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Amendements  sur le projet ou la proposition


N
° 3199

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 novembre 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI visant à la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement (n° 2715 rectifié).

PAR M. Michel LESAGE

Député

——

Voir le numéro :

Assemblée nationale : 2715 rectifié.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. L’INDISPENSABLE RECONNAISSANCE DU DROIT DE L’HOMME À L’EAU (ARTICLE PREMIER) 11

II. L’ACCÈS À L’EAU ET À DES ÉQUIPEMENTS SANITAIRES DANS L’ESPACE PUBLIC (ARTICLE 2) 13

1. La proposition de loi prévoit que toutes les collectivités donnent aux personnes non raccordées à un réseau d’alimentation en eau la possibilité de s’alimenter gratuitement en eau potable à un point d’eau situé sur leur territoire. 14

2. La proposition de loi prévoit que les collectivités de plus de 3 500 habitants mettent à disposition des toilettes publiques gratuites accessibles à toute personne. 14

3. La proposition de loi prévoit que les collectivités de plus de 15 000 habitants mettent à disposition des douches publiques gratuites pour les personnes vulnérables. 16

III. LA CRÉATION ET LE FINANCEMENT D’UNE AIDE PRÉVENTIVE (ARTICLES 3, 4, 5 ET 6) 17

A. LA PERTINENCE DE LA CRÉATION D’UNE ALLOCATION DE SOLIDARITÉ PRÉVENTIVE (ARTICLE 3) 17

1. Les limites du dispositif FSL 17

2. La « loi Brottes » et les expérimentations sur les territoires sont-elles suffisantes ? 19

3. La tarification progressive de l’eau est-elle sociale ? 20

B. L’ALLOCATION FORFAITAIRE D’EAU POUR LIMITER LA FACTURE À 3 % MAXIMUM DU REVENU (ARTICLE 3) 22

C. LE MONTANT DE L’ALLOCATION FORFAITAIRE (ARTICLE 4) 23

D. LE FINANCEMENT DE L’ALLOCATION FORFAITAIRE (ARTICLE 5) 26

1. Le financement par la fiscalité 26

2. Le financement par l’usager 27

3. Autres sources de financement : les « transferts » 28

IV. LA NÉCESSAIRE MOBILISATION DES COLLECTIVITÉS EN FAVEUR DU DROIT À L’EAU (ARTICLE 7) 37

CONCLUSION 41

TRAVAUX EN COMMISSION 43

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 43

II. EXAMEN DES ARTICLES 65

Article 1er (article L. 1314-1 [nouveau] du code de la santé publique) : Reconnaissance et définition du droit humain à l’eau 65

Article 2 (article L. 1314-2 [nouveau] du code de la santé publique) : Obligation pour les collectivités territoriales de mettre à disposition gratuitement des points d’eau potable, des toilettes publiques et des douches publiques sur leur territoire 67

Article 3 (article L. 115-3-1 [nouveau] du code de l’action sociale et des familles) : Création de l’aide préventive pour l’accès à l’eau potable et définition des bénéficiaires 70

Article 4 (article L. 115-3-2 [nouveau] du code de l’action sociale et des familles) : Allocation forfaitaire d’eau 72

Article 5 (article L. 1314-3 [nouveau] du code de la santé publique) : Fonds de solidarité pour le droit à l’eau 75

Article 6 (articles L. 351-6 et L. 351-7 du code de la construction et de l’habitation et article 6 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement) : Financement de la mise en œuvre du droit à l’eau 80

Article 7 (articles L. 1413-1, L. 2224-5 et L. 2224-5-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Suivi des mesures de mise en œuvre du droit à l’eau prises au niveau communal 81

Article 8 (article L. 213-1 du code de l’environnement) : Demande de rapport 83

Article 9 : Gage 83

Titre : Proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit à l’eau potable et à l’assainissement 84

TABLEAU COMPARATIF 85

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 99

BIBLIOGRAPHIE 105

INTRODUCTION

● La question du droit à l’eau, de sa reconnaissance et de sa mise en œuvre, caractérise la capacité de nos sociétés à répondre aux besoins fondamentaux des populations.

L’eau est le reflet fidèle des communautés humaines. « Dis-moi ce que tu fais de ton eau, je te dirai qui tu es », écrit Erik Orsenna (1).

Ce droit à l’eau traduit deux exigences. Celle que chaque être humain dispose de suffisamment d’eau pour satisfaire ses besoins fondamentaux et celle de la réalisation d’un équipement garantissant à chacun l’hygiène, la santé, la salubrité et la dignité.

C’est la vie qui est au cœur de la reconnaissance et de la mise en œuvre effective du droit à l’eau. Celle des hommes, des animaux, de la végétation… en un mot celle de notre planète.

● Paris accueille la Conférence sur le Climat (COP 21) du 30 novembre au 11 décembre 2015.

Si les sujets de la transition énergétique et de l’émission de gaz à effet de serre font l’objet de multiples débats, la place de l’eau y est par contre moins prépondérante.

Pourtant, l’eau est la première concernée par le réchauffement climatique. Les changements climatiques sont aussi des changements aquatiques.

En effet, l’eau est le principal vecteur par lequel les effets du dérèglement climatique se font sentir : baisse de la pluviométrie (de 10 à 30 % dans des populations de latitude intermédiaire), intensification des catastrophes naturelles (inondations, sécheresses), fonte des glaces, variation des débits des cours d’eau, élévation du niveau des mers...

Le dérèglement climatique est un révélateur et un accélérateur des tensions actuelles sur les ressources en eau.

L’eau facile est devenue fragile.

L’eau menacée peut à son tour devenir menaçante et causer des ravages. Et les menaces sur l’eau sont aussi des menaces sur notre capacité à assurer les besoins fondamentaux liés aux écosystèmes, à la qualité de la ressource, à la santé publique, à l’alimentation… mais aussi à l’accès pour tous à l’eau potable. C’est-à-dire à tous les aspects du développement.

C’est un des grands défis de ce siècle.

● En 2010, les Nations Unies ont reconnu le droit à l’eau potable et à l’assainissement comme un droit de l’homme. Le Forum Mondial de l’Eau qui s’est tenu en Corée en 2014 et auquel votre Rapporteur a eu l’honneur de participer et de représenter l’Assemblée nationale, avait aussi retenu ce thème pour ses débats.

Mais force est de constater que l’accès à l’eau potable est loin d’être une réalité pour tous.

Quelques chiffres fournis par l’ONU suffisent à nous en convaincre et à situer les enjeux. En effet, 800 millions de personnes n’ont pas accès à l’eau. Près de 2 milliards de personnes n’ont pas d’autre choix que de boire de l’eau que l’on peut qualifier de dangereuse, « soit en raison de ses conditions d’utilisation (par exemple si elle est partagée avec des animaux ou d’autres sources de contamination), soit parce qu’elle est reconnue comme insalubre » ! Et si l’on ajoute ceux dont la qualité de l’eau consommée est incertaine, ce sont entre 3 et 4 milliards de personnes qui boivent de l’eau douteuse, soit une personne sur deux ! Autrement dit, la moitié de l’humanité n’a pas un accès satisfaisant à de l’eau potable. (2)

De plus, 2,2 milliards de personnes manquent d’un assainissement permettant une vie digne.

Dans les pays en développement, 90 % des eaux usées domestiques et industrielles sont rejetées sans traitement. 2,6 millions de personnes meurent chaque année des suites de maladies liées à l’absence ou à la mauvaise qualité des eaux (soit 7 000 personnes qui décèdent chaque jour, dont 5 000 enfants de moins de 15 ans). (3)

Malheureusement cette situation risque de s’aggraver sous l’effet de plusieurs facteurs :

– le réchauffement climatique : le GIEC estime qu’en 2035, 40 % de la population mondiale vivra dans des régions soumises au stress hydrique ;

– la croissance démographique : nous serons 9 milliards d’habitants en 2050 avec une forte augmentation dans les régions qui souffrent déjà de déficit hydrique (en Afrique : la population va doubler d’ici 2050) ;

– l’urbanisation : dans 10 ans, la population mondiale sera urbaine pour plus des deux tiers.

● Assurer l’accès à l’eau pour tous est un objectif fondamental. C’est un enjeu de dignité, un enjeu humanitaire, social et sanitaire.

C’est aussi un enjeu de développement et une condition pour la paix : l’eau source de vie peut être aussi source de conflits.

22 millions de personnes (soit 62 000 par jour) se seraient déplacées en 2013 du fait de catastrophes naturelles (4), dont beaucoup sont liées à l’eau (inondations, sécheresses…) et il y aura 250 millions de migrants en 2050 si rien n’est fait !

Les premières actions de Daech et de Boko Haram au Moyen Orient ont consisté à confisquer l’eau. Ils profitent de la raréfaction de l’eau, des conflits climatiques et des migrations pour accroître leur pouvoir et leur terreur.

● La France est aussi concernée car le droit à l’eau n’est pas effectif pour tous.

En France, l’eau potable coule aujourd’hui, et à tout moment, au robinet de 99 % des logements, et 90 % sont raccordés à l’assainissement.

C’est une belle réussite collective que l’on oublie souvent.

Mais pour autant, le droit à l’eau n’est pas effectif pour tous.

– D’abord pour les personnes démunies qui ont du mal à payer leur eau. Près d’un million de ménages n’ont accès à l’eau qu’à un prix considéré comme excessif par rapport à leurs revenus. Un consensus existe pour considérer que le coût est excessif lorsque la facture dépasse 3 % des revenus.

– Le droit à l’eau n’est pas effectif non plus pour plus de 100 000 personnes qui n’ont pas un accès direct ou permanent à l’eau et à l’assainissement : SDF, personnes vivant en habitat précaire…

Ces chiffres sont malheureusement en augmentation, comme l’ont souligné, au cours des auditions que votre Rapporteur a menées, le CNLE (Comité national de lutte contre l’exclusion) et l’Observatoire national de lutte contre la pauvreté. Huit millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté. Et le socle de la pauvreté, c’est bien le logement et les charges afférentes (énergie et eau essentiellement) qui peuvent atteindre 25 % à 40 % de leurs revenus.

● Depuis une douzaine d’années, de nombreux rapports et travaux parlementaires ont mis l’accent sur « les lacunes du droit à l’eau pour tous » en France.

C’est le cas notamment du Conseil d’État qui souligne dans son rapport « L’eau et son droit » (2010) que « le droit à l’accès à l’eau [en France] se réduisant pour le moment à un droit à l’aide en cas d’impayé [via les CCAS ou les FSL] et à un encadrement de la coupure d’eau, il ne comporte pas, hormis à travers l’allocation logement, de traitement préventif [des] difficultés » de paiement de la facture du service d’eau et d’assainissement, dans un contexte social de plus en plus difficile pour certains ménages.

Le Conseil d’État recommandait aussi « d’obliger les communes à rouvrir des points d’eau collectifs, accessibles aux sans-abri, pour que ceux-ci puissent satisfaire leurs besoins d’alimentation et d’hygiène dans des conditions économiques acceptables ».

Ces recommandations avaient également été présentées par le Conseil économique, social et environnemental en 2009, et ont été reprises par le Comité national de l’eau (CNE), le Commissariat général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) en 2011 (5), par l’Académie de l’eau (Henri Smets, 2013) et par plusieurs parlementaires dont les députés Daniel Marcovitch (6), André Flajolet (7), Marie-George Buffet (8), Jean Glavany (9) et le sénateur Christian Cambon (10).

La « loi Brottes » du 15 avril 2013 (11) dans son article 28 a rendu possible le financement des aides au Fonds de solidarité pour le logement (FSL) par le budget propre des collectivités et l’expérimentation d’une tarification différenciée. Elle a aussi interdit toute coupure d’eau (voir pages 38-40 du présent rapport).

Votre Rapporteur tient à souligner aussi que la présente proposition de loi est l’aboutissement d’une réflexion menée depuis près de trois ans avec de nombreuses associations et ONG humanitaires, caritatives et environnementales regroupées au sein d’une plateforme coordonnée par la Fondation France Libertés et la Coalition Eau (12). L’OBUSSAS (Observatoire des usagers de l’assainissement en Île-de-France), Henri Smets et l’Académie de l’eau ont également réalisé d’importants travaux sur le sujet. Votre Rapporteur les remercie pour leur participation. Tous les acteurs de l’eau ont été associés à la réflexion et leurs points de vue ont été précieux.

Cette élaboration partagée explique aussi que cette proposition de loi soit aujourd’hui signée par plusieurs parlementaires, dans le cadre d’une démarche transpartisane, ce dont votre Rapporteur se félicite.

La proposition de loi s’articule ainsi autour de quatre points forts :

– l’indispensable reconnaissance du droit à l’eau potable et à l’assainissement pour tous (article premier) ;

– l’accès à l’eau et à des équipements sanitaires dans l’espace public (article 2) ;

– la création et le financement d’une aide préventive pour l’eau (articles 3 à 6) ;

– la nécessaire mobilisation des collectivités sur les territoires (article 7).

I. L’INDISPENSABLE RECONNAISSANCE DU DROIT DE L’HOMME À L’EAU (ARTICLE PREMIER)

L’article L. 210-1 du code de l’environnement, issu de l’article 1er de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques, dite « LEMA » prévoit que « chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d’accéder à l’eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous ». Mais les modalités de mise en œuvre n’ont jamais été réellement définies.

Au plan international, la France a adopté les résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies du 26 juillet 2010 et du 18 décembre 2013 qui ont reconnu que « le droit à l’eau potable et à l’assainissement est un droit fondamental, essentiel à la pleine jouissance de la vie et à l’exercice de tous les droits de l’homme ».

Dans l’article 1er de la proposition de loi, le droit à l’eau est traduit en trois exigences : celle que chaque être humain dispose chaque jour d’une quantité suffisante d’eau potable pour répondre à ses besoins élémentaires, celle de disposer ou d’accéder aux équipements lui permettant d’assurer son hygiène, son intimité et sa dignité, et celle d’utiliser les services et réseaux d’eau et d’assainissement dans des conditions compatibles avec ses ressources.

L’enjeu en France est donc d’aider les plus démunis à payer leur facture d’eau et d’apporter des réponses concrètes à ceux qui n’ont pas d’accès direct à l’eau ou vivent dans des habitats précaires.

Concernant cet article 1er, votre Rapporteur a proposé un amendement supprimant la mention « de l’homme », d’une part parce que le droit à l’eau concerne évidemment les femmes et les hommes, d’autre part parce que la création d’un nouveau « droit de l’Homme » se fait au niveau constitutionnel ou international. En l’occurrence, le droit à l’eau résulte des conventions internationales auxquelles la France est État partie.

De plus, la loi française ne reconnaît de droits qu’aux personnes et la mention « de l’Homme », ou « humain » n’est donc pas appropriée au niveau de la loi ordinaire.

Il est ainsi proposé de ne pas retenir les termes « garanti par l’État » qui avaient été introduits dans la même logique que la « loi DALO » sur le droit au logement (13) car, comme le soulignait le Conseil d’État dans son rapport de 2010 la question « Qui est le débiteur du droit à l’eau ? » demeure juridiquement complexe : l’État central, un État fédéré, une collectivité, un fournisseur privé ? Est-ce que ça peut être l’État dans la mesure où la compétence en la matière lui échappe dans l’ordre interne au profit des collectivités comme en France ? ».

Pour votre Rapporteur, au-delà des mots, l’essentiel est bien de s’attaquer aux vrais problèmes posés par l’accès universel à l’eau, d’en définir la portée, les contenus et les moyens et que le droit à l’eau soit réellement mis en œuvre au profit des plus démunis.

II. L’ACCÈS À L’EAU ET À DES ÉQUIPEMENTS SANITAIRES DANS L’ESPACE PUBLIC (ARTICLE 2)

L’article 2 de la proposition de loi prévoit l’obligation pour les collectivités territoriales d’installer et d’entretenir des équipements sanitaires pour les personnes les plus vulnérables non raccordées au réseau.

Comme l’ont montré de nombreux rapports (dont, récemment, le vingtième rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre sur l’état du mal-logement en France), trop de personnes vivent encore dans des conditions inhumaines. Il s’agit d’environ 200 000 personnes sans domicile fixe ou vivant dans des conditions précaires, voire indignes.

L’article 2 de la proposition de loi prévoit l’obligation, pour toutes les communes, d’installer et d’entretenir des points d’eau potable d’accès public gratuit et non discriminatoire.

Pour les communes de plus de 3 500 habitants, cet article prévoit des toilettes publiques gratuites et, pour celles de plus de 15 000 habitants, des douches publiques gratuites pour les personnes vulnérables avec possibilité de leur donner accès à des douches existantes utilisées par le public.

Ces dispositions nouvelles sont largement approuvées par de nombreux acteurs, car elles répondent à un véritable besoin pour les personnes non raccordées au réseau.

Outre l’aspect économique, l’absence d’accès physique à l’eau reste une réalité pour certaines catégories de la population, principalement les personnes ne disposant pas d’un domicile fixe (personnes sans abri, habitat mobile, gens du voyage…).

Rappelons que dans son rapport de 2010, intitulé « L’eau et son droit », le Conseil d’État recommandait déjà d’obliger les communes à rouvrir des points d’eau collectifs, accessibles aux sans-abri.

Aujourd’hui de nombreuses associations font le constat de l’absence de points d’eau ou de toilettes publiques dans certaines villes de France.

En mars 2012, à l’initiative du Comité national de l’eau, le ministère chargé de l’Écologie, en partenariat avec l’Association des maires de France, a publié un guide de bonnes pratiques pour favoriser l’accès à l’eau potable et à l’assainissement pour les plus démunis : réouvertures des fontaines publiques, installation de points d’eau, maintien de l’accès à l’eau dans les squats, ouverture de bains douches, installation de toilettes publiques, douches ambulantes…

Votre Rapporteur a souhaité examiner plus en détail ces propositions.

1. La proposition de loi prévoit que toutes les collectivités donnent aux personnes non raccordées à un réseau d’alimentation en eau la possibilité de s’alimenter gratuitement en eau potable à un point d’eau situé sur leur territoire.

Chaque habitant pourrait donc se rendre au point d’eau et y puiser de l’eau potable, comme c’était le cas historiquement.

C’est un enjeu encore plus important en période caniculaire (accès à l’eau pour tous dans des circonstances exceptionnelles).

Une telle mesure est déjà mise en œuvre sur une grande échelle puisqu’existent dans la plupart des municipalités des bornes-fontaines, des fontaines à boire, des points d’eau dans les cimetières (ou d’autres lieux) et des alimentations de bornes d’incendies. À Paris, il y a plus de 1 200 points d’eau, plus de 400 toilettes publiques et plus de 18 bains douches (14).

Si ce n’est pas le cas, cette proposition est assez facile à mettre en œuvre puisque chaque mairie en France, à quelques exceptions près, est déjà alimentée en eau potable. La dépense principale sera donc liée au fait que la municipalité devra payer l’eau consommée par les exclus (ceux qui se seront déplacés), au prix moyen en France de 4 € le mètre cube.

Le nombre de personnes potentiellement concernées est de l’ordre de 150 000.

Soulignons que le Comité national de l’eau faisait la même proposition en 2011 (15) mais en limitant cette obligation aux municipalités de plus de 1 000 habitants. Étaient donc exclues du dispositif 27 400 communes (soit 9,5 millions d’habitants). On notera que l’économie faite par l’exclusion des plus petites communes serait très faible car il n’y a que peu d’exclus de l’eau dans les secteurs ruraux. Dans ce cas il ne semble pas nécessaire de limiter l’obligation de créer des points d’eau aux seules communes de plus de 1 000 habitants.

Rappelons que la « loi Besson » du 5 juillet 2000 (16) et son décret d’application du 29 juin 2001 relatif à l’accueil et l’habitat des gens du voyage impose aux communes de plus de 5 000 habitants de mettre à disposition des équipements sanitaires.

2. La proposition de loi prévoit que les collectivités de plus de 3 500 habitants mettent à disposition des toilettes publiques gratuites accessibles à toute personne.

Soulignons que cette obligation présente un intérêt pour toutes les personnes (y compris les touristes) et pas seulement les personnes exclues. C’est un enjeu social mais aussi de santé, d’hygiène, et de salubrité publique. En France, 9 800 communes sur 36 600 ont plus de 3 500 habitants.

Pour évaluer le coût de la mise en œuvre, il faudrait disposer de statistiques sur le nombre de toilettes publiques existantes afin de déterminer le nombre de toilettes supplémentaires à installer pour satisfaire à l’obligation prévue par la proposition de loi. Les seules statistiques disponibles concernent les grandes villes.

DENSITÉ DE TOILETTES PUBLIQUES

Villes de plus de 150 000 habitants

Population

Nombre de toilettes publiques

Ratio habitants/toilettes

Paris

2 243 000

401

5 500

Marseille

851 000

18

47 300

Lyon

484 000

200

2 420

Toulouse

441 000

61

7 200

Nice

343 000

11

30 900

Nantes

285 000

53

5 320

Strasbourg

272 000

15

18 100

Montpellier

257 000

5

51 400

Bordeaux

239 000

77

3 100

Lille

227 000

15

15 100

Rennes

207 000

83

2 590

Reims

180 000

35

5 140

Le Havre

175 000

42

4 160

Saint-Etienne

(171 000)

n.c

n.c

Toulon

164 000

15

10 900

Grenoble

155 000

72

2 150

Dijon

151 000

51

5 800

TOTAL 16 villes

6 674 000

1 158

5 800

Source : « Palmarès 2014 des villes durables », Terraeco.net, 27 février 2014.

On observe que les grandes villes font fonctionner entre une toilette publique pour 2 100 habitants et une toilette publique pour 51 400 habitants.

La moyenne sur 16 grandes villes est d’une toilette pour 5 800 habitants.

Le coût de l’équipement est très variable en fonction des modèles choisis : entre 15 000 € et 20 000 € par an (investissement et entretien) pour des toilettes automatiques de type Decaux et quelques milliers d’euros pour des toilettes moins coûteuses dans le style des toilettes de chantier ou de celles utilisées pour les événements temporaires.

Pour les collectivités locales, il est aussi possible d’utiliser des toilettes existantes (terrains de sport, centres d’hébergement et de réinsertion sociale, centres d’hébergement d’urgence, centres d’accueil de jour, etc.) Au Royaume-Uni des subventions sont accordées à des entreprises privées mettant déjà des toilettes à disposition de leurs clients afin d’ouvrir au public en général l’accès à ces toilettes (Community toilet scheme).

3. La proposition de loi prévoit que les collectivités de plus de 15 000 habitants mettent à disposition des douches publiques gratuites pour les personnes vulnérables.

Il peut s’agir de douches municipales ou de douches situées dans des établissements sous contrat avec la municipalité, par exemple dans des complexes sportifs, des piscines, les centres d’accueil de jour…

Selon une enquête réalisée par Médecins du monde en 2014, il n’y aurait en France qu’une trentaine de villes avec des bains douches municipaux. Mais grâce à la présence d’établissements sous contrat, aucun investissement nouveau ne serait nécessaire pour mettre en œuvre la proposition de loi car de telles douches existent déjà dans toutes les municipalités de plus de 15 000 habitants. Il faudra sans doute trouver les modalités d’utilisation avec les gestionnaires de ces établissements (par exemple des heures réservées aux personnes démunies).

La gratuité d’accès aux douches pour les personnes les plus vulnérables (évaluées à 150 000) impliquerait aussi, par exemple que les centres communaux d’action sociale (CCAS) leur offrent un ticket d’accès chaque semaine. Si un ticket coûte 2 €, les CCAS doivent prévoir une dépense de 104 € par personne (2 € x 52 semaines). En réalité, le surcoût global induit par la proposition de loi sera nettement plus faible car les douches sont déjà gratuites dans de nombreux cas (comme à Paris, Lyon, Reims, Nantes par exemple) du fait des systèmes sociaux en place.

III. LA CRÉATION ET LE FINANCEMENT D’UNE AIDE PRÉVENTIVE (ARTICLES 3, 4, 5 ET 6)

Les articles 3, 4, 5 et 6 concernent la création et le financement d’une allocation forfaitaire d’eau pour les personnes raccordées au réseau et qui sont en situation de précarité.

Votre Rapporteur a tenté de répondre à trois questions importantes :

Pourquoi une allocation de ce type ? Les dispositifs actuels ne sont-ils pas suffisants ?

Quelles modalités, quels publics visés ?

Quel est son coût et comment en assurer son financement ?

A. LA PERTINENCE DE LA CRÉATION D’UNE ALLOCATION DE SOLIDARITÉ PRÉVENTIVE (ARTICLE 3)

Votre Rapporteur considère que la création d’une allocation de solidarité est indispensable, d’une part parce que la précarité liée au logement et au paiement des charges afférentes (eau, énergie) est réelle pour plus d’un million de personnes (et elle ne cesse d’augmenter), et d’autre part parce que les réponses apportées jusqu’à présent par le législateur ont porté uniquement sur le traitement curatif à travers la prise en charge des impayés (par les CCAS ou les FSL).

Ce constat est largement partagé (Conseil d’État, Cour des comptes, CGEDD, CNE, Académie de l’eau…). Il découle de plusieurs observations.

1. Les limites du dispositif FSL

Les Fonds de solidarité pour le logement (FSL) ont été institués par la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement. Les FSL relèvent désormais des conseils départementaux depuis la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

Les FSL rencontrent aujourd’hui plusieurs limites :

● Ce dispositif d’aide sociale est extrêmement hétérogène sur l’ensemble du territoire que ce soit au niveau des partenariats mis en œuvre (y compris en termes de financement), des modalités et critères d’intervention ou encore des aides apportées. Il est de plus en plus aléatoire avec des politiques de « stop-and-go » trop fréquentes.

● Un caractère inégalitaire : dans un quart environ des départements français, il n’y a pas de volet « Eau » du FSL et, dans ceux qui le possèdent il n’y a pas toujours réellement de « versement eau ».

Quand les volets « Eau » des FSL sont abondés, les montants disponibles pour faire face aux impayés sont parfois insuffisants, alors même que nombre de foyers en difficulté n’osent pas en faire la demande.

● Une gestion lourde : pour 2,5 millions d’euros d’abandon de créances, les coûts de gestion seraient supérieurs à 2 millions d’euros. La lourdeur de cette prise en charge a posteriori ne permet pas d’apporter des réponses rapides et pérennes et comporte un surcoût important (poursuite des impayés, etc.).

● Une relative inefficacité : le FSL ne touche qu’un nombre limité de personnes par rapport aux besoins réels. Il est estimé que plus de 50 % des personnes qui pourraient y prétendre ne font pas la demande. Sur 500 000 ménages bénéficiant d’un échéancier de paiement pour l’eau, seulement 70 000 seraient aidés par les FSL.

● Une grande majorité des personnes les plus démunies vivent en habitat collectif où, très souvent, il n’existe pas de facturation individuelle de l’eau potable. Cette dernière est intégrée dans les charges locatives ou de copropriété et n’est individualisée que dans une minorité de cas. La saisine du FSL est alors difficile, car la personne n’a pas de facture d’eau impayée.

● Un caractère stigmatisant : la procédure de demande est souvent considérée comme humiliante pour les ayants droit, ce qui explique le taux élevé de non-recours.

● Une solidarité défaillante : la solidarité nationale, qui devrait primer dans le domaine de l’eau, n’existe pas et, dans les faits, de nombreuses associations caritatives interviennent de plus en plus dans les situations les plus dramatiques. À titre d’illustration, il a été signalé à votre Rapporteur par l’OBUSASS que l’habitat francilien étant constitué principalement de logements collectifs et de copropriétés, les impayés d’eau sont noyés dans les impayés de charges et sont compensés par la solidarité des autres habitants. Dans les quartiers socialement défavorisés, les pauvres paient pour les beaucoup plus pauvres. L’exposé des motifs de la proposition de loi présentée en 2010 par le député André Flajolet soulignait déjà que l’intervention du FSL, « nécessaire pour apporter une réponse aux situations les plus complexes ou aux accidents de la vie, ne permet pas d’assurer une mise en œuvre complète et équitable de ce droit d’accès à l’eau au niveau national ».

En définitive, les systèmes d’aides actuels, qui ont bien sûr le mérite d’exister, demeurent ponctuels, limités et s’inscrivent dans une logique uniquement curative de soutien aux seuls impayés et toujours sur demande de l’usager. Facultatifs au niveau des territoires, ces mécanismes demeurent soumis au bon vouloir des autorités locales.

Un système de soutien préventif à la facture d’eau est donc devenu nécessaire. Celui-ci doit pouvoir relever de la solidarité nationale au même titre que le droit au logement et à l’énergie.

2. La « loi Brottes » et les expérimentations sur les territoires sont-elles suffisantes ?

La loi du 15 avril 2013 précitée (dite « loi Brottes ») comporte diverses dispositions concernant l’eau, sa tarification (article 28) ainsi que sur les coupures d’eau.

Elle permet une expérimentation sur les territoires pouvant inclure « la définition de tarifs tenant compte de la composition ou des revenus du foyer, l’attribution d’une aide au paiement des factures d’eau ou d’une aide à l’accès à l’eau en application de l’article L. 210-1 du code de l’environnement ».

Pour la mise en œuvre de l’expérimentation, les collectivités territoriales et leurs groupements compétents en matière d’eau et d’assainissement sont autorisés à déroger :

– aux dispositions de l’article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales, les communes ou leurs groupements concernés par l’expérimentation pouvant contribuer à son financement en prenant en charge dans leur budget propre tout ou une partie du montant de l’aide attribuée par le service pour le paiement des factures d’eau des foyers en situation de précarité ou ayant des difficultés de paiement de leurs factures d’eau ;

– au montant maximal de la subvention attribuée au fonds de solidarité pour le logement, prévue à l’article L. 2224-12-3-1 du même code, qui ne peut excéder 2 % des montants hors taxes des redevances d’eau ou d’assainissement perçues. La loi précise qu’« à défaut d’intervention du fonds de solidarité pour le logement, le versement est réalisé au centre communal ou intercommunal d’action sociale pour la durée de l’expérimentation. »

Il faut souligner que plusieurs collectivités en France se sont déjà engagées depuis plusieurs années dans la mise en place d’une tarification différenciée de l’eau (Niort, Libourne, Dunkerque, etc.). Les difficultés ont été nombreuses.

Ici encore, nous sommes sur le registre de la mise en place de dispositifs locaux et non dans le cadre d’un dispositif de solidarité nationale applicable sur tout le territoire.

Seule une cinquantaine de collectivités ont décidé de s’engager dans cette démarche alors qu’on compte en France 24 000 services publics de l’eau et de l’assainissement.

L’évaluation de ces expérimentations n’interviendra qu’après 2020. La lutte contre la précarité est urgente, et doit s’appliquer sur l’ensemble du territoire national.

C’est ce que propose la proposition de loi : un dispositif de solidarité nationale créant une allocation forfaitaire, à caractère préventif, valable sur tout le territoire national.

De plus, la proposition de loi est complémentaire de la « loi Brottes ». Mieux, elle la conforte en demandant dans son article 7 que les collectivités organisatrices des services publics de l’eau et de l’assainissement s’impliquent dans la mise en œuvre du droit à l’eau pour tous en organisant un débat en leur sein dans les trois ans suivant le renouvellement général de leurs instances et en fournissant un rapport comprenant une description des actions menées au plan local pour la mise en œuvre du droit à l’eau en particulier sur les enjeux liés à la tarification.

3. La tarification progressive de l’eau est-elle sociale ?

Encourager aux économies d'eau et lutter contre les gaspillages sont des objectifs partagés par tous. Aussi, dans la logique de dissuasion de consommation, la tentation peut exister d'augmenter le prix de l'eau par paliers (tarification progressive). Les premiers m3 correspondant à la consommation irréductible, essentielle, seraient gratuits ou vendus à un tarif très faible. Les m3 supplémentaires, volumes utiles et de confort, voire superflus, feraient l'objet de tarifications plus fortes.

La pertinence de cette approche séduisante au premier abord suscite des avis très divergents. Sa mise en place s’avère délicate au vu de ses effets complexes et controversés en matière sociale.

● En effet, cette tarification ne va pas nécessairement dans le sens de la justice sociale et de l’équité citoyenne. Ce n’est pas parce que l’on est pauvre que l’on consomme moins. À revenus différents mais à consommation égale, une tarification progressive n’avantage pas les revenus modestes.

● Ensuite, au-delà des conséquences individuelles, l'équilibre financier global d'un tel dispositif risque de faire supporter l'essentiel de la prise en charge de la consommation des premières tranches (gratuites ou à tarif réduit) par les consommateurs « moyens » relevant de la consommation des tranches suivantes. Dans le cas de figure où les 40 premiers litres seraient gratuits ou à tarif réduit, ce seraient les familles de 4 à 5 personnes et plus qui supporteraient l'essentiel de la péréquation, que ce soit au profit des plus démunis ou des personnes aisées.

● La Ville de Paris a considéré qu'une tarification progressive serait inadaptée en zone urbaine dense où prédominent les abonnements collectifs car elle pénaliserait les familles nombreuses et avantagerait indifféremment tous les célibataires, quels que soient leurs revenus, sans aucun effet redistributif envers les plus démunis. La ville a donc opté pour des aides préventives et curatives.

● La tarification progressive n'est envisageable et pertinente que si elle est établie en fonction de la composition du foyer et du nombre de personnes dans un ménage.

Il apparaît alors nécessaire de procéder à un recensement précis, régulier, récurrent, ce qui est difficile et peut être perçu comme inquisitorial. Faut-il faire varier le tarif à chaque naissance, divorce, départ d'un enfant, hébergement d’un proche ?

● Les solidarités familiales et sociales risquent de se trouver elles aussi taxées : les foyers qui accueillent, pour les dépanner, des jeunes (ou des moins jeunes) en les hébergeant quelque temps ou qui prennent soin de parents âgés plusieurs mois dans l'année se verraient alors appliquer un prix de l'eau supérieur.

● Une tarification progressive taxant plus fortement les consommations dites importantes ou excessives pourrait générer des effets pervers.

Elle pourrait conduire, pour réduire les volumes d'eau consommés et donc facturés, au recours à de multiples techniques alternatives qui, prises individuellement paraissent louables mais qui, cumulées, peuvent avoir des effets négatifs sur la ressource globale en eau. Il peut s'agir des pompages dans les ruisseaux ou de l'exploitation de puits individuels dont la multiplication dans la même nappe phréatique limiterait sa possibilité de renouvellement.

● De plus, la multiplication de ces initiatives individuelles non contrôlées peut éloigner de l'objectif d'équité sociale, de l'idée de l'eau bien commun et donc de la démarche de solidarité, de partage, de péréquation, en matière de service public de l'eau. Le service se trouverait alors pris en charge financièrement par un nombre moindre d'usagers, parmi lesquels les moins favorisés.

● Au niveau technique, s'il est possible d'appliquer sans difficulté la tarification progressive à des usagers résidant en habitat individuel, titulaires d'un contrat, il n'en est pas de même pour des usagers résidant en copropriété ou en habitat social avec un contrat collectif.

Elle implique la pose de compteurs individuels dans chaque logement d'un immeuble collectif. Plusieurs exemples soulignent que ceci n'est pas toujours facile car tous les appartements ne sont pas conçus pour recevoir un compteur individuel d’eau en immeuble collectif. Ils ont parfois deux voire trois colonnes d’eau qui alimentent la prise d'eau.

Il apparaît que ce qui peut être aisé à réaliser avec l'électricité et la pose de compteurs individuels l'est moins avec l'eau car les réseaux électriques et les canalisations d'eau n'ont sur ce plan rien en commun.

B. L’ALLOCATION FORFAITAIRE D’EAU POUR LIMITER LA FACTURE À 3 % MAXIMUM DU REVENU (ARTICLE 3)

● L’objectif unanimement reconnu en France et dans d’autres pays est de limiter la charge de la facture d’eau et d’assainissement au niveau maximum de 3 % du revenu des ménages (pour l’énergie - éclairage et chauffage – le niveau de dépenses excessives est évalué à 10 % du revenu).

Toutes les auditions réalisées par votre Rapporteur ont permis de constater qu’en France cet objectif fait consensus. Il a été retenu par le Comité national de l’eau ; c’est le pourcentage retenu dans les propositions de loi précédentes de M. André Flajolet et de Mme Marie-George Buffet ; il a été soutenu par la Coalition Eau dès 2009, par l’OBUSASS, par la Confédération nationale du logement (CNL), l’Union des associations familiales (UNAF), l’association Consommation, logement et cadre de vie (CLCV), la Fondation Abbé Pierre, le CGEDD. Il correspond aussi aux pratiques observées en Europe (il a été utilisé pour la première fois au Royaume-Uni en 1998).

Rappelons que la dépense moyenne annuelle d’un ménage pour l’eau et l’assainissement est de 480 € hors taxes et redevances (montant calculé sur la base d’une consommation de 120 m3 facturée en moyenne 4 €/m3).

Pour que le principe de l’allocation de solidarité soit facilement mis en œuvre, il était souhaitable d’appliquer des principes simples et lisibles d’éligibilité.

Une gestion individualisée par rapport aux revenus de chaque ménage se heurterait à des problèmes complexes de moyens et de coût de mise en œuvre.

● Pour mettre en œuvre l’allocation de solidarité la proposition de loi propose donc qu’elle soit attribuée « automatiquement » aux bénéficiaires d’allocations sociales (couverture maladie universelle complémentaire et « RSA socle »). En 2015 le RSA socle correspond à un revenu de 524,16 € pour une personne seule et de 786,24 € pour un couple.

Il ne sera pas demandé si le ménage a ou non un contrat de fourniture d’eau, ni le nombre de personnes à charge puisque le RSA varie déjà avec celui-ci. Le distributeur informera l’organisme distribuant les allocations sociales du prix de l’eau et de l’assainissement correspondant à divers niveaux de consommation pour un usager domestique habituel de son périmètre d’intervention.

● Combien de ménages seraient concernés par l’allocation forfaitaire ?

La proposition de loi définit comme titulaire du droit à une aide financière préventive pour l’eau toute personne qui doit dépenser plus de 3 % de ses ressources afin de disposer de l’eau nécessaire pour satisfaire ses besoins élémentaires (article 3, alinéa 3).

Si cette définition fait consensus, elle ne figure pour l’instant dans aucun texte juridiquement obligatoire en France.

Concrètement, le nombre de bénéficiaires de l’allocation de solidarité sera inférieur au nombre de bénéficiaires de la CMU-C puisque l’allocation ne sera pas versée dans les zones où l’eau est bon marché. En 2014, 5,1 millions de personnes bénéficiaient de la CMU-C soit 7,7 % de la population. En métropole, il y avait 4,5 millions de bénéficiaires, soit 7 % de la population.

Compte tenu de la taille moyenne des ménages, près de 2,6 millions d’entre eux seraient potentiellement concernés. Comme une partie vit dans des zones de prix faible de l’eau, le nombre de bénéficiaires de l’allocation de solidarité sera plus faible. Le nombre exact dépendra des dispositions du décret de mise en œuvre.

Au final, environ un million de ménages serait concerné sur les 28 millions de ménages français.

● Pour identifier les ménages, il faudrait disposer d’une bonne estimation des ressources de chacun, de la composition du ménage concerné et du prix de l’eau et de l’assainissement dans chacun des services publics.

En attendant de disposer de ce genre d’information, la proposition de loi propose de créer une allocation de solidarité pour l’eau qui sera calculée de manière forfaitaire pour satisfaire approximativement à l’objectif des 3 % des revenus. Du fait que le prix de l’eau varie dans de très larges proportions selon les lieux, il est nécessaire de tenir compte des situations locales.

C. LE MONTANT DE L’ALLOCATION FORFAITAIRE (ARTICLE 4)

L’allocation de solidarité pour l’eau variera en fonction du prix de l’eau.

L’allocation de solidarité tient compte du fait que les ménages ont des revenus très différents et doivent payer pour l’eau des prix qui varient dans une fourchette de 1 à 7. Pour simplifier, votre Rapporteur a choisi de créer une allocation de solidarité pour l’eau exprimée en pourcentage du RSA socle et calculée forfaitairement de sorte que la dépense d’eau et d’assainissement d’un ménage, compte tenu de l’allocation de solidarité reçue, ne dépasse pas environ 3 % de ses revenus. Les caisses d’allocations familiales (CAF) sont en mesure de fournir les informations nécessaires sur les ménages appartenant à diverses catégories de revenus tandis que les distributeurs peuvent fournir les informations sur le prix de l’eau.

Cette allocation de solidarité est forfaitaire et son montant varie avec le revenu et le prix de l’eau et de l’assainissement. Elle est versée uniquement aux personnes dont les revenus sont inférieurs au plafond de la CMU-C et qui vivent dans une commune où le prix de l’eau et de l’assainissement est supérieur à un niveau fixé par décret. Le montant de l’allocation est doublé si le prix de l’eau est anormalement élevé, et est divisé par deux pour les personnes dont les revenus sont compris entre le RSA socle et le plafond de la CMU-C (17).

Comme l’allocation est exprimée en pourcentage du RSA, elle varie avec la taille du ménage. Ce pourcentage prend l’une des quatre valeurs fixées par décret.

Les personnes qui n’appartiennent pas aux catégories des titulaires de la CMU-C ou des bénéficiaires du RSA Socle ne sont pas prises en compte même si elles sont très démunies. Ceci nécessitera d’envisager d’autres modalités d’intervention à leur égard.

La proposition de loi pourrait être améliorée si elle prévoyait que les CCAS peuvent ajouter sur la liste des bénéficiaires les personnes qui ont été « oubliées », mais qui selon les CCAS ont des revenus équivalents (inférieurs au plafond de la CMU-C ou inférieurs ou égaux au montant du RSA socle).

Une autre solution serait de verser l’allocation de solidarité à toutes les personnes dont le revenu fiscal de référence est inférieur à un certain seuil, sur le modèle du chèque énergie, le seuil variant avec le prix de l’eau. Cette solution pourrait être mise en œuvre lorsque le chèque énergie sera opérationnel.

Le montant envisagé pour l’allocation de solidarité est une fraction du RSA socle (celui-ci s’élève à 524 € par mois en 2015). Son montant, de l’ordre de 1 %, sera fixé par décret et devrait être d’environ 60 € par an pour une personne seule et d’environ le double pour une famille de 4 personnes.

Pour une personne seule ayant un revenu mensuel de 500 €, la dépense d’eau (50 m3 par an) dépasse 3 % des revenus dès que le prix de l’eau dépasse 3,6 €/m3 (car alors la dépense dépasse 15 € par mois ou 180 € par an).

Si le prix de l’eau atteint 4,5 €/m3, la dépense d’eau est de 225 €, soit 3,75 % du revenu. Grâce à une allocation de solidarité de 1 % du RSA socle (5,14 €/mois ou 61,68 €/an), la dépense d’eau est réduite à 163,32 € ou 2,72 % du revenu.

Si cette personne habite dans une région où l’eau est très chère (6 €/m3), sa dépense annuelle d’eau sera de 300 € et son allocation de solidarité serait doublée (123,36 €). Finalement sa dépense d’eau après déduction de l’allocation serait de 176,54 € ou 2,9 % de son revenu.

Les droits à une allocation de solidarité sont calculés sur la base d’une consommation forfaitaire de 50 m3 par an pour une personne. Dans le cas d’une famille, le calcul prend en compte le nombre d’unités de consommation du ménage. Ainsi une famille de 4 personnes a droit à une allocation calculée sur la base de 105 m3 par an.

À titre d’exemple, le dispositif d’octroi de l’allocation de solidarité pourrait prendre la forme suivante :

Montant de l’aide préventive selon que le prix de l’eau est :

Si l’usager fait partie des ménages qui perçoivent des revenus :

Inférieurs ou égaux au RSA « socle »

Entre le RSA « socle » et le plafond pour la CMU-C

Plus élevés que le plafond CMU-C

Inférieur à 4 euros / m3

0

0

0

Compris entre 4 et 6 euros/m3

1 % du RSA« socle », soit environ 60 euros

0,5 % du RSA « socle », soit environ 30 euros

0

Supérieur à 6 euros/m3

2 % du RSA « socle », soit environ 120 euros

1 % du RSA« socle »,
soit environ 60 euros

0

Limiter la charge de la facture d’eau au niveau maximum de 3 % du revenu implique au plan national la mobilisation d’un montant annuel d’environ 50 millions d’euros.

Le calcul se fonde sur les travaux menés par Henri Smets et sur les données de l’OBUSASS à partir des chiffres suivants :

– selon les chiffres du CGEDD, l’allocation de solidarité serait attribuée à environ 830 000 ménages qui paient l’eau à un prix supérieur à la moyenne nationale (4 €/m3) et ont de faibles revenus. Il s’agit d’une partie des 2 millions de ménages qui ont des revenus inférieurs au plafond de la CMU-C (18;

– l’allocation moyenne serait de l’ordre de 60 € par an par ménage bénéficiaire.

Le montant total des allocations de 50 millions d’euros est une mesure de solidarité qu’il ne doit pas être difficile d’assumer, car elle ne représente que 0,5 % des dépenses hors taxe pour les services publics d’eau et d’assainissement, 0,80 € par personne et par an (ou 1,8 € par ménage et par an) ou encore 1,35 centime d’euro/m3 d’eau.

D. LE FINANCEMENT DE L’ALLOCATION FORFAITAIRE (ARTICLE 5)

Les hypothèses de financement de l’allocation de solidarité sont multiples. Le choix a été fait de retenir une option de financement qui n’impacte pas la facture d’eau. Cette solution apparaît pertinente pour plusieurs raisons.

Dans son ouvrage sur le financement des aides pour les dépenses d’eau potable des ménages (2014), Henri Smets rappelle que celles-ci relèvent classiquement de la théorie des 3 T :

– les taxes : la fiscalité payée par les contribuables ;

– les tarifs : payés par les usagers (le prix du m3) ;

– les transferts : financement par des sources alternatives (entreprises délégataires de service public, entreprises industrielles ou commerciales, producteurs de boissons, propriétaires fonciers…).

Cette question a fait l’objet d’une analyse approfondie par votre Rapporteur suite à de multiples auditions. Les différentes hypothèses ont été examinées avec leurs avantages et leurs inconvénients.

1. Le financement par la fiscalité

La fiscalité est déjà présente dans le domaine de l’eau, en particulier par la TVA qui s’applique aux factures ou encore par les redevances appliquées sur le prélèvement d’eau.

Ainsi les agences de l’eau perçoivent chaque année plus de 2 milliards d’euros de redevances, dont 346 millions d’euros pour les redevances sur le prélèvement d’eau (75 % à la charge des collectivités locales, 21 % de l’industrie, 3,6 % pour l’agriculture).

Pour financer les 50 millions d’euros d’allocations de solidarité, nécessaires au plan national, il suffirait d’ajouter une contribution de 1,35 centime d’euros par m3 à la redevance de prélèvement ou d’augmenter la redevance pour les usagers non domestiques (qui est peu élevée).

Ainsi tous les usagers de l’eau participeraient à la solidarité nationale (sans frais supplémentaire de collecte).

Cette approche serait ainsi dans l’esprit de la « loi Oudin » (19) (le 1 % pour la coopération décentralisée).

Elle aurait par contre des inconvénients : prise en charge de la solidarité par les usagers (par la facture des services publics d’eau et d’assainissement), absence de progressivité par rapport au revenu, réduction des moyens des agences de l’eau (alors que 175 millions d’euros ont été prélevés sur les agences de l’eau en 2015).

Le financement pourrait aussi consister à fiscaliser certaines charges liées à l’eau actuellement financées en France par la facture payée par les usagers. À titre d’exemple : mettre l’assainissement à la charge des budgets municipaux et couvrir cette dépense par la taxe foncière.

Soulignons que cette approche serait contraire aux deux grands principes qui régissent la politique de l’eau et ont valeur constitutionnelle : le principe « pollueur-payeur » et le principe « l’eau paye l’eau ». Pour autant cette question du financement de l’eau par un « mix facture-fiscalité » mérite d’être posée.

S’il est logique que l’usager domestique, par sa facture, prenne en charge les coûts liés à sa consommation personnelle d’eau potable et au service d’assainissement des eaux usées, il est pertinent de s’interroger sur sa participation à d’autres charges telles que celles liées à la gestion de la ressource, aux eaux pluviales, aux inondations, à la lutte contre les pollutions, à la reconquête de la continuité écologique des cours d’eau ou encore aux ponctions sur les budgets des agences de l’eau.

Un certain nombre de ces charges liées au grand cycle de l’eau relèvent davantage de budgets publics (locaux et/ou nationaux).

Le financement des politiques de l’eau est un véritable enjeu pour les années à venir. Comme votre Rapporteur le soulignait dans le rapport d’évaluation sur la politique de l’eau qu’il a remis au Premier ministre en juin 2013 : « Un changement de paradigme est nécessaire. Il nécessite de reconsidérer l’enjeu de la durabilité et de la gestion intégrée des ressources en eau en repensant les périmètres et le financement des deux cycles de l’eau et en clarifiant dans ce nouveau cadre ce qui relève de la fiscalité (l’impôt) et ce qui relève de la facture d’eau (le tarif). ».

En ce qui concerne le droit à l’eau pour tous, soulignons que la fiscalité locale intervient pour les aides curatives par l’intermédiaire des budgets sociaux mis en œuvre au niveau communal et intercommunal (CCAS, CIAS) et au niveau départemental (FSL). Au niveau national, il n’existe pas jusqu’à présent de dispositif similaire de solidarité.

2. Le financement par l’usager

Le financement des aides par l’usager (via le tarif) et donc par le petit cycle de l’eau (c’est-à-dire par les ressources collectées au niveau des services publics de l’eau et de l’assainissement) est la solution la plus souvent mise en œuvre et inscrite dans les propositions de loi précédentes relatives à l’accès à l’eau.

Via la tarification, qu’elle soit uniforme ou différenciée, elle est donc à la charge des usagers (contribution au prorata des consommations).

Ceci demeure vrai si le financement est assuré par les services publics d’eau et d’assainissement (SPEA) ou les agences de l’eau, qui sont aussi financées par les usagers.

Depuis la « loi Brottes » de 2013, la contribution maximale autorisée des SPEA aux FSL a été portée à 2 % des redevances (au lieu de 0,5 % selon la « loi Cambon » du 7 février 2011).

II est parfois proposé, pour financer les aides préventives à l’eau, de créer un tarif différencié par catégories d’usagers : gros consommateurs d’eau (tarifs progressifs), usagers industriels ou professionnels (tarifs professionnels), usagers ayant des besoins particuliers (piscines, jardins, résidences secondaires).

Soulignons qu’une augmentation de 2 % du prix de l’eau pour les usagers non domestiques (dont la consommation représente 25 % du total) assurerait les 50 millions d’euros nécessaires à la création du fonds de solidarité pour l’eau (équivalent à 0,5 % de l’ensemble des dépenses d’eau potable et d’assainissement).

La tarification différenciée, très utilisée dans certains pays d’Amérique Latine (Brésil, Bolivie, Colombie, Costa Rica, Pérou, Uruguay), a également été mise en œuvre dans un certain nombre de collectivités françaises, mais cette approche de péréquation interne est en contradiction avec le principe d’égalité des conditions d’accès au service public de l’eau. De plus, elle est souvent soumise à la bonne volonté des territoires et aux décisions de plus de 20 000 SPEA en France.

Quant à la tarification progressive, outre le fait qu’elle dépend aussi des décisions locales, son caractère social n’est pas avéré (voir précédemment).

3. Autres sources de financement : les « transferts »

En dehors de la fiscalité (le contribuable) ou des factures d’eau (l’usager), le financement des aides peut être assuré par d’autres sources, telles que les versements effectués par des acteurs économiques autres que l’État, les collectivités locales ou les SPEA, donc en dehors du petit cycle de l’eau.

Il peut s’agir des délégataires des SPEA, des entreprises fournisseurs des services du secteur de l’eau, des entreprises individuelles et commerciales (par exemple produisant des boissons), des propriétaires fonciers.

Ces versements peuvent être des dons, des subventions ou prendre la forme de taxes affectées ou de contributions obligatoires : taxe sur le chiffre d’affaires des entreprises délégataires (de 1 % dans la proposition de loi de Mme Marie-George Buffet), taxe sur le chiffre d’affaires des distributeurs d’eau publics (régies) ou privés, taxes sur les eaux embouteillées (ces taxes existent déjà), taxe sur les importations d’eau embouteillée (qui serait à créer).

Soulignons que des entreprises délégataires de SPEA participent déjà en France au financement des FSL et des aides curatives.

Ces différentes hypothèses ont été examinées par votre Rapporteur. L’ouvrage précité d’Henri Smets a été très utile ici encore.

Pour votre Rapporteur, il apparaît fondamental pour le financement de l’allocation de solidarité :

– de ne pas créer de taxe nouvelle ;

– d’éviter toute augmentation du prix de l’eau proposé en France par les services publics d’eau et d’assainissement et donc de ne pas passer par la facture qui repose sur les quantités consommées ;

– de ne pas déresponsabiliser les collectivités (via les CCAS, le FSL…).

Quelles sont les différentes hypothèses ?

● La taxe sur les entreprises du secteur de l’eau (dont le chiffre d’affaires est d’environ 10 milliards d’euros HT), souvent proposée, peut apparaître comme une solution.

Mais il convient de souligner :

– qu’elle revient au même que de prélever sur les factures d’eau et d’assainissement car les entreprises taxées répercuteront la taxe sur les usagers,

– et qu’elle devrait s’appliquer à tous les distributeurs, y compris aux régies, sinon se poserait le problème de distorsion de concurrence.

Notons que certains délégataires se sont engagés lors de la négociation de leurs contrats à verser aux CCAS une part de la rémunération perçue sur la distribution d’eau (La Lyonnaise des Eaux à Libourne, Véolia au Syndicat des Eaux d’Île-de-France par exemple).

Une taxe spéciale des grands groupes pour des motifs sociaux a déjà été pratiquée (dans les domaines du pétrole, de la pharmacie).

Sur ce sujet Henri Smets conclut : « La solution de la taxe sur les eaux paraît difficile à mettre en œuvre en dehors des cas où les contrats de délégation seraient renégociés. Imposer une taxe sur le chiffre d’affaires de toutes les entreprises de l’eau serait sans doute faisable mais le résultat ne différerait pas d’une taxe sur les factures d’eau. Dans le contexte actuel, cette solution a peu de chance d’aboutir puisqu’il s’agit de créer une taxe nouvelle ».

● La taxe sur les eaux embouteillées :

Il existe deux taxes sur les eaux embouteillées.

Le droit spécifique défini par l’article 520 A du code général des impôts s’applique :

- d’une part, aux bières,

- et d’autre part, aux boissons non alcoolisées suivantes : eaux minérales naturelles ou artificielles, eaux de table, eaux de laboratoire filtrées, et boissons, gazéifiées ou non, non alcoolisées ne renfermant pas plus de 1,2 % de volume d’alcool. Pour les eaux et boissons non alcoolisées, le tarif de cette taxe est fixé à 5,4 €/m3 (20). Son produit en 2014 a été de 74 millions d’euros.

La surtaxe sur les eaux minérales (article 1582 du code général des impôts) est perçue à la demande et au profit des communes sur le territoire desquelles est située une source d’eau minérale. Elle s’applique aux livraisons d’eaux minérales effectuées sur le marché intérieur (pas aux exportations). Le montant de cette surtaxe est limité à 5,8 €/m3 (soit 0,9 centime d’euro par bouteille de 1,5 litre). Son produit en 2012 a été de 19 millions d’euros. Les sommes perçues sont mises à la disposition de chaque commune concernée, dans la limite des ressources ordinaires de celle-ci, le surplus éventuel étant reversé au département. À noter : la surtaxe ne s’applique pas aux eaux de source, qui représentent environ le tiers de la consommation d’eaux embouteillées.

La proposition de loi (article 5) prévoit que l’allocation de solidarité pour l’eau soit financée par une contribution additionnelle de 0,005 € par litre (un demi-centime d’euro) de la taxe existante sur les eaux embouteillées qui est de 0,0054 euro par litre. Le produit de cette contribution additionnelle serait versé à un fonds de solidarité pour le droit à l’eau institué au sein du Fonds national d’aide au logement (FNAL).

Cette proposition paraît pertinente pour plusieurs raisons :

– cette contribution ne conduirait pas à une augmentation du coût de l’eau du robinet et n’impacterait donc pas la facture d’eau. Tout autre financement pénaliserait les usagers de l’eau fournie en réseau par les services publics de l’eau et de l’assainissement ;

– ces eaux en bouteille sont consommées par un grand nombre de personnes qui n’hésitent pas à dépenser un prix beaucoup plus élevé pour une eau dont ils disposent presque gratuitement au robinet (le rapport est de 1 à 100, voire bien davantage) ;

– un léger surcoût devrait être tolérable et ne diminuerait sûrement pas les quantités consommées, surtout s’il s’agit de venir en aide aux usagers démunis qui ne peuvent pas payer leur facture d’eau du robinet, comme c’est le cas ici ;

– ce geste de solidarité se justifierait aussi par le fait que les consommateurs d’eau en bouteille consomment presque sans payer de redevance une source qui fait partie du patrimoine de la nation ;

– « cette mesure éviterait la critique de la marchandisation de l’eau de réseau car l’eau embouteillée à la différence de l’eau en vrac n’est pas une ressource commune disponible pour tous. Personne ne s’attend à recevoir gratuitement des bouteilles d’eau (sauf en cas de panne d’alimentation en eau du réseau) alors que l’eau potable et gratuite coule librement aux fontaines publiques » (Henri Smets).

– la taxe est existante (donc pas de création de taxe nouvelle) et il ne faut pas faire appel à une disposition législative nouvelle pour l’utiliser. Elle est perçue au niveau national par les douanes (donc pas de frais de perception supplémentaire) ;

– sa mise en œuvre serait simple et lisible : une contribution de solidarité de 0,5 centime par litre d’eau vendu en France (arrondie à 1 centime d’euro par bouteille car beaucoup de bouteilles vendues sont d’1,5 litre). En France, 8,2 milliards de litres d’eau en bouteille sont consommés chaque année, soit environ 5,5 milliards de bouteilles par an. Au total, la recette supplémentaire permettant de financer l’allocation eau serait d’environ 55 millions d’euros ;

– cette contribution pourrait faire l’objet d’un affichage sur chaque bouteille d’eau, ce qui permettrait aux producteurs d’eau embouteillée de faire valoir leur action sociale.

Sur le principe, votre Rapporteur ajoute qu’il n’est pas anormal de faire contribuer l’eau en bouteille à la solidarité en France. L’eau en bouteille n’apparaît pas comme un produit de première nécessité et elle pose des questions de pouvoir d’achat par son coût (120 fois plus cher que l’eau au robinet en moyenne), et d’ordre environnemental (fabrication de bouteilles à base de pétrole, transport, atteinte à l’environnement, recyclage…).

Dans son ouvrage précité, Henri Smets procède à une étude comparée des solutions de financement de l’allocation. Il les résume dans le tableau suivant :

Nom de la solution

Taxe existante ? (1)

Payée par tous ? (2)

Montant acceptable ? (3)

Pas de difficultés juridiques ? (4)

SCORE (5)

Tarif différencié

OUI

NON

OUI

OUI

3

Redevance agence sur prélèvements eau

OUI

OUI

OUI

OUI

4

Taxe sur les factures d’eau et d’assainissement

NON

OUI

OUI

OUI

3

Droit sur les eaux et boissons embouteillées

OUI

OUI

OUI

OUI

4

Surtaxe sur les eaux minérales

OUI

OUI

NON

NON

2

Taxe sur le chiffre d’affaires des distributeurs

NON

OUI

OUI

OUI

3

Taxe sur le chiffre d’affaires des distributeurs privés

NON

NON

OUI

NON

1

(1) La taxe est existante s’il ne faut pas faire appel à une disposition législative nouvelle pour l’utiliser. Toutefois, il faut généralement un vote dans le cadre de la loi de finances pour en faire varier le taux.

(2) Le tarif différencié peut être mis en œuvre dans le cadre de l’expérimentation prévue par la loi Brottes.

(3) Le montant de la taxe est dit acceptable si la taxe proposée peut aisément dépasser 50 M€.

(4) Des difficultés juridiques sont probables si la taxe proposée de solidarité ne frappe qu’un petit nombre de personnes.

(5) Le score est de 1 point pour chaque réponse positive.

Source : « Les aides pour les dépenses d’eau des ménages » (H. Smets), février 2014, p. 88.

En conclusion, écrit-il, « le droit spécifique sur les eaux embouteillées apparaît comme une solution intéressante pour financer les aides préventives. L’avantage de ce système est de ne pas conduire à une augmentation du prix de l’eau du robinet et de ne pas générer des frais supplémentaires de perception. »

● La contribution additionnelle d’un demi-centime par litre d’eau embouteillée vendue en France (venant s’ajouter au droit spécifique de l’article 520 A du code général des impôts) correspond à une contribution de chaque consommateur de 1 centime d’euro par bouteille achetée. Sachant que chaque Français consomme en moyenne 145 litres d’eau en bouteille par an (soit 96 bouteilles de 1,5 litre), sa contribution moyenne sera de 0,96 € par an…

Soulignons qu’en réponse à une enquête IPSOS/France Libertés réalisée en mai 2014, 70 % des acheteurs d’eau en bouteille sont prêts à contribuer personnellement.

Sondage IPSOS pour France Libertés sur « Les Français et l’accès à l’eau et à l’assainissement en France »

Un sondage effectué par IPSOS pour France Libertés en mai 2014 indique notamment que :

-95 % des personnes interrogées considèrent qu’il est important ou très important d’aider les personnes les plus démunies en France à accéder à l’eau ;

-78 % sont favorables à la mise en place d’un fonds national de solidarité pour aider les personnes en difficulté à accéder à l’eau ;

-pour financer ce fonds, 67 % sont favorables au principe d’une contribution de 1 centime d’euro pour chaque bouteille d’eau vendue, et 70 % des acheteurs d’eau en bouteille sont prêts à contribuer personnellement de cette manière.

● En ce qui concerne le versement de l’aide préventive en direction des ménages votre Rapporteur propose de passer par les CAF et les caisses de la Mutualité sociale agricole, et non par les FSL. Ceci paraît pertinent car, comme indiqué précédemment, les FSL, mis en place par les conseils départementaux (dont l’avenir n’est pas assuré, notamment pour certains) n’existent pas partout (surtout pour le « FSL eau »). De plus, leurs moyens sont inégaux en fonction des territoires, ainsi que leurs modalités d’intervention ; leur gestion est lourde, leur efficacité discutée et ils ont un caractère stigmatisant pour les ménages (seuls les usagers qui en font la demande peuvent en bénéficier). Ils relèvent d’une logique uniquement curative de soutien aux impayés soumise au bon vouloir des territoires. Les FSL ne permettent pas de mettre en œuvre une solidarité nationale qui devrait primer dans le domaine de l’eau.

Éléments sur le marché des eaux embouteillées

● Il existe plusieurs types d’eau en bouteille :

– les eaux de source : une quarantaine en France (3,6 milliards de litres vendus en 2013). Elles sont obligatoirement d’origine souterraine et ne doivent pas faire l’objet de traitement chimique, ni d’adjonction.

– les eaux minérales : au nombre de quatre-vingt (6.5 milliards de litres vendus). Elles proviennent de sources non « potables » au sens réglementaire.

● Les quantités vendues sont considérables et en forte croissance (21) . Le volume global des ventes serait passé de 9 litres par personne en 1999 à 27 litres en 2013 ! Les principaux marchés sont d’abord les États-Unis, puis le Mexique (avec une croissance de 10 % par an) alors que 12 millions de personnes n’ont pas l’accès à l’eau au Mexique !

En France, 9,5 milliards de litres sont vendus chaque année avec une croissance de 8 % par an depuis 2008. Chaque Français consomme en moyenne 145 litres par an.

Les eaux embouteillées sont disponibles sous de multiples formats (en bombonnes, bouteilles, canettes, en contenance de 20 cl, bouteilles ludiques pour enfants…) et sont de plus en plus distribuées sous différents modes (« drive », portage à domicile, transports collectifs…).

● Le marché global des eaux embouteillées pèse des dizaines de milliards d’euros, dont 2,5 pour le seul marché français.

Trois grandes multinationales possèdent 80 % des parts de marché et sont propriétaires chacune de dizaines de marques.

– le groupe Nestlé (32 %) : 80 milliards d’euros de chiffre d’affaires avec les marques Vittel, Perrier, Contrex, Hépar, San Pellegrino, Quézac, Nestlé Pure Life…

– le groupe Danone (27 %) : Evian, Volvic, Badoit…

– le groupe Neptune (20 %) : Cristalline, Pierval, St Yorre, Courmayeur, Vals, Vichy, Rozana, Thonon, Mont Blanc, St-Amand…

Les autres parts de marchés sont possédées à 13 % par les distributeurs (Leclerc, Intermarché,…) et 7 % par de plus petites sociétés (Plancoët racheté par le groupe Ogen, Carola racheté par le groupe belge Spadel…).

Avec la crise de 2008 le marché a connu un creux. Depuis, le marché mondial des eaux embouteillées est devenu florissant. Il est marqué par des stratégies commerciales offensives, une forte augmentation des actions commerciales et de la publicité (Tour de France 2015), la recherche de nouveaux clients (bouteilles pour enfants) – et sur le développement des eaux aromatisées (versions plates, gazeuses, light…). Celles-ci représentent à peine 2 % du volume des eaux embouteillées consommées en France (soit 125 millions de litres par an) mais pèsent 6 % du chiffre d’affaires.

● En termes de prix, les eaux embouteillées sont 100 à 200 fois plus chères que l’eau du robinet qui coûte en moyenne 3,80 € le m3 au consommateur (dans une fourchette de 2 € à 6 €) soit 0,0038 € du litre (0,38 centime d’euros par litre).

Le prix des eaux embouteillées varie d’environ 0,20 € le litre (200 € du m3) à environ 0,60 € (600 € du m3).

N.B. Dans les trains SNCF, le coût atteint 5,40 € le litre (5 400 € du m3) soit 1 500 fois plus que le prix de l’eau du robinet !

● Votre Rapporteur tient à souligner que cette forte croissance de la consommation d’eaux embouteillées, dont les emballages sont à plus de 99 % en plastique, n’est pas sans conséquences en termes environnementaux.

« L’empreinte écologique des eaux embouteillées produites et exportées dans le monde entier est très élevée : les produire, les transporter, les réfrigérer et les éliminer sont des processus très gourmands en ressources naturelles, en énergie, en pétrole. Les émissions de gaz à effet de serre (pour la production, le transport, l’incinération) sont beaucoup plus importantes que lorsque cette eau est livrée par les réseaux d’eau potable jusqu’au robinet. Une bouteille d’eau parcourt en moyenne 300 km de l’embouteillage au recyclage » (Source : l’Express – N° 3377 – Juin 2015) ;

Même si les choses s’améliorent, seulement 50 % des bouteilles plastiques sont recyclées. Beaucoup tapissent nos océans comme l’ont montré de nombreux reportages.

Le plastique utilisé dans la fabrication de la bouteille d’eau, le PET (polyéthylène téréphtalate) nécessite plusieurs millions de litres de pétrole par an. Il faut près de 2 kg de pétrole brut pour fabriquer 1 kg de PET. 30 000 bouteilles = 1 tonne de plastique.

IV. LA NÉCESSAIRE MOBILISATION DES COLLECTIVITÉS EN FAVEUR DU DROIT À L’EAU (ARTICLE 7)

L’amélioration du droit à l’eau est traitée dans cette proposition de loi uniquement par la création d’une allocation de solidarité pour ceux qui ont les revenus les plus faibles et qui sont raccordés au réseau. C’est un système d’aide préventive au paiement de la facture mis en place au plan national.

Mais pour diminuer la facture d’eau, votre Rapporteur tient à souligner que d’autres leviers peuvent être activés : économies d’eau, réduction des fuites, diminution de la TVA, limitation de la partie fixe de la facture qui pénalise les petits consommateurs à faibles ressources…

S’agissant d’un sujet qui relève essentiellement des collectivités distributrices d’eau en France, la proposition de loi fait des propositions complémentaires pour mobiliser les élus sur les territoires et pour faciliter la mise en œuvre de tarifs sociaux au niveau local comme le pratiquent déjà quelques rares collectivités locales.

La loi en vigueur prévoit que des aides pour payer les factures d’eau sont accordées par les Fonds de solidarité pour l’eau mais ne rend pas obligatoire la création de ces systèmes de distribution d’aides curatives. De ce fait, un quart des FSL ne peuvent pas aider les usagers incapables de payer leur eau. Pour rendre disponibles les aides curatives pour l’eau sur tout le territoire, il est prévu que tous les FSL sans exception devront comporter un volet eau et que les versements des distributeurs en faveur du volet eau ne pourront être utilisés que pour la prise en charge des dettes d’eau (article 6, alinéa 9).

La proposition de loi demande aux communes de s’impliquer dans la mise en œuvre du droit à l’eau en organisant en leur sein un premier débat sur le sujet dans les trois ans suivant le renouvellement général du Conseil municipal (article 7, alinéa 7).

Dans l’esprit de la « loi Brottes », ce débat portera en particulier sur les enjeux liés à la tarification à une ou plusieurs tranches.

Le maire présentera un rapport comprenant un état des lieux (type d’habitat, collectif, individuel, typologie des consommations et des usages de l’eau, données sur la pauvreté, aides du FSL, du CCAS…) et les actions menées (FSL, aides préventives, mobilisation des partenaires, dispositifs d’accompagnement pédagogique et de participation des citoyens, accès à l’eau des populations qui ne sont pas raccordées au réseau…).

L’objectif est d’examiner l’adéquation des tarifs, des aides préventives et curatives pour l’eau et des installations sanitaires locales (bornes-fontaines, autres points d’eau, toilettes publiques, douches…).

Pour mieux informer le public, le rapport du maire sur le prix et la qualité des services de l’eau devra contenir une section sur les mesures prises pour la mise en œuvre du droit à l’eau (article 7, alinéa 5).

D’autre part, très peu de règlements de services publics de l’eau et de l’assainissement ont intégré l’article premier de la LEMA du 30 décembre 2006 qui a introduit le droit à l’eau dans la législation, alors que ces règlements font souvent référence à d’autres textes législatifs.

Rappelons que cet article dispose que « l’usage de l’eau appartient à tous et chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d’accéder à l’eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous ».

Cet article de la LEMA pourrait être utilement intégré dans les règlements des services publics d’eau et d’assainissement.

Le Comité national de l’eau sera, quant à lui, chargé de remettre un rapport triennal au Premier ministre et au Parlement sur la mise en œuvre du droit à l’eau, notamment en ce qui concerne les populations qui ne disposent pas d’un accès à l’eau permanent et continu à l’eau potable. Ce rapport permettra d’assurer le suivi de la mise en œuvre effective de la proposition de loi et contribuera à mettre en évidence des lacunes à corriger (article 8, alinéa 2).

*

* *

Votre Rapporteur tient aussi à souligner l’enjeu des « non-coupures » d’eau pour la mise en œuvre effective du droit d’accès à l’eau potable et à l’assainissement. La présente proposition de loi ne traite pas cette question car elle a fait l’objet de dispositions législatives au cours des derniers mois.

Pour la mise en œuvre effective du droit d’accès à l’eau potable, si l’enjeu n’est plus, en France, de garantir l’accès à ce service qui dessert 99 % de la population, un des enjeux essentiels est d’éviter les coupures d’eau chez les personnes en grandes difficultés financières qui ne peuvent plus assurer le paiement de ce service.

Même si peu de données existent, en 2011 le CGEDD estimait que les coupures d’eau pour impayés concernaient entre 100 000 et 140 000 foyers par an (rapport précité sur la mise en œuvre de l’article 1er de la LEMA).

Elles interviennent non seulement lorsque des abonnés ont un retard de paiement en raison de difficultés financières mais aussi dans le cadre d’une contestation de sa facture par l’usager.

Il a été constaté que les pratiques des fournisseurs d’eau sont très différentes. Certains se refusent à user de ce moyen et privilégient la recherche de solutions avec l’usager (c’est le cas de la régie Eau de Paris par exemple) tandis que d’autres bloquent très rapidement l’accès à l’eau potable même pour des retards de paiement de 100 ou 200 €. Et ce, tant que la créance n’est pas recouvrée, c’est-à-dire durant plusieurs mois, voire même plus d’une année comme l’ont montré des procès récents (par exemple le procès intenté par M. Arnaud Cajet contre la société SAUR, qui a donné lieu à une question prioritaire de constitutionnalité au sujet de la « loi Brottes » en 2014).

S’il est exact que l’usager en difficulté peut certes faire appel à l’aide sociale, argument souvent utilisé par les fournisseurs d’eau, toutefois une personne peut se trouver en difficulté sans pour autant avoir le droit à une aide spécifique : c’est le cas des « travailleurs pauvres ». Par ailleurs, un grand nombre de personnes sont dans l’ignorance de l’existence de ces dispositifs, soit parce qu’elles sont victimes soudainement d’un accident de la vie ou n’ont jamais effectué ce type de démarches. Ainsi, le taux de non-recours à l’aide sociale est estimé à 36 % pour le RSA socle et à 68 % pour le RSA activité (chiffres 2011 de l’Observatoire de non-recours aux droits et services – ODENORE).

Quoi qu’il en soit, même lorsqu’une aide est sollicitée, sa mise en place prend plusieurs mois. C’est sur ces considérations que s’est d’ailleurs fondé un article de la « loi Brottes » pour supprimer la conditionnalité, assez restrictive, des bénéficiaires du FSL pour interdire les coupures d’eau dans une résidence principale, quelles que soient les ressources financières des usagers.

Rappelons que la loi « DALO » précitée de 2007 et un décret de 2008 (22) ont étendu la trêve hivernale en prohibant les coupures d’eau toute l’année pour les personnes bénéficiant ou ayant bénéficié au cours des douze derniers mois d’une aide du FSL.

L’article 19 de la « loi Brottes » du 15 avril 2013 et son décret d’application du 27 février 2014 ont modifié les dispositions du décret de 2008 concernant les coupures d’eau. Une nouvelle disposition a été introduite dans le code de l’action sociale et des familles (article L. 115-3, alinéa 3). Elle stipule : « Du 1er novembre de chaque année au 31 mars de l’année suivante, les fournisseurs d’électricité, de chaleur, de gaz ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l’interruption, y compris par résiliation de contrat, pour non-paiement des factures, de la fourniture d’électricité, de chaleur, de gaz aux personnes ou familles (…). Ces dispositions s’appliquent aux distributeurs d’eau pour la distribution d’eau tout au long de l’année ».

Cet article L. 115-3 a fait l’objet de multiples interprétations, contentieux et recours devant les juridictions. En septembre 2014, la justice a tranché et la Lyonnaise des Eaux a été condamnée pour coupure illégale.

Depuis février 2014 et le décret d’application de la « loi Brottes », les coupures d’eau dans une résidence principale sont désormais interdites toute l’année.

Parallèlement aux procédures engagées (Cour de Cassation, question prioritaire de constitutionnalité), le sujet des coupures d’eau est revenu en discussion au Parlement en 2015 dans le cadre des débats sur le projet de loi relatif à la transition énergétique.

Une disposition revenant au régime antérieur a été adoptée par le Sénat en première lecture avec la possibilité de protéger les plus démunis et de couper l’eau des mauvais payeurs sans difficulté financière (en précisant que c’est seulement pour les personnes en grave difficulté financière que les coupures d’eau sont totalement interdites).

Après une commission mixte paritaire infructueuse, le texte voté à l’Assemblée nationale en nouvelle lecture (avril 2015) a supprimé ce dispositif et prévu, en revanche, la possibilité de procéder à une réduction du débit d’eau. Cet article a été supprimé par le Sénat en nouvelle lecture, et n’a pas été rétabli par l’Assemblée en lecture définitive. Par conséquent, l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles en vigueur aujourd’hui demeure celui issu de la « loi Brottes », qui interdit les coupures d’eau toute l’année.

CONCLUSION

L’eau c’est la vie, c’est aussi la santé et la dignité.

Cette proposition de loi « visant à la mise en œuvre effective du droit à l’eau potable et à l’assainissement » permet d’apporter des réponses concrètes pour l’accès à l’eau des plus démunis : pour ceux qui ne bénéficient pas d’un raccordement à l’eau en France du fait de leur privation de logement et pour ceux qui éprouvent des difficultés à payer leur facture d’eau du fait de la faiblesse de leurs revenus. Plus d’un million de ménages en France sont concernés et malheureusement la pauvreté continue de progresser. Il était donc nécessaire et urgent de s’interroger sur le respect réel des droits fondamentaux de la personne humaine quand on mesure les efforts considérables que doivent faire beaucoup de familles pour assurer le poids du loyer, des charges d’eau et d’énergie.

Il s’agit bien d’une urgence sociale qui nécessite la mise en œuvre de mesures concrètes en complément de l’approche curative qui prévaut jusqu’à aujourd’hui et qui, selon l’avis de nombreux acteurs associatifs, politiques et sociaux, a trouvé ses limites.

Les mesures inscrites dans la proposition de loi (les équipements sanitaires dans l’espace public et l’aide préventive) sont simples, faciles à mettre en œuvre et complémentaires des dispositifs actuels. Elles permettent de lutter contre les inégalités territoriales et s’inscrivent dans une perspective de droit, de dignité et d’égalité de traitement des citoyens en France.

Votre Rapporteur tient à souligner que l’efficacité de ces dispositions sera renforcée si l’on veille à ce qu’un nombre de mesures d’accompagnement indispensables soient menées telles que les économies d’eau, l’amélioration de l’information des consommateurs sur les prix et les coûts ou encore la mobilisation des travailleurs sociaux.

Comme il a été souligné en introduction, l’eau est la première concernée par les changements climatiques, avec beaucoup d’indicateurs au rouge en France comme à l’international. Avec des menaces tels que des événements climatiques exceptionnels mais aussi des menaces sur la gestion durable de la ressource ou sur notre capacité à assurer les besoins fondamentaux : l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, à la sécurité alimentaire, à la santé publique ou encore au développement social et économique. Pour répondre positivement aux défis de ce siècle, des réponses concrètes doivent être apportées. C’est aussi l’enjeu de cette proposition de loi.

Ces réponses concrètes doivent mobiliser tous les acteurs de la politique de l’eau en France. De ce point de vue, votre Rapporteur se félicite des lois récentes relatives à la nouvelle organisation territoriale de la République (lois « MAPTAM » et « NOTRe »), qui ont permis de clarifier la gouvernance dans le domaine de l’eau avec le transfert des compétences en matière d’eau potable et d’assainissement aux EPCI à fiscalité propre au 1er janvier 2020, et, à compter du 1er janvier 2018, des compétences en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI).

Ces évolutions simplifieront la gouvernance et l’efficacité des politiques de l’eau actuellement éclatées en 24 000 autorités organisatrices, qui verront leur nombre fortement diminuer.

TRAVAUX EN COMMISSION

I. DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du mercredi 4 novembre 2015, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné le rapport de M. Michel Lesage sur la proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement (n° 2715 rectifié).

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous examinons aujourd’hui la proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement. M. Michel Lesage en a été désigné rapporteur. Je rappelle que M. Michel Lesage est président du groupe d’études « Politique de l’eau » et qu’il est l’auteur du rapport d’évaluation de la politique de l’eau en France, qu’il a remis en 2013 au Premier ministre.

Comme pour la proposition de loi sur l’économie bleue, ce texte devait être inscrit à l’ordre du jour de la semaine de l’Assemblée nationale du 23 au 27 novembre prochain. Mais la conférence des présidents a décidé de réserver ce texte pour la semaine de l’Assemblée qui commencera début février.

Néanmoins, j’ai décidé de maintenir la discussion de ce texte en commission, en accord avec le rapporteur qui a effectué un grand nombre d’auditions, tant pour sa préparation que pour son examen. Il était temps d’en tirer les conséquences.

En raison des auditions des représentants de la compagnie Air France que nous avons effectuées ce matin avec la commission des affaires économiques et celle des affaires sociales, nous avons été contraints de déplacer à cet après-midi l’examen de la proposition de loi.

Je rappelle qu’aucune commission ne s’est saisie pour avis sur ce texte.

À l’issue du délai de dépôt, le secrétariat de la commission a enregistré cinquante-cinq amendements. Un seul amendement, le CD16 du rapporteur, a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution.

M. Michel Lesage, rapporteur. Monsieur le président, je tiens à vous remercier d’avoir bien voulu inscrire ce texte à l’ordre du jour des travaux de notre commission.

À quelques jours de la Conférence de Paris sur le climat, je suis particulièrement heureux que notre commission examine une proposition de loi sur l’eau.

Pour tout être vivant, l’eau est un élément vital indispensable non substituable qui doit être considéré comme un bien commun.

L’eau est l’objet de nombreux enjeux, tant en termes quantitatifs que qualitatifs. L’eau facile est devenue fragile. Elle est aussi confrontée à de nombreuses menaces, telles que le réchauffement climatique avec des phénomènes de plus en plus fréquents de sécheresse et d’inondations. L’eau menacée est devenue menaçante.

Dans le cadre de la préparation de la COP21, alors que les émissions de gaz à effet de serre tiennent la vedette, si je puis dire, l’eau n’a pas, me semble-t-il, toute la place qu’elle mérite dans les débats. Or l’accès à l’eau potable est un enjeu mondial. Si, sur le plan international, une résolution de l’Organisation des Nations unies de 2010 a reconnu que l’eau est un droit humain, c’est loin d’être une réalité pour tous : selon les experts, plus de 2 milliards de personnes continuent d’utiliser une eau contaminée et 3 à 4 milliards d’individus, soit à peu près la moitié de l’humanité, n’ont toujours pas accès à une eau satisfaisante, autrement dit à une eau potable.

Dans les pays en développement, 80 % des eaux usées domestiques et industrielles sont rejetées sans aucun traitement. Malheureusement, cette situation risque de s’aggraver avec le réchauffement climatique puisque des régions déjà défavorisées seront soumises au stress hydrique, à la croissance démographique et à l’urbanisation. On le voit, les enjeux liés à l’eau sont multiples et surtout peut-être à venir.

L’accès à l’eau pour tous est un enjeu social, humanitaire, de dignité, de développement et de paix.

Le changement climatique a déjà conduit 20 millions de personnes à se déplacer et les experts estiment à 250 millions le nombre de réfugiés climatiques dans le monde en 2050. Vous aurez remarqué que les premières actions de Daech et Boko Haram ont consisté à confisquer l’eau. Ils profitent de la raréfaction de l’eau, des conflits climatiques et des migrations pour accroître leur pouvoir. L’eau est donc un enjeu de paix.

Et la France dans tout cela ?

En France, l’eau potable coule au robinet de près de 99 % des personnes. 90 % des logements sont raccordés à l’assainissement. C’est le travail des élus locaux sur le terrain qui a permis cette belle réussite.

Mais de l’avis de tout un ensemble de partenaires qui s’impliquent dans ce domaine – le Conseil d’État, le Conseil national de l’eau, le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) qui a réalisé un rapport il y a trois ans sur cette question, les organisations non gouvernementales (ONG), les associations humanitaires, caritatives, l’Académie de l’eau, etc. –, deux enjeux considérables méritent d’être rappelés.

Premièrement, un million de ménages en France ont du mal à payer leur facture d’eau ; on s’accorde à reconnaître que ceux qui consacrent plus de 3 % de leurs revenus à leur facture d’eau sont en difficulté. Ce chiffre de 3 % fait consensus au niveau de l’OCDE et en France.

Deuxièmement, on estime que 100 000 à 150 000 personnes n’ont pas un accès effectif à l’eau, soit parce qu’elles sont sans domicile fixe, soit parce qu’elles vivent en habitat précaire, et ce chiffre serait en augmentation.

Le Comité national de lutte contre l’exclusion et l’Observatoire national de lutte contre la pauvreté que j’ai rencontrés ont souligné que la pauvreté s’aggrave et se traduit pour nombre de Français par des difficultés à accéder à l’eau.

Depuis une douzaine d’années, de nombreux rapports et travaux parlementaires ont mis l’accent sur ce sujet et des propositions de loi ont été déposées par des parlementaires, députés et sénateurs, de toutes sensibilités politiques. Je pense notamment à M. André Flajolet avec lequel j’ai travaillé sur ce texte, qui a présidé le Conseil national de l’eau et qui avait déposé une proposition de loi dans le même esprit. Elle se différencie de ma proposition de loi pour ce qui touche aux modalités de financement ; j’aurai l’occasion d’y revenir.

La présente proposition de loi a été élaborée conjointement avec de nombreuses associations autour de la fondation France Libertés, de la structure collective Coalition Eau, de l’Observatoire des usagers de l’assainissement en Île-de-France (OBUSASS), de M. Henri Smets, de l’Académie de l’eau. Leur concours a été particulièrement précieux, sur les aspects juridiques notamment.

J’ai également rencontré des collectivités locales – Dunkerque, Libourne, Niort – qui, sur le terrain, ont expérimenté une tarification différenciée, par exemple par paliers progressifs. C’est ce qui explique que ce texte soit signé par plusieurs parlementaires, dans le cadre d’une démarche transpartisane, de presque toutes les sensibilités politiques, à une exception près. Et M. Martial Saddier m’a expliqué à plusieurs reprises que, s’il était favorable à titre personnel à ce texte, il lui était difficile d’engager le groupe dont il était le porte-parole. Bref, c’est le fruit de trois ans de travail suite au Forum mondial de l’eau qui s’est tenu à Marseille en 2012.

J’en viens au contenu concret de la proposition de loi proprement dite.

L’article 1er rappelle les notions du droit de l’homme à l’eau en les précisant et la nécessité de le mettre en œuvre en France de manière effective pour ceux qui ne sont pas raccordés et ceux qui consacrent une trop grande part de leurs revenus au paiement de leurs factures d’eau. On sait que les charges relatives à l’eau et à l’énergie sont déterminantes par rapport au logement. Or le logement est un outil fondamental d’accès à la dignité et à l’épanouissement de la famille.

L’article 2 reprend des préconisations formulées notamment par le Conseil d’État. Il vise à obliger toutes les collectivités à installer et entretenir des points d’eau potable d’accès gratuit. Les collectivités de plus de 3 500 habitants devront disposer de toilettes publiques et celles de plus de 15 000 habitants devront prévoir l’accès à des douches.

C’est un enjeu social, sanitaire et de santé publique. Lors des périodes de canicule, chacun doit pouvoir accéder à des points d’eau dans des conditions correctes, où qu’il soit sur le territoire.

L’Association des maires de France (AMF), dont M. André Flajolet copréside le groupe de travail sur l’eau, est favorable à cette disposition facile à mettre en œuvre puisqu’il y a des réseaux d’eau potable partout, par exemple dans les cimetières et sur les terrains de football. Il est possible d’utiliser les équipements existants, comme les centres sportifs, les centres d’accueil de jour, etc. Est-il vraiment anormal d’exiger qu’il y ait des toilettes publiques dans les communes de plus de 3 500 habitants ? Du reste, c’est pratiquement le cas partout.

Les articles 3, 4, 5 et 6 portent sur le financement d’un outil nouveau : l’allocation forfaitaire d’eau à caractère préventif. La création de ce dispositif est pertinente parce que la précarité liée au logement est réelle et les charges afférentes au logement génèrent des difficultés pour les plus vulnérables. Les réponses apportées jusqu’à présent par le législateur trouvent leurs limites car elles ont avant tout un caractère curatif, par la prise en charge des impayés par les Centres communaux d’action sociale (CCAS) ou les Fonds de solidarité logement (FSL). Si les FSL ont le mérite d’exister, ils ont leurs limites : non seulement un quart des départements n’ont pas de FSL « eau », mais les critères d’attribution, les montages financiers, les partenariats diffèrent d’un territoire à l’autre, d’un département à l’autre. Le système est également peu efficace, car beaucoup de gens hésitent à recourir au FSL, jugeant cette démarche stigmatisante : on ne peut activer le FSL qu’en cas d’impayés, ce qui implique de pouvoir fournir une facture, autrement dit d’avoir un compteur individuel. Or, en France, 50 % des foyers n’ont pas de facture d’eau car, dans la grande majorité des cas, il n’existe pas de facture individuelle en habitat collectif. J’ajoute que ce n’est pas la solidarité nationale qui joue, dans la mesure où cette affaire concerne les territoires.

Le besoin est estimé entre 50 et 60 millions d’euros. Il fallait trouver un système simple, lisible, ne pas créer une nouvelle taxe, fixer des critères d’éligibilité ainsi que des mécanismes de financement et de redistribution simples. C’est pourquoi il était proposé que la redistribution des financements obtenus par le biais de la taxe sur les boissons embouteillées redescende sur les territoires par le biais des services des Caisses d’allocation familiale (CAF) et de la MSA qui disposent de tous les éléments sur les allocataires du revenu de solidarité active (RSA) socle et/ou de la Couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) en fonction du décret d’application qui sera pris pour mettre en œuvre ce dispositif.

D’autres mécanismes ont été proposés dans des propositions de loi précédentes, via les FSL ; non seulement on n’en trouve pas partout, mais la disparition, un temps envisagée, des départements, gestionnaires de ces fonds, aurait posé problème.

Bien sûr, le système pourra évoluer lorsque la réflexion sur le chèque énergie aboutira. En fait, ce que je propose équivaut à un « chèque eau ». Notre allocation a été pensée et travaillée il y a déjà trois ou quatre ans, bien avant la création du chèque énergie qui a eu lieu dans le cadre de la loi sur la transition énergétique. Le chèque énergie coûtera 600 millions d’euros par an ; l’allocation dont je vous parle devrait coûter 50 à 60 millions d’euros, soit dix fois moins.

Il existe plusieurs façons de financer ces 60 millions d’euros. La première consiste à augmenter la facture d’eau, comme cela a été proposé dans des propositions de loi précédentes. Vous le savez, le prix de l’eau est fixé sur le territoire par les services publics de l’eau et de l’assainissement. Il suffit de multiplier les quantités consommées par un prix au mètre cube. En France, 3,5 milliards de mètres cubes d’eau sont distribués chaque année aux ménages. Le prix moyen d’un mètre cube d’eau étant de 3,80 euros, cela fait 13 milliards par an. Pour obtenir 60 millions supplémentaires, il suffirait d’augmenter de 0,5 % les factures d’eau et la question serait réglée. Mais ce n’est pas ce que nous proposons, car nous considérons que cette mesure n’est pas juste : elle toucherait les familles les plus défavorisées. Et comme il existe 24 000 autorités organisatrices, il est extrêmement difficile de traiter la question sociale de l’eau via la facture. Certes, il y en aura moins à l’avenir : la loi NOTRe prévoit de donner la compétence eau et assainissement aux EPCI, ce qui va diviser par trois ou quatre le nombre d’autorités organisatrices et permettre que les différents prix de l’eau qui existent sur le territoire soient rapprochés. C’est ce qu’a fait l’agglomération de Saint-Brieuc qui avait quatorze services d’eau et d’assainissement.

J’ajoute que les ménages paient déjà, à travers leur facture, des éléments du « petit cycle » de l’eau, c’est-à-dire la potabilisation, le transport, l’arrivée au robinet, et du « grand cycle » de l’eau – la lutte contre les inondations, la pollution, etc. Enfin, la facture d’eau ne tient pas compte des revenus.

Voilà pourquoi nous n’avons pas retenu cette hypothèse et nous proposons que les recettes du fonds de solidarité soient constituées par une contribution sur les bouteilles d’eau.

Le marché des eaux embouteillées est particulier. Un hors-série du magazine L’Express du 17 juin 2015 titrait : « Un liquide qui vaut de l’or », « La tendance est mondiale », « Les eaux embouteillées déferlent sur tous les continents et génèrent un business juteux ». Au-delà des jugements que l’on peut porter sur la question, il s’agit d’être juste et objectif.

La France compte quarante eaux de sources et quatre-vingts eaux minérales. Nous proposons une contribution de 0,5 centime d’euro par litre d’eau embouteillée vendue en France ou 1 centime d’euro par bouteille d’un litre et demi, ce qui, j’en conviens, n’est pas tout à fait proportionnel. Comme 10 milliards de litres d’eau embouteillée sont vendus par an, soit en moyenne 140 litres d’eau par an et par habitant, cela représente un surcoût de 1 euro par an pour le consommateur, ce qui ne remettra pas en cause l’achat de bouteilles d’eau. Les producteurs d’eau en bouteille estiment que cette disposition les pénalisera. C’est pourquoi nous leur proposons que ce prélèvement puisse se transformer en une opportunité de communication pour eux via l’affichage sur les bouteilles du centime solidaire. Et de toute façon, il sera répercuté sur l’acheteur final.

80 % des eaux de source sont regroupées au sein de trois multinationales : le suisse Nestlé Waters possède 30 % du marché, le géant français Danone 27 % et le groupe Neptune Roxane 20 %. Les 13 % restants sont des marques de distributeurs comme Leclerc, Intermarché, etc., et des petites sociétés comme Plancoët dans les Côtes d’Armor qui dépend du groupe Semo.

En résumé, la mesure qui vous est proposée présente plusieurs avantages. D’abord, il ne s’agit pas de créer une nouvelle taxe. Ensuite, elle est simple, lisible et elle s’applique sur l’ensemble du territoire. De plus, le surcoût pour le consommateur est faible.

Enfin, il n’est pas anormal que la commission du développement durable tienne compte de l’empreinte écologique extrêmement forte générée par les eaux en bouteille pour les produire, les transporter, les réfrigérer ou les éliminer – seulement 50 % des bouteilles d’eau sont recyclées. Tous ces processus sont fortement consommateurs de pétrole. J’ajoute que l’eau du robinet coûte cent fois moins cher que l’eau en bouteille, voire 1 500 fois moins cher qu’une petite bouteille d’eau individuelle.

Enfin, les collectivités et les territoires qui sont responsables des politiques de l’eau doivent se mobiliser. L’article 7 vise à renforcer la loi dite « loi Brottes » en prévoyant un rapport sur la question sociale de l’eau, une réflexion sur la tarification différenciée, éventuellement progressive même si une telle tarification n’est pas sociale.

Mme Martine Lignières-Cassou. Au mois de juillet 2010, l’Organisation des Nations unies a voté une résolution qui déclare que l’eau est un droit fondamental et essentiel au plein exercice du droit à la vie. Cette résolution, qui a été approuvée par la France, demande aux États de fournir les ressources financières nécessaires et de développer les nouvelles technologies indispensables pour garantir l’accès à une eau potable, salubre, propre, abordable à chacun et pour que l’assainissement soit effectif pour tous.

C’est cette année que doit être atteint l’objectif 7 du millénaire pour le développement. Il prévoit que le pourcentage de la population qui n’a pas accès à l’eau potable soit réduit de moitié. C’est donc aussi dans ce contexte d’engagement pris par la France à l’échelle internationale et pour respecter le droit à l’eau et à l’assainissement dans notre pays que nous soutenons la proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement.

Cette proposition de loi est transpartisane et rassembleuse. Il n’y a aucune divergence entre l’actuelle majorité et le gouvernement précédent en ce qui concerne les enjeux cruciaux qu’elle contient.

Tous ici nous partageons l’idée qu’il est nécessaire de garantir à chaque être humain l’accès à l’eau potable. Notre collègue André Flajolet avait déposé une proposition de loi en 2010.

Le présent texte vise à inscrire le principe du droit à l’eau et à l’assainissement dans le droit français et à le traduire par des mesures concrètes. Les collectivités territoriales sont appelées à les mettre en œuvre.

L’article 2 tend à instaurer une obligation pour les municipalités de fournir de l’eau gratuitement à tous ceux qui n’y ont pas accès, notamment les personnes sans domicile fixe. Cela ne créera pas de charge nouvelle pour les collectivités qui possèdent, soit dans leur cimetière, soit dans leur salle des sports, au moins un point d’eau et des toilettes. D’ailleurs, ce dispositif a été discuté avec l’Association des maires de France dont l’interlocuteur n’était autre que M. André Flajolet.

Le Conseil d’État recommandait déjà en 2010 aux communes d’ouvrir des points d’eau collectifs accessibles aux sans-abri. En outre, la responsabilité des communes ne se limite pas à l’ouverture des équipements existants aux personnes qui n’ont pas accès à l’eau potable puisque l’article 7 prévoit qu’elles organisent un débat sur la mise en œuvre du droit à l’eau au cours des trois premières années de chaque mandature.

La présente proposition de loi n’est pas originale par rapport aux précédentes puisqu’elle reprend l’idée de la création d’une aide préventive à l’eau et à l’assainissement pour les ménages les plus modestes et pour lesquels les factures d’eau et d’assainissement dépassent 3 % de leurs revenus. L’innovation de ce texte réside dans le mode de financement du système préventif. Comme l’a dit M. Michel Lesage, il nous est apparu beaucoup plus juste de ne pas solliciter directement ou indirectement les consommateurs d’eau potable, les ménages déjà taxés, y compris pour le financement du grand cycle de l’eau. Les recettes nécessaires, estimées à 50 millions d’euros par an, proviendraient de l’élargissement d’une taxe sur les eaux embouteillées qui existe déjà, ce qui reviendrait à 1 centime d’euro par bouteille d’un litre et demi.

La proposition de loi a vocation à traduire dans les faits nos engagements sur le plan international et à garantir à chacun un accès à l’eau potable pour qu’il puisse vivre dignement. J’espère qu’elle suscitera l’adhésion de toutes et de tous.

M. Frédéric Reiss. Monsieur le président, je vous remercie de m’accueillir dans votre commission à l’occasion de l’examen cette proposition de loi.

La présente proposition est examinée à la veille de la COP21 – est-ce une coïncidence ? Elle repose sur des valeurs de fraternité et de solidarité puisqu’elle permet un accès à l’eau pour les ménages les plus précaires et les personnes démunies. Si l’intention est tout à fait respectable, le mode de financement en revanche me préoccupe : l’article 5 prévoit que le fonds de solidarité du droit à l’eau sera alimenté par une nouvelle taxe de 0,5 centime par litre d’eau embouteillée ainsi que par l’affectation des recettes du droit d’accises auquel est soumise la filière des eaux en bouteille.

Je ne peux mesurer aujourd’hui quel sera l’impact demain de cette mesure sur un petit producteur d’eau minérale naturelle. Reste que ce mode de financement me semble assez discriminatoire puisqu’il fait basculer la responsabilité des opérateurs en charge de la distribution de l’eau sur le producteur d’eau en bouteille.

L’adoption d’une telle disposition aurait à n’en pas douter des conséquences sur un secteur réputé économiquement fragile. Le secteur de l’eau minérale naturelle est déjà fortement contributeur : il acquitte un droit d’accise de 0,54 centime d’euro par hectolitre et une surtaxe versée aux communes du territoire sur lequel se situent les sources.

Elle aurait également un impact néfaste sur la filière de l’eau minérale et de l’eau de source dans un certain nombre de PME qui représente 10 000 emplois directs non délocalisables et 30 000 emplois indirects.

Le coût de cette taxe devra nécessairement être répercuté sur le prix de la bouteille. Pourtant, c’est un produit de première nécessité qui est consommé par tous les Français.

La création de cette taxe est-elle conforme à l’article 40 de la Constitution ?

M. le rapporteur. Elle existe déjà…

M. Frédéric Reiss. Plus de 80 % de l’eau du robinet consommée par les ménages sont destinés à l’hygiène et seulement 1 % est consommé pour la boisson. Les eaux emballées ne sont pas responsables du prix de l’eau du robinet et n’ont donc aucune influence sur le montant des factures d’eau. Taxer les eaux emballées pour financer le fonds de solidarité ne me paraît pas pertinent.

M. Guillaume Chevrollier. Monsieur le rapporteur, je tiens tout d’abord à préciser que ce texte n’est pas totalement trans-courants puisque le groupe Les Républicains ne s’y est pas associé. Qui plus est, vous « mouillez », si je puis dire, notre collègue Martial Saddier alors qu’il n’est pas présent aujourd’hui, ce que je trouve inélégant. (Murmures divers)

La présente proposition de loi correspond à la politique du Gouvernement faite de bons sentiments, surtout dans cette période électorale, mais marquée par un irréalisme économique.

Vous voulez accorder un nouveau droit, le droit à l’eau gratuit, principe à mon sens déresponsabilisant. Je ne crois pas que l’accès à l’eau ne soit pas réel dans notre pays. En revanche, l’accès à l’eau potable et à l’assainissement est un droit qu’il faut développer dans un certain nombre de pays sous-développés, même si des améliorations significatives ont eu lieu en Asie puisque le pourcentage de personnes n’ayant pas accès à l’eau potable est passé de 32 % en 1990 à 8 % en 2011. Mais en 2011, l’accès à l’eau restait difficile en Afrique pour 327 millions de personnes. En France, et c’est heureux, la situation n’est pas celle-ci. On peut donc se poser la question de la légitimité d’un tel texte, de la création de nouvelles contraintes pour les communes et surtout de cette nouvelle imposition.

Certes, l’eau devient chère dans nombre de communes et son prix peut être un problème pour certaines familles. Mais celles-ci sont déjà aidées. Améliorons les dispositifs existants plutôt que de créer des droits nouveaux qui comportent un certain nombre d’inconvénients.

Votre proposition d’interdire les coupures d’eau semble irréaliste alors que l’on sait que 90 % des coupures sont dues aujourd’hui à des impayés sans rapport avec des situations de précarité. Ne développons pas l’irresponsabilité, ce à quoi peut conduire votre texte.

M. le rapporteur. Mais ce n’est pas dans le texte !

M. Guillaume Chevrollier. Pourquoi taxer l’eau embouteillée ? En quoi le secteur de l’eau minérale serait responsable du prix de l’eau du robinet ? Pourquoi grever la compétitivité de ce secteur déjà lourdement taxé et qui doit faire face à une forte concurrence européenne ? Pourquoi menacer des milliers d’emplois qui ne sont pas délocalisables ?

Cette taxe représenterait 4 % du chiffre d’affaires de l’eau minérale Plancoët, ce qui est loin d’être négligeable contrairement à ce que vous avez dit. Cette hausse se répercutera inévitablement sur les consommateurs.

Dans un contexte de ras-le-bol fiscal et de reculs fiscaux comme nous le montre le projet de loi de finances pour 2016, M. Dino Cinieri et moi-même avons cosigné un amendement qui vise à supprimer cette nouvelle taxe inopportune et malvenue.

Si ce texte est bien-pensant, il n’est pas responsable, pas nécessaire et il me paraît assez négatif pour les municipalités.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. La liste des signataires représente tous les groupes, sauf Les Républicains. M. Michel Lesage a voulu dire qu’il s’était adressé à M. Martial Saddier pour savoir si le groupe Les Républicains accepterait de signer cette proposition de loi. M. Martial Saddier a indiqué qu’à titre personnel il soutenait ce texte, mais que le groupe LR ne le signerait pas, comme en témoigne votre déclaration, cher Guillaume Chevrollier : c’est un texte dans lequel vous ne vous retrouvez pas, ce que je peux comprendre.

Cette mise au point était nécessaire. Le rapporteur l’a fait de façon que je ne crois pas maladroite : il n’y avait pas dans ses propos la volonté de nuire ou d’être désagréable envers tel ou tel. Il est respectueux des autres, comme tous les parlementaires. (Approbations)

M. François-Michel Lambert. Merci à notre collègue Michel Lesage pour cette proposition de loi transpartisane, qui doit le rester, et de sa confiance, puisqu’il m’y a associé.

Nous n’avons plus le temps d’attendre : il n’est pas acceptable en 2015 que 150 000 personnes – l’équivalent d’une ville comme Aix-en-Provence – soient encore exclues de l’accès à l’eau potable, et que 1 million de personnes – soit une ville comme Marseille – se retrouvent en grande difficulté pour payer leur facture d’eau. J’ajoute que les 65 millions de Français – et les 80 millions de touristes accueillis sur notre sol – doivent avoir accès à des toilettes publiques. Il nous est tous arrivé un jour d’être confronté à ce genre d’urgence… (Sourires)

Ce texte répond à un enjeu du XXIe siècle, en n’oubliant pas les plus démunis tout en garantissant l’hygiène d’un pays moderne comme le nôtre. Au demeurant, le coût pour la nation des 150 000 personnes exclues de l’accès à l’eau potable et des milliers de personnes n’ayant pas accès à un réseau d’hygiène n’est jamais explicitement pris en compte.

En 1987, un gouvernement de droite a instauré une taxe sur les briquets et allumettes pour l’affecter à la lutte contre les incendies de forêt. (Rires) C’est la même logique que nous proposons aujourd’hui avec une taxe sur les bouteilles d’eau, dont l’impact sur les foyers sera de 1 euro par an – moins que le prix d’un café dans ma commune.

Comme le suggèrent le rapporteur et notre président, il est indispensable de trouver un chemin apaisé pour faire aboutir ce texte et ainsi l’inscrire comme l’une des grandes réussites transpartisanes de cette législature.

Dans ma circonscription, la commune de Roquevaire, en régie publique, a mis en œuvre un dispositif d’accès à l’eau potable à 1 euro les trente premiers mètres cubes et progressif au-delà ; d’autres communes l’ont mis en œuvre, et je les soutiens. Je me réjouis de la traduction législative de leurs efforts à travers la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement.

M. Stéphane Demilly. À vingt-six jours de l’accueil par la France de la 21e Conférence des parties (COP21), le débat sur l’instauration d’un droit humain à l’eau potable et à l’assainissement revêt une dimension hautement symbolique.

Hier, nous avons eu le plaisir d’entendre dans l’Hémicycle M. Roger Nkodo Dang, président du Parlement panafricain et de débattre avec lui de la mise en place d’un plan d’urgence d’accès à l’électricité et à la lumière pour le continent africain. Il nous a présenté la recommandation, adoptée à l’unanimité par le Parlement panafricain le 7 octobre dernier, validant l’initiative de la Fondation Énergies pour l’Afrique, présidée par M. Jean-Louis Borloo. Il s’agit là d’un magnifique défi pour la décennie à venir, porté de surcroît par un ancien ministre français, un défi qui est en passe d’être relevé, ce dont nous pouvons être fiers.

Ce défi met en lumière d’autres enjeux vitaux, pour notre pays cette fois-ci, que l’on avait tendance à négliger. En effet, si aujourd’hui 99 % des Français accèdent à l’eau, près de 1 million de ménages n’y ont accès qu’à un prix considéré comme excessif, puisque leur facture d’eau dépasse 3 % de leurs revenus.

En novembre 2013, le nombre de bénéficiaires de tarifs sociaux en matière d’énergie s’élevait à 4 millions. Ce chiffre démontre une nouvelle fois la précarité énergétique dans laquelle se trouvent bon nombre de nos concitoyens, alors que notre pays fait partie du club des pays riches.

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui pose ainsi le débat à sa juste place, en proposant des outils visant à répondre à cet enjeu majeur de santé publique que constitue l’accès naturel à l’eau potable et à l’assainissement. Il est en effet essentiel qu’un combat de cette nature transcende les clivages politiques traditionnels pour faire l’objet d’un consensus politique le plus large possible.

Avec mes collègues du groupe Union des démocrates et indépendants, nous souhaitons que le germe de l’unité républicaine porté par cette proposition de loi trouve sa traduction dans les débats à venir au sein de cette commission puis dans l’Hémicycle, et que les remarques des uns et des autres y trouvent leur place, afin que nous parvenions à construire ensemble une grande loi consacrant le droit humain à l’eau potable et à l’assainissement dans notre pays.

Dans sa version actuelle, le texte pose plusieurs questions : des doutes sont émis par les uns et les autres, des amendements ont été déposés, dont certains par le rapporteur lui-même, ce qui laisse présager que cette proposition de loi devra évoluer pour prendre une forme permettant d’atteindre l’objectif que ses auteurs lui ont assigné.

Si l’article 1er, qui consacre un droit de l’Homme à l’eau – je mets une majuscule à « homme » –, fait difficilement débat en réaffirmant le droit à l’accès à l’eau comme un des fondements mêmes de notre démocratie, certaines notions ainsi que plusieurs mesures visant à sa mise en œuvre méritent d’être précisées. Ainsi, la notion de « quantité suffisante d’eau potable » n’est pas définie alors même que des chiffres pourraient être utilisés sur la base de différentes sources statistiques.

À l’article 2, l’obligation pour les communes d’installer des équipements n’est pas chiffrée. Or dans un contexte de baisse de la dotation globale de fonctionnement, il est absolument nécessaire de connaître le coût de telles mesures et de les anticiper – c’est un maire qui vous le dit pour avoir bouclé son budget lundi soir.

Par ailleurs, la proposition de loi crée une aide préventive de la collectivité, ainsi qu’une nouvelle allocation forfaitaire à l’eau. Ces idées sont intéressantes, reste à en connaître les modalités. La multiplication des aides ne risque-t-elle pas d’être contre-productive ? Ne serait-il pas plus judicieux d’approfondir ce qui existe déjà, notamment les dispositifs en cours d’expérimentation ? Je pense à la tarification progressive de l’eau qui présente la triple vertu d’être socialement intéressante, responsabilisante et respectueuse de nos ressources en eau.

Enfin, la taxe sur l’eau en bouteille prévue à l’article 5 pose question, même si j’en comprends les objectifs. Cette contribution ne risque-t-elle pas d’être directement répercutée sur les consommateurs, à un moment où toute nouvelle taxe est perçue comme une injustice par nos concitoyens ? Finalement, n’allons-nous pas taxer l’eau pour financer l’accès à l’eau ? Peut-être pouvons-nous imaginer un financement basé sur une assiette plus large, différente, avec un taux beaucoup plus faible et ne touchant pas un produit de première nécessité.

Monsieur le rapporteur, je pose ces questions dans le même esprit constructif que celui ayant présidé à l’élaboration de cette proposition de loi. Je souhaite que notre commission puisse y apporter de premières réponses afin, comme je l’ai dit, de le faire évoluer vers une version capable de susciter une adhésion beaucoup plus large.

M. Olivier Falorni. Comme le rappelle l’UNICEF, l’accès à l’eau potable fait partie des plus grandes réussites du millénaire. Cependant, 11 % de la population mondiale n’a pas accès à l’eau. Chaque minute dans le monde, un enfant de moins de cinq ans meurt d’une maladie liée à l’eau. Dans ces conditions, comment ne pas se réjouir qu’un travail dépassant les clivages et associant des dizaines de structures ait lieu sur un droit fondamental ?

Avec mon collègue Jacques Krabal, nous considérons que cette proposition de loi est pleine de bons sens. Même dans notre pays, des centaines de milliers de personnes n’ont pas accès ou ont un accès insuffisant à l’eau et à l’assainissement. Les coupures d’eau – inacceptables et totalement illégales – se poursuivent, malgré les saisines de tribunaux. L’obligation de saisine des services sociaux par le fournisseur et le maintien d’un service restreint sont des dispositifs respectueux des besoins fondamentaux et de la dignité humaine, l’aide étant aujourd’hui délivrée au cas par cas.

Le simple fait de prendre une douche ou de boire un verre d’eau restant inaccessible pour les personnes les plus vulnérables, nous ne pouvons que partager les dispositions de l’article 2 de cette proposition de loi. Outre l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, les collectivités locales ou les EPCI doivent assurer la mise à disposition des points d’eau gratuits. L’installation et l’entretien de toilettes publiques gratuites pour tous dans les communes de plus de 3 500 habitants, de douches gratuites et de laveries dans les communes de plus de 15 000 habitants, sont des dispositions respectueuses de la dignité de chacun. De plus, inscrire les toilettes gratuites pour tous évite la stigmatisation.

Le paiement de ces services, encore en vigueur dans de nombreuses communes, contribue à diminuer les coûts, mais ne couvre pas la globalité des dépenses. Si l’on peut s’accorder sur la nécessaire mise en œuvre de tous les moyens pour assurer l’accès de tous à l’eau potable et à l’assainissement, on ne peut éviter l’écueil du coût supporté dans un contexte budgétaire restreint. Le texte stipule que le délai de mise en œuvre est de cinq ans et que les collectivités peuvent faire appel à des subventions des agences de l’eau. Or celles-ci auront-elles les moyens de répondre à un nombre important de collectivités ? La contribution solidaire de 0,5 centime par litre d’eau embouteillée suffira-t-elle à répondre aux exigences du texte ?

Le prix moyen du mètre cube d’eau distribué en France est passé de 3,39 euros en 2008 à 4,15 euros en 2013. Or il s’agit bien d’une moyenne nationale : les Français ne sont pas égaux, parfois même au sein d’un même département, devant ce besoin élémentaire. C’est pourquoi nous plaidons pour une harmonisation des tarifs : il en va de l’égalité devant le droit humain à l’eau et à l’assainissement.

Enfin, à l’approche de la COP21, comment ne pas souligner la conjonction entre climat et eau ? Même si nous constatons dans nos circonscriptions que les citoyens sont de plus en plus sensibilisés aux économies d’eau, d’énergie, à la protection de la planète et au réchauffement climatique, en prenant des initiatives parfois surprenantes et très positives, il faut intensifier les campagnes de sensibilisation pour amener les collectivités, les entreprises et nos concitoyens à amplifier le mouvement. Chacun peut économiser son eau et prendre en compte l’empreinte eau des produits qu’il consomme. On peut aussi réduire sa consommation. Autant d’éléments à prendre en considération pour aller au-delà des dispositions du texte.

En conclusion, le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste ne peut qu’approuver une réponse sociale à un besoin élémentaire, conformément aux engagements nationaux sur ce droit essentiel, dont sont privées des centaines de milliers de personnes dans notre pays.

M. Patrice Carvalho. Cette proposition de loi semble salutaire. Nous connaissons le lien étroit entre l’eau et la vie : sans accès à l’eau, il ne peut y avoir de vie. Par conséquent, chaque foyer doit bénéficier de ce droit vital. Or la baisse du pouvoir d’achat des familles populaires, avec en particulier l’augmentation du coût de l’eau, tend à mettre en cause ce droit.

L’exposé des motifs indique que « si la facture d’eau et d’assainissement représente 1,25 % du revenu disponible moyen d’un ménage, près d’un million de ménages n’ont accès à l’eau qu’à un prix considéré comme excessif par rapport à leur revenu et qu’un consensus existe pour considérer que le prix de l’eau est inabordable lorsque cette facture dépasse 3 % des revenus effectifs du ménage ». Or ce pourcentage de 1,25 % vaut pour les hauts revenus : l’impact de la facture sur les petits revenus est bien plus important.

Il faut ajouter à ce problème la grande diversité des situations géographiques : le prix de l’eau n’est pas le même partout et les conditions d’exploitation et de fourniture ne sont pas identiques non plus selon que la collectivité est en régie ou en délégation de service. Le mètre cube d’eau le moins cher s’établit à 1,50 euro, le plus cher à 5,17 euros, soit une amplitude de 1 à 4. Dans ma petite commune, le coût va de 4 à 11 euros avec l’assainissement : une personne qui tire un mètre cube d’eau paie un mètre cube d’assainissement. L’écart peut être de 1 à 7 en milieu rural et en zone semi-urbaine. Depuis 2011, les tarifs ont augmenté en moyenne de 6,3 %, pour une inflation à 4 %, avec des augmentations parfois vertigineuses : 37 % à Évreux, 25 % à Bar-le-Duc, 24 % à Agen.

Les actuels dispositifs d’aide aux familles dans l’impossibilité de régler leurs factures ne sont pas satisfaisants. Par conséquent, la création d’une aide préventive pour les personnes en situation de précarité apparaît judicieuse. Je m’interroge cependant sur le financement de cette disposition, car le texte propose une contribution de solidarité de 0,5 centime par litre d’eau embouteillée : c’est plus près de 2 euros par an, monsieur le rapporteur, si l’on prend en compte les consommations moyennes d’eau en bouteille. Tous les médecins vous disent qu’il faut boire au moins un litre d’eau par jour. Je n’ai donc pas d’opposition formelle à cette disposition, mais une étude d’impact me semble nécessaire car cette contribution ne concernera pas seulement les géants de la distribution, elle concernera aussi les PME dans ce secteur, ce qui entraînera une répercussion sur le prix de la bouteille.

Mme Martine Lignières-Cassou. Mais on n’impose pas de boire de l’eau en bouteilles !

M. Patrice Carvalho. En 2020, les syndicats d’eau seront transférés aux intercommunalités. Or à l’heure actuelle, les grandes collectivités sont régies par le plan comptable M49 – les choses sont plus compliquées pour les petites communes rurales – et pratiquent la vérité du prix de l’eau. Autrement dit, l’investissement et le fonctionnement sont répercutés sur la facture. Quand on me dit que les premiers mètres cubes coûtent 1 euro, je demande à voir… Comment un tel prix est-il possible, surtout dans les grandes villes ?

M. François-Michel Lambert. Venez voir chez moi, à Roquevaire. Et c’est une municipalité communiste…

M. Patrice Carvalho. Ce sont les meilleurs, je sais ! (Sourires.)

Comment les collectivités rassemblées en intercommunalités géreront-elles l’eau, quand les unes payaient 4 euros et les autres 11 euros ? Une moyenne sera instaurée, si bien que celles qui avaient investi paieront pour celles qui ne l’ont pas fait. Bref, ce sera ingérable.

Monsieur le rapporteur, la proposition de loi devrait comporter l’obligation d’une réelle information sur la qualité de l’eau car, dans neuf cas sur dix, la qualité de l’eau tirée en sous-sol est meilleure que celle de certaines bouteilles. Or, quand des gens en grande difficulté financière achètent des packs entiers de bouteilles d’eau, alors qu’elles ont du mal à payer leur facture d’eau, il y a un vrai problème.

Lorsque je gérais un syndicat d’eau, les impayés – une centaine sur 3 000 abonnés – étaient soumis aux services sociaux, car la moitié des gens avaient les moyens, mais géraient mal leur budget ou ne voulaient tout simplement pas payer. Après intervention des services sociaux, ces gens réglaient leur facture. Si demain, on donne l’eau à tout le monde, les impayés vont se multiplier, ce qui sera plus difficile à gérer.

Mme Catherine Quéré. Je félicite le rapporteur de son important travail. Nous ne pouvons que soutenir ce texte, car il est inacceptable que des milliers de personnes n’aient toujours pas accès à l’eau potable.

Néanmoins, nous sommes nombreux à nous interroger sur l’article 5. Nous en avons beaucoup discuté avec M. Jean Launay, président du Comité national de l’eau, et Mme Viviane Le Dissez, qui ont reçu France Libertés. Les modalités de financement ne sont peut-être pas les bonnes. Certes, le consommateur sera peu touché. Mais si l’augmentation de la taxe n’impactera pas les grands groupes, elle risque de mettre en danger les petites et moyennes entreprises d’embouteillage d’eau implantées dans nos communes.

La loi a instauré une taxe conventionnelle entre les sources thermales et les communes où elles sont implantées avec un maximum de 0,453 euro par hectolitre. Aussi la mise en place d’une taxe nationale ne va-t-elle pas entraîner une diminution ou une perte de recettes pour les communes thermales, plus nombreuses en milieu rural et en montagne ? Les petites sources locales, les plus nombreuses, pourraient être contraintes de cesser leur activité.

En conclusion, si nous soutenons cette proposition de loi, les modalités de l’article 5 nous semblent devoir être revues. Serait-il possible de nous réunir pour trouver une solution acceptable par tous, par exemple une taxe assortie d’un plancher ?

M. Michel Heinrich. Je salue la passion avec laquelle le rapporteur a défendu sa proposition de loi. Si je suis, comme lui, attaché au principe du droit à l’eau potable, ma position ne sera pas différente de celle du groupe auquel j’appartiens : nous considérons que l’eau a un prix et que la gratuité serait déresponsabilisante, d’autant que les communes proposent des dispositifs d’aide aux personnes en difficulté financière.

Quant à la taxe sur les bouteilles, je n’en comprends pas la logique. Je ne vois pas en quoi les eaux embouteillées seraient responsables du prix de l’eau – c’est comme si vous vouliez financer la lutte contre la précarité énergétique en taxant les piles et les batteries !

Par conséquent, je ne voterai pas cette proposition de loi.

M. Bertrand Pancher. Je salue le travail remarquable réalisé par notre collègue Michel Lesage, dont la ténacité a permis à cette proposition de loi d’entamer son chemin législatif. Ce texte a d’autant plus de valeur à mes yeux qu’il est non seulement juste, mais aussi le fruit d’un travail transpartisan et d’une très étroite collaboration avec tous les acteurs de terrain, qui connaissent mieux que personne les problématiques auxquelles sont encore confrontés trop de nos concitoyens.

Certes, notre pays a d’ores et déjà mis en place divers dispositifs, mais il convenait d’ancrer les choses et de combler des lacunes. Je pense notamment à l’accès à l’eau, encore trop insatisfaisant pour les plus démunis, en particulier les sans-abri. C’est un vrai problème de santé publique et d’humanité, tout simplement.

La principale pierre d’achoppement de ce texte est – ne nous voilons pas la face – la taxe sur les eaux embouteillées. Or il convient d’abord de rappeler que cette taxe n’est pas nouvelle, la proposition de loi souhaitant simplement l’augmenter de 0,5 centime d’euro. Ensuite, cette difficulté ne tient pas longtemps si l’on se place du côté des consommateurs, un sondage IPSOS 2014 ayant démontré que 67 % des Français étaient favorables au principe d’une contribution de 1 centime d’euro sur chaque bouteille d’eau vendue, afin de financer un fonds de solidarité permettant aux personnes en difficulté d’avoir accès à l’eau. Du côté des petits embouteilleurs, ils ont été écoutés avec toute l’attention que méritaient leurs inquiétudes, mais ils doivent à présent être entendus au travers d’amendements, monsieur le rapporteur.

Au-delà de cette proposition de loi, nos habitudes doivent changer. L’accès à l’eau est, certes, un droit, mais, comme tout droit, il implique des devoirs, le premier étant de protéger cette ressource précieuse que nous nous plaisons encore trop souvent à croire inépuisable, noyés que nous sommes dans nos habitudes de surconsommation. Il revient à chacun d’entre nous de mieux respecter cette ressource et de mieux la partager.

Mme Geneviève Gaillard. Je tiens à féliciter M. Michel Lesage pour cette proposition de loi. Je m’étonne d’entendre certains collègues trouver que ce texte n’a pas de légitimité et d’autres soutenir que l’eau en bouteille est un produit de première nécessité : l’eau est un produit de première nécessité, mais l’eau embouteillée ne l’est pas dès lors que l’on peut disposer d’une eau du robinet potable, comme c’est le cas dans toutes les collectivités, et qui coûte deux cents fois moins cher ! Replaçons les choses là où elles doivent l’être… (Approbations sur divers bancs)

J’entendais ce matin quelqu’un parler des résistances au changement. Le changement exige du courage et un attachement à des valeurs, comme la solidarité. Si l’on veut que notre société avance, il faut savoir évoluer. Je ne m’inquiète pas pour les embouteilleurs d’eau : ils trouveront un moyen de s’en sortir et les conséquences pour eux ne seront pas aussi importantes qu’on l’imagine. Par contre, je ne vois pas l’intérêt de demander aux gens de consommer cette eau deux cents fois plus chère s’ils n’en ont pas les moyens.

Je me pose toutefois une question, monsieur le rapporteur : si les collectivités de plus de 3 500 habitants doivent installer et entretenir des toilettes publiques gratuites, et celles de 15 000 habitants des douches publiques gratuites, est-ce à dire que les personnes habitant dans des communes de 3 500 habitants ne prennent pas de douche ? Cette discrimination me semble choquante. Les communes de 3 500 habitants pourraient installer des douches en utilisant les vestiaires des stades, par exemple.

M. Jean-Pierre Vigier. Monsieur le rapporteur, selon l’exposé des motifs de votre proposition de loi, le droit à l’eau traduit deux exigences, dont « celle de la réalisation d’un équipement garantissant à chacun l’hygiène, la santé, la salubrité et la dignité ». Les collectivités locales ont déjà pris conscience de la nécessité de réhabiliter leurs réseaux d’eau et d’assainissement, dont la plupart, construits dans les années cinquante à soixante-dix, sont devenus vétustes, voire hors normes sanitaires. Or avec leurs faibles budgets et leur petit nombre d’abonnés, les petites collectivités en milieu rural n’ont plus les moyens de réhabiliter ces réseaux. Sans compter que leurs moyens financiers s’amenuisent avec la baisse des dotations d’État, mais aussi des subventions des agences de l’eau et des départements qui sont passées de 70 % à 40 %. Ce retard dans la rénovation des réseaux entraîne inévitablement des conséquences sur l’environnement et la qualité sanitaire de l’eau. Donner les moyens aux collectivités rurales de réhabiliter leur réseau ne doit-il faire partie de la mise en œuvre du droit à l’eau ?

M. Guy Baillart. Je ne reviendrai pas sur le principe même, incontestable, de cette proposition de loi : tous nos concitoyens doivent avoir accès à l’eau et nul ne peut en être privé.

M. le rapporteur a reconnu que le problème de l’accès à l’eau est relativement minoritaire. Par contre, les difficultés des services de distribution d’eau, en particulier en milieu rural, risquent de se multiplier et tout porte à croire que le prix de l’eau va probablement beaucoup augmenter. C’est le cas pour l’assainissement, dont les installations sont vieillissantes dans un contexte de réorientation des financements des agences de l’eau. C’est le cas également pour la distribution d’eau potable, car les réseaux datent souvent des années cinquante et ont été peu modifiés, si bien que pratiquement tous les syndicats d’eau vont se retrouver à devoir financer de lourds investissements.

Certes, la qualité des eaux souterraines est généralement bonne, mais dans certaines zones, je pense au Grand Ouest, cette eau est de si mauvaise qualité que l’Europe nous inflige des pénalités.

Certains ont l’air de penser que l’eau va devenir gratuite, ce qui ne sera pas le cas puisque ce texte prévoit des aides accordées sur critères sociaux. Par contre, le texte ne prévoit rien sur le cubage. Or cet aspect est important, car les personnes en grande difficulté financière dont les factures sont prises en charge ne se préoccupent pas forcément des fuites et des robinets qui coulent…

L’eau et l’assainissement ne relèvent pas toujours de la même facture. Dans de nombreux cas, il existe un syndicat pour l’assainissement et un syndicat pour l’eau. Une harmonisation me semble nécessaire car, au-delà de l’accès à l’eau, l’accès à l’assainissement doit être abordé, et le problème n’est pas aussi évident qu’on pourrait le penser.

Enfin, il existe un flou sur la définition des collectivités, ce qui sera d’autant plus gênant lors de la mise en place des communes nouvelles, dont certaines seront très étendues.

M. Gabriel Serville. En Guyane, près de 15 % de la population – dont 70 % en milieu rural – n’est pas raccordée au réseau d’eau potable. Cette situation, pour le moins paradoxale au regard de l’abondance des pluies sur le littoral, s’explique par la répartition non homogène de la population sur le territoire : 90 % se trouvent sur la bande littorale, et 10 % à l’intérieur des terres où il pleut moins souvent et où la ressource est difficilement récupérable.

En réalité, nous sommes confrontés à un problème davantage qualitatif que quantitatif, puisque l’obligation de respecter certaines normes européennes et nationales imposent de très lourds investissements en termes d’équipement, que les collectivités guyanaises n’ont pas forcément les moyens de réaliser. Nous avons connu une situation assez catastrophique en janvier 2005, quand 40 % des habitants de Camopi, commune située sur les bords de l’Oyapock, ont contracté une gastro-entérite après avoir consommé une eau de très mauvaise qualité.

Les fonds nécessaires pour régler le problème de l’accès à l’eau potable en Guyane sont évalués à 400 millions d’euros. Face aux voix qui s’élèvent pour dire que les embouteilleurs d’eau vont être pénalisés, j’espère que la sagesse va l’emporter pour faire passer le message de solidarité de cette proposition de loi. Compte tenu par ailleurs des nombreux problèmes de financement auxquels sont confrontées les collectivités territoriales et les EPCI, je suis prêt à accompagner cette démarche de solidarité jusqu’à son terme.

Mme Geneviève Gaillard. Très bien !

M. Jean-Yves Caullet. Il me semble que l’on gagnerait en souplesse si le texte se limitait à inscrire le principe de seuils de population minimaux, renvoyant à un décret le soin de les fixer.

M. le rapporteur. Le texte que nous examinons est appelé à évoluer encore, mais je note que le consensus existe sur le principe qui le sous-tend – l’institution du droit à l’eau pour tous, singulièrement pour les plus défavorisés, comme un droit fondamental. C’est un enjeu d’hygiène, de santé et de dignité des personnes, et parfois de salubrité. Le problème étant avéré, nous devons lui apporter une solution. Le consensus s’est fait aussi sur les bénéficiaires des mesures à prendre : premièrement, ceux dont les habitats précaires ne sont pas raccordés aux réseaux de distribution d’eau, et les personnes sans domicile fixe ; deuxièmement ceux qui sont raccordés, mais qui ne peuvent pas payer leur facture.

La question des coupures d’eau ne figure pas dans la version du texte qui vous est soumise parce qu’elle a été réglée par la loi dite « Brottes » du 15 avril 2013 et ses décrets d’application ; elles sont désormais interdites toute l’année, pour toutes les résidences, quels que soient les revenus des abonnés. Je sais que cela ne fait pas forcément consensus, notamment en cas de mauvaise foi, mais cette affaire est désormais juridiquement tranchée.

L’accord existe aussi sur le fait qu’il appartient aux communes de se mobiliser, puisqu’elles ont autorité pour installer des points d’eau, des douches et des toilettes publiques. Nous pouvons bien sûr revoir les seuils de population à partir desquels les collectivités devront installer ces équipements, mais j’appelle l’attention sur le fait que l’abaissement des seuils signifie l’augmentation du coût de la mesure car, à ce jour, il y a presque partout des toilettes publiques dans les agglomérations de plus de 3 500 habitants et beaucoup de douches publiques dans les villes de plus de 15 000 habitants.

L’octroi aux personnes vulnérables d’une aide préventive pour l’eau fait consensus parmi tous ceux qui travaillent à ces questions depuis longtemps. Son principe n’a pas été remis en cause au cours du débat, mais les modalités de son financement divisent.

Chacun le sait, la consommation d’eau est financée par les taxes, les transferts et les tarifs. On pourrait donc envisager d’augmenter la tarification de l’eau, que les communes déterminent. On aurait pu aussi concevoir de taxer les grandes sociétés délégataires ; mais pour éviter une distorsion de concurrence il aurait fallu taxer aussi les régies et, au final, la taxe aurait été répercutée sur les usagers ; c’est pourquoi cette solution ne nous est pas parue souhaitable, non plus que celle qui consisterait à augmenter la redevance perçue par les agences de l’eau. La modalité retenue me paraît la plus pertinente, mais rien n’empêche d’approfondir encore la réflexion entre collègues et avec le Gouvernement pour mettre au point une alternative qui semblerait meilleure. On pourrait d’ailleurs régler la question très simplement : il suffirait de distraire les 50 millions d’euros nécessaires au financement de l’aide préventive des 175 millions d’euros que l’État prélève chaque année sur les 2,3 milliards du fonds de roulement des agences de l’eau, lui-même constitué par un prélèvement opéré à 80 % sur les factures d’eau domestiques. Le problème serait réglé…

Il n’y a pas création d’une taxe nouvelle puisque la taxe sur les eaux et autres boissons embouteillées existe déjà. Certains arguments avancés pour s’opposer à son augmentation me semblent contradictoires : si, comme il a été dit, elle est répercutée sur les consommateurs d’eau en bouteille, elle ne pèsera pas sur les embouteilleurs. Au demeurant, notre collègue Bertrand Pancher a fait référence à une enquête conduite par la société Ipsos et dont les résultats sont éloquents : non seulement les deux tiers des personnes interrogées se disent favorables à une contribution solidaire d’un centime d’euro sur le prix d’achat d’une bouteille d’eau, mais 70 % des acheteurs d’eau en bouteille se déclarent prêts à contribuer.

Au vu de ces résultats, j’ai fait valoir aux embouteilleurs d’eau l’image positive que donnerait une pastille « solidarité » collée sur chaque bouteille pour attester du geste fait en faveur des plus démunis, et souligné que les acheteurs continueraient, j’en suis convaincu, d’acheter de l’eau embouteillée en dépit de ce centime supplémentaire, qui serait donc sans conséquence sur le chiffre d’affaires des entreprises considérées, y compris les plus petites d’entre elles.

Une proposition pratiquement identique à la nôtre avait été présentée par le Conseil général de l’environnement et du développement durable, saisi par Mmes Nathalie Kosciusko-Morizet et Roselyne Bachelot, alors ministres, qui publia en 2012 un rapport consacré à l’accès à l’eau et à l’assainissement dans des conditions acceptables par tous, confié à Mme Isabelle Monteils et à M. Pierre Rathouis, et dont les conclusions sont reprises dans le texte qui vous est soumis ; l’alternance politique empêcha l’aboutissement de la proposition.

Enfin, j’ai cité le nom de M. Martial Saddier par correction, car je le sais attaché à l’aide, par ce moyen, aux plus défavorisés, même si des divergences peuvent demeurer sur l’appréciation des instruments à mettre en œuvre pour atteindre l’objectif commun visé.

Mme Martine Lignières-Cassou. Contrairement à ce qui a été avancé, le dispositif proposé ne peut induire de distorsion de concurrence entre eaux embouteillées en France et eaux embouteillées à l’étranger dans la mesure où la taxe s’appliquera à toutes les eaux en bouteille vendues sur notre territoire, quelle que soit leur provenance. Par ailleurs, peut-être le texte devrait-il préciser davantage que l’aide préventive est calculée par ménage.

M. le rapporteur. Il est dit à l’article 3 que l’aide préventive porte sur une consommation d’eau annuelle forfaitaire de 50 mètres cubes par unité de consommation. L’aide n’est pas directement proportionnelle au nombre de personnes qui composent le foyer.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je serai contraint de m’absenter sous peu ; M. Christophe Bouillon me remplacera à la présidence. Il est acquis, au terme de cet intéressant débat, que la proposition de loi est appelée à évoluer. Dans l’intervalle, je souhaite que l’article 5, qui fait l’objet d’amendements de suppression, soit adopté par notre commission. Cela n’empêchera pas que les modalités de financement de l’aide préventive puissent être modifiées lors de l’examen de la proposition en séance plénière ou dans le cadre de l’article 88. Si l’article 5 était supprimé, l’équilibre du texte serait détruit et nous nous trouverions en difficulté.

Mme Catherine Quéré. Il est bon de savoir que la porte n’est pas fermée à des modifications ultérieures. (Sourires)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Ce disant, je ne pense pas trahir la pensée de notre rapporteur, dont les réponses nous ont fait comprendre qu’il est prêt à revoir les modalités de financement, le cas échéant.

M. le rapporteur. En effet.

II. EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
(article L. 1314-1 [nouveau] du code de la santé publique)

Reconnaissance et définition du droit humain à l’eau

I. LE DROIT EN VIGUEUR

Le fondement juridique du droit à l’eau potable et à l’assainissement est international : s’il ne figure pas dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme adoptée en 1948, la résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies du 28 juillet 2010 reconnaît l’accès à l’eau potable et à l’assainissement comme un droit fondamental, « essentiel au plein exercice du droit à la vie et de tous les droits de l’Homme ». Par ailleurs, plusieurs traités internationaux relatifs aux droits humains mentionnent explicitement l’importance de l’eau et de l’assainissement (séparément ou conjointement) dans le contexte de la mise en œuvre des droits humains, notamment la Convention relative aux droits de l’enfant (que la France a ratifiée en 1990) en ce qui concerne le droit à la meilleure santé possible. Tous les États membres de l’ONU ont l’obligation juridique de respecter, de protéger et de mettre en œuvre les droits humains.

En France, plusieurs initiatives ont été prises ces dernières années pour donner une traduction juridique nationale à ce nouveau droit, notamment la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques qui proclame dans son article premier que « chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d’accéder à l’eau potable dans des conditions économiques acceptables pour tous ». Cette disposition est codifiée à l’article L. 210-1 du code de l’environnement.

Parallèlement à la reconnaissance d’un « droit à l’eau » par la loi du 30 décembre 2006, quelques réglementations éparses permettent indirectement de garantir un meilleur accès à l’eau potable dans certaines situations :

– en cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d'urgence, notamment en cas de menace d'épidémie, le ministre chargé de la santé – et, dans certains cas, le préfet - peut, par arrêté motivé, prescrire dans l'intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques encourus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu afin de prévenir et de limiter les conséquences des menaces possibles sur la santé de la population (article L. 3131-1 du code de la santé publique) ; sur le fondement de ces dispositions, un préfet peut enjoindre au gestionnaire d'un immeuble de rétablir l'alimentation en eau potable d'un foyer ;

– le code de la sécurité intérieure (articles L. 732-1 et L. 732-2) impose aux exploitants d'un service public de production ou de distribution d'eau pour la consommation humaine de prévoir les mesures nécessaires au maintien de la satisfaction des besoins prioritaires de la population lors des situations de crise ;

– l’interdiction des coupures totales d’eau, pour les personnes ou familles éprouvant des difficultés particulières compte tenu de leurs ressources et qui bénéficient d’une aide du Fonds de solidarité pour le logement (article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles) ;

– enfin, dans les communes où le nombre des décès a dépassé le chiffre de la mortalité moyenne de la France pendant trois années consécutives, le préfet doit ordonner une enquête afin de déterminer notamment si la commune est pourvue d'eau potable de bonne qualité ou en quantité suffisante. Dans les cas particulièrement graves, les travaux jugés nécessaires peuvent être ordonnés par décret (article L. 1331-17 du code de la santé publique).

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

L’article premier du texte initial de la proposition de loi introduit dans le code de la santé publique un article L. 1314-1 disposant que le « droit à l’eau potable et à l’assainissement » est un droit de l’homme, et définissant ce que comprend ce droit :

– une quantité suffisante d’eau potable chaque jour pour répondre aux besoins élémentaires de chaque personne,

– un accès aux équipements permettant d’assurer son hygiène, son intimité et sa dignité,

– et l’utilisation des services et réseaux d’assainissement dans des conditions compatibles avec ses ressources.

L’article précise que l’ensemble des personnes publiques doivent concourir à la mise en œuvre de ce droit fondamental.

III. LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

Votre Rapporteur a proposé à la commission d’adopter plusieurs amendements. Tout d’abord, il est apparu juridiquement nécessaire de supprimer la mention « de l’homme » (ainsi que le mot « humain » dans le titre de la proposition de loi), pour deux raisons :

– le droit à l’eau concerne évidemment les femmes comme les hommes,

– la création d’un nouveau « droit de l’Homme » s’opère au niveau constitutionnel ou international et non pas par une loi ordinaire (en l’occurrence, le droit à l’eau résulte de conventions internationales auxquelles la France est partie) ; de plus, la loi en France ne reconnaît de droits qu’aux personnes.

D’autre part, les termes « garanti par l’État » qui figuraient dans le texte initial dans la même logique que celle de la loi « DALO » (loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable) ont été supprimés : comme le soulignait le Conseil d’État dans son rapport « L’eau et son droit » en 2010, la question « Qui est le débiteur du droit à l’eau ? » demeure juridiquement complexe. Le débiteur peut-il être l’État lorsque la compétence en la matière, dans l’ordre juridique national, appartient aux collectivités locales, ce qui est le cas en France ?

Enfin, votre Rapporteur a présenté plusieurs amendements rédactionnels, que la commission a adoptés.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD1 du rapporteur.

M. le rapporteur. Les articles d’une loi ne comportant pas de titres, l’amendement tend à supprimer l’intitulé de l’article.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD2 du rapporteur.

M. le rapporteur. À mon grand regret, la mention « de l’homme » doit être supprimée, à la fois parce que le droit à l’eau concerne évidemment tant les hommes que les femmes et parce que la création d’un nouveau droit de l’homme ne peut se faire qu’au niveau constitutionnel ou international. Par l’amendement CD53, je vous proposerai ultérieurement, pour les mêmes raisons, de modifier le titre de la proposition de loi.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine et adopte successivement l’amendement CD3, de conséquence, les amendements rédactionnels CD4 et CD6, et l’amendement de précision CD5, tous du rapporteur.

La Commission adopte l’article 1er ainsi modifié.

Article 2
(article L. 1314-2 [nouveau] du code de la santé publique)

Obligation pour les collectivités territoriales de mettre à disposition gratuitement des points d’eau potable, des toilettes publiques et des douches publiques sur leur territoire

Votre Rapporteur a proposé, dans l’article premier, d’insérer dans le code de la santé publique un nouveau Chapitre, consacré au droit à l’eau potable et à l’assainissement. L’article 2 vise à ajouter dans ce chapitre un nouvel article L. 1314-2 créant des obligations aux collectivités territoriales compétentes en matière de distribution d’eau potable et en matière d’assainissement.

I. LES COMPÉTENCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Au sein de la Deuxième partie du code général des collectivités territoriales, qui est relative aux communes, les articles L. 2224-7 et suivants définissent et régissent les services publics de l’eau et de l’assainissement. L’article L. 2224-7 définit le « service d’eau potable » comme « tout service assurant tout ou partie de la production par captage ou pompage, de la protection du point de prélèvement, du traitement, du transport, du stockage et de la distribution d'eau destinée à la consommation humaine ». Quant au « service public d’assainissement », sa définition résulte des articles L. 2224-7 et L. 2224-8 combinés : il s’agit d’assurer tout ou partie des missions de raccordement, de collecte, de transport et d’épuration des eaux usées, d’élimination des boues produites, et de contrôle des installations.

L’article L. 2224-11 précise que ces services publics sont financièrement gérés comme des SPIC (services publics à caractère industriel et commercial) : leur financement est assuré par les redevances versées par les usagers. Ils peuvent être exploités en régie, affermés ou concédés.

L’article L. 2224-7-1 confie une compétence obligatoire en matière de distribution d’eau potable aux communes, et l’article L. 2224-8, une compétence obligatoire en matière d’assainissement des eaux usées. Dans ce cadre, elles doivent établir un schéma de distribution d’eau potable et un schéma d’assainissement collectif.

Toutefois, ces compétences peuvent être exercées au niveau intercommunal. En pratique, il s’agit des compétences majeures des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, qui interviennent soit dans le cadre de leur propre périmètre, soit en s’associant à d’autres collectivités (communes, EPCI) au sein de syndicats mixtes.

L’eau et l’assainissement sont des compétences obligatoires des métropoles (article L. 5217-2) et des communautés urbaines (article L. 5215-20), et des compétences optionnelles des communautés d’agglomération (article L. 5216-5).

En application de l’article L. 2224-12, les communes et les groupements de collectivités territoriales doivent établir, pour chaque service d’eau ou d’assainissement dont ils sont responsables, un « règlement de service » qui définit « en fonction des conditions locales, les prestations assurées par le service ainsi que les obligations respectives de l'exploitant, des abonnés, des usagers et des propriétaires. ».

Toute fourniture d’eau potable, quel qu’en soit le bénéficiaire, fait l’objet d’une facturation au tarif applicable à la catégorie d’usagers correspondante ; la seule exception à ce principe de facturation concerne les bouches et poteaux d’incendie situés sur le domaine public (article L. 2224-12-1). Le montant des redevances est fixé par le conseil municipal ou l’organe délibérant de l’EPCI.

II. TROIS OBLIGATIONS COMBINÉES

Votre Rapporteur propose de charger les collectivités territoriales compétentes en la matière de prendre « les mesures nécessaires pour satisfaire les besoins élémentaires en eau potable » des personnes qui ne disposent pas d’un raccordement au réseau d’eau potable. Pour ce faire,

– toutes les collectivités territoriales concernées devront installer et entretenir des équipements de distribution gratuite d’eau potable ;

– de plus, dans chaque collectivité de plus de 3 500 habitants, des toilettes publique gratuites devront être accessibles à tous ;

– enfin, les collectivités de plus de 15 000 habitants devront installer et entretenir des douches gratuites, et éventuellement rendre possible l’accès aux douches ou laveries existant dans des établissements recevant du public.

III. LES MODALITÉS DE MISE EN œUVRE PROPOSÉES

L’article 2 de la proposition de loi prévoit que les dispositions de mise en œuvre du nouvel article L. 1314-2 du code de la santé publique devront être prises dans un délai de 5 ans. Il précise que cette mise en œuvre peut passer par l’utilisation des équipements sanitaires existants dans des bâtiments communaux et dans des équipements subventionnés par les collectivités (par exemple des gymnases, des piscines municipales…). Il prévoit enfin la possibilité que ces collectivités reçoivent des subventions pour mettre en œuvre leurs obligations, en particulier des subventions des agences de l’eau.

Votre Rapporteur a proposé plusieurs modifications rédactionnelles ou de précision, que la commission a adoptées.

*

* *

L’amendement CD7 est retiré.

La Commission examine et adopte successivement l’amendement de précision CD8 et les amendements rédactionnels CD9 et CD10, tous du rapporteur.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CD11 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement tend à inclure, dans le champ de l’article, des personnes non-résidentes, par exemple des touristes.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine et adopte successivement l’amendement rédactionnel CD12, l’amendement de précision CD13 et les amendements rédactionnels CD14 et CD15, tous du rapporteur.

La Commission adopte l’article 2 ainsi modifié.

Article 3
(article L. 115-3-1 [nouveau] du code de l’action sociale et des familles)

Création de l’aide préventive pour l’accès à l’eau potable et définition des bénéficiaires

I. LE DROIT EN VIGUEUR

L’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles dispose que « Dans les conditions fixées par la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, au regard notamment de son patrimoine, de l’insuffisance de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la collectivité pour disposer de la fourniture d’eau, d’énergie et de services téléphoniques dans son logement ».

Cette formulation est la rédaction de l’article L. 115-3 telle que modifiée par la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, mais une disposition législative disposant que toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières du fait d'une situation de précarité a droit à une aide de la collectivité pour accéder ou préserver son accès à une fourniture d'eau et d'énergie est présente dans le droit national en vigueur depuis 1993 (23).

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

On peut considérer qu’il résulte de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles et de l’article L. 210-1 du code de l’environnement qu’il existe en France un droit individuel à bénéficier d’un tarif social ou d’une « allocation eau ». Deux approches peuvent être envisagées pour contribuer concrètement à mettre ce droit en œuvre :

L’approche dite « préventive » vise à éviter la survenance d’une situation de précarité (en l’occurrence la « précarité hydrique ») par l’attribution d’aides en amont. L’approche dite « curative » vise à résoudre la situation de précarité par l’attribution d’aides prenant en charge tout ou partie des impayés constatés.

La démarche curative est déjà utilisée en France, puisqu’il existe des aides destinées à couvrir les impayés d’eau, versées par les centres communaux d’action sociale (CCAS) ou le fonds de solidarité pour le logement. Mais elle est nettement insuffisante, et doit donc être complétée par la généralisation et la pérennisation d’un soutien préventif. Actuellement, un tel dispositif existe dans une cinquantaine de collectivités territoriales, mais dans un cadre expérimental, celui de la « loi Brottes » de 2013 (24), et donc temporaire.

Le Fonds de solidarité pour le logement

Créé par la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, et géré par le conseil départemental ou par des intercommunalités, le Fonds de solidarité pour le logement (FSL) octroie des aides aux personnes qui rencontrent des difficultés pour assurer leurs dépenses de logement, ce qui inclut les dépenses relatives à l’eau, à l’énergie et au téléphone. Ces aides s’adressent aux locataires, aux propriétaires occupants, aux résidents de logements-foyer, sous conditions d’attribution (en tenant compte de l’ensemble des ressources de toutes les personnes qui composent le foyer, à l’exception des aides au logement, de l’allocation de rentrée scolaire, de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et de ses compléments éventuels). Chaque département a toutefois ses propres critères d’attribution des aides.

Le conseil départemental peut créer des fonds locaux pour l'octroi de tout ou partie des aides du fonds de solidarité pour le logement et en confier la gestion, par convention, aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale qui instruiront les demandes.

Le FSL est abondé par les collectivités territoriales et les opérateurs (eau, énergie, téléphone).

L’article L. 2224-12-3-1 du code général des collectivités territoriales dispose que les services publics d'eau et d'assainissement peuvent attribuer une subvention au fonds de solidarité pour le logement afin de contribuer au financement des aides relatives au paiement des fournitures d'eau ou des charges collectives afférentes mentionnées dans la loi du 31 mai 1990. Le montant de cette subvention facultative est plafonné à 0,5 % des montants hors taxes des redevances d’eau ou d’assainissement perçues.

L’article L. 115-3 précité inscrit le droit à l’eau comme composante du droit au logement. Votre Rapporteur souhaite qu’une disposition législative distincte établisse le droit à une aide de la collectivité pour disposer de la quantité indispensable d’eau indépendamment du logement.

Le nouvel article L. 115-3-1 proposé précise que les ménages concernés sont ceux dont les dépenses « incompressibles » consacrées à l’eau et à l’assainissement collectif (pour la satisfaction des besoins élémentaires) dépassent 3 % de leurs ressources disponibles, celles-ci étant définies comme celles prises en compte pour l’attribution des aides des FSL. Une quantité d’eau consommée, de 50 mètres-cube par an, complète la définition des ménages concernés. Un décret en Conseil d’État précisera les conditions d’application de cet article.

*

* *

La Commission examine et adopte successivement les amendements rédactionnels CD17, CD18, CD19 et CD20 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 3 ainsi modifié.

Article 4
(article L. 115-3-2 [nouveau] du code de l’action sociale et des familles)

Allocation forfaitaire d’eau

L’article L. 115-3-1 introduit par l’article 3 de la proposition de loi dans le code de l’action sociale et des familles a posé le principe de l’aide financière à verser aux personnes qui, compte tenu de leurs ressources, ne peuvent pas assurer la couverture de leurs dépenses consacrées à la satisfaction de leurs besoins élémentaires d’eau potable. L’article 4 de la proposition de loi complète le dispositif par un article L. 115-3-2 pour indiquer de quelle manière va être calculé le montant de cette « allocation forfaitaire d’eau ».

Pour les ménages « éprouvant des difficultés particulières » visés par le nouvel article L. 115-3-1, deux éléments vont être combinés pour calculer le montant d’allocation qui leur sera proposé :

– leurs ressources ;

– le prix de l’eau dans la zone où ils résident.

Deux seuils sont ainsi définis pour le niveau de ressources, et deux autres seuils pour le prix de l’eau. Les deux seuils de ressources sont fixés en application de dispositions législatives existantes (relatives d’une part, au « RSA socle », et d’autre part, à la couverture maladie universelle complémentaire ou CMU-C) ; les deux seuils de référence pour le prix de l’eau seront à fixer par décret en Conseil d’État.

Tout d’abord, le Gouvernement devra définir, par décret en Conseil d’État, le prix de référence de l’eau au-delà duquel les ménages visés auront droit à une allocation.

Dans les zones du territoire où les prix de l’eau sont supérieurs à ce prix de référence, il y aura deux catégories de ménages bénéficiaires :

– les ménages dont les ressources sont inférieures ou égales au « RSA socle », qui recevront l’allocation (dont le montant sera également fixé par le décret, et sera indexé sur celui du RSA socle) ;

– les ménages dont le niveau de ressources se situe entre le montant du RSA socle et le plafond de ressources donnant droit à la CMU-C : ces ménages recevront la moitié de l’allocation.

Le décret en Conseil d’État fixera également un niveau de prix de l’eau au-delà duquel l’eau pourra être considérée comme excessivement chère. Là où le prix de l’eau dépasse ce niveau, le montant de l’allocation forfaitaire d’eau sera doublé.

Niveaux actuels du « RSA socle » et du plafond de ressources pour la CMU-C

● Le revenu de solidarité active (RSA) vise à fournir aux personnes sans ressources ou disposant de faibles ressources un niveau minimum de revenu variable selon la composition du foyer.

Le régime juridique du RSA (qui a remplacé le RMI et l’API) a été défini par la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion. L’article L. 262-2 du code de l’aide sociale et des familles, dans sa rédaction issue de cette loi de 2008, prévoit que l’allocation « RSA » est versée aux foyers dont les ressources sont inférieures à un « niveau garanti ». Ce « niveau garanti » (que l’allocation permet d’atteindre) est la somme d’un montant forfaitaire et d’une fraction (62 %) des revenus professionnels des membres du foyer.

Le niveau du montant forfaitaire varie en fonction de la composition du foyer et du nombre d’enfants à charge. Pour un foyer sans revenus d’activité professionnelle, ce montant est appelé en pratique « RSA socle ».

Actuellement le montant mensuel du « RSA socle » est de 524,16 euros pour une personne seule, de 786,24 euros pour une personne seule avec un enfant ou pour un couple, et de 943,49 euros pour un couple avec un enfant (décret n° 2015-1231 du 6 octobre 2015 portant revalorisation du montant forfaitaire du revenu de solidarité active).

● La couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) donne droit à la prise en charge gratuite de la part complémentaire des dépenses de santé. Bénéficient de la CMU-C les personnes et familles dont les ressources sont inférieures à un plafond annuel de référence, plafond qui varie selon le lieu de résidence (métropole ou outre-mer) et la composition du foyer. La loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle a prévu ce droit à une couverture complémentaire (articles L. 861-1 et suivants du code de la sécurité sociale).

Pour une personne seule en métropole, le plafond annuel de ressources en dessous duquel est ouvert le droit à la CMU-C est actuellement de 8 645 euros (soit 720,42 euros par mois). Pour un foyer comptant deux personnes, il est de 12 967 euros par an (soit 1 080,58 euros par mois).

C’est au pouvoir réglementaire qu’il appartiendra, outre la fixation des seuils précités qui feront l’objet d’un décret en Conseil d’État, d’arrêter les modalités du versement de l’allocation aux bénéficiaires. Votre Rapporteur considère que cette tâche devrait être confiée aux caisses d’allocations familiales (CAF) et aux caisses de la mutualité sociale agricole (MSA), en coopération avec les services de l’État, car l’identification des ménages concernés sera aisée à partir des informations dont disposent ces caisses.

*

* *

La Commission examine et adopte l’amendement de précision CD21 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD22 du même auteur.

M. le rapporteur. L’objectif étant que la proportion des revenus consacrée à l’eau n’excède pas 3 %, il faut, pour définir les bénéficiaires de l’allocation forfaitaire, tenir compte des revenus des ménages mais aussi du tarif de l’eau. Le croisement de ces données permettra de déterminer les personnes éligibles à l’allocation forfaitaire. On estime à 1 million sur les 2,5 millions d’allocataires du revenu de solidarité active socle ceux qui percevront l’allocation forfaitaire d’eau. C’est ce que précise l’amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de précision CD23 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD24 du même auteur.

M. le rapporteur. L’amendement précise que ce n’est pas aux services des caisses d’allocations familiales qu’il revient de distribuer l’aide mais que les modalités de distribution seront fixées par le pouvoir réglementaire.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine et adopte successivement les amendements rédactionnels CD25, CD26 et CD28 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CD29 du même auteur.

M. le rapporteur. L’article 40 de la Constitution ne nous permettant pas de confier aux organismes de Sécurité sociale une nouvelle mission pouvant constituer une création de charge, l’amendement tend à supprimer l’alinéa 4 de l’article.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD27 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement précise qu’un décret en Conseil d’État fixera le prix de référence de l’eau au-delà duquel le montant de l’allocation forfaitaire d’eau est doublé.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 ainsi modifié.

Article 5
(article L. 1314-3 [nouveau] du code de la santé publique)

Fonds de solidarité pour le droit à l’eau

Le nouvel article L. 1314-1 du code de la santé publique, créé par l’article premier de la proposition de loi, a défini le droit à l’eau potable et à l’assainissement. Le nouvel article L. 1314-2 du même code, introduit par l’article 2 de la proposition de loi, a créé des obligations pour les collectivités territoriales en matière d’accès à l’eau potable, aux toilettes et aux douches, pour les personnes ne disposant pas d’un raccordement aux réseaux. L’article 5 de la proposition de loi complète le dispositif en introduisant un article L. 1314-3 dans le même code, pour qu’un Fonds de solidarité pour le droit à l’eau permette de financer l’allocation forfaitaire d’eau.

I. UN FONDS DÉDIÉ AU SEIN DU F.N.A.L

Le Fonds national d’aide au logement (FNAL) est un organisme pour lequel les URSSAF prélèvent une cotisation sociale dont le taux varie selon l’effectif des entreprises. Cette cotisation sociale à la charge des employeurs, définie à l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale, permet de financer l’aide personnalisée au logement (APL). Le Fonds a été institué par la loi n° 77-1 du 3 janvier 1977 portant réforme de l’aide au logement. Il est doté de l’autonomie financière, administré par un conseil de gestion présidé par le ministre chargé du logement, et géré par la Caisse des dépôts et consignations.

Votre Rapporteur propose qu’au sein du FNAL soit constitué un « fonds de solidarité pour le droit à l’eau », afin de financer l’allocation forfaitaire d’eau et ses frais de gestion.

II. UNE CONTRIBUTION ADDITIONNELLE À LA TAXE EXISTANTE SUR LES EAUX EN BOUTEILLE

L’article 520 A du code général des impôts définit une taxe sur les eaux embouteillées (qui s’applique également à d’autres boissons non alcoolisées (voir encadré). Le tarif actuel de cette taxe est de 0,0054 euro par litre ; en 2014, son produit s’est élevé à environ 74 millions d’euros.

Votre Rapporteur propose d’appliquer à la même assiette une contribution additionnelle d’un demi-centime par litre (0,005 euro par litre), afin que la recette de cette contribution additionnelle finance le Fonds de solidarité pour le droit à l’eau, et ainsi, l’allocation forfaitaire d’eau.

Article 520 A du code général des impôts

« I. Il est perçu un droit spécifique :

a) Sur les bières, dont le taux, par hectolitre, est fixé à :

3,69 € par degré alcoométrique pour les bières dont le titre alcoométrique n'excède pas 2,8 % vol. ;

7,38 € par degré alcoométrique pour les autres bières ;

(…)

b) Sur les boissons non alcoolisées énumérées ci-après dont le tarif, par hectolitre, est fixé à :

0,54 € pour les eaux minérales naturelles ou artificielles, eaux de source et autres eaux potables, eaux de laboratoire filtrées, stérilisées ou pasteurisées, ainsi que pour les boissons gazéifiées ou non, ne renfermant pas plus de 1,2 % vol. d'alcool, livrées à titre onéreux ou gratuit en fûts, bouteilles ou boîtes, à l'exception des sirops et des jus de fruits et de légumes et des nectars de fruits.

II. Pour les eaux et boissons mentionnées au b du I, le droit est dû par les fabricants, les exploitants de sources, les importateurs et les personnes qui réalisent des acquisitions intracommunautaires sur toutes les quantités livrées à titre onéreux ou gratuit sur le marché intérieur, y compris la Corse et les départements d'outre-mer.

Le droit est liquidé lors du dépôt, au service de l'administration dont dépend le redevable, du relevé des quantités livrées au cours du mois précédent. Ce relevé doit être déposé et l'impôt acquitté avant le 25 de chaque mois.

Les expéditions vers un autre État membre de l'Union européenne et les exportations vers un pays tiers sont exonérées du paiement du droit spécifique lorsqu'elles sont réalisées directement et sans intermédiaire par les personnes mentionnées au premier alinéa ou par une société de distribution.

III. Les modalités d'application des dispositions qui précèdent seront, en tant que de besoin, fixées par décret. »

*

* *

La Commission est saisie des amendements identiques CD54 de M. Dino Cinieri et CD55 de M. Philippe Folliot.

M. Guillaume Chevrollier. Nous proposons par l’amendement CD54 de supprimer l’article, qui prévoit de financer le nouveau fonds de solidarité du droit à l’eau en taxant les eaux embouteillées. Ce mécanisme n’a aucune justification : le prix des eaux en bouteille n’entre en rien dans la tarification de l’eau du robinet. Alors que le Gouvernement avait promis une pause fiscale, de nouvelles taxes fleurissent. Nous avons entendu le président Jean-Paul Chanteguet expliquer qu’une évolution était possible. Il est vrai que l’examen du projet de loi de finances pour 2016 nous a habitués aux reculades du Gouvernement… (Murmures divers) Celui-ci a déjà renoncé aux dispositions qui devaient frapper les retraités modestes, les personnes handicapées et les étudiants ; peut-être aurons-nous gain de cause pour les eaux embouteillées.

Il le faut, car ce projet de taxe, loin d’être anecdotique, aura un très fort impact sur la filière, notamment sur les PME ; 10 000 emplois directs et 30 000 emplois indirects sont en jeu. La taxe aura aussi une incidence sur le pouvoir d’achat des Français puisque son montant sera nécessairement répercuté sur le prix de la bouteille – or 94,6 % de la population achèterait de l’eau embouteillée. Ainsi, la taxe projetée représenterait une hausse non négligeable de 4,4 % du prix d’une bouteille de Cristalline vendue 0,11 euro. Dans la proposition de loi à laquelle vous avez fait référence, monsieur le rapporteur, notre ancien collègue André Flajolet assurait le financement de l’aide par la création d’une taxe prélevée sur les redevances perçues par les services d’eau et d’assainissement, ce qui avait une certaine logique. Arrêtons de créer de nouvelles taxes qui mettent à mal la compétitivité de nos entreprises.

M. Philippe Folliot. Je partage la philosophie d’un texte tendant à remédier à la situation de gens qui, vivant dans la précarité, ont difficilement accès à l’eau. Je remarque par ailleurs qu’à la précarité des individus s’ajoute une « précarité territoriale », qui doit également être prise en considération. Ma commune étudie ainsi un projet d’extension du réseau public d’adduction à l’eau potable, à laquelle des habitants n’ont pas accès pour l’instant. La difficulté tient à ce que dans ces zones très peu densément peuplées, la réalisation de ces équipements représente un coût considérable. Il faut prévoir un mécanisme de solidarité tel que tout le monde ait un accès direct à l’eau. En l’espèce, l’investissement nécessaire s’élève à 1 million d’euros pour servir une dizaine d’usagers.

Je reviens à l’amendement CD55, qui tend à supprimer un dispositif particulièrement injuste. Pourquoi viser les seuls embouteilleurs d’une eau dont on vante par ailleurs les vertus ? Il me souvient d’avoir assisté à des réunions dans lesquelles nous nous inquiétions de l’hydratation des populations… Si, pour atteindre l’objectif recherché, une taxe est nécessaire, elle devrait dans l’absolu concerner d’autres boissons moins bonnes pour la santé.

Sur un autre plan, cette taxation aura des conséquences dommageables pour les PME qui embouteillent dans des zones en difficulté. Dans ma circonscription, deux embouteilleurs sont installés au centre d’une zone de revitalisation rurale comptant moins de dix habitants au kilomètre carré. Ces entreprises pourvoient des emplois, qualifiés ou non qualifiés, très importants pour notre territoire. La perspective d’un doublement de la taxe ne peut qu’inquiéter, qu’il s’agisse de leur capacité d’investissement ou du maintien des emplois, voire de l’activité elle-même.

J’ai entendu ce qu’a dit le président Jean-Paul Chanteguet, mais, en attendant que la discussion reprenne en séance plénière pour permettre une autre formulation, la sagesse commanderait d’adopter les amendements de suppression de l’article pour rassurer des PME qui jouent un rôle d’aménagement du territoire essentiel dans des zones rurales très fragiles.

Présidence de M. Christophe Bouillon, vice-président de la Commission

M. le rapporteur. Il est contradictoire de dire que les embouteilleurs pâtiront d’une taxe dont vous expliquez ensuite qu’ils la répercuteront sur le prix de vente des bouteilles, et donc sur les clients. Quant aux consommateurs, ceux-là mêmes qui acceptent de payer 100, 200, voire 300 fois plus cher pour boire de l’eau en bouteille plutôt que l’eau du robinet, ils sont bien sûr prêts à payer un centime d’euro en plus chaque bouteille d’eau achetée – ce qui représente un euro par an et par personne – pour faire acte de solidarité. J’avais même songé à l’impression d’une pastille sur l’étiquette.

Je ne suis pas désespérément attaché à ce mode de financement, et si des propositions alternatives sont avancées, elles seront examinées, mais je considère celle qui vous est faite comme la plus juste et la plus pertinente, et elle ne pénalisera ni les embouteilleurs ni les consommateurs. L’eau embouteillée est source de profits considérables pour les sociétés multinationales, ce qui est très bien, et l’impact de l’augmentation de la taxe sera très faible pour elles. Et comme les PME dont vous vous inquiétez pourront également augmenter d’un centime d’euro leur prix de vente, le rapport de forces interne ne sera pas modifié. Avis, donc, défavorable aux amendements de suppression.

M. Philippe Folliot. Je n’ai pas parlé du coût pour le consommateur de la mesure proposée mais de son impact sur les entreprises du secteur – non pas les multinationales mais les PME qui, comme les deux qui sont implantées dans ma circonscription, utilisent des capitaux locaux pour employer une main-d’œuvre locale, dans une logique d’aménagement du territoire. Ma question demeure : pour quoi ne taxer que l’eau en bouteille et non les sodas ?

M. le rapporteur. Ils le sont aussi.

M. Philippe Folliot. Il s’agit d’un secteur fragile, soumis à la concurrence, Si nous souhaitons ne pas être en contradiction avec la politique du Gouvernement tendant à engager une action dynamique en faveur de l’aménagement du territoire, ne donnons pas, par cette taxe, un signe contraire. Pour la PME dont je vous ai parlé, le doublement de la taxe représenterait 600 000 euros ; c’est tout sauf insignifiant pour une entreprise de petite taille.

M. Guillaume Chevrollier. Les entreprises ne répercutent pas entièrement les taxes dans leurs prix de vente ; elles en absorbent une partie, ce qui porte atteinte à leur compétitivité. Par ailleurs, les réponses aux enquêtes d’opinion sont sujettes à caution, tant elles varient en fonction de la formulation des interrogations. Les consommateurs seront-ils vraiment d’accord pour payer plus cher l’eau en bouteille, ou la hausse bloquera-t-elle la consommation en cette période de tension sur le pouvoir d’achat ? La question reste posée.

M. Christophe Bouillon, président. Le président Jean-Paul Chanteguet a appelé la Commission à adopter l’article 5, au bénéfice du réexamen ultérieur du dispositif de financement du fonds de solidarité du droit à l’eau, pour rassurer chacun. Le rapporteur a indiqué qu’il n’y est pas opposé. Il va sans dire que, si l’article 5 est supprimé, tout l’édifice s’écroule ; ce n’est pas la volonté partagée des membres de la Commission.

M. le rapporteur. Je rappelle que l’article 520 A du code général des impôts prévoit déjà la perception d’une taxe sur les boissons non alcoolisées, dont les eaux embouteillées. L’enquête d’opinion réalisée par la société IPSOS à la demande de France Libertés figure sur le site de la fondation. Je rappelle enfin que la somme en jeu s’élève à 50 millions d’euros par an ; c’est très peu au regard du chèque énergie, dont le coût est de 600 millions d’euros. Je le redis, si des modalités plus pertinentes de financement du fonds de solidarité du droit à l’eau sont proposées, je ne m’y opposerai pas, en particulier si la collectivité nationale décide de consacrer à cette fin 0,50 % des 12 milliards d’euros prélevés chaque année sur les factures d’eau. L’important, c’est la cause que nous défendons ; le financement de la mesure peut aussi se traduire par une augmentation de 1 euro par an sur les factures d’eau, mais le mécanisme que nous avons retenu est celui qui nous a paru être le plus juste et le moins pénalisant pour les entreprises et pour les consommateurs d’eau embouteillée. Avis, donc, défavorable aux amendements de suppression.

M. Christophe Bouillon, président. Les amendements sont-ils maintenus ?

M. Guillaume Chevrollier. Je maintiens l’amendement CD55 et je dois vous dire ma perplexité devant la manière dont cette proposition de loi est écrite. Ce texte, qui est pourtant le fruit de mois de travail que je salue, prend l’eau de toute part, si j’ose dire, et l’on parle déjà de le réviser. (Murmures divers) C’est surprenant.

Mme Martine Lignières-Cassou. Faites d’autres propositions !

M. Christophe Bouillon, président. Notre rapporteur a montré qu’il tient bien la barre (Sourires) mais qu’il sait aussi tenir compte des observations qu’il entend.

La Commission rejette les amendements CD54 et CD55

Puis elle adopte successivement l’amendement rédactionnel CD31 et l’amendement de précision CD32 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD33 rectifié du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement précise que la contribution additionnelle s’appliquera à tous les fûts, bouteilles ou boîtes, quelle que soit leur contenance. Nous avions songé un temps à en exclure les bonbonnes de plus de dix litres dont on se sert dans les entreprises, mais cette rédaction aurait posé beaucoup trop de difficultés d’application.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine et adopte ensuite l’amendement de précision CD34 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 5 ainsi modifié, le groupe Les Républicains votant contre.

Article 6
(articles L. 351-6 et L. 351-7 du code de la construction et de l’habitation et article 6 de la loi
n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement)

Financement de la mise en œuvre du droit à l’eau

I. DISPOSITIONS DE COORDINATION RELATIVES AU F.N.A.L

L’article 5 de la proposition de loi ayant prévu l’intégration d’un Fonds de solidarité pour le droit à l’eau au sein du Fonds national d’aide au logement (FNAL), l’article 6 tire les conséquences de ces dispositions pour modifier les articles du code de la construction et de l’habitation relatifs au FNAL.

Ainsi, l’article L. 351-6 de ce code, qui définit les missions du FNAL, sera complété par un alinéa disposant que ce fonds « finance l’allocation forfaitaire d’eau prévue par l’article L. 115-3-2 du code de l’action sociale et des familles ainsi que les dépenses de gestion y afférentes ». D’autre part, l’article L. 351-7 qui définit les recettes du FNAL est modifié afin de distinguer :

– les recettes existantes du FNAL, qui ne sont pas modifiées par la proposition de loi et qui continueront à financer les allocations citées à l’article L. 351-6 ;

– et la nouvelle recette (contribution additionnelle à la taxe sur les boissons en bouteille), qui sera affectée au financement de l’allocation forfaitaire d’eau.

II. UN FONDS « EAU » OBLIGATOIRE DANS CHAQUE F.S.L

Actuellement, il est possible de demander une aide financière curative au Fonds de solidarité pour le logement (voir encadré p. 71), lorsque la consommation d’eau est facturée dans les charges du logement (en revanche, lorsque l’occupant du logement reçoit une facture d’eau individualisée, il doit adresser sa demande soit à la CAF, soit au CCAS).

Mais chaque FSL, au niveau départemental, a son propre règlement intérieur et donc ses propres critères d’attribution. Certains départements conditionnent, par exemple, l'obtention d'une aide du FSL au fait que le foyer touche uniquement le revenu de solidarité active (RSA). Et il n’y a pas, au sein de chaque FSL, de dispositif spécifiquement consacré à l’eau.

Votre Rapporteur propose de compléter l’article 6 de la loi du 31 mai 1990 précitée visant à la mise en œuvre du droit au logement, pour prévoir que chaque FSL doit comprendre un fonds destiné à financer les aides pour l’eau.

*

* *

La Commission examine et adopte l’amendement rédactionnel CD35 et les amendements de précision CD36, CD 37, CD 38, CD39 et CD40 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 6 ainsi modifié.

Article 7
(articles L. 1413-1, L. 2224-5 et L. 2224-5-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)

Suivi des mesures de mise en œuvre du droit à l’eau prises au niveau communal

L’article 7 de la proposition de loi vise à impliquer les autorités communales dans la mise en œuvre de l’article L. 1314-1 du code de la santé publique créé par l’article premier.

I. UN SUIVI PAR L’ASSEMBLÉE DÉLIBÉRANTE

L’article L. 2224-5 du code général des collectivités territoriales dispose que le maire ou le président de l’EPCI doit présenter chaque année à l’assemblée délibérante un rapport sur le prix et la qualité du service public d’eau potable, destiné notamment à l’information des usagers. Ce rapport, ainsi que l’avis du conseil municipal ou de l’assemblée délibérante de l’EPCI, sont mis à la disposition du public.

Votre Rapporteur propose de compléter l’article L. 2224-5 par un alinéa précisant que ce rapport annuel doit comporter une description des mesures prises par la commune et les services de l’eau et de l’assainissement pour la mise en œuvre de l’article L. 1314-1 du code de la santé publique.

Il propose, d’autre part, de créer un article L. 2224-5-1 pour compléter ce débat annuel au sein du conseil municipal (ou au niveau de l’EPCI) par un débat spécifique sur la mise en œuvre du droit à l’eau potable et à l’assainissement, basé sur un rapport présenté par le maire (état des lieux et actions menées au niveau local), et organisé dans les trois ans qui suivent les élections municipales. L’article proposé précise que ce débat portera notamment sur les enjeux liés à la tarification à une ou plusieurs tranches, pour tenir compte, le cas échéant, des résultats de l’expérimentation prévue par l’article 28 de la « loi Brottes » précitée.

II. UN SUIVI PAR LA COMMISSION CONSULTATIVE DES SERVICES PUBLICS LOCAUX

L’article L. 1413-1 du code général des collectivités territoriales prévoit la création d’une commission consultative des services publics locaux par les régions, les départements, les communes de plus de 10 000 habitants, les EPCI de plus de 50 000 habitants et les syndicats mixtes comprenant au moins une commune de plus de 10 000 habitants, pour l’ensemble des services publics qu’ils délèguent à un tiers ou qu’ils exploitent en régie dotée de l’autonomie financière. Cette commission comprend des membres de l’assemblée délibérante et des représentants d’associations locales. Elle est présidée par le maire, le président du conseil départemental, le président du conseil régional, ou le président de l’organe délibérant de l’EPCI ou du syndicat mixte.

Chaque commission est obligatoirement consultée par l’assemblée délibérante préalablement à la prise de quatre catégories de décisions :

– délégation de service public,

– création d’une régie dotée de l’autonomie financière,

– partenariat,

– participation du service de l’eau ou de l’assainissement à un programme de recherche et de développement.

Votre Rapporteur propose d’ajouter à cette liste une consultation obligatoire de la commission sur tout projet de décision qui affecte de manière significative la mise en œuvre du droit à l’eau potable et à l’assainissement mentionné à l’article L. 1314-1 du code de la santé publique (résultant de l’article premier de la présente proposition de loi).

*

* *

La Commission examine et adopte l’amendement de précision CD41, l’amendement rédactionnel CD42 et les amendements de précision CD43, CD44, CD45, CD46 et CD47 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD48 du rapporteur.

M. le rapporteur. La loi dite « Brottes » du 15 avril 2013, qui lance une expérimentation de cinq ans, ne fournit malheureusement pas la base légale qui permettrait d’instituer une première tranche de consommation gratuite ou à prix réduit. En proposant de supprimer cette possibilité, l’amendement laisse les collectivités définir la politique de prix qu’elles souhaitent, sans leur donner d’orientation, car une tarification progressive obéit à une logique plus environnementale que sociale : lorsque le prix du mètre cube d’eau augmente par tranche, les familles nombreuses sont pénalisées.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine et adopte successivement l’amendement de précision CD49 et l’amendement rédactionnel CD50 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 7 ainsi modifié.

Article 8
(article L. 213-1 du code de l’environnement)

Demande de rapport

Le Comité national de l’eau, créé par la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution, est un organisme consultatif placé auprès du ministre chargé de l’environnement. L’article L. 213-1 du code de l’environnement dispose qu’il a notamment pour mission de donner son avis sur le prix de l’eau facturé aux usagers et sur la qualité des services publics de distribution d’eau et d’assainissement.

Votre Rapporteur propose de compléter l’article L. 213-1 pour charger le Comité national de l’eau de remettre tous les trois ans au Parlement et au Gouvernement un rapport sur la mise en œuvre du droit à l’eau potable et à l’assainissement. Le Comité national de l’eau sera également chargé de recevoir les réclamations liées à la méconnaissance éventuelle de ce droit.

*

* *

La Commission examine et adopte l’amendement CD51 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 8 ainsi modifié.

Article 9
Gage

Votre Rapporteur propose la suppression de cet article 9, le gage prévu étant inopérant.

*

* *

La Commission examine et adopte l’amendement CD52 du rapporteur.

En conséquence, l’article 9 est supprimé.

Titre
Proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit à l’eau potable et à l’assainissement

La Commission examine l’examen CD53 du rapporteur.

M. le rapporteur. Pour la raison que j’ai indiqué au début, il convient d’intituler le texte « Proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit à l’eau potable et à l’assainissement », l’expression « droit humain » étant inusitée en droit français.

La Commission adopte l’amendement.

*

Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.

TABLEAU COMPARATIF

___

Dispositions en vigueur

___

Texte de la proposition de loi

___

Texte adopté par la Commission

___

 

PROPOSITION DE LOI VISANT À LA MISE EN ŒUVRE EFFECTIVE DU DROIT HUMAIN À L’EAU POTABLE ET À L’ASSAINISSEMENT

PROPOSITION DE LOI VISANT À LA MISE EN ŒUVRE EFFECTIVE DU DROIT À L’EAU POTABLE ET À L’ASSAINISSEMENT

amendement CD53

 

Article 1er
Droit de l’homme à l’eau

Article 1er

amendement CD1

Code de la santé publique

   

Première partie : Protection générale de la santé

Livre III : Protection de la santé et environnement

Titre Ier : Dispositions générales

Chapitre III : Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail

Après le chapitre III du titre Ier du livre III de la première partie du code de la santé publique, il est inséré un chapitre IV ainsi rédigé :

Le titre Ier du livre III de la première partie du code de la santé publique est complété par un chapitre IV intitulé : « Droit à l’eau potable et à l'assainissement » et comportant un article L. 1314-1 ainsi rédigé :

 

« Chapitre IV

Alinéa supprimé

 

« Droit de l’homme à l’eau

Alinéa supprimé

amendement CD2

 

« Art. L. 1314-1. - Le droit à l’eau potable et à l’assainissement est un droit de l’homme garanti par l’État.

« Art. L. 1314-1. – Le droit à l’eau potable et à l’assainissement comprend le droit, pour chaque personne :

 

« Il comprend le droit, pour chaque personne :

amendement CD3

 

« 1° De disposer chaque jour d’une quantité suffisante d’eau potable pour répondre à ses besoins élémentaires ;

« 1° (Sans modification)

 

« 2° De disposer ou d’accéder aux équipements lui permettant d’assurer son hygiène, son intimité et sa dignité ;

« 2° D’accéder aux équipements lui permettant d’assurer son hygiène, son intimité et sa dignité ;

amendement CD4

 

« 3° D’utiliser les services et réseaux d’assainissement dans des conditions compatibles avec ses ressources.

« 3° (Sans modification)

 

« L’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics concourent, dans le cadre de leurs compétences, à la mise en œuvre du droit à l’eau potable et à l’assainissement dans des conditions fixées par décret. »

« L’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics concourent à la mise en œuvre du droit à l’eau potable et à l’assainissement. »

amendements CD6 et CD5

 

Article 2

Article 2

 

Après l’article L. 1314-1 du même code, il est inséré un article L. 1314-2 ainsi rédigé :

I. – Le chapitre IV du titre Ier du livre III de la première partie du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de l’article 1er, est complété par un article L. 1314-2 ainsi rédigé :

amendements CD8 et CD15

 

« Art. L. 1314-2. – Les collectivités territoriales ou les établissements publics de coopération intercommunale responsables de l’eau potable et de l’assainissement prennent les mesures nécessaires pour satisfaire les besoins élémentaires en eau potable et assainissement des populations résidant sur leur territoire qui sont sans branchement à l’eau potable.

« Art. L. 1314-2. – Les collectivités territoriales ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de distribution d’eau potable et en matière d’assainissement prennent les mesures nécessaires pour satisfaire les besoins élémentaires en eau potable et en assainissement des personnes qui ne disposent pas d’un raccordement au réseau d’eau potable.

amendements CD9, CD10 et CD11

 

« En vue de mettre en œuvre le droit de vivre dans un environnement équilibré, d’assurer la salubrité publique et la dignité de tous, les collectivités installent et entretiennent des points d’eau potable sur leur territoire et destinés à l’accès public, gratuit et non discriminatoire à l’eau potable.

« Les collectivités mentionnées au premier alinéa installent et entretiennent des équipements de distribution gratuite d’eau potable.

amendement CD12

 

« Les collectivités de plus de 3 500 habitants installent et entretiennent des toilettes publiques gratuites accessibles à toute personne.

« Dans chaque commune de plus de 3 500 habitants, des toilettes publiques gratuites sont accessibles à toute personne.

amendement CD13

 

« Les collectivités de plus de 15 000 habitants installent et entretiennent des douches publiques gratuites pour les personnes vulnérables. Elles adoptent, le cas échéant, des dispositions pour donner à ces personnes accès à des douches existantes et à des laveries utilisées par le public.

« Les collectivités mentionnées au premier alinéa de plus de 15 000 habitants installent et entretiennent des douches gratuites. Elles adoptent, le cas échéant, des dispositions pour donner accès à des douches ou des laveries dans des établissements recevant du public. »

amendement CD14

 

« Les dispositions de mise en œuvre doivent être prises dans un délai de cinq ans. Les collectivités font appel, le cas échéant, à des équipements sanitaires existant dans des bâtiments et équipements communaux ou subventionnés par la collectivité, elles peuvent bénéficier de subventions pour la création de nouveaux équipements sanitaires, en particulier des subventions des agences de l’eau.

II. – Les dispositions de mise en œuvre du I sont prises dans un délai de cinq ans. Les collectivités ou établissements publics mentionnés au I utilisent, le cas échéant, des équipements sanitaires existant dans des bâtiments communaux et dans des équipements qu’ils subventionnent. Ils peuvent bénéficier de subventions pour la création de nouveaux équipements sanitaires, en particulier de subventions des agences de l’eau.

amendement CD15

 

Article 3

Article 3

Code de l’action sociale et des familles

Après l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 115-3-1 ainsi rédigé :

(Alinéa sans modification)

 

« Art. L. 115-3-1. – Toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, au regard notamment de son patrimoine, de l’insuffisance de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide préventive de la collectivité pour disposer de l’eau potable nécessaire à ses besoins élémentaires, sans préjudice des dispositions sur l’aide curative résultant de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990.

« Art. L. 115-3-1. – Toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, au regard notamment de son patrimoine, de l’insuffisance de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la collectivité pour être en mesure de disposer de l’eau potable nécessaire à ses besoins élémentaires, sans préjudice de l’article 6 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement.

amendement CD17

 

« Sont considérées comme éprouvant des difficultés particulières au sens de cet article, les personnes ou familles dont les dépenses forfaitaires d’eau potable pour les besoins élémentaires dépassent 3 % de leurs ressources disponibles, lorsque la consommation d’eau est de 50 m3 par an par unité de consommation.

« Au sens du présent article, sont considérées comme éprouvant des difficultés particulières les ménages dont les dépenses d’eau potable permettant de couvrir les besoins élémentaires excèdent 3 % de leurs ressources disponibles et lorsque leur consommation d’eau est de 50 m3 par an par personne.

amendement CD18

 

« Par dépenses forfaitaires d’eau, on entend les dépenses d’eau potable et d’assainissement collectif pour satisfaire les besoins élémentaires en eau potable et assainissement d’un ménage, toutes taxes, redevances et contributions comprises.

« Les dépenses d’eau mentionnées au deuxième alinéa sont les dépenses d’eau potable et d’assainissement collectif permettant de satisfaire les besoins élémentaires en eau potable et en assainissement d’un ménage, toutes taxes, redevances et contributions comprises.

amendement CD19

 

« Par ressources disponibles des ménages, on entend les ressources des ménages telles que définies à l’article 5 du décret n° 2005-212 du 2 mars 2005 relatif aux fonds départementaux de solidarité pour le logement. »

Alinéa supprimé

 

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application de cet article. »

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article et définit les ressources disponibles des ménages au sens du deuxième alinéa. »

amendement CD20

 

Article 4

Article 4

 

Après l’article L. 115-3-1 du même code, il est inséré un article L. 115-3-2 ainsi rédigé :

Après le même article L. 115-3, il est inséré un article L. 115-3-2 ainsi rédigé :

 

« ArtL. 115-3-2. – Les ménages dont les ressources sont inférieures ou égales au Revenu de solidarité active socle reçoivent directement ou indirectement par les services des caisses d’allocations familiales une allocation forfaitaire d’eau et les ménages dont les ressources sont comprises entre ce montant et le plafond de ressources donnant droit à la Couverture maladie universelle complémentaire la moitié de cette allocation.

« ArtL. 115-3-2. – Lorsque le prix de référence de l’eau est supérieur à un niveau fixé par décret en Conseil d’État, les ménages dont les ressources sont inférieures ou égales au montant forfaitaire mentionné au 2° de l’article L. 262-2 reçoivent une allocation forfaitaire d’eau. Les ménages dont les ressources sont comprises entre ce montant et le plafond de ressources donnant droit à la couverture maladie universelle complémentaire reçoivent la moitié de cette allocation.

amendements CD22, CD23, CD24, CD25 et CD26

 

« Le montant de l’allocation forfaitaire d’eau est exprimé en fonction du Revenu de solidarité active socle et est fixé par décret en Conseil d’État compte tenu de l’article L. 115-3-1 du code de l’action sociale et des familles.

« Le montant de l’allocation forfaitaire d’eau est indexé sur le montant forfaitaire mentionné au 2° de l’article L. 262-2, et est fixé par décret en Conseil d’État.

amendement CD28

 

« Les services des caisses d’allocations familiales organisent la distribution des allocations forfaitaires avec le concours des services compétents de l’État et des collectivités territoriales dans le cadre de leurs compétences et selon les modalités prévues par l’article 28 de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes. Dans ce but, ils transmettent, si nécessaire, les fichiers indispensables à l’organisme chargé de la distribution des allocations forfaitaires.

Alinéa supprimé

amendement CD29

 

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application de cet article, notamment le prix moyen de l’eau en dessous duquel aucune allocation forfaitaire n’est attribuée et le prix moyen de l’eau au-dessus duquel l’allocation forfaitaire est doublée. Par prix moyen de l’eau, on entend le rapport entre le montant des dépenses forfaitaires d’eau d’un couple et le volume de la consommation forfaitaire d’eau correspondante. »

« Le décret en Conseil d’État prévu au premier et au deuxième alinéas détermine les conditions d'application du présent article. Il fixe également le niveau au-delà duquel le prix de référence de l’eau peut être considéré comme particulièrement élevé. Lorsque le prix de l’eau dépasse ce niveau, le montant de l’allocation forfaitaire d’eau mentionnée au premier alinéa est doublé. »

amendement CD27

Code de la santé publique

Article 5

Article 5

 

Après l’article L. 1314-2 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1314-3 ainsi rédigé :

Le chapitre IV du titre Ier du livre III de la première partie du code de la santé publique, tel qu’il résulte des articles 1er et 2, est complété par un article L. 1314-3 ainsi rédigé :

 

« Art. L. 1314-3. – Un fonds de solidarité du droit à l’eau est institué au sein du Fonds national d’aide au logement afin de favoriser la mise en œuvre du droit à l’eau tel que défini par l’article L 1314-1.

« Art. L. 1314-3. – Un fonds de solidarité pour le droit à l’eau est institué au sein du Fonds national d’aide au logement mentionné à l’article L. 351-6 du code de la construction et de l’habitation, afin de financer l’allocation forfaitaire d’eau mentionnée à l’article L. 115-3-2 du code de l’action sociale et des familles et les frais de gestion de cette allocation.

amendements CD31 et CD32

 

« Les recettes du fonds de solidarité sont constituées par une contribution de 0,5 centime d’euro par litre d’eau embouteillée vendue en France. Ces recettes ne peuvent être utilisées que pour la mise en œuvre du droit à l’eau.

« Les recettes du fonds de solidarité pour le droit à l’eau sont constituées par une contribution additionnelle au droit spécifique défini à l’article 520 A du code général des impôts. Cette contribution additionnelle s’élève à 0,005 € par litre et s’applique aux boissons non alcoolisées définies au b) du I de l’article 520 A lorsque ces boissons sont commercialisées en fûts, bouteilles ou boîtes. »

amendement CD33 rect.

 

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. »

Alinéa supprimé

amendement CD34

 

Article 6

Article 6

Code de la construction et de l’habitation

I. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

I. – (Alinéa sans modification)

Art. L. 351-6. - Le fonds national d'aide au logement est chargé de financer l'aide personnalisée au logement, la prime de déménagement prévue à l'article L. 351-5 et les dépenses de gestion qui s'y rapportent ainsi que les dépenses du conseil national de l'habitat.

   

Il finance également l'allocation de logement relevant du titre III du livre VIII du code de la sécurité sociale ainsi que les dépenses de gestion qui s'y rapportent.

1° Après le deuxième alinéa de l’article L. 351-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

1° (Alinéa sans modification)

 

« Il finance les allocations forfaitaires d’eau prévues par l’article L. 115-3-3 du code de l’action sociale et des familles ainsi que les dépenses de gestion y afférentes. » 

« Il finance l’allocation forfaitaire d’eau prévue par l’article L. 115-3-2 du code de l’action sociale et des familles ainsi que les dépenses de gestion y afférentes. » 

amendement CD35

………………………………………

   
 

2° L’article L. 351-7 est ainsi modifié :

2° (Alinéa sans modification)

Art. L. 351-7. - Les recettes du Fonds national d'aide au logement sont constituées notamment par :

a) Au début du premier alinéa, sont ajoutés les mots : « Pour le financement des dépenses prévues aux deux premiers alinéas de l’article L. 351-6 du présent code, » ;

a) Au début du premier alinéa, sont ajoutés les mots : « Pour le financement des dépenses prévues aux deux premiers alinéas de l’article L. 351-6, » ;

a) Des dotations de l'État ;

   

b) Le produit des prélèvements mis à la charge des employeurs en application des 1° et 2° de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale ;

   

c) (Abrogé) ;

   

d) (Abrogé) ;

   

L'État assure l'équilibre des recettes et des dépenses du fonds national d'aide au logement.

b) Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

 

« Pour le financement des dépenses prévues au troisième alinéa de l’article L. 351-6 du présent code, les recettes du fonds national d’aide au logement sont constituées par le produit de la contribution sur les eaux embouteillées mentionnée à l’article L. 1313-2 du code de la santé publique. »

« Pour le financement des dépenses prévues au troisième alinéa de l’article L. 351-6 du présent code, les recettes du fonds national d’aide au logement sont constituées par le produit de la contribution sur les eaux et boissons embouteillées mentionnée à l’article 520 A du code général des impôts. »

amendements CD36 et CD37

Loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement

   

Art. 6. - Il est créé dans chaque département un fonds de solidarité pour le logement.

   

Le fonds de solidarité accorde, dans les conditions définies par son règlement intérieur, des aides financières sous forme de cautionnements, prêts ou avances remboursables, garanties ou subventions à des personnes remplissant les conditions de l'article 1er et qui entrent dans un logement locatif ou qui, étant locataires, sous-locataires ou résidents de logements-foyers, se trouvent dans l'impossibilité d'assumer leurs obligations relatives au paiement du loyer, des charges et des frais d'assurance locative, ou qui, occupant régulièrement leur logement, se trouvent dans l'impossibilité d'assumer leurs obligations relatives au paiement des fournitures d'eau, d'énergie et de services téléphoniques.

   

Le fonds de solidarité pour le logement, dans les conditions définies par son règlement intérieur, accorde des aides au titre des dettes de loyer et de factures d'énergie, d'eau et de téléphone, y compris dans le cadre de l'accès à un nouveau logement. Le fonds de solidarité pour le logement fait connaître son rapport annuel d'activité au ministre chargé du logement. Ce rapport annuel d'activité fait l'objet d'une présentation et d'un débat au comité régional de l'habitat et de l'hébergement, insistant notamment sur ses bonnes pratiques transposables à d'autres territoires.

II. – Après le troisième alinéa de l’article 6 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

II. – (Alinéa sans modification)

 

« Chaque fonds de solidarité pour le logement crée un volet eau destiné à financer les aides curatives pour l’eau ; les versements, destinés à ce volet, des distributeurs d’eau et des organismes mentionnés à l’article 6-3 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement ne peuvent être utilisés que pour financer les aides curatives pour l’eau ».

« Chaque fonds de solidarité pour le logement comprend un fonds destiné à financer les aides pour l’eau ; les versements, destinés à ce fonds, des distributeurs d’eau et des organismes mentionnés à l’article 6-3 ne peuvent être utilisés que pour financer les aides pour l’eau. »

amendements CD38 et CD39

………………………………………..

   

Code général des collectivités territoriales

   

Art. L. 2224-2. - Il est interdit aux communes de prendre en charge dans leur budget propre des dépenses au titre des services publics visés à l'article L. 2224-1.

   

Toutefois, le conseil municipal peut décider une telle prise en charge lorsque celle-ci est justifiée par l'une des raisons suivantes :

   

1° Lorsque les exigences du service public conduisent la collectivité à imposer des contraintes particulières de fonctionnement ;

   

2° Lorsque le fonctionnement du service public exige la réalisation d'investissements qui, en raison de leur importance et eu égard au nombre d'usagers, ne peuvent être financés sans augmentation excessive des tarifs ;

   

3° Lorsque, après la période de réglementation des prix, la suppression de toute prise en charge par le budget de la commune aurait pour conséquence une hausse excessive des tarifs.

III. – Après le cinquième alinéa de l’article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

III. – Supprimé

amendement CD40

 

« 4° Lorsque la commune décide au titre de l’aide sociale d’attribuer une subvention permettant de réduire la répercussion sur l’ensemble des abonnés des mesures de solidarité sur l’eau et l’assainissement prises par les services de l’eau et de l’assainissement. »

 
 

Article 7

Article 7

 

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

(Alinéa sans modification)

Art. L. 1413-1. - Les régions, les départements, les communes de plus de 10 000 habitants, les établissements publics de coopération intercommunale de plus de 50 000 habitants et les syndicats mixtes comprenant au moins une commune de plus de 10 000 habitants créent une commission consultative des services publics locaux pour l'ensemble des services publics qu'ils confient à un tiers par convention de délégation de service public ou qu'ils exploitent en régie dotée de l'autonomie financière. Les établissements publics de coopération intercommunale dont la population est comprise entre 20 000 et 50 000 habitants peuvent créer une commission consultative des services publics locaux dans les mêmes conditions.

   

Cette commission, présidée par le maire, le président du conseil départemental, le président du conseil régional, le président de l'organe délibérant, ou leur représentant, comprend des membres de l'assemblée délibérante ou de l'organe délibérant, désignés dans le respect du principe de la représentation proportionnelle, et des représentants d'associations locales, nommés par l'assemblée délibérante ou l'organe délibérant. En fonction de l'ordre du jour, la commission peut, sur proposition de son président, inviter à participer à ses travaux, avec voix consultative, toute personne dont l'audition lui paraît utile.

   

La majorité des membres de la commission peut demander l'inscription à l'ordre du jour de toute proposition relative à l'amélioration des services publics locaux.

   

La commission examine chaque année sur le rapport de son président :

   

1° Le rapport, mentionné à l'article L. 1411-3, établi par le délégataire de service public ;

   

2° Les rapports sur le prix et la qualité du service public d'eau potable, sur les services d'assainissement visés à l'article L. 2224-5 ;

   

3° Un bilan d'activité des services exploités en régie dotée de l'autonomie financière ;

   

4° Le rapport mentionné à l'article L. 1414-14 établi par le cocontractant d'un contrat de partenariat.

1° Après le   de l’article L. 1413-1, il est inséré un 5° ainsi rédigé :

1° Après le treizième alinéa de l’article L. 1413-1, il est inséré un 5° ainsi rédigé :

amendement CD41

 

« 5° Tout projet de décision qui affecte de manière significative l’exercice du droit à l’eau, avant que l’assemblée délibérante ou l’organe délibérant se prononce sur le projet. »

« 5° Tout projet de décision qui affecte de manière significative la mise en œuvre du droit à l’eau potable et à l’assainissement mentionné à l’article L. 1314-1 du code de la santé publique. » ;

amendement CD42

……………………………………….

   

Art. L. 2224-5. - Le maire présente au conseil municipal ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale présente à son assemblée délibérante un rapport annuel sur le prix et la qualité du service public d'eau potable destiné notamment à l'information des usagers.

   

Ce rapport est présenté au plus tard dans les neuf mois qui suivent la clôture de l'exercice concerné.

   

Le maire y joint la note établie chaque année par l'agence de l'eau ou l'office de l'eau sur les redevances figurant sur la facture d'eau des abonnés et sur la réalisation de son programme pluriannuel d'intervention.

   

Le rapport et l'avis du conseil municipal ou de l'assemblée délibérante sont mis à la disposition du public dans les conditions prévues à l'article L. 1411-13.

   

Un décret détermine les conditions d'application du présent article. Il précise notamment les indicateurs techniques et financiers qui doivent figurer dans le rapport annuel et qui sont transmis par voie électronique au système d'information prévu à l'article L. 213-2 du code de l'environnement. Il définit, en tenant compte de la taille des communes, les modalités d'application de cette transmission, qui est facultative pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale de moins de 3 500 habitants, et en fixe l'entrée en vigueur au plus tard au 31 décembre 2015.

   

Les services d'assainissement municipaux sont soumis aux dispositions du présent article.

2° L’article L. 2224-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l’article L. 2224-5, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

amendement CD43

 

« Le rapport contient une description des mesures prises par la municipalité et les services de l’eau et de l’assainissement pour la mise en œuvre du droit à l’eau. »

« Le rapport comprend une description des mesures prises par la municipalité et les services de l’eau et de l’assainissement pour la mise en œuvre du droit à l’eau potable et à l’assainissement mentionné à l’article L. 1314-1 du code de la santé publique. » ;

amendements CD44 et CD45

 

3° Après l’article L. 2224-5, il est inséré un article L. 2224-5-1 ainsi rédigé :

3° (Alinéa sans modification)

 

« Art. L. 2224-5-1. – Au cours des trois premières années de chaque mandature, le maire organise au sein du conseil municipal un débat sur la mise en œuvre du droit à l’eau.

« Art. L. 2224-5-1. – Dans les trois ans suivant le renouvellement général du conseil municipal, le maire organise au sein du conseil municipal un débat sur la mise en œuvre du droit à l’eau potable et à l’assainissement mentionné à l’article L. 1314-1 du code de la santé publique.

amendements CD46 et CD47

 

« Le débat mentionné à l’alinéa 1er porte notamment sur les enjeux liés à la tarification à une ou plusieurs tranches avec la possibilité d’une première tranche de consommation gratuite ou à prix réduit. Il s’appuie sur un rapport comprenant un état des lieux et une description des actions existantes dans ce domaine au niveau local.

« Le débat mentionné au premier alinéa porte notamment sur les enjeux liés à la tarification à une ou plusieurs tranches. Le maire présente un rapport comprenant un état des lieux et une description des actions menées dans ce domaine au niveau local.

amendements CD48, CD49 et CD50

 

« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article, notamment le contenu du rapport mentionné au deuxième alinéa. »

(Alinéa sans modification)

 

Article 8

Article 8

Code de l’environnement

   

Art. L. 213-1. - Le Comité national de l'eau a pour mission :

   

1° De donner son avis sur les circonscriptions géographiques des bassins et groupements de bassins et sur tout problème commun à deux ou plusieurs bassins ou groupements de bassin ;

   

2° De donner son avis sur tous les projets d'aménagement et de répartition des eaux ayant un caractère national ainsi que sur les grands aménagements régionaux ;

   

3° De donner son avis sur les projets de décret concernant la protection des peuplements piscicoles ;

   

4° De donner, sur proposition d'un comité consultatif constitué en son sein, son avis sur le prix de l'eau facturé aux usagers et la qualité des services publics de distribution d'eau et d'assainissement.

L’article L. 213-1 du code de l’environnement est complété par un 5° ainsi rédigé :

L’article L. 213-1 du code de l’environnement est complété par un 5° et un 6° ainsi rédigés :

 

« 5° De remettre au Premier ministre un rapport triennal sur la mise en œuvre du droit à l’eau, notamment en ce qui concerne les populations qui ne disposent pas d’un branchement à l’eau potable et de recevoir les réclamations liées à d’éventuelles inobservations du droit à l’eau en France. »

« 5° De remettre au Parlement et au Gouvernement un rapport triennal sur la mise en œuvre du droit à l’eau potable et à l’assainissement mentionné à l’article L. 1314-1 du code de la santé publique, notamment en ce qui concerne les personnes qui ne disposent pas d’un raccordement au réseau d’eau potable ;

   

«  De recevoir les réclamations liées à la méconnaissance éventuelle de ce droit à l’eau potable et à l’assainissement. »

amendement CD51

 

Article 9

Article 9

 

I. – Les charges résultant pour les collectivités territoriales sont compensées, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Supprimé

amendement CD52

 

II. – Les charges pour l’État sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle au droit visé à l’article 403 du code général des impôts.

 

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (IRSTEA)

– Mme Marie Tsanga Tabi (Unité mixte de recherche « Gestion territoriale de l’eau et de l’environnement »)

Action tank « Entreprises et pauvreté »

– M. Jacques Berger, directeur

Fondation France Libertés

– M. Emmanuel Poilâne, directeur

– M. David Blanchon

– M. Michel Jacob

– M. Guillaume Demuth

– M. Patrick Flicoteaux

– Mme Marion Esnault

– Mme Nadja Bedock

Servicepublic2000

– M. Loïc Mahévas, président-directeur général

– M. Nicolas Crinquant, directeur du domaine d’activité Eau et milieux aquatiques

Fédération professionnelle des entreprises de l’eau (FP2E)

– M. Igor Semo, vice-président de la FP2E

– M. Didier Paris, membre du bureau

– M. Tristan Mathieu, délégué général

Fédération Nationale des Collectivités Concédantes et Régies (FNCCR)

– M. Charles Revet, sénateur de Seine-Maritime, vice-président, président du Syndicat interdépartemental de l’eau Seine-Aval (SIDESA)

– M. Paul Raoult, sénateur honoraire, vice-président, président des syndicats départementaux d’eau et d’assainissement du Nord (Noréade)

– M. Michel Desmars, chef du département « eau et assainissement »

– Mme Mélissa Bellier, juriste, département « eau et assainissement »

Table ronde associations de consommateurs :

– Mme Stéphanie Turquin, économiste, Institut national de la consommation

– M. Alain Chosson, CLCV-Association nationale de défense des consommateurs et usagers

Table ronde experts :

– M. Bernard Barraqué, directeur de recherche Centre national de la recherche scientifique (CNRS) au Centre international de recherche sur l’environnement et le développement (CIRED)/Agroparistech

– M. Marc Laimé, consultant

– M. Emmanuel Poilâne, directeur de la Fondation Danielle Mitterrand France Libertés

– Mme Soizic Rivoalan, Croix Rouge française

– M. Frédéric Tiberghien, conseiller d’État

Observatoire des usagers de l’assainissement en Île-de-France (OBUSASS)

– Mme Karina Kellner, secrétaire générale

– Mme Sabine Vacher, animatrice

– M. Benjamin Dumas, membre

Association des maires de France (AMF)*

– M. Denis Merville, président de la commission environnement

– M. André Flajolet, maire de Saint-Venant, membre du comité directeur

Table ronde « villes » :

– Mme Odile Nieuwyaer, chargée des relations avec les usagers de l’eau, Direction de la propreté et de l’eau, Ville de Paris

– Mme Geneviève Gaillard, députée

– M. Marc Lambert, directeur, Syndicat des eaux du vivier (SEV), Niort

– M. Alain Piveteau, adjoint au maire chargé des finances, Niort

– M. Hervé Marseille, vice-président, syndicat des eaux d’Île-de-France

– M. Christophe Lime, adjoint au maire de Besançon, en charge de l’eau et de l’assainissement

– M. Bernard Maurin, vice-président de la régie publique Eau des lacs de l’Essonne

– M. Gilbert Mitterrand, ancien maire de Libourne

Académie de l’eau

– M. Jean-Louis Oliver, secrétaire général

– M. Henri Smets, membre du collège des personnalités

– M. Marc-Antoine Martin, membre du conseil d’administration

– M. Daniel Marcovitch, conseiller de Paris, membre du collège des personnalités de l’Académie de l’eau et président ou vice-président de plusieurs importantes institutions françaises dans le domaine de l’eau

Grand Orient de France

– M. Jean-Jacques Demantes, membre de la Commission nationale de réflexion sur le développement durable

– M. Sylvestre Clancier, président de la Commission nationale de réflexion sur le développement durable

Comité national de l’eau

– M. Jean Launay, député, président

– M. Daniel Marcovitch, vice-président

Coordination eau Île-de-France

– M. Jean-Claude Oliva, directeur

Union nationale des associations familiales (UNAF)

– M. Lionel Le Borgne, administrateur en charge de l’habitat et de l’eau

– Mme Claire Ménard, chargée des relations parlementaires

– Mme Simone Sitbon, chargée de mission en charge de l’Environnement, du développement durable et de l’eau

Agence de l’eau Artois Picardie

– M. Olivier Thibault, directeur général

Agence de l’eau Seine Normandie

– Mme Michèle Rousseau, directrice générale

– M. Louis Hubert, directeur de la stratégie territoriale

Agence de l’eau Loire Bretagne

– M. Noël Mathieu, directeur général

Agence de l’eau Adour Garonne

– M. Laurent Bergeot, directeur

Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie – Direction de l’eau et de la biodiversité

– M. Laurent Roy, directeur

– Mme Camille Meunier, chargée de mission service public d’eau et d’assainissement

– M. Jean-Baptiste Butlen, adjoint à la sous-directrice de l’action territoriale et de la législation de l’eau

Office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA)

– Mme Elisabeth Dupont-Kerlan, directrice générale

– M. René Lalement, directeur de la connaissance et de l’information sur l’eau

Confédération nationale du Logement (CNL)

– Mme Corinne Rinaldo, secrétaire confédérale

Coalition Eau

– M. Henri Smets

Secours Catholique

– M. François Aveline

Médecins du monde

– M. Jean-François Corty, directeur des missions France

– Mme Anne Lise Denoeud, juriste, direction des missions France

Caisse nationale des allocations familiales (CNAF)

– Mme Patricia Chantin, chargée des relations avec le Parlement

– M. Jean-Louis Deroussen, président

Députés auditionnés :

– M. François Brottes, député

– Mme Marie-George Buffet, députée

– M. Paul Giacobbi, député

– M. François-Michel Lambert, député

– M. Martial Saddier, député

Confédération générale du Logement (CGL)

– M. Michel Fréchet, président

Organisation de coordination et de développement économiques (OCDE)

– Mme Aziza Akhmouch, chef du programme de l’OCDE sur la gouvernance de l’eau, direction de la Gouvernance publique et du développement territorial

– M. Xavier Leflaive, chef de l’unité Eau, à la direction de l’Environnement

– Mme Céline Kauffmann, cheffe adjointe de la division des politiques réglementaires, direction de la Gouvernance publique et du développement territorial

Observatoire National de la Pauvreté et de lExclusion Sociale (ONPS)

– M. Jérôme Vignon

Comité national de lutte contre l’exclusion (CNLE)

– M. Etienne Pinte, ancien député

– Mme Christiane El-Hayek

Ministère du Logement, de l’Égalité des territoires et de la Ruralité - Cabinet de Mme Sylvia Pinel, ministre

– M. Aurélien Taché, conseiller hébergement

Cabinet du Premier Ministre

– M. Thibault Delahaye, conseiller parlementaire

Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’ÉnergieCabinet de Mme Ségolène Royal, ministre

– M. Laurent Bouvier, conseiller

Secrétariat dÉtat chargé des personnes handicapées et de la lutte contre lexclusionCabinet de Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État

– Mme Myriam Bouali

– Mme Marie-Automne Thépot

– M. Léopold Gilles

Chambre Syndicale des Eaux Minérales

M. Jean-Pierre Deffis, président

Assemblée des communautés de France (AdCF)

M. Damien Denizot

Union nationale des centres communaux ou intercommunaux d’action sociale (UNCCAS)

– Mme Astrid Lelièvre, membre du conseil d’administration

– Mme Juliette Bourreau, responsable politiques de lutte contre les exclusions et accès aux droits

– Mme Hélène-Sophie Mesnage, déléguée générale adjointe

Caisse d’allocations familiales (CAF) Côtes d’Armor

– M. Antoine Romera, directeur

Caisse d’allocations familiales (CAF) Île-de-France

– M. Jean-Louis Haurie, directeur

Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie - Direction de l’eau et de la biodiversité

– M. François Mitteault, directeur de l’eau et de la biodiversité

– Mme Virginie Dumoulin, sous-directrice de l’action territoriale et de la législation de l’eau à la direction de l’eau et de la biodiversité

Mutualité sociale agricole (MSA)

– M. Bruno Lachesnaie, directeur du Développement sanitaire et social à la Caisse centrale de la MSA (CCMSA)

Association française de l’industrie des fontaines à eau (AFIFAE)

– M. François Gilleron, président

– Mme Bénédicte Bergeaud, secrétaire générale déléguée

Eau de Paris

Mme Anne Le Strat, présidente

Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

BIBLIOGRAPHIE

– « Les aides pour les dépenses d’eau des ménages », Henri Smets, éd. Johanet, 2014

– « L’avenir de l’eau – petit précis de mondialisation II », Erik Orsenna, éd. Fayard, 2008

– « De l’eau pour tous ! » Gérard Payen, éd. Armand Colin, 2013

– « L’eau et son droit », rapport public 2010 du Conseil d’État, éd. La documentation française, 2010

– « Perspectives de l’environnement de l’OCDE à l’horizon 2050 – les conséquences de l’inaction », OCDE, 2012

– « Le prix de l’eau et des services d’eau potable et d’assainissement », OCDE, 2010

– « Atlas mondial de l’eau – défendre et partager notre bien commun », David Blanchon, éd. Autrement, 2013

– « L’essentiel du droit de l'eau », Bernard Drobenko, éd. Gualino-Lextenso, 2013

– « L’eau en France : la gestion d’un bien pas comme les autres », direction de l'information légale et administrative, éd. La Documentation française, 2009

– « Accès à l’eau pour tous : quels dispositifs, quelles solidarités ? », Synthèse du colloque du Cercle français de l’eau, 2013

– Comment mettre en place le droit à l’eau pour les plus démunis ? Étude OBUSASS, 2009

– « L’eau pour tous, quelles nouvelles tarifications ? », Les cahiers de l’eau, éd. La Lyonnaise des eaux, n° 4, 2012

– « Spécial eau : les mannes de l’or bleu », hors-série de l’Express, n° 3377, juin 2015

– « Les Français et l’accès à l’eau et à l’assainissement en France », sondage IPSOS pour France Libertés, 2014

– « De l’eau pour tous, agir localement pour assurer l’accès à l’eau potable et à l’assainissement pour les plus démunis en France », Coalition eau, janvier 2009

– « Accès à l’eau et à l’assainissement dans des conditions économiquement acceptables par tous », Rapport n° 7643-01, Isabelle Monteils et Pierre Rathouis, CGEDD, juillet 2011

– « Comment améliorer le financement et la durabilité des services d’eau et d’assainissement français ? », Conseil national de l’eau, février 2013.

© Assemblée nationale

1 () « L’avenir de l’eau – Petit précis de mondialisation » Fayard, 2008

2 () Gérard Payen, conseiller du Secrétaire Général de l’ONU pour les questions liées à l’eau, auteur de « De l’eau pour tous ! » (éd. Armand Colin, 2013)

3 () Source : « Baromètre 2015 de l’eau, de l’hygiène et de l’assainissement – État des lieux de l’accès à une ressource vitale » (1er mars 2015), Solidarités International.

4 () Source : Norwegian Refugee Council, “Global Estimates 2014 – People displaced by disasters” (septembre 2014)

5 () Rapport de mission sur la mise en œuvre de l’article 1er de la loi n°2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques : « Accès à l’eau et à l’assainissement dans des conditions économiquement acceptables par tous » (rapport de mission sur la mise en œuvre de l’article premier de la loi du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques), juillet 2011

6 () Rapporteur du projet de loi portant réforme de la politique de l’eau en 2002

7 () Proposition de loi visant à créer l’allocation de solidarité pour l’eau, déposée en 2010

8 () Proposition de loi visant à mettre en œuvre le droit à l’eau, déposée en 2012

9 () Proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement, déposée en 2013

10 () Qui a abouti à l’adoption de la loi n° 2011-156 du 7 février 2011 relative à la solidarité dans les domaines de l’alimentation en eau et de l’assainissement

11 () Loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes

12 () Sont membres de la Coalition Eau : ACAD, Action contre la Faim, ADEDE, AVSF, CCFD, Coopération Atlantique Guinée 44, CORAIL, CRID, 4D, East, Eau Sans Frontières International, Eau Vive, Green Cross International, GRET, Hydraulique Sans Frontières, Ingénieurs Sans Frontières, Initiative Développement, Kynarou, Les Amis de la Terre, Réseau Foi et Justice Afrique Europe, Secours Catholique – Caritas France, Secours Islamique France, Sherpa, Solidarité Eau Europe, Toilettes du Monde, Triangle Génération Humanitaire, WECF.

Avec la participation des représentants de la Coordination Eau Île de France, le Secours Populaire, le Secours Catholique, le Grand Orient de France et France Nature Environnement.

13 () Loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

14 () Voir l’annexe 7 de l’ouvrage « Les aides pour les dépenses d’eau des ménages » de Henri Smets (2014).

15 () Délibération n° 2011-02 : avis sur l’accès à l’eau pour les personnes qui en sont exclues (6 juin 2011)

16 () Loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage

17 () Actuellement, en métropole, le plafond annuel de référence pour bénéficier de la CMU-C est de 8 645 euros (soit 720,42 euros par mois) pour une personne seule, et de 12 967 euros (1 080,58 euros par mois) pour un foyer de deux personnes.

18 () L’allocation de solidarité ne serait pas versée aux titulaires du RSA-socle qui vivent dans des régions ou l’eau est relativement bon marché. Ainsi une personne seule, titulaire du RSA-socle, qui consomme 120 litres d’eau par jour (3,6 m3/mois) pour ses besoins essentiels, consacre plus de 3 % de ses ressources à l’eau lorsque le prix moyen de l’eau est supérieur à 4,20 €/m3.

19 () Loi n° 2005-95 du 9 février 2005 relative à la coopération internationale des collectivités territoriales et des agences de l’eau dans les domaines de l’alimentation en eau et de l’assainissement.

20 () 54 centimes d’euro par hectolitre, soit 5,4 euros par kilolitre ou par mètre cube et 0,0054 euro par litre.

21 () Les données sont peu nombreuses. Les chiffres qui suivent sont tirés d’un supplément de l’Express n° 3377 du 17 juin 2015 intitulé « Spécial eau, les mannes de l’or bleu ».

22 () Décret n°2008-780 du 13 août 2008 relatif à la procédure applicable en cas d’impayés des factures d’électricité, de gaz, de chaleur et d’eau.

23 () Article 2 de la loi n° 92-722 du 29 juillet 1992 portant adaptation de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion et relative à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale et professionnelle, entrée en vigueur au 1er janvier 1993.

24 () L’article 28 de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau prévoit la possibilité pour les collectivités locales d’expérimenter, pendant 5 ans, une tarification sociale de l’eau ; l’expérimentation peut inclure des tarifs différenciés selon les revenus du foyer, une aide au paiement des factures ou une aide à l’accès à l’eau.