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N
° 2119

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 juillet 2014

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE LOI, relatif à l’adaptation de la société au vieillissement (n° 1994)

PAR Mme Fanny DOMBRE COSTE

Députée

——

Voir les numéros : 1994, 2111, 2119 et 2155.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 7

I. UN PROJET DE LOI QUI SÉCURISE L’OFFRE DE LOGEMENT INTERMÉDIAIRE POUR PERSONNES ÂGÉES ET EN FAVORISE LE DÉVELOPPEMENT 8

A. LA REDÉFINITION DES LOGEMENTS-FOYERS EN RÉSIDENCES AUTONOMIE 8

1. La nécessité de moderniser les logements-foyers 8

2. Nouvelles missions et nouveau cadre juridique des logements-foyers 9

3. L’intégration des logements-foyers au RPLS 10

B. LA RÉSOLUTION DES DIFFICULTÉS RENCONTRÉES DANS LES RÉSIDENCES SERVICES 11

1. Le modèle économique de certaines résidences services n’est pas soutenable 11

2. Vers une gestion plus sûre des résidences services 12

3. Les difficultés liées à la suppression de la dérogation à la règle d’activité exclusive des services d’aide à la personne 13

C. LA PLANIFICATION DANS LE PLH D’UNE ADAPTATION ET D’UN RENOUVELLEMENT DE L’OFFRE 14

1. La nécessité de la prise en compte du vieillissement par les outils de programmation 14

2. La réponse apportée par le projet de loi via le PLH 14

II. LA DIVERSITÉ DE L’OFFRE DE LOGEMENTS, DONT CERTAINS MODÈLES SONT OUBLIÉS PAR LE PROJET DE LOI, DOIT TOUTEFOIS ENCORE ÊTRE RENFORCÉE 15

A. PERMETTRE AUX BAILLEURS SOCIAUX DE DÉVELOPPER DES « RÉSIDENCES SERVICES À COÛT SOCIAL » 15

1. Généraliser les bonnes pratiques des bailleurs sociaux 15

2. Lever les obstacles légaux à des projets de « domiciles accompagnés » 16

B. SÉCURISER LES PRATIQUES D’HÉBERGEMENT INTERGÉNÉRATIONNEL 17

1. Le logement intergénérationnel est confronté à un vide juridique 17

2. Un cadre juridique souple et sécurisant doit être donné à ces pratiques 18

TRAVAUX DE LA COMMISSION 19

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 19

II. EXAMEN DES ARTICLES 31

Chapitre II – Habitat collectif pour personnes âgées 31

Section 1 : Les résidences autonomie et les autres établissements d’hébergement pour personnes âgées 31

Article 11 (article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles) : Définition et missions des résidences autonomie 31

Article 12 (article L. 633-3 du code de la construction de de l’habitation) : Harmonisation des contrats de séjour conclus dans les résidences autonomie 33

Article 13 (article L. 342-1 du code de l’action sociale et des familles) : Évolution tarifaire des résidences autonomies conventionnées à l’aide personnalisée au logement (APL) 33

Article 14 (article L. 411-10 du code de la construction de de l’habitation) : Recensement des logements foyers possédés par les bailleurs sociaux 33

Section 2 : Les autres formes d’habitat avec services 34

Article 15 (articles 41-1 à 41-5 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) : Réforme du fonctionnement des résidences services ayant le statut de copropriété 34

Article additionnel après l’article 15 (article L. 442-13 [nouveau] du code de la construction et de l’habitation) : Développement de domiciles accompagnés dans le parc social 34

Article additionnel après l’article 15 (article L. 445-1 du code de la construction et de l’habitation) : Volet spécifique aux locataires âgés dans les conventions d’utilité sociale 37

Article additionnel après l’article 15 (article L. 365-4 du code de la construction et de l’habitation) : Agrément des associations de logement intergénérationnel 37

Article additionnel après l’article 15 : Rapport sur les difficultés juridiques du logement intergénérationnel 38

Après l’article 15 38

Chapitre III - Territoires, habitat et transports 39

Article 16 (article L. 302-1 du code de la construction et de l’habitation) : Programmation d’une offre de logements adaptée aux personnes âgées 39

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 40

INTRODUCTION

Le vieillissement de la population française, permis par l’augmentation de la durée de vie, est une chance pour notre société autant qu’il est un défi immense pour les générations à venir. D’ici à 2060, une personne sur trois sera âgée de 60 ans et plus. Le nombre des personnes âgées de plus de 90 ans va quasiment quadrupler, passant de 1,5 million aujourd’hui à 5,5 millions en 2060.

Ce changement démographique nécessite que l’ensemble des politiques publiques soient repensées et que notre rapport au vieillissement évolue. Le vieillissement ne doit plus être regardé uniquement en termes médicaux, mais également en termes de bien-être et d’inclusion sociale.

Il doit également être perçu comme une opportunité formidable de développement économique, d’innovation, de croissance et d’emplois à travers ce qu’on appelle la silver economy. Selon une enquête du Crédoc de 2010, les seniors assureront dès 2015 une majorité des dépenses sur les différents marchés : 64 % pour la santé, 60 % pour l’alimentation, 58 % pour l’équipement, 57 % pour les loisirs et 56 % pour les dépenses d’assurance. Des technologies les plus innovantes comme la robotique, la domotique ou les objets connectés, au logement en passant par la mobilité ou les loisirs, toutes les entreprises et tous les secteurs de l’économie française seront impactés. La France doit se positionner sur ces marchés très prometteurs. C’est le sens de la signature en décembre 2013 du contrat de filière Silver économie qui va structurer, autour de six axes, la feuille de route pour les années à venir.

C’est cette approche qu’a retenue le présent projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement et votre rapporteure s’en félicite.

Votre rapporteure salue également la volonté affichée par le projet de loi de décloisonner les politiques publiques, condition indispensable pour permettre d’apporter une réponse personnalisée à la question du vieillissement. Maintien à domicile ou hébergement collectif, accompagnement social et médical, vie associative, la réponse doit être globale et c’est par cette seule entrée que nous pourrons aussi répondre à la question sociale, à l’exclusion et à l’isolement.

À ce titre, le logement apparaît comme un outil central. Si le logement est adapté aux personnes âgées, il peut être un levier majeur des politiques d’autonomie et du mieux vieillir. Il est également un élément clé de la silver economy dans la mesure où celle-ci ambitionne de créer une économie de la prévention et de services autour du domicile. C’est pourquoi, le présent projet de loi consacre six articles à ces problématiques. La commission des affaires économiques s’est donc, au regard de ses compétences en matière de logement et d’urbanisme, saisie pour avis des articles 11 à 16.

Les besoins, de même que les préférences sociales en la matière, sont connus. 90 % des Français préfèrent adapter leur domicile qu’à avoir à le quitter si leur état de santé se dégrade (sondage Opinionway pour l’Observatoire de l’intérêt général, 2012). Or aujourd’hui, 6 % seulement des logements sont adaptés à la vie quotidienne de personnes en perte d’autonomie. L’offre intermédiaire entre le domicile traditionnel et la maison de retraite médicalisée est insuffisante alors que la demande est croissante. Outre l’adaptation des logements, il est donc nécessaire de développer une offre la plus diversifiée possible de logements pour répondre aux attentes et aux besoins des personnes âgées, en fonction de leur degré d’autonomie.

Votre rapporteure se félicite que le présent projet de loi apporte des avancées en la matière. Il sécurise le cadre juridique des logements-foyers et des résidences services, qui sont aujourd’hui les deux principales offres de logement intermédiaire pour les personnes âgées. Il donne ainsi les outils et le cadre pour que cette offre se développe dans les années à venir.

Votre rapporteure considère toutefois que la diversité de l’offre de logements, dont certains modèles sont oubliés par le présent projet de loi, doit encore être renforcée. Elle proposera donc, sur ce point, de compléter les dispositions proposées.

I. UN PROJET DE LOI QUI SÉCURISE L’OFFRE DE LOGEMENT INTERMÉDIAIRE POUR PERSONNES ÂGÉES ET EN FAVORISE LE DÉVELOPPEMENT

Votre rapporteure salue les avancées de ce projet de loi en matière de sécurisation de l’offre de logement existante entre la maison de retraite médicalisée et le domicile traditionnel, complétée par l’inscription dans le programme local de l’habitat (PLH) d’un objectif de renouvellement et d’adaptation des logements.

A. LA REDÉFINITION DES LOGEMENTS-FOYERS EN RÉSIDENCES AUTONOMIE

1. La nécessité de moderniser les logements-foyers

Les logements-foyers accueillant des personnes âgées sont des établissements non médicalisés proposant la location de logements indépendants associés à des espaces communs et des services collectifs facultatifs (restauration, blanchisserie, activités de loisirs, ...).

Parmi les différentes formes d’habitat collectif intermédiaire, les logements-foyers constituent le modèle le plus ancien et le plus important quantitativement. Ils se sont développés majoritairement dans les années 1970-1980. En effet, selon une enquête menée par l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (UNCCAS) datant d’octobre 2012, près de la moitié des logements-foyers gérés par les CCAS/CIAS a été construite entre 1975 et 1983. Cela est la marque de l’intérêt qui leur était porté, avant la préférence marquée des politiques publiques pour la médicalisation des structures d’hébergement.

Alors que 2 900 logements-foyers étaient dénombrés dans les années 2000, il n’en reste plus que 2 200 en 2013 (soit 110 000 places), dont une partie n’est plus adaptée et ne peut être réhabilitée. La préoccupation grandissante pour la dépendance a mené plusieurs centaines de logements-foyers à se transformer en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) à l’occasion de la réforme de la tarification de 1999. Depuis la construction des logements-foyers, la typologie des résidents a, en outre, changé : ils sont désormais nettement plus âgés (82 ans en moyenne) et leurs attentes ont évolué. Par conséquent, un vaste programme de modernisation des logements-foyers est nécessaire, à la fois pour rénover les bâtiments et pour adapter les logements au vieillissement afin de maintenir l’autonomie des personnes le plus longtemps possible.

Votre rapporteure se réjouit donc de l’abondement exceptionnel pendant trois ans du plan d’aide à l’investissement de la CNSA afin d’aider les logements-foyers à entreprendre leurs travaux, comme le prévoit le rapport annexé au projet de loi. Le plan d’investissement contribuant à la rénovation du parc de logements foyers sera financé par la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA) à hauteur de 10 millions d’euros dès 2014, pour un montant total de 50 millions d’euros sur trois ans.

2. Nouvelles missions et nouveau cadre juridique des logements-foyers

Jusqu’à présent, les logements-foyers souffraient d’une double caractérisation peu lisible, puisqu’ils étaient définis à la fois à l’article L. 633-1 du code de la construction et de l’habitation et aux 6° et 7° de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles. Les dispositions relatives au contrat d’accueil dans ces établissements n’étaient pas harmonisées. Le projet de loi répond aux difficultés posées pour les gestionnaires par cette double législation en faisant prévaloir les dispositions du code de l’action sociale et des familles, simplifiant ainsi le travail des gestionnaires dans l’élaboration du contrat.

Par ailleurs, la nouvelle dénomination « résidences autonomie » pour les logements-foyers a une connotation plus attractive et souligne la mission de prévention de la perte d’autonomie que remplissent ces établissements. Cette mission est pleinement consacrée dans le projet de loi par les dispositions suivantes :

– l’instauration d’un socle minimal de prestations de prévention collective de la perte d’autonomie

– la simplification des règles limitant l’accueil des personnes les plus dépendantes dans les établissements

– la création du forfait autonomie

Votre rapporteure salue l’initiative du Gouvernement dans la redéfinition des missions et du cadre juridique des logements-foyers, mais s’interroge néanmoins sur l’utilisation du forfait autonomie.

La création du forfait autonomie, dont le financement prévu par la CASA est de 40 millions d’euros, vise à soutenir la mission de prévention de la perte d’autonomie dans les logements-foyers ne bénéficiant pas du forfait soins courants et à avoir un effet levier dans l’évolution du parc existant. Bien que les logements-foyers ne soient pas dédiés à l’accueil des mêmes types de populations dépendantes que les EHPAD, certains résidents en perte d’autonomie peuvent souhaiter demeurer dans ces logements, devenus leurs domiciles. Les prestations et le forfait autonomie contribueraient donc à pérenniser le choix de vie de ces personnes.

Cependant, votre rapporteure a entendu les réticences des acteurs des logements-foyers concernant le forfait autonomie et tenait à les évoquer. L’essentiel des réticences tient à l’impossibilité de le cumuler avec le forfait soins courants en vigueur, alors que ces deux forfaits poursuivent pourtant deux objectifs différents. Aujourd’hui, environ 300 logements-foyers bénéficient du forfait soins pour financer la rémunération de professionnels soignants ainsi que l’achat de médicaments et produits nécessaires aux soins.

Toutefois, estimant qu’il n’était pas du ressort de la commission des affaires économiques de se pencher sur ces questions, votre rapporteure a décidé de laisser le soin à la commission des affaires sociales de traiter de la création de ce forfait.

3. L’intégration des logements-foyers au RPLS

Le répertoire des logements locatifs sociaux (RPLS), créé le 1er janvier 2011, a pour objectif la description des caractéristiques du parc de logements locatifs des bailleurs sociaux (nombre de logements, taux d’occupation, niveau des loyers, …). Or, jusqu’à présent, il ne couvrait pas les logements-foyers destinés aux personnes âgées. Votre rapporteure est favorable à l’intégration des logements-foyers dans le RPLS, permise par l’article 14, puisqu’il s’agit d’un moyen d’améliorer la connaissance du parc locatif social et de contribuer à améliorer la visibilité de ces établissements.

Néanmoins, dans le cadre des auditions qu’elle a menées, votre rapporteure a perçu l’inquiétude sur la capacité des bailleurs sociaux à fournir les informations destinées au RPLS. Dans la rédaction actuelle du code de construction et de l’habitation, seuls les bailleurs peuvent transmettre des informations au RPLS. Or, la quasi-totalité des logements-foyers ne sont pas gérés par les bailleurs eux-mêmes. Près de 70 % du parc national des logements-foyers est géré par les centres communaux d’action sociale (CCAS) et 28 % par le secteur associatif non lucratif. Ce sont donc les gestionnaires, et non les bailleurs, qui sont majoritairement en possession des informations nécessaires au RPLS, notamment concernant les vacances, les redevances, etc.… Ainsi, votre rapporteure propose un amendement autorisant les gestionnaires à transmettre directement l’information à l’État, dans le cas des logements-foyers. Il s’agit d’une mesure de simplification.

Une deuxième difficulté soulevée lors des auditions est celle de l’intégration au RPLS des résidences étudiantes. Leur intégration ne correspond pas à l’objectif visé par le projet de loi et compliquerait considérablement la transmission d’informations, au regard de la très grande mobilité des étudiants. Votre rapporteure propose donc un amendement dans ce sens, afin que les résidences étudiantes restent en dehors de ce répertoire.

B. LA RÉSOLUTION DES DIFFICULTÉS RENCONTRÉES DANS LES RÉSIDENCES SERVICES

1. Le modèle économique de certaines résidences services n’est pas soutenable

Les résidences services à destination des personnes âgées, communément appelées « résidences seniors », sont des copropriétés proposant la location ou l’achat de logement, associé à des équipements communs (restaurant, espaces de vie commune divers…) et des prestations collectives haut de gamme. Elles s’adressent à des personnes âgées autonomes, valides ou semi-valides, désirant profiter d’un logement individuel et de la convivialité et de la sécurité offertes par les services et le personnel. Il existe actuellement environ 375 résidences services, représentant près de 32 000 logements.

Deux modèles de résidences services sont toutefois à distinguer :

– Les résidences « ancienne/première génération » (entre 250 et 300) : ce modèle est marqué par l’absence de distinction entre les différents services proposés, qu’ils soient individualisables ou non individualisables. Les services forment un tout et le syndic et le prestataire de services peuvent être identiques. On parle de « modèle intégré ». Tous les services sont payés à travers les charges de copropriété. Ce modèle date des années 1970-1990 mais ne s’est plus développé depuis.

– Les résidences « nouvelle génération » (environ 100) : le propriétaire (investisseur) confie à un exploitant professionnel la gestion de la résidence services, évitant ainsi que le syndic n’agisse en tant que gestionnaire des services. L’exploitant est chargé de trouver des occupants, qui seront locataires. Les services sont individualisés et les résidents paient uniquement ceux qu’ils utilisent effectivement. Les services sont à la carte.

De nombreux propriétaires ou leurs ayant-droit rencontrent aujourd’hui des difficultés pour s’acquitter des frais de leur appartement dans les résidences-services de première génération. Les services sont en effet facturés aux copropriétaires, en plus des charges classiques, même si l’appartement est vacant et les prestations non utilisées. Par conséquent, du fait de ces charges élevées et incompressibles, les propriétaires sont confrontés à l’impossibilité de vendre ou louer leur bien, ou même d’effectuer une donation. On estime ainsi qu’une centaine de copropriétés, sur les 375 résidences services existantes, sont fragilisées en raison des défauts de paiement de copropriétaires. Ces défauts de paiement fragilisent le modèle économique des résidences services, alors même qu’il devrait répondre à une demande croissante.

La diminution des charges en résidences services apparaît donc comme une nécessité et le modèle des résidences services en copropriété de première génération doit évoluer.

2. Vers une gestion plus sûre des résidences services

Si certaines résidences services ont certes connu de graves difficultés, elles restent néanmoins des structures intéressantes dont il faut permettre le développement. Elles sont une solution intermédiaire entre le domicile traditionnel et la maison de retraite. On estime ainsi qu’à l’horizon 2020, la France comptera 1 000 résidences services contre 375 aujourd’hui. Ce boom doit s’effectuer dans un cadre juridique sûr.

C’est ce que permet l’article 15 du projet de loi. Les futures résidences services devront ainsi se conformer au modèle des résidences de nouvelle génération proposant des services « à la carte » et des charges individualisées. L’article 15 créé également un conseil des résidents, permettant aux résidents locataires d’être informés et de faire connaître, avant l’assemblée générale des copropriétaires, leurs opinions sur les services proposés.

Les modifications apportées à la gestion des résidences services ont été saluées par les intervenants rencontrés par votre rapporteure. Les acteurs des résidences services s’estiment satisfaits des dispositions visant à la séparation des services individualisables et non individualisables afin de garantir une répartition plus équitable des charges entre les copropriétaires.

Votre rapporteure tient toutefois à souligner un point de vigilance : l’absence de mesures transitoires. En l’état actuel du projet de loi, une incertitude existe en effet sur l’obligation ou non, pour toutes les résidences de première génération existantes, de modifier leur règlement de copropriété. Une mission de l’IGAS sur le sujet est en cours et le Gouvernement a annoncé qu’une réponse serait apportée en septembre au moment du passage du texte en séance publique. Votre rapporteure considère en la matière qu’une certaine souplesse doit être permise afin que certaines résidences de première génération, satisfaites de leur modèle, puissent conserver leur fonctionnement actuel.

3. Les difficultés liées à la suppression de la dérogation à la règle d’activité exclusive des services d’aide à la personne

Dans le prolongement des modifications apportées à la gestion des résidences services, le projet de loi prévoit de retirer aux résidences services la possibilité de déroger au principe de l’activité exclusive des organismes prestataires de services d’aide à la personne.

Votre rapporteure partage les objectifs du projet de loi, à savoir éviter les conflits d’intérêts et les risques de clientèle captive. Néanmoins, elle souhaite attirer l’attention sur les difficultés liées à la suppression de cette dérogation.

Lors des auditions qu’elle a menées, votre rapporteure a été alertée sur les complications qu’engendrerait cette suppression. En effet, ces résidences fournissent des services à la personne en plus d’autres services (accueil, gardiennage,…). La loi de financement de sécurité sociale pour 2007 avait modifié les dispositions de la loi du 25 juillet 2005 relative au développement des services à la personne, afin d’ouvrir le bénéfice de l’agrément de services à la personne aux résidences services, par dérogation à la règle de la condition d’activité exclusive prévue à l’article L. 7232-1-2 du code du travail. Il permettait aux résidences services de bénéficier des mêmes avantages sociaux et fiscaux que les organismes se consacrant uniquement à des activités de services à la personne pour les prestations assimilables à des activités de services à la personne proposées à leurs résidents.

Dans l’organisation de certaines résidences services de nouvelle génération, l’exploitant, distinct du syndic, est également fournisseur de services. Par conséquent, la fin de la dérogation obligerait inutilement certaines résidences à créer deux structures différentes. Cette disposition mettrait en danger et complexifierait ce modèle de résidences services.

C’est pourquoi votre rapporteure a déposé un amendement visant à maintenir cette dérogation pour les résidences services. La souplesse entre les différents modèles doit être la règle, afin que ce type de résidences se développe le plus possible puisqu’elles constituent une offre adaptée aux personnes âgées en début de perte d’autonomie. Le respect des obligations de qualité et de formation pour la délivrance de l’agrément est suffisant.

C. LA PLANIFICATION DANS LE PLH D’UNE ADAPTATION ET D’UN RENOUVELLEMENT DE L’OFFRE

1. La nécessité de la prise en compte du vieillissement par les outils de programmation

Depuis 2005, l’article R. 302-1-2 du code de la construction et de l’habitation spécifie que le programme local de l’habitat (PLH), établi au niveau des intercommunalités, peut décrire « les principaux axes d’une politique d’adaptation de l’habitat en faveur des personnes âgées et handicapées ».

Néanmoins, la prise en compte de la problématique du vieillissement en matière d’urbanisme et d’habitat se développe de manière imparfaite. Les PLH établissent fréquemment des diagnostics des besoins des personnes âgées, sans intégrer suffisamment dans leurs opérations la préoccupation d’un habitat proche de commerces, de services médicalisés et de services à la personne. Surtout, les PLH ont tendance à ne traiter la question du vieillissement qu’à travers l’offre médico-sociale. Or, l’un des objectifs du projet de loi est de s’éloigner de cette bipolarisation de l’offre d’accueil destinée aux personnes âgées, entre la maison de retraite médicalisée et le domicile, en développant l’offre intermédiaire.

2. La réponse apportée par le projet de loi via le PLH

Votre rapporteure encourage vivement une réponse transversale et globale aux enjeux du vieillissement de la population, nécessitant une coordination des instruments de planification et des différents acteurs.

L’environnement urbain tout entier doit, en effet, être repensé et adapté afin de maintenir l’autonomie des personnes âgées : sécurisation de la voirie, accès aux transports publics, services de proximité, mobilier urbain, etc. L’insuffisance de l’adaptation de l’espace urbain expose la personne âgée au risque de confinement dans son logement et de rupture avec l’environnement. La mobilité se réduit au fil de l’âge, conduisant progressivement à une réduction de l’espace de vie, pouvant engendrer l’appauvrissement des liens sociaux. Surtout, l’absence de prise en compte du vieillissement dans les politiques urbaines peut, à terme, rendre impossible le maintien à domicile, nécessitant un déménagement ou un aménagement dans une institution d’hébergement. Ainsi, l’effort en matière d’urbanisme s’inscrit dans l’objectif de retardement du processus de perte d’autonomie et va de pair avec l’effort à fournir en matière de logement.

L’article 16 du projet de loi, en assignant aux PLH un nouvel objectif de développement de l’offre d’accueil et d’adaptation des logements existants, garantit que les futurs documents d’urbanisme devront répondre « aux besoins particuliers des personnes en situation de perte d’autonomie liée à l’âge ou au handicap ». Votre rapporteure est donc favorable à ce nouvel objectif assigné au PLH, qui est une avancée importante dans la prévention de la perte d’autonomie.

II. LA DIVERSITÉ DE L’OFFRE DE LOGEMENTS, DONT CERTAINS MODÈLES SONT OUBLIÉS PAR LE PROJET DE LOI, DOIT TOUTEFOIS ENCORE ÊTRE RENFORCÉE

Les résidences autonomies et les résidences services, dont le cadre juridique est amélioré par le projet de loi ne pourront pas, à elles toutes seules, répondre à tous les besoins en matière de logements adaptés pour les personnes âgées.

D’une part parce que le nombre de places en résidences autonomies est limité (110 000 places) et que la priorité est davantage à leur rénovation qu’à leur construction. D’autre part parce que le coût des résidences services demeure encore élevé (de 1 500 à 5 000 € de loyers et charges par mois), et que la grande majorité des personnes âgées aux revenus modestes n’y aura pas accès.

C’est pourquoi, votre rapporteure a le souci que les freins juridiques au développement d’autres types d’habitat, soient levés, afin que toutes les personnes âgées aient véritablement la possibilité d’exercer leur « libre choix », peu importe leur revenu, entre le domicile traditionnel, la maison de retraite et une solution de logement intermédiaire, adapté à leur degré d’autonomie. Votre rapporteure considère que le projet de loi doit être, sur ce point, complété.

A. PERMETTRE AUX BAILLEURS SOCIAUX DE DÉVELOPPER DES « RÉSIDENCES SERVICES À COÛT SOCIAL »

1. Généraliser les bonnes pratiques des bailleurs sociaux

35 % des locataires du parc social auront plus de 65 ans en 2035, contre 20 % aujourd’hui. Les bailleurs sociaux se sont déjà engagés depuis quelques années dans des réflexions sur l’adaptation de leur parc existant aux besoins liés à la perte d’autonomie.

27 entreprises sociales pour l’habitat (SA HLM) se sont ainsi regroupées, en 2005, au sein de l’association Delphis afin de créer un label Habitat seniors services (HSS). Ce label est délivré lorsque des adaptations techniques au logement ont été réalisées, mais aussi lorsqu’une palette de services aux résidents pour un maintien à domicile de qualité est mise en place.

Ces pratiques sont toutefois encore très inégales entre les bailleurs et les territoires. C’est pourquoi, votre rapporteure considère qu’une nouvelle étape doit être franchie. Une circulaire du ministère du logement du 12 avril 2010 précisait que les Conventions d’Utilité Sociale (CUS), qui lient l’État et les organismes HLM pour une durée de six ans, pouvaient, de manière facultative, inclure des « objectifs relatifs à l’adaptation des logements pour tenir compte du vieillissement de la population ». Votre rapporteure propose un amendement afin que, pour la prochaine génération de CUS, ces objectifs deviennent obligatoires et qu’un volet relatif à une gestion locative et de proximité adaptée aux personnes âgées soit inclus.

2. Lever les obstacles légaux à des projets de « domiciles accompagnés »

Dans certains territoires, des bailleurs sociaux vont plus loin. Ils développent des nouvelles résidences, spécialement conçues pour des personnes âgées, qui comprennent à la fois des logements adaptés d’un point de vue technique et des services de proximité non individualisables, fournis directement par le bailleur social ou par un tiers, une association le plus souvent. Ces services peuvent consister en un gardien réalisant régulièrement des visites de courtoisie, une aide aux petits bricolages et une orientation vers d’autres services à la personne. On peut citer, par exemple le projet des « octaves » à Lille, ou celui conduit par la Mutualité française dans l’Hérault.

Ces différents projets se heurtent toutefois à des obstacles légaux liés à l’encadrement de l’activité des organismes HLM par le code de la construction et de l’habitation :

– Aucune priorité aux personnes âgées n’est prévue dans l’attribution d’un logement locatif social. La loi ne fixe qu’une seule condition d’accès : le respect d’un plafond de ressources. Seul l’article R. 441-4 dispose que « les logements construits ou aménagés en vue de leur occupation par des personnes handicapées sont attribués à celles-ci ou, à défaut de candidat, en priorité à des personnes âgées dont l'état le justifie ».

– Les bailleurs sociaux ont également des problèmes pour financer ces services supplémentaires et spécifiques aux personnes âgées. Les niveaux de loyer, de même que les charges locatives facturées par les bailleurs, sont en effet strictement plafonnés par la loi. Le décret « charges », pris en application de l’article L. 442-3, énonce de manière limitative les prestations qui peuvent faire l’objet de charges locatives et les services spécifiques aux personnes âgées n’y entrent pas.

Votre rapporteure a donc décidé de soutenir l’amendement proposé par Mme Audrey Linkenheld en commission des affaires économiques. Celui-ci lève ces obstacles légaux en autorisant les organismes HLM à réserver, à des personnes âgées, l’attribution d’un logement locatif social spécialement conçu pour le logement de personnes en perte d’autonomie. L’attribution serait alors conditionnée à la signature d’une charte de souscription des services non individualisables liées à la chose louée.

En complément, votre rapporteure propose un sous-amendement à cet amendement afin que les bailleurs sociaux puissent facturer ces services non individualisables à travers les charges locatives, sur le même modèle que les résidences services.

Ces différentes mesures, bien encadrées, ont un seul objectif : permettre le développement de véritables « résidences services à coût social » afin que toutes les catégories de la population puissent avoir accès à une offre de logement intermédiaire entre le domicile traditionnel et la maison de retraite.

Parallèlement, cet assouplissement des règles relatives aux organismes HLM permettrait de faciliter le développement de projets d’habitat alternatif tel que la « maison des babayagas » à Montreuil. Ces projets d’habitat autogéré par des personnes âgées sont, le plus souvent, élaborés en partenariat avec des bailleurs sociaux, ce qui génère, vu les restrictions légales, des problèmes sur les modalités de financement des parties communes.

B. SÉCURISER LES PRATIQUES D’HÉBERGEMENT INTERGÉNÉRATIONNEL

1. Le logement intergénérationnel est confronté à un vide juridique

Une autre forme d’habitat s’est développée dans les années 2000 : le logement intergénérationnel sous la forme d’un échange de services entre une personne âgée et un étudiant.

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a regretté que cette nouvelle forme d’habitat ne soit pas évoquée. Votre rapporteure éprouve le même regret car il représente une solution idéale pour de nombreux retraités et étudiants français. Moins connu et surtout moins développé que les résidences étudiantes ou les cités universitaires, il vise à faire cohabiter un étudiant avec un sénior à son domicile. Le loyer pour l’étudiant est faible voire inexistant.

Cette forme de solidarité intergénérationnelle, qui permet à une personne âgée vivant seule de diminuer sa désocialisation et donc de retarder sa perte d’autonomie, doit être encouragée mais son développement est freiné par la faiblesse de son cadre juridique. En France, le logement intergénérationnel est porté uniquement par des associations, telle que le Pari Solidaire. En Espagne, où cette forme d’habitat est née dans les années 1990, les projets ont été portés par les fonds sociaux de la Caisse d’Epargne de Catalogne, en collaboration avec les municipalités et les universités. En Allemagne, le logement intergénérationnel s’est développé initialement grâce aux associations, mais les pouvoirs publics ont ensuite lancé des programmes de « maisons intergénérationnelles » avec des subventions fédérales.

En l’absence de toute disposition juridique, le développement de cette forme d’habitat demeure limité en France. Les associations mettant en relation une personne âgée et un étudiant se voient, en outre, menacées par certains services de l’État d’être requalifiée d’agences immobilières, devant par conséquent respecter toutes les règles de la loi Hoguet.

2. Un cadre juridique souple et sécurisant doit être donné à ces pratiques

Pour mieux sécuriser cette pratique, votre rapporteure propose donc deux amendements afin que ce sujet soit abordé dans le cadre de ce projet de loi.

Un amendement propose tout d’abord d’étendre le bénéfice de l’agrément des organismes d’intermédiation locative aux associations de logement intergénérationnel. L’obtention de cet agrément, dont bénéficie déjà le Pari Solidaire depuis 2011 (arrêté n° 2011-175 du 1er février 2011) mais pas les autres associations présentes sur d’autres territoires, leur permettrait de ne pas être assimilées, du point de vue juridique, aux activités des agences immobilières. L’obtention de cet agrément serait, en outre, soumis à un cahier des charges spécifiques clarifiant les obligations respectives des personnes âgées hébergeant et des étudiants hébergés.

Par ailleurs, dans un second amendement, votre rapporteure demande au Gouvernement que soit remis au Parlement un rapport plus global proposant des solutions à toutes les difficultés juridiques rencontrées par ces associations et notamment :

– L’adaptation de la convention d’occupation précaire (COP). Actuellement, les associations utilisent la convention d’occupation précaire avec participation, qui permet d’introduire une clause de rupture pour non-respect des obligations de solidarité. Néanmoins, elle n’est pas adaptée à la cohabitation sans participation financière.

– La pertinence de dérogations aux règles relatives à la taxe d’habitation et au versement des allocations sociales. Lorsqu’une personne âgée héberge un jeune, la présomption de concubinage lui fait, en effet, perdre une demi-part fiscale. L’hébergement d’un jeune travailleur pénalise ainsi la personne âgée qui était exonérée de taxe d’habitation, ce qui freine le développement de la cohabitation intergénérationnelle.

– La clarification, enfin, de la distinction entre les services rendus par le jeune dans le cadre de la cohabitation intergénérationnelle et ce qui pourrait être considéré comme du travail dissimulé. Dans la cohabitation intergénérationnelle, le jeune ne doit pas assumer le rôle d’une aide à domicile ou d’une assistance médicale. Néanmoins, il s’engage à respecter un certain nombre d’obligations : présence les soirs, « veille passive » (appel du médecin ou des secours en cas de nécessité), aide dans l’accomplissement de tâches, etc.… Dans ce cadre, votre rapporteure considère qu’une clarification précise des obligations du jeune est souhaitable afin que les risques de dérives soient réduits.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du 9 juillet 2014, la commission a examiné pour avis le projet de loi relatif au vieillissement.

M. le président François Brottes. Nous passons à l’examen d’un texte conséquent qui va concerner toute la silver economy. Préparé de longue date et très concret, il vise à redonner espérance et dignité à ceux qui vieillissent, mais pas toujours, hélas ! dans des conditions convenables.

Comme certains d’entre vous me l’ont demandé, j’ai souhaité que la Commission se saisisse pour avis des articles du projet de loi relatifs au logement, qui relèvent de sa compétence, en l’occurrence des articles 11 à 16.

Mme Fanny Dombre Coste, rapporteure. Deux jours après la sortie du rapport de la Fondation de France sur l'isolement, on mesure l'importance pour la cohésion sociale d'anticiper, d'un point de vue quantitatif mais aussi qualitatif, ce que l'on peut appeler une révolution de l'âge ou encore le papy-boom.

La France est engagée dans un processus de transition démographique inédit. L’augmentation de la durée de vie est une chance pour la société française, mais aussi un défi immense pour les générations à venir.

Les personnes âgées de 60 ans et plus, au nombre de 15 millions aujourd'hui, seront plus de 20 millions en 2030, et près de 24 millions en 2060, soit une personne sur trois. Parmi eux, le nombre des plus de 90 ans va quasiment quadrupler, passant de 1,5 million aujourd'hui à 5,5 millions en 2060.

Cette révolution de l'âge représente une formidable opportunité de développement économique : c'est le sens du lancement de la filière silver economy par Arnaud Montebourg et Michèle Delaunay en décembre 2013. On peut évoquer les objets connectés, la robotique, la domotique, autant de secteurs identifiés dans le cadre des trente-quatre plans pour une nouvelle France industrielle et qui représentent 300 000 emplois potentiels dans les années à venir. Mais cette révolution est aussi l'occasion d'adapter la ville, les transports, et bien sûr les logements aux personnes âgées. Au vu des chiffres cités, on mesure l'impact en termes d'activité et donc de croissance et d'emplois. Au Japon, par exemple, cette politique, anticipée il y a vingt ans, génère ente 0,3 et 0,5 point de croissance, contre 0,03 dans notre pays.

Au-delà de l'aspect économique, cette révolution de l'âge doit nous amener aussi à changer notre regard. Il s'agit de créer les conditions d'une société plus inclusive, qui anticipe la perte d'autonomie et qui adapte ses politiques publiques dans tous les champs de la société : mobilité, logement, accès aux soins, aménagement du territoire, vie associative, loisirs, cohésion sociale...

C'est tout l'intérêt de ce texte que de mettre en place un cadre pour une approche transversale des enjeux et des réponses à y apporter.

La commission des affaires économiques, au regard de ses compétences en matière de logement et d'urbanisme, s'est saisie pour avis des articles 11 à 16 du projet de loi, relatifs aux habitats collectifs pour personnes âgées et au programme local de l’habitat (PLH).

Avant d'aborder plus précisément ces points, je voudrais tout d'abord apporter une appréciation globale positive sur ce projet de loi.

Je salue la volonté affichée de décloisonnement des politiques publiques, condition indispensable pour apporter une réponse personnalisée à la question du vieillissement. Maintien à domicile ou hébergement collectif, accompagnement social et médical, vie associative, la réponse doit être globale. C’est par cette seule approche que nous pourrons répondre également à la question sociale et lutter contre l'exclusion et l'isolement.

Ce projet de loi d'orientation et de programmation repose sur trois piliers : l'anticipation de la perte d'autonomie, l'adaptation de la société au vieillissement, l'accompagnement de la perte d'autonomie.

Le titre premier du texte met en place une stratégie coordonnée entre acteurs locaux à travers la création d'une conférence des financeurs qui sera le lieu privilégié de programmation, de coordination et de financement des actions individuelles et collectives de prévention de la perte d'autonomie, y compris la lutte contre l'isolement à travers la formation et l'accompagnement des associations et des aidants dans le cadre du projet MONALISA.

Le titre II porte sur l'adaptation de la société au vieillissement. Il aborde plus particulièrement la question du logement, nous y reviendrons, mais également la mobilité et la vie associative, avec la création du volontariat civique senior.

Le titre III traite de l'accompagnement de la perte d'autonomie à travers la revalorisation de l'allocation personnalisée d’autonomie (APA), le renforcement de l'aide à domicile et l'allégement du reste à charge. Il s’intéresse également à la refondation des métiers de l'aide à domicile, la nécessaire qualification de ces métiers et leur formation, mais aussi au soutien aux aidants, avec la création très attendue du droit au répit, ainsi qu’à la refonte de la tarification des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

Le titre IV établit la gouvernance des politiques de l'autonomie à travers la création d'un Haut conseil de l'âge qui doit contribuer à l'élaboration de la politique globale de l'autonomie, le renforcement de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) qui assurera le financement de la prévention et l'affirmation du principe de coordination accrue entre les différents intervenants institutionnels sur les territoires.

Il importe de préciser que le projet de loi et le rapport annexé très complet, ont été co-construits avec l'ensemble des acteurs travaillant sur les questions du vieillissement.

J’en reviens à la partie du texte dont nous sommes saisis, les articles 11 à 16 qui concernent le logement.

La question de l'habitat est centrale pour les personnes âgées. De plus, il existe un lien étroit entre habitat et autonomie, car l'environnement matériel, quand il est inadapté, est facteur d'accélération du vieillissement.

Aujourd'hui, 90 % des Français préfèrent adapter leur logement plutôt que de le quitter. Seulement 20 % des plus de quatre-vingt-cinq ans seront concernés par une forte dépendance et auront recours à des établissements médicalisés.

L'objectif premier est de permettre le maintien à domicile le plus longtemps possible et, en conséquence, l'adaptation des logements privés. Cela concerne 75 % des seniors qui sont propriétaires de leurs logements, mais aussi les bailleurs sociaux qui devront adapter leur offre de logement.

Le Président de la République a fixé un objectif : l'État devra adapter 80 000 logements aux contraintes de l'âge et du handicap d'ici la fin du quinquennat.

Dans l'offre actuelle de logements destinés aux personnes âgées, les seniors n'ont le choix qu'entre trois types d'habitat : le logement traditionnel, souvent inadapté à la perte d'autonomie, les résidences médicalisées EHPAD, souvent onéreuses pour les résidents et les collectivités, et les résidences service dont les prix varient entre 1 500 et 5 000 euros par mois pour les plus haut de gamme.

Il y a là un enjeu de mixité sociale et donc de cohésion sociale. D'où l'intérêt de proposer une nouvelle offre destinée aux seniors, alliant prestation de services, préservation du lien social, mixité générationnelle et bâti de qualité.

La réponse à apporter ne peut en aucun cas être uniforme. La diversité de l'offre de logement est indispensable pour répondre à l'ensemble des besoins.

Outre l'objectif du maintien à domicile, le texte traite de la nécessité de développer une offre intermédiaire entre la maison de retraite médicalisée et le domicile.

L'article 11 refonde le statut juridique des logements-foyers pour personnes âgées, rebaptisés « résidences autonomie ». Il consacre leur vocation première de logement intermédiaire en limitant l'effectif de personnes âgées en perte d'autonomie, institue une mission de prévention et un socle minimum de prestations qui sera défini par décret et leur alloue pour le financer, le forfait autonomie.

L'article 12 harmonise les contrats de séjour conclus dans les résidences autonomie en mettant fin à la dualité existant entre le code de la construction et de l'habitation et celui de l'action sociale et des familles.

L'article 13 concerne l'évolution tarifaire des résidences autonomie conventionnées à l'aide personnalisée au logement et vise à lever une ambiguïté entre la part de l'hébergement et la part des prestations.

L'article 14 permet le recensement des logements-foyers et des centres d'hébergement et de réinsertion sociale possédés par les bailleurs sociaux dans le répertoire national des logements locatifs des bailleurs sociaux (RPLS).

L'article 15 réforme le fonctionnement des résidences services ayant le statut de copropriété, afin de garantir l'avenir de leur modèle économique et de mieux protéger leurs occupants.

Le modèle économique des résidences services de première génération ne peut être maintenu en l'État. Dans ces résidences qui mutualisent des prestations très complètes, dont les soins infirmiers et restauration, les charges sont très lourdes pour les propriétaires, que le logement soit occupé ou pas.

Le texte propose de distinguer les services non individualisables – accueil et service de garde 24 heures sur 24, animation – des services individualisables – restauration, soins infirmiers – afin que les charges soient réparties plus équitablement entre les copropriétaires. Pour éviter tout risque de conflit d'intérêts, le syndic ne pourra plus être prestataire des services individualisables ou non individualisables.

L'article 16 assigne un nouvel objectif au PLH qui devra programmer des objectifs de construction et de réhabilitation des logements et répondre aux besoins des personnes en situation de perte d'autonomie liées à l'âge ou au handicap.

Je compléterai mon propos en abordant deux points non traités par le texte, mais qui ont été soulignés à travers les différentes auditions que j'ai menées.

Entre les résidences autonomie et les résidences services, se développent aujourd'hui des projets d'habitat partagé ou regroupé avec le souci de la mixité intergénérationnelle et à coût social. Je pense à un projet porté par la Mutualité française à Montpellier, mais aussi au modèle plus connu des Béguinages ou encore des Babayagas. Ce modèle intéressant, même s'il reste une niche, doit être encouragé et juridiquement consolidé.

Le deuxième point concerne la pratique qui se développe d'intermédiation locative intergénérationnelle, portée par des associations comme le Pari Solidaire. Ce modèle, qui apporte à la fois une réponse à l'isolement et aux problèmes financiers pour nos anciens et nos jeunes, est amené à se développer, particulièrement dans les villes universitaires. Là encore, le cadre juridique est insuffisant et je déposerai des amendements pour le sécuriser.

Pour conclure, anticipation, adaptation et accompagnement assurent la cohérence de ce texte de la politique de l'âge. Cette politique s'appuiera sur la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA) dont le montant est estimé à 645 millions d’euros par an dont 375 millions supplémentaires seront consacrés à l’APA.

C'est un texte ambitieux qui se concrétisera par étapes, un changement de paradigme, une autre vision qui nous est proposée du vieillissement, une réponse au défi de la révolution de l'âge au caractère universel dont le principe fondateur est l'égalité de tous les citoyens face au risque de la perte d'autonomie.

En ce sens, ce projet de loi d'adaptation de la société au vieillissement comporte une dimension éthique et sociétale majeure qui fera date, je n'en doute pas.

M. Daniel Fasquelle. Ma première question porte sur les travaux au domicile des personnes âgées. Les accidents liés à des chutes à domicile font plus de morts que les accidents de la route ; pourtant, on n’en parle jamais. Alors que les travaux nécessaires pour adapter un logement peuvent être simples à réaliser – mais difficiles à accepter car on a le sentiment d’être en sécurité chez soi –, certains de nos concitoyens n’ont pas les moyens. Le crédit d’impôt prévu à cet effet est méconnu et réservé à ceux qui ont les moyens de les faire. Que prévoit le projet de loi pour aider ceux dont les ressources sont insuffisantes pour financer des travaux chez eux ?

J’avais déposé une proposition de loi, que je reprendrai peut-être sous forme d’amendements en séance, pour permettre aux enfants de financer les travaux chez leurs parents en bénéficiant du crédit d’impôt. Cette hypothèse a-t-elle été étudiée ?

Le maintien à domicile doit être la priorité.

Deuxième question, nous assistons à une multiplication des « résidences seniors » qui sont fondées sur un nouveau modèle, différent de celui des maisons de retraite, qui après avoir connu quelques ratés semble aujourd’hui rôdé. Que prévoit le projet de loi pour mieux encadrer sur le plan juridique et fiscal ces résidences ?

Je remarque enfin que le deuxième alinéa de l’article 14 propose de supprimer les mots : « établissement public de gestion immobilière du Nord-Pas-de-Calais ». Quelle est la portée de cette suppression ?

Mme Jeanine Dubié. Le projet de loi est une véritable révolution, je le dis sincèrement, dans la prise en compte des difficultés liées au vieillissement.

Les personnes de plus de soixante ans, au nombre de 15 millions aujourd’hui, seront 24 millions en 2060. Pour elles, l’enjeu est de vieillir le plus longtemps possible sans incapacité, de leur permettre grâce à un environnement favorable de rester autonome le plus longtemps possible.

Le titre du projet de loi est tout un symbole. On a trop tendance à traiter le vieillissement au travers de cas individuels de perte d’autonomie progressive ou subite obligeant à recourir à des tiers pour assumer les actes de la vie quotidienne. Le plus souvent, la personne âgée est obligée de s’adapter à un environnement défavorable qui contribue à accroître sa perte d’autonomie.

Le projet de loi adopte une approche inversée, qui a l’ambition d’embrasser l’ensemble des politiques publiques : c’est à la société dans son ensemble de s’adapter pour garantir, au fur et à mesure de l’avancée en âge, des conditions de vie, de logement et de déplacement qui permettent à une personne âgée, confrontée aux effets de la dépendance, de rester autonome le plus longtemps possible.

J’insiste, il ne faut pas confondre les notions de dépendance et de perte d’autonomie qui recouvrent des réalités différentes. La dépendance, c’est l’incapacité à faire seul certains actes de la vie quotidienne. Donner de l’autonomie à une personne, c’est lui donner les moyens de se débrouiller seule malgré son handicap ou sa dépendance.

Cette précision permet de comprendre l’importance de ce projet de loi qui prend en compte l’environnement dans lequel évolue la personne âgée.

Grâce au choix d’une loi d’orientation et de programmation, la politique de l’âge est inscrite dans un programme pluriannuel et transversal qui embrasse toutes les dimensions de la prise en compte de l’avancée en âge en confortant le choix d’un financement solidaire de l’accompagnement de la perte d’autonomie fondé sur une ressource dédiée, la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie. Toutes les politiques publiques doivent être mobilisées autour des enjeux de l’autonomie qui représentent un gisement d’emploi considérable.

Il reste quelques questions en suspens. Le projet de loi est muet sur le calendrier de mise en œuvre de la réforme. Cette question est loin d’être neutre : si la réforme de l’APA n’entre pas en vigueur rapidement, la CASA continuera pour l’essentiel à combler le déficit du fonds de solidarité vieillesse, ce qui a été fait dans les deux dernières lois de finances. Ces 645 millions d’euros doivent être réellement affectés au développement des actions en faveur de l’autonomie des personnes âgées.

Seconde interrogation, l’absence d’allusion au deuxième volet qui devait concerner l’accompagnement et la prise en charge des personnes âgées dans les EHPAD. Le reste à charge pour les familles qui résident dans ces établissements n’est pas évoqué alors qu’un groupe de travail avait été annoncé au mois de mars pour définir des mesures applicables dans la deuxième partie du quinquennat.

Les mesures proposées dans l’article 11 sont importantes car il fallait clarifier le statut des résidences services et revoir le fonctionnement des logements-foyers. Ces établissements étaient adossés à des centres d’action sociale et avaient pour objet d’accueillir des personnes peu dépendantes, offrant une solution intermédiaire entre le domicile et l’établissement. Aujourd’hui, du fait du vieillissement de la population, il n’y a plus grande différence entre les logements-foyers et les EHPAD. J’apprécie leur requalification que traduit leur nouvelle désignation sous le terme de « résidence autonomie ».

Mme Pascale Got. Je salue la discussion de ce projet de loi car la France a pris beaucoup de retard sur la politique de l’âge, terme qui a ma préférence, car le vieillissement n’en est qu’un aspect.

La France a une approche sociétale complexe du vieillissement dont elle a sous-estimé le potentiel économique.

Il est important que ce texte aborde non seulement la personne qui vieillit mais aussi ceux qui l’accompagnent, qu’on appelle par ce vilain mot, des aidants.

Ce texte porte un message sociétal fort. Il comporte des propositions qui vont dans le bon sens. Il met en avant la silver economy à laquelle je crois beaucoup. La France n’a pas à rougir de sa R&D dans ce domaine. Au Japon, les entreprises développent une technologie imaginée en France, notamment sur la robotique.

Nous devons aussi favoriser la formation et améliorer la qualification dans les associations qui font un gros travail. Dans certaines d’entre elles, on se demande qui aide qui parce qu’on emploie des personnes en difficulté pour aider d’autres personnes en difficulté.

Il ne faut pas le nier, ce secteur est porteur d’emplois sur nos territoires, notamment au travers du développement des services à la personne.

Il faut bien sûr valoriser le maintien à domicile mais attention à ne pas en faire une solution par défaut, lorsque les ressources ne permettent pas d’aller dans les établissements spécialisés. Dans cette situation, l’arrivée dans les maisons de retraite est retardée jusqu’à la fin de vie. Certaines pathologies nécessitent un entre-deux : des établissements d’accueil dans lesquels les personnes contraintes de quitter leur domicile continuent à être stimulées tout en ayant un accompagnement médical qui leur évite de décliner. Je suis très attachée à l’existence d’échelons intermédiaires entre le domicile et les maisons de retraite.

Je partage enfin la préoccupation de M. Fasquelle : de plus en plus de personnes âgées autour de 75-80 ans prennent conscience de la nécessité de réaliser des travaux pour adapter leur logement. Mais c’est un véritable casse-tête pour elles, car elles ne savent pas à qui s’adresser et ne disposent pas toujours des moyens pour les financer. Il est important de pouvoir organiser le maintien à domicile de personnes qui sont pleinement conscientes de leur vieillissement et veulent l’anticiper mais n’ont pas les moyens de le faire. Ce texte devra leur apporter des réponses.

M. Antoine Herth. Je salue le discours très engagé de la rapporteure auquel je souscris, à l’exception de sa conclusion. Dans l’attente des améliorations que nous pourrons lui apporter, je ne suis pas certain à ce stade que ce texte fera date.

Je suis en particulier déçu par les articles 17 et 18 dont la portée est très modeste.

M. le président François Brottes. Je précise que ces articles ne font pas partie du champ de la saisine de la commission.

M. Antoine Herth. Pardonnez-moi, mais ils figurent dans la dernière page du document qui nous a été distribué.

M. le président François Brottes. Parce que cette page comporte l’article 16, dont la commission est saisie.

M. Antoine Herth. Je comprends. Je ne manquerai pas de faire valoir mon point de vue devant la commission compétente.

M. Philippe Kemel. Le texte repose sur une approche sociétale tout à fait nouvelle. Il prend en compte l’évolution dans l’âge de la personne qui nécessite un environnement différent. Le texte sanctuarise également les financements.

Je regrette cependant que la gouvernance territoriale ne soit pas suffisamment abordée. Nous savons que le Conseil d’État a rendu un avis défavorable sur ce point. Mais, pour certains territoires dans lesquels l’habitat est de qualité très moyenne, le maintien à domicile est particulièrement délicat. Il nécessite des transformations des logements que le pouvoir d’achat des familles ne permet pas d’assumer alors que les mécanismes de financement restent à inventer.

En outre, les bailleurs sociaux se heurtent souvent à l’impossibilité, dans des régions comme la mienne, de construire de l’habitat social car les prix de revient des opérations sont largement supérieurs aux coûts de sortie. Nous butons sur un mur de mobilisation financière.

Autre élément absent du texte, l’accompagnement des aidants. Eux aussi ont besoin d’un habitat particulier qui leur offre dans la ville le soutien nécessaire, par exemple la proximité des commerces. Cela nécessite une politique globale de la ville et une réflexion sur la localisation des investissements.

L’approche sociétale et la régulation collective doivent être confortées pour conduire autour d’un noyau – ville ou communauté de commune – une politique globale mais la gouvernance territoriale doit absolument être renforcée.

Mme Marie-Hélène Fabre. Je me félicite de la discussion de ce texte. Je m’associe à deux questions posées par Pascale Got, la première sur la formation des personnels et la seconde sur les promesses d’emplois dans ce secteur.

En matière de logement, il faut citer les accueillants familiaux, ces particuliers qui accueillent des personnes âgées. Sauf erreur de ma part, ils ne figurent pas dans le projet de loi. Qu’en est-il ? Quel soutien peut leur être apporté ?

Mme Annick Le Loch. Je salue la création des résidences autonomie. Il n’y a pas si longtemps les logements-foyers étaient voués à disparaître car ils n’étaient pas adaptés à la dépendance. On les a incités à se transformer en EHPAD en raison de la médicalisation.

Ce texte propose un panel de solutions d’accueil qui permettra aux personnes âgées d’être accueillies dans de bonnes conditions. Je suis ravie de constater que les logements-foyers ont toute leur place dans cette offre de logement.

L’accueil familial mérite d’être soutenu. Le département du Finistère ne compte que 140 familles d’accueil. Il n’y a pas de politique volontariste pour encourager ce type d’accueil prometteur. La rapporteure peut-elle nous apporter des précisions sur ce mode d’accueil ?

M. le président François Brottes. Il est important de ne pas considérer et de ne pas laisser penser à nos concitoyens que seule la collectivité doit prendre en charge le vieillissement et la perte d’autonomie.

Pour avoir vécu plusieurs fois des scènes sur la prise en charge des personnes âgées, j’ai été atterré de voir à quel point la démission de la famille peut témoigner d’une ingratitude insupportable, y compris de la part de familles qui ont largement les moyens de ne pas être ingrates. Combien de fois ai-je été confronté à des familles me demandant de les envoyer au tribunal pour les obliger à se mettre d’accord ! De telles situations me choquent profondément. Chacun sait ce qu’il doit à ses parents. Mais, malheureusement, nous vivons dans une société d’ingratitude. Nous avons intérêt, nous, les élus de la République, à faire prendre conscience à nos concitoyens qu’ils ont des devoirs. Le devoir intergénérationnel de solidarité échappe de plus en plus dans notre civilisation alors que c’était certainement moins le cas il y a une cinquantaine d’années.

Il faut faire attention à ce que les textes n’accréditent pas l’idée qu’on peut s’exonérer de ce devoir du lien familial. Je le dis pour le rapport, mais aussi pour que nous ne glissions pas trop vers un assistanat, une prise en compte totale de ce que les familles devraient aussi assumer. Certaines ne le peuvent pas, j’en conviens. Mais la société ne peut pas tout assurer à la place des parents ou à la place des enfants, où qu’on soit et quel que soit son âge. Cela vaut aussi pour l’éducation des enfants.

M. Daniel Fasquelle. J’approuve pleinement ce que vous venez de dire, monsieur le président ; nous le vivons au quotidien. C’était un peu le sens de ma proposition de loi : inciter les enfants à aider leurs parents en étendant le bénéfice du crédit d’impôt pour faire jouer à plein la solidarité familiale, qui est inscrite dans le code civil et dont il faut faire en sorte qu’elle soit respectée.

Mme Pascale Got. N’allons pas pour autant idéaliser le maintien à domicile systématique.

M. Dominique Potier. J’ai organisé plusieurs réunions sur le sujet du vieillissement. La question de la responsabilité du lien familial est au cœur des débats. Il n’y a pas de modèle économique qui s’affranchisse d’une fraternité et d’une parentalité responsable. La société doit aider, mais nous devons d’abord assumer ces liens premiers qui sont ceux de la famille. Vous avez bien fait de le rappeler, monsieur le président.

Je souhaite interroger la rapporteure sur le modèle de financement des solutions d’habitat en amont de l’EHPAD. Pour avoir porté des projets de résidence adaptée qui visent à prévenir la perte de l’autonomie, j’ai constaté que nous nous heurtons à un problème de financement de la prévention, qui se pose pour toute la santé publique. On sait qu’un euro investi peut en faire économiser dix sur une décennie. Pourtant, on peine à trouver le financement sur le long terme qui permette d’adapter les logements et d’apporter le minimum d’aménités sociales pour conserver une autonomie sans recourir aux super structures que sont les EHPAD.

Mme la rapporteure. Ce débat nous touche tous. Il y a souvent des vécus qui s’expriment. C’est tout l’intérêt de ce sujet.

Monsieur Fasquelle et Mme Got, ce texte ne dit pas que le maintien à domicile est la seule et unique solution. Mais, dans la mesure où 90 % des Français veulent rester le plus longtemps possible chez eux, nous devons essayer d’accompagner ce maintien à domicile. C’est le premier objectif de ce texte que de répondre à cette demande de nos concitoyens sans perdre de vue qu’on peut aussi changer notre regard sur les résidences service et les EHPAD pour les considérer aussi comme des domiciles. Il faut regarder ce texte de manière globale et pas cloisonnée comme nous avons l’habitude de le faire, j’insiste sur ce point.

Vous avez tous deux évoqué la question de l’Agence nationale de l'habitat. Nous sommes tous confrontés à cette difficulté. Les personnes ont du mal à trouver des financements quand elles n’ignorent pas tout simplement leur existence. Faute d’informations sur les dispositifs existants, l’enveloppe de l’ANAH n’est pas toujours utilisée. Un plan d’action a été mis en place pour y remédier et pour diviser par deux les délais de traitement des demandes. Il a également pour but d’inciter les collectivités territoriales à accompagner la rénovation de l’habitat. Ces plans d’action seront coordonnés par la conférence des financeurs, au plus près des territoires.

Ce projet de loi construit un cadre : le Haut conseil de l’âge pilotera la stratégie en matière d’adaptation de la société au vieillissement. Ensuite, celle-ci sera déployée dans les territoires en fonction de spécificités de chacun d’eux. On sait que les besoins, les associations, les politiques des conseils généraux diffèrent d’un territoire à l’autre. Ce texte, c’est là son intérêt, ne cherche pas à appliquer un principe uniformément sur le territoire mais définit une vision qui est ensuite déclinée avec les acteurs locaux, au plus près de nos concitoyens.

Il n’est pas prévu de modifier le crédit d’impôt. La Caisse des dépôts réfléchit à une évolution du viager pour répondre à la demande de financement du maintien à domicile. J’ai pris connaissance de votre proposition de loi, monsieur Fasquelle. Je crois que la question qu’elle soulève est à l’étude.

L’article 15 définit un cadre juridique plus précis pour les résidences services que vous appelez résidences senior, notamment en séparant services individualisables et services non individualisables. Ces résidences se révèlent parfois un fardeau pour les copropriétaires qui ne parviennent pas à revendre leur bien car les charges sont trop importantes. Le texte institue des résidences deuxième génération dans lesquelles les services sont distingués pour alléger les charges. Une question reste posée : doit-on imposer aux résidences de première génération d’adopter le nouveau modèle ou les y inciter car certaines d’entre elles fonctionnent très bien ? Dans ma ville, certaines résidences m’ont écrit pour me demander de ne rien changer. L’idéal serait de laisser la possibilité à ces résidences selon leur modèle économique d’adopter ou pas le modèle proposé par le projet de loi.

Madame Dubié, vous avez exprimé votre intérêt pour ce texte et votre satisfaction. Vous avez raison de souligner l’approche inversée que ce texte essaie de promouvoir. Ce n’est pas à la personne âgée de s’adapter mais à la société, petit à petit, de s’adapter au vieillissement de la population. Les contraintes budgétaires nous obligent à procéder par étapes à cette adaptation. La ministre a pris l’engagement d’une application de la réforme à compter de mai 2015, une fois les décrets publiés.

Le coût de la construction du logement social relève de la gouvernance. La conférence des financeurs réunira l’ensemble des acteurs qui participent au financement : caisses de retraite, bailleurs sociaux, aménageurs, services sociaux et CNSA.

Les familles d’accueil ne figurent pas dans le texte mais elles sont mentionnées dans le rapport annexé que je vous invite à lire. Cette solution est une niche car elle concerne surtout certains territoires, principalement ruraux mais elle est appelée à se développer.

Mme Jeanine Dubié. Ce sujet est abordé dans le chapitre V du titre III.

Mme la rapporteure. Il n’entre donc pas dans le champ de mon rapport.

J’apprécie les propos du président Brottes et de M. Potier sur la nécessité de maintenir le lien familial au cœur des débats.

Monsieur Fasquelle, la suppression dans l’article 14 correspond à un toilettage juridique lié à la transformation de la SOGINORPA en organisme HLM dans le cadre de la loi du 18 janvier 2013.

Je suis désolée de ne pas pouvoir vous offrir l’élixir de jouvence pour clore cette discussion.

M. le président François Brottes. Nous sommes saisis de onze amendements sur ce texte. Un seul d’entre eux a été déclaré irrecevable, l’amendement CE3 de Mme Linkenheld.

II. EXAMEN DES ARTICLES

Chapitre II
Habitat collectif pour personnes âgées

Section 1
Les résidences autonomie et les autres établissements d’hébergement pour personnes âgées

Article 11
(article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles)

Définition et missions des résidences autonomie

La Commission est saisie de l’amendement CE5 de Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. Avant de présenter mon amendement, je me joins aux félicitations adressées au Gouvernement et à la rapporteure. J’ai pu vérifier sur le terrain combien ce texte était attendu et satisfaisant pour les acteurs.

Je le concède, cet amendement énonce ce qui peut apparaître comme une évidence.

Le préfet peut faire savoir aux intercommunalités que l’offre de construction ou de rénovation de logements prévue par le PLH n’est pas suffisante. Cet amendement propose que, de la même manière, le directeur de l’Agence régionale de santé se prononce sur l’adéquation aux besoins d’un territoire de l’offre d’établissements d’accueil de personnes âgées dépendantes et de dispositifs pour les aidants dans le schéma d’organisation sociale et médico-sociale.

Mme la rapporteure. Le schéma auquel vous faites référence structure l’offre sociale et médico-sociale, son objet est bien plus large que la dépendance. En outre, le 3° de l’article L. 312-5 du code de l’action sociale et des familles prévoit depuis 2010 que le schéma régional est établi par le directeur général de l’ARS. Je vous propose donc de retirer votre amendement.

Mme Jeanine Dubié. Pour que soient créées des places d’accueil pour les personnes âgées dépendantes, l’ARS doit débloquer les crédits nécessaires. L’offre d’accueil est donc tributaire de l’enveloppe de médicalisation dont dispose le directeur de l’ARS. En outre, le directeur de l’ARS donne déjà son avis sur le schéma.

M. le président François Brottes. Il me semble que l’amendement ne porte pas uniquement sur les places médicalisées.

Malgré tout, votre suggestion est à double tranchant. Il ne faut pas faire de ce sujet une patate chaude que l’État et les collectivités se renvoient. L’État cherche à éviter la médicalisation pour ne pas avoir à la financer tandis que le conseil général est favorable au développement de la médicalisation qui améliore l’accueil dans les établissements qu’ils gèrent. Le directeur de l’ARS ne peut pas être le juge de paix puisqu’il est à la fois juge et partie dans cette affaire.

Sur l’accueil non médicalisé, il est vrai que le directeur de l’ARS n’est pas consulté aujourd’hui. Il pourrait être tenté de donner des leçons aux collectivités afin qu’elles déploient davantage de places non médicalisées. Mais j’ai conscience d’être là dans le procès d’intention…

Mme Audrey Linkenheld. Toutes vos remarques sont fondées. Mais c’est la raison pour laquelle j’ai établi le parallèle avec le PLH. Le préfet se trouve dans cette même situation schizophrénique que le directeur de l’ARS. Il est à la fois celui qui délègue les aides à la pierre pour la construction de logement – qui sont parfois jugées insuffisantes par les collectivités territoriales –, et celui qui peut estimer que les projets de construction ne sont pas à la hauteur des besoins. Si le préfet peut être juge et partie, le directeur de l’ARS peut sans doute l’être aussi.

Mme la rapporteure. Nous aurons l’occasion de débattre de cet amendement à la commission des affaires sociales. Puisque le directeur de l’ARS est déjà consulté, votre amendement me semble dénué d’intérêt. C’est la raison pour laquelle je m’en tiens à l’avis que j’ai exprimé.

Mme Jeanine Dubié. Le projet régional de santé, établi par l’ARS, prévoit la répartition des équipements dont font partie les EHPAD.

Mme Audrey Linkenheld. Je veux bien retirer l’amendement et tenter de convaincre la commission des affaires sociales. Je persiste à ne pas comprendre pourquoi le directeur de l’ARS ne réussirait pas dans le domaine médico-social ce que le préfet fait en matière d’habitat.

M. le président François Brottes. Êtes-vous satisfaite de l’avis du préfet sur le PLH ?

Mme Audrey Linkenheld. L’avis du préfet sur l’adéquation des projets aux besoins est généralement pertinent.

M. le président François Brottes. Je m’inscris en faux sur la pertinence des avis sur les PLH. La pertinence des avis des préfets n’a rien d’une science exacte…

L’amendement est retiré.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 11 sans modification.

Article 12
(article L. 633-3 du code de la construction et de l’habitation)

Harmonisation des contrats de séjour conclus dans les résidences autonomie

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 sans modification.

Article 13
(article L. 342-1 du code de l’action sociale et des familles)

Évolution tarifaire des résidences autonomies conventionnées à l’aide personnalisée au logement (APL)

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 sans modification.

Article 14
(article L. 411-10 du code de la construction et de l’habitation)

Recensement des logements foyers possédés par les bailleurs sociaux

La Commission examine l’amendement CE11 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement permet aux gestionnaires des logements-foyers, en lieu et place des bailleurs sociaux, de transmettre les informations nécessaires à leur inscription dans le répertoire des logements locatifs sociaux : ce sont eux qui sont les mieux placés pour ce faire.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement CE12 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement précise que les résidences étudiantes n’ont pas vocation à être enregistrées dans le RPLS.

Mme Audrey Linkenheld. Je soutiens cet amendement. Pour avoir étudié la définition des logements locatifs sociaux de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation, je confirme que les résidences étudiantes en sont exclues. La rapporteure a mis le doigt sur une erreur du projet de loi susceptible de dénaturer cette définition.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 14 modifié.

Section 2
Les autres formes d’habitat avec services

Article 15
(articles 41-1 à 41-5 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis)

Réforme du fonctionnement des résidences services ayant le statut de copropriété

La Commission examine l’amendement CE10 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à maintenir pour l’exploitant de certaines résidences service la dérogation lui permettant de fournir des services aux résidents, à la différence des syndics pour lesquels cette dérogation est supprimée. Il donne aux gestionnaires une plus grande souplesse.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15 modifié.

Article additionnel après l’article 15
(article L. 442-13 [nouveau] du code de la construction et de l’habitation)

Développement de domiciles accompagnés dans le parc social

La Commission examine l’amendement CE4 de Mme Audrey Linkenheld qui fait l’objet des sous-amendements CE13 et CE14 de la rapporteure.

Mme Audrey Linkenheld. Nous avons évoqué les différentes possibilités de maintien à domicile pour des personnes encore autonomes mais exposées à un risque de perte d’autonomie. Mme la rapporteure a rappelé certaines expériences locales. Parmi les expérimentations, figure la possibilité donnée aux bailleurs sociaux de construire des logements fléchés vers des personnes âgées – ces logements anticipent la perte d’autonomie ; ils intègrent des prestations de service qui ne sont pas nécessairement liées à la perte d’autonomie mais au contraire participent à la prévention de la perte d’autonomie. Or une difficulté réglementaire empêche la répartition de la charge de ces services. Selon mon interprétation, ces services ne sont pas toujours considérés comme des charges récupérables, ce qui rend difficile leur répercussion par les organismes de logement social.

Cet amendement s’inspire de ce que le projet de loi prévoit pour les copropriétés. À l’instar de l’habitat participatif, il propose que les personnes intégrant ces logements spécialement conçus pour eux signent parallèlement au contrat de location une charte en vertu de laquelle elles s’engagent à adhérer à ces services.

Mme la rapporteure. Nous devons développer, à côté du maintien à domicile, des résidences services et des EHPAD, une offre de logement intermédiaire à coût social. Ce sujet n’est pas traité dans le projet de loi.

Je suis tout à fait favorable à cet amendement que je complète par deux sous-amendements pour clarifier la répartition des charges. Les résidences collectives qui assument et mutualisent des services pour les résidents, dont j’ai cité des exemples précédemment, sont en difficulté car leur modèle économique n’est pas viable avec ces charges supplémentaires.

Mme Audrey Linkenheld. Je suis tout à fait favorable aux sous-amendements de la rapporteure.

M. le président François Brottes. Je me fais l’avocat du diable. Avec cet amendement, si je ne signe pas la charte, je n’ai pas droit au logement. Si je ne suis pas content des services rendus, je ne peux pas revenir en arrière.

Comment se défait-on de son engagement si le service rendu n’est pas à la hauteur de l’attente ? Je trouve cela un peu raide pour le consommateur.

Mme Audrey Linkenheld. Comme dans n’importe quel logement locatif social, si vous n’êtes pas satisfaits, vous faites une demande de mutation.

M. le président François Brottes. Ce sont deux problèmes distincts. Le logement peut parfaitement convenir mais les services associés peuvent ne pas être adaptés ou de mauvaise qualité. Quelle est la porte de sortie si le service payé ne donne pas satisfaction mais que le logement convient ?

À vous entendre, si on n’est pas content du service, on quitte le logement… C’est un peu excessif, ne trouvez-vous pas ?

Mme Audrey Linkenheld. Ce n’est exactement pas ce que je dis. Si vous n’êtes pas satisfait d’un service, comme pour n’importe quel locataire d’un logement social mécontent des services associés à un HLM, vous vous retournez vers le bailleur auquel il appartient ensuite de corriger la prestation.

La charte précise que si vous ne souhaitez pas bénéficier du service pour d’autres motifs, vous déposez une demande de mutation pour un logement social classique. Dans ce cas, vous rentrez dans le droit commun du logement social.

Grâce aux partenaires qui les soutiennent, les expérimentations en cours permettent de proposer des logements avec services à coût faible. Il n’est pas anormal que ne bénéficient de ces logements que des personnes qui en ont le profil. Par ailleurs, il n’est pas dérogé au droit du consommateur. Si la qualité des prestations pose problème, la plainte du consommateur est parfaitement justifiée.

Mme Jeanine Dubié. Je comprends cet amendement mais les services concernés mériteraient d’être précisés. L’amendement mentionne « un service de préservation de l’autonomie et de prévention de la dépendance pour sécuriser les locataires à travers un accompagnement personnalisé à domicile ». Or, il n’est pas possible d’obliger quelqu’un à souscrire aux services proposés dans la résidence, sauf à porter atteinte à sa liberté individuelle.

S’il s’agit d’un système de téléalarme, le service est attaché à la construction. En revanche, s’agissant de l’intervention de personnes physiques délivrant un service individualisé à la personne, il me paraît difficile de la conditionner.

M. le président François Brottes. Peut-être pourriez-vous le retravailler ?

Mme Audrey Linkenheld. Je le redis, l’amendement ne vise pas les prestations classiques, comme l’aide à domicile, mais des services qui sont en train d’être imaginés et qui seront peut-être couverts par le forfait autonomie instauré par le projet de loi. Ces services relèvent de la prévention : une personne qui vient faire la conversation, qui incite à profiter des services offerts par la commune. On est dans de l’humain ; on n’est pas dans du médicalisé.

Je vous renvoie à la partie consacrée aux copropriétés dans le projet de loi qui prévoit un certain nombre de services directement liés à la copropriété.

Cet amendement transpose au logement locatif social et plus largement à toutes les opérations mixtes ce que le projet de loi prévoit pour les copropriétés. Comme pour l’habitat participatif, il s’agit d’éviter un choix entre la copropriété pour ceux qui en ont les moyens et le logement locatif social pour ceux qui ne les ont pas. J’aimerais demain que des personnes âgées autonomes cohabitent dans des résidences mixtes avec des personnes dont le niveau de revenu voire l’âge sont différents.

Nous parlons d’expérimentation. On avance en marchant. Je comprends que ces nouveautés puissent heurter les schémas classiques. Mais j’ai fait moi-même l’expérience du caractère parfois inopérant de ces schémas.

M. le président François Brottes. Je ne voudrais pas vous heurter, mais je vous propose un sous-amendement. Je maintiens que, dans la mesure où la contrainte est lourde, on peut imaginer que certains services prévus dans la charte se dégradent ou disparaissent, sans pour autant modifier la charte ou la facturation. Je vous propose d’ajouter à la fin du deuxième alinéa de l’amendement : « associée à leur bonne exécution ». De cette manière, si la prestation est mal exécutée, le montant de la facture peut être révisé. Sans cette précision, le consommateur s’engage sur un montant qui n’est jamais révisable ce qui n’est pas très respectueux des droits de celui-ci.

Mme Audrey Linkenheld. Je souscris tout à fait à ce sous-amendement. J’en profite pour préciser que l’amendement porte sur la charte, liée au contrat de bail. Cela n’exclut pas la signature d’un contrat entre le locataire et le prestataire de services. La charte doit être suffisamment précise pour que le locataire sache à quoi il s’engage. La fourniture d’un service commercial donne lieu pour sa part à un contrat comme pour tout autre service.

Mme la rapporteure. Pour rassurer Mme Dubié, l’amendement précise que ce sont bien des services non individualisables – les actions de prévention de la perte d’autonomie et non les services à la personne.

Je souscris pleinement au sous-amendement proposé par le président.

La Commission adopte successivement les sous-amendements CE13 et CE14 de la rapporteure, ainsi que le sous-amendement du Président, puis l’amendement ainsi sous-amendé.

Article additionnel après l’article 15
(article L. 445-1 du code de la construction et de l’habitation)

Volet spécifique aux locataires âgés dans les conventions d’utilité sociale

La Commission est saisie de l’amendement CE7 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Les prochaines conventions d’utilité sociale qui seront conclues entre les organismes HLM et l’État devront comporter un volet spécifique à la qualité de service rendu aux locataires les plus âgés.

La Commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 15
(article L. 365-4 du code de la construction et de l’habitation)

Agrément des associations de logement intergénérationnel

La Commission examine l’amendement CE6 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement modeste concerne les organismes d’intermédiation locative qui mettent en relation des personnes âgées et des jeunes. Il propose, pour une meilleure reconnaissance du travail de ces associations et plus grande sécurité pour les jeunes et les personnes âgées, de soumettre toutes les associations de logement intergénérationnel à l’agrément de l’État, conditionné par le respect d’un cahier des charges.

La Commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 15
Rapport sur les difficultés juridiques du logement intergénérationnel

La Commission est saisie de l’amendement CE9 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’amendement demande la remise d’un rapport par le Gouvernement pour étudier trois aspects importants du logement intergénérationnel : la possibilité de mettre en place des conventions d’occupation, la levée de l’incertitude juridique sur la nature du service rendu par le jeune qui est parfois requalifié en travail dissimulé, l’aménagement de la majoration automatique de taxe d’habitation qu’occasionne la présence du jeune pour la personne âgée.

M. le président François Brottes. Est-ce forcément toujours un jeune ?

Mme la rapporteure. En pratique, à 95 %, ce sont des jeunes.

M. le président François Brottes. Cela peut concerner une personne de quarante ans. Il est dommage que la réflexion soit limitée aux jeunes.

Mme la rapporteure. Vous avez raison. Mais nous parlons de logement intergénérationnel ce qui laisse supposer l’existence de deux classes d’âge. L’amendement ne précise pas l’âge, ce qui laissera aux auteurs du rapport tout le loisir d’étudier cette question.

M. le président François Brottes. Peut-être faut-il réfléchir à une formulation plus large.

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 15

La Commission est saisie de l’amendement CE8 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. La loi impose pour les résidences services la construction de deux places de parking par résident ainsi que des places de vélo. Cette obligation occasionne un surcoût dans les centres urbains. L’amendement propose de dispenser les résidences services de l’obligation pour les vélos. Il complète les annonces faites par la ministre du logement sur la simplification des normes de construction.

Mme Audrey Linkenheld. Je souscris à l’objectif d’assouplissement des règles en matière de stationnement. Mais je suis étonnée d’entendre que la loi fixe le nombre de places alors qu’habituellement, cela relève des plans locaux d’urbanisme.

Mme Jeanine Dubié. Les places de vélo peuvent être utiles au personnel de l’établissement ainsi qu’aux familles qui viennent rendre visite aux résidents.

Mme Annick Le Loch. J’allais faire la même remarque…

Mme la rapporteure. Il ne s’agit pas de supprimer les places de vélo, mais de donner plus de souplesse aux résidences pour gérer les places dont elle dispose.

Je précise à l’adresse de Mme Linkenheld que le code de la construction et de l’habitation se borne à fixer le principe ; ce sont les PLU qui déterminent les modalités d’application.

Mme Jeanine Dubié. Dans le cas présent, les résidences sont soumises à la réglementation relative aux établissements recevant du public qui comporte des prescriptions particulières pour les places de parking.

Mme la rapporteure. L’amendement introduit de la souplesse dans la réglementation pour résoudre le problème des résidences services dans les communes à forte pression immobilière. Il ne porte que sur les emplacements pour les vélos, ceux pour les voitures ayant fait l’objet des mesures de simplification des normes de construction.

M. Philippe Kemel. Ces mesures ne sont pas favorables aux villes qui manquent de transports publics et sont donc envahies par la voiture. Je suis opposé à l’assouplissement dans ce domaine.

M. le président François Brottes. Votre amendement me semble rencontrer un succès mitigé, madame la rapporteure… Je crains qu’il ne soit pas vraiment dans l’air du temps.

Mme la rapporteure. J’entends les différents arguments. J’accepte de retirer cet amendement.

L’amendement est retiré.

Chapitre III
Territoires, habitat et transports

Article 16
(article L. 302-1 du code de la construction et de l’habitation)

Programmation d’une offre de logements adaptée aux personnes âgées

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 16 sans modification.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Ailancy

M. Sadik Filipovic, associé, spécialiste de la silver economy

Domitys

M. Jean-Marie Fournet, président

M. Guillaume Lelong, directeur marketing

Haut comité pour le logement des personnes défavorisées

M. Xavier Emmanuelli, président

M. René Dutrey, secrétaire général

La maison des Babayagas

Mme Thérèse Clerc, fondatrice

« Le Pari Solidaire – Logement intergénérationnel » - Réseau COSI (Cohabitation solidaire intergénérationnelle)

Mme Aude Messean, directrice et cofondatrice du Parisolidaire, présidente et fondatrice du Réseau Cosi

Les Sénioriales

M. Bruno Derville, président

Union sociale pour l’habitat (USH)

Mme Magali Vallet, conseillère en politiques sociales

M. Hervé des Lyons, conseiller juridique

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