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N
° 2613

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 4 mars 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE LOI, (n° 2520), visant à assouplir le mécanisme
dit du « 
droit d’option départemental »,

PAR M. Jacques KRABAL

Député

——

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. LE NOUVEAU DISPOSTIF DE RATTACHEMENT VOLONTAIRE D’UN DÉPARTEMENT À UNE RÉGION CONTIGUË 7

A. UN DROIT D’OPTION RÉNOVÉ D’ORIGINE PARLEMENTAIRE 7

B. UN DROIT D’OPTION QUASIMENT IMPRATICABLE 11

II. LE NÉCESSAIRE ASSOUPLISSEMENT DES CONDITIONS DE MAJORITÉ REQUISES POUR EXERCER LE DROIT D’OPTION DÉPARTEMENTAL 11

III. LES AMÉLIORATIONS PROPOSÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR 13

IV. LE REJET DE LA PROPOSITION DE LOI PAR LA COMMISSION 13

DISCUSSION GÉNÉRALE 15

EXAMEN DES ARTICLES 19

Article unique (article 3 de la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015) : Assouplissement du mécanisme du « droit d’option départemental » 19

Après l’article unique 21

TABLEAU COMPARATIF 23

Mesdames et Messieurs,

La loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral instaure, à compter du 1er janvier 2016, une nouvelle carte régionale, qui comptera douze régions métropolitaines en plus de la collectivité territoriale de Corse.

À l’issu de la discussion parlementaire, cinq régions restent inchangées par rapport à la situation antérieure (Bretagne ; Centre ; Ile-de-France ; Pays-de-la-Loire, Provence-Alpes-Côte-d’Azur) et sept nouvelles régions sont issues de la fusion de treize régions actuelles (Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine ; Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes ; Auvergne et Rhône-Alpes ; Bourgogne et Franche-Comté ; Nord - Pas-de-Calais et Picardie ; Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées ; Basse-Normandie et Haute-Normandie).

L’objectif d’une telle réforme était, selon le Gouvernement, non seulement d’adapter la carte régionale aux réalités géographiques et à l’Europe des régions, mais encore de relever le défi du redressement de l’économie et des comptes publics. Or, la méthode retenue par le Gouvernement pour opérer ce découpage territorial reposait sur la prise en compte des périmètres administratifs des régions et non pas des identités locales, attachées à des territoires d’importance inégale, ne recoupant pas ces périmètres.

Une autre méthode aurait toutefois pu être retenue, telle celle proposée par Pierre Foncin (1841-1916), historien et géographe français, qui était fondée sur treize ensembles régionaux reposant sur les limites départementales à partir de critères purement géographiques et cohérents. Cette carte des « 13 ensembles » (cf schéma infra) retenait les Plaines du Nord, les Plaines de Paris et de la Champagne, le Plateau Lorrain, les Plaines et Collines de Normandie, l’ensemble Bretagne, Vendée et Poitou, les Plaines de la Loire, le Massif Central, les Plaines du Sud-Ouest, les Pyrénées, l’ensemble Jura & Saône, les Alpes et la Plaine du Languedoc (l’Alsace-Lorraine, territoire allemand à l’époque, formait un territoire à part).

Cette approche fondée sur les réalités géographiques qui font notre pays permet de dégager des ensembles ayant à la fois une taille critique correspondant à l’objectif actuel de rénovation de notre organisation territoriale et de renforcement des régions au service, en particulier, du développement économique et un fondement objectif qui ne répond pas au jeu des intérêts des uns et des autres.

DÉLIMITATION DES ENSEMBLES RÉGIONAUX NATURELS SELON PIERRE FONCIN (1891)

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     Plaines du Nord (Nord, Pas-de-Calais, Somme)

     Plaines de Paris et de la Champagne (Oise, Aisne, Marne, Haute-Marne, Aube, Yonne, Seine-et-Marne, Seine, Seine-et-Oise, Eure-et-Loir)

     Plateau Lorrain (Ardennes, Meuse, Meurthe-et-Moselle, Vosges)

     Plaines et Collines de Normandie (Seine-Inférieure, Eure, Calvados, Manche, Orne)

     Bretagne, Vendée et Poitou (Loire-Inférieure, Finistère, Côtes-du-Nord, Morbihan, Ille-et-Vilaine, Vendée, Vienne, Deux-Sèvres)

     Plaines de la Loire (Mayenne, Sarthe, Maine-et-Loire, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Loiret, Cher, Indre, Nièvre)

     Le Massif Central (Allier, Creuse, Haute-Vienne, Dordogne, Lot, Tarn, Aveyron, Lozère, Haute-Loire, Loire, Puy-de-Dôme, Corrèze, Cantal)

     Plaines du Sud-Ouest (Charente-Inférieure, Charente, Gironde, Lot-et-Garonne, Gers, Landes)

     Pyrénées (Basses-Pyrénées, Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Orientales, Haute-Garonne, Ariège, Aude)

     Jura & Saône (Belfort, Haute-Saône, Doubs, Jura, Côte-d'Or, Saône-et-Loire, Ain)

     Alpes (Haute-Savoie, Savoie, Hautes-Alpes, Basses-Alpes, Alpes-Maritimes, Var, Corse)

     Plaine du Languedoc (Rhône, Isère, Ardèche, Drôme, Vaucluse, Bouches-du-Rhône, Gard, Hérault)

Source : Pierre Foncin, Géographie de la France, Armand Colin (1891)

Aujourd’hui encore, cette délimitation régionale, proposée il y a pourtant plus d’un siècle, se fonde sur de véritables unités territoriales comme le montrent, par exemple, les Plaines de Paris et de la Champagne. Si l’on considère l’actuelle région Picardie, on observe que les départements qui la composent s’orientent du point de vue économique et humain vers les régions qui leur sont limitrophes (l’Aisne vers la région Champagne-Ardenne ; l’Oise vers l’Île-de-France ; la Somme vers le Nord–Pas-de-Calais). L’on peut également citer le cas, dans la région Pays-de-la-Loire, du département de la Loire-Atlantique qui, selon ce schéma, aurait pu être rattaché à la Bretagne de même que la Vendée… En adoptant une telle carte, on pouvait espérer éviter bien des débats inutiles. Acte est cependant pris de la délimitation des régions telles qu’elle résulte de la loi du 16 janvier 2015. Cela ne signifie pourtant pas qu’il faille renoncer à toute évolution de cette carte. Décidée vite voire précipitamment, votée dans l’urgence, elle n’est certainement pas parfaite et il conviendrait que la parole puisse être donnée aux départements afin d’envisager les évolutions qui leur sembleraient nécessaires.

Comme le disait Jean de La Fontaine dans la fable Le Renard et le Bouc, « En toute chose il faut considérer la fin », et la finalité de cette proposition de loi est bien d’améliorer la carte régionale retenue par la loi du 16 janvier 2015 au regard du véritable « vouloir vivre ensemble » majoritairement partagé par les administrés d’un département et d’une autre région que leur région d’appartenance.

C’est la raison pour laquelle, l’article unique de la présente proposition de loi vise à assouplir la possibilité pour un département et deux régions contiguës de modifier les limites territoriales retenues par la loi du 16 janvier 2015 en permettant au département concerné de quitter la région A pour rejoindre la région B en substituant à la condition de majorité des trois-cinquièmes des suffrages exprimés par chacune des trois assemblées délibérantes (soit 60 % des voix), la majorité simple, c’est-à-dire plus de 50 % des suffrages exprimés.

I. LE NOUVEAU DISPOSTIF DE RATTACHEMENT VOLONTAIRE D’UN DÉPARTEMENT À UNE RÉGION CONTIGUË

A. UN DROIT D’OPTION RÉNOVÉ D’ORIGINE PARLEMENTAIRE

Initialement, l’article 3 du projet de loi n° 635 relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, tirait les conséquences de la refonte de la carte des régions en supprimant la procédure relative au regroupement volontaire de régions et des départements et procédait à deux autres coordinations au sein du code général des collectivités territoriales.

Il faut en effet rappeler que la procédure de fusions des régions, introduite par l’article 28 de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales introduisant un nouvel article L. 4123-1 du code général des collectivités territoriales, n’avait jamais été mise en œuvre notamment en raison des conditions de référendum et de majorité requises qui sont apparues comme un obstacle insurmontable. De manière dérogatoire, la demande de fusion devait être inscrite à l’ordre du jour des deux conseils régionaux si au moins 10 % de ses membres le demandaient. La fusion reposait alors sur des délibérations concordantes des conseils régionaux concernés, auquel s’ajoutait, le cas échéant, l’avis du comité de massif compétent. Le projet de regroupement était ensuite soumis pour avis aux conseils généraux concernés. Enfin, devait être organisé un référendum dans l’ensemble des régions concernées. Le projet de fusion n’était validé qu’à la condition qu’il recueille, dans chacune des régions concernées, une double majorité correspondant à la majorité des suffrages exprimés et au moins au quart des électeurs inscrits. Le regroupement pouvait alors être décidé par décret en Conseil d’État, le découpage régional étant de nature réglementaire.

La même loi avait introduit des procédures similaires afin de permettre, sur une base volontaire, le regroupement des départements (article L. 3114-1 du code précité), le changement de région d’un département encore appelé « droit d’option départemental » (article L. 4122-1-1 du même code) et le regroupement dans une collectivité unique d’une région et des départements qui la composent (article L. 4124-1 du même code).

À l’occasion de l’examen en première lecture du projet de loi précité, le Sénat a profondément modifié son article 3 afin de supprimer toute condition de consultation des électeurs en cas de modification des limites des régions et des départements ainsi qu’en cas de fusion de ces collectivités territoriales. Ainsi, pourraient être réalisés par seules délibérations concordantes des assemblées délibérantes des collectivités concernées la fusion de départements, le transfert d’un département de sa région d’origine vers une région limitrophe, le regroupement de régions et la fusion en une collectivité unique d’une région et des départements la composant.

Le Sénat a plus particulièrement modifié la procédure de transfert d’un département de sa région d’origine vers une région limitrophe prévue par l’article L. 4122-1-1 du code général des collectivités territoriales, afin de prévoir que ce transfert puisse être décidé par décret en Conseil d’État après délibérations concordantes du conseil général du département concerné et du conseil régional de la région de rattachement envisagée, sans consultation du conseil régional de la région que le département se propose de quitter.

En adoptant, sur proposition du rapporteur, un amendement de réécriture globale de l’article 3, l’Assemblée nationale a entrepris de remettre à plat les possibilités d’évolution des départements et des régions sur une base volontaire et consensuelle en première lecture.

S’agissant du sujet qui nous intéresse aujourd’hui, l’Assemblée nationale a donc introduit la possibilité, pendant une période limitée (entre le 1er janvier 2016 et le 1er mars 2019), d’une évolution volontaire du rattachement de départements contigus à une autre région lorsque cette modification des limites régionales correspond à un consensus entre les organes délibérants de toutes les collectivités concernées. Toutefois, elle a subordonné cette évolution à la condition de réunir la majorité des trois cinquièmes des suffrages du conseil départemental du département concerné, ainsi que des deux conseils régionaux des régions concernées. L’Assemblée nationale avait enfin prévu qu’une telle modification soit prise en compte par le législateur, afin qu’il puisse en tirer les conséquences sur le plan électoral dans la mesure où le découpage régional et le tableau des effectifs des conseils régionaux relèvent désormais de la loi.

En deuxième lecture, la rédaction retenue par le Sénat prévoyait que la région de départ n’aurait pas à accepter cette évolution mais pourrait s’y opposer, disposant ainsi d’un droit de veto, toujours par une délibération adoptée à la majorité des trois cinquièmes dans un délai de quatre mois. Cet assouplissement du droit d’option départemental devait entrer en vigueur le 1er janvier 2016 et être abrogé le 31 décembre 2016 sous réserve de l’achèvement des procédures en cours, laissant ainsi aux collectivités concernées un an pour les mettre en œuvre avant que toute possibilité d’évolution volontaire de la carte des régions soit supprimée. Le Sénat a également supprimé l’obligation de recourir au législateur pour en tirer les conséquences sur le plan électoral, en prévoyant qu’un décret en Conseil d’État y pourvoirait.

À l’initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Carlos Da Silva, l’Assemblée nationale a finalement rétabli, en deuxième lecture puis en nouvelle lecture, la nécessité du consentement positif de la région de départ, exprimé par les trois cinquièmes de son conseil régional, doutant de la conformité à la Constitution du dispositif proposé au Sénat au regard du principe de libre administration des collectivités territoriales, en ce qu’il permettait le passage d’une région à l’autre sans accord de la région de départ. L’Assemblée nationale a également rétabli le calendrier de rattachement volontaire entre le 1er janvier 2016 et le 1er mars 2019 tel qu’elle l’avait proposé en première lecture.

Ce sont ces dispositions qui figurent dans la loi du 16 janvier 2015 à l’article 3.

L’ensemble de ces évolutions sont résumées dans le tableau ci-après.

MODALITÉS D’ÉVOLUTION DU RATTACHEMENT VOLONTAIRE D’UN DÉPARTEMENT
À UNE AUTRE RÉGION CONTIGUË LORS DE L’EXAMEN DU PROJET DE LOI RELATIF
À LA DÉLIMITATION DES RÉGIONS, AUX ÉLECTIONS RÉGIONALES
ET DÉPARTEMENTALES ET MODIFIANT LE CALENDRIER ÉLECTORAL

Article

L. 4122-1-1 du code général des collectivités territoriales

Dispositif en vigueur jusqu’au 1er janvier 2016

Modifications adoptées par le Sénat en première lecture

Modifications adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

Modifications adoptées par le Sénat en deuxième lecture

Modifications adoptées par l’Assemblée nationale en deuxième et en nouvelle lecture

Rattachement d’un département à une autre région

– délibérations concordantes du conseil départemental et des deux conseils régionaux concernés ;

– suppression de l’accord du conseil régional de la région de départ ;

– délibérations concordantes du conseil départemental et des deux conseils régionaux concernés, adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés ;

– délibérations concordantes du conseil général et de la région d’arrivée, adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés ;

– absence d’opposition de la région de départ dans un délai de 4 mois ;

– délibérations concordantes du conseil départemental et des deux conseils régionaux concernés, adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés ;

– organisation d’une consultation devant réunir la majorité absolue des suffrages exprimés, correspondant à un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits dans le département et dans chaque région ;

– abrogation de la condition référendaire.

– abrogation de la condition référendaire ;

– abrogation de la condition référendaire ;

– abrogation de la condition référendaire ;

– modification décidée par décret en Conseil d’État.

 

– modification décidée par la loi ;

– modification décidée par décret en Conseil d’État ;

– modification décidée par décret en Conseil d’État ;

   

– dispositif en vigueur du 1er janvier 2016 au 1er mars 2019.

– dispositif en vigueur du 1er janvier au 31 décembre 2016.

– dispositif en vigueur du 1er janvier 2016 au 1er mars 2019.

B. UN DROIT D’OPTION QUASIMENT IMPRATICABLE

Comme l’ont montré les débats parlementaires tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, au cours des lectures successives, le dispositif retenu finalement par le 2° du I de l’article 3 de la loi du 16 janvier 2015 reste très difficile à mettre en œuvre en ce qu’il subordonne toujours le droit d’option départemental à un avis positif des trois assemblées délibérantes à la majorité qualifiée des trois-cinquièmes des suffrages exprimés.

Comme l’ont soutenu de nombreux parlementaires de la plupart des groupes politiques au cours de ces débats (1), il est en effet peu envisageable que la collectivité de départ soit très majoritairement favorable au départ du département vers une autre région comme l’ont montré les critiques exprimées sur ce point sur tous les bancs du Parlement.

En outre, l’exigence d’une majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés dans chacune des collectivités concernées n’apparaît pas justifiée. En effet, cette majorité qualifiée n’est pas requise par le droit en vigueur qui ne requiert que des délibérations concordantes du conseil départemental et des deux conseils régionaux concernés. Certes, il est au surplus prévu, dans le droit en vigueur, de consulter la population concernée afin de réunir la majorité absolue des suffrages exprimés, correspondant à un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits dans le département et dans chaque région, mais cette condition est supprimée pour l’avenir, y compris pour les fusions de collectivités.

Il convient donc de réviser le dispositif adopté le 16 janvier 2015 de manière à le rendre effectif. Autrement, la réforme engagée ne produira pas les effets escomptés.

II. LE NÉCESSAIRE ASSOUPLISSEMENT DES CONDITIONS DE MAJORITÉ REQUISES POUR EXERCER LE DROIT D’OPTION DÉPARTEMENTAL

S’il est vrai que de nombreuses formules ont été proposées au cours des débats parlementaires pour assouplir le droit d’option départemental modifié à l’initiative du Sénat, votre rapporteur considère que la solution la plus simple et la plus efficace serait de conserver l’obligation d’un vote positif des trois assemblées délibérantes sur le projet de rattachement du département à l’une des deux régions mais de substituer à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, la majorité des suffrages exprimés.

Votre rapporteur ne soutient pas, en effet, la proposition selon laquelle la région de départ ne devrait pouvoir que s’opposer au projet de rattachement à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, exerçant ainsi un simple droit de veto. Il fait sienne l’analyse du rapporteur de l’Assemblée nationale sur le projet de loi relatif à la délimitation des régions, M. Carlos Da Silva, selon laquelle cette solution pourrait s’avérer incompatible avec le respect du principe constitutionnel de libres administrations des collectivités territoriales dès lors qu’une région pourrait voir son territoire être modifié de manière substantielle sans que son conseil régional ou la population concernée ait à signifier son consentement.

Votre rapporteur estime en revanche que la démarche d’assouplissement du droit d’option départemental engagé par l’Assemblée nationale, avec le soutien du Gouvernement, à l’occasion de la loi du 16 janvier 2015, doit être renforcée par le remplacement de la majorité qualifiée par une majorité simple.

Il reconnaît qu’une telle réforme aurait pour effet de rompre l’harmonisation souhaitée par l’Assemblée nationale qui a retenu la même règle de majorité pour tout projet de fusion de départements, fusion de régions et fusion de région avec ses départements ainsi que pour tout projet de rapprochement d’un département avec une région.

Toutefois, il considère que cette procédure distincte serait justifiée par le fait que, contrairement à tout projet de fusion, le rattachement d’un département à une région n’entraîne pas la disparition par absorption de l’une ou l’autre des collectivités concernées, et par tant n’impose pas le recours à la majorité qualifiée.

Un tel assouplissement aurait en outre le mérite de favoriser plus largement les départements qui le souhaitent de se rattacher à la région avec laquelle ils partagent une véritable volonté de « vivre ensemble », ce qui favorisera à termes d’importantes économies grâce à une rationalisation volontaire des structures des départements de ladite région.

Votre rapporteur observe enfin que durant les débats, le Gouvernement ne s’est pas montré hostile à cette évolution en émettant un avis de sagesse à plusieurs reprises au cours de la deuxième lecture du projet de loi précité, bien qu’en dernière lecture il se soit finalement ravisé.

Ainsi, lors de la séance du 30 octobre 2014 au Sénat, M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, a déclaré que : « L’amendement n° 122 vise à revenir à des conditions de délibération à la majorité simple lorsqu’il s’agit de se prononcer sur des regroupements dans le cadre de l’exercice du droit d’option. Le Gouvernement, qui comprend cette volonté d’assouplissement, s’est exprimé par la voix du Premier ministre : il a annoncé qu’il y avait sur ce sujet une possibilité d’ouverture. Je m’en remets donc, au nom du Gouvernement, à la sagesse du Sénat. »(2)

De la même manière, M. André Vallini, secrétaire d’État chargé de la réforme territoriale, a déclaré à l’Assemblée nationale lors de la séance du 20 novembre 2014 : « S’agissant de la majorité requise pour l’adoption des trois délibérations que je viens d’évoquer, plusieurs amendements proposent l’instauration d’une majorité simple, alors que le texte de la commission prévoit une majorité des trois cinquièmes. Ces amendements ne posent pas de difficultés (…) En tout cas, ils ne posent pas des difficultés de même nature. On peut toutefois admettre que le caractère exceptionnel des délibérations dont il est question appelle presque naturellement l’instauration d’une majorité renforcée, d’une majorité qualifiée (…) Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Parlement, qui sera attentif à la stabilité qui doit présider à notre organisation territoriale » (3).

La présente proposition de loi ne devrait donc pas se heurter à l’avis défavorable du Gouvernement qui, par cohérence, pourrait délivrer un avis de sagesse à défaut d’évoluer vers un avis favorable.

III. LES AMÉLIORATIONS PROPOSÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR

Votre rapporteur a déposé un amendement visant à ce que le rattachement d'un département d'une région à une autre région contigüe ne puisse intervenir qu'une seule fois afin de responsabiliser les élus régionaux et départementaux sur ce choix fondamental tout en assurant la stabilité des limites territoriales qui en résulteraient à l'issue de ce choix.

En contrepartie, cet amendement proposait également de supprimer la disposition selon laquelle le droit d'option départemental ne peut être exercé que jusqu’au 1er mars 2019 afin de laisser la possibilité à chaque collectivité concernée de se prononcer une fois sur cette option, même si elle ne l’envisage qu'après 2019. La réécriture proposée ne modifiait pas, en revanche, la disposition selon laquelle la procédure de fusion de régions, prévue à l’article L. 4123-1 du code général des collectivités territoriales, ne peut être exercée qu’entre le 1er janvier 2016 et le 1er mars 2019.

IV. LE REJET DE LA PROPOSITION DE LOI PAR LA COMMISSION

Votre Commission ne s’est pas ralliée aux propositions d’amélioration que votre rapporteur a présentées et n’a pas adopté la présente proposition de la loi.

*

* *

DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du mercredi 4 mars 2015, la Commission procède à l’examen de la proposition de loi de M. Jacques Krabal et plusieurs de ses collègues visant à assouplir le mécanisme dit du « droit d'option départemental » (n° 2520).

Après l’exposé du rapporteur, une discussion générale a lieu.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Lors de l’examen de la loi du 16 janvier 2015, nous avons passé des nuits entières à débattre dans l’hémicycle des conditions de rattachement d’un département à une autre région. Cette proposition de loi – qui reprend la partie la plus modérée des amendements permettant de les assouplir – semble relever du bon sens. Cependant, monsieur le rapporteur, chacun sait qu’elle répond à des enjeux locaux. Vous avez beaucoup bataillé pour le rattachement de l’Aisne à la région de Champagne-Ardenne plutôt qu’à celle de Nord-Picardie ; loin d’instaurer la paix, votre proposition pourrait au contraire déclencher des guerres. En effet, les trois départements qui composent la région de Picardie n’ont pas de véritable solidarité géographique. Il ne serait pas logique de pousser au rattachement de l’Aisne entière à la Champagne-Ardenne car si le sud du département – que vous représentez – possède certainement de bonnes connexions avec cette région, ma circonscription, située au nord de la vôtre, est partagée sur la question. Dans ce cas, appliquer votre proposition de loi aurait des effets délétères et ne contribuerait pas à ramener la paix dans ce territoire écartelé dont le rattachement régional reste discutable. Par conséquent, je ne pourrai pas soutenir ce texte, pas plus que je n’ai pu soutenir en séance les amendements d’assouplissement du droit d’option.

M. Paul Molac. J’ai été l’un des commentateurs des amendements sur les conditions de rattachement d’un département à une autre région, et j’en ai moi-même déposé. Les débats ont été passionnés et les votes serrés, certains faisant l’objet d’un scrutin public. Je salue donc la décision du groupe RRDP de revenir sur cette disposition.

La proposition de loi toucherait, au plus, une dizaine de départements en France, parmi lesquels l’Aisne, le Gard, la Lozère ou encore la Loire-Atlantique. Il faut souligner la modération du texte qui propose simplement de passer d’une majorité qualifiée à une majorité simple. Je soutiendrai cette proposition avec enthousiasme.

M. Philippe Gosselin. Nous reproduisons à l’identique les débats auxquels nous avons assisté il y a à peine quelques semaines. En effet, ce texte propose de modifier la loi du 16 janvier 2015, dont l’encre est à peine sèche ! De plus, alors qu’une loi doit être générale et impersonnelle, ce texte de circonstance vise certains départements en particulier. Notons que la loi du 16 janvier 2015 n’empêche pas les départements de changer de rattachement ; le droit d’option – parfaitement légitime – y est pleinement reconnu. Mais revenir sur les conditions de majorité conduirait à une situation paradoxale où les départements qui souhaiteraient changer de région seraient soumis à des règles de majorité moins contraignantes que les communes qui voudraient changer d’intercommunalité. Pourtant, le changement de région constitue un acte important qui peut modifier considérablement les équilibres territoriaux. Le rapporteur remarque que son amendement qui limite à une seule fois la possibilité d’exercer le droit d’option permet aux élus de bien réfléchir avant d’y procéder ; mais la règle des trois cinquièmes qui existe aujourd’hui autorise la même pondération. Il me semble donc préférable de s’y tenir, tout en reconnaissant l’importance du droit d’option.

M. Carlos Da Silva. Il faut saluer la constance du rapporteur qui avait défendu dans l’hémicycle la même position en faveur de l’assouplissement du droit d’option. En tant que rapporteur de la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, je rappelle que ce texte a introduit plusieurs modifications en ce sens. En effet, alors que seul un référendum pouvait auparavant permettre l’application de ce droit, il en a confié la responsabilité aux élus départementaux. Certes, les débats ont été vifs, certains souhaitant que la nouvelle délimitation des régions concerne également les départements ; tel ne fut pas le choix du Gouvernement et le groupe majoritaire s’est rallié à sa position, essentiellement pour des raisons pratiques. Les régions existent en tant que collectivités depuis une trentaine d’années ; les politiques publiques ont permis d’unifier ces territoires et d’y développer des infrastructures utiles, leur conférant une identité. De plus, étant donné la longueur et l’âpreté des débats dans l’hémicycle – signe de l’intérêt et de la passion suscités par la question –, descendre au niveau départemental aurait empêché la loi d’aboutir. Enfin, le texte final – qui supprime le principe du référendum, mais propose la règle de la majorité des trois cinquièmes – représente un équilibre qui a permis de faire adopter cette loi avec une majorité très composite. Revenir sur une seule partie de la loi affecterait cet équilibre et serait malvenu eu égard à la qualité et à l’intensité de nos débats. Enfin, j’ai souligné à l’époque que plutôt que d’organiser un référendum, les candidats aux élections départementales, puis régionales qui allaient suivre le vote et la promulgation de cette loi pouvaient proposer aux électeurs de rattacher leur département à une autre région ou de faire fusionner deux régions. Or je n’ai pas vu les candidats en Loire-Atlantique mettre en avant ce type de proposition. Je souhaite donc que notre Commission rejette cette proposition de loi, tout en respectant le travail et la constance du rapporteur qui continuera sans nul doute de défendre sa position légitime.

M. Jean-Luc Warsmann. Je fais miens les principaux arguments des trois précédents orateurs. Ainsi, cette proposition de loi répond à l’évidence à des motivations de nature locale. Cher collègue, au-delà de la campagne de marketing que vous avez développée dans votre circonscription pour que votre département change de rattachement, il faut revenir au niveau national ! La règle actuelle représente un point d’équilibre : certaines collectivités peuvent convoiter un territoire voisin riche et rechigner à s’occuper de départements moins tentants, mais comme l’a noté le rapporteur de la loi du 16 janvier 2015, la garantie de l’équilibre revient au législateur. Ensuite, comme l’a souligné Philippe Gosselin, il serait choquant qu’il soit plus simple à un département de changer de région qu’à une commune de quitter une intercommunalité. Par ailleurs, au nom du sérieux du travail juridique, il est inopportun de revenir sur une loi qui vient d’être promulguée, même si ce principe est souvent enfreint sous cette législature. Enfin, n’oublions pas l’argument économique. Les débats parlementaires des dernières années sont souvent en décalage par rapport aux réalités des territoires : alors que le marché du bâtiment et des travaux publics s’effondre, l’incertitude en matière de compétences des élus produit des effets dramatiques. Aujourd’hui où la loi entre enfin en vigueur, ajouter une nouvelle incertitude sur les limites des collectivités conduirait à une apocalypse complète. Les entreprises du bâtiment font toutes état des mêmes problèmes : le manque d’intérimaires, le fait que les départs en retraite ne sont plus compensés par de nouveaux recrutements, la mise des ouvriers au chômage intempéries et la menace des plans sociaux. Après une baisse de 30 % l’année dernière et à nouveau cette année, et une diminution des appels d’offres pour l’an prochain, le secteur a besoin de stabilité. Nos concitoyens attendent du Parlement qu’il contribue à la reprise économique.

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EXAMEN DES ARTICLES

Article unique
(article 3 de la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015)

Assouplissement du mécanisme du « droit d’option départemental »

Le 2° du I de l’article 3 de la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 instaure la possibilité, à compter du 1er janvier 2016, pour un département et deux régions contiguës de demander, par délibérations concordantes de leurs assemblées délibérantes, adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, une modification des limites régionales visant à inclure le département dans le territoire d'une région qui lui est limitrophe.

L’article unique de la présente proposition de loi propose de simplifier le dispositif en substituant au mécanisme d’option à la majorité qualifiée des trois cinquièmes des suffrages exprimés un vote à la majorité simple au sein des trois assemblées délibérantes concernées.

Comme il a été indiqué dans l’exposé général du présent rapport, cette simplification du mécanisme du droit d’option départemental permettra de s’appuyer sur un régime juridique suffisamment souple pour garantir son effectivité tout en sauvegardant le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales.

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La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL6 du rapporteur et CL1 de M. Paul Molac.

M. le rapporteur. Rien n’est plus éloigné de mon état d’esprit que la volonté de réengager une guerre, et à aucun moment – excepté en citant Jean de La Fontaine – je n’ai fait référence au département de l’Aisne ! Les représentants de tous les bancs ont pointé du doigt les insuffisances de la loi du 16 janvier 2015 en matière de droit d’option ; dès lors, que l’encre soit sèche ou non, il ne faut pas hésiter à l’améliorer ! Comment peut-on affirmer que cette proposition de loi amènera une augmentation des plans sociaux ? Elle ne remet pas en cause l’équilibre qu’a évoqué le rapporteur de la loi du 16 janvier 2015, mais en propose un autre. Elle ne créera pas plus d’incertitudes que le texte déjà voté, mais permettra de mieux prendre en compte les aspirations locales. Cette disposition ne concernera même pas une dizaine de départements, parmi lesquels – il est vrai – celui de l’Aisne. Le législateur doit certes garder la nouvelle carte des régions, mais sans négliger les améliorations possibles à l’intérieur de ce cadre global. Ce n’est pas une injure à faire aux élus locaux que leur demander leur avis ; un autre amendement propose même de favoriser la consultation citoyenne puisque le Sénat a supprimé le recours au référendum. Même si la nouvelle carte représente déjà un pas en avant, il reste nécessaire d’améliorer le fonctionnement démocratique de notre pays.

Quant à l’amendement CL6, son 1° est purement rédactionnel : il confirme l’objectif de la proposition de loi visant à supprimer la majorité qualifiée des trois cinquièmes des suffrages exprimés au bénéfice d’une majorité simple. Le 2° est pour sa part le corollaire de la simplification de la règle de la majorité proposée au 1° puisqu’il tend à ne permettre le rattachement d’un département à une autre région qu’une seule fois – un élément de stabilité par rapport au texte voté – afin de responsabiliser les élus régionaux et départementaux sur ce choix fondamental tout en assurant la stabilité des limites territoriales qui en résulteront. Enfin, le 3° de cet amendement réécrit le IV de l’article 3 de la loi du 16 janvier 2015 pour supprimer la disposition selon laquelle le droit d’option départemental ne pourra être exercé qu’avant le 1er mars 2019. En effet, il est important de laisser à chaque collectivité concernée la possibilité de se prononcer une fois sur cette option, même si cela n’est envisagé qu’après cette date. La réécriture proposée ne modifie pas, en revanche, la disposition selon laquelle la fusion de régions prévue par l’article L. 4123-1 du code général des collectivités territoriales, ne puisse être exercée qu’entre le 1er janvier 2016 et le 1er mars 2019.

M. Paul Molac. La comparaison entre les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les régions me paraît injustifiée dans la mesure où dans le cas des EPCI, les communes ont généralement choisi de se mettre ensemble.

M. Philippe Gosselin. Les préfets et les commissions départementales de la coopération intercommunale (CDCI) ont joué un rôle très important dans certains groupements !

M. Paul Molac. Une seule commune est dans ce cas dans le pays de Ploërmel. En revanche, les régions ont été découpées sur un bout de table, dans un ministère. Elles n’ont pas tout de suite acquis le statut de collectivités locales de plein droit, les découpages n’étant au départ qu’administratifs, et il a fallu attendre la loi Defferre de 1982 – la dernière fois où le Parlement s’est prononcé sur les frontières régionales – pour que la situation change.

Quant aux difficultés économiques, le problème est réel, mais la commission des Lois s’occupe également d’autres sujets !

M. Jean-Luc Warsmann. Quelle déconnexion !

M. Paul Molac. L’amendement CL1 prévoit qu’une région ne peut pas s’opposer au départ d’un département et n’est consultée que pour avis.

M. le rapporteur. Défavorable. Cet amendement part d’une volonté de faire avancer le droit d’option, mais j’imagine mal qu’on se passe du vote de la région quittée – la plus directement touchée par les conséquences d’une telle décision – alors qu’on le demande à la région d’accueil et au département qui souhaite changer de rattachement. Cela me paraît contraire aux principes démocratiques.

La Commission rejette les amendements.

Elle est saisie de l’amendement CL2 de M. Paul Molac.

M. le rapporteur. Défavorable. Si je partage l’idée selon laquelle la limite du 1er mars 2019 devrait être supprimée, ce n’est pas pour permettre d’exercer le droit d’option départemental à chaque alternance politique. La proposition que j’ai soumise précédemment visait à assurer à chaque département la possibilité de l’exercer une fois seulement, avant ou après le 1er mars 2019.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle rejette l’article unique.

Après l’article unique

La Commission aborde l’amendement CL3 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Cet amendement vise à assouplir les conditions dans lesquelles un département peut décider de rejoindre une autre région limitrophe que la sienne. Il complète le dispositif en prévoyant que la demande de rattachement d’un département à une région limitrophe peut être formulée par l’une ou l’autre de ces collectivités et ensuite soumise à une consultation dans le département et la région d’accueil concernés. Dénuée de son pouvoir de blocage, la région d’appartenance perdrait donc toute latitude de s’opposer au processus.

M. le rapporteur. Favorable. À partir du moment où les électeurs du département se sont prononcés en faveur du rattachement à une autre région que la leur, il n’est plus nécessaire de prévoir la possibilité pour la région de départ de s’y opposer. La région d’accueil garde la possibilité de refuser expressément le rattachement, mais son avis sera probablement favorable ; c’est pourquoi la disposition selon laquelle son accord est réputé acquis à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la consultation des électeurs me paraît équilibrée.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL4 de M. Paul Molac.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Cet amendement me semble contradictoire avec l’article 72-1 de la Constitution qui dispose : « La modification des limites des collectivités territoriales peut également donner lieu à la consultation des électeurs ». Le référendum d’initiative populaire visé par l’amendement ne relève pas de la même nature ; le texte proposé est donc probablement inconstitutionnel.

Je voudrais également rappeler à tous que l’heure n’est plus à lancer de graves sujets de dissension, mais à s’assurer, au-delà du développement économique global, qu’au sein des grandes régions plus ou moins arbitrairement découpées, l’ensemble des territoires qui les composent soient traités avec égalité. C’est ce combat qu’il faut mener au lieu de revenir à nouveau sur la question des rattachements.

M. le rapporteur. Avis favorable. Il s’agit d’un amendement de bon sens, car il promeut la démocratie à un moment où celle-ci est mise à mal et encourage l’initiative citoyenne dans un domaine qui concerne la vie quotidienne de nos concitoyens. Il s’agit en effet de permettre l’organisation d’un référendum sur la modification des limites régionales à l’initiative de 5 % des électeurs d’un département. Si, à l’issue de ce référendum, les électeurs se sont prononcés en faveur du rattachement de leur département à une autre région, il ne me paraît pas anormal de supprimer la possibilité pour la région de départ de se prononcer sur ce rattachement ; seule la région d’accueil devra alors se prononcer.

La Commission rejette l’amendement.

M. Dominique Raimbourg, président. L’ensemble des articles et des amendements ayant été rejetés, il n’y a pas lieu, pour la Commission, de se prononcer sur la proposition de loi qui est aussi rejetée.

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TABLEAU COMPARATIF

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Dispositions en vigueur

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Texte de la proposition de loi

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Texte adopté par la Commission

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Proposition de loi visant à assouplir
le mécanisme dit du
« droit d’option départemental »

 

Loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral

   

Art. 3. – I. – A compter du 1er janvier 2016, le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

   

1° L’article L. 3114-1 est ainsi modifié :

   

a) À la première phrase du premier alinéa du I, après le mot : « généraux », sont insérés les mots : « , adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, » ;

   

b) Le II est abrogé ;

   

2° L’article L. 4122-1-1 est ainsi modifié :

Article unique

 

a) À la première phrase du I, après le mot : « délibérantes », sont insérés les mots : « , adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, » ;

Au a) du 2° de l’article 3 de la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales, les mots : « des trois cinquièmes des suffrages exprimés » sont remplacés par les mots : « absolue des suffrages exprimés ».

 

b) Le II est abrogé ;

   

3° L’article L. 4123-1 est ainsi modifié :

   

a) À la première phrase du premier alinéa du I, après le mot : « régionaux, », sont insérés les mots : « adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, » ;

   

b) Le II est abrogé ;

   

4° L’article L. 4124-1 est ainsi modifié :

   

a) À la première phrase du premier alinéa du I, après le mot : « région », il est inséré le mot : « métropolitaine » et, après le mot : « délibérantes », sont insérés les mots : « , adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, » ;

   

b) Le II est abrogé.

   

II. – Lorsque, en application de l’article L. 4122-1-1 du code général des collectivités territoriales, un département est inclus dans le territoire d’une région, l’effectif du conseil régional de la région dont est issu ce département, l’effectif du conseil régional de la région dans laquelle il est inclus et le nombre de candidats par section départementale pour l’élection du conseil régional de chacune de ces régions, déterminés au tableau n° 7 annexé au code électoral, sont fixés par décret en Conseil d’État avant le prochain renouvellement général.

   

L’effectif des conseils régionaux concernés et le nombre de candidats par section départementale pour l’élection de ces conseils régionaux sont déterminés selon les règles suivantes :

   

1° Il est soustrait à l’effectif global du conseil régional de la région dont est issu le département un nombre de sièges égal à la part de la population de ce département par rapport à la population totale de cette région, arrondi le cas échéant à l’unité inférieure ;

   

2° Il est ajouté à l’effectif global du conseil régional de la région dans laquelle est inclus le département un nombre de sièges égal à la part de la population de ce département par rapport à la population totale de cette région, arrondi le cas échéant à l’unité supérieure ;

   

3° Le nombre de candidats par section départementale dans chacune des régions est déterminé en fonction de la population de chaque département à la représentation proportionnelle suivant la règle du plus fort reste. À ce nombre, sont ajoutés, pour chaque section départementale, deux candidats.

   

Les chiffres des populations prises en compte sont ceux des populations légales en vigueur.

   

III. – Lorsque, en application de l’article L. 4123-1 du code général des collectivités territoriales, plusieurs régions sont regroupées en une seule région, l’effectif du conseil régional de cette région et le nombre de candidats par section départementale pour l’élection de son conseil régional, déterminés au tableau n° 7 annexé au code électoral, sont fixés par décret en Conseil d’État avant le prochain renouvellement général.

   

L’effectif du conseil régional et le nombre de candidats par section départementale pour l’élection de ce conseil régional sont déterminés selon les règles suivantes :

   

1° L’effectif du conseil régional est égal à la somme des effectifs des conseils régionaux des régions regroupées ;

   

2° Le nombre de candidats par section départementale est déterminé en fonction de la population de chaque département à la représentation proportionnelle suivant la règle du plus fort reste. À ce nombre, sont ajoutés, pour chaque section départementale, deux candidats.

   

Les chiffres des populations prises en compte sont ceux des populations légales en vigueur.

   

IV. – Les articles L. 4122-1-1 et L. 4123-1 du code général des collectivités territoriales ainsi que les II et III du présent article sont abrogés à compter du 1er mars 2019.

   
© Assemblée nationale

1 () Voir notamment les comptes rendus des séances du 30 octobre 2014 au Sénat et du 20 novembre 2014 à l’Assemblée nationale sur l’article 3 du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départemental et modifiant le calendrier électoral.

2 () Voir le compte rendu intégral de la séance du jeudi 30 octobre 2014 au Sénat (http://www.senat.fr/interventions/crisom_pjl13-635_2.html).

3 () Voir le compte rendu intégral de la deuxième séance du jeudi 20 novembre 2014 à l’Assemblée nationale (http://www.assemblee-nationale.fr/14/cri/2014-2015/20150066.asp).