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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 septembre 2016.
AVIS
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LE PROJET DE LOI de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer
et portant autres dispositions en matière sociale et économique (n° 4000)
PAR M. Serge LETCHIMY
Député
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Voir les numéros : 4000, 4064, 4054.
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Pages
INTRODUCTION 5
A. MALGRÉ UN PROCESSUS HISTORIQUE DE RATTRAPAGE, LES INÉGALITÉS PERSISTENT DANS LES TERRITOIRES D’OUTRE-MER 7
1. Le long chemin de l’égalité formelle en outre-mer 7
2. Des inégalités socio-économiques toujours persistantes en outre-mer 8
B. DU RAPPORT LUREL AU PROJET DE LOI : UNE NOUVELLE ÉTAPE VERS L’ÉGALITÉ RÉELLE 8
II. LA NÉCESSITÉ D’UN DÉVELOPPEMENT ENDOGÈNE, TERRITORIALISÉ ET DIFFÉRENCIÉ 11
A. FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE INTERNE 11
1. Encourager l’épanouissement économique des outre-mer au travers du renforcement de la compétitivité du tissu productif local 11
2. Promouvoir l’attractivité des outre-mer au sein de leur environnement respectif 12
III. LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION 17
A. SÉCURISER LE DISPOSITIF FISCAL 17
1. L’exonération de cotisations sociales pour les non-salariés 17
2. L’extension du FIP-DOM à l’ensemble des foyers fiscaux français 17
3. Le soutien aux groupements d’employeur 18
4. La sécurisation des investissements de renouvellement 18
B. SOUTENIR LA CONSTRUCTION DE LOGEMENTS 18
1. L’extension de la LODEOM majorée au secteur du BTP 18
2. Le soutien au logement intermédiaire 19
3. La suppression de l’agrément fiscal préalable pour les programmes d’accession sociale 19
4. L’aide à la réhabilitation du parc locatif social 19
TRAVAUX DE LA COMMISSION 23
I. DISCUSSION GÉNÉRALE 23
II. EXAMEN DES ARTICLES 33
TITRE IV – DISPOSITIONS ÉCONOMIQUES EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ RÉELLE 33
Article 11 (article L. 1803-2 et L. 1803-5 du code des transports) : Dispositif « Cadres avenir Mayotte » 33
Article 12 (articles L. 1803-2 et L. 1803-5 du code des transports) : Passeport pour la mobilité en stages professionnels 34
Article 13 (article L. 335-5 du code de l’éducation) : Procédure adaptée de validation des acquis de l’expérience 36
Article 14 (article L. 410-5 du code de commerce) : Extension du dispositif « Bouclier qualité-prix » aux transporteurs maritimes et transitaires 37
Article 15 (article L. 752-6-1 du code de commerce) : Caractère suspensif de la saisine de l’Autorité de la concurrence 38
Après l’article 15 40
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 49
Ce projet de loi s’insère dans une politique globale du Gouvernement en direction des territoires d’outre-mer, quels que soient leur forme institutionnelle et leur statut juridique, en faveur de la poursuite d’un objectif d’égalité réelle.
Il convient de garder à l’esprit que l’égalité réelle ne se décrète pas, elle se conquiert. Ainsi, notre ambition est d’apporter, dans une perspective de long terme, des réponses à certaines difficultés structurelles auxquelles se trouvent confrontées les collectivités territoriales d’outre-mer. En ce sens, cet objectif d’égalité réelle est un fil conducteur qui entend contribuer, d’une part à la réduction des écarts de développement existant entre l’hexagone (1) et les collectivités territoriales d’outre-mer et, d’autre part, à la réduction des écarts persistant au sein des collectivités elles-mêmes.
Ce concept d’égalité réelle est transversal et concerne à la fois le champ social, économique, culturel et même environnemental. De même, il ne consiste pas en une égalité formelle qui révèle un traitement indifférencié de tous les citoyens français. En quelque sorte, l’égalité réelle englobe l’égalité formelle tout en la dépassant, ce qui nous renvoie au mot de Condorcet : « Il ne peut y avoir ni vraie liberté, ni justice dans une société, si l’égalité n’y est pas réelle ».
L’égalité n’est pas ce qui gomme les différences et les « retards » à partir d’un paradigme de référence. Elle est ce qui, dans la diversité, émerge d’une égale dignité, de la même capacité d’agir, d’imaginer, d’intervenir sur son destin, d’actionner ses interdépendances. Elle se nourrit de capacités, d’initiatives et de responsabilité. En clair, l’égalité surgit de l’émancipation vraie.
À ce titre, le présent projet de loi ne constitue que la première pierre d’un édifice stratégique plus global qui reste à construire. Il s’agit d’une chance à saisir et c’est ce qu’a tenté de faire votre rapporteur en proposant à la commission des affaires économiques, saisie pour avis, plusieurs amendements visant à promouvoir un développement endogène de nos territoires sous plusieurs angles : sécuriser le cadre fiscal et réglementaire imposé aux entreprises locales, soutenir la construction de logements dans le contexte d’une crise de l’habitat, consacrer et encadrer la pluriactivité qui est la règle dans ces territoires et faire venir des jeunes talents en renforçant la formation professionnelle et le tutorat.
I. LA MARCHE VERS L’ÉGALITÉ EN OUTRE-MER NE DOIT PAS MASQUER LA PERSISTANCE D’INÉGALITÉS SOCIALES
Territoires à l’origine profondément inégalitaires, les sociétés outre-mer sont le produit d’une longue marche historique vers l’égalité depuis la Révolution française jusqu’à la Libération. Alors qu’ils ont pendant longtemps été relégués au second plan, nos territoires ont reçu la reconnaissance au plus haut sommet de notre ordre juridique.
Dans les années récentes, les outre-mer ont pu adapter leur organisation institutionnelle dans le respect de leur identité – on pense à la dernière réforme en date avec la départementalisation de Mayotte en 2011 –, tout en bénéficiant des fruits de l’État-providence dans une logique de rattrapage vis-à-vis de l’hexagone.
Néanmoins, ce modèle de rattrapage s’essouffle à en juger par l’état actuel plus qu’inquiétant du développement économique. De nombreux indicateurs, qu’ils soient macroéconomiques (chômage, pauvreté, inégalités) ou liés au développement humain (éducation, infrastructures), sont dans le rouge.
A. MALGRÉ UN PROCESSUS HISTORIQUE DE RATTRAPAGE, LES INÉGALITÉS PERSISTENT DANS LES TERRITOIRES D’OUTRE-MER
L’histoire des pays d’outre-mer est un long combat pour l’affirmation, puis la traduction concrète des idéaux républicains de liberté, d’égalité et de fraternité.
Par la loi de départementalisation du 19 mars 1946, une étape décisive a été franchie en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane et à La Réunion. Il s’agissait de mettre un terme à la gestion coloniale de ces pays et de répondre aux revendications pour l’égalité des droits, en particulier en matière sociale (extension du système de protection sociale, création de nouveaux droits sociaux, convergence des salaires minimaux), alors même que la question de l’autonomie de ces territoires, à raison de la spécificité de leur culture et de leur identité, restait ouverte.
Aujourd’hui, les outre-mer occupent une place singulière dans la République. Celle-ci « reconnait au sein du peuple français, les populations d’outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité » (article 72-3 de la Constitution). Ce principe d’égalité est donc inscrit dans les textes les plus fondamentaux de notre droit.
L’égalité ne doit donc pas s’entendre comme une notion inerte, mais comme un principe d’action au service d’une aspiration puissante de nos concitoyens en faveur d’une égalité réelle, aux regards des écarts structurels existant.
Plus de soixante-dix ans après la loi de 1946, l’égalité avec la métropole demeure, pour nombre des 2,75 millions de Français vivant en outre-mer, une réalité parfois encore bien trop lointaine.
Malgré l’action volontariste de l’État et des différentes collectivités, la situation actuelle fait apparaître des écarts dans plusieurs territoires d’outre-mer avec l’hexagone dans les domaines suivants : accès aux principaux services de la vie courante, accès à l’éducation, accès au travail, paupérisation, précarité des jeunes.
En ce sens, différentes études ont régulièrement fait le constat d’une dégradation préoccupante dans la sphère économique.
Les niveaux de richesse par habitant des outre-mer sont inférieurs au produit intérieur brut (PIB) national par habitant. En 2013, cet écart atteint respectivement 31 % et 38 % pour la Martinique et la Guadeloupe, 73 % pour Mayotte, 36 % pour La Réunion et 49 % pour la Guyane. Ces écarts sont encore plus importants au sein de collectivités régies par l’article 74 de la Constitution où la Polynésie française et Wallis-et-Futuna présentent un PIB par habitant inférieur, respectivement, de 49 % et de 64 % à la moyenne nationale.
Le taux de pauvreté est en moyenne deux fois plus important que dans l’hexagone où il s’établit à 14 %. De même, le taux de chômage est de 19,4 % en Martinique, de 21 % en Guadeloupe et même de presque 24 % à La Réunion alors qu’il avoisine 10 % dans l’hexagone. Il convient de souligner que les jeunes ultramarins sont particulièrement touchés par ce fléau.
Enfin, le PIB par tête y est de 30 à 40 % inférieur au PIB par tête national. Si l’on se réfère à l’indice de développement humain (IDH), celui-ci est de 100 à 120 points inférieur à ce qu’il est dans l’hexagone.
Le constat du maintien de ces écarts a amené le Président de la République à engager une réflexion sur ce sujet, afin de définir des mesures adaptées pour y remédier. À la demande du chef de l’État, le Premier ministre a ainsi chargé M. Victorin Lurel, député et ancien ministre des outre-mer, d’élaborer un rapport destiné à clarifier la notion d’égalité réelle entre les outre-mer et l’hexagone, à analyser les causes des écarts constatés et à émettre des propositions permettant de progresser vers l’égalité réelle.
Selon l’auteur du rapport, l’égalité réelle est « la conjonction de l’égalité civique, politique, sociale et économique convergeant vers les niveaux de vie nationaux ».
Par ailleurs, ce rapport, remis en mars 2016, formule 35 recommandations déclinées en 75 propositions pour favoriser la convergence des niveaux de développement entre les outre-mer et la France métropolitaine. Parmi celles-ci, on retrouve l’idée d’un nouveau modèle de développement à échéance de 25 ans maximum, spécifique à chaque territoire.
Dans la continuité de ce rapport, le Gouvernement a décidé de légiférer pour définir une méthode et des outils afin de structurer une politique en faveur de cette convergence. L’objectif ainsi poursuivi est, dans le respect du statut de chaque collectivité ultramarine, de réduire les écarts de développement à l’horizon de 10 à 20 ans.
Le présent projet de loi présente un caractère mixte. Il est pour partie, dans ses premiers articles, un texte de « programmation déterminant les objectifs de l’action de l’État ». Il est, d’autre part, pour les autres mesures du projet, un texte comportant des dispositions proprement normatives lesquelles relèvent du régime juridique des lois ordinaires.
Il comporte quatre titres.
Le titre Ier, intitulé « Stratégie en faveur de l’égalité réelle pour les outre-mer », regroupe les articles 1er à 3 du projet, correspondant aux mesures de « programmation » dépourvues de portée normative.
Il fait de l’ambition de réduction des écarts de développement entre les territoires ultramarins, toutes catégories juridiques confondues, et l’hexagone, d’une part, et de la réduction de ceux « constatés » qui persistent au sein de chaque territoire, d’autre part, « une priorité de la Nation ».
Il mentionne les instruments juridiques qui pourront être utilisés pour parvenir à la réduction des écarts de développement, en rappelant la possibilité de faire usage des adaptations, des expérimentations et des habilitations prévues par notre Constitution.
Le titre II, intitulé « Dispositions en faveur de la convergence », comprend des dispositions normatives (articles 4 à 8) relatives à l’établissement de « plans de convergence ». Il s’agit d’un nouvel instrument de planification stratégique à disposition des acteurs publics visant à concrétiser l’égalité réelle entre les populations d’outre-mer et la France hexagonale.
Le titre III est intitulé « Dispositions sociale en faveur de l’égalité réelle ». Il comprend deux articles, les articles 9 et 10, qui étendent et aménagent certaines dispositions régissant les prestations familiales et l’assurance vieillesse à Mayotte.
Enfin, le titre IV, intitulé « Dispositions économiques en faveur de l’égalité réelle », comporte cinq articles (11 à 15) énonçant diverses mesures pour les jeunes, le dispositif « cadres avenir Mayotte », le « passeport pour la mobilité des stages professionnels ». En matière de droit de la concurrence, il est prévu de conférer un caractère suspensif pendant trois mois à la saisine de l’Autorité de la concurrence ainsi que l’extension du bouclier qualité-prix aux entreprises maritimes. Enfin, il consacre une procédure adaptée de validation des acquis de l’expérience (VAE).
À l’évidence, le paradigme de l’assimilation-rattrapage qui a régi les outre-mer depuis l’après-guerre a atteint ses limites. Nous devons agir en faveur d’une meilleure domiciliation de la responsabilité dans nos territoires. Les habilitations ordinaires prévues par l’article 73 de la Constitution sont de plus en plus actionnées. L’adaptation aux géographies est en cours. Le tarissement des transferts publics impose désormais l’esprit de projet et d’innovation.
Cet esprit d’innovation doit être mis au service d’un nouveau modèle de développement économique endogène et territorialisé. Endogène, d’une part, car il doit prendre naissance au sein même de nos pays d’outre-mer et, par conséquent, écarter la transposition, tel quel, d’un modèle importé depuis l’hexagone ou l’Union européenne. Territorialisé, d’autre part, car la diversité des collectivités ultramarines nous amène à considérer qu’il existe une multitude de trajectoires possibles, qui prennent appui sur les spécificités de chacun des territoires.
Cette nouvelle approche du développement doit pouvoir s’appuyer sur trois axes au moins : le renforcement du potentiel de développement de la sphère économique interne, la promotion de l’économie circulaire dans le cadre d’un environnement régional propice à son émergence ainsi que la sécurisation des zones franches.
1. Encourager l’épanouissement économique des outre-mer au travers du renforcement de la compétitivité du tissu productif local
Pour renforcer la compétitivité de notre économie, il nous paraît nécessaire de cibler deux angles en particulier : la pluriactivité et la jeunesse.
Premièrement, votre rapporteur propose de mettre en place un « programme de jeunes professionnels ». Ce dispositif instaure une dérogation temporaire aux règles régissant le recrutement de la fonction publique locale pour permettre aux collectivités locales d’offrir des postes à des jeunes diplômés originaires des outre-mer, qu’ils résident localement, dans l’hexagone ou dans des pays étrangers. Sortant des études supérieures, ils disposent en effet d’une expertise particulièrement valorisable pour nos régions et que nous devons pouvoir mobiliser pour l’avenir. Investir dans ce capital humain permettrait plus largement de faire émerger une génération de jeunes administrateurs, entrepreneurs et managers ultramarins, susceptible de favoriser l’innovation, de penser de nouveaux projets, d’accroitre la taille et la compétitivité des entreprises locales.
En outre, les employeurs doivent participer pleinement à la formation professionnelle, notamment des jeunes actifs. Il serait possible d’étendre des dépenses éligibles au titre de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle en y intégrant le tutorat des étudiants ou apprentis dans le cadre d’une convention signée avec un établissement de formation, ainsi que les éventuels compléments de salaire qui leur sont versés à ce titre.
Par ailleurs, la pluriactivité est particulièrement développée dans les départements d’outre-mer (DOM) et les collectivités d’outre-mer (COM). Elle consiste à exercer simultanément plusieurs activités professionnelles, qui peuvent relever de différents statuts (salarié, agent public, travailleur indépendant). Votre rapporteur considère qu’elle doit être encouragée. Elle répond aux aspirations des actifs, notamment dans les jeunes générations. Elle permet aux personnes concernées d’accroître leurs revenus, de diversifier leurs expériences professionnelles et d’acquérir de nouvelles compétences. Pour permettre un déploiement optimal, une stratégie pourrait être coordonnée entre les différents acteurs publics sur ce sujet, puis cette réflexion pourrait être matérialisée dans le cadre de la convention régionale pluriannuelle de coordination de l’emploi, de l’orientation et de la formation.
Pour renforcer l’attractivité de ces territoires, il est indispensable d’actionner plusieurs leviers : promouvoir un espace économique concurrentiel, favoriser l’investissement et encourager la politique du logement.
Tout d’abord, il convient d’envoyer un signal fort aux investisseurs. D’une part, l’aide fiscale à l’investissement doit pouvoir s’appliquer aussi bien aux investissements initiaux qu’aux investissements de renouvellement. C’est ce que propose votre rapporteur. De même, devant les limites du Fonds d’investissement de proximité outre-mer (FIP-DOM) – seuls 8 millions d’euros ont été collectés depuis 2011 –, il est nécessaire de revoir l’organisation du dispositif. Ainsi, il nous parait important de lever la limitation de la souscription aux seuls domiciliés fiscaux outre-mer et de l’étendre à l’ensemble des foyers fiscaux français.
Par ailleurs, le constat est fait d’une crise en matière d’habitat dans l’outre-mer. En effet, le secteur du logement social est confronté à l’urgence de sa rénovation et à l’adaptation d’une partie de son parc ancien avec des obligations réglementaires et de mise en conformité. À ce titre, rappelons que le parc locatif social dans les outre-mer totalise un patrimoine de 130 000 logements locatifs sociaux dont près de 40 % ont plus de vingt ans. En ce sens, votre rapporteur propose de favoriser la réhabilitation des logements HLM dans les territoires d’outre-mer en supprimant le zonage ANRU des opérations de réhabilitation éligibles au crédit d’impôt, afin de ne pas limiter la réhabilitation aux seules opérations de rénovation urbaine et en revalorisant le montant du crédit d’impôt par une augmentation de l’assiette et du taux. D’autre part, la question de l’accession au logement social revêt une importance toute particulière pour des territoires en proie à de fortes inégalités sociales. Votre rapporteur estime qu’il faut ainsi supprimer l’agrément fiscal préalable pour les programmes d’accession sociale (PSLA).
Enfin, en matière de droit de la concurrence, la pratique a démontré la nécessité de renforcer la prise en compte de l’Autorité de la concurrence lorsqu’elle est saisie par la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC). Cette dernière prend des décisions concernant des projets importants qui peuvent avoir des conséquences durables sur la structuration du paysage commercial et sur la situation concurrentielle d’un territoire. Dans l’esprit du projet de loi qui confère un caractère suspensif à la saisine de l’Autorité de la concurrence, celle-ci pourrait se prononcer plus rapidement dans un délai de 25 jours ouvrés.
Le 4 décembre 2014, la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a confié à votre rapporteur une mission sur le développement de l’économie circulaire dans les outre-mer. L’objectif, affiché notamment lors de la COP 21, est de faire des outre-mer des fers de lance de la transition énergétique.
Ce travail a abouti à deux rapports : le premier consacré à la question des véhicules hors d’usage (VHU) ; le second traitant plus généralement des autres déchets, par exemple des bateaux de plaisance hors d’usage (BPHU), des déchets d’emballage, des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) et des déchets de textile.
Le rapport consacré aux VHU met en avant les défis économiques, environnementaux ou encore sanitaires que posent les vieux véhicules (outre la pollution, les VHU sont des lieux privilégiés de reproduction de moustiques porteurs du Chikungunya et de la dengue), mais aussi le défi en termes de développement économique.
Plus largement, l’absence de débouchés pour ces territoires de petite taille ou à la démographie faible (c’est le cas pour la Guyane) font que les installations lourdes (cimenterie, aciérie) sont rarement rentables, alors que le transfert de déchets vers la Métropole ou les pays européens, situés à plusieurs milles nautiques, sont coûteux et rarement optimaux. Ainsi, à des problèmes économiques viennent s’ajouter des considérations géographiques inadéquates.
En conséquence, les stocks de VHU sont importants dans les territoires d’outre-mer, jusqu’à six fois le flux de VHU annuel. Il faut aussi ajouter une variété d’autres facteurs responsables de cette situation : des réseaux de collecte informelle, d’une part, avec l’habitude de récupérer les parties exploitables du véhicule, mais aussi une culture de l’abandon, d’autre part, aboutissant au dépôt des vieux véhicules dans des dépôts sauvages ou sur des terrains privés.
Il faut aussi souligner le manque d’information de la population et la nécessité de poursuivre les campagnes de communication dans ce sens. Des précédents, notamment lors de l’épidémie de Chikungunya l’an passé, ont démontré de la réactivité de la population à se débarrasser de VHU pour des raisons sanitaires.
Finalement, dans le cadre des DOM, l’éloignement des territoires avec l’hexagone mais aussi avec les pays européens est aussi une donne importante. En effet, le transfert de VHU d’un pays à un autre n’est autorisé qu’entre pays européens, ce qui ne prend pas en compte la réalité géographique de territoires ultramarins situés dans les Caraïbes ou dans l’océan Indien.
L’une des préconisations du rapport est de faire évoluer la responsabilité élargie du producteur (REP), l’une des hypothèses étant la mise en place d’un éco-organisme et d’une contribution financière. Un décret en ce sens est aujourd’hui en préparation au sein du ministère de l’environnement. Une autre hypothèse est une solution autonome de filiarisation par les concessionnaires.
Pour compléter le dispositif, votre rapporteur défendra en séance un amendement encadrant la gestion des véhicules économiquement irréparables conservés par leurs propriétaires dans le cadre de la procédure relative aux véhicules endommagés. Il prévoit, notamment, que ces véhicules sont interdits de circuler si le premier rapport de l’expert en automobile fait état d’une nécessité de réparation touchant à la sécurité dudit véhicule du fait de ses déficiences et que, si dans un délai de six mois à compter de la date d’inscription de l’interdiction de circulation, le véhicule n’a pas été réparé par son propriétaire, alors ce dernier doit s’en défaire. Il doit le remettre à un centre VHU agréé s’il s’agit d’une voiture particulière ou d’une camionnette et ce de manière à ce que ce véhicule soit traité dans la filière appropriée de gestion de ces déchets.
Autre sujet extrêmement important pour les outre-mer, le système des zones franches d’activité mis en place par la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer.
L’objectif de ce dispositif était d’améliorer la compétitivité des petites et moyennes entreprises qui sont situées dans les départements d’outre-mer, en prévoyant des abattements sur plusieurs impôts :
– l’impôt sur les bénéfices (impôt sur le revenu ou impôt sur les sociétés) ;
– La cotisation foncière des entreprises (CFE) ;
– La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ;
– La taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) ;
– La taxe foncière sur les propriétés non-bâties (TFPNB).
La dernière année d’application du dispositif était 2017 pour l’imposition sur les bénéfices et 2018 pour les allègements en matière de fiscalité directe locale. Il était par ailleurs prévu que les taux des abattements se réduisent progressivement sur les trois dernières années d’application.
Pour votre rapporteur, les zones franches constituent des outils au service de l’attractivité des territoires. En effet, le concept de « zone franche » est protéiforme et se traduit par une multitude de configurations, avec la mobilisation de différents outils au regard d’un projet et d’une stratégie de développement. Une telle zone offre ainsi un ensemble d’avantages et ne consiste donc pas simplement en une zone d’avantages fiscaux. Cet ensemble d’incitations doit être élaboré pour impacter la totalité des déterminants de la rentabilité des entreprises, qui ne se réduisent pas à la dimension fiscale : la simplification des démarches administratives, le recours à une organisation logistique performante, l’accès à des services publics répondant aussi aux besoins du secteur privé apparaissent comme des leviers tout aussi importants.
C’est pourquoi il est indispensable de procéder à une réflexion de fond sur le dispositif appelé à succéder au système actuel afin qu’il soit adapté au mieux aux exigences d’un développement endogène.
Le Gouvernement a parfaitement conscience de cette nécessité et a fait deux annonces particulièrement importantes : le maintien, en 2017, du taux d’abattement au niveau de 2016 et la prolongation du dispositif pour un an.
Votre rapporteur se félicite de ces décisions mais estime nécessaire de se donner plus de temps pour mener à bien la réflexion. Une prolongation du dispositif de deux ans semble, dans cette perspective, un minimum.
Fort de ces analyses, votre rapporteur a porté plusieurs propositions visant à enrichir le projet de loi, propositions qui ont été adoptées par la commission des affaires économiques et, pour la plupart, par la commission des lois, saisie au fond.
La commission des affaires économiques a d’abord adopté un certain nombre d’amendements visant à sécuriser les dispositifs fiscaux existants.
La commission a adopté un amendement de votre rapporteur instaurant une dégressivité de l’exonération des cotisations sociales sur quatre ans en remplacement de l’exonération totale actuelle de 24 mois, à enveloppe constante, pour les travailleurs débutant une activité non salariée dans les départements et régions d’outre-mer.
Selon la nouvelle configuration, la première année pourrait rester entièrement exonérée avant l’introduction d’une progressivité du taux de cotisation pour atteindre les niveaux du régime de croisière (de 9 % et 15 %, selon les activités concernées). Cette disposition vise à limiter l’effet de seuil qui existe actuellement et qui est de nature à désinciter au développement d’activités durables.
En effet, les entrepreneurs ne sont pas toujours en mesure d’anticiper la hausse subite et non progressive de leur taux de cotisations sociales et ne prennent pas toujours en compte cette augmentation des charges dans leur business plan, ce qui porte atteinte à la pérennité de leur activité.
Créé en 2011, le FIP-DOM n’a malheureusement pas atteint les objectifs fixés lors de sa création alors qu’il s’agit d’un instrument qui a fait ses preuves, par exemple en Corse. Depuis quatre ans, seuls 8 millions d’euros ont été collectés via cet outil.
La limitation de la souscription aux seuls domiciliés fiscaux outre-mer est la principale cause de cet échec et la commission a donc adopté un amendement de votre rapporteur levant cette restriction tout en réduisant, afin de limiter le coût fiscal de la mesure, le taux de réduction d’impôt.
La commission a adopté un amendement visant à soutenir le développement des groupements d’employeur dans les départements et territoires d’outre-mer en prévoyant :
– l’exonération de la TVA pour l’ensemble des services rendus par les groupements d’employeurs constitués dans les départements et territoires d’outre-mer à leurs adhérents pendant les deux premières années suivant l’adhésion du membre concerné. Cette disposition vise à inciter la création de ce type de structure, notamment dans les activités confrontées à une forte cyclicité ou saisonnalité, conformément aux orientations arrêtées dans le cadre du plan d’action « Tout Pour l’Emploi dans les TPE et PME » présenté par le Premier ministre ;
– l’extension du régime bonifié d’exonération des cotisations dues par les employeurs, au titre de la législation de sécurité sociale, institué par la LODEOM, à l’ensemble des groupements d’employeurs sectoriels et multisectoriels, sans condition d’effectif ni de secteur d’activité. Il s’agit ainsi d’inciter à leur développement sur le territoire en allégeant le coût du travail pour les employeurs.
La référence spécifique à la notion d’investissement initial affaiblit la portée des dispositifs fiscaux d’aide à l’investissement outre-mer. L’aide fiscale à l’investissement doit pouvoir s’appliquer aussi bien aux investissements initiaux qu’aux investissements de renouvellement.
Le Gouvernement, dans une réponse très précise et claire au sénateur Georges Patient, a d’ailleurs reconnu la légitimité de cette position. La commission a donc adopté un amendement proposant donc d’écrire dans la loi la doctrine officielle du Gouvernement afin de lever toute ambiguïté et ainsi mettre fin à certaines situations de blocage.
Le plan logement outre-mer signé le 26 mars 2015 était porteur d’une ambition forte visant à relancer la politique du logement tant en offre nouvelle qu’en matière d’amélioration de l’habitat et des quartiers anciens. Aujourd’hui, on constate que les objectifs chiffrés du plan (par exemple, la construction et la réhabilitation de 10.000 logements sociaux par an) ne seront probablement pas atteints. Le soutien au secteur de la construction doit donc être renouvelé.
Le BTP (bâtiment et travaux publics) est un secteur essentiel pour le développement économique des territoires ultra-marins, secteur qui connaît aujourd’hui de sérieuses difficultés et qui est confronté à une concurrence parfois déloyale.
Il est donc indispensable de soutenir le BTP et c’est pourquoi la commission a adopté un amendement proposant, conformément à l’engagement de Mme Pau-Langevin, alors ministre des outre-mer, le rajout du secteur du BTP à la liste des secteurs prioritaires reconnus par la LODEOM et bénéficiant d’exonérations de cotisations patronales renforcées.
Aujourd’hui, seuls les organismes HLM, les SEM exerçant une activité immobilière outre-mer et les organismes mentionnés à l’article L 365-1 du code de la construction et de l’habitation peuvent utiliser le crédit d’impôt pour financer des opérations dans le logement intermédiaire.
Or, les besoins en logements outre-mer sont importants au regard des enjeux démographiques et le contexte de morosité dans le secteur du BTP reste persistant. La situation actuelle entre en contradiction, de surcroît, avec les plans logement outre-mer qui prévoient de développer une offre de logements locatifs sociaux et intermédiaires.
La commission a donc adopté un amendement élargissant le dispositif.
La commission a également adopté un amendement ayant pour objet de conduire à leur terme les mesures de simplification du mode d’instruction de l’agrément fiscal des programmes de logement social en défiscalisation et surtout en crédit d’impôt, avec en particulier la suppression de l’agrément fiscal préalable pour les programmes d’accession sociale (PSLA).
En outre-mer, dans un contexte de crise en matière d’habitat, le secteur du logement social est confronté à l’urgence de sa rénovation et de l’adaptation aux obligations réglementaires de mise en conformité et de mise aux normes techniques des groupes immobiliers sociaux anciens (équipements sanitaires, électricité, eau…) d’une part, mais aussi à la nécessité d’engager le traitement et la prévention des risques (risques naturels et notamment sismique, amiante) sur certains groupes immobiliers ou dans certaines zones.
Continuer à faire assurer un rôle d’accueil au parc social ancien est fondamental pour préserver le maintien et l’accueil de ménages modestes et très modestes dans un contexte marqué par des besoins quantitatifs importants et une offre nouvelle caractérisée par des niveaux de loyers moyens bien plus élevés que ceux du parc locatif ancien.
Rappelons que le parc locatif social dans les outre-mer totalise un patrimoine de 130 000 logements locatifs sociaux, dont près de 40 % ont plus de vingt ans. Soulignons également que la rénovation du parc locatif ancien dans les DOM n’est pas éligible aux crédits logement de l’ANRU comme en métropole.
Le dispositif actuel n’étant pas opérationnel, la commission a adopté un amendement visant à :
– supprimer le zonage (ne pas limiter la mesure aux seules opérations de rénovation urbaine) ;
– revaloriser le montant du crédit d’impôt par une augmentation plus réaliste de l’assiette (de 20 000 € à 50 000 €) et un taux de 40 %.
La pluriactivité consiste à exercer simultanément plusieurs activités professionnelles, qui peuvent relever de différents statuts (salarié, agent public, travailleur indépendant). Elle est particulièrement développée dans les départements et collectivités d’outre-mer.
La pluriactivité doit être encouragée. Elle répond aux aspirations des actifs, notamment dans les jeunes générations. Elle permet aux personnes concernées d’accroître leurs revenus, de diversifier leurs expériences professionnelles et d’acquérir de nouvelles compétences. Elle confronte cependant ces personnes à une complexité administrative plus importante.
La commission a donc adopté un amendement dont l’objectif est triple :
– tout d’abord, expérimenter durant trois ans, dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, la mise en place d’une stratégie coordonnée entre l’État, la région, les partenaires sociaux, les organismes consulaires et les opérateurs de l’emploi et de la formation ; cette stratégie sera définie au sein d’une commission spécialisée du Comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation personnelle (CREFOP) et les actions mises en place par les différents partenaires seront précisées par contrat de plan régional de développement des formations et d’orientation professionnelle (CPRDFOP) ;
– ensuite, prévoir, toujours pendant trois ans, que la convention régionale pluriannuelle de coordination de l’emploi, de l’orientation et de la formation sera chargée de mettre en œuvre cette stratégie ;
– enfin, permettre la mise en œuvre anticipée du compte personnel d’activité (CPA), avant le 1er janvier 2018, pour les travailleurs indépendants affiliés aux fonds d’assurance-formation de non-salariés, qui seront prêts avant cette date. Cet amendement bénéficiera particulièrement aux départements et collectivités d’outre-mer, puisque la pluriactivité y est particulièrement développée.
Enfin, la commission a adopté deux mesures en faveur de la jeunesse. La première vise à faciliter la venue dans les territoires d’outre-mer des jeunes diplômés en leur proposant d’accéder à des postes de responsabilité dans les collectivités locales.
La seconde vise à élargir, dans les DOM et les COM, le périmètre des dépenses éligibles au titre de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle, en y incluant les dépenses liées au tutorat.
Lors de sa réunion du lundi 26 septembre 2016, la commission a examiné pour avis le projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique (n° 4000), sur le rapport de M. Serge Letchimy.
Mme la présidente Frédérique Massat. La commission s’est saisie pour avis du projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, déposée le 3 août 2016. Nous avons désigné notre collègue Serge Letchimy comme rapporteur : c’est donc lui qui défendra demain les amendements adoptés par la commission des affaires économiques auprès de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, saisie au fond.
La commission des affaires économiques s’est toujours impliquée sur les textes relatifs à l’outre-mer. Nous n’examinerons qu’une partie du projet de loi, à savoir les articles 11 à 15 regroupés au titre IV et qui concernent les opportunités économiques à créer en faveur de l’égalité réelle. Ils prévoient notamment des dispositions visant à renforcer la concurrence, l’accès au droit économique et à lutter contre la vie chère.
Sur ces articles, vingt et un amendements ont été déposés, dont un a été retiré et trois déclarés irrecevables – les amendements CE2, CE3 et CE4 de M. Jean-Paul Tuaiva –, car situés hors du champ de la saisine ; il reste donc dix-sept amendements à examiner.
M. Serge Letchimy, rapporteur. Je tiens à souligner, Madame la présidente, que, quelles qu’aient été vos fonctions antérieures, vous vous êtes toujours montrée très attentive aux problèmes des pays, départements et régions d’outre-mer.
La décision du Président de la République et du Gouvernement de confier à M. Victorin Lurel un rapport sur l’égalité réelle outre-mer doit être saluée. On pourrait avoir le sentiment d’une simple posture, d’un simple égrenage de chiffres alors qu’il s’agit bel et bien, je l’affirme avec force, d’un engagement politique majeur. Le processus de départementalisation engagé en 1946 visait à atteindre l’égalité au sens global du terme, autrement dit dans tous les domaines – justice, social, économique, infrastructures de développement – tout en garantissant le respect de la culture, de la géographie, bref de l’identité propre à chaque pays. C’était la volonté exprimée par les populations de La Réunion, de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Guyane. Il s’agissait, en d’autres termes, pour la France, d’assurer à l’ouvrier martiniquais ou guadeloupéen le même traitement social et familial que celui auquel avait droit l’ouvrier du Languedoc-Roussillon ou de la banlieue parisienne. Cet accès au droit social est fondamental. Or, au cours des vingt années qui ont suivi 1946, l’égalité ne s’est pas construite outre-mer suivant la dynamique souhaitée par de nombreux parlementaires : le processus s’est révélé très lent et très long. Il a fallu plusieurs dizaines d’années pour appliquer les droits sociaux, en particulier les droits familiaux, pour garantir tout ce qui touche à la sécurité sociale, aux indemnités chômage, au droit au logement… Non seulement ce processus a été, je le répète, lent et long, mais il a fallu des luttes sociales pour faire appliquer le droit social outre-mer. Car la dynamique lancée était davantage celle d’une assimilation sociale que politique : le but était de permettre aux Martiniquais, aux Guadeloupéens, aux Réunionnais ou aux Guyanais l’accès à la même liberté et à la même justice sociale qu’en métropole.
Cela étant, si le Président de la République a pris cette initiative, c’est parce qu’il a considéré, tout comme les députés de la majorité, que ce processus était inachevé : certaines réalités apparaissaient même inacceptables. Le rapport de M. Victorin Lurel dresse ainsi des constats parfois dramatiques : le taux de chômage est de 19,4 % en Martinique, de 21 % en Guadeloupe et même de presque 24 % à La Réunion – le décalage avec la métropole est grave. Le produit intérieur brut (PIB) par tête y est de 30 à 40 % inférieur au PIB par tête national. Et ne parlons pas de l’indice de développement humain (IDH) qui est de 100 à 120 points inférieur à ce qu’il est dans l’hexagone. Plus grave encore, l’exemple de Mayotte, qui vient de faire valoir son droit à bénéficier de l’article 73 de la Constitution : les écarts y sont extrêmes. Je ne reviens pas sur les considérations du rapport de M. Victorin Lurel sur l’échec scolaire ou sur l’accès aux soins.
Le processus aujourd’hui engagé, et c’est toute l’intelligence du texte, ne consiste pas à décréter l’égalité réelle – ce qui ne manquerait pas de décevoir certains qui, au lendemain du vote, déploreraient n’avoir toujours rien obtenu. Il faut rassurer tout le monde en rappelant qu’il s’agit bien d’un processus : le chapitre Ier du titre II définit clairement une stratégie de convergence vers l’égalité réelle sur tous les points évoqués, de la santé au social, en passant par les équipements structurants, l’éducation, la formation professionnelle, etc. Cette démarche me paraît d’autant plus intelligente que ce processus s’inscrit dans un plan de convergence fondé sur un partenariat entre l’État et les collectivités – communes, établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), départements, régions –, de façon à pouvoir définir, grâce au dialogue, les objectifs à atteindre pour les dix, voire les vingt années à venir. C’est la raison pour laquelle le texte s’intitule « projet de loi de programmation » en ce qu’il vise à inscrire cette démarche dans le temps et à se donner les moyens d’évaluer ces plans de convergence. Le texte précise à cet effet que le contrat de partenariat signé entre l’État et les collectivités de chaque territoire devra être évalué localement mais aussi par la Commission nationale d’évaluation des politiques publiques de l’État outre-mer (CNEPEOM).
Une telle démarche n’avait encore jamais été mise en place, même s’il convient de saluer les bienfaits de la loi pour le développement économique des outre-mer (LODEOM), que, du reste, nous entendons modifier sur plusieurs points. Notre seule crainte a trait aux défaillances budgétaires qui peuvent se produire tant au niveau national qu’au niveau local ; c’est pourquoi je me réjouis que le processus de vérification de l’implication financière de l’État et des collectivités soit aussi un des enjeux du texte : il ne sera pas possible de fuir ses responsabilités après avoir signé un contrat. Je vois mal, en effet, l’État animer des plans de territoire sans que ces plans ne prévoient des moyens financiers – ce serait, sinon, un leurre politique pouvant se révéler très dangereux. La commission des affaires économiques doit donc y veiller.
En outre, une étape semble avoir été franchie puisque le texte concerne non seulement les départements et régions relevant de l’article 73 de la Constitution, mais aussi les collectivités d’outre-mer relevant de l’article 74, comme Saint-Martin ou la Polynésie française, ou encore la Nouvelle Calédonie dont le statut est régi par le titre XIII de la Constitution. Or, lorsqu’on évoque « les » outre-mer, on croit qu’il existe une sorte d’uniformité institutionnelle, ce qui n’est pas exact : les statuts des collectivités que je viens de mentionner sont très différents les uns des autres. Ainsi le dialogue partenarial se fera à la Martinique avec la collectivité unique, conformément à la décision qu’elle a prise récemment, alors qu’il s’effectuera parallèlement avec deux collectivités en Guadeloupe.
La trajectoire politique, économique, sociale, culturelle, géographique et écologique de la Polynésie française n’est pas la même que celle de La Réunion qui elle-même diffère de celle de la Martinique. Les bassins géographiques n’ont pas la même taille : celui de La Réunion compte près d’un million de personnes alors que celui de la Martinique n’en rassemble que 381 000. Et la Guyane est encore plus spécifique. C’est pourquoi il faut souligner l’intelligence de la stratégie choisie par le Gouvernement, sur proposition de M. Victorin Lurel, en ce qu’elle spécifie les stratégies de développement, sans chercher à mettre tout le monde dans le même sac. Les stratégies économiques doivent correspondre aux réalités. Il ne s’agit pas de promouvoir l’uniformité au nom d’une République une et indivisible, modèle qu’on peut certes admettre dans tel ou tel cas mais pas forcément quand on prend en considération les différences géographiques : l’égalité n’est pas l’uniformité et, du coup, l’accès à l’égalité peut être très différencié.
Ce dispositif est d’une importance capitale pour nous ; il devrait impliquer l’État, les collectivités mais également, bien entendu, les hommes, les entreprises, les acteurs culturels, etc. dans une véritable dynamique d’accession à l’égalité dans le respect de chacun.
Cela étant, je ne cesse de le répéter, l’égalité réelle présuppose l’émancipation économique et le développement endogène. Si l’on n’assortit pas au droit à l’égalité le droit au développement interne, on manquera quelque chose et nous en reviendrons à cette idée simpliste qui a de plus en plus cours dans la sphère politique : celle de l’assimilation pure et simple. C’est dans cette perspective que, dans son rapport, M. Victorin Lurel a fait des propositions dans le domaine économique. Ce volet économique, nous entendons bien, avec les membres de la commission, tenter de l’enrichir au maximum.
En attendant d’étayer ce point, je souhaite dire un mot sur Mayotte. Lorsqu’on m’a confié le rapport sur l’article 349 du traité de Lisbonne, je me suis rendu à Mayotte et j’ai très vite constaté qu’il fallait non seulement faire un effort exceptionnel, mais également tenir les engagements politiques pris antérieurement. Or la partie du texte consacrée à Mayotte est très importante car elle pose les bases de l’accession à l’égalité. C’était la revendication du peuple de Mayotte et il est important que la République respecte cet engagement, que les droits sociaux en vigueur sur le territoire hexagonal valent aussi à Mayotte moyennant bien sûr des adaptations. De ce point de vue, les dispositions concernant les prestations familiales, les aides aux personnes handicapées, les aides aux personnes âgées, etc., semblent aller dans le bon sens.
Pour en revenir à l’émancipation, nous proposons une série d’amendements visant à accroître le potentiel de développement. Je prendrai deux exemples.
En premier lieu, le Gouvernement va-t-il laisser s’éteindre, sans rien proposer d’autre, les avantages de la LODEOM – extinction prévue pour la fin de l’année 2017 –, notamment en ce qui concerne les zones globales d’activité ? Un de mes amendements vise à prolonger la LODEOM de deux ans. Je considère, en effet, que la durée d’une année envisagée par le Gouvernement ne sera pas suffisante. Cet amendement pourrait rassurer les investisseurs et les entreprises qui pourraient ainsi mieux organiser leur investissement ; du reste, le Gouvernement, et j’en suis très heureux, partage ce point de vue.
Ensuite, nous faisons des propositions très importantes concernant la pluriactivité. L’un des plus graves problèmes de nos départements et régions d’outre-mer est le chômage et en particulier celui des jeunes. Dans le cadre de l’application du compte personnel d’activité (CPA), on pourrait anticiper et donner de vrais droits à des personnes qui exercent plusieurs activités, ce qui permettrait d’ailleurs de traiter en partie la question des activités informelles – il n’est pas question ici du travail au noir. Ces activités informelles peuvent en effet parfaitement être intégrées à une dynamique d’encouragement de la pluriactivité. Il ne s’agit pas de créer un statut de pluriactif, mais de donner de vrais droits à quelqu’un qui, pendant six mois, peut travailler dans l’hôtellerie ou le tourisme et, pendant six mois, travailler dans un autre secteur.
Nous avons, en outre, déposé des amendements d’appel. Nous proposons pour Mayotte, par le biais du dispositif « cadres d’avenir », au titre de la mobilité territoriale, de permettre à de jeunes diplômés de revenir au pays au bout de quatre ans d’expérience professionnelle, et donc de renforcer l’encadrement local. La même dynamique pourrait être envisagée pour les collectivités qui ont besoin de cadres mais où ces jeunes ne peuvent occuper des postes de fonctionnaires en dehors des processus dérogatoires prévus par la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
Nous proposons par ailleurs de relancer la question du fret et de l’accès à certains droits : je veux parler de la possibilité de bénéficier d’aides pour diminuer le coût des activités et d’avoir accès aux financements européens relatifs à l’accompagnement des intrants. Ce droit doit bénéficier aux entreprises qui importent d’Europe, mais ces intrants pourraient aussi bien provenir de pays limitrophes à La Réunion ou bien limitrophes à la Guadeloupe et à la Martinique, et pour un coût écologique moins élevé. Du reste, il semble que la relation avec la seule Europe tient moins au respect du droit communautaire qu’à une stratégie purement nationale.
Je me ferai un plaisir de défendre en commission des lois tous ces amendements qui visent à améliorer le texte, après bien sûr que nous en aurons débattu au sein de la commission des affaires économiques.
M. Philippe Naillet. Je partage totalement les propos de M. Serge Letchimy. L’égalité réelle est attendue sur le plan social mais aussi sur le plan économique puisque le développement économique, le rapporteur l’a souligné, doit favoriser l’emploi. Or nos taux de chômage sont en moyenne deux fois, voire deux fois et demie plus élevés que celui de la France hexagonale.
M. Serge Letchimy a rappelé que toutes les avancées que nous avons obtenues depuis soixante-dix ans furent d’abord le fruit de la mobilisation sociale. Le texte qui nous est soumis offre pour la première fois une opportunité formidable : celle de construire l’égalité réelle. C’est à nous, les élus d’outre-mer, qu’il appartient de lui donner un contenu, mais notre rapporteur a raison : cela ne se fera pas en neuf ou dix mois.
Le monde économique a su jusqu’à présent se saisir des différents dispositifs législatifs, la LODEOM en particulier ; mais il évolue désormais dans un contexte d’opportunités nouvelles : la révolution numérique supprime les distances, réduit considérablement les temps de traitement ; la croissance se crée désormais au sein de nos bassins géographiques respectifs. Ainsi, La Réunion compte dans son voisinage des pays à forte croissance : l’Afrique du Sud, le Mozambique, l’Éthiopie – qui a connu jusqu’en 2014 un taux de croissance de 10 % par an, de 8,5 % aujourd’hui ; or un Réunionnais met moins de temps à se rendre en Éthiopie qu’en France hexagonale. Nos entreprises attendent par conséquent de nous que nous créions les conditions devant leur permettre de saisir toutes ces opportunités. Notre développement économique reposait jusqu’à maintenant exclusivement sur deux éléments : l’import-substitution et la commande publique. Chacun voit bien que ce système atteint ses limites. Il faut donc, j’y insiste, saisir les opportunités que j’ai mentionnées et mettre le paquet sur la formation – j’y reviendrai.
Je me félicite que l’article 12 du texte définisse un nouveau dispositif de continuité territoriale financé par l’Agence de l’outre-mer (LADOM) pour répondre à des besoins bien identifiés dans nos territoires. Il faut en effet aller plus loin en matière de mobilité car celle-ci est essentielle à notre développement. Elle favorise le développement culturel, économique et social des territoires ultramarins dans leur zone géographique. Un rapprochement avec les pays de la zone favoriserait aussi l’insertion des outre-mer et de leurs populations dans leur environnement. C’est pourquoi je proposerai deux amendements visant à mettre en place un dispositif de type « Eramus régional » favorisant les échanges entre les jeunes ultramarins – étudiants, demandeurs d’emploi, salariés devant suivre une formation – et les jeunes des pays de leur zone géographique. L’outil ainsi créé a vocation à revaloriser la mobilité des jeunes ultramarins et à offrir de nouvelles opportunités d’insertion professionnelle.
Je regrette que, dans l’Océan Indien, dans les Caraïbes, en Amazonie ou en Océanie, l’Union européenne ne conduise pas de véritables politiques régionales de développement, bien qu’elle y consacre des moyens considérables ; cela, faute d’une vision stratégique et géographique qui devrait prévaloir sur la considération du statut juridique des bénéficiaires.
L’article 11 crée un dispositif « cadres d’avenir » à Mayotte, s’inspirant de ce qui se fait en Nouvelle-Calédonie, pour permettre aux jeunes d’accéder à des formations puis à des emplois de haut niveau dans l’administration publique et dans le secteur privé.
L’article 13 étend la possibilité d’intégrer les travailleurs informels dans une démarche de validation des acquis de l’expérience en contrepartie de leur insertion dans un parcours de formalisation progressive de leurs activités.
Je proposerai également une dérogation au nombre maximum de stagiaires pouvant être accueillis dans les start-up. Les outre-mer connaissent, en effet, je le répète, un taux de chômage deux fois plus important que dans l’hexagone, mais ils regorgent aussi de volonté d’innovation.
J’en profite pour souligner qu’à La Réunion nous avons créé une zone d’activité concernant plusieurs secteurs, parmi lesquels les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC). En moins de vingt ans, plus de 200 entreprises s’y sont installées et plus de 1 200 emplois se sont créés.
Le titre IV que nous examinons contient également des dispositions pour lutter contre la vie chère et pour renforcer la concurrence et l’investissement.
Quand elle était députée, Mme Ericka Bareigts, à laquelle j’ai succédé quand elle a été nommée au Gouvernement, a été rapporteure de la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer. Ce texte traduisait l’engagement n° 29 de François Hollande pendant la campagne présidentielle : « Je lutterai sans concession contre les monopoles et les marges abusives pour réduire la vie chère. » De nombreuses avancées ont été obtenues, telles que la mise en œuvre du bouclier qualité-prix, la limitation des tarifs bancaires, ou encore l’aide au développement des filières de production pour lutter contre les structures monopolistiques. Au-delà de ce texte, la majorité a également obtenu la fin du roaming qui causait une inégalité entre ultramarins et hexagonaux en matière de frais téléphoniques. Le projet de loi poursuit cette ambition : l’article 14 élargit ainsi la liste des opérateurs économiques participant à la négociation du bouclier qualité-prix aux transporteurs maritimes et aux transitaires.
Il ne faut pas oublier que bon nombre des territoires ultramarins sont insulaires. Il est important, en ce sens, d’ouvrir notre espace maritime : le Gouvernement a réaffirmé à plusieurs reprises l’ambition maritime de la France pour qu’elle soit présente au grand rendez-vous de l’économie bleue. C’est que, grâce à ses outre-mer, la France dispose de la deuxième puissance maritime mondiale. C’est pourquoi je proposerai un amendement visant à évaluer la mise en place d’une école supérieure des métiers de la mer, outre-mer, pour permettre à nos jeunes de devenir officiers de marine, capitaines de navire ou encore ingénieurs – d’autres métiers apparaîtront d’ici là. Des formations professionnelles continues de haut niveau permettront à nos jeunes de trouver rapidement une activité professionnelle et aux filières de bénéficier de salariés formés, étape indispensable à la structuration d’une force économique encore sous-estimée.
L’article 15, enfin, permet de suspendre la décision des commissions départementales d’aménagement commercial (CDAC) à la remise de l’avis de l’Autorité de la concurrence. Cet avis est en effet important pour certains projets considérables qui peuvent avoir des conséquences durables sur la structuration du paysage et sur la situation concurrentielle d’un territoire. Le but est de se prémunir des situations oligopolistiques ou monopolistiques sur les territoires ultramarins.
Encore une fois, il s’agit pour nous de donner une nouvelle dimension au développement économique ultramarin, qui dépendra de notre capacité à saisir les opportunités pour les décennies à venir.
M. Ibrahim Aboubacar. L’étape que les outre-mer sont sur le point de franchir est cruciale. Depuis une dizaine d’années, en effet, les outre-mer se cherchent, qu’il s’agisse des responsables politiques, de la rue – je pense aux événements de 2009 et de 2011 – ou des législateurs, qui ont tenté de mettre en place des dispositifs de développement, l’Union européenne s’interrogeant elle aussi de son côté. Au-delà, et on l’a constaté à l’occasion du colloque sur le soixante-dixième anniversaire de la départementalisation, on voit bien que, pour ce qui concerne les quatre vieilles colonies, nous sommes arrivés au bout de quelque chose.
Notre ambition doit donc être au moins égale à celle de 1946. J’entends par là que les travaux que nous conduirons, une fois le texte voté, devront donner une crédibilité à cette égalité réelle. Pour l’heure, en outre-mer, beaucoup s’interrogent : est-ce un slogan, est-ce un argument de campagne électorale ? Non : c’est, je le répète, une nouvelle étape, très importante, qui exige que nous lui donnions toute la crédibilité nécessaire. Il va falloir, à cette fin, que nous libérions les énergies de tous les acteurs que nous appelons au rendez-vous de cette nouvelle étape, les acteurs politiques comme les acteurs économiques. Or libérer les énergies suppose de l’inventivité, de l’innovation, mais également de la confiance, une confiance reposant sur la permanence des dispositifs que nous allons mettre en place. Il n’y a rien eu de pire, ces dernières années, en matière de développement économique outre-mer, que les incertitudes liées aux dispositifs votés année après année et aux atermoiements budgétaires, alors que les acteurs économiques ont besoin de se projeter dans le temps.
Nous allons mettre en place des plans de convergence d’une durée de dix à vingt ans selon les territoires. Dix à vingt ans, c’est une durée longue ; ils ne pourront avoir de sens que pour autant que les outils mobilisés pour leur mise en œuvre suscitent la confiance, qui elle-même dépendra de leur durabilité et leur efficacité. Certains dispositifs en vigueur devront être prolongés, comme l’a précisé M. Serge Letchimy, afin de nous laisser le temps, dans les deux années à venir, de mieux définir ceux dont nous aurons besoin pour réaliser cette nouvelle ambition. Or, les outils que nous serons amenés à expérimenter devront, si je puis dire, être globaux.
Nous allons devoir définir une stratégie pour assurer toute sa cohérence à ce texte qui se présente comme un projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer, mais qui porte également d’autres dispositions en matière sociale et économique. Il serait bon que ces dispositions, sauf exception, tendent toutes vers cet objectif d’égalité réelle, notamment par la résorption des handicaps. Reste que nous sommes toujours quelque peu bridés par la nécessité de respecter l’article 40 de la Constitution et il n’est pas toujours évident pour nous, en l’espèce, de faire des propositions, en particulier sur les nombreux articles qui prévoient des expérimentations. Mais comme le Gouvernement nous a invités à co-construire un texte qui vient de loin, nous entendons bien répondre à son invitation.
On notera que plusieurs propositions de différentes commissions se recoupent. La commission des affaires économiques est saisie du titre IV, qui ne figurait pas dans l’avant-projet ; aussi devons-nous le renforcer afin de proposer un dispositif pérenne.
Pour ce qui est du territoire de Mayotte, nous avons engagé le processus de départementalisation en 2011. Depuis lors, j’ai été de ceux qui se sont battus pour que soit défini un plan stratégique « Mayotte 2025 », afin de nous aider à hiérarchiser les priorités tant elles étaient nombreuses. Il nous manquait, pour appliquer certaines dispositions, un appui législatif ; or le présent projet de loi peut constituer cet appui législatif. On a mentionné, par exemple, le dispositif « cadres d’avenir », mais il n’est pas le seul.
C’est que nous sommes bien loin, à Mayotte, de l’égalité réelle : il s’agit déjà d’obtenir l’égalité dans les domaines les plus basiques comme l’éducation, la santé… L’égalité réelle apparaît à Mayotte comme un luxe : si déjà nous pouvions franchir l’étape de l’égalité tout court ! Nous allons donc faire deux étapes en une, conduire deux processus en même temps alors que la stratégie de développement des autres départements d’outre-mer pourra consister en un processus unique. Rappelons que Mayotte a été la première collectivité territoriale d’outre-mer à se doter d’une collectivité unique et la première à avoir modernisé ses outils de gouvernance. Nous mènerons donc ce double processus avec toujours la volonté de donner à notre action de la crédibilité. J’insiste sur ce mot car le programme « cadres d’avenir » faisait partie de l’accord signé entre l’État et les élus de Mayotte en 2001 – c’en était même l’une des points fondamentaux puisque nous savions que nous ne pouvions pas engager la transformation juridique alors à l’œuvre sans cadres. Or ce point n’a pas été appliqué, ce qui explique les difficultés que nous rencontrons dans la mise en œuvre de la départementalisation. S’il l’avait été, nous n’aurions pas à proposer de nouveau aujourd’hui un programme de formation de cadres, indispensable au renforcement des capacités des collectivités locales. Espérons que l’on n’aura pas à nous reprocher, dans vingt ans, de n’avoir pas appliqué les dispositions que nous nous apprêtons à voter.
Mme la présidente Frédérique Massat. Je vous informe, chers collègues, qu’aucun des amendements déposés dans le cadre de cette saisine pour avis n’a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution : cet article, certes, nous bride, mais rien n’empêche les fins législateurs que vous êtes de négocier avec le Gouvernement qui, lui, n’y est pas soumis.
M. le rapporteur. Puisque nous voulons tout à la fois obtenir l’égalité dite réelle et travailler au développement endogène, il semble intéressant de préciser que le Gouvernement a prévu la possibilité de procéder aux expérimentations prévues aux articles 37-1, 72 et 73 de la Constitution. Ainsi, des expérimentations pourront être menées de façon différenciée entre la Guadeloupe, La Réunion et la Martinique, afin que des dispositifs d’accompagnement pour l’accès à l’égalité soient adaptés aux réalités locales. Les collectivités pourront solliciter l’État pour bénéficier de ce droit à l’expérimentation dans le domaine social, dans celui des normes, etc. Nous ne devons pas avoir le sentiment, en effet, qu’il suffit de décréter l’égalité pour avoir accès à l’égalité. Il s’agit de combiner l’investissement local et la solidarité de l’État, faute de quoi nous nous engagerions dans un processus assez mortifère qui ne permettrait pas de créer une dynamique durable.
On doit donc, d’une part, s’approprier les grands enjeux – mutations énergétiques, écologiques, révolution numérique –, en faisant appel à des outils modernes qui dépassent le seul cadre de la loi ou du règlement ; car si l’on attend la publication de lois ou de décrets pour s’en sortir, on n’ira pas très loin. Mais, d’autre part, on doit pouvoir s’appuyer sur l’article 73, alinéa 3, de la Constitution, en vertu duquel la loi ou le règlement peut habiliter les collectivités – à l’exception, malheureusement, de La Réunion – « à fixer elles-mêmes les règles applicables sur leur territoire, dans un nombre limité de matières pouvant relever du domaine de la loi ou du règlement ». C’est une avancée considérable.
TITRE IV
DISPOSITIONS ÉCONOMIQUES EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ RÉELLE
Article 11
(article L. 1803-2 et L. 1803-5 du code des transports)
Dispositif « Cadres avenir Mayotte »
La montée en compétence des jeunes actifs est un enjeu fondamental dans les territoires ultramarins, notamment à Mayotte. En effet, l’offre de formation de l’enseignement supérieur reste limitée à Mayotte alors même que le nombre de bacheliers augmente d’année en année. Cette situation oblige de nombreux Mahorais à se former hors de leur territoire.
Depuis 2011, l’agence de l’outre-mer pour la mobilité (LADOM) propose le passeport mobilité études (PME). Ce dispositif ouvre droit, sous conditions de ressources, à la prise en charge du titre de transport pour les étudiants suivant en métropole des formations initiales saturées ou inexistantes dans leurs territoires d’origine. Toutefois, il ne finance que les frais de transport et ne permet pas la prise en charge d’une aide mensuelle ni de frais d’installation.
Le présent article crée un dispositif dit « Cadres avenir Mayotte » destiné à aider de jeunes Mahorais à démarrer une formation menant à un diplôme de niveau Master 2. Il s’adosse au dispositif existant appelé « passeport mobilité études », prévu à l’article L. 1803-5 du code des transports, qui permet au titre de la « continuité territoriale » de financer une partie des titres de transport pour des étudiants originaires d’outre-mer poursuivant leur études en métropole. En sus du financement du titre de transport, ce nouveau dispositif prend également en charge les frais d’installation en métropole et le versement d’une allocation mensuelle pendant une durée maximale de cinq ans. En contrepartie, les bénéficiaires seront tenus de s’engager professionnellement à Mayotte, que ce soit dans le secteur public ou privé.
L’article renvoie à des décrets d’application afin de déterminer les critères d’attribution, le montant et la nature des aides destinées aux étudiants, les conditions de ressources auxquelles elles sont subordonnées et les durées d’activité professionnelle que leurs bénéficiaires doivent s’engager à effectuer à Mayotte à l’issue de leur formation en contrepartie du versement de l’aide.
Ce nouveau programme participera au développement socio-économique de Mayotte sur le long terme car l’investissement dans le capital humain génère des effets positifs pour l’économie. D’une part, il favorisera l’efficacité de l’action publique sur le territoire, renforcera la satisfaction des usagers quant à leur accès aux services publics tout en assurant un meilleur appariement entre les postes et les profils recrutés. D’autre part, dans le secteur privé, ce dispositif encouragera l’émergence d’une génération d’entrepreneurs et de manageurs formés pour venir travailler à Mayotte, ce qui contribuera à doper la compétitivité des entreprises locales.
Votre rapporteur ne peut qu’approuver cette mesure qui donne corps au principe d’égalité réelle en outre-mer.
*
* *
La commission examine l’amendement CE20 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet de compléter le dispositif prévu par l’article 11 du projet de loi pour Mayotte à l’ensemble des territoires ultra-marins. L’accès aux emplois offerts par les collectivités territoriales est régi par la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; nous proposons d’introduire un mécanisme particulier permettant d’intégrer directement des jeunes titulaires d’un master, afin de renforcer l’encadrement des collectivités pendant une durée maximale de trois ans. Les jeunes martiniquais, guadeloupéens et guyanais seraient ainsi incités à revenir dans leur pays pour y exercer des responsabilités locales.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 11 modifié.
Article 12
(articles L. 1803-2 et L. 1803-5 du code des transports)
Passeport pour la mobilité en stages professionnels
Actuellement, le code des transports contient une série de dispositifs visant à améliorer la mobilité de jeunes actifs ultramarins :
– l’aide à la continuité territoriale, qui participe au financement du déplacement en mode aérien vers la métropole, quel que soit l’objet du déplacement ;
– le passeport pour la mobilité des études, qui prend en charge 50 % du coût du transport aérien des étudiants (100 % pour les boursiers d’État sur critères sociaux) quand la filière d’études choisie n’est pas disponible dans la collectivité de résidence ;
– le passeport pour la mobilité de la formation professionnelle, qui prend en charge 100 % du coût du transport aérien des personnes en formation en mobilité ou devant passer les épreuves d’admission de certains concours administratifs ou d’entrée dans une grande école. Le passeport pour la mobilité de la formation professionnelle comporte également des mesures pédagogiques et d’accompagnement de la vie quotidienne des stagiaires de la formation professionnelle.
Le présent article complète l’article L. 1803-5 du code des transports par un nouvel alinéa visant à mettre en place le « passeport pour la mobilité en stages professionnels ». Il s’agit d’un dispositif d’aide au financement des titres de transport des élèves et étudiants inscrits dans des filières professionnelles de leur académie (élèves en terminale professionnelle ou technologique, étudiants en section de technicien supérieur, en IUT, en licence et master professionnels) , qui sont conduits dans le cadre de leur cursus à effectuer un stage professionnel dans une autre académie.
Ce dispositif n’est pas cumulable avec le passeport pour la mobilité des études ni avec le passeport pour la mobilité de la formation professionnelle. Par ailleurs, cette aide est attribuée selon des conditions de ressources, afin de mieux cibler les publics fragiles ou en difficulté dans le respect du principe d’égalité des chances.
Il s’agit de répondre à un double défi particulièrement marqué dans les territoires ultramarins. D’une part, il convient d’augmenter le capital humain de ces territoires en améliorant l’employabilité des jeunes qui connaissent un taux de chômage important. D’autre part, la mesure a un effet favorable pour le tissu productif local qui pourra se développer grâce au recrutement de jeunes actifs qualifiés.
Votre rapporteur approuve ce dispositif qui vise à renforcer la formation professionnelle initiale des jeunes actifs tout en rendant les entreprises locales plus compétitives.
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La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 sans modification.
Article 13
(article L. 335-5 du code de l’éducation)
Procédure adaptée de validation des acquis de l’expérience
L’article L. 335-5 du code de l’éducation régit le dispositif de validation des acquis de l’expérience (VAE) qui permet aux personnes exerçant une activité professionnelle ou bénévole pendant une durée minimale d’un an de bénéficier d’une certification (diplôme, titre ou certification de qualification professionnelle), en rapport direct avec les compétences développées.
Néanmoins, le dispositif de VAE ne prévoit pas expressément la possibilité de prendre en compte au titre de la VAE les périodes d’activité informelle. Le secteur informel désigne l’ensemble des activités productrices de biens et services qui échappent au regard ou à la régulation de l’État.
Des études de l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE) ont mis en exergue l’existence d’une économie informelle importante dans les territoires ultramarins. Cette situation peut s’expliquer par un marché du travail sinistré (en particulier chez les jeunes) et par un phénomène de pluriactivité qui s’exerce hors de toute réglementation adaptée à son déploiement.
Le présent article institue dans les collectivités mentionnées à l’article 73 de la Constitution, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à
Saint-Pierre-et-Miquelon, une procédure adaptée de validation des acquis de l’expérience, qui permet de prendre en compte des activités dont la durée est inférieure à celle d’un an prescrit par l’article L. 335-5 du code de l’éducation. (2)
Cette adaptation a un caractère expérimental pour une durée de cinq ans et n’est accessible qu’aux personnes qui se sont engagées dans une démarche de création d’entreprise supervisée par une association ou une fondation de microcrédit reconnue d’utilité publique, organismes mentionnés au 5° de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier.
Dans son avis sur le projet de loi, en date du 28 juillet 2016, le Conseil d’État a estimé que cet assouplissement était « justifié au regard des caractéristiques et des contraintes particulières des collectivités susceptibles de les mettre en œuvre ».
Dans le cadre d’une démarche incitative et innovante, la régularisation d’une partie du travail informel engendrera des retombées positives : accroissement du taux de création d’entreprises, augmentation des ressources fiscales de l’État et de l’assiette des cotisations sociales, réduction des dépenses de minima sociaux dont bénéficient certains travailleurs informels, réduction des situations de concurrence déloyale pour les travailleurs enregistrés.
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La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 sans modification.
Article 14
(article L. 410-5 du code de commerce)
Extension du dispositif « Bouclier qualité-prix » aux transporteurs maritimes et transitaires
Actuellement, l’article L. 410-5 du code de commerce prévoit la liste des opérateurs économiques participant, dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution (DOM, ROM) et dans les collectivités d’outre-mer (COM) de Saint Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et des îles Wallis et Futuna, à la négociation des accords annuels de modération des prix. Ce dispositif est autrement désigné sous le terme de « bouclier qualité-prix » (BQP).
Chaque année depuis 2013, les représentants des organisations professionnelles du secteur du commerce de détail et de leurs fournisseurs (producteurs, grossistes, importateurs) négocient avec le représentant de l’État la liste des produits « BQP » : pain, viande, lait, produits d’hygiène corporelle, produits d’entretien ménager, fourniture scolaire, petit équipement ménager. Les opérateurs économiques s’engagent sur un prix maximal pour l’ensemble des produits standardisés de la liste « BQP ».
Après avis public de l’Observatoire de la formation des prix et des marges territorialement compétent, le représentant de l’État et les opérateurs économiques concluent un accord qui est rendu public, par arrêté préfectoral. À défaut d’accord, le préfet fixe le prix global par arrêté.
Face à la problématique endémique de la « vie chère » dans les territoires ultramarins, le dispositif permet de remédier en partie à cette situation. En effet, il a démontré son efficacité économique sur trois points : une baisse généralisée des prix contenus dans les listes, un renforcement de la consommation locale et un accroissement du nombre de commerces proposant le « BQP » (3).
Le présent article modifie l’article L. 410-5 du code de commerce, pour étendre aux entreprises de fret maritime et aux transitaires la liste des opérateurs économiques participant à la négociation des accords annuels de modération des prix.
Le coût des services des entreprises de fret maritime et des transitaires a une influence importante sur la formation des prix en outre-mer. En effet, le poids du fret représente une part non négligeable du prix de vente au consommateur (en moyenne 5 % à 15 %). Ce phénomène peut s’expliquer, notamment, par un fonctionnement sous-optimal du marché de fret maritime pour des trajets entre la France métropolitaine et l’outre-mer (situation de monopole).
L’implication de ces opérateurs économiques pourrait s’inscrire en théorie dans une logique de cercle vertueux : d’une part, elle engendrerait une stabilisation, voire une diminution, des coûts de transports supportés par les importateurs, les grossistes et la grande distribution ; d’autre part, ces derniers devront répercuter toute réduction sur leurs prix de vente des produits « BQP » aux consommateurs qui verront leur pouvoir d’achat augmenter.
Votre rapporteur approuve cette disposition même s’il faut tempérer ses retombées concrètes. En effet, la marge de négociation des entreprises maritimes et transitaires est moindre que celle des autres opérateurs économiques, dans la mesure où ils n’entrent pas dans l’identification du produit (diversité des marchandises dans les conteneurs).
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La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 14 sans modification.
Article 15
(article L. 752-6-1 du code de commerce)
Caractère suspensif de la saisine de l’Autorité de la concurrence
La loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer, dite « loi Lurel », a modifié l’article L. 752-6-1 du code de commerce. Celui-ci prévoit une procédure de consultation de l’Autorité de la concurrence (ADLC) par la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC), lorsque la part de marché de l’entreprise qui sollicite l’autorisation, calculée en surface de vente, est susceptible de dépasser 50 % de la zone de chalandise après l’opération.
Cette disposition a pour objet de lutter contre les risques de constitution de monopoles locaux, lors de l’attribution des autorisations administratives d’implantation de surfaces nouvelles. En ce sens, la CDAC doit tenir compte de l’emprise économique déjà détenue dans la zone par une entreprise qui sollicite une autorisation d’installation. Cette mesure s’applique dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et les collectivités d’outre-mer de
Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Cet article crée un nouvel alinéa à l’article L. 752-6-1 du code de commerce. Il vise à conférer un caractère suspensif pendant trois mois à la saisine de l’Autorité de la concurrence. En l’absence d’avis de l’ADLC dans ce délai, la CDAC est libre de statuer.
Cette mesure contribue à mieux prendre en compte l’avis de l’ADLC. Elle permet de répondre à un double enjeu. D’une part, il s’agit d’éviter les risques de concentration pour les activités de la grande distribution et donc de tendre vers un équilibre du marché dans les territoires ultramarins. D’autre part, elle permet d’assurer une meilleure sécurité juridique pour les entreprises, dans la mesure où la CDAC devra s’aligner sur le sens de l’avis de l’ADLC pour rendre le sien a posteriori.
Votre rapporteur approuve cette mesure. Néanmoins, il a souhaité réduire le délai de saisine de l’Autorité de la concurrence à vingt-cinq jours ouvrés, à compter de la date de réception du dossier complet de l’opération. Ainsi, l’optimisation du temps d’examen par l’Autorité de la concurrence vise à encourager les entreprises à s’implanter dans les territoires d’outre-mer, en évitant les lenteurs inutiles, voire des blocages.
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La commission étudie l’amendement CE9 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. L’article 15 dispose que lorsqu’une commission départementale demande à l’Autorité de la concurrence de donner son avis sur l’une de ses décisions, celle-ci doit répondre dans un délai de trois mois, période qui suspend l’entrée en vigueur de cette décision. Nous proposons que l’Autorité n’ait plus trois mois, mais vingt-cinq jours ouvrés pour se prononcer. Nous avons auditionné des membres de l’Autorité, qui soutiennent cette mesure, sous réserve que le dossier transmis par la commission départementale soit complet. Cet amendement, en proposant d’accélérer le processus de consultation, s’inscrit dans l’esprit de la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer, qu’avait portée M. Victorin Lurel.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15 modifié.
La commission est saisie de l’amendement CE14 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Cet amendement est extrêmement important, car les enjeux relatifs au bâtiment et aux travaux publics (BTP) sont cruciaux partout dans notre pays. « Quand le bâtiment va, tout va », dit-on ; ce n’est malheureusement pas le cas chez nous. Le secteur connaît une forte récession dans nos régions, et nous devons relancer la machine ; j’ai suggéré de prolonger de deux années la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (LODEOM), afin de disposer du temps nécessaire à l’élaboration de nouveaux mécanismes et de garantir une certaine lisibilité au secteur. Cet amendement vise à intégrer le BTP dans les dispositifs prioritaires de la LODEOM pour qu’il bénéficie d’un renforcement des exonérations des cotisations patronales. Cela répond à un engagement pris en avril dernier par
Mme George Pau-Langevin, alors ministre des outre-mer.
Cette disposition permettra de lutter contre les difficultés rencontrées par le BTP, de réaliser des gains de productivité et de consolider un secteur exposé, fondamental pour le développement économique et qui représente un gisement d’emplois considérable dans nos pays.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle en vient à l’amendement CE15 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. L’aide fiscale à l’investissement doit s’appliquer aussi bien aux investissements initiaux qu’à ceux de renouvellement. Nous proposons donc de modifier les articles 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W du code général des impôts afin d’indiquer très clairement la possibilité d’appliquer ces aides au renouvellement des investissements – le remplacement d’un camion en fin de vie, par exemple –, comme nous y autorise la réponse de la Commission européenne à notre notification des régimes d’aide en octobre 2007, qui n’avait jamais écarté cette possibilité.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle aborde l’amendement CE13 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. L’enjeu du fonds d’investissement de proximité (FIP) est considérable. On a mis en place un FIP pour l’outre-mer et un autre pour la Corse, mais une différence existe entre les deux : seuls les habitants ultra-marins peuvent déposer des fonds auprès du FIP pour l’outre-mer, alors que tous les Français peuvent le faire pour celui de la Corse. Le FIP Corse a ainsi pu collecter 200 millions d’euros contre seulement 5 millions d’euros pour celui de l’outre-mer en 2013… Nous demandons donc depuis très longtemps que l’ensemble des Français puissent participer au FIP pour l’outre-mer. L’adoption de cet amendement corrigerait cette incompréhensible injustice et constituerait un vrai pas vers l’égalité réelle.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle examine l’amendement CE19 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Le Gouvernement a déployé un plan pour le logement outre-mer, qui va dans le bon sens. Il faut augmenter la construction de logements sociaux et réhabilités, car l’objectif du plan fixé à 10 000 logements par an n’a pas été atteint malgré un effort budgétaire soutenu. M. Victorin Lurel propose de fixer un objectif beaucoup plus ambitieux – entre 12 000 et 14 000 logements par an ; encore faut-il s’en donner les moyens. Quand un objectif est affiché par l’État mais que, de l’autre côté, on actionne le frein à main, cela pose un problème… En 2013, on recensait 7 000 logements locatifs sociaux (LLS) et 5 000 deux ans plus tard ; en Guadeloupe, on ne comptait plus que 1 118 logements sociaux, logements locatifs très sociaux (LLTS) et prêts locatifs sociaux (PLS) en 2015 contre 1 453 l’année précédente ; en Martinique, on ne construit que 600 à 800 logements de ces trois catégories par an, alors que le besoin s’élève à 1 500 logements.
On constate également une réelle panne dans le logement intermédiaire, et nous proposons de lever un obstacle majeur en ne restreignant plus le crédit d’impôt aux seuls organismes d’habitations à loyer modéré (HLM) et sociétés d’économie mixte (SEM). La défiscalisation reste ouverte pour les autres opérateurs, mais seulement si leur chiffre d’affaires n’excède pas 20 millions d’euros ; les autres n’ont droit ni au crédit d’impôt, ni à la défiscalisation.
Nous proposons d’ouvrir le crédit d’impôt aux entreprises n’évoluant pas dans le champ de l’immobilier social classique – HLM ou SEM –, sans limite de chiffre d’affaires, afin de stimuler l’investissement.
M. Philippe Naillet. Je comprends bien le problème décrit par M. Serge Letchimy ; le plan logement prévoit que 30 % des nouveaux logements sociaux doivent appartenir au secteur intermédiaire, mais seuls 450 des 3 000 logements livrés relevaient de cette catégorie l’année dernière à La Réunion.
Néanmoins, je vais m’abstenir de voter cet amendement, car les HLM et les SEM doivent conserver la maîtrise du logement intermédiaire social. En effet, les entreprises dont le chiffre d’affaires excède 20 millions d’euros qui entrent dans ce marché sont mues par des motivations essentiellement fiscales.
M. le rapporteur pour avis. Cet amendement porte sur le bénéfice du crédit d’impôt et non sur un mécanisme de défiscalisation. Si l’on veut augmenter le volume de logements, force est de reconnaître que seuls la défiscalisation et le crédit d’impôt permettent de faciliter le financement du logement intermédiaire. M. Philippe Naillet, votre raisonnement sur les entreprises réalisant plus de 20 millions d’euros de chiffre d’affaires pourrait se tenir pour l’ensemble des sociétés, puisqu’il s’agit d’un bénéfice octroyé à une entreprise investissant hors du champ des HLM. Je comprends néanmoins votre objection.
M. Philippe Naillet. Comme on se trouve dans de l’aménagement, je maintiens mon abstention.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle étudie l’amendement CE18 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. En réponse à une question posée au Gouvernement par M. Victorin Lurel, le Premier ministre, M. Manuel Valls, a décidé de simplifier le mode d’instruction de l’agrément fiscal des programmes de logement social pour la défiscalisation et pour le crédit d’impôt. Cet amendement propose de supprimer l’agrément fiscal préalable pour les programmes sociaux de location-accession (PSLA) ; cela concernera notamment les acquisitions réalisées à terme dans le cadre d’un processus de location-vente.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle est saisie de l’amendement CE17 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise, là encore, à accroître le nombre annuel de constructions de logements. Le Gouvernement a l’intention de substituer progressivement le crédit d’impôt à la ligne budgétaire unique (LBU), celui-ci s’ajoutant à la défiscalisation. Une dynamique s’est enclenchée, et certains logements, construits dans le cadre de montages de défiscalisation dans le logement social, sont affectés à des personnes âgées ou à des ménages modestes, voire démunis. L’investisseur bénéficie de la défiscalisation et les sociétés HLM assurent le portage du programme puis rachètent le patrimoine après une période de cinq ans au cours de laquelle les logements sont sous-loués. Nous proposons d’intégrer dans ce système les institutions gérant les foyers et les résidences sociales, qui ne jouent pas le rôle de structures intermédiaires gérant la défiscalisation.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle en vient à l’amendement CE16 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Il manque à ce texte du courage et de la détermination pour le BTP. Dans le cadre de la rénovation du parc locatif HLM, les départements d’outre-mer ne sont pas éligibles aux crédits de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU). J’ignore la raison de cette situation. L’ANRU intervient outre-mer, mais pas dans la rénovation du parc locatif. C’est d’autant plus paradoxal que ce parc est vieillissant : 40 à 45 % de ses 130 000 logements sont âgés de plus de vingt ans.
Les besoins de rénovation sont très importants, car, outre les travaux classiques, il faut ajouter le coût du désamiantage, très élevé outre-mer et des mises aux normes anti-sismiques. Du coup, les frais de rénovation d’un logement HLM, qui ne dépassent pas 20 000 euros en moyenne en métropole, atteignent 50 000 euros outre-mer. Nous proposons de relever le plafond du crédit d’impôt de 20 000 à 50 000 euros et son taux de 20 à 40 %. Cela permettrait d’accroître les efforts de restauration du patrimoine ancien.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle aborde l’amendement CE10 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet d’accompagner l’économie sociale et solidaire et plus particulièrement les groupements d’employeurs. Outre la résorption du chômage, l’économie sociale et solidaire doit stimuler les prises en charge solidaires. Dans cette optique, nous souhaitons exonérer de TVA les groupements d’employeurs pendant deux ans et étendre le régime bonifié d’exonération des cotisations dues par les employeurs au titre de la législation de la sécurité sociale. Ces deux mesures stimuleront la création de groupements d’employeurs, ce qui améliorera la compétitivité, ces structures servant de relais aux entreprises dans les domaines du recrutement et de la formation.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle examine l’amendement CE11 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Les activités non salariées bénéficient d’une exonération de cotisations sociales pendant vingt-quatre mois. Il convient de saluer cette disposition qui permet de diminuer le coût du travail, mais l’effet de seuil s’avère brutal. Nous souhaitons étendre de deux ans cette mesure pour la porter, à somme constante, à quatre ans en intégrant une progressivité qui lissera l’acquittement des charges sociales. On soutiendra ainsi la pérennité et la résilience des entreprises.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle étudie l’amendement CE21 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Beaucoup d’habitants des territoires et des départements d’outre-mer ont plusieurs emplois – souvent un emploi dans le secteur formel et l’autre dans l’informel ; par ailleurs, l’activité outre-mer varie fortement selon la saison, notamment dans le tourisme. Je souhaitais créer un statut du pluriactif, mais j’ai abandonné provisoirement cette idée afin de ne pas créer de concurrence aux activités classiques ; je propose, en revanche, de mettre en œuvre de manière anticipée, avant le 1er janvier 2018, le compte personnel d’activité (CPA) pour les travailleurs indépendants affiliés aux fonds d’assurance-formation de non-salariés ; ces derniers pourront ainsi conserver leurs droits tout en travaillant six mois dans un hôtel et le reste de l’année dans l’agriculture ou la pêche. Cette étape est très importante dans le chemin devant conduire à l’élaboration d’un statut du pluriactif. En outre, nous proposons d’expérimenter pendant trois ans le déploiement d’une stratégie de pluriactivité, coordonnée entre l’État, la région, les partenaires sociaux, les organismes consulaires et les opérateurs de l’emploi et de la formation, définie au sein d’une commission spécialisée du comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle (CREFOP), contenant des actions précisées par un contrat de plan régional de développement des formations et d’orientation professionnelle (CPRDFOP), et mise en œuvre par la convention régionale pluriannuelle de coordination de l’emploi, de l’orientation et de la formation.
M. Ibrahim Aboubacar. Monsieur le rapporteur, je comprends le bien-fondé du III de votre amendement, mais les dispositions légales actuellement en vigueur interdisent-elles les expérimentations que vous proposez dans les I et II ?
M. le rapporteur pour avis. Il faudra procéder à un moment donné à une codification sociale ; c’est la raison pour laquelle il ne s’agit que d’une première étape. Par ailleurs, la coordination de l’action entre l’État, la région, les partenaires sociaux, les organismes consulaires et les opérateurs de l’emploi et de la formation est indispensable à la réussite de cette stratégie, faute de quoi on ne pourra pas cibler les besoins et accompagner les individus. Ces derniers doivent pouvoir accéder à des plateformes de dialogue. Au cours des trois années d’expérimentation, on déploiera des conventions visant à mieux prendre en compte les besoins de financement complémentaires, notamment des personnes non-salariées. Ce processus devra déboucher sur des codifications sociales pour que chacun puisse assez facilement identifier son travail informel, lié à la pluriactivité, et son activité normée classique, cela se révélant important pour les pensions de retraite. C’est la raison pour laquelle nous avons préféré utiliser, dans un premier temps, le support du compte personnel d’activité. La question de la pluriactivité ne concerne pas seulement l’outre-mer : beaucoup de personnes travaillent en métropole dans une start-up tout en étant fonctionnaire ou artiste. Ou conduisent une voiture…
M. Ibrahim Aboubacar. Mais de telles dispositions, non normatives, n’entrent-elles pas dans le périmètre des alinéas 6 et 7 de l’article 4 du présent projet de loi, relatifs aux instruments de mise en œuvre de la convergence ?
M. le rapporteur pour avis. Il importe de lier les plans de convergence aux stratégies de convergence et aux expérimentations.
M. Ibrahim Aboubacar. L’alinéa 6 dispose que les plans de convergence regrouperont l’ensemble des actions opérationnelles en matière d’emploi, de santé et de jeunesse ; l’alinéa suivant a trait aux demandes d’habilitation et d’expérimentation, ainsi qu’aux propositions de modification. Il va nous falloir arbitrer entre le cadre fixé par la loi et l’initiative laissée aux concepteurs des plans de convergence.
M. le rapporteur pour avis. Ne nous faisons pas d’illusions : lorsque le partenariat se mettra en place dans un territoire, tous les acteurs seront réunis, mais ils auront besoin de moyens financiers, d’outils réglementaires et d’instruments fiscaux pour agir.
Si la Martinique ou la Guadeloupe ont besoin d’une modification d’un texte législatif pour mettre en œuvre leur politique en matière de pluriactivité, il faudra changer la loi ou leur octroyer une habilitation pour élaborer un règlement.
Ce texte a l’avantage de tracer une perspective, mais il ne crée pas les outils techniques permettant de mettre en œuvre le plan de convergence. Il conviendra de les inventer et de se montrer innovant, ce qui nécessitera de mobiliser les énergies et les intelligences locales. J’espère que le Parlement ne bridera pas les dynamiques locales. On s’inscrira dans une démarche de créativité permanente pendant dix à vingt ans, ce qui représente une longue période ! C’est une sorte de logiciel d’intelligence locale… Ce texte ouvre la possibilité de respirer, mais si personne ne saisit cette opportunité, il restera dans un tiroir.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle est saisie de l’amendement CE12 du rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Cet amendement étend, pour les départements et les territoires d’outre-mer, le périmètre des dépenses éligibles au titre de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle. Il y intègre la rémunération des salariés assurant le tutorat des étudiants ou des apprentis dans le cadre d’une convention signée avec un établissement de formation, ainsi que les éventuels compléments de salaire qui leur sont versés à ce titre.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle en vient à l’amendement CE7 de M. Jean-Paul Tuaiva, repris par le rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Je reprends l’amendement de M. Jean-Paul Tuaiva, car je suis très sensible à son objet. En effet, il nous semble que la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna devraient bénéficier de la contribution au service public de l’électricité (CSPE). Ce sujet se trouve au cœur du débat sur l’égalité.
On me dira que l’article 74 de la Constitution empêche ces territoires de bénéficier de cette solidarité, mais la question des limites de l’égalité est éminemment politique. Chaque partie de la République a droit à un minimum de solidarité, particulièrement lorsqu’il s’agit de questions aussi vitales que l’eau, l’accès à l’électricité, l’air et la géopolitique des océans ; on ne peut pas se gargariser de posséder le deuxième territoire maritime mondial – nos zones économiques exclusives atteignent 11 millions de kilomètres carrés, et seuls les États-Unis en possèdent de plus étendues – grâce à la Polynésie, à
Wallis-et-Futuna et à la Nouvelle-Calédonie, et refuser de reconnaître que l’on doit l’accès à une électricité peu coûteuse à la Polynésie. La CSPE doit donc s’appliquer à ces territoires. Lors du débat qui a précédé le vote de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, le Gouvernement s’était engagé à remettre avant le 31 décembre 2015 un rapport portant sur les modalités d’application de la CSPE. Éti rapo-tala ? Où est-il, ce rapport ?
Mme la présidente Frédérique Massat. On a récemment modifié la CSPE, mais son chantier reste ouvert. Nous avons beaucoup de travail à accomplir.
M. le rapporteur pour avis. Madame la présidente, vous êtes en train de dire que vous allez demander au Gouvernement de remettre ce rapport, n’est-ce pas ? Les Polynésiens n’ont toujours pas vu ce document, huit mois après la date prévue de sa publication, alors qu’il concerne un sujet crucial. Une fois qu’il aura été remis, il faudra en discuter pour permettre à ces territoires d’accéder à cette solidarité.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle aborde l’amendement CE6 de M. Jean-Paul Tuaiva, repris par le rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Je reprends également cet amendement, qui prévoit le déploiement d’un plan de développement de valorisation énergétique des déchets dans les départements et les collectivités d’outre-mer à l’horizon de 2020. Ces plans existent déjà, au titre de l’article 73 de la Constitution, aux échelons intercommunal, départemental et régional. Compte tenu de l’importance du sujet pour la Polynésie française, Wallis-et-Futuna et la Nouvelle-Calédonie, il convient d’adopter cette proposition.
M. Ibrahim Aboubacar. La rédaction de l’amendement ne concerne pas uniquement les collectivités au sens de l’article 74 de la Constitution.
M. le rapporteur pour avis. Absolument. Il conviendra de le sous-amender pour circonscrire son champ.
Mme la présidente Frédérique Massat. Vous ne pouvez pas rectifier l’amendement, monsieur le rapporteur pour avis, puisque vous n’en êtes pas l’auteur. Je vous propose de le voter en état et de le retravailler d’ici à la séance publique si la Commission des lois l’adopte.
M. le rapporteur pour avis. Très bien.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle examine l’amendement CE8 de M. Jean-Paul Tuaiva, repris par le rapporteur pour avis.
M. le rapporteur pour avis. Je reprends cet amendement, car j’ai moi-même subi le désagrément que M. Jean-Paul Tuaiva propose de faire disparaître. En effet, les personnes possédant un compte bancaire domicilié outre-mer s’en voient refuser l’usage dans 85 % des cas en métropole – cela concerne notamment les cartes de fidélité ou les financements bancaires. Nous souhaitons qu’un rapport sur le sujet soit rédigé, mais il s’agit surtout d’un sujet non négligeable pour l’égalité réelle. C’est parfaitement inacceptable.
M. Ibrahim Aboubacar. Il m’est arrivé la même mésaventure samedi dernier !
Mme la présidente Frédérique Massat. On pourrait demander au Gouvernement d’insérer dans le texte une disposition plus décisive que la rédaction d’un rapport.
La commission adopte l’amendement.
L’amendement CE5 de M. Jean-Paul Tuaiva n’est pas défendu.
La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, modifiées.
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
(par ordre chronologique)
Union sociale pour l’habitat (USH)
M. Mahieddine Hedli, directeur à l’outre-mer
Fédération des entreprises d’outre-mer (FEDOM)
M. Jean-Pierre Philibert, président
Mme Samia Badat-Karam, secrétaire générale
M. Laurent Renouf, responsable des affaires économiques
Association des chambres de commerce et d’industrie d’Outre-Mer (ACCIOM)
M. Manuel Baudoin, président de la Chambre de commerce et d’industrie de Martinique
M. Éric Koury, président de la Commission Nouvelle Économie de la CCI des Îles de Guadeloupe
M. Jean-Baptiste Tivolle, directeur général
Cabinet de Mme Ericka Bareigts, Ministre des Outre-mer
M. Jean-Bernard Nilam Ribal, directeur de cabinet adjoint
M. Philippe Mouchard, conseiller chef du pôle économique, conseiller auprès de la Ministre chargé des affaires économiques, de la pêche, de l’agriculture et des investissements publics
M. Florent Clouet, conseiller chargé du logement, de la transition énergétique, du développement durable et du transport
Mme Agnès Fontana, sous-directrice des affaires juridiques et institutionnelles
M. Pierre Dupuy, conseiller parlementaire
Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA)
M. François Moutot, directeur général
Mme Valérie Chaumanet, directrice des relations institutionnelles
Autorité de la concurrence
M. Thierry Dahan, vice-président
M. David Viros, chef du service du président
Conseil économique, social et environnemental (CESE)
M. Christian Vernaudon, rapporteur de l’avis sur l’avant-projet de loi de programmation en faveur de l’égalité réelle dans les Outre-mer, adopté par le CESE
M. Philippe Méraud, administrateur de la section de l’aménagement durable des territoires
1 () Dans ce rapport, le terme hexagone s’entend au sens des territoires de la France hexagonale ainsi que de la Corse et de l’ensemble des îles de la côte atlantique et méditerranéenne.
2 () Signalons que cette durée vient d’être ramenée de trois à un an par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016.
3 () Voir le rapport n° 3363 de Mme Erika Bareigts et Daniel Fasquelle sur la mise en application de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer