’heur d’être nés dans le mariage.

Par cette proposition de loi, nous interrogeons à nouveau le législateur sur l’adaptation de notre droit aux familles d’aujourd’hui. La réalité des familles de 2014 n’est pas simple à appréhender tant elle est plurielle. Nous avons déjà débattu de cette question il y a un an, lors de l’examen du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe. Rappelons seulement quelques chiffres : plus d’un enfant sur deux naît en dehors du mariage, près de 3 millions d’enfants vivent au sein de familles monoparentales, 130 000 divorces sont prononcés chaque année et 1,5 million d’enfants vivent avec un parent et un beau-parent au sein de plus de 700 000 familles recomposées. Dans une tribune cosignée par la rapporteure et par notre collègue Paul Molac, nous écrivions il y a quelques mois : « Sauf à marginaliser un très grand nombre de compatriotes et leurs enfants, il n’est plus possible de faire tourner nos références autour d’un seul modèle, celui de la famille stable, indestructible et biologique. » La société se réforme elle-même. Elle n’attendra jamais la loi pour évoluer. Mais le silence de la loi ouvre la porte aux dérives et aux risques. L’évolution du droit civil doit donc se poursuivre pour prendre en compte les transformations sociologiques de la cellule familiale. Des pères ont manifesté, parfois de manière spectaculaire, leur souhait d’une plus grande égalité de traitement des demandes du couple séparé. Des mères soulignent souvent l’asymétrie entre la pénalisation forte de la non-représentation d’enfant et l’absence de contrainte pour celui qui n’exerce pas son droit de visite et d’hébergement.

De même, derrière le développement de la médiation familiale, c’est la mise en œuvre de la coparentalité après la séparation qui est interrogée. L’idée que le couple parental doit survivre au couple conjugal impose qu’un environnement favorable au dialogue s’établisse au sein de couples dont les relations sont susceptibles de rester conflictuelles.

Enfin, le développement des familles recomposées pose la question de l’inexistence juridique de la place du beau-parent et de ses liens avec ses beaux-enfants.

Le législateur a décidé de remiser au grenier de l’histoire du droit de la famille les notions de puissance maritale, de puissance paternelle, d’enfant adultérin, de chef de famille. Aujourd’hui, ces évocations nous font sourire tant elles semblent désuètes. Avec cette proposition de loi, je ne doute pas que d’autres postulats largement usités quoique très décriés les rejoindront. C’est le cas du droit de visite et d’hébergement, notion totalement décalée et très mal vécue lorsqu’elle figure dans le prononcé du jugement.

Le texte permet d’avancer un peu plus dans le prolongement des lois de 1987, 1993 et 2002. Il établit dans le code civil une égale considération des parents après leur séparation, tant au regard de l’enfant qu’au regard de la société, en prévoyant la double résidence des enfants. Il rappelle la nécessité et les conditions d’expression de l’accord des deux parents au sujet des décisions concernant l’enfant, tout en permettant de prendre appui sur la médiation familiale. Il permet également la reconnaissance de la place des beaux-parents. Ceux-ci s’investissent humainement, affectivement, parfois financièrement, dans l’éducation de leurs beaux-enfants. Il est devenu irréaliste de les ignorer.

Le groupe SRC défendra plusieurs amendements au cours de nos débats. Je veux saluer le long travail mené par notre rapporteure depuis plusieurs mois, d’abord dans la perspective d’un projet de loi relatif à la famille aux côtés de Mme Dominique Bertinotti, puis dans le cadre de cette proposition de loi cosignée par les membres du groupe SRC et par plusieurs membres du groupe écologiste. Nous avons constaté que les grands principes de ce texte recueillaient un large consensus. Il faut souligner à cet égard l’apport constructif et consensuel de l’ensemble des associations familiales, même s’il est difficile de répondre favorablement à l’ensemble des attentes, qui sont parfois contradictoires.

Il n’y a pas de politique familiale sacrée ou intangible. De même, il n’y a pas un modèle exclusif de famille. Le groupe SRC est convaincu de la nécessité d’apporter aux familles toujours plus de sécurité juridique, toujours plus d’égalité et toujours plus de place dans l’intérêt de l’enfant. C’est le sens de cette proposition de loi que nous sommes fiers de porter.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je précise, monsieur Coronado, que vous n’êtes pas cosignataire de cette proposition de loi, contrairement à votre collègue du groupe écologiste Mme Véronique Massonneau, membre de la commission des Affaires sociales, que nous accueillons avec plaisir parmi nous.

M. Sergio Coronado. Je vous sais gré de l’avoir rappelé, monsieur le président.

Nous vivons une grande métamorphose – une « révolution », avait coutume de dire Mme Bertinotti lorsqu’elle était chargée de la famille – dont les effets, on le voit ici, peuvent déranger. Depuis les années 1970, la génération du baby-boom incarnait cette métamorphose dont elle fut le moteur pendant plusieurs décennies. C’est avec l’arrivée à l’âge adulte des baby-boomers que l’on a vu se développer la contraception, l’émancipation sexuelle, l’union libre, la famille hors mariage, les couples dont les deux membres travaillent, l’égalité des sexes, les séparations et les divorces, les familles monoparentales et recomposées. Une nouvelle génération d’adultes, héritière des bouleversements familiaux du dernier tiers du XXe siècle, fait émerger de nouvelles problématiques et porte de nouvelles aspirations. En témoignent la multiplication des couples mixtes, dans un monde de plus en plus globalisé, le recours croissant aux nouvelles technologies de la procréation, le développement significatif de l’homoparentalité, l’aspiration à une implication plus décisive des hommes dans la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle – même si les inégalités de genre, notamment dans l’espace domestique, demeurent fortes –, des formes nouvelles d’exercice concret de la paternité, ou encore un questionnement renouvelé des identités masculine et féminine.

Les contours de la filiation, des origines et de la parentalité se redessinent. Le législateur est souvent questionné et appelé à trancher. Le gouvernement précédent avait promis une grande loi relative à la famille. M. Poisson vient de relater, de la manière dont il l’a vécu, le feuilleton qui s’en est suivi. Mme Bertinotti avait mis en place un groupe de travail et commandé en octobre 2013 un rapport sur les nouvelles géographies familiales. Ce document a finalement été rendu public le mardi 8 avril 2014, mais sur le site de l’École des hautes études en sciences sociales et non pas sur un portail gouvernemental. Bref, le projet de loi sur la famille a été sans cesse repoussé. Des dispositions nouvelles en matière de procréation médicalement assistée (PMA) furent dans un premier temps annoncées par la ministre chargée de la famille et par le Premier ministre, puis écartées malgré les promesses faites devant la représentation nationale.

Nous étudions aujourd’hui un texte d’origine parlementaire. D’habitude, on se félicite des initiatives du Parlement en matière législative. En l’occurrence – et je ne veux porter aucun jugement de valeur sur la qualité du travail de mes collègues –, ce texte est la manifestation d’un renoncement du Gouvernement à sa volonté réformatrice, assumé et revendiqué encore tout à l’heure dans l’hémicycle au nom de l’« apaisement ». C’est le fruit, j’en suis persuadé, d’une mauvaise analyse de l’état de la société française face à la question familiale.

Il n’en reste pas moins que la proposition de loi aborde des situations familiales importantes. Elle vise à renforcer l’exercice conjoint de l’autorité parentale, à reconnaître toute leur place aux tiers, en particulier aux beaux-parents, et à développer la médiation familiale. Les amendements que je présenterai avec Véronique Massonneau portent notamment sur la filiation au sein des couples homosexuels, en particulier les couples de femmes. Ce n’est pas, je tiens à le souligner, une façon détournée d’aborder la question de la PMA. Le sujet mérite un temps de débat qui lui soit propre. C’est pourquoi le groupe écologiste a décidé aujourd’hui même de déposer une proposition de loi visant à ouvrir la PMA aux couples de femmes, afin de l’inscrire à l’ordre du jour de la niche parlementaire dont il disposera en janvier prochain. Les autres amendements portent sur la prise en compte de la parole de l’enfant, notamment concernant la garde. À cet égard, je tiens à saluer l’ouverture d’esprit de Mme la rapporteure et le travail qu’elle a accompli avec les écologistes. Une telle coopération entre nos groupes est rare sur ces questions difficiles.

Mme Marie-Noëlle Battistel. La délégation aux Droits des femmes a demandé il y a quelques jours seulement à être saisie de ce texte, comme elle l’avait été de la proposition de loi relative à l’autorité parentale en 2001. Je remercie le président Urvoas d’avoir répondu positivement à notre demande.

Après avoir auditionné plusieurs associations, la secrétaire d’État chargée de la famille, la mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF), ainsi que des magistrats et des avocats, notre délégation a adopté cet après-midi le rapport que j’ai présenté, qui comporte une douzaine de recommandations.

Cette proposition de loi, qui a pour objectif d’adapter le droit civil aux nouvelles configurations familiales, est en effet un texte d’apaisement, mais elle appelle des améliorations dans la prise en compte des violences intrafamiliales. Je rappelle qu’une femme sur dix est concernée par les violences conjugales, qu’une femme meurt tous les deux jours à la suite de violences infligées par son conjoint ou son compagnon et que vingt-six enfants ont été tués en 2012. Nous venons de prendre connaissance des amendements déposés. En fonction de ceux qui seront votés, la délégation aux Droits des femmes présentera les siens lors de la réunion organisée au titre de l’article 88 du Règlement, car elle n’a pas eu le temps de le faire en temps et en heure pour cette séance.

M. Philippe Houillon. Comme l’a dit Jean-Frédéric Poisson, il est regrettable, alors que nous ne modifions rien de moins que le code civil, que nous n’ayons ni étude d’impact ni avis du Conseil d’État. Sans contester qu’il faille traiter certains sujets, je trouve que la proposition de loi leur donne des réponses rigides, qui seront des sources évidentes de contentieux.

Mme la secrétaire d’État parle d’un texte d’apaisement. Mais alors, sachant la difficulté pratique qu’il y a à trouver des équilibres dans les rapports familiaux, pourquoi commencer par instaurer une amende civile ? Brandir ce chiffon rouge me semble être une erreur stratégique manifeste !

Je n’ai pas d’observations à formuler sur les dispositions relatives à l’état civil, sinon que certaines existent déjà.

Lorsque le texte prévoit que les décisions importantes supposent un accord exprès des deux parents, il est évident que cet accord doit être préalable. Prenons l’exemple concret d’une personne faisant l’objet d’une mutation professionnelle dans un lieu éloigné : que doit-elle faire, sachant que cette mutation aura bien entendu des incidences sur l’exercice du droit de visite et d’hébergement ? Recueillir l’accord préalable de l’autre parent avant de répondre à son employeur ? Dans ces situations que l’on rencontre tous les jours, soit un accord est trouvé entre les parents et le juge aux affaires familiales entérine une nouvelle modalité d’exercice du droit de visite et d’hébergement, soit ce n’est pas possible et, comme on ne peut empêcher quelqu’un de répondre à une demande de mutation, c’est le juge qui tranche en cas de contentieux. Je ne nie pas qu’il y ait là un sujet de préoccupation, mais le texte introduit une rigidité qui sera à l’évidence source de contentieux. En effet, quelle sera la sanction du non-respect de l’accord exprès préalable ? Que se passe-t-il pour la personne qui n’obtient pas cet accord alors qu’elle doit répondre à la demande de mutation qui lui est imposée ? Lui infliger une sanction poserait quand même un problème ! Et, si l’on ne prévoit pas de sanction, autant laisser de la souplesse dans le dispositif.

Selon vous, madame la rapporteure, le texte n’érige pas en principe la résidence alternée.

Mme la rapporteure. La résidence alternée paritaire.

M. Philippe Houillon. Pourtant, il est écrit que « la résidence des enfants est fixée au domicile de chacun des parents ». C’est « à titre exceptionnel » que « le juge peut fixer la résidence de l’enfant au domicile de l’un des parents. Dans ce cas, il statue sur les modalités du droit de visite de l’autre parent. » Vous devrez nous expliquer en quoi il n’y a pas là un principe et une exception, sachant que, dans la pratique, la garde alternée est l’exception : elle requiert tant de conditions pour que l’intérêt de l’enfant soit préservé que ce n’est pas le cas le plus général. Tous les praticiens vous le diront.

Que l’on fasse des avancées, soit, mais de manière très prudente et certainement pas en érigeant en principe quelque chose qui ne correspond généralement pas à la réalité. L’enfant a besoin de stabilité. Or on observe qu’un certain nombre de gardes alternées ne durent pas, car les conditions qui doivent être idéales pour qu’elles fonctionnent – proximité, entente entre ses parents – ne résistent pas au temps.

En ce qui concerne le statut des beaux-parents, je ne nie pas, encore une fois, qu’il n’existe pas de sujet de préoccupation, mais convenez que votre dispositif est un peu rigide et compliqué et que ce sera une source importante de contentieux. Malheureusement, l’enfant est souvent pris en otage dans le conflit entre les parents bien après le divorce. Or, si un parent souhaite donner un mandat d’éducation quotidienne à son nouveau conjoint, il faudra que cela soit rédigé par acte sous seing privé ou par acte authentique. Ce formalisme hors de proportion avec la réalité provoquera des contentieux, puisqu’il est impossible de tout prévoir dans cet acte.

En outre, il s’agit de permettre d’exercer l’autorité parentale à un tiers qui n’en est pas le détenteur. Cela s’apparente davantage à une forme de délégation de l’autorité parentale qu’à un mandat ou un contrat pour l’exercer. Il me semble nécessaire d’approfondir la question.

Enfin, si toutes les démarches de médiation sont souhaitables lorsqu’elles permettent d’apaiser les conflits, je m’interroge sur la pertinence de l’injonction de médiation. Lorsque les personnes ne sont pas d’accord et que, en amont, différents intervenants ont déjà tenté de les mettre d’accord, je ne suis pas sûr que leur enjoindre de façon autoritaire d’aller se faire expliquer par un médiateur ce qu’est la médiation – puisque c’est à cela que cela reviendra – constitue la meilleure solution. Un peu plus de souplesse serait souhaitable.

Bref, la proposition de loi comporte beaucoup trop de rigidités qui n’iront pas dans le sens de l’apaisement mais seront au contraire source de contentieux, dans une matière où il y en a déjà beaucoup.

M. Jacques Bompard. L’éclatement d’une famille est dramatique à la fois pour le couple et pour les enfants. Cette proposition de loi ne s’intéresse qu’aux effets de l’éclatement, nullement aux causes. La société, donc l’État, est pourtant partie prenante dans les causes de ce phénomène. Alors que les familles éclatent si facilement, en si grand nombre et avec des dégâts de plus en plus importants, il me paraît extraordinaire que l’on se désintéresse des causes.

Ce n’est pas, je le sais, l’objet du texte, mais, à mes yeux, un bon législateur est un législateur modeste et prudent. Lorsqu’il prétend régler tous les problèmes par la loi, bien souvent, il ne fait que les aggraver.

La proposition de loi porte sur trois sujets : l’autorité parentale et son exercice lors des divorces, la promotion d’un nouveau modèle de la famille sociale accordant une place très élargie au tiers éducateur, la promotion de la médiation familiale pour régler les violences lors des divorces. Elle apporte deux thèmes dans le débat législatif : une imposition de fait du statut du beau-parent dans une vision très large et des facilitations pour les couples homosexuels mariés ou non mariés dans la délégation de l’autorité parentale.

Cependant, elle comporte plusieurs failles. Sa partie la plus problématique se situe en son chapitre II, qui veut consacrer « la place croissante prise par le tiers ». L’article 10 pose le grave problème de la parenté distributive. Contrairement à ce que prétend la proposition de loi, cette modification contribuerait à diluer encore plus l’autorité parentale du conjoint séparé. Par ailleurs, le mandat n’est pas assez complexe pour prémunir l’enfant du risque de la multiplication des intervenants, alors même qu’il conviendrait de lui éviter d’autres traumatismes. Enfin, avec la garde prioritairement accordée à la mère, cette disposition travaillera encore plus à la disparition de la figure du père dans notre société. Sans doute y a-t-il des enfants qui attendent leur père derrière la vitre, madame la secrétaire d’État, mais il y a aussi des pères qui ne peuvent exercer leur droit de visite et qui attendent derrière la vitre de leur voiture…

L’article 11 pose l’abandon de la préférence pour la famille biologique. On ne considère plus qu’une parenté sociale afin de continuer à saccager le modèle traditionnel d’éducation des enfants. On comprend également que cette disposition vise à simplifier l’exercice de l’autorité dans les couples homosexuels.

L’article 12 entre en contradiction avec l’article 372-2 du code civil, puisqu’un tiers pourrait effectuer des actes importants pour l’enfant avec la seule autorisation du juge. Par ailleurs, en cas de dispute entre le mandant et le tiers, l’article place les deux intervenants sur un pied d’égalité dans la saisine éventuelle du juge. Il marginalise donc le parent biologique.

L’article 14 donne la possibilité surréaliste de voir un tiers ayant été mandaté pour exercer l’autorité parentale conserver cette autorité alors que les parents voudraient la lui ôter. Par ailleurs, il force le juge à accepter les mandats sans prêter attention à l’intérêt supérieur de l’enfant.

Lors de sa visite au Vatican, Manuel Valls avait promis un apaisement avec les catholiques. Or cette proposition de loi est une nouvelle provocation. Alors que la famille devrait être le lieu de l’héritage, de l’éducation et de la continuité, le texte propose plus d’éclatement et la création d’une parenté distributive coupée de la réalité.

En multipliant les intervenants dans l’éducation des enfants, le groupe socialiste veut continuer à détruire la famille traditionnelle, processus déjà largement engagé avec la loi dite du mariage pour tous. Dans son chapitre Ier, la proposition de loi ne dit rien de la lutte contre l’explosion coûteuse et traumatisante des divorces.

Par ailleurs, le texte ne met jamais en avant l’intérêt supérieur de l’enfant mais plutôt la discussion entre adultes, qui serait la clé de toute solution. Les choses sont beaucoup plus compliquées ! Dans son message pour la paix, Benoît XVI a donné une définition de la famille traditionnelle : « La famille naturelle, en tant que profonde communion de vie et d’amour, fondée sur le mariage entre un homme et une femme, constitue “le lieu premier d’’humanisation’ de la personne et de la société”, le “berceau de la vie et de l’amour”. Aussi, est-ce avec raison que la famille est qualifiée de première société naturelle […] “qui constitue le fondement de la vie des personnes, comme le prototype de tout ordre social”. »

En forçant la société à changer de modèle familial, c’est donc bien vers la guerre et le désordre que les apprentis sorciers veulent nous amener. Imaginons un instant le traumatisme d’enfants qui pourraient avoir une infinité de tiers éducateurs au cours de leur existence !

Par ailleurs, les dispositions sont manifestement oublieuses des réalités humaines. L’article 372-2 du code civil tentait de préserver une place pour chacun des parents biologiques dans l’éducation des enfants. Avec votre texte, la disparition programmée de cette entente, pourtant nécessaire à l’éducation d’un enfant, est amorcée. Pis, on sait bien, au vu des statistiques, que c’est la disparition de la figure du père qui est organisée. Nous allons vers une société sans repères et sans figure paternelle, c’est-à-dire vers une société du chaos.

Ce texte établit la volonté du législateur de détruire l’ordre naturel en le remplaçant par un ordre contre-nature qui déstructure et l’individu et la société.

Mme Colette Capdevielle. C’est le plus souvent à l’occasion d’un litige familial douloureux que nos concitoyens découvrent le code civil, la justice et son fonctionnement, parfois ses dysfonctionnements. Le droit de la famille est un droit à part entière, technique et complexe. Les différents textes qui se succèdent depuis des années ont tous pour objectif d’apaiser les contentieux et d’encourager les parties à régler elles-mêmes les conflits qui peuvent les opposer en privilégiant la médiation familiale, qui doit rester un moyen et non une fin, et en réservant le recours au juge aux situations les plus complexes, notamment en cas de violences conjugales. Pour les autres, c’est-à-dire la majorité des couples qui se séparent, la loi n’apporte rien, car, fort heureusement, les parents parviennent à s’entendre sur les conditions de leur séparation. Il est donc fondamental que nos textes de loi s’écrivent dans un esprit de protection, d’apaisement et de responsabilité.

Madame la rapporteure, je vous ai déjà exprimé mes craintes sur certaines dispositions de l’article 4 et sur l’article 7, et je suis heureuse de constater que vous présentez des amendements. Les conséquences de l’article 4 ont-elles bien été mesurées, tant du point de vue de sa constitutionnalité que de son application pratique ? Je crains en particulier que les dispositions relatives aux actes importants et aux actes usuels ne soient à l’origine de nombreux contentieux. Elles imposent en effet au parent chez lequel vit l’enfant de solliciter systématiquement l’avis, l’autorisation et l’accord de l’autre parent pour tout acte de la vie quotidienne – loisirs, santé, pratiques sportives et culturelles, alimentation, choix vestimentaires.

Quant à la double résidence pour le mineur dont les parents sont séparés, elle peut être une grave source de désagréments pour l’enfant, dont elle compliquera le moindre acte de la vie quotidienne. L’intérêt de l’enfant ne se conforme pas à la perception subjective qu’en ont les parents ou le juge aux affaires familiales : il est d’abord garanti par la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant, qui sont identiques pour tous et identifiables en l’état des connaissances de la pédopsychologie et de la pédopsychiatrie. Il ne me paraît pas souhaitable de résoudre les questions liées au mode de résidence de l’enfant par une approche prétendument objective de l’intérêt de l’enfant.

Je m’interroge également sur la nécessité d’introduire une sanction dans cette matière, alors que le texte privilégie l’apaisement et la médiation. Que vient faire une amende civile en droit de la famille en 2014 ?

J’attends beaucoup de la discussion et des amendements qui pourront enrichir le texte en tenant compte de nos observations.

Mme Véronique Massonneau. Cette intéressante proposition de loi, qui aborde des sujets souvent sensibles, matière à polémique, marque une première étape dans l’évolution législative relative à la famille. Ainsi, la résidence alternée, telle que la prévoit l’article 7, permet un retournement symbolique de la pratique, en prenant en compte chaque situation particulière, dans le dessein de préserver l’intérêt de l’enfant au sein de chaque famille.

Toutefois, on ne peut cacher quelques déceptions face à certains oublis : les familles homoparentales sont absentes et le cas des enfants issus de PMA pratiquée à l’étranger n’est pas traité. L’examen des amendements que j’ai déposés avec Sergio Coronado sera l’occasion de combler ces lacunes.

Subsistent également quelques questions, qui concernent en premier lieu l’article 4. S’il est inspiré par l’intention louable de protéger un parent des violences de l’autre, il vise les crimes et les délits contre les personnes. Or ce champ d’application trop étendu risque de faire perdre des droits à un parent de manière disproportionnée. Ne serait-il pas opportun de le circonscrire plus précisément ?

Si l’un des parents est condamné pour des faits de violence à l’encontre de l’autre parent, ce dernier ne sera plus obligé d’obtenir son accord pour le changement de résidence ou d’établissement scolaire de leur enfant. Cette disposition de bon sens soulève néanmoins la question de la durée de la procédure judiciaire. S’il doit attendre une condamnation définitive, le parent victime des violences ne sera-t-il pas empêché d’effectuer ces actes importants aussi rapidement qu’il le souhaiterait ? Ne pourrait-on envisager que la mesure s’applique dès que la procédure est engagée ? Certes, le risque serait alors que de fausses déclarations permettent de ne pas tenir compte de l’avis du second parent, sans que celui-ci soit pour autant coupable d’un crime ou d’un délit. Quel dispositif peut-on envisager afin de protéger les parents réellement victimes d’un crime ou d’un délit tout en évitant les déclarations abusives ?

Les écologistes sont attachés à des solutions apaisées et concertées entre les parents, car l’intérêt de l’enfant passe par le dialogue. Si l’on peut espérer que la plupart des situations se régleront de bonne foi, des cas de blocage ne sont pas à exclure. Comment empêcher que l’obligation d’accord ne se transforme en droit de veto ? Comment gérer les absences de réponse du second parent ? Comment prévenir et régler les désaccords qui ne trouvent pas de solution par le dialogue ? Quels délais prévoir, notamment pour la saisine du juge ?

Enfin, je tiens à saluer le recours à la médiation familiale et la réaffirmation, au chapitre III, du processus amiable qui favorise un climat apaisé au sein des familles. En 2009, la médiation ne représentait que 3,6 % des affaires judiciaires en matière familiale. Pourtant, nous nous accordons tous à considérer que ces phases de dialogue contribuent à pacifier les conflits entre ex-conjoints. Au Québec, entre 2001 et 2006, 22 % des couples ont eu recours à des services de médiation et 82 % d’entre eux ont abouti à une entente. L’exemple québécois révèle les insuffisances du modèle français : les parents sont trop rarement informés et les mesures de médiation insuffisamment promues.

La médiation ne permet pas seulement d’atténuer les tensions néfastes pour l’enfant, mais de traiter à la source les conflits matériels – qui sont encore aujourd’hui à l’origine de 46 % des contentieux en matière familiale – et de régler la question cruciale du partage des charges et des avantages sociaux. Je me félicite donc de la volonté de généraliser la médiation. Mais des questions subsistent, notamment celles des moyens – humains et financiers. Pour certains, le coût des séances représente une barrière psychologique. Peut-on envisager la gratuité des premières séances, pour inciter les familles à recourir à la médiation ? Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous éclairer sur les moyens qui seront alloués à la mise en œuvre de la loi ?

Mme Cécile Untermaier. Depuis le vote de la loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de même sexe, l’opposition nous accuse régulièrement de vouloir détruire la cellule familiale. En témoignant au contraire de notre souci de la protéger, ce texte oppose un démenti formel à ces reproches.

La proposition de loi codifie ainsi à droit constant la définition de l’acte important en matière d’autorité parentale. Elle grave également dans le marbre législatif certaines pratiques, comme la reconnaissance de l’importance des beaux-parents dans l’éducation d’un enfant dont les parents sont séparés. Il me semble que le lien affectif compte autant, si ce n’est davantage, que le lien biologique, dès lors que l’intérêt de l’enfant est préservé.

J’ai toutefois quelques observations à formuler. Il est vrai qu’une étude d’impact fait défaut. Nous devrons trouver, à l’avenir, le moyen de combler cette lacune.

Ce texte apparaît d’abord comme une loi sur les couples séparés. Or on peut se demander ce qui, dans ces situations douloureuses, doit prévaloir : les préoccupations des parents ou l’intérêt des enfants ? La loi n’a pas à être une thérapie de couple ! Les premières victimes des séparations, ce sont les enfants. Dès lors, c’est encore et toujours l’intérêt de l’enfant, et lui seul, qui doit primer, et nous devons veiller à ce que la loi ne mette pas trop l’accent sur les préoccupations parentales. Certains amendements répondent à cette exigence.

La proposition de loi dit beaucoup trop de choses au juge. Nous devons faire confiance à l’institution judiciaire et ne pas ajouter à la loi des dispositions qui coulent de source. Ainsi, l’article 19 précise que « le mineur est entendu d’une manière adaptée à son degré de maturité ». J’imagine l’accueil que le juge réservera à cette disposition…

Enfin, s’il faut soutenir et privilégier le développement de la médiation, elle ne constitue pas la panacée. Il faut être conscient des limites de cet outil transactionnel et être vigilant quant aux garanties entourant sa mise en œuvre. Nous devons appeler l’attention du Gouvernement sur les besoins des services de la justice dans ce domaine.

M. Bernard Gérard. La proposition de loi n’hésite pas à user de la menace en créant une amende civile destinée à sanctionner le parent qui a « fait délibérément obstacle de façon grave ou renouvelée aux règles de l’exercice conjoint de l’autorité parentale prévues à l’article 372-1 en empêchant l’autre parent d’exercer ses prérogatives […] ». Le texte ajoute, de manière bien inutile, que le montant de l’amende sera proportionnel à la gravité de l’entrave et aux facultés du parent. L’idée est évidemment de sanctionner des comportements autres que le non-respect des périodes de résidence chez l’autre parent. On pense au fameux syndrome d’aliénation parentale.

Si l’on comprend bien le souhait de donner aux juges aux affaires familiales des moyens de pression pour inciter les parents à exécuter les décisions, on peut néanmoins se demander quels comportements seront visés et comment sera caractérisée leur gravité. On peut surtout douter que la menace d’une sanction pécuniaire soit de nature à influer sur des agissements que chaque parent estime, en toute bonne foi, conforme à son bon droit comme à l’intérêt de l’enfant. Le syndrome d’aliénation parentale, s’il existe, est une véritable pathologie dont il est illusoire de penser qu’elle puisse céder à la menace d’une amende civile.

L’autre innovation en matière de sanction est la contraventionnalisation de la non-représentation d’enfant lors de sa première commission. Un système d’amende forfaitaire est même prévu pour cette contravention de quatrième classe. Seule la réitération de l’infraction rendrait son auteur passible des tribunaux correctionnels. Le principe de l’amende forfaitaire et, de manière plus générale, de la contraventionnalisation me paraît tout à fait inopportun. Le non-respect du droit de visite ne peut pas être assimilé à une infraction au code de la route, dont la matérialité suffit à justifier la répression. L’audience correctionnelle et la menace d’un emprisonnement sont des moyens indispensables pour que le parent prenne conscience de l’illicéité de son comportement. Ils s’ajoutent au dialogue, évidemment essentiel pour trouver des solutions sur ces sujets délicats. Et, même si les moyens de défense sont limités, ils existent. Enfin, certaines circonstances peuvent justifier le défaut de remise de l’enfant à l’autre parent. Chacun connaît des exemples de parents qui se trouvent dans des situations désespérées. Sans les excuser, on peut à tout le moins les écouter et ne pas les soumettre à un système de sanction automatique.

Enfin, alors que c’est parfois la volonté de l’enfant qui constitue un obstacle, la solution consistant à infliger une amende contraventionnelle au parent impuissant me semble manquer d’humanité, même si je sais que tel n’est pourtant pas le souhait des auteurs de la proposition de loi.

Mme Catherine Coutelle. La délégation aux Droits des femmes, comme la commission des Lois, est soucieuse de légiférer de manière cohérente. Or, en 2010, nous avons adopté à l’unanimité la loi relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, qui comportait une disposition supprimant la médiation dans les cas de violence. Cette disposition n’est pas rappelée dans la proposition de loi.

De même, le projet de loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes comprend un certain nombre de mesures relatives aux violences. Enfin, le Sénat a adopté le projet de loi permettant la ratification de la convention d’Istanbul dont l’article 31 prévoit que tous les textes relatifs à la famille doivent prendre en compte les violences à l’égard des femmes et des enfants. Ce texte ne satisfait pas suffisamment à cette exigence.

Les amendements présentés apportent cependant des améliorations qui sont attendues, si l’on en juge par l’émotion qu’a suscitée le texte auprès des associations de victimes de violences, des avocats et des magistrats. À cet égard, je regrette que les auteurs de la proposition de loi n’aient pas entendu la MIPROF.

M. Sébastien Denaja. Il faut rendre hommage au travail qu’a effectué pendant près de deux ans Dominique Bertinotti au service des familles – de toutes les familles –, au service des enfants – de tous les enfants – et au service de toutes les manières de « faire famille » – même si l’expression a pu hérisser certains.

Oui, monsieur Poisson, nous préférons les liens d’affection, d’amour, oserais-je même dire, au lien biologique. C’est aussi ce qui différencie la gauche et la droite. Le Gouvernement a fait part de sa volonté d’apaisement.

M. Guy Geoffroy. Vous n’en prenez pas le chemin !

M. Sébastien Denaja. Il s’inscrit ainsi dans la continuité de son prédécesseur qui avait œuvré pour apaiser les enfants et les familles victimes de discrimination. La présente proposition de loi poursuit ce travail au service de l’intérêt des enfants. La priorité du quinquennat de François Hollande est la jeunesse et qui dit jeunesse dit également enfance.

Je tiens à saluer le travail de la rapporteure, tout en regrettant l’absence d’étude d’impact et d’avis du Conseil d’État.

Je souhaite, pour une fois, répondre à notre collègue Jacques Bompard qui a cité Benoît XVI et le mythe d’une famille traditionnelle fantasmée. Pour ma part, je préfère Michel Serres qui rappelait récemment que la famille traditionnelle, la famille catholique, est la famille adoptive. Sous le contrôle de M. Poisson, et sans provocation et en toute laïcité, il me semble que Joseph n’était que le père adoptif de Jésus.

Avec cette proposition de loi, en dépit de la modification du dispositif, le Gouvernement respecte sa parole. Les promesses sur la question cruciale de la résidence sont tenues. Pour avoir auditionné tous les acteurs concernés en tant que rapporteur du projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes, je peux témoigner de l’extrême acuité et sensibilité du sujet. L’amendement qui avait défrayé la chronique lors du débat sur ce texte au Sénat, à l’initiative du groupe écologiste, en est la preuve. En posant le principe de la double résidence, vous proposez une sortie par le haut, respectueuse de la primauté de l’intérêt de l’enfant. À cet égard, il serait peut-être utile de modifier le titre de la proposition de loi en plaçant les termes « intérêt de l’enfant » avant ceux d’« autorité parentale ». Ce changement peut paraître cosmétique, mais les mots, parfois, ont un sens.

Je n’ai pas de réserves sur les intentions du texte, je les comprends et les partage pour l’essentiel. Toutefois, j’ai moi aussi des inquiétudes à propos de l’article 4 et des risques d’inconstitutionnalité que, en l’absence d’étude d’impact, il me semble nécessaire d’exposer. L’accord exprès requis en cas de changement de domicile d’une autre personne, qui n’est pas le parent, peut poser une difficulté dont le Conseil constitutionnel pourrait être saisi, y compris à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité. Êtes-vous en mesure de me rassurer, car je ne souhaite pas voir des décisions de justice fragilisées par une censure constitutionnelle ? Pensez-vous que l’article 4 passera sous les fourches caudines du contrôle de constitutionnalité, notamment au regard de la liberté d’aller et venir ?

La double résidence soulève également une question fiscale. Aujourd’hui, la part fiscale pour l’enfant, fondée sur la résidence de celui-ci, est attribuée au parent qui coche la case idoine dans la déclaration d’impôt. En cas de double résidence, qui cochera la case ? Il ne s’agit pas d’un sujet mineur.

À l’instar de Mme Massonneau et de Mme Coutelle, je considère que les dispositions sur les violences sont insatisfaisantes. On ne peut pas attendre une condamnation définitive pour se dispenser de l’accord du parent auteur de l’infraction. En cas de violences faites aux femmes ou aux enfants, le principe de précaution doit prévaloir. Or, si j’ai bien lu le texte, l’accord n’est pas requis dans le seul cas où le parent est condamné.

Comme Mme Capdevielle, j’attends beaucoup de la discussion sur ces différents points.

La Commission en vient à l’examen des articles de la proposition de loi.

EXAMEN DES ARTICLES

Chapitre Ier
Dispositions relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale

Le chapitre premier de la proposition de loi vise à clarifier les règles applicables à l’exercice conjoint de l’autorité parentale, afin d’en assurer le respect entre parents séparés et de permettre aux enfants de conserver une relation équilibrée avec chacun de leurs parents.

Avant l’article 1er

La Commission est saisie de l’amendement CL12 de Mme Colette Capdevielle.

Mme Colette Capdevielle. Alors que M. Denaja suggère d’inverser l’ordre des termes d’autorité parentale et d’intérêt de l’enfant dans le titre de la proposition de loi, je propose pour ma part de les remplacer.

L’autorité est un concept important, mais elle n’est qu’un élément parmi d’autres de la responsabilité des parents et doit être mise au service de la responsabilité, qui est une notion plus large, plus progressiste et plus conforme à l’approche contemporaine des relations entre parents et enfants.

Quant à l’intérêt de l’enfant, il s’agit d’un concept assez vague et soumis à interprétation. Cet amendement lui préfère celui plus générique de « droits de l’enfant », dont la définition est plus protectrice et plus conforme à l’esprit de la convention internationale du même nom. On le sait, l’enfant est à la fois sujet et objet de droit.

Il me semble important qu’une proposition de loi qui a l’ambition d’adapter le droit de la famille aux nouvelles formes de familles renouvelle les concepts sur lesquels il repose.

Mme la rapporteure. L’idée que vous défendez est séduisante. Si la notion de responsabilité renvoie à des droits et à des devoirs, celle d’autorité fait référence au droit existant et, contrairement à ce qu’avancent certains, n’est pas fondée sur la force ou la contrainte. Je comprends donc la logique qui sous-tend votre amendement, mais je préfère m’en tenir aux termes actuels. J’émets donc un avis défavorable.

M. Jean-Frédéric Poisson. L’amendement de Mme Capdevielle est cohérent avec l’esprit du texte, et la rapporteure a d’ailleurs eu quelque difficulté à justifier son avis défavorable. Toutefois, responsabilité et autorité ne sont ni synonymes ni interchangeables. Je préfère, comme la rapporteure, fonder la responsabilité sur l’autorité, alors que Mme Capdevielle défend la conception inverse. Je ne voterai donc pas l’amendement.

M. Guy Geoffroy. Pourquoi cette vision péjorative de l’autorité ? L’autorité n’est pas l’autoritarisme : elle participe à la construction de repères susceptibles d’aider l’enfant à se structurer et à devenir un adulte responsable. Certes, il faut s’interroger sur son exercice et sur la capacité des individus à assumer leur responsabilité de parents, mais j’encourage les auteurs de ces amendements à faire preuve de la plus grande prudence avant de balayer l’autorité d’un revers de main. Ce qu’il faut, c’est conjuguer autorité et responsabilité.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Je comprends la philosophie qui inspire cet amendement, mais la référence à l’autorité parentale figure dans de nombreux codes et sa modification risque d’introduire de la confusion.

La Commission rejette l’amendement.

Article 1er
(art. 62 du code civil)

Information de l’auteur d’une reconnaissance d’enfant sur ses droits et ses devoirs en tant que parent

Cet article a pour objet de renforcer l’information de l’auteur d’une reconnaissance d’enfant sur ses droits et ses devoirs en tant que parent. À cette fin, il complète la liste des articles du code civil dont il est fait lecture lors de l’établissement de l’acte de reconnaissance.

La reconnaissance de maternité ou de paternité est régie par les articles 62, 62-1 et 316 du code civil. La reconnaissance est l’acte juridique par lequel la mère ou le père d’un enfant établit sa maternité ou sa paternité et s’engage à en assumer les conséquences légales. Elle peut intervenir avant la naissance ou après celle-ci.

La reconnaissance a essentiellement vocation à établir la paternité hors mariage – la désignation de la mère dans l’acte de naissance étant suffisante pour établir la maternité, les reconnaissances maternelles sont rares (22) – mais n’est pas réservée à l’établissement de la filiation hors mariage. L’article 315 du code civil offre notamment la possibilité au mari de reconnaître l’enfant lorsque la présomption de paternité est écartée en application de l’article 313 du même code, c’est-à-dire quand l’acte de naissance ne le désigne pas en qualité de père, à condition que la paternité d’un tiers ne soit pas déjà légalement établie.

L’acte de reconnaissance obéit à un formalisme particulier. L’article 316 du code civil précise que la reconnaissance doit être faite dans l’acte de naissance, par acte reçu par l’officier de l’état civil ou par tout autre acte authentique. Une reconnaissance par acte sous seing privé est nulle pour irrégularité de forme. L’article 62 du code civil précise les mentions devant y figurer, telles que les prénoms, nom, date de naissance ou, à défaut, âge et lieu de naissance et domicile de l’auteur de la reconnaissance ainsi que les dates, lieu, sexe et prénoms de l’enfant. Son quatrième alinéa précise aussi que « lors de l’établissement de l’acte de reconnaissance, il est fait lecture à son auteur des articles 371-1 et 371-2 » du code civil.

Cette lecture permet d’informer l’auteur de l’acte de reconnaissance de la signification de l’autorité parentale, « ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant » (article 371-1) et de son obligation de contribuer à l’entretien et à l’éducation des enfants (article 372-2).

Le présent article complète cette liste en y ajoutant la lecture des articles 372 et 373-2 du code civil, relatifs respectivement à l’exercice en commun de l’autorité parentale (23) et sur l’exercice de l’autorité parentale par les parents séparés (24). Cet ajout aura pour effet de renforcer la solennité de l’acte de reconnaissance et de mieux informer le nouveau parent sur ses droits et ses obligations.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL17 de Mme Lucette Lousteau.

M. Erwann Binet. Cet amendement restreint la liste des dispositions relatives à l’autorité parentale qui sont lues à l’auteur d’une reconnaissance d’enfant. Est ainsi visé, pour l’article 372, l’alinéa premier définissant l’exercice en commun de l’autorité parentale, le seul dont la lecture s’impose.

Mme la rapporteure. Je partage votre souci de limiter la lecture lors de l’établissement des actes d’état civil. Mais la reconnaissance engage les parents et, même si la lecture de certaines dispositions peut paraître superflue, cet acte fort justifie qu’on y consacre un peu de temps. J’émets donc un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La Commission rejette l’amendement de conséquence CL14 de Mme Colette Capdevielle.

Puis elle adopte l’article 1er sans modification.

Article 2
(art. 101-1 et 101-2 [nouveaux] du code civil)

Règles de publicité des actes de l’état civil et livret de famille

Cet article a pour objet de consacrer au niveau législatif, en les inscrivant dans le code civil, d’une part, les règles de publicité des actes de l’état-civil et, d’autre part, le livret de famille. Il complète, à cette fin, le titre II du livre Ier du code civil, relatif aux actes de l’état civil, par un nouveau chapitre VIII, intitulé « De la publicité des actes de l’état civil » et composé de deux nouveaux articles, 101-1 et 101-2, consacrés respectivement aux règles de publicité des actes de l’état civil et au livret de famille.

1.  La publicité des actes de l’état civil

Le nouvel article 101-1 du code civil prévoit que la publicité des actes de l’état-civil est assurée par la délivrance des copies intégrales ou d’extraits faites par les officiers d’état-civil, à laquelle la procédure de vérification sécurisée des données à caractère personnel contenues dans les actes de l’état civil peut cependant suppléer.

a.  La délivrance des copies intégrales et des extraits d’actes de l’état civil

En l’état du droit, la publicité des actes de l’état-civil est régie par le titre II du décret n° 62-921 du 3 août 1962 modifiant certaines règles relatives aux actes de l’état civil, modifié en dernier lieu par le décret n° 2013-429 du 24 mai 2013 portant application de la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe et modifiant diverses dispositions relatives à l’état civil et du code de procédure civile.

Le premier alinéa du nouvel article 101-1 du code civil reprend une partie des dispositions du second alinéa de l’article 8 du décret du 3 août 1962, lequel prévoit que « la publicité des actes de l’état civil est assurée par la délivrance de copies intégrales ou d’extraits faite par les officiers de l’état civil des actes qu’ils détiennent ». Rappelons qu’une copie intégrale consiste en la reproduction fidèle de l’acte avec toutes les mentions, tandis que l’extrait, comme son nom l’indique, ne comporte qu’une partie des informations y figurant.

Le second alinéa du nouvel article 101-1 précise que le contenu et les conditions de délivrance des copies intégrales ou d’extraits sont fixés par décret en Conseil d’État. Ce décret est celui du 3 août 1962, précité, dont la modification ne sera pas ici nécessaire.

Il prévoit notamment que les registres de l’état civil datant de moins de cent ans ne peuvent être directement consultés que par les agents de l’État habilités à cet effet et les personnes munies d’une autorisation écrite du procureur de la République (article 8, premier alinéa), afin d’éviter que les particuliers ne soient lésés par la divulgation de certains renseignements relatifs à leur état civil (25). Il précise dans quelles conditions un particulier peut obtenir des copies intégrales des actes de naissance, de mariage, de reconnaissance et de décès (article 9), des extraits d’actes de mariage et de naissance, avec ou sans filiation (articles 10 et 11), et dans quelles conditions ces documents peuvent être obtenus par les administrations (article 11-1).

b.  La vérification sécurisée des données à caractère personnel contenues dans les actes de l’état civil

Le troisième alinéa du nouvel article 101-1 du code civil prévoit que la procédure de vérification sécurisée des données à caractère personnel contenues dans les actes de l’état civil peut être mise en œuvre aux fins de suppléer à la délivrance des copies et extraits dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Dans le souci de simplifier les démarches des usagers tout en favorisant des transferts de données sécurisées, le décret n° 2011-167 du 10 février 2011 a introduit aux articles 13-2 à 13-5 du décret n° 62-921 du 3 août 1962 modifiant certaines règles relatives aux actes de l’état civil un dispositif de vérification sécurisée d’informations nominatives et personnelles contenues dans les actes de l’état civil. 

Celui-ci ouvre la possibilité aux administrations, aux services et établissements publics de l’État ou des collectivités territoriales, aux caisses et aux organismes gérant des régimes de protection sociale de demander directement à l’officier de l’état civil dépositaire de l’original de l’acte de l’état civil du demandeur de confirmer l’exactitude des informations transmises par lui, le cas échéant après les avoir complétées ou rectifiées. Cette transmission peut s’effectuer par voie dématérialisée via la plateforme COMEDEC (communication électronique des données de l’état civil).

Ce système est actuellement utilisé par le ministère de l’Intérieur dans le cadre de la délivrance du passeport ainsi que par les notaires pour les besoins de leurs actes et liquidation des successions dans leurs relations avec les communes qui ont souhaité participer à la mise en œuvre expérimentale de la plateforme COMEDEC.

Il convient de relever que ce dispositif ne s’impose pas aux communes : celles qui souhaitent y adhérer doivent signer deux conventions proposées par le ministère de la Justice et l’agence nationale des titres sécurisés.

2.  La consécration du livret de famille dans le code civil

Le nouvel article 101-2 du code civil inscrit le livret de famille dans le code civil, en tant que mode de publicité des actes de l’état civil.

En l’état du droit, le livret de famille, qui joue un rôle essentiel dans les démarches administratives quotidiennes des familles, est simplement mentionné, de manière incidente, par l’article 28-1 du code civil (qui précise que les actes administratifs et les déclarations ayant pour effet l’acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité peuvent ou doivent, en cas de perte de cette nationalité, être mentionnés dans le livret de famille).

Aucun article dudit code ne définit le livret de famille ou ne précise son régime juridique, qui relève exclusivement de textes de nature réglementaire : le décret n° 74-449 du 15 mai 1974 relatif au livret de famille (modifié en dernier lieu par le décret n° 2013-429 du 24 mai 2013 précité) et à l’information des futurs époux sur le droit de la famille et l’arrêté du 1er juin 2006 fixant le modèle de livret de famille.

Le livret de famille, sans être un acte de l’état civil, est pourtant un mode de publicité et de preuve important des actes de l’état civil, ce qui permet de considérer qu’il relève de l’état des personnes, donc des domaines dont les règles doivent être précisées par la loi, conformément à l’article 34 de la Constitution (26) .

Les conditions de délivrance et le contenu du livret de famille

Le décret n° 74-449 du 15 mai 1974 prévoit notamment que le livret de famille est établi et remis par l’officier de l’état-civil :

– aux époux lors de la célébration du mariage ;

– aux parents, ou à celui d’entre eux à l’égard duquel la filiation est établie, lors de la déclaration de naissance du premier enfant ;

– à l’adoptant, lors de la transcription sur les registres de l’état civil du jugement d’adoption d’un enfant par une personne seule (art. 1er).

Un livret de famille est également remis, à leur demande, aux parents qui en sont dépourvus par l’officier de l’état civil qui a établi l’acte d’enfant sans vie (art. 4).

 Le livret comporte, selon le cas, un extrait de l’acte de mariage ou un extrait de l’acte de naissance du ou des parents à l’égard desquels la filiation est établie ainsi qu’un extrait de l’acte de naissance de l’enfant (art. 2). Il est ultérieurement complété, selon le cas, par l’extrait de l’acte de mariage des parents, l’extrait de l’acte de naissance du parent à l’égard duquel la filiation est établie postérieurement à la date de délivrance du livret, les extraits des actes de naissance des enfants communs ou, lorsque la filiation n’est établie qu’à l’égard d’un parent, des enfants dont la filiation n’est établie qu’à l’égard de ce parent, les extraits des actes de décès des enfants morts avant leur majorité et les extraits des actes de décès des époux ou des parents (art. 3).

Outre ces extraits d’actes de l’état civil, le livret comporte une information sur le droit de la famille, notamment sur le nom, la filiation, l’autorité parentale et le droit des successions, ainsi qu’une information sur les droits et devoirs respectifs des conjoints, leurs obligations et leur régime matrimonial (art. 20). Le contenu de ces informations est fixé par l’annexe II à l’arrêté du 1er juin 2006 fixant le modèle de livret de famille, actualisée en dernier lieu par l’arrêté du 24 mai 2013.

Chacun des extraits, chacune des mentions portées sur le livret de famille a la force probante qui s’attache aux extraits des actes de l’état civil et aux mentions portées en marge (art. 13).

Un second livret peut être remis à celui des époux ou des parents qui est dépourvu du premier livret, notamment en cas de divorce ou de séparation justifié par la production d’une décision judiciaire ou d’une convention homologuée (art. 14).

L’article 101-2 met fin à cette lacune du code civil.

Dans sa rédaction initiale, il comportait deux alinéas. La première phrase de son premier alinéa – qui a été maintenue par la Commission – précise la première finalité du livret de famille, qui est d’assurer la publicité des actes de l’état civil, dont il comporte des extraits (voir encadré). Elle renvoie également à un décret en Conseil d’État le soin de fixer le contenu, les règles de mise à jour et les conditions de délivrance du livret de famille. Ce décret est celui du 15 mai 1974, qu’il ne devrait pas être nécessaire de modifier en conséquence.

La seconde phrase du premier alinéa et le second alinéa de l’article 101-2 – qui ont été supprimés par la Commission – complétaient le contenu du livret de famille, qui comporte également une information sur le droit de la famille, notamment sur le nom, la filiation, les droits et les devoirs des parents à l’égard de leurs enfants et le droit des successions, ainsi que sur les droits et devoirs respectifs des conjoints, leurs obligations et leur régime matrimonial. Ces dispositions reprenaient celles de l’article 20 du décret du 15 mai 1974, sous réserve de la substitution des termes « droits et devoirs des parents à l’égard de leurs enfants » à ceux d’« autorité parentale ».

Sur l’initiative de M. Gosselin, la Commission a adopté un amendement supprimant tout élément de définition du contenu du livret de famille du nouvel article 101-2 du code civil, afin de renvoyer l’intégralité de ce contenu au décret. Ledit décret devra également préciser les conditions de sécurisation du livret de famille, afin de renforcer la lutte contre la fraude.

En conséquence, la seconde phrase du premier alinéa du nouvel article 101-2 du code civil ne comporte désormais plus qu’une habilitation du pouvoir réglementaire à définir le modèle du livret de famille par arrêté et le second alinéa a été supprimé.

*

* *

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL41 de la rapporteure.

Puis elle en vient à l’amendement CL1 de M. Philippe Gosselin.

M. Jean-Frédéric Poisson. La volonté de modifier le contenu du livret de famille comporte une dimension pédagogique que je ne conteste pas. En revanche, elle se heurte à des difficultés matérielles certaines. Qu’adviendra-t-il à chaque modification du droit – cette Commission est bien placée pour en apprécier la fréquence ? Comment garantir la sécurité juridique du document ? Compte tenu des problèmes pratiques que ne manquera pas de poser cette disposition, nous proposons la suppression de l’alinéa 8.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. J’avoue que je suis sensible aux arguments de M. Poisson.

Mme la rapporteure. Vous soulevez à juste titre une difficulté. Je suggère que nous poursuivions la réflexion sur ce sujet. Dans cette attente, vous pourriez retirer votre amendement.

M. Jean-Frédéric Poisson. J’ai pour habitude de ne jamais retirer les amendements que je dépose. Je maintiens celui-ci, qui semble d’ailleurs recueillir une large approbation.

M. Erwann Binet. L’article 20 du décret du 15 mai 1974 relatif au livret de famille prévoit déjà que celui-ci comporte une information sur le droit de la famille. Ce point mérite vraiment d’être retravaillé avant la séance.

Mme la rapporteure. Je propose tout de même que vous retiriez votre amendement, quitte à le redéposer et à le faire adopter en séance, ce qui lui conférera plus d’emphase et de solennité.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Article 3
(art. 372 du code civil)

Définition de l’exercice conjoint de l’autorité parentale

Cet article a pour objet, en complétant l’article 372 du code civil, d’expliciter la signification concrète de l’exercice conjoint de l’autorité parentale, qui implique que les parents s’informent réciproquement de l’organisation de la vie de l’enfant et prennent ensemble les décisions qui le concernent, y compris en cas de séparation. Il ne fait, sur ce point, que clarifier et rappeler l’état du droit, parfois ignoré par les parents.

1. L’autorité parentale, ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant

L’autorité parentale, qui a remplacé la « puissance paternelle » en 1970, est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité exclusive l’intérêt de l’enfant.

a. Évolution historique : de la « puissance paternelle » à « l’autorité parentale »

C’est la loi n° 70-459 du 4 juin 1970 relative à l’autorité parentale qui a remplacé la « puissance paternelle » du Code Napoléon, héritée de la patria potestas romaine, les termes d’autorité parentale. Tandis que la patria potestas donnait au pater familias (le père de famille), tant sur la personne que sur les biens de l’enfant, une autorité en principe perpétuelle et quasi absolue, analogue à un droit de propriété, allant jusqu’au jus vitae necisque (le droit de vie et de mort), l’autorité parentale est une fonction, c’est-à-dire un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant (27).

Le changement de terminologie intervenu en 1970 signifie également que cette fonction parentale n’est plus un monopole du père, mais appartient à égalité aux deux parents qui, en principe, l’exercent en commun (28). Depuis celle du 4 juin 1970, deux autres lois ont été exclusivement consacrées à l’autorité parentale, la loi n° 87-570 du 22 juillet 1987 sur l’exercice de l’autorité parentale, dite « loi Malhuret » et la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale (29).

C’est cette dernière qui a consacré définitivement la coparentalité, c’est-à-dire l’exercice en commun par les deux parents de l’autorité parentale, conformément aux recommandations formulées dans les rapports de Mme Irène Théry de 1998 (30) et de la commission présidée par le professeur Françoise Dekeuwer-Défossez de 1999 (31).

b. Définition et contenu de l’autorité parentale

L’autorité parentale est définie par l’article 371-1 du code civil comme « un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant ». Le même article précise qu’elle « appartient aux parents jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne ». L’autorité parentale implique également un dialogue avec l’enfant, que « les parents associent […] aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité ».

Les droits et devoirs des parents incluent la prise en charge quotidienne (ancien droit et devoir de garde, qui a disparu du code civil en 2002), la surveillance, l’éducation et la protection de la santé de l’enfant. Par ailleurs, les titulaires de l’exercice de l’autorité parentale sont solidairement responsables de plein droit (32) des dommages causés par leurs enfants mineurs habitant avec eux, en application du quatrième alinéa de l’article 1384 du code civil. Chacun des parents est tenu de contribuer à l’entretien et à l’éducation des enfants, à proportion de ses ressources, de celle de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant (article 371-2 du code civil).

L’autorité parentale est d’ordre public et, par conséquent, hors du commerce : aucune renonciation, aucune cession portant sur l’autorité parentale ne peut avoir d’effet, si ce n’est en vertu d’un jugement (article 376 du code civil).

2. L’exercice conjoint de l’autorité parentale

En l’état du droit, l’exercice conjoint de l’autorité parentale, qui constitue la règle de principe, n’est pourtant pas explicité par le code civil. Tel est l’objet du présent article.

a. Exercice conjoint et unilatéral de l’autorité parentale

La loi du 4 mars 2002 a, comme cela a été souligné, généralisé l’exercice conjoint de l’autorité parentale. Le premier alinéa de l’article 372 affirme ainsi nettement que « les père et mère exercent en commun l’autorité parentale ».

● L’exercice unilatéral de l’autorité parentale

Ce n’est donc qu’à titre exceptionnel et dans des hypothèses limitativement énumérées que l’exercice de l’autorité parentale peut être réservé à un seul des parents. Tel est le cas :

– lorsque la filiation est établie à l’égard de l’un des parents plus d’un an après la naissance d’un enfant dont la filiation est déjà établie à l’égard de l’autre, celui-ci reste seul investi de l’exercice de l’autorité parentale. Il en est de même lorsque la filiation est judiciairement déclarée à l’égard du second parent de l’enfant. L’autorité parentale pourra néanmoins être exercée en commun en cas de déclaration conjointe des parents adressée au greffier en chef du tribunal de grande instance ou sur décision du juge aux affaires familiales (article 372, alinéas 2 et 3, du code civil et décret n° 2012-1443 relatif à la déclaration conjointe d’exercice de l’autorité parentale et portant diverses dispositions de procédure en matière familiale) ;

– si l’un des parents décède ou se trouve privé de l’exercice de l’autorité parentale (article 373-1 du code civil) Un parent peut être privé de l’exercice de l’autorité parentale s’il est hors d’état de manifester sa volonté, en raison de son incapacité, de son absence ou de toute autre cause (article 373 du même code) (33) ;

– la séparation des parents est en principe sans incidence sur les règles de dévolution de l’exercice de l’autorité parentale (article 373-2, premier alinéa), mais le juge peut, si l’intérêt de l’enfant le commande, confier l’exercice de l’autorité parentale à l’un des deux parents (article 373-2-1). Le désintérêt de l’un des parents (34), la violation grave et délibérée des règles relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale (35), le comportement dangereux du parent concerné (36) ou des gestes de maltraitance vis-à-vis des enfants (37) peuvent motiver, par exemple, cette décision.

● Le retrait de l’autorité parentale

La privation de l’exercice de l’autorité parentale doit être distinguée du retrait (autrefois appelé déchéance), total ou partiel, de celle-ci. Le droit et l’exercice du droit sont distincts : un parent privé de l’exercice de l’autorité parentale ne perd pas celle-ci pour autant. Il conserve ainsi certains attributs de l’autorité parentale, notamment le droit et l’obligation de maintenir des relations personnelles avec l’enfant (article 373-2, alinéa 2, du code civil) ainsi qu’un droit de surveillance de la manière dont ses enfants sont élevés et il doit être informé des choix importants relatifs à la vie de ce dernier (article 373-2-1 du même code). Il conserve également le droit de consentir au mariage (article 148), à l’adoption (article 348) et à l’émancipation de l’enfant mineur (article 477).

Le retrait total ou partiel de l’autorité parentale est régi par les articles 378 à 381 du code civil. Peuvent se voir retirer totalement l’autorité parentale par une décision expresse du jugement pénal les parents qui sont condamnés, soit comme auteurs, coauteurs ou complices d’un crime ou délit commis sur la personne de leur enfant, soit comme coauteurs ou complices d’un crime ou délit commis par leur enfant, soit comme auteurs, coauteurs ou complices d’un crime sur la personne de l’autre parent (article 378). Le retrait peut également être prononcé, en dehors de toute condamnation pénale, en cas de graves carences dans la protection ou l’éducation de l’enfant, dès lors que ce comportement a mis en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l’enfant (article 378-1 du même code).

b. Signification de l’exercice conjoint de l’autorité parentale

Dans le cadre de l’exercice conjoint de l’autorité parentale, les parents disposent donc des mêmes pouvoirs et sont égaux en droits et en devoirs. Toute décision concernant l’enfant suppose donc leur accord, même lorsqu’ils sont séparés. Le parent qui agirait sans le consentement de l’autre engagerait sa responsabilité, il pourrait même – c’est en pratique exceptionnel – se voir priver de l’exercice de l’autorité parentale.

Le code civil ne comporte cependant aucune définition de l’exercice conjoint de l’autorité parentale. Cette absence de définition précise contribue sans doute à la méconnaissance par certains parents séparés de ce principe et de ce qu’il implique au quotidien.

Le groupe de travail créé en juin 2013 par la garde des Sceaux et par la ministre déléguée auprès de la ministre des Affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, composé d’associations représentatives de parents et des familles, d’avocats, de magistrats et de représentants du Défenseur des droits, avec pour mission de clarifier les règles sur l’autorité parentale (ci-après « le groupe de travail sur la coparentalité ») a souligné ces difficultés dans son rapport, présenté en janvier 2014 (38). Il a ainsi considéré qu’il arrive souvent que le parent qui vit avec l’enfant prenne des décisions seul et en avise a posteriori l’autre parent, qui est ainsi mis devant le fait accompli. S’il souhaite contester cette décision, ce dernier soit alors saisir le juge. Une telle situation est source de tensions et d’une multiplication des procédures entre les parents, et à terme, est contraire à l’intérêt de l’enfant (39). Il a par conséquent recommandé d’introduire une définition, à droit constant, permettant de préciser que l’exercice conjoint de l’autorité parentale suppose une prise de décision commune des parents.

Le présent article, ainsi que le suivant, suivent cette recommandation. Le premier alinéa de l’article 372 du code civil, qui dispose que « les père et mère exercent en commun l’autorité parentale », est ainsi complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils doivent s’informer réciproquement de l’organisation de la vie de l’enfant et prendre ensemble les décisions qui le concernent ».

Cet ajout précise, à droit constant, les contours des attributions de chacun des parents dans le cadre de l’exercice conjoint de l’autorité parentale. Il pose à la fois un devoir d’information sur l’organisation de la vie de l’enfant (40) – une prise de décision commune est évidemment impossible sans cette information préalable – et le principe d’une prise de décision commune. Il ne fait qu’expliciter l’état du droit, en le rendant plus lisible, et ne crée par conséquent aucun risque nouveau de paralysie.

Rappelons qu’en cas de désaccord entre parents, la solution restera la même qu’en l’état du droit : le juge aux affaires familiales doit être saisi, et il statue en considération de l’intérêt de l’enfant et des critères mentionnés à l’article 373-2-11 du code civil (41), qui incluent notamment la pratique antérieurement suivie par les parents. Sur l’initiative de la rapporteure, la Commission a inséré un nouvel alinéa au sein de l’article 4 de la proposition de loi le rappelant expressément.

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La Commission adopte l’article 3 sans modification.

Article 4
(art. 372-1 du code civil)

Définition de l’acte important et régime juridique du changement de résidence et d’établissement scolaire de l’enfant

Cet article insère dans le code civil un nouvel article 372-1. Ce nouvel article complète la définition de l’exercice conjoint de l’autorité parentale figurant à l’article 3 de la proposition de loi en précisant que tout acte de l’autorité parentale, qu’il ait un caractère usuel ou important, requiert l’accord des deux parents lorsqu’ils exercent en commun l’autorité parentale (premier alinéa de l’article 372-1).

Il définit par ailleurs la notion d’acte important, en reprenant la définition qu’en a donné la jurisprudence (alinéa 2), et précise comment les désaccords susceptibles d’apparaître entre les parents doivent être résolus (alinéa 3).

Enfin, il qualifie expressément d’acte important le changement de résidence de l’enfant, dès lors qu’il modifie les modalités d’accueil par l’autre parent, ainsi que le changement d’établissement scolaire, requérant par conséquent un accord exprès de l’autre parent. Une exception est cependant prévue lorsque l’un des parents a été condamné pour un crime ou un délit commis à l’encontre de l’autre parent (alinéa 4).

Cet article codifie ainsi l’état du droit applicable à l’exercice conjoint de l’autorité parentale, qui est jurisprudentiel et généralement mal connu, à droit constant (sous réserve de la qualification du changement d’établissement scolaire d’acte important, qui constitue pour partie une innovation, voir infra).

1. L’accord des parents sur tout acte de l’autorité parentale

Le premier alinéa du nouvel article 372-1 dispose que « tout acte de l’autorité parentale, qu’il ait un caractère usuel ou important, requiert l’accord de chacun des parents lorsqu’ils exercent en commun l’autorité parentale » et précise que « cet accord est exprès pour les actes importants ».

Ce rappel du droit existant correspond, comme celui figurant à l’article précédent, à une recommandation du groupe de travail sur la coparentalité. Il explicite l’état du droit, qu’il ne modifie en rien, afin de résoudre certaines des difficultés constatées dans le cadre de l’exercice conjoint de l’autorité parentale par les parents séparés (voir commentaire de l’article 3, supra).

Il devrait permettre de mettre un terme aux interprétations erronées qui sont parfois données de la présomption d’accord prévue à l’article 372-2 du code civil. Aux termes de cet article, « à l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre, quand il fait seul un acte usuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant ».

Cette présomption d’accord concernant les actes usuels signifie que les tiers de bonne foi n’ont pas à exiger une preuve de l’accord des deux parents (en demandant une double signature, par exemple) et qu’ils ne risquent pas de voir leur responsabilité engagée si l’acte passé par un seul des parents est ensuite contesté. En d’autres termes, la présomption légale vaut dispense de preuve de l’accord des deux parents et décharge de responsabilité au bénéfice des tiers de bonne foi. Il s’agit d’un assouplissement indispensable, destiné à simplifier la vie quotidienne des familles lors de l’accomplissement d’actes usuels. La présomption, qui est simple, tombe naturellement si l’autre parent a exprimé son désaccord : le tiers qui avait connaissance d’une dissension manifeste entre les parents relative à l’acte et qui n’en a pas tenu compte cesse d’être un tiers de bonne foi et n’est donc plus protégé.

Cet article est cependant souvent interprété comme donnant la possibilité à un parent d’agir seul, sans concertation avec l’autre parent, pour les actes usuels, un accord n’étant requis que pour l’accomplissement d’actes importants. Cette interprétation est inexacte : l’article 372-2 ne dispense nullement les parents d’une concertation et d’un accord, même pour les actes usuels.

La seconde phrase du premier alinéa du nouvel article 372-1, en précisant que l’accord est exprès pour les actes importants, signifie qu’a contrario, l’accord peut être implicite pour les actes usuels, à l’égard des tiers comme entre les parents. Elle correspond elle aussi à l’état du droit, qu’elle ne fait qu’expliciter. La nécessité d’un accord exprès se déduit en effet d’une lecture a contrario de l’article 372-2 du code civil, qui signifie que le parent qui souhaite accomplir seul un acte usuel n’est pas de tenu d’établir qu’il dispose de l’accord exprès de l’autre parent, à la différence d’un acte important, pour lequel il doit pouvoir établir cet accord exprès (42).

2. La définition de l’acte important

Les règles actuelles relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale reposent en pratique largement sur la distinction entre actes importants et actes usuels, seuls ces derniers bénéficiant de la présomption d’accord prévue à l’article 372-2 du code civil. La distinction de ces actes, au cœur de la coparentalité, est mal connue des parents car elle est exclusivement jurisprudentielle, aucune définition n’en étant donnée par le code civil. Elle est donc source de contentieux et de difficultés d’interprétation par les parents comme pour les praticiens du droit.

Le deuxième alinéa du nouvel article 372-1, dans un souci de clarification, définit par conséquent l’acte important. La définition est reprise de la jurisprudence, selon laquelle constitue un acte important « l’acte qui rompt avec le passé et engage l’avenir de l’enfant ou qui touche à ses droits fondamentaux ».

L’acte est donc important :

– soit parce qu’il rompt avec le passé et engage l’avenir de l’enfant. Ces deux critères sont cumulatifs, car la seule rupture avec le passé ne saurait être suffisante si elle n’est pas combinée avec son impact sur l’avenir de l’enfant : un acte peut rompre avec le passé et rester usuel, car sans gravité et, inversement, un acte peut engager l’avenir de l’enfant mais s’inscrire dans la continuité directe des décisions déjà prises ;

– soit parce qu’il touche aux droits fondamentaux de l’enfant.

Il aurait été possible de définir également expressément l’acte usuel. Cette option n’a cependant pas été retenue, afin d’éviter tout risque de créer une « zone grise » dans laquelle seraient susceptibles d’entrer les actes ne relevant ni de l’une ni de l’autre définition. Les actes usuels sont donc définis « en creux » : tout acte n’entrant pas dans la définition de l’acte important est un acte usuel.

L’option consistant à retenir une liste soit d’actes importants, soit de domaines touchant à la vie de l’enfant (tels que sa santé, sa scolarité ou son éducation religieuse) a également été écartée, en raison des inconvénients qu’elle présente. Aucune liste d’actes ne saurait en effet prétendre à l’exhaustivité. Une liste assortie de l’adverbe « notamment », outre les critiques qui peuvent être adressées à l’emploi de cet adverbe dans la loi, créerait par ailleurs le risque d’une interprétation a contrario susceptible de faire basculer certains actes importants dans la catégorie des actes usuels. Il en va de même d’une liste de domaines relatifs à la vie de l’enfant.

Seuls les changements de résidence de l’enfant et d’établissement scolaire, qui relèvent d’une problématique particulière car ils sont la source de très nombreux conflits et ont de graves conséquences sur le maintien des relations personnelles entre l’enfant et ses deux parents, ont fait l’objet de dispositions spécifiques (voir infra).

Les équilibres jurisprudentiels subtils dressant la ligne de partage entre actes usuels et importants ne seront pas remis en cause par la définition proposée. En l’état du droit, sont ainsi considérés comme des actes usuels bénéficiant de la présomption d’accord de l’autre parent, par exemple :

– une intervention chirurgicale bénigne et médicalement nécessaire pratiquée à la demande d’un parent seul ainsi que les soins médicaux de routine (vaccinations obligatoires, blessures légères, soins dentaires, maladies infantiles bénignes) de manière générale (43) ;

– une demande d’inscription, par un seul parent, de ses enfants mineurs sur son passeport (44) ainsi que la demande de documents administratifs (carte nationale d’identité, etc.) pour l’enfant de manière générale ;

Sont en revanche considérés comme des actes importants exigeant l’accord explicite des deux parents :

– la circoncision rituelle pratiquée dans les religions juive et musulmane, dans la mesure où elle constitue un signe d’appartenance religieuse ainsi que le choix d’une religion pour l’enfant de manière générale (45) ;

– les interventions chirurgicales nécessitant l’hospitalisation prolongée de l’enfant, sauf cas d’urgence où le médecin peut prendre le risque d’agir avec l’accord d’un seul parent (46) ;

– le choix du nom d’usage de l’enfant (47) ;

– le consentement à un prélèvement d’organes sur le mineur décédé (article L. 1232-2 du code de la santé publique) ou l’acceptation d’une offre transactionnelle en réparation d’un préjudice moral issu d’une transfusion sanguine contaminée (48) ;

– la demande de perte de la nationalité française (49) ;

– la participation de l’enfant à une émission télévisée sur les parents divorcés sans le consentement de sa mère ou à des photographies même si son père est célèbre (50).

3. Le règlement des désaccords susceptibles d’apparaître entre les parents

Sur l’initiative de votre rapporteure, la Commission a adopté un amendement précisant comment et selon quels critères les désaccords susceptibles d’apparaître entre les parents dans le cadre de l’exercice conjoint de l’autorité parentale seront réglés.

La première phrase du troisième alinéa du nouvel article 372-1 du code civil prévoit ainsi qu’en cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales, en référé le cas échéant (ce qui permettra de faire face aux situations dans lesquelles il est indispensable que le juge statue rapidement, pour éviter une déscolarisation si le désaccord porte sur un changement d’établissement scolaire, par exemple, ou si le désaccord porte sur une intervention chirurgicale urgente). Dans les situations le requérant, le juge pourra également prendre des mesures provisoires.

La seconde phrase du même troisième alinéa dispose que le juge statue selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant et en prenant en considération les éléments mentionnés à l’article 372-2-11 du code civil. Rappelons que ces éléments sont les suivants :

– la pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu’ils avaient pu antérieurement conclure ;

– les sentiments exprimés par l’enfant mineur dans les conditions prévues à l’article 388-1 du code civil ;

– l’aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre ;

– le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l’âge de l’enfant ;

– les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l’article 373-2-12 du code civil ;

– les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre. 

4. La qualification du changement de résidence et d’établissement scolaire de l’enfant d’actes importants

Le quatrième alinéa du nouvel article 372-1 du code civil qualifie le changement de résidence, dès lors qu’il modifie les modalités d’accueil de l’enfant par l’autre parent, ainsi que le changement d’établissement scolaire, d’actes importants. Il prévoit cependant une exception afin de tenir compte des situations dans lesquelles le déménagement serait motivé par les violences exercées par l’autre parent.

a. Le changement de résidence de l’enfant

En l’état du droit, le changement de résidence de l’un des parents, dès lors qu’il modifie les modalités d’exercice de l’autorité parentale, doit faire l’objet d’une information préalable et en temps utile de l’autre parent, en application du troisième alinéa de l’article 373-2 du code civil, créé par la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale. En cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales qui statue selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant. En cas de déménagement, le juge répartit les frais de déplacement et ajuste en conséquence le montant de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant.

L’article 227-6 du code pénal punit par ailleurs de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende « le fait, pour une personne qui transfère son domicile en un autre lieu, alors que ses enfants résident habituellement chez elle, de ne pas notifier son changement de domicile, dans un délai d’un mois à compter de ce changement, à ceux qui peuvent exercer à l’égard des enfants un droit de visite ou d’hébergement en vertu d’un jugement ou d’une convention judiciairement homologuée ».

Ces dispositions sont relatives à l’information de l’autre parent (préalable dans le code civil, et a posteriori dans le code pénal) et n’abordent pas expressément la question de l’accord, exprès ou implicite, de l’autre parent. Cependant, à la lecture de la deuxième phrase du troisième alinéa de l’article 373-2 du code civil, qui prévoit qu’en cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales qui statue selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant, on déduit que l’accord de l’autre parent est requis, le juge décidant in fine si le déménagement doit entraîner un réaménagement des modalités d’exercice de l’autorité parentale.

En tout état de cause, il résulte des règles générales relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale, qui exigent une prise de décision commune en ce qui concerne l’enfant, que l’acte soit usuel ou important, que l’accord de l’autre parent est en principe requis pour changer le domicile de l’enfant, la seule différence étant la nécessité d’un accord exprès dans le second cas.

Le fait de qualifier d’acte important le changement de résidence de l’enfant, dès lors que ce changement modifie les modalités d’accueil de l’enfant par l’autre parent (c’est-à-dire ses modalités de résidence ou le droit de visite de l’autre parent) constitue donc une clarification utile. En effet, le déménagement peut avoir pour conséquence de bouleverser – voire de rompre – les relations entre l’enfant et l’autre parent, si l’éloignement géographique est important (en cas de déménagement outre-mer ou à plusieurs centaines de kilomètres, par exemple). Il est par conséquent indispensable que le juge soit saisi, en cas de désaccord, préalablement au changement de résidence, s’il est de nature à modifier les modalités d’accueil de l’enfant par l’autre parent.

Cette qualification d’acte important ne porte pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’aller et venir, qui inclut le libre choix de son domicile (51) :

– l’accord de l’autre parent n’est requis que si le changement de résidence a un impact direct sur les relations de l’enfant avec l’autre parent. Dans cette hypothèse, la liberté d’aller et venir doit être conciliée avec le droit de l’enfant de maintenir des relations avec chacun de ses parents et celui de chaque parent de maintenir des relations avec son enfant (52) ;

– en tout état de cause, il n’est évidemment pas question d’interdire au parent qui le souhaite de déménager, mais simplement de prévoir que, en cas de désaccord, il appartiendra au juge de déterminer si le déménagement du parent concerné nécessite une modification des modalités d’exercice de l’autorité parentale.

Le but recherché est que tout déménagement, s’il modifie les modalités d’accueil de l’autre parent, ait au moins été discuté entre les parents et que ses conséquences au regard de l’intérêt de l’enfant aient été pleinement mesurées.

Cette proposition avait été formulée par la commission présidée par le professeur Françoise Dekeuwer-Défossez, en 1999 (53).

b. Le changement d’établissement scolaire

En l’état du droit, la radiation et l’inscription dans un établissement scolaire constituent, en principe, un acte usuel, sans préjudice du devoir d’informer l’autre parent (54). Cette demande peut donc émaner d’un seul des parents, l’accord de l’autre étant présumé en application de l’article 372-2 du code civil, sauf en cas d’opposition manifeste exprimée par l’autre parent naturellement (55). S’il y a désaccord, c’est au parent le plus diligent de saisir le juge aux affaires familiales pour qu’il prononce, notamment en cas de déscolarisation de l’enfant, sur le fondement de l’article 1207 du code de procédure civile, des mesures provisoires (56).

Certains changements d’établissements scolaires sont cependant considérés comme des actes importants. Tel est le cas en cas d’inscription dans un établissement d’enseignement privé (57), lorsque l’un des parents retire l’enfant d’un établissement religieux où il avait été préalablement inscrit pour le mettre dans un établissement laïque (58) ou en cas de changement d’orientation (59).

Le quatrième alinéa du nouvel article 372-1 du code civil, s’écartant cette fois de la jurisprudence actuelle, qualifie tout changement d’établissement scolaire d’acte important. Ces changements sont en effet fréquemment source de tensions entre les parents séparés, et il est légitime que ces actes, qui engagent l’avenir de l’enfant, soient soumis à un accord exprès de l’autre parent.

En cas de désaccord, il appartiendra au parent le plus diligent, comme pour tout acte important, de saisir le juge aux affaires familiales, en référé le cas échéant, pour qu’il statue selon les critères prévus au troisième alinéa de l’article 372-1 du même code, conformément à la pratique déjà suivie en l’état du droit dans de telles situations (60).

c. L’exception prévue lorsque le changement est motivé par les violences exercées par l’autre parent

La dernière phrase du troisième alinéa du nouvel article 372-1 du code civil prévoit une exception, qui vise à répondre aux situations dans lesquelles le déménagement d’un parent et le changement de résidence ou d’établissement scolaire de l’enfant en découlant est motivé par les violences exercées par l’autre parent à son encontre. Il est ainsi prévu que l’accord de l’autre parent n’est pas requis lorsque celui-ci a été condamné comme auteur, coauteur ou complice d’un crime ou délit sur la personne du parent qui souhaite changer la résidence ou l’établissement scolaire de l’enfant.

Votre rapporteure a proposé de simplifier et d’améliorer la rédaction de cette exception, afin de tenir des observations formulées lors des auditions qu’elle a menées, qui ont souligné, pour certaines, la nécessité de bien prendre en compte ces situations de violences et, pour d’autres, d’éviter une atteinte excessive à l’exercice conjoint de l’autorité parentale. Elle a ainsi proposé un amendement prévoyant que le juge peut dispenser le changement de résidence ou d’établissement scolaire de l’enfant de l’accord de l’autre parent, si ce changement est motivé par les violences exercées par ce dernier. Cette nouvelle rédaction aurait supprimé le caractère automatique de l’exception, qui aurait été accordée par le juge, et n’exigeait plus une condamnation – qui peut tarder à venir – pour que l’exception puisse jouer, la seule condition étant que le changement de résidence ou d’établissement scolaire soit motivé par les violences exercées par l’autre parent. Cet amendement a cependant été rejeté par la Commission.

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La Commission examine l’amendement CL42 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement a un double objet : en premier lieu, dans un souci de lisibilité, il regroupe les dispositions spécifiques relatives au changement de résidence dans un seul article du code civil ; en second lieu, il modifie la rédaction de l’exception prévue lorsque le changement de résidence ou d’établissement scolaire est en lien avec des violences exercées par l’autre parent.

Cet amendement fait notamment suite aux auditions au cours desquelles les femmes victimes de violences nous ont fait savoir que l’automaticité de la dispense d’accord de l’autre parent n’était pas bienvenue et que le périmètre de l’exception n’était pas assez large.

La rédaction proposée supprime l’automaticité, l’exception étant désormais accordée par le juge ; elle n’exige plus une condamnation pour que l’exception puisse jouer, la condition requise étant désormais que le changement de résidence ou d’établissement scolaire soit en lien avec les violences exercées par l’autre parent.

En ce qui concerne le changement de résidence ou d’établissement scolaire, si celui-ci a pour conséquence de modifier les modalités d’accueil de l’enfant, il faudra obtenir l’accord de l’autre parent. Si ce n’est pas le cas, on informera simplement l’autre parent comme c’est le cas actuellement. Ainsi, si l’on déménage à 300 kilomètres, il faudra recueillir l’accord exprès de l’autre parent.

M. Sébastien Denaja. Vous proposez de laisser au juge un pouvoir discrétionnaire, alors que, en ces matières, la logique est habituellement celle d’une compétence liée pour ce dernier ou d’un pouvoir d’appréciation encadré. Avec cette rédaction, même en cas de violences, le juge peut ne pas dispenser un parent d’obtenir l’accord de l’autre. Une formule impérative, telle que : « le juge dispense… », serait préférable. Je n’ai aucun doute sur les intentions de la rapporteure et je partage ses objectifs, mais l’absence d’obligation de dispense en cas de violences me pose problème.

Je m’interroge également sur l’absence de mention de la victime des violences. Il me semble qu’il faudrait préciser sur qui les violences sont exercées.

M. Philippe Houillon. Cet amendement m’inquiète également. Je déduis de sa rédaction, peut-être à tort, que, a contrario, le juge ne peut pas dispenser dans tous les autres cas qui ne relèvent pas de violence. En outre – et je suis là en désaccord avec M. Denaja –, l’automaticité n’est pas souhaitable : il faut laisser au juge toute latitude pour choisir la solution appropriée à chaque cas. Si mon interprétation n’est pas erronée, vous devez retirer cette disposition qui peut être une extraordinaire source de blocages.

Mme Colette Capdevielle. Je partage l’analyse de M. Houillon. Le juge aux affaires familiales décide. Il n’est pas besoin d’écrire dans la loi ce qu’il a à faire et à ne pas faire. Cela vaut pour la répartition des frais et le montant de la contribution : il n’est nul besoin d’en faire état dans cet article. Il convient donc d’en rester à la rédaction actuelle en laissant au parent le plus diligent la possibilité de saisir en référé le juge aux affaires familiales, lequel statuera librement sur toutes les questions posées. Laissons les magistrats tranquilles ! N’inscrivons pas dans la loi ce qui est l’évidence mais aussi la pratique.

Mme la rapporteure. Cet amendement tient compte des nombreuses auditions que j’ai menées sur les violences familiales.

Je suis d’accord avec Mme Capdevielle sur la saisine du juge. In fine, le juge décidera. Nous introduisons, à leur demande, une exception pour les femmes victimes de violences. Cependant, l’automaticité n’est pas opportune, car le juge doit conserver une marge d’appréciation. L’amendement propose donc un compromis : en cas de violences, le juge peut dispenser.

M. Philippe Houillon. Que se passe-t-il lorsqu’il n’y a pas de violences ?

Mme la rapporteure. Le pouvoir d’appréciation du juge reste entier.

M. Jean-Frédéric Poisson. L’amendement conditionne la faculté pour le juge de dispenser de l’accord à l’existence de violences conjugales. La formulation choisie est exclusive. Je suggère le retrait de l’amendement qui, en l’état, ne traite que des violences, ce qui ne correspond pas à votre intention.

Mme Catherine Coutelle. La délégation aux Droits des femmes a longuement débattu de cet article sans parvenir à une solution. Il me semble que, davantage que l’amendement, c’est le premier alinéa de l’article 4 qui pose problème. Il rétablit l’article 372, supprimé en 2002, mais alors qu’il prévoyait l’information du parent, la nouvelle réaction dispose que « tout acte de l’autorité parentale, qu’il ait un caractère usuel ou important, requiert l’accord de chacun des parents lorsqu’ils exercent en commun l’autorité parentale ». Tout acte usuel est donc subordonné à un accord des parents, qui doit être exprès pour les actes importants.

Je remercie la rapporteure d’avoir cherché une solution pour les cas de violences, au sujet desquels la délégation l’avait sollicitée. Mais le problème posé par l’écriture du premier alinéa reste entier.

M. Guy Geoffroy. On ignore ici à quel moment intervient le juge. Ceux qui ont travaillé sur l’ordonnance de protection savent combien il est délicat, pour le juge, de décider d’accorder le statut de victime présumée ou vraisemblable à une personne qui fait état de violences. C’est un véritable casse-tête de déterminer à partir de quand le juge estime devoir prononcer une ordonnance de protection sans que cela vaille reconnaissance explicite et a priori du statut de victime de violences.

Or, dans votre amendement, le deuxième alinéa de l’article 372-1-1 fait référence aux « violences exercées », ce qui ne correspond à aucune procédure existante en matière de violences faites aux femmes. Il me semble que l’articulation avec les mesures de protection des victimes de violences est à revoir. J’invite à la prudence, non pas sur l’intention qui peut nous réunir, mais sur la formulation choisie. Voter cet amendement, c’est prendre un risque énorme, mais le rejeter, c’est aller à l’encontre du souhait de chacun d’entre nous.

M. Erwann Binet. Je voudrais rappeler l’état du droit. Nombre des dispositions dont nous débattons ici existent déjà dans notre droit. Tout d’abord, la nécessité d’un accord exprès des deux parents pour les actes importants de la vie de l’enfant est la définition même de l’exercice conjoint de l’autorité parentale. Pour les actes usuels, en revanche, il y a présomption de l’accord de l’autre parent : il est donc faux de dire que l’accord des deux parents est, désormais, nécessaire pour tous les actes de la vie de l’enfant. C’est l’état du droit existant.

Quant au changement de domicile, ne sont ici visés que les cas portant atteinte à l’exercice de l’autorité parentale par l’autre parent. Il faut trouver un équilibre entre la liberté d’aller et venir des parents et la nécessité pour l’enfant d’avoir un contact avec son autre parent : l’accord des deux parents est donc, par principe, nécessaire. À défaut, c’est, en l’état du droit, le juge qui tranche. L’exercice conjoint de l’autorité parentale suppose donc, y compris après une séparation, un dialogue permanent entre les deux parents pour tous les actes de la vie de l’enfant – avec, je le répète, une présomption d’accord pour tous les actes usuels.

Mme la secrétaire d’État. Dans l’état du droit, tout acte usuel requiert déjà l’accord des parents. La construction jurisprudentielle a fait apparaître la notion d’acte important, dont la proposition de loi que nous examinons tend à inscrire une définition dans le code civil – laquelle renvoie au changement de résidence déterminant un changement des conditions d’accueil par l’autre parent.

L’amendement est plus explicite en indiquant que cette disposition vise à la fois le parent chez lequel l’enfant réside le plus souvent et celui qui exerce le droit de visite et d’hébergement.

Pour les cas de violence, la rédaction de l’amendement est également plus large que celle du texte initial, car elle vise des situations n’exigeant ni condamnation ni ordonnance de protection : le juge dispensera alors le parent changeant de résidence de requérir l’accord de l’autre parent.

Dans les autres cas, c’est-à-dire lorsqu’il n’y a pas violence, mais seulement désaccord entre les parents, le juge devra être saisi, comme c’est déjà le cas, pour évaluer les raisons avancées par le parent qui change de résidence et modifie les conditions d’accueil – changement d’activité, mutation ou rapprochement de sa famille.

Avis favorable, donc, à cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette successivement l’amendement de conséquence CL13 de Mme Colette Capdevielle et l’amendement CL2 de M. Philippe Gosselin.

Elle examine ensuite l’amendement CL43 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le présent amendement vise à clarifier les critères en fonction desquels seront réglés les désaccords susceptibles d’apparaître entre les parents dans le cadre de l’exercice conjoint de l’autorité parentale. Il tend à préciser que, en cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales, qui devra alors statuer en prenant en considération les éléments mentionnés à l’article 373211 du code civil.

La Commission adopte l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l’amendement de précision CL3 de M. Philippe Gosselin.

Elle adopte ensuite l’article 4 modifié.

Après l’article 4

La Commission est saisie de l’amendement CL7 de M. Philippe Gosselin.

M. Jean-Frédéric Poisson. Cet amendement tend à intégrer dans le code civil, parmi les mesures d’investigation que peut ordonner le juge et à côté de l’enquête sociale, l’expertise médico-psychologique, qui n’y figure pas alors même qu’elle est souvent ordonnée par les juges.

Mme la rapporteure. L’idée est à ce point excellente que je la propose dans mon amendement CL58. Je demande donc le retrait de l’amendement CL7 et émettrais, à défaut, un avis défavorable.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Article 5
(art. 373-2-6 du code civil)

Confirmation du pouvoir d’astreinte du juge aux affaires familiales et création d’un mécanisme d’amende civile en cas de manquement grave et renouvelé aux règles de l’exercice conjoint de l’autorité parentale

Cet article confirme, d’une part, la possibilité, pour le juge aux affaires familiales, d’assortir ses décisions d’une astreinte, et prévoit, d’autre part, la création d’un mécanisme d’amende civile destiné à assurer le respect des règles relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale et des décisions des juges aux affaires familiales fixant les modalités de l’exercice de l’autorité parentale. Le dispositif proposé vise à pallier l’absence de dispositif d’exécution forcée des décisions des juges aux affaires familiales.

1.  L’absence de dispositif d’exécution forcée des décisions des juges aux affaires familiales

La création de ce mécanisme part du constat dressé par le groupe de travail sur la coparentalité (61), selon lequel l’exécution des décisions des juges aux affaires familiales pose une difficulté particulière s’agissant des mesures relatives aux modalités d’exercice de l’autorité parentale. En effet, comme le souligne le rapport dudit groupe de travail, il n’existe pas de dispositif d’exécution forcée, s’agissant d’une matière qui touche aux relations familiales. Le juge peut seulement, à la demande d’une partie, tenter d’inciter l’autre à exécution la décision en prononçant une astreinte, mais ce dispositif est rarement demandé et peu mis en œuvre en pratique.

Certes, lorsque l’un des parents ne respecte pas les règles de l’autorité parentale, telles qu’elles résultent des dispositions du code civil ou d’une décision du juge aux affaires familiales, l’autre parent peut saisir le juge aux affaires familiales pour qu’il statue de nouveau sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale. Celui-ci peut alors prendre en compte l’attitude de chacun des parents et leur respect des règles relatives à l’autorité parentale, en application du 3° de l’article 373-2-11 du code civil, qui invite le juge à prendre en considération, lorsqu’il statue sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, « l’aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre ». La jurisprudence a d’ailleurs admis que le non-respect de l’exercice conjoint de l’autorité parentale, constituant un élément nouveau, pouvait justifier un changement de résidence de l’enfant.

Le changement de résidence ou des modalités de droit de visite et d’hébergement n’apparaît cependant pas adapté pour sanctionner la violation par l’un des parents des règles de l’autorité parentale : il n’est pas toujours possible et peut ne pas être dans l’intérêt de l’enfant.

Certains parents se tournent alors vers la voie pénale, mais celle-ci ne permet de sanctionner que certaines violations spécifiques de l’autorité parentale : la non-représentation d’enfant (art. 227-5 du code pénal (62)), l’absence de notification par le parent du transfert de son domicile lorsque l’enfant réside avec lui (art. 227-6 du même code (63)) et la soustraction de mineur (art. 227-7 du même code (64)).

Les atteintes à l’exercice conjoint de l’autorité parentale ne sont donc pas systématiquement sanctionnées et deviennent sources de tensions préjudiciables, in fine, à l’enfant.

2.  La confirmation de la possibilité pour le juge aux affaires familiales d’assortir sa décision d’une astreinte

En application de l’article L. 131-1 du code des procédures civiles d’exécution, « tout juge peut, même d’office, ordonner une astreinte pour assurer l’exécution de sa décision ». Le juge de l’exécution peut, par ailleurs, assortir d’une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité.

L’astreinte – qui est versée par le débiteur au créancier de l’obligation – peut être utile pour assurer le versement de la pension alimentaire ou le respect du droit de visite et d’hébergement, par exemple. Cette possibilité est cependant rarement utilisée, alors qu’elle peut se révéler très efficace dans certaines situations familiales, en cas de violation d’une obligation précise.

C’est pourquoi le 1° du présent article, inséré par la Commission sur l’initiative de votre rapporteure, rappelle cette possibilité au deuxième alinéa de l’article 373-2-6 du code civil. Rendre cette possibilité plus visible dans les textes devrait permettre d’accroître son utilisation par les praticiens.

3.  La création d’un nouveau dispositif d’amende civile en cas de manquement aux règles relatives à l’exercice de l’autorité parentale

Afin de mettre fin à cette lacune et de renforcer l’effectivité des règles relatives à l’autorité parentale, le 2° du présent article complète l’article 373-2-6 du code civil par un nouvel alinéa permettant au juge aux affaires familiales d’infliger une amende civile au parent qui manque à ces règles.

L’amende civile est une amende édictée par une loi civile et prononcée par une juridiction civile qui sanctionne, en général, soit le fait de se soustraire à une charge publique ou civique (65), soit l’usage contestable d’une voie de droit  (66) (67). Ces amendes sont versées au Trésor public.

La plus connue est celle prévue par l’article 32-1 du code de procédure civile, qui prévoit que « celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 3 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés ».

Le dispositif prévu est strictement encadré, tant en ce qui concerne la définition des manquements susceptibles d’être sanctionnés que ses effets. Il est, à cet égard, pleinement conforme aux exigences constitutionnelles applicables en matière de sanctions, qui s’appliquent également aux amendes civiles (68), et en particulier aux principes de légalité des délits et des peines et de proportionnalité :

–les manquements susceptibles d’entraîner le prononcé d’une amende sont définis en termes clairs et précis ;

– l’amende doit faire l’objet d’une décision spécialement motivée ;

– son montant est plafonné et proportionné à la gravité de l’atteinte et aux facultés contributives du parent.

a.  Les manquements susceptibles d’entraîner le prononcé d’une amende

L’amende prévue ne peut être prononcée par le juge aux affaires familiales que dans deux hypothèses précisément définies :

– soit lorsqu’un parent fait délibérément obstacle de façon grave ou renouvelée aux règles de l’exercice conjoint de l’autorité parentale prévues à l’article 372-1 du code civil en empêchant l’autre parent d’exercer ses prérogatives ;

– soit lorsqu’un parent ne respecte pas une décision ou la convention homologuée fixant les modalités de l’exercice de l’autorité parentale.

i.  L’atteinte grave ou renouvelée aux règles de l’exercice conjoint de l’autorité parentale prévues à l’article 372-1 du code civil

L’article 372-1, inséré par l’article 4 de la présente proposition de loi, précise que tout acte de l’autorité parentale, qu’il ait un caractère usuel ou important, requiert l’accord de chacun des parents lorsqu’ils exercent en commun l’autorité parentale. Il qualifie, par ailleurs, le changement de résidence de l’enfant, dès lors qu’il modifie les modalités d’accueil de l’autre parent, ainsi que le changement d’établissement scolaire, d’actes importants.

L’amende civile pourrait donc s’appliquer si l’un des parents s’abstenait délibérément, de manière grave ou renouvelée, de recueillir l’accord de l’autre parent pour l’accomplissement d’un ou de plusieurs actes importants et, en particulier, s’il changeait la résidence ou l’établissement scolaire de l’enfant en dépit de l’opposition de l’autre parent, sans avoir saisi le juge aux affaires familiales préalablement pour qu’il statue sur ce point. Une amende pourrait également être prononcée si l’un des parents accomplissait, de manière renouvelée, plusieurs actes usuels alors que l’autre parent a expressément exprimé son désaccord, ou encore s’il refusait ou s’abstenait abusivement de donner son accord à l’accomplissement d’actes indispensables pour l’éducation de l’enfant.

ii.  La violation d’une décision ou d’une convention homologuée fixant les modalités d’exercice de l’autorité parentale

L’amende civile prévue par le présent article peut, par ailleurs, être prononcée lorsqu’un parent ne respecte pas une décision ou une convention homologuée fixant les modalités de l’exercice de l’autorité parentale. Tel peut être le cas, par exemple, si l’un des parents ne respecte pas la décision du juge aux affaires familiales déterminant les modalités de résidence de l’enfant (en s’abstenant de remettre l’enfant à l’autre parent lorsqu’il devrait l’être, par exemple) ou s’il fait obstacle au droit de visite de l’autre parent.

On relèvera, en revanche, que le non-versement par un parent de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant ne fait pas partie des modalités d’exercice de l’autorité parentale. Plusieurs articles du code civil distinguent en effet expressément les modalités d’exercice de l’autorité parentale et la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant (articles 373-2-7 et 373-2-8).

b.  Une procédure et un montant strictement encadrés

D’un point de vue procédural, l’amende doit faire l’objet d’une décision spécialement motivée de la part du juge.

Par ailleurs, le montant de l’amende est plafonné à 10 000 euros.

Enfin, les modalités de calcul de l’amende garantissent qu’elle soit « proportionnée à la gravité de l’atteinte aux règles de l’exercice conjoint de l’autorité parentale » – l’accomplissement répété d’actes usuels sans l’accord de l’autre parent ne présente pas la même gravité qu’un changement de résidence de l’enfant à plusieurs centaines de kilomètres, par exemple – « et aux facultés contributives du parent ».

*

* *

La Commission examine l’amendement CL48 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à ajouter un alinéa rappelant la possibilité pour le juge aux affaires familiales d’assortir sa décision d’une astreinte, afin d’en assurer un meilleur respect. Si cette possibilité existe déjà en droit, elle est en pratique très rarement utilisée par les juges aux affaires familiales, alors que l’astreinte peut se révéler adaptée dans certaines situations familiales, en cas de violation d’une obligation précise. Ce pouvoir d’astreinte permettra par exemple de lutter plus efficacement contre le non-paiement de la pension alimentaire prévue par l’article 3732 du code civil ou le non-respect des modalités de résidence de l’enfant.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de rectification CL44 de la rapporteure.

Puis elle rejette l’amendement de coordination CL45 du même auteur.

Elle adopte successivement l’amendement de clarification et de précision CL47 et l’amendement rédactionnel CL46 du même auteur.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL15 de Mme Colette Capdevielle et CL22 de Mme Élisabeth Pochon.

Mme Colette Capdevielle. Si l’exercice du droit de visite et d’hébergement est un droit, le fait que l’un des parents l’exerce de manière « perlée » – c’est-à-dire, en pratique, quand ça lui convient – est très préjudiciable pour l’enfant, qui peut attendre ce parent en vain pendant tout un après-midi, et très déstabilisant pour le parent chez qui l’enfant réside. Cet amendement d’appel – ainsi que l’amendement CL22, qui a le même objet – invite à trouver des moyens de rééquilibrer de telles situations.

Les amendements sont retirés.

La Commission adopte l’article 5 modifié.

Article 6
(art. 373-2-1 du code civil)

Résidence de l’enfant en cas d’exercice unilatéral de l’autorité parentale

Cet article complète le second alinéa de l’article 373-2-1 du code civil, qui prévoit que, si l’intérêt de l’enfant le commande, le juge peut confier l’exercice de l’autorité parentale à l’un des deux parents, afin de préciser que, dans cette hypothèse, le juge fixe la résidence de l’enfant au domicile du parent qui exerce l’autorité parentale.

Tel est déjà évidemment le cas en pratique, mais la précision est nécessaire par coordination avec les modifications insérées par l’article 7. Celui-ci fait en effet de la fixation de la résidence de l’enfant au domicile de l’un des parents l’exception et ne prévoit plus qu’un droit de visite, et non d’hébergement, dans ce cas. Il est donc nécessaire de consacrer à la résidence de l’enfant en cas d’exercice unilatéral de l’autorité parentale une disposition spécifique, qui a naturellement sa place à l’article 373-2-1 du code civil.

*

* *

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL49 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 6 modifié.

Article 6 bis (nouveau)
(art. 373-2-2 du code civil)

Révision du montant de la contribution à l’éducation et à l’entretien de l’enfant si le manquement de l’un des parents à ses obligations a pour effet de modifier la répartition de la charge effective d’entretien et d’éducation de l’enfant

Ce nouvel article est issu de l’adoption par la Commission d’un amendement de M. Erwann Binet et les membres du groupe socialiste, républicain et citoyen. Il complète le deuxième alinéa de l’article 373-2-2 du code civil afin de prévoir que le juge aux affaires familiales peut ajuster la pension alimentaire versée pour contribuer à l’éducation et à l’entretien de l’enfant lorsque le non-respect par l’un des parents de la convention homologuée ou de la décision du juge aux affaires familiales a pour effet de modifier la répartition de la charge effective d’entretien et d’éducation de l’enfant.

Si l’un des parents n’exerce pas son droit de visite et d’hébergement ou s’il ne respecte pas la répartition des périodes de résidence qui a été fixée, ce manquement a pour conséquence d’accroître la charge financière que doit assumer l’autre parent. Il est donc nécessaire d’ajuster le montant de la pension alimentaire en conséquence.

La jurisprudence a déjà admis cette possibilité, mais n’apparaît pas bien établie sur ce point (69).

Il convient de souligner que ce dispositif n’a pas pour effet de lier le droit de visite et d’hébergement ou la durée et la fréquence des périodes de résidence chez l’un des parents au paiement de la pension alimentaire par ce dernier. Son objet est simplement d’ajuster, dans un souci d’équité, le montant de la pension à la modification de la répartition de la charge effective d’entretien et d’éducation de l’enfant entre les parents résultant du fait que l’un d’entre eux accueille l’enfant moins souvent qu’initialement prévu par la convention homologuée ou la décision du juge. Si l’un des parents dispose, par exemple, d’un droit de visite et d’hébergement une fin de semaine sur deux et la moitié des vacances scolaires et, qu’en pratique, il n’exerce pas ce droit, il est évident que la charge financière que doit assumer l’autre parent pour l’éducation et l’entretien de l’enfant est accrue. La révision de la pension alimentaire permettra d’en tenir compte.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CL18 de M. Erwann Binet.

Mme Catherine Coutelle. Cet amendement a pour objet de prévoir expressément que la pension alimentaire peut être révisée par le juge si le non-respect par l’un des parents de la convention homologuée ou de la décision du juge aux affaires familiales a pour effet de modifier la répartition entre les parents de la charge effective d’entretien et d’éducation de l’enfant.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Article 7
(art. 373-2-9 du code civil)

Résidence de l’enfant en cas d’exercice conjoint de l’autorité parentale

Cet article réforme les dispositions du code civil applicables à la résidence de l’enfant en cas de séparation des parents. Il supprime la notion de résidence alternée du code civil, dont les avantages et les inconvénients font débat depuis près de trente ans. Les parents et, en cas de désaccord entre eux, le juge n’auront plus à effectuer un choix binaire, autour duquel les conflits se cristallisent, entre résidence au domicile de l’un des parents ou résidence alternée. Désormais, la résidence de l’enfant au domicile de chacun de ses parents – sans que celle-ci n’implique aucunement un partage égalitaire de la durée de présence au domicile de chacun des parents – sera le principe, quelle que soit la répartition effective des périodes de résidence chez chacun de ses parents. La résidence ne sera plus fixée au domicile de l’un des parents qu’à titre exceptionnel, en cas d’impossibilité matérielle pour ce parent d’accueillir l’enfant chez lui.

En conséquence, la notion de droit d’hébergement – qui était mal ressentie par beaucoup de parents – disparaît dans le cadre de l’exercice conjoint de l’autorité parentale, et celle de droit de visite devient résiduelle, car réservée aux cas dans lesquels l’autre parent ne peut accueillir l’enfant chez lui.

1. La suppression du choix binaire entre résidence alternée et résidence au domicile de l’un des parents au profit de la résidence au domicile de chacun des parents

La résidence alternée a été introduite dans le code civil par la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002. Débattu et sujet de controverses depuis plusieurs décennies, son usage a fait l’objet d’une étude récente du ministère de la Justice. La réforme proposée vise à dépasser les clivages que la résidence alternée a pu susciter, afin que la discussion entre les parents se recentre sur l’essentiel, à savoir la mise en place de l’aménagement pratique des temps d’accueil chez chacun des parents, avec pour exigence la recherche de la meilleure solution dans l’intérêt de l’enfant.

a. L’état du droit

La « garde alternée » – pour reprendre la terminologie alors d’usage – avait été condamnée par la Cour de cassation dans un arrêt du 2 mai 1984 (70) et la loi n° 87-570 du 22 juillet 1987 sur l’exercice de l’autorité parentale, puis la loi n° 93-22 du 8 janvier 1993 modifiant le code civil relative à l’état civil, à la famille et aux droits de l’enfant et instituant le juge aux affaires familiales, en inscrivant dans le code civil la notion de « résidence habituelle » semblaient avoir confirmé cette position. De nombreux juges du fond continuèrent cependant à admettre la résidence alternée (71) et la loi du 4 mars 2002, précitée, a finalement ouvert une option entre résidence alternée et résidence au domicile de l’un des parents.

Le premier alinéa de l’article 373-2-9 du code civil prévoit ainsi que la résidence de l’enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l’un d’eux, soit par la convention homologuée par le juge par laquelle les parents ont organisé d’un commun accord les modalités d’exercice de l’autorité parentale, soit par le juge. La loi marque même une certaine préférence pour la résidence alternée, qui est mentionnée en premier lieu. Le deuxième alinéa du même article prévoit en outre que le juge peut, à la demande de l’un des parents ou en cas de désaccord entre eux sur le mode de résidence de l’enfant, ordonner à titre provisoire une résidence en alternance dont il détermine la durée. Au terme de celle-ci, il statue définitivement sur la résidence de l’enfant.

La Cour de cassation a jugé que la résidence alternée n’implique pas que le temps passé par l’enfant auprès de chacun de ses parents soit de même durée et que le juge peut, si l’intérêt de l’enfant le commande, compte tenu des circonstances de la cause, décider d’une alternance aboutissant à un partage inégal du temps de présence de l’enfant auprès de chacun de ses parents (72).

La résidence alternée emporte des conséquences fiscales et sociales.

D’un point de vue fiscal, le I de l’article 194 du code général des impôts prévoit que, en cas de résidence alternée au domicile de chacun des parents et sauf disposition contraire dans la convention homologuée par le juge, la décision judiciaire ou, le cas échéant, l’accord entre les parents, les enfants mineurs sont réputés être à la charge égale de l’un et de l’autre parent. Cette présomption peut être écartée s’il est justifié que l’un d’entre eux assume la charge principale des enfants. En conséquence, lorsque les enfants sont réputés être à la charge égale de chacun des parents, la majoration du quotient familial est égale à la moitié de celle qui serait attribuée en cas de résidence exclusive, assurant ainsi un partage égal entre les deux parents (73). Le partage de la majoration de part implique aussi celui des réductions et crédits d’impôt prévus pour les frais de garde des enfants et de scolarité des enfants scolarisés dans l’enseignement supérieur et secondaire.

En matière d’allocations familiales, l’article L. 521-2 du code de la sécurité sociale précise qu’en cas de résidence alternée mise en œuvre de manière effective, les parents désignent en principe l’allocataire. Les allocations familiales peuvent cependant être partagées en deux parts égales soit sur demande conjointe des parents, soit en cas de désaccord sur la désignation de l’allocataire.

b. L’application de la résidence alternée

● Les résultats de l’étude menée par le ministère de la Justice en 2012

Le ministère de la Justice a lancé une étude, au milieu de l’année 2012, une vaste étude sur la résidence alternée, dont les résultats ont été publiés en novembre 2013 (74).

Cette étude a porté sur 6042 décisions, concernant 9399 enfants, rendues entre le 4 et le 15 juin 2012. Il ressort de l’analyse de ces décisions que dans 80 % des situations, les parents sont en accord sur la résidence des enfants et dans 10 % des cas en désaccord. Dans les 10 % des situations restantes, l’un des deux parents n’a pas exprimé de demande.

Au total, 96 % des demandes des mères sont satisfaites, et 93 % de celles des pères.

Lorsque les parents sont d’accord, ils demandent, pour 71 % des enfants, une résidence chez la mère, pour 10 % une résidence chez le père et pour 19 % une résidence alternée. Les juges homologuent dans la quasi-totalité des cas (99,8 %) les demandes des parents.

Lorsque les parents sont en désaccord, pour 52 % des enfants, le père demande la résidence chez lui, la mère chez elle, pour 35 % des enfants, le père demande la résidence alternée, la mère une résidence chez elle, et pour 6 % des enfants, le père demande une résidence chez lui, alors que la mère demande une résidence alternée.

Lorsque chacun des parents demande la résidence chez lui, le juge prononce la résidence chez la mère pour 62 % des enfants, et chez le père pour 36 % d’entre eux.

Lorsque le père demande une résidence alternée et la mère une résidence chez elle, le juge prononce une résidence alternée pour 25 % des enfants et la résidence chez la mère pour 75 % d’entre eux.

Lorsque la mère demande une résidence alternée et le père une résidence chez lui, le juge prononce une résidence alternée pour 40 % des enfants et une résidence chez le père pour 60 %.

Au total, dans les situations de désaccord, les juges fixent la résidence des enfants :

– pour 63 % d’entre eux chez la mère (pour 71 % en cas d’accord des parents) ;

– pour 24 % d’entre eux chez le père (pour 10 % en cas d’accord) ;

– pour 12 % c’est la résidence alternée qui est retenue (pour 19 % en cas d’accord).

● L’évolution de la résidence alternée entre 2004 et 2012

Toutes procédures confondues, la part d’enfants mineurs pour lesquels une résidence alternée a été prononcée est passée de 9,9 % en 2004 (soit 14 076 décisions sur 142 179 décisions) à 16,4 % en 2012 (soit 26 964 décisions sur 164 147 décisions).

Pour les seules procédures de divorce, la part d’enfants mineurs en résidence alternée est passée de 11,5 % en 2004 à 20,9 % en 2012.

Toutes procédures confondues, entre 2002 et 2012, l’âge moyen d’un enfant résidant en alternance oscille entre 9 et 10 ans. L’étude rendue en novembre 2013, précitée, met en évidence que la résidence alternée est privilégiée pour les enfants de 5 à 10 ans, tandis que la résidence chez la mère est privilégiée pour les enfants de moins de cinq ans et que la résidence chez le père est plus fréquemment choisie pour les adolescents.

c. La réforme proposée

La résidence alternée suscite des débats importants. Ses partisans font valoir qu’elle est le seul mode de résidence permettant à l’enfant de conserver des liens équilibrés avec chacun de ses parents et assurant l’égalité des parents. Ses adversaires avancent que l’alternance de l’hébergement risque de déstabiliser l’enfant, ballotté d’un parent à l’autre au fil des jours et des semaines, et que ce mode de résidence privilégie l’intérêt des parents ou de l’un d’entre eux, au détriment de celui de l’enfant.

Lors de l’examen en première lecture du projet de loi sur l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, le Sénat a adopté, en séance, le 17 septembre 2013, un amendement qui prévoyait notamment de favoriser prioritairement le prononcé de la résidence alternée paritaire (c’est-à-dire avec une répartition égale des temps de présence au domicile de chacun des parents), sauf décision motivée du juge. Cet article additionnel a été supprimé par la commission des Lois de l’Assemblée nationale, le 18 décembre 2013, au motif que le dispositif proposé encadrait excessivement la marge d’appréciation du juge, sans lui permettre d’apprécier in concreto quelle est la solution la plus adaptée à l’intérêt de l’enfant. La détermination de la résidence de l’enfant n’est pas apparue, par ailleurs, relever de l’égalité entre les femmes et les hommes, l’intérêt de l’enfant devant primer toute autre considération dans ce domaine.

Le groupe de travail sur la coparentalité, précité, qui avait été chargé de faire des propositions sur le sujet, n’est pas parvenu à un consensus et n’a donc pas adopté de proposition commune.

La réforme proposée vise à dépasser ces clivages en faisant disparaître l’alternative binaire ouverte, en cas de séparation des parents, par le premier alinéa de l’article 373-2-9, entre la résidence alternée ou la résidence au domicile de l’un des parents. S’inspirant d’une proposition formulée dans le rapport du groupe de travail sur la médiation familiale et les contrats de co-parentalité présidé par M. Marc Juston (75), mis en place en octobre 2013 par la ministre déléguée à la famille, il est ainsi proposé de poser pour principe, au premier alinéa de l’article 373-2-9, que « la résidence de l’enfant est fixée au domicile de chacun de ses parents, selon des modalités de fréquence et de durée déterminées d’un commun accord entre les parents ou à défaut par le juge ».

Les parents n’auront donc plus à faire entrer l’organisation pratique retenue dans un « schéma » et à opérer un choix binaire entre résidence alternée ou résidence chez l’un d’entre eux. Cette réforme fait disparaître la référence à une dénomination particulière, sans influer sur la répartition effective des temps passés au domicile de chacun des parents. La résidence au domicile de chacun des parents n’implique en effet pas une répartition égale des temps de présence chez chacun d’entre eux. Sur ce point, la Commission, sur l’initiative de votre rapporteure, a adopté un amendement de précision, faisant référence aux modalités « de fréquence et de durée », afin de mettre plus clairement encore en évidence que l’alternance des temps de résidence au domicile de chacun des parents ne signifie aucunement que ces temps de résidence devront être égaux.

Pour prendre un exemple concret, des parents souhaitant fixer, en application du droit en vigueur, la résidence de l’enfant chez l’un d’entre eux et que l’enfant se rende au domicile de l’autre parent les fins de semaines des semaines paires et la moitié des vacances scolaires pourront retenir exactement la même organisation pratique avec le dispositif proposé. La seule différence sera que, au lieu de fixer la résidence au domicile de l’un des parents tandis que l’autre ne disposerait que d’un droit de visite et d’hébergement, l’enfant aura sa résidence au domicile de chacun d’entre eux, même si, en pratique, le temps passé au domicile de l’un de ses deux parents sera bien inférieur au temps passé chez l’autre. Du point de vue fiscal et social, ce n’est évidemment pas le régime actuellement applicable à la résidence alternée qui sera appliqué dans cette situation : les avantages fiscaux et les allocations familiales resteront attribués au parent qui assume à titre principal la charge effective de l’enfant.

Dans certaines situations, il sera matériellement impossible de fixer la résidence de l’enfant chez l’un des parents. Tel peut être le cas, en particulier, s’il ne peut l’accueillir à son domicile, soit parce qu’il en est dépourvu, soit parce que ce dernier ne lui permet pas d’accueillir un enfant, ou pour d’autres raisons. Dans un tel cas de figure, le second alinéa de l’article 373-2-9 prévoit, qu’à titre exceptionnel, le juge peut fixer la résidence de l’enfant au domicile de l’un des parents. Dans ce cas, il statue sur le droit de visite de l’autre parent. Celui-ci pourra, si les circonstances l’exigent, être exercé dans un espace de rencontre qu’il désigne, comme c’est le cas dans le droit en vigueur.

Le 2° du présent article reprend, par ailleurs, en l’adaptant à la nouvelle rédaction de l’article 373-2-9, le deuxième alinéa actuel dudit article, qui permet au juge d’ordonner à titre provisoire une résidence en alternance dont il détermine la durée, avant de statuer définitivement (76) sur la résidence de l’enfant. La résidence en alternance ayant disparu, ce sont désormais les modalités de fréquence et de durée de la résidence de l’enfant qui peuvent être fixées par le juge à titre provisoire.

2. La disparition du droit d’hébergement dans le cadre de l’exercice conjoint de l’autorité parentale

La résidence au domicile de chacun des deux parents devenant le principe, la notion de droit d’hébergement disparaît dans le cadre de l’exercice conjoint de l’autorité parentale. Celle de droit de visite subsiste, mais de manière très résiduelle, puisqu’elle ne s’appliquera plus qu’à titre exceptionnel, lorsqu’il n’est pas possible de fixer la résidence au domicile de chacun des parents, pour des raisons matérielles. La suppression – s’agissant du droit d’hébergement – et la quasi disparition – s’agissant du droit de visite – de cette terminologie est une conséquence bienvenue de la réforme proposée, car ces termes étaient mal ressentis par de nombreux parents, pour lesquels disposer des droits de « visiter » visite et « d’héberger » son enfant ne saurait correspondre à l’exercice conjoint de l’autorité parentale.

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La Commission adopte l’amendement de précision CL50 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 7 modifié.

Article 7 bis (nouveau)
(art. 373-2-12 du code civil)

Pouvoir du juge aux affaires familiales d’ordonner une expertise en vue de recueillir des éléments médicaux ou psychologiques

Ce nouvel article est issu de l’adoption par la Commission d’un amendement de votre rapporteure. Il a pour objet de consacrer la possibilité pour le juge aux affaires familiales d’ordonner une expertise en vue de recueillir des éléments médicaux ou psychologiques.

L’état du droit sur cette question n’est pas parfaitement cohérent. En effet, le 4° de l’article 373-2-11 du code civil prévoit que le juge, lorsqu’il se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, prend en considération les résultats des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l’âge de l’enfant, mais aucun article du code ne prévoit expressément qu’il peut les ordonner. L’article 373-2-12 du même code ne permet en effet au juge d’ordonner qu’une enquête sociale.

Il est donc opportun de préciser à l’article 373-2-12 du code civil que le juge peut, au même titre qu’il donne mission à une personne qualifiée d’effectuer une enquête sociale, ordonner une mesure d’expertise. Cette modification est opérée par le 1° du présent article, qui insère à cette fin un nouvel alinéa après le premier alinéa de l’article 373-2-12.

Afin de couvrir l’ensemble des expertises que les juges aux affaires familiales peuvent ordonner, il convient de ne pas qualifier cette expertise « d’expertise médico-psychologique », mais de prévoir seulement qu’elle est ordonnée « en vue de recueillir des éléments médicaux ou psychologiques ».

Comme pour l’enquête sociale, l’expertise doit pouvoir donner lieu à une contre-expertise, et ses résultats ne doivent pas être utilisés dans le débat sur la cause du divorce. Ces modifications de conséquence sont opérées, respectivement, par les 2° et 3° du présent article, qui modifient les deuxième et dernier alinéas de l’article 373-2-12 du code civil.

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La Commission est saisie de l’amendement CL58 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Afin de couvrir l’ensemble des expertises que les juges aux affaires familiales peuvent ordonner, il convient de ne pas qualifier cette expertise d’« expertise médico-psychologique », mais de prévoir seulement qu’elle est ordonnée en vue de recueillir des éléments médicaux ou psychologiques.

La Commission adopte l’amendement.

Article 8
(art. 227-5 du code pénal)

Transformation du délit de non-représentation d’enfant en contravention de la quatrième classe lors de la première infraction

Cet article, partant du constat d’un taux très élevé de classement sans suite du délit de non-représentation d’enfant prévu par l’article 227-5 du code pénal, « contraventionnalise » ce délit, lors de la première infraction, afin qu’il soit plus efficacement réprimé en pratique. Il crée par ailleurs deux faits justificatifs à la non-représentation d’enfant et opère une modification de coordination à l’article 227-9 du code pénal.

1. Un délit rarement sanctionné en pratique

La non-représentation d’enfant, définie par l’article 227-5 du code pénal, fait rarement l’objet de poursuites pénales en pratique.

a. Définition et éléments constitutifs de la non-représentation d’enfant

Le délit de non-représentation d’enfant fait partie, avec la soustraction de mineur par un ascendant (article 227-7 du code pénal) et par un tiers (article 227-8 du même code) et le défaut de notification de changement de domicile (article 227-6), des atteintes à l’exercice de l’autorité parentale réprimées par la section 3 du chapitre 7 du titre 2 du livre II du code pénal.

La non-représentation de mineur est définie par l’article 227-5 du code pénal comme « le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer ». Il est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Cette infraction vient sanctionner le non-respect des droits de visite, d’hébergement ou de garde d’une personne sur un enfant mineur, que ces droits proviennent d’une décision de justice, d’une convention judiciairement homologuée ou de la loi (77).

L’élément matériel constitutif de la non-représentation d’enfant est le fait de ne pas remettre l’enfant au titulaire d’un droit de visite ou de garde, ou de ne pas ramener l’enfant au parent chez qui l’enfant réside après avoir exercé un droit de visite. La matérialité de l’infraction peut résulter d’actes positifs, comme le fait d’éloigner l’enfant au moment où le parent vient le chercher (78) ou de mettre en place un stratagème pour faire obstacle au droit de visite (79), mais elle peut être commise par omission (80).

La non-représentation est une infraction intentionnelle et suppose une intention délictueuse. Il faut donc que l’auteur ait connaissance de l’obligation de représenter l’enfant. La décision de justice prévoyant le droit de visite doit, par exemple, être suffisamment précise à cet égard (81).

La jurisprudence, bien que généralement exigeante dans son appréciation des faits justificatifs invoqués dans ce cadre, a admis que le refus était justifié en cas de danger encouru par l’enfant entre les mains de celui qui le réclame. Tel est le cas, par exemple, en cas de risque d’enlèvement du mineur à l’étranger (82), de risques de perturbations psychologiques graves (83) ou de comportement violent du parent auquel l’enfant doit être remis (84). La résistance de l’enfant ne constitue en général pas un fait justificatif ou une excuse légale, sauf lorsque l’enfant est proche de la majorité (85).

Outre les peines principales, des peines complémentaires sont prévues par l’article 227-29 du code pénal (86).

Les peines sont aggravées et relevées à trois ans d’emprisonnement et à 45 000 euros d’amende si l’enfant est retenu au-delà de cinq jours sans que ceux qui ont le droit de réclamer qu’il leur soit représenté sachent où il se trouve ou s’il est retenu indûment hors du territoire de la République (article 227-9 du code pénal).

b. Un délit rarement réprimé

Le ministère de la Justice ne dispose pas de statistiques distinctes pour les trois infractions sanctionnant les atteintes à l’exercice de l’autorité parentale, qui sont regroupées dans la rubrique « contentieux sur l’exercice de l’autorité parentale ».

En 2012, au niveau des services enquêteurs, sur 23 000 personnes mises en cause, 400 gardes à vue ont été mises en œuvre, soit un rapport de 1,7 %.

Au niveau du parquet, ces contentieux ont représenté, la même année, 28 600 affaires, dont 60 % ont fait l’objet d’un classement sans suite, l’infraction étant considérée comme insuffisamment ou non caractérisée. 15 % des 11 000 affaires pouvant faire l’objet de poursuites ont été classées en raison de la régularisation d’office de la situation, du désistement du plaignant ou du comportement de la victime. Les alternatives aux poursuites ont été privilégiées (85 %).

Depuis 2008, le nombre de condamnations du chef de non-représentation d’enfants et de non-représentation d’enfants aggravée oscille entre 800 et 900 condamnations annuelles. S’agissant de la non-représentation d’enfant « simple », les principales décisions prononcées sont l’emprisonnement, ferme ou avec sursis (50 % des décisions environ), la dispense de peine (entre 25 et 30 %) et l’amende.

2. La réforme proposée

Le présent article vise à améliorer l’exécution et la sanction des violations des décisions de justice statuant sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, en adaptant le dispositif réprimant la non-représentation d’enfant, conformément aux recommandations du rapport du groupe de travail sur la coparentalité, précité. Il insère également à l’article 227-5 du code pénal des faits justificatifs à la non-représentation d’enfant et opère une modification de coordination à l’article 227-9 du même code.

a. La « contraventionnalisation » de la non-représentation d’enfant lors de la première infraction

Il est proposé de transformer en contravention de la 4e classe l’infraction de non-représentation d’enfant, lors de la première infraction. Cette contravention, créée par le I du présent article (non codifié puisque la partie législative du code pénal ne comporte pas de contravention), pourra être forfaitisée, et donc donner lieu à des amendes forfaitaires de 135 ou 375 euros.

Les faits resteront délictueux en cas de réitération, c’est-à-dire en cas de nouvelle commission dans un délai de deux ans. Tel est l’objet du 1° du II du présent article, qui complète l’article 227-5 du code pénal en ce sens. Sur l’initiative de votre rapporteure, la Commission a légèrement modifié la rédaction de cette disposition. Celle-ci exigeait simplement, pour que la non-représentation devienne délictuelle, qu’un tel fait ait déjà été commis au cours des deux années précédentes. Il est apparu préférable, car plus précis (87) , d’exiger que la personne concernée ait déjà fait l’objet d’une première contravention pour un fait identique. Cette solution s’inspire de celle retenue pour le délit de défaut habituel de titre de transport, prévue par l’article L. 2242-6 du code des transports (88).

Ce dispositif, bien que transformant partiellement un délit en contravention de 4e classe, sera plus dissuasif que le mécanisme actuel, car il permettra une verbalisation immédiate, dès le premier fait de non-représentation, sans passage devant un tribunal. La réforme a un objectif pédagogique et préventif et vise à éviter que de tels faits se reproduisent.

b. La prise en compte de deux faits justificatifs

Le délit de non-représentation d’enfant est défini, comme cela a été rappelé, comme le fait de refuser « indûment » de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer. L’adverbe « indûment » souligne l’existence de faits justificatifs – outre les causes d’irresponsabilité ou d’atténuation de la responsabilité prévues pour l’ensemble des infractions par les articles 122-1 à 122-8 du code (89) – susceptibles de faire obstacle aux poursuites ou, à tout le moins, à une condamnation.

Sur l’initiative de votre rapporteure, la Commission a adopté un amendement complétant l’article 227-5 du code pénal afin de prévoir expressément deux faits justificatifs. Le 2° du II du présent article prévoit ainsi que ne peut donner lieu à des poursuites pénales le fait de refuser de représenter à un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer :

– si la représentation de l’enfant ferait courir un danger à celui-ci ;

– en cas de manquement grave et habituel du titulaire du droit de réclamer l’enfant aux obligations qui lui incombent en application du deuxième alinéa de l’article 373-2 du code civil, qui prévoit que chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l’enfant et respecter les liens de celui-ci avec l’autre parent.

Le premier de ces faits justificatifs a déjà été retenu par la jurisprudence (voir supra).

Le second constitue en revanche une innovation, qui vise à tenir compte des situations dans lesquelles l’un des parents manque gravement et de manière habituelle à son obligation de maintenir des relations personnelles avec l’enfant, par exemple parce qu’il n’exerce pas son droit de visite et d’hébergement.

Pour prendre un exemple concret, lorsque le parent qui dispose d’un droit de visite une fin de semaine sur deux ne l’exerce pas ou très irrégulièrement, il apparaît injustifié et contraire à l’intérêt de l’enfant que l’autre parent soit tenu de garder l’enfant enfermé à son domicile à la date prévue par la décision ou la convention homologuée, alors que le parent titulaire du droit de visite ne viendra pas le chercher, pour ne pas risquer des poursuites. Dans de telles situations, le parent concerné doit être, sinon libéré de son obligation de représenter l’enfant, du moins ne pas risquer de poursuites pénales.

L’adverbe « indûment » est maintenu au premier alinéa de l’article 227-5 du code pénal, car ces deux faits justificatifs ne sont évidemment pas les seuls applicables et leur insertion dans le code n’a pas pour objet de remettre en cause les autres causes d’irresponsabilité déjà admises par la jurisprudence.

Ces deux faits justificatifs seront également applicables en matière contraventionnelle, une référence aux trois derniers alinéas de l’article 227-5 du code pénal ayant été inséré au I de l’article 8 de la présente loi.

c. La modification de coordination de l’article 227-9 du code pénal

Sur l’initiative de la rapporteure, la Commission a adopté une modification de coordination de l’article 227-9 du code pénal.

En effet, la « contraventionnalisation » du délit de non-représentation d’enfant opéré par l’article 8 aurait pu être interprétée comme rendant inapplicable, lors de la première infraction, l’aggravation des peines prévue par l’article 227-9 du code pénal dans les deux hypothèses suivantes :

– lorsque l’enfant est retenu au-delà de 5 jours sans que ceux qui ont le droit de réclamer qu’il leur soit représenté sachent où il se trouve ;

– si l’enfant mineur est retenu indûment à l’étranger.

En d’autres termes, la non-représentation d’enfant, dans ces hypothèses très graves, serait elle aussi devenue une contravention.

Tel n’est évidemment pas le but recherché par cet article. L’amendement adopté a donc levé cette ambiguïté, en ne faisant plus référence dans l’article 227-9 du code pénal à l’article 227-5 (qui ne réprime désormais plus que la réitération du fait de non-représentation) mais au fait de refuser indûment de représentant un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer.

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* *

La Commission examine l’amendement CL53 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet « amendement fenêtre » – ainsi désigné car il prend en compte la situation des enfants qui attendent indéfiniment à la fenêtre un parent qui ne vient jamais – tend à exonérer d’une condamnation le parent qui, pour avoir voulu éviter à l’enfant cette attente vaine, ne se trouverait pas en mesure de le représenter à l’autre parent le jour où, par extraordinaire et contrairement à son habitude, celui-ci serait venu le chercher. L’amendement tend aussi à appliquer cette exonération en cas de violences de la part de l’autre parent.

M. Philippe Houillon. Cet amendement, qui répond à des préoccupations réelles, est beaucoup trop flou. En cas d’erreur ou d’abus dans le recours à cette disposition, la personne débitrice du droit de visite ou d’hébergement s’exposerait à des poursuites pénales. Du reste, il est déjà possible de saisir le juge aux affaires familiales pour suspendre le droit de visite dans ces situations – mais ce n’est pas le premier de vos amendements qui réinvente le fil à couper le beurre. Faute de précision, le dispositif proposé par l’amendement sera source de contentieux.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

Mme la rapporteure. Le Parquet n’engagera pas de poursuites pénales. Il est très facile de prouver, sur la foi de témoignages, qu’un parent n’est pas venu. L’amendement a pour objet de supprimer l’épée de Damoclès qui oblige à faire attendre à un enfant la visite d’un parent qui ne viendra pas. C’est là une question très pratique.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement qui prévoit des faits justificatifs à la non-représentation d’un enfant mineur est très important. On peut toujours se demander s’il est suffisamment précis, mais son absence poserait d’autres problèmes.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite successivement l’amendement de précision CL51 et l’amendement de clarification CL52 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 8 modifié.

Après l’article 8

La Commission est saisie de l’amendement CL23 de M. Sergio Coronado.

Mme Véronique Massonneau. Si la gestation pour autrui (GPA) est prohibée par notre droit, ce n’est pas le cas pour les traitements de PMA réalisés à l’étranger par des couples de femmes ou des femmes seules. La loi ne permet pas à ces femmes d’avoir accès à ce qui n’est qu’une technique d’assistance, qui permet de sécuriser sanitairement et juridiquement les femmes qui souhaitent avoir un enfant et les pères.

Dans l’intérêt des enfants, il convient de permettre la reconnaissance de leur filiation. Or, au mépris le plus total de cet intérêt, un récent jugement du tribunal de Versailles a interdit une adoption par la mère sociale.

L’article 312 du code civil énonce que l’enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari, établissant une filiation légitime. Il y a lieu d’instaurer une présomption de parenté dans un couple de femmes, pour un enfant qui résulterait d’un projet parental commun, afin que la filiation et les droits des deux mères sur l’enfant soient bien reconnus. Un certain nombre d’enfants « résultent d’un projet parental commun », notion qui figure dans l’arrêt du 20 octobre 2011 de la cour d’appel de Paris. Ce projet parental commun distingue les parents des familles homoparentales, qui sont souvent partie prenante dans le projet de parentalité, des beaux-parents. Les points II, III et IV sont des dispositions de coordination.

Cet amendement permettrait de résoudre l’établissement de la filiation pour la conjointe de la mère, qu’il y ait eu ou non recours aux techniques médicales d’assistance à la procréation.

M. Olivier Dussopt. Je tiens tout d’abord à saluer le travail de la rapporteure et du responsable de notre groupe qui, après que nous avons vu s’éloigner la perspective d’examiner une grande loi sur la famille portée par le Gouvernement, ont eu le courage de reprendre les travaux et de nous présenter cette première proposition de loi – qui en appelle d’autres – afin de faire avancer les chantiers qui auraient dû être ceux de la loi sur la famille.

Lors de l’examen du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe, nous avions dit que l’adoption simple serait autorisée au sein du couple homoparental ou hétéroparental et que, si nous autorisions l’adoption simple au sein d’un couple homoparental – en pensant particulièrement aux couples de femmes –, nous nous trouverions dans la situation baroque consistant à refuser dans le même temps à ces couples de femmes l’accès à la procréation médicalement assistée, seule méthode possible pour avoir accès à la maternité, des méthodes plus dangereuses pour leur santé et pour leur couple étant exclues.

Cela n’a pas été le cas et cet amendement est aussi pour moi l’occasion de dire que j’aurai toujours le regret que l’accès de toutes les femmes – et non pas seulement des couples – à la procréation médicalement assistée n’ait pas été prévu par le texte que nous avons adopté, lequel, bien qu’il constitue un grand progrès, reste lacunaire sur ce point.

La décision rendue à Versailles a souligné les difficultés que pourrait provoquer l’absence d’ouverture d’accès à la PMA pour toutes les femmes, en exposant des couples à un risque juridique quant à la possibilité d’adopter un enfant et de faire reconnaître le rôle du parent social – en l’occurrence la mère – en lui permettant d’être la mère adoptive.

J’entends les arguments selon lesquels cette proposition de loi n’est peut-être pas le meilleur véhicule législatif pour combler, même partiellement, cette lacune et, bien que je n’aie guère l’habitude de trop m’éloigner des positions de mon groupe politique, je voterai cet amendement qui me paraît cohérent avec ce que j’ai défendu durant les débats sur le mariage pour tous.

M. Erwann Binet. Cet amendement répond à la très grande surprise suscitée par les trois jugements rendus la semaine dernière par le tribunal de grande instance de Versailles pour refuser l’adoption, au sein de couples de femmes, d’enfants conçus par PMA à l’étranger. Ce faisant, il donne à ces jugements une importance qu’ils ne méritent pas, sinon bien sûr pour les familles concernées, légitimement bouleversées par cette décision. En effet, ces trois jugements ne parviennent pas à cacher les dizaines de jugements qui, depuis plusieurs mois et dans tous les autres tribunaux de grande instance de France, permettent ces adoptions. Ils ne font donc pas jurisprudence.

Ils ne méritent pas non plus l’importance qu’on leur donne parce qu’ils ne respectent ni le sens de la loi sur le mariage pour tous ni l’intention du législateur. Lors de nos débats, il a en effet toujours été admis que l’adoption ouverte aux couples de même sexe serait très largement investie par les couples de femmes dont les enfants ont été conçus par PMA réalisée à l’étranger, et que ce cas représenterait la très grande majorité des demandes d’adoption. Cela a donc toujours été l’intention du législateur.

Ces jugements ne méritent pas non plus cette importance parce que leurs motifs sont très critiquables. Ils se fondent en effet sur des réserves imaginaires du Conseil constitutionnel et reprennent l’argument des opposants au mariage pour tous tendant à laisser penser – ce qui est baroque – que l’ouverture de la PMA aux couples de lesbiennes ouvrirait la GPA aux mêmes couples, pour des raisons d’égalité, oubliant que notre droit établit cette même discrimination entre les couples hétérosexuels, dont certains peuvent recevoir une réponse à leur désir d’enfant au moyen de la PMA parce que leur stérilité le permet, tandis que d’autres ne le pourraient parce que la réponse à leur stérilité est la GPA qui est interdite. Il existe donc dans notre droit une inégalité qui n’est pas soulignée par les juges.

Enfin, ces jugements se fondent sur une notion de fraude qui, à en croire de nombreux juristes qui s’expriment depuis la semaine dernière, n’a pas sa place en l’espèce.

Dans l’intervention qu’il a faite ce matin, le président de la République a rappelé qu’une éventuelle réforme de la procréation médicalement assistée, qui va bien au-delà de la question de l’ouverture aux couples de lesbiennes, devait attendre l’avis du Comité national consultatif d’éthique. Cette position est celle du groupe SRC.

Quant aux décisions du tribunal de grande instance de Versailles, nous espérons que, très rapidement, les jugements d’adoption concernant les couples de même sexe suivront à nouveau les rails du droit voulu il y a un an par la représentation nationale.

M. Sergio Coronado. Les difficultés rencontrées par les couples de même sexe étaient prévisibles et nous les avions évoqués lors des débats sur le projet de loi. De fait, nous étions plusieurs à souligner que, dès lors que nous ouvrions le mariage, la question de la filiation ne pourrait être mise de côté, notamment la façon dont les couples homosexuels font des enfants et veulent que la filiation soit établie.

Je me félicite que la garde des Sceaux ait donné une suite favorable à cette préoccupation avec la circulaire du 25 janvier 2013 qui permet l’octroi d’une pièce nationale d’identité à des enfants nés d’une GPA à l’étranger – ce qui ne revenait pas à légaliser la GPA, mais à sécuriser la situation des enfants, comme je l’avais demandé à plusieurs reprises durant le débat. Je souhaitais du reste que l’on aille plus loin et que la question de la retranscription à l’état civil soit réglée. Le Gouvernement a fait un demi-pas en ce sens et nous attendons désormais que le pas soit entièrement franchi.

Pour ce qui est des couples de femmes ayant recours à la PMA, un amendement très similaire a été déposé durant le débat sur l’ouverture du mariage aux couples de même sexe. La garde des Sceaux et vous-même, monsieur Binet, qui étiez alors rapporteur de ce texte, m’avez assuré que la loi serait parfaitement interprétée par les magistrats et ne soulèverait pas de difficultés. La preuve en a été donnée.

Monsieur Binet, si les propos que vous venez de formuler ne sont pas faux, erronés ou de mauvaise foi, du moins donnent-ils une description très optimiste de la situation réelle. Les décisions de justice qui ont été rendues font apparaître une très grande disparité de traitement de ces questions entre les tribunaux. En outre, la Chancellerie a sur ce point une position différente de la vôtre et nous ne disposons pas d’enquêtes statistiques sur l’adoption en fonction du sexe des parents. Le tableau que vous dressez est contredit par de récents articles de presse, notamment par une enquête publiée par un journal du soir, qui souligne la très grande disparité dans le traitement des demandes d’adoption depuis le vote de la loi.

Il ne s’agit pas ici de réintroduire la question de la PMA, mais d’assurer l’établissement de la filiation et de sécuriser la situation de ces enfants. Je l’avais dit lors de l’examen du texte et je le redis solennellement : nous aurons le débat sur la procréation médicalement assistée dans le cadre d’une niche parlementaire à l’initiative du groupe écologiste. Si la rapporteure ne peut s’engager à combler cette lacune en séance, j’appelle l’ensemble de la représentation nationale à voter l’amendement CL23, qui tient compte de la situation des enfants – laquelle, à en croire la secrétaire d’État, est ce qui mobilise désormais le Gouvernement.

M. Philippe Gosselin. M. Coronado a raison de dire que, dès lors que nous abordions la question du mariage, celle de la filiation ne pouvait que se poser. Je comprends qu’il souhaite déposer un amendement à caractère émotionnel, lié au jugement du tribunal de grande instance de Versailles – qui est, à ma connaissance, le seul actuellement rendu en ce sens, car les procureurs qui ont pu se prononcer contre l’adoption, notamment à Marseille et à Aix, n’ont pas été suivis et il appartiendra à une cour d’appel ou à la Cour de cassation de faire jurisprudence.

Dans tous les cas, cependant, le mécanisme est bancal et le signal envoyé est que, la PMA et la GPA n’étant pas autorisées en France, il suffit d’aller à l’étranger, car il n’y aura pas de difficultés juridiques au retour et la filiation sera reconnue au nom de l’intérêt de l’enfant. L’adoption de l’amendement ne s’impose donc nullement.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement est très attaché à ce que la loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe soit entièrement appliquée et respectée. En ce sens, nous ne souhaitons pas non plus rouvrir le débat sur la loi « Taubira ». Je comprends l’émotion et la vigilance des parlementaires qui déposent et soutiennent cet amendement, mais je crains que ce dernier ne soit pas utile pour intervenir dans les situations actuelles. En effet, comme l’a indiqué tout à l’heure M. Binet, l’adoption par l’épouse de la mère ayant eu un enfant par PMA est accordée par la quasi-totalité des tribunaux.

J’ai tendance à avoir confiance dans les associations et j’en ai reçu plusieurs, dont deux qui me semblent particulièrement vigilantes et attentives à propos de ce dossier : l’Association des parents gays et lesbiens et l’Inter-LGBT. Croisant les informations fournies par ces associations et les chiffres transmis par la Chancellerie, je sais que, lorsqu’un jugement n’est pas conforme à l’esprit de la loi, il remonte aux associations et aux médias, et on en entend parler.

Jusqu’à présent, un seul tribunal de grande instance, celui de Versailles, a fait de la loi « Taubira » une interprétation qui ne nous semble conforme ni à l’esprit de la loi ni à l’intention du législateur. Il serait inquiétant qu’un amendement vienne confirmer que la loi « Taubira » comporte une zone d’incertitude et d’ambiguïté, et cela d’autant plus que, d’un point de vue juridique, le raisonnement des juges de Versailles est assez douteux. Tirant argument de la fraude pour refuser l’adoption, il confond en effet la fraude à l’adoption, qui n’est pas en cause ici, et la fraude à la conception, qui conduirait à remettre en cause la mère biologique elle-même. Ce raisonnement juridique me semble donc voué à l’échec et je ne voudrais pas qu’un amendement adopté sur un texte qui n’est pas consacré à la filiation vienne en quelque sorte conforter une interprétation actuellement minoritaire dans les tribunaux.

D’autre part, aucune rédaction législative ne protège d’un jugement qui diffère des autres et qui appellera une décision de cour d’appel, puis un arrêt de cassation – c’est la nature même du droit et de la loi que d’être appliqués et interprétés.

Enfin, la transposition de la présomption de paternité en présomption de parenté toucherait très fortement à la filiation et aurait des conséquences qui mériteraient une étude d’impact.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable à cet amendement et très favorable au respect et à l’application de la loi « Taubira ». Comme l’a déjà déclaré aujourd’hui le président de la République, nous attendons la décision du comité d’éthique.

Mme la rapporteure. Avis défavorable.

M. Sergio Coronado. L’amendement ayant déjà été déposé par notre groupe lors de l’examen du projet de loi ouvrant le mariage civil aux couples de même sexe, il n’a pas été rédigé sous le coup de l’émotion, mais il procède d’une conviction et d’un raisonnement. Je fais en effet partie des parlementaires qui ont des convictions et qui les portent dans chaque débat – à la différence de certains autres, qui prennent des engagements et en changent lorsqu’ils changent de fonctions.

Quant à l’étude d’impact de la transposition de la présomption de paternité en présomption de parenté, dont vous déplorez l’absence, il fallait, si vous en souhaitiez une, présenter un projet de loi sur la famille, comme le Gouvernement s’y était engagé. Ce n’est pas moi qui ai fait ce choix.

La Commission rejette l’amendement.

Article 8 bis (nouveau)
(art. 34-1 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative)

Réquisition de la force publique par le ministère public pour faire exécuter les décisions de justice rendues en matière civile

Le présent article est issu d’un amendement de la rapporteure, adopté par la Commission. Il modifie l’article 34-1 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative afin d’autoriser le ministère public à requérir directement la force publique pour faire exécuter les décisions de justice rendues en matière civile.

En l’état du droit, le procureur de la République et le procureur général ont le droit de requérir directement l’assistance de la force publique à l’effet d’assurer l’exécution des sentences pénales, en application de l’article 709 du code de procédure pénale.

Depuis l’abrogation de l’article 5 du titre VIII de la loi des 16 et 24 août 1790 sur l’organisation judiciaire (90) opérée par l’ordonnance n° 2006-673 du 8 juin 2006 (91) , il n’existe, en revanche, pas de disposition comparable en matière civile, sous réserve de l’article 34-1 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 qui prévoit que le procureur de la République peut requérir directement la force publique pour faire exécuter les décisions rendues sur le fondement des instruments internationaux et européen relatives au déplacement illicite international d’enfants (92), dans les conditions définies par le décret n° 2012-98 du 27 janvier 2012 relatif à l’exécution par le procureur de la République des décisions de retour prises en application des instruments internationaux et européens relatifs au déplacement illicite international d’enfants.

L’article L. 121-5 du code des procédures civiles d’exécution donne, certes, une mission générale de surveillance de l’exécution des décisions de justice rendues en matière civile, en affirmant que « le procureur de la République veille à l’exécution des jugements et des autres titres exécutoires ». Il peut, pour accomplir sa mission, « enjoindre à tous les huissiers de justice de son ressort de prêter leur ministère », en application du premier alinéa de l’article L. 121-6 du même code. Ce pouvoir d’injonction lui permet d’enjoindre à l’huissier de justice de présenter une réquisition appropriée auprès de l’autorité préfectorale, mais il ne peut requérir directement la force publique pour faire exécuter une décision de justice rendue en matière civile et, surtout, ces textes ne s’appliquent qu’aux mesures d’exécution forcée sur les biens, et non sur les personnes.

Le présent article modifie l’article 34-1 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 afin de mettre fin à cette lacune.

Le premier alinéa de l’article 34-1, dans sa rédaction issue du présent article, rappelle la mission générale de surveillance de l’exécution des décisions de justice rendues en matière civile, dans des termes proches – mais moins large que le champ d’application du code des procédures civiles d’exécution, qui s’applique à tous les jugements et autres titres exécutoires qui ne sont pas de nature pénale ou administrative – de ceux de l’article L. 121-5 du code des procédures civiles d’exécution.

Son deuxième alinéa confère au procureur de la République de requérir directement la force publique pour faire exécuter ces décisions de justice.

Son troisième alinéa reprend la rédaction actuelle de l’article 34-1 de la loi du 8 février 1995, relative aux enlèvements internationaux d’enfants.

Ces dispositions permettront d’assurer le respect du droit d’obtenir l’exécution d’une décision de justice, corollaire du droit à un procès équitable, et du principe selon lequel tout « justiciable nanti d’une sentence judiciaire dûment revêtue de la formule exécutoire est en droit de compter sur l’appui de la force publique pour assurer l’exécution du titre qui lui a été ainsi délivré » (93).

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* *

La Commission examine ensuite l’amendement CL54 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement a pour objet de renforcer l’exécution des décisions rendues par les juges aux affaires familiales, en permettant au parquet de requérir directement la force publique pour faire exécuter les décisions de justice rendues en matière civile.

La Commission adopte l’amendement.

Chapitre II
Dispositions relatives aux droits et aux devoirs des tiers qui concourent à l’éducation de l’enfant

D’après l’INSEE, 1,5 million d’enfants, soit plus d’un sur dix, vivent dans des familles recomposées, c’est-à-dire dans des familles où les enfants ne sont pas tous issus du couple actuel. Près d’un million (940 000) d’entre eux vivent avec un parent et un beau-parent (94). Le droit de la famille doit s’adapter à ces nouvelles configurations familiales et reconnaître, afin de sécuriser et de faciliter la vie quotidienne de ces familles, la place que les beaux-parents occupent dans l’éducation et la vie des enfants, avec lesquels ils nouent des liens affectifs et durables. Son objet n’est pas d’instituer un « statut du beau-parent », qui serait rigide et ne correspondrait pas à la diversité des situations et des attentes, mais d’offrir une « palette » d’instruments, souples, évolutifs et adaptables. Ces instruments permettront aux beaux-parents d’exercer en droit les responsabilités qu’ils assument déjà en fait, dans l’intérêt de l’enfant.

Les dispositifs proposés tiennent compte et parfois s’inspirent des travaux et réflexions menés depuis une dizaine d’années sur ce sujet, qui ne sont jamais concrétisés jusqu’à présent. Peuvent notamment être cités :

– le rapport de la commission présidée par le professeur Françoise Dekeuwer-Défossez de 1999 (95) ;

– le rapport de la Défenseure des enfants, Mme Dominique Versini, présenté en 2006 (96) ;

– l’avant-projet de loi sur l’autorité parentale et les droits des tiers présenté en 2009 par la secrétaire d’État chargée de la famille et de la solidarité, Mme Nadine Morano ;

– le rapport de M. Jean Léonetti, remis au Premier ministre le 7 octobre 2009 (97).

Plus récemment, le groupe de travail sur la filiation, les origines et la parentalité mis en place par la ministre déléguée chargée de la famille en 2013 et présidé par Mme Irène Théry (98), a formulé plusieurs recommandations sur ce sujet, qui ont fortement inspiré plusieurs des dispositifs proposés, en particulier le mandat d’éducation quotidienne (article 10).

Avant l’article 9

L’amendement CL19 de Mme Pascale Crozon est retiré.

Article 9
(art. 372-2 du code civil)

Extension de la présomption d’accord de l’autre parent à l’égard des tiers de bonne foi aux actes usuels qu’un parent a autorisé un tiers à accomplir

Cet article étend la présomption d’accord de l’autre parent à l’égard des tiers de bonne foi aux actes usuels qu’un parent a autorisé un tiers à accomplir.

Rappelons que l’article 372-2 du code civil – déjà évoqué dans le commentaire de l’article 4 – prévoit que, « à l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre, quand il fait seul un acte usuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant ».

Cette présomption légale d’accord concernant les actes usuels vaut dispense de preuve de l’accord des deux parents et décharge de responsabilité au bénéfice des tiers de bonne foi. Concrètement, elle signifie que les tiers – une administration, par exemple – n’ont pas à exiger une preuve de l’accord des deux parents (en demandant une double signature, par exemple) et qu’ils ne risquent pas de voir leur responsabilité engagée si l’acte passé par un seul des parents est ensuite contesté. Cette présomption, qui est simple, tombe naturellement si l’autre parent a exprimé son désaccord.

Cet assouplissement simplifie considérablement la vie quotidienne des familles. En l’état du droit, il ne bénéficie cependant qu’aux actes usuels accomplis par un parent.

Le présent article a pour objet d’étendre cette présomption d’accord au profit des tiers qui ont été autorisés par l’un des parents à accomplir un acte usuel de l’autorité parentale. Un beau-parent ne pourra ainsi plus se voir opposer qu’il est nécessaire de recueillir l’accord de l’autre parent pour aller chercher son bel-enfant à l’école, par exemple, dès lors qu’il pourra justifier y avoir été autorisé par le parent avec lequel il vit. Cette mesure simple contribuera ainsi à sécuriser et à faciliter la vie quotidienne de ces familles.

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La Commission adopte l’article 9 sans modification.

Article 10
(art. 373-2-1-1 [nouveau] du code civil)

Création d’un mandat d’éducation quotidienne

Cet article crée un mandat d’éducation quotidienne permettant au tiers vivant de manière stable avec l’un des parents d’accomplir les actes usuels de l’autorité parentale à l’égard de l’enfant vivant avec le couple pour la durée de la vie commune. Rédigé par acte sous seing privé ou en la forme authentique, ce mandat ne pourra être établi qu’avec l’accord de l’autre parent.

1. Le mandat d’éducation quotidienne permettra de simplifier la vie quotidienne de nombreuses familles

Certes, l’extension de la présomption légale d’accord de l’autre parent prévue à l’article 372-2 du code civil pour les actes usuels qu’un parent a autorisé un tiers à accomplir, opérée par l’article 9, sécurisera les autorisations ponctuelles que les tiers et, en particulier, les beaux-parents auront reçues de l’un des parents.

Il est cependant souhaitable de permettre aux familles qui le désirent de délivrer aux beaux-parents une autorisation plus générale d’accomplir les actes usuels de l’autorité parentale. Cette autorisation générale permettrait notamment de faire face aux situations imprévues et urgentes, telles qu’une fracture dont aurait été victime l’enfant et qui aurait conduit à une brève hospitalisation en urgence, pour lesquelles, si le parent avec lequel vit l’enfant est absent ou indisponible, une autorisation ponctuelle n’a pu être délivrée. Il est fréquent que, dans de telles situations, l’établissement hospitalier n’autorise pas la sortie du mineur de l’établissement avec son beau-parent, alors qu’il s’agit d’un acte usuel. Le mandat d’éducation quotidienne permettrait de répondre à ces difficultés.

Le dispositif proposé s’inspire des recommandations formulées dans plusieurs rapports, notamment celui de Mme Dominique Versini (99) et de Mme Irène Théry (100).

Dans la « palette » des instruments mis à la disposition des familles qui souhaitent accorder une place aux tiers qui ont noué des liens affectifs avec l’enfant, le mandat vient entre la présomption légale d’accord prévue par l’article 372-2 du code civil – qu’il ne remet évidemment nullement en cause – et le partage puis la délégation de l’exercice de l’autorité parentale.

La proposition de loi met ainsi en place une série d’instruments accordant une place croissante, selon les choix opérés par les familles concernées et leurs besoins, au tiers, avec un formalisme lui aussi croissant :

– la présomption légale d’accord de l’autre parent prévue par l’article 372-2 du code civil pour les actes usuels bénéficiera à tous les tiers autorisés, sans qu’aucun formalisme ne soit exigé ;

– le mandat d’éducation quotidienne constituera une autorisation générale d’accomplir les actes usuels de l’autorité parentale. Il pourra être établi sous seing privé ou en la forme authentique, et nécessitera l’accord de l’autre parent ;

– l’enfant pourra, à titre exceptionnel, être confié à un tiers, par une décision du juge aux affaires familiales, comme le prévoit le droit en vigueur. Les pouvoirs du tiers dans ce cadre seront cependant étendus, puisqu’il pourra accomplir tous les actes usuels (et non plus seulement relatifs à la surveillance et l’éducation de l’enfant) et être autorisé à titre exceptionnel par le juge à accomplir un acte important ;

– les parents pourront décider de partager l’exercice de l’autorité parentale avec un tiers, par la voie d’une convention homologuée ;

– enfin, comme c’est le cas dans le droit en vigueur, le ou les parents pourront décider de transférer l’exercice de leur autorité parentale à un tiers, par un jugement, en sollicitant une délégation de cet exercice à leur profit.

2. Le dispositif proposé

Le mandat d’éducation quotidienne fera l’objet d’un nouvel article 373-2-1-1 du code civil, qui lui sera spécifiquement consacré.

La première phrase de son premier alinéa prévoit dans quelle situation et au profit de qui le mandat peut être établi :

– son établissement sera subordonné à l’accord de l’autre parent, ce qui permettra d’éviter qu’il puisse être une source de conflits entre les parents. Il sera ainsi réservé aux configurations familiales non conflictuelles ;

– le mandat pourra être établi au profit du concubin, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du conjoint du parent, avec lequel il réside de façon stable ;

– un mandat pourra être établi pour chacun des enfants vivant avec le couple.

La seconde phrase du même premier alinéa précise que le mandat pourra être rédigé par acte sous seing privé ou en la forme authentique. Elle définit également l’objet du mandat, qui est de permettre d’accomplir les actes usuels de l’autorité parentale pour la durée de la vie commune. L’accomplissement d’acte important est donc a contrario exclu.

Le second alinéa du nouvel article 373-2-1-1 est relatif à la fin du mandat. Celui-ci pourra être révoqué à tout moment par le mandant. Il prendra fin de plein droit en cas de rupture de la vie commune, de décès du mandant ou du mandataire ou de renonciation de ce dernier à son mandat.

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* *

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement CL4 de M. Philippe Gosselin.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL55 et CL56 de la rapporteure.

Elle adopte ensuite l’article 10 modifié.

Article 11
(art. 373-3 du code civil)

Assouplissement de la possibilité de confier l’enfant à un tiers

Cet article assouplit la possibilité pour le juge de confier, à titre exceptionnel et si l’intérêt de l’enfant l’exige, l’enfant à un tiers, chez qui il résidera et qui pourra exercer les actes usuels relatifs à l’autorité parentale, dont le ou les parents ne seront pas pour autant privés.

● Le du présent article modifie le deuxième alinéa de l’article 373-3 du code civil.

Cet alinéa prévoit, dans sa rédaction en vigueur, que le juge peut, à titre exceptionnel et si l’intérêt de l’enfant l’exige, notamment lorsqu’un des parents est privé de l’exercice de l’autorité parentale, décider de confier l’enfant à un tiers, choisi de préférence dans sa parenté. Le juge peut être saisi par l’un des parents ou le ministère public, qui peut lui-même être saisi par un tiers, parent ou non. Le juge statue conformément aux critères fixés à l’article 373-2-11 du code civil (101). L’enfant peut ainsi être confié à un grand-parent ou à un beau-parent, par exemple, à la suite de la séparation de ses parents ou du décès d’un d’entre eux. La jurisprudence s’est déjà fondée sur cette disposition pour confier l’enfant à un beau-parent à la suite du décès de l’un de ses parents, afin d’éviter que le mineur ne soit séparé de ses demi-frères et sœurs avec lesquels il a été élevé (102).

Dans cette situation, l’article 373-4 du même code prévoit que l’autorité parentale continue d’être exercée par les père et mère (si l’un d’entre eux n’en a pas été privé, comme le deuxième alinéa de l’article 373-3 en évoque la possibilité) et le tiers peut seulement accomplir, en l’état du droit (voir le commentaire de l’article 12 sur les modifications proposées sur ce point), les actes usuels relatifs à la surveillance et à l’éducation de l’enfant.

La modification opérée par le 1° consiste à remplacer les mots : « choisi de préférence dans sa parenté » par les mots : « parent ou non ». La priorité accordée à un parent est ainsi supprimée, ce qui élargira la possibilité que le juge puisse confier l’enfant, dans de telles hypothèses, à un beau-parent.

● Le du présent article modifie le troisième et dernier alinéa du même article 373-3 du code civil.

Cet alinéa prévoit, dans sa rédaction actuelle, que dans des circonstances exceptionnelles, le juge aux affaires familiales qui statue sur les modalités de l’exercice de l’autorité parentale après séparation des parents peut décider, du vivant même des parents, qu’en cas de décès de celui d’entre eux qui exerce cette autorité, l’enfant n’est pas confié au survivant. Il peut, dans ce cas, désigner la personne à laquelle l’enfant est provisoirement confié. Cette disposition préventive peut trouver à s’appliquer lorsque le parent survivant est incapable de prendre en charge l’enfant ou indigne de le faire, par exemple en cas de violences ou d’abus sexuels, alors que l’enfant est par ailleurs bien pris en charge par un proche, grand-parent, oncle, tante ou beau-parent.

Le 2° du présent article étend la possibilité pour le juge de faire usage de cette disposition en ne la réservant plus exclusivement au cas du décès du parent qui exerce l’autorité parentale, mais plus largement au décès de l’un des parents. Il est précisé, par ailleurs, que la personne à laquelle l’enfant est confié peut être un tiers, parent ou non.

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La Commission est saisie de l’amendement CL5 de M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Cet amendement tend à supprimer l’article 11. Il faut en effet revenir à une priorité de parenté, quitte à l’élargir. La préférence familiale me semble nécessaire.

Mme la rapporteure. Avis défavorable, car l’assouplissement sera très bienvenu si l’intérêt de l’enfant exige.

M. Philippe Gosselin. C’est déjà possible aujourd’hui, même s’il existe une préférence familiale.

Mme la rapporteure. Il est préférable de l’expliciter. Le choix du juge répondra ainsi exclusivement à l’intérêt de l’enfant, sans être prédéterminé par le législateur, qui favorise le retour à un parent, alors qu’un tiers ayant vécu avec l’enfant et l’ayant élevé peut avoir noué des liens bien plus forts avec lui qu’un parent éloigné.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 11 sans modification.

Article 12
(art. 373-4 du code civil)

Renforcement des droits du tiers auquel l’enfant a été confié

Cet article s’inscrit dans la continuité de l’article 11, en renforçant les droits du tiers auquel l’enfant a été confié. Certaines de ces modifications s’inspirent des recommandations du rapport du groupe de travail présidé par Mme Irène Théry, précité (103).

En l’état du droit, le premier alinéa de l’article 373-4 prévoit que le tiers peut seulement accomplir les actes usuels relatifs à la surveillance et à l’éducation de l’enfant. Une double extension est opérée. Le supprime, en premier lieu, la référence à la surveillance et à l’éducation de l’enfant, afin de permettre l’accomplissement de tout acte usuel de l’autorité parentale. Un acte usuel relatif à la santé de l’enfant (des soins courants) pourra ainsi être accompli, par exemple. Le même 1° complète, en second lieu, ce même premier alinéa en ajoutant une phrase permettant au juge, à titre exceptionnel, d’autoriser le tiers auquel l’enfant a été confié à accomplir, lorsque l’intérêt de l’enfant le justifie, un acte important de l’autorité parentale.

Le supprime par ailleurs le second alinéa de l’article 373-4, devenu obsolète, qui prévoit que le juge aux affaires familiales, lorsqu’il confie l’enfant à titre provisoire à un tiers, peut décider qu’il devra requérir l’ouverture d’une tutelle, et le remplacer par un alinéa prévoyant qu’en cas de conflit entre le tiers et l’un des parents (et non pas seulement entre le tiers et le parent survivant, l’article 373-3 du code civil pouvant s’appliquer alors même que les deux parents sont encore vivants, comme l’indiquait initialement le présent article, rectifié sur ce point par un amendement de la rapporteure adopté par la Commission), chacun peut saisir le juge qui statue en considération de l’intérêt de l’enfant. Cette précision apparaît d’autant plus nécessaire que les pouvoirs du tiers sont renforcés.

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La Commission adopte l’amendement de rectification CL62 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 12 modifié.

Article 13
(section 3 du chapitre Ier du titre IX du livre Ier du code civil)

Réforme de la délégation de l’exercice de l’autorité parentale

Cet article ainsi que le suivant ont pour objet de réformer la délégation de l’exercice de l’autorité parentale, afin de distinguer plus clairement que dans le droit en vigueur la délégation du partage de l’exercice de l’autorité parentale (article 13), d’une part, et d’assouplir les conditions du recours audit partage (article 14), d’autre part.

1. L’état du droit

a. Délégation-transfert et délégation-partage

En l’état du droit, la délégation de l’exercice de l’autorité parentale, dont le régime a été simplifié par la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, est régie par les articles 376 à 377-3 du code civil, regroupés au sein de la section 3 du chapitre Ier du titre IX du livre Ier du code civil, intitulée « De la délégation de l’autorité parentale ». Il convient de distinguer :

– la délégation « classique », qui transfère tout ou partie de l’exercice de l’autorité parentale à un tiers. Elle peut être volontaire (article 377, premier alinéa) ou forcée (article 377, deuxième alinéa, voir commentaire de l’article 15) ;

– la délégation-partage, créée par la loi du 4 mars 2002, prévue par l’article 377-1 du code civil, qui permet, pour les besoins de l’éducation de l’enfant, aux parents ou à l’un d’eux de partager tout ou partie de l’exercice de l’autorité parentale. Il n’y a pas transfert de l’exercice de l’autorité parentale, mais partage avec un tiers, sans en priver les parents.

La délégation, sous ses deux formes (transfert ou partage), est un instrument utile pour accorder une place aux beaux-parents dans les familles recomposées (104). La délégation-partage permet au beau-parent qui le souhaite de partager avec les parents les fonctions éducatives qui appartiennent à ces derniers. La délégation-transfert, plus exceptionnelle, peut se révéler aussi très utile, notamment lorsque le parent qui vit avec l’enfant est malade, ou qu’il est momentanément dans l’impossibilité d’exercer l’autorité parentale et que l’autre parent ne peut, ou ne doit pas prendre le relais.

Les deux formes de la délégation sont également précieuses pour accorder la place que les grands-parents peuvent occuper dans certaines familles, en raison de la maladie ou de l’éloignement du parent ou des parents, par exemple.

b. Régime juridique de la délégation-transfert

La délégation « classique » de l’autorité parentale doit être consentie par les titulaires de l’autorité parentale. Ses conditions de mise en œuvre ont été assouplies par la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale : elle peut être prononcée quel que soit l’âge du mineur, alors que la loi n° 70-459 du 4 juin 1970 relative à l’autorité parentale avait fixé la limite d’âge à dix-huit ans et la loi n° 74-631 du 5 juillet 1974 fixant à dix-huit ans l’âge de la majorité avait porté cette limite à seize ans.

Seuls les parents, ensemble ou séparément, peuvent demander au juge aux affaires familiales d’accorder la mesure de délégation, le tuteur ayant perdu cette prérogative. Dans le cas d’un exercice conjoint de l’autorité parentale, les deux parents doivent consentir l’un et l’autre à la délégation (105). En revanche, en cas d’exercice unilatéral de l’autorité parentale, le parent peut consentir seul à déléguer tout ou partie de son autorité. L’autre parent devra alors être informé en application de son droit de surveillance.

En cas de délégation de l’autorité parentale, les parents demeurent titulaires de l’autorité parentale et ne sont dépossédés, au profit d’un tiers, que de son exercice. Ainsi, seuls les parents peuvent consentir à une adoption ou verser une contribution financière compensant les frais de l’enfant. Ils bénéficient en outre d’un droit de visite et d’hébergement, qu’ils peuvent définir pour les autres membres de la famille si la délégation est partielle ; c’est le délégataire qui y procédera en cas de délégation totale.

La délégation peut en effet être totale ou partielle : il revient aux intéressés d’en déterminer les modalités au regard de leur situation familiale. Par exemple, la délégation de l’autorité parentale peut être attribuée pour « les actes de la vie courante, les formalités administratives et la gestion du patrimoine de l’enfant »  (106). Son caractère partiel répond davantage à l’idée de gestion de la cellule familiale. Le délégataire ne peut exercer que les droits qui lui ont été transférés par jugement, par exemple ceux répondant aux besoins de l’enfant, tels que les actes usuels relatifs à l’éducation ou à la surveillance, l’autorisation d’un acte chirurgical, le droit de consentir au mariage ou la garde de l’enfant  (107).

c. Régime juridique de la délégation-partage

Le jugement de délégation de l’autorité parentale peut prévoir que les père et mère ou l’un d’eux – selon les modalités initiales d’exercice, à savoir conjoint ou unilatéral – partageront tout ou partie de l’exercice de l’autorité parentale avec le tiers délégataire, sans en être dépossédés, dans le cadre juridique d’une autorité partagée.

Cette délégation ne peut se faire que « pour les besoins d’éducation de l’enfant ». La notion est vaste, sans doute est-il possible d’y inclure les actes relatifs à la surveillance de l’enfant en tant qu’expression de l’éducation, compris dans la présomption d’accord de l’article 372-2 du code civil : préparation ou contrôle des déplacements de l’enfant, des soins à lui apporter, de son hygiène, de son comportement, etc.

La présomption d’accord de l’article 372-2 du code civil est applicable aux actes des délégants et du délégataire. Ainsi, à l’égard des tiers de bonne foi, chacun est réputé agir avec l’accord des autres, parent et délégataire, lorsqu’il accomplit seul un acte usuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant.

Ni la loi ni la jurisprudence ne précisent l’étendue de cette délégation-partage : les modalités du partage sont à définir entre les parties. La première chambre civile de la Cour de cassation n’a pas imposé au juge de définir dans l’acte de jugement les attributs devant être partagés partiellement (108).

En cas de conflit ou de concurrence entre les parties, le dernier alinéa de l’article 377-1 du code civil prévoit le recours au juge qui « peut être saisi des difficultés que l’exercice partagé de l’autorité parentale pourrait générer par les parents, l’un d’eux, le délégataire ou le ministère public ».

2. La clarification de la distinction entre partage et délégation de l’exercice de l’autorité parentale

Le présent article a pour objet de clarifier la distinction entre la délégation de l’exercice de l’autorité parentale et son transfert. Les articles actuels du code civil sont en effet ambigus :

– le deuxième alinéa de l’article 377-1, sur lequel est fondée la délégation-partage, employant le terme de délégation, alors que juridiquement le partage doit, comme cela a été souligné, être distingué de la délégation ;

– partage et délégation sont « entremêlés » au sein du même article 377-1 ;

– l’intitulé de la section fait référence à la « délégation de l’autorité parentale », alors que seul son exercice peut être délégué, et qu’il conviendrait de distinguer dans l’intitulé également la délégation et le partage.

Afin d’opérer ces clarifications, le du présent article modifie l’intitulé de la section 3 du chapitre 1er du titre IX du livre Ier, qui devient « Du partage et de la délégation de l’autorité parentale », afin de distinguer clairement la délégation et le partage et de souligner que seul l’exercice de l’autorité parentale est concerné.

Cette section est divisée en trois paragraphes, le premier consacré aux principes généraux ( du présent article), le deuxième à la délégation de l’exercice de l’autorité parentale ( du présent article) et le troisième au partage de l’exercice de l’autorité parentale (article 14).

Un nouvel article 376-2, relatif à la compétence du juge pour résoudre les litiges susceptibles d’être générés par la délégation ou le partage, est inséré au sein du premier paragraphe relatif aux principes généraux ( du présent article). Il reprend les dispositions du dernier alinéa de l’actuel article 377-1 du code civil.

Les articles 377 et 377-2 sont renumérotés en conséquence de ces changements et deviennent, respectivement, les articles 377-2 et 377-3 du code civil (du présent article).

L’article 377-3, relatif à l’impossibilité de déléguer le droit de consentir à l’adoption du mineur, est transféré au sein du paragraphe 1 relatif aux principes généraux, avec une modification rédactionnelle visant à préciser que ce droit ne peut pas davantage être partagé (du présent article).

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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL57 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 13 modifié.

Article 14
(art. 377 et 377-1 du code civil)

Réforme du partage de l’exercice de l’autorité parentale

Cet article réforme l’actuelle « délégation-partage » de l’exercice de l’autorité parentale, qui est désormais clairement distingué de la délégation.

Par rapport au droit existant (voir le commentaire de l’article 13), le régime juridique du partage de l’exercice de l’autorité parentale est significativement assoupli.

L’article 377-1 du code civil est remplacé au sein de la section 3 du chapitre 1er du titre IX du livre Ier par un nouveau paragraphe 2, composé des articles 377 et 377-1.

L’article 377 est relatif à la mise en place du partage de l’exercice de l’autorité parentale. Celle-ci a désormais lieu par la voie d’une convention homologuée par le juge aux affaires familiales, par laquelle ils organisent le partage de tout ou partie de l’exercice de leur autorité parentale avec un tiers.

En cas d’exercice conjoint de l’autorité parentale, le partage peut avoir lieu sur l’initiative conjointe des parents (premier alinéa du nouvel article 377) ou sur l’initiative d’un seul d’entre eux (deuxième alinéa). Dans ce second cas, l’accord de l’autre parent doit être recueilli.

En cas d’exercice unilatéral de l’autorité parentale, le parent qui exerce seul l’autorité parentale peut prendre l’initiative du partage (troisième alinéa de l’article 377). L’avis de l’autre parent doit être recueilli.

Dans tous les cas, le juge homologue la convention sauf s’il constate qu’elle ne préserve pas suffisamment l’intérêt de l’enfant ou que le consentement du ou des parents n’a pas été donné librement (quatrième alinéa de l’article 377).

Le nouvel article 377-1 traite de la fin du partage. Celui-ci prend fin soit par une nouvelle convention homologuée par le juge soit, en cas de désaccord, par un jugement, à la demande du tiers ou de l’un des parents (premier alinéa). Le second alinéa de l’article 377-1 précise, si la demande émane d’un parent qui exerce l’autorité parentale, le juge y fait droit sauf circonstances exceptionnelles.

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La Commission adopte l’article 14 sans modification.

Article 15
(art. 377-2 du code civil)

Création d’un nouveau cas d’ouverture de la délégation de l’exercice de l’autorité parentale

Cet article crée un nouveau cas d’ouverture de la délégation de l’exercice de l’autorité parentale dite « forcée » ou « sanction », car intervenant à la demande d’un tiers et non du ou des parents, à la différence de la délégation volontaire prévue par l’actuel alinéa premier de l’article 377 du code civil. Il s’agit de la délégation prévue par l’actuel deuxième alinéa de l’article 377 du code civil (devenu l’article 377-2 du même code, en application de l’article 13 de la proposition de loi), opérée à l’initiative et au profit du particulier, de l’établissement ou du service départemental d’aide sociale à l’enfant (ASE) qui a recueilli l’enfant ou d’un membre de la famille.

Cette délégation peut intervenir « en cas de désintérêt manifeste ou si les parents sont dans l’impossibilité d’exercer tout ou partie de l’autorité parentale ». Le désintérêt manifeste a été constaté, par exemple, en l’absence d’exercice du droit de visite pendant plusieurs années (109) ou d’absence de la vie de l’enfant depuis huit ans et de non-versement de pension alimentaire depuis le divorce (110). L’impossibilité d’exercer l’autorité parentale renvoie à l’incapacité et à l’absence visée par l’article 373 du code civil, mais a aussi été admise à l’égard d’un parent difficilement joignable et ne prenant pas en compte les besoins de son enfant (111).

Le présent article complète ces deux cas d’ouverture en y ajoutant un troisième, l’accomplissement répété d’actes non usuels par la personne, le service ou l’établissement à qui est confié l’enfant avec l’autorisation du juge des enfants, en raison de refus abusifs ou injustifiés ou en cas de négligence des détenteurs de l’autorité parentale, en application du deuxième alinéa de l’article 375-7 du code civil. Sa rédaction a été clarifiée par un amendement adopté par la Commission sur l’initiative de votre rapporteure.

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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL61 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 15 modifié.

Chapitre III
Dispositions relatives à la médiation familiale

Article 16
(chapitre Ier du titre II de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative, art. 75 du code civil)

Définition de la médiation familiale

L’article 16 définit la médiation familiale et prévoit la lecture par l’officier d’état civil, le jour du mariage, d’une nouvelle disposition relative à cette forme de médiation.

1.  La définition de la médiation familiale

a.  L’état du droit

Le régime de la médiation familiale n’a vu le jour que postérieurement à celui de la médiation civile. Ce dernier est issu de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 (112) dont le chapitre Ier (articles 21 à 25) du titre II est consacré à la médiation. Celle-ci est définie à l’article 21 (113) comme « tout processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige ». Par ailleurs, qu’elle soit judiciaire ou extra-judiciaire, la médiation est soumise au principe de confidentialité : les constatations du médiateur et les déclarations recueillies ne peuvent être divulguées aux tiers ni invoquées ou produites dans le cadre d’une instance judiciaire ou arbitrale sans l’accord des parties. L’accord auquel parviennent les parties peut être soumis à l’homologation du juge, qui lui donne force exécutoire.

Les règles relatives à la médiation contenues dans la loi du 8 février 1995 ont été précisées par le décret n° 96-652 du 22 juillet 1996 (114), dont les dispositions ont été codifiées aux articles 131-1 à 131-15 du code de procédure civile. Ainsi, tout juge peut y recourir. Il désigne alors un médiateur, tiers qualifié, indépendant et impartial. La médiation peut être confiée à une personne physique ou à une personne morale. Sa durée initiale ne peut excéder trois mois. Cette mission peut cependant être renouvelée une fois, pour une même durée, à la demande du médiateur.

La loi du 8 février 1995 ne comporte pas de définition de la médiation spécifiquement familiale. Une telle définition a cependant été proposée par le Conseil national consultatif de la médiation familiale (115) en 2002, lequel a émis la suggestion suivante : « La médiation familiale est un processus de construction ou de reconstruction du lien familial axé sur l’autonomie des personnes concernées par des situations de rupture ou de séparation dans lequel un tiers impartial, indépendant, qualifié et sans pouvoir de décision : le médiateur familial, favorise à travers l’organisation d’entretiens confidentiels, leur communication, la gestion de leur conflit dans le domaine familial entendu dans sa diversité et dans son évolution ».

Malgré l’absence de définition légale de la médiation familiale, la reconnaissance de la spécificité de celle-ci a progressé avec la création, par le décret n° 2003-1166 du 2 décembre 2003 (116), d’un diplôme d’État de médiateur familial. Aux termes de l’article premier de ce décret, « il est créé un diplôme d’État de médiateur familial qui atteste des compétences nécessaires pour intervenir auprès de personnes en situation de rupture ou de séparation afin de favoriser la reconstruction de leur lien familial et aider à la recherche de solutions répondant aux besoins de chacun des membres de la famille ». Par la suite, un arrêté du 12 février 2004 (117) a défini notamment le contenu et l’organisation de la formation, les modalités de certification ainsi que celles concernant le contrôle pédagogique et l’agrément des établissements de formation. Certaines de ces règles ont été modifiées par un arrêté du 19 mars 2012 (118). Cette formation est réservée aux personnes dotées d’un niveau bac +3 et se déroule sur un peu moins de deux ans.

La médiation familiale a également reçu un début d’existence législative avec deux mentions dans le code civil. Ainsi, aux termes de l’article 255, issu de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce, le juge peut, au titre des mesures provisoires qu’il a la faculté de prendre dans le cadre d’une procédure de divorce, notamment « proposer aux époux une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder » ou « enjoindre aux époux de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l’objet et le déroulement de la médiation (119) ».

La deuxième mention se trouve à l’article 373-2-10, issu de la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale. Dans le cas où un juge a été saisi afin de statuer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, il est prévu, « à l’effet de faciliter la recherche par les parents d’un exercice consensuel » de cette autorité, que le juge dispose des deux mêmes possibilités que celles prévues à l’article 255.

La décision enjoignant aux parties de rencontrer un médiateur familial en application des articles 255 et 373-2-10 n’est pas, en vertu de l’article 1071 du code de procédure civile, susceptible de recours. Il convient par ailleurs de rappeler que, en dehors de ces médiations judiciaires, de nombreuses médiations familiales (environ 70 % (120)) ont lieu du propre chef des personnes concernées.

Le coût d’une médiation familiale dépend des revenus des parties. Il est compris entre 2 et 131 euros par personne et par séance. Lorsque la médiation se déroule dans le cadre judiciaire, elle peut faire l’objet d’une prise en charge, pour les personnes qui y sont éligibles, au titre de l’aide juridictionnelle.

La médiation familiale est donc entrée dans la pratique et donne des résultats très positifs. Comme le souligne le rapport sénatorial du 26 février 2014 de Mme Catherine Tasca et de M. Michel Mercier, « lorsqu’elle est mise en œuvre, la médiation donne lieu à un accord entre les parties (écrit ou oral) dans 57 % des affaires. Au tribunal de grande instance d’Arras, choisi pour expérimenter deux procédures d’incitation à la médiation (…), lorsqu’une médiation est menée à son terme, elle donne lieu à un accord des parties dans 100 % des cas ». Une médiation, même si elle ne débouche pas sur un accord, permet d’apaiser les conflits, ce qui est tout particulièrement conforme à l’intérêt des enfants du couple. Quand elle débouche sur un accord, elle présente en outre l’avantage de décharger les juges aux affaires familiales d’une partie du contentieux dont ils sont saisis.

Toutefois, la médiation familiale souffre encore de deux faiblesses : elle reste insuffisamment connue et sa définition ne figure toujours pas dans la loi, ce qu’a déploré notamment le groupe de travail présidé par M. Marc Juston dans son rapport « Médiation familiale et contrats de coparentalité » d’avril 2014 (121).

b.  L’insertion de trois nouveaux articles dans la loi du 8 février 1995

Le I de l’article 16 vise à mieux reconnaître la place et le rôle de la médiation familiale en insérant, dans la loi du 8 février 1995, une nouvelle section consacrée à la médiation familiale. Elle trouverait place après la section 2 du chapitre Ier du titre II et serait composée de trois nouveaux articles 22-4, 22-5 et 22-6.

Selon le nouvel article 22-4, « les différends entre époux ou entre parents peuvent faire l’objet d’une mesure de médiation familiale en vue de leur résolution amiable ». Cette disposition initiale vise à introduire la définition figurant à l’article qui suit.

L’article 22-5 définit la médiation familiale de la façon suivante : « La médiation familiale, qui a pour finalité d’apaiser le conflit et de préserver les relations au sein de la famille, est un processus structuré et confidentiel de résolution amiable des différends familiaux. Avec l’aide du médiateur familial, tiers qualifié, impartial et indépendant, les personnes tentent de parvenir à une solution mutuellement acceptable, qui tient compte de l’intérêt de l’une et de l’autre et de celui de leurs enfants éventuels et qui peut prendre la forme d’accords susceptibles d’être homologués par le juge. » Par cette consécration législative, la médiation familiale est ainsi placée au même rang que la médiation judicaire et reconnue comme un dispositif à part entière. La définition adoptée par la présente proposition de loi se différencie de celles proposées jusque-là notamment par la mention de la nécessité de tenir compte de l’intérêt des enfants éventuels.

Enfin, l’article 22-6 précise le régime de la médiation familiale en renvoyant aux « dispositions générales figurant à la section 1 » et aux « règles propres à la médiation judiciaire figurant à la section 2 » du même chapitre. La médiation familiale se trouve ainsi organisée selon un régime juridique de rang législatif, des aménagements réglementaires pouvant intervenir ultérieurement pour le préciser afin de tenir compte de la spécificité de ce mode de médiation.

Ces dispositions ont été très favorablement accueillies par les personnes auditionnées par votre rapporteure.

S’agissant du I de l’article 16, la commission des Lois a adopté deux amendements rédactionnels de votre rapporteure.

2.  La lecture lors du mariage d’un article consacré à la médiation familiale

Le II de l’article 16 prévoit la lecture par l’officier d’état civil, le jour du mariage, du nouvel article 22-4 inséré dans la loi du 8 février 1995.

a. Les articles du code civil lus lors de la célébration du mariage

En application du premier alinéa de l’article 75 du code civil, le jour du mariage, l’officier de l’état civil, à la mairie, en présence des témoins, fait lecture aux futurs époux des articles 212 et 213, du premier alinéa des articles 214 et 215, et de l’article 371-1 du même code. Ces articles portent sur les droits et devoirs des époux l’un vis-à-vis de l’autre ou à l’égard de leurs enfants.

L’article 212 dispose ainsi que « les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance » et l’article 213 qu’ils « assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille » et « pourvoient à l’éducation des enfants et préparent leur avenir ». Le premier alinéa de l’article 214 prévoit que « si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives ». Le premier alinéa de l’article suivant précise que « les époux s’obligent mutuellement à une communauté de vie ». Enfin, l’article 371-1 dispose que l’autorité parentale « est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant » et qu’elle « appartient aux parents jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne ». Il ajoute que « les parents associent l’enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité ».

b. L’ajout opéré par la proposition de loi

Le II de l’article 16 se propose d’ajouter à cette liste le nouvel article 22-4 de la loi du 8 février 1995, aux termes duquel « les différends entre époux ou entre parents peuvent faire l’objet d’une mesure de médiation familiale en vue de leur résolution amiable ». Il s’agit là d’une des préconisations du groupe de travail présidé par M. Marc Juston (122).

Il est parfois objecté que la lecture d’une telle disposition le jour de la célébration du mariage serait maladroite en ce qu’elle viendrait jeter un froid dans une cérémonie de nature joyeuse. À cela on peut tout d’abord répondre que les autres articles de loi lus à la même occasion portent déjà sur des questions sérieuses (devoir de secours, contribution aux charges, protection de la sécurité et de la moralité des enfants, etc.). On peut ajouter que la médiation familiale ne doit pas être perçue négativement puisqu’elle a, au contraire, pour objectif de permettre de déconflictualiser nombre de situations qui peuvent apparaître dans la vie d’un couple et ne concerne pas uniquement cette hypothèse ultime qu’est la séparation. Au demeurant, l’inconvénient tenant à l’évocation de cette procédure lors de la cérémonie du mariage paraît bien relatif au regard des avantages que l’on retirerait à faire mieux connaître un dispositif qui a fait la preuve de son utilité.

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La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL39 et CL40 de la rapporteure.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL6 de M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Si importante que soit la médiation familiale, il n’est peut-être pas indispensable de lire systématiquement autant d’articles de loi lors de la cérémonie de mariage qui deviendra bientôt très juridique, laissant bien peu de place à l’amour.

Mme la rapporteure. Ayant été adjointe au maire, j’ai lu un article sur les crédits.

M. Philippe Gosselin. Il a été supprimé pour ces mêmes raisons.

Mme la rapporteure. Je rappelle qu’il s’agit là d’une proposition contenue dans le rapport d’avril 2014 du groupe de travail sur la médiation familiale. En effet, cette dernière ne sert pas seulement dans les séparations, et peut même parfois les éviter.

M. Philippe Gosselin. Les successions aussi sont importantes, ainsi que les accidents de la vie : la liste des choses importantes n’est pas limitative et on pourrait l’allonger indéfiniment.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 16 modifié.

Article 17
(art. 373-2-10 du code civil)

Injonction par le juge de prendre part à des séances de médiation familiale avant une décision statuant sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale

L’article 17 donne au juge aux affaires familiales, dans le cadre de la fixation des modalités d’exercice de l’autorité parentale, la possibilité d’enjoindre aux parents de participer à des séances de médiation familiale.

1.  L’état du droit et les réformes envisagées

L’article 373-2-10 dispose dans sa rédaction actuelle :

« En cas de désaccord, le juge s’efforce de concilier les parties.

À l’effet de faciliter la recherche par les parents d’un exercice consensuel de l’autorité parentale, le juge peut leur proposer une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder.

Il peut leur enjoindre de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l’objet et le déroulement de cette mesure. »

Des témoignages recueillis par votre rapporteure, il ressort que, dans un nombre non négligeable de cas, les réunions d’information mentionnées au troisième alinéa demeurent superficielles, et réunissent parfois plusieurs couples, ce qui interdit évidemment de poser un premier diagnostic personnalisé. Cet entretien d’information se limite souvent à de simples généralités. Les parties ne sont ainsi pas mises en mesure d’entrevoir les possibilités que recèle la médiation familiale.

Afin d’explorer des moyens de remédier à ces difficultés, un premier type d’expérimentation a été lancé (jusqu’au 31 décembre 2014) dans le ressort des tribunaux de grande instance de Bordeaux et d’Arras (123). Cette expérimentation se situe bien dans le cadre des requêtes initiales relatives à l’exercice de l’autorité parentale, entrant dans le champ de l’article 373-2-10.

Par application du décret n° 2010-1395 du 12 novembre 2010 (124), le dispositif expérimenté, baptisé « double convocation », consiste à permettre au juge, saisi d’un litige relatif à l’autorité parentale, d’enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur familial pour une réunion d’information (qui fait l’objet d’une première convocation) et, parallèlement, de fixer dans une convocation distincte la date de l’audience future. Lors de l’audience, si les parties n’ont pas eu recours à la médiation, le juge tranche le litige. Si les parties ont eu recours à la médiation, soit le juge homologue, le cas échéant, l’accord intervenu en médiation soit, en l’absence d’accord ou d’homologation, il tranche le litige. Si l’accord n’est que partiel, celui-ci peut être homologué, le juge tranchant alors les autres points.

2.  La mise en place d’une injonction de prendre part à des séances de médiation

L’article 17 vise à remplacer les deuxième et troisième alinéas de l’article 373-2-10 du code civil par les quatre alinéas suivants :

« À l’effet de faciliter la recherche par les parents d’un exercice consensuel de l’autorité parentale, le juge peut :

« 1° Leur proposer une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder ;

« 2° Leur enjoindre de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l’objet et le déroulement de cette mesure ;

« 3° Leur enjoindre de prendre part à des séances de médiation familiale. »

L’article 17 réaménage l’article 373-2-10 pour plus de clarté, mais son apport réside surtout dans la faculté offerte au juge d’enjoindre aux parents de participer à des séances de médiation familiale. La quasi-totalité des médiateurs familiaux rencontrés par votre rapporteure ont souligné que les parents ne prenaient souvent conscience de l’intérêt d’une médiation qu’au terme d’une ou deux séances. Il est fréquent qu’ils s’y rendent à contrecœur et n’en découvrent l’utilité et les mérites que lorsque le processus de médiation est enclenché.

Le dispositif de la « double convocation », tel qu’il est expérimenté à Arras et à Bordeaux, n’a pas été retenu par la présente proposition de loi. Son efficacité semble en effet incertaine. Le rapport du groupe de travail présidé par M. Marc Juston relève que « le bilan a mis en évidence une faible efficience de ce dispositif en termes d’engagements des personnes en médiation familiale (125) ». Son efficacité est en tout cas moindre que l’injonction de prendre part à de véritables « séances de médiation ».

L’objectif n’est nullement que l’injonction puisse porter sur de nombreuses séances de médiation. Lorsque, après une ou deux séances, le médiateur constatera une situation de blocage, il mettra fin de lui-même au processus. L’absence de blocage manifestera au contraire l’ouverture des parties à un rapprochement possible, et les séances de médiation pourront se poursuivre. Le principe d’adhésion nécessaire des parties retrouvera alors toute sa portée.

Les dispositions de l’article 17 ont reçu l’approbation de la quasi-unanimité des personnes auditionnées par votre rapporteure, la seule interrogation parfois émise portant précisément sur la possible ambiguïté concernant le nombre de séances pouvant être imposées par le juge.

Pour répondre à cette interrogation, la commission des Lois a adopté, outre un amendement rédactionnel, un amendement de votre rapporteure, précisant que le pouvoir d’injonction donné au juge dans le cadre du 3° de l’article 373-2-10 porte sur la participation à « une ou deux » séances de médiation familiale au maximum. En aucun cas, par conséquent, le juge ne pourra imposer tout un processus de médiation « forcée ».

Votre rapporteure a également déposé un amendement, adopté par la Commission, visant à écarter toute possibilité d’injonction de participer à des séances de médiation lorsque des violences ont été commises par l’un des parents sur la personne de l’autre parent ou sur la personne de l’enfant. La formulation retenue est très large puisqu’elle vise tous types de violences conjugales ou intrafamiliales, de quelque nature qu’elles soient — physiques ou psychologiques — et quelle que soit leur ancienneté.

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La Commission est saisie de l’amendement CL20 de Mme Lucette Lousteau.

M. Erwann Binet. Cet amendement est retiré au bénéfice de l’amendement CL36 de la rapporteure.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte ensuite successivement l’amendement rédactionnel CL38 et l’amendement de précision CL59 de la rapporteure.

Puis elle est saisie de l’amendement CL36 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à écarter toute possibilité d’injonction de participer à des séances de médiation lorsque des violences ont été commises sur l’autre parent ou sur la personne de l’enfant. Cette précision nous a été demandée par les associations que nous avons rencontrées.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL10 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Cet amendement est satisfait par l’amendement CL36 qui vient d’être adopté.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission adopte l’article 17 modifié.

Article 18
(art. 373-2-13 du code civil)

Injonction par le juge, dans le cadre d’instances modificatives, de prendre part à des séances de médiation familiale

L’article 18, dans le prolongement de l’article précédent, donne au juge aux affaires familiales, dans le cadre des instances modificatives portant sur des conventions homologuées ou sur des décisions relatives à l’exercice de l’autorité parentale, la possibilité d’enjoindre aux parents de participer à des séances de médiation familiale.

1.  L’état du droit et les pistes de réformes

Dans sa rédaction actuelle, l’article 373-2-13 du code civil, relatif aux instances ayant pour objet la modification d’une décision initiale, prévoit que « les dispositions contenues dans la convention homologuée ainsi que les décisions relatives à l’exercice de l’autorité parentale peuvent être modifiées ou complétées à tout moment par le juge, à la demande des ou d’un parent ou du ministère public, qui peut lui-même être saisi par un tiers, parent ou non ».

Le code civil ne prévoit ici nulle intervention de la médiation, que ce soit sous forme de proposition de recours à la médiation ou d’injonction de rencontrer un médiateur familial pour une réunion d’information. Les instances modificatives constituent pourtant une situation où, de l’aveu de nombre de personnes auditionnées par votre rapporteure, l’intervention d’une médiation pourrait se révéler particulièrement utile. Il en va ainsi lorsque des parents séparés assaillent le juge aux affaires familiales de demandes multiples et récurrentes concernant, par exemple, les modalités de résidence des enfants ou leur accueil lors des week-ends ou des vacances.

Pour tenter de progresser dans cette voie, une seconde expérimentation, distincte de celle exposée plus haut, a été lancée (jusqu’au 31 décembre 2014) dans le ressort des tribunaux de grande instance de Bordeaux et d’Arras (126). Elle porte spécifiquement sur les instances modificatives visées à l’article 373-2-13.

L’article 15 de la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 (127) dispose donc, à titre expérimental, que toute requête tendant à la modification d’une décision initiale concernant les modalités de l’exercice de l’autorité parentale ou la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant, ou des dispositions contenues dans une convention homologuée, doit être précédée, à peine d’irrecevabilité, d’une tentative de médiation familiale. Par exception, la médiation ne s’impose ni si la demande émane conjointement des deux parents afin de solliciter l’homologation d’une convention, ni si l’absence de recours à la médiation est justifiée par un motif légitime, ni enfin si la tentative de médiation préalable risque, compte tenu des délais dans lesquels elle est susceptible d’intervenir, de porter atteinte au droit des intéressés d’avoir accès au juge dans un délai raisonnable.

Mme Catherine Tasca et M. Michel Mercier soulignent dans leur rapport du 26 février 2014 qu’« au TGI d’Arras, (…) les requêtes modificatives sont toutes soumises au magistrat référent qui oriente directement vers l’audience, celles qui font exception à l’obligation de médiation préalable » et que « pour les autres requêtes, l’exigence légale est considérée comme respectée dès lors que les parties se sont présentées à une séance d’information sur la médiation (gratuite) à laquelle elles ont été convoquées, ou, de leur propre initiative, avant la saisine du juge (128) ». La tentative de médiation obligatoire se ramène donc à Arras à une simple réunion d’information.

Dans son rapport, le groupe de travail « Médiation familiale et contrats de coparentalité », présidé par M. Marc Juston, a proposé « de rendre applicable, le plus rapidement possible et sur tout le territoire national, cette disposition (129) ».

2.  La mise en place d’une injonction de prendre part à des séances de médiation

L’article 18 vise à compléter l’article 373-2-13 par un alinéa ainsi rédigé : « À l’effet de faciliter la recherche par les parents d’un accord sur les modifications à apporter à la convention homologuée ou aux décisions relatives à l’exercice de l’autorité parentale, le juge peut leur enjoindre de prendre part à des séances de médiation familiale. »

L’objectif est, comme à l’article 17, d’amener les parties à s’engager dans un processus de médiation afin de découvrir in concreto les bénéfices qu’ils pourraient en tirer. Là encore, si une ou deux séances n’ont pas convaincu les parties de l’utilité du processus, le médiateur y mettra fin.

Le fait que le prononcé de cette injonction constitue une simple faculté pour le juge, et non une obligation, vise à permettre d’écarter les affaires où une médiation paraîtrait manifestement inadaptée pour différents motifs (violences physiques ou psychologiques structurelles, motifs de santé, risque d’allongement excessif de la procédure, etc.). L’office du juge est donc préservé.

Par ailleurs, le fait de laisser au juge une faculté d’appréciation a été jugé préférable au choix fait à Arras et Bordeaux d’instaurer une tentative de médiation obligatoire préalable à la saisine du juge, assortie d’exceptions particulièrement larges et imprécises.

Surtout, le dispositif retenu par l’article 18 impose l’organisation de véritables « séances de médiation », alors que, d’après le rapport sénatorial précité, la tentative de médiation obligatoire à Arras se limite dans les faits à une réunion d’information.

Les dispositions de l’article 18 ont été saluées quasi-unanimement par les personnes auditionnées par votre rapporteure, leur seule interrogation ayant trait, comme pour l’article 17, au nombre de séances susceptibles d’imposées par le juge.

Là encore, guidée par le même souci de clarification qui l’avait animée à propos de l’article 17, la commission des Lois a adopté un amendement de votre rapporteure, précisant que le pouvoir d’injonction octroyé au juge dans le cadre de l’article 373-2-13 porte sur la participation à « une ou deux » séances de médiation familiale au plus.

*

* *

La Commission adopte l’amendement de précision CL60 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 18 modifié.

Chapitre IV
Dispositions relatives à la prise en compte de la parole de l’enfant

Article 19
(art. 388-1 du code civil)

Audition du mineur d’une façon adaptée à son degré de maturité

L’article 19 vise à compléter le premier alinéa de l’article 388-1 du code civil par une phrase ainsi rédigée : « Le mineur est entendu d’une manière adaptée à son degré de maturité. »

1.  L’état du droit en matière de recueil de la parole de l’enfant

a.  Les conventions internationales

La convention internationale relative aux droits de l’enfant (CIDE) du 26 janvier 1990, dite convention de New York, a consacré un véritable droit à la parole pour l’enfant. Son article 12 stipule :

« 1. Les États parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité.

2. À cette fin, on donnera notamment à l’enfant la possibilité d’être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l’intéressant, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un représentant ou d’une organisation approprié, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale. »

La nécessité de recueillir la parole de l’enfant se fonde sur l’intérêt de l’enfant, principe énoncé à l’article 3-1 de la même convention, aux termes duquel : « dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ».

On rappellera que ces articles 3-1 et 12 ont été déclarés d’applicabilité directe par la Cour de cassation (130).

Le Comité des droits de l’enfant (131) a publié, à l’issue de sa session organisée du 25 mai au 12 juin 2009, une « observation générale » de l’article 12 de la CIDE. Il y insiste sur le fait que le droit pour tout enfant d’être entendu constitue, avec la non-discrimination, le droit à la vie et le droit au développement de l’intérêt supérieur de l’enfant, l’un des quatre principes généraux de la convention.

Cette observation générale précise également que l’article 12 n’impose pas de seuil d’âge au droit d’être entendu et que les États ne doivent pas en apporter. Le droit pour chaque enfant d’exprimer son point de vue n’a pas en effet besoin d’emprunter une forme verbale de communication. Ainsi les gestes et les dessins peuvent-ils être considérés comme une façon pour l’enfant, même très jeune, d’exprimer son point de vue.

Par ailleurs, comme le relève le Défenseur des droits dans son rapport 2013 : « Pour le comité des droits de l’enfant, les conditions de l’audition de l’enfant sont également primordiales pour que soit respecté son droit d’être entendu. Ainsi considère-t-il que l’audition doit prendre la forme d’une discussion plutôt que d’un interrogatoire, de préférence dans le cabinet du juge ou d’un spécialiste plutôt que dans une enceinte de justice (132). »

De son côté, la convention européenne sur l’exercice des droits des enfants du 25 janvier 1996 stipule en son article 3 : « Un enfant qui est considéré par le droit interne comme ayant un discernement suffisant, dans les procédures l’intéressant devant une autorité judiciaire, se voit conférer les droits suivants, dont il peut lui-même demander à bénéficier :

a. recevoir toute information pertinente ;

b. être consulté et exprimer son opinion ;

c. être informé des conséquences éventuelles de la mise en pratique de son opinion et des conséquences éventuelles de toute décision. »

b.  Le droit interne

La prise en compte de la parole de l’enfant a été consacrée en droit positif par l’article 53 de la loi n° 93-22 du 8 janvier 1993 (133). Cet article insère, après l’article 388 du code civil, un article 388-1 disposant que « dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement être entendu par le juge ou la personne désignée par le juge à cet effet » et que « lorsque le mineur en fait la demande, son audition ne peut être écartée que par une décision spécialement motivée ». Le nouvel article ainsi créé prévoit aussi que le mineur peut être entendu seul, avec un avocat ou une personne de son choix, étant précisé que si ce choix n’apparaît pas conforme à l’intérêt du mineur, le juge peut procéder à la désignation d’une autre personne.

La référence très large à « toute procédure le concernant » permet de viser des instances se déroulant aussi bien devant le juge aux affaires familiales que devant le juge des enfants ou le juge des tutelles, comme l’a rappelé, lors de son audition par votre rapporteure, la représentante de l’Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille.

L’article 9 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance marque une nouvelle avancée. Dans la rédaction qui en est issue, l’article 388-1 dispose désormais que « cette audition [du mineur capable de discernement] est de droit lorsque le mineur en fait la demande » et que « lorsque le mineur refuse d’être entendu, le juge apprécie le bien-fondé de ce refus ». Il est également ajouté un alinéa précisant que « le juge s’assure que le mineur a été informé de son droit à être entendu et à être assisté par un avocat ». Dans son rapport 2013 (134), le Défenseur des droits souligne la demande du mineur formée auprès du juge aux affaires familiales afin d’être entendu est fréquente lors des séparations parentales.

Le décret n° 2009-572 du 20 mai 2009 (135), repris dans les articles 338-1 à 338-12 du code de procédure civile, précise les conditions d’application de l’article 388-1 (136). Ainsi, la demande d’audition peut être présentée sans forme au juge par le mineur lui-même ou par les parties. Elle peut l’être en tout état de la procédure et même pour la première fois en cause d’appel. Lorsque le juge estime que l’intérêt de l’enfant le commande, il désigne pour procéder à son audition une personne exerçant ou ayant exercé une activité dans le domaine social, psychologique ou médico-psychologique. Dans le respect de l’intérêt de l’enfant, il est fait de l’audition un compte rendu, soumis au respect du contradictoire.

2.  Les réformes envisagées au nom de l’intérêt de l’enfant

Malgré les avancées, tant en droit international qu’en droit interne, qui viennent d’être énumérées, la prise en compte de la parole de l’enfant souffre encore de plusieurs faiblesses.

Tout d’abord, elle est trop souvent écartée pour les enfants de moins de douze ou treize ans, notamment au motif que l’enfant ne serait pas capable de discernement. Ensuite, l’appréciation du discernement diffère d’une juridiction à l’autre, faute de critères et de pratiques homogènes, ce qui crée des déceptions et des inégalités de traitement chez les enfants qui demandent à être entendus. Dans certains tribunaux de grande instance, les juges aux affaires familiaux se refusent même tout simplement à entendre les mineurs. Enfin, d’une manière générale, le principe même de l’audition des mineurs, surtout des plus jeunes, rencontre encore des réticences, au prétexte que leur parole risquerait d’être manipulée ou instrumentalisée par l’un des parents et qu’entendre l’enfant conduirait à le mêler, contre son propre intérêt, au conflit parental.

C’est pourquoi, afin de remédier à ces difficultés, le Défenseur des droits, dans son rapport 2013 (137), formule la proposition suivante : « Reconnaître une présomption de discernement à tout enfant qui demande à être entendu par le juge dans une procédure qui le concerne. Le magistrat entendant l’enfant qui le demande pourra alors apprécier son discernement et sa maturité. Reformuler l’article 388-1 du code civil en ce sens. »

Cette proposition rejoint celle avancée par le groupe de travail « De nouveaux droits pour les enfants », présidé par M. Jean-Pierre Rosenczveig(138). Le rapport de ce groupe de travail précise cependant que la meilleure prise en compte de la parole de l’enfant ne doit pas aller jusqu’à donner à celui-ci un pouvoir de décision : « En effet, ce pouvoir de décision aurait l’effet inverse à celui recherché puisqu’il conduirait à travers la reconnaissance d’un droit nouveau à accorder à l’enfant une place qui ne peut et ne doit être la sienne. Ainsi, pour prendre l’exemple de la séparation du couple parental, l’enfant ne peut et ne doit pouvoir décider seul son lieu de résidence, ce qui risquerait de le placer au centre d’un conflit de loyauté entre ses parents. L’enfant doit donc pouvoir donner son avis mais les parents décident sous contrôle du juge, et à défaut d’accord ou d’un accord qui ne prend pas en compte les intérêts de l’enfant le juge doit pouvoir trancher le litige (139). »

Toute réforme en matière de recueil de la parole de l’enfant se doit de rechercher un équilibre entre la nécessité d’écouter la parole de l’enfant et, en même temps, le besoin de protéger celui-ci des conséquences de sa parole, comme l’explique M. Marc Juston, président du tribunal de grande instance de Tarascon : « Face à la parole de l’enfant, qui est devenu le personnage central de la famille, la problématique du juge aux affaires familiales, dans une situation de conflit familial, réside dans la difficile conciliation entre, d’une part, le droit à la protection de l’enfant, qui positionne l’enfant comme objet de droit et, d’autre part, le droit de l’enfant à exprimer son opinion, qui le place comme sujet de droit (140). »

Le principe fondamental qui doit guider toute réforme en la matière est donc bien l’intérêt supérieur de l’enfant, principe énoncé aussi bien à l’article 373-2-6 du code civil (« le juge (…) règle les questions qui lui sont soumises (…) en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs ») qu’à l’article L. 112-4 du code de l’action sociale et des familles (« l’intérêt de l’enfant, la prise en compte de ses besoins fondamentaux, physiques, intellectuels, sociaux et affectifs ainsi que le respect de ses droits doivent guider toutes décisions le concernant »).

3.  Les apports de la présente proposition de loi

L’article 19 de la proposition de loi entend poser les bases d’une meilleure prise en compte de la parole de l’enfant en complétant le premier alinéa de l’article 388-1.

Ce premier alinéa prévoit, dans sa rédaction actuelle, que « dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet ». Il serait désormais complété par une phrase précisant que « le mineur est entendu d’une manière adaptée à son degré de maturité. »

Cette rédaction est inspirée de l’article L. 1111-2 du code de la santé publique, relatif au droit d’information de toute personne sur son état de santé, qui dispose, s’agissant des mineurs, qu’ils « ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d’une manière adaptée (…) à leur degré de maturité ».

Elle constitue également une reprise des termes employés par le troisième alinéa de l’article 371-1 du code civil, qui dispose que « les parents associent l’enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité ».

Il est manifeste que la rédaction proposée par l’article 19, largement saluée par les personnes auditionnées par votre rapporteure, constitue une première étape vers l’élargissement de la prise en compte de la parole de l’enfant, qui appelle des compléments ultérieurs.

Dans cet esprit, votre rapporteur a déposé un amendement supprimant la condition actuellement posée par l’article 388-1 du code civil faisant de la capacité de discernement du mineur un préalable nécessaire à son audition par le juge. Cet amendement confirme que l’audition est de droit lorsque le mineur en fait la demande mais, par souci d’équilibre, ménage une exception à ce principe dans le cas où l’intérêt de l’enfant commande qu’il ne soit pas entendu. Le juge doit alors motiver spécialement sa décision. Cet amendement, qui réaménage par ailleurs l’article 388-1 pour plus de clarté, a été adopté par la commission des Lois.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL37 de la rapporteure et CL21 de M. Erwann Binet.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à assurer une meilleure prise en compte de la parole du mineur dans les procédures qui le concernent, en supprimant la condition actuellement posée par l’article 388-1 du code civil tenant à sa capacité de discernement. L’amendement précise que le mineur doit être entendu selon des modalités adaptées à son degré de maturité.

En parallèle, et par souci d’équilibre, il est précisé que, si l’audition est de droit lorsque le mineur en fait la demande, une exception est toutefois ménagée à ce principe dans le cas où l’intérêt de l’enfant commande qu’il ne soit pas entendu. Le juge doit dans ce cas motiver spécialement sa décision.

L’amendement réaménage par ailleurs l’article 388-1, par souci de clarté.

M. Guy Geoffroy. Il faudrait reprendre, par cohérence, la combinaison de l’âge et du degré de maturité évoquée par l’article 371-1 du code civil.

M. Erwann Binet. De nombreux juges aux affaires familiales que nous avons rencontrés et les associations familiales nous ont indiqué que l’interprétation de la capacité de discernement était disparate d’un tribunal de grande instance à l’autre et selon les modes opératoires adoptés par les juges eux-mêmes, qui peuvent décider, en fonction de l’âge de l’enfant, s’ils vont l’entendre. La Défenseure des enfants avait d’ailleurs proposé à cet égard qu’une présomption de discernement soit instaurée dès lors que l’enfant exprimait le besoin d’être entendu par le juge. Nous souhaitons donc lever la condition d’âge, même s’il va de soi que l’enfant doit pouvoir exprimer ce souhait.

M. Philippe Gosselin. S’il y a des différences d’appréciation quant au discernement, il y en aura aussi quant à la maturité, qui sera prise en compte différemment selon les juges. Comme le discernement, la maturité est déterminée par un faisceau d’indices et n’est pas susceptible d’une définition rigoureuse. Évitons de rendre la loi bavarde et de susciter des interprétations différentes selon les tribunaux.

Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement souscrit à l’objectif poursuivi par la rapporteure et par M. Binet, car les pratiques sont très différentes. Les magistrats ne sont pas toujours formés ou n’ont pas toujours le temps pour procéder à des auditions d’enfants, qui sont en outre compliquées.

L’audition de l’enfant n’en est pas moins importante. Il s’agit d’ailleurs d’un droit figurant à la fois dans les conventions internationales et dans le code civil, et qui doit être renforcé.

Cependant, l’expression « capacité de discernement » ne touche pas seulement le code civil, mais elle a d’autres conséquences pour les enfants et pour leurs droits dans d’autres codes.

La prudence s’impose donc et je ne puis être favorable à un amendement qui proposerait la suppression de la condition relative à la capacité de discernement. Je propose donc que nous recherchions, avant l’examen du texte en séance publique, une rédaction favorisant l’audition de l’enfant.

Mme la rapporteure. C’est en fonction de critères de discernement que les juges décident, dans différentes juridictions, d’entendre des enfants d’âge différents. Parfois, du reste, ce sont les enfants qui ne veulent pas être entendus.

Je ne retirerai pas l’amendement, mais nous pouvons y retravailler pour trouver une rédaction tenant compte des préoccupations de chacun, car nous souhaitons tous permettre que la parole de l’enfant soit entendue.

M. Erwann Binet. La capacité de discernement et le degré de maturité désignent des choses différentes et ne sont pas interchangeables. La capacité de discernement porte en effet sur la possibilité d’être entendu, tandis que le degré de maturité porte sur la manière de recueillir la parole de l’enfant. Alors que l’amendement CL37 de la rapporteure propose de supprimer uniquement les mots « capable de discernement », l’amendement CL21 présume le discernement. Je retire cet amendement au bénéfice de l’amendement CL37 de la rapporteure.

L’amendement CL21 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL37.

Puis elle adopte l’article 19 modifié.

Après l’article 19

La Commission est saisie des amendements CL31 et CL34 de M. Sergio Coronado, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Véronique Massonneau. Ces amendements portent sur l’aspect de la proposition de loi relatif aux droits des enfants, qu’il nous semble nécessaire de développer. Ils reprennent des propositions du groupe de travail sur les droits de l’enfant présidé par le magistrat Jean-Pierre Rosenczveig, qui avait rédigé un rapport en vue de la loi sur la famille. Parmi ses nombreuses propositions, le groupe de travail souhaitait voir augmenter les droits des enfants dans les procédures les concernant. Aujourd’hui, un enfant de treize ans peut aller en prison, sa majorité sexuelle est à quinze ans, il peut travailler à seize ans, et même à quinze ans s’il est en apprentissage, voire à quatorze ans dans certaines conditions, et il peut conduire un véhicule dès seize ans. Il est temps d’aligner le statut civil avec le statut pénal et de renforcer les droits de ceux qui ne sont pas encore majeurs, mais plus tout à fait des enfants.

Ces deux amendements, directement repris du rapport Rosenczveig, proposent qu’un enfant de quinze ans puisse être mieux entendu dans les affaires qui le concernent sur sa garde. Il est bien sûr toujours délicat pour un mineur de prendre part aux affaires qui concernent ses parents et il nous faut éviter deux écueils : l’instrumentalisation des enfants par ses parents et forcer un enfant à intervenir sur un sujet dont il veut se protéger.

C’est la raison pour laquelle nous proposons de fixer un seuil d’âge suffisamment élevé. L’amendement CL31 tend à donner à ces enfants de plus de quinze ans la possibilité de saisir eux-mêmes le procureur, afin qu’il puisse éventuellement saisir le juge pour statuer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, comme peuvent d’ailleurs déjà le faire des tiers, qu’ils soient ou non parents. Le filtre du procureur nous semble à cet égard une garantie importante.

L’amendement CL33 tend à ce que le juge aux affaires familiales prenne en compte l’adhésion de l’enfant de plus de quinze ans à sa prise en charge, alors qu’il ne prend actuellement en compte que les sentiments exprimés par l’enfant, quel que soit son âge. Pour un enfant plus âgé, cela est manifestement insuffisant, car cet enfant est assez mûr pour avoir un droit de veto. Un enfant de plus de quinze ans est capable d’exprimer son adhésion aux modalités de sa prise en charge et le juge doit pouvoir en tenir compte. Passé cet âge, sa maturité lui permet d’éviter d’être instrumentalisé par l’un de ses parents.

Mme la rapporteure. Cet amendement tend à faire du mineur, certes âgé d’au moins quinze ans, une partie au litige opposant ses parents, même si la possibilité qui lui serait offerte de saisir le juge aux affaires familiales ne serait qu’indirecte, car elle passerait par le truchement du producteur.

Une telle évolution semble porteuse de difficultés. Tout d’abord, ce qui est proposé s’opposerait au système actuel de la représentation légale des mineurs. Dans les procès civils, le mineur est représenté par ses parents ou par un administrateur ad hoc. On créerait ici un régime spécifique pour la saisine du juge aux affaires familiales en matière d’autorité parentale et de contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant, ce qui serait dérogatoire par rapport aux autres procès civils. Ensuite, l’enfant serait amené à formuler des demandes – par exemple de vivre chez son père –, dont certaines pourraient être rejetées par le juge, décidant par exemple que l’enfant irait chez sa mère. La position de l’enfant sera en quelque sorte cristallisée ou objectivée. Il peut être pris comme l’allié ou l’adversaire d’un de ses parents, ce qu’évite le système actuel du recueil de la parole de l’enfant par le juge.

Ces difficultés méritent une réflexion plus approfondie avant d’introduire une innovation aussi importante dans notre droit.

En conséquence, avis défavorable aux deux amendements.

La Commission rejette successivement les amendements.

Article 19 bis (nouveau)
(art. 413-2 et 413-3 du code civil)

Émancipation à la demande du mineur

Le présent article est issu d’un amendement présenté par M. Sergio Coronado et Mme Véronique Massonneau et adopté par la commission des Lois.

Le I de l’article 19 bis (nouveau) modifie l’article 413- 2 du code civil. Celui-ci dispose, dans sa rédaction actuelle, que le mineur âgé de seize ans révolus peut être émancipé, pour de justes motifs, par le juge des tutelles, « à la demande des père et mère ou de l’un d’eux ». Le I de l’article 19 bis (nouveau) permet au mineur lui-même de solliciter cette émancipation auprès du juge des tutelles.

Le II de l’article 19 bis (nouveau) complète l’article 413-3 du code civil, qui dispose actuellement que le mineur resté sans père ni mère peut être émancipé « à la demande du conseil de famille ». Il est précisé là encore que cette émancipation peut être sollicitée par le mineur lui-même.

L’intervention du juge des tutelles garantit qu’une émancipation ne sera pas prononcée en l’absence de motifs sérieux, et notamment si le mineur ne présente pas la maturité suffisante.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL33 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. L’amendement CL33, qui porte lui aussi sur la prise en compte de la parole et de la volonté de l’enfant, concerne plus précisément l’émancipation.

En matière civile, l’enfant peut saisir un juge des enfants s’il s’estime en danger. Toutefois, hors ces cas de danger, l’enfant reste incapable de faire valoir lui-même ses droits, même lorsque son âge rend possible sa poursuite devant un tribunal correctionnel.

C’est pourquoi cet amendement propose que l’enfant de plus de seize ans puisse demander lui-même son émancipation. Actuellement, elle ne peut être demandée que par ses parents ou l’un de ses deux parents.

Les critères pour prononcer l’émancipation resteraient identiques. Toutefois, un mineur de plus de seize ans est capable d’exprimer ses intérêts et de vouloir les défendre directement.

Mme la rapporteure. Avis favorable.

Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Chapitre V
Dispositions finales

Article 20
Gage
de la présente proposition de loi

Le présent article, qui prévoit le gage financier des dispositions de la présente proposition de loi, a pour objet d’en assurer la recevabilité financière. Dans cette perspective, il compense les charges pouvant résulter pour l’État, les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale de l’application de certaines dispositions de la présente proposition de loi.

La commission des Lois a adopté un amendement de suppression de cet article présenté par le Gouvernement, ce dernier ayant fait valoir, par le biais de cet amendement et ce, de manière explicite, son intention d’accepter les conséquences financières, en termes d’aggravation des charges publiques, des mesures prévues par la proposition de loi ainsi que son soutien aux dispositions qu’elle contient.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL35 du Gouvernement.

Mme la secrétaire d’État. Cet amendement, qui tend à supprimer l’article 20, lève le gage.

Mme la rapporteure. Avis très favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 20 est supprimé.

Titre de la proposition de loi

L’amendement CL11 de Mme Colette Capdevielle est retiré.

La Commission adopte l’ensemble du texte de la proposition de loi modifié.

TABLEAU COMPARATIF

___

Dispositions en vigueur

___

Texte de la proposition de loi

___

Texte adopté par la Commission

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Proposition de loi relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant

Proposition de loi relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant

 

Chapitre IER

Chapitre IER

 

Dispositions relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale

Dispositions relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale

Code civil

Article 1er

Article 1er

Art. 62. – L’acte de reconnaissance énonce les prénoms, nom, date de naissance ou, à défaut, âge, lieu de naissance et domicile de l’auteur de la reconnaissance.

   

Il indique les date et lieu de naissance, le sexe et les prénoms de l’enfant ou, à défaut, tous renseignements utiles sur la naissance, sous réserve des dispositions de l’article 326.

   

L’acte de reconnaissance est inscrit à sa date sur les registres de l’état civil.

   

Seules les mentions prévues au premier alinéa sont portées, le cas échéant, en marge de l’acte de naissance de l’enfant.

   

Dans les circonstances prévues à l’article 59, la déclaration de reconnaissance peut être reçue par les officiers instrumentaires désignés en cet article et dans les formes qui y sont indiquées.

   

Lors de l’établissement de l’acte de reconnaissance, il est fait lecture à son auteur des articles 371-1 et 371-2.

Art. 373-2. – Cf. annexe

À la fin du sixième alinéa de l’article 62 du code civil, la référence : « 371-2 » est remplacée par les références : « 371-2, 372 et 373-2 ».

(Sans modification)

 

Article 2

Article 2

 

Le titre II du livre Ier du même code est complété par un chapitre VIII ainsi rédigé :

(Alinéa sans modification)

 

« Chapitre VIII

(Alinéa sans modification)

 

« De la publicité des actes de l’état civil

(Alinéa sans modification)

 

« Art. 101-1. – La publicité des actes de l’état civil est assurée par la délivrance des copies intégrales ou d’extraits faites par les officiers de l’état civil.

« Art. 101-1. – (Alinéa sans modification)

 

« Le contenu et les conditions de délivrance des copies intégrales et des extraits sont fixés par décret en Conseil d’État.

(Alinéa sans modification)

 

« La procédure de vérification sécurisée des données à caractère personnel contenues dans les actes de l’état civil peut être mise en œuvre aux fins de suppléer à la délivrance des copies et extraits dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État.

… copies intégrales et des extraits …

amendement CL41

 

« Art. 101-2. – La publicité des actes de l’état civil est également assurée par le livret de famille, dont le contenu, les règles de mise à jour et les conditions de délivrance sont fixés par décret en Conseil d’État. Le livret de famille, dont le modèle est défini par arrêté, comporte en outre une information sur le droit de la famille, notamment sur le nom, la filiation, les droits et devoirs des parents à l’égard de leurs enfants et le droit des successions.

« Art. 101-2. – La publicité des actes de l’état civil est également assurée par le livret de famille, dont le contenu, les règles de mise à jour, les conditions de délivrance et de sécurisation sont fixés par décret en Conseil d’État. Son modèle est défini par arrêté.

amendement CL1

 

« Il comporte également une information sur les droits et devoirs respectifs des conjoints, leurs obligations et leur régime matrimonial. »

Alinéa supprimé

amendement CL1

 

Article 3

Article 3

 

Le premier alinéa de l’article 372 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :

(Sans modification)

Art. 372. – Les père et mère exercent en commun l’autorité parentale.

« Ils doivent s’informer réciproquement de l’organisation de la vie de l’enfant et prendre ensemble les décisions qui le concernent. »

 

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   
 

Article 4

Article 4

 

L’article 372-1 du même code est rétabli dans la rédaction suivante :

Après l’article 372 du même code, il est rétabli un article 372-1 ainsi rédigé :

 

« Art. 372-1. – Tout acte de l’autorité parentale, qu’il ait un caractère usuel ou important, requiert l’accord de chacun des parents lorsqu’ils exercent en commun l’autorité parentale. Cet accord est exprès pour les actes importants.

« Art. 372-1. – (Alinéa sans modification)

 

« Constitue un acte important l’acte qui rompt avec le passé et engage l’avenir de l’enfant ou qui touche à ses droits fondamentaux.

(Alinéa sans modification)

Art. L. 373-2-11. – Cf. annexe

 

« En cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales, en référé le cas échéant. Le juge statue selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant et en prenant en considération les éléments mentionnés à l’article 373-2-11.

amendement CL43

 

« Le changement de résidence de l’enfant, dès lors qu’il modifie les modalités d’accueil de l’enfant par l’autre parent, et le changement d’établissement scolaire sont des actes importants. Toutefois, l’accord de l’autre parent n’est pas requis lorsque celui-ci a été condamné soit comme auteur, coauteur ou complice d’un crime ou délit sur la personne du parent qui souhaite changer la résidence ou l’établissement scolaire de l’enfant. »

(Alinéa sans modification)

 

Article 5

Article 5

Art. 373-2-6. – Le juge du tribunal de grande instance délégué aux affaires familiales règle les questions qui lui sont soumises dans le cadre du présent chapitre en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs.

 

L’article 373-2-6 du même code est ainsi modifié :

amendement CL44

Le juge peut prendre les mesures permettant de garantir la continuité et l’effectivité du maintien des liens de l’enfant avec chacun de ses parents.

 

 Au deuxième alinéa, après le mot : « prendre », sont insérés les mots : « , le cas échéant sous astreinte, ».

amendement CL48

Il peut notamment ordonner l’interdiction de sortie de l’enfant du territoire français sans l’autorisation des deux parents. Cette interdiction de sortie du territoire sans l’autorisation des deux parents est inscrite au fichier des personnes recherchées par le procureur de la République.

   
 

L’article 372-2-6 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

Art. 372-1– Cf. supra art. 4

« Il peut également, lorsqu’un parent fait délibérément obstacle de façon grave ou renouvelée aux règles de l’exercice conjoint de l’autorité parentale prévues à l’article 372-1 en empêchant l’autre parent d’exercer ses prérogatives, ou lorsqu’un parent ne respecte pas une décision fixant les modalités de l’exercice de l’autorité parentale, le condamner, par une décision spécialement motivée, au paiement d’une amende civile d’un montant qui ne peut excéder 10 000 euros. L’amende est proportionnée à la gravité de l’atteinte aux règles de l’exercice conjoint de l’autorité parentale et aux facultés contributives du parent. »

… une décision ou une convention homologuée fixant les modalités d’exercice …

amendements CL46 et CL47

 

Article 6

Article 6

Art. 373-2-1. – Si l’intérêt de l’enfant le commande, le juge peut confier l’exercice de l’autorité parentale à l’un des deux parents.

   

L’exercice du droit de visite et d’hébergement ne peut être refusé à l’autre parent que pour des motifs graves.

Le début du second alinéa de l’article 373-2-1 du même code est ainsi rédigé : « Il fixe la résidence de l’enfant à son domicile et détermine le droit de visite et d’hébergement de l’autre parent, qui ne peut être refusé que... (le reste sans changement). »

… l’enfant au domicile du parent qui exerce l’autorité parentale et détermine …

amendement CL49

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   
   

Article 6 bis (nouveau)

Art. 373-2-2. – En cas de séparation entre les parents, ou entre ceux-ci et l’enfant, la contribution à son entretien et à son éducation prend la forme d’une pension alimentaire versée, selon le cas, par l’un des parents à l’autre, ou à la personne à laquelle l’enfant a été confié.

 

Le deuxième alinéa de l’article 373-2-2 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :

Les modalités et les garanties de cette pension alimentaire sont fixées par la convention homologuée visée à l’article 373-2-7 ou, à défaut, par le juge.

 

« Le montant de cette pension peut être modifié par le juge si le non-respect par l’un des parents de la convention homologuée ou de la décision du juge aux affaires familiales a pour effet de modifier la répartition entre les parents de la charge effective d’entretien et d’éducation de l’enfant. »

amendement CL18

Cette pension peut en tout ou partie prendre la forme d’une prise en charge directe de frais exposés au profit de l’enfant.

   

Elle peut être en tout ou partie servie sous forme d’un droit d’usage et d’habitation.

   
 

Article 7

Article 7

 

L’article 373-2-9 du même code est ainsi modifié :

(Alinéa sans modification)

 

1° Les trois premiers alinéas sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :

1° (Alinéa sans modification)

Art. 373-2-9. – En application des deux articles précédents, la résidence de l’enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l’un d’eux.

« En application des deux articles précédents, la résidence de l’enfant est fixée au domicile de chacun des parents selon les modalités déterminées d’un commun accord entre les parents ou à défaut par le juge.

… modalités de fréquence et de durée déterminées …

amendement CL50

A la demande de l’un des parents ou en cas de désaccord entre eux sur le mode de résidence de l’enfant, le juge peut ordonner à titre provisoire une résidence en alternance dont il détermine la durée. Au terme de celle-ci, le juge statue définitivement sur la résidence de l’enfant en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l’un d’eux.

« À titre exceptionnel, le juge peut fixer la résidence de l’enfant au domicile de l’un des parents. Dans ce cas, il statue sur les modalités du droit de visite de l’autre parent. Si les circonstances l’exigent, ce droit de visite peut être exercé dans un espace de rencontre qu’il désigne. » ;

(Alinéa sans modification)

Lorsque la résidence de l’enfant est fixée au domicile de l’un des parents, le juge aux affaires familiales statue sur les modalités du droit de visite de l’autre parent. Ce droit de visite, lorsque l’intérêt de l’enfant le commande, peut être exercé dans un espace de rencontre désigné par le juge.

   

Lorsque l’intérêt de l’enfant le commande ou lorsque la remise directe de l’enfant à l’autre parent présente un danger pour l’un d’eux, le juge en organise les modalités pour qu’elle présente toutes les garanties nécessaires. Il peut prévoir qu’elle s’effectue dans un espace de rencontre qu’il désigne, ou avec l’assistance d’un tiers de confiance ou du représentant d’une personne morale qualifiée.

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

2° (Sans modification)

 

« Ces différentes modalités peuvent être ordonnées par le juge à titre provisoire pour une durée qu’il détermine. Au terme de celle-ci, il statue définitivement. »

 
   

Article 7 bis (nouveau)

   

L’article 373-2-12 du code civil est ainsi modifié :

Art. 373-2-12. – Avant toute décision fixant les modalités de l’exercice de l’autorité parentale et du droit de visite ou confiant les enfants à un tiers, le juge peut donner mission à toute personne qualifiée d’effectuer une enquête sociale. Celle-ci a pour but de recueillir des renseignements sur la situation de la famille et les conditions dans lesquelles vivent et sont élevés les enfants.

 

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

   

« Le juge peut également ordonner une expertise en vue de recueillir des éléments médicaux ou psychologiques. »

Si l’un des parents conteste les conclusions de l’enquête sociale, une contre-enquête peut à sa demande être ordonnée.

 

2° Au deuxième alinéa, après le mot : « sociale », sont insérés les mots : « ou celles de l’expertise , et, après le mot : « contre-enquête », sont insérés les mots : « ou contre-expertise » ;

   

3° Le début du troisième alinéa est ainsi rédigé :

L’enquête sociale ne peut être utilisée dans le débat sur la cause du divorce.

 

« Les conclusions de l’enquête sociale ou de l’expertise ne peuvent être utilisées... (le reste sans changement). »

amendement CL58

Code pénal

Article 8

Article 8

Art. 227-5– Cf. annexe

Art. 131-13. – Cf. annexe

Code de procédure pénale

Art. 529 à 529-2. – Cf. annexe

I. – Hors le cas prévu par l’article 227-5 du code pénal, le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer est puni de l’amende prévue par l’article 131-13 du même code pour les contraventions de la quatrième classe. Cette contravention peut faire l’objet de la procédure de l’amende forfaitaire prévue par les articles 529 à 529-2 du code de procédure pénale.

I. – Hors le cas prévu par le premier alinéa de l’article 227-5 du code pénal et sous réserve des cas prévus aux trois derniers alinéas du même article, le fait …

amendement CL53

   

II. – L’article 227-5 du code pénal est ainsi modifié :

Code pénal

Art. 227-5. – Le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

II. – Le début de l’article 227-5 du code pénal est ainsi rédigé : « Lorsqu’il a déjà été commis au cours des deux années précédentes, le fait… (le reste sans changement). »

1° Le début est ainsi rédigé : « Lorsque la personne concernée a déjà fait l’objet d’une contravention pour un fait identique au cours …

amendement CL51

   

2° Le même article 227-5 est complété par les trois alinéas suivants :

   

« Ne peut donner lieu à des poursuites pénales le fait de refuser de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer :

   

« 1° Si la représentation de l’enfant ferait courir un danger à celui-ci ;

Art. 373-2. – Cf. supra art. 4

 

« 2° En cas de manquement grave et habituel du titulaire du droit de réclamer l’enfant aux obligations qui lui incombent en application du deuxième alinéa de l’article 373-2 du code civil. »

amendement CL53

Art. 227-9. – Les faits définis par les articles 227-5 et 227-7 sont punis de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende :

Art. 227-7. – Cf. annexe

 

IV. – Au début du premier alinéa de l’article 227-9 du même code, les mots : « Les faits définis par les articles 227-5 et 227-7 »  sont remplacés par les mots : « Le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer et le fait défini à l’article 227-7 » .

amendement CL52

1° Si l’enfant mineur est retenu au-delà de cinq jours sans que ceux qui ont le droit de réclamer qu’il leur soit représenté sachent où il se trouve ;

   

2° Si l’enfant mineur est retenu indûment hors du territoire de la République.

   
   

Article 8 bis (nouveau)

Loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative

 

L’article 34-1 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative est ainsi rédigé :

Art. 34-1. – Le procureur de la République peut requérir directement la force publique pour faire exécuter les décisions rendues sur le fondement des instruments internationaux et européens relatives au déplacement illicite international d’enfants, dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.

 

« Art. 34-1. – Le procureur de la République veille à l’exécution des décisions de justice rendues en matière civile.

   

« Sous réserve des dispositions applicables aux procédures civiles d’exécution, le procureur de la République peut requérir directement la force publique pour faire exécuter ces décisions de justice.

   

« Pour les décisions rendues sur le fondement des instruments internationaux et européens relatives au déplacement illicite international d’enfants, les conditions du recours à la force publique par le procureur de la République sont définies par décret en Conseil d’État. »

amendement CL54

 

Chapitre II

Chapitre II

 

Dispositions relatives aux droits et aux devoirs des tiers
qui concourent à l’éducation de l’enfant

Dispositions relatives aux droits et aux devoirs des tiers
qui concourent à l’éducation de l’enfant

Code civil

Article 9

Article 9

Art. 372-2. – A l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre, quand il fait seul un acte usuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant.

À la fin de l’article 372-2 du code civil, les mots : « relativement à la personne de l’enfant » sont remplacés par les mots : « ou quand il autorise un tiers à accomplir un tel acte ».

(Sans modification)

 

Article 10

Article 10

 

Après l’article 373-2-1 du même code, il est inséré un article 373-2-1-1 ainsi rédigé :

(Alinéa sans modification)

 

« Art. 373-2-1-1. – Sans préjudice de l’article 372-2, le parent peut, avec l’accord de l’autre parent, donner un mandat d’éducation quotidienne à son concubin, partenaire ou conjoint avec lequel il réside de façon stable pour chacun des enfants vivant avec le couple. Le mandat, rédigé par acte sous seing privé ou en la forme authentique, permet d’accomplir les actes usuels de l’autorité parentale pour la durée de la vie commune.

« Art. 373-2-1-1. – …

… concubin, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou conjoint avec lequel il réside de façon stable pour chacun des enfants vivant avec le couple. Le mandat, rédigé par acte sous seing privé ou en la forme authentique, permet au concubin, partenaire ou conjoint d’accomplir …

amendements CL55 et CL56

 

« Le mandat peut être révoqué à tout moment par le mandant. Il prend fin de plein droit en cas de rupture de la vie commune, de décès du mandant ou du mandataire ou de renonciation de ce dernier à son mandat. »

(Alinéa sans modification)

 

Article 11

Article 11

Art. 373-3. – La séparation des parents ne fait pas obstacle à la dévolution prévue à l’article 373-1, lors même que celui des père et mère qui demeure en état d’exercer l’autorité parentale aurait été privé de l’exercice de certains des attributs de cette autorité par l’effet du jugement prononcé contre lui.

L’article 373-3 du même code est ainsi modifié :

(Sans modification)

Le juge peut, à titre exceptionnel et si l’intérêt de l’enfant l’exige, notamment lorsqu’un des parents est privé de l’exercice de l’autorité parentale, décider de confier l’enfant à un tiers, choisi de préférence dans sa parenté. Il est saisi et statue conformément aux articles 373-2-8 et 373-2-11.

1° À la fin de la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « choisi de préférence dans sa parenté » sont remplacés par les mots : « parent ou non » ;

 

Dans des circonstances exceptionnelles, le juge aux affaires familiales qui statue sur les modalités de l’exercice de l’autorité parentale après séparation des parents peut décider, du vivant même des parents, qu’en cas de décès de celui d’entre eux qui exerce cette autorité, l’enfant n’est pas confié au survivant. Il peut, dans ce cas, désigner la personne à laquelle l’enfant est provisoirement confié.

2° À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « celui d’entre eux qui exerce cette autorité » sont remplacés par les mots : « l’un d’eux » et après le mot : « survivant », sont insérés les mots : « mais à un tiers, choisi dans sa parenté ou non, selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant ».

 
 

Article 12

Article 12

 

L’article 373-4 du même code est ainsi modifié :

(Alinéa sans modification)

Art. 373-4 . – Lorsque l’enfant a été confié à un tiers, l’autorité parentale continue d’être exercée par les père et mère ; toutefois, la personne à qui l’enfant a été confié accomplit tous les actes usuels relatifs à sa surveillance et à son éducation.

1° À la fin du premier alinéa, les mots : « accomplit tous les actes usuels relatifs à sa surveillance et à son éducation » sont remplacés par les mots : « peut accomplir tous les actes usuels de l’autorité parentale » ;

1° (Sans modification)

 

2° Le même alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « À titre exceptionnel, le juge peut également l’autoriser à accomplir, lorsque l’intérêt de l’enfant le justifie, un acte important de l’autorité parentale. » ;

2° (Sans modification)

 

3° Le second alinéa est ainsi rédigé :

3° (Alinéa sans modification)

Le juge aux affaires familiales, en confiant l’enfant à titre provisoire à un tiers, peut décider qu’il devra requérir l’ouverture d’une tutelle.

« En cas de conflit entre le tiers et le parent survivant, chacun peut saisir le juge qui statue en considération de l’intérêt de l’enfant. »

… le tiers et le ou les parents, chacun …

amendement CL62

 

Article 13

Article 13

Livre Ier

Des personnes

Titre IX

De l’autorité parentale

Chapitre Ier

De l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant

Section 3

La section 3 du chapitre Ier du titre IX du livre Ier du même code est ainsi modifiée :

(Alinéa sans modification)

De la délégation de l’autorité parentale

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Du partage et de la délégation de l’exercice de l’autorité parentale » ;

1° (Sans modification)

 

2° Il est inséré un paragraphe 1 intitulé : « Principes généraux » et comprenant les articles 376 à 376-3 ;

2° (Sans modification)

 

3° Après l’article 376-1, il est inséré un article 376-2 ainsi rédigé :

3° (Alinéa sans modification)

Art.  373-2-11. – Cf. annexe

« Art. 376-2. – Le juge peut être saisi des difficultés que l’exercice partagé ou délégué de l’autorité parentale pourrait générer par les parents, l’un d’eux, le tiers qui exerce l’autorité parentale ou le ministère public. Il statue conformément à l’article 373-2-11. » ;

« Art. 376-2. – Lorsqu’il statue sur le partage ou la délégation de l’exercice de l’autorité parentale, le juge règle les différentes questions qui lui sont soumises conformément au présent chapitre. Il peut être saisi des difficultés nées de l’exercice partagé ou délégué par les parents, l’un d’eux, le tiers qui exerce l’autorité parentale ou le ministère public. » ;

amendement CL57

 

4° Les articles 377 et 377-2 deviennent, respectivement, les articles 377-2 et 377-3 ;

4° (Sans modification)

 

5° Il est inséré un paragraphe 3 intitulé : « De la délégation de l’exercice de l’autorité parentale » et comprenant les articles 377-2 et 377-3, tels qu’ils résultent du 4° du présent article ;

5° (Sans modification)

Art. 377-3. – Le droit de consentir à l’adoption du mineur n’est jamais délégué.

6° L’article 377-3 devient l’article 376-3 et est complété par les mots : « ou partagé ».

6° (Sans modification)

 

Article 14

Article 14

 

L’article 377-1 du même code est remplacé par un paragraphe 2 ainsi rédigé :

(Sans modification)

 

« Paragraphe 2

 
 

« Du partage de l’exercice de l’autorité parentale

 

Art. 377-1. – La délégation, totale ou partielle, de l’autorité parentale résultera du jugement rendu par le juge aux affaires familiales.

« Art. 377. – Les parents qui exercent conjointement l’autorité parentale peuvent saisir le juge aux affaires familiales, afin de faire homologuer la convention par laquelle ils organisent le partage de tout ou partie de l’exercice de leur autorité parentale avec un tiers.

 

Toutefois, le jugement de délégation peut prévoir, pour les besoins d’éducation de l’enfant, que les père et mère, ou l’un d’eux, partageront tout ou partie de l’exercice de l’autorité parentale avec le tiers délégataire. Le partage nécessite l’accord du ou des parents en tant qu’ils exercent l’autorité parentale. La présomption de l’article 372-2 est applicable à l’égard des actes accomplis par le ou les délégants et le délégataire.

« Le juge peut également être saisi par l’un des parents qui exercent l’autorité parentale. Le partage nécessite l’accord des deux parents.

 

Le juge peut être saisi des difficultés que l’exercice partagé de l’autorité parentale pourrait générer par les parents, l’un d’eux, le délégataire ou le ministère public. Il statue conformément aux dispositions de l’article 373-2-11.

« La même faculté appartient au parent qui exerce seul l’autorité parentale. L’avis de l’autre parent doit être recueilli.

 
 

« Dans tous les cas, le juge homologue la convention sauf s’il constate qu’elle ne préserve pas suffisamment l’intérêt de l’enfant ou que le consentement du ou des parents n’a pas été donné librement.

 
 

« Art. 377-1. – Le partage prend fin par une convention homologuée par le juge ou, en cas de désaccord par un jugement, à la demande du tiers ou de l’un des parents.

 
 

« Si la demande émane d’un parent qui exerce l’autorité parentale, le juge y fait droit sauf circonstances exceptionnelles. »

 
 

Article 15

Article 15

Art. 377. – Les père et mère, ensemble ou séparément, peuvent, lorsque les circonstances l’exigent, saisir le juge en vue de voir déléguer tout ou partie de l’exercice de leur autorité parentale à un tiers, membre de la famille, proche digne de confiance, établissement agréé pour le recueil des enfants ou service départemental de l’aide sociale à l’enfance.

   

En cas de désintérêt manifeste ou si les parents sont dans l’impossibilité d’exercer tout ou partie de l’autorité parentale, le particulier, l’établissement ou le service départemental de l’aide sociale à l’enfance qui a recueilli l’enfant ou un membre de la famille peut également saisir le juge aux fins de se faire déléguer totalement ou partiellement l’exercice de l’autorité parentale.

Au deuxième alinéa de l’article 377-2 du même code, tel qu’il résulte de l’article 13 de la présente loi, après le mot : « manifeste », sont insérés les mots : « ou d’accomplissement d’actes importants répétés en application du deuxième alinéa de l’article 375-7 ».

les mots : « ou si les parents s’abstiennent ou refusent, de façon répétée, d’effectuer des actes importants en application du deuxième alinéa de l’article 375-7 ».

amendement CL61

Dans tous les cas visés au présent article, les deux parents doivent être appelés à l’instance. Lorsque l’enfant concerné fait l’objet d’une mesure d’assistance éducative, la délégation ne peut intervenir qu’après avis du juge des enfants.

   
 

Chapitre III

Chapitre III

 

Dispositions relatives à la médiation familiale

Dispositions relatives à la médiation familiale

 

Article 16

Article 16

 

I. – Après la section 2 du chapitre Ier du titre II de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative, il est inséré une section 2 bis ainsi rédigée :

I. – (Alinéa sans modification)

 

« Section 2 bis

(Alinéa sans modification)

 

« La médiation familiale

(Alinéa sans modification)

 

« Art. 22-4. – Les différends entre époux ou entre parents peuvent faire l’objet d’une mesure de médiation familiale en vue de leur résolution amiable.

« Art. 22-4. – (Sans modification)

 

« Art. 22-5. – La médiation familiale, qui a pour finalité d’apaiser le conflit et de préserver les relations au sein de la famille, est un processus structuré et confidentiel de résolution amiable des différends familiaux. Avec l’aide du médiateur familial, tiers qualifié, impartial et indépendant, les personnes tentent de parvenir à une solution mutuellement acceptable, qui tient compte de l’intérêt de l’une et de l’autre et de celui de leurs enfants éventuels et qui peut prendre la forme d’accords susceptibles d’être homologués par le juge.

« Art. 22-5. – 

… l’intérêt de chacune et de celui …

amendement CL39

 

« Art. 22-6. – Les dispositions générales figurant à la section 1 et les règles propres à la médiation judiciaire figurant à la section 2 du présent chapitre sont applicables à la médiation familiale. »

« Art. 22-6. – Les sections 1 et 2 du présent …

amendement CL40

Art. 75. – Le jour désigné par les parties, après le délai de publication, l’officier de l’état civil, à la mairie, en présence d’au moins deux témoins, ou de quatre au plus, parents ou non des parties, fera lecture aux futurs époux des articles 212 et 213, du premier alinéa des articles 214 et 215, et de l’article 371-1 du présent code.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

II. – Le premier alinéa de l’article 75 du code civil est complété par les mots : « ainsi que de l’article 22-4 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative ».

II. – (Sans modification)

Code civil

Article 17

Article 17

Art. 373-2-10. – En cas de désaccord, le juge s’efforce de concilier les parties.

Les deuxième et troisième alinéas de l’article 373-2-10 du même code sont remplacés par les quatre alinéas suivants :

(Alinéa sans modification)

A l’effet de faciliter la recherche par les parents d’un exercice consensuel de l’autorité parentale, le juge peut leur proposer une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder.

« À l’effet de faciliter la recherche par les parents d’un exercice consensuel de l’autorité parentale, le juge peut :

(Alinéa sans modification)

Il peut leur enjoindre de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l’objet et le déroulement de cette mesure.

« 1° Leur proposer une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder ;

« 1° Leur proposer une mesure de médiation familiale et, après …

amendement CL38

 

« 2° Leur enjoindre de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l’objet et le déroulement de cette mesure ;

« 2° (Sans modification)

 

« 3° Leur enjoindre de prendre part à des séances de médiation familiale. »

« 3° Leur enjoindre de prendre part à une ou deux séances de médiation familiale, sauf si des violences ont été commises par l’un des parents sur la personne de l’autre parent ou sur la personne de l’enfant. »

amendements CL59 et CL36

 

Article 18

Article 18

Art. 373-2-13. – Les dispositions contenues dans la convention homologuée ainsi que les décisions relatives à l’exercice de l’autorité parentale peuvent être modifiées ou complétées à tout moment par le juge, à la demande des ou d’un parent ou du ministère public, qui peut lui-même être saisi par un tiers, parent ou non

L’article 373-2-13 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

(Alinéa sans modification)

 

« À l’effet de faciliter la recherche par les parents d’un accord sur les modifications à apporter à la convention homologuée ou aux décisions relatives à l’exercice de l’autorité parentale, le juge peut leur enjoindre de prendre part à des séances de médiation familiale. »

… part à une ou deux séances de médiation …

amendement CL60

 

Chapitre IV

Chapitre IV

 

Dispositions relatives à la prise en compte de la parole de l’enfant

Dispositions relatives à la prise en compte de la parole de l’enfant

 

Article 19

Article 19

 

Le premier alinéa de l’article 388-1 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée :

L’article 388-1 du code civil est ainsi modifié :

   

I. – Le premier alinéa est ainsi modifié :

   

1) Les mots : « capable de discernement » sont supprimés ;

   

2) L’alinéa est complété par la phrase suivante :

Art. 388-1. – Dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet.

« Le mineur est entendu d’une manière adaptée à son degré de maturité. »

« Il doit être entendu selon des modalités adaptées à son degré de maturité. »

   

II. – Le deuxième alinéa est remplacé par les trois alinéas suivants :

Cette audition est de droit lorsque le mineur en fait la demande. Lorsque le mineur refuse d’être entendu, le juge apprécie le bien-fondé de ce refus. Il peut être entendu seul, avec un avocat ou une personne de son choix. Si ce choix n’apparaît pas conforme à l’intérêt du mineur, le juge peut procéder à la désignation d’une autre personne.

 

« Cette audition est de droit lorsque le mineur en fait la demande et ne peut, par exception, être écartée que si son intérêt le commande et par une décision spécialement motivée.

   

« Lorsque le mineur refuse d’être entendu, le juge apprécie le bien-fondé de ce refus.

   

« Il peut être entendu seul ou avec un avocat ou une personne de son choix. Si ce choix n’apparaît pas conforme à l’intérêt du mineur, le juge peut procéder à la désignation d’une autre personne. »

amendement CL37

L’audition du mineur ne lui confère pas la qualité de partie à la procédure.

   

Le juge s’assure que le mineur a été informé de son droit à être entendu et à être assisté par un avocat.

   
   

Article 19 bis (nouveau)

Art. 413-2. – Le mineur, même non marié, pourra être émancipé lorsqu’il aura atteint l’âge de seize ans révolus.

   

Après audition du mineur, cette émancipation sera prononcée, s’il y a de justes motifs, par le juge des tutelles, à la demande des père et mère ou de l’un d’eux.

 

I. – Apès le mot : « mère », la fin du deuxième alinéa de l’article 413-2 du même code est ainsi rédigée : « , de l’un d’eux ou à la demande du mineur lui-même. »

Lorsque la demande sera présentée par un seul des parents, le juge décidera, après avoir entendu l’autre, à moins que ce dernier soit dans l’impossibilité de manifester sa volonté.

   

Art. 413-3. – Le mineur resté sans père ni mère pourra de la même manière être émancipé à la demande du conseil de famille.

 

II. – L’article 413-3 du même code est complété par les mots : « ou du mineur lui-même ».

amendement CL33

 

Chapitre V

Chapitre V

 

Dispositions finales

Dispositions finales

 

Article 20

Article 20

 

I. – Les charges pour l’État sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Supprimé

amendement CL35

 

II. – Les charges pour les collectivités territoriales sont compensées à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

 
 

III. – Les charges pour les organismes de sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

 

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

Code civil 148

Art.  373-2 et 373-2-11

Code pénal 148

Art. 131-13, 227-5 et 227-7

Code de procédure pénale 149

Art. 529 à 529-2

Code civil

Art. 373-2. – La séparation des parents est sans incidence sur les règles de dévolution de l’exercice de l’autorité parentale.

Chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l’enfant et respecter les liens de celui-ci avec l’autre parent.

Tout changement de résidence de l’un des parents, dès lors qu’il modifie les modalités d’exercice de l’autorité parentale, doit faire l’objet d’une information préalable et en temps utile de l’autre parent. En cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales qui statue selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant. Le juge répartit les frais de déplacement et ajuste en conséquence le montant de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant.

Art.  373-2-11. – Lorsqu’il se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge prend notamment en considération :

1° La pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu’ils avaient pu antérieurement conclure ;

2° Les sentiments exprimés par l’enfant mineur dans les conditions prévues à l’article 388-1 ;

3° L’aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre ;

4° Le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l’âge de l’enfant ;

5° Les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l’article 373-2-12 ;

6° Les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre.

Code pénal

Art. 131-13. –   Constituent des contraventions les infractions que la loi punit d’une amende n’excédant pas 3 000 euros.

Le montant de l’amende est le suivant :

1° 38 euros au plus pour les contraventions de la 1re classe ;

2° 150 euros au plus pour les contraventions de la 2e classe ;

3° 450 euros au plus pour les contraventions de la 3e classe ;

4° 750 euros au plus pour les contraventions de la 4e classe ;

5° 1 500 euros au plus pour les contraventions de la 5e classe, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit, hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit.

Art. 227-5. – Le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Art. 227-7. – Le fait, par tout ascendant, de soustraire un enfant mineur des mains de ceux qui exercent l’autorité parentale ou auxquels il a été confié ou chez qui il a sa résidence habituelle, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Code de procédure pénale

Art. 529. – Pour les contraventions dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État l’action publique est éteinte par le paiement d’une amende forfaitaire qui est exclusive de l’application des règles de la récidive.

Toutefois, la procédure de l’amende forfaitaire n’est pas applicable si plusieurs infractions, dont l’une au moins ne peut donner lieu à une amende forfaitaire, ont été constatées simultanément ou lorsque la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit.

Art. 529-1. – Le montant de l’amende forfaitaire peut être acquitté soit entre les mains de l’agent verbalisateur au moment de la constatation de l’infraction, soit auprès du service indiqué dans l’avis de contravention dans les quarante-cinq jours qui suivent la constatation de l’infraction ou, si cet avis est ultérieurement envoyé à l’intéressé, dans les quarante-cinq jours qui suivent cet envoi.

Art. 529-2. – Dans le délai prévu par l’article précédent, le contrevenant doit s’acquitter du montant de l’amende forfaitaire, à moins qu’il ne formule dans le même délai une requête tendant à son exonération auprès du service indiqué dans l’avis de contravention. Dans les cas prévus par l’article 529-10, cette requête doit être accompagnée de l’un des documents exigés par cet article. Cette requête est transmise au ministère public.

À défaut de paiement ou d’une requête présentée dans le délai de quarante-cinq jours, l’amende forfaitaire est majorée de plein droit et recouvrée au profit du Trésor public en vertu d’un titre rendu exécutoire par le ministère public.

PERSONNES ENTENDUES PAR LA RAPPORTEURE

Administrations et ministères

• Caisse nationale des allocations familiales (CNAF)

—  M. Jean-Louis Deroussen, président du conseil d’administration

—  M. Frédéric Marinacce, directeur chargé des politiques familiales et sociales

—  Mme Patricia Chantin, responsable des relations avec le Parlement

• Ministère des Droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports

—  M. Jérôme Teillard, directeur de cabinet adjoint

—  M. Gilles Bon-Maury, conseiller

• Ministère de l’Économie et des finances

Direction de la législation fiscale

—  Mme Véronique Bied-Charreton, directrice

—  M. Aulne Abeille, chef du bureau en charge de la fiscalité du patrimoine

—  M. Olivier Trebosc, inspecteur principal, bureau C1.

• Ministère de l’Éducation nationale

—  M. Éric Tournier, conseiller technique au cabinet en charge du premier degré et des relations avec les directeurs académiques des services de l’éducation nationale (DASEN)

—  M. Guillaume Thobaty, chef du bureau des consultations et du contentieux relatifs aux établissements et à la vie scolaire à la direction des Affaires juridiques

—  Mme Anne Lavagne, chef du bureau du fonctionnement des écoles et des établissements, de la vie scolaire, des relations avec les parents d’élèves et de la réglementation à la direction générale de l’enseignement scolaire

• Ministère de la Justice

—  Mme Stéphanie Kretowicz, conseillère droit de la famille, aide aux victimes et droit de l’environnement

—  M. Elie Patrigeon, attaché parlementaire

Représentants des professions judiciaires et des médiateurs familiaux

• Syndicat de la magistrature

—  M. Xavier Gadrat, secrétaire national

—  M. Éric Bocciarelli, secrétaire général

• Union syndicale des magistrats (USM)

—  Mme Marie-Jan Ody, secrétaire nationale

—  Mme Véronique Léger, secrétaire nationale

• Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille

—  Mme Evelyne Monpierre, vice-présidente

—  Mme Christina Rinaldis, vice-présidente

• Conseil national des Barreaux (CNB) (141)

—  Mme Paule Aboudaram, vice-présidente, ancien bâtonnier d’Aix en Provence,

—  Mme Céline Cadars-Beaufour, membre de la commission Textes, avocate au barreau de Paris,

—  M. Jacques-Edouard Briand, conseiller du service Relations avec les pouvoirs publics

• Collectif d’avocats praticiens du droit de la famille

—  Me Coralie Gaffinel, avocate

—  Me Charlotte Robbe, avocate

• Fédération nationale de la médiation et des espaces familiaux (FENAMEF)

—  M. Roger Leconte, président d’honneur, fondateur de la fédération

—  M. Jean-Pierre Berthon, premier vice-président

• Association pour la médiation familiale (APMF)

—  Mme Audrey Ringot, présidente

—  Mme Nicole Descamps, vice-présidente

Associations familiales

• Union nationale des associations familiales (UNAF)

—  M. François Fondard, président

—  Mme Guillemette Leneveu, directrice générale

—  M. François Édouard, vice-président, président du département Droit de la famille et protection de l’enfance

• Association des Familles rurales (AFR)

—  Mme Nadia Ziane, responsable de pôle « représentation défense des familles et territoires »

• Conseil National des Associations Familiales Laïques (CNAFAL)

—  M. Jean-Marie Bonnemayre, président

—  Mme Marie Odile Printanier, vice-présidente

• Fédération nationale Familles de France (FF)

—  M. Thierry Vidor, directeur général

—  Mme Virginie Durin, administrateur national responsable du département Éducation

• Union des Familles Laïques (UFAL)

—  M. Michel Canet, président

Autres associations

• Centre national d’information sur les droits des femmes et de la famille (CNIDFF)

—  Mme Christine Passagne, conseillère technique

• Club des marâtres

—  Mme Marie Luce Iovane, fondatrice, membre du Collectif Recomposer

—  Mme Catherine Audibert, psychologue clinicienne et psychanalyste

• Collectif Abandon de famille - tolérance zéro

—  Mme Stéphanie Lamy, co-fondatrice du collectif

• Collectif « Les femmes et la résidence alternée »

—  Mme Stéphanie Hain, fondatrice

• Défense des Enfants International - France

—  Mme Sophie Graillat, présidente

—  M. Alain Cornec, administrateur

—  M. Maurice Daubannay, administrateur

• Fédération des mouvements de la condition paternelle (FMCP)

—  M. Stéphane Ditchev, secrétaire général

—  M. Benjamin Cotelle, secrétaire aux actions de représentation

—  M. Stéphane Ruffin, secrétaire délégué à l’accueil du public, et aux formations

• Fédération française des espaces de rencontre (FFER)

—  Mme Marie-Thérèse Lacroix, présidente

—  Mme Caroline-Françoise Kruse, vice-présidente

—  M. Benoit Bastard, membre du conseil d’administration

• Fédération nationale Solidarité femmes (FNSF)

—  Mme Françoise Brié, vice-président de la Fédération

—  Mme Clémentine Labatut, avocate, membre de la commission justice

• Observatoire des Libertés

—  M. Louis Maisonneuve, président

—  M. Bertrand Giraud, vice-président, président de l’association l’Enfant et son droit

• Osons les pères

—  M. Sébastien Ledoux, président

• SOS les mamans

—  Mme Carole Lapanouse, présidente

—  Mme Florence Bittan, avocate, conseil juridique

—  Mme Bouchra Elfrini

• SOS Papa

—  M. Jean Latizeau, président

—  M. Dominique Ruffié, membre du bureau exécutif

• SVP Papa

—  M.  Yann Vasseur, président

—  Mme Séverine Deguine, assistante juridique

Personnalités qualifiées et universitaires

• Mme Adeline Gouttenoire, directrice de l’Institut des mineurs, professeur à l’Université Montesquieu–Bordeaux IV et présidente de l’Observatoire Départemental de la protection de l’enfance

• Groupe de travail Filiation, origine et parentalité

—  Mme Irène Théry, sociologue, présidente du groupe de travail  

—  Mme Anne-Marie Leroyer, professeure, rapporteure du groupe de travail

La rapporteure a également reçu des contributions écrites :

– des Associations familiales protestantes ;

– de la Confédération nationale des associations familiales catholiques (CNAFC) ;

– du Défenseur des droits.

DÉPLACEMENT DE LA RAPPORTEURE

Vendredi 18 avril 2014

Déplacement au Pôle Prévention et Soutien à la Parentalité de Caen

Visite du service de médiation familiale et de recueil de la parole de l’enfant

Rencontre avec Mme Isabelle Bindel, directrice adjointe, et avec l’équipe du service

© Assemblée nationale

1 () A. Lapinte, « Un enfant sur dix vit dans une famille recomposée », Insee Première, n° 1470, octobre 2013.

2 () Rapport du groupe de travail « Médiation familiale et contrats de co-parentalité », 2014.

3 () Rapport du groupe de travail « De nouveaux droits pour les enfants », De nouveaux droits pour les enfants ? Oui… Dans l’intérêt même des adultes et de la démocratie, janvier 2014.

4 () Rapport du groupe de travail « Protection de l’enfance et adoption », 40 propositions pour adapter la protection de l’enfance et l’adoption aux réalités d’aujourd’hui, février 2014.

5 () Rapport du groupe de travail « Filiation, origines, parentalité », Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, 2014.

6 () Direction des affaires civiles et du sceau, direction générale de la cohésion sociale, Rapport sur les réflexions du groupe de travail sur la coparentalité, Comment assurer le respect de la coparentalité entre parents séparés, janvier 2014.

7 () Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l’enfant, entrée en vigueur le 2 septembre 1990.

8 () I. Théry, Couple, filiation et parenté aujourd’hui : le droit face aux mutations de la famille et de la vie privée, La Documentation française, 1998.

9 () F. Dekeuwer-Défossez, Rénover le droit de la famille : propositions pour un droit adapté aux réalités et aux aspirations de notre temps, La Documentation française, 1999.

10 () Cet article est ainsi rédigé : « Lorsqu’il se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge prend notamment en considération :

1° La pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu’ils avaient pu antérieurement conclure ;

2° Les sentiments exprimés par l’enfant mineur dans les conditions prévues à l’article 388-1 ;

3° L’aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre ;

4° Le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l’âge de l’enfant ;

5° Les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l’article 373-2-12 ;

6° Les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre. »

11 () CA Rouen, 17 décembre 2009, n° 08/04197.

12 () CA Montpellier, 30 mai 1988, Juris-Data n° 198811-583.

13 () TA Montpellier, 1er octobre 2009, n° 08/20124.

14 () Civ. 1ère, 2 mai 1984, n° 83-11071.

15 () F. Dekeuwer-Défossez, op. cit., 1999.

16 () D. Versini, L’enfant au cœur des nouvelles parentalités. Pour un statut des tiers qui partagent ou ont partagé la vie des enfants et ont des liens affectifs forts avec lui, La Documentation française, 2006.

17 () J. Léonetti, Intérêt de l’enfant, autorité parentale et droits des tiers, La Documentation française, 2009.

18 () I. Théry, Filiation, origines, parentalité. Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, 2014 (spéc. le chapitre 10).

19 () Ibid., p. 277.

20 () D. Versini, op. cit., p. 61 et 66.

21 () I. Théry, Filiation, origines, parentalité. Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, 2014, p. 288-293.

22 () Elles peuvent intervenir notamment en l’absence d’indication du nom de la mère dans l’acte de naissance, que la cause en soit accidentelle ou que cette absence résulte de la volonté de la mère de conserver l’anonymat lors de l’accouchement.

23 () Article 372 : « Les père et mère exercent en commun l’autorité parentale.

Toutefois, lorsque la filiation est établie à l’égard de l’un d’entre eux plus d’un an après la naissance d’un enfant dont la filiation est déjà établie à l’égard de l’autre, celui-ci reste seul investi de l’exercice de l’autorité parentale. Il en est de même lorsque la filiation est judiciairement déclarée à l’égard du second parent de l’enfant.

L’autorité parentale pourra néanmoins être exercée en commun en cas de déclaration conjointe des père et mère adressée au greffier en chef du tribunal de grande instance ou sur décision du juge aux affaires familiales. » 

24 () Article 373-2 : « La séparation des parents est sans incidence sur les règles de dévolution de l’exercice de l’autorité parentale.

Chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l’enfant et respecter les liens de celui-ci avec l’autre parent.

Tout changement de résidence de l’un des parents, dès lors qu’il modifie les modalités d’exercice de l’autorité parentale, doit faire l’objet d’une information préalable et en temps utile de l’autre parent. En cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales qui statue selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant. Le juge répartit les frais de déplacement et ajuste en conséquence le montant de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant. » 

25 () L’exclusion des registres de l’état civil de moins de cent ans de la libre consultation des archives publiques est de nature législative et figure à l’article L. 213-2 du code du patrimoine (qui a codifié l’ancien article 7 de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives).

26 () On pourrait renvoyer, par analogie, à la décision n° 64-30 L du 17 septembre 1964, où le Conseil constitutionnel a jugé que la règle suivant laquelle les décisions d’adoption concernant les personnes nées à l’étranger ou dont le lieu de naissance n’est pas connu doivent être portées sur un registre d’état civil dans un délai déterminé est relative à l’état des personnes et que, dès lors, en vertu de l'article 34 de la Constitution, elle est du domaine de la loi.

27 () Sur l’évolution de l’autorité parentale, v. Ph. Malaurie et H. Fulchiron, La famille, Defrénois, 4e éd., 2011, p. 599 et s.

28 () La loi de 1970 distinguait cependant deux situations : le modèle de la « famille légitime », où s’appliquaient l’égalité – sauf dans le domaine patrimonial – et la collégialité, et les situations « anormales », telles que le divorce et les naissances hors mariage. En cas de divorce, l’autorité parentale était exercée par le parent à qui le tribunal avait confié la garde de l’enfant. S’agissant des naissances hors mariage, l’article 374 du code civil confiait l’autorité parentale sur l’enfant naturel à la mère, si l’un et l’autre de ses parents l’avaient reconnu, sauf décision contraire du tribunal confiant cette autorité au père ou, comme pour un enfant légitime, aux deux parents.

29 () Il faut ajouter à ces lois d’autres textes ayant eu des incidences importantes sur l’exercice de l’autorité parentale, comme la loi n° 75-617 du 11 juillet 1975 portant réforme du divorce, la loin° 85-1372 du 23 décembre 1985 relative à l’égalité entre les époux dans les régimes matrimoniaux et des parents dans la gestion des biens des enfants mineurs et la loi n° 93-22 du 8 janvier 1993 modifiant le code civil relative à l’état civil, à la famille et aux droits de l’enfant et instituant le juge aux affaires familiales.

30 () I. Théry, Couple, filiation et parenté aujourd’hui : le droit face aux mutations de la famille et de la vie privée, La Documentation française, 1998.

31 () F. Dekeuwer-Défossez, Rénover le droit de la famille : propositions pour un droit adapté aux réalités et aux aspirations de notre temps, La Documentation française, 1999.

32 () Il s’agit d’un régime de responsabilité de plein droit du fait d’autrui depuis l’arrêt Bertrand de 1997 (Civ. 2e, 19 février 1997, n° 94-21.111). Elle ne peut plus être écartée, depuis cet arrêt, en établissant l’absence de faute dans la surveillance ou l’éducation de l’enfant.

33 () Avant la loi du 4 mars 2002, précitée, les causes de privation de l’exercice de l’autorité parentale étaient plus nombreuses et incluaient la condamnation pour abandon ou pour délaissement ainsi que la délégation de l’autorité parentale.

34 () V. par exemple : Civ. 1ère, 4 novembre 2010, n° 09-15165 ; CA Douai, 14 avril 2011, n° 10/07409 ; CA Lyon, 6 juin 2011, n° 09/07117.

35 () Civ. 1ère, 17 janvier 2006, n° 03-14421 ; CA Poitiers, 21 novembre 2000, n° 99/02692.

36 () Civ. 1ère, 14 avril 2010, n° 09.13686 ; Civ. 1ère, 11 février 2009, n° 08.11337 ; CA Douai, 3 mars 2011, n° 10/05861.

37 () CA Rennes, 15 mai 2000, n° 99/01575.

38 () Rapport sur les réflexions du groupe de travail sur la coparentalité, Comment assurer le respect de la coparentalité entre parents séparés, janvier 2014. Ce rapport peut être consulté à l’adresse Internet suivante : http://www.justice.gouv.fr/publication/rap-coparentalite-20140701.pdf

39 () Rapport précité, p. 8.

40 () Ce devoir d’information a déjà été affirmé à plusieurs reprises par la jurisprudence (CA Paris, 26 juin 2003, Jurisdata n° 2003-220851 ; CA Paris, 10 février 1998, Jurisdata n° 1998-014013 ; CA Paris, 1er mars 2001, Jurisdata n° 2001-137974 ; CA Aix-en-Provence, 5 février 2004, Jurisdata n° 2004-237261).

41 () Cet article est ainsi rédigé : « Lorsqu’il se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge prend notamment en considération :

1° La pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu’ils avaient pu antérieurement conclure ;

2° Les sentiments exprimés par l’enfant mineur dans les conditions prévues à l’article 388-1 ;

3° L’aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre ;

4° Le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l’âge de l’enfant ;

5° Les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l’article 373-2-12 ;

6° Les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre. »

42 () CE, 8 février 1999, n° 173126.

43 () TGI de Paris, 6 novembre 1973.

44 () CE, 8 février 1999 ; CE, 4 décembre 2002.

45 () CA Paris, 29 septembre 2000 ; CA Rennes, 4 avril 2005.

46 () TGI de Paris, 6 novembre 1973.

47 () Cass. Civ. 1ère, 3 mars 2009.

48 () CA Paris, 12 octobre 2004.

49 () CE, 26 juillet 2006.

50 () CA Versailles, 11 septembre 2003.

51 () Conseil constitutionnel, décision n° 2012-279 QPC du 05 octobre 2012, M. Jean-Claude P. [régime de circulation des gens du voyage].

52 () Rappelons que le respect de l’intérêt de l’enfant est lui aussi constitutionnellement protégé (décision n° 2013-669 DC du 17 mai 2013, Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe), de même que le droit de mener une vie familiale normale (qui inclut celui de maintenir des relations avec son enfant après la séparation des parents) garanti par le dixième alinéa du préambule de la Constitution de 1946.

53 () F. Dekeuwer-Défossez, Rénover le droit de la famille : propositions pour un droit adapté aux réalités et aux aspirations de notre temps, La Documentation française, 1999, p. 71.

54 () CAA Paris, 2 octobre 2007, n° 05PA04019.

55 () TA Lille, 11 mars 2009, n° 0805148.

56 () Voir la note d’information relative à l’autorité parentale du ministère de l’Éducation nationale du 21 septembre 2010.

57 () CA Rouen, 17 décembre 2009, n° 08/04197.

58 () CA Montpellier, 30 mai 1988, Juris-Data n° 198811-583.

59 () TA Montpellier, 1er octobre 2009, n° 08/20124.

60 () Voir ministère de l’Éducation nationale, note d’information relative à l’autorité parentale du 21 septembre 2010, p. 3.

61 () Rapport précité, p. 22.

62 () L’article 227-5 du code pénal prévoit que le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

63 () L’article 227-6 du code pénal prévoit le fait, pour une personne qui transfère son domicile en un autre lieu, alors que ses enfants résident habituellement chez elle, de ne pas notifier son changement de domicile, dans un délai d’un mois à compter de ce changement, à ceux qui peuvent exercer à l’égard des enfants un droit de visite ou d’hébergement en vertu d’un jugement ou d’une convention judiciairement homologuée, est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende.

64 () L’article 226-7 du même code prévoit que le fait, par tout ascendant, de soustraire un enfant mineur des mains de ceux qui exercent l’autorité parentale ou auxquels il a été confié ou chez qui il a sa résidence habituelle, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

65 () Voir, par exemple les amendes prévues par les articles 10 (obligation d’apporter son concours à la justice) 50, 53, 68, 101 et 156 (en cas de violation de leurs obligations par les officiers de l’état civil) ou 417 et 1417 (en matière de protection des majeurs) du code civil.

66 () Voir les articles 32-1 (abus du droit d’agir en justice), 559, 581 (exercice dilatoire ou abusif d’une voie de recours) et 628 (pourvoi en cassation abusif) du code de procédure civile.

67 () G. Cornu (dir.), Association Henri Capitant, Vocabulaire juridique, 8e éd., Presses universitaires de France, 2000.

68 () Décision n° 2010-85 QPC du 13 janvier 2011, Établissements Darty et Fils, cons. 3.

69 () Voir, par exemple, TGI Chartres, 22 juin 1992, infirmé par CA Versailles, 18 novembre 1993, JCP G, 1994.I.3771, n° 17, obs. H. Fulchiron. Le premier jugement, infirmé en appel, avait ordonné le partage entre les parents des frais supplémentaires occasionnés à la mère par le père qui négligeait de prendre l’enfant aux dates convenues.

70 () Civ. 1ère, 2 mai 1984, n° 83-11071.

71 () CA Lyon, 5 octobre 1993, JCP G 1994.II.22231 ; CA Paris, 10 février 1999, JCP G, II, 10170 ; CA Paris, 1er mars 2001, n° 1999/24908.

72 () Civ. 1ère, 25 avril 2007, n° 06-16886, Bull. civ. I, n° 156.

73 () Les enfants ouvrent ainsi droit à une majoration de :

a) 0,25 part pour chacun des deux premiers et 0,5 part à compter du troisième, lorsque par ailleurs le contribuable n’assume la charge exclusive ou principale d’aucun enfant ;

b) 0,25 part pour le premier et 0,5 part à compter du deuxième, lorsque par ailleurs le contribuable assume la charge exclusive ou principale d’un enfant ;

c) 0,5 part pour chacun des enfants, lorsque par ailleurs le contribuable assume la charge exclusive ou principale d’au moins deux enfants.

74 () Ministère de la Justice, direction des affaires civiles et du sceau, pôle évaluation de la justice civile, « La résidence des enfants de parents séparés. De la demande des parents à la décision du juge », novembre 2013.

75 () Médiation familiale et contrats de co-parentalité, 2014. Ce rapport peut être consulté à l’adresse Internet suivante : http://www.oned.gouv.fr/ressources/mediation-familiale-et-contrats-co-parentalite

76 () Le terme « définitivement », qui figure dans le droit en vigueur et que le 2° du présent article reprend, est employé par le code par opposition à l’expression « à titre provisoire ». Contrairement à certaines interprétations erronées, il ne signifie nullement que la décision fixant la résidence ne puisse être modifiée ou complétée à tout moment par le juge par la suite, comme le rappelle expressément l’article 373-2-13 du code civil.

77 () Ce dernier cas peut s’appliquer, par exemple, à un parent auquel un tiers ne remettrait pas l’enfant ou encore à la mère d’un enfant né hors mariage qui serait seule titulaire de l’exercice de l’autorité parentale, à laquelle le père refuserait de remettre l’enfant.

78 () Crim., 5 novembre 1997, n° 95-85244 (cas d’un parent qui fait dormir son enfant chez sa sœur la veille de l’exercice du droit de visite de l’autre parent).

79 () Crim., 18 décembre 2002, n° 02-83667 (cas d’un parent qui fait croire à l’autre parent que son enfant est malade).

80 () Crim., 29 avril 1976, JCP G 1976, II, 18505.

81 () CA Aix-en-Provence, 17 avril 2002, Jurisdata n° 2002-180312 (délit non caractérisé, l’ordonnance du juge aux affaires familiales accordant un droit de visite une fin de semaine sur deux sans préciser le rang de ces fins de semaine dans le mois).

82 () CA Dijon, 19 décembre 1984, RSC 1985, 812.

83 () Trib. Corr. d’Agen, 22 mai 1985, RSC 1985, 811.

84 () CA Bastia, 29 novembre 2006, JCP 2007, IV, 2065.

85 () Crim., 14 mars 1972, JCP G 1973, II, 17405 ; CA Toulouse, 8 septembre 2003, Jurisdata n° 2003-225476.

86 () Il s’agit de l’interdiction des droits civiques et de famille, de la suspension ou de l’annulation du permis de conduire pour 5 ans maximum, de l’interdiction pour 5 ans maximum de quitter le territoire, l’obligation d’accomplir un stage de responsabilité parentale et de l’interdiction à titre définitif ou pour dix ans au maximum d’exercer une activité impliquant un contact habituel avec des mineurs.

87 () Cette rédaction est par ailleurs plus conforme dans son esprit à la notion de réitération. Celle-ci – qui n’existe certes pas en matière contraventionnelle – suppose une première condamnation, puisqu’elle est constituée lorsqu’une « personne a déjà été condamnée définitivement pour un crime ou un délit et commet une nouvelle infraction qui ne répond pas aux conditions de la récidive légale » en application de l’article 132-16-7 du code pénal.

88 () Aux termes de cet article, ce délit d’habitude est constitué lorsque la personne concernée a fait l’objet, sur une période inférieure ou égale à douze mois, de plus de dix contraventions pour avoir voyagé sans titre de transport ou munie d'un titre de transport non valable ou non complété.

89 () Ces causes d’irresponsabilité sont le défaut de discernement résultant d’un trouble psychique ou neuro-psychique, la contrainte, l’erreur de droit, l’ordre ou l’autorisation de la loi ou du règlement et le commandement de l’autorité légitime, la légitime défense et l’état de nécessité.

90 () Cet article disposait que « les commissaires du Roi, chargés de tenir la main à l’exécution des jugements, poursuivront d’office cette exécution dans toutes les dispositions qui intéresseront l’ordre public ; et en ce qui concernera les particuliers, ils pourront, sur la demande qui leur en sera faite, soit enjoindre aux huissiers de prêter leur ministre, soit ordonner les ouvertures de porte, soit requérir mainforte lorsqu’elle sera nécessaire ».

91 () Ordonnance n° 2006-673 du 8 juin 2006 portant refonte du code de l’organisation judiciaire et modifiant le code de commerce, le code rural et le code de procédure pénale.

92 () Cette disposition a été créée par la loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010 relative à l’exécution des décisions de justice, aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires, qui a inséré à cette fin un article 12-1 dans la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution, dont les dispositions ont ensuite été reprises dans un nouvel article 34-1 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 créé par l’ordonnance n° 2011-1895 du 19 décembre 2011 relative à la partie législative du code des procédures civiles d’exécution.

93 () CE, 30 novembre 1923, Couitéas.

94 () A. Lapinte, « Un enfant sur dix vit dans une famille recomposée », Insee Première n° 1470, octobre 2013.

95 () F. Dekeuwer-Défossez, Rénover le droit de la famille : propositions pour un droit adapté aux réalités et aux aspirations de notre temps, La Documentation française, 1999.

96 () D. Versini, L’enfant au cœur des nouvelles parentalités. Pour un statut des tiers qui partagent ou ont partagé la vie des enfants et ont des liens affectifs forts avec lui, La Documentation française, 2006.

97 () J. Léonetti, Intérêt de l’enfant, autorité parentale et droits des tiers, La Documentation française, 2009.

98 () I. Théry, Filiation, origines, parentalité. Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, 2014 (spéc. le chapitre 10).

99 () D. Versini, L’enfant au cœur des nouvelles parentalités. Pour un statut des tiers qui partagent ou ont partagé la vie des enfants et ont des liens affectifs forts avec lui, précité, p. 61 et 66.

100 () I. Théry, Filiation, origines, parentalité. Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, 2014, p. 288-293.

101 () Rappelons que cet article prévoit que, « lorsqu’il se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge prend notamment en considération :

1° La pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu’ils avaient pu antérieurement conclure ;

2° Les sentiments exprimés par l’enfant mineur dans les conditions prévues à l’article 388-1 ;

3° L’aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre ;

4° Le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l’âge de l’enfant ;

5° Les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l’article 373-2-12 ;

6° Les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre. »

102 () Civ. 1ère, 18 décembre 1990, n° 89-14065.

103 () I. Théry, Filiation, origines, parentalité. Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, 2014, p. 300.

104 () Avant la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, la délégation constituait l’une des rares possibilités ouvertes aux couples de même sexe pour reconnaître des droits au parent social. La Cour de cassation a ainsi admis le recours à la délégation-partage au profit de la concubine de la mère de l’enfant (Civ. 1ère, 24 février 2006, n° 04.17090, Bull. civ. I, n° 101 ; Civ. 1ère, 16 avril 2008, n° 07-11273). La jurisprudence est cependant exigeante sur l’existence de circonstances particulières justifiant le recours à la délégation-partage (Civ. 1ère, 8 juillet 2010, n° 09.12623).

105 () CA Paris, 5 mars 1968.

106 () CA Lyon, 16 novembre 2004.

107 () CE, 7e sous-section, 29 février 2008, Kabbar.

108 () Cass. 1re Civ. 24 février 2006.

109 () CA Lyon, 7 mai 2002, Jurisdata n° 197869.

110 () CA Rennes, 29 mai 2000, n° 98/03537.

111 () Civ. 1ère, 5 avril 2005, Bull. civ. I, n° 162.

112 () Loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative.

113 () Dans sa rédaction issue de l’article 1er de l’ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011 portant transposition de la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale.

114 () Décret n° 96-652 du 22 juillet 1996 relatif à la conciliation et à la médiation judiciaires.

115 () Le Conseil national consultatif de la médiation familiale a été créé par un arrêté du 8 octobre 2001 (NOR: MESA0123531A). Institué auprès du garde des Sceaux, ministre de la Justice, et du ministre chargé de la famille, il est chargé de proposer aux ministres toutes mesures utiles pour favoriser l’organisation de la médiation familiale et promouvoir son développement.

116 () Décret n° 2003-1166 du 2 décembre 2003 portant création du diplôme d’État de médiateur familial.

117 () Arrêté du 12 février 2004 relatif au diplôme d’État de médiateur familial (NOR: SOCA0420506A).

118 () Arrêté du 19 mars 2012 relatif au diplôme d’État de médiateur familial (NOR: SCSA1123827A).

119 () Cette réunion d’information est gratuite.

120 () Rapport n° 404 (session ordinaire de 2013-2014) du 26 février 2014 de Mme Catherine Tasca et de M. Michel Mercier, au nom de la commission des Lois du Sénat sur la justice familiale, p. 50.

121 () Rapport du groupe de travail « Médiation familiale et contrats de coparentalité », présidé par M. Marc Juston, mis en place par Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille, p. 8.

122 () Rapport précité, p. 9.

123 () Cf. arrêté du 16 mai 2013 désignant les juridictions habilitées à expérimenter certaines modalités de mise en œuvre de l’injonction de rencontrer un médiateur familial (NOR: JUSB1312253A).

124 () Décret n° 2010-1395 du 12 novembre 2010 relatif à la médiation et à l’activité judiciaire en matière familiale.

125 () Rapport précité, p. 10.

126 () Cf. arrêté du 16 mai 2013 désignant les juridictions habilitées à expérimenter la tentative de médiation familiale préalable à toute demande de modification de décisions relatives aux modalités de l’exercice de l’autorité parentale, à la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant ainsi qu’aux dispositions contenues dans la convention homologuée (NOR: JUSB1312259A).

127 () Loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles.

128 () Rapport précité, p. 58.

129 () Rapport précité, p. 11.

130 () Cass. 1ère civ., 18 mai 2005, n° 02-20.163, Bulletin, 2005, I, n° 212, p. 180 ; Cass. 1ère civ., 18 mai 2005, n° 02-16.336, Bulletin, 2005, I, n° 211, p. 179, Semaine juridique, éd. G, 2005, I, n° 199, p. 2421, confirmés par Cass. 1ère civ., 14 juin 2005, n° 04-16.942, Bulletin, 2005, I, n° 245, p. 207.

131 () Le Comité sur les droits de l’enfant (CRC) est le corps d’experts indépendants qui contrôle l’application de la Convention internationale des droits de l’enfant des Nations unies par les gouvernements qu’ont ratifié la Convention

132 () Défenseur des droits, Rapport 2013 consacré aux droits de l’enfant, L’enfant et sa parole en justice, p.27.

133 () Loi n° 93-22 du 8 janvier 1993 modifiant le code civil relative à l’état civil, à la famille et aux droits de l’enfant et instituant le juge aux affaires familiales.

134 () Rapport précité, p. 7.

135 () Décret n° 2009-572 du 20 mai 2009 relatif à l’audition de l’enfant en justice.

136 () Une circulaire du ministère de la Justice du 3 juillet 2009 (CIV/10/09) apporte un certain nombre d’éclairages supplémentaires.

137 () Rapport précité, p. 7 (proposition n° 1).

138 () Rapport du Groupe de travail « De nouveaux droits pour les enfants », présidé par M. Jean-Pierre Rosenczveig, remis à Mme Dominique Bertinotti, ministre de la Famille, le 29 janvier 2014, p. 126 (proposition n° 1.75).

139 () Rapport précité, p. 126.

140 () Marc Juston, « La parole de l’enfant devant le juge aux affaires familiales : enfant-roi, enfant-proie », Gazette du Palais, n° 74 à 75, 15-16 mars 2013.

141 () Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.