N° 3544 et N° 3545
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le mercredi 2 mars 2016.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR :
– LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant la ratification de l’accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d’autre part,
et
– LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant la ratification de l’accord-cadre de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République des Philippines, d’autre part,
PAR M. Gwenegan BUI
Député
——
ET
ANNEXE : TEXTES DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
Voir les numéros :
Sénat : 414, 551 (2014-2015), 239, 240, 241 et T.A. 61, 62 (2015-2016).
Assemblée nationale : 3378 et 3379.
SOMMAIRE
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Pages
INTRODUCTION 5
I. UNE COOPÉRATION HISTORIQUE AVEC L’UNION EUROPÉENNE 7
1. Un partenariat ancien entre l’Union européenne et l’ANASE (ASEAN) 7
2. Des enjeux économiques bien identifiés 8
3. Une présence politique et financière européenne non négligeable 9
II. DEUX ACCORDS OPPORTUNS POUR STRUCTURER DES RELATIONS PLUS ÉTROITES ET PLUS DENSES 13
1. Une volonté d’élargir les champs de coopération : cadre général et titre Ier des accords 13
2. Les dispositions des Titres II à VI de l’accord avec le Viêt Nam 17
3. Les dispositions des Titres II à VI de l’accord avec les Philippines 19
4. Cadre institutionnel et dispositions finales des accords (Titres VII et VIII) 22
CONCLUSION 25
EXAMEN EN COMMISSION 27
ANNEXES 31
ANNEXE N° 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 31
ANNEXE - TEXTES DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES 33
Les deux accords-cadres qui nous sont soumis se substituent, pour les relations entre l’Union européenne et, respectivement, le Viêt Nam et les Philippines, à l’accord relatif à la coopération dans les domaines commercial, économique et du développement conclu en juin 1980 entre la Communauté économique européenne et l’Association des Nations d’Asie du Sud-est ou ANASE (Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour et Thaïlande), aujourd’hui plus communément désignée selon l’acronyme anglophone d’ASEAN, ainsi qu’à l’accord de coopération CEE-Viêt Nam de 1995 s’agissant de ce dernier pays auquel l’accord de 1980 n’a été étendu qu’en 1999.
Leur conclusion traduit le souci, d’une part, de disposer d’un outil juridique dédié à chacun des pays de la zone, d’autre part, d’élargir de manière importante les champs de la coopération, qui ne saurait se limiter aux aspects purement économiques et commerciaux. Ces accords-cadres permettent ainsi d’accompagner les mutations politiques, juridiques et économiques de ces pays, d’enrichir les liens qui existent avec l’Union européenne et de renforcer les convergences de vues par la mise en œuvre d’une coopération plus étroite.
Les accords-cadres portent à la fois sur des matières relevant de la compétence de l’Union européenne et sur des matières relevant, au moins pour partie, de celle des États membres. Ils sont donc de nature mixte et doivent, pour entrer en vigueur, être ratifiés par les États membres. À ce jour, la France est un des derniers États européens avec la Grèce et l’Italie et, s’agissant des Philippines, l’Irlande, à ne pas avoir ratifié ces accords. Le Viêt Nam a notifié sa ratification le 20 décembre 2013 ; les Philippines n’ayant à ce jour pas procédé à cette notification. Le Sénat a adopté les deux projets de loi au cours de sa séance du 17 décembre 2015.
Sans gommer les spécificités de chacun des pays, leurs dynamiques propres et celles des relations qu’ils entretiennent avec la France, un rapport unique a semblé justifié dès lors que les deux accords ont été négociés sur une base similaire dans le cadre d’un mouvement général impulsé par l’Union européenne. En outre, comme l’indique leur intitulé et contrairement aux accords de libre-échange qui appellent des commentaires circonstanciés, ils ne font que fixer un cadre autour de grandes orientations générales, par ailleurs très consensuelles.
L’Union européenne a souhaité, dans les années 1990, inscrire sa relation avec les États tiers dans un cadre global et engager la négociation d’accords portant à la fois sur les domaines politique, économique et sectoriel. En 2004, l’Union européenne a proposé aux six membres fondateurs de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (Brunei, Malaisie, Indonésie, Philippines, Thaïlande, Singapour) de conclure des accords de ce type. Par décision du Conseil du 14 mai 2007, ce mandat a été étendu au Viêt Nam.
Les relations entre l’Union européenne et, respectivement, le Viêt Nam et les Philippines, étaient, jusqu’au présent accord-cadre, régies par l’accord conclu entre la Communauté économique européenne et les cinq membres fondateurs de l’ASEAN (Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour et Thaïlande) en juin 1980. Cet accord, assez ancien donc, porte sur la coopération dans les domaines commercial, économique et du développement. Lorsque le Brunei, le Viêt Nam, le Laos et le Cambodge ont adhéré à l’ASEAN en 1980, l’UE a accepté l’adhésion de ces pays à l’accord de coopération de 1980 (1).
L’accord de coopération CEE-Viêt Nam de 1995 dit de « 3e génération » avait quant à lui pour objet de renforcer la coopération entre l’UE et le Viêt Nam dans les domaines économique, commercial et du développement ainsi qu’en matière de lutte contre la drogue. Il instaurait en outre une commission mixte permettant aux parties d’établir des priorités dans la mise en œuvre de l’accord.
Les relations entre l’UE et l’ASEAN ont évolué à mesure de l’émergence économique de ces pays pour s’orienter vers le développement des investissements, le renforcement de la coopération économique et l’intensification du dialogue politique. L’ASEAN s’est vu octroyer un rôle primordial dans la stratégie asiatique de l’UE, adoptée en juillet 1994, confortée par le premier sommet Asie-Europe (ASEM), une rencontre informelle de chefs d’État, organisé à Bangkok en 1996. En septembre 2001, la Commission a présenté sa communication intitulée « Un cadre stratégique pour renforcer les relations de partenariat Europe-Asie », qui identifiait l’ASEAN comme un partenaire économique et politique essentiel de la Communauté européenne et soulignait son importance en tant que locomotive pour les relations entre l’Europe et l’Asie en général. La communication de la Commission intitulée « Un nouveau partenariat avec l’Asie du Sud-Est », présentée en juillet 2003, réaffirme l’importance du partenariat entre l’UE et l’ASEANE.
Le tout premier sommet UE-ASEAN s’est tenu à Singapour le 22 novembre 2007. À l’occasion de ce sommet, les réalisations et les perspectives du partenariat UE-ASEAN ont été discutées, ainsi que certains thèmes régionaux et mondiaux tels que le processus d’intégration de l’ASEAN, l’énergie, le changement climatique, la durabilité environnementale et la situation en Birmanie. Un plan d’action détaillant les activités de coopération à moyen terme a également été adopté lors du sommet.
Le rapport de la mission d’information sur les émergents du Asie du Sud-Est de la commission des Affaires étrangères (2) présente l’exceptionnel dynamisme économique de la zone ASEAN et les potentiels de marché pour les entreprises françaises.
Le Viêt Nam est un des principaux marchés d’Asie du Sud-Est avec 90 millions d’habitants et une croissance soutenue, qui était de 5,9 % en 2014. Son PNB a été multiplié par 5 en quinze ans, si bien qu’il fait partie des pays à revenus intermédiaires avec un revenu par habitant de 1 895 dollars en 2013.
L’UE est actuellement le 2ème partenaire commercial et l’un des deux grands importateurs du Viêt Nam. Le commerce bilatéral est passé de 17,75 milliards de dollars en 2010 à 36,8 milliards en 2014. Au premier semestre 2015, les échanges commerciaux bilatéraux ont atteint 19,4 milliards de dollars, +11% sur un an. Le Viêt Nam exporte, pour l’essentiel, sandales et chaussures, textile-habillement, articles en bois, café, produits aquatiques, l’Europe accusant un déficit commercial de 6 milliards. L’UE est aussi un grand investisseur au Viêt Nam. En juin 2015, 23 des 28 pays de l’UE avaient investi au Viêt Nam, avec plus de 2.100 projets en cours totalisant un montant de 38,4 milliards de dollars. Ces projets se concentrent dans des secteurs importants du Viêt Nam, notamment l’industrie, la construction et les services.
Après un accord politique en août dernier, la signature effective d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Viêt Nam est intervenue. En décembre dernier, en présence du Premier ministre Nguyen Tan Dung et du président Juncker, le ministre vietnamien de l’Industrie et du Commerce Vu Huy Hoang et Mme Cecilia Malmström ont signé une déclaration sur la fin des négociations de l’ALE entre l’UE et le Viêt Nam. La Commissaire a présenté l’accord hier, 1er février. Il doit encore être avalisé par le Conseil et le Parlement européen. C’est le deuxième accord conclu dans la zone après Singapour en 2014 (des négociations sont en cours avec la Malaisie et la Thaïlande).
L’ALE prévoit l’élimination de « 99 % » des droits de douane sur les marchandises des deux partenaires, soit immédiatement, soit après une période pouvant s’étendre jusqu’à sept ans. Ce sera le cas pour les vins et alcools européens vers le Viêt Nam. L’Europe, elle, lèvera dans le même délai ses droits sur les produits textiles et les chaussures. Autre restriction, le riz vietnamien ainsi que le surimi et le thon en boîte seront soumis à des quotas à leur entrée dans l’Union. Le Viêt Nam a également accepté d’ouvrir son marché aux services européens, dans la finance, les télécoms, les transports et le courrier. Dans le domaine de l’investissement, le pays va supprimer ou alléger les obstacles à la construction d’usines manufacturières. Avec la reconnaissance des indications géographiques, les marques européennes telles que le Champagne, le parmesan et le Scotch Whisky seront mieux protégées. Pour les marchés publics, les deux partenaires se sont alignés sur les règles de transparence de l’OMC. Enfin, le traité contient un chapitre contraignant sur le respect des droits de l’homme et des droits des travailleurs, et insiste aussi sur la nécessité d’un « développement durable ».
Les enjeux sont d’autant plus élevés que le Viêt Nam fait partie des douze pays du partenariat transpacifique (TPP) dont les négociations ont abouti en octobre dernier.
Par ailleurs, l’UE vient de lancer (décembre 2015) des négociations pour un tel accord avec les Philippines. L’accord portera notamment sur la suppression des droits de douane, les services et l’investissement, l’accès aux marchés publics ainsi que le renforcement des règles dans le domaine de la concurrence et de la propriété intellectuelle. Il comprendra aussi un chapitre détaillé sur la protection de l’environnement et le développement social. Le premier cycle de négociations devrait avoir lieu aux Philippines au premier semestre 2016.
L’UE est le quatrième partenaire commercial des Philippines. Les exportations européennes vers ce pays sont principalement composées de matériel de transport (31 %), de machines (15 %), de produits alimentaires (13 %). De leur côté, les Philippines exportent surtout vers l’UE des équipements de bureau et de télécommunications (45 %), des machines (15 %) et des produits alimentaires (12,5 %). L’UE est aussi le premier investisseur étranger dans le pays, où ses investissements directs pèsent plus de 6,2 milliards d’euros.
Les Philippines bénéficient déjà, depuis décembre 2014, du régime spécial d’encouragement au développement durable et à la bonne gouvernance de l’Union européenne (SPG+) accordant des préférences commerciales sur un certain nombre de lignes tarifaires. À ce titre, les Philippines peuvent exporter à destination de l’UE les produits relevant de 91 % des lignes tarifaires en franchise de droits de douane.
La relation entre l’Union européenne et le Viêt Nam s’est renforcée à mesure que le Viêt Nam s’est préoccupé de multiplier ses alliances, notamment en réponse à la montée en puissance de la Chine, particulièrement dans sa politique de « territorialisation » de la mer de Chine. Le Viêt Nam soutient le développement des échanges, non seulement économiques, mais aussi politiques et il faut souligner qu’il a d’ailleurs été l’un des rares pays d’Asie à avoir soutenu l’éventuelle candidature de l’UE au Sommet de l’Asie de l’Est, qui se consacre à la sécurité en Asie orientale. Son implication a également été forte pour que la relation UE-ASEAN soit élevée au rang de partenariat stratégique.
La croissance économique du Viêt Nam a rebattu les cartes de la présence européenne. L’UE est le premier pourvoyeur d’aide non remboursable du pays et allouera 400 millions d’euros d’aide publique au développement au Viêt Nam au titre de l’Instrument de coopération au développement (ICD) 2014-2020, contre 306 millions d’euros au titre de l’ICD 2007-2013. Mais, comme l’aide publique au développement française d’ailleurs, les sommes seront en grande partie concentrées sur le développement durable avec 86 % des sommes affectées au soutien au développement énergies renouvelables. Rappelons que la France est le deuxième donateur bilatéral derrière le Japon avec 1,5 milliard d’euros cumulés depuis 1993.
L’UE et le Viêt Nam tiennent également, depuis 2003, un dialogue annuel sur les droits de l’Homme, qui malheureusement ne se traduit pas par une amélioration des droits et libertés, notamment de la liberté d’expression.
Moins connues que les relations UE-Viêt Nam, compte tenu du tropisme français, les relations UE-Philippines n’en sont pas moins très denses y compris sur le plan politique. Elles sont actuellement formalisées par des réunions de hauts-fonctionnaires organisées tous les deux ans. Le Président Aquino a effectué une visite aux institutions européennes les 15 et 16 septembre 2014 au cours de laquelle il a rencontré les présidents Van Rompuy et Barroso. Cette visite a permis de faire un tour d’horizon des principaux champs de coopérations UE-Philippines, tel que le soutien au processus de paix à Mindanao (cf. infra), d’évoquer les dossiers relatifs à la pêche, d’échanger sur les tensions en mer de Chine du Sud et d’aborder la candidature des Philippines au nouveau système de préférences généralisées (SPG+), retenue en décembre de la même année.
Ce système est conditionné à un engagement des pays en développement à ratifier et à mettre en œuvre 27 conventions internationales en matière de droits de l’Homme, de bonne gouvernance et de développement durable. La Commission est chargée d’établir tous les deux ans des rapports de suivi de l’application effective des 27 conventions par les pays bénéficiaires. La principale source d’informations qui permet à la Commission d’évaluer les progrès réalisés par les Philippines dans la mise en œuvre effective des conventions de l’OIT réside dans les plus récents rapports et les dernières recommandations des organes de surveillance de l’OIT. S’y ajoutent les informations obtenues au moyen des contacts réguliers avec les autorités des pays bénéficiaires, y compris dans le cadre de visites de contrôle.
Des manquements ont été constatés, notamment en ce qui concerne les droits des femmes et les droits de l’enfant. Un rapport devrait prochainement faire état des résultats du suivi de 2015. L’État de droit et le respect des droits humains demeurent encore largement perfectibles, même si les progrès sont réels. Un autre dossier est suivi de près par les instances européennes : les manquements sérieux et persistants des Philippines aux règles de la convention dans l’enseignement et l’administration de la formation des marins (dite convention STCW), constatés en 2014 par l’Agence Européenne de Sécurité Maritime, agissant pour le compte de la Commission européenne et qui pourraient conduire à refuser aux officiers formés aux Philippines le droit de travailler sur des navires battant pavillon d’un État membre de l’UE. 20% des effectifs de la marine marchande mondiale sont philippins.
Le montant de l’allocation attribuée aux Philippines pour la période 2014-2020 au titre de l’Instrument de Coopération au Développement (ICD) a été fixé à 325 millions d’euros, contre 130 millions pour l’exercice 2007-2013. Rappelons par ailleurs que l’Agence française de développement a engagé aux Philippines plus de 360 millions d’euros de prêts depuis 2010, notamment pour un projet de renforcement des capacités des collectivités locales.
Les deux secteurs de concentration identifiés par l’Union européenne pour la période 2014-2020 sont les suivants :
– croissance inclusive pour 225 millions d’euros, avec un accent sur l’accès à l’électricité, notamment via les énergies renouvelables et sur la création d’emploi ;
– renforcement de l’État de droit pour 95 millions d’euros, avec un accent sur la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption. Ce volet ciblera particulièrement le soutien au processus de paix à Mindanao, dans la continuité des efforts entrepris depuis 2007 pour soutenir la conclusion d’un accord politique.
En effet, l’UE a été invitée par le gouvernement philippin et le Front islamique de Libération Moro (MILF) à faciliter les négociations et à contrôler le respect des accords établis auparavant. Le rôle de l’UE est apprécié par les deux parties dans le processus qui a mené à la signature de « l’accord de paix global sur Mindanao » signé le 27 mars 2014 par le gouvernement philippin et le MILF. Pour mémoire, cet accord, qui n’a toujours pas été validé par le parlement, vise à créer une région autonome du Bangsamoro administrée par la minorité musulmane et à mettre ainsi fin au conflit qui oppose depuis des décennies le gouvernement central aux indépendantistes du sud de l’île de Mindanao.
Au-delà du soutien politique, l’UE apporte un soutien technique et financier au Processus de paix, à hauteur de plus de 13 millions d’euros depuis 2007. L’UE fait partie de l’International Monitoring Team (IMT) coordonné par la Malaisie et dirige notamment sa composante humanitaire (Humanitarian, Development and Rehabilitation component). Elle a notamment soutenu l’organisation technique des discussions officielles et officieuses entre les parties, fourni des experts pour soutenir le processus de paix et accompagner la rédaction de la Bangsamoro Basic Law. L’UE a également mené des campagnes de sensibilisation des populations et a soutenu les ONG impliquées sur le terrain.
La contribution de l’UE à la résolution du conflit passe, depuis 2008, par l’Instrument contribuant à la Stabilité et à la Paix (1 million d’euros en 2008 et 3,9 millions en 2010). L’UE prévoit de verser 9 millions sur la période 2014-2016 et de concentrer ses efforts sur la poursuite du soutien à la mise en œuvre de l’accord.
L’UE est enfin présente sur les enjeux de développement et humanitaires à Mindanao afin de répondre aux causes profondes du conflit. L’UE a ainsi alloué 150 millions d’euros depuis 1990 au titre de l’ICD sur des projets tels que le soutien à la réforme du secteur de la santé (notamment chez les populations autochtones), la réintégration des déplacés internes ou le renforcement des institutions. ECHO a également versé 22 millions d’euros depuis 2001 à titre d’aide humanitaire aux victimes du conflit armé.
Le principal apport des accords-cadres conclus, outre l’actualisation à laquelle ils procèdent, est d’avoir inclus la relation actuelle, essentiellement économique et commerciale, dans une perspective plus large de coopération. C’est un point essentiel pour la France dont la diplomatie économique est certes à renforcer, mais qui n’a pas qu’une conception économique de la diplomatie. Or, les enjeux stratégiques et globaux sont particulièrement aigus en Asie du Sud-Est, quand bien même l’absence de crise ouverte l’occulte aux yeux des médias.
Chaque Accord de partenariat et de coopération (ACP) porte sur tous les aspects des relations bilatérales : politiques, économiques, sectoriels. En ce sens, chacun de ces nouveaux accords renouvelle la relation bilatérale de l’Union européenne avec le co-contractant en étendant de façon significative les secteurs de coopération et en les intégrant dans une dynamique bilatérale en lieu et place de l’accord conclu avec la région (et de l’accord bilatéral mais de portée plus restreinte conclu avec le Viêt Nam). Il répond à la volonté de l’UE de s’engager avec les pays tiers dans une relation plus globale et plus dynamiques.
Le Conseil de l’Union européenne a, en novembre 2004, autorisé la Commission européenne à négocier des accords-cadres de partenariat et de coopération (APC) avec les États membres de l’Association des Nations d’Asie du Sud-est. Les négociations avec l’Indonésie ont été engagées en 2005 et se sont déroulées sans difficultés majeures. L’accord est entré en vigueur. Les négociations avec le Viêt Nam et les Philippines n’ont pas non plus soulevé de problèmes particuliers.
S’agissant du Viêt Nam, les négociations commencées en novembre 2007 se sont achevées en septembre 2010. L’accord cadre a été paraphé en octobre 2010, puis signé en juin 2012 à Bruxelles. S’agissant des Philippines, les négociations engagées en février 2009 se sont achevées en juin 2010. L’accord-cadre a été paraphé en juin 2010 puis signé en juillet 2012 à Phnom Penh.
Les accords de partenariat et de coopération conclus par l’UE avec les États tiers sont pour l’essentiel similaires. Les deux qui sont soumis à ratification ne se distingue pas foncièrement des accords conclus ou en négociation avec les autres États de la région. Ces textes comportent des dispositions en matière politique, économique et sectorielle : lutte contre la prolifération des armes de destruction massive ; lutte contre la criminalité et le terrorisme transnationaux ; coopération dans les instances régionales et internationales ; développement du commerce et des investissements ; coopération sectorielle : tourisme, société de l’information, science et technologies, énergie, transports, éducation, culture, environnement, ressources naturelles, agriculture, pêche, santé, sécurité alimentaire, statistiques, protection des données à caractère personnel, modernisation de l’administration publique ; coopération sur les questions de migrations et de trafic d’êtres humains ; dans le domaine des droits de l’Homme et de la justice ; promotion des liens entre les peuples.
Néanmoins, l’accord conclu avec le Viêt Nam est plus dense. Il comporte 65 articles répartis en huit titres, ainsi que quatre déclarations annexées, quand l’accord avec les Philippines comporte 54 articles, également répartis en huit titres. On notera qu’un titre est dédié à la paix et la sécurité s’agissant du Viêt Nam, tandis qu’un titre est consacré à la coopération en matière de migration et de travail maritime avec les Philippines, reflétant ainsi les spécificités de la relation avec l’Union européenne.
STRUCTURE DES DEUX ACCORDS
Accord avec le Viêt Nam - Nature et portée de l’accord (Titre Ier) ; - Coopération et développement (Titre II) ; - Paix et sécurité (Titre III) ; - Coopération en matière de commerce et d’investissement (Titre IV) ; - Coopération dans le domaine de la justice (Titre V) ; - Développement socio-économique et autres domaines de coopération (Titre VI) ; - Cadre institutionnel (Titre VII) ; - Dispositions finales (Titre VIII). Quatre déclarations, faisant partie intégrante de l’accord, sont également jointes à l’accord-cadre : - déclaration commune sur le statut d’économie de marché ; - déclaration unilatérale de l’Union européenne sur le système de préférences généralisées (SPG) ; - déclaration commune relative à l’article 24 (coopération dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme) ; - déclaration commune relative à l’article 57 (respect des obligations). |
Accord avec les Philippines - Nature et portée de l’accord (Titre Ier) ; - Dialogue politique et coopération (Titre II) ; - Commerce et investissement (Titre III) ; - Coopération en matière de justice et de sécurité (Titre IV) ; - Coopération en matière de migration et de travail maritime (Titre V) ; - Coopération économique et au développement et autres secteurs (Titre VI) ; - Cadre institutionnel (Titre VII) ; - Dispositions finales (Titre VIII). |
Le titre I de chaque accord fixe le cadre général de la coopération : principes généraux (article 1), objectifs de la coopération (article 2) et dispositions détaillées sur trois de ces objectifs que sont la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive, la coopération juridique et la coopération dans la lutte contre le terrorisme.
Les objectifs de l’accord sont les suivants :
- la coopération avec l’UE dans toutes les instances et organisations régionales et internationales ;
- le développement du commerce et des investissements ;
- la coopération dans les autres secteurs d’intérêt commun ;
- la coopération sur les questions de migrations et de trafic d’êtres humains ;
- la coopération dans le domaine des droits de l’homme et de la justice ;
- la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive ;
- la lutte contre la criminalité et le terrorisme transnationaux ;
- la promotion des liens entre les peuples.
L’article 1er dresse la liste des principes généraux qui gouvernent l’accord, au nombre desquels, les principes généraux du droit international, les principes démocratiques et des droits de l’Homme inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme de l’Assemblée générale des Nations unies. Il souligne également que les Parties s’engagent à poursuivre leur coopération sur la voie de la réalisation intégrale des objectifs de développement adoptés au niveau international et à promouvoir le développement durable dans toutes ses dimensions.
S’agissant du Viêt Nam, l’article est beaucoup plus étoffé dans ses références à l’État de droit et au cadre juridique et politique de l’aide au développement. Un alinéa précise également que les parties avec reconnaissent le rôle significatif du commerce et des programmes préférentiels en matière de commerce dans le développement et la promotion du développement des pays en développement comme le Viêt Nam.
L’article 2 présente les objectifs de la coopération. Il est intéressant de souligner les similitudes et les spécificités, dont certaines sont mises en exergue en gras, des deux accords :
– Dans l’accord avec le Viêt Nam, les Parties prévoient de développer le commerce et l’investissement entre elles et de supprimer les obstacles au commerce et à l’investissement. Par la coopération au développement, elles entendent aussi éradiquer la pauvreté, promouvoir le développement durable, relever les nouveaux défis comme le changement climatique et les maladies transmissibles, approfondir les réformes économiques et renforcer l’intégration dans l’économie mondiale.
Les Parties annoncent également vouloir coopérer dans le domaine de la justice et de la sécurité en vue de lutter notamment contre la criminalité organisée, le blanchiment de capitaux, les drogues illicites, la prolifération des armes de destruction massive, le commerce illicite des armes légères et de petit calibre ainsi que contre le terrorisme.
D’autre coopérations sectorielles, très diverses, sont également prévues notamment dans les domaines suivants : la fiscalité, la santé, l’éducation et la formation, la culture, le tourisme, les transports, l’urbanisme et l’aménagement du territoire, l’emploi et les affaires sociales, la science et la technologie ;
– Dans l’accord avec les Philippines, les objectifs de la coopération qui portent sur un très grand nombre de domaines, qu’ils soient politique, économique, social ou relatif à la justice et la sécurité.
Les Parties prévoient de mettre en place une coopération en matière de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale, dans le domaine des droits de l’homme, dans la lutte contre les crimes graves de portée internationale, contre la prolifération des armes de destruction massive et des armes légères et de petit calibre, ainsi que pour la promotion d’un processus de paix et de prévention des conflits.
Les Parties prévoient une coopération dans tous les domaines d’intérêt commun liés aux échanges et aux investissements.
Les Parties annoncent également vouloir coopérer dans le domaine de la justice et de la sécurité, notamment en matière de coopération judiciaire, de drogues illicites, de blanchiment de capitaux, de lutte contre la criminalité organisée et la corruption, de protection des données ainsi que des réfugiés et déplacés internes, ainsi qu’en matière de migration et de travail maritime.
D’autres coopérations sectorielles dans des domaines d’intérêt commun très divers sont également prévues notamment dans les domaines d’action suivants : la fiscalité, la santé, l’éducation et la formation, la santé, la culture, le tourisme, les transports, l’urbanisme et l’aménagement du territoire, l’emploi et les affaires sociales, la science et la technologie.
La compréhension interpersonnelle, le dialogue et l’interaction efficaces avec la société civile doivent être mis en avant.
L’article 3 des accords ajoute que les Parties s’engagent à dialoguer et à coopérer dans les instances et organisations régionales et internationales telles que l’Organisation des Nations unies (ONU) et ses agences, l’ANASE (ASEAN), le forum régional de l’ANASE, le sommet Asie-Europe (ASEM) et l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Ce dialogue au niveau politique et institutionnel est complété par des coopérations entre groupes de réflexion, universités, ONG, entreprises et médias par l’entremise de séminaires, de conférences, d’échanges de jeunes et d’autres activités.
Dans chacun des secteurs, la coopération peut être bilatérale, régionale ou une combinaison des deux comme le prévoit l’article 4 de chaque accord.
L’article 5 reprend les principes généraux de l’accord applicables à la coopération au développement déjà évoqués et notamment la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement.
Les objectifs de cette coopération au développement sont mentionnés de manière non exhaustive à l’article 6. Les Parties doivent viser notamment à parvenir à une croissance économique soutenue ; à promouvoir le développement social et humain, les réformes et le développement des institutions ; la gestion durable et la régénération de l’environnement ainsi que les bonnes pratiques dans le domaine de la préservation des ressources naturelles. Elles doivent également prévenir les conséquences du changement climatique et soutenir les politiques et instruments visant à une intégration progressive dans l’économie et le commerce mondiaux.
Aux termes de l’article 7, la coopération peut prendre diverses formes : assistance technique, formations, ateliers, séminaires, échanges d’experts, études et recherches communes, échanges d’informations sur les bonnes pratiques en matière d’efficacité de l’aide et éventuellement d’autres formes de financement.
Les articles 8, 9 et 10 prévoient que les Parties conviennent de coopérer à la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs ; à la lutte contre le commerce illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC) sous tous ses aspects ; ainsi qu’en matière de lutte contre le terrorisme.
L’article 11 traite de la coopération dans le domaine juridique, dans le renforcement de l’État de droit et des institutions, des capacités judiciaires et du système juridique, ainsi que dans le domaine de la justice pénale internationale. Les Parties déclarent considérer la Cour pénale internationale comme « une institution progressiste et indépendante œuvrant à des fins de paix et de justice internationale ».
En prenant en compte leurs niveaux de développement respectifs, les Parties s’engagent, à l’article 12, à dialoguer sur le commerce bilatéral et multilatéral, à promouvoir et à diversifier leurs échanges commerciaux en œuvrant à la suppression des obstacles aux échanges, notamment en éliminant les barrières non tarifaires et en améliorant la transparence.
Les engagements des Parties visant à favoriser les échanges ainsi que le commerce des services sont précisées respectivement aux articles 13 et 19.
Les Parties conviennent de coopérer sur les questions sanitaires et phytosanitaires ainsi que sur les questions relatives à la « bientraitance des animaux » (article 14), sur les obstacles techniques au commerce (article 15), et sur les questions douanières et la facilitation des échanges (article 16).
Les Parties favorisent un environnement « attrayant et stable » pour l’investissement (article 17), assurent le maintien d’une législation et d’une règlementation en matière de concurrence que des autorités chargées de la concurrence appliquent de manière « efficace, non discriminatoire et transparente ».
L’article 20 prévoit l’intensification de la coopération dans le domaine de la protection et de l’application des droits de propriété intellectuelle, notamment en vue de faciliter la protection et l’enregistrement des indications géographiques de l’autre Partie sur leurs territoires respectifs.
Une participation accrue des acteurs économiques est encouragée à l’article 21 telles que les chambres de commerce et d’industrie et les associations professionnelles.
Pour garantir une certaine sécurité et prévisibilité dans leurs relations commerciales bilatérales, les Parties conviennent de se consulter dans les meilleurs délais, à la demande d’une Partie, sur tout différend susceptible d’entraver leur coopération en matière de commerce.
Les Parties conviennent de coopérer plus particulièrement pour lutter contre la criminalité organisée (article 23), contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (article 24), contre les drogues illicites (article 25).
En outre, aux termes de l’article 21, les Parties s’engagent à coopérer afin d’aligner le niveau de protection des données à caractère personnel sur les normes internationales les plus strictes. Cette coopération peut se faire par le biais d’une assistance technique sous la forme d’un échange d’informations et de compétences techniques.
L’article 27 prévoit que les Parties s’engagent à coopérer dans le domaine des migrations en établissant un dialogue approfondi sur toutes les questions ainsi que par l’échange d’expériences et de pratiques. Cette coopération porte notamment sur les causes des migrations, les règles d’admission, l’élaboration d’une politique préventive contre l’immigration clandestine, le trafic de migrants et la traite des êtres humains, ainsi que la réadmission des ressortissants illégalement présents sur le territoire d’une Partie.
Les Parties conviennent également de coopérer dans le secteur de l’éducation et de la formation (article 28), de la santé (article 29), de l’environnement et ressources naturelles (article 30), pour faire face au changement climatique (article 31), de l’agriculture, de la sylviculture, de l’élevage, de la pêche et du développement rural (article 32), de l’égalité hommes-femmes (article 33), dans la gestion des débris de guerre comme les mines, les bombes et autres engins non explosés qui est un sujet de préoccupation pour le Viêt Nam et pour laquelle la France a une expertise (article 34), dans le domaine des droits de l’homme (article 35), dans la réforme de l’administration publique (article 35).
Aux termes de l’article 37, les Parties reconnaissent le rôle et la contribution potentielle des associations et des organisations non gouvernementales (ONG), y compris les partenaires sociaux, au processus de coopération instauré par l’accord de partenariat et de coopération.
Les Parties conviennent également de promouvoir une coopération multiculturelle multiforme, y compris en matière de préservation du patrimoine (article 38), de renforcer la coopération scientifique et technologique dans les domaines d’intérêt mutuel, en particulier le changement climatique et la gestion des ressources naturelles ainsi que la santé humaine et animale (article 39), de coopérer en matière de technologies de l’information et de la communication (article 40), dans les secteurs appropriés du transport (article 41), dans le secteur de l’énergie (article 42), du tourisme (article 43), en matière de politique industrielle en vue d’améliorer la compétitivité des petites et moyennes entreprises (article 44), pour promouvoir l’échange d’informations sur leurs tendances et politiques économiques respectives (article 45), dans le domaine de la fiscalité (article 46), en matière de services financiers en vue d’améliorer la comptabilité, l’audit ainsi que les systèmes de surveillance et de réglementation, notamment dans les secteurs de la banque et de l’assurance (article 47).
Les Parties s’engagent à coopérer en matière de prévention et d’atténuation des catastrophes naturelles, sujet d’inquiétude pour le Viêt Nam, notamment en partageant des informations sur le suivi, l’évaluation, la prévision et le signalement précoce des catastrophes naturelles, en améliorant les capacités dans la prévention et l’atténuation des catastrophes naturelles et en s’épaulant mutuellement par la fourniture des technologies, équipements spécialisés et matériel nécessaire aux interventions d’urgence (article 48).
S’y ajoutent des coopérations dans le domaine de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire (article 49), dans le domaine du travail, de l’emploi et des affaires sociales (article 50) ainsi qu’en vue d’harmoniser et développer les méthodes statistiques (article 51).
Le titre II prévoit des dialogues réguliers ; des programmes et des activités menées en commun ; des échanges d’informations, de vues et d’expériences ; des partages quant aux meilleures pratiques ; la fourniture de services et le renforcement des capacités institutionnelles.
Les Parties conviennent de poursuivre leurs efforts de collaboration afin de promouvoir le processus de paix et la prévention des conflits (article 5), de coopérer à la promotion et à la protection efficace de tous les droits de l’homme y compris dans le cadre d’instruments internationaux de défense des droits de l’homme auxquelles elles sont parties (article 6). Elles reconnaissent que les crimes les plus graves de portée internationale doivent être réprimés par la Cour pénale internationale et conviennent de mener un dialogue en vue de l’adhésion universelle au statut de Rome de la Cour pénale internationale (article 7). Elles s’engagent également à coopérer dans la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs (article 8), dans la lutte contre le commerce illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC) et de leurs munitions (article 9) et dans la lutte contre le terrorisme (article 10).
Une coopération en matière d’administration publique est également prévue à l’article 11.
Les Parties coopèrent en vue de renforcer les échanges commerciaux et les investissements (article 12). Plusieurs domaines sont expressément visés : les questions sanitaires et phytosanitaires (article 13), les obstacles techniques au commerce (article 14), la douane et les facilitations des échanges (article 15), les flux d’investissement (article 16), la politique de concurrence (article 17), les services (article 18) ainsi que les droits de propriété industrielle (article 19).
Les Parties déclarent reconnaître l’importance particulière de l’État de droit et du renforcement de toutes les institutions pertinentes et s’engagent dans une coopération juridique qui comprend notamment l’échange d’informations relatives aux meilleures pratiques en matière de systèmes juridiques et de législation (article 20).
L’accord prévoit des coopérations dans la lutte contre les drogues illicites (article 21), contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (article 22), ainsi que contre la criminalité organisée et la corruption (article 23).
Une coopération pour augmenter le niveau de protection des données à caractère personnel (article 24) ainsi que sur des questions relatives au bien-être des réfugiés et des déplacés internes figurent également dans l’accord.
L’article 26 prévoit que les Parties s’engagent à coopérer dans le domaine des migrations entre leurs territoires en établissant un dialogue approfondi sur toutes les questions. Cette coopération porte notamment sur les causes des migrations, les règles d’admission, l’élaboration d’une législation relative à la protection et aux droits des migrants, l’établissement d’une politique préventive contre l’immigration clandestine, le trafic de migrants et la traite des êtres humains, ainsi que la réadmission des ressortissants illégalement présents sur le territoire d’une Partie.
Aux termes de l’article 27, les Parties conviennent de coopérer, sous la forme d’un mécanisme de consultations mutuelles et de dialogue, afin de promouvoir et de défendre des conditions de vie et de travail décentes pour les gens de mer, la sécurité au travail et les programmes et politiques en matière de santé. La coopération porte également sur l’éducation maritime, la formation, et la délivrance de brevets de gens de mer, ainsi que sur des programmes destinés à lutter contre la piraterie et le terrorisme.
Les Parties s’engagent à coopérer dans le domaine de l’emploi et des affaires sociales (article 28).
La coopération au développement prévue à l’article 29, qui se fera par le biais d’un dialogue régulier, a pour objet de promouvoir le développement durable, qui contribuera à réduire la pauvreté et à réaliser les objectifs du développement adoptés au niveau international, dont les objectifs du millénaire pour le développement.
Les Parties conviennent de dialoguer sur la politique économique (article 30) et sur la société civile (article 31).
Elles s’engagent à coopérer au niveau de la gestion des risques de catastrophe (CRG) (article 32), dans le secteur de l’énergie (article 33), dans le domaine de l’environnement et des ressources naturelles afin de les préserver et de les gérer de manière durable (article 34), en matière d’agriculture, de pêche et de développement durable (article 35), au niveau de la politique régionale en mettant l’accent sur les régions défavorisées, les liens entre les régions urbaines et rurales et le développement rural (article 36), en matière de politique industrielle en vue notamment d’améliorer la compétitivité des PME (article 37), dans le domaine des transports en vue d’améliorer les perspectives d’investissement et la circulation des marchandises et des passagers, de promouvoir la sûreté et la sécurité maritime et aérienne, d’agir sur l’impact environnemental des transports et d’augmenter l’efficacité des systèmes de transport (article 38).
Les Parties conviennent de coopérer dans le domaine de la science et de la technologie (article 39), en matière de technologies de l’information et de la communication (article 40) ainsi que dans le domaine audiovisuel, des médias et des multimédias (article 41).
Sont également prévues des coopérations en matière de tourisme (article 42), en matière de services financiers en vue d’améliorer la comptabilité, l’audit ainsi que les systèmes de supervision et de réglementation, notamment dans les secteurs de la banque et de l’assurance (article 43), dans le domaine fiscal où les Parties appliqueront les principes de bonne gouvernance (article 44), dans le domaine de la santé (article 45), ainsi qu’en vue d’harmoniser et de développer leurs méthodes statistiques respectives (article 47).
Aux termes de l’article 46, les Parties conviennent de promouvoir la coopération dans le domaine de l’éducation, des sports, de la culture et de la religion sous la forme notamment de contacts interpersonnels ainsi que de dialogues interculturels et interreligieux.
Le Titre VII de chacun des accords (article 52 de l’accord avec le Viêt Nam et article 48 de l’accord avec les Philippines) crée un comité mixte, composé de représentants des deux Parties, afin de veiller au bon fonctionnement et à la bonne application de l’accord. Il peut créer des sous-comités et des groupes de travail spécialisés pour l’assister dans l’accomplissement de ses tâches. S’agissant du Viêt Nam, le comité mixte se réunit « normalement » chaque année. La périodicité des réunions est d’au moins une fois tous les deux ans s’agissant des Philippines.
Les dispositions finales figurent aux articles 53 à 65 de l’accord avec le Viêt Nam et aux articles 49 à 58 de celui avec les Philippines. Les Parties mettent à disposition, dans la limite de leurs ressources, les moyens appropriés, financiers et autres, afin de permettre la réalisation des objectifs de l’accord. Elles encouragent la Banque européenne d’investissement à poursuivre son action au Viêtnam.
Classiquement, l’accord et les actions réalisées dans le cadre de l’accord ne modifient pas les engagements pris par les Parties dans leurs relations avec des tiers et n’affectent pas non plus le pouvoir des États membres d’entreprendre des actions de coopération bilatérale ou de conclure de nouveaux accords de partenariat et de coopération à titre bilatéral.
L’application et l’interprétation de l’accord sont confiées au comité mixte qui peut régler les différends qui lui sont soumis par voie de recommandation. Si le problème n’a pas pu être résolu au sein du comité mixte, les Parties peuvent prendre « les mesures appropriées » en cas de non-respect par l’autre Partie des obligations induites par l’accord avec une priorité accordée « aux mesures qui perturbent le moins le fonctionnement du présent accord ».
Sont également précisées les Parties au traité, le champ d’application territoriale, les langues du traité, les procédures de notification ainsi que les conditions d’entrée en vigueur et la durée de l’accord. En outre, une Partie ne peut pas être tenue de divulguer des informations si elle considère que c’est contraire à ses intérêts essentiels en matière de sécurité.
Chaque accord entre en vigueur le premier jour du mois suivant la date à laquelle la dernière partie a notifié à l’autre l’accomplissement des procédures juridiques nécessaires à cet effet. Il est conclu pour cinq ans et automatiquement prorogé pour des périodes successives d’un an, sauf notification écrite contraire six mois avant la fin de toute période ultérieure d’un an. L’accord peut être dénoncé par l’une ou l’autre partie au moyen d’une notification écrite de dénonciation adressée à l’autre partie ; il cesse d’être applicable six mois après la réception de cette notification par l’autre partie.
Une clause d’évolution future permet aux Parties, par consentement mutuel, d’étendre le champ d’application du présent accord afin de renforcer le niveau de coopération, en l’assortissant notamment d’accords ou de protocoles sur des domaines ou des activités spécifiques.
Les accords-cadres de partenariat et de coopération conclus respectivement avec le Viêt Nam et les Philippines renforcent le partenariat économique tout en élargissant le champ de la coopération, notamment en intégrant des questions politiques.
Peu contraignants, ils manifestent essentiellement la volonté des parties de s’engager dans une relation globale qui ne se limite pas à la seule dimension économique et commerciale. Des accords sectoriels plus précis, tels que des accords de libre-échange, sont appelés à les compléter et à faire l’objet de réels débats.
Les accords-cadres ne faisant qu’accompagner des évolutions positives en matière de développement économique et de progression de l’État de droit, on ne saurait trouver argument pour en contester l’opportunité. Votre rapporteur propose donc d’en autoriser la ratification.
La commission examine, sur le rapport de M. Gwenegan Bui, les deux présents projets de loi au cours de sa séance du mercredi 2 mars à 9 heures 45.
Après l’exposé du rapporteur, un débat a lieu.
Mme la présidente Elisabeth Guigou. Merci beaucoup cher collègue. Il est très important d’intensifier nos relations avec cette région du monde, ce que vous n’avez cessé de nous rappeler. La France y dispose toujours de larges capacités d’influence que nous devrions cultiver davantage.
M. Jean-Paul Bacquet. Cet accord est effectivement très important, car le Viêt Nam est en plein développement, avec un boom économique surprenant. La France y jouit toujours d’un large capital de sympathie. Je ne me fais pas trop d’illusion sur les effets de ce texte sur les droits de l’homme, mais l’enjeu est ailleurs. Il faut autoriser la ratification de ce texte pour de multiples raisons. Je ne suis pas sûr que les Vietnamiens nous attendent. Mais je suis persuadé que le progrès économique aura inévitablement des conséquences sur l’évolution des droits de l’homme.
M. Michel Terrot. Des conventions similaires ont-elles été signées avec d’autres Etats de la région, que sont le Cambodge et le Laos ?
M. Gwenegan Bui, rapporteur. La question des droits de l’homme est une figure imposée mais nécessaire quand les signataires d’un accord sont la France ou l’Union européenne. Le dialogue existe. Comme le souligne notre collègue Jean-Paul Bacquet, cet accord est important. Si j’ai insisté en indiquant que la France était l’un des derniers pays européens à le ratifier, ce n’est pas parce que c’est un problème en soi, mais c’est une question de symbole. J’ai été reçu par l’Ambassadeur du Vietnam qui attendait cette ratification. C’est parce que la signature de notre pays revêt une grande valeur, tant d’ailleurs pour les autorités vietnamiennes que pour l’homme de la rue. La France a une image positive au Viêt Nam. Sa signature signifie qu’il y a une volonté réelle de mettre en œuvre cet accord et que la France attache de l’importance aux liens avec le Viêt Nam.
J’ajoute qu’au Viêt Nam comme partout en Asie du Sud Est, la France n’agit pas de manière cohérente et manque de volontarisme. Nous sommes présents grâce à nos entreprises et à nos communautés d’expatriés, mais il n’y a pas assez de stratégie d’Etat. Je compte beaucoup sur M. Jean-Marc Ayrault, qui, à la suite de M. François Fillon, a bien compris l’importance de cette région et s’y était rendu comme Premier ministre. Mais il n’y a toujours pas eu de visite du Président de la République. La Présidente de notre Commission s’y est rendue récemment, car précisément il faut cultiver notre place et qu’il y a urgence en la matière. Il est important de maintenir notre influence, sinon d’autres pays prendront notre place. Il faut que les parlementaires s’y rendent et entretiennent les liens d’amitié.
En réponse à M. Michel Terrot, j’indique qu’il n’y a pas pour l’heure d’accord similaire avec le Cambodge et le Laos, la Commission européenne n’ayant pas reçu mandat pour en négocier. Ces deux pays sont en revanche membres de l’accord passé par l’Union européenne avec la région. Des négociations sont en cours avec les membres fondateurs de l’ASEAN. Je pense que le Cambodge et le Laos n’ont pas exprimé cette demande et veulent aussi observer l’effet des accords que nous discutons.
M. François Scellier. J’insiste sur l’attente du Viêt Nam. Je m’étais rendu dans ce pays en qualité de président du conseil général du Val d’Oise et député il y a quelques années pour effectuer une visite sur le thème du développement économique. J’avais été frappé par l’attente des Vietnamiens vis-à-vis de la France, alors même qu’il n’existait aucun rapprochement entre les deux autorités gouvernementales de nos deux pays. Je l’ai d’ailleurs fait remarquer à Philippe Douste-Blazy, alors ministre des affaires étrangères, à mon retour. Devant ce manque de relation au plus haut niveau de l’Etat, j’avais d’ailleurs été reçu en province presque comme un représentant de l’Etat français.
Mme la présidente Elisabeth Guigou. Il a été fait allusion à ma visite au Viêt Nam et en Birmanie avant Noël dernier. Je l’ai faite à la demande du Président de la République ; j’ai d’ailleurs remis à cette occasion une lettre de François Hollande aux plus hautes autorités de ces pays. J’étais effectivement été reçue au plus haut niveau de l’Etat et pas uniquement par nos homologues parlementaires. Dans la lettre du Président de la République, il annonçait qu’il se rendrait dans ce pays cette année. Je crois savoir que cette visite est prévue pour le début de l’été, après le renouvellement des instances dirigeantes du parlement.
Lors de mes entretiens, j’avais indiqué que je proposerai que cet accord soit ratifié avant cette visite d’Etat car c’était un élément important pour mes interlocuteurs. Si le calendrier est respecté, le projet de loi sera examiné en séance publique le 17 mars. J’informerai alors par courrier les personnes qui ont bien voulu me recevoir, en particulier les parlementaires, du vote de l’Assemblée nationale. Par ailleurs, je m’associe à toutes les remarques qui ont été faites sur les attentes existant au Viêt Nam à l’égard de la France.
M. Jean-Paul Bacquet. L’absence de la France au Viêt Nam est inacceptable, d’autant plus que les Vietnamiens n’ont aucun sentiment vis-à-vis de notre pays contrairement à d’autres pays colonisés par la France. Les Vietnamiens ont même oublié leur ressentiment vis-à-vis des Etats-Unis. Ce qu’ils veulent à présent est ne pas être dépendant vis-à-vis de la Chine et des Etats-Unis. Ils sont d’ailleurs conscients de leur position stratégique. Je veux également souligner l’intérêt du Viêt Nam en matière d’aide au développement pour le choix de ses investissements. La France pourrait chercher à renforcer la coopération avec le Viêt Nam en la matière. La question de l’aide déliée se pose à nouveau.
M. Gwenegan Bui, rapporteur. François Scellier a raison d’insister sur le poids de la coopération décentralisée. Nombreuses sont les collectivités françaises qui ont établi des liens avec des municipalités ou régions vietnamiennes. Celle-ci est cependant insuffisamment coordonnée en France, ce qui ne permet pas d’optimiser les actions.
Je rappellerai que la France est le deuxième pays donateur d’aide au Viêt Nam après le Japon.
Enfin, je regrette de manière générale que la France n’utilise pas ses atouts, à commencer par l’existence de 700 à 800 000 Français d’origine vietnamienne, dont je suis. Cette ressource n’est absolument pas exploitée alors que les histoires personnelles, familiales, de ces personnes, leurs liens affectifs, culturels et économiques avec le Viêt Nam , constituent autant de ponts entre nos deux pays.
Mme la présidente Elisabeth Guigou. Nous le faisons ici à la Commission !
M. Gwenegan Bui, rapporteur. Mais il n’y a pas de stratégie portée par notre diplomatie. En fait, nous ne sommes pas capables de mobiliser ces Français d’origine vietnamienne. Cela me laisse pantois. Ma remarque est également valable pour les Français d’autres origines.
Le second atout dont dispose la France au Viêt Nam est la langue française. Pouria Amirshahi a produit un rapport très intéressant sur le sujet pour la commission des Affaires étrangères. Cependant, au Viêt Nam, l’usage du français se délite et le nombre de locuteurs baisse considérablement. Bientôt, le français représentera une histoire et non un vécu.
Le Viêt Nam est confronté à une situation très compliquée en mer de Chine. L’Australie augmente considérablement son budget militaire, renforce sa marine et son aviation. La mer de Chine est devenue une zone de tension et les Vietnamiens ne veulent pas être pris dans un étau entre la Chine et les Etats-Unis et ses alliés. C’est une opportunité pour la France, dont les intérêts sont par ailleurs concernés. Je pense que la France peut jouer la stratégie du petit caillou en se positionnant au milieu du jeu, afin de compliquer la partie et de limiter les risques d’affrontement. Mais il faut, de grâce, que tout cela soit coordonné.
Je ne serai plus dans cette commission et je souhaite qu’elle continue, je ne doute pas que Jean-Jacques Guillet le fera, à plaider pour que France ait une attention et une action plus forte dans cette partie du monde.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte les deux projets de loi (n° 3379 et n° 3378) sans modification.
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR
Néant
TEXTES DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
Article unique
(Non modifié)
Est autorisée la ratification de l’accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d’autre part (ensemble une annexe), signé à Bruxelles le 27 juin 2012, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Article unique
(Non modifié)
Est autorisée la ratification de l’accord-cadre de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République des Philippines, d’autre part, signé à Phnom Penh le 11 juillet 2012, et dont le texte est annexé à la présente loi.
NB : Le texte des accords-cadres figure en annexe aux deux projets de loi (n 3378 et 3379).
1 () En revanche, l’accord n’a pas été étendu à la Birmanie, entrée dans l’ANASE en 1997.
2 () « L’Asie du Sud-Est à la confluence des océans », rapport d’information de Gwenegan Bui et Jean-Jacques Guillet, n°2548 du 4 février 2015.