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Amendements  sur le projet ou la proposition


N
° 3615

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 mars 2016

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l’accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord,

PAR M. Guy-Michel  CHAUVEAU

Député

——

ET

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Voir les numéros :

Sénat : 286, 457, 458 et T.A. 111 (2015-2016).

Assemblée nationale : 3578, 3620

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. UN DÉMARCHE DE COHÉRENCE ET DE CONSÉQUENCE 7

A. L’ABOUTISSEMENT D’UN RETOUR ENGAGÉ DÈS 1995 7

B. TROIS ÉLÉMENTS SUPPLÉMENTAIRES À PRENDRE EN COMPTE 9

1. La simplicité administrative et la sécurité juridique 9

2. L’influence française 10

3. L’absence d’incidence et ainsi d’inflexion sur notre positionnement vis-à-vis de l’OTAN 11

4. Une négociation sans difficulté 12

II. UN ACCORD TECHNIQUE CLASSIQUE, QUI NE SOULÈVE AUCUNE DIFFICULTÉ 13

A. LE CHAMP D’APPLICATION : LES QUARTIERS GÉNÉRAUX MILITAIRES INTERALLIÉS, LEURS PERSONNELS ET LEURS PERSONNES À CHARGE 13

1. Les structures civiles et militaires de l’OTAN et leurs statuts 13

a. Les structures de l’OTAN 13

b. La convention de Londres de 1951 SOFA OTAN sur le stationnement des forces armées 14

c. La convention d’Ottawa de 1951 sur le statut de l’OTAN 15

2. Le protocole de Paris : un texte spécifique aux quartiers généraux militaires internationaux 15

a. Une mise en œuvre, avec des adaptations, de la convention SOFA OTAN 15

b. Son champ d’application : les quartiers généraux militaires internationaux, ainsi que leurs personnels civils et militaires 15

B. DES DISPOSITIONS ADMINISTRATIVES, FISCALES ET TECHNIQUES 16

1. Le statut des quartiers généraux 16

2. La couverture juridique des personnes civils et militaires, et de leurs ayant droits 17

3. Le règlement des différends et les dispositions finales 18

C. UNE RATIFICATION NÉCESSAIREMENT PAR VOIE LÉGISLATIVE 19

D. UNE APPLICATION ÉVENTUELLE À CERTAINS QUARTIERS GÉNÉRAUX ET CERTAINES STRUCTURES EN FRANCE, MAIS APRÈS UNE DÉCISION EXPLICITE AU CAS PAR CAS 20

EXAMEN EN COMMISSION 23

ANNEXE N° 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 25

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES 27

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La réintégration par la France de la structure du commandement intégré de l’Organisation du Traité de l’Atlantique (OTAN), en 2009, conduit naturellement à se poser la question de la ratification du protocole de Paris du 28 août 1952 sur le statut des quartiers militaires internationaux créés en vertu du traité de Washington du 4 avril 1949 donnant naissance à l’Alliance atlantique.

Ce protocole a été une première fois ratifié par la France, le 20 janvier 1955, alors que notre pays, membre fondateur de l’Alliance, accueillait non seulement le siège de l’OTAN, mais aussi le Grand quartier général des puissances alliées en Europe (GQGPAE ou SHAPE en anglais), à Rocquencourt. À l’Assemblée nationale, le rapporteur en était le général Pierre Billotte.

Ce protocole a été dénoncé le 30 mars 1966, avec effet au 31 mars 1967, lorsque la France a décidé, dans les circonstances historiques que nous connaissons, de quitter la structure de commandement intégrée.

A alors eu lieu le transfert du SHAPE en Belgique, à Mons, où il est toujours établi.

Cinquante ans après, la démarche inverse s’impose.

D’une part, la réintégration opérée à partir de 2009 a donné des résultats positifs. Sa pertinence a été confirmée dès 2012 par le rapport pour le Président de la République française sur « les conséquences du retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN, sur l’avenir de la relation transatlantique et les perspectives de l’Europe de la défense » établi par M. Hubert Védrine, ancien ministre des affaires étrangères.

Ensuite, le protocole est un texte très technique, de conséquence, dont les dispositions de type « accord de siège d’une organisation internationale » ne soulèvent pas de difficulté. Il définit le cadre juridique du stationnement des quartiers généraux interalliés et accorde une couverture juridique administrative, douanière et fiscale à leurs personnels militaires et civils, ainsi qu’à leurs ayant droits. Il complète et précise la convention de Londres du 19 juin 1951 entre les États parties au Traité de l’Atlantique Nord sur le statut de leurs forces, dite SOFA OTAN (Status Of Force Agreement), sur le statut des forces armées d’un pays membre de l’Alliance lorsqu’elles sont déployées sur le territoire d’un autre État membre. Cette convention n’a jamais été dénoncée par la France.

De plus, il n’implique aucune inflexion ni aucun infléchissement de notre position au sein de l’OTAN. Sa ratification ouvre à l’opposé la perspective d’une valorisation sur notre territoire des quartiers généraux et structures militaires françaises certifiés par l’OTAN et ouverts à la multi-nationalité.

Enfin, à quelques mois du prochain sommet de l’OTAN, qui aura lieu les 8 et 9 juillet 2016 à Varsovie, la France, qui est l’un des très rares membres de l’Alliance à avoir une capacité militaire opérationnelle de premier plan, ne peut que gagner à conforter son influence au sein de l’Alliance en montrant qu’elle est prête, si nécessaire, à développer ses quartiers généraux en accueillant sur son sol des personnels des armées alliées dans les mêmes conditions que les autres États.

Au surplus, il faut toujours le rappeler, l’Alliance atlantique est une alliance défensive fondée sur le principe de l’assistance mutuelle en cas d’attaque armée contre un de ses membres, comme le prévoit l’article 5 du traité de 1949, selon le principe « tous pour un, un pour tous ».

C’est dans cette perspective que le présent projet de loi visant à autoriser l’accession de la France au protocole de Paris, a été adopté par le Sénat, à l’issue d’un débat en séance publique, le 15 mars dernier, sur le rapport de M. Jacques Gautier, sénateur, vice-président de la délégation française à l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, et qu’il revient à l’Assemblée de faire de même, sans réserve.

I. UN DÉMARCHE DE COHÉRENCE ET DE CONSÉQUENCE

A. L’ABOUTISSEMENT D’UN RETOUR ENGAGÉ DÈS 1995

L’Alliance atlantique a été créée le 4 avril 1949 par le Traité de Washington. C’est un traité d’assistance mutuelle en cas d’agression contre l’un de ses membres. Son article 5 définit les termes et conditions de cet engagement de défense collective. Son dispositif est le suivant :

« Les parties conviennent qu’une attaque armée contre l’une ou plusieurs d’entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d’elles, dans l’exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l’article 51 de la Charte des Nations Unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d’accord avec les autres parties, telle action qu’elle jugera nécessaire, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l’Atlantique Nord ».

Pour la France, l’Alliance atlantique a été la réponse à sa demande, dès 1945, d’une garantie américaine dont le défaut dans l’Entre-deux-guerres est l’une des origines du désastre de 1940. Elle en est l’un des membres fondateurs.

Rapidement, en avril 1951, a été mise en place l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord, l’OTAN. Notre pays a accueilli son siège, au Palais de Chaillot, puis à Dauphine, et la structure de commandement militaire, le Grand quartier général des puissances alliées en Europe (GQGPAE ou Supreme Headquarters Allied Powers Europe - SHAPE en anglais), d’abord à l’hôtel Astoria à Paris, puis à Rocquencourt. Le premier commandant suprême allié (Supreme Allied Commander EuropeSACEUR) a été le général Dwight D. Eisenhower.

En 1966, la France se retire du commandement militaire intégré, après avoir retiré la flotte de la Méditerranée dès 1959, et celle de l’Atlantique en 1962. Comme l’observe M. Hubert Védrine dans son rapport sur « Les conséquences du retour de la France dans le commandement militaire intégré de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), l’avenir de la relation transatlantique et les perspectives de l’Europe de la Défense », remis au Président de la République le 14 novembre 2012, c’est à la suite de la fin de non-recevoir à la demande de la France, en 1958, d’un directoire à trois et d’une approche mondiale de la sécurité, et c’est le moment où le général de Gaulle, Président de la République, fait le choix d’une « stratégie nucléaire de stricte dissuasion ».

Le siège de l’OTAN déménage alors en Belgique, à Evere, et le SHAPE aussi, à Mons, où il se trouve toujours.

Devenu sans objet, le protocole de Paris est dénoncé le 30 mars 1966 avec effet au 31 mars 1967.

Pour autant, la France reste membre de l’Alliance et, dès 1967, l’accord Ailleret-Lemnitzer, conclu entre le chef d’état-major des armées et le SACEUR, prévoit une série de missions françaises de coordination auprès des principaux états-majors régionaux de l’Alliance.

À partir des années 1990, s’engage le rapprochement de la France avec le commandement intégré, d’abord sous la présidence de François Mitterrand.

Puis, à partir de 1995, M. Jacques Chirac étant Président de la République, les ministres de la défense participent aux réunions ministérielles de l’OTAN, les chefs d’état-major français prennent part aux réunions avec leurs homologues des pays Alliés, et le représentant militaire français auprès de l’OTAN siège au comité militaire. Des officiers français servent par ailleurs dès cette date au quartier général des forces alliées en Europe (SHAPE), dans les états-majors de niveau opérationnel et dans certains organismes du commandement pour la Transformation (Allied Command Transformation – ACT), après sa création en 2003.

Enfin, en juin 2008, la pleine participation aux structures du commandement intégrée est annoncée par le Président de la République, M. Nicolas Sarkozy, au cours des débats sur le Livre blanc sur la défense nationale, avec deux objectifs : d’une part, accroître notre présence et notre influence dans l’Alliance ; d’autre part, faciliter la relance de l’Europe de la défense, en levant toute ambiguïté sur une éventuelle concurrence entre les deux organisations.

Cette décision a fait l’objet d’un vote positif à l’Assemblée nationale en mars 2009, sur la déclaration de politique étrangère du Gouvernement au titre de l’article 49-1 de la Constitution. La France annonce officiellement sa pleine participation aux structures militaires de l’OTAN lors du Sommet de Strasbourg-Kehl les 3 et 4 avril 2009.

Ce retour a cependant été assorti de deux conditions pour permettre à la France de préserver sa liberté d’appréciation pour contribuer ou non aux opérations de l’OTAN et pour qu’aucune force française ne soit placée en permanence sous un commandement de l’OTAN en temps de paix. Ainsi, pour les forces armées françaises, le commandement opérationnel est toujours exercé par le chef d’état-major des armées. C’est lui qui fixe le cadre des missions données aux armées. Seul le contrôle opérationnel peut être donné au SACEUR ou à ses autorités subordonnées sur une décision nationale. Ce contrôle opérationnel n’autorise pas l’autorité qui le détient à modifier le cadre des missions, mais seulement à employer les forces dans le cadre fixé.

La France maintient également son choix de ne pas participer au groupe des plans nucléaires. Sa dissuasion relève, en effet, du principe de l’autonomie stratégique, ainsi que de la liberté d’appréciation, de décision et d’action.

Le retour de la France a été salué, puisque l’un des deux commandements stratégiques, avec le poste de commandant suprême allié pour la transformation (SACT), à Norfolk en Virginie (États-Unis), a été confié à un officier général français. Depuis septembre 2009, les généraux Stéphane Abrial, Jean-Paul Palomeros puis Denis Mercier, en poste actuellement, s’y sont succédé.

La décision de pleine participation à l’OTAN a depuis été confirmée par les conclusions du rapport précité de M. Hubert Védrine et par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013, qui a précisé que : « notre stratégie de défense et de sécurité nationale ne se conçoit pas en dehors du cadre de l’Alliance atlantique et de notre engagement dans l’Union européenne ».

Par conséquent, l’accession au Protocole de Paris telle que la propose le Gouvernement est, dans cette perspective, une mesure logique qui va de soi.

B. TROIS ÉLÉMENTS SUPPLÉMENTAIRES À PRENDRE EN COMPTE

1. La simplicité administrative et la sécurité juridique

L’enjeu de l’accession au Protocole de Paris se mesure de manière très concrète. Il doit permettre la simplicité et la sécurité juridique là où règne actuellement la complexité.

C’est ce qu’illustre le cas du quartier général du Corps réaction rapide–France (QG-CRR-Fr) de Lille, certifié par l’OTAN.

Lors de sa création en 2006, les États concernés ont signé un arrangement technique qui prévoit qu’il  est amendé lorsqu’une nouvelle nation rejoint le CRR -Fr ou qu’une nation le quitte. C’est un processus continu, car des entrées et des sorties interviennent régulièrement. Le tableau d’effectifs 2016 du CRR-Fr compte 447 postes, dont 359 pour la France et 88 ouverts aux autres nations.

Cet arrangement technique est donc renégocié en permanence. Actuellement, selon les informations communiquées, le statut fiscal est accordé par la France au personnel militaire étranger inséré dans les QG français de réaction rapide dans le Nord, au cas par cas, à titre privé et de manière provisoire.

En outre, dans la pratique de l’OTAN, les personnels affectés à un corps de réaction rapide ne relèvent pas des catégories couvertes par la convention de Londres de 1951 dite SOFA OTAN, mais bien de celles couvertes par le protocole de Paris, dont c’est l’objet. Par conséquent, une réserve des États-Unis a été introduite à cet arrangement technique précité dit « Soutien », liant notamment leur participation à la garantie d’une application du SOFA OTAN à leurs personnels.

L’accession au protocole de Paris aurait permis d’éviter une telle construction.

Elle mettra, en outre, en cohérence la pratique de la France avec celle de ses alliés, pour lesquels la non-reconnaissance du statut des personnels affectés dans les quartiers généraux internationaux prévu par le protocole de Paris peut constituer un motif d’incertitude.

Outre le CRR-Fr, plusieurs états-majors accueillent actuellement des troupes alliés.

Tel est le cas du quartier général du corps de réaction rapide européen (CRR-E), situé à Strasbourg, également certifié par l’OTAN. Des personnels des pays alliés y sont affectés.

Quelques officiers issus des pays Alliés sont également affectés au sein de l’état-major maritime à Toulon (FRMARFOR) ou aérien à Lyon-Mont-Verdun (Core JFACC).

2. L’influence française

L’accession de la France au protocole de Paris permettrait de valoriser les structures militaires françaises, ainsi que de renforcer leur rayonnement, leur attractivité et, par conséquent, notre influence au sein de l’Alliance.

Plusieurs quartiers généraux ou organismes militaires français pourraient se voir accorder, si nécessaire et si la France le demande, le bénéfice des dispositions du protocole de Paris. Cela entraînerait une simplification et une harmonisation des règles et procédures administratives liées à l’accueil de personnel de l’OTAN, à laquelle nos Alliés se montrent particulièrement sensibles. Le renforcement de l’attractivité de notre territoire qui en résulterait permettrait de valoriser nos structures nationales et, à terme, d’augmenter notre influence au sein du commandement de l’OTAN.

Toute perspective d’une consolidation, voire d’un accroissement de l’influence française au sein de l’Alliance, doit être mise en regard avec l’importance et la qualité des contributions de la France, depuis la fin de la Guerre froide, aux opérations de l’OTAN, contributions qui sont le reflet de l’excellence et de la disponibilité de nos forces.

La France a notamment participé ainsi aux opérations de gestion de crise suivantes :

– dans les Balkans, en Bosnie, de 1993 à 2004, dans le cadre de l’IFOR puis de la SFOR, puis lors de la campagne aérienne de l’OTAN en 1999 visant à mettre fin aux exactions contre les populations civiles au Kosovo. Au Kosovo, la France a, en outre, contribué à la KFOR, la force de l’OTAN, assurant son commandement à trois reprises. Début 2014, il a été décidé du retrait de la composante française ;

– en Afghanistan, dès 2001, où elle a apporté une contribution significative à la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS), placée depuis 2003 sous le commandement de l’OTAN. Elle a retiré en 2012 ses forces combattantes, et ne participe pas, en effectifs, à la mission de conseil, d’assistance et de formation Resolute Support qui a succédé au début de 2015 à la FIAS. La France contribue toutefois, comme pour toutes les opérations de l’OTAN, au financement de la mission ;

– en Libye, dans le cadre de l’opération Protecteur Unifié, en 2011, où elle a été l’un des Alliés les plus engagés pour protéger les populations civiles libyennes.

Cette perspective d’une influence accrue doit aussi être mesurée au regard de la participation française au budget de l’OTAN, par le biais de contributions directes, qui couvrent les dépenses communes lorsqu’elles servent les intérêts des vingt-huit membres et n’incombent à aucun d’entre eux en particulier. Ces dépenses sont supportées collectivement suivant le principe du financement commun. La France y contribue à hauteur de 10,63 %. Elle est le troisième contributeur aux budgets militaires, après les États-Unis (22,14 %) et l’Allemagne (14,65 %), mais devant le Royaume-Uni (9,84 %) et l’Italie (8,41 %).

Ce mode de financement recouvre les deux sources de financement des quartiers généraux : le budget militaire (coûts d’exploitation et de maintenance des quartiers généraux) et le programme OTAN d’investissement au service de la sécurité (dépenses d’infrastructure des quartiers généraux).

3. L’absence d’incidence et ainsi d’inflexion sur notre positionnement vis-à-vis de l’OTAN

Comme l’a précisé le secrétaire d’État aux affaires étrangères, M. André Vallini, lors de l’examen du projet de loi en séance publique le 15 mars, au Sénat, il faut se garder de donner à l’accession au protocole de Paris une portée qu’elle n’a pas.

Celle-ci n’affecte en rien notre position vis-à-vis de l’OTAN.

Ainsi, le protocole de Paris ne remet en cause aucune des conditions, déjà évoquées, mises à la réintégration en 2009.

Il n’implique aucun infléchissement de notre position au sein de l’OTAN où la France continuera de faire entendre la voix d’un allié « loyal, solidaire, mais indépendant ».

Il n’amoindrit en aucun cas ses ambitions pour l’Europe de la défense, celle de la structuration toujours plus forte et substantielle de la dimension européenne de l’Alliance.

Il ne porte pas non plus atteinte à l’autonomie et à l’indépendance de la politique de défense de la France, et ne porte non plus aucune atteinte à sa souveraineté.

4. Une négociation sans difficulté

Les négociations en vue d’une nouvelle accession de la France au protocole de Paris ont débuté en septembre 2014, en marge du Sommet de l’OTAN du Pays de Galles.

Dans la mesure où la France était Partie au protocole jusqu’en 1967, et avait réintégré la structure de commandement de l’Otan en 2009, elles se sont déroulées sans difficulté.

La décision française a été présentée au Secrétaire général de l’OTAN, M. Jens Stoltenberg, par courrier du 21 janvier 2015, ainsi qu’au Conseil de l’Atlantique Nord, conformément à la procédure prévue par l’article XVIII de la convention de Londres SOFA OTAN auquel renvoie l’article 16 du protocole de Paris.

Elle a été aussitôt saluée et a recueilli le soutien unanime des vingt-sept autres membres de l’Alliance, ainsi que le Secrétaire général de l’OTAN en a pris acte par courrier en date du 28 janvier 2015.

II. UN ACCORD TECHNIQUE CLASSIQUE, QUI NE SOULÈVE AUCUNE DIFFICULTÉ

A. LE CHAMP D’APPLICATION : LES QUARTIERS GÉNÉRAUX MILITAIRES INTERALLIÉS, LEURS PERSONNELS ET LEURS PERSONNES À CHARGE

1. Les structures civiles et militaires de l’OTAN et leurs statuts

a. Les structures de l’OTAN

Les structures de l’OTAN sont pour certaines civiles, pour d’autres militaires.

Si l’on excepte les Sommets réunissant les chefs d’État et de Gouvernement et les réunions au niveau ministériel, le Conseil de l’Atlantique Nord est la principale instance de décision politique de l’OTAN. Il est composé des représentants permanents de chaque pays membre, qui ont rang d’ambassadeur et se réunissent pour examiner des questions d’ordre politique ou opérationnel nécessitant des décisions collectives. Il est aussi le cadre permettant de procéder à de larges consultations sur tous les sujets touchant à la paix et à la sécurité des pays membres.

Le groupe des plans nucléaires, dont la France ne fait pas partie, a pour tâche d’examiner la politique nucléaire de l’Alliance à la lumière de l’évolution de l’environnement de sécurité. Il réunit les ministres de la défense de tous les États membres, à l’exception de la France.

Le comité des plans de défense est la plus haute instance décisionnelle sur les questions relatives à la structure militaire intégrée de l’Alliance.

Les éléments constitutifs de l’organisation militaire de l’OTAN sont :

– le comité militaire, qui rassemble les chefs d’état-major de la défense des États membres de l’OTAN, et qui donne aux commandants stratégiques des orientations concernant les affaires militaires ;

– l’État-major militaire international, qui est l’organe exécutif du comité militaire ;

– le commandement militaire, selon la structure qui suit.

Au niveau stratégique, il y a deux commandements :

– le commandement allié Opérations (ACO), dont le quartier général (SHAPE) est comme on l’a vu, à Mons. Il est dirigé par le commandant suprême des forces alliées en Europe (SACEUR). Le SACEUR est traditionnellement un américain, car il est en même temps le commandant en chef des forces des États-Unis en Europe. C’est actuellement le général Philip M. Breedlove ;

– le commandement allié Transformation (ACT), situé à Norfolk, en Virginie, dirigé par le commandant suprême allié Transformation (SACT), qui est actuellement le général français Denis Mercier.

ACO est responsable de toutes les opérations de l’Alliance, depuis le détroit de Gibraltar jusqu’en Afghanistan. ACT mène de nombreuses initiatives visant à la transformation de la structure, des forces, des capacités et de la doctrine militaires de l’OTAN. Ses responsabilités principales englobent la formation, l’entraînement et les exercices, ainsi que la conduite d’expériences destinées à évaluer de nouveaux concepts, de même que la promotion de l’interopérabilité à l’échelle de l’Alliance.

Ensuite, au deuxième niveau, ou niveau opérationnel, on trouve des commandements de forces interarmées (Joint Force Commands – JFC) permanents – à Brunssum (Pays-Bas), et à Naples (Italie) – tous deux capables de conduire des opérations à partir de leurs emplacements fixes ou de mettre en place un QG de groupes de forces interarmées multinationales (GFIM) basé à terre. Le commandement de forces interarmées de Brunssum a ainsi servi de quartier général, sauf pour la composante Mer, à la FIAS en Afghanistan, et le commandement de forces interarmées de Naples sert de quartier général pour les opérations de l’OTAN dans les Balkans.

Le troisième niveau, niveau des composantes ou niveau tactique, comprend trois commandements de composante de forces interarmées (Single Service Commands – SCCs), qui fournissent aux éléments de niveau opérationnel, des quartiers généraux propres aux différentes armées : Terre, Mer ou Air. Bien que ces commandements de composante soient habituellement subordonnés à l’un des commandants de forces interarmées, ils peuvent être affectés aux opérations placées sous un autre commandement lorsque la situation l’exige. Le quartier général Air (HQ AIRCOM) est situé à Ramstein, en Allemagne. Le quartier général Mer (HQ MARCOM) est situé à Northwood, au Royaume-Uni, et le quartier général terre (HQ LANDCOM) est établi à Izmir, en Turquie.

b. La convention de Londres de 1951 SOFA OTAN sur le stationnement des forces armées

C’est la convention entre les États Parties au Traité de l’Atlantique Nord sur le statut de leurs forces (SOFA OTAN), signée à Londres le 19 juin 1951, qui détermine le statut des forces armées des Parties lorsque celles-ci se trouvent en service sur le territoire métropolitain d’une autre Partie. La convention de Londres SOFA OTAN fixe notamment les modalités d’entrée et de sortie du territoire (article III), de l’utilisation du permis de conduire (article IV) et du port de l’uniforme et des armes (articles V et VI). Elle prévoit également les conditions d’exercice de la compétence juridictionnelle des États (article VII), les modalités de règlement des dommages (article VIII), ainsi que les dispositions applicables en matières douanières et fiscales (articles X à XIII).

Le protocole de Paris est complémentaire à la convention SOFA-OTAN, car il fixe les règles relatives aux quartiers généraux militaires internationaux.

c. La convention d’Ottawa de 1951 sur le statut de l’OTAN

Le Protocole de Paris est également complémentaire à la convention d’Ottawa du 20 septembre 1951 sur le statut de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, des représentants nationaux et du personnel international, à laquelle la France est également partie. Celle-ci ne s’applique pas aux quartiers généraux. Cette convention définit le statut, les privilèges et immunités de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord – en tant qu’organisation internationale –, de son personnel international et des représentants des États membres assistant aux réunions de l’OTAN, pour exercer leurs fonctions et remplir leur mission.

2. Le protocole de Paris : un texte spécifique aux quartiers généraux militaires internationaux 

a. Une mise en œuvre, avec des adaptations, de la convention SOFA OTAN

L’article 1er du Protocole de Paris étant réservé aux définitions, c’est son l’article 2 qui fixe son objet : il s’agit d’appliquer aux quartiers généraux militaires interalliés la convention de Londres de 1951, « sous réserve des dispositions ci-après du présent protocole », c’est-à-dire avec toutes les précisions, clarifications et adaptations nécessaires.

Les autres articles du protocole font d’ailleurs largement référence à cette convention.

b. Son champ d’application : les quartiers généraux militaires internationaux, ainsi que leurs personnels civils et militaires

Les termes « quartier général militaire international » renvoient à la définition du Protocole de Paris, au c de l’article 1er.

Sa rédaction est la suivante : « Par « Quartier général interallié » , on entend tout quartier général suprême et tout quartier général militaire international créé en vertu du Traité de l’Atlantique Nord et directement subordonné à un quartier général suprême ».

Sont ainsi précisément concernés les états-majors militaires de l’OTAN (« quartiers généraux militaires internationaux »). Il s’agit, comme on l’a vu, soit de SHAPE (ACO) et d’ACT, soit des états-majors immédiatement subordonnés au niveau opérationnel ou au niveau tactique (JFCs, SSCs)

En outre, le paragraphe 1 de l’article 14 prévoit que le Conseil de l’Atlantique Nord peut décider d’appliquer tout ou partie du Protocole à tout « quartier général militaire international » ou à toute « organisation militaire internationale » institués par le Traité de l’Atlantique Nord, mais qui ne répondraient pas aux définitions de l’article 1er.

Si le terme « quartier général militaire international » renvoie à la définition de l’article 1er du Protocole de Paris, l’expression « organisation militaire internationale » est plus large et a vocation à englober toutes les structures militaires dotées d’un effectif multinational.

Actuellement, la France n’a sur son territoire aucun quartier général interallié ni aucune structure assimilée.

Cela pourrait changer à l’avenir, car elle dispose de commandement et de structures certifiées par l’OTAN et ouvertes à la multi-nationalité, comme on le verra au D ci-après.

B. DES DISPOSITIONS ADMINISTRATIVES, FISCALES ET TECHNIQUES

Le Protocole de Paris comprend 16 articles, dont la plupart s’appuient sur la convention de Londres de 1951 SOFA OTAN. Il s’agit de clauses classiques.

1. Le statut des quartiers généraux

Le protocole de Paris fixe pour les quartiers généraux des règles similaires à celles applicables aux organisations internationales dans les accords de siège.

L’article 4 fixe ainsi les droits et obligations des quartiers généraux vis-à-vis de leurs personnels civils et militaires Il s’agit des privilèges et priorités de juridiction. Son dispositif précise ainsi les modalités du transfert des droits et obligation que la convention de Londres SOFA OTAN confère et impose à un État d’origine ou à ses autorités au sujet de ses forces, de ses éléments civils ou de leurs personnes à charge, au quartier général suprême et à ses autorités subordonnées.

La capacité juridique des quartiers généraux est précisée :

– l’article 10 la confère à chaque quartier général et lui permet par conséquent de contracter, d’acquérir et d’aliéner. L’exercice de cette capacité peut cependant être soumis à des accords particuliers ;

– l’article 11 permet à un quartier général d’ester en justice et lui reconnait une large immunité en matière de mesures d’exécution, sauf pour la recherche de preuves d’infraction et pour les infractions douanières et fiscales.

Les exonérations fiscales et douanières, prévues à l’article 8, sont similaires à celles des autres organisations internationales. Les quartiers généraux sont exonérés, dans la mesure du possible, des droits et taxes afférents aux dépenses supportées par eux dans l’intérêt de la défense commune et pour leur avantage officiel et exclusif. Les États Parties sont invités à négocier avec les quartiers généraux établis sur leur territoire des accords complémentaires détaillant la mise en œuvre de ce principe. Les exonérations douanières prévues à l’article XI du SOFA OTAN sont applicables aux quartiers généraux interalliés.

L’article 9 porte sur la liquidation des avoirs acquis et la restitution du foncier et des infrastructures, lorsqu’ils ont cessé d’être nécessaires à un quartier général interallié. Le produit de la liquidation est réparti entre les Parties au Traité de l’Atlantique Nord au prorata de leurs contributions aux dépenses en capital de ce quartier général. Les terrains, bâtiments ou installations mis à disposition par l’État de séjour sont alors rendus à celui-ci et toute plus ou moins-value des biens immobiliers répartie selon les mêmes modalités.

L’article 13 pose le principe de l’inviolabilité des archives et autres documents officiels, conservés dans les locaux d’un quartier général ou détenus par une personne dûment autorisée.

L’article 5 prévoit la délivrance de cartes d’identités personnelles par le quartier général, lesquelles doivent être produites à toute réquisition.

L’article 6 précise les conditions d’application, dans le contexte des quartiers généraux interalliés, de l’article VIII de la convention de Londres SOFA OTAN relatif au règlement des dommages occasionnés ou subis sur le territoire de l’État de séjour.

L’article 12 autorise un quartier général interallié à détenir des devises et à avoir des comptes dans n’importe quelle monnaie. Justifiée à l’époque du contrôle des changes en Europe, cette disposition est maintenant très datée, même si son maintien ne crée aucune difficulté.

2. La couverture juridique des personnes civils et militaires, et de leurs ayant droits

L’article 4 du protocole prévoit que les personnels affectés aux quartiers généraux bénéficient des privilèges, et priorités de juridiction, mentionnés à l’article VII de la convention de Londres SOFA OTAN, mais que les pouvoirs de juridiction normalement dévolus à l’État d’origine en matière pénale et disciplinaires, les concernant, sont transférés aux autorités de l’État dont la loi militaire s’applique à l’intéressé.

Les obligations imposées par la convention de Londres SOFA OTAN en matière d’arrestation, d’enquêtes, de recherche de preuves, de règlement des indemnités, de droits, taxes et amendes incombent à la fois au quartier général interallié et à l’État d’origine.

S’agissant du traitement des demandes d’indemnité, prévu au d de l’article 4, pour des actes dommageables commis en dehors de l’exécution du service ou pour l’usage non autorisé de tout véhicule des forces armées, les obligations en principe imposées à l’État d’origine incombent en l’espèce à l’État qui dispose des forces armées auxquelles l’intéressé appartient ou à défaut d’un tel État, au quartier général interallié dont il relève.

L’article 7 fixe les conditions dans lesquelles les exonérations fiscales prévues à l’article X de la convention de Londres SOFA OTAN sont applicables aux membres des forces et de l’élément civil affectés à un QG, et à leurs personnes à charge. L’exonération dans l’État de séjour permet l’imposition dans l’État de la nationalité.

L’article 8 précise les exonérations douanières. Le personnel affecté à un quartier général peut également importer en franchise temporaire de droits dans l’État de séjour ses effets, un véhicule et son mobilier personnels. Ces franchises ne s’appliquent en principe pas aux ressortissants de l’État de séjour.

Actuellement, selon les chiffres communiqués par le ministère de la défense au rapporteur du Sénat, M. Jacques Gautier, 1 485 militaires issus de pays de l’OTAN sont affectés en France, dont :

– 210 militaires affectés dans les états-majors, les forces ou en coopération de formation ;

– 30 militaires élèves ou auditeurs dans les écoles ;

– 49 militaires affectés dans les missions de défense (statut diplomatique) ;

– 546 affectés au sein du corps européen (statut « traité de Strasbourg » pour le personnel de l’Union européenne) ;

– 500 au sein du bataillon allemand basé à Illkirch (qui n’est pas une structure OTAN) ;

– 150 à l’École de formation de Le Luc en Provence (qui n’est pas une structure OTAN).

Parmi eux, 240 militaires seraient susceptibles de bénéficier du protocole de Paris.

3. Le règlement des différends et les dispositions finales

L’article 15 du protocole prévoit que les contestations relatives à l’interprétation ou à l’application du protocole sont réglées par la négociation directe entre les Parties, sans recours à une juridiction extérieure. Les questions qui ne peuvent être réglées de cette manière sont portées devant le Conseil de l’Atlantique Nord, sauf disposition contraire.

Pour ce qui concerne les dispositions finales, l’article 16 du protocole prévoit que les articles XV et XVII à XX de la convention de Londres SOFA OTAN soient applicables au présent protocole comme s’ils en étaient partie intégrante. Il précise aussi que le Protocole pourra être complété par des accords bilatéraux entre l’État de séjour et un quartier général suprême.

L’article XV de la convention de Londres SOFA OTAN est relatif à son maintien en vigueur en cas d’hostilités entraînant l’application des dispositions du Traité de l’Atlantique Nord.

L’article XVII prévoit la possibilité de réviser tout article, à tout moment, en adressant une demande au Conseil de l’Atlantique Nord.

L’article XVIII concerne les modalités de ratification et d’entrée en vigueur tandis que l’article XIX traite de sa dénonciation, et fixe un délai de préavis d’un an.

Enfin, l’article XX pose le principe d’une application territoriale limitée au territoire métropolitain des États parties contractante et encadre la possibilité d’une extension à un territoire dont l’État en question assure les relations internationales dans la région de l’Atlantique Nord.

C. UNE RATIFICATION NÉCESSAIREMENT PAR VOIE LÉGISLATIVE

Au regard de l’article 53 de la Constitution, qui prévoit que « les traités ou accords (…) qui modifient des dispositions de nature législative (…) ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu’en vertu d’une loi », l’accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créé en vertu du traité de l’Atlantique Nord est nécessaire.

Celui-ci porte, en effet, sur la matière législative.

Il étend, comme on l’a vu, avec des adaptations et précisions, l’application de la convention de Londres SOFA OTAN, et notamment ses privilèges fiscaux ou ses privilèges et priorités de juridiction, aux quartiers généraux interalliés, ainsi qu’à leurs personnels civils et militaires.

Tous les États membres de l’OTAN, à l’exception du Canada, ont signé et ratifié le Protocole de Paris. Le Canada a signé le Protocole de Paris le 28 août 1952, mais ne l’a pas ratifié. Sa situation géographique est très spécifique au sein de l’Alliance.

Pour la France, une ratification avant le prochain Sommet de l’OTAN, qui aura lieu à Varsovie les 8 et 9 juillet prochains, est opportune.

En août 1954, la ratification avait également été législative, l’Assemblée nationale suivant ainsi à une très large majorité, de 516 contre 100, l’avis favorable du rapporteur, le général Pierre Billotte.

D. UNE APPLICATION ÉVENTUELLE À CERTAINS QUARTIERS GÉNÉRAUX ET CERTAINES STRUCTURES EN FRANCE, MAIS APRÈS UNE DÉCISION EXPLICITE AU CAS PAR CAS

L’accession au protocole de Paris n’entraînera pas de façon automatique et directe l’application de ce texte aux quartiers généraux français certifiés par l’OTAN.

Il faut, en effet, une décision spécifique conformément à l’article 14 qui prévoit, comme on l’a vu, que le Conseil de l’Atlantique Nord peut décider d’appliquer tout ou partie du protocole à tout « quartier général militaire international » ou à toute « organisation militaire internationale » institués par le Traité de l’Atlantique Nord, mais qui ne répondraient pas aux définitions de l’article 1.

L’expression « organisation militaire internationale » est assez large et a vocation à englober toutes les structures militaires dotées d’un effectif multinational.

Ainsi, les structures multinationales situées en France pourraient faire à l’avenir, si nécessaire, l’objet d’une décision dite « d’activation » par le Conseil de l’Atlantique Nord. Il appartiendra alors à la France de formuler, le moment venu de telles demandes, étant rappelé que la décision au sein du Conseil de l’Atlantique Nord de l’OTAN intervient par consensus. L’accession au protocole de Paris n’implique donc pas que ce dernier s’applique de façon automatique aux structures situées en France, mais ouvre une faculté qui peut ne pas manquer d’intérêt.

En l’état, la liste des quartiers généraux et structures susceptibles de faire l’objet d’une éventuelle demande d’activation est la suivante.

Certifié par l’OTAN, le quartier général du Corps de réaction rapide-France (CRR-Fr) peut, sur décision du Conseil de l’Atlantique Nord et conformément aux procédures en vigueur à l’OTAN, être déployé pour un exercice ou pour une mission opérationnelle décidée par l’OTAN. Il peut également l’être pour des exercices et opérations dirigées par l’Union européenne, sur décision du Conseil de l’Union européenne, ou être engagé dans une opération décidée par la nation cadre (la France) de son propre chef. Le QG CRR-Fr ne doit pas cesser d’être à disposition de l’OTAN, ou employé autrement, sans que le SACEUR n’en soit averti au préalable. Le tableau d’effectif 2016 du CRR-Fr comporte 447 postes, dont 359 France et 88 ouverts à la multinationalité. Outre la France qui est nation cadre, 12 autres nations contribuent au CRR-Fr : Belgique (16), Allemagne (13), Etats-Unis (11), Royaume-Uni (10), Pays-Bas (6), Italie (5), Espagne (3), Hongrie (3), Grèce (2), Roumanie (2), Turquie (2), Albanie (1). Des discussions sont en cours avec plusieurs autres nations qui pourraient rejoindre le CRR-FR à moyen terme, dont notamment le Canada et la Pologne.

Le quartier général du Corps de réaction rapide européen (CRR-E), situé à Strasbourg, est également certifié par l’OTAN. L'emploi du Corps européen en opération relève d’une décision des cinq nations cadres. Un comité commun, composé des chefs d’état-major de la défense et des directeurs politiques du ministère des affaires étrangères de chacune de ces nations, se réunit annuellement pour prendre toutes les décisions majeures concernant l’Eurocorps. Le corps européen n’est subordonné à aucune organisation militaire. C’est le comité qui évalue les demandes d’aide d’organisations multinationales comme l’Union européenne, dans le cadre de politique de sécurité et de défense commune, et l’OTAN. Le corps européen peut également être déployé au profit des nations cadres. Au 21 janvier 2016, les effectifs du corps européen étaient les suivants : France : 230 ; Allemagne : 188 ; Espagne : 131 ; Belgique : 107 ; Luxembourg : 2 ; Grèce : 2 Italie : 2 Pologne : 111 ; Turquie : 3.

Le quartier général de la force aéromaritime française de réaction rapide (FRMARFOR) est un état-major opérationnel. Son contrat opérationnel lui prescrit de pouvoir générer en tout temps un des états-majors tactiques capables de planifier et de conduire des opérations maritimes dans un cadre national, européen ou OTAN.

Il faut aussi mentionner le centre d’excellence, qu’est le centre d'analyse et de simulation pour la préparation aux opérations aériennes (CASPOA), qui a pour mission la formation et l’entrainement aux structures, outils et procédures de commandement et de contrôle C2, dans le domaine des opérations aériennes. Ses formations s’adressent au personnel des armées françaises (provenant en grande majorité de l’armée de l’air), au personnel OTAN, et à la plupart des pays avec lesquels la France entretient un partenariat stratégique. Le centre forme environ un millier de stagiaires par an. Cette unité est composée aujourd’hui de 37 personnes, dont trois officiers étrangers (un Allemand, un Italien et un Américain). En 2007, le CASPOA a obtenu le label de Centre d’Excellence de l’OTAN dans le domaine du C2 Air. C’est aujourd’hui le seul centre d’excellence OTAN en France. À ce titre, le CASPOA participe aux travaux doctrinaux et de transformation de l’Alliance dans son domaine d’expertise. Le CASPOA est localisé à Lyon-Mont-Verdun avec le JFACC, état-major opératif aérien pour la planification et la conduite des opérations aériennes. Cet état-major, certifié par l’OTAN, accueille aujourd’hui 3 officiers étrangers (un Belge, un Britannique et un Canadien).

Compte tenu de ces différents éléments, votre rapporteur ne peut que se prononcer en faveur d’une nouvelle accession de la France au protocole de Paris et recommander ainsi l’adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission examine le présent projet de loi au cours de sa séance du mardi 29 mars 2016, à 17h00.

Après l’exposé du rapporteur et suivant son avis, la commission adopte le projet de loi (n° 3578) sans modification.

ANNEXE N° 1 :

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Néant

ANNEXE

TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée l’accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord, signé à Paris le 28 août 1952, et dont le texte est annexé à la présente loi.

NB : Le texte du protocole figure en annexe au projet de loi (n° 3578)

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