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Amendements  sur le projet ou la proposition


N
° 4064

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 28 septembre 2016.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LE PROJET DE LOI (n° 4000), APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique,

PAR M. Victorin LUREL,

Député

——

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 11

AUDITION DE MME ÉRICKA BAREIGTS, MINISTRE DES OUTRE-MER, ET DISCUSSION GÉNÉRALE 23

EXAMEN DES ARTICLES 53

TITRE IER – STRATÉGIE EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ RÉELLE OUTRE-MER 54

Article 1er : Affirmation de l’objectif d’égalité réelle 54

Article 2 : Définition des politiques publiques en faveur de l’égalité réelle dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution 56

Article 3 : Définition des politiques publiques en faveur de l’égalité réelle dans les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie 58

Article 3 bis (nouveau) : Affirmation de la continuité territoriale comme priorité de l’action de l’État 60

Article 3 ter (nouveau) : Affirmation d'un objectif de construction de logements 61

TITRE II – DISPOSITIONS EN FAVEUR DE LA CONVERGENCE 61

Chapitre Ier – Instruments de mise en œuvre de la convergence 61

Article 4 : Création de plans de convergence dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution 61

Article 5 : Possibilité de créer des plans de convergence dans les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie 71

Article 5 bis (nouveau) : Création de contrats de convergence 74

Article 6 (art. L. 1111-9 et L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales) : Dérogations au principe d’interdiction des financements croisés et de cumul de subventions entre plusieurs niveaux de collectivité 75

Article 7 (art. L. 2563-7 [nouveau], L. 2564-19, L. 2564-19-1 [nouveau], L. 2573-39, L. 3541-1, L. 3443-3 [nouveau], L. 4434-10 [nouveau], L. 5823-1 [nouveau], L. 5842-9, L. 71-111-3, L. 72-101-3 du code général des collectivités territoriales ; art. L. 212-1 du code des communes de Nouvelle-Calédonie) : Prise en compte des plans de convergence dans les rapports et débats d’orientation budgétaire des collectivités 76

Article 7 bis (nouveau) : Création d’un grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenguées en Guyane 78

Chapitre II – Suivi de la convergence 79

Article 8 (art. 74 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009) : Évaluation des politiques de convergence 79

TITRE III – DISPOSITIONS SOCIALES 85

Article 9 A (nouveau) (art. L. 313-20 du code de la construction et de l’habitation) : Expérimentation de la caution solidaire Visale dans les outre-mer pour les moins de 30 ans bénéficiant d’un logement dans le secteur social 85

Article 9 B (nouveau) (art. L. 114-2 et L. 114-4 du code de la sécurité sociale) : Prestations familiales à Mayotte 86

Article 9 C (nouveau) (art. L. 7528 du code de la sécurité sociale) : Prestation accueil et restauration scolaire 87

Après l’article 9 C 88

Article 9 D (nouveau) (art. L. 26241 à L. 2624-4 [nouveaux] du code du travail) : Représentativité des syndicats locaux 89

Article 9 (art. L. 542-4 du code de l’action sociale et des familles ; art. 2, 7-1 à 7-3 [nouveaux], 10-1 et 10-2 [nouveau] de l’ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l’extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte) : Prestations familiales à Mayotte 92

Article 10 (art. 14 et 23-8 [nouveau] de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte ; art. 64-1 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte) : Régime d’assurance vieillesse à Mayotte 100

Article 10 bis (nouveau) (art. 3, 4 et 7 de la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d’assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon) : Ratification d’ordonnances 103

Article 10 ter (nouveau) : Ratification d’ordonnance 104

Article 10 quater (nouveau) : Couverture maladie universelle complémentaire à Mayotte 104

Article 10 quinquies (nouveau) : Qualité du système de santé outre-mer 106

Article 10 sexies (nouveau) : Protocoles de coopération entre professionnels de santé ultramarins 107

Après l’article 10 sexies 108

Article 10 septies (nouveau) : Pluriactivité professionnelle dans les régions et départements d’outre-mer 110

Article 10 octies (nouveau) (art. 39 de la loi n° 20161088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels) : Pluriactivité et compte personnel d’activité 111

Après l’article 10 octies 112

Article 10 nonies (nouveau) (art. L. 81513 du code de la sécurité sociale) : Récupération sur succession au titre de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) 114

Après l’article 10 nonies 114

Article 10 decies (nouveau) : Rapport sur le lien entre prix et consommation des boissons alcooliques 115

Après l’article 10 decies 119

Article 10 undecies (nouveau) : Rapport sur l’ajustement des plafonds de ressources applicables aux prestations délivrées à Saint-Pierre-et-Miquelon par rapport au niveau des prix et des revenus 120

Après l’article 10 undecies 121

TITRE IV – DISPOSITIONS RELATIVES À LA MOBILITÉ ET À LA CONTINUITÉ TERRITORIALE ET NUMÉRIQUE 124

Article 11 A (nouveau) (art. L. 1 du code des postes et des communications électroniques) : Extension du mécanisme de péréquation tarifaire des lettres 127

Article 11 B (nouveau) (art. L. 1803-1 et L. 1803-7 du code des transports) : Création d’une aide au voyages pour obsèques et d’une aide au transport de corps 128

Article 11 (art. L. 1803-2-1 [nouveau] et 1803-5 du code des transports) : Soutien à la formation en mobilité à Mayotte 130

Article 12 (art. L. 1803-2 et L. 1803-5-1 [nouveau] du code des transports) : Soutien à la formation professionnelle en mobilité des ultramarins 137

Après l’article 12 139

Article 12 bis (nouveau) (art. L. 1803-15 du code des transports) : Continuité territoriale de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité 139

Après l’article 12 bis 140

Article 12 ter (nouveau) : Rapport sur la création de mécanismes d’interconnexion dans la Caraïbe et l’océan Indien 140

Article 12 quater (nouveau) : Rapport sur l’accès des consommateurs ultramarins au commerce électronique 141

Après l’article 12 quater 141

Article 12 quinquies (nouveau) : Rapport sur le processus de formation des prix des billets d’avion entre les outre-mer et l’hexagone 143

TITRE V (nouveau) – DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉCOLE ET À LA FORMATION 145

Avant l’article 13 A 145

Article 13 A (nouveau) (art. L. 3232-7-1 [nouveau] du code de la santé publique) : Organisation d’une sensibilisation sur les questions nutritionnelles à l’intention des élèves du primaire 147

Article 13 B (nouveau) (art. L. 3323-2 et L. 3335-2 du code de la santé publique) : Interdiction de tout affichage publicitaire concernant les boissons alcooliques à proximité d’un établissement scolaire 148

Article 13 C (nouveau) (art. 40 de la loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer des communications électroniques) : Financement d’échanges scolaires avec des pays de l’environnement régional des territoires ultramarins 149

Article 13 D (nouveau) : Rapport sur l’aide à la mobilité des étudiants ultramarins 149

Après l’article 13 D 153

Article 13 E (nouveau) : Habilitation du Gouvernement à prendre une ordonnance 153

Article 13 : Conditions d’accès à la validation des acquis de l’expérience 153

Article 13 bis (nouveau) : Possibilité d’expérimenter l’école obligatoire entre trois et dix-huit ans 155

Article 13 ter (nouveau) : Possibilité d’expérimenter l’extension du périmètre des dépenses éligibles au titre de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle 156

Article 13 quater (nouveau) : Possibilité d’expérimenter la réduction de la durée minimale du contrat de professionnalisation 157

Article 13 quinquies (nouveau) : Rapport sur l’évaluation de la formation aux métiers de la mer 157

TITRE VI (nouveau) – DISPOSITIONS ÉCONOMIQUES, COMMERCIALES ET BANCAIRES 159

Article 14 (art. L. 410-5 du code de commerce) : Intégration des transporteurs maritimes et des transitaires dans les négociations de modération des prix 159

Article 14 bis (nouveau) (art. L. 232-24 du code de commerce) : Information obligatoire du représentant de l’État dans le département en cas de non-respect de l’obligation de dépôt des comptes 160

Article 14 ter (nouveau) (art. L. 410-6 [nouveau] du code de commerce) : Obligation pour les grandes et moyennes surfaces à Mayotte et en Guyane de négocier un tarif de gros à l’égard des petites surfaces de détail 163

Article 14 quater (nouveau) (art. L. 441-6 et L. 443-1 du code de commerce) : Clarification des délais de paiement applicables en outre-mer 165

Article 14 quinquies (nouveau) (art. L. 450-3-2 du code de commerce) : Possibilité de faire usage d’une identité d’emprunt pour détecter l’existence d’un accord d’exclusivité d’importation 167

Article 15 (art. L. 752-6-1 du code de commerce) : Caractère suspensif de la saisine de l’Autorité de la concurrence par les commissions départementales et territoriales d’aménagement commercial 169

Article 16 (nouveau) (art. L. 743-2-2 du code monétaire et financier) : Alignement progressif des tarifs pratiqués par les banques locales de Nouvelle-Calédonie sur les tarifs moyens pratiqués par les banques en métropole 170

Article 17 (nouveau) (art. 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses mesures d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations) : Discrimination en raison de la domiciliation bancaire 171

Après l’article 17 172

Article 18 (nouveau) (art. 24 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer) : Élargissement du dispositif de l’aide au fret 173

Article 19 (nouveau) : Expérimentation d’un Small Business Act outre-mer 174

TITRE VII (nouveau) – DISPOSITIONS RELATIVES À LA CULTURE 174

Article 20 (nouveau) (art. 1er du décret du 2 thermidor an II) : Délivrance de livrets de famille bilingues par les mairies 175

Article 21 (nouveau) (art. 43-11 et 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication) : Valorisation des outre-mer par les chaînes de radio et de télévision du service public 176

TITRE VIII (nouveau) – DISPOSITIONS RELATIVES AU DÉVELOPPEMENT DURABLE 176

Article 22 (nouveau) (art. 46 de la loi n° 2009-967 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement) : Atteindre les objectifs nationaux en matière de gestion des déchets 176

Après l’article 22 177

Article 23 (nouveau) : Rapport sur la qualité des réseaux publics d’électricité 178

Article 24 (nouveau) : Rapport sur l’extension de la contribution au service public de l’électricité en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française 178

TITRE IX (nouveau) – DISPOSITIONS RELATIVES À LA FONCTION PUBLIQUE 179

Article 25 (nouveau) (art. 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État) : Prise en compte des intérêts des fonctionnaires ultramarins dans les mouvements de personnel 179

Article 26 (nouveau) : Expérimentation d’une direction des ressources humaines unique pour les fonctionnaires de l’État dans les petites collectivités 180

Article 27 (nouveau) : Expérimentation de formations communes aux trois fonctions publiques dans les petites collectivités 180

Article 28 (nouveau) : Rapport sur les aides accordées aux fonctionnaires ultramarins en cas de changement de résidence administrative 181

TITRE X (nouveau) – DISPOSITIONS JURIDIQUES, INSTITUTIONNELLES ET JUDICIAIRES 181

Avant l’article 29 182

Article 29 (nouveau) (art. L. 42511 et L. 4433-7 à L. 4433-11 du code général des collectivités territoriales) : Extension du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution 182

Article 30 (nouveau) (art. L. 621-12 du code minier) : Encadrement de la détention de matériel minier en Guyane 184

Article 31 (nouveau) (art. 6 decies de l’ordonnance n° 581100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires) : Délégations parlementaires aux outre-mer 185

Article 32 (nouveau) (art. 17 de la loi n° 89462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs) : Zones tendues outre-mer 186

Article 33 (nouveau) (art. 135 de la loi n° 2014366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové) : Report de trois ans du délai de conversion des plans d’occupation des sols en plans locaux d’urbanisme dans les communes d’outre-mer 187

Article 34 (nouveau) : Expérimentation d’un dispositif d’attraction des talents 188

Après l’article 34 188

TITRE XI (nouveau) – DISPOSITIONS RELATIVES AUX DROITS DES FEMMES 189

Article 35 (nouveau) : Expérimentation d’observatoires des violences faites aux femmes 190

Après l’article 35 190

TITRE XII (nouveau) – DISPOSITIONS DE NATURE FISCALE 191

Article 36 (nouveau) (art. L. 272-1 du code forestier) : Exonération des collectivités territoriales de Guyane des frais de garderie et d’administration des forêts 191

Article 37 (nouveau) (3° du III de l’art. 44 quaterdecies du code général des impôts) : Ajout du secteur du bâtiment et des travaux publics dans la liste des secteurs prioritaires bénéficiant d’exonérations bonifiées dans les zones franches d’activités en Guadeloupe, en Martinique, ou à La Réunion 195

Article 38 (nouveau) (art. 199 undecies A du code général des impôts) : Réduction d’impôt au titre des travaux de réhabilitation portant sur des logements achevés depuis plus de vingt ans dans les départements d’outre-mer 197

Article 39 (nouveau) (art. 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W du code général des impôts) : Suppression de la distinction entre investissement initial et investissement de renouvellement pour bénéficier de diverses réductions d’impôts au titre d’investissements productifs outre-mer 198

Article 40 (nouveau) (VII de l’art. 199 undecies C du code général des impôts) : Suppression de l’agrément préalable pour bénéficier de la réduction d’impôt sur le revenu fléchée vers le logement social dans les collectivités d’outre-mer 205

Article 41 (nouveau) (art. 199 terdecies-0 A du code général des impôts) : Élargissement de la souscription du Fonds d’investissement de proximité outre-mer à l’ensemble des contribuables français 207

Article 42 (nouveau) (art. 244 quater W du code général des impôts) : Généralisation du crédit d’impôt pour financer des opérations dans le logement intermédiaire dans les départements d’outre-mer 209

Article 43 (nouveau) (art. 244 quater W du code général des impôts) : Suppression de l’agrément fiscal préalable pour les programmes d’accession à la propriété sociale dans les départements d’outre-mer 210

Article 44 (nouveau) (art. 244 quater X du code général des impôts) : Élargissement du bénéfice du crédit d’impôt au titre des investissements dans le logement social outre-mer en cas de recours à un intermédiaire entre l’investisseur et l’occupant 212

Article 45 (nouveau) (art. 244 quater X du code général des impôts) : Extension du champ d’application et augmentation du crédit d’impôt réalisé au titre de la rénovation des logements sociaux outre-mer 214

Après l’article 45 215

Article 46 (nouveau) (art. 293 B du code général des impôts) : Relèvement du seuil de chiffre d’affaires des microentreprises en deçà duquel est ouvert le bénéfice d’une franchise de taxe sur la valeur ajoutée 216

Après l’article 46 217

Article 47 (nouveau) (art. 1519 J et 1599 quinquies C du code général des impôts) : Redevance communale et régionale géothermique 218

Article 48 (nouveau) (art. 1649 decies du code général des impôts) : Établissement du cadastre en Guyane 220

Article 49 (nouveau) (art. 37 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer) : Taux supplémentaire d’octroi de mer régional 221

Article 50 (nouveau) (art. 44 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer) : Réduction des frais d’assiette et de recouvrement de l’octroi de mer 223

Article 51 (nouveau) : Rapport sur la rationalisation du dispositif de zones franches outre-mer 224

TITRE XIII (nouveau) – DISPOSITIONS RELATIVES À LA STATISTIQUE ET À LA COLLECTE DE DONNÉES 226

Article 52 (nouveau) : Extension des enquêtes statistiques réalisées par l’État aux collectivités d’outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie 226

Après l’article 52 227

Article 53 (nouveau) : Rapport sur les méthodes de calcul du seuil de pauvreté 229

Article 54 (nouveau) : Rapport sur l’intégration du PIB des collectivités d’outre-mer dans la comptabilité nationale 230

TABLEAU COMPARATIF 233

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 375

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 391

« L’égalité ne souffre pas de rester abstraite […]. Il n’y a pas de nationalité maigre. »  (1)

Aimé Césaire.

Mesdames, Messieurs,

La célébration du soixante-dixième anniversaire de la loi de départementalisation du 19 mars 1946 (2), qui faisait des quatre « vieilles colonies » de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane et de La Réunion des départements français, a été l’occasion de rappeler que la quête d’égalité entre tous les Français était une longue marche, toujours d’actualité.

La loi de départementalisation constituait en effet l’aboutissement de revendications portées par les représentants des Antilles, de Guyane et de La Réunion dès la seconde moitié du XIXe siècle. C’est au sortir de la Seconde Guerre mondiale que des représentants de ces quatre territoires – Aimé Césaire, Léopold Bissol, Gaston Monnerville et Raymond Vergès – déposèrent trois propositions de loi visant à en faire des départements français. Examinées par l’Assemblée nationale constituante, les demandes des quatre territoires réunies en un texte unique ont été adoptées à l’unanimité.

La loi du 19 mars 1946, puis l’article 73 de la Constitution du 27 octobre 1946 qui disposait que le régime législatif de ces nouveaux départements était identique à celui des autres, ont ainsi consacré leur assimilation complète à l’Hexagone et leur pleine appartenance à la République.

Un siècle après Victor Schœlcher et l’abolition de l’esclavage, ce changement statutaire était alors perçu comme une accession à l’égalité institutionnelle et juridique, mais aussi comme la promesse d’une égalité économique et sociale. Pourtant, soixante-dix ans après cette étape fondamentale, et malgré des évolutions importantes dans les domaines institutionnels et juridiques, il reste beaucoup à accomplir pour que cette promesse soit honorée.

Si la généralisation progressive des droits sociaux durant les Trente Glorieuses, complétée par une vague de réformes à la fin du XXe siècle, et les efforts fournis en matière d’infrastructures et de services collectifs ont permis d’avancer sur le chemin de l’égalité, les écarts de niveau de vie constatés entre les outre-mer et l’Hexagone demeurent considérables, au-delà de l’acceptable, et se doublent d’inégalités importantes au sein de chacun des territoires ultra-marins.

Les niveaux de richesse par habitant de ces territoires sont ainsi, si l’on excepte le cas particulier de Saint-Barthélemy, systématiquement inférieurs au PIB national par habitant : l’écart atteint 31 % pour la Martinique, 36 % pour La Réunion, 38 % pour la Guadeloupe, 49 % pour la Polynésie française, 64 % pour Wallis-et-Futuna, 73 % pour Mayotte.

Le taux de pauvreté, qui indique le pourcentage de ménages dont le niveau de vie est inférieur à 60 % du revenu médian local, s’établit pour sa part à 17 % à La Réunion et en Guadeloupe, 20 % en Martinique et 27,6 % à Mayotte – contre 13 % en France hexagonale. Ces chiffres ne reflètent pas, en outre, la réalité exacte de la pauvreté puisque l’INSEE les établit dans les territoires ultra-marins en référence au revenu médian local, et non au revenu médian national. Rapporté au revenu médian national, le taux de pauvreté atteindrait 49 % à La Réunion et 92 % à Mayotte.

De nombreux autres indicateurs sont révélateurs des écarts de développement entre les outre-mer et la France hexagonale. Le taux de chômage, qui s’établit à 10,5 % au niveau national, atteint 21 % de la population active en Guyane, 25 % en Guadeloupe et 28 % à La Réunion. En matière d’éducation, un jeune sur dix de moins de dix-huit ans est en difficulté de lecture au niveau national alors que ce taux varie entre 27,7 % à La Réunion et 74,6 % à Mayotte. La mortalité infantile frappe 3,6 enfants sur 1 000 au niveau national, contre 4,5 en Nouvelle-Calédonie, 8,3 en Guadeloupe et 16,1 à Mayotte.

Il est tout aussi insupportable que, au sein de chacun des territoires ultra-marins, les inégalités soient plus fortes qu’ailleurs sur le territoire national. Le rapport inter-décile, qui mesure combien de fois les 10 % les plus riches reçoivent plus que les 10 % les plus pauvres, est de 5,4 à La Réunion, 6,7 en Guadeloupe et 10,7 en Guyane contre 3,6 en France hexagonale. Le coefficient de Gini, utilisé par les Nations Unies pour mesurer les inégalités au sein d’une population – et où 0 correspond à une situation d’égalité parfaite et 1 à la configuration la plus inégalitaire possible – se situe à 0,39 à La Réunion et 0,42 en Nouvelle-Calédonie, contre 0,29 dans l’Hexagone.

Ces inégalités constituent un frein puissant à la croissance, a souligné l’économiste Olivier Sudrie dans une étude publiée en 2012 sur les territoires ultra-marins : « elles réduisent l’efficacité des politiques publiques. Elles rongent aussi le corps social en affaiblissant les solidarités et en bridant le développement humain – les pays et les territoires les plus inégalitaires sont aussi ceux où les performances éducatives, sanitaires et sociales sont les plus mauvaises. (3) »

C’est bien le constat d’un modèle économique déficient, qui ne parvient plus à combler les retards et à offrir des perspectives durables de création de richesse, qu’il faut aujourd’hui dresser. La croissance des économies ultra-marines, généralement supérieure à la moyenne nationale dans le dernier quart du XXe siècle, n’a pas réussi à enclencher un cercle vertueux. Le rattrapage a eu lieu, mais ses effets n’ont pas été suffisants. C’est toute une promesse républicaine que la Représentation nationale doit maintenant pleinement accomplir.

Il n’existe ni fatalité, ni malédiction. Riches d’atouts considérables, de par leurs positionnements géographiques, la taille des zones économiques exclusives, leur biodiversité remarquable, les cultures et leurs savoirs, leurs populations métissées qui préfigurent les sociétés de demain, les outre-mer offrent à la France des chances nouvelles dans le monde à venir.

C’est pourquoi il est temps pour notre pays d’entreprendre une démarche volontariste et solidaire, qui tienne compte des spécificités et des intérêts propres de chaque territoire, pour assouvir l’ambition d’une égalité réelle entre tous les Français.

Les outre-mer sont la France ; si elle les néglige, elle se dégrade elle-même. Il n’est pas admissible que, pour leurs populations, le principe d’égalité énoncé dans les textes les plus fondamentaux de notre République – les articles 1er de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 et de la Constitution du 4 octobre 1958 – demeurent un horizon lointain quand il devrait être une réalité tangible.

Le présent projet de loi a précisément pour objet de traduire les promesses d’égalité en réalisations concrètes. Il appelle, de la part du Parlement, une démarche inédite par son ampleur et sa durée.

Dès 2007, le programme du Parti socialiste pour la campagne présidentielle présentait une série de mesures en faveur de « l’égalité économique réelle ». En 2012, alors candidat à l’élection présidentielle, M. François Hollande proposait d’encourager « un nouveau modèle de développement des outre-mer comportant un programme d’investissement et une action prioritaire pour l’emploi et la formation des jeunes (4)» Devenu Président de la République, il a souhaité, le 21 novembre 2014, en réponse à la demande formulée par le président du Conseil représentatif des Français d’outre-mer (CREFOM), qu’une loi soit adoptée pour accélérer la marche des outre-mer vers l’égalité réelle.

De quelle égalité réelle s’agit-il ?

Le chef de l’État a livré une première définition, le 9 mai 2015, en Guadeloupe : « L’égalité ne s’arrête pas simplement à des conditions politiques ou à des conditions sociales mais doit être la capacité de pouvoir s’épanouir, s’accomplir et notamment sur le plan économique. C’est l’égalité réelle. Je vous propose donc de franchir maintenant cette nouvelle étape et d’établir un plan par territoire d’outre-mer en faveur de l’égalité réelle. Une loi sur l’égalité réelle devra en définir les principes. »

C’est pour préparer ce texte que le Président de la République et le Premier ministre, M. Manuel Valls, ont confié à votre rapporteur, le 17 juin 2015, une mission de préfiguration en contribuant notamment à donner « un contenu à l’égalité réelle et aux indicateurs permettant de l’objectiver », en cernant « le champ des plans territoriaux devant permettre de l’atteindre en préservant le caractère concerté et adapté à chaque territoire de la démarche d’élaboration de ces plans » et en définissant « les modalités d’ajustement de la trajectoire proposée sur la durée » (5).

Au terme de plusieurs mois de travaux, l’audition de plus de soixante personnes et une très large concertation des élus ainsi que des forces économiques et sociales ultramarines, ce rapport a été remis au Premier ministre le 16 mars 2016. Il met l’accent sur la nécessité d’inventer un nouveau modèle de développement pour les outre-mer, localement débattu et décidé, fondé sur une croissance socialement plus inclusive et plus créatrice de valeur et d’emplois. Il définit l’égalité réelle, analyse les causes des écarts et formule 35 recommandations, déclinées en 23 axes de travail et 75 propositions pour accompagner la convergence réelle des outre-mer vers la moyenne nationale.

Le rapport propose en particulier de définir des doctrines de développement à vingt-cinq ans fondées sur une vision stratégique et mises en application par des plans de convergence propres à chaque territoire.

Capitalisant sur l’expérience acquise par les territoires ultramarins dans les différents exercices de programmation pluriannuelle, mais également sur d’autres expériences nationales ou internationales, ces plans de convergence devraient mettre l’accent sur :

– les infrastructures de base, notamment dans le domaine des transports, de l’énergie et de l’assainissement ;

– l’alignement de la performance des politiques publiques menées dans les outre-mer par rapport à l’hexagone, notamment en matière de prévention, d’éducation à la santé et de prévention de l’illettrisme ;

– la réduction des inégalités internes, qui nuisent au développement ;

– la conception et la mise en œuvre de stratégies de développement économique, d’innovation et d’emploi spécifiques à chaque territoire, permettant la convergence du PIB par habitant et des taux de chômage à travers de nouveaux relais de croissance durable.

Les 23 axes de travail du « rapport Lurel »

1. Établir une égalité sociale des droits ;

2. Inscrire la recherche de l’égalité réelle dans un monde en mutation ;

3. Faire rayonner les outre-mer et les rendre plus attractifs aux investisseurs ;

4. S’adapter à des contextes institutionnels spécifiques ;

5. Définir une « vision stratégique préalable » ;

6. Décliner des plans de convergence dans des engagements contractualisés ;

7. Inscrire la marche vers l’égalité réelle dans un calendrier raisonnable et la mesurer avec des indicateurs pertinents ;

8. Évaluer la convergence avec des outils statistiques modernisés ;

9. Proposer nationalement et localement les efforts sociaux, budgétaires et fiscaux en faveur de la réduction des inégalités ;

10. Mettre à niveau des infrastructures de base ;

11. Redéfinir les politiques publiques en faveur de l’emploi et de l’insertion professionnelle ;

12. Poursuivre la lutte contre la vie chère ;

13. Donner du pouvoir d’achat aux plus précaires ;

14. Décréter l’état d’urgence sociale et conduire un plan d’actions ;

15. Relancer la création de valeur et d’emploi ;

16. Redonner du souffle aux TPE/PME ;

17. Mettre l’épargne et les services financiers au service de la production et de l’investissement local ;

18. Aider les classes populaires et moyennes à épargner et à investir davantage ;

19. Investir massivement dans la recherche et le développement ;

20. Optimiser la gestion et la maîtrise du foncier par l’État et les collectivités ;

21. Solenniser l’objectif de convergence vers l’égalité réelle dans une loi ;

22. S’assurer que les moyens budgétaires et financiers prévus soient réellement mobilisés ;

23. Mettre en place un dispositif de suivi des plans de convergence.

Le sens de ces stratégies de convergence n’est donc pas de plaquer sur des populations et des territoires différents un modèle de développement uniforme, mais bien de mettre en place des actions adaptées à chaque territoire, y compris en tenant compte de la grande diversité en leur sein.

Ainsi que l’a souligné le Conseil économique, social et environnemental dans son avis sur l’avant-projet de loi, il n’y a rien de plus différent « qu’un habitant des villages amérindiens de la forêt équatoriale guyanaise et un ingénieur travaillant sur la base spatiale de Kourou ou qu’un agriculteur-pêcheur vivant en autosubsistance sur sa terre, dans son logement dans une vallée des Marquises en Polynésie française et un chômeur vivant dans un quartier "bidonville" de Papeete ou qu’un habitant d’un village coutumier des îles Loyauté et un chômeur de la banlieue de Nouméa (6)»

Ces plans de convergence requerront un effort financier des pouvoirs publics à la hauteur de l’ambition qui les commande. C’est le rôle de la solidarité nationale.

Le rapport préconise enfin la mise en place d’un dispositif de suivi rigoureux. Il rappelle la grande inégalité statistique dans laquelle se trouvent les outre-mer par rapport à l’hexagone, qui ne permet pas de disposer d’indicateurs pertinents, pourtant indispensables à la conception de politiques publiques efficaces. Il recommande donc de renforcer les moyens de la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer (CNEPEOM), créée par la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, et de lui confier cette mission de suivi des stratégies de convergence.

En définissant les fondements, la méthodologie et les outils pour concrétiser l’égalité réelle entre les outre-mer et l’hexagone, ce rapport a permis de prolonger les réflexions engagées par le CREFOM et de les inscrire à l’agenda gouvernemental. Le ministère des outre-mer et le secrétariat d’État à l’Égalité réelle ont initié une campagne participative d’ampleur inédite grâce à un portail Internet dédié. Entre le 3 août et le 9 septembre 2016, les internautes ont pu prendre part à cette consultation pour proposer leur définition de l’égalité réelle et les indicateurs ou actions à retenir pour honorer cette promesse.

S’il se situe donc dans le prolongement d’un long processus de réflexion et de concertation, le présent projet de loi n’est cependant pas un aboutissement. L’égalité réelle ne se décrète pas : elle se construit. Ce texte n’est que la première pierre, fondamentale, d’une stratégie qui se déploiera sur une génération, pour que les Ultramarins qui naissent aujourd’hui bénéficient des mêmes opportunités que leurs concitoyens de l’Hexagone. Ainsi que l’a indiqué la ministre des outre-mer, Mme Éricka Bareigts, lors de son audition par la commission des Lois, le 20 septembre dernier : « Voilà ce à quoi nous devons nous atteler maintenant : ouvrir des voies nouvelles. »

Votre rapporteur est convaincu que l’étape qui pourrait être franchie grâce à l’adoption de ce projet de loi rivalisera d’importance avec celle accomplie par nos prédécesseurs, il y a plus de soixante-dix ans, lors de l’adoption de la loi de départementalisation.

*

* *

Les amendements adoptés par la commission des Lois lors de ses réunions des 27 et 28 septembre 2016 ont pour finalité de renforcer la normativité du texte et d’accroître son envergure en même temps que son ambition. Ce n’est pas un hasard si, de quatre titres à l’origine, il s’est enrichi pour en compter désormais treize afin de prendre en compte l’ensemble des problématiques posées par l’objectif d’égalité réelle.

C’est ce que suppose la mise en œuvre complète, intégrale et absolue, de cette démarche d’égalité réelle que recommandait votre rapporteur au Premier ministre dans ses travaux.

Le projet de loi initial et les principaux apports de la Commission sont présentés ci-après.

● Le titre Ier du projet de loi pose les bases d’une stratégie globale destinée à bâtir un nouveau modèle économique et social.

L’article 1er institue solennellement l’objectif d’égalité réelle comme priorité de la Nation. Il définit les objectifs des politiques publiques devant être mises en œuvre pour parvenir à cet objectif : la résorption des écarts de niveau de développement en matière économique, sociale, environnementale mais aussi d’accès aux services publics et à la culture.

À l’initiative de votre rapporteur, votre Commission a adopté un amendement de réécriture globale de cet article pour reconnaître aux populations des outre-mer le droit d’adopter un modèle propre de développement durable et rappeler notamment la nécessité d’accélérer les efforts d’équipement, de favoriser l’inclusion des territoires d’outre-mer dans leur environnement régional et de lutter contre toutes les formes de discriminations.

L’article 2 concerne les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution. Il précise l’importance d’adopter une démarche de convergence adaptée à chacun des territoires pour tenir compte, selon la même formulation que celle de l’article 73, « des caractéristiques et des contraintes particulières des collectivités » concernées. Il précise également que la définition de ces politiques publiques fera l’objet d’une concertation entre elles et l’État.

L’article 3 concerne les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie. Il comporte des dispositions analogues à celles de l’article 2 en soulignant la nécessité d’adapter les politiques publiques conduites aux spécificités des collectivités concernées.

Votre Commission a adopté des amendements visant à prendre en compte les intérêts propres de ces collectivités et à prévoir, comme pour l’article 2, la possibilité de recourir aux expérimentations prévues par les articles 37-1 et 72 de la Constitution et d’adaptations prévues par son article 74-1.

L’article 3 bis, introduit par la Commission, vise à inscrire dans la loi que le principe de continuité territoriale constitue un enjeu de souveraineté et une priorité de l’action de l’État.

L’article 3 ter inscrit dans la loi, à l’initiative de votre rapporteur, un objectif de construction de 150 000 logements dans les territoires d’outre-mer.

● Le titre II est consacré aux instruments de convergence visant à mettre en œuvre les objectifs définis par le titre Ier.

L’article 4 prévoit la création de nouveaux instruments de planification pluriannuels à la disposition de l’État et des collectivités de l’article 73 : les plans de convergence. Conclus pour des durées inédites par leur ampleur, dix à vingt ans, ils auront pour objectif, selon l’étude d’impact du projet de loi, de « sortir d’une logique de planification sectorielle de moyen terme pour adopter une perspective transverse de long terme. »

Votre Commission a adopté plusieurs amendements pour compléter le contenu de ces plans : ils devront notamment comprendre, en plus d’un diagnostic économique, social, financier et environnemental, un diagnostic portant sur les inégalités de revenus, de patrimoines, les discriminations et les inégalités entre les femmes et les hommes, des actions opérationnelles en matière de lutte contre l’illettrisme ainsi qu’un volet relatif aux contrats de convergence. Cet article prévoit désormais que les plans de convergence devront être conclus dans les douze mois suivant la promulgation de la loi et au plus tard le 1er juillet 2018. Il prévoit également que les autres documents de planification existants devront être rendus compatibles avec ces plans, afin d’assurer la primauté de ces derniers. Un amendement de votre rapporteur exclut enfin l’ensemble des établissements publics locaux de la signature de ces plans, à l’exception des établissements publics de coopération intercommunale.

L’article 5 offre la possibilité aux collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie de conclure des plans de convergence sur le modèle de ceux de l’article 4. Plusieurs amendements adoptés par votre Commission visent à préciser le contenu des plans de convergence que pourrait être amenée à signer la Nouvelle-Calédonie.

Votre rapporteur a fait adopter un article 5 bis qui crée la faculté de signer des contrats de convergence pour mettre en œuvre les plans de convergence. Conclus pour des durées plus courtes, six années au maximum, ces contrats pourront être constitués, pour tout ou partie, des contrats de plan État-régions.

L’article 6 prévoit que les actions inscrites dans les plans de convergence puissent déroger aux principes d’interdiction de financements croisés par plusieurs collectivités et de cumul de subventions entre plusieurs niveaux de collectivité.

L’article 7 instaure une présentation de l’état d’avancement des plans de convergence dans les rapports sur les orientations budgétaires des différentes collectivités ultramarines concernées ou, dans les collectivités n’étant pas soumises à l’obligation de présenter un rapport, l’organisation d’un débat.

Votre Commission a adopté un nouvel article 7 bis, à l’initiative de Mme Chantal Berthelot, qui crée un grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenguées. Il répond ainsi à la préconisation du rapport de nos collègues parlementaires Aline Archimbaud, sénatrice, et Marie-Anne Chapdelaine, députée, consacré au suicide des jeunes Amérindiens en Guyane, rendu au Premier ministre et à la ministre des outre-mer en décembre 2015.

L’article 8 confie à la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer (CNEPEOM) le soin d’évaluer les politiques de convergence et précise les indicateurs de richesse pris en compte pour procéder à cette évaluation.

Votre Commission a adopté plusieurs amendements visant à renforcer les politiques d’évaluation par la publication de rapports annuels de la part de cette instance, par la possibilité de bénéficier du concours des chambres régionales des comptes pour le suivi de la programmation financière et par la prise en compte de quatre indicateurs prioritaires – PIB par habitant, taux de chômage, écarts de revenus par habitant, seuil de pauvreté – pour mesurer les trajectoires de convergence en complément des dix nouveaux indicateurs de richesse prévus par la loi n° 2015-411 du 13 avril 2015.

● Le titre III est consacré aux dispositions sociales.

Votre Commission a adopté plusieurs articles additionnels visant à expérimenter l’application de la « caution solidaire Visale » dans les outre-mer (article 9 A), à mieux évaluer les impacts du renforcement du système de retraites à Mayotte (article 9 B), à assurer la prise en charge de la prestation d’accueil et de restauration scolaire par les caisses d’allocation familiale d’outre-mer (article 9 C) et à fixer les conditions dans lesquelles les organisations syndicales ultramarines sont considérées comme représentatives pour la négociation d’accords interprofessionnels (article 9 D).

L’article 9 prévoit, conformément à l’engagement contenu dans le document stratégique Mayotte 2025, d’accélérer le rythme d’augmentation des allocations familiales à Mayotte pour atteindre dès 2021 des montants similaires à ceux en vigueur dans les autres départements français. Dans le même objectif d’égalité, il procède à la mise en place du complément familial et du montant majoré du complément familial à Mayotte dans des modalités de droit commun.

L’article 10 réforme le système de retraite à Mayotte en procédant à trois évolutions complémentaires : en instituant un dispositif spécifique de garantie des pensions des salariés du secteur privé afin de permettre aux retraités ayant cotisé de manière significative au titre de la retraite de disposer d’une pension supérieure à l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), en prévoyant la mise en œuvre des systèmes de retraite complémentaire obligatoire de droit commun et, enfin, en clarifiant les modalités de versement aux pensionnés du secteur public.

Votre Commission a ensuite adopté plusieurs amendements portant articles additionnels visant à ratifier trois ordonnances relatives à Mayotte et Saint-Pierre et Miquelon (article 10 bis et article 10 ter), inclure un volet relatif à la mise en place progressive de la couverture maladie universelle complémentaire dans la stratégie nationale de santé déclinée à Mayotte (article 10 quater), prévoir que les plans de convergence intègrent un volet en faveur des établissements hospitaliers (article 10 quinquies), favoriser la négociation et la conclusion de protocoles de coopération entre professionnels de santé (article 10 sexies), encourager la pluriactivité (article 10 septies), anticiper l’entrée en vigueur du compte personnel d’activité pour certains travailleurs indépendants (article 10 octies) et porter de 39 000 euros à 100 000 euros le seuil au-delà duquel il est procédé à une récupération sur succession au titre de l’ASPA (article 9 nonies) afin de permettre une revalorisation des petites retraites.

● Votre Commission a créé un titre IV consacré à la mobilité et à la continuité territoriale et numérique et adopté deux amendement du Gouvernement visant, d’une part, à renforcer le mécanisme de péréquation tarifaire des lettres en prévoyant une extension de son champ d’application (article 11 A) et, d’autre part, à créer deux nouvelles aides de continuité territoriale : une aide au voyage pour obsèques et une aide au transport de corps outre-mer (article 11 B).

L’article 11 crée un dispositif « cadres avenir » à Mayotte, s’inspirant du dispositif qui a connu un grand succès en Nouvelle-Calédonie depuis 2005 et qui permet à de nombreux étudiants d’accéder à des formations puis à des emplois de haut niveau dans l’administration publique et le secteur privé. Il inclut la mise en place d’un volet spécial au sein du passeport pour la mobilité des études avec, en plus de l’aide au financement du déplacement vers le lieu de formation, certaines aides pour les stagiaires bénéficiaires du passeport pour la mobilité de la formation professionnelle : une allocation d’installation, une aide mensuelle et une aide à l’insertion professionnelle dans le département de Mayotte.

L’article 12 définit un nouveau dispositif de continuité territoriale financé par le fonds de continuité territoriale géré par l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (LADOM) : une aide nouvelle pour accompagner les élèves et les étudiants qui se trouvent dans l’obligation d’effectuer un stage à l’extérieur de la collectivité de leur établissement d’enseignement.

● Votre Commission a créé un titre V consacré à l’école et à la formation.

L’article 13 étend la possibilité d’intégrer les travailleurs informels dans une démarche de validation des acquis de l’expérience en contrepartie de leur insertion dans un parcours de formalisation progressive de leurs activités.

Votre Commission a notamment adopté un amendement de votre rapporteur invitant le Gouvernement à rendre, à titre expérimental, la scolarité obligatoire de trois à dix-huit ans en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à Mayotte et à La Réunion (article 13 bis).

● Votre Commission a créé un titre VI relatif aux dispositions économiques, commerciales et bancaires.

L’article 14 vise à inclure les entreprises de transports maritimes et les transitaires dans la négociation des accords annuels de modération des prix prévus outre-mer.

Votre Commission a notamment adopté un amendement de lutte contre la vie chère introduisant une obligation, à l’égard des grandes et moyennes surfaces, de négocier un tarif professionnel pour leur activité de gros, lequel serait – à défaut – fixé par un arrêté préfectoral, pris après consultation des parties concernées afin de lutter contre le coût de la vie (article 14 ter), ainsi qu’un amendement visant à rendre opérationnel l’article 20 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relatif au décompte des délais de paiement en outre-mer (article 14 quater).

L’article 15 permet de suspendre la décision des commissions départementales d’aménagement commercial (CDAC) à la remise de l’avis de l’Autorité de la concurrence dans le cas d’une demande d’autorisation pour un projet d’exploitation commerciale portant à plus de 50 % la part de marché de l’entreprise sollicitant l’autorisation.

Votre Commission a également adopté un amendement visant à créer une aide au fret (article 18).

● Votre Commission a créé un titre VII consacré à la culture.

Ce titre comprend deux articles visant, d’une part, à lever les verrous juridiques qui s’opposent à la distribution par les municipalités de livrets de famille bilingues (article 20) et, d’autre part, de rappeler au secteur public de la communication audiovisuelle l’obligation de prendre en compte la valorisation des outre-mer dans le cahier des charges de France Télévision, Radio France internationale, Radio France et Arte (article 21).

● Votre Commission a créé un titre VIII relatif au développement durable.

Ce titre comprend notamment un article visant à s’assurer des conditions pour chaque collectivité et département d’outre-mer d’atteindre les objectifs nationaux d’orienter 75 % des déchets d’emballages ménagers et des papiers vers les filières de recyclage (article 22).

● Votre Commission a également créé un titre IX consacré à la fonction publique.

Il comprend notamment un article qui a pour objet de prendre en compte les intérêts matériels et moraux des fonctionnaires rattachés aux collectivités d’outre-mer dans les tableaux périodiques de mutation (article 25).

● Votre Commission a créé un titre X relatif aux dispositions juridiques, institutionnelles et judiciaires.

Ce titre comprend notamment un nouvel article qui prévoit l’extension du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) aux régions ultramarines et l’abandon progressif de l’instrument daté qu’est le schéma d’aménagement régional (SAR) au terme d’une période de dix ans qui correspond à sa durée actuellement fixée par le code général des collectivités territoriales (article 29).

Votre Commission a également adopté un amendement, présenté par Mme Chantal Berthelot, visant à renforcer la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane (article 30) ainsi qu’un article qui consacre dans l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires l’existence de la délégation parlementaire aux outre-mer (article 31).

● Votre Commission a aussi créé un titre XI relatif aux droits des femmes.

Ce titre comprend un article unique qui propose d’expérimenter la mise en place, dans chacune des collectivités d’outre-mer, d’observatoires des violences faites aux femmes (article 35).

● Votre Commission a créé un titre XII contenant diverses dispositions de nature fiscale.

Ce titre comporte seize articles additionnels visant notamment à ouvrir la participation au fonds d’investissement de proximité outre-mer (FIP-DOM-COM ou FIP-OM) à l’ensemble des contribuables français pour élargir l’assiette de sa collecte et en améliorer ainsi la portée (article 41) ; à relever, pour une durée expérimentale de cinq ans, le seuil de chiffre d’affaires des microentreprises à 70 000 euros pour les activités de service et à 160 000 euros pour les activités commerciales afin de favoriser la création d’entreprises et d’emplois (article 46) ; à instituer, sur le modèle de la redevance départementale et communale des mines, une redevance communale et régionale en matière de production électrique au moyen de la géothermie (article 47).

● Enfin, votre Commission a créé un titre XIII consacré à la statistique et à la collecte de données.

Ce titre comprend un article 52 qui prévoit l’extension systématique des enquêtes statistiques nationales à la Nouvelle-Calédonie et aux collectivités d’outre-mer pour leur assurer une meilleure visibilité ainsi qu’un article 53 ayant pour objet de prévoir la remise au Parlement, par le Gouvernement, d’un rapport sur l’harmonisation du calcul des seuils de pauvreté entre les territoires ultra-marins et l’Hexagone.

AUDITION DE MME ÉRICKA BAREIGTS, MINISTRE DES OUTRE-MER, ET DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du mardi 20 septembre 2016, la commission des Lois auditionne Mme Éricka Bareigts, ministre des Outre-mer, et procède à une discussion générale sur le projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique (n° 4000) (M. Victorin Lurel, rapporteur).

M. le président Dominique Raimbourg. Notre séance est consacrée au projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique. Ce projet a été déposé sur le Bureau de l’Assemblée nationale le 3 août 2016 et renvoyé à la commission des Lois. Nous procéderons donc, après l’audition de la ministre des outre-mer, à la discussion générale sur le texte.

La commission des Affaires économiques et la commission des Affaires sociales se sont saisies pour avis, et ont respectivement désigné comme rapporteurs M. Serge Letchimy et Mme Monique Orphé. Elles se réuniront le lundi 26 septembre pour procéder à l’examen des articles, ce que la commission des Lois fera le mardi 27 septembre au soir et le mercredi 28 dans la matinée.

Est également présent parmi nous M. Jean-Claude Fruteau, en sa qualité de président de la Délégation aux outre-mer, laquelle se réunira le mardi 27 septembre dans l’après-midi pour rendre un avis sur le texte.

Nous devons encore désigner un co-rapporteur d’application, membre de l’opposition. Le groupe Les Républicains ayant suggéré la candidature de M. Daniel Gibbes, je vous propose qu’il en soit ainsi décidé.

La parole est à Mme Éricka Bareigts.

Mme Éricka Bareigts, ministre des outre-mer. Je suis très heureuse de vous retrouver pour engager le travail sur ce projet de loi. Cette discussion est un rendez-vous important pour nos territoires, qui attendent de nouveaux progrès et de nouvelles avancées. Il y a soixante-dix ans, Aimé Césaire, Léopold Bissol, Gaston Monnerville et Raymond Vergès s’unissaient dans un combat politique pour la reconnaissance des outre-mer et la consolidation des piliers de la République dans ces territoires : la loi de départementalisation de la Guadeloupe, de la Martinique, de La Réunion et de la Guyane a permis de franchir des étapes essentielles sur le chemin de l’égalité, des droits sociaux notamment. C’est en quelque sorte la marche de l’histoire que nous devons sans cesse nous rappeler. Robert Badinter expliquait le nécessaire travail de mémoire, un travail qui permet de « revenir aux sources, dresser le bilan, ouvrir des voies nouvelles ». Voilà ce à quoi nous devons nous atteler maintenant : ouvrir des voies nouvelles.

En 2016, les progrès accomplis sont importants – nous en sommes tous conscients –, mais les écarts de niveau de vie demeurent persistants : je pense au chômage, au taux de pauvreté, aux inégalités de revenu, au taux d’illettrisme, mais aussi à la mortalité infantile, domaine dans lequel nous sommes dans la situation qui était celle de l’Hexagone il y a vingt ans. Cette réalité constitue une insulte aux principes républicains et enferme nos concitoyens des départements et collectivités d’outre-mer dans des conditions de vie particulièrement pénibles. Il nous faut donc poursuivre et parachever la dynamique de développement et l’accompagner de politiques volontaristes. Il nous faut permettre aux Ultramarins de bénéficier des mêmes opportunités que les Métropolitains, qu’il s’agisse des conditions de vie, de l’accès aux droits, de l’éducation ou du développement personnel et professionnel. C’est cela, l’égalité républicaine.

Le Gouvernement a ainsi souhaité qu’un projet de loi soit présenté au Parlement, pour faire du principe d’égalité une réalité pour les près de trois millions de compatriotes résidant dans les DOM, les COM et la Nouvelle-Calédonie. C’est pourquoi le Président de la République et le Premier ministre ont confié à Victorin Lurel le soin de rédiger un rapport visant à préparer ce rendez-vous législatif. Ce dernier est l’aboutissement d’un long et exemplaire processus de concertation et de consultation : universitaires, socio-professionnels – notamment via le Conseil économique, social et environnemental (CESE) – et, bien entendu, parlementaires ont été mobilisés dans des délais très contraints. Je souhaite ici rendre hommage au travail des députés et sénateurs, tous territoires et tendances politiques confondus : votre voix compte, et votre rôle sera essentiel, tout au long de notre discussion. Cette mobilisation démontre notre capacité à construire un projet pour une France qui se pense au-delà des frontières hexagonales.

Le texte qui vous est soumis ne constitue que la première étape d’une stratégie globale en faveur de l’égalité réelle outre-mer. Il détaille les principes, les outils, la méthodologie et plusieurs mesures économiques et sociales y contribuant. Je souhaite maintenant vous en présenter les différents volets.

Le titre Ier définit les principes et l’objectif à atteindre pour l’égalité réelle. Il est nécessaire d’affirmer un horizon commun pour la conduite des politiques publiques dans les outre-mer. Cet horizon, c’est celui de l’égalité réelle. Il permet de poser le cadre d’une stratégie destinée à engager un nouvel élan.

L’histoire républicaine des outre-mer doit continuer de s’écrire, et cette nouvelle page sera celle de l’égalité réelle. Ma conviction profonde est que nous sommes arrivés au bout d’un modèle qui a consisté, exclusivement, à réduire les écarts immenses entre l’Hexagone et les outre-mer, sans toujours y parvenir, notamment en termes d’opportunités de développement ou de droits sociaux.

Selon moi, il faut définir une nouvelle approche stratégique, qui doit s’inscrire pleinement dans le projet républicain. Les outre-mer disposent chacun de singularités constituant autant d’atouts pour l’attractivité de ces territoires. Nous entrons aujourd’hui dans une nouvelle étape de notre histoire, celle de la mise en place d’un modèle économique et social dynamique, puissant, solidaire, tourné vers l’environnement régional de chaque territoire, qui permette aux Ultramarins de libérer pleinement leur potentiel et aux territoires d’être des atouts pour le développement et la réussite française au sein d’aires géoéconomiques en pleine expansion.

C’est dans cette perspective que le projet de loi, dans sa première partie, est consacré à l’ensemble des mesures de programmation pour l’égalité réelle. Il affirme que cette égalité entre les outre-mer et l’Hexagone constitue une priorité de la Nation, et définit les objectifs des politiques publiques qui y concourent. C’est ce qui permettra d’accroître les niveaux de vie, de réduire les inégalités, d’encourager le développement des territoires, bref de faire en sorte que ces territoires et leurs habitants bénéficient des mêmes opportunités que leurs compatriotes de l’Hexagone.

L’égalité est, bien sûr, inscrite dans nos principes républicains mais, à l’instar de la République, elle ne saurait être seulement évoquée ou invoquée, alors qu’aujourd’hui encore elle n’est qu’un vain mot pour certains Français. Il nous faut donc, ensemble, assurer à toutes les citoyennes et à tous les citoyens, quels que soient leurs lieux d’habitation, leur couleur de peau, leur identité culturelle ou cultuelle, les moyens adaptés pour se réaliser et progresser dans notre société. Notre devoir est de faire prévaloir la solidarité nationale.

Dès ma nomination au secrétariat d’État à l’égalité réelle auprès du Premier ministre en février dernier, je l’avais déclaré : l’égalité ne se décrète pas ; elle est un processus, un projet de société qui s’inscrit dans le long terme et concerne des territoires qui connaissent de grandes disparités structurelles, du fait, entre autres, de l’éloignement géographique, de dotations inégales en ressources naturelles ou encore d’une attractivité touristique plus ou moins grande. Avancer sur le chemin de l’égalité réelle, c’est prendre en compte ces différences et les aborder avec des outils adaptés.

C’est ce projet, cette stratégie globale que nous vous proposons d’inscrire dans la loi. Un texte de loi qui définit une ambition, une méthodologie et des outils. Un texte de loi qui irriguera les futures politiques publiques mises en place.

Une fois l’objectif posé, il nous faut définir une méthode d’action. C’est l’objet du titre II, qui crée, à cette fin, un nouvel instrument de planification de la trajectoire de convergence et de réduction des écarts de développement, territoire par territoire : le plan de convergence.

Les plans de convergence permettront de définir une méthode commune à tous les acteurs pour concrétiser l’égalité réelle. Ils seront le fruit d’un travail de coconstruction qui impliquera les citoyens, les associations, les acteurs économiques, les collectivités et les corps constitués. Cette méthode constitue une condition sine qua non pour que les plans répondent effectivement aux besoins locaux et que les différents acteurs se les approprient pleinement.

Les plans de convergence préciseront ainsi les mesures et actions à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs. Ils comprendront notamment un volet relatif au périmètre et à la durée du plan ; un diagnostic économique, social, financier et environnemental ; une stratégie de convergence ; des actions opérationnelles ; des expérimentations ; une programmation financière et un tableau de suivi. Ils s’appuieront sur les outils contractuels déjà existants.

La Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer (CNEPEOM) assurera le suivi du plan de convergence de chaque collectivité. Cette démarche d’évaluation permettra de mesurer les progrès réalisés, les objectifs atteints, les endroits où il reste encore du travail à faire. Cette évaluation s’appuiera notamment sur un tableau de bord, qui regroupera les principaux indicateurs de la convergence, prenant en compte les spécificités locales.

Cette démarche de contractualisation permettra d’installer une dynamique collective pour mutualiser les moyens et définir une stratégie partenariale, et les plans de convergence, élaborés de manière participative, se présenteront sous la forme d’un document de programmation transverse, contractualisé et d’une durée de dix à vingt ans.

Un horizon défini, une méthodologie efficace sont ainsi proposés dans ce projet de loi, qui contient aussi des mesures visant à renforcer le modèle social des territoires ultramarins et leur développement économique.

Le titre III est consacré à des dispositions sociales en faveur de l’égalité dans le département de Mayotte. La recherche de l’égalité sociale constitue un thème toujours actuel et attendu par nos concitoyens ultramarins. Depuis soixante-dix ans, la gauche a été au rendez-vous du progrès, et a porté des avancées concrètes. Ainsi, sous l’impulsion de Michel Rocard, les allocations familiales ont-elles été alignées, en 1993, sur les montants hexagonaux. Et en 2000, quatre ans après l’alignement du SMIC sous l’égide du gouvernement de Lionel Jospin, la loi d’orientation pour l’outre-mer a aligné le RMI en deux ans.

Deux articles prévoient des mesures relatives à l’égalité sociale à Mayotte, où la départementalisation est intervenue il n’y a que cinq ans. Je précise que le volet social de ce texte aura vocation à être affiné, complété et enrichi durant l’ensemble du processus parlementaire. Des avancées volontaristes et équilibrées pourront ainsi être obtenues de concert.

Le premier objectif de ce titre est d’accélérer la logique de convergence à l’œuvre, afin de permettre à nos compatriotes mahorais de disposer d’une politique familiale renforcée. C’était l’engagement pris par le Premier ministre Manuel Valls dans le document stratégique « Mayotte 2025 », signé en juin 2015. Nous le réalisons dans ce projet de loi.

Rappelons que, depuis mai 2012, de nombreuses avancées ont déjà eu lieu grâce au concours actif des services du ministère des affaires sociales et de la santé : alignement de l’allocation de rentrée scolaire, hausse significative du RSA, mise en place des allocations logement, instauration de la prime d’activité.

L’article 9 prévoit d’accélérer le rythme d’augmentation des allocations familiales. Il prévoit également, comme dans les DOM « historiques », la mise en place du complément familial outre-mer. De plus, ce même article procède à l’extension des compléments de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) à Mayotte, et ce aux mêmes conditions que dans l’Hexagone. Ces différentes mesures permettront de renforcer le soutien apporté aux familles, en particulier aux foyers les plus modestes, alors que le PIB par habitant n’atteint pas, dans ce département, 30 % de la moyenne nationale.

Le deuxième objectif est d’accompagner la mise en place d’un système complet d’assurance vieillesse dans ce département. L’article 10 institue notamment un dispositif spécifique de garantie des pensions des salariés du secteur privé, ce « minimum contributif » devant permettre aux retraités ayant cotisé de manière significative au titre de la retraite de disposer d’une pension supérieure à l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), actuellement inférieure à 400 euros par mois. L’article prévoit par ailleurs la mise en œuvre simultanée des systèmes de retraite complémentaire obligatoire existant dans l’Hexagone et dans les six autres collectivités ultramarines régies par le droit social national. Ce volet est ainsi une étape importante dans le développement humain de nos territoires.

Enfin, le titre IV vise à ouvrir de nouvelles opportunités économiques et à faciliter l’initiative entrepreneuriale. Les outre-mer seront amenés à faire face dans les prochaines années à d’importants défis démographiques, sociaux mais aussi économiques, et je crois profondément que nous devons proposer une nouvelle vision, un nouveau modèle économique pour nos territoires. J’évoquais la fin d’un processus : il nous faut inventer l’avenir. Les douze territoires des outre-mer ne sauraient être à part dans la réussite économique de la France. Ils en sont parties prenantes, et doivent être mieux connus, et reconnus en tant que tels.

Cessons de voir ces territoires comme des périphéries, des lieux d’exotisme, mais considérons tout leur potentiel et leurs atouts, géopolitiques et surtout humains. Prenons l’exemple entrepreneurial : le tissu économique y est composé pour près de 90 % par de petites et moyennes entreprises, et le dynamisme de la jeunesse ultramarine est avéré. Les outre-mer sont des terres d’innovation, une innovation qui s’appuie sur des traditions, des savoir-faire, des échanges commerciaux diversifiés. À nous de les renforcer et de les développer.

Plusieurs dispositions sont ainsi prévues dans le titre IV, notamment en matière de formation. À Mayotte, nous proposons de renforcer l’accès des personnes à la formation puis à des emplois de haut niveau dans les administrations publiques et dans le secteur privé. Nous nous inspirons pour cela du dispositif « cadres avenir », qui a très bien fonctionné en Nouvelle-Calédonie.

Pour compléter les dispositifs en faveur de la jeunesse ultramarine dans l’ensemble des territoires, le projet de loi définit un nouveau dispositif de continuité territoriale financé par le fonds de continuité territoriale géré par l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (LADOM). Ainsi, les élèves et étudiants qui effectuent un stage dans le cadre de leur formation professionnelle à l’extérieur de la collectivité de leur établissement pourront bénéficier d’une aide. Il s’agit d’une substantielle avancée en matière de mobilité.

Favoriser les dispositifs de formation est aussi l’objectif poursuivi par l’article 13. Il permet d’étendre la possibilité d’intégrer les travailleurs informels dans une démarche de validation des acquis de l’expérience (VAE) en contrepartie de leur insertion dans un parcours de formalisation progressive de leurs activités.

Enfin, les articles 14 et 15 sont des dispositions techniques permettant d’assurer la modération des prix par les transporteurs maritimes et via la lutte contre la concentration des activités commerciales.

Ce projet de loi constitue un véritable levier économique et social pour les outre-mer. Il a pour ambition de les inscrire dans une démarche d’excellence économique, environnementale et éducative, mais aussi de combler les retards sociaux – plus d’une vingtaine d’années en termes d’indice de développement humain (IDH) –, en luttant davantage contre la pauvreté et les inégalités, notamment en investissant encore plus dans le capital humain. Cette démarche, c’est celle de l’égalité réelle.

Ce projet ambitieux, je souhaite qu’il soit affiné, complété et enrichi durant l’ensemble du processus parlementaire, et notamment en ce qui concerne son volet social. Je serai très attentive à vos propositions et souhaite que nous concrétisions notre ambition.

La loi sur l’égalité réelle outre-mer sera l’un des derniers vecteurs législatifs du quinquennat. Nous devons donc être à la hauteur de ce rendez-vous et participer ainsi au renforcement de l’inclusion républicaine de ces territoires.

M. Victorin Lurel, rapporteur. C’est avec grand plaisir que je me retrouve devant la commission des Lois qui est la première commission au sein de laquelle j’ai siégé à l’Assemblée nationale. Le plaisir est d’autant plus grand que je suis ici en tant que rapporteur d’un texte que nous attendons depuis longtemps. Un tel projet de loi s’apparente en effet pour les outre-mer à un graal, voire à une obsession en ce qui concerne les élus, notamment ceux de ma formation politique. C’est qu’il correspond à l’engagement 29, pris par François Hollande lors de sa campagne électorale, d’encourager un nouveau modèle de développement de l’outre-mer, comportant un programme d’investissements et une action prioritaire pour l’emploi et la formation des jeunes. Il répond enfin à un désir ardent des associations qui ont milité pour qu’au cours de la législature soit adopté un texte qui, après soixante-dix ans de départementalisation, constitue, sinon un aboutissement, du moins une étape majeure de notre marche vers l’égalité.

J’ai travaillé dans un esprit transpartisan, en auditionnant l’ensemble des formations politiques, des experts et les représentants de diverses institutions. Je voudrais en particulier évoquer ici les échanges que j’ai eus avec Patrick Ollier, grand serviteur des outre-mer, toujours attentif à nos difficultés et à nos atouts : dès lors que la responsabilité de la société était mise en cause dans le développement des inégalités, il est apparu que nous ne pourrions-nous entendre sur une même définition de l’égalité. Nous pouvions en revanche tomber d’accord sur la notion d’égalité des chances et considérer, en d’autres termes, qu’une politique visant à promouvoir l’égalité consiste à donner à tous les mêmes chances au départ, le reste du parcours dépendant ensuite de chacun : s’il y a au bout du compte des inégalités, ce sont des inégalités, pas des injustices.

Le rapport qui a inspiré le projet de loi qui vous est soumis aujourd’hui entendait donc promouvoir cette politique d’égalité des chances et identifier les moyens permettant aux outre-mer de s’aligner en une génération sur les ratios nationaux. Ce délai de vingt ans, fixé par le Président de la République, admet naturellement des ajustements, en particulier pour les territoires ayant besoin d’un horizon plus lointain, comme Mayotte et la Guyane, ou qui, au contraire, peuvent espérer, comme la Martinique, atteindre l’objectif en douze ou quatorze ans ou en une quinzaine d’années, à l’image de la Guadeloupe. Peu importe ces compromis puisque, comme le disait Keynes, à long terme nous serons tous morts.

Un certain nombre de critères ont été définis, à partir desquels mesurer la réduction des écarts : le revenu per capita, le PIB par habitant, le revenu disponible brut par habitant, l’indice de développement humain. Notre mission ne portant pas uniquement sur les inégalités entre les outre-mer et la métropole mais également sur les inégalités internes à ces territoires, ont également été retenus des indicateurs comme le coefficient de Gini ou le rapport interdécile, qui mesure l’écart entre les plus riches et les plus pauvres, l’ensemble de ces données devant permettre d’évaluer sur une génération la trajectoire vers l’égalité.

Afin que le plus grand nombre de nos concitoyens soient associés à sa démarche, le Gouvernement a enfin souhaité organiser une grande campagne participative, dont les résultats devraient être connus sous peu.

Au total, malgré les conditions difficiles dans lesquelles nous avons travaillé compte tenu des délais, ce texte mérite pleinement, compte tenu de sa nature et de son contenu, de devenir un bel exemple de coproduction législative. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’aurai quelques questions à vous poser, madame la ministre.

Le projet de loi comporte quatre titres, que, d’une manière ou d’une autre, nous souhaitons consolider. C’est particulièrement vrai pour le titre Ier, qui comporte les articles ayant vocation à redéfinir ce que sont les principes fondateurs de l’action gouvernementale dans les outre-mer pour mener à son terme une marche commencée avec l’égalité civile et citoyenne, poursuivie, en 1946 avec l’égalité administrative et politique, puis, dans les années 1990, avec l’égalité sociale, laquelle reste à parachever.

En ce qui concerne le titre II, malgré la batterie d’indicateurs retenus, on peut craindre que l’évaluation de l’action gouvernementale ne soit pas réalisée avec suffisamment de précision.

J’ajoute qu’il s’agit là d’une loi transversale, qui va s’appliquer aux onze territoires d’outre-mer habités, dans le respect de notre devise républicaine : liberté, égalité, fraternité. Cela signifie qu’en Polynésie, en Nouvelle-Calédonie, à Wallis-et-Futuna, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Martin ou à Saint-Barthélemy, qui vivent sous des régimes législatifs différents, l’égalité doit transcender les statuts et s’inscrire en surplomb des régimes législatifs. Pour le dire autrement, l’obligation morale et juridique portée par notre devise doit s’appliquer aux outre-mer dans le respect du principe de libre administration territoriale, ce qui constitue un exercice délicat.

Au-delà d’une consolidation des quatre titres que comporte le projet de loi, nous souhaitons également en ajouter qui touchent aux questions culturelles, environnementales mais aussi à l’implication des entités subétatiques d’outre-mer dans la coopération régionale et les relations internationales.

Enfin, nous pensons qu’il convient de rééquilibrer le projet de loi, qui comporte en l’état beaucoup de mesures programmatiques, et d’étoffer son volet normatif pour le rendre plus contraignant, tout en respectant le principe de libre administration.

En matière de convergence, nous avions suggéré d’établir des plans sur quinze ou vingt ans, mais déclinés selon des contrats de convergence alignés sur le mandat des élus locaux – six ans – afin qu’un élu ne soit pas contraint par ce qu’a fait son prédécesseur. Or cela ne figure pas dans le projet de loi.

Nous sommes d’accord sur la nécessité d’intégrer au débat d’orientation budgétaire les orientations et les engagements qui auront été pris. Néanmoins le projet de loi n’oblige pas à inscrire les crédits dans le budget primitif, le budget supplémentaire ou les décisions modificatives. Certes, le préfet, le haut-commissaire ou l’administrateur supérieur à Wallis-et-Futuna seront garants de la sincérité budgétaire, mais nous préférerions voir cette obligation inscrite dans le texte.

Les délais de convergence ont donné lieu à débats, mais il me semble pertinent de prévoir que la trajectoire s’étalera sur vingt ans. À l’exception de Saint-Barthélemy et de la Nouvelle-Calédonie, je ne vois pas en effet lequel de nos territoires pourrait prétendre se rapprocher des ratios nationaux en cinq ou dix ans. Il faut donc s’inscrire dans un horizon long, au sein duquel les exécutifs territoriaux garderont une marge de négociations.

Quant à la contractualisation, elle doit être soumise à délais. Le texte indique qu’elle concerne l’ensemble des collectivités, soit, lorsqu’ils existent encore, comme en Guadeloupe et à La Réunion, la région et le département, auxquels il faut ajouter les communes, ce qui, pour la Guadeloupe, porte le nombre de contractants à trente-six, chiffre qui grimpe à plus de quarante si l’on inclut également les EPCI et les syndicats uniques. Est-il pertinent d’impliquer autant d’acteurs ?

En ce qui concerne le suivi et le contrôle de la convergence, le projet de loi propose que la CNEPEOM procède à une évaluation tous les dix-huit ou vingt-quatre mois, soit à deux reprises au cours de la législature, de manière à pouvoir procéder, le cas échéant, à des ajustements. Nous nous interrogeons cependant sur ce choix de la CNEPEOM, et l’une de nos collègues suggérait plutôt la création d’une autorité indépendante, composée d’élus locaux et nationaux, d’experts et de fonctionnaires. Si d’aventure une telle proposition devait se heurter à l’article 40, seriez-vous prête, madame la ministre, à vous y montrer favorable ?

Le titre III, consacré aux dispositions sociales, concerne essentiellement Mayotte. J’ai entendu en séance publique certains déclarer que l’outre-mer avait déjà trop reçu, mais dois-je rappeler que, depuis une quinzaine d’années, la mission « Outre-mer », ce n’est, dans chaque projet de loi de finances, que 2 milliards d’euros de crédits ? Et encore l’actuel Gouvernement l’a-t-il revalorisée, car nous avions perdu 450 millions d’euros.

Des inégalités de traitement – certains parleraient de discriminations – subsistent en matière sociale, dans l’attribution de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF), du complément familial, de l’allocation logement ou dans les conditions d’éligibilité au régime social des indépendants (RSI), puisque, à la différence de ce qui se passe ici, le bénéfice des prestations familiales est subordonné pour les travailleurs indépendants à l’acquittement des cotisations. Si l’État a des créances à recouvrer, il doit avoir d’autres moyens pour le faire, et nous serons intraitables, en l’occurrence, sur le respect du principe d’égalité.

Enfin, au plan économique, le projet de loi comporte deux mesures intéressantes, mais nous devons aller plus loin, notamment dans le soutien aux PME. Nous préconisons en particulier, compte tenu de l’ampleur et de la prégnance du chômage partiel outre-mer, que les entreprises en difficulté n’aient plus à faire l’avance de fonds, qui serait assumée par Pôle emploi dans les cas de chômage technique. En matière de délais de paiement, nous suggérons également d’avoir recours au dispositif Dailly, par exemple auprès de la Banque publique d’investissement.

Nous ne manquons donc pas d’idées, toute la question étant de savoir si, sur l’ensemble de ces questions sociales, économiques, culturelles et diplomatiques, l’État est prêt à lever le gage et à nous donner les moyens de mettre en œuvre une coproduction législative efficace pour donner naissance à une loi qui réponde à l’ambition fixée par le Président de la République et le Premier ministre : faire qu’en une génération, les outre-mer conquièrent leur graal, c’est-à-dire l’égalité par rapport à la métropole.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales. Je me félicite de ce projet de loi en faveur de l’égalité réelle, qui concrétise un engagement du Président de la République et est très attendu dans les territoires ultramarins. Néanmoins, madame la ministre, si des félicitations s’imposent, je constate que le titre III, qui renferme les dispositions sociales, porte uniquement sur le régime particulier mahorais.

Il est vrai que les spécificités du territoire mahorais et le processus de départementalisation, somme toute encore assez récent, rendent d’autant plus urgentes les mesures de convergence contenues dans le projet de loi. Il me semble pourtant que le rapport rendu au Premier ministre par Victorin Lurel montre qu’un très long chemin reste encore à parcourir pour assurer l’égalité réelle entre les outre-mer et l’Hexagone. Même si beaucoup a déjà été fait, les territoires ultramarins restent les plus inégalitaires, et des retards persistent – on parle de douze ans pour la Martinique et la Guadeloupe, de vingt-cinq ans pour La Réunion et de trente ans pour Mayotte.

Pour réduire ces écarts, il faut, au-delà de la programmation, des mesures fortes en matière sociale. C’est la raison pour laquelle je souhaiterais recueillir votre avis, madame la ministre, sur d’éventuelles dispositions complémentaires susceptibles d’enrichir le projet de loi que vous nous soumettez aujourd’hui, si tant est qu’elles ne soient pas déclarées irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution.

J’attire en premier lieu votre attention sur l’ASPA, qui bénéficie aux personnes qui n’ont pas travaillé mais complète surtout les petites retraites, d’autant plus faibles dans les territoires ultramarins que le rattrapage du SMIC y a été tardif et que nombre de salariés n’ont pas cotisé, les employeurs ne les ayant pas déclarés à l’époque. Or le mécanisme de récupération sur succession propre à cette allocation est très mal vécu par nos concitoyens ultramarins, dont certains vont jusqu’à renoncer à la percevoir pour préserver le petit patrimoine qu’ils lègueront à leurs héritiers. Si cela peut se justifier pour des personnes n’ayant pas travaillé, pour les autres au contraire, c’est d’autant plus injuste qu’elles sont frappées par une double peine : non seulement leur retraite est inférieure à celles des personnes qui n’ont pas travaillé mais, en outre, elles ne peuvent pas émarger à certaines prestations dues aux allocataires du minimum vieillesse, parce que leurs revenus sont supérieurs à celui-ci.

Pour résoudre ce problème, plusieurs solutions peuvent être envisagées. La première consisterait à supprimer le mécanisme de récupération sur succession. La seconde serait de relever le seuil au-delà duquel s’opère le recouvrement sur succession : de 39 000 euros aujourd’hui, ne pourrait-on envisager de le porter à 50 000 voire à 100 000 euros ? La troisième solution consisterait enfin à instaurer un minimum contributif majoré à hauteur de l’ASPA, et ce pendant une durée de trente ans, puisque le SMIC a été aligné en 1996. Ce sont là trois propositions que je vous soumets concernant l’ASPA et les petites retraites.

Le deuxième problème est celui des prestations familiales. Vous le savez comme moi, les critères de leur attribution sont parfois différents de ceux qui s’appliquent en métropole, ce qui pénalise certaines familles. Ainsi, le complément familial n’est ouvert dans les DOM qu’aux parents d’enfants âgés de trois à cinq ans, alors que, dans l’Hexagone, il bénéficie aux familles d’au moins trois enfants, mais dès leurs trois ans et jusqu’à leur vingt et unième année. Bien sûr, les objectifs poursuivis par la politique familiale ne sont pas les mêmes dans les deux cas. Néanmoins, ne devrait-on pas envisager d’étendre le bénéfice de ce complément dans les outre-mer, par exemple jusqu’à seize ans, âge limite de scolarisation, quitte, le cas échéant, à restreindre le dispositif aux familles de plusieurs enfants ? Jusqu’aux cinq ans de l’enfant, c’est peu vu le coût certain que représente la scolarisation, notamment pour les familles ultramarines.

Le troisième et dernier problème que j’aimerais soulever est l’application de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF), qui, dans les DOM, n’est ouverte qu’aux parents d’enfants handicapés, alors qu’elle bénéficie en métropole à tous les parents ayant réduit ou cessé leur activité pour s’occuper de leurs enfants – sous condition de ressources, naturellement. Je souhaite que l’on revienne sur ce que je considère comme une profonde inégalité. Madame la ministre, quel est votre avis sur l’extension de ce dispositif ?

M. Jean-Claude Fruteau, président de la délégation aux outre-mer. Monsieur le président, permettez-moi tout d’abord de vous remercier de votre invitation. J’y vois la marque de la reconnaissance d’une nécessité : l’expression autonome et persévérante de la voix des outre-mer dans nos débats parlementaires. La géographie, l’économie, les particularités et les situations juridiques sont telles que, parfois, les problèmes spécifiques des outre-mer sont méconnus, ou mal abordés lors de la préparation de ces débats. Je vous sais certes vigilante, madame la ministre, lorsqu’il s’agit de parer à ces risques. Mais enfin les procédures préalables sont complexes, les arbitrages peuvent être aléatoires ; dès lors, il est bon – et cela peut rendre de grands services au Gouvernement – qu’une instance parlementaire endosse en quelque sorte la tenue du veilleur, pour assurer, partout où cela est nécessaire, la prise en considération de ces problèmes spécifiques.

Ce fut une préoccupation constante de notre délégation dès les premiers mois de la législature. Bien entendu, nous n’en sommes pas restés à cette attitude défensive, car nous avons en commun le souci positif de mettre en valeur l’apport spécifique de nos collectivités au sein de la République. Situer la prise en considération, secteur après secteur, projet après projet, des spécificités des outre-mer dans une perspective globale de promotion et de développement de nos territoires : ainsi pourrait être décrit ce qui sert de fil rouge à l’action de la délégation sous ses diverses formes. Vous ne serez donc pas surpris que je suive ce fil pour aborder le présent projet de loi.

On ne peut qu’être frappé, à première lecture, par son architecture, qui constitue en elle-même un appel à l’engagement : le texte parle d’abord stratégie, avant de fonder juridiquement l’objectif général de convergence, puis de définir une série de mesures sectorielles dont on comprend immédiatement qu’elles ne sont que les premières applications du principe consacré par le projet. L’initiative parlementaire trouvera certainement à s’employer, dans le cadre de la présente discussion et plus tard, en vue d’ajouter à ces premières mesures d’autres dispositions allant dans le sens de l’égalité réelle.

La notion de convergence, détaillée dans le titre II, me paraît établir que le concept d’égalité réelle ne peut renvoyer exclusivement, ni même principalement, à l’idée de rattrapage des écarts économiques et sociaux entre les outre-mer et l’Hexagone – comme si l’on pouvait figer à une date donnée une réalité collective toujours en mouvement. Il faut, bien entendu, procéder à de tels rattrapages lorsqu’ils sont nécessaires, et ils le sont souvent. Mais si, comme l’énonce l’exposé des motifs, l’égalité réelle est « un processus que les politiques publiques doivent contribuer à atteindre », alors elle implique l’ouverture d’un dialogue permanent et concret sur des projets positifs de développement, sans se limiter à une perspective strictement mathématique. Les plans de convergence institués par le projet de loi s’inscrivent d’ailleurs dans une tradition française dont, si je ne me trompe, le dernier avatar fut la loi de juillet 1982 par laquelle Michel Rocard a entendu rénover les instruments de concertation de la planification nationale à la française.

C’est dire que ces plans ne réussiront que si l’État, mais aussi les élus des territoires, ont la volonté politique de faire réellement fonctionner les nouveaux instruments créés par la loi, de s’imposer le respect de leurs dispositions, d’assurer le suivi effectif des politiques qu’ils intègrent. Il y aura convergence entre les situations si les engagements contractés pour parvenir à cet objectif sont concrètement substantiels : la convergence ne se fera pas à l’économie.

Nombreux sont les domaines dans lesquels il y a lieu d’ouvrir la perspective de l’égalité réelle. Certains sont traités dans le projet de loi initial ; les débats qui commencent aujourd’hui permettront assurément d’en faire apparaître d’autres, d’autant que la programmation dont il est ici question ne s’épuise pas dans des initiatives à caractère juridique. J’évoquerai deux de ces domaines, en m’inspirant des travaux de la délégation.

Le premier est constitué des politiques d’adaptation et d’atténuation rendues nécessaires par le changement climatique. Les travaux de la délégation sur le sujet l’ont bien montré : nous sommes tous appelés à adapter nos comportements en fonction des phénomènes liés au changement climatique, mais les outre-mer subissent à cet égard, si j’ose dire, une double peine. En butte à ces phénomènes plus que l’Hexagone du fait de leur situation géographique, ils sont en outre désavantagés s’agissant des moyens nécessaires pour en contenir ou en contrer les effets. L’Assemblée nationale a bien voulu adopter la proposition de résolution, votée à l’unanimité par notre délégation, qui traduisait notre préoccupation à ce sujet. Mais peut-être pourriez-vous, madame la ministre, nous donner des précisions sur les initiatives spécifiques aux outre-mer qui ont été prises après la COP21 et dans lesquelles le schéma de l’égalité réelle trouve parfaitement à s’appliquer.

Le second domaine est l’éducation, particulièrement le problème posé par l’instruction dispensée aux jeunes dont la langue maternelle et usuelle n’est pas le français. Nous avons ainsi été alertés sur la situation délicate des jeunes Amérindiens de Guyane par nos collègues Marie-Anne Chapdelaine et Chantal Berthelot ; un rapport à ce sujet, cosigné par Mme Chapdelaine, a été remis au Premier ministre. Voilà l’exemple le plus clair qui soit du fait que l’égalité réelle ne peut pas être mathématique, mais résulte de l’acceptation raisonnée d’une spécificité culturelle. Quelles dispositions ont été prises pour faire suite au constat et aux préconisations de ce rapport ?

En vous posant ces deux questions, madame la ministre, j’exerce au nom de mes collègues, dans le cadre particulier du présent débat, la fonction de veille dont la délégation aux outre-mer a été investie par la Conférence des présidents au début de cette législature. Alors que nous parvenons presque au terme de celle-ci, je forme le vœu que cette fonction – dont, en m’invitant, vous avez bien voulu, monsieur le président, reconnaître l’importance – soit consolidée, du point de vue symbolique et juridique, par le renforcement du fondement juridique de la délégation. Je déposerai un amendement en ce sens.

Avant de conclure, j’aimerais vous livrer un sentiment que je sais partagé par mes collègues de la délégation aux outre-mer, quelle que soit leur appartenance politique. L’égalité réelle commence par l’égalité dans la considération. Or même celle-ci ne nous est pas garantie. Que de fois, lors de discussions, de réunions préparatoires en vue d’apprécier des propositions d’amendements, nous voyons chez nos interlocuteurs des comportements regrettables ! On ignore nos spécificités ; on les sous-évalue ; on feint de découvrir les implications ultramarines de telle ou telle disposition ; on invoque trop facilement de prétendus objectifs fondamentaux pour minimiser l’importance de nos questions. La condescendance infligée est une forme bien réelle d’inégalité. Il faut espérer que sinon la lettre du droit, du moins l’esprit de la loi nouvelle incitera ceux qui adoptent cette attitude à s’en abstenir désormais, et que le respect nourrira la convergence.

Je souhaite que le débat qui commence ouvre de nouvelles perspectives à nos outre-mer et leur donne davantage de moyens pour contribuer, dans le respect de leurs spécificités et de nos traditions, au rayonnement national.

Mme la ministre. M. le rapporteur a soulevé des questions de fond qui sont essentielles : il s’agit de permettre la stabilisation du dispositif de convergence et de le rendre pleinement efficient dans la durée.

Le contexte est difficile, bien que je voie quel engouement le débat qui s’engage suscite en chacun de vous. Car les délais, très contraints, vous obligent à travailler au pas de charge. Nous avons dû, nous aussi, nous hâter de déposer ce projet de loi, pour apporter au moins une première réponse, dans les territoires, à la question fondamentale de l’égalité réelle.

« L’égalité transcende les statuts », disiez-vous, monsieur le rapporteur. Telle est en tout cas la volonté qui a présidé à l’écriture du texte. Les plans de convergence concernent les territoires régis par l’article 73 de la Constitution comme ceux qui relèvent de l’article 74. Et la démarche du Gouvernement transcende dès à présent les statuts. Je songe à celle qui caractérise le travail en cours sur les accords de Papeete : il s’agit bien là d’égalité réelle et de co-construction, fruit de la volonté que le territoire et la solidarité nationale agissent ensemble, dans le respect des règles constitutionnelles et des lois organiques qui obligent l’un et l’autre. L’exercice est donc possible, puisqu’il est réalisé ; il est voulu, puisqu’il est prévu dans la loi ; mais il doit s’inscrire dans le cadre juridique et réglementaire qui est le nôtre.

En ce qui concerne l’idée d’enrichir le texte, je l’ai dit de façon très sincère et très volontaire dans mon exposé : c’est nécessaire, d’autant que nous avons tous été soumis à des délais très contraints et que les questions abordées sont importantes. Mais l’égalité réelle est une notion très vaste, et nous pourrions être tentés d’inclure tant de choses dans le projet que nous en perdrions le fil conducteur de notre action.

Il s’agit donc de garder ce fil tout en étendant les dispositions, en les enrichissant, le cas échéant par des titres – portant, par exemple, sur la coopération décentralisée ou régionale, un sujet qui a donné lieu à de très importants travaux ; je songe à la proposition de loi de Serge Letchimy, qui contribue à renforcer l’ancrage des territoires dans leur grand bassin. De tels éléments concourent à libérer nos territoires de ce qui les emprisonnait.

Tel est le sens de la convergence. J’ai beaucoup aimé l’approche des plans de convergence défendue par le président Jean-Claude Fruteau : en effet, il ne s’agit pas seulement de rattrapage, mais d’une dynamique, de la volonté commune à un territoire ultramarin et à la nation, et c’est par cette volonté que nous pourrons déverrouiller nos outre-mer.

Outre la coopération, la culture et l’environnement sont de nature à y contribuer, et nous pouvons envisager de travailler sur ces sujets.

En ce qui concerne l’opposabilité et l’évaluation, j’établis un lien entre ces deux aspects, car ils touchent l’un et l’autre à l’efficacité de l’action que nous allons mener.

Fallait-il des plans de convergence ou des contrats de convergence ? Nous nous sommes posé la question. Mais le plan de convergence intégrera les autres instruments contractuels, dont le contrat de plan État-région, alors que l’on se demande où celui-ci trouverait sa place si nous options pour un contrat de convergence. Le plan de convergence est un document stratégique qui réunit les engagements contractuels et leur donne sens. Tel est l’état actuel de notre réflexion ; nous pourrons étudier au cours du débat la possibilité d’évoluer sur cette question, et d’ajouter des éléments qui concourraient à l’efficacité de la démarche.

S’agissant de l’évaluation, je souhaite vivement son amélioration. Si une autorité administrative indépendante peut en être l’outil – mais il faudra y travailler –, je suis favorable à cette proposition. Car c’est par l’évaluation des politiques publiques que l’on garde le fil, surtout à un horizon de dix à vingt ans : c’est elle qui permet le réajustement. Cette évaluation peut être portée par une autorité indépendante ; elle peut aussi avoir lieu lors des discussions budgétaires, puisque le présent texte fait du débat d’orientation budgétaire l’occasion, pour la collectivité associée au plan de convergence, de rendre compte de l’état d’avancement de celui-ci. Ainsi, lors des échéances fixées par une autorité, ou par la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer (CNEPEOM) comme le prévoit actuellement le texte, ou encore lors des débats d’orientation budgétaire, nous pourrons, sur la base d’éléments publics, objectifs et sérieux, ajuster les politiques et les rendre plus efficaces. C’est ce que veulent nos concitoyens.

J’en viens au titre « social ». C’est un volet sur lequel nous travaillons beaucoup, madame la rapporteure pour avis. Certes, l’égalité réelle ne se réduit pas au rattrapage ; toujours est-il que certaines prestations ne sont pas encore appliquées dans nos territoires. Vous qui avez occupé mes fonctions, monsieur le rapporteur, vous savez, comme je le sais moi-même pour avoir été députée, que nous devons y œuvrer en commun et unir nos ambitions – bien que l’équilibre soit difficile à trouver –, car il est absolument nécessaire de progresser vers l’égalité sociale, l’un des éléments de la convergence vers l’égalité réelle.

Nous travaillons sur l’allocation de solidarité aux personnes âgées, l’assurance vieillesse des parents au foyer, le complément familial, madame la rapporteure pour avis. Nous avons des rendez-vous interministériels sur ces sujets et, du point de vue technique, nous avons bien avancé. Nous allons continuer ce travail ensemble, si vous le voulez bien.

En ce qui concerne le changement climatique, monsieur le président Fruteau, nos territoires souffrent en effet d’une double peine – au moins. Cette question a d’ailleurs fait l’objet d’un rapport de Mme Sage et de MM. Aboubacar et Letchimy auprès de votre délégation. Lors du prochain débat budgétaire, mon ministère vous proposera donc la création d’une ligne budgétaire permettant de contracter auprès de l’Agence française de développement (AFD) des prêts affectés à des investissements structurels destinés à protéger les territoires. Nous nous inspirons ici du Fonds vert. Nous accompagnerons les collectivités locales en vue d’investissements protégeant de la houle, des risques cycloniques et des autres problèmes que nous connaissons.

S’agissant du rapport de Mme Marie-Anne Chapdelaine et de ses 37 propositions, nous avons progressé dans la prise en charge psychiatrique des personnes en crise suicidaire, en particulier en développant des actions de prévention et de lutte contre les addictions, notamment à l’alcool.

Nous travaillons aussi, monsieur Fruteau, sur le problème de l’école et de l’apprentissage de la langue. Les écoles du fleuve guyanais disposent aujourd’hui d’intervenants en langue maternelle, qui ont pour mission de faire l’intermédiaire entre les enfants qui ne maîtrisent pas le français et les enseignants. Ce système est encouragé par l’État ; le pacte d’avenir actuellement en discussion prévoit de le renforcer et de l’étendre à toutes les populations de la forêt et du fleuve.

Je terminerai par votre amendement tendant à donner une base légale à la délégation aux outre-mer. Il faut évidemment, pour toutes les raisons que vous avez citées, conserver à celle-ci sa fonction de veille. Mais son rôle va plus loin : il s’agit de défendre les outre-mer et de diffuser les bons messages, ceux qui permettront la reconnaissance de ces territoires tels qu’ils sont, avec leurs atouts et leurs handicaps. Cette démarche volontaire, beaucoup plus ambitieuse, indique le sens du travail que nous avons à faire ensemble.

Mme Huguette Bello. Ce texte intervient à un moment où la convergence des bouleversements est maximale et où les inégalités ne cessent de s’accroître dans le monde, en France continentale et dans les outre-mer. Il représente donc un défi qui suppose une volonté politique – elle aussi – réelle et de long terme.

L’aspiration des outre-mer à l’égalité est constante ; elle est inscrite dans nos histoires respectives. L’égalité réelle en constitue une nouvelle étape. Elle a donné lieu à des définitions et suscite parfois des interrogations. Quoi qu’il en soit, elle ne saurait se réduire au rattrapage ; elle n’est assurément pas un prétexte à uniformisation, ni le simple prolongement de politiques déjà appliquées. S’inscrire dans le mouvement de l’égalité réelle, c’est avant tout réfléchir et agir à partir de nous-mêmes ; c’est s’inspirer, comme aurait dit Péguy, de notre réalité réelle ; c’est permettre à l’ensemble de nos potentialités de se déployer.

Pour cela, il faut d’abord lever les obstacles créés de toutes pièces, singulièrement ceux qui sont dus à une législation et à des règles inadaptées. En voici deux exemples parmi d’autres. La loi du 9 janvier 1985, dite « loi montagne », appliquée de manière mécanique, entrave le développement des activités touristiques dans les Hauts de La Réunion. La politique européenne commune de la pêche, conçue pour les pays du Nord, n’est pas du tout adaptée à nos régions où les ressources halieutiques sont abondantes. En interdisant depuis plus d’une décennie les aides à la construction des navires dans les régions ultrapériphériques françaises, l’Europe ne nous permet pas de disposer d’une flotte de pêche à la mesure de nos potentialités.

L’égalité réelle, c’est aussi parachever l’égalité sociale qui a été au fondement de la loi de départementalisation du 19 mars 1946. Je pense aux prestations sociales non encore alignées, mais aussi aux petites retraites. Ce qui vient d’arriver aux agriculteurs retraités dans nos régions est significatif et paradoxal : en raison des inégalités du passé, ils ne bénéficieront pas de l’augmentation générale des retraites agricoles qui porte celles-ci à 75 % du salaire minimum.

L’égalité réelle, c’est encore compléter et renforcer les politiques publiques dans des domaines aussi fondamentaux que l’éducation, où les retards persistent à tous les niveaux en dépit de progrès considérables ; la lutte contre l’illettrisme – lequel continue de concerner un pourcentage inquiétant de la population ; la santé, où les indicateurs sont presque toujours défavorables ; le logement social, mais aussi intermédiaire ; la petite enfance, où tout se joue et où beaucoup reste à faire.

S’engager sur la voie de l’égalité réelle, c’est bien sûr créer les conditions d’un développement qui soit une source d’emplois et de richesse. Or il est devenu évident que la première de ces conditions est de concilier toutes nos appartenances, et d’abord notre double appartenance géographique et politique à l’océan Indien et à l’Union européenne. L’égalité réelle passe donc nécessairement par les retrouvailles avec la géographie. Comment pourrait-il en être autrement pour La Réunion, au moment même où l’océan Indien retrouve sa place dans l’économie mondiale, où les échanges Sud-Sud s’intensifient, où les perspectives dans le domaine maritime se font de plus en plus précises ? À cet égard, il est surprenant que le mot « géographie » n’apparaisse jamais dans le projet de loi.

L’égalité réelle, c’est donc rejeter définitivement les oppositions binaires. Mais retrouver la géographie impose d’abord une véritable politique en faveur de tous les désenclavements : en l’absence de ce que l’on appelle désormais les interconnectivités, toutes les politiques de développement, tous les dispositifs sont tôt ou tard voués à l’échec. La Réunion sera toujours une île, mais une île dans le monde. De ce point de vue, les avancées incontestables que nous opérons depuis peu vers le désenclavement maritime doivent nous inspirer dans l’aérien et le numérique.

Ce texte doit poser les bases d’un désenclavement aérien pensé comme moyen de développement, mais aussi comme facteur de développement, pour une continuité territoriale au service de la mobilité des ultramarins, du tourisme, de la production locale. Le dispositif actuel d’aide au voyage, que les Réunionnais financent d’ailleurs en grande partie eux-mêmes, ne saurait être considéré comme une solution durable à laquelle il suffirait d’apporter quelques ajouts. En outre, nos relations avec les pays de notre environnement géographique et notre développement international requièrent une politique aérienne plus ouverte.

Le texte doit aussi permettre à nos régions de se classer dans le peloton de tête du numérique. Plus que d’autres, nous avons le devoir de nous approprier cette technologie qui nous donne enfin l’occasion de lever tous les obstacles liés à l’éloignement, à l’insularité, à l’absence d’économies d’échelle, ces fameux « handicaps structurels ». L’alternative est simple et redoutable : subir la fracture numérique et contrarier le développement pendant longtemps encore, ou faire de cette technologie un facteur de compétitivité et ouvrir la voie à des milliers d’emplois et à d’innombrables perspectives.

Madame la ministre, je ne saurais conclure sans vous parler de l’exposé des motifs du projet de loi – qu’il est évidemment impossible d’amender. On y a oublié une fois de plus La Réunion, ses hommes mais aussi ses femmes qui ont combattu pour la liberté, ceux qui ont résisté sur place – on n’en parle jamais –, qui ont ouvert leur chemise pour mourir pour la France, ces soldats qui sont partis par centaines. Ce texte n’est pas le seul à les oublier ; croyez que cela nous blesse profondément.

M. Ibrahim Aboubacar. Comme responsable du texte au sein du groupe Socialiste, écologiste et républicain, je me réjouis de ce projet qui répond à une demande avérée de nos territoires. Nous sommes particulièrement satisfaits de la méthode utilisée : le rapport de Victorin Lurel et la concertation que celui-ci a organisée à cette occasion sont tout à fait remarquables. Je n’oublie pas non plus la consultation numérique lancée par le Gouvernement. À quel moment aurons-nous connaissance de son contenu et comment le Gouvernement compte-t-il l’intégrer au projet ? Car la prise en considération de l’expression des citoyens contribuera à la crédibilité de notre travail et, sans doute, à la mobilisation citoyenne en vue de l’application des mesures qui auront été arrêtées.

Le calendrier de travail est contraint, mais l’enjeu en vaut la peine. Notre groupe est donc décidé à tout faire pour que le texte soit adopté au cours de la présente législature. Les outre-mer le méritent.

Sans vouloir revenir sur les questions soulevées par nos rapporteurs, il sera sans doute nécessaire d’apporter au cours du débat quelques précisions sur le calendrier et les modalités d’élaboration des plans de convergence, afin d’y voir plus clair quant à leur valeur, notamment au regard des autres outils de planification ou de programmation.

J’en viens au suivi du dispositif. L’idée que la CNEPEOM – au sein de laquelle j’ai été rapporteur il y a deux ans, et que je préside aujourd’hui – pourrait en être l’outil n’est pas mauvaise à condition, vu la nature des plans de convergence, d’en revoir sans doute la composition et, à coup sûr, les moyens. Au-delà de la CNEPEOM, le suivi supposera un renforcement très significatif de l’appareil statistique disponible pour tous les outre-mer. Car s’il est une observation récurrente dans les travaux de la CNEPEOM depuis trois ans, c’est l’indisponibilité d’outils spécifiques comparables d’un territoire à l’autre et existant dans l’ensemble des outre-mer, fondant des évaluations crédibles, sérieuses, susceptibles de mobiliser les énergies. C’est pourtant nécessaire pour que les collectivités puissent contracter sur des bases claires.

Madame la ministre nous ayant invités à enrichir le texte, je proposerai les pistes suivantes.

L’égalité réelle est égalité entre les outre-mer, mais aussi à l’intérieur de chacun de nos territoires. À cet égard, parmi tous les indicateurs mobilisés, il ne faudra pas oublier l’égalité entre les hommes et les femmes, particulièrement à Mayotte : la question a fait l’objet d’un rapport de la délégation aux droits des femmes de notre Assemblée, présenté par sa présidente, Mme Catherine Coutelle, et par sa vice-présidente, Mme Monique Orphé ; j’en retiens particulièrement la proposition 14. D’une manière générale, l’égalité entre les hommes et les femmes doit être un fil rouge de nos travaux dans les territoires d’outre-mer concernés par cet enjeu – et ils sont nombreux.

J’ai bien entendu le président Fruteau au sujet des questions économiques, mais l’égalité réelle passera aussi par le renforcement des appareils économiques de nos territoires. Nous avons inventé des dispositifs pour dix, vingt ou vingt-cinq ans. Victorin Lurel a parlé de vingt ans. Or la permanence des outils économiques à notre disposition fait l’objet d’un débat récurrent. Certes, madame la ministre, nous avons obtenu l’année dernière une visibilité jusqu’en 2020, voire 2025, s’agissant de la fiscalité des collectivités et d’autres efforts sont en cours. Mais l’on ne peut pas inviter les acteurs concernés à réfléchir sur vingt ans si les outils économiques fluctuent comme ils l’ont fait au cours des dernières années : pour mobiliser les énergies, il faut que leur durée soit compatible avec les plans dont il est question au niveau européen comme à l’échelon national.

Il me paraît important de le dire dès le début de la discussion, même si ce n’est pas nécessairement dans le présent texte que nous pourrons traiter des questions de cette nature : il faudra bien, à un moment donné, répartir les dispositions entre ce support législatif et d’autres, notamment les lois de finances.

Beaucoup ont parlé de l’éducation. J’aimerais insister pour ma part sur un secteur qui contribue à l’efficacité de l’action publique dans nos collectivités et, en ce sens, à l’égalité : la fonction publique. Ce sujet nous a déjà mobilisés : dans la dernière loi relative à l’outre-mer, nous avons abordé plusieurs questions concernant la Polynésie française ainsi que Wallis-et-Futuna ; nous avons créé le dispositif du CIMM (centre des intérêts moraux et matériels). Le présent texte doit nous permettre de progresser encore sur cette voie ainsi qu’en matière de retraites, au-delà du cas de Mayotte.

Je suis tout à fait d’accord avec Mme Orphé : il faut renforcer le volet social pour tous les territoires, quel que soit leur statut. Toutefois, n’oublions pas que, ici comme souvent, Mayotte doit effectuer deux exercices en un. On parle d’égalité réelle mais, pour Mayotte, il s’agit d’aller vers l’égalité réelle en sautant l’étape de l’égalité sociale, ou de construire l’égalité réelle en contournant l’égalité sociale, ou encore de mélanger les deux : le chemin n’y sera pas nécessairement le même que dans les autres départements d’outre-mer, qui ont connu deux processus successifs. Ceci explique le contenu de la partie du texte relative aux prestations sociales.

Cette première réunion va nous permettre d’obtenir des clarifications concernant la démarche engagée, la portée de la loi et la force qu’il conviendra de lui donner. Puisque la plupart de nos amendements tomberont sous le coup de l’article 40, nous apprécierons particulièrement une co-construction législative raisonnable mais résolue, pour un résultat à la mesure des espérances de nos outre-mer.

Mme Marie-Anne Chapdelaine. Madame la ministre, j’aimerais revenir un instant sur la mission, que j’avais conduite avec Mme la sénatrice Aline Archimbaud, sur le suicide chez les Amérindiens et les Bushinenges. Nous avions soulevé la question de la réforme du Conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenge (CCPAB), qui est relativement prégnante, comme le savent mes collègues de Guyane Chantal Berthelot et Gabriel Serville. Ce conseil peut se saisir du devenir des Amérindiens et traiter du suicide mais il nécessite une réforme. Seriez-vous favorable à une telle évolution ? Jetteriez-vous un œil bienveillant, pour reprendre le qualificatif employé par notre rapporteur, sur l’amendement qui la porte, afin qu’il puisse être adopté dans ce projet de loi ?

Je voudrais aussi revenir sur l’éducation. On parle d’égalité réelle mais on devrait déjà parler d’égalité tout court. Dans les outre-mer, il existe des situations que les députés métropolitains ne toléreraient pas, qui feraient sortir les parents d’élèves et les élus dans la rue. Je crois beaucoup à ce projet de loi qui doit être à la hauteur afin que les enfants, où qu’ils soient, aient accès à l’éducation. Certains élèves, qui doivent affronter quarante-huit heures de pirogue pour revenir chez eux, sont maintenus trois mois dans un internat alors qu’ils pourraient rentrer tous les week-ends si les transports étaient améliorés.

Madame la ministre, j’ose espérer que ce projet de loi s’étoffera de ces questions-là. J’espère que vous appuierez les propositions de mes collègues, qui vont dans ce sens.

M. Philippe Houillon. Mon intervention va être extrêmement brève, monsieur le président, car – vous l’avez sans doute remarqué comme moi – les principales critiques ont été faites par nos rapporteurs. Ces critiques ont certes été formulées dans des termes extrêmement choisis, élégants et diplomates. Leurs interventions ont néanmoins exprimé la déception face à une certaine pauvreté de ce texte. Notre collègue Lurel a fait trente-cinq propositions dans l’important rapport qu’il a rédigé à l’issue d’un long travail. On en retrouve peu de chose dans le texte qui nous est soumis.

En première approche, même si nous sommes en fin de législature et qu’il aurait été préférable de prendre cette initiative plus tôt, on ne peut qu’être satisfait de voir le Gouvernement porter une attention particulière aux outre-mer. Cela étant, je partage la remarque que j’entends sur tous les bancs : face à une formidable attente, nous avons un texte avec seulement trois articles déclaratifs et un agrégat de quelques mesures qui sont très en deçà des enjeux.

Ce texte est donc extrêmement décevant. C’est sans doute la raison pour laquelle je vous ai entendue, madame la ministre, dire que le Gouvernement souhaitait qu’il soit enrichi. Au-delà de leurs critiques pertinentes et à fleuret moucheté, les rapporteurs eux-mêmes suggèrent de faire de la coproduction législative, ce qui est une autre façon de dire que le texte n’est pas satisfaisant en l’état. Monsieur le rapporteur, vous l’avez dit de manière infiniment plus élégante que moi, mais vous l’avez dit quand même.

Je ne sais pas si cette coproduction législative que vous appelez de vos vœux interviendra pendant ce débat, dans le cadre de délais contraints. Il y a beaucoup de chemin à parcourir en faveur de nos outre-mer à partir d’un texte pauvre. Si cette coproduction n’aboutissait pas, ce serait vraiment une occasion ratée. Certains mauvais esprits – dont je ne suis pas – diraient probablement que le but électoraliste n’est pas loin, compte tenu du calendrier électoral.

Pour terminer, je souligne qu’il n’y a aucune mesure dynamique et offensive en faveur des entreprises, par exemple, pour régler le problème du chômage dont il n’est pas question non plus dans le projet de loi. Il n’y a rien de tout cela. Il est évident que certaines mesures intéressant les entreprises doivent impérativement être contenues dans le texte final. C’est aussi l’une des clefs de l’égalité réelle.

M. le président Dominique Raimbourg. Monsieur Houillon, l’ancien président de la commission des Lois, que vous êtes, est très certainement favorable à la coproduction législative !

M. Philippe Houillon. C’était d’ailleurs une idée d’un de mes anciens présidents de groupe, qui est actuellement candidat ! Vous voyez de qui je veux parler…

M. le président Dominique Raimbourg. Nous allons nous retrouver !

M. Guillaume Larrivé. J’aurais une question ponctuelle mais importante, je crois, à l’endroit de Mme la ministre sur la portée de l’article 9. Pour l’essentiel, cet article prévoit à Mayotte, conformément à une déclaration du Premier ministre, d’accélérer le rythme d’augmentation des allocations familiales pour se rapprocher dès 2021, au lieu de 2026, des montants en vigueur au plan national. J’ai lu attentivement la documentation d’étude d’impact sur cet article 9 sans y voir nulle part le mot « immigration ». Ce mot n’est pas un tabou et il correspond à une réalité vécue douloureusement par la population de Mayotte puisqu’une partie très importante des habitants est de nationalité étrangère sans titre de séjour.

Pourquoi le Gouvernement n’envisage-t-il pas de nous indiquer l’impact de cette forte augmentation des allocations familiales à Mayotte sur cette problématique de l’immigration ? Y a-t-il un impact ? N’y en a-t-il aucun ? Cette question doit être d’autant plus posée que, par ailleurs, d’autres membres du Gouvernement – je pense au ministre de l’intérieur – nous indiquent que l’effort de lutte contre l’immigration irrégulière à Mayotte doit être maintenu, voire amplifié. Quelle est l’articulation entre ces deux domaines de l’action publique ? Quel est l’impact, au regard de la nécessaire maîtrise de l’immigration, de cette augmentation très forte des allocations familiales que vous envisagez d’accélérer ?

Mme Maina Sage. Avant de vous donner mon sentiment sur ce texte, je voulais rappeler pourquoi nous sommes là aujourd’hui, à étudier un dispositif particulier de rattrapage en vue d’une plus grande équité – avant l’égalité – pour nos territoires.

Pour ma part, je porte un regard très pragmatique sur les chiffres. À cet égard, je voulais remercier notre collègue Victorin Lurel pour le travail mené pendant presque deux ans. La réalité des chiffres est déplorable. Avant tout, il ne faut pas perdre de vue ce diagnostic. Nous pourrons débattre pendant des heures ou des années des mesures à prendre pour rectifier le tir, mais le constat est celui d’un échec partagé que nous devons être capables de regarder en face.

La différence de PIB va de 15 % à 75 %. Le PIB national moyen est de 35 000 euros, avec certes des différences entre les régions de l’Hexagone, l’Île-de-France étant à 56 000 euros et le Limousin à 26 000 euros. Ces différences sont cependant incomparables avec celles qui existent en outre-mer, ou entre l’Hexagone et l’outre-mer. Il ne s’agit là que du PIB, mais on peut aussi parler de l’accès à l’éducation ou à la santé, du niveau d’illettrisme. On peut aussi prendre certains critères de l’indice de développement humain (IDH) sur le logement, les taux de natalité et de mortalité. Sur le plan économique, le taux de chômage en outre-mer est deux fois plus élevé que le taux de chômage moyen national.

Nous avons le devoir de nous interroger sur ces écarts et de construire ensemble une relation entre l’État et ses territoires d’outre-mer, qui soit différente de celle que nous avons vécue. Malgré tout ce qu’on aura tenté de faire, nous devons malheureusement dresser un constat d’échec : le résultat est là, face à nous. Que nous soyons de gauche, de droite ou du centre, nous portons tous cette responsabilité. Ce sont tous nos concitoyens français. Les différences sont trop importantes pour que nous nous cachions derrière des a priori et des excuses. De nombreux a priori m’ont violemment frappée lorsque j’ai commencé à exercer ce mandat national : la désinformation ; le manque de connaissances de nos territoires sur le plan juridique ; le manque de connaissances sur notre capital humain, notre jeunesse, nos tissus économiques, nos richesses environnementales et culturelles.

En aparté, je voudrais vous faire part d’une réflexion que j’ai eu l’occasion de partager avec notre ministre : je regrette que ces sujets n’aient pas été traités dans le texte sur l’égalité et la citoyenneté. Cette différence symbolise l’existence d’un problème dans notre société, dans la manière dont nous traitons nos territoires. Le texte sur l’égalité et la citoyenneté a réuni tous les députés alors que – je le regrette d’avance – nous allons examiner celui-ci principalement entre nous, les ultramarins. Au passage, je remercie mes collègues Houillon et Larrivé de leur présence parmi nous.

Ce sont ces sujets de fond que je souhaiterais aborder au cours de nos débats. Nous aurons le temps d’examiner les mesures, mais nous devons partir de ce diagnostic, de ce constat d’échec collectif et partagé. Nous devons être innovants, ambitieux afin de construire une autre relation entre l’État et ses collectivités et territoires d’outre-mer. Dans ce cadre, nous transcendons effectivement des différences juridiques prévues par les articles 73 et 74 de la Constitution ou les statuts de la Nouvelle-Calédonie.

Sur le plan général, j’ai deux remarques majeures à faire. La première porte sur les fondements de ce texte. Les rapports produits permettent de dresser le constat de manière très honnête et transparente, mais ce projet répond-il à l’ambition de départ ? Certains estiment que nous passons à côté de l’objectif alors que d’autres considèrent que nous l’atteignons. Pour ma part, peut-être parce que je suis du centre, je suis plus mesurée : je pense que nous ne l’atteignons que très partiellement et que nous pouvons aller beaucoup plus loin. Je crois que notre travail de parlementaire doit s’exprimer pleinement sur ce texte. C’est à nous de l’enrichir. Le Gouvernement nous a invités à le faire. Faisons-le pleinement en essayant de tirer le meilleur parti de cette volonté commune. Donnons-nous le courage d’atteindre ces objectifs.

Deuxième remarque : il faut consolider l’article 1er et poser les jalons de ce que nous considérons comme essentiel en termes d’accès aux services publics. On peut parler de tous les sujets – économie, éducation, environnement, culture – sur lesquels nous avons tous des choses à dire, mais il faut commencer par cette définition. Chaque territoire fixera ensuite ses priorités : éducation, santé, désenclavement géographique ou autre.

Pour ma part, j’aurais souhaité introduire à l’article 1er deux notions : l’isolement et le genre.

L’isolement est lié à la fragmentation et à la taille de nos territoires, à la distance par rapport à la métropole, à l’éclatement géographique. Il faut prendre en compte ces réalités pour établir un bon diagnostic et faire en sorte que les mesures préconisées soient en cohérence avec les freins à l’origine d’un retard que nous ne rattraperons jamais. On parle de rattrapage mais il existe des handicaps structurels que nous n’effacerons pas. Il faut pouvoir intégrer cela. Les territoires comme les nôtres, qui sont des collectivités autonomes, demandent la solidarité nationale. Lorsqu’on a un territoire qui est à 20 000 kilomètres de la métropole, à huit heures d’avion du continent le plus proche, éclaté sur une surface maritime grande comme l’Europe, peuplé de moins de 300 000 habitants répartis sur 118 îles, croyez-moi, c’est un défi quotidien. Nous savons très bien que nous n’y arriverons pas tout seuls. C’est pour cela que nous demandons la solidarité nationale. Nous ne pourrons jamais combler totalement le retard mais nous pourrons l’atténuer grâce à des efforts de désenclavement s’appuyant sur le numérique, par exemple. Quoi qu’il en soit, nous devons tenir compte de l’échelle de ces territoires, des distances, des contraintes géographiques.

La question du genre, de l’égalité entre les hommes et les femmes, doit aussi être intégrée parmi les indicateurs des politiques publiques tendant à favoriser les rattrapages dans différents domaines.

Le contrôle, le suivi et l’évaluation des mesures exceptionnelles de rattrapage devraient être organisés autour d’une structure qui soit la plus indépendante possible et dotée de moyens importants lui permettant de soutenir ces politiques de convergence. Si nous voulons aboutir à un résultat probant et être capable de le mesurer efficacement, nous devons nous doter d’un outil à la mesure de l’enjeu. À mon sens, il peut prendre la forme d’une autorité indépendante, même si d’autres solutions sont peut-être possibles. L’idée est de renforcer la CNEPEOM dans ses missions et dans ses moyens, et d’envisager toute la politique de suivi statistique de nos territoires.

Madame la ministre, nous étions hier ensemble aux Assises du tourisme. Je vous remercie d’avoir organisé un débat sur la manière de concrétiser les vingt-sept mesures annoncées l’an dernier par le Conseil de promotion du tourisme (CPT) pour renforcer la contribution des destinations d’outre-mer dans l’attractivité touristique de la France. Vous voyez bien que le point de départ est le pilotage, la donnée, le diagnostic sans lequel aucune prescription n’est possible.

Sur un plan plus personnel, j’aurai à revenir sur des mesures particulières pour la Polynésie, concernant la continuité territoriale ou le soutien aux étudiants. Aujourd’hui, je voulais me cantonner à des remarques plus générales au profit de tous les territoires d’outre-mer.

Enfin, je voudrais remercier le président Jean-Claude Fruteau d’avoir parlé de la justice climatique, un sujet qui a toute sa place dans ce texte.

Mme Chantal Berthelot. Madame la ministre, merci pour le ton sincère de votre présentation et pour les réponses que vous avez déjà apportées à l’une de mes questions. Après le président de la Délégation à l’outre-mer, je remercie le président de la commission des Lois de nous accueillir. Je remercie également les membres de cette commission pour leur présence, leur intérêt pour ce sujet. Comme le dit Maina Sage, il ne faut pas que nous restions entre ultramarins. D’un autre côté, je trouve toujours un peu curieux qu’un texte sur l’outre-mer soit examiné en commission des Lois. La loi est quelque chose. Elle nous fixe un cadre de vie commun ; elle doit faire respecter les principes de la République : liberté, égalité, fraternité.

Permettez-moi une petite parenthèse concernant l’actualité parce que je ne peux pas me taire. Il est important pour moi de rappeler le respect de la République. L’égalité réelle passe aussi par le respect de l’autre et donc de son origine.

M. le rapporteur. Origine gauloise, évidemment !

Mme Chantal Berthelot. Notamment en Guyane, nous sommes très fiers de nos origines diverses et variées, très fiers de nos ancêtres qui ne sont pas des Gaulois. Nos ancêtres sont des Chinois, des Eurasiens, des Amérindiens ou des Bushinenges.

S’agissant de l’égalité réelle, le Gouvernement a fait preuve de beaucoup d’ambition et il s’est fixé des objectifs louables, mais le texte produit me laisse perplexe, comme j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire. Vous m’avez partiellement répondu en disant que vous laissiez une place à la coproduction. Victorin Lurel a même parlé de très belle coproduction. Alors, étonnez-moi ! Faites en sorte que nous puissions sortir de nos travaux avec une très belle coproduction, et mes commentaires seront alors complètement différents.

Nos compatriotes ultramarins souffrent d’inégalités d’une manière très quotidienne, madame la ministre, comme vous avez pu vous en rendre compte sur le terrain à l’occasion de votre mission parlementaire. Les inégalités concernent l’accès à des services publics sur tout le territoire, à des soins de qualité, à l’emploi, à l’énergie, au logement, au numérique, à la garantie d’une plus grande sécurité, à l’éducation, à la culture. Il existe des inégalités externes et internes. En Guyane comme en Polynésie française, les inégalités internes sont aussi importantes que les inégalités externes.

La liste est longue, composée également de besoins que d’aucuns pourraient juger futiles ou accessoires. Permettez-moi de rappeler que nos concitoyens aimeraient avoir des abonnements internet et téléphoniques à des prix aussi décents que ceux qu’ils voient dans les publicités télévisées. Ils aimeraient aussi avoir accès à des billets d’avions à des tarifs abordables pour rejoindre l’Hexagone et les autres outre-mer. Pour aller de Guyane en Martinique ou en Guadeloupe, il faut parfois dépenser 700 euros dans un billet d’avion. À la lecture de ce projet de loi, force est de constater que les mesures proposées à ce stade ne permettront pas à nos concitoyens d’atteindre l’égalité réelle sur ces problématiques très précises.

Les mesures sociales doivent être densifiées. Des mesures économiques, sanitaires, environnementales et sécuritaires apparaissent indispensables. Vous avez indiqué, madame la ministre, que la coopération régionale, la culture et l’environnement pourraient faire l’objet de nouveaux titres. Sur l’environnement, j’ai des amendements prêts et quasiment déposés. Il faudrait y travailler ainsi que sur la culture.

J’aimerais aussi revenir sur l’évaluation, un sujet sur lequel j’ai commis un rapport avec Ibrahim Aboubacar et d’autres collègues. Nous y avons rappelé que l’évaluation des politiques publiques commence à prendre corps en France, même si elle chemine lentement. Il s’agit d’un enjeu important pour nous tous. Comme les points de convergence vont être territorialisés, chacun va proposer une stratégie et des objectifs. Sans données fiables et indicateurs très concrets, on ne pourra pas évaluer ces politiques publiques.

Dans un communiqué publié hier, France Stratégie rappelle la manière d’évaluer l’impact des politiques publiques sur nos territoires, évoquant une entité indépendante et des experts. « Encore faut-il pour cela disposer d’informations précises qui permettront d’arbitrer en faveur des solutions produisant les meilleurs résultats », indique le communiqué. Il est donc nécessaire de disposer d’une méthode et de données en amont. Nous pourrions nous inspirer du guide édité par France Stratégie pour faire des propositions concrètes concernant l’article 8 et de vraies mesures d’évaluations. Nous devons en effet nous interroger sur nos objectifs et les moyens employés pour y parvenir. Les mesures prises sont-elles les bonnes ? Il s’agit de moyens financiers mais aussi d’adaptation au territoire.

Nous partageons le constat d’échec évoqué par Maina Sage. Il me semble que les échecs sont surtout dus à des choix qui n’étaient pas adaptés à nos réalités géographiques et culturelles, à notre environnement, à nos particularismes. Avec une bonne évaluation, peut-être coproduirons-nous une loi ouvrant le chemin vers l’égalité réelle souhaitée par ceux qui nous ont précédés en 1946. Nos concitoyens l’exigent de nous aujourd’hui.

M. Boinali Said. Au regard de la présentation de ce texte et de ses effets escomptés, ces notions de convergence et de contrat me permettent d’espérer qu’à terme, dans une génération, nous voyions aboutir ces questions liées à l’égalité.

L’égalité pourrait aussi se construire à partir de ce qu’on appelle un changement de paradigme, de modèle, en intégrant la dimension régionale. Mais au vu des complexités de nos territoires et des retards structurels accumulés, je pense que la problématique de l’égalité tend aussi à la réduction des inégalités internes et à une réflexion plus approfondie autour des schémas économiques, des interactions entre les économies informelles et formelles. Quelle est la place de la transition vers l’économie formelle puisque la plupart de nos communes et régions sont traversées par ces activités informelles ?

M. Gabriel Serville. C’est avec un réel plaisir que j’accueille l’analyse de ce nouveau texte qui permet de porter un regard particulier et positivement différencié sur les outre-mer et sur l’impérieuse nécessité de tendre vers l’égalité réelle.

Madame la ministre, vous avez pris le temps de récapituler les nombreuses avancées obtenues par les outre-mer, suivant les trente engagements du Président de la République. Nous ne pouvons qu’en être satisfaits. Néanmoins, si beaucoup a été fait, on ne peut nier que beaucoup reste à réaliser. On pourrait s’interroger sur la sémantique utilisée et sur la notion d’égalité réelle, comme si nous étions confrontés à une autre forme d’égalité que celle qui est si chère à la devise républicaine : liberté, égalité, fraternité. Notre collègue Victorin Lurel n’a-t-il pas évoqué une quasi-égalité après soixante-dix ans de départementalisation ?

En réalité, je considère qu’il ne saurait y avoir d’égalité réelle sans une profonde compréhension de nos vérités fondamentales et, comme l’a rappelé notre collègue Chantal Berthelot, sans une relation de respect mutuel. À titre d’exemple, l’absence d’égalité a transpiré à travers le rejet de tous les amendements que j’ai présentés lors des discussions sur la loi réformant le droit d’asile. Conséquence : à ce jour, pas moins de 6 000 migrants ont été recensés en Guyane pour une population d’environ 250 000 personnes. Lorsque l’on recense 10 000 migrants dans l’Hexagone peuplé de 67 millions d’habitants, cela donne des sueurs froides à la République. Cet exemple montre bien qu’il y a deux poids, deux mesures.

Le chantier est vaste et nous nous y attellerons avec la plus grande détermination, sans faillir. En revanche, conformément à mes déclarations relatives au pacte d’avenir de la Guyane, je pense que des questions profondes subsistent quant aux traductions budgétaires et financières dont fera l’objet ce projet de loi. La procédure accélérée et le temps imparti, juste avant les prochaines élections, me laissent perplexes. C’est pourquoi je souhaiterais avoir des précisions sur les moyens réellement déployés pour garantir la mise en œuvre des quelques dispositions contenues dans ce projet de loi. Ce dernier ne répond pas véritablement à toutes nos attentes, mais si nous pouvions avoir quelques garanties et assurances sur le plan des moyens, nous pourrions rassurer les populations concernées.

Mme la ministre. Mesdames et Messieurs les députés, il est nécessaire de reposer les choses. Le Gouvernement est très fier de porter le sujet de l’égalité réelle, soixante-dix ans après la départementalisation. Si nous avions manqué ce rendez-vous, nous n’aurions pas eu de débat, pas eu non plus le courage de regarder les choses en face et nous n’aurions pas développé l’ambition de nous projeter dans le futur. En vous écoutant les uns et les autres, je n’ai pas peur de comparer notre projet pour l’égalité réelle avec celui de la départementalisation en 1946. Vos interventions montrent bien que nous nous trouvons à un rendez-vous important, car nous souhaitons construire l’avenir selon un modèle, une vision et une transparence nouveaux et sur un lien différent entre l’Hexagone et les territoires ultramarins. On écrit une nouvelle page en utilisant la méthode de la co-construction. Le texte de 1946 comprenait quatre articles, mais l’important ne réside pas dans la longueur d’un texte : il est dans le sens de notre combat politique et dans l’ambition que nous portons pour nos territoires. Saisir ces enjeux nécessite de bien connaître ces régions ; dans le cas contraire, on se laisse aller à des polémiques politiciennes et on n’écoute pas les arguments de l’autre.

C’est vrai, le temps est contraint. Le Gouvernement fait le pari d’effectuer le travail législatif en quatre mois ; cela ne sera pas simple, mais nous ne voulons pas manquer l’occasion de travailler au service de l’égalité réelle dans un esprit de co-construction avec le Parlement.

On ne peut pas dresser un constat d’échec global des soixante-dix dernières années. En effet, nos grands-parents n’ont pas connu l’école, nos parents y sont allés et ma génération a accédé à l’université. Il s’agit là du déploiement, pendant trois générations, d’un projet qui reposait sur la stratégie du rattrapage. Nous proposons d’écrire le futur en remplaçant cette stratégie par la dynamique de la convergence. On a construit imparfaitement des territoires depuis soixante-dix ans, peut-être à cause d’une volonté de mimétisme que nous écartons aujourd’hui, les enjeux et notre ambition ayant évolué.

Ce texte aussi est imparfait, car on ne peut pas arriver à un résultat sans défaut en aussi peu de temps, mais l’enjeu est grand et nous devons honorer ce rendez-vous. Ministre, j’ai souhaité la co-construction, parce que nous avons collectivement la responsabilité d’accomplir la première étape de l’égalité réelle. Il ne s’agit que d’un premier pas, ce texte devant servir de socle à des approfondissements futurs dans l’économie ou l’éducation. Ce travail nous oblige les uns et les autres, et je suis très fière et heureuse de participer avec vous à cette entreprise ; les gens nous attendent et ont besoin de disposer de nouveaux projets et d’une gouvernance renouvelée, fondée sur des façons de faire et des pilotages inédits ; tel est le discours que j’ai tenu hier aux Assises du tourisme.

Madame Bello, je participerai aux travaux de l’Observatoire de la connectivité, mis en place par mes collègues MM. Matthias Fekl et Alain Vidalies, afin d’agir dans ce domaine. Le Gouvernement intervient dans le dossier des mobilités aériennes, car les dispositifs régionaux actuels s’avèrent trop inflationnistes. Il convient également d’aborder ce sujet sous l’angle de la transparence de la formation des prix et de la concurrence. Dans ces matières, nous devons conserver le souci du dialogue et de l’équilibre de nos territoires.

Monsieur Aboubacar, je partage votre volonté de développer une co-construction raisonnable et raisonnée.

J’ai participé aux travaux, présidés par Mme Chantal Berthelot, de la CNEPEOM, et il m’apparaît nécessaire de réfléchir aux moyens d’améliorer l’évaluation.

Nous soutenons la proposition de Mme Marie-Anne Chapdelaine de réformer le Conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenges.

Nous voulons l’égalité, et la loi doit permettre d’adapter les dispositifs à ce que nous sommes, afin que les énergies puissent être libérées et que nous puissions tirer le meilleur parti de nos atouts. Comment pouvons-nous, en respectant le cadre législatif, atteindre cet objectif dans une République une et indivisible, mais diverse ?

Malgré la volonté de certains de l’attiser, il n’y a pas de polémique particulière sur les allocations familiales : leur obtention est soumise, y compris à Mayotte, aux conditions du droit commun, celles-ci comprenant la régularité du séjour sur le sol national.

Afin de sécuriser les populations, nous avons déployé un plan sécurité en Guyane et à Mayotte et lui avons affecté des moyens élevés.

Nous devons intensifier notre effort en matière de prévention, la reconstruction de la cohésion et du lien sociaux exigeant de renforcer le tissu associatif.

Enfin, il nous faut développer des projets de coopération avec les territoires ultra-marins : cela se révèle parfois compliqué, mais nous continuons à avancer dans ce domaine.

M. le président Dominique Raimbourg. Nous vous remercions, madame la ministre, de vos réponses. Je remercie également les rapporteurs, le président de la Délégation aux outre-mer ainsi que l’ensemble des intervenants pour leur participation active à cette réunion.

EXAMEN DES ARTICLES

Lors de ses deux réunions des 27 et 28 septembre 2016, la Commission examine les articles du projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique (n° 4000) (7).

M. le président Dominique Raimbourg. Mes chers collègues, notre Commission doit examiner, ce soir et demain matin, les articles du projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique. Elle a désigné M. Victorin Lurel rapporteur. Les commissions des Affaires économiques et des Affaires sociales, qui se sont saisies pour avis de ce projet de loi, ont désigné, respectivement, M. Serge Letchimy et Mme Monique Orphé, que je remercie de leur présence.

La délégation aux outre-mer s’est réunie. Son président, M. Jean-Claude Fruteau, a participé à la discussion générale.

Ce projet de loi a fait l’objet d’un travail parlementaire approfondi. La semaine dernière, nous avons en effet procédé à l’audition de la ministre des Outre-mer. Les commissions saisies pour avis se sont réunies hier. Enfin, cet après-midi, la délégation aux outre-mer était convoquée.

Compte tenu de ce travail préparatoire, je vous invite à être concis. Nous devons examiner 262 amendements. Pour ce faire, nous disposons de la séance de ce soir et de celle de demain matin. C’est à la fois beaucoup et peu.

Conformément à l’article 89 du Règlement, j’ai consulté M. Gilles Carrez, président de la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, sur les amendements dont la recevabilité financière devait être appréciée. Au regard de l’article 40 de la Constitution, une trentaine d’amendements ont été déclarés irrecevables. Les auteurs de ces amendements pourront engager un dialogue avec le Gouvernement d’ici à l’examen du texte en séance publique.

TITRE IER
STRATÉGIE EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ RÉELLE OUTRE-MER

Article 1er
Affirmation de l’objectif d’égalité réelle

1. Les dispositions initiales du projet de loi

Le présent article inscrit dans notre législation l’objectif d’égalité réelle outre-mer, c’est-à-dire la réduction des écarts de développement existants entre les outre-mer et l’Hexagone mais également au sein même des territoires ultra-marins.

Ainsi que le soulignait votre rapporteur dans le rapport qu’il a remis au Premier ministre, si « l’égalité des droits entre les ultramarins et les autres français est quasiment achevée : mêmes droits civiques, mêmes droits civils, même droit pénal applicable » (8), l’égalité réelle, sociale, économique, sanitaire et culturelle est encore loin d’être atteinte. L’égalité réelle s’entend, selon les mots du Président de la République lui-même, comme l’égalité économique et l’égalité des chances, c’est-à-dire « la capacité de pouvoir s’épanouir, s’accomplir et notamment sur le plan économique » (9).

Cet article solennise l’engagement pris par le Président de la République en faveur de l’égalité réelle en faisant de cette démarche « une priorité de la Nation. »

Il définit ensuite les objectifs des politiques publiques devant être mises en œuvre pour parvenir à cet objectif : la résorption des « écarts de développement en matière économique, sociale, environnementale mais aussi d’accès aux services publics et à la culture ». L’article donne là un contenu plus concret à cette notion d’égalité réelle, qui dépasse ainsi le seul cadre de l’égalité économique.

Il n’assortit en revanche la réduction de ces écarts de développement d’aucun objectif chiffré et ne donne lieu à aucune programmation financière, ainsi que l’a souligné le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi.

Les collectivités concernées par cet objectif sont celles qui sont mentionnées aux deuxième et troisième alinéas de l’article 72-3 de la Constitution, ce qui inclut tous les territoires d’outre-mer, à l’exception de Clipperton et des Terres australes et antarctiques françaises, qui ne sont pas habités de façon permanente.

L’objectif d’égalité réelle concerne donc à la fois les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution – la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et Mayotte –, celles qui sont régies par l’article 74 – Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, les îles de Wallis et Futuna, la Polynésie française – et la Nouvelle-Calédonie.

2. Le dispositif adopté par votre commission des Lois

À l’initiative de votre rapporteur, la Commission a adopté un amendement de rédaction globale de cet article. Cette nouvelle rédaction est à la fois plus prescriptive et plus complète que celle du projet de loi initial.

Elle reconnaît tout d’abord aux populations des outre-mer « le droit à l’égalité réelle au sein du peuple français ». Elle précise ensuite que l’État et les collectivités concernées « s’engagent à mettre en œuvre des politiques publiques appropriées » pour atteindre l’objectif d’égalité réelle plutôt que de simplement contribuer à les mettre en œuvre.

Le contenu de ces politiques publiques est également complété : celles-ci devront notamment résorber les écarts de niveaux de développement en matière économique, sociale et environnementale mais aussi en matière sanitaire, de différence d’accès aux soins, à l’éducation et à la culture. Il est également précisé que les politiques de convergence devront accélérer les efforts d’équipement, favoriser l’inclusion des collectivités dans leur environnement régional et instaurer l’égalité entre les femmes et les hommes.

Un nouvel alinéa reconnaît enfin le droit aux collectivités d’adopter un modèle propre de développement durable, conformément aux recommandations de votre rapporteur formulées dans le rapport qu’il a remis au Premier ministre en mars 2016.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL202 rectifié du rapporteur.

M. le rapporteur. Je vous propose une nouvelle rédaction de l’article 1er qui affirme de manière plus solennelle le droit à l’égalité réelle des populations d’outre-mer, remplace la notion de « réduction des écarts » par celle de « résorption des écarts », vise l’inclusion des territoires dans leur environnement régional, la valorisation de leurs atouts et de leurs ressources propres, l’égalité entre les femmes et les hommes et la lutte contre toutes les formes de discrimination, et énonce le droit d’adopter un modèle propre de développement dans chacun des territoires.

Cet amendement devrait satisfaire mes collègues.

M. Ibrahim Aboubacar. Cet amendement, répondant à la plupart des préoccupations que nous avons exprimées, rendra effectivement sans objet tous les amendements qui suivent.

Mme Catherine Coutelle. L’égalité entre les femmes et les hommes, mentionnée dans le présent amendement concernant les plans de convergence, sera-t-il également prise en compte au titre des actions opérationnelles ?

M. le rapporteur. Le plan de convergence, qui définira une vision à long terme pouvant aller jusqu’à vingt ans, devra être décliné dans des contrats de convergence, d’une durée de cinq ou six ans. L’égalité entre les femmes et les hommes sera un volet obligatoire de ces contrats.

La Commission adopte l’amendement CL202 rectifié. L’article 1er est ainsi rédigé.

En conséquence, les amendements CL105 de Mme Huguette Bello, CL48 de M. Ibrahim Aboubacar, CL106 de Mme Huguette Bello, CL66 de Mme Maina Sage, CL85 de M. Ibrahim Aboubacar, CL107 de Mme Huguette Bello, CL67 et CL68 de Mme Maina Sage et CL77 de Mme Sonia Lagarde de même que le sous-amendement CL301 du rapporteur deviennent sans objet.

Article 2
Définition des politiques publiques en faveur de l’égalité réelle dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution

1. Les dispositions initiales du projet de loi

Cet article concerne les seules collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, c’est-à-dire la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et La Réunion.

Il précise l’importance d’adopter une démarche de convergence adaptée à chacun des territoires pour tenir compte, selon la même formulation que celle de l’article 73 de la Constitution, « des caractéristiques et des contraintes particulières des collectivités » concernées. Il ne s’agit en effet pas de mettre en œuvre une démarche de convergence uniforme, qui viserait à aligner les outre-mer sur le modèle hexagonal, mais de valoriser les richesses et les atouts des territoires considérés pour qu’ils trouvent leur propre chemin de développement économique, social et environnemental.

L’article précise que la définition de ces politiques publiques fera l’objet d’une concertation entre l’État et les collectivités concernées.

Cet article recense également les différents outils juridiques prévus par la Constitution qui permettraient d’adapter ces démarches de convergence aux spécificités de chacun de ces territoires : l’expérimentation, l’adaptation et l’habilitation.

L’expérimentation a été introduite dans la Constitution par la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République dans deux articles : les articles 37-1 et 72.

L’article 37-1 autorise la loi ou le règlement à comporter, pour un objet et une durée limités, des dispositions à caractère expérimental. L’État peut ainsi, par le biais d’une loi, confier de nouvelles compétences à une collectivité.

Le quatrième alinéa de l’article 72 prévoit que « sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti, les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque selon le cas, la loi ou le règlement l’a prévu, déroger, à titre expérimental pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’exercice d’une compétence ». Les conditions d’application de cet alinéa ont été précisées par la loi organique n° 2003-704 du 1er août 2003 relative à l’expérimentation par les collectivités territoriales.

L’adaptation et l’habilitation sont en revanche propres aux collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution. Le premier alinéa de cet article 73, également introduit par la révision constitutionnelle de 2003, précise ainsi que, si les lois et règlements y sont applicables de plein droit, « ils peuvent faire l’objet d’adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités. »

Le troisième alinéa de l’article 73 dispose par ailleurs que dans un nombre limité de matières pouvant relever du domaine de la loi, ces collectivités peuvent être habilitées par la loi à fixer elles-mêmes les règles applicables sur leur territoire. Ces règles ne peuvent porter sur les aspects les plus régaliens de l’action de l’État : le quatrième alinéa du même article exclut en effet du champ de l’habilitation les questions relatives à la nationalité, les droits civiques, les garanties des libertés publiques, le droit pénal, la politique étrangère, la défense ou encore le droit électoral. Les conditions d’application de cet article ont été précisées par la loi organique n° 2011-883 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution.

2. Le dispositif adopté par votre commission des Lois

La Commission a adopté cet article ainsi que trois amendements, dont un rédactionnel. Un amendement de votre rapporteur vise tout d’abord à exclure l’ensemble des établissements publics locaux de la définition des politiques publiques de convergence, à la seule exception des établissements publics de coopération intercommunale. Votre rapporteur estime en effet que l’implication d’un trop grand nombre d’acteurs dans cette définition, comme les différentes agences des conseils départementaux ou régionaux, rendrait longue et difficile la définition de ces politiques. Un amendement de notre collègue Huguette Bello a précisé que la définition de ces politiques publiques devait tenir compte de « l’environnement régional » des collectivités concernées.

*

* *

La Commission adopte l’amendement de précision CL225 du rapporteur.

Puis elle étudie l’amendement CL108 de Mme Huguette Bello. 

Mme Huguette Bello. Après des décennies de face à face exclusif entre les régions d’outre-mer et la France continentale, le constat est unanime aujourd’hui pour reconnaître que le développement de ces territoires ne pourra être ni envisagé, ni réalisé, en dehors de leur espace régional. En effet, tout converge désormais vers une inscription réelle des outre-mer dans leur environnement géographique. Qu’il s’agisse de la nécessité, reconnue par tous, de s’engager de manière plus déterminée dans la coopération régionale, de la politique européenne du grand voisinage, de l’intensification des échanges sud-sud, du recours de plus en plus incontournable aux circuits courts ou de l’indispensable prise en compte de notre domaine maritime et de ses immenses potentialités, on le voit : l’égalité réelle passe par les retrouvailles avec la géographie. Cet amendement vise donc à inscrire dans la loi cette donnée incontournable du développement des outre-mer.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL240 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Article 3
Définition des politiques publiques en faveur de l’égalité réelle dans les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie

1. Les dispositions initiales du projet de loi

Le présent article concerne les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution – Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, les îles de Wallis et Futuna, la Polynésie française – et la Nouvelle-Calédonie.

Il comporte des dispositions analogues à celles de l’article 2 en soulignant la nécessité d’adapter les politiques publiques conduites aux spécificités des collectivités concernées.

Il précise que l’État « apporte un concours actif dans le cadre de la mise en œuvre de cette démarche ».

2. Le dispositif adopté par votre commission des Lois

Votre Commission a adopté cet article après y avoir apporté quelques précisions.

Un amendement de votre rapporteur dispose tout d’abord que les politiques publiques mises en œuvre devront tenir compte des « intérêts propres de chacune de ces collectivités », pour reprendre la formulation de l’article 74 de la Constitution.

Un autre amendement de votre rapporteur exclut l’ensemble des établissements locaux, à l’exception des établissements publics de coopération intercommunale, de la définition des politiques publiques et un amendement de notre collègue Daniel Gibbes précise que ces politiques devront tenir compte de l’environnement régional des collectivités.

Un autre amendement de M. Daniel Gibbes permet, enfin, de recenser dans cet article, par parallélisme avec l’article 2, les outils juridiques prévus par la Constitution qui permettraient d’adapter les démarches de convergence aux spécificités des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie : l’expérimentation et l’adaptation.

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* *

La Commission examine l’amendement rédactionnel CL226 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement a pour objet de ne viser que les établissements publics de coopération intercommunale, à l’exclusion de tous les autres établissements publics locaux.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CL243 de précision du même auteur.

M. le rapporteur. Cet amendement reprend les termes mêmes de la Constitution en visant les intérêts propres des COM du Pacifique, au lieu de leurs « contraintes particulières ».

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine l’amendement CL2 de M. Daniel Gibbes. 

M. Daniel Gibbes. L’intégration des territoires ultramarins dans leur environnement économique régional est un facteur clef à prendre en considération si l’on souhaite véritablement mettre fin aux inégalités. Saint-Martin et Sint-Maarten, par exemple, sont une île, une région ultra-périphérique (RUP) et un pays et territoire d’outre-mer (PTOM). Mais d’un côté, le SMIC est de 600 dollars et de l’autre, il est de même niveau que le SMIC hexagonal.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

La Commission aborde l’amendement CL11 de M. Daniel Gibbes.

M. Daniel Gibbes. La Constitution prévoit l’expérimentation et l’adaptation de la loi dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 comme pour celles relevant de l’article 73. La flexibilité du cadre législatif applicable sur ces territoires justifie d’autant plus l’expérimentation de nouvelles normes.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

La Commission adopte l’article 3 modifié.

Article 3 bis (nouveau)
Affirmation de la continuité territoriale comme priorité de l’action de l’État

Suivant l’avis favorable de votre rapporteur, votre commission des Lois a adopté un amendement de M. Stéphane Claireaux qui affirme que la mise en place et le maintien de liaisons territoriales continues entre les différentes composantes du territoire de la République constituent un enjeu de souveraineté et une priorité de l’action de l’État.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL16 de M. Stéphane Claireaux. 

M. Stéphane Claireaux. Au moment où de nombreux pays limitrophes des départements et collectivités d’outre-mer mettent en place de nouveaux systèmes de visa qui s’appliquent aux ressortissants français, l’absence de liaison aérienne directe entre ces territoires de la République et le reste du territoire national, comme c’est le cas pour Saint-Pierre-et-Miquelon, pose de réels problèmes de souveraineté nationale et de continuité territoriale. Nous sommes à Saint-Pierre-et-Miquelon les seuls citoyens français à devoir demander l’autorisation à un pays tiers pour pouvoir circuler entre deux points du territoire national, voire pour pouvoir rentrer chez nous.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement. L’article 3 bis est ainsi rédigé.

Article 3 ter (nouveau)
Affirmation d’un objectif de construction de logements

La Commission a adopté un amendement de votre rapporteur qui inscrit dans la présente loi de programmation l’objectif chiffré de construction de 150 000 logements dans les territoires d’outre-mer au cours des dix années suivant sa promulgation.

*

* *

La Commission étudie l’amendement CL169 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement a trait à l’objectif de construction de 150 000 logements. Notre loi de programmation devant être ambitieuse, il est important qu’elle soit assortie d’objectifs chiffrés. Le logement étant un enjeu considérable, je vous propose d’adopter cet amendement.

La Commission adopte l’amendement. L’article 3 ter est ainsi rédigé.

TITRE II
DISPOSITIONS EN FAVEUR DE LA CONVERGENCE

Chapitre Ier
Instruments de mise en œuvre de la convergence

Article 4
Création de plans de convergence dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution

Cet article prévoit la création de nouveaux instruments de planification pluriannuels à la disposition de l’État et des collectivités de l’article 73 : les plans de convergence. Conclus pour des durées inédites par leur ampleur, dix à vingt ans, ils auront pour objectif, selon l’étude d’impact du projet de loi, de « sortir d’une logique de planification sectorielle de moyen terme pour adopter une perspective transverse de long terme. »

1. Les outils de programmation existants

Il existe aujourd’hui plusieurs dispositifs de programmation pluriannuels dans les outre-mer, dont les principaux sont les contrats de plan État-région (CPER) pour les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution.

Les CPER sont des contrats par lesquels l’État et une région s’engagent sur la programmation et le financement d’investissements structurants pour le territoire concerné. « Ils traduisent les priorités partagées par l’État et les régions, mais aussi les autres niveaux de collectivités territoriales, en matière d’aménagement et de développement du territoire national » selon la circulaire du Premier ministre du 2 août 2013. Créés par la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification, ils sont conclus simultanément par toutes les régions pour une durée de six ans. La nouvelle génération de CPER, la sixième depuis 1984, a été conclue pour la période 2015-2020, et représente un total de trente milliards d’euros de crédits contractualisés au niveau national, dont 12,5 milliards d’euros de crédits de l’État.

Afin de ne pas disperser les efforts, les contrats portent sur un nombre limité de thématiques, six, au service d’une politique transversale, l’emploi :

– la mobilité multimodale,

– l’enseignement supérieur, recherche et innovation,

– la transition écologique et énergétique,

– le numérique,

– l’innovation, les filières d’avenir et l’usine du futur,

– les territoires.

Pour ce qui concerne les départements et régions d’outre-mer, la circulaire du Premier ministre du 2 août 2013 a prévu « une adaptation et un élargissement du cadre contractuel par rapport à la métropole » pour tenir compte de leurs situations spécifiques. Six thématiques ont ainsi été retenues, l’emploi étant également abordé de manière transversale en leur sein :

– les infrastructures et services collectifs de base, la vulnérabilité des territoires et des populations,

– l’aménagement urbain durable,

– la gestion des ressources énergétiques et environnementales (transitions énergétiques et écologiques),

– le développement de la recherche et de l’innovation, les filières d’excellence,

– la cohésion sociale et l’employabilité,

– le développement économique durable (comprenant le développement de l’économie numérique) ; des actions et initiatives visant à répondre, localement, aux appels à projets lancés dans le cadre du volet numérique du « Programme investissements d’avenir ».

Un volet « mobilité multimodale » a également été ajouté à ces thématiques, conformément à une circulaire du Premier ministre du 25 septembre 2013.

Les contrats de plan 2015-2020 ont été signés avec la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et La Réunion à l’été 2015. Plus de deux milliards d’euros de crédits ont été contractualisés avec les différentes collectivités, dont 865 millions d’euros de crédits de l’État.

Le schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDEII) est un outil plus récent, qui a succédé aux schémas régionaux de développement économique, expérimentés entre 2005 et 2010. Introduit par l’article 2 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, le SRDEII définit « les orientations en matière d’aides aux entreprises, de soutien à l’internationalisation et d’aides à l’investissement immobilier et à l’innovation des entreprises, ainsi que les orientations relatives à l’attractivité du territoire régional. Il définit les orientations en matière de développement de l’économie sociale et solidaire, en s’appuyant notamment sur les propositions formulées au cours des conférences régionales de l’économie sociale et solidaire. » (10)

Le projet de schéma doit faire l’objet d’une présentation et d’une discussion au sein de la conférence territoriale de l’action publique mentionnée à l’article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales, avec les chambres consulaires et avec la chambre régionale de l’économie sociale et solidaire. Il doit être adopté par le conseil régional dans l’année qui suit son renouvellement (11).

Le schéma d’aménagement régional (SAR) est un outil propre aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution. Il fixe « les orientations fondamentales à moyen terme en matière de développement durable, d’atténuation et d’adaptation aux effets du changement climatique, d’économies d’énergie, de qualité de l’air, de valorisation du potentiel d’énergies renouvelables, de mise en valeur du territoire et de protection de l’environnement » (12). Il équivaut, pour les collectivités concernées, au schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie prévu par l’article L. 222-1 du code de l’environnement (13).

Conclu pour une durée de dix ans, le SAR présente la particularité d’être approuvé par décret en Conseil d’État (14). Il s’impose aux plans locaux d’urbanisme, qui doivent être compatibles avec lui (15).

La Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et La Réunion étant des régions ultrapériphériques (RUP) au sens des articles 349 et 355 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, elles bénéficient à ce titre d’un certain nombre de programmes opérationnels européens.

Compte tenu de leur niveau de produit intérieur brut (PIB) par habitant, ces collectivités entrent en effet dans les critères définis par la politique de cohésion européenne visant à réduire les disparités économiques et sociales entre les régions de l’Union. L’intervention s’élève, selon l’étude d’impact du projet de loi, à cinq milliards d’euros sur la période 2004-2020, financés par quatre fonds structurels d’investissement : fonds européen de développement régional (FEDER), fonds social européen (FSE), fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) et fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP).

2. La création de plans de convergence

Les plans de convergence institués par le présent article se distinguent des instruments de planification existants à la fois par leur inscription dans un temps inhabituellement long, dix à vingt ans, et l’ampleur des thématiques abordées.

Le I du présent article précise que ces plans définissent les orientations et précisent les mesures visant à mettre en œuvre de manière opérationnelle les objectifs énumérés à l’article 1er du projet de loi, c’est-à-dire la réduction des écarts de développement en matière économique, sociale, environnementale et les différences d’accès aux services publics et à la culture entre les collectivités d’outre-mer et le territoire hexagonal.

Le II de l’article détermine ensuite avec précision le contenu des plans de convergence.

Ceux-ci devront ainsi tout d’abord définir leur périmètre ainsi que leur durée, comprise entre dix et vingt ans selon le territoire concerné (), en s’appuyant pour cela sur un diagnostic économique, social, financier et environnemental (2°).

Une stratégie de convergence de long terme, tenant compte des spécificités de chacun des territoires, déterminera le « niveau de réduction des écarts de développement à atteindre » au terme du plan (). C’est cette stratégie qui prévoira les actions à entreprendre dans l’ensemble des secteurs entrant dans le périmètre du plan.

Ces secteurs sont particulièrement nombreux puisque, outre les actions en matière d’environnement, de développement économique et social, d’accès aux services publics et à la culture, déjà évoquées à l’article 1er du projet de loi, on y recense notamment les actions en matière d’infrastructures, de santé et d’accès aux soins, d’éducation, de formation professionnelle, de logement, d’accès à la justice, de télécommunications, d’accès à l’information et au sport.

Un volet opérationnel permettra ensuite de préciser l’ensemble des actions à conduire dans chacun des secteurs retenus par la stratégie (). Il s’agira, selon l’étude d’impact du projet de loi, de volets évolutifs, régulièrement révisés, « faisant des plans de convergence des processus agiles, s’adaptant en continu à l’évolution des réalités outre-mer ».

Le choix a en effet été fait par le Gouvernement de ne pas assortir les plans de convergence de contrats opérationnels de plus courte durée pour assurer leur mise en œuvre, contrairement à ce que proposait votre rapporteur dans son rapport au Premier ministre avec la création de « contrats de convergence ». Ce sont donc ces volets opérationnels qui serviront de support à l’action de l’État et des collectivités signataires des plans de convergence, sans que leur durée ou les modalités de leur évolution ne soit prévue par le projet de loi.

Le précise que les plans de convergence comprendront un volet relatif aux éventuelles demandes d’habilitation et d’expérimentation ainsi que les propositions de modification ou d’adaptation législatives ou réglementaires prévues par la Constitution demandées par les collectivités compétentes concernées.

Le prévoit que les plans comprennent une programmation financière de leurs actions.

Les plans de convergence comporteront un tableau de suivi des actions et des projets inscrits (). Ce tableau de suivi est un élément très important du plan, qui permettra de procéder à l’évaluation régulière de la stratégie de la convergence.

Cette évaluation sera effectuée par la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer (CNEPEOM) dans les conditions prévues à l’article 8 du projet de loi. Elle s’appuiera pour cela sur les nouveaux indicateurs de richesse utilisés par le Gouvernement dans le rapport qu’il remet désormais chaque année au Parlement (cf. supra.). Le 7° du présent article précise que les collectivités pourront utiliser tout ou partie de ces indicateurs de richesse pour l’établissement de leurs tableaux de suivi.

Le précise enfin que les plans de convergence pourront comprendre toute mesure contractuelle nécessaire à leur gouvernance, à leur mise en œuvre et à leur évaluation.

Le III dispose que les documents de planification et de programmation existants, c’est-à-dire par exemple les contrats de plan État-région (CPER) et les schémas d’aménagement régional (SAR), « tiennent compte de la stratégie de convergence définie dans le plan ».

Ce faisant, le projet de loi ne créé donc pas de hiérarchie entre les différents instruments de planification, au sommet de laquelle se seraient situés les plans de convergence. Ainsi que le relève le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi, ces plans « ne s’imposent ni se substituent aux autres documents de planification existants ». Une telle hiérarchie existe pourtant entre certains documents de planification : les plans locaux d’urbanisme doivent, par exemple, « être compatibles » avec les SAR (16).

Mais dans le cas des plans de convergence, l’étude d’impact du projet de loi souligne qu’une hiérarchisation aurait notamment supposé de remettre en cause les contrats de plan État-région signés en 2015 ou de repousser après 2020 l’entrée en vigueur des plans de convergence.

L’articulation des plans de convergence avec les instruments de planification existants n’est donc pas clairement précisée par le projet de loi et rien n’est prévu pour assurer leur primauté. Le choix a été fait de créer un document de « droit souple » destiné à s’imposer progressivement aux autres instruments grâce à son caractère transverse et sa durée supérieure, selon les termes de l’étude d’impact.

Le IV prévoit que les plans de convergence fassent l’objet d’une présentation et d’une discussion au sein de la conférence territoriale de l’action publique, à l’image de ce que la loi a déjà prévu pour le schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (17).

Créée par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, cette conférence peut débattre et rendre des avis sur tous les sujets relatifs à l’exercice de compétences et à la conduite de politiques publiques nécessitant une coordination ou une délégation de compétences entre les collectivités territoriales et leurs groupements (18). Présidée par le président du conseil régional, elle est composée de représentants des conseils régionaux et départementaux, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale.

Le projet de loi prévoit que le débat porte sur l’articulation et la coordination des politiques de convergence entre les différentes collectivités et l’État.

Le V précise que les plans de convergence sont signés par l’État, les collectivités et les établissements publics intéressés, ce qui inclut un grand nombre de signataires potentiels : les départements et les régions, les collectivités de Guyane et de Martinique, mais aussi leurs communes ainsi que les établissements publics intercommunaux.

Le VI prévoit enfin la possibilité de réviser les plans de convergence, partiellement ou totalement, à mi-parcours de leur exécution. Compte de la durée particulièrement longue de ces plans, cette révision permettra d’apporter à la démarche les ajustements nécessaires.

3. Les dispositions adoptées par votre commission des Lois

La Commission a adopté cet article en y apportant, par voie d’amendements, plusieurs précisions visant à compléter le contenu des plans de convergence.

Un amendement de votre rapporteur prévoit ainsi que ces plans comprendront désormais un diagnostic sur les inégalités de revenu et de patrimoine, les discriminations et les inégalités entre les femmes et les hommes.

À l’initiative de Mme Catherine Coutelle et M. Thierry Robert, trois amendements ont complété les orientations fondamentales devant être précisées dans les stratégies de convergence : sont ainsi mentionnés l’égalité entre les femmes et les hommes, la lutte contre l’illettrisme et l’accès à la mobilité.

Le volet regroupant l’ensemble des actions opérationnelles s’est également enrichi pour inclure des actions en matière d’égalité entre les femmes et les hommes et de lutte contre l’illettrisme, toujours à l’initiative de Mme Catherine Coutelle et M. Thierry Robert.

La Commission a adopté un amendement de votre rapporteur qui inscrit dans la loi la possibilité pour les collectivités de conclure des contrats de convergence, qui constitueraient des déclinaisons opérationnelles des plans de convergence, dans les conditions prévues au nouvel article 5 bis.

Elle a également adopté un amendement de votre rapporteur qui prévoit, au III de l’article, que les documents de planification et de programmation déjà conclus devront être rendus compatibles avec les plans de convergence. Cette disposition vise à assurer la primauté de ces derniers sur notamment les contrats de plan État-région (CPER) et schémas d’aménagement régionaux (SAR). Dans la mesure où la convergence constitue désormais une priorité de la Nation, votre rapporteur juge en effet important que la mise en œuvre de ces plans prime sur les autres documents de planification.

Le V de cet article a enfin été modifié par un amendement de votre rapporteur pour, d’une part, exclure, à l’exception des établissements publics de coopération intercommunale, l’ensemble des établissements publics locaux et, d’autre part, fixer une date limite à la conclusion des plans – dans les douze mois suivants la promulgation de la loi et, au plus tard, le 1er juillet 2018.

*

* *

La Commission adopte successivement l’amendement de précision CL224 et l’amendement rédactionnel CL241 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CL290 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à inclure dans les plans de convergences un diagnostic portant sur les inégalités internes de chacun des territoires concernés. Nous visons également les inégalités de patrimoine.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL44 de Mme Catherine Coutelle. 

M. Ibrahim Aboubacar. Nous proposons d’insérer l’objectif d’égalité entre les femmes et les hommes à plusieurs endroits des articles 4 et suivants.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement CL25 de M. Thierry Robert. 

M. Thierry Robert. La seule mention de l’éducation dans les actions à prévoir dans les plans de convergence est insuffisante, la lutte contre l’illettrisme constituant un enjeu en soi, au sein des établissements scolaires et en dehors. De nouveaux dispositifs et des moyens supplémentaires, humains et financiers, sont nécessaires pour lutter contre l’illettrisme dont sont victimes de nombreux ultra-marins. Il serait incompréhensible de ne pas prendre en compte en tant que tel ce fléau qui bride tout projet d’autonomisation ou d’émancipation. Son éradication doit être l’objet d’actions propres dans le cadre des futurs plans de convergence outre-mer. C’est le sens de l’amendement.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL27 de M. Thierry Robert.

M. Thierry Robert. L’amendement évoque la continuité territoriale et la majoration du coût des billets d’avion, maintenu artificiellement haut par la faiblesse de la concurrence sur les liaisons entre les outre-mer et la France métropolitaine et par la participation financière des collectivités territoriales. Il tend à ce que soit inscrite à l’ordre du jour des débats antérieurs à l’élaboration des plans de convergence entre l’État et les collectivités concernées la question de « l’ouverture du ciel » des outre-mer, par le biais de plans adaptés à chaque territoire, dans l’optique de faire baisser les tarifs de ces vols.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL45 de Mme Catherine Coutelle. 

M. Ibrahim Aboubacar. L’amendement, qui fait référence à l’égalité entre les hommes et les femmes, est dans le prolongement de celui dont il a été question précédemment.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement CL26 de M. Thierry Robert.

M. Thierry Robert. L’amendement tend à ce que les plans de lutte contre l’illettrisme soient inclus dans le volet comportant les actions opérationnelles des futurs plans de convergence.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL200 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement vise à réintroduire dans la loi la possibilité donnée aux collectivités de conclure des contrats de convergence, qui a été supprimée par le Gouvernement.

M. Ibrahim Aboubacar. Le sujet, qui concerne l’architecture du dispositif, n’est pas neutre. Les plans de convergence s’étaleront sur une vingtaine d’années. L’idée de contrats de convergence pour une durée plus courte est bonne, mais il faudra travailler à leur articulation avec les autres outils programmatiques prévus pour la même durée car le problème se posera immanquablement.

M. le rapporteur. C’est prévu.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL28 de M. Thierry Robert.

M. Thierry Robert. La consécration des méthodes de l’habilitation, de l’adaptation ou de l’expérimentation afin d’obtenir une égalité réelle pour l’outre-mer est bénéfique. Toutefois, pour rendre l’action de l’État et des collectivités concernées plus efficace lors de l’élaboration des plans de convergence propres à chaque territoire, il conviendrait de recenser les dispositions législatives et réglementaires susceptibles d’être l’objet de ces procédures. La connaissance du sujet par les collectivités concernées contribuera à conduire des plans de convergence plus ambitieux et plus fournis.

M. le rapporteur. L’inventaire des domaines susceptibles de faire l’objet d’expérimentations, d’adaptations ou d’habilitation aura lieu lors des diagnostics économiques, sociaux et environnementaux prévus pour le plan de convergence. Rien ne sert de surcharger le texte ; je suggère le retrait de l’amendement.

M. Ibrahim Aboubacar. Je pense que la proposition est satisfaite par l’alinéa 7 de l’article.

M. Thierry Robert. Je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL246 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement vise, en renforçant la portée normative et donc la force juridique du texte sans porter atteinte au principe de la libre administration des collectivités territoriales, à rendre les plans de convergence compatibles avec les documents de programmation existants et à permettre ainsi une vision à long terme du développement des territoires concernés. Le Gouvernement est d’accord avec l’articulation proposée. Les contrats de convergence étant alignés sur la durée des mandats locaux, les exécutifs entrants pourront ainsi présenter des amendements à ce qui a été précédemment adopté, sans subir ce que leurs prédécesseurs auront décidé ; la démocratie s’en trouvera renforcée. Il conviendra d’autre part que le contrat de plan État-région (CPER), qui contient une annexe financière, devienne un volet obligatoire du plan de convergence. Ce sera soumis au vote des assemblées avant ou après signature avec l’État, puis le préfet en fera son affaire dans le cadre du contrôle de légalité.

M. Ibrahim Aboubacar. Souhaite-t-on rendre obligatoire la compatibilité des autres documents de planification avec le plan de convergence ou avec les contrats de convergence dont nous venons d’adopter le principe ?

M. le rapporteur. La question mérite que l’on s’y attarde. Je vous demande d’adopter l’amendement tel qu’il est formulé, et nous verrons à en préciser la rédaction en séance publique.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL245 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CL205 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement tend à limiter la signature des plans de convergence aux seuls collectivités et établissements publics de coopération intercommunale, afin de limiter le nombre de contractants, et à fixer au 1er juillet 2018 la date limite de signature des plans de convergence.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

Article 5
Possibilité de créer des plans de convergence dans les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie

1. Les dispositions initiales du projet de loi

Cet article s’applique aux collectivités régies par l’article 74 de la Constitution – Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, les îles de Wallis et Futuna, la Polynésie française – et à la Nouvelle-Calédonie.

Dans les collectivités de l’article 74, ce ne sont pas des contrats de développement État-région qui sont signés mais des contrats de projets et de développement. Ces derniers s’inscrivent dans une logique de programmation pluriannuelle de soutien aux investissements structurants comparable à celle des CPER. 272 millions d’euros de crédits de l’État ont été contractualisés avec les cinq collectivités concernées jusqu’en 2020.

La Nouvelle-Calédonie signe pour sa part des contrats de développement avec l’État. Créés par l’article 210 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, ils ont pour objet de favoriser « l’accès aux formations initiales et continues, l’insertion des jeunes, le développement économique, l’amélioration des conditions de vie des populations et le développement culturel. » Ils sont conclus et renouvelés pour une période de cinq ans avec la Nouvelle-Calédonie et chacune de ses provinces. Pour la période 2011-2016, ce sont dix contrats de développement qui ont été conclus avec l’État, pour un engagement financier de 408 millions d’euros de sa part.

La Nouvelle-Calédonie élabore également un schéma d’aménagement et de développement qui « exprime les orientations fondamentales en matière d’infrastructures, de formation initiale et continue, d’environnement, d’équipements, de services d’intérêt territorial et de développement économique, social et culturel » (19). Conclu pour cinq ans, il s’impose aux contrats de développement.

Le présent article n’impose pas à ces collectivités la signature de contrats de convergence mais prévoit simplement la possibilité pour l’État de leur proposer la signature de contrats de plans de convergence inspirés de ceux définis à l’article 4.

2. Les modifications apportées par votre commission des Lois

Votre Commission a adopté cinq amendements de MM. Daniel Gibbes et Philippe Gomes pour compléter le contenu des plans de convergence dans les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie.

Dans ces dernières, le plan de convergence devra désormais également comprendre un volet institutionnel pour adapter les institutions de ces collectivités au développement socio-économique de leur territoire. Les plans de convergence de Nouvelle-Calédonie devront pour leur part comprendre en plus les voies permettant une révision du dispositif de la continuité territoriale, afin d’adapter l’aide à l’achat de billets d’avions aux revenus des foyers bénéficiaires, des mesures visant à aligner progressivement les prix des services bancaires sur ceux de l’Hexagone ainsi qu’une extension locale des missions de la Banque publique d’investissement (Bpifrance).

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* *

La Commission examine l’amendement CL3 de M. Daniel Gibbes. 

M. Daniel Gibbes. Dans sa rédaction actuelle, l’article ne traduit pas la forte implication de l’État dans l’élaboration des plans de convergence des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution. Il est donc proposé par cet amendement que ces collectivités « saisissent » l’État en vue de l’élaboration. Le terme reflète mieux leur degré d’autonomie.

M. le rapporteur. Parce que nous visons à ce que la mise en œuvre des plans de convergence soient rendus obligatoires par loi, j’exprimerai un avis défavorable. Je suis, en revanche favorable à l’amendement CL78 de M. Jean-Paul Tuaiva qui, plus prescriptif que le projet dans sa rédaction actuelle, prévoit l’élaboration conjointe des plans de convergence par l’État et les collectivités considérées.

M. Ibrahim Aboubacar. Le plan de convergence est impératif pour les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution ; pour celles qui sont régies par l’article 74 de la Constitution, il est prévu que l’État le propose. Une symétrie d’initiative est nécessaire et nous devons régler cette question d’une manière ou d’une autre.

M. le président Dominique Raimbourg. L’amendement CL78, qui concerne également l’élaboration du plan de convergence mais pour d’autres territoires, n’étant pas soutenu, je suggère de reprendre la discussion sur ce point en séance publique.

Mme Maina Sage. J’appuie cette proposition. Nous devons trouver un accord.

M. le rapporteur. Je pense également que nous devrons trouver une meilleure rédaction d’ici à la séance publique.

M. Daniel Gibbes. Je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte ensuite l’amendement de précision CL227 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL4 de M. Daniel Gibbes.

M. Daniel Gibbes. L’article 5 détaille la teneur des plans de convergence des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie. Ils ne peuvent être complets sans un volet institutionnel, appelé à évoluer pour tenir compte du développement socio-économique des territoires. C’est ce que souligne l’amendement.

M. le rapporteur. Avis favorable.

M. Ibrahim Aboubacar. Je comprends l’idée mais j’appelle à la prudence : il ne faudrait pas que cette disposition soit un motif de paralysie des plans de convergence.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL32 de M. Philippe Gomes.

M. Daniel Gibbes. L’amendement est défendu.

M. le rapporteur. Il est satisfait, puisque nous avons adopté le principe d’un rapport visant à étendre la contribution au service public de l’électricité à la Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Je suggère donc son retrait.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL31 de M. Philippe Gomes.

La Commission est saisie de l’amendement CL33 de M. Philippe Gomes.

M. Daniel Gibbes. L’amendement prévoit d’intégrer dans les plans de convergence les voies permettant d’aligner progressivement les tarifs des services bancaires et des taux d’intérêt pratiqués en Nouvelle-Calédonie sur les tarifs moyens constatés en métropole.

M. le rapporteur. Avis défavorable au bénéfice de l’amendement CL34 qui, portant uniquement sur les tarifs bancaires, me paraît plus raisonnable. Ce serait s’ingérer dans la gestion des établissements de crédit de prétendre dicter les taux d’intérêt qu’ils doivent appliquer.

M. Daniel Gibbes. Je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL34 de M. Philippe Gomes.

Elle examine ensuite l’amendement CL35 de M. Philippe Gomes. 

M. Daniel Gibbes. Par cet amendement, il est proposé qu’en Nouvelle-Calédonie le plan de convergence soit l’occasion de définir les modalités selon lesquelles Bpifrance mettra en œuvre, en les adaptant, l’ensemble de ses produits destinés aux entreprises.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement CL5 de M. Daniel Gibbes. 

M. Daniel Gibbes. L’amendement tend à ce que la définition des orientations visant à réduire les écarts de développement soit obligatoirement précédée d’un état des lieux précis et fiable des transferts de compétences et de charges de l’État aux collectivités dans les six mois précédent l’élaboration du plan de convergence. Ce plan doit impérativement être défini sur des bases saines.

M. le rapporteur. Avis défavorable puisque l’état des lieux sera réalisé dans le cadre du diagnostic économique, social, environnemental et institutionnel préalable à l’élaboration du plan de convergence.

M. Daniel Gibbes. On a vu, lors du transfert de compétences à la collectivité, que l’état des lieux n’a pas toujours été ce qu’il aurait dû être. Nous en avons un exemple concret.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 5 modifié.

Article 5 bis (nouveau)
Création de contrats de convergence

Votre Commission a adopté un article additionnel qui vise à créer des contrats de convergence. Suivant la recommandation déjà émise par votre rapporteur dans son rapport au Premier ministre, la mise en œuvre des plans de convergence doit pouvoir être déclinée dans des contrats plus courts, d’une durée maximale de six ans.

La conclusion de ces contrats de convergence ne constituera cependant pas une obligation pour les collectivités. Les CPER pourront ainsi tenir lieu de contrats de convergence dans certains cas, ou constituer une partie de ces contrats de convergence dans d’autres cas. Il ne s’agit en effet pas d’empiler des dispositifs contractuels mais plutôt de prévoir un instrument souple, adapté à la mise en œuvre concrète des plans.

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* *

La Commission examine l’amendement CL201 du rapporteur.

M. le rapporteur. Pour assurer au mieux l’exécution des plans, ils convient de les assortir de contrats conclus pour des durées plus courtes – six années au maximum. C’est l’une des recommandations du rapport mais ce ne sera pas une obligation et, dans les cas où cette faculté ne serait pas utilisée, les CPER seraient l’une des composantes des contrats de convergence. Ainsi évitera-t-on l’empilement d’instruments de planification.

La Commission adopte l’amendement. L’article 5 bis est ainsi rédigé.

Article 6
(art. L. 1111-9 et L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales)

Dérogations au principe d’interdiction des financements croisés et de cumul de subventions entre plusieurs niveaux de collectivité

Cet article prévoit que les actions inscrites dans les plans de convergence puissent déroger aux principes d’interdiction de financements croisés par plusieurs collectivités et de cumul de subventions entre plusieurs niveaux de collectivité.

Le quatrième alinéa de l’article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales dispose en effet que les projets nécessitant le concours de plusieurs collectivités ne peuvent recevoir de subventions d’investissements que de la région ou du département. La seule dérogation à cette interdiction de financement croisé concerne les contrats de plan État-région. Le du présent article étend cette dérogation aux plans de convergence.

Le I de l’article L. 1111-10 du même code dispose que le département peut seulement contribuer au financement des projets dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les communes ou leurs groupements. Il prévoit simplement une dérogation à ce principe pour le financement des contrats de plan État-région. Le du présent article vise à étendre cette dérogation aux plans de convergence.

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La Commission adopte l’article 6 sans modification.

Article 7
(art. L. 2563-7 [nouveau], L. 2564-19, L. 2564-19-1 [nouveau], L. 2573-39, L. 3541-1, L. 3443-3 [nouveau], L. 4434-10 [nouveau], L. 5823-1 [nouveau], L. 5842-9, L. 71-111-3, L. 72-101-3 du code général des collectivités territoriales ; art. L. 212-1 du code des communes de Nouvelle-Calédonie)

Prise en compte des plans de convergence dans les rapports et débats d’orientation budgétaire des collectivités

Cet article instaure une présentation de l’état d’avancement des plans de convergence dans les rapports sur les orientations budgétaires des différentes collectivités ultramarines concernées ou, dans les collectivités n’étant pas soumises à l’obligation de présenter un rapport, l’organisation d’un débat.

1. L’état du droit

Le code général des collectivités territoriales impose aux présidents des assemblées délibérantes de présenter à leur assemblée, dans un délai de deux mois avant l’examen de leur budget, un rapport sur les orientations budgétaires, les engagements pluriannuels envisagés ainsi que sur la structure et la gestion de la dette de leur collectivité.

Cette obligation concerne les communes de 3 500 habitants et plus (20) et leurs établissements publics(21), les départements (22) et les régions (23).

Dans les communes de 10 000 habitants et plus (24), les établissements publics de plus de 10 000 habitants comprenant au moins une commune de 3 500 habitants (25), les départements (26) et les régions (27), le rapport comporte en outre une présentation de la structure et de l’évolution des dépenses et des effectifs de la collectivité.

Ce rapport d’orientation budgétaire donne lieu à un débat et fait l’objet d’une délibération spécifique de la part de l’assemblée délibérante.

Dans les collectivités de Guyane (28) et de Martinique (29), la loi ne prévoit pas la remise d’un rapport mais seulement l’organisation d’un débat, dans un délai de dix semaines précédant l’examen du budget, sur les orientations budgétaires de l’exercice ainsi que sur les engagements pluriannuels envisagés.

Dans les communes de Nouvelle-Calédonie de 3 500 habitants et plus, enfin, un débat est également organisé, sans présentation de rapport, sur les orientations générales du budget de l’exercice ainsi que sur les engagements pluriannuels envisagés, dans un délai de deux mois précédant l’examen de celui-ci (30).

2. Les modifications proposées par l’article

Il est naturellement primordial que l’ensemble des collectivités concernées soient étroitement associées à la mise en œuvre des plans de convergence. La présentation de l’état d’avancement de ces plans, dans les rapports d’orientation budgétaire et lors des débats, permettra aux élus de suivre leur exécution, de programmer les moyens budgétaires nécessaires et d’ajuster éventuellement les stratégies adoptées.

Cet article prévoit l’obligation d’inscrire l’état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence pour les communes de Guadeloupe, Guyane, Martinique et La Réunion (1° du I), les communes de Mayotte (2° du I), les communes de la Polynésie française (4° du I), le département de Mayotte (1° du II), les départements de la Guadeloupe et de La Réunion (2° du II), les régions de Guadeloupe et de La Réunion (III), les établissements publics de coopération intercommunale de Guadeloupe, Guyane, Martinique et La Réunion (1°du IV), les établissements publics de coopération intercommunale de Polynésie française (2° du IV).

Pour la collectivité de Guyane (1° du V), la collectivité territoriale de Martinique (2° du V) et les communes de Nouvelle-Calédonie (VI), le présent article ne prévoit en revanche que l’organisation d’un débat, ces collectivités n’étant pas soumises à l’obligation de présenter un rapport d’orientation budgétaire.

3. La position de la commission des Lois

La Commission a adopté deux amendements rédactionnels de votre rapporteur à cet article.

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La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL247 et CL 248 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 7 modifié.

Article 7 bis (nouveau)
Création d’un grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenguées en Guyane

Suivant l’avis favorable de votre rapporteur, votre commission des Lois a adopté un amendement de Mmes Chantal Berthelot et Marie-Anne Chapdelaine qui crée en Guyane un grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenguées en remplacement de l’actuel Conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinengées (CCPAB).

Créé en 2007 et mis en place effectivement en 2010, le CCPAB est un organisme consultatif placé auprès du représentant de l’État dans la collectivité territoriale de Guyane. Il est composé de vingt membres : seize représentants d’organismes et associations représentatifs des populations amérindiennes et bushinenge désignés par ces organismes et associations, et quatre personnalités qualifiées désignées par arrêté du ministre chargé des outre-mer (31). Leur mandat est de six ans, renouvelable.

Le CCPAB émet un avis préalable sur « tout projet ou proposition de délibération de l’assemblée de Guyane emportant des conséquences sur l’environnement, le cadre de vie ou intéressant les activités culturelles des populations amérindiennes et bushinenge » (32). Il est saisi, selon les cas, par le président de l’assemblée de Guyane ou le représentant de l’État et dispose d’un mois pour se prononcer. Il dispose également d’une capacité d’auto-saisine. Il peut enfin tenir des réunions conjointes avec le conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Guyane pour examiner des questions entrant dans leur champ commun de compétences.

Le présent article additionnel reprend une des recommandations du rapport de Mmes Aline Archimbaud, sénatrice, et Marie-Anne Chapdelaine, députée, consacré au suicide des jeunes Amérindiens en Guyane, rendu au Premier ministre et à la ministre des outre-mer en décembre 2015. La proposition n° 15 prévoyait en effet de transformer le CCAPB en grand conseil coutumier, de le doter d’un budget propre et de clarifier sa composition.

Cette transformation est également rendue nécessaire par l’adoption de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages qui consacre le dispositif d’accès et de partage des avantages (APA)(33). Ainsi que l’avait proposée notre collègue Chantal Berthelot lors de l’examen de cette loi, le futur grand conseil coutumier pourrait devenir la personne morale de droit public chargée de représenter les peuples amérindiens à chaque étape du dispositif APA.

Cet article additionnel modifie donc le code général des collectivités territoriales pour y introduire ce nouveau grand conseil coutumier. Il sera composé de douze représentants des autorités traditionnelles amérindiennes et bushinenguées, de quatre représentants désignés par les organismes et associations représentatifs de ces populations, et de quatre personnalités qualifiées désignées par le ministre des outre-mer. Les modes de saisine de cette nouvelle instance seront similaires à celles de l’actuel Conseil consultatif.

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La Commission est saisie de l’amendement CL60 de Mme Chantal Berthelot. 

Mme Marie-Anne Chapdelaine. Par cet amendement, ma collègue Chantal Berthelot propose de créer en Guyane un grand conseil coutumier. Nous permettrons ainsi aux populations amérindiennes et bushinenge de prendre leur destin en main. Ils co-élaboreront les politiques qui leur seront appliquées, en tenant compte des particularités locales. Un avis favorable ferait aboutir une demande réitérée avec force et qui fait l’objet d’un consensus entre le Gouvernement, les députés guyanais et les premiers intéressés. J’appelle votre attention sur le sort d’une population victime de nombreuses inégalités, la forêt l’éloignant des services publics et de l’éducation. Contribuer au moins partiellement au rétablissement de l’égalité en adoptant cette proposition serait une bonne chose.

M. le rapporteur. Je rends hommage à notre collègue qui a pris à cœur la défense de la création d’un grand conseil coutumier, à laquelle je donne un avis très favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 7 bis est ainsi rédigé.

Chapitre II
Suivi de la convergence

Article 8
(art. 74 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009)

Évaluation des politiques de convergence

Cet article confie à la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer (CNEPEOM) le soin d’évaluer les politiques de convergence (I) et précise les indicateurs de richesse pris en compte pour procéder à cette évaluation (II).

1. Des attributions nouvelles pour la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer

La CNEPEOM a été créée par l’article 74 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer. Sa composition et ses missions ont été précisées par le décret n° 2010-1048 du 1er septembre 2010.

La Commission comprend ainsi 39 membres titulaires, dont dix députés, dix sénateurs, deux membres du Conseil économique, social et environnemental (CESE), les onze présidents des collectivités et assemblées délibérantes d’outre-mer ainsi que six représentants de l’État. À ces membres titulaires, s’ajoutent dix députés, dix sénateurs ainsi que deux membres du CESE en qualité de suppléants.

La CNEPEOM a pour mission de suivre la mise en œuvre de l’ensemble des politiques publiques de l’État outre-mer, en particulier les mesures en faveur du développement économique et social de ces collectivités, qu’elles soient antérieures ou postérieures à la loi du 27 mai 2009.

Elle établit à cette fin tous les deux ans un rapport public d’évaluation portant notamment sur l’impact socio-économique de l’application des titres II à IV (34) de la loi du 27 mai 2009 et sur l’impact de l’organisation des circuits de distribution et du niveau des rémunérations en outre-mer sur les mécanismes de formation des prix. Ce champ a été étendu à la mise en œuvre de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 relative aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer.

La Commission remet également chaque année au Parlement un rapport d’activité qui « présente sommairement les évaluations entreprises », selon l’article 74 de la loi du 27 mai 2009.

Le I du présent article dispose que, désormais, le rapport public d’évaluation de la Commission, établi tous les deux ans, évaluera également l’impact des politiques publiques poursuivies par les plans de convergence dans des conditions fixées par décret.

Ainsi que l’a souligné votre rapporteur dans son rapport au Premier ministre, la CNEPEOM constitue « l’instance naturelle pour débattre chaque année de la mise en œuvre des engagements contractuels pris par l’État en faveur de la convergence des outre-mer. » (35). Confier cette mission d’évaluation à une instance existante permet en effet d’éviter de créer un nouvel organisme et de s’appuyer sur la compétence des nombreux élus qui composent cette commission, avec le concours de la direction générale de l’outre-mer. Cela supposera néanmoins de doter cette Commission de moyens renforcés pour remplir au mieux cette mission nouvelle d’évaluation des stratégies de convergence.

2. La prise en compte de nouveaux indicateurs de richesse

Le II du présent article précise les indicateurs qui seront utilisés pour évaluer les trajectoires de convergence. Suivant la préconisation du CESE, le projet de loi a retenu les dix nouveaux indicateurs de richesse prévus par la loi n° 2015-411 du 13 avril 2015 visant à la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques.

Issu d’une proposition de loi présentée par notre collègue Eva Sas (36), l’article unique de la loi du 13 avril 2015 fait obligation au Gouvernement de présenter chaque année au Parlement un « rapport présentant l’évolution, sur les années passées, de nouveaux indicateurs de richesse, tels que des indicateurs d’inégalités, de qualité de vie et de développement durable ». Une consultation citoyenne avait été conduite au printemps 2015 par France Stratégie et le CESE pour identifier les indicateurs pertinents. Dix ont été retenus :

– le taux d’emploi ;

– l’effort de recherche ;

– l’endettement (dette publique, dette des entreprises et endettement des ménages) ;

– l’espérance de vie en bonne santé ;

– la satisfaction dans la vie ;

– les inégalités de revenus ;

– la pauvreté en conditions de vie ;

– les sorties précoces du système scolaire ;

– l’empreinte carbone (émissions de gaz à effet de serre induites par la consommation de la population) ;

– l’artificialisation des sols.

Le premier rapport de ce type a été rendu public le 27 septembre 2015.

Disposer d’indicateurs communs pour effectuer le suivi de la convergence est naturellement une nécessité, ainsi que l’avait rappelé le CESE dans son avis sur l’avant-projet de loi (37). Les indicateurs choisis « couvrent un spectre large de problématiques et sont en mesure de rendre compte de la convergence entre la France hexagonale et les outre-mer dans un certain nombre de domaines » souligne l’étude d’impact du projet de loi. Ils pourront naturellement être complétés par des données spécifiques en fonction des territoires concernés et des stratégies retenues.

Ces indicateurs seront intégrés dans les tableaux de bord de suivi de chacun des plans de convergence et pris en compte dans les évaluations effectuées par la CNEPEOM.

Toutefois, le renseignement de ces indicateurs supposera de renforcer les moyens dédiés à la collecte et au traitement statistique dans les outre-mer, tel qu’indiqué dans l’étude d’impact. Lors de son audition par votre rapporteur, M. Eric Lenoir, chef de mission au Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), a en effet souligné la grande difficulté à accéder à des données statistiques de qualité dans plusieurs territoires d’outre-mer. Des efforts conséquents devront donc être accomplis dans les mois qui viennent pour renforcer les moyens des instituts statistiques locaux, notamment en Nouvelle-Calédonie et Polynésie française, harmoniser les méthodes de collecte et de traitement des données et mettre ainsi fin à cette inégalité de traitement entre les outre-mer et l’Hexagone.

3. Le dispositif adopté par la commission des Lois

Votre Commission a adopté cinq amendements à cet article.

Elle a tout d’abord adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteur, un amendement de M. Ibrahim Aboubacar et des députés du groupe Socialiste, écologiste et républicain qui prévoit que la CNEPEOM rende désormais un rapport public spécifique sur l’évaluation des stratégies de convergence. Ce rapport sera rendu tous les ans, et non pas tous les deux ans comme l’actuel rapport d’évaluation prévu au quatrième alinéa de l’article 74 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009. L’amendement précise en outre que la CNEPEOM pourra pour cela bénéficier du concours de l’ensemble des services de l’État. Votre rapporteur est très attaché au renforcement des moyens de cette instance et souhaite qu’elle puisse bénéficier du concours du CGET, qui dispose d’une grande expertise en matière d’évaluation. Celui-ci pourrait créer en son sein, à condition de bénéficier de moyens renforcés, un observatoire du suivi de la convergence outre-mer.

Un amendement de votre rapporteur prévoit par ailleurs que le rapport d’activité que la CNEPEOM remet chaque année au Parlement puisse également faire l’objet d’un débat.

La Commission a ajouté un I bis, à l’initiative de votre rapporteur, pour permettre aux collectivités ayant conclus des plans de convergence de bénéficier du concours des chambres régionales ou territoriales des comptes afin d’assurer le suivi de la programmation financière de ces plans.

Le II de l’article, relatif aux indicateurs, prévoit désormais que quatre indicateurs, communs à toutes les collectivités, seront utilisés prioritairement pour évaluer les politiques de convergence, en complément des nouveaux indicateurs de richesse. Il s’agira du PIB par habitant, du taux de chômage, des écarts de revenus par habitant et du seuil de pauvreté. Votre rapporteur partage en effet la conviction qu’un nombre limité d’indicateurs permettra d’effectuer des comparaisons indiscutables. Les autres indicateurs seront toutefois utiles pour entreprendre des analyses plus fines, adaptées à chaque territoire. Un amendement de Mme Catherine Coutelle prévoit enfin que tous ces indicateurs devront comprendre des données sexuées.

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La Commission examine les amendements CL203 du rapporteur et CL86 de M. Ibrahim Aboubacar, qui peuvent faire l’objet d’une discussion commune.

M. le rapporteur. Par l’amendement CL203, je propose que la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer (CNEPEOM) rende tous les deux ans un rapport public spécifique sur la convergence, distinct du rapport prévu par la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique outre-mer. Nous avions initialement prévu que le rapport serait annuel, mais nous nous sommes rendu compte après discussion avec le Gouvernement et avec la DGOM que ce n’est pas possible. Je prie M. Ibrahim Aboubacar de bien vouloir retirer l’amendement CL86 au bénéfice de l’amendement CL203.

M. Ibrahim Aboubacar. Comme vous l’avez rappelé, nous avions envisagé, dans nos travaux initiaux, une évaluation annuelle des stratégies de convergence ; c’est ce que propose l’amendement CL86. J’espère que ce n’est pas au motif que la CNEPEOM n’a pas les moyens d’assurer un suivi annuel que le Gouvernement considère maintenant que ce suivi sera bisannuel – car c’est de suivi qu’il s’agit et non d’évaluation. Je suis disposé à retirer l’amendement CL86, mais la question des moyens permettant à la CNEPEOM, que je préside actuellement, de faire ce travail doit être clarifiée. L’amendement CL203 ne doit pas cacher l’insuffisance des ressources de la Commission nationale.

M. le rapporteur. Nous avons beaucoup hésité entre rapport annuel et rapport bisannuel. Onze territoires sont concernés, et la CNEPEOM ne peut élaborer tous les ans onze rapports outre le rapport traditionnel. C’est pourquoi nous avons accepté de modifier la périodicité, tout en proposant le renforcement des moyens alloués à la CNEPEOM – mais cela reste aléatoire. Aussi, puisque j’étais favorable à un rapport annuel, je retire l’amendement CL203 et je m’en remets à la sagesse des commissaires pour ce qui est de l’amendement CL86.

L’amendement CL203 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL86.

Elle examine ensuite l’amendement CL250 du rapporteur

M. le rapporteur. Il s’agit d’organiser un débat annuel, sans vote, sur le rapport d’activité remis chaque année au Parlement par la CNEPEOM.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CL8 tombe.

La Commission est saisie de l’amendement CL249 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement prévoit la saisine des chambres régionales des comptes pour l’évaluation des plans de convergence.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL204 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement vise à utiliser, pour mesurer l’évolution des stratégies de convergence, les quatre indicateurs prioritaires exhaustifs que sont le produit intérieur brut par habitant, le taux de chômage, les écarts de revenus et le seuil de pauvreté.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL6 de M. Daniel Gibbes. 

M. Daniel Gibbes. Dans un souci d’efficacité et de transparence, il est proposé de retenir les deux indicateurs que sont le revenu par habitant et le taux de chômage ; ils suffisent à illustrer de manière fiable et pertinente la situation économique et sociale des territoires d’outre-mer.

M. le rapporteur. Je suggère le retrait de l’amendement, satisfait par l’amendement CL204 qui vient d’être adopté.

M. Daniel Gibbes. Je retire l’amendement, mais je m’interroge sur la raison pour laquelle mon amendement CL7 a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 alors qu’il ne créait aucune charge au budget de l’État : il visait à ce que les collectivités concernées créent une instance locale chargée de mesurer l’impact des politiques publiques menées conjointement avec l’État.

M. le président Dominique Raimbourg. La proposition entraînait un travail supplémentaire, ce qui est dans tous les cas analysé comme une charge.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL46 de Mme Catherine Coutelle. 

M. Ibrahim Aboubacar. L’amendement, qui tient à cœur à la délégation aux Droits des femmes comme il me tient à cœur, vise à ce que l’évaluation des stratégies de convergence intègre des données sexuées.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 8 modifié.

TITRE III
DISPOSITIONS SOCIALES

Dans la rédaction initiale du projet de loi, le titre III « Dispositions sociales en faveur de l’égalité réelle » se composait de deux articles relatifs à Mayotte. Ils ont pour objet, d’une part, d’accélérer la convergence à l’œuvre afin de permettre aux Mahorais de disposer d’une politique familiale renforcée (article 9) et, d’autre part, d’accompagner la mise en place d’un système complet d’assurance vieillesse dans le département (article 10).

Sur proposition de votre rapporteur, la commission des Lois a retiré de l’intitulé du titre III la mention de l’égalité réelle, la jugeant déjà exprimée dans le titre du projet de loi. Elle a également adopté quatorze articles additionnels, renforçant ainsi l’ambition du texte en matière sociale.

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La Commission examine d’abord l’amendement CL303 de M. Victorin Lurel, rapporteur.

M. Victorin Lurel, rapporteur. C’est un amendement rédactionnel, qui modifie le libellé du titre III : la notion d’égalité réelle ne doit pas être répétée dans chaque subdivision.

La Commission adopte l’amendement. Le titre III est ainsi rédigé.

Article 9 A (nouveau)
(art. L. 313-20 du code de la construction et de l’habitation)

Expérimentation de la caution solidaire Visale dans les outre-mer pour les moins de 30 ans bénéficiant d’un logement dans le secteur social

Alors que les bailleurs exigent des garanties que les salariés précaires ou en période d’essai ne peuvent pas toujours fournir, du fait de contrats majoritairement précaires (CDD, Intérim, etc.), Action Logement (38) met en œuvre le « visa pour le logement et l’emploi » (Visale) depuis le 20 janvier 2016. Ce service de cautionnement gratuit des loyers du parc privé garantit aux propriétaires privés le paiement des loyers impayés durant les trois premières années du bail.

Sont concernés tous les salariés précaires du secteur privé dès lors que l’entrée dans l’emploi et dans le logement s’effectuent dans des délais rapprochés, les jeunes salariés de moins de 30 ans et les ménages accompagnés dans le cadre d’une intermédiation locative.

La moitié des résidents des outre-mer est âgée de moins de 35 ans quand l’âge médian dans l’Hexagone atteint 40 ans. Cette jeunesse de la population se double, dans certains départements d’outre-mer, d’une proportion de population vivant sous le seuil de pauvreté de plus de 50 %.

Afin de faciliter les démarches des jeunes ultramarins, l’article 9 A, issu d’un amendement de M. Philippe Naillet, propose d’expérimenter pour trois ans dans les départements d’outre-mer l’extension du dispositif Visale pour l’accès dans le logement social.

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La Commission examine l’amendement CL138 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. Il s’agit d’autoriser, à titre expérimental, pendant trois ans, l’application de la caution solidaire Visale dans les outre-mer pour les jeunes de moins de trente ans qui bénéficient d’un logement dans le secteur social.

M. le rapporteur. Favorable.

Mme Éricka Bareigts, ministre des outre-mer. Favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 9 A est ainsi rédigé.

Article 9 B (nouveau)
(art. L. 114-2 et L. 114-4 du code de la sécurité sociale)

Prestations familiales à Mayotte

L’article 9 B, issu d’un amendement de Mme Catherine Coutelle, a pour objet de mieux évaluer les impacts du renforcement du système de retraites à Mayotte dont il est question dans ce texte et plus largement de mieux évaluer les phénomènes, dont les inégalités professionnelles, le travail à temps partiel et l’impact d’une plus grande prise en charge de l’éducation des enfants, qui pourraient pénaliser les retraites des femmes dans les différentes collectivités territoriales d’outre-mer.

Il prévoit à cette fin que le Conseil d’orientation des retraites prenne en compte la situation des outre-mer dans ses travaux.

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La Commission examine l’amendement CL47 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Cet amendement vise à mieux évaluer les impacts du renforcement du système de retraites dans l’ensemble des outre-mer et, plus précisément, à disposer de données sexuées. En effet, pour pouvoir lutter contre les inégalités, il faut avoir des données sexuées dans tous les domaines.

M. le rapporteur. Favorable.

Mme la ministre. Favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 9 B est ainsi rédigé.

Article 9 C (nouveau)
(art. L. 752
8 du code de la sécurité sociale)
Prestation accueil et restauration scolaire

Issu d’un amendement du rapporteur, l’article 9 C précise que les caisses d’allocations familiales contribuent à la prise en charge de la prestation accueil et restauration scolaire (PARS) pendant toute la durée de la scolarité.

En vigueur en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion et à Mayotte, la PARS est une aide financière versée directement aux gestionnaires de services de restauration scolaire pour réduire le coût de revient des repas et proposer aux familles des tarifs de cantine adaptés aux situations des familles. Or, selon les territoires concernés, la prise en charge diffère et peut exclure les élèves scolarisés en lycée. Il convient, par conséquent, d’unifier le régime applicable en déterminant par voie législative le périmètre de la mesure.

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La Commission examine l’amendement CL171 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à étendre la prestation accueil et restauration scolaire aux lycéens.

Mme la ministre. Défavorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 9 C est ainsi rédigé.

Après l’article 9 C

La Commission examine les amendements identiques CL173 du rapporteur et CL95 de M. Ibrahim Aboubacar.

M. le rapporteur. L’amendement CL173 vise à transférer la charge et le service des prestations familiales dues à l’ensemble des personnels de l’État vers le régime général des caisses d’allocations familiales des départements d’outre-mer.

J’ai cru comprendre que la mesure était satisfaite. Sur la base de quel texte et de quelle action, madame la ministre ?

M. Ibrahim Aboubacar. L’amendement CL95 est identique à l’amendement CL173.

Mme la ministre. Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements parce qu’il considère que la demande des auteurs des amendements est satisfaite. L’article 45 de la loi du 21 décembre 2015 de financement de la Sécurité sociale pour 2016 prévoit déjà la mesure proposée. Les transferts prévus dans ces amendements interviendront donc à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2017.

L’article 45 prévoit également que le montant des cotisations et des prestations versées dans les départements d’outre-mer est aligné sur celui de la métropole et qu’une cotisation d’allocations familiales à la charge de l’État est créée. Celui-ci sera assujetti au droit commun, à savoir au taux de 5,25 %.

M. Ibrahim Aboubacar. Je prends acte de la réponse de Mme la ministre, à savoir que cette mesure entrera en vigueur partout au plus tard le 1er janvier 2017. Je rappelle que cette revendication était exprimée dans les mouvements sociaux qui ont secoué notre département l’année dernière.

Au bénéfice de ces explications, je retire mon amendement CL95.

M. le rapporteur. Je retire évidemment mon amendement CL173, tout en regrettant que nous ayons déjà perdu pratiquement une année… Il nous a fallu attendre trois ans et demi avant que soit pris un petit arrêté « sucre » qui, de surcroît, est quasiment inapplicable. Je demande que la décision d’exécution soit prise le plus rapidement possible.

Les amendements identiques sont retirés.

La Commission examine l’amendement CL284 de la commission des Affaires économiques.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques. L’article additionnel que je propose d’introduire vise à instaurer une dégressivité de l’exonération des cotisations sociales pour les travailleurs non salariés lissée sur quatre ans en remplacement de l’exonération totale actuelle de vingt-quatre mois, à enveloppe constante. Le but est d’éviter les effets de seuil.

M. le rapporteur. Favorable. Cet amendement s’inscrit dans le cadre des diverses mesures que j’ai demandé au Gouvernement de prendre en faveur des travailleurs indépendants, mais que je n’ai pas pu proposer en raison de l’application de l’article 40 de la Constitution.

Mme la ministre. Monsieur Letchimy, je vous demande de retirer votre amendement. Nous y travaillons. Ce débat aura lieu lors de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), ce qui nous laissera le temps de terminer le travail au niveau interministériel.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. La parole d’une ministre est d’or, dans l’hémicycle comme en commission… Je considère, madame la ministre, que vous êtes favorable à cet amendement et que nous nous réunirons d’ici à l’examen du PLFSS pour trouver ensemble la rédaction la plus à même de répondre à ce problème important. Je retire mon amendement CL284.

L’amendement est retiré.

Article 9 D (nouveau)
(art. L. 2624
1 à L. 2624-4 [nouveaux] du code du travail)
Représentativité des syndicats locaux

Issu d’un amendement du rapporteur, l’article 9 D a pour objet de fixer les conditions dans lesquelles les organisations syndicales de salariés et d’employeurs sont considérées comme représentatives pour la négociation d’accords interprofessionnels au niveau local.

Le code du travail prévoit un mode de détermination de la représentativité des organisations syndicales dans les entreprises, dans les branches au niveau national ou régional ainsi qu’au niveau national et interprofessionnel. Or, la spécificité de la situation outre-mer a conduit, par le passé, à trouver des solutions dans le cadre d’accords interprofessionnels régionaux.

Le modèle retenu est celui qui est fixé par la loi pour la détermination de la représentativité au niveau national et interprofessionnel pour les organisations de salariés et au niveau national et interprofessionnel ou national et multi-professionnel pour les organisations patronales.

Le paysage conventionnel des collectivités ultra-marines intéressées, différent d’une collectivité à l’autre, se caractérise par un nombre important d’entreprises qui ne sont couvertes par aucune convention de branche, nationale ou locale, soit parce que la convention collective nationale n’est pas applicable, soit parce que la branche n’est pas constituée outre-mer. Pour tenter de résorber cette difficulté, le présent article permet aux organisations syndicales et professionnelles représentatives au niveau local de signer des accords de branche à la double condition que les secteurs d’activités intéressés ne soient pas déjà constitués en branche et qu’aucun accord national ne s’applique localement.

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* *

La Commission examine l’amendement CL178 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit là d’une vieille demande des organisations syndicales de neuf territoires des outre-mer sur la représentativité syndicale. Nous demandons d’appliquer les mêmes critères que ceux qui sont appliqués dans l’hexagone, étant entendu que cela n’empêchera pas que les accords de branche et les accords interprofessionnels nationaux soient appliqués dans ces territoires.

Je suis député depuis quinze ans, et cela fait quinze ans que j’entends parler de cette affaire. Aujourd’hui, nous avons l’occasion de la régler.

Par ailleurs, la concertation se fera pour parfaire, si j’ose dire, le texte et son application.

Mme la ministre. Défavorable. Il n’y a pas eu de consultation des partenaires sociaux sur ce sujet. Or cette étape est indispensable.

M. le rapporteur. Mme Monique Orphé a porté cette affaire, il y a quelques temps, avec l’ardeur qu’on lui connaît. Des promesses avaient été faites à l’époque, qu’il n’a pas été possible de tenir.

Au moment où je parle, une pétition circule dans un certain nombre de territoires pour protester contre le fait que le sujet n’est pas évoqué alors que l’on parle d’égalité.

Quand un syndicat gagne une élection, ses membres ne peuvent pas siéger dans certaines instances. Je pense à la caisse de Sécurité sociale, à Antenne 1ère, Réunion 1ère, Guadeloupe 1ère, Martinique 1ère, à la caisse d’allocations familiales, etc. Un conflit a eu récemment lieu à La Réunion : la Confédération générale des planteurs et éleveurs de La Réunion (CGPER) ne peut pas siéger à la commission départementale de la consommation des espaces agricoles parce que la FNSEA désigne un représentant qui n’est pas représentatif au sein de la chambre d’agriculture.

Nous demandons d’appliquer à l’outre-mer les critères appliqués dans l’hexagone, quitte à prévoir des textes spécifiques pour assurer une compatibilité parfaite avec les textes nationaux. C’est du reste conforme à ce que nous souhaitons tous : relancer le dialogue social au sein des entreprises.

D’ici à l’examen du texte en séance publique, le Gouvernement nous donnera peut-être des réponses plus concrètes que celles que nous avons entendues depuis quinze ans.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales. Je devais déposer, dans le cadre de la loi n° 2016-1008 du 8 août 2016 dite « loi travail », un amendement dans ce sens, mais je ne l’ai pas fait car on m’a demandé d’engager une consultation avec les représentants syndicaux. Je m’y suis attelée il y a quelques mois. Autour de la table, il n’y avait que des syndicats de la Martinique et de La Réunion. Je dois dire que, pour le moment, ils ne sont pas favorables à cette disposition – en tout cas, ceux qui étaient présents, mais on sait que les absents ont toujours tort… Pour ce qui me concerne, je ne voterai pas cet amendement.

M. le rapporteur. J’ai reçu personnellement un certain nombre de demandes. Une pétition en ligne circule qui montre l’accord de ces syndicats. C’est une revendication récurrente.

Lorsque j’étais ministre des outre-mer, j’ai reçu tous les syndicats. Ce sont les syndicats nationaux qui sont opposés à cette mesure.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Non !

M. le rapporteur. Les syndicats locaux – et je peux les citer – sont tous favorables à une représentativité au niveau de leur territoire.

Nous avons largement le temps d’engager une concertation avec le Gouvernement et de régler définitivement le problème d’ici à l’examen du texte en séance publique.

L’obstacle est toujours le même : c’est l’opposition des syndicats nationaux. Un certain nombre de syndicats locaux de Guadeloupe, de La Martinique, en Guyane l’Union des travailleurs guyanais (UTG) demandent depuis longtemps cette représentativité. Cette question n’est pas tranchée ici, d’autant qu’au-delà des critères d’élections pour une bonne représentativité, il y aurait, me dit-on, des incidences financières. Si tel est le cas, il faut le dire clairement. Je demande que l’on nous donne, d’ici le 4 octobre, une réponse claire, pertinente et actualisée.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Je persiste et signe ! J’ai procédé à une consultation à La Réunion et en métropole avec des syndicats locaux de Martinique. Peut-être certains syndicats en Guadeloupe sont-ils d’accord, mais je n’ai pas pu m’en assurer. Il serait bon de retirer cet amendement, de procéder à une consultation avant de présenter à nouveau la mesure peut-être en seconde lecture.

M. Ibrahim Aboubacar. Compte tenu de la discussion qui vient d’avoir lieu, je suggère que l’amendement soit retiré et de travailler dans l’esprit qui vient d’être évoqué.

M. le rapporteur. Quels syndicats de Martinique avez-vous entendu ?

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. FO, la CGT…

M. le rapporteur. FO est le syndicat le plus violemment opposé à la mesure au niveau national !

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. L’UTG n’a jamais voulu être consultée. Elle n’a jamais voulu me rencontrer.

M. le rapporteur. On connaît leur idéologie politique : FO est une antenne de FO nationale. Et, je le répète, c’est le syndicat le plus violemment opposé au niveau national. Si ce sont eux qui ont été entendus, il est normal qu’ils disent ce que pense leur centrale.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Mais ce ne sont pas les seuls à avoir été entendus. Je peux citer la CFDT…

Mme Huguette Bello. Dans cette affaire, il y a des syndicats locaux – ainsi la Confédération générale des planteurs et éleveurs de La Réunion. Il est tout à fait logique que ces syndicats locaux aient une représentation.

Dans nos régions, il y a toujours ce rapport de dominant à dominé, du grand syndicat sur sa branche qui se trouve dans les régions. Il est plus que temps de prendre en considération les syndicats locaux. Je suis donc d’accord avec les propos de M. Lurel sur ce point.

M. le président Dominique Raimbourg. Les arguments ont été échangés ; nous passons au vote

La Commission adopte l’amendement. L’article 9 D est ainsi rédigé.

Article 9
(art. L. 542-4 du code de l’action sociale et des familles ; art. 2, 7-1 à 7-3 [nouveaux],
10-1 et 10-2 [nouveau] de l’ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative
à l’extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale
dans la collectivité départementale de Mayotte)

Prestations familiales à Mayotte

L’article 9 prévoit, conformément à l’engagement contenu dans le document stratégique Mayotte 2025 (39), d’accélérer le rythme d’augmentation des allocations familiales à Mayotte pour atteindre dès 2021 des montants similaires à ceux en vigueur dans les autres départements français. Dans le même objectif d’égalité, il procède à la mise en place du complément familial et du montant majoré du complément familial à Mayotte dans des modalités de droit commun.

1. L’état du droit

a. Une démographie spécifique

La situation démographique mahoraise présente une singularité tant au regard des départements du territoire européen que des autres collectivités régies par l’article 73 de la Constitution (40). Les 230 000 habitants du département ne représentent que 0,3 % des quelque 66 millions de Français, la population de l’île connaît une croissance très vive.

POPULATION DE MAYOTTE DEPUIS 1958

Source : Insee

Bien qu’en phase de stabilisation, l’indice de fécondité à Mayotte demeure plus de deux fois supérieur à la moyenne nationale – 4,22 contre 1,98 d’après l’étude d’impact jointe au projet de loi. Le département est le plus jeune de France avec près de 55 % de moins de 20 ans.

Le dynamisme démographique mahorais tranche également avec la situation des autres départements d’outre-mer, dont certains – aux Antilles notamment – ont achevé leur transition démographique et ne diffèrent pas significativement des départements du territoire européen à cet égard.

CARACTÉRISTIQUES DÉMOGRAPHIQUES COMPARÉES

 

Nombre de naissances (2014)

Taux de natalité (2014)

Taux de fécondité (enfants/femme, 2014)

Proportion de moins de 20 ans (2015)

Guadeloupe

5 001

12,5

2,21

26,9

Guyane

6 591

26,2

3,53

42,3

Martinique

4 367

11,5

2,11

24,3

La Réunion

14 095

16,8

2,45

31,3

Mayotte

7 306

32,7

4,22

54,5

Total DROM

37 360

17,9

2,66

33

Hexagone

779 278

12,2

1,98

24,4

France

816 638

12,4

2,00

24,7

Source : INSEE (mai 2016). Périmètre INSEE, hors COM.

Les prestations familiales versées sur le territoire mahorais sont régies par l’ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l’extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte. Elles sont au nombre de quatre :

– les allocations familiales,

– l’allocation de rentrée scolaire (ARS),

– l’allocation de logement (familiale et sociale),

– l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH).

Hormis l’ARS depuis 2015 (41) et d’une partie de l’AEEH, les prestations familiales sont versées à Mayotte suivant des modalités et pour des montants différents de ceux applicables dans le reste de la France (42).

b. Les allocations familiales

L’ordonnance n° 2011-1923 du 22 décembre 2011 relative à l’évolution de la sécurité sociale à Mayotte dans le cadre de la départementalisation a prévu un rattrapage des allocations familiales sur quinze ans, soit jusqu’en 2026. Cette convergence est d’appréciation délicate puisque, si les prestations sont versées sous conditions de ressources en droit commun – départements européens et d’outre-mer confondus – avec un montant maximal pour les foyers les plus modestes, un montant intermédiaire et un montant minimal, tel n’est pas le cas à Mayotte où les allocations familiales ont un caractère universel.

Au 1er avril 2016, les montants pour deux enfants sont relativement proches de ceux servis au niveau national, l’étude d’impact faisant état d’un différentiel négatif de 18,3 % par rapport à la configuration la plus avantageuse. Toutefois, l’écart grandit à partir de trois enfants – différentiel négatif de 52,7 % par rapport au maximum – pour accuser un retard de 75,3 % pour une famille mahoraise de six enfants. Au-delà, chaque enfant supplémentaire entraîne un versement de 18,83 € contre 166,72 € en droit commun.

Ce différentiel a pour conséquence de priver la population d’une solidarité pourtant nécessaire à la bonne éducation des enfants au sein de la famille, alors même que les enfants mahorais sont particulièrement touchés par la pauvreté – 88 % des moins de 15 ans vivant dans un ménage à bas revenus.

Le processus de rattrapage en cours jusqu’en 2026 se traduit par un gain financier de 28 € par an pour les familles ayant deux enfants à charge et de 64 € par an pour les familles ayant trois enfants à charge et plus.

Quant au complément familial (CF), il est soumis à condition de ressources tant en France hexagonale (43) que dans les départements d’outre-mer (44). Il existe une allocation de base et une allocation majorée suivant les revenus dont dispose le foyer. Les conditions de versement sont toutefois différentes :

– dans l’Hexagone, l’allocataire doit avoir au moins trois enfants à charge, âgés de plus de 3 ans et de moins de 21 ans ;

– dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, la famille doit assumer la charge d’au moins un enfant de plus de 3 ans et de moins de 5 ans et ne pas avoir d’enfant de moins de 3 ans (45).

c. L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé

L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé est prévue aux articles L. 541-1 à L. 541-4 du code de la sécurité sociale. Dans les territoires hexagonaux et ultramarins où s’applique le droit commun, l’attribution de l’allocation de base de 130 € liée à l’existence du handicap peut éventuellement s’accompagner d’un complément destiné à compenser les surcoûts et les pertes des familles, liés au handicap de l’enfant. Le montant du complément est gradué en six catégories et varie entre 96 € et 1 575 € selon la situation de la famille et l’impact du handicap sur les charges du foyer.

L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé a été étendue dans le département de Mayotte par l’ordonnance n° 2008-859 du 28 août 2008 relative à l’extension et à l’adaptation outre-mer de diverses mesures bénéficiant aux personnes handicapées et en matière d’action sociale et médico-sociale. Comme en droit commun, le montant de base de l’allocation mensuelle s’établit à 130 € lorsque l’enfant présente une incapacité d’au moins 80 %. Aucune condition de ressources n’est exigée. Le nombre de foyers mahorais bénéficiaires est évalué à moins de 300, soit cinq fois moins qu’en Guyane pour une population comparable.

2. Les dispositions du projet de loi

L’article 9 du projet de loi procède à un alignement – partiel et à compter de 2019 (III) – des conditions de versement des allocations familiales et de l’AEEH à Mayotte sur les règles qui prévalent en droit commun.

a. Le rattrapage anticipé à 2021 des allocations familiales

L’anticipation à 2021 du rattrapage des montants des allocations familiales servies, actuellement prévu en 2026, concernerait plus de 13 000 familles de plus de deux enfants. Pour ce faire, l’alinéa 4 modifie l’article 7 de l’ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l’extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte.

Parallèlement, l’extension du complément familial à Mayotte devrait permettre de mieux soutenir les foyers modestes, quand un tiers des familles du département avec au moins un enfant mineur sont monoparentales – contre 16 % en moyenne nationale. Seraient ciblées, à l’instar du dispositif actuellement en vigueur dans les autres départements et régions d’outre-mer, les familles mahoraises aux revenus modestes ayant des enfants de 3 à 5 ans. Le complément familial mensuel de base (96,25 €) devrait concerner 500 familles tandis que 1 800 foyers percevraient le complément familial majoré (125,15 €).

L’étude d’impact souligne que le versement d’un complément familial à Mayotte constituera un puissant facteur de promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes en donnant aux femmes à la tête de familles monoparentales les moyens d’éduquer leurs enfants sans dépendre de leur compagnon.

L’élargissement du complément familial à Mayotte conduit à l’intégrer à la liste des prestations familiales applicables au territoire (alinéas 2 et 3) : deux nouveaux articles 7-1 et 7-2 sont insérés dans l’ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l’extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale (alinéas 5 à 11) afin d’y intégrer le dispositif déjà applicable dans les autres départements et régions d’outre-mer.

MONTANT DES ALLOCATIONS FAMILIALES PAR FAMILLE

(avant et après l’entrée en vigueur du projet de loi, en euros par mois)

Nombre d’enfants à charge

Hexagone

Outre-mer de droit social commun (46)

Mayotte avant réforme

Montant à Mayotte par rapport au droit commun en 2016

Montant à Mayotte par rapport au droit commun en 2021

1

0

23,91

47,29 (47)

197,8 %

100 %

2

130,12

106,25

81,7 %

100 %

3

296,83

140,49

47,3 %

65,7 %

4

463,55

159,31

34,4 %

46,2 %

5

630,26

178,14

28,3 %

36,9 %

6

796,98

196,97

24,7 %

31,6 %

Enfant supplémentaire

166,72

18,83

11,3 %

11,3 %

Source : Circulaire interministérielle n° DSS / SD2B / 2016 / 78 du 15 mars 2016.

S’agissant du coût budgétaire de l’opération, l’étude d’impact jointe au projet de loi chiffre à 14,6 millions d’euros l’impact de l’accélération à 2021 du processus d’alignement des allocations familiales initialement prévu pour durer jusqu’à 2026. Quant à l’élargissement du complément familial, il devrait en résulter une dépense de 3,3 millions d’euros par an.

b. Le rattrapage de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé

L’extension des compléments (alinéas 12 à 17) et de la majoration parent isolé (alinéas 18 et 19) de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé concernerait une centaine de familles mahoraises.

MONTANT DE L’ALLOCATION D’ÉDUCATION DE L’ENFANT HANDICAPÉ (EN EUROS)

 

Droit commun

Mayotte

Allocation de base

130,12

130,12

Complément 1ère catégorie

97,59

0

Complément 2ème catégorie

(majoration pour parent isolé)

264,30

(52,86)

0

Complément 3ème catégorie

(majoration pour parent isolé)

374,09

(73,19)

0

Complément 4ème catégorie

(majoration pour parent isolé)

579,72

(231,77)

0

Complément 5ème catégorie

(majoration pour parent isolé)

740,90

(296,83)

0

Complément 6ème catégorie

(majoration pour parent isolé)

1 104,18

(435,08)

0

Source : Circulaire interministérielle n° DSS / SD2B / 2016 / 78 du 15 Mars 2016.

Cette extension bénéficierait aux enfants dont le taux d’incapacité atteint 80 % et qui fréquentent un établissement qui assure une éducation adaptée et un accompagnement aux jeunes handicapés, sauf à ce que des services d’éducation spéciale ou des soins à domicile soient nécessaires. La majoration pour parent isolé prévue en droit commun serait accessible, pouvant atteindre 435,08 € par mois.

Les alinéas 20 à 22 prévoient enfin les modalités de coexistence entre l’AEEH et la prestation de compensation dont bénéficient les personnes handicapées aux termes des articles L. 245-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles.

Le coût budgétaire de la mesure est estimé à 415 000 euros en année pleine. Le total de la dépense au titre de l’AEEH, actuellement de 455 000 euros, approcherait ainsi un million d’euros.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL99 de M. Jacques Bompard.

M. Jacques Bompard. J’abonde dans le sens du Gouvernement quant à la légitimité de modifier l’ordonnance n° 2002-149. Pris il y a quatorze ans, ce texte ne saurait cependant connaître un changement ne tenant pas compte des nouvelles mutations que vivent les départements à l’aune de la tendance migratoire actuelle, qui est cataclysmique. Parce que le contribuable français est indirectement le garant de la délivrance du régime de base pour les prestations familiales, il est nécessaire que cette aide délivrée aux Mahorais ne s’applique qu’aux seuls ressortissants français. Au regard de 52 % d’individus d’origine étrangère, il est nécessaire de ne pas multiplier des allocations qui encourageraient des mouvements de population que la France n’a plus les capacités de recevoir et qui en viennent à inquiéter les Mahorais eux-mêmes. C’est pourquoi je propose l’insertion d’un alinéa précisant que tout octroi de cette nature sera mis à la seule disposition des Français de souche.

M. le rapporteur. Défavorable.

Mme la ministre. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL12 de M. Jacques Bompard.

M. Jacques Bompard. Accélérer le rythme d’augmentation des allocations familiales à Mayotte pour atteindre le niveau national en 2021 est à la fois irréalisable et fallacieux.

Irréalisable, car les flux en constante croissance de l’immigration à Mayotte, département qui compte déjà 52 % d’individus d’origine étrangère, rendent chaque jour les candidats à la délivrance du complément familial plus nombreux.

Fallacieux, car la promesse de ces subsides encourage ce mouvement d’affluence alors que la population a connu une multiplication par quatre ou cinq en quarante ans.

Au regard de la hausse constante des demandeurs potentiels et des bénéficiaires à qui elles profitent, ces prestations sociales n’ont pas vocation à être prises en charge par les Français. C’est pourquoi je demande la suppression des alinéas 2 et 3 de l’article 9. Il sera toujours temps de revoir cette position quand les flux migratoires seront contenus, ce qui n’est pas le cas actuellement.

M. le rapporteur. Défavorable.

Mme la ministre. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements de précision CL170 et CL208, et l’amendement de cohérence CL209, tous du rapporteur.

La Commission examine ensuite l’amendement CL146 de M. Boinali Said.

M. Boinali Said. Le présent amendement a pour objet de permettre au représentant légal de l’enfant handicapé empêché de se faire représenter par un tiers.

M. le rapporteur. Favorable.

Mme la ministre. Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Les règles du complément familial en vigueur dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution sont transposées dans les mêmes termes à Mayotte. De ce fait, toute personne apportant la preuve de la charge de l’enfant peut d’ores et déjà percevoir la prestation si elle en remplit les conditions. Votre amendement n’apporte pas de précision particulière sur ce sujet. En fait, il est satisfait.

M. Gabriel Serville. Je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte successivement l’amendement de précision CL210 et l’amendement CL211 rédactionnel, tous deux du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 9 modifié.

Article 10
(art. 14 et 23-8 [nouveau] de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte ; art. 64-1 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte)

Régime d’assurance vieillesse à Mayotte

L’article 10 réforme le système de retraite à Mayotte en procédant à trois évolutions complémentaires : en instituant un dispositif spécifique de garantie des pensions des salariés du secteur privé afin de permettre aux retraités ayant cotisé de manière significative au titre de la retraite de disposer d’une pension supérieure à l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), en prévoyant la mise en œuvre des systèmes de retraite complémentaire obligatoire de droit commun et, enfin, en clarifiant les modalités de versement aux pensionnés du secteur public.

1. L’état du droit

Le régime de retraite des salariés du secteur privé et des salariés de droit privé du secteur public de Mayotte a été institué par le décret n° 87-175 du 16 mars 1987. Il est géré par la caisse de sécurité sociale de Mayotte (CSSM) et reçoit les cotisations des salariés depuis sa création.

L’assurance vieillesse est, pour sa part, régie par l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte. Le droit régissant le régime général y a été transposé, avec les adaptations rendues impératives par la jeunesse du dispositif, par les ordonnances n° 2011-1923 du 22 décembre 2011 relative à l’évolution de la sécurité sociale à Mayotte dans le cadre de la départementalisation, et n° 2015-897 du 23 juillet 2015 relative au régime d’assurance vieillesse applicable à Mayotte.

Selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, 48 % des Mahorais de plus de 60 ans sont pris en charge par la CSSM au titre de la prestation vieillesse, alors que 85 % de cette classe d’âge perçoit une prestation vieillesse du régime général en France hexagonale. Or les plus de 60 ans sont, à Mayotte, proportionnellement six fois moins nombreux que dans l’Hexagone et quatre fois moins nombreux que dans les autres départements et régions d’outre-mer. Pour les hommes et les femmes, l’espérance de vie à 60 ans est respectivement de 19 et 21 ans à Mayotte contre 23 et 27 ans dans l’Hexagone.

PROPORTION DE PERSONNES ÂGÉES DE 60 ANS ET PLUS EN FRANCE

 

Guadeloupe

Guyane

Martinique

La Réunion

Mayotte

DROM (hors Mayotte)

Hexagone

France

Pourcentage population

22,7

7,9

25

15,1

4,2

16,3

24,8

24,5

Source : INSEE (Janvier 2016). Périmètre INSEE, hors COM.

En 2014, sur les 4 228 bénéficiaires d’une prestation vieillesse recensés par l’étude d’impact, les deux-tiers le sont au titre de l’allocation spéciale pour les personnes âgées (ASPA). La proportion de personnes âgées percevant le minimum vieillesse est plus de six fois supérieure dans les DROM par rapport à la France hexagonale ; à Mayotte, cette proportion est environ dix fois supérieure (48).

PROPORTION D’ALLOCATAIRES DU MINIMUM VIEILLESSE DANS LA POPULATION DE 61 ANS ET PLUS

Guadeloupe

Guyane

Martinique

La Réunion

Mayotte

DROM (hors Mayotte)

France

24,4 %

20 %

18,8 %

22,6 %

32 %

22 %

3,6 %

Source : DREES (Mai 2016). Mayotte : estimation à partir des données CCSM (Déc. 2015) et des données du RGP 2012.

Le mécanisme de « pension minimale » en vigueur à Mayotte pour les retraités du secteur privé a pour objet de soutenir le montant de la retraite des assurés qui perçoivent une faible pension compte tenu de leur durée d’assurance. Selon l’étude d’impact, un montant de pension différentiel complète ainsi la pension de retraite pour la porter à ce minimum, actuellement fixé à la moitié du SMIG mahorais, soit 616 € par mois. Ce montant est calculé en fonction de la durée d’assurance de l’assuré (49). Si la pension ainsi établie est inférieure au montant de l’ASPA à Mayotte, elle est complétée par cette allocation.

Les régimes complémentaires ne sont en vigueur à Mayotte ni dans le secteur privé, ni pour les agents non titulaires du secteur public.

Il existe enfin une forfaitisation des pensions versées à certains agents publics (50), système inéquitable puisqu’il revient à traiter de la même manière des agents de faible indice ayant cotisé entre 5 et 24 ans en leur versant une même pension mensuelle de 646,16 €.

2. Les dispositions du projet de loi

a. Le renforcement des petites retraites des salariés du secteur privé et la valorisation des périodes de travail

L’article 10 prévoit d’apporter un soutien temporaire au mécanisme de minimum de pension afin d’élever le montant des retraites au-dessus de l’ASPA sans pour autant décourager l’allongement des carrières (alinéas 1er à 7). Il convient, en effet, que la convergence avec le régime de droit commun vienne, à terme, mettre fin à ce dispositif particulier – au plus tard le 1er janvier 2035 (alinéa 7).

Trois modifications seraient apportées au minimum de pension mahorais, tant par les dispositions du projet de loi que par ses règlements d’application :

– le montant auquel la pension de retraite est porté, pour une personne à carrière complète, serait revalorisé de 616 € à 629 € par mois, soit au niveau national ;

– la pension minimale pour les assurés à carrière importante dans le régime mahorais (70 % de la durée d’assurance requise comme en droit commun) serait majorée de 210 € afin d’encourager les carrières complètes ;

– une mesure temporaire spécifique permettrait de renforcer le minimum de pension pour les assurés aux carrières modestes, afin de limiter l’apport du filet de sécurité que constitue l’ASPA aux situations les plus fragiles. Pour une carrière égale au tiers de la durée d’assurance requis, l’assuré bénéficierait d’un montant de pension minimal sensiblement majoré – de l’ordre de 40 € de bonification. Au-delà et pour un niveau de carrière intermédiaire, inférieur à celui ouvrant droit à la majoration de pension minimale décrite précédemment pour 70% de durée d’assurance, le montant minimum augmenterait progressivement jusqu’à un second niveau (120 €), représentant la moitié de la durée d’assurance requise.

Le renforcement du minimum de pension conduit l’assuré à respecter ses obligations déclaratives et contributives car il permet de dépasser le minimum vieillesse. Le Gouvernement indique compter sur cet effet incitatif pour résorber une part de l’économie informelle. Plus d’un tiers des retraités mahorais actuels devraient bénéficier de ce mécanisme.

Le coût du dispositif estimé dans l’étude d’impact jointe au projet de loi est de 5 millions d’euros par an à l’issue d’une montée en charge progressive.

b. L’institution d’un système de retraite complémentaire

Afin de permettre à l’ensemble des salariés de Mayotte de disposer d’un régime complémentaire de retraite, les alinéas 8 et 9 rendent applicables le régime de l’Ircantec (51) aux salariés de droit public à la date à laquelle seront mis en place, au moyen d’un accord conventionnel, les régimes Agirc et Arrco (52) pour les salariés de droit privé. L’étude d’impact mentionne que les syndicats de salariés et d’employeurs ont admis cette perspective au cours de la concertation préalable au dépôt du texte devant le Parlement.

Les conditions de mise en œuvre demeureront à définir par les partenaires sociaux, responsables de la gestion des régimes complémentaires du secteur privé. Pour l’Ircantec, l’affiliation permettrait aux agents contractuels de bénéficier au plus vite d’un régime complémentaire améliorant le faible niveau des pensions versées par la CSSM, ce qui réduirait de façon bienvenue les inégalités entre titulaires et contractuels dans la fonction publique à Mayotte.

c. L’équité de traitement des pensions des agents publics

Les alinéas 11 à 13 prévoient de garantir une équité de traitement entre les pensionnés publics mahorais, quel que soit le régime dont ils relèvent – fonction publique d’État ou territoriale –, et le droit commun de la fonction publique. Ils modifient l’article 64-1 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte de façon à plafonner la pension unique mahoraise au maximum de ce que perçoit un affilié dans le reste du territoire national au taux plein dans les mêmes conditions.

*

* *

La Commission adopte successivement les amendements de précision CL212, CL213 et CL214, et l’amendement de cohérence CL176, tous du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 10 modifié.

Article 10 bis (nouveau)
(art. 3, 4 et 7 de la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987
portant réforme du régime d’assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon)

Ratification d’ordonnances

L’article 10 bis, issu d’un amendement du Gouvernement, a pour finalité la ratification des ordonnances n° 2015‑896 du 23 juillet 2015 portant réforme du régime d’assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon (I) et n° 2015-897 du 23 juillet 2015 relative au régime d’assurance vieillesse applicable à Mayotte (II).

Il comporte également (III) des dispositions de toilettage de la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d’assurance vieillesse applicable à Saint Pierre et Miquelon. Un financement pérenne de la prise en charge pour la retraite des périodes de chômage saisonnier est organisé afin d’apporter une réponse durable et adaptée aux conséquences, pour les salariés de certains secteurs d’activité, des conditions climatiques de l’archipel.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL308 du Gouvernement.

Mme la ministre. Il s’agit de procéder à la ratification de plusieurs ordonnances.

M. le rapporteur. Favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 10 bis est ainsi rédigé.

Article 10 ter (nouveau)
Ratification d’ordonnance

L’article 10 ter, issu d’amendements identiques présentés par Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales, et par M. Ibrahim Aboubacar et les députés du groupe Socialiste, écologiste et républicain, a pour objet la ratification de l’ordonnance n° 2016-160 du 18 février 2016 portant adaptation de la prime d’activité au département de Mayotte. Le projet de loi de ratification (n° 3999) a été déposé sur le Bureau de l’Assemblée nationale le 3 août 2016.

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La Commission examine les amendements identiques CL257 de Mme Monique Orphé et CL55 de M. Ibrahim Aboubacar.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Cet amendement procède à la ratification de l’ordonnance du 18 février 2016 portant adaptation de la prime d’activité au département de Mayotte. Le projet de loi de ratification a été déposé sur le Bureau de l’Assemblée nationale le 3 août dernier.

M. le rapporteur. Favorable.

Mme la ministre. Favorable.

La Commission adopte les amendements identiques. L’article 10 ter est ainsi rédigé.

Article 10 quater (nouveau)
Couverture maladie universelle complémentaire à Mayotte

L’article 84 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé prévoit la remise, d’ici la fin de l’année 2016, d’un rapport fixant les modalités d’instauration de la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC) à Mayotte. Cette disposition avait été votée à l’initiative des députés ultra-marins.

Il est plus que jamais indispensable de réaffirmer l’importance de la généralisation de la CMUC sur le territoire mahorais. C’est pourquoi l’article 10 quater, issu d’un amendement présenté par Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales, propose que la déclinaison à Mayotte de la stratégie nationale de santé inclue un volet consacré à la mise en place de la CMUC.

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La Commission examine l’amendement CL258 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. La stratégie nationale de santé déclinée à Mayotte inclut obligatoirement un volet relatif à la mise en place progressive de la couverture maladie universelle complémentaire.

M. le rapporteur. Favorable.

Mme la ministre. Favorable. Je précise que ce rapport sera publié avant la fin de cette année.

M. Ibrahim Aboubacar. La question de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) et des complémentaires de santé fait défaut dans le dispositif de santé à Mayotte, ce qui empêche de renforcer l’offre de soins, notamment en médecine ambulatoire. Elle a fait l’objet de longs débats au moment des discussions sur « Mayotte 2025 », document signé par le Gouvernement, après un engagement extrêmement fort du Président de la République sur place. Cela fait deux ans que nous patientons. Le ministère de la santé nous a parlé d’un rapport et l’on nous renvoie maintenant à la déclinaison de la stratégie nationale de santé. Je prends acte de ce qui est proposé, mais je répète que le système de santé de Mayotte, qui ne s’appuie que sur l’hôpital public, a atteint des limites difficilement supportables qu’il faut faire évoluer.

Mme la ministre. Monsieur le député, je m’y attelle… Il s’agit effectivement d’un sujet essentiel, avalisé à travers « Mayotte 2025 » et qui fait l’objet d’un soutien au plus haut niveau de l’État. Je dois du reste me rendre à Mayotte ce jeudi même.

Nous avons conscience qu’il faut absolument avancer sur le dossier de la CMU-C. Je le dis d’autant plus, et je parle sous le couvert des députés réunionnais présents, que La Réunion et Mayotte ont des sujets de préoccupation communs en matière de santé. Les établissements hospitaliers, la médecine ambulatoire sont des questions essentielles. La CMU-C est à cet égard un outil primordial. Je réaffirme ici que le rapport sera rendu avant la fin de l’année et que nous avancerons très rapidement en la matière.

M. Jacques Bompard. Ce débat montre la différence qu’il y a entre le rêve et la réalité. L’idéal serait que l’on puisse soigner tout le monde partout et parfaitement. Mais en réalité, on ne le peut pas. À force de rêver, la médecine est en train de se détériorer, voire de disparaître dans notre pays. Le rêve, c’est bien ; mais ne pas tenir compte de la réalité n’est que pure folie.

La Commission adopte l’amendement. L’article 10 quater est ainsi rédigé.

Article 10 quinquies (nouveau)
Qualité du système de santé outre-mer

Les établissements hospitaliers ultra-marins doivent répondre à des défis sanitaires majeurs et sont confrontés à des situations économiques et sociales souvent difficiles. Ils se heurtent, par ailleurs, fréquemment à des défis importants en termes d’attractivité médicale. Ils ont encore, en outre, à poursuivre et renforcer leurs dynamiques d’investissements et de recomposition de l’offre de soins pour renforcer la qualité et la sécurité de la prise en charge des patients. Il convient, enfin, d’accompagner leurs efforts d’efficience par la mobilisation des leviers d’aide au renforcement de la performance.

C’est pourquoi l’article 10 quinquies, issu d’un amendement présenté par Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales, propose que les plans de convergence intègrent obligatoirement un volet en faveur des établissements hospitaliers.

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La Commission examine l’amendement CL259 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à intégrer dans la stratégie nationale de santé un volet consacré aux établissements hospitaliers ultramarins qui sont confrontés à de nombreux problèmes.

M. le rapporteur. J’espère que cet objectif sera satisfait dans le cadre de la négociation des plans de convergence : cette affaire relève du domaine contractuel. J’invite donc Mme Orphé à retirer cet amendement.

Mme la ministre. J’invite moi aussi Mme Orphé à retirer son amendement.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. L’ordonnance traitant de la stratégie nationale de santé doit être prise l’année prochaine. Si l’on intègre la problématique des hôpitaux ultramarins dans les plans de convergence, on risque de l’examiner plus tardivement et donc de prendre du retard. C’est la raison pour laquelle nous préférons l’intégrer dans la stratégie nationale de santé.

M. Ibrahim Aboubacar. Le dernier alinéa de l’exposé sommaire de l’amendement propose que les plans de convergence intègrent obligatoirement un volet en faveur des établissements hospitaliers alors que le texte de l’amendement fait état de la stratégie nationale de santé… D’où mon hésitation ! Pour ma part, j’ai défendu la position qui consiste à savoir exactement quelle est la part entre les plans de convergence et le reste, mais compte tenu des thématiques traitées dans l’article 10, c’est-à-dire l’attractivité de l’exercice médical et paramédical dont on connaît l’urgence, je demande au rapporteur que ce volet figure dans l’outil le plus rapidement disponible et donc que l’on adopte cet amendement en l’état.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Je précise que j’ai travaillé avec le cabinet de la ministre des Affaires sociales et que c’est lui qui m’a suggéré d’inclure ce volet dans la stratégie nationale de santé plutôt que dans le plan de convergence.

M. le rapporteur. Je suis prêt à revoir ma position et à donner un avis favorable sur cet amendement. Cela dit, je ne pourrai pas avoir la même position sur les amendements suivants car ils sont dépourvus de portée juridique. Nos hôpitaux connaissent à l’évidence un problème d’attractivité – j’en sais quelque chose. Si la stratégie nationale de santé outre-mer peut accélérer les choses, pourquoi pas ?

La Commission adopte l’amendement. L’article 10 quinquies est ainsi rédigé.

Article 10 sexies (nouveau)
Protocoles de coopération entre professionnels de santé ultramarins

Afin d’assurer la continuité du service territorial de santé au public, il est indispensable de développer des protocoles de coopération entre professionnels de santé et cela afin de favoriser une prise en charge coordonnée des patients par des équipes pluridisciplinaires. Or, on recense aujourd’hui très peu de protocoles actifs dans les collectivités ultra-marines, où les enjeux de l’accès aux soins sont pourtant encore plus cruciaux que dans l’Hexagone.

C’est pourquoi l’article 10 sexies, issu d’un amendement présenté par Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales, a pour objet d’inciter l’État à encourager la conclusion de tels protocoles, soit entièrement nouveaux, soit déjà existants dans l’Hexagone, comme c’est le cas pour ceux qui concernent les infirmiers, les sages-femmes ou les orthoptistes.

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La Commission en vient à l’amendement CL260 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Il s’agit de favoriser la conclusion de protocoles de coopération entre professionnels de santé, là aussi dans le cadre de la stratégie nationale de santé. Je précise que l’ordonnance est en préparation et qu’elle devrait être prise au mois de juin 2017.

M. le rapporteur. Avis défavorable. La disposition proposée n’a pas de réelle portée juridique.

Mme la ministre. Je suis pour ma part favorable à cette démarche.

La Commission adopte l’amendement. L’article 10 sexies est ainsi rédigé.

Après l’article 10 sexies

La Commission examine ensuite l’amendement CL261 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Il s’agit de permettre aux hôpitaux ultramarins de faire des expérimentations pour développer des stratégies de recomposition et de modernisation de l’offre de soins, toujours dans le cadre de la stratégie nationale de santé.

M. le rapporteur. Défavorable.

Mme la ministre. Même avis : cette disposition n’a pas de portée juridique. Je demande le retrait de cet amendement.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL262 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Il s’agit d’expérimenter les consultations médicales par télémédecine à Wallis-et-Futuna, à la demande de ce territoire.

M. le rapporteur. Je demande le retrait de cet amendement : si elle est fondée, la mesure proposée est quelque peu prématurée. Tant que Wallis-et-Futuna ne bénéficiera pas du haut débit et de la fibre optique, la télémédecine sera impossible. J’en sais quelque chose, pour avoir favorisé la coopération entre les Fidji et Wallis-et-Futuna dans ce domaine.

Mme la ministre. Je demande le retrait de cet amendement, car ce projet fait partie des mesures que nous portons dans la stratégie nationale de santé outre-mer et dans la feuille de route que nous sommes en train d’écrire avec Wallis-et-Futuna. Dans le même temps, nous traitons le sujet du raccordement au câble qui doit être déployé par les Fidji. Grâce à cette collaboration, nous pourrons associer la connectivité et la télémédecine.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Madame la ministre, l’un n’empêche pas l’autre ! Certes, la mise en place d’un dispositif câblé de grande ampleur nécessite beaucoup de temps. Mais ce n’est pas pour cela que les bases de la télémédecine ne peuvent pas être d’ores et déjà posées dans ce texte. Peut-être cela pourrait-il inciter le Gouvernement à aller plus vite en matière de stratégie numérique. Il me semble intéressant de mettre en place de tels dispositifs dans des zones qui ne sont pas interconnectées. Ce n’est pas parce qu’un investissement est lourd qu’il faut éviter la pensée positive.

M. Ibrahim Aboubacar. Pour avoir auditionné la semaine dernière les acteurs de ce territoire dans le cadre de mon avis budgétaire, je peux dire que ce projet de câble est attendu dans les dix-huit mois à venir. Le premier alinéa de l’amendement fait état d’une expérimentation de deux ans, manifestement incompatible avec les délais. Du coup, la mesure proposée ne pourra pas produire les effets escomptés.

Mme la ministre. Monsieur Letchimy, je suis dans une démarche positive de coconstruction avec Wallis-et-Futuna, sur ces deux sujets, mais ce n’est pas son inscription dans la loi qui l’accélérera. C’est pourquoi j’ai demandé le retrait de cet amendement. La démarche est en cours.

M. le rapporteur. Monsieur Aboubacar, les travaux seront-ils engagés ou terminés dans dix-huit mois ?

M. Ibrahim Aboubacar. On m’a dit que le câble serait là dans dix-huit mois.

M. le rapporteur. Le présent amendement prévoit une expérimentation pour une durée de deux ans… On aurait déjà consommé dix-huit mois.

M. le président Dominique Raimbourg. Dans l’état actuel de la législation, rien n’interdit de faire de la télémédecine. Il ne me semble pas qu’il soit nécessaire de l’inscrire dans la loi.

Sans nier la nécessité de faire des progrès de ce type, l’inscription de cette mesure dans la loi relève plus d’une déclaration d’intention. Cela dit, je ne voudrais surtout pas que mes propos soient vus comme une remarque de quelqu’un qui ne prend pas en considération la situation particulière de Wallis-et-Futuna. On peut réaliser l’expérimentation si le câble est déjà déployé. Dans le cas contraire, l’amendement ne change pas beaucoup les choses.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. J’ai bien entendu les explications de Mme la ministre. Je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

Article 10 septies (nouveau)
Pluriactivité professionnelle dans les régions et départements d’outre-mer

La pluriactivité consiste à exercer simultanément plusieurs activités professionnelles, qui peuvent relever de différents statuts (salarié, agent public, travailleur indépendant). Elle est particulièrement développée dans les territoires d’outre-mer.

La pluriactivité doit être encouragée car elle répond aux nouvelles aspirations des travailleurs, notamment dans les jeunes générations. Elle permet aux personnes concernées d’accroître leurs revenus, de diversifier leurs expériences professionnelles et d’acquérir de nouvelles compétences. Elle confronte cependant ces personnes à une complexité administrative plus importante.

C’est pourquoi l’article 10 septies, issu d’un amendement présenté par le Gouvernement et inspiré d’une proposition de M. Serge Letchimy, prévoit d’expérimenter durant trois ans, dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, la mise en place d’une stratégie coordonnée entre l’État, la région, les partenaires sociaux, les organismes consulaires et les opérateurs de l’emploi et de la formation. Cette stratégie sera définie au sein d’une commission spécialisée du comité régional de l’emploi de la formation et de l’orientation professionnelles (CREFOP) et les actions mises en place par les différents partenaires seront précisées par la convention régionale pluriannuelle de coordination de l’emploi, de l’orientation et de la formation prévue à l’article L. 6123-4 du code du travail.

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La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CL285 de la commission des Affaires économiques et l’amendement CL158 du Gouvernement.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un sujet central. Je suis du reste très content que les amendements CL158 et CL157 du Gouvernement confortent mon amendement CL285.

La question de la saisonnalité, de l’activité informelle, de la pluriactivité est un enjeu considérable, tant dans l’hexagone que dans les départements et territoires d’outre-mer. Je ne parle pas des gens qui travaillent au noir, mais de ceux qui sont dans un processus de validation des acquis de l’expérience et qui peuvent avoir une activité privative, administrative, fût-ce un mi-temps dans la fonction publique, et une deuxième activité. Le processus de couverture sur le plan social des droits et des droits à la formation n’est pas cadré. Il ne s’agit pas de créer d’ores et déjà un statut du pluriactif, mais de mettre en place, par le biais du compte personnel d’activité, un processus qui pourrait permettre à quelqu’un qui travaille pendant une période donnée dans le domaine touristique par exemple – la saison touristique dure six mois en Guyane, Martinique ou Guadeloupe – d’avoir une autre activité par ailleurs. Ce cadrage devrait aboutir progressivement à un vrai statut.

Tel est le sens de notre proposition, dont j’observe qu’elle a été reprise dans les deux amendements du Gouvernement. Elle en sera d’autant mieux sécurisée.

Mme la ministre. L’amendement CL158 est assez semblable à l’amendement CL285 et l’amendement CL157 vise à anticiper l’application du compte personnel d’activité dans les outre-mer.

M. le président Dominique Raimbourg. Retirez-vous votre amendement au profit des amendements du Gouvernement, monsieur Letchimy ?

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Volontiers, monsieur le président.

L’amendement CL285 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL158. L’article 10 septies est ainsi rédigé.

Article 10 octies (nouveau)
(art. 39 de la loi n° 2016
1088 du 8 août 2016 relative au travail,
à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels)

Pluriactivité et compte personnel d’activité

Créé par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, le compte personnel d’activité (CPA) s’appliquera à l’ensemble des actifs, quel que soit leur statut. Il entre en vigueur le 1er janvier 2017 pour les salariés et demandeurs d’emploi, le 1er janvier 2018 pour les travailleurs indépendants.

Le CPA donnera des droits nouveaux aux pluriactifs puisqu’il couvrira à la fois les salariés et les travailleurs indépendants, et donc notamment les personnes qui cumulent ces deux activités. Il bénéficiera particulièrement aux départements et collectivités d’outre-mer, puisque la pluriactivité y est particulièrement développée.

L’article 10 octies, issu d’un amendement présenté par le Gouvernement, a pour objet de permettre une mise en œuvre anticipée, avant le 1er janvier 2018, pour les travailleurs indépendants affiliés aux fonds d’assurance-formation de non-salariés qui seront prêts avant cette date.

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La Commission adopte l’amendement CL157 du Gouvernement. L’article 10 octies est ainsi rédigé.

Après l’article 10 octies

La Commission examine l’amendement CL110 de Mme Huguette Bello.

Mme Huguette Bello. Je reviens, à travers le présent amendement, sur une préoccupation récurrente au sujet de laquelle j’avais déjà fait voter un amendement en 2014, qui demandait au Gouvernement de remettre un rapport sur l’allocation de solidarité pour les personnes âgées (ASPA). L’ASPA est versée depuis 2006 en remplacement du minimum vieillesse. Elle est destinée à assurer à toute personne de plus de soixante-cinq ans un montant de ressources d’environ 800 euros mensuels pour une personne seule, et de 1 227,61 euros pour un couple. Mais nous savons que la moitié seulement des personnes éligibles sont allocataires de l’ASPA.

Parmi les explications de ce faible recours, on avance souvent une méconnaissance des droits donnés par la loi de n° 2014-40 du 20 janvier 2014 de réforme des retraites. En fait, le gage patrimonial, c’est-à-dire la récupération sur succession lorsque celle-ci représente un actif net supérieur à 39 000 euros, a un effet dissuasif maintes fois souligné. C’est d’ailleurs pour cette raison que la clause de récupération a été supprimée pour les agriculteurs.

Il s’agit ici, en se référant aux exonérations prévues pour les plus-values immobilières au titre de l’impôt sur le revenu, de prévoir une durée de détention au-delà de laquelle la récupération sur succession des allocations perçues n’est plus exigible. On peut envisager cette disposition à titre expérimental dans les outre-mer, car nous pouvons aussi être les vecteurs de la réduction de la précarité et des inégalités.

M. le rapporteur. Le débat sur l’ASPA est beaucoup plus large. Nous avons demandé au Gouvernement des mesures bien plus concrètes. Je sais que la ministre, le moment venu, aura à formuler un certain nombre de propositions. En tout cas, votre amendement ne règle pas le problème des retraités pauvres, des gens qui touchent de toutes petites pensions. Je demande à notre collègue de retirer son amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme Huguette Bello. Je ne le retirerai pas.

Mme la ministre. Vous abordez là, madame Bello, un sujet qui nous touche tous beaucoup. Mme Orphé l’a également évoqué en commission des Affaires sociales et dans le rapport qu’elle a remis hier. Nous voilà ramenés à une inégalité historique : certains se retrouvent avec ces petites retraites précisément à cause du retard de la mise en œuvre de l’égalité sociale – le SMIC par exemple n’a été aligné qu’en 1996. Comme le soulignait M. Letchimy, la parole d’une ministre est une parole qui compte ; aussi, madame Bello, je vous demande de retirer votre amendement parce que nous sommes en train de travailler sur ce sujet en vue de faire des propositions lors de l’examen du texte en séance publique.

Mme Huguette Bello. Je le répète : je ne le retirerai pas. Le 5 septembre 2014 un mien amendement a été adopté en séance et on attend toujours le rapport promis !

Mme la ministre. Mais il n’est pas ici question de proposer un rapport.

Mme Huguette Bello. Je persévère depuis que je suis confrontée au problème des retraites des Réunionnais. Surtout, les gens n’étaient pas déclarés à la sécurité sociale ; il fallait aller demander une attestation au patron pour prouver que l’on avait travaillé. C’est de cela que nous souffrons.

Mme la ministre. J’entends bien ce que dit Mme Bello. J’insiste vraiment sur le fait que je n’ai pas proposé un rapport mais parlé de travailler à une proposition sur un sujet qui nous tient à cœur. Et, lors des débats en séance, je serais, comme ministre de ce Gouvernement, très fière et très heureuse de proposer la mesure qui sera le fruit de cette réflexion.

M. Ibrahim Aboubacar. Il s’agit d’un problème central et qui d’ailleurs concerne de nombreuses personnes dans les quatre « vieux » départements d’outre-mer. Nous-même avons déposé l’amendement CL52 qui montre la même préoccupation, dans une autre dimension. Nous aussi tenons absolument à ce qu’il y soit apporté une réponse. Pouvez-vous nous assurer, madame la ministre, que le Gouvernement proposera un dispositif global sur le sujet ? À défaut, nous voterons les amendements en question, quitte à ce que proposiez à votre tour de les rectifier dans le sens le plus convenable.

M. le rapporteur. M. Aboubacar vient de faire allusion à l’amendement que nous allons examiner juste après celui-ci, dont il est le premier signataire et sur lequel je donnerai un avis favorable – cela sous réserve que le Gouvernement, d’ici à l’examen du texte en séance publique, nous apporte des réponses encore plus concrètes, à même de satisfaire la préoccupation de notre collègue Huguette Bello, mais également une demande récurrente des élus nationaux.

Dans ces conditions, je persiste à demander à Mme Bello de retirer son amendement au profit du suivant.

La Commission rejette l’amendement.

Article 10 nonies (nouveau)
(art. L. 815
13 du code de la sécurité sociale)
Récupération sur succession au titre de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA)

L’article 10 nonies, issu d’un amendement présenté par M. Ibrahim Aboubacar et les députés du groupe Socialiste, écologiste et républicain, a pour objet de porter de 39 000 euros à 100 000 euros le seuil au-delà duquel il est procédé à une récupération sur succession au titre de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA).

Dans l’actuelle rédaction de l’article L. 81513 du code de la sécurité sociale, le recouvrement sur succession n’est opéré que sur la fraction de l’actif net dépassant 39 000 euros. Ce mécanisme, particulièrement mal ressenti dans les outre-mer où la valorisation foncière explique que beaucoup de retraités modestes disposent néanmoins d’un petit patrimoine, se révèle pénalisant pour les héritiers de ces pensionnés. Il est responsable d’un taux de recours insatisfaisant au dispositif, les personnes âgées dans le besoin préférant y renoncer pour ne pas obérer le maigre héritage de leurs enfants.

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La Commission examine l’amendement CL52 de M. Ibrahim Aboubacar.

M. Ibrahim Aboubacar. Je viens de le présenter : nous souhaitons modifier le seuil au-delà duquel il est procédé à une récupération sur succession au titre de l’ASPA.

M. le président Dominique Raimbourg. M. le rapporteur a indiqué à l’instant qu’il y était favorable.

Mme la ministre. Je ferai la même réponse que précédemment : nous aborderons la question de l’ASPA de façon globale. Vous savez qu’il existe différentes pistes. Nous devons par conséquent continuer de travailler afin de proposer une solution en séance.

Suivant l’avis du rapporteur, la Commission adopte l’amendement. L’article 10 nonies est ainsi rédigé.

Après l’article 10 nonies

La Commission examine l’amendement CL112 de Mme Huguette Bello.

Mme Huguette Bello. L’égalité sociale a été la revendication phare de la loi de départementalisation de 1946. Sa mise en œuvre n’a pas été linéaire et elle a connu de multiples exceptions et dérogations. La parité sociale s’est, pendant de longues années, substituée à l’égalité sociale. Mais force est de constater que, pour l’essentiel, celle-ci s’est réalisée. Reste toutefois un certain nombre de prestations sociales toujours servies à des taux et selon des critères défavorables aux outre-mer.

Nous l’avons évoqué hier en commission des Affaires sociales et cet après-midi : c’est le premier volet du plan d’achèvement que nous proposons et qui doit être une sorte de pendant du plan de convergence. Il faut également prévoir un second volet relatif aux petites retraites.

Deux professions illustrent de façon dramatique la situation actuelle où se prolongent les inégalités héritées du passé. Je pense d’abord aux agriculteurs retraités qui n’ont pas bénéficié de l’augmentation générale des retraites agricoles à hauteur de 75 % du SMIC, prévue par le décret de septembre 2015. Je pense également aux marins pêcheurs, dont on ne parle jamais, qui, n’ayant pas cotisé ou l’ayant fait au demi-rôle, perçoivent des retraites de 200 à 300 euros par mois. Cette grande précarité touche tous les travailleurs du privé ainsi pénalisés par l’arrivée tardive de la sécurité sociale dans nos régions et par le chômage massif.

M. le rapporteur. Je demande le retrait de cet amendement, puisque son objet rejoint exactement celui du projet de loi pour ce qui touche aux plans de convergence. Ensuite, il n’apporte aucune précision sur les modalités envisagées pour parvenir à l’objectif visé.

Mme la ministre. Même avis que le rapporteur.

La Commission rejette l’amendement.

Article 10 decies (nouveau)
Rapport sur le lien entre prix et consommation des boissons alcooliques

L’article 10 decies, issu d’un amendement présenté par Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales, sollicite du Gouvernement un rapport étudiant le lien entre le prix des boissons alcooliques et la consommation d’alcool, et évaluant l’impact d’une éventuelle majoration des droits d’accises sur les boissons alcooliques en matière de lutte contre l’alcoolisme.

Votre rapporteur a conditionné son avis favorable à un sous-amendement généralisant l’étude à l’ensemble des boissons alcooliques et non à une seule d’entre elles – en l’occurrence le rhum –, considérant que les méfaits de l’alcool ne dépendaient guère de la boisson dans laquelle il se trouvait contenu au moment de son absorption.

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La Commission examine l’amendement CL256 de la commission des Affaires sociales, qui fait l’objet d’un sous-amendement CL292 du rapporteur.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Nous connaissons tous le problème de santé publique que pose l’alcool, particulièrement dans les outre-mer. Le présent amendement prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport mesurant l’impact du prix du rhum, en particulier, sur la consommation d’alcool dans les outre-mer, mais aussi l’effet d’une majoration des droits d’accises sur les boissons alcooliques en matière de lutte contre l’alcoolisme.

M. le rapporteur. Le sous-amendement CL292 vise à supprimer les mots : « , et en particulier du rhum produit dans les départements d’outre-mer, », afin de viser tous les alcools sans distinction.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Je souscris au sous-amendement de Victorin Lurel : il ne faut pas cibler un alcool en particulier. Quant à la majoration des droits d’accises, elle peut nuire considérablement à la compétitivité du rhum et à sa commercialisation dans le monde.

Je ne suis pas membre de la commission des Lois, donc je ne vote pas. Mais Mme Bello nous rappelait tout à l’heure que cela fait soixante-dix ans qu’on lutte pour le droit à l’égalité sociale – soixante-dix ans ! Autrement dit, des gens dans cette République sont depuis soixante-dix ans en quête d’un droit dont ils sont censés bénéficier. Le plan de convergence prévu par le texte doit amener l’État à prendre ses responsabilités pour parvenir à une application claire et nette des mêmes droits, que l’on se trouve en Martinique ou dans le Languedoc-Roussillon. C’est pourquoi je regrette le rejet de l’amendement de Mme Bello.

M. le président Dominique Raimbourg. La pratique de la commission des Lois est de ne jamais demander de rapports. Or nous allons examiner trente-cinq demandes de rapports ! Pour ce qui est de celle-ci, je considère comme vous, madame Orphé, que la question de l’alcoolisme est très importante et je partage tout à fait votre point de vue ; mais je constate que de nombreux rapports demandés ne sont finalement jamais déposés. Or, qu’est-ce qui vous empêcherait, au cours des six mois suivant la promulgation de la loi, en respectant l’esprit du sous-amendement du rapporteur selon lequel il convient de ne pas cibler un alcool en particulier, de demander la constitution d’une mission d’information qui permettrait de déterminer si le bas prix des boissons, dans les départements d’outre-mer, influe sur une consommation apparemment plus élevée encore qu’en métropole ?

Je comprends l’utilité de certains rapports parce qu’ils permettent d’évoquer des questions financières en échappant au couperet de l’article 40 de la Constitution. Mais celui que vous réclamez ici ne pourrait-il pas être utilement remplacé par une mission ? Cette démarche me paraîtrait plus efficace que celle consistant à surcharger les services du ministère de l’Outre-mer qui ont parfois du mal à répondre à la demande.

Mme la ministre. L’alcoolisme, nous sommes bien d’accord, madame la rapporteure pour avis, détruit nos familles – sans parler de tout ce qui touche aux violences. Comme Victorin Lurel, je pense qu’il ne faut pas cibler le rhum en particulier mais évoquer l’alcool en général. En effet, il ne s’agit pas de mettre en péril une filière, en l’occurrence celle du rhum, qui apporte à nos territoires une activité économique mais participe également d’une identité : comme d’autres régions produisent du vin, nous, nous produisons du rhum de qualité. Il s’agit donc avant tout de lutter contre un fléau, pas contre une filière.

Le président rappelait le nombre important de demandes de rapports. Il faut toutefois tenir compte de la méconnaissance des territoires et du fait que nous ne disposons pas toujours des chiffres et des analyses nécessaires pour éclairer les députés. Je suis tout à fait favorable à votre proposition de créer une mission d’information qui nous apporterait des pistes de travail plus rapidement qu’un rapport.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Ma demande d’un rapport ne visait pas du tout à contourner l’article 40 de la Constitution : l’idée était justement de ne pas pénaliser les distributeurs par une excessive et brutale majoration des droits d’accises. Aussi suis-je prête à retirer mon amendement si nous pouvons parvenir à nos fins par le biais d’une mission d’information.

M. le rapporteur. La question de la majoration des droits d’accises n’est pas gagnée d’avance car nous sommes dans une situation qu’il nous faut clarifier vis-à-vis de l’Union européenne.

Il est vrai, monsieur le président, que nous avons une cinquantaine de demandes de rapports. Pourquoi ? Parce que le rapport est l’arme du député démuni face à l’article 40 de la Constitution. En outre, le rapport permet de soulever une question et d’appeler une réponse de l’exécutif. Or, le Gouvernement a décidé d’enrichir le texte. Je serais donc très heureux, en tant que rapporteur, que tous ces rapports deviennent inutiles et que les arbitrages attendus arrivent. Je n’ignore certes pas la jurisprudence de la commission des Lois, évoquée à l’instant par son président, mais, faute d’un texte initial charnu, eh bien, les députés demandent des rapports… Reste que le compromis proposé par le président me paraît très bon.

M. le président Dominique Raimbourg. Quelle est votre position, madame la rapporteure pour avis ?

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Je maintiens être prête à retirer mon amendement sous réserve que la ministre prenne l’engagement de mettre en place une mission d’information.

Mme la ministre. Je partage tout à fait l’avis du président, j’y insiste, et je souhaite que nous nous engagions très rapidement sur le sujet afin de définir des pistes. Je rappelle que la démarche du Gouvernement est celle de la coconstruction du projet de loi, et ce jusqu’au bout du processus législatif.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Soyons précis : s’agit-il d’une mission d’information gouvernementale ou bien parlementaire ? Car si la mission est gouvernementale, madame la ministre, c’est avec votre budget que sera payé le billet d’avion des deux ingénieurs qui se rendront en Martinique, à La Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon afin de mesurer sur place l’état de l’alcoolisme. Et par la même occasion, vous vous engagez à prendre les décrets et les arrêtés destinés à changer les choses.

M. le président Dominique Raimbourg. Il existe en effet deux types de missions. Nous pouvons envisager une mission de la commission compétente – qui serait ici la commission des Affaires sociales – et qui serait financée par le budget de l’Assemblée nationale, ou bien une mission gouvernementale financée par le budget du ministère. J’ai pour ma part suggéré la création d’une mission parlementaire.

M. Daniel Gibbes. Donc pourvue de moyens limités.

M. le président Dominique Raimbourg. Donc, en effet, pourvue de moyens limités mais qui permettraient tout de même d’aller à La Réunion.

M. Ibrahim Aboubacar. Je sais qu’il sera difficile de trouver des députés candidats à une telle mission… D’autant qu’elle serait composée de députés non originaires des départements producteurs de rhum. (Sourires.)

Mme Maina Sage. Des dizaines de rapports sont pour l’instant proposés par voie d’amendements ; si on veut faire des dizaines de missions, il va falloir prévoir un budget spécial ! Je partage en tout cas l’idée précédemment exprimée selon laquelle les demandes de rapports traduisent bien un manque de données et l’incapacité de faire voter des amendements. Certains sont parvenus à passer la barrière de l’article 40 de la Constitution, mais, très franchement, se pose la question de l’arbitrage : ne vaudrait-il pas mieux débattre sur le fond, sur des dispositions innovantes, ambitieuses pour nos territoires, plutôt que de proposer systématiquement des remises de rapports ?

Je suis en outre d’accord sur la nécessité d’approfondir la question de l’alcoolisme dans nos territoires. Certaines collectivités d’outre-mer, comme la nôtre, la Polynésie française, mais aussi comme la Nouvelle-Calédonie, ont une fiscalité propre dont on pourrait tirer des enseignements – en particulier pour les DOM – afin de gagner du temps. Reste que la fiscalité seule ne suffira pas à régler le problème de l’alcoolisme même si la question de la tarification de l’alcool produit localement se pose. Il convient donc de rendre l’alcool moins accessible tout en évitant de stigmatiser une de ces productions qui procurent une certaine richesse économique. Mieux vaut rester prudent : le sous-amendement du rapporteur permet précisément de ne pas cibler le rhum en particulier.

Nous soutiendrons la création d’un rapport ou bien la création d’une mission mais nous souhaiterions qu’on aille un peu plus loin : nous avons besoin d’action.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Il nous faudrait obtenir l’accord de la présidente de la commission des Affaires sociales, Mme Catherine Lemorton, pour créer une mission d’information parlementaire. Or j’ai bien peur que son budget ne soit restreint. Je milite par conséquent davantage pour une mission gouvernementale, surtout si nous souhaitons aller vite.

Le sujet, et vous en êtes d’accord, madame la ministre, est crucial ; aussi apparaît-il nécessaire d’obtenir d’un rapport les éléments – quitte à n’en disposer que dans un an – permettant de mesurer l’impact d’une éventuelle majoration des droits d’accises sur les boissons alcooliques en matière de lutte contre l’alcoolisme. Encore une fois, la consommation abusive d’alcool cause des ravages dans nos territoires. Par conséquent, soit on tâche d’agir, soit on recule de peur d’être stigmatisés – en tout cas, moi, je n’en ai pas peur. Bien sûr, il ne s’agit pas d’être brutal : j’aurais pu déposer un amendement visant à augmenter immédiatement les droits d’accises, mais je sais que nombre de mes collègues ne sont pas d’accord. Je demande donc qu’on prenne le temps d’y réfléchir, d’où mon souhait de la remise d’un rapport dans le cas où une mission d’information ne serait pas constituée.

La Commission adopte le sous-amendement.

Puis elle adopte l’amendement sous-amendé. L’article 10 decies est ainsi rédigé.

Après l’article 10 decies

La Commission examine l’amendement CL268 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphé, rapporteur pour avis. Le présent amendement vise à revoir les conditions d’attribution des allocations de logement dans les DOM.

M. le rapporteur. Avis défavorable : je ne vois pas pour quel motif on créerait un loyer minimum en outre-mer. À mon sens, il faudrait plutôt réviser les conditions d’accès aux aides au logement ou le montant de ces aides en fonction des revenus.

Mme la ministre. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient aux deux amendements identiques CL269 de la commission des Affaires sociales et CL19 de M. Stéphane Claireaux.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. L’amendement CL269 demande au Gouvernement de remettre un rapport sur les modalités de mise en place des aides sociales au logement à Saint-Pierre-et-Miquelon.

M. Stéphane Claireaux. J’ai bien entendu vos considérations, monsieur le président, sur le nombre de rapports demandés, mais c’est la seule solution que j’ai trouvée pour faire entendre la voie des Saint-Pierrais en ce qui concerne les allocations de logement, pour bénéficier de droits pourtant acquis. Malgré deux habilitations gouvernementales successives, en 2009 et 2012, malgré l’engagement pris par le Président de la République, lors de sa visite sur place en décembre 2014, et malgré l’avis favorable du Conseil d’État, en juin 2015, les aides au logement ne sont toujours pas applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon. Je ne sais donc plus à quel saint me vouer ! D’où mon amendement CL19.

M. le rapporteur. J’émets un avis favorable sur ces deux amendements. Madame la ministre, quand j’étais moi-même au Gouvernement, nous nous étions engagés à prendre une ordonnance ; or elle n’a jamais été publiée. Aujourd’hui, on est obligé de demander un rapport… Le Gouvernement peut-il nous répondre ? Qu’en est-il de cette ordonnance ? Peut-être le délai imparti au Gouvernement est-il dépassé et peut-être faut-il reprendre une habilitation. Mais voilà quatre ans et demi que nous l’attendons !

Mme la ministre. Je propose au député Claireaux que nous nous rencontrions dès demain afin que nous puissions, avec les services du ministère, avancer sur le sujet. À défaut d’obtenir la réponse souhaitée, vous aurez l’occasion de déposer à nouveau votre amendement en séance publique.

M. le président Dominique Raimbourg. Au bénéfice de ces explications, les amendements sont-ils retirés ?

M. Stéphane Claireaux. Nous prendrons contact demain avec les services de la ministre et, en attendant, je retire l’amendement.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Je retire également le mien.

Les deux amendements identiques sont retirés.

Article 10 undecies (nouveau)
Rapport sur l’ajustement des plafonds de ressources
applicables aux prestations délivrées à Saint-Pierre-et-Miquelon
par rapport au niveau des prix et des revenus

L’article 10 undecies, issu d’un amendement présenté par M. Stéphane Claireaux, vise à attirer l’attention du Gouvernement sur l’enjeu d’égalité réelle que constitue la hausse des plafonds de ressource applicables aux dispositifs sociaux relevant de la caisse de prévoyance sociale de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Si plusieurs plafonds de ressource sont effectivement revalorisés afin de tenir compte du niveau structurellement élevé de prix et donc de revenus dans la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon, cette revalorisation doit être généralisée afin de permettre l’accès, à situation de pouvoir d’achat égale, aux mêmes droits sociaux.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL20 de M. Stéphane Claireaux.

M. Stéphane Claireaux. Cet amendement tend à nouveau à demander un rapport dans le but d’appeler l’attention du Gouvernement sur l’enjeu fondamental d’égalité réelle que constitue la hausse des plafonds de ressource applicables aux dispositifs sociaux relevant de la Caisse de prévoyance sociale de Saint-Pierre-et-Miquelon. Si plusieurs plafonds de ressource sont effectivement revalorisés afin de tenir compte du niveau structurellement élevé des prix et donc des revenus à Saint-Pierre-et-Miquelon, cette revalorisation doit être généralisée afin de permettre l’accès, à situation de pouvoir d’achat égale, aux mêmes droits sociaux.

Certaines prestations familiales, en effet, dont nous avons obtenu l’extension en 2009, bénéficient des plafonds de ressource majorés. L’objectif est d’en généraliser le principe.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

Mme la ministre. Avis favorable : ce sujet mérite qu’on y travaille.

La Commission adopte l’amendement. L’article 10 undecies est ainsi rédigé.

Après l’article 10 undecies

La Commission examine ensuite l’amendement CL144 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. Depuis la promulgation de la loi du 31 décembre 1986, certains employeurs et travailleurs indépendants doivent s’acquitter de leurs cotisations pour pouvoir bénéficier de leurs prestations familiales. Il s’agit uniquement des employeurs et travailleurs indépendants ultramarins qui doivent produire un justificatif de paiement.

En France hexagonale, le versement des prestations familiales pour les employeurs et travailleurs indépendants n’est soumis à aucune condition particulière. Cela constitue par conséquent une inégalité réelle entre les ultramarins et les hexagonaux.

Il est demandé que, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant une possible suppression du paiement préalable au versement des prestations sociales pour les employeurs et travailleurs indépendants dans les outre-mer, prévu à l’article L. 755-2-1 du code de la sécurité sociale. Ce rapport comprendra les données départementalisées relatives aux taux d’impayés des cotisations pour les employeurs et travailleurs indépendants.

M. le rapporteur. Je suis bien obligé d’émettre un avis favorable, faute de mieux… Il n’est plus l’heure de demander un rapport mais de supprimer effectivement le paiement préalable dont il est question. La situation actuelle entretient, en effet, l’affreux soupçon : il y aurait de mauvais payeurs dans les outre-mer et à cause de cela, on priverait les travailleurs indépendants et leurs enfants d’allocations. Pourtant, le Gouvernement ne manque pas de moyens de contrainte : avis à tiers détenteur, injonctions de payer, saisie et que sais-je encore. C’est à lui qu’il revient de mettre en place les moyens de recouvrement de ces créances. Nous serions heureux que cet arbitrage soit pris dès demain, que les conditions entre hexagonaux et ultramarins soient enfin alignées. Les députés présents connaissent le sujet : les travailleurs indépendants ne peuvent pas percevoir les allocations familiales s’ils ne sont pas à jour de leurs cotisations – ce qui n’est pas le cas en métropole. J’attends une réponse rapide et concrète du Gouvernement. Si nous n’avons pas pu déposer d’amendement en ce sens, c’est une fois de plus à cause de l’article 40 de la Constitution.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Nous avons beaucoup discuté entre nous de ce projet de loi. Notre collègue Aboubacar emploie souvent le terme de « crédibilité ». Sommes-nous crédibles ou non ? Or sur le sujet dont il est ici question, je suis d’accord avec le rapporteur : ce n’est pas un rapport qu’il faut, cela n’a pas de sens. Nous en sommes déjà à cinq rapports : on ne va pas tout de même en faire une bible ! On ne peut accepter qu’en métropole les travailleurs indépendants n’aient pas besoin de prouver le paiement préalable alors qu’on l’exige des travailleurs indépendants d’outre-mer. Aussi a-t-on l’impression – c’est la vision hexagonale – que ces gens-là ne paient pas leurs cotisations mais qu’ils veulent toucher des allocations. Cette stigmatisation perdure ; je ne saurais l’accepter. Je vous demande d’y mettre un terme, madame la ministre, par un signal politique fort. Il faut arrêter cela ! Le Gouvernement doit prendre la responsabilité de déposer un amendement en ce sens ; nous, nous ne pouvons pas le faire sous peine de tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution. Restez debout, madame la ministre, et présentez un amendement en séance le 4 ou le 5 octobre prochain. Et alors un rapport deviendra inutile.

M. Ibrahim Aboubacar. Je suis tout à fait d’accord.

Mme la ministre. Je reste debout, monsieur Letchimy ; Fanm doubout, dit-on à La Réunion.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Chez nous aussi…

Mme la ministre. Je suis défavorable à la remise d’un rapport parce que, en effet, il faut travailler sur ce dossier. Non seulement les travailleurs indépendants des outre-mer sont injustement stigmatisés, mais il est ici question des allocations familiales, lesquelles sont destinées aux enfants, aux familles, à leur bien-être. Le Gouvernement souhaite le retrait de votre amendement, monsieur Naillet, parce qu’il apportera une réponse le 5 octobre à votre préoccupation.

M. Ibrahim Aboubacar. Nous entendons, avec vraiment grand plaisir, l’engagement ferme que vient de prendre la ministre de déposer des amendements visant à régler cette question en séance.

M. Philippe Naillet. Compte tenu de l’engagement de la ministre, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

M. le rapporteur. Je souhaite vous informer, avant que nous n’abordions le titre IV, de ce que nous n’avons pas pu déposer plusieurs amendements à cause de l’article 40 de la Constitution.

Nous attendons avec impatience un arbitrage du Gouvernement sur l’allocation vieillesse pour les parents au foyer, un problème qui dure aussi depuis soixante-dix ans. Je souhaite également que les deux dernières des quatre prestations, le complément familial DOM et la prestation accueil du jeune enfant, soient prises en compte. J’ai même suggéré que cette idée soit appliquée d’ici au 1er janvier 2019 ou 2020. Sur l’allocation de logement, il n’y a pas vraiment eu de débat avant la réunion de la commission des Lois. Enfin, toujours pour les mêmes raisons, nous n’avons pas pu déposer d’amendement sur le revenu supplémentaire temporaire d’activité. Sur ces quatre grandes prestations, nous attendons avec quelque impatience de connaître les intentions du Gouvernement.

Il s’agissait de vous montrer la difficulté de notre travail mais aussi sa beauté… Le texte évolue dans le bon sens et j’espère que nous aurons le même bonheur avec le titre IV.

TITRE IV
DISPOSITIONS RELATIVES À LA MOBILITÉ ET À LA CONTINUITÉ TERRITORIALE ET NUMÉRIQUE

Le présent titre, issu d’un amendement de votre rapporteur, est consacré aux dispositions relatives à la mobilité et à la continuité territoriale et numérique. Il comprend huit articles, dont six additionnels.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL295 du rapporteur et CL101 de Mme Huguette Bello.

M. le rapporteur. L’amendement CL295 propose de rédiger ainsi l’intitulé du titre IV : « Dispositions relatives à la mobilité et à la continuité territoriale et numérique ».

Mme Huguette Bello. Mon amendement CL101 propose de rédiger ainsi l’intitulé : « Dispositions en faveur du désenclavement aérien, numérique et maritime des outre-mer ».

Au moment où les échanges s’intensifient à travers le monde, le développement des outre-mer rend urgente l’adoption de mesures structurelles en faveur du désenclavement, lequel se décline désormais en trois dimensions : aérienne, maritime mais aussi numérique.

Le désenclavement aérien, en dépit du dispositif d’aide au voyage, n’est toujours pas réalisé : coût des billets d’avions, opacité des taxes, saisonnalité des liaisons et des prix, ouverture sur les pays environnants… Beaucoup reste à faire pour faciliter la mobilité des ressortissants d’outre-mer.

C’est pourquoi le texte doit jeter les bases d’un véritable désenclavement aérien avec, d’une part, une continuité territoriale au service de la mobilité des ultramarins – le dispositif actuel d’aide au voyage, que les Réunionnais financent d’ailleurs eux-mêmes en grande partie, ne saurait être considéré comme une solution durable à laquelle il suffirait d’apporter quelques ajouts –, et avec, d’autre part, une ouverture sur les pays de notre environnement géographique.

Notre développement à l’international requiert une politique aérienne plus ouverte : l’aéroport international de La Réunion est desservi par six compagnies aériennes – quatre françaises et deux étrangères – tandis qu’on dénombre, à l’Île Maurice voisine, pas moins de vingt opérateurs… Ces chiffres se passent de commentaire.

Le désenclavement numérique, pour sa part, est devenu une exigence. Cette mutation technologique permet d’envisager, pour la première fois, le développement de nos territoires sans les contraintes liées à l’éloignement, à l’insularité et à l’absence d’économies d’échelle. Or nous subissons déjà des retards : nous en sommes toujours à la phase d’attribution de la licence 4G alors que la 5G est annoncée. Se posera également très vite, avec l’explosion des débits, la question des câbles sous-marins.

Le numérique est une question stratégique pour les outre-mer, un enjeu majeur pour nos économies et pour la création d’emploi.

M. le rapporteur. Vous devriez être satisfaite par mon amendement, madame Bello ; c’est pourquoi je vous demanderai de bien vouloir retirer le vôtre.

Nous allons être obligés de créer d’autres titres et pour cela d’attendre que l’ensemble des amendements soit voté afin d’avoir une vue globale du texte. Il y aura, par exemple, un titre portant sur l’économie, le commerce et la banque. Ici, nous parlons du transport aérien, de la continuité territoriale et numérique.

Mme Maina Sage. Les rédactions proposées pour l’intitulé du titre IV sont ambitieuses, mais également plus honnêtes que la version initiale dans la mesure où cette partie du texte ne contient aucune disposition à caractère véritablement économique. Y sont en effet abordés la continuité territoriale, l’élargissement aux stages professionnels des étudiants – c’est donc bien dans le cadre de l’éducation et non de l’économie que nous nous situons ici. Mais cela révèle aussi la faiblesse du texte : les vraies mesures de soutien aux entreprises en sont absentes. Je suis donc favorable au changement de l’intitulé.

J’ai toutefois des réserves sur le titre proposé par le rapporteur : « Dispositions relatives à la mobilité et à la continuité territoriale et numérique ». J’aurais aimé que cette continuité soit également maritime : malheureusement, pour l’instant, cela reste un vœu pieux. Aussi, logiquement, j’aurais préféré que ces amendements de rédaction de l’intitulé soient présentés à la fin de l’examen du titre IV : après tout, rien ne dit que les amendements sur le numérique vont être votés. Il ne faudrait pas proposer un joli titre sans être assuré que les mesures correspondantes ont été vraiment adoptées.

M. Letchimy, rapporteur pour avis. Je ne comprends pas ces deux amendements. Nous avons trois piliers : l’un sur la procédure, la stratégie, les plans de convergence, objet des titres Ier et II ; le titre III sur les dispositions sociales en faveur de l’égalité réelle, pour Mayotte ; et ce titre IV qui ouvrirait des perspectives sur la question du développement économique en offrant la possibilité d’enclencher localement un processus de développement, dans chaque territoire ; ce développement endogène pourrait contribuer à l’accès à l’égalité par l’économique. Certains ont même parlé d’un nouveau modèle de développement durable, d’économie circulaire, qui peut aller loin en associant le numérique à l’intelligence économique, à l’agriculture biologique, etc.

Or, voilà qu’il est question de réduire ce titre à la question du désenclavement, à dispositions relatives à la mobilité et à la continuité territoriale et numérique. Ce n’est pas le sujet. Le texte doit avancer sur deux pieds : l’égalité qui se décrète et que l’on force petit à petit ; l’ambition d’un programme de développement où s’expriment l’inspiration et la créativité. Il ne s’agit évidemment pas de tout mélanger dans un fourre-tout, mais il faut préserver l’aspect économique dans le titre, quitte à prévoir des sous-titres sur la mobilité, le désenclavement numérique terrestre, aérien, maritime et tout ce que vous voulez. La formulation « dispositions économiques en faveur de l’égalité réelle » est peut-être à revoir mais, s’il vous plaît, laissez-y la notion de développement économique ! Vous nous prenez un peu au dépourvu et, personnellement, je suis défavorable à la modification que vous proposez.

M. le rapporteur. Nous n’avons pas l’intention de supprimer des sujets, notamment l’économie. À ce stade, il est prévu au moins douze titres – appelez-les comme vous voulez : chapitres, sous-chapitres… – qui concernent l’économie : commerce, banque, culture, social, etc. La procédure commande d’adopter les titres avant de voter sur les amendements. Après tout cela, nous aurons une vue d’ensemble du texte.

Mme la ministre. Je suis d’accord avec l’esprit de l’intervention de Serge Letchimy : la loi sur l’égalité réelle comporte forcément un aspect économique. Avec cette loi, notre volonté est d’impulser un nouveau modèle reposant sur des stratégies locales, ancrées dans des plans de convergence co-construits par l’État et les territoires en fonction des opportunités, des atouts et des handicaps de chacun des territoires. Voilà le cadre général, la démarche qui doit impulser un nouveau modèle.

Pour arriver à l’égalité réelle dans chaque territoire, nous devons agir sur le social parce qu’il n’y a pas d’économie sans développement humain qui, lui-même, passe notamment par l’éducation, la formation et la lutte contre la pauvreté. D’où l’existence de ce titre social. Mais, comme le disait très justement le rapporteur, il n’est pas question de supprimer le titre économique.

Les outils de la mobilité, de la continuité territoriale et du numérique visent à la connectivité numérique, maritime, aérienne. Nos territoires doivent être connectés de différentes manières et avec leur bassin océanique. Comme le social, la culture, l’éducation et l’économie, ces instruments nous permettront d’entrer dans ces plans de convergence et d’aller vers l’égalité réelle.

Je suis donc favorable à la rédaction de l’intitulé proposée par le rapporteur : « Dispositions relatives à la mobilité et à la continuité territoriale et numérique ». Et nous garderons évidemment le titre sur l’économie.

M. le président Dominique Raimbourg. Ce qui aura pour effet de faire tomber l’amendement de Mme Bello.

La Commission adopte l’amendement CL295. L’intitulé du titre IV est ainsi rédigé.

En conséquence, l’amendement CL101 tombe.

Article 11 A (nouveau)
(art. L. 1 du code des postes et des communications électroniques)

Extension du mécanisme de péréquation tarifaire des lettres

Cet article additionnel, issu d’un amendement du Gouvernement, élargit le champ de la péréquation tarifaire des lettres échangées entre les collectivités ultra-marines et l’hexagone aux envois supérieurs à cent grammes, contre vingt grammes seulement aujourd’hui. Ceci a pour objet de renforcer la continuité postale entre tous les territoires de la République. Votre rapporteur juge cette disposition tout à fait intéressante mais aurait souhaité que la péréquation tarifaire soit étendue aux envois jusqu’à deux kilos.

*

* *

La Commission en vient à l’amendement CL168 du Gouvernement.

Mme la ministre. Cet amendement concerne les postes et télécommunications et constitue un premier pas important vers l’alignement des tarifs. Nous proposons d’augmenter le poids des courriers auxquels s’applique la péréquation tarifaire en le portant de 20 grammes à 100 grammes. Cette mesure permettra de couvrir 96 % des envois postaux effectués par les familles et les entreprises.

M. le rapporteur. Quitte à faire de la peine à Mme la ministre, à titre personnel, j’émets un avis défavorable à cet amendement car je suis déçu. Je connais la difficulté du sujet. Mais faire la continuité postale uniquement sur les lettres individuelles et passer de 20 grammes à 100 grammes, c’est peu : lors de précédentes discussions, il avait été envisagé d’aller jusqu’aux envois postaux de deux kilos et plus. D’autant que les gens envoient de moins en moins de lettres individuelles de nos jours, les échanges passant par SMS, courriels, visioconférences, etc.

Certes, cela pourra porter le coût de l’opération à 2 ou 3 millions d’euros, je n’en disconviens pas. Mais on ne saurait mettre cette affaire de côté. Nous avons d’ailleurs déposé un amendement sur le click and collect, autrement dit « vous cliquez et vous êtes livrés ». L’Europe vient de produire un rapport sur le commerce électronique dont l’harmonisation devra être effective dans un an. Nous avons eu le même débat sur les frais d’itinérance que nous avons supprimés par anticipation. Je demande un rapport précisément pour ne pas oublier les outre-mer, contrairement à la Commission. Avec le click and collect, vous êtes livrés par La Poste ou dans un dépôt commun ; mais avec votre texte, ce n’est pas possible, alors que le commerce électronique se développe vraiment et que même les grandes surfaces s’y mettent. Une fois de plus, nous serons en retard et confrontés à une inégalité, faute d’avoir anticipé.

Pour montrer que je ne suis n’est pas tout à fait dupe et pour être cohérent avec moi-même, à titre personnel, je ne voterai pas pour cet amendement. Cela étant, chers collègues, je vous invite malgré tout à l’adopter. Mais je maintiens qu’il est cosmétique et qu’il ne répond pas à notre demande de continuité postale.

Mme la ministre. J’entends le rapporteur, que je remercie pour sa vigilance, mais je voudrais faire deux remarques.

En 2015, plus de 3 millions de courriers ont été envoyés de la Martinique vers la métropole. Pour avoir des enfants étudiants, je peux témoigner du fait qu’il y a de nécessaires envois de dossiers d’inscription, etc. Je ne peux pas laisser dire que cette mesure serait subsidiaire. Elle est nécessaire ; c’est une question d’égalité et de justice et nous sommes très fiers de la proposer.

Deuxième remarque : nous devons nous montrer vigilants à l’égard du commerce électronique. D’une part, il pose un problème de concurrence au niveau européen, à un moment où nous avons avec l’Europe des discussions extrêmement tendues sur certains sujets comme le règlement général d’exemption par catégorie (RGEC). Nous avons eu une réunion la semaine dernière et nous avons pu constater que l’Europe vérifie tout et garde sur nos territoires un œil extrêmement vigilant. D’autre part, le développement des colis et du commerce électronique peut faire du mal aux petits commerces et aux petites boutiques de nos territoires.

Je maintiens que la mesure que nous proposons représente une réelle avancée.

La Commission adopte l’amendement. L’article 11 A est ainsi rédigé.

Article 11 B (nouveau)
(art. L. 1803-1 et L. 1803-7 du code des transports)

Création d’une aide au voyages pour obsèques et d’une aide au transport de corps

Cet article additionnel, issu d’un amendement du Gouvernement, crée deux nouvelles aides de continuité territoriale : une aide au voyage pour obsèques et une aide au transport de corps outre-mer. Ce dispositif doit permettre aux familles séparées par les distances entre les outre-mer et l’hexagone de se rendre plus facilement sur les lieux d’obsèques et de bénéficier d’une aide pour le transport des corps.

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* *

La Commission en vient à l’amendement CL164 du Gouvernement.

Mme la ministre. Cette mesure s’inscrit dans le cadre de la continuité territoriale et vise à aider les familles lorsque survient un décès. Une aide au voyage pour obsèques finance une partie du déplacement – de l’hexagone vers l’outre-mer – des familles désireuses d’assister aux funérailles d’un parent. Le montant de l’aide est fonction du quotient familial et de la destination. Une autre aide prend la forme d’une participation aux frais de transport du corps d’un résident ultramarin décédé en France métropolitaine, ou, inversement, d’un résident métropolitain décédé outre-mer. Cette aide est allouée d’après les ressources de la personne en charge du rapatriement.

M. Letchimy, rapporteur pour avis. Madame la ministre, vous proposez là de régler un problème extrêmement douloureux pour beaucoup de familles antillaises, réunionnaises, guyanaises ou calédoniennes : la souffrance face à la mort. Vous proposez un accompagnement financier pour rapatrier le corps si l’enterrement a lieu outre-mer, et une aide aux familles désireuses d’assister aux obsèques.

Mais si l’on peut saluer ce requiem pour les morts, je vous aurais invitée à un requiem aussi pour les vivants… Depuis longtemps notre histoire est jalonnée d’allers sans retour, à commencer par l’esclavage, punition inhumaine et barbare. Mais dans les années 1960 aussi, on a assisté à une sorte d’exode transocéanique de gens en quête de travail, des gens qui venaient de Martinique pour travailler dans l’hexagone, à La Poste, à l’hôpital ou ailleurs ; pour près de 75 %, ils ne sont pas revenus. Depuis un moment, je me bats pour que la France fasse ce que l’Espagne fait pour les Canariens : travailler sur un processus de migration-retour. Mettez-le en œuvre. La continuité territoriale ne doit pas être à sens unique. On sait que le globe terrestre est uniforme, qu’il n’y a pas un morne quelque part où l’on monte en France pour descendre aux Antilles…

Je salue donc votre initiative mais, s’il vous plaît, pensez aux vivants, ouvrez la perspective et donnez la possibilité d’une migration-retour, notamment pour les jeunes très diplômés que les départements et les régions financent pour qu’ils obtiennent des formations de niveau bac +4 ou bac +5, qui vont faire le bonheur des Japonais, des Australiens, des Russes, des Européens, et qui ne peuvent pas revenir dans leur territoire. Cela aiderait à créer les conditions d’un nouveau modèle de développement économique pour ne pas les enfermer dans le pré carré de la consommation éternelle et de l’assistanat.

Je vous invite donc à dépasser cette douleur-là pour aller un peu plus loin. On me promet depuis longtemps la création d’un groupe de travail chargé de réfléchir à la migration-retour. Quand nous l’aurons fait, nous aurons réglé un problème de justice.

Mme la ministre. Vous parlez des vivants, et c’est un vrai sujet. Nous avons tous des membres de nos familles qui sont arrivées ici dans les années 1960, qui y ont fait leur vie et ne sont pas rentrées. Leurs enfants ont été en partie déracinés.

Quant à la mobilité-retour, elle a été le combat de nombreux députés dont j’ai fait partie. Les territoires s’assèchent de leurs forces vives. Pour qu’un territoire puisse engranger des perspectives et se construire un avenir, il doit récupérer cette richesse. Le Gouvernement va proposer deux amendements autour de cette idée. Je sais que c’est extrêmement important pour la Martinique, compte tenu du vieillissement de sa population. Au-delà de cela, c’est vital pour les outre- mer. C’est aussi un problème de justice : il faut que nous puissions dire aux jeunes gens qui se forment qu’ils ont le choix, ce qui n’a pas forcément été le cas jusqu’à présent.

Mme Chantal Berthelot. Je voudrais m’assurer que le dispositif prévu par cet amendement fonctionne aussi entre les outre-mer.

M. le rapporteur. J’émets un avis favorable à cet amendement, à cette réserve près, soulevée par notre collègue Chantal Berthelot : si un Guadeloupéen meurt à La Réunion, sa famille ne pourra pas bénéficier des aides prévues. D’ici à la séance, il faudra prévoir un amendement pour améliorer le texte. Pour le reste, c’est une mesure tout à fait bienvenue. Il me semble d’ailleurs qu’un dispositif analogue avait déjà été adopté, mais que les décrets d’application n’étaient pas sortis. C’est un très bon amendement qui arrive à son heure, mais qu’il faudra améliorer.

Mme Chantal Berthelot. Il faut savoir qu’il y a beaucoup d’évacuations sanitaires entre la Guyane, la Martinique et la Guadeloupe. Mais parfois, malheureusement, une évacuation peut devenir un aller simple… D’où ma question.

La Commission adopte l’amendement. L’article 11 B est ainsi rédigé.

Article 11
(art. L. 1803-2-1 [nouveau] et 1803-5 du code des transports)

Soutien à la formation en mobilité à Mayotte

L’article 11 crée un dispositif « cadres avenir » à Mayotte, s’inspirant du dispositif qui a connu un grand succès en Nouvelle-Calédonie depuis 2005 et qui permet à de nombreux étudiants d’accéder à des formations puis à des emplois de haut niveau dans l’administration publique et le secteur privé. Il inclut la mise en place d’un volet spécial au sein du passeport pour la mobilité des études avec, en plus de l’aide au financement du déplacement vers le lieu de formation, certaines aides pour les stagiaires bénéficiaires du passeport pour la mobilité de la formation professionnelle : une allocation d’installation, une aide mensuelle et une aide à l’insertion professionnelle dans le département de Mayotte.

1. L’état du droit

Le Schéma régional de développement de l’économie, de l’emploi et de la formation (SRDE-PRDF) élaboré par le Conseil général de Mayotte relève combien « l’éducation et la formation apparaissent comme l’un des enjeux primordiaux pour le développement de Mayotte et la montée en compétence et en qualification de la population ». Or, la faiblesse de l’offre d’enseignement supérieur sur l’île (53) oblige les jeunes Mahorais à se former hors du territoire.

Créée en 1982 et réformée en 2006 (54), l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (LADOM) est chargée d’accompagner les migrations des résidents des outre-mer cherchant une qualification ou une insertion professionnelle. Sur le fondement de l’article 50 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer et de l’article L. 1803-2 du code des transports, elle propose :

– le « passeport pour la mobilité des études », qui prend en charge 50 % du coût du transport aérien des étudiants (100 % pour les boursiers d’État sur critères sociaux) quand la filière d’études choisie n’est pas disponible dans la collectivité de résidence. Il ne permet pas la prise en charge d’une aide mensuelle ni de frais d’installation. ;

– le « passeport pour la mobilité de la formation professionnelle », qui prend en charge 100 % du coût du transport aérien des personnes en formation en mobilité ou devant passer les épreuves d’admission de certains concours administratifs ou d’entrée dans une grande école.

Depuis 2011, plus de 17 000 Mahorais ont bénéficié de ce dispositif, avec une montée en puissance depuis son déploiement.

2. Les dispositions du projet de loi

L’article 11 insère un nouvel article L. 1803-2-1 dans le code des transports et modifie l’article L. 1803-5 du même code. Il vise à permettre à de jeunes Mahorais de suivre en métropole ou à La Réunion une formation menant à un diplôme de niveau master 2 (bac + 5) en prenant en charge à la fois le transport, une aide à l’installation, une allocation mensuelle pendant une durée de cinq ans et un accompagnement dédié par LADOM. L’aide est octroyée afin de faciliter leur emploi dans des postes d’encadrement dans les entreprises, les collectivités publiques et les établissements publics à Mayotte, c’est-à-dire dans la perspective d’un retour dans le département une fois le cursus de formation achevé (55).

Le conseil départemental de Mayotte et toute personne morale de droit public ou privé peuvent prendre part, par convention, à ce dispositif. Un décret est prévu pour en préciser les modalités, notamment les conditions de ressources auxquelles seront soumis les bénéficiaires.

Le coût de la mesure est estimé par l’étude d’impact à 1,1 million d’euros en année pleine.

3. Le dispositif adopté par la commission des Lois

Votre commission a adopté cet article, réécrit par un amendement rédactionnel du Gouvernement.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL162 du Gouvernement qui fait l’objet des sous-amendements CL305 du rapporteur, CL89 de M. Ibrahim Aboubacar, CL13 et CL14 de M. Jacques Bompard, CL274 de la commission des Affaires économiques.

Mme la ministre. L’amendement CL162 a trait à un problème de codification : la mesure proposée étant spécifique au département de Mayotte, la création d’une section particulière vise à éviter toute confusion avec les mesures portant sur l’ensemble des outre-mer.

Le dispositif tend à remédier au problème que vient de soulever Serge Letchimy : il porte sur la formation et le retour des étudiants mahorais. Nous nous sommes inspirés du programme de Nouvelle-Calédonie intitulé « 400 cadres ».

M. Letchimy, rapporteur pour avis. En cas d’adoption de l’amendement de Mme la ministre, mon amendement CL274 tombera. Je propose donc que mon amendement soit transformé en sous-amendement.

M. le président Dominique Raimbourg. C’est ce que j’ai proposé pour tous les amendements suivants, qui sinon tomberaient puisque l’amendement de Mme la ministre propose une rédaction globale de l’article.

M. le rapporteur. Je suis favorable à l’amendement, sous réserve de l’adoption de mon sous-amendement rédactionnel CL305.

La Commission adopte le sous-amendement CL305.

La Commission examine le sous-amendement CL89.

M. Ibrahim Aboubacar. Mon sous-amendement CL89, aussi symbolique que rédactionnel, propose de remplacer le mot « métropole » par « hexagone ».

M. le rapporteur. Avis favorable.

Mme la ministre. Ce sous-amendement est plus que rédactionnel et, comme son auteur, je suis particulièrement sensible à l’usage de ces mots. Cependant, le terme « métropole » figurant dans la Constitution, il faudrait une réforme constitutionnelle pour le changer. En outre, le choix du mot « hexagone » reviendrait à exclure plusieurs territoires, notamment la Corse et les îles bretonnes. Et comme nous sommes dans la commission des Lois, je m’en tiens à l’avis juridique : le mot « métropole » étant dans la Constitution, l’adoption de ce sous-amendement pourrait entraîner des difficultés d’application de certains textes.

M. Letchimy, rapporteur pour avis. Madame la ministre, je vais retenir ma respiration et m’étouffer moi-même pour ne pas m’énerver… Comment peut-on un instant justifier l’usage du mot « métropole » ? Au motif que cela poserait problème à l’ordre constitutionnel sur le plan sémantique, il faudrait continuer, pour qualifier un lieu, à utiliser un terme qui symbolise l’organisation de la domination coloniale ? Je ne suis pas d’accord. Il faut absolument que l’on fasse l’effort de comprendre que le mot « métropole » s’applique à une notion d’aménagement du territoire, de structuration des villes. C’est la définition qui doit être consacrée. Le terme ne doit plus jamais faire référence au territoire hexagonal, sinon cela signifie automatiquement qu’il y a une colonie. Ne négligez pas cette espèce de psychologie de la domination qui plaît à bon nombre d’entre nous, si l’on en juge par le contexte de la campagne présidentielle : tout peut être lâché dans le rapport à l’autre ; il y a une indifférence et surtout la non-prise en compte de leur propre différence. Ibrahim Aboubacar a parfaitement raison : il faut utiliser le mot « hexagone » et absolument éviter d’employer le terme de métropole. Si quelqu’un veut poser une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) concernant ce mot, pourquoi pas ? Mais notre majorité ne peut pas laisser cette acception du terme « métropole » dans un texte.

M. le rapporteur. J’ai moi-même présenté des amendements de même nature à d’autres articles. En 2003, alors que je venais d’être élu député, j’ai déposé un texte tendant à modifier la Constitution dans ce sens. Il n’a pas abouti. Tout le monde sait que le terme de métropole est connoté de curieuse manière. C’est l’histoire, le colonialisme. J’ai même écrit un livre sur les racines latines du mot. Il est vrai que l’on ne peut plus continuer à l’employer ainsi. Enfin, le mot « hexagone » a déjà été utilisé dans plusieurs lois sans que la Constitution ait été modifiée.

La notion d’hexagone exclut la Corse, souligne la ministre. Dans mon acception du terme, la Corse est comprise, mais j’ai appris ici qu’il fallait dire « l’hexagone et la Corse ». Tout cela va très loin, même dans l’histoire du droit. Une décision du Conseil constitutionnel sur Mayotte, que nous avons fait tomber il n’y a pas si longtemps, faisait référence à deux peuples, l’un des outre-mer et l’autre de métropole. Le Conseil constitutionnel a unifié et harmonisé sa jurisprudence. Il est certain que c’est connoté, même s’il y a ce problème géographique et de frontière. Sans vouloir exclure la Corse et les îles de Bretagne, le mot « hexagone » ne me gêne pas et il figure déjà dans beaucoup de textes. Je voterai ce sous-amendement.

M. Ibrahim Aboubacar. Je fais observer que les Corses disent « le continent » et non pas « la métropole » pour parler de l’hexagone.

M. le président Dominique Raimbourg. C’est la France continentale. Si je puis me permettre une remarque : parler d’hexagone ou de continent revient à exclure l’île d’Oléron, l’île de Noirmoutier, l’île de Sein, etc. Je comprends que le terme de « métropole » soit connoté, mais il va falloir trouver un mot.

M. Daniel Gibbes. « L’hexagone et ses annexes » ?

Mme Maina Sage. Cela procède d’une vision très terrestre de l’hexagone… Si l’on prend l’hexagone dans toute sa dimension terrestre et maritime, cela intègre ces îles. Deuxièmement, j’ai noté dans certains amendements de Mme Bello la notion de France continentale. S’il y a un problème d’insécurité juridique à l’utilisation du terme « hexagone » dans ce texte, il n’en demeure pas moins que nous souhaitons bannir celui de « métropole » à l’avenir car il rappelle une histoire coloniale qui s’est faite au détriment de nos territoires.

Peut-être pouvons-nous rédiger un amendement qui intégrerait dans le droit positif le fait qu’à compter d’aujourd’hui, nous écartons le terme de « métropole » et nous souhaitons le remplacer à chaque fois – et nous y veillerons – dans la légistique, dans la sémantique.

Effectivement, ce n’est pas que du rédactionnel. Il y a une sensibilité particulière. C’est symbolique, mais c’est important. Finalement, les efforts que nous devons faire pour changer le regard sur nos territoires commencent aussi par les mots que nous utilisons. Je conçois qu’il y ait un risque de fragilisation du texte sur le plan juridique. Si c’est vraiment le cas, nous devons le consolider. Nous devons expliquer qu’en utilisant « hexagone » ou « France continentale », nous faisons bien référence à ce qui, dans le passé, était appelé « métropole », terme que nous ne souhaitons plus voir dans nos textes.

M. le président Dominique Raimbourg. Hexagone au sens terrestre et maritime…

La Commission adopte le sous-amendement CL89.

La Commission examine le sous-amendement CL13.

M. Jacques Bompard. Créer une plateforme de soutien à la formation en mobilité pour les résidents de Mayotte nous semble encourager la délocalisation de l’activité d’un département déjà sévèrement touché par le chômage dont le taux atteint 60 %, selon Daniel Zaïdani, président du conseil départemental de Mayotte.

Si ses bénéficiaires sont censés faire usage de cette allocation au service de Mayotte, au retour de leur formation, aucune garantie de cette réversion effective et légitime ne semble véritablement peser sur les allocataires. Il en va du respect de la nature égalitaire du texte de proposer, comme je le fais dans mon sous-amendement CL13, qu’en cas de non-respect du retour à Mayotte après sa formation, le bénéficiaire soit tenu de procéder au remboursement des octrois qui lui ont été attribués. Cette proposition serait en quelque sorte une parallèle avec les prêts contractés pour leurs études par certains étudiants.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette le sous-amendement CL13.

La Commission examine le sous-amendement CL14.

M. Jacques Bompard. Mon sous-amendement CL14 porte sur la proposition de créer un dispositif « cadres avenir » à Mayotte, sous prétexte que la formule aurait été un modèle de réussite en Nouvelle-Calédonie. C’est un peu surprenant : comme le soulignait notre collègue Aboubacar à l’issue de ces auditions, la situation calédonienne n’est en aucune mesure comparable à celle de Mayotte, notamment à l’échelle migratoire.

Encourager des mouvements de populations, fussent-ils initiés par des nécessités professionnelles, engendrerait une délocalisation massive et dommageable au regard du taux de chômage actuel dans le département. De plus, au vu du grand nombre de demandes que risque de susciter cette offre, la nature mensuelle de l’allocation proposée nécessite la délivrance de fonds que le contribuable français peut de moins en moins se voir imputer. C’est la raison pour laquelle je propose la suppression de l’alinéa 5 de cet article.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

Mme la ministre. Même avis.

M. Ibrahim Aboubacar. Ce dispositif de formation de cadres est absolument indispensable. À ce moment de la construction de la départementalisation, le renforcement des capacités du secteur public – comme de celles des structures économiques du secteur privé – nécessite une telle mesure, déjà prévue dans l’accord signé en l’an 2000 sur l’avenir de Mayotte : le dispositif faisait l’objet de l’un des articles de la loi de 2001 qui a été insuffisamment exécutée. Tous les rapports dont nous disposons, qu’ils émanent de l’Union européenne, de la Cour des comptes ou autres, soulignent l’urgente nécessité d’un dispositif de renforcement des capacités.

La Commission rejette le sous-amendement CL14.

La Commission examine le sous-amendement CL274 de la commission des Affaires économiques.

M. Letchimy, rapporteur pour avis. Le sous-amendement CL274 propose un dispositif inspiré du modèle de Mayotte mais avec une procédure différente. Dans le cadre de la loi de 1984 sur le statut de la fonction publique, nous proposons de créer un dispositif particulier pour permettre aux collectivités locales de recevoir des jeunes très formés, suivant l’idée de la migration retour. Les collectivités pourraient recruter par des contrats pouvant aller jusqu’à trois ans, dans le cadre des dérogations autorisées par la loi de janvier 1984.

M. le rapporteur. Ce sous-amendement me pose quelques problèmes. Il propose de donner à un exécutif la possibilité d’engager des talents sans respecter le principe du recrutement par concours, pour une durée limitée. En fait, cette possibilité existe déjà – d’autant que le contrôle de légalité s’exerce de manière très bienveillante de nos jours – sauf si le poste en question peut être pourvu par un fonctionnaire. On peut recruter des contractuels, ce qui n’est pas sans poser problème car l’indice de rémunération peut être beaucoup plus élevé que celui de la fonction publique. C’est quand même une rupture d’égalité au sein de la fonction publique. Un exécutif serait libre de recruter qui il veut, sans concours, pour une durée de trois ans. Le contrôle de légalité ne pourrait plus s’exercer tout à fait, sachant qu’il a déjà tendance à tout laisser passer. J’émets un avis défavorable.

Mme la ministre. Même avis.

M. Letchimy, rapporteur pour avis. Je rappelle qu’il s’agit de postes correspondant à des emplois non permanents d’une durée de deux ans. Ce processus pourrait permettre aux départements et régions d’outre-mer de renforcer leur encadrement, tout en encourageant le retour de jeunes cadres antillais ou réunionnais, très bien formés, dans leur région. Nous avons là une occasion d’assouplir la loi de janvier 1984 qui, dans certaines conditions, permet des recrutements. Vous dites que les préfets laissent tout passer et qu’il est très facile de recruter des chargés de mission. En fait, il y a encore des règles très spécifiques et les chargés de mission correspondent à la catégorie A.

C’est l’occasion ou jamais de permettre à la Martinique et à la Guadeloupe, ciblées plus particulièrement, de voir revenir leurs diplômés et rajeunir leur population. Ces deux territoires en sont au stade du non-renouvellement de la population et vivent la descente aux enfers d’un dépeuplement accéléré. Sans ce phénomène de retour, il faudra encourager l’immigration en provenance des pays voisins pour rebondir sur le plan démographique. Notre taux de fécondité est en train de chuter. En Guadeloupe et en Martinique, la part des personnes de plus de soixante ans va bientôt représenter respectivement 40 % et 45 % de la population, et ces territoires auront l’excellent privilège d’être devenus les deux départements les plus vieux de France. C’est avec le genre de petites choses préconisées dans mon sous-amendement que nous pouvons régler ce problème, au-delà de la réglementation juridique et administrative que le préfet contrôle ou ne contrôle pas.

M. le rapporteur. Votre sous-amendement indique bien qu’il s’agit d’emplois permanents. Depuis que les textes de 1946 ont été remplacés par ceux de 1983, 1984 et 1986, le principe fondamental est que les emplois permanents sont pourvus par des fonctionnaires. Cependant, lorsque vous faites un appel à candidature et que vous ne trouvez pas la personne que vous cherchez dans la fonction publique ou sur les listes d’aptitude, vous pouvez recruter des contractuels sur un emploi permanent. Sur ce point, votre sous-amendement est satisfait.

À partir du moment où il apporte la preuve des recherches infructueuses, un exécutif peut faire venir des contractuels, de jeunes talents, titulaires de diplômes de niveau bac +5 ou bac +7. Je l’ai fait moi-même. Il est même possible de prendre quelques libertés et les titulariser ensuite, quand ils passent le concours, à leur indice de contractuel, même si celui-ci est supérieur à la grille de la fonction publique. Le problème est que l’on en arrive à une fonction publique à deux vitesses : de jeunes recrues peuvent avoir un indice beaucoup plus élevé que leurs collègues plus anciens qui ont suivi un déroulé de carrière normal. Pour ma part, j’ai dû régler ce problème avec les syndicats. Nous avons finalement décidé que tout le monde passerait le concours et que les contractuels seraient recrutés au tarif correspondant dans la grille de la fonction publique.

Il est donc possible de recruter des contractuels sur des emplois non permanents ou permanents, pour peu que l’on respecte un minimum de règles – d’autant que les préfets laissent passer un certain nombre de choses en contrôle de légalité.

La Commission rejette le sous-amendement CL274.

Elle adopte l’amendement 162 sous-amendé.

L’article 11 est ainsi rédigé.

Article 12
(art. L. 1803-2 et L. 1803-5-1 [nouveau] du code des transports)

Soutien à la formation professionnelle en mobilité des ultramarins

L’article 12 définit un nouveau dispositif de continuité territoriale financé par le fonds de continuité territoriale géré par l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (LADOM) : une aide nouvelle pour accompagner les élèves et les étudiants qui se trouvent dans l’obligation d’effectuer un stage à l’extérieur de la collectivité de leur établissement d’enseignement.

1. L’état du droit

L’article L. 1803-1 du code des transports prévoit : « Dans les conditions déterminées par les lois et règlements, les pouvoirs publics mettent en œuvre outre-mer, au profit de l’ensemble des personnes qui y sont régulièrement établies, une politique nationale de continuité territoriale. Cette politique repose sur les principes d’égalité des droits, de solidarité nationale et d’unité de la République. Elle tend à rapprocher les conditions d’accès de la population aux services publics de transport, de formation, de santé et de communication de celles de la métropole, en tenant compte de la situation géographique, économique et sociale particulière de chaque collectivité territoriale d’outre-mer. »

En faisant directement application, le fonds de continuité territoriale prévu à l’article L. 1803-2 du même code dispense notamment des aides destinées aux étudiants de l’enseignement supérieur et aux élèves de l’enseignement secondaire ainsi qu’un soutien aux déplacements justifiés par la formation professionnelle en mobilité. L’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (LADOM) est l’opérateur de cette politique publique (56).

Or, les élèves en terminale professionnelle ou technologique ainsi que les étudiants en section professionnelle amenés à faire un stage pratique parfois difficile à trouver au sein de l’académie ne bénéficient actuellement pas de ces dispositifs.

2. Les dispositions du projet de loi

L’article 12 vise à rendre éligible au financement par le fonds de continuité territoriale la prise en charge, sous conditions de ressources, d’une partie des frais de transport liés à la réalisation des stages professionnels lorsque ces stages doivent être réalisés hors de l’académie ultramarine où se déroule la formation. Il crée, à cette fin, un nouvel article L. 1803-5-1 au sein du code des transports.

L’aide destinée aux élèves et étudiants des outre-mer en stage professionnel est dénommée « passeport pour la mobilité en stages professionnels ». Elle porte sur le financement des titres de transport nécessités par le stage lorsque sa réalisation suppose de quitter le territoire de la collectivité ultramarine d’origine (57), mais n’est cependant pas cumulable avec les deux autres dispositifs déjà proposés par LADOM – passeport pour la mobilité des études et passeport pour la mobilité de la formation professionnelle.

Le dispositif sera ultérieurement précisé par voie réglementaire.

La Commission a adopté cet article modifié par cinq amendements rédactionnels de votre rapporteur.

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La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL217, CL218, CL252, CL219 et CL220 du rapporteur.

Elle adopte l’article 12 modifié.

Après l’article 12

La Commission est saisie de l’amendement CL41 de M. Philippe Gomes.

M. Daniel Gibbes. Cet amendement propose de compléter le code des transports afin d’obliger à modifier les arrêtés d’application avant le 1er janvier 2017 de sorte qu’ils tiennent désormais compte du coût moyen du billet d’avion constaté pour les trajets entre la collectivité de résidence et l’hexagone, et l’impact de ce coût, malgré l’aide, sur les revenus des bénéficiaires.

M. le rapporteur. Avis défavorable. D’autres amendements, notamment celui déposé par Maïna Sage, me semblent mieux répondre à cette problématique, particulièrement prégnante dans le Pacifique. S’il fallait financer le reste à charge, le montant de l’enveloppe dédiée à la continuité territoriale n’y suffirait pas.

Mme la ministre. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Article 12 bis (nouveau)
(art. L. 1803-15 du code des transports)

Continuité territoriale de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité

Cet article additionnel, issu d’un amendement du Gouvernement, fait du représentant de l’État dans les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie le représentant de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, afin d’assurer la continuité de service de cette dernière dans les territoires où elle ne possède pas d’implantation.

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La Commission examine l’amendement CL163 du Gouvernement.

Mme la ministre. Les programmes de formation ou d’insertion professionnelle en mobilité élaborés par les collectivités de l’article 74 et la Nouvelle-Calédonie peuvent donner lieu à l’intervention de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (LADOM). Celle-ci doit être pleinement articulée avec le représentant de l’État. L’amendement CL163 vient donc étendre à ces collectivités, où LADOM n’a pas de délégation territoriale, la règle selon laquelle le préfet est le délégué de l’agence, à l’instar de ce qui est déjà mis en œuvre dans les collectivités dans lesquelles l’agence possède des délégations.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement. L’article 12 bis est ainsi rédigé.

Après l’article 12 bis

La Commission est saisie de l’amendement CL102 de Mme Huguette Bello.

Mme Huguette Bello. Désormais, l’égalité entre les citoyens et les territoires passe aussi par le numérique. Dans les outre-mer, les retards, le niveau inférieur des prestations, leurs tarifs plus élevés sont autant d’obstacles qui doivent être rapidement surmontés si l’on veut éviter que la fracture numérique ne devienne un handicap structurel.

Mieux : il s’agit d’aller plus loin et d’investir massivement dans la fibre et le très haut débit de sorte qu’Internet et les technologies liées au numérique deviennent dans les outre-mer un facteur de compétitivité décisif.

M. le rapporteur. Je comprends vos préoccupations, ma chère collègue, mais votre amendement est déjà satisfait. Il existe un plan France Très Haut Débit qui va jusqu’en 2022 : chaque territoire a la possibilité d’élaborer un dossier après avoir établi un schéma directeur d’aménagement numérique et de bénéficier des subventions du programme d’investissements d’avenir (PIA). Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.

Mme la ministre. Même avis : nous nous mobilisons autour du plan France Très Haut Débit à travers le PIA et des cofinancements de l’État, qui couvrent des actions qui entrent parfaitement dans le cadre du grand chantier que vous venez d’évoquer.

La Commission rejette l’amendement.

Article 12 ter (nouveau)
Rapport sur la création de mécanismes d’interconnexion dans la Caraïbe et l’océan Indien

Issu d’un amendement de votre rapporteur, cet article additionnel prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement, au plus tard neuf mois après la promulgation de la loi, sur la mise en œuvre d’un mécanisme pour l’interconnexion dans la Caraïbe (MIC) et d’un mécanisme pour l’interconnexion dans l’océan Indien (MIOI), sur le modèle du mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE).

Ces mécanismes auront notamment pour mission de favoriser l’investissement outre-mer dans des projets de réseau et d’infrastructure transnationaux portant sur les secteurs de l’énergie, des télécommunications, des transports aériens et maritimes ou de l’audiovisuel.

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La Commission est saisie de l’amendement CL207 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement, inspiré d’une recommandation de Serge Letchimy, invite le Gouvernement à engager des démarches auprès des institutions européennes pour créer un mécanisme pour l’interconnexion dans la Caraïbe, d’une part, et dans l’océan Indien, d’autre part.

Mme la ministre. Je suis très favorable à cette initiative qui donnera de l’ampleur à la stratégie de connectivité.

La Commission adopte l’amendement. L’article 12 ter est ainsi rédigé.

Article 12 quater (nouveau)
Rapport sur l’accès des consommateurs ultramarins au commerce électronique

Issu d’un amendement de votre rapporteur, cet article additionnel prévoit la remise par le Gouvernement, au plus tard neuf mois après la promulgation de la loi, d’un rapport au Parlement destiné à proposer des mesures en vue de faciliter l’accès des consommateurs ultramarins au commerce électronique, en pleine expansion.

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La Commission en vient à l’amendement CL239 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à faciliter l’accès des consommateurs ultramarins au commerce électronique, notamment en encourageant les dispositifs de retrait à un dépôt commun, sur le mode click and collect. C’est une manière de dire à la Commission européenne et au Gouvernement de ne pas nous oublier.

Mme la ministre. Favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 12 quater est ainsi rédigé.

Après l’article 12 quater

La Commission examine l’amendement CL136 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. Certains acheteurs de livres numériques domiciliés dans les outre-mer rencontrent des difficultés à récupérer les fichiers électroniques dont ils ont fait l’acquisition sur les sites de ventes en ligne. Ce problème est lié au fait que l’adresse IP des abonnés ultramarins peut être attribuée par des registres internet locaux et non par l’organisme régional chargé d’attribuer les adresses IP en Europe, comme c’est le cas pour la France métropolitaine.

Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre avant le 31 mars 2017 un rapport sur les problèmes liés aux conditions d’accès aux livres numériques et aux applications du « Play Store » de Google dans les collectivités d’outre-mer. Il s’agit d’aller vers une simultanéité d’accès au livre numérique dans l’hexagone et dans les outre-mer.

M. le rapporteur. Votre amendement, monsieur Naillet, est satisfait par celui que nous venons d’adopter. Il visait, je vous le rappelle, à demander un rapport au Gouvernement sur les mesures permettant de lever tous les obstacles au commerce électronique en outre-mer dans le cadre de la consultation lancée par la Commission européenne pour réviser la directive la directive « Satellite et câble », dite « Geoblocking », qui date de 1993. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.

M. Philippe Naillet. J’accepte de le retirer.

L’amendement CL136 est retiré.

La Commission est saisie de deux amendements de la commission des Affaires sociales, CL263 et CL264, pouvant faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. J’indique d’ores et déjà que je vais retirer ces deux amendements : les sujets en jeu méritent autre chose que des rapports. Je souhaiterais que Mme la ministre formule des engagements sur la prise en charge par la sécurité sociale, d’une part, des frais d’accompagnement d’un enfant par l’un de ses parents lors d’une évacuation sanitaire et, d’autre part, des frais de rapatriement de patients des outre-mer décédés en métropole lors d’une évacuation sanitaire.

Mme la ministre. Je pense que votre amendement CL264 est satisfait par l’amendement CL164 que la Commission a adopté.

L’accompagnement d’un enfant en cas d’évacuation sanitaire est un vrai problème : si un parent part, l’autre reste, et si un professionnel de santé fait le voyage, aucun des deux parents n’est présent. Généralement, les collectivités locales interviennent pour octroyer une aide sociale.

Je m’engage à travailler avec vous pour faire avancer au maximum ces dossiers.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. L’amendement CL164 ne répond pas entièrement à ma demande : il prévoit que seule une partie des frais de rapatriement sera prise en charge au titre de la continuité territoriale, alors que je demande leur prise en charge totale.

Les amendements CL263 et CL264 sont retirés.

Article 12 quinquies (nouveau)
Rapport sur le processus de formation des prix des billets d’avion entre les outre-mer et l’hexagone

Issu d’un amendement de Mme Huguette Bello, cet article additionnel prévoit la remise par le Gouvernement, dans un délai d’un mois à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport au Parlement sur le processus de formation des prix des billets d’avion entre les outre-mer et l’Hexagone.

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La Commission en vient à l’amendement CL104 de Mme Hugette Bello.

Mme Huguette Bello. En février dernier, le ministre de l’économie et des finances avait annoncé que des investigations seraient menées par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) auprès des compagnies aériennes desservant les outre-mer afin de clarifier leurs pratiques tarifaires.

Mon amendement vise à porter à la connaissance du Parlement le résultat de ces investigations à travers un rapport.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Des nombreux rapports ont déjà été publiés et rien n’a vraiment changé. Il faut favoriser la transparence des prix et la concurrence entre compagnies aériennes afin de faire baisser durablement les prix.

Mme la ministre. Pour ma part, je suis favorable à cet amendement. Les investigations de la DGCCRF ont déjà bien avancé et leurs résultats pourraient faire l’objet d’un rapport.

J’ai pris l’initiative d’organiser une rencontre avec les compagnies aériennes. Dans le cadre de notre stratégie de connectivité et d’ouverture sur la zone, il nous faut avancer sur la transparence. Les usagers ont besoin d’en savoir plus sur la composition du prix des billets. Il faut réfléchir à d’autres solutions que les dispositifs locaux d’aide à la mobilité – expérimentés entre autres à La Réunion – car ils ont un effet inflationniste sur le prix des billets.

M. Ibrahim Aboubacar. Je veux bien que nous travaillions en ce sens. Rappelons toutefois que le projet de loi contre la vie chère en outre-mer comportait déjà de semblables mesures et que le Gouvernement a remis un rapport au Parlement sur ce sujet, s’appuyant sur la Direction générale de l’avion civile (DGAC). La Commission nationale d’évaluation des politiques publiques de l’État outre-mer (CNÉPÉDOM) a organisé des tables rondes avec toutes les compagnies aériennes sur la base du rapport de la DGAC, dont nous avions tous trouvé le contenu surprenant. Si le travail de la DGCCRF s’avère plus neutre que celui de la DGAC, pourquoi pas ?

M. le rapporteur. J’aimerais appeler votre attention, chers collègues, sur le fait que Mme Bello demande que le rapport soit remis un mois après la promulgation de la loi.

Je souscris aux propos de mon collègue Ibrahim Aboubacar. La DGAC a publié plusieurs rapports dans lesquels le secret commercial nous a toujours été opposé : circulez, il n’y a rien à voir ! En revanche, la DGCCRF avait remis un rapport qui concluait à l’abus de position dominante. M. de Robien, alors ministre des transports, avait refusé de saisir les tribunaux. Il avait été répondu au député martiniquais Philippe Edmond-Mariette, fin connaisseur du sujet, et à moi-même qu’il n’y avait rien à savoir de plus.

Si c’est l’Autorité de la concurrence qui est chargée de faire un rapport, peut-être pouvons-nous espérer quelque indépendance. Force est de constater que, de la part des grands services de l’État, nous avons parfois du mal à trouver toute la transparence et toute l’objectivité que l’on serait en droit d’attendre.

Cela fait quinze ans que je cherche à recueillir de plus amples informations : je n’obtiens rien. Nous avons, par exemple, voulu avoir des précisions sur le yield management, technique mise au point par un Indien pour Air France : pourquoi sur une même rangée de sièges, pour la même catégorie, un billet peut être vendu 1 200 euros et un autre 300 euros ? On nous oppose le secret commercial : impossible de connaître les mécanismes de fixation des prix.

Il faudrait saisir l’Autorité de la concurrence – ou bien créer une commission d’enquête.

Mme la ministre. Les rapports sont nécessaires, ils éclairent. Reste qu’ils ne règlent pas le problème : ils n’ont permis aucune avancée concrète en matière de transparence.

J’ai l’ambition d’avancer très rapidement, d’abord avec les compagnies, ensuite en prenant appui sur le dispositif de transparence porté par loi relative à la régulation économique outre-mer.

Quant à l’Autorité de la concurrence, il me semblerait bon de faciliter sa saisine afin que, sur de tels sujets, nous puissions plus aisément trouver des solutions.

La Commission adopte l’amendement. L’article 12 quinquies est ainsi rédigé.

TITRE V (nouveau)
DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉCOLE ET À LA FORMATION

Le présent titre, issu d’un amendement de votre rapporteur, est consacré aux dispositions relatives à l’école et à la formation. Il comprend dix articles, dont neuf additionnels.

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La Commission est saisie de l’amendement CL302 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à insérer un titre V ainsi rédigé : « Dispositions relatives à l’école et à la formation ».

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement. Le titre V est inséré.

Avant l’article 13 A

La Commission examine l’amendement CL272 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Je propose de créer un chapitre spécifiquement consacré à la lutte contre l’illettrisme en outre-mer, enjeu social crucial.

M. le rapporteur. Défavorable : nous répondons déjà à cette demande. Dès l’article 1er, ce problème est pris en compte. Les plans de convergence comprendront aussi des actions spécifiques. Par ailleurs, la lutte contre l’illettrisme est couverte par le titre V que nous venons d’insérer.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Je vais retirer l’amendement, mais je le redéposerai en séance sous forme d’un article additionnel. Il ne faut pas avoir honte des problèmes que nous rencontrons dans nos territoires. L’illettrisme doit apparaître dans ce projet de loi.

L’amendement CL272 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL271 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Il s’agit d’ouvrir aux personnes qui le souhaitent la possibilité de suivre des cours d’alphabétisation dans le cadre du compte personnel de formation.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Le compte personnel de formation offre déjà cette possibilité.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Le cabinet de Mme la ministre m’a indiqué que ce n’était pas le cas.

M. le rapporteur. Si nous commençons à dresser la liste de tous les contenus de formation relevant du compte personnel de formation, nous n’en sortirons jamais… Je le répète, il est d’ores et déjà possible de prendre des cours de français dans ce cadre.

Mme la ministre. Je pense que cet amendement est satisfait. Le projet de loi « Égalité et citoyenneté » comprend un volet dédié à la maîtrise de la langue française s’appuyant sur l’idée de parcours de formation. Certains articles du code du travail ont été modifiés en conséquence. Les organismes paritaires sont mobilisés. La construction d’un socle de compétences, y compris linguistiques, est incluse dans les plans de formation. Par ailleurs, n’oublions pas qu’une Agence nationale de la langue française sera créée bientôt.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Je retire mon amendement, mais je le redéposerai si, vérifications faites, il n’est pas satisfait.

L’amendement CL271 est retiré.

La Commission examine l’amendement CL139 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. Cet amendement a vocation à aider au développement des start-up ultramarines en demandant une dérogation sur deux ans du nombre maximum de stagiaires pouvant être accueillis dans les entreprises reconnues. Il s’agirait de porter leur proportion à 30 % de l’effectif. Cela correspond à une demande des jeunes, qui désirent se former aux nouvelles technologies et à l’innovation.

M. le rapporteur. Cette disposition semble séduisante, mais que signifie-t-elle en réalité, sinon la construction d’entreprises par l’emploi massif de stagiaires non rémunérés, ou très peu, sans création d’emplois et avec une captation de la richesse ou de la valeur produite par le seul entrepreneur ?

Les start-up ne sont pas différentes des autres entreprises : elles cherchent à minimiser leurs coûts, et les salaires sont des coûts comme les autres. Si nous ne défendons pas les jeunes diplômés qui cherchent un emploi dans les outre-mer, si nous les cantonnons à des stages pour plusieurs années, comment vont-ils vivre ? Et pourquoi resteraient-ils ? Avis défavorable.

Mme la ministre. J’émettrai moi aussi un avis défavorable. Cette mesure risque d’engendrer des abus : les stages remplaceraient les emplois, ce qui n’est pas souhaitable pour ces jeunes. Nous avons déjà plafonné le nombre des stagiaires dans les entreprises.

Mme Maina Sage. Accorder un avantage supplémentaire aux start-up en leur permettant de recruter plus largement des stagiaires n’est peut-être pas une solution. Reste qu’un projet de loi tel que celui qui nous occupe devrait inclure des mesures visant à promouvoir l’innovation, notamment dans le domaine numérique qui fait partie des grands enjeux de demain. Il faut soutenir massivement les initiatives allant en ce sens. Cela donnerait une autre envergure au volet économique de ce projet de loi, qui souffre d’une certaine faiblesse sur ce point.

L’amendement CL139 ouvre une piste et je le soutiendrai. Je pense que nous pouvons aller beaucoup plus loin en encourageant la dématérialisation et en développant des aides aux entreprises pour leur faciliter l’accès à internet, afin qu’elles puissent mieux vendre leurs produits et capter de nouveaux marchés. Il faut soutenir l’innovation dans nos territoires, en particulier le numérique : elle est source de création d’emplois, elle est attractive pour notre jeunesse.

M. Philippe Naillet. L’avis du rapporteur et celui de la ministre étant défavorables, je retire mon amendement que je retravaillerai afin de mieux border le dispositif. Je soulignerai ici qu’il est né des échanges que j’ai eus avec des entrepreneurs de la technopole de La Réunion et des jeunes qui souhaitent améliorer leurs compétences en étant insérés dans la réalité pratique de l’entreprise.

Mme la ministre. Je comprends la volonté exprimée par M. Naillet et par Mme Sage. Nous voulons encourager la créativité et pour cela, nous essayons de rédiger autrement les textes qui nous concernent, lesquels restent trop souvent enfermés dans une même vision. Philippe Naillet appelle à une autre représentation du travail, de l’emploi, de l’intervention de l’État dans des domaines innovants. Je le comprends. Il est important d’insuffler l’esprit d’innovation à nos jeunes.

Toutefois, il ne faut pas s’exposer à des abus ; nous devons veiller à ce que ces start-up n’aient pas recours trop facilement aux stages, ce qui serait contre-productif : cela contribuerait à l’instabilité de l’emploi et conduirait les jeunes à chercher ailleurs d’autres solutions.

L’amendement CL139 est retiré.

Article 13 A (nouveau)
(art. L. 3232-7-1 [nouveau] du code de la santé publique)

Organisation d’une sensibilisation sur les questions nutritionnelles à l’intention des élèves du primaire

Issu d’un amendement adopté par la commission des Affaires sociales à l’initiative de sa rapporteure pour avis, Mme Monique Orphée, cet article additionnel a pour objet de faire organiser par les établissements scolaires une sensibilisation sur les questions nutritionnelles à l’intention des élèves des classes de l’enseignement primaire.

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La Commission en vient à l’examen CL254 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à mettre en place une sensibilisation sur les questions nutritionnelles en direction des élèves de l’école primaire, de la maternelle au cours élémentaire. À cet égard, je vous demande de bien vouloir accepter une rectification qui consisterait à remplacer les termes « des classes de cours élémentaires » par « de l’école primaire ».

M. le rapporteur. Avis favorable.

Mme la ministre. Votre amendement me semble satisfait par les dispositifs mis en place dans le cadre du programme national pour l’alimentation et divers autres plans, notamment européens.

La Commission adopte l’amendement rectifié. L’article 13 A est ainsi rédigé.

Article 13 B (nouveau)
(art. L. 3323-2 et L. 3335-2 du code de la santé publique)

Interdiction de tout affichage publicitaire concernant les boissons alcooliques à proximité d’un établissement scolaire

Issu de deux amendements identiques de Mme Monique Orphée et M. Ibrahim Aboubacar, le présent article additionnel vise à interdire, dans les outre-mer, tout affichage publicitaire concernant les boissons alcooliques à proximité d’un établissement scolaire.

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La Commission est saisie de deux amendements identiques, CL255 de la commission des Affaires sociales et CL58 de M. Ibrahim Aboubacar.

Mme Monique Orphé, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à interdire dans les outre-mer tout affichage publicitaire concernant les boissons alcooliques à proximité d’un établissement scolaire.

M. Ibrahim Aboubacar. Il est nécessaire d’empêcher les abus. Aujourd’hui, il y a trop de ventes d’alcool à proximité des établissements scolaires. Je soutiens résolument cette disposition.

M. le rapporteur. Avis favorable.

Mme la ministre. Très favorable.

La Commission adopte les amendements. L’article 13 B est ainsi rédigé.

Article 13 C (nouveau)
(art. 40 de la loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer des communications électroniques)

Financement d’échanges scolaires avec des pays de l’environnement régional des territoires ultramarins

Issu d’un amendement du Gouvernement, cet article vise à financer via le fonds d’échange à but éducatif, culturel et sportif (FEBECS) des échanges scolaires réalisés dans le cadre d’un appariement ou d’une convention avec un établissement situé dans l’environnement régional des territoires ultramarins.

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La Commission en vient à l’amendement CL166 du Gouvernement.

Mme la ministre. Les dispositifs actuels de mobilité encouragent surtout des flux vers l’hexagone. Nous souhaitons mettre l’accent sur la mobilité régionale en encourageant les échanges scolaires avec les pays de la zone – vers l’Inde, la Chine, l’Amérique du Sud.

M. le rapporteur. Avis très favorable : cela fait des années que nous attendons ce type de mesure. J’espère que ce dispositif s’appliquera aussi au Pacifique.

La Commission adopte l’amendement. L’article 13 C est ainsi rédigé.

Article 13 D (nouveau)
Rapport sur l’aide à la mobilité des étudiants ultramarins

Issu d’un amendement de Mme Maina Sage, cet article additionnel prévoit la remise par le Gouvernement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport au Parlement visant à proposer aux étudiants des collectivités ultramarines des aides à la continuité territoriale pour les besoins de leur formation.

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La Commission est saisie de l’amendement CL76 de Mme Maïna Sage, et du sous-amendement CL309 du rapporteur.

Mme Maina Sage. Comme un premier amendement portant sur le sujet de la mobilité intérieure a été refusé au titre de l’article 40, j’ai déposé cet amendement de repli qui demande un rapport.

Le dispositif de continuité territoriale englobe la continuité territoriale intérieure, mais les dispositifs s’y rapportant restent optionnels et sont conditionnés à la volonté de l’État et des territoires de la mettre en œuvre, exception faite de la Guyane.

Nous recevons des aides à la continuité territoriale, des aides pour la mobilité des étudiants, pour la formation, bientôt pour les stages. Je profite d’ailleurs de l’occasion qui m’est donnée pour me féliciter de l’adoption des amendements visant à couvrir les frais de rapatriement et d’accompagnement des ultramarins décédés dans l’hexagone et à encourager les échanges scolaires à l’échelon régional – même si la question de son application aux collectivités d’outre-mer ne manquera pas de se poser.

Le dispositif de continuité territoriale a été mis en place par l’État, au nom de la solidarité territoriale, pour faciliter la circulation de tous les Français.

Le projet de loi essaie de remédier aux inégalités d’accès au service public et à l’inégalité des chances entre citoyens français. Je voudrais vous faire comprendre à quel point il est fondamental, dans cette perspective, de prendre en compte la continuité territoriale intérieure.

La continuité territoriale « extérieure », autrement dit entre les collectivités ultramarines et l’hexagone, présuppose l’existence de la continuité territoriale intérieure. Quand l’État accorde la continuité territoriale à un territoire pour faciliter la circulation vers l’hexagone, il faut que celle-ci puisse être effective dès la commune de résidence. Cela peut paraître évident mais, dans certains territoires, les habitants doivent parcourir des kilomètres et des kilomètres avant d’atteindre l’aéroport international. Je citerai le cas de la Polynésie française, dont la surface maritime est grande comme l’Europe : il me faut quatre heures d’avion pour effectuer le tour de ma circonscription ! Il me paraît inconcevable qu’on offre la possibilité aux jeunes des Marquises d’aller étudier dans l’hexagone sans prendre en compte les difficultés de circulation qu’ils rencontrent à l’intérieur du territoire polynésien. On me répondra que des dispositifs sont prévus à cet effet. Je peux vous montrer, documents du Haut-Commissariat de la République en Polynésie française à l’appui, que la couverture des frais n’intervient que de manière partielle, et qui plus est a posteriori, sous forme de remboursement, et ne concerne que la mobilité des étudiants. Rien n’est prévu pour la formation ou l’aide publique classique. Et rien ne sera prévu non plus pour les stages si nous ne faisons rien.

Autre aspect de la continuité intérieure, la continuité intérieure propre qui renvoie au désenclavement des territoires à l’échelon local. Vous avez voulu que le titre IV s’intitule désormais « Dispositions en faveur du désenclavement aérien, numérique et maritime des outre-mer », mais le désenclavement doit commencer à l’intérieur même de nos territoires. Si la Guyane a mis en place une continuité intérieure, ce n’est pas pour rien : c’est une nécessité, une nécessité pour les évacuations sanitaires, une nécessité pour l’accès de nos enfants à l’école. Aux Marquises, des gamins de dix ans quittent leurs parents pour être scolarisés et ne revoient qu’une ou deux fois par an. C’est aussi cela, la réalité de nos territoires. Je ne pense pas que le fait que nous soyons autonomes justifie que l’État se désengage de ce qui est pour nous du ressort de la solidarité nationale. La Polynésie française, avec moins de 300 000 habitants, ne pourra assumer les charges liées à un territoire dont la surface maritime est grande comme l’Europe : c’est impossible. C’est à ce titre que l’État intervient dans plusieurs domaines tout comme nous intervenons dans des domaines de l’État.

Je prends mon temps car je voudrais vraiment vous sensibiliser à ce problème, sur lequel je reviens dans plusieurs amendements. J’ai déjà évoqué lors de votre audition, madame la ministre, la nécessité d’intégrer dans ce texte la question de l’isolement, de la fragmentation, de la taille de nos territoires et de leur éloignement par rapport à la France hexagonale. C’est là que réside le premier de nos handicaps, un handicap structurel qui ne pourra jamais être rattrapé et qui justifie la solidarité nationale. Ces particularités, ce sont celles de la Polynésie française, mais aussi de la Guyane, de Wallis-et-Futuna ou de Saint-Pierre-et-Miquelon, autant de territoires particulièrement enclavés et qui souffrent de problèmes de desserte maritime et aérienne. Quel que soit leur statut, ils appellent un regard particulier de l’État.

Pour que l’aide à la continuité territoriale soit effective en leur sein, il faut insister pour que la continuité territoriale intérieure soit prise en compte. L’amendement de Philippe Gomes n’est pas tout à fait le même que le nôtre : il demande que l’on révise les arrêtés qui fixent les seuils. Car si l’on ouvre des droits par la loi, mais en fixant des seuils qui empêchent les citoyens de bénéficier des dispositifs d’aide, on est dans la parfaite malhonnêteté intellectuelle ! De ce point de vue, l’amendement de M. Gomez met le doigt sur un problème réel pour les collectivités d’outre-mer du Pacifique.

J’ai voulu attirer l’attention sur cet enjeu par cet amendement d’appel, même si je ne tiens pas spécialement à ce qu’il soit adopté car je n’ai pas envie que ce problème soit traité à travers un énième rapport. J’aimerais que nous nous mettions d’accord d’ici à la séance sur la possibilité de mettre en œuvre la continuité intérieure.

M. le président Dominique Raimbourg. Si j’ai bien compris, madame Sage, vous acceptez de retirer cet amendement d’appel, étant précisé que Mme la ministre a bien entendu ce plaidoyer vibrant en faveur d’une prise en compte des difficultés particulières de certains territoires, compte tenu de leur taille.

Mme Maina Sage. J’aimerais connaître la position du rapporteur et de la ministre.

M. le rapporteur. La Polynésie, avec plus de 5,5 millions de kilomètres carrés d’espace maritime et 118 îles, dont 76 habitées, est plus vaste que l’Europe. Pour se rendre des Australes ou des Marquises à Papeete, cela coûte au moins 500 euros. Je comprends donc la demande et j’y donne, si elle est maintenue, un avis favorable, en présentant un sous-amendement CL109 qui supprime le paragraphe précisant que les délégations aux outre-mer sont obligatoirement soumises pour avis, car on ne saurait donner d’ordres aux instances parlementaires. Cependant, le Gouvernement m’a assuré que la continuité incluait déjà cet aspect. Je souhaite donc que la ministre nous explique de quelle manière. Si c’est bien le cas, cela vaudra aussi pour l’hinterland guyanais, et je demanderai à Mme Sage de retirer son amendement.

Mme la ministre. Il y a deux sujets : la continuité territoriale intérieure propre et la continuité territoriale de l’intérieur vers l’extérieur. Sur le premier sujet, vous proposez un rapport ; je peux y être favorable. Mais en ce qui concerne le second sujet, je maintiens que le transport avant d’arriver à l’aéroport de Papeete est compris dans la mobilité, pour les étudiants et la formation professionnelle, dans le cadre du programme pour la mobilité.

Mme Maina Sage. Je vois que, plus qu’un rapport, il faut une commission d’enquête, car les informations qui vous sont remontées, madame la ministre, ne sont pas exactes. La preuve en est que l’article 40 a été opposé à l’amendement initial…

Mme la ministre. Ce n’est pas de mon fait.

M. le président Dominique Raimbourg. Mme la ministre n’y est pour rien, c’est la commission des Finances qui fait application de l’article 40 de la Constitution…

Mme Maina Sage. C’est donc que la commission des Finances a estimé qu’il occasionnerait une charge supplémentaire. Je maintiens notre amendement demandant un rapport et je vous remettrai des documents. Vous pourrez d’ailleurs les télécharger en ligne sur le site du Haut-Commissariat : vous y verrez que seule la mobilité étudiante prend en compte ce déplacement, et encore le remboursement, partiel, n’a-t-il lieu qu’a posteriori : il faut faire l’avance. Quand vous accordez la continuité, accordez-la depuis la commune de résidence. Je ne pense pas que ce soit demander la lune. Je remercie le rapporteur de son soutien.

La Commission adopte successivement le sous-amendement CL309 puis l’amendement CL76 sous-amendé. L’article 13 D est ainsi rédigé.

Après l’article 13 D

La Commission examine en présentation commune les amendements CL141 et CL142 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. C’est la proposition que Mme la ministre a portée tout à l’heure, avec l’amendement CL66, et que j’ai appelée un Erasmus régional. Mes deux amendements sont satisfaits.

Ces amendements sont retirés.

Article 13 E (nouveau)
Habilitation du Gouvernement à prendre une ordonnance

Cet article additionnel, adopté à l’initiative du Gouvernement, a pour objet d’habiliter le Gouvernement à mettre à jour par ordonnance plusieurs articles obsolètes du code de l’éducation portant application et adaptation des dispositions du code aux collectivités d’outre-mer.

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La Commission examine l’amendement CL291 du Gouvernement.

Mme la ministre. Cet amendement a pour objet d’habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance pour modifier le code de l’éducation.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement. L’article 13 E est ainsi rédigé.

Article 13
Conditions d’accès à la validation des acquis de l’expérience

L’article 13 étend la possibilité d’intégrer les travailleurs informels dans une démarche de validation des acquis de l’expérience en contrepartie de leur insertion dans un parcours de formalisation progressive de leurs activités.

1. L’état du droit

Comme le mentionne l’étude d’impact jointe au projet de loi, l’économie informelle a été pour la première fois définie par le Bureau international du travail en 1993 comme « un ensemble d’unités produisant des biens et des services en vue principalement de créer des emplois et des revenus pour les personnes concernées. Ces unités, ayant un faible niveau d’organisation, opèrent à petite échelle et de manière spécifique, avec peu ou pas de division entre le travail et le capital en tant que facteurs de production. Les relations de travail, lorsqu’elles existent, sont surtout fondées sur l’emploi occasionnel, les relations de parenté ou les relations personnelles et sociales plutôt que les accords contractuels comportant des garanties en bonne et due forme ».

Le 12 juin 2015, la recommandation de l’Organisation internationale du Travail n° 204, concernant la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle, rappelait que « la plupart des individus n’entrent pas dans l’économie informelle par choix mais du fait du manque d’opportunités dans l’économie formelle et faute d’avoir d’autres moyens de subsistance ».

Dans ses études sur les travailleurs informels indépendants aux Antilles et en Guyane (58), l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE) souligne l’existence d’une économie informelle importante outre-mer. Elle concerne des publics mis en difficulté par la situation dégradée du marché du travail, une crainte face aux formalités administratives et des activités qui s’inscrivent difficilement dans le cadre défini au niveau national. Cette absence d’enregistrement est d’autant plus préjudiciable aux travailleurs que les activités exercées leur permettraient de bénéficier d’un ensemble de droits sans pour autant augmenter considérablement leur contribution.

Compte-tenu du faible niveau de formation de la plupart des travailleurs informels dans les territoires ultramarins, la reconnaissance des compétences développées dans l’économie informelle peut présenter un caractère suffisamment incitatif pour justifier leur inscription dans un parcours de formalisation progressive de leurs activités. Le dispositif de validation des acquis de l’expérience (VAE) (59), qui permet aux personnes exerçant une activité pendant une durée minimale de trois ans de bénéficier d’une certification en rapport avec les compétences développées, apparaît comme un instrument idéal en ce sens.

2. Les dispositions du projet de loi

L’article 13 prévoit, à titre expérimental et pour cinq ans, dans les collectivités mentionnées à l’article 73 de la Constitution, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, que la durée minimale d’activité d’un an requise par l’article L. 335-5 du code de l’éducation pour la recevabilité d’une demande de validation des acquis de l’expérience soit levée dès lors que le demandeur signe une convention en vue de la création d’une entreprise avec un des organismes mentionnés au 5° de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier (60).

Cette expérimentation doit permettre de régulariser une partie du travail informel en inscrivant les travailleurs concernés dans un parcours progressif de formalisation de leurs activités économiques. Il en résulterait une sécurisation de leur parcours professionnels, le versement de cotisations et de contributions aux caisses publiques, et une réduction des situations de concurrence déloyale auxquelles sont confrontées les entreprises légalement déclarées sur ces territoires.

La commission des Lois a adopté cet article modifié par un amendement rédactionnel de votre rapporteur.

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La Commission adopte l’amendement CL221 rédactionnel du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CL131 de M. Boinali Said.

M. Boinali Said. Il s’agit d’étendre le dispositif de validation des acquis aux salariés et employés du secteur informel.

M. le rapporteur. L’article 13 représente déjà une avancée importante en faveur de la reconnaissance des acquis des travailleurs du secteur informel. Je demande le retrait de l’amendement, à défaut de quoi j’y donne un avis défavorable.

Cet amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL132 de M. Boinali Said.

M. Boinali Said. Il s’agit d’étendre le dispositif expérimental prévu à l’article 13 au-delà de cinq ans.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

Elle adopte ensuite l’article 13 modifié.

Article 13 bis (nouveau)
Possibilité d’expérimenter l’école obligatoire entre trois et dix-huit ans

Cet article additionnel, issu d’un amendement de votre r apporteur, vise à permettre l’expérimentation, pendant trois ans, de l’instruction obligatoire pour les enfants des deux sexes, français et étrangers, entre trois ans et dix-huit ans, en Guadeloupe, Guyane, à la Martinique, à Mayotte et à La Réunion.

L’objectif est de lutter à la fois contre le fléau de l’illettrisme, très prégnant outre-mer, et contre les phénomènes de décrochage scolaire.

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La Commission examine l’amendement CL180 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’expérimenter une extension de la scolarité obligatoire entre trois et dix-huit ans pour lutter contre le décrochage, l’illettrisme et la déshérence des jeunes. Ce serait optionnel. Monique Orphé a souligné qu’il fallait un chapitre sur l’illettrisme ; voilà une manière élégante de répondre à la problématique.

Mme Chantal Berthelot. Voilà qui est élégant et généreux, j’en suis d’accord. Le Gouvernement prend la décision d’expérimenter mais qui construit les écoles supplémentaires nécessaires pour scolariser les enfants ? Le Gouvernement prévoit-il une dotation exceptionnelle aux collectivités territoriales ?

Mme la ministre. L’expérimentation sera calibrée en fonction des disponibilités dans chaque territoire.

La Commission adopte cet amendement. L’article 13 bis est ainsi rédigé.

L’amendement de repli CL181 du rapporteur est retiré.

Article 13 ter (nouveau)
Possibilité d’expérimenter l’extension du périmètre des dépenses éligibles au titre de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle

Cet article, issu de deux amendements identiques de votre rapporteur et de M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis au nom de la commission des Affaires économiques, vise à permettre l’expérimentation, pendant cinq ans, de l’extension du périmètre des dépenses éligibles au titre de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle. Il y intègre la rémunération des salariés assurant le tutorat des étudiants ou apprentis dans le cadre d’une convention signée avec un établissement de formation ainsi que les éventuels compléments de salaire qui leur sont versés à ce titre.

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La Commission examine les deux amendements identiques CL192 du rapporteur et CL286 de la commission des Affaires économiques.

M. le rapporteur. Cet amendement étend à titre expérimental, dans les départements et territoires d’outre-mer, le périmètre des dépenses éligibles au titre de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle. Il y intègre la rémunération des salariés assurant le tutorat des étudiants ou apprentis dans le cadre d’une convention signée avec un établissement de formation ainsi que les éventuels compléments de salaire qui leur sont versés à ce titre. Un décret précisera le dispositif.

Mme la ministre. L’avis n’est pas défavorable, mais je souhaiterais que l’on retravaille la rédaction de ces amendements.

M. le rapporteur. Le Gouvernement peut le faire sur le texte adopté par la Commission.

La Commission adopte ces amendements. L’article 13 ter est ainsi rédigé.

Article 13 quater (nouveau)
Possibilité d’expérimenter la réduction de la durée minimale du contrat de professionnalisation

Issu d’un amendement du Gouvernement, cet article additionnel propose, à titre expérimental, de favoriser l’enchaînement d’une préparation opérationnelle à l’emploi (POE) effectuée en mobilité, d’une part, et d’un contrat de professionnalisation exécuté dans la collectivité ultramarine de résidence du bénéficiaire, d’autre part.

La condition de durée minimale du contrat de professionnalisation suivant immédiatement une POE, fixée à douze mois dans le droit commun, paraissant excessive, cet article propose de réduire à six mois cette condition de durée minimale à condition que la POE effectuée en mobilité soit d’une durée minimale de trois mois et que le contrat de professionnalisation, qui prend effet à l’issue de celle-ci, ait été signé auparavant.

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* *

La Commission examine l’amendement CL161 du Gouvernement.

Mme la ministre. Il s’agit d’expérimenter un contrat de professionnalisation adapté pour les outre-mer.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement. L’article 13 quater est ainsi rédigé.

Article 13 quinquies (nouveau)
Rapport sur l’évaluation de la formation aux métiers de la mer

Issu d’un amendement de M. Philippe Naillet, cet article prévoit la remise par le Gouvernement, avant le 21 décembre 2017, d’un rapport au Parlement sur l’évaluation de la formation aux métiers de la mer dans l’enseignement supérieur prodigué dans les départements et régions d’outre-mer.

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La Commission examine l’amendement CL143 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. Le Gouvernement a réaffirmé à plusieurs reprises l’ambition maritime de la France pour qu’elle soit présente au grand rendez-vous de l’économie bleue. Grâce à ses outre-mer, avec ses 11 millions de kilomètres carrés de domaine maritime, juste derrière les États-Unis, la France se trouve deuxième puissance maritime mondiale. Or, en outre-mer, il n’existe pas d’établissement supérieur dédié aux métiers de la mer de haut niveau, comme c’est le cas dans l’Hexagone. Ce secteur constitue une force économique encore sous-estimée. Des formations professionnelles continues de haut niveau permettront à nos jeunes de trouver rapidement une activité professionnelle et aux filières de se développer. Il est donc demandé que le Gouvernement remette avant le 31 décembre 2017 au Parlement un rapport sur l’évaluation de la formation aux métiers de la mer dans l’enseignement supérieur dans les départements et régions d’outre-mer.

M. le rapporteur. Je demande le retrait de cette nouvelle demande de rapport.

Mme la ministre. J’y suis pour ma part favorable, car je pense qu’il faut inciter aux formations aux métiers de la mer, secteur d’avenir.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Est-il réellement possible de produire tous ces rapports ? Quel gouvernement, quel ministère aura la possibilité de remettre autant de rapports dans les délais que nous prévoyons ?

M. le président. Ce n’est pas à moi de répondre, car je ne suis pas au Gouvernement, mais quelque chose me dit qu’une partie de ces rapports ne seront jamais rendus… L’expérience nous le montre. Nous avons tous compris cependant que c’est une façon pour un amendement de ne pas tomber sous le coup de l’irrecevabilité de l’article 40 de la Constitution. M. le rapporteur a expliqué que c’était le mode d’intervention des députés démunis, députés à qui je ne souhaite pas porter ombrage. C’est un texte très particulier…

La Commission adopte cet amendement. L’article 13 quinquies est ainsi rédigé.

TITRE VI (nouveau)
DISPOSITIONS ÉCONOMIQUES, COMMERCIALES ET BANCAIRES

Le présent titre, issu d’un amendement de votre rapporteur, regroupe les dispositions économiques, commerciales et bancaires. Il comprend dix articles.

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La Commission examine l’amendement CL304 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement tend à insérer une nouvelle division intitulée : « Titre VI — Dispositions économiques, commerciales et bancaires ».

La Commission adopte cet amendement. Le titre VI est ainsi inséré.

Article 14
(art. L. 410-5 du code de commerce)

Intégration des transporteurs maritimes et des transitaires dans les négociations de modération des prix

L’article 14 vise à inclure les entreprises de transports maritimes et les transitaires dans la négociation des accords annuels de modération des prix prévus outre-mer.

1. L’état du droit

Issu de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, dite « loi Lurel », l’article L. 410-5 du code de commerce prévoit la possibilité pour le représentant de l’État en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna, de négocier annuellement avec les organisations professionnelles du secteur du commerce de détail un accord de modération du prix global portant sur une liste de produits de consommation courante.

Si aucun accord n’est signé dans un délai d’un mois, et dans l’hypothèse d’une situation où les prix sont anormalement et structurellement élevés, le représentant de l’État peut arrêter le prix global de la liste de produits concernés, sur la base des prix les plus bas constatés dans les différentes enseignes pour chacun des produits de la liste. Ce prix global doit être affiché conformément aux dispositions de l’article L. 113-3 du code de la consommation, c’est-à-dire par voie de marquage, d’étiquetage, d’affichage ou par tout autre procédé approprié. Un dispositif de contrôle de l’application des principes définis par ce mécanisme a également été instauré.

Ce dispositif est communément appelé « bouclier qualité-prix » (BQP). Selon l’étude d’impact, il a fait la preuve de son efficacité : les négociations des accords de modération de prix ont conduit, depuis sa création, à une baisse moyenne du montant global de la liste de produits de 12,5 % par rapport aux prix affichés avant l’ouverture des négociations dans les territoires concernés.

2. Les dispositions du projet de loi

L’article 14 du projet de loi modifie l’alinéa 1 de l’article L. 410-5 du code de commerce afin de faire participer, aux côtés des organisations professionnelles du secteur du commerce de détail, les entreprises de transport maritime et les transitaires aux négociations annuelles sur le BQP.

La baisse des prix constatée repose aujourd’hui essentiellement sur la contribution du secteur du commerce. Il apparaît nécessaire de répartir l’effort de modération des prix sur un plus grand nombre d’opérateurs économiques. Dans la mesure où le coût du service proposé par les transporteurs de fret maritime et les transitaires a une influence importante sur la formation des prix – de 4,55 % à 53,3 % du prix d’achat d’un bien selon l’étude d’impact – il est naturel qu’ils prennent part à ces négociations BQP.

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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL222 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 14 modifié.

Article 14 bis (nouveau)
(art. L. 232-24 du code de commerce)

Information obligatoire du représentant de l’État dans le département en cas de non-respect de l’obligation de dépôt des comptes

1. L’état du droit

Certaines sociétés sont tenues de déposer au greffe du tribunal de commerce, chaque année, certains documents, notamment leurs comptes annuels (bilan, compte de résultat et annexe). Sont soumises à cette obligation les sociétés par actions (art. L. 232-23 du code de commerce), les sociétés à responsabilité limitée (art. L. 232-22 du même code) et certaines sociétés en nom collectif (art. L. 232-21 du même code).

Ce dépôt doit être effectué au cours du mois suivant l’approbation des comptes par l’assemblée générale des actionnaires ou des associés.

Une fois déposés au greffe du tribunal de commerce, les documents sont accessibles au public. Seules les micro-entreprises peuvent déclarer que les comptes annuels qu’elles déposent ne seront pas rendus publics (art. L. 232-25 du code de commerce).

Cette obligation a été introduite par la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, complétée par un décret n° 67-236 du 23 mars 1967. Dès l’origine, cette exigence de publicité visait à donner aux acteurs économiques les éléments d’information utiles sur la situation financière des sociétés.

En pratique, cette obligation de dépôt des comptes annuels est peu respectée. Ainsi que l’évoquait le rapporteur à l’Assemblée nationale du projet de loi à l’origine de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises : « En réalité, il faut souligner que moins de la moitié des entreprises, y compris des sociétés par actions, déposent leurs comptes ».

C’est pourquoi le législateur a prévu une série de mesures tendant à renforcer le respect de cette obligation :

– l’article R. 247-3 du code de commerce érige en contravention de 5e classe le fait de ne pas satisfaire aux obligations de dépôt prévues aux articles L. 232-21 à L. 232-23 (amende de 1 500 euros portée à 3 000 euros en cas de récidive) ;

– l’article L. 123-5-1 du code de commerce (créé par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001) prévoit qu’« à la demande de tout intéressé ou du ministère public, le président du tribunal, statuant en référé, peut enjoindre sous astreinte au dirigeant de toute personne morale de procéder au dépôt des pièces et actes au registre du commerce et des sociétés auquel celle-ci est tenue par des dispositions législatives ou réglementaires ». Cette injonction de faire s’adresse au dirigeant de « toute » personne morale qui n’aurait pas procédé au dépôt des pièces et actes en vertu des dispositions législatives et réglementaires. Son objet est donc plus large que le dépôt des comptes annuels, mais ces derniers sont aussi concernés. Imposé par le droit de l’Union européenne, ce pouvoir d’injonction se propose d’assurer la sécurité des transactions en permettant aux cocontractants de vérifier la solvabilité de leur partenaire ;

– l’article L. 232-24 du code de commerce impose au greffier, lorsqu’il constate l’inexécution du dépôt des comptes, d’informer le président du tribunal de commerce pour qu’il puisse faire application du II de l’article L. 611-2 du même code ;

– le II de l’article L. 611-2 du code de commerce prévoit en effet que « lorsque les dirigeants d’une société commerciale ne procèdent pas au dépôt des comptes annuels dans les délais prévus par les textes applicables, le président du tribunal peut leur adresser une injonction de le faire à bref délai sous astreinte ». Cette disposition permettant la saisine d’office du tribunal de commerce a été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans une décision n° 2016-548 QPC du 1er juillet 2016 ;

– enfin, étant donné que cette obligation n’est que très peu respectée en outre-mer, la loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015 d’actualisation du droit des outre-mer a modifié le premier alinéa du paragraphe II de l’article L. 611-2 pour permettre au président d’un observatoire des prix, des marges et des revenus de demander au président du tribunal de commerce de se saisir.

2. Le dispositif proposé par votre Commission

Le présent article additionnel, adopté à l’initiative de votre rapporteur, s’inscrit dans cette logique pour renforcer la pression sur les entreprises en vue du dépôt de leurs comptes au greffe du tribunal de commerce, en prévoyant, à l’article L. 232-24 du code de commerce, une information systématique du préfet de département par le greffier en cas d’inexécution de cette obligation. Il pourra alors également prendre contact avec l’entreprise, le président du tribunal de commerce ou le président de l’office des prix, des revenus et des marges compétent en outre-mer pour que cette obligation soit respectée.

L’enjeu est en effet capital tant pour disposer d’une photographie statistique fiable de l’activité économique ultramarine que pour prévenir les défaillances d’entreprises.

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* *

La Commission examine l’amendement CL231 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à renforcer la surveillance sur les entreprises qui refusent de déposer leurs comptes au greffe du tribunal de commerce à travers une information systématique du préfet, qui pourra alors également prendre contact avec l’entreprise et le président du tribunal de commerce pour que cette obligation soit respectée. L’amende de 1 500 euros n’est pas suffisamment dissuasive, et nous rencontrons un vrai problème de déficit statistique dans tous les outre-mer. La principale source de statistiques, ce sont les entreprises ; or elles ne déclarent pas. Il faut trouver un moyen de les y inciter. Dans la loi LREOM n° 2012-1270 du 20 novembre 2012, cela reste une faculté, pour les seules entreprises ayant perçu des subventions publiques, et le préfet n’en use pas.

Mme la ministre. Sagesse.

Mme Chantal Berthelot. Il faudrait peut-être aussi exiger du ministère de la Justice la numérisation des K-bis en Guyane, pour que les entreprises de Saint-Laurent-du-Maroni n’aient plus à faire 500 kilomètres pour le récupérer et déposer leurs comptes… Il y a aussi des obligations qui incombent à l’État.

La Commission adopte cet amendement. L’article 14 bis est ainsi rédigé.

Article 14 ter (nouveau)
(art. L. 410-6 [nouveau] du code de commerce)

Obligation pour les grandes et moyennes surfaces à Mayotte et en Guyane de négocier un tarif de gros à l’égard des petites surfaces de détail

1. L’état du droit

La loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer (dite « LREOM ») a créé le mécanisme du « bouclier-qualité-prix » à l’article L. 410-5 du code de commerce.

Cette disposition prévoit l’organisation, par le représentant de l’État, d’une négociation annuelle, entre « les organisations professionnelles du secteur du commerce de détail et leurs fournisseurs » afin de trouver « un accord de modération du prix global d’une liste limitative de produits de consommation courante ». Elle intervient après avis public de l’office des prix, des marges et des revenus territorialement compétent et peut donner lieu à une fixation des prix par le préfet en l’absence d’accord un mois après l’ouverture des négociations. Cette négociation doit se tenir en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Wallis-et-Futuna et à Saint-Martin.

Comme l’a mis en exergue le rapport d’application n° 3363 de la LREOM présenté par Mme Éricka Bareigts et M. Daniel Fasquelle le 16 décembre 2015 (61), le dispositif du « bouclier-qualité-prix » commence à faire ses preuves dans la plupart des territoires ultramarins.

Toutefois, il est apparu qu’à Mayotte et en Guyane, l’une des difficultés pour obtenir une modération des prix des commerces de détail réside dans le fait qu’ils sont tenus de s’approvisionner auprès des grandes et moyennes surfaces de l’île qui se trouvent en situation d’oligopole et qui refusent, totalement à Mayotte, et très généralement en Guyane, de pratiquer à l’égard de ces petits commerce un tarif de gros.

Il s’ensuit que dans ces deux collectivités le refus persistant des groupes de grande distribution de considérer leur rôle de « grossistes » contribue à augmenter le coût de la vie.

2. Le dispositif proposé par votre Commission

Le présent article additionnel, adopté à l’initiative de votre rapporteur et du groupe Socialiste, écologiste et républicain, s’inspire donc du dispositif du « bouclier-qualité-prix ». Il introduit un nouvel article L. 410-6 au sein du code de commerce prévoyant une obligation pour les grandes et moyennes surfaces du Département de Mayotte et de Guyane de négocier chaque année, après avis public de l’office des prix, des marges et des revenus, un tarif professionnel pour leur activité de gros à l’égard des petites surfaces du commerce de détail (I).

Le II précise qu’en l’absence d’accord un mois après l’ouverture des négociations, ce tarif de gros ainsi que ses modalités d’encadrement sont fixés par un arrêté préfectoral.

Ces tarifs ne seraient opposables qu’aux seuls détaillants disposant d’un numéro d’enregistrement au registre du commerce.

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La Commission examine les amendements CL195 du rapporteur et CL91 de M. Ibrahim Aboubacar.

M. le rapporteur. Il n’y a pas de grossiste en Guyane et à Mayotte ; ce sont les grandes surfaces qui fournissent les petits commerces, notamment les « doukas » comme on les appelle à Mayotte. Il s’agit par cet amendement de prévoir ce qui existe pour les produits alimentaires : le préfet passerait un accord de modération avec les grandes surfaces pour un tarif professionnel de gros. C’est un bouclier qualité-prix de gros.

Mme la ministre. J’ai produit un rapport sur l’application de la loi LREOM. C’est un sujet extrêmement important. La loi LREOM n’est pas adaptée à Mayotte et à la Guyane, un petit et un grand territoire. Les dimensions peuvent rendre les problématiques tantôt identiques, tantôt différentes, selon les sujets. Pour prendre l’exemple de Mayotte, les Mahorais sont victimes de la double peine : non seulement ils sont éloignés mais, du fait même de cet éloignement, ils ne peuvent avoir d’influence sur le coût des produits et les « doukas » sont obligés de les acheter aux grandes surfaces. J’émets toutefois un avis de sagesse sur cet amendement car je pense qu’il ne réglera pas le problème, en mettant le préfet dans une situation particulière de négociation avec les commerçants. Il peut également se poser un problème autour des coopératives. L’exercice est délicat. Ce n’est pas un sujet législatif à proprement parler : nous entrons dans les plans de convergence. C’est le sens de la double stratégie que nous avons retenue : une loi et en même temps des plans de convergence.

La Commission adopte ces amendements. L’article 14 ter est ainsi rédigé.

Article 14 quater (nouveau)
(art. L. 441-6 et L. 443-1 du code de commerce)

Clarification des délais de paiement applicables en outre-mer

1. L’état du droit

L’article L. 441-6 du code de commerce dispose que les fournisseurs sont payés dans un délai de 30 à 45 jours à partir de la date de réception des marchandises.

Pour tenir compte des délais d’acheminement vers les territoires ultramarins, le VI de l’article 21 de la loi n° 2008-776 de modernisation de l’économie du 4 août 2008 (dite « LME ») a prévu un délai de paiement plus long pour l’outre-mer. Il disposait que : « Pour les livraisons de marchandises qui font l’objet d’une importation dans le territoire fiscal des départements de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Guyane et de La Réunion, ainsi que des collectivités d’outre-mer de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, le délai prévu au neuvième alinéa de l’article L. 441-6 du code de commerce est décompté à partir de la date de réception des marchandises ».

Néanmoins, il est très vite apparu que des marchandises pouvaient être réceptionnées, dans un premier temps, sur le territoire hexagonal, quand bien même la destination finale des produits était un territoire d’outre-mer, par exemple s’il s’agissait de l’entrepôt métropolitain du transitaire du client ultramarin ou d’un tiers agissant pour son compte. Ces marchandises étaient ainsi considérées comme équivalant à une livraison en métropole, soumises au droit commun, ce qui aboutissait à renchérir le prix initial par les frais d’immobilisation reposant sur l’importateur ultramarin et, in fine, sur le consommateur final ultramarin.

L’article 20 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer (dite "LREOM") a donc eu pour objet de « réduire les frais intégrés dans la reconstitution du prix de revient des produits importés dans les DOM et COM » afin de tenir compte du délai d’acheminement des marchandises à destination des outre-mer même lorsqu’elles sont d’abord réceptionnées par l’acheteur ou son représentant dans l’hexagone. Il a ainsi complété l’article L. 441-6 du code de commerce par un V ainsi rédigé : « V. – Pour les livraisons de marchandises qui font l’objet d’une importation dans le territoire fiscal des départements de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Guyane et de La Réunion, ainsi que des collectivités d’outre-mer de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, le délai de paiement prévu au neuvième alinéa du I du présent article est décompté à partir du vingt-et-unième jour suivant la date de mise à disposition de la marchandise par le vendeur à l’acheteur ou à son représentant en métropole, ou de la date de dédouanement de la marchandise au port de destination finale si celle-ci est antérieure. » Il a modifié dans le même sens l’article L. 443-1.

Or, selon le rapport d’application n° 3363 de la LREOM présenté par Mme Éricka Bareigts et M. Daniel Fasquelle, la mise en œuvre de ce dispositif pose toujours des difficultés : outre le fait qu’il soit souvent méconnu des importateurs locaux, il est apparu que ces derniers ne pouvaient imposer cette nouvelle réglementation à leurs fournisseurs dans la mesure où les délais fixés par le code de commerce sont des délais maximaux de paiement et non pas minimaux. Dès lors, la non prise en compte du délai de vingt-et-un jours n’est pas passible de sanction.

2. Le dispositif proposé par votre Commission

Le présent article additionnel, adopté à l’initiative de votre rapporteur et des membres du groupe Socialiste, écologiste et républicain, vient corriger ce point en modifiant les articles L. 441-6 et L. 443-1 du code de commerce pour préciser que, lorsque la marchandise est mise à disposition en métropole, le délai ne peut être décompté qu’à partir du vingt et unième jour suivant la date de cette mise à disposition ou à partir de la date de dédouanement si celle-ci est antérieure.

Désormais, le délai de vingt-et-un jours devient un délai minimal de sorte que la charge financière que représente l’immobilisation financière liée à l’acheminement ne reposera plus sur l’importateur ultramarin mais sur le fournisseur, ce qui devait conduire à faire diminuer le prix des produits importés.

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La Commission examine les amendements identiques CL196 du rapporteur et CL92 de M. Ibrahim Aboubacar.

M. le rapporteur. La loi LREOM parle de deux délais de paiement en outre-mer : l’un pour les produits livrés dans ces territoires, l’autre pour livrer à un représentant en métropole et qui est de vingt et un jours. Or, alors qu’il s’agit d’une clause d’ordre public, elle reste lettre morte car aucune entreprise n’accepte de faire un contentieux à son fournisseur, et le délai demandé est donc en pratique de cinq jours. C’est très grave. Nous demandons que le délai soit respecté. C’est une précision de la loi LREOM.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte ces amendements. L’article 14 quater est ainsi rédigé.

Article 14 quinquies (nouveau)
(art. L. 450-3-2 du code de commerce)

Possibilité
de faire usage d’une identité d’emprunt pour détecter l’existence d’un accord d’exclusivité d’importation

1. L’état du droit

En insérant l’article L. 420-2-1 au sein du code de commerce, l’article 5 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 précitée (dite « LREOM ») a créé une nouvelle infraction en droit de la concurrence, applicable dans les seuls départements et collectivités d’outre-mer, à l’exception de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française : l’interdiction des « accords ou pratiques concertées ayant pour objet ou pour effet d’accorder des droits exclusifs d’importation à une entreprise ou à un groupe d’entreprises ».

Outre l’interdiction des ententes (article L. 420-1 du code de commerce), des abus de position dominante ou de dépendance économique (article L. 420-2 du même code), l’interdiction des accords d’exclusivité d’importation entre un fournisseur et un distributeur (le plus souvent « importateur-grossiste » ou « agent de marque ») est une quatrième infraction qui ne s’applique donc que dans un champ géographique limité.

Cette interdiction n’est toutefois pas générale. En effet, l’article 5 complète également l’article L. 420-4 du code de commerce, qui énumère les dérogations possibles aux infractions au droit de la concurrence. Les accords d’exclusivité peuvent être autorisés si leurs « auteurs peuvent justifier qu’ils sont fondés sur des motifs objectifs tirés de l’efficacité économique et qui réservent aux consommateurs une partie équitable du profit qui en résulte ».

Le législateur a en effet considéré qu’au vu de l’étroitesse des marchés ultramarins, il pouvait être parfois plus efficace économiquement, pour un fournisseur, de recourir à un importateur unique pour atteindre une taille critique. Encore faut-il, en cas de contrôle ou de contestation, que cette efficacité économique soit prouvée et qu’elle profite au consommateur. La charge de la preuve incombe aux entreprises ou groupes d’entreprises concernées.

Depuis, les recherches menées sur le terrain par les agents des DIECCTE dans les DOM et les COM et relayées par le rapport d’application n° 3363 de la LREOM présenté par Mme Éricka Bareigts et M. Daniel Fasquelle montrent que les exclusivités de droit ont été remplacées par des exclusivités de fait en raison de l’absence de nouveaux entrants sur le marché.

Or, ces exclusivités d’importation de fait sont beaucoup plus difficiles à prouver. Elles doivent reposer sur un faisceau d’indices qu’il est d’autant plus délicat à détecter qu’aucun tiers n’a formulé de plainte. Aussi, les agents des DIECCTE ont exprimé le besoin de pouvoir utiliser une identité d’emprunt pour mener les enquêtes sur les exclusivités, à l’instar du pouvoir de contrôle des agents en matière de vente de biens et de services sur internet récemment introduit dans le droit commercial par la loi relative à la consommation, dite « Hamon », au II de l’article L. 450-3-2 du code de commerce.

2. Le dispositif proposé par votre Commission

Le présent article additionnel complète le II de l’article L. 450-3-2 du code de commerce qui permet actuellement aux agents de l’Autorité de la concurrence et aux fonctionnaires de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes habilités par le ministre chargé de l’économie de faire usage d’une identité d’emprunt pour le contrôle de la vente de biens et de la fourniture de services sur internet.

L’objectif de cet article additionnel est de permettre aux agents des directions des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIECCTE), dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, de faire usage de ce moyen d’investigation pour la détection de l’infraction visée à l’article L. 420-2-1 du code de commerce, c’est-à-dire l’interdiction des « accords ou pratiques concertées ayant pour objet ou pour effet d’accorder des droits exclusifs d’importation à une entreprise ou à un groupe d’entreprises ».

Ce nouveau pouvoir facilitera le repérage des cas suspects avant la phase d’instruction à proprement parler mais devra respecter le principe selon lequel l’agent verbalisateur ne suscite pas l’infraction, ce qui ne saurait être le cas en ce qui concerne une simple vérification.

Un décret en Conseil d’État précisera les conditions dans lesquelles les agents procèderont à leurs constatations.

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La Commission examine les amendements CL193 du rapporteur et CL90 de M. Ibrahim Aboubacar.

M. le rapporteur. Il s’agit de testing pour déceler les exclusivités de distribution. Pour plus de transparence et un meilleur fonctionnement du marché, la loi LREOM a interdit les exclusivités. Or la parade a été trouvée : les accords d’exclusivité ne sont pas signés, ne font l’objet d’aucun écrit. Il faut donc pouvoir vérifier l’existence d’accords interdits. C’était une demande de la ministre dans le rapport parlementaire d’application de la LREOM qu’elle a produit avec M. Fasquelle.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte ces amendements. L’article 14 quinquies est ainsi rédigé.

L’amendement de repli CL194 du rapporteur est retiré.

Article 15
(art. L. 752-6-1 du code de commerce)

Caractère suspensif de la saisine de l’Autorité de la concurrence par les commissions départementales et territoriales d’aménagement commercial

L’article 15 permet de suspendre la décision des commissions départementales d’aménagement commercial (CDAC) à la remise de l’avis de l’Autorité de la concurrence dans le cas d’une demande d’autorisation pour un projet d’exploitation commerciale portant à plus de 50 % la part de marché de l’entreprise sollicitant l’autorisation.

1. L’état du droit

Les commissions départementales et territoriales d’aménagement commercial (CDAC et CTAC) ont pour fonction de délivrer les autorisations d’exploitation pour les créations ou extensions de magasins de commerce de détail d’une surface de vente supérieure à mille mètres carrés (62).

Compte tenu de la grande concentration de ces activités commerciales dans plusieurs territoires d’outre-mer, où des groupes détiennent parfois plus de 40 % de parts de marché, la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, dite « loi Lurel », a introduit dans le code de commerce un article L. 752-1 qui permet aux CDAC et CTAC de saisir l’Autorité de la concurrence si la demande d’autorisation portait à plus de 50 % la part de marché de l’entreprise sollicitant l’autorisation.

2. Les dispositions du projet de loi

Ainsi que le souligne l’étude d’impact, la saisine de l’Autorité de la concurrence ne suspend pas le processus de décision de la commission d’aménagement commercial. Il peut en résulter des situations délicates dans lesquelles l’Autorité de la concurrence rend un avis défavorable alors même que la commission d’aménagement commercial a déjà donné son accord.

Dans leur rapport d’information sur la mise en application de la loi du 20 novembre 2012 (63), Mme Éricka Bareigts et M. Daniel Fasquelle regrettaient ainsi que, par une décision du 6 août 2013, la commission territoriale d’aménagement commercial de Saint-Barthélemy ait délivré une autorisation d’exploitation avant même que l’avis de l’Autorité de la concurrence, qui était défavorable, ne fût rendu.

L’article 15 vise à donner un caractère suspensif à la saisine par les CDAC et CDAT de l’Autorité de la concurrence, reprenant ainsi la proposition n° 6 du rapport précité. Celle-ci disposera d’un délai maximal de trois mois pour rendre son avis, délai au terme duquel la commission d’aménagement commercial pourra librement statuer.

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* *

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL223 du rapporteur.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, elle adopte ensuite l’amendement CL275 du rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques.

Ensuite de quoi, elle adopte l’amendement rédactionnel CL251 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 15 modifié.

Article 16 (nouveau)
(art.
L. 743-2-2 du code monétaire et financier)
Alignement progressif des tarifs pratiqués par les banques locales de Nouvelle-Calédonie sur les tarifs moyens pratiqués par les banques en métropole

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de M. Philippe Gomes après avis favorable du rapporteur, impose un objectif d’alignement progressif des tarifs bancaires pratiqués en Nouvelle-Calédonie sur les tarifs moyens constatés dans l’Hexagone, dans un délai de cinq ans, à la suite de négociations menées sous l’égide du haut-commissaire de la République.

1. L’état du droit

L’article 16 de la loi n° 2013-1029 du 15 novembre 2013 portant diverses dispositions relatives aux outre-mer a introduit l’article L. 743-2-2 au sein du code monétaire et financier afin de permettre au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie de négocier avec les banques locales des accords de modération de leurs tarifs et, à défaut d’accord, d’imposer par arrêté des baisses tarifaires. Cette disposition a commencé à porter ses fruits, puisque deux accords ont été conclus, fin 2014 et fin 2015.

2. Le dispositif proposé par votre Commission

Dans un objectif d’égalité réelle entre les populations de Nouvelle-Calédonie et celles de métropole, le présent article additionnel complète l’article L. 743-2-2 au sein du code monétaire et financier pour fixer comme objectif à ces négociations un alignement progressif, dans un délai de cinq ans, des tarifs pratiqués par les banques locales de Nouvelle-Calédonie sur les tarifs moyens constatés dans l’Hexagone par l’observatoire des tarifs bancaires publiés par le comité consultatif des services financier.

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La Commission examine l’amendement CL36 de M. Philippe Gomes.

M. Daniel Gibbes. En Nouvelle-Calédonie, le haut-commissaire peut, en vertu de l’article L. 743-2-2 du code monétaire et financier, négocier avec les banques locales des accords de modération de leurs tarifs et, à défaut d’accord, imposer par arrêté des baisses tarifaires. Cette disposition a commencé à porter ses fruits puisque deux accords ont été conclus en 2014 et 2015.

Nous proposons de fixer comme objectif à ces négociations un alignement progressif, dans un délai de cinq ans, des tarifs pratiqués par les banques locales de Nouvelle-Calédonie sur les tarifs moyens constatés en métropole.

M. Victorin Lurel, rapporteur. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 16 est ainsi rédigé.

Article 17 (nouveau)
(art. 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses mesures d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations)

Discrimination en raison de la domiciliation bancaire

Cet article additionnel, adopté à l’initiative du Gouvernement après avis favorable de votre rapporteur, rappelle que le refus de délivrer un service, ou de manière générale le fait d’écarter de tout type de démarche une personne du fait de sa domiciliation bancaire, constitue une forme de discrimination.

On rappellera que l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses mesures d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations a transposé en droit national la définition communautaire des discriminations directes et indirectes et du harcèlement, parmi lesquelles figure la discrimination en raison de son lieu de résidence.

Or, les ultramarins rencontrent encore une difficulté majeure relative à leur domiciliation bancaire. Bien souvent, ils voient leur demande de crédit ou de souscription à un service refusée en raison de leur domiciliation bancaire hors de l’Hexagone.

Le présent article complète donc l’article 1er de la loi du 27 mai 2008 précité pour préciser que constitue également une discrimination directe le fait de traiter de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne l’aura été dans une situation comparable, une personne en raison de sa domiciliation bancaire.

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La Commission examine l’amendement CL165 du Gouvernement.

M. le rapporteur. Nous sommes favorables au fait de sanctionner tout refus de délivrer un service ou, de manière générale, le fait d’écarter de tout type de démarche une personne du fait de sa domiciliation bancaire.

La Commission adopte l’amendement. L’article 17 est ainsi rédigé.

Après l’article 17

La Commission examine les amendements identiques CL289 de la commission des Affaires économiques et CL80 de M. Jean-Paul Tuaiva. 

Mme Maina Sage. Cet amendement vise à supprimer les difficultés que rencontrent les Ultramarins présents en métropole du fait de leur domiciliation bancaire outre-mer. Ceux-ci en effet se voient régulièrement refuser certains services ou crédits en raison de leur domiciliation bancaire hors métropole, assimilée à un compte à l’étranger. Il s’agit de lutter contre cette discrimination que subissent notamment nos étudiants.

M. le rapporteur. Cet amendement est satisfait par l’amendement que nous venons d’adopter.

Mme Maina Sage. J’insiste sur le fait qu’en la matière la loi n’est pas appliquée, et qu’il me semble donc utile que ce problème, dénoncé par le Défenseur des droits, fasse l’objet sinon d’un rapport au moins d’une mission. Je recevais encore ce week-end la réclamation d’un étudiant à qui l’on oppose le fait que sa caution soit domiciliée outre-mer, alors qu’il est accompagné d’une personne en CDI. Il faut donc trouver les moyens d’informer les agences bancaires et les assurances qu’une telle pratique est illégale.

La Commission rejette les amendements.

Article 18 (nouveau)
(art. 24 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer)
Élargissement du dispositif de l’aide au fret

Cet article additionnel, adopté à l’initiative du Gouvernement après avis favorable de votre rapporteur, rend désormais éligible à l’aide au fret prévue à l’article 24 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, les échanges inter-outre-mer et les importations depuis les pays étrangers, dans une logique d’intégration régionale des économies ultramarines.

L’aide au fret aux entreprises situées dans les départements d’outre-mer, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique et à Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Wallis et Futuna, est désormais destinée à abaisser le coût du fret :

 – des matières premières, ou produits importés dans ces départements ou ces collectivités, depuis l’Union européenne ou les pays tiers ou acheminés depuis ces départements et collectivités pour y entrer dans un cycle de production ;

– des matières premières, ou produits expédiés après un cycle de production locale vers l’Union européenne, y compris ces départements et collectivités d’outre-mer ;

– des déchets importés dans ces départements ou ces collectivités depuis l’Union européenne ou les pays tiers, ou acheminés depuis ces départements et collectivités, aux fins de traitement et en particulier de valorisation ;

– des déchets expédiés vers l’Union européenne y compris ces départements ou collectivités aux fins de traitement et en particulier de valorisation.

Le montant de l’aide au fret est fixé chaque année en loi de finances, étant précisé que pour les départements d’outre-mer, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique et dans la collectivité de Saint-Martin, cette aide peut être cofinancée par l’allocation additionnelle spécifique de compensation des surcoûts liés aux handicaps des régions ultrapériphériques, mentionnée à l’article 12 du règlement (UE) n°1301/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au Fonds européen de développement régional et aux dispositions particulières relatives à l’objectif « Investissement pour la croissance et l’emploi ».

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Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL156 du Gouvernement, précisant les conditions d’éligibilité à l’aide au fret. L’article 18 est ainsi rédigé.

Article 19 (nouveau)
Expérimentation d’un Small Business Act outre-mer

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de votre rapporteur, crée un Small Business Act ultramarin, en permettant, à titre expérimental, aux autorités adjudicatrices dans les départements, régions, collectivités uniques d’outre-mer, collectivités de l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie ainsi qu’à Mayotte, de réserver jusqu’à un tiers de leurs marchés aux PME installées sur leur territoire.

Toutefois, pour chaque secteur économique concerné, le montant total des marchés réservés aux PME ne pourra excéder 15 % du montant annuel moyen des marchés du secteur économique concerné conclus par le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice concerné au cours des trois années précédentes.

Cette expérimentation, d’une durée de cinq ans, est destinée à soutenir l’activité économique ultramarine et en particulier la vitalité des petites et moyennes entreprises.

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La Commission adopte l’amendement CL238 du rapporteur, relatif à l’accès des PME aux marchés conclus dans les départements, régions et collectivités d’outre-mer. L’article 19 est ainsi rédigé.

TITRE VII (nouveau)
DISPOSITIONS RELATIVES À LA CULTURE

Le présent titre, issu d’un amendement de votre rapporteur, comprend des dispositions relatives à la culture. Il comporte deux articles.

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La Commission adopte l’amendement CL307 du rapporteur, insérant dans le projet de loi un titre VII destiné à regrouper les « Dispositions relatives à la culture ».

Article 20 (nouveau)
(art. 1er du décret du 2 thermidor an II)

Délivrance de livrets de famille bilingues par les mairies

À plusieurs reprises ces dernières années, la Chancellerie a justifié des mesures d’interdiction de documents administratifs bilingues en s’appuyant sur les deux textes suivants : le décret du 2 thermidor de l’an II (20 juillet 1794), qui dispose que les actes publics doivent être écrits en langue française sur le territoire de la République, et l’arrêté consulaire du 24 prairial de l’an XI (13 juin 1803) qui précise que l’emploi de la langue française est obligatoire même dans les régions où l’usage de dresser les actes publics dans l’idiome local se serait maintenu.

L’application de la loi du 20 juillet 1794 est souvent considérée par les historiens comme suspendue quelques jours après sa promulgation, à la chute de Robespierre. Pourtant, l’autorité judiciaire – courrier du procureur de la République au maire de Rennes, 5 avril 2011 – ainsi que le ministère de la Justice lui-même – courrier de M. Michel Mercier à M. Jean-Jacques Urvoas, 7 juillet 2011 et, plus récemment, circulaire du 23 juillet 2014 relative à l’état civil – n’en remettent jamais en cause la validité.

La modification de ces deux textes permettrait de lever les verrous juridiques qui s’opposent à la distribution par les municipalités de livrets de famille bilingues, étant entendu que seule la version en langue française aurait valeur officielle et que la traduction en langue régionale ferait simplement office d’usage. L’arrêté consulaire du 24 prairial de l’an XI est cependant de niveau réglementaire et ne pourra être actualisé que par le Gouvernement.

Si le principe selon lequel « la langue de la République est le français » a valeur constitutionnelle depuis la loi constitutionnelle du 25 juin 1992, le Conseil constitutionnel lui-même a précisé, dans sa décision n° 94-345 DC du 29 juillet 1994, que cette disposition ne saurait « prohiber l’usage de traductions lorsque l’utilisation de la langue française est assurée ».

Le présent article additionnel, inspiré des amendements portés notre collègue M. Paul Molac lors de l’examen du projet de loi Égalité et citoyenneté et issu de deux amendements identiques de votre rapporteur et de M. Ibrahim Aboubacar et des députés du groupe Socialiste, écologiste et républicain, reprend strictement la formulation du Conseil constitutionnel pour l’inscrire dans le décret législatif du 2 thermidor de l’an II. Il met ainsi la loi en accord avec les principes constitutionnels.

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La Commission adopte les amendements identiques CL198 du rapporteur et CL93 de M. Ibrahim Aboubacar, relatifs à la traduction des documents administratifs. L’article 20 est ainsi rédigé.

Article 21 (nouveau)
(art. 43-11 et 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication)

Valorisation des outre-mer par les chaînes de radio et de télévision du service public

Cet article additionnel, issu d’un amendement de votre rapporteur, a pour objet de rappeler au secteur public de la communication audiovisuelle l’obligation de prendre en compte la valorisation des outre-mer dans les cahiers des charges de France Télévision, Radio France internationale, Radio France et Arte.

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La Commission adopte l’amendement CL232 du rapporteur, relatif à la valorisation des outre-mer dans la diffusion des programmes de communication audiovisuelle. L’article 21 est ainsi rédigé.

TITRE VIII (nouveau)
DISPOSITIONS RELATIVES AU DÉVELOPPEMENT DURABLE

Le présent titre, issu d’un amendement de votre rapporteur, regroupe des dispositions relatives au développement durable. Il comprend trois articles additionnels.

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La Commission adopte l’amendement CL294 du rapporteur, insérant dans le projet de loi un titre VIII destiné à regrouper les « Dispositions relatives au développement durable ».

Article 22 (nouveau)
(art. 46 de la loi n° 2009-967 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement)

Atteindre les objectifs nationaux en matière de gestion des déchets

Cet article additionnel, issu d’un amendement de M. Philippe Naillet, vise à assurer les conditions qui permettent aux collectivités et départements d’outre-mer d’atteindre les objectifs nationaux d’orienter 75 % des déchets d’emballages ménagers et des papiers vers les filières de recyclage.

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La Commission examine l’amendement CL145 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. Il s’agit d’étendre la responsabilité des producteurs en matière de coût d’emballage et de recyclage. Il est demandé que la couverture des coûts de collecte, de tri et de traitement des emballages ménagers et papiers – aujourd’hui essentiellement supportés par les collectivités locales – soit portée à 80 % des coûts nets du service de collecte et de tri réel.

M. le rapporteur. Sur un sujet aussi technique, je m’en remets à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte l’amendement. L’article 22 est ainsi rédigé.

Après l’article 22

La Commission examine l’amendement CL287 de la commission des Affaires économiques.

M. le rapporteur. L’amendement est satisfait, puisque un programme de développement des énergies renouvelables est déjà inclus dans la programmation pluriannuelle de l’énergie.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques. Il s’agit surtout d’un amendement d’appel, afin de rappeler que le rapport qui devait être réalisé pour étudier les conditions de mise en place de la contribution au service public de l’électricité (CSPE) en Polynésie, à Wallis-et-Futuna et en Nouvelle-Calédonie n’a jamais été rendu.

Or, malgré le statut particulier de ces territoires, il me semble utile de distinguer les besoins vitaux – dont l’électricité fait indéniablement partie – des besoins liés à l’organisation du développement économique

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’examen de l’amendement CL288 de la commission des Affaires économiques.

M. le rapporteur. Il est prévu de remplacer les schémas d’aménagement régionaux (SAR) par des schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET), qui vont être obligatoires, ce qui, me semble-t-il, satisfait l’amendement.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. En dehors du SRADDET, il y a également d’autres documents qui concernent la régulation des déchets dans les départements et les régions d’outre-mer. En revanche, le problème demeure pour les collectivités relevant de l’article 74. Mon amendement était donc avant tout un amendement d’appel, que j’accepte de retirer.

L’amendement est retiré.

Article 23 (nouveau)
Rapport sur la qualité des réseaux publics d’électricité

Issu d’un amendement de votre rapporteur, cet article additionnel prévoit la remise au Parlement, par le Gouvernement, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport sur l’application dans les départements d’outre-mer du décret n° 2007-1826 relatif aux niveaux de qualité et aux prescriptions techniques en matière de qualité des réseaux publics de distribution et de transport de l’électricité.

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La Commission en vient à l’examen de l’amendement CL197 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le niveau de qualité du réseau public de distribution d’électricité n’est pas le même en métropole et outre-mer : si le pourcentage d’utilisateurs mal alimentés n’excède pas 5 % outre-mer, ce taux est ramené à 3 % en France hexagonale. Ce différentiel résultant d’un arrêté peut paraître anecdotique, il s’avère en réalité discriminatoire. Nous souhaitons donc que la loi corrige cette différence de traitement.

La Commission adopte l’amendement. L’article 23 est ainsi rédigé.

Article 24 (nouveau)
Rapport sur l’extension de la contribution au service public de l’électricité en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française

Issu d’un amendement de M. Philippe Gomes, cet article additionnel prévoit la remise au Parlement, par le Gouvernement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport sur l’extension de la contribution au service public de l’électricité en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.

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La Commission examine l’amendement CL40 de M. Philippe Gomes.

M. Daniel Gibbes. Il s’agit d’acter l’extension de la CSPE en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement. L’article 24 est ainsi rédigé.

TITRE IX (nouveau)
DISPOSITIONS RELATIVES À LA FONCTION PUBLIQUE

Le présent titre, issu d’un amendement de votre rapporteur, regroupe des dispositions relatives à la fonction publique. Il comprend quatre articles additionnels.

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La Commission adopte l’amendement CL296 du rapporteur, insérant dans le projet de loi un titre IX destiné à regrouper les « Dispositions relatives à la fonction publique ».

Article 25 (nouveau)
(art. 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État)

Prise en compte des intérêts des fonctionnaires ultramarins dans les mouvements de personnel

Cet article additionnel, issu d’un amendement du Gouvernement, vise à prendre en compte, parmi les critères permettant de classer les demandes de mutations, les intérêts des fonctionnaires qui justifient du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans les outre-mer. Il étend cette faculté aux administrations qui ne sont pas soumises à l’obligation d’établir des tableaux périodiques de mutation.

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La Commission examine l’amendement CL167 du Gouvernement.

M. le rapporteur. Il s’agit d’étendre la possibilité de tenir compte des centres d’intérêts matériels et moraux (CIMM) des fonctionnaires de l’État dans les services et administrations dont les mouvements des personnels ne sont pas régis par un tableau périodique des mutations. Il est bon en effet de généraliser le CIMM à l’ensemble des administrations, en couvrant les petits corps de fonctionnaires qui n’étaient pas encore concernés. Avis favorable.

M. Patrick Mennucci. Pouvez-vous préciser ce que sont ces CIMM ?

M. le rapporteur. Quand vous êtes né outre-mer, que vous y possédez des terrains, voire une sépulture familiale, on considère que vous y avez des intérêts matériels et moraux qui justifient de donner priorité à votre demande de mutation.

La Commission adopte l’amendement. L’article 25 est ainsi rédigé.

Article 26 (nouveau)
Expérimentation d’une direction des ressources humaines unique pour les fonctionnaires de l’État dans les petites collectivités

Issu d’un amendement du Gouvernement, cet article additionnel prévoit la création, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, d’une direction des ressources humaines unique des fonctionnaires de l’État, dans les territoires de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Wallis-et-Futuna, sous l’autorité du représentant de l’État.

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La Commission examine l’amendement CL159 du Gouvernement.

M. le rapporteur. Cet amendement prévoit pour la fonction publique d’État une direction des ressources humaines unique pour les territoires de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Wallis-et-Futuna. Il sera possible ensuite aux deux autres fonctions publiques d’adopter par convention la même organisation. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 26 est ainsi rédigé.

Article 27 (nouveau)
Expérimentation de formations communes aux trois fonctions publiques dans les petites collectivités

Issu d’un amendement du Gouvernement, cet article additionnel prévoit l’expérimentation, pendant une durée de cinq années, de la mutualisation des actions de formation organisées par et pour le compte de l’ensemble des services de l’État et des employeurs territoriaux et hospitaliers dans les territoires de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Wallis-et-Futuna. Il en est espéré un gain d’efficience et la possibilité d’accroître la diversité, la qualité et le volume des actions de formation effectuées.

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La Commission est saisie de l’amendement CL160 du Gouvernement.

M. le rapporteur. Cet amendement propose la mutualisation des actions de formation au bénéfice des agents publics dans les DOM et dans les COM. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 27 est ainsi rédigé.

Article 28 (nouveau)
Rapport sur les aides accordées aux fonctionnaires ultramarins en cas de changement de résidence administrative

Issu d’un amendement de Mme Maina Sage, cet article additionnel prévoit la remise au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport de la commission d’évaluation des politiques publiques de l’État sur les inégalités dans la prise en charge des frais liés aux changements de résidence et aux congés entre les fonctionnaires d’État résidant outre-mer et ceux résidant dans l’hexagone.

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La Commission examine l’amendement CL71 de Mme Maina Sage, qui fait l’objet d’un sous-amendement CL306 du rapporteur.

Mme Maina Sage. Il ne s’agit pas de demander des avantages nouveaux mais d’obtenir que, lorsqu’un fonctionnaire d’État en Polynésie française est muté et affecté dans une autre collectivité, un DOM ou dans l’Hexagone, il puisse bénéficier des avantages attachés à son corps. Cette proposition s’est heurtée à l’article 40. C’est la raison de cet amendement de repli, qui demande à tout le moins qu’un rapport soit rédigé sur la question. Je ne désespère pas néanmoins de parvenir à revenir sur cette injustice en séance : ces fonctionnaires sont en effet les derniers agents publics de la République à ne pas être accompagnés lorsqu’ils sont affectés dans un autre territoire que leur lieu de résidence.

M. le rapporteurAvis favorable. De manière à respecter la souveraineté du Parlement, je recommande dans mon sous-amendement de supprimer le dernier alinéa relatif aux délégations aux outre-mer des deux assemblées.

La Commission adopte le sous-amendement, puis l’amendement CL71 ainsi sous-amendé. L’article 28 est ainsi rédigé.

TITRE X (nouveau)
DISPOSITIONS JURIDIQUES, INSTITUTIONNELLES ET JUDICIAIRES

Le présent titre, issu d’un amendement de votre rapporteur, comprend des dispositions relatives aux évolutions juridiques, institutionnelles et judiciaires nécessaires à une égalité réelle outre-mer. Il comporte six articles.

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La Commission adopte l’amendement CL297 du rapporteur, insérant dans le projet de loi un titre X destiné à regrouper les « Dispositions juridiques, institutionnelles et judiciaires ».

Avant l’article 29

La Commission examine l’amendement CL49 de M. Jean-Claude Fruteau.

M. Ibrahim Aboubacar. Il s’agit d’intégrer les résultats électoraux des outre-mer dans l’ensemble des résultats électoraux nationaux publiés par la presse.

M. le rapporteur. Je souhaite le retrait de cet amendement, qui empêcherait de publier les résultats des élections le soir même, faute de disposer de ceux des outre-mer.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL140 de M. Philippe Naillet. 

M. Philippe Naillet. Il s’agit de permettre que, sur autorisation du préfet, un cercueil puisse être à nouveau ouvert après son transfert par avion en provenance ou à destination des outre-mer. De nombreuses familles ultramarines ne peuvent en effet faire de cérémonie à cercueil ouvert lorsque la personne est décédée dans l’hexagone, puis rapatriée en outre-mer. Elles ont, dans ces conditions, du mal à faire leur deuil.

M. le rapporteur. Je suis d’autant plus sensible à cette demande qu’en Guadeloupe vit une communauté d’Indo-Guadeloupéens dont le rituel exige qu’ils lavent leurs morts. Mais une telle mesure présente un vrai danger sanitaire pour les vivants. Aussi a-t-on plutôt recours à des cercueils munis d’une vitre. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Article 29 (nouveau)
(art. L. 4251‑1 et L. 4433-7 à L. 4433-11 du code général des collectivités territoriales)

Extension du schéma régional d’aménagement, de développement durable
et d’égalité des territoires aux collectivités régies
par l’article 73 de la Constitution

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRE », consacre le renforcement des responsabilités des Régions et les charge d’élaborer la stratégie de développement économique de leur territoire (article 2). En optant pour une approbation du schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SREDEII) par arrêté du représentant de l’État dans la région, le législateur s’est clairement positionné dans une logique de décentralisation. Si cette orientation va dans le sens d’une plus grande adéquation entre les réalités locales et la définition des politiques publiques au plus près des citoyens, l’article 10 de cette même loi, relatif au schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires semble entrer en contradiction avec ces principes puisqu’il en exclut les régions d’outre-mer.

La loi n° 84-747 relative aux compétences des régions d’outre-mer donne en effet, depuis 1984, compétence aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution pour l’élaboration et l’adoption des schémas d’aménagement régionaux (SAR) approuvés par décret en Conseil d’État.

L’exclusion des régions d’outre-mer du champ d’application de l’article 10 de la loi NOTRE pénalise ces collectivités puisqu’elle les prive de la capacité de réactivité nécessaire à la bonne mise en œuvre de leurs politiques d’aménagement et de développement économique en les maintenant dans des rigidités procédurales d’un autre temps.

La loi de 1984 est, en effet, clairement obsolète au regard du mouvement de décentralisation continu, progressif, et réaffirmé par tous les Gouvernements. Les collectivités des outre-mer ne peuvent rester prisonnières d’un outil qui leur refuse tout dynamisme :

– le SAR est approuvé après une longue procédure par décret en conseil d’État, tandis que le SRADDET l’est par simple arrêté préfectoral ;

– la région possède davantage d’autonomie dans l’élaboration du SRADDET, d’où un document adapté aux réalités du terrain et révisé de manière plus souple ;

– le SRADDET autorise la possibilité de préciser dans les communes littorales les modalités de conciliation entre plusieurs objectifs ;

– enfin, le SRADDET permet de développer un volet économique en intégrant le SRDEII.

C’est pourquoi l’article 29, issu d’un amendement de votre rapporteur, propose l’extension du SRADDET aux régions ultramarines et l’abandon progressif de l’instrument daté qu’est le SAR. Les dispositions le concernant seront abrogées au terme d’une période de dix ans qui permettra une transition sans heurt vers le régime de droit commun.

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* *

La Commission examine l’amendement CL185 du rapporteur.

M. le rapporteur. Lors de la création des SRADDET par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), les outre-mer avaient été exclus du dispositif au motif qu’ils disposaient déjà d’un schéma d’aménagement régional (SAR), voté et adopté après décret en Conseil d’État. Mais la mise en place de ces SAR est une procédure bureaucratique, très lourde, qui porte de surcroît atteinte au principe de libre administration territoriale.

Le présent amendement propose donc l’extension des SRADDET aux régions ultramarines, et l’abandon progressif des SAR au terme d’une période de dix ans qui correspond à sa durée actuelle maximale.

La Commission adopte l’amendement. L’article 29 est ainsi rédigé.

Article 30 (nouveau)
(art. L. 621-12 du code minier)

Encadrement de la détention de matériel minier en Guyane

Prévue par la loi n° 2013-1029 du 15 novembre 2013 portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, la section 4 du chapitre Ier du titre II du livre IV du code minier apporte des restrictions aux conditions de détention et d’utilisation de matériels et de substances utilisées dans l’activité minière. Ces limitations s’appliquent, aux termes de l’article L. 621-12 du même code, sur le seul territoire du parc amazonien de Guyane (PAG).

L’orpaillage illégal et les dégradations environnementales qu’il entraîne constituent, en effet, un enjeu majeur de souveraineté et de protection des milieux face auxquels la nation ne peut laisser la collectivité de Guyane sans assistance. Il est toutefois apparu que l’adoption par le Parlement de mesures exceptionnelles applicables dans les limites du PAG avait simplement conduit les excavations irrégulières à se déplacer aux frontières de celui-ci. Les fleuves continuent à charrier détritus et mercure, qu’ils répandent sur l’ensemble du territoire guyanais.

Issu d’un amendement de Mme Chantal Berthelot, l’article 30 modifie par conséquent l’article L. 621-12 du code minier de façon à étendre les restrictions apportées à l’usage de matériel minier sur tout l’espace guyanais.

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La Commission en vient à l’amendement CL51 de Mme Chantal Berthelot.

M. Ibrahim Aboubacar. Cet amendement entend renforcer la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane.

M. le rapporteur. Nous sommes favorables à l’extension géographique du dispositif de lutte contre l’orpaillage à tout le territoire guyanais. En effet, le parc amazonien de Guyane est trop limité en superficie pour que les dispositions dérogatoires en faveur de la lutte contre l’orpaillage illégal puissent porter pleinement leurs fruits.

La Commission adopte l’amendement. L’article 30 est ainsi rédigé.

Article 31 (nouveau)
(art. 6 decies de l’ordonnance n° 58‑1100 du 17 novembre 1958
relative au fonctionnement des assemblées parlementaires)

Délégations parlementaires aux outre-mer

Les délégations aux outre-mer ont été conçues, dans chaque assemblée parlementaire, comme un instrument d’information, d’évaluation et de proposition permettant une expression institutionnelle, permanente et plurielle, des problématiques des outre-mer et favorisant la rencontre, sur ces questions, des élus des collectivités ultramarines et les autres parlementaires. Elles ont été créées, respectivement, par un arrêté modifiant l’instruction générale du Bureau du Sénat, le 16 novembre 2011, et par une délibération de la conférence des présidents de l’Assemblée nationale, le 17 juillet 2012.

Sur le fondement d’actes émanant ainsi d’organes internes à chacune des assemblées, les délégations ont conduit un important travail de réflexion et de proposition qui, sans interférer dans le jeu des procédures constitutionnelles, s’est révélé fort utile pour l’information générale du Parlement et la prise en compte des réalités ultramarines dans les travaux législatifs.

Par cette action, dans leur domaine propre, les délégations aux outre-mer ont rempli un rôle tout à fait analogue à la mission assignée aux délégations aux droits des femmes, dont l’origine remonte à la loi n° 99-585 du 12 juillet 1999. L’universalité structurelle des compétences de ces dernières a justifié le recours à la loi pour donner une base symbolique et juridique forte à leur existence ; la même considération justifie le passage de l’acte interne à la loi pour la définition du statut des délégations aux outre-mer.

L’article 31, issu d’amendements identiques présentés, d’une part, par M. Ibrahim Aboubacar et les députés du groupe Socialiste, écologiste et républicain et, d’autre part, par M. Jean-Claude Fruteau, président de la délégation aux Outre-mer de l’Assemblée nationale, consacre l’existence de ces délégations dans l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires. Votre rapporteur s’est rallié à ces amendements bien qu’il eût préféré, par courtoisie envers le Sénat, que les députés ne règlent que les affaires de l’Assemblée nationale et qu’ils laissent les sénateurs libres d’adopter, ou non, une démarche similaire.

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La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CL190 du rapporteur, et les amendements identiques CL59 de M. Jean-Claude Fruteau et CL273 de M. Ibrahim Aboubacar.

M. le rapporteur. Mon amendement propose d’inscrire dans la loi la Délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale, sans statuer sur le cas du Sénat afin de respecter son autonomie.

Les deux autres amendements, en revanche, statuent pour les deux assemblées, en proposant d’institutionnaliser ces délégations par leur inscription dans les règlements.

M. Ibrahim Aboubacar. Il me semble préférable d’adopter l’amendement du président de la Délégation aux outre-mer plutôt que l’amendement du rapporteur, quitte à le sous-amender.

Les amendements CL190 et CL123 sont retirés.

La Commission adopte les amendements identiques CL59 et CL273. L’article 31 est ainsi rédigé.

Article 32 (nouveau)
(art. 17 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs)

Zones tendues outre-mer

En matière de logement, les « zones tendues » correspondent à un espace de plus de 50 000 habitants dans laquelle la demande excède l’offre. Les zones tendues sont délimitées par le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013. Cette qualification emporte deux conséquences :

– d’une part, l’application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l’article 232 du code général des impôts. Cette taxe est acquittée par le propriétaire, l’usufruitier, le preneur à bail à construction ou à réhabilitation ou l’emphytéote qui dispose du logement depuis le début de la période de vacance. Elle représente 12,5 % de la valeur locative du bien la première année de la vacance, et 25 % à compter de la deuxième. Elle est prélevée au bénéfice de l’État ;

– d’autre part, diverses dérogations au droit commun du logement telles que la réduction à un mois, au lieu de trois mois en droit commun, du délai de préavis dans lequel un locataire doit faire part de sa volonté de quitter le logement qu’il occupe, ou encore un encadrement des loyers, conformément à l’article 17 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.

Alors que 1400 communes sont concernées dans le pays, aucune ne l’est dans les départements ou collectivités d’outre-mer. Considérant que, dans ces territoires, la demande locative excède fréquemment l’offre, l’article 32, issu d’un amendement présenté par M. Philippe Naillet, intégrer les outre-mer dans ces zones tendues.

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La Commission examine l’amendement CL137 de M. Philippe Naillet.

M. Philippe Naillet. Une « zone tendue » est une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants dans laquelle la demande en logement excède l’offre.

Le décret du 10 mai 2013 a créé un nouveau dispositif de préavis, lequel est réduit à un mois lorsque le logement se trouve dans ces zones tendues ; mille quatre cents communes sont concernées, aucune dans les départements ou collectivités d’outre-mer.

Or le « plan logement outre-mer 2015-2020 » rappelle que plus de 90 000 logements supplémentaires sont nécessaires dans les outre-mer. Le présent amendement permet donc d’intégrer les outre-mer dans ces zones tendues, afin de qu’ils puissent bénéficier de ce délai de préavis d’un mois.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement. L’article 32 est ainsi rédigé.

Article 33 (nouveau)
(art. 135 de la loi n° 2014‑366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové)

Report de trois ans du délai de conversion des plans d’occupation des sols en plans locaux d’urbanisme dans les communes d’outre-mer

Le plan d’occupation des sols (POS) a été créé par la loi n° 67-1253 d’orientation foncière du 30 décembre 1967. Son élaboration a été transférée aux communes avec la décentralisation. En créant le plan local d’urbanisme (PLU) et la carte communale, la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000, dite « loi SRU », souhaitait que le POS soit progressivement remplacé par l’un de ces deux documents, sans pour autant prévoir de caducité à une date certaine.

L’article 135 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) a finalement fixé au 24 mars 2017 la date au-delà de laquelle le règlement national d’urbanisme s’applique sur le territoire des communes qui n’ont toujours pas adopté de plan local d’urbanisme. La sanction du retard consiste ainsi en un retrait de la compétence, qui fait retour à l’État.

Considérant que les contraintes particulières existant en outre-mer font que de nombreuses communes se trouvent en difficulté pour respecter ce délai, l’article 33, issu d’un amendement du rapporteur, repousse pour ce qui les concerne de trois années la date-butoir prévue par la loi « ALUR », pour la fixer au 24 mars 2020.

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La Commission examine l’amendement CL234 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit de proroger pour trois ans le délai dans lequel les communes doivent transformer leur plan d’occupation des sols (POS) en plan local d’urbanisme (PLU). Sans cette prorogation avant mars 2017, de nombreuses communes qui n’ont pu mener à bien ce processus de révision perdront cette compétence au profit de l’État.

La Commission adopte l’amendement. L’article 33 est ainsi rédigé.

Article 34 (nouveau)
Expérimentation d’un dispositif d’attraction des talents

L’article 34, issu d’un amendement du rapporteur, prévoit l’expérimentation, pour une durée de trois ans, d’une promotion de la citoyenneté économique dans les départements et régions d’outre-mer qui en font la demande au représentant de l’État.

Ce dispositif d’attraction des talents comprend la délivrance d’une carte de séjour pluriannuelle portant la mention « Passeport talent » prévue à l’article L. 313-20 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ainsi que l’accompagnement par une structure labellisée dans le cadre du développement de son projet d’entreprise et un enseignement intensif de la langue française. Les services de l’État et des collectivités à l’étranger sont chargés de repérer les personnes susceptibles de développer des projets bénéficiant aux territoires d’accueil.

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La Commission examine l’amendement CL191 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement prévoit la promotion, à titre expérimental, de la citoyenneté économique dans les territoires d’outre-mer.

La Commission adopte l’amendement. L’article 34 est ainsi rédigé.

Après l’article 34

La Commission est saisie de l’amendement CL122 de M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. Cet amendement a pour objectif d’établir, par le biais d’un rapport, un état des lieux exhaustif de la situation sur l’ensemble des outre-mer en matière d’habitants sans titre et d’occupation illicite du domaine public, afin que soient préconisées des solutions adaptées aux réalités de chaque territoire.

Je rappelle que la Guyane subit de plein fouet les effets d’une crise migratoire qui a conduit près de dix mille personnes sur son territoire en moins de trois mois, ce qui pose de vrais problèmes en termes de santé publique et de scolarisation, ainsi qu’en matière d’habitat, les squats et les habitations insalubres se multipliant.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Les données juridiques sont déjà suffisamment nombreuses sur la question, au premier rang desquelles les travaux réalisés par Serge Letchimy dans le cadre de la loi du 23 juin 2011 sur l’habitat indigne.

M. Ibrahim Aboubacar. Si la loi du 14 octobre 2015 d’actualisation du droit des outre-mer a réglé la question pour la Guadeloupe et la Martinique, nous réclamons des avancées en ce qui concerne Mayotte et la Guyane. Le Sénat a produit sur la question un volumineux rapport. Le Gouvernement doit trancher.

M. Gabriel Serville. Nous souhaitons contraindre le Gouvernement à réagir face à la situation périlleuse dans laquelle se trouve la Guyane.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Je comprends l’inquiétude de Gabriel Serville compte tenu de la situation en Guyane. J’indique néanmoins que, si, lorsque nous avons voté à l’unanimité la loi sur l’habitat insalubre, nous n’avions pas rendu obligatoire l’inventaire commune par commune. C’est chose faite depuis la loi sur l’actualisation du droit. Il est donc possible aujourd’hui de s’appuyer sur ces inventaires pour élaborer une stratégie appropriée.

La Commission rejette l’amendement.

TITRE XI (nouveau)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DROITS DES FEMMES

Le présent titre, issu d’un amendement de votre rapporteur, comprend des dispositions relatives aux droits des femmes.

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La Commission examine l’amendement CL298 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’introduire dans la loi un nouveau titre relatif aux droits des femmes.

Nous estimons en effet que l’égalité n’est pas seulement un enjeu économique et que la loi ne peut faire l’économie, en matière d’égalité, d’une approche paritaire et sexuée.

La Commission adopte l’amendement. Le titre XI est ainsi rédigé.

Article 35 (nouveau)
Expérimentation d’observatoires des violences faites aux femmes

Issu d’un amendement de Mme Monique Ophée, rapporteure pour avis au nom de la commission des Affaires sociales, cet article additionnel propose d’expérimenter dans les outre-mer la création d’observatoires des violences faites aux femmes, à l’image de l’observatoire départemental des violences envers les femmes créé dans le département de Seine-Saint-Denis en 2002.

Ces observatoires seraient chargés de soutenir les femmes pour la mise en œuvre d’une ordonnance de protection, de prendre des mesures d’accompagnement protégé des enfants, de trouver des solutions d’hébergement aux femmes victimes de violences conjugales, de soutenir la diffusion du téléphone « grave danger » (TGD) qui est remis par le Procureur aux femmes confrontées à des violences conjugales, de favoriser la distribution de bons de taxis, d’offrir des consultations psycho-traumatologique, de mener des enquêtes sur les comportements sexistes et violents envers les jeunes filles, de lutter contre les mariages forcés ou encore d’intervenir en milieu scolaire pour favoriser la lutte contre le sexisme.

De nombreux observatoires de ce type existent aujourd’hui en France hexagonale.

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La Commission est saisie de l’amendement CL265 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphée, rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales. Il s’agit d’encourager la création d’observatoires des violences faites aux femmes dans les différents départements d’outre-mer.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement. L’article 35 est ainsi rédigé.

Après l’article 35

La Commission examine l’amendement CL266 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphée, rapporteure pour avis. Les outre-mer sont souvent exclus des études nationales – que celles-ci concernent les violences faites aux femmes ou les grossesses précoces – au motif que cela reviendrait trop cher. Il convient donc de trouver des financements pour inclure ces territoires dans les études.

M. le rapporteur. Une telle disposition relève du champ réglementaire.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL267 de la commission des Affaires sociales.

Mme Monique Orphée, rapporteure pour avis. Cet amendement concerne les campagnes de sensibilisation sur la contraception et les grossesses précoces.

M. le rapporteur. J’en demande le retrait pour les mêmes raisons que précédemment.

L’amendement est retiré.

TITRE XII (nouveau)
DISPOSITIONS DE NATURE FISCALE

Le présent titre, issu d’un amendement de votre rapporteur, regroupe des dispositions de nature fiscale. Il comprend seize articles.

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La Commission adopte l’amendement CL299 du rapporteur, insérant dans le projet de loi un titre XII ainsi rédigé : « Dispositions de nature fiscale ».

Article 36 (nouveau)
(art. L. 272-1 du code forestier)

Exonération des collectivités territoriales de Guyane des frais de garderie et d’administration des forêts

Le présent article additionnel, adopté à l’initiative de M. Gabriel Serville, vise à exonérer les forêts des collectivités territoriales en Guyane des frais de garderie et d’administration normalement versés à l’Office national des forêts (ONF).

1. L’état du droit

Le régime forestier emporte notamment la gestion par l’ONF, dont c’est la première mission (article L. 212-2 du code forestier), selon un document d’aménagement approuvé par arrêté (article L. 212-1 du même code). L’arrêté d’aménagement tient compte d’objectifs de gestion durable, fixe l’assiette des coupes et peut interdire ou soumettre à conditions dans certaines zones les activités qui compromettent la réalisation de ses objectifs. La concession dans les forêts d’État de droits d’usage de toute nature pour tout motif est interdite (article L. 241-1 du même code).

Des dispositions pénales propres protègent les forêts soumises au régime forestier et permettent de sanctionner toute destruction de l’état boisé, occupation sans titre et empiètement de toute nature. Des amendes et des remises en l’état primitif aux frais du délinquant sont prévues.

Les forêts domaniales ultramarines soumises au régime forestier, littorales ou non, sont imprescriptibles et aliénables seulement en vertu d’une loi comme dans le droit commun (article L. 213-1 du code forestier et L. 3211-5 du code général de la propriété des personnes publiques) avec des cas dérogatoires d’aliénation par décret en Conseil d’État pour des parcelles de moins de 150 hectares sans intérêt environnemental ou humain particulier. Certaines sont même strictement inaliénables comme à La Réunion (article L. 274-1 pour les forêts du département) et à Mayotte (article L. 275-2 pour les forêts de l’État et du Département de Mayotte).

La Guyane, dont les 2,4 millions d’hectares du domaine forestier permanent (DFP) au-delà de la bande littorale relèvent du régime forestier, se distingue par :

– un mécanisme de cession gratuite de forêts aux collectivités territoriales en raison du rôle social ou environnemental que ces forêts jouent au plan local (articles L. 272-2 du code forestier et L. 5142-2 du code général de la propriété des personnes publiques). La cession n’entraîne pas de sortie du régime forestier et la collectivité se substitue à l’État dans ses droits et obligations à l’égard des tiers ;

– un dispositif de concession ou de cession gratuite à des personnes morales en vue de leur utilisation par les communautés d’habitants qui tirent traditionnellement leurs moyens de subsistance de la forêt (articles L. 272-5 du code forestier et L. 5143-1 du code général de la propriété des personnes publiques) ;

– une possibilité de reconnaître des droits d’usage collectif à ces mêmes communautés (art. L. 272-4 du code forestier).

Or, selon le rapport de la délégation sénatoriale à l’outre-mer sur le domaine de l’État en outre-mer rendu public le 18 juin 2015 (64), contrairement aux autres départements français, aucune forêt de la collectivité de Guyane ne serait gérée par l’ONF. Il n’existerait pourtant aucun obstacle juridique, le code forestier permettant la création de forêts communales sous régime forestier sur demande de la commune et après arrêté préfectoral.

Le point d’achoppement des négociations est notamment la participation financière des communes à la gestion de la forêt. En effet, dans le droit commun, la répartition des responsabilités est telle que :

– la commune propriétaire d’une forêt fixe les orientations stratégiques de la gestion, décide du programme des coupes de bois et de leurs modes de vente ainsi que du programme des travaux dont elle assure aussi la maîtrise d’ouvrage, accorde les concessions et encaisse les produits de sa forêt ;

– l’ONF assure la surveillance, élabore et applique les documents d’aménagement forestier, prépare les ventes, fixe les conditions techniques d’occupation et d’exploitation, propose le programme annuel des travaux en cohérence avec l’aménagement et émet les factures des ventes de bois. En contrepartie, l’ONF reçoit un versement compensateur de l’État et des frais de garde de la part de la commune.

C’est cette compensation financière à hauteur de deux euros l’hectare que ne peuvent assumer les communes, en particulier en Guyane, car elles sont victimes d’un « effet de ciseau » entre des ressources propres très faibles et des charges très lourdes dues à l’immensité de leur territoire et aux besoins d’équipement de la population. L’application du dispositif national de frais de garde n’est donc pas adaptée à la Guyane, alors que c’est précisément le territoire qui pourrait tirer le plus de parti d’une exploitation de sa forêt.

Aussi, le rapport de la délégation sénatoriale précité a-t-il proposé d’introduire une exonération des frais de garde normalement dus à l’ONF pour l’outre-mer, au moins à titre temporaire pour enclencher la dynamique de création de forêts communales, le temps que les ressources tirées des ventes de bois et des concessions profitent aux communes.

Cette mesure serait la contrepartie de l’exonération temporaire de la taxe foncière sur les propriétés non bâties dont bénéficie l’ONF jusqu’en 2018. En effet, aux termes de l’article 1395 H du code général des impôts, dans les cinq départements d’outre-mer, les forêts d’État sont exonérées de la taxe foncière sur les propriétés non bâties perçue au profit des communes et de leurs EPCI à concurrence de 80 % pour les années 2009 à 2015 et, respectivement, à concurrence de 70 %, 60 % et 50 % pour les impositions établies au titre de 2016, 2017 et 2018.

2. Le dispositif proposé par votre Commission

Le présent article additionnel, adopté à l’initiative de M. Gabriel Serville après avis favorable de votre rapporteur, vise à exonérer les forêts des collectivités territoriales en Guyane des frais de garderie et d’administration normalement versés à l’Office national des forêts (ONF).

Pour ce faire, il modifie l’article L. 272-1 du code forestier, qui indique quelles sont les dispositions de ce code qui ne sont pas applicables en Guyane, en y insérant un renvoi au 2° de l’article L. 223-1, relatif aux frais de garde perçus par l’ONF.

La perte de recettes pour l’ONF est gagée par une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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La Commission examine l’amendement CL126 de M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. Dans un souci d’égalité réelle, cet amendement vise à exonérer les forêts des collectivités territoriales en Guyane des frais de garderie et d’administration normalement versés à l’Office national des forêts (ONF).

En effet, les projets de forêts communales en Guyane sont obérés par le dispositif national des frais de garderie censés compenser pour l’ONF les charges dues à l’application sous son autorité du régime forestier. Les finances des communes guyanaises subissent un effet de ciseau avec de faibles rentrées fiscales et de lourdes charges dues aux besoins en équipements collectifs d’une population en forte croissance. Elles ne peuvent donc assumer des frais représentant 2 euros par hectare.

C’est pourquoi le rapport de la Délégation sénatoriale à l’outre-mer sur le domaine de l’État en outre-mer, rendu public le 18 juin 2015, propose de stimuler la création de forêts communales en les exonérant de frais de garderie, ce qui génèrera des ressources pour les communes, tout en les rendant pilotes de l’exploitation du bois sur leur territoire. Par ailleurs, cette exonération au bénéfice des communes serait une juste contrepartie pour l’absence de versement de taxe sur le foncier non bâti par l’ONF, au mépris des dispositions du code général des impôts.

M. le rapporteur. Dans une région forestière comme la Guyane, les communes à faibles ressources sont soumises à des droits de garderie sans commune mesure avec ce qui se pratique dans l’Hexagone. Faut-il pour autant obérer les ressources de l’ONF ? L’État devra lui accorder les crédits nécessaires pour faire son travail. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 36 est ainsi rédigé.

Article 37 (nouveau)
(3° du III de l’art. 44 quaterdecies du code général des impôts)

Ajout du secteur du bâtiment et des travaux publics dans la liste des secteurs prioritaires bénéficiant d’exonérations bonifiées dans les zones franches d’activités en Guadeloupe, en Martinique ou à La Réunion

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques après avis favorable de votre rapporteur, autorise les entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics de Guadeloupe, de Martinique et de La Réunion à bénéficier des exonérations prévues par le 3° du III de l’article 44 quaterdecies du code général des impôts, dans le cadre des zones franches d’activités.

1. L’état du droit

L’article 4 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (dite « LODEOM »), codifié à l’article 44 quaterdecies du code général des impôts (CGI), a instauré, sous certaines conditions, un abattement sur les bénéfices provenant d’exploitations situées en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à Mayotte ou à La Réunion.

Cette mesure s’inscrit dans un cadre plus global d’aides fiscales, constituant le régime fiscal des zones franches d’activités (ZFA) et concernant tout à la fois l’impôt sur le revenu ou l’impôt sur les sociétés, l’ancienne taxe professionnelle et les actuelles cotisation foncière des entreprises et cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la taxe foncière sur les propriétés bâties et la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Ce dispositif d’aide d’État, qui n’est pas soumis à la règle de minimis, a été déclaré par la Commission européenne compatible avec le droit de l’Union le 19 novembre 2009.

Pour être éligibles, le I de l’article 44 quaterdecies du CGI précise que les entreprises doivent, à la clôture de l’exercice au titre duquel est appliqué l’abattement, employer moins de deux cent cinquante salariés et réaliser un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions d’euros.

Cette mesure repose sur un mécanisme à « double étage ».

Le premier étage du dispositif ZFA couvre l’ensemble des entreprises de ces départements, sous la condition que leur activité s’exerce dans un des secteurs ouvrant droit à la réduction d’impôt au titre de l’investissement productif outre-mer. Le II de l’article 44 quaterdecies du CGI précise que l’activité principale de l’exploitation doit relever de l’un des secteurs d’activité éligibles à la réduction d’impôt prévue à l’article 199 undecies B du même code ou correspondre à l’une des activités suivantes : comptabilité, conseil aux entreprises, ingénierie ou études techniques à destination des entreprises. Ces entreprises peuvent faire l’objet d’un abattement de 50 % au titre des exercices ouverts entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2014. L’abattement est fixé à 40 % pour les exercices ouverts en 2015, à 35 % pour les exercices ouverts en 2016 et à 30 % pour les exercices ouverts en 2017. Il est plafonné à 150 000 euros pour un exercice ou une période d’imposition de douze mois.

Le dispositif est doublé d’un second étage, réservé aux entreprises éligibles au ZFA qui satisfont, en sus, à des critères spécifiques fixés par le III de l’article 44 quaterdecies du CGI, soit géographiques (1° et 2°), soit répondant à un secteur prioritaire (3°). Actuellement, ces secteurs prioritaires sont les suivants : Recherche et développement ; Technologies de l’information et de la communication ; Tourisme, y compris les activités de loisirs s’y rapportant ; Agro-nutrition ; Environnement et Énergies renouvelables.

Les entreprises de ces secteurs bénéficient d’avantages fiscaux bonifiés. Le taux de l’abattement est ainsi porté à 80 % au titre des exercices ouverts entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2014, à 70 % au titre des exercices ouverts en 2015, à 60 % au titre des exercices ouverts en 2016 et à 50 % au titre des exercices ouverts en 2017 ; d’autre part, l’abattement appliqué est, dans ce cas, plafonné à 300 000 euros pour un exercice ou une période d’imposition de douze mois. Lorsque l’entreprise réalise des bénéfices soumis à des taux d’abattement différents, le total ne peut excéder 300 000 euros, dont 150 000 euros au plus sur les bénéfices éligibles à l’abattement de droit commun.

2. Le dispositif proposé par votre Commission

Le présent article additionnel complète la liste des secteurs prioritaires mentionnés au 3° du III de l’article 44 quaterdecies pour y inclure le secteur du « bâtiment et des travaux publics », qui connaît une grave crise depuis quelques années.

Les entreprises de ce secteur pourront donc bénéficier des avantages fiscaux bonifiés dans le cadre des zones franches d’activité en Guadeloupe, en Martinique ou à La Réunion.

La perte de recettes en résultant pour l’État est gagée par une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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La Commission examine l’amendement CL276 du rapporteur pour avis au nom de la commission des Affaires économiques.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Cet amendement propose d’ajouter le BTP aux secteurs prioritaires reconnus par la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (LODEOM).

M. le rapporteur. Avis favorable. Je soutiens toutes les mesures susceptibles de dynamiser l’économie sans nous faire courir de risques de fraude et sans effet pervers.

La Commission adopte l’amendement. L’article 37 est ainsi rédigé.

Article 38 (nouveau)
(art. 199 undecies A du code général des impôts)

Réduction d’impôt au titre des travaux de réhabilitation portant sur des logements achevés depuis plus de vingt ans
dans les départements d’outre-mer

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de votre rapporteur, restaure l’éligibilité des départements d’outre-mer au bénéfice de la réduction d’impôt prévue par le e) du 2 de l’article 199 undecies A du code général des impôts au titre des travaux de réhabilitation portant sur des logements achevés depuis plus de vingt ans.

Le e) du 2 de l’article 199 undecies A du code général des impôts ouvre une réduction d’impôt à l’occasion de travaux de réhabilitation de logements achevés depuis plus de vingt ans, lorsque le propriétaire s’engage à l’occuper à titre d’habitation principale pendant au moins cinq ans, ou à le louer pendant cette même durée à des personnes qui en font leur habitation principale. Cette réduction d’impôt s’applique également aux travaux de confortation des logements contre le risque sismique.

Le taux de la réduction d’impôt est fixé à 18 % et il peut être majoré dans certains cas, notamment lorsque le logement est situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville. La réduction d’impôt est effectuée pour le calcul de l’impôt dû au titre de l’année d’achèvement des travaux et des quatre années suivantes. Enfin, les sommes versées à ce titre sont prises en compte dans la limite d’un plafond fixé à 2 448 euros par mètre carré de surface habitable.

Alors que l’ensemble des outre-mer y étaient auparavant éligible, l’article 110 de la loi de finances pour 2016 n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 a exclu les seuls départements d’outre-mer du bénéfice de ce dispositif. La suppression de cet avantage fiscal est entrée en vigueur le 1er janvier 2016 ; son bénéfice a toutefois été maintenu pour les travaux pour lesquels des acomptes au moins égaux à 50 % du prix ont été versés au 31 décembre 2015, sous la condition qu’ils soient achevés au plus tard le 31 décembre 2017 – soit un délai de deux années pour terminer les travaux.

Le présent article additionnel propose la restauration d’une mesure nécessaire à la rénovation du parc privé, en particulier dans les zones marquées par un risque sismique important, puisque le Plan Séisme en vigueur depuis 2011 classe en « risque fort », de niveau 5/5, les départements de Guadeloupe et Martinique, et en « risque modéré », de niveau 3/5, Mayotte.

La prévention de ce risque naturel d’une particulière acuité en outre-mer –aucun département français n’est classé en « risque fort » sur le continent européen – justifierait un soutien du Gouvernement en séance publique, permettant de lever le gage financier. Pour mémoire, la dépense fiscale associée à cette réduction d’impôt s’élevait à 185 millions d’euros en 2015.

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La Commission examine l’amendement CL186 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il existe un dispositif de défiscalisation applicable aux travaux de réhabilitation des logements achevés depuis plus de vingt ans. L’an dernier, le Gouvernement l’a supprimé sans concertation dans les départements d’outre-mer, par l’article 110 de la loi de finances pour 2016, afin de financer le logement social. Or il s’est rendu compte que ce dispositif fonctionnait très bien et qu’il fallait le rétablir. Tel est l’objet du présent amendement.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Je soutiens cet amendement, en précisant que la situation est grave dans les départements d’outre-mer : le nombre de logements vacants y est exceptionnellement élevé ; il est par exemple de 12 000 à la Martinique, le nombre étant à peu près équivalent à la Guadeloupe.

Je vois poindre le débat sur l’opportunité de prolonger des mesures de défiscalisation dans un contexte où il est nécessaire de réaliser des économies budgétaires. La prolongation des dispositifs permettant de financer le logement social a été acquise pour une durée donnée, différente dans les territoires d’outre-mer et les départements d’outre-mer. Cette prolongation nous permet de respirer, pour pouvoir continuer la bataille sur la défiscalisation. Cependant, les propriétaires occupants souhaitant réhabiliter leur logement ne peuvent plus bénéficier de cette défiscalisation dans les départements d’outre-mer. D’où l’importance de cet amendement.

La Commission adopte l’amendement. L’article 38 est ainsi rédigé.

Article 39 (nouveau)
(art. 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W du code général des impôts)

Suppression de la distinction entre investissement initial et investissement de renouvellement pour bénéficier de diverses réductions d’impôts au titre d’investissements productifs outre-mer

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de M. Serge Letchimy après avis favorable du rapporteur, propose de supprimer la référence à la notion d’ « investissement initial », pour bénéficier des réductions d’impôts au titre d’investissements productifs outre-mer prévues par les articles 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W du code général des impôts (CGI).

1. L’évolution récente des régimes de défiscalisation des investissements productifs outre-mer

L’article 199 undecies B du CGI prévoit un dispositif de réduction d’impôt sur le revenu pour les investissements productifs réalisés outre-mer. Cette réduction s’applique aux investissements réalisés par les exploitants dont les bénéfices sont soumis à l’impôt sur le revenu et qui exercent une activité agricole, industrielle, commerciale ou artisanale. Son taux est de 38,25 % dans la généralité des cas, mais il peut être majoré pour les investissements réalisés dans certains départements ou dans certains secteurs.

La réduction d’impôt s’applique également aux investissements réalisés dans le cadre de « schémas locatifs ». Dans ce cas, les biens productifs sont donnés en location à l’exploitant ultra-marin pour une durée au moins égale à cinq ans (ou la durée normale d’utilisation du bien loué si elle est inférieure) : les propriétaires des biens non utilisateurs – en pratique, le plus souvent, les associés d’une société de personnes qui souhaitent minorer leur impôt, et qui font appel à un cabinet de défiscalisation pour réaliser le montage de l’opération et sa gestion – peuvent bénéficier de la réduction d’impôt sous réserve de la rétrocession d’une partie de l’avantage fiscal à l’entreprise locataire, sous forme de diminution du loyer ou du prix de cession du bien. Ce taux de rétrocession était de 62,5 % de la réduction d’impôt pour les investissements supérieurs à 300 000 euros et de 52,63 % dans les autres cas, avant l’application de la réforme de la loi de finances pour 2014 (voir infra).

L’application de cette réduction d’impôt est soumise à un agrément de l’administration fiscale dès lors que les investissements sont réalisés dans certains secteurs d’activité dits « sensibles », tels que les transports ou la rénovation d’hôtels. Dans les autres secteurs, l’agrément préalable n’est requis que pour les investissements supérieurs à un million d’euros ; ce seuil est abaissé à 250 000 euros pour les investissements intermédiés (réalisés via les schémas locatifs mentionnés supra).

Par ailleurs, en application de l’article 217 undecies du CGI, les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés peuvent déduire de leur bénéfice imposable le montant de certains investissements qu’elles réalisent dans des départements d’outre-mer (DOM), soit directement, soit via la souscription de parts de certaines sociétés. Cette déduction est étendue par l’article 217 duodecies du CGI aux sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés en France qui réalisent des investissements dans les collectivités d’outre-mer (COM) et en Nouvelle-Calédonie. Le dispositif s’applique, en ce qui concerne l’obligation d’obtenir un agrément préalable, sous des conditions de seuil sensiblement les mêmes que celles prévues par l’article 199 undecies B. Les investissements réalisés directement par une société ne sont pas nécessairement exploités par elle. Elle peut en effet les donner en location pendant au moins cinq ans et bénéficier de la déduction, à condition de rétrocéder 75 % de l’avantage fiscal à l’exploitant locataire du bien.

À compter du printemps 2013, les régimes de défiscalisation outre-mer ont fait l’objet de travaux approfondis dans le cadre de la démarche de modernisation de l’action publique (MAP). Les avantages fiscaux existants faisaient en effet l’objet de critiques, portant notamment sur leur ciblage insuffisant, sur le caractère lacunaire de l’évaluation de leur impact économique et, surtout, sur l’« évaporation fiscale » résultant de l’intermédiation des investissements, au profit de contribuables généralement très aisés et de cabinets de défiscalisation, pratique qui aboutit à ce que moins des deux tiers de la dépense fiscale bénéficient effectivement aux exploitants ultra-marins dans le cadre des schémas locatifs. De surcroît, la décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 2013, qui a censuré la part variable (fixée à 4 %) du plafonnement global des avantages fiscaux au titre des investissements ultra-marins, a suscité des craintes sur le financement de ces investissements.

Les travaux menés ont abouti à une réforme réalisée dans le cadre de la loi de finances pour 2014.

S’agissant des dispositifs portant sur les investissements productifs, à savoir les articles 199 undecies B et 217 undecies, ont notamment été apportées les modifications suivantes :

– ces dispositifs ont été réservés, lorsque l’activité de l’exploitant est exercée dans un DOM, aux entreprises ayant réalisé un chiffre d’affaires inférieur à 20 millions d’euros au titre du dernier exercice clos ;

– dans le cadre des investissements intermédiés, le taux de rétrocession de l’avantage fiscal au bénéfice des exploitants ultra-marins a été augmenté ;

– les dépenses éligibles ont été réduites à la marge (en ont été exclus les logiciels qui sont nécessaires à l’utilisation des investissements éligibles dans le cadre des travaux de rénovation hôtelière et les véhicules qui ne sont pas strictement indispensables à l’activité de l’exploitant), tandis qu’une condition de durée minimale d’affectation des investissements réalisés dans le cadre de concessions de service public à caractère industriel et commercial a été instaurée ;

– la base de calcul de l’avantage a été aménagée, la notion de « subvention publique » – laquelle doit être déduite de la base éligible – étant remplacée par celle d’« aide publique », plus large, incluant par exemple les aides perçues par les entreprises dans le cadre de programmes européens ; le fait générateur de l’avantage fiscal a également été modifié, la notion de « réalisation » de l’investissement laissant la place à la notion de « mise en service », plus claire ;

– enfin, une distinction a été établie entre investissements initiaux au sens de l’article 2 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission, du 17 juin 2014, déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité, et investissements dits « de renouvellement » : pour ces derniers, l’assiette de l’avantage fiscal est minorée du montant correspondant à la valeur réelle du bien remplacé.

Outre ces aménagements, l’article 21 de la loi de finances pour 2014 a institué un crédit d’impôt, codifié à l’article 244 quater W, en faveur des exploitants qui réalisent, dans un département d’outre-mer, un investissement productif dans un secteur éligible – ces secteurs étant définis par renvoi aux dispositions prévues dans le cadre de l’article 199 undecies B du CGI. Cet investissement doit être affecté pendant au moins cinq ans à l’exploitation de l’entreprise – ou pendant sa durée normale d’utilisation, lorsqu’elle est inférieure.

Ce crédit d’impôt est exclusif, pour un même investissement, du bénéfice des articles 199 undecies B et 217 undecies. Les exploitants réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 20 millions d’euros peuvent opter soit pour les dispositifs prévus à ces deux derniers articles, soit pour le crédit d’impôt – l’option étant irrévocable pour un même investissement. En revanche, les exploitants dont le chiffre d’affaires est supérieur à 20 millions d’euros ne sont plus éligibles qu’au crédit d’impôt.

Le taux du crédit d’impôt est fixé à 38,25 % pour les investissements réalisés par une entreprise relevant de l’impôt sur le revenu – ce taux étant porté à 45,9 % pour les investissements réalisés dans les départements de Guyane et de Mayotte –, et à 35 % pour les entreprises relevant de l’impôt sur les sociétés.

Pour les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu, dans le cadre de l’article 199 undecies B, le taux de la réduction d’impôt est de 38,25 % en cas de défiscalisation directe ; en revanche, lorsque la défiscalisation est intermédiée, le taux de la réduction d’impôt est généralement de 45,3 %, mais 29,9 % seulement bénéficient à l’exploitant, sous forme de rétrocession. Par rapport à la défiscalisation dans le cadre de l’article 199 undecies B, le crédit d’impôt s’avère donc soit équivalent – s’agissant de la défiscalisation directe – soit plus favorable – s’agissant de la défiscalisation intermédiée. Dans ce dernier cas, l’« évaporation fiscale » de 15,4 points se répartit entre 8,35 points au profit de l’exploitant (38,25 – 29,9) et 7,05 points au profit de l’État (45,3 – 38,25).

Pour les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés, le taux du crédit d’impôt de 35 % procure un avantage toujours supérieur à la défiscalisation prévue dans le cadre de l’article 217 undecies. Pour un investissement de 100, le montant de l’avantage pour l’exploitant est en effet de 33,1/3 en cas de déduction directe (soit le taux normal de l’impôt sur les sociétés), de 25,7 en cas de déduction intermédiée (soit le taux de rétrocession de 77 %, appliqué au taux de 33,1/3 %), au lieu de 35 pour le crédit d’impôt.

Le bénéfice du crédit d’impôt accordé à l’exploitant est subordonné à un agrément préalable dans les mêmes conditions que celles prévues pour l’article 217 undecies.

Le crédit d’impôt est imputable sur l’impôt sur le revenu ou sur l’impôt sur les sociétés dont l’exploitant est redevable au titre de l’année au cours de laquelle le fait générateur est intervenu ; lorsque le montant du crédit d’impôt est supérieur à l’impôt dû, l’excédent est immédiatement restitué. Un dispositif de préfinancement calqué sur celui applicable pour le crédit d’impôt compétitivité emploi est par ailleurs prévu afin de permettre à l’exploitant de disposer, avant la liquidation de l’impôt, du montant du crédit d’impôt.

Seuls sont éligibles les investissements réalisés dans un DOM – l’exclusion des COM et de la Nouvelle-Calédonie se justifiant par le statut fiscal autonome de ces territoires. De ce fait, le seuil de 20 millions d’euros, au-delà duquel les entreprises ne peuvent bénéficier des dispositifs prévus aux articles 199 undecies B et 217 undecies du CGI, ne trouve pas à s’appliquer pour les investissements réalisés dans les COM et en Nouvelle-Calédonie.

Les dispositions de l’article 21 de la loi de finances pour 2014 devaient entrer en vigueur au 1er juillet 2014, en même temps que les nouvelles lignes directrices de l’Union européenne pour les aides à finalité régionale. Toutefois, leur application était subordonnée à leur validation préalable par la Commission européenne.

Or, la Commission européenne n’a pas procédé à cette validation dans les délais prévus, tout en acceptant la prorogation des régimes existants, prévus par les articles 199 undecies B, 199 undecies C et 217 undecies du CGI, pour la période comprise entre le 1er juillet et le 31 décembre 2014 – sous réserve du respect des nouveaux plafonds d’intensité d’aide fixés dans les lignes directrices concernant les aides à finalité régionale pour la période 2014-2020.

Compte tenu des délais pour obtenir cette validation, et sur la suggestion de la Commission européenne, le Gouvernement a décidé de placer les régimes de défiscalisation prévus par les articles 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W sous la condition du respect du règlement européen général d’exemption par catégorie (RGEC) à compter du 1er janvier 2015.

Aussi, l’article 67 de la dernière loi de finances rectificative pour 2014 a modifié les articles 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W du CGI, en introduisant dans chacun d’entre eux une disposition générale prévoyant que le bénéfice de l’avantage fiscal était subordonné au respect du règlement (UE) n° 651/2014 du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité, et en apportant d’autres modifications.

Cette réforme s’est traduite par les aménagements suivants :

– les aides en faveur des entreprises en difficulté étant exclues du champ d’application du RGEC, les investissements exploités par des entreprises se trouvant dans une telle situation ne sont désormais plus éligibles au bénéfice des dispositifs prévus par les trois articles précités ;

– le RGEC prévoyant que l’aide à finalité régionale ne doit concerner que les aides octroyées pour un investissement initial, le bénéfice de l’aide fiscale prévu par les trois articles précités exclut les investissements de remplacement.

Toutefois, il peut apparaître curieux de limiter l’application des trois dispositifs fiscaux précités aux investissements initiaux, pour assurer leur compatibilité avec les dispositions du RGEC, sans supprimer parallèlement les dispositions relatives au calcul de l’assiette des investissements de remplacement, introduites par l’article 21 de la loi de finances pour 2014.

Le Gouvernement a néanmoins précisé, à l’époque, que le maintien de la notion d’investissement de remplacement dans les dispositifs existants s’expliquait par deux raisons. En premier lieu, la définition des « investissements initiaux » dans le cadre du RGEC s’avère plus large que dans notre droit interne – en d’autres termes, un « investissement de remplacement », dans le cadre de l’article 199 undecies B par exemple, pourrait ne pas être considéré comme tel dans le cadre du RGEC. Ensuite, le RGEC ne trouve pas à s’appliquer dans les COM (à l’exception de Saint-Martin) et en Nouvelle-Calédonie : c’est aussi à ce titre que les dispositions sur les investissements de remplacement ont été maintenues pour les articles 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W du CGI.

Ces dispositifs de défiscalisation des investissements productifs ont été validés par la Commission européenne le 2 mars 2015.

Interrogé par le Sénateur Georges Patient sur la pérennité des dispositifs de défiscalisation des investissements productifs en outre-mer, et en particulier sur les conséquences de l’application du RGEC à ces dispositifs, le Gouvernement a indiqué, dans une réponse du 3 décembre 2015, que les négociations avec la Commission européenne avaient « permis d’acter le principe d’une révision durable du RGEC, dans les mois à venir et sur la base d’éléments objectifs à l’établissement desquels les administrations et les organisations socioprofessionnelles travaillent actuellement. Cette révision permettra de donner dans la durée aux entrepreneurs des Outre-mer les assurances que, légitimement, ils estiment nécessaires. L’auteur de la question a souhaité attirer l’attention sur la situation des opérateurs, sensibles à d’éventuelles incertitudes qui pèseraient sur le cadre applicable aux aides fiscales à l’investissement productif (…). Aucune modification de notre droit interne et aucun changement dans le périmètre des aides en droit communautaire n’est venue restreindre en 2015 le champ d’application du mécanisme de la défiscalisation Outre-mer. L’ensemble des opérations, qu’elles soient sous agrément ou pas, demeurent soumises, sans changement par rapport aux années précédentes, aux règles d’éligibilité qui découlent de la loi (…). Au-delà de la campagne 2015, le Gouvernement réaffirme son attachement aux dispositifs d’aide fiscale à l’investissement qui constituent l’un des moteurs essentiels du développement économique des Outre-mer. Le Gouvernement s’est engagé à en assurer la stabilité jusqu’à la fin du quinquennat » (65).

2. Le dispositif proposé par votre Commission

Compte tenu de l’engagement pris par le Gouvernement pour assurer la pérennité des dispositifs de défiscalisation des investissements productifs outre-mer et de la confusion qu’entraîne la distinction entre les notions d’investissement initial et d’investissement de renouvellement, votre Commission a adopté, à l’initiative de M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques, le présent article additionnel qui supprime, aux articles 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W du CGI, la condition selon laquelle « L’investissement doit être un investissement initial, au sens de l’article 2 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission, du 17 juin 2014, déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité ».

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La Commission est saisie de l’amendement CL277 de la commission des Affaires économiques.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Par cet amendement, nous demandons que l’aide fiscale à l’investissement outre-mer s’applique aussi bien aux investissements de renouvellement qu’aux investissements initiaux, comme c’était le cas auparavant. Les articles 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W du code général des impôts font référence à l’investissement initial. Dès lors, un contribuable ne peut bénéficier de l’avantage fiscal que s’il réalise un tel investissement. Pourtant, on a parfois besoin de renouveler certains biens pendant leur durée d’amortissement, notamment des machines. Je rappelle que la Commission européenne n’a jamais remis en cause le principe du renouvellement des investissements.

M. le rapporteur. Une curieuse distinction a été faite entre les investissements initiaux et les investissements de renouvellement. Dans sa réponse à une question écrite du sénateur Georges Patient, le Gouvernement s’est montré favorable à la suppression de cette distinction. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 39 est ainsi rédigé.

Article 40 (nouveau)
(VII de l’art. 199 undecies C du code général des impôts)

Suppression de l’agrément préalable pour bénéficier de la réduction d’impôt sur le revenu fléchée vers le logement social dans les collectivités d’outre-mer

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de M. Philippe Gomes, après avis favorable de votre rapporteur, propose de supprimer la procédure d’agrément préalable prévue au VII de l’article 199 undecies C du code général des impôts (CGI) pour bénéficier de la réduction d’impôt sur le revenu fléchée vers le logement social.

1. L’état du droit

Une nouvelle réduction d’impôt a été instaurée par la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (dite « LODEOM ») en faveur des investissements dans le logement social ; codifiée à l’article 199 undecies C du CGI, elle a connu un développement très rapide entre 2010 et 2013, la dépense fiscale correspondante passant de 11 à 299 millions d’euros en l’espace de quatre ans.

Aux termes de cet article, les contribuables domiciliés en France bénéficient d’une réduction d’impôt sur le revenu à raison de l’acquisition ou de la construction de logements neufs outre-mer et de l’acquisition de logements de plus de vingt ans faisant l’objet de travaux de réhabilitation. Les logements concernés doivent être donnés en location à un organisme de logement social (OLS) pour une durée minimale de cinq années ; les logements doivent être loués en respectant des plafonds de loyer et de ressources des locataires. La réduction d’impôt est égale à 50 % du prix de revient des logements, retenu dans la limite d’un plafond par mètre carré de surface habitable. Une partie de la réduction d’impôt doit être rétrocédée à l’organisme de logement social.

Parmi les conditions ouvrant droit au bénéfice de cette réduction d’impôt, le VII de l’article 199 undecies C précise que lorsque le montant par programme des investissements est supérieur à deux millions d’euros ou lorsque l’investissement est réalisé par une société soumise à l’impôt sur les sociétés, il faut obtenir un agrément préalable délivré par le ministre chargé du budget dans les conditions prévues au III de l’article 217 undecies.

Ce dispositif d’agrément ralentit le processus d’investissement dans les logements sociaux, puisqu’il peut conduire à un délai d’attente de 12 à 36 mois.

Les mêmes difficultés sont apparues dans le cadre de la procédure d’agrément prévue à l’article 244 quater X ouvrant droit à un crédit d’impôt au bénéfice des organismes de logement social pour la construction de logements sociaux dans les départements d’outre-mer. Or, l’article 55 bis du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, voté dans les mêmes termes par les deux assemblées, a supprimé cette procédure d’agrément préalable obligatoire (66). Adopté à l’initiative du Gouvernement, cette simplification était justifiée par le fait que s’agissant d’un secteur dans lequel les acteurs publics sont très présents et d’un dispositif de crédit d’impôt, la subordination à un agrément se révélait superfétatoire.

Cette simplification n’a cependant pas été étendue au mécanisme de réduction d’impôt sur le revenu fléchée sur le logement social prévu par l’article 199 undecies C du CGI.

2. Le dispositif proposé par votre Commission

Adopté à l’initiative de M. Philippe Gomes, malgré une demande de retrait de votre rapporteur, le présent article additionnel restreint la procédure d’agrément préalable prévue au VII de l’article 199 undecies C du code général des impôts (CGI) pour bénéficier de la réduction d’impôt sur le revenu fléchée vers le logement social dans les collectivités d’outre-mer, au seul cas où « le programme n’est pas visé par un arrêté du représentant de l’État portant attribution d’une subvention au titre des contrats de développement ».

En effet, votre Commission a fait sien l’argument selon lequel la procédure d’agrément est superfétatoire lorsque les programmes d’investissement en faveur du logement social bénéficient déjà du soutien de l’État au titre des contrats de développement et sont instruits à ce titre par les services locaux de l’État.

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La Commission en vient à l’amendement CL43 de M. Philippe Gomes.

M. Daniel Gibbes. Cet amendement vise à modifier l’article 199 undecies C du code général des impôts, dont l’objet est de soutenir les opérations de logement social conduites par les bailleurs sociaux jusqu’au 31 décembre2025 à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy et dans les îles Wallis-et-Futuna.

M. le rapporteur. J’ai eu des discussions à ce sujet avec le Gouvernement et avec Philippe Gomes, premier signataire de l’amendement. Pour alléger la procédure, le Gouvernement a supprimé l’agrément préalable pour les opérations de logement social financées par crédit d’impôt dans les départements d’outre-mer. Je comprends que, par symétrie, Philippe Gomès demande que la Nouvelle-Calédonie et les autres collectivités d’outre-mer bénéficient de cette même mesure. Toutefois, en Nouvelle-Calédonie, ces investissements sont financés non pas par un tel crédit d’impôt, c’est-à-dire, in fine, par le contribuable, mais par des contrats dits de développement. Le Gouvernement avait décidé de faire des propositions sur la base des préconisations du rapport de M. Thierry Bert, inspecteur des finances. Dans l’attente de ces propositions, j’émets un avis favorable à cet amendement.

La Commission adopte l’amendement. L’article 40 est ainsi rédigé.

Article 41 (nouveau)
(art. 199 terdecies-0 A du code général des impôts)

Élargissement de la souscription du Fonds d’investissement de proximité outre-mer à l’ensemble des contribuables français

Actuellement, le VI ter A de l’article 199 terdecies-0-A du code général des impôts prévoit que les contribuables domiciliés fiscalement en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à La Réunion, Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna peuvent bénéficier d’une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 42 % des versements au titre de souscriptions en numéraire de parts de fonds d’investissement de proximité outre-mer (FIP-OM).

Ce fonds est constitué pour 70 % au moins de titres financiers, parts de société à responsabilité limitée et avances en compte courant émises par des sociétés qui exercent leurs activités exclusivement dans des établissements situés dans les territoires précités et dans les secteurs retenus pour l’application de la réduction d’impôt sur le revenu prévue au I de l’article 199 undecies B.

L’objectif de ce fonds, constitué par des investisseurs particuliers ultra-marins, est d’être un acteur du développement des petites et moyennes entreprises implantées outre-mer et de participer ainsi à la création d’emplois locaux. Il permet également aux entreprises locales d’améliorer leurs capacités d’investissement et donc de conduire à terme des projets de développement. Ces développements vont ensuite contribuer à maintenir et à favoriser l’emploi.

Le I du présent article additionnel, adopté à l’initiative de votre rapporteur, élargit la souscription du fonds d’investissement de proximité outre-mer (FIP-OM) à l’ensemble des contribuables français pour améliorer la collecte.

Dans la mesure où il ne saurait être question de créer une distorsion avec le régime fiscal du fonds d’investissement de proximité Corse (FIP-Corse) prévu au VI ter A du même article, le présent article prévoit également d’appliquer au FIP-OM et au FIP-Corse le même taux de réduction d’impôt, soit 38 % de l’investissement jusqu’à 12 000 euros pour un célibataire ou 24 000 euros pour un couple.

Le II du présent article constitue un gage qu’il conviendra de demander au Gouvernement de lever au cours de la séance publique. Le III précise que ce dispositif entre en vigueur à compter du 1er janvier 2017.

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La Commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CL187 du rapporteur et CL94 de M. Ibrahim Aboubacar, et l’amendement CL278 de la commission des Affaires économiques.

M. le rapporteur. L’amendement CL187 vise à étendre le champ de collecte du fonds d’investissement de proximité outre-mer (FIP outre-mer) à l’ensemble du territoire national. En 2011, j’avais déposé un amendement tendant à créer ce fonds. Mme Christine Lagarde, ministre de l’Économie, des finances et de l’industrie, l’avait accepté, mais avec la restriction suivante : que le champ de collecte soit cantonné aux outre-mer.

Afin de financer et de faire passer cette mesure, nous proposons d’abaisser le taux de réduction correspondant de l’impôt sur le revenu de 42 à 38 %, taux applicable pour le FIP Corse. Dans ces conditions, le Gouvernement est plutôt favorable à cette extension.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. L’amendement CL278 va dans le même sens. Quelque 200 millions d’euros ont été collectés dans le cadre du FIP Corse, contre seulement 7 à 8 millions dans le cadre du FIP outre-mer. Nous considérons donc qu’il faut élargir le champ de collecte à l’ensemble du territoire national, ainsi que vient de l’expliquer le rapporteur. Cela permettra d’avoir une stratégie d’investissement intégrée, combinant les dispositifs d’épargne ou d’investissement existant dans l’Hexagone et outre-mer. C’est une très bonne mesure.

M. Ibrahim Aboubacar. L’amendement CL94 est identique à celui du rapporteur. Nous sommes tous d’accord avec cette réforme du dispositif.

M. le rapporteur. Je demande au rapporteur pour avis de bien vouloir retirer son amendement au profit du CL187. Le CL278 prévoit la même baisse de taux, mais seulement pour les contribuables domiciliés fiscalement dans l’Hexagone.

L’amendement CL278 est retiré.

La Commission adopte les amendements CL187 et CL94. L’article 41 est ainsi rédigé.

Article 42 (nouveau)
(art. 244 quater W du code général des impôts)

Généralisation du crédit d’impôt pour financer des opérations dans le logement intermédiaire dans les départements d’outre-mer

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques, après avis favorable de votre rapporteur, étend à toutes les entreprises installées dans les départements d’outre-mer le bénéfice du crédit d’impôt prévu au 4 du I de l’article 244 quater W du code général des impôts (CGI), pour améliorer le financement des programmes d’investissement dans le logement intermédiaire.

Actuellement, seules les entreprises dont l’activité principale relève de l’un des secteurs d’activité éligibles à la réduction d’impôt prévue à l’article 199 undecies B ou les organismes mentionnés au 1 du I de l’article 244 quater X (c’est-à-dire les organismes à loyers modérés, les sociétés d’économies mixtes exerçant une activité immobilière outre-mer et les organismes concourant aux objectifs de la politique d’aide au logement) peuvent utiliser ce crédit d’impôt pour financer des opérations dans le logement intermédiaire. Ces entreprises doivent en outre ne pas réaliser un chiffre d’affaires excédant vingt millions d’euros.

Or, les besoins en logements outre-mer sont importants au regard des enjeux démographiques et du contexte morose du secteur du bâtiment et des travaux publics. La situation actuelle entre en contradiction, de surcroit, avec les plans logement outre-mer qui prévoient de développer une offre de logements locatifs sociaux et intermédiaires.

C’est la raison pour laquelle le I du présent article étend le crédit d’impôt à toutes les entreprises installées dans les départements d’outre-mer qui souhaiteraient investir dans des programmes d’investissement en faveur du logement intermédiaire, sans toutefois remettre en cause le plafond de vingt millions d’euros de chiffre d’affaires.

Le II constitue un gage qu’il conviendra de demander au Gouvernement de lever au cours de la séance publique.

Le III précise que le crédit d’impôt n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CL279 de la commission des Affaires économiques.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Outre-mer, l’enjeu en termes de logement est considérable. Dans le rapport qu’il a remis au Premier ministre, M. Lurel évoque un objectif de construction et de réhabilitation de 12 000 à 14 000 logements par an. Dans son plan « logement outre-mer », le Gouvernement avait fixé, quant à lui, un objectif de 10 000 logements. Or le niveau de 8 000 à 9 000 logements n’a pas été atteint. Il y a donc un vrai déficit et de vrais besoins, en particulier en ce qui concerne la construction de logements intermédiaires, qui est en panne.

Actuellement, seuls les organismes HLM et les sociétés d’économie mixte (SEM), sont éligibles au crédit d’impôt. Nous proposons que les sociétés dont le chiffre d’affaires est supérieur à 20 millions d’euros puissent également en bénéficier, afin de les encourager à investir. Cette mesure me semble utile et fondamentale.

Rappelons que le Gouvernement a fait un pari : ouvrir le dispositif de défiscalisation pour le financement du logement social tout en cherchant à substituer ce crédit d’impôt à la ligne budgétaire unique (LBU). Toutefois, à mon avis, la dynamique de la défiscalisation ne fonctionne pas en ce qui concerne les logements intermédiaires, dont les départements d’outre-mer ont besoin.

M. le rapporteur. Je soutiens très fortement cet amendement, car il faut combler ce vide. Pour la bonne forme, je signale toutefois que le Gouvernement est hésitant à ce sujet.

La Commission adopte l’amendement. L’article 42 est ainsi rédigé.

Article 43 (nouveau)
(art. 244 quater W du code général des impôts)

Suppression de l’agrément fiscal préalable pour les programmes d’accession à la propriété sociale dans les départements d’outre-mer

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques, contre l’avis de votre rapporteur, supprime la condition d’agrément préalable obligatoire délivré par le ministre de l’économie pour les programmes d’investissements en faveur de l’accession sociale à la propriété d’un montant supérieur à un million d’euros ouvrant droit à crédit d’impôt (I du présent article), à savoir :

– ceux visés au 3° du 4 du I de l’article 244 quater W, qui concerne les acquisitions ou constructions de logements neufs situés dans les départements d’outre-mer à condition que :

a) l’entreprise signe avec une personne physique, dans les six mois de l’achèvement de l’immeuble, ou de son acquisition si elle est postérieure, un contrat de location-accession à la propriété immobilière ;

b) l’acquisition ou la construction de l’immeuble a été financée au moyen d’un prêt conventionné pour les opérations de location-accession à la propriété immobilière ;

c) les trois quarts de l’avantage en impôt procuré par le crédit d’impôt pratiqué au titre de l’acquisition ou la construction de l’immeuble sont rétrocédés à la personne physique signataire du contrat de location-accession.

– ceux visés au 1 du I de l’article 244 quater X, c’est à dire les programmes d’investissements en faveur de l’accession sociale à la propriété réalisés par des organismes d’habitation à loyer modéré, des sociétés d’économies mixtes exerçant une activité immobilière outre-mer et des organismes concourant aux objectifs de la politique d’aide au logement, sous certaines conditions (voir infra - article 44).

L’objectif poursuivi est de simplifier les procédures pour accélérer l’investissement en faveur de la production de logement sociaux en outre-mer, à l’instar de ce que prévoit l’article 40 du présent projet de loi dans les collectivités d’outre-mer.

Toutefois, l’obtention d’un agrément préalable délivré par le ministre chargé du budget lorsque le programme d’investissement est supérieur à un million d’euros constitue une garantie pour les investisseurs privés participant pour partie au financement de ces programmes d’investissement.

Le II constitue un gage qu’il conviendra de demander au Gouvernement de lever au cours de la séance publique.

Le III précise que le crédit d’impôt n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

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La Commission en vient à l’amendement CL280 de la commission des Affaires économiques.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Je l’ai souvent dit : l’égalité passe aussi par le droit à un logement décent. Gabriel Serville a eu raison d’évoquer l’habitat insalubre tout à l’heure.

À la suite d’une question de M. Lurel au Premier ministre, l’agrément fiscal préalable a été supprimé pour les programmes de logements bénéficiant d’une défiscalisation, mais il ne l’a pas été pour les opérations d’accession sociale à la propriété. C’est un oubli. Précisons que ces opérations permettent à des foyers modestes de devenir propriétaires à terme, après avoir payé un loyer pendant, par exemple, quinze ans.

M. le rapporteur. Ainsi que je l’ai indiqué, je suis favorable aux mécanismes de soutien à l’économie qui ne présentent pas de risque de détournement de procédure. Or je crains que tel soit le cas en l’espèce. Le montage proposé, avec la présence d’un tiers gestionnaire, me semble délicat et source de fragilité. Avis défavorable. Toutefois, je m’en remettrai à l’avis du Gouvernement, si celui-ci devait être favorable.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. L’agrément fiscal impose que, dès l’achèvement des travaux, un tiers gestionnaire – soit une société HLM, soit une SEM – prenne le relais de la société civile immobilière qui a construit l’immeuble, afin d’assurer la sous-location ou la commercialisation des logements.

Les programmes dont il est question concernent des personnes fragiles, âgées ou sans domicile fixe. Ces outils dédiés visent à accompagner ceux qui se trouvent au plus bas de l’échelle sociale. Ces personnes ne méritent pas une telle suspicion !

J’invite le rapporteur à revenir sur sa position. Certes, il faut être très vigilant pour éviter les dérives, et c’est ce que permet l’agrément fiscal. Mais les dérives concernent plutôt les hauts niveaux de défiscalisation – ce que d’aucuns pourraient appeler la défiscalisation « spéculative », certains opérateurs cherchant à « se sucrer » en profitant du dispositif – que les bas niveaux.

J’ai réalisé des foyers d’accueil pour personnes en difficulté ou sans domicile fixe à Fort-de-France. Nous avons dû batailler pour trouver des financements. En définitive, seule la ville de Fort-de-France a financé l’opération, car il n’était pas possible de bénéficier de la défiscalisation.

M. le rapporteur. Je m’en remets à la sagesse de la Commission. J’adopterai la même position pour l’amendement suivant, le CL281. Je vous invite, monsieur le rapporteur pour avis, à discuter de cette question avec le Gouvernement.

La Commission adopte l’amendement. L’article 43 est ainsi rédigé.

Article 44 (nouveau)
(art. 244 quater X du code général des impôts)

Élargissement du bénéfice du crédit d’impôt au titre des investissements dans le logement social outre-mer en cas de recours à un intermédiaire entre l’investisseur et l’occupant

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques, contre l’avis de votre rapporteur, rend éligible au crédit d’impôt prévu à l’article 244 quater X du code général des impôts les investisseurs qui feraient appel à des résidences sociales et des logements-foyers pour accueillir les locataires personnes physiques.

On rappellera que ne peuvent actuellement bénéficier d’un crédit d’impôt au titre de l’acquisition ou de la construction de logement neufs destinés à l’accession sociale à la propriété sur le fondement de l’article 244 quater X du CGI que les organismes d’habitation à loyer modéré, les sociétés d’économies mixtes exerçant une activité immobilière outre-mer et les organismes concourant aux objectifs de la politique d’aide au logement, sous réserve que :

– les logements soient donnés en location nue ou meublée dans les six mois de leur achèvement ou de leur acquisition, pour une durée au moins égale à cinq ans, à des personnes physiques qui en font leur résidence principale ;

– les bénéficiaires de la location soient des personnes physiques dont les ressources n’excèdent pas des plafonds fixés par décret en fonction du nombre de personnes destinées à occuper à titre principal le logement et de la localisation de celui-ci ;

– le montant des loyers à la charge des personnes physiques n’excède pas des limites fixées par décret et déterminées en fonction, notamment, de la localisation du logement ;

– une part minimale, définie par décret, de la surface habitable des logements compris dans l’immeuble soit louée à des personnes physiques dont les ressources sont inférieures à ces deux plafonds ;

– une fraction, définie par décret, du prix de revient de l’immeuble corresponde à des dépenses supportées au titre de l’acquisition d’équipements de production d’énergie renouvelable, d’appareils utilisant une source d’énergie renouvelable ou de matériaux d’isolation ;

– enfin, les logements soient financés par subvention publique à hauteur d’une fraction minimale de 5 %, sauf pour les logements bénéficiant des prêts conventionnés.

L’objectif du présent article est de permettre aux organismes d’habitation à loyer modéré, aux sociétés d’économies mixtes exerçant une activité immobilière outre-mer et aux organismes concourant aux objectifs de la politique d’aide au logement de pouvoir bénéficier d’un tel crédit d’impôt même s’ils concluent une convention avec un gestionnaire intermédiaire pour qu’il procède à la mise en location des logements dans les conditions prévues par l’article 244 quater X du code général des impôts.

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La Commission adopte l’amendement CL281 de la commission des Affaires économiques. L’article 44 est ainsi rédigé.

Article 45 (nouveau)
(art. 244 quater X du code général des impôts)

Extension du champ d’application et augmentation du crédit d’impôt réalisé au titre de la rénovation des logements sociaux outre-mer

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques, après avis favorable de votre rapporteur, étend le champ d’application géographique du crédit d’impôt en faveur de la rénovation du logement social en outre-mer prévu à l’article 244 quater X du code général des impôts et en augmente le montant.

Actuellement, le 4 du I de l’article 244 quater X précité fait bénéficier du crédit d’impôt les travaux de rénovation ou de réhabilitation des logements sociaux achevés depuis plus de vingt ans et situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, visés au II de l’article 9-1 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. Ces travaux de rénovation doivent permettre aux logements concernés d’acquérir des performances techniques voisines de celles des logements neufs ou de les conforter contre le risque sismique.

Le I du présent article introduit deux assouplissements importants car les besoins de rénovation outre-mer sont très importants en raison du coût du désamiantage et des mises aux normes antisismiques.

D’une part, il supprime le zonage afin de ne pas limiter la mesure aux seules opérations de rénovation urbaine (1°).

D’autre part, il revalorise le montant du crédit d’impôt rénovation par une augmentation plus réaliste de l’assiette, qui passe de 20 000 euros à 50 000 euros (2°), et par un doublement du taux du crédit d’impôt, qui passe de 20 à 40 % (3°).

Le II constitue un gage qu’il conviendra de demander au Gouvernement de lever au cours de la séance publique.

Le III précise que le crédit d’impôt n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

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La Commission examine l’amendement CL282 de la commission des Affaires économiques.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Les programmes de rénovation du parc social existant sont très importants outre-mer : environ 130 000 logements sont concernés, dont 40 % ont plus de vingt ans – il s’agit généralement de logements construits dans des cités. Les enjeux de rénovation sont multiples : à ceux que l’on connaît dans l’Hexagone s’ajoutent celui du désamiantage, mais surtout ceux du confortement sismique et de l’adaptation climatique et énergétique, qui pèsent très lourd. Aujourd’hui, le montant des travaux retenu pour le calcul du crédit d’impôt est limité à 20 000 euros, ce qui correspond au coût moyen dans l’Hexagone. Nous proposons, d’une part, de relever ce plafond à 50 000 euros, ce qui correspond, d’après les analyses, au coût moyen des travaux de rénovation outre-mer, et, d’autre part, de porter le taux du crédit d’impôt de 20 à 40 %.

M. le rapporteur. Avis favorable : ce dispositif me paraît simple et efficace. Mais je dois dire que le Gouvernement y est plutôt hostile.

La Commission adopte l’amendement. L’article 45 est ainsi rédigé.

Après l’article 45

La Commission est saisie de l’amendement CL283 de la commission des Affaires économiques.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. La pluriactivité, le travail saisonnier et le développement des structures de l’économie circulaire et de l’économie sociale et solidaire sont de véritables enjeux outre-mer. Pour sortir progressivement des mécanismes de consommation massive de produits importés et favoriser la production locale, il faut absolument multiplier les outils intelligents, qui permettent de combiner les efforts de l’État, des collectivités et des individus.

De mon point de vue, les groupements d’employeurs ne sont pas suffisamment soutenus. Ils jouent un rôle utile en tant que lieu de focalisation du recrutement. Ils permettent de repositionner les salariés sur les besoins multiples en fonction des calendriers des entreprises. Je propose que l’on aide les groupements d’employeurs en exonérant de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) l’ensemble des services qu’ils rendent et en leur étendant le bénéfice du régime bonifié d’exonération des cotisations sociales dues par les employeurs au titre de la sécurité sociale, institué par la LODEOM.

M. le rapporteur. Je suis extrêmement opposé à cet amendement. J’ai une expérience un peu douloureuse en ce qui concerne les groupements d’employeurs, y compris les groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification (GEIQ). Très souvent, ils se transforment en sociétés d’intérim, demandent la caution conjointe et solidaire des collectivités et, parfois, se défaussent sur ces dernières. Auparavant, une entreprise de plus de 300 salariés ne pouvait pas adhérer à un groupement d’employeurs, mais un texte présenté par notre collègue Jean-Frédéric Poisson a porté ce seuil à 500. Or, dans les outre-mer, peu d’entreprises ont autant de salariés. Si l’on fait bénéficier les groupements d’employeurs de dispositifs tels que ceux vous proposez, une entreprise n’aura plus besoin de recruter ! Le groupement d’employeurs deviendra une interface entre l’employeur et le salarié. Il faut vraiment repenser ce dispositif, afin d’éviter de casser le contrat à durée indéterminée (CDI), de distendre le lien entre l’employeur et le salarié, et de porter atteinte aux droits du personnel et des syndicats.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Nous faisons une lecture très différente de ce que sont les groupements d’employeurs. Nous incitons à la création de groupements d’employeurs maîtrisables et maîtrisés. Sachant que le chômage atteint 23 % à la Guadeloupe, un peu moins de 20 % à la Martinique et 24 à 25 % à La Réunion, il faut utiliser toutes sortes de mécanismes maîtrisables pour répondre aux besoins d’activité. Il y a une énorme différence, notamment en termes de dynamique, entre les sociétés d’intérim et les groupements d’employeurs, en particulier les GEIQ. Je présenterai de nouveau mon amendement en séance publique, afin que nous ayons un vrai débat sur ce point et que nous dépassions les positions individuelles.

M. Ibrahim Aboubacar. Je comprends les objections du rapporteur. Néanmoins, je travaille depuis un an dans le département de Mayotte pour aider un certain nombre de secteurs à sortir de l’économie informelle et à rentrer dans la légalité, notamment pour l’emploi de la main-d’œuvre. Or les services et les opérateurs économiques avec lesquels j’ai travaillé m’ont fait valoir que les groupements d’employeurs sont, dans l’état actuel des choses, le seul outil disponible.

Ainsi que l’a indiqué le rapporteur pour avis, ce ne sont pas des sociétés d’intérim. Il faut que nous revenions sur cette question en séance publique et que nous adoptions un dispositif bordé et sécurisé qui réponde aux objections du rapporteur.

L’amendement est retiré.

Article 46 (nouveau)
(art. 293 B du code général des impôts)

Relèvement du seuil de chiffre d’affaires des microentreprises en deçà duquel est ouvert le bénéfice d’une franchise de taxe sur la valeur ajoutée

Cet article additionnel, adopté à l’initiative de votre rapporteur, relève, pour une durée expérimentale de cinq ans, le seuil de chiffre d’affaires des microentreprises installées en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion en deçà duquel elles bénéficient d’une franchise de taxe sur la valeur ajoutée.

Actuellement, l’article 293 B prévoit que, pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, les entreprises établies en France bénéficient d’une franchise qui les dispense du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), lorsqu’elles n’ont pas réalisé :

– pour les activités commerciales, un chiffre d’affaires supérieur à 82 200 euros l’année civile précédente, ou 90 300 euros l’année civile précédente lorsque le chiffre d’affaires de la pénultième année n’a pas excédé 82 200 euros ;

– pour les activités de prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d’hébergement, un chiffre d’affaires supérieur à 32 900 euros l’année civile précédente, ou 34 900 euros l’année civile précédente sous réserve qu’il n’ait pas excédé 32 900 euros la pénultième année.

Le présent article additionnel prévoit une dérogation à cette règle, à titre expérimental, pour les microentreprises installées en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion, en portant ces seuils d’exonération du paiement de la TVA à 100 000 euros pour leurs activités commerciales (ou 110 000 euros lorsque la pénultième année il n’a pas excédé 100 000 euros) et à 50 000 euros pour leurs activités de service (ou 60 000 lorsque la pénultième année il n’a pas excédé 50 000 euros).

L’objectif est de soutenir l’activité et la création d’emplois dans ces territoires marqués par la crise économique.

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La Commission en vient à l’amendement CL188 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit de relever le seuil de chiffre d’affaires en deçà duquel les micro-entreprises bénéficient d’une franchise les dispensant du paiement de la TVA. Cette mesure vise à soutenir les petites entreprises.

La Commission adopte l’amendement. L’article 46 est ainsi rédigé.

Après l’article 46

La Commission examine l’amendement CL10 de M. Daniel Gibbes.

M. Daniel Gibbes. Cet amendement tend à exonérer de la taxe de solidarité, dite « taxe Chirac », les vols d’une distance inférieure à cinquante kilomètres pour les territoires ultramarins. Le rapport de M. Bruno Le Roux a fait apparaître son caractère inéquitable pour certains territoires d’outre-mer. Ainsi, le montant de la taxe est identique pour un vol entre Paris et Tokyo et pour un vol entre Saint-Barthélemy et Sint Marteen, partie néerlandaise de l’île Saint-Martin, en dépit de la courte distance qui sépare les deux îles.

M. le rapporteur. Saint-Barthélemy et Saint-Martin ont fait partie de la circonscription dont je suis député, et je comprends qu’il y a ici un cas particulier. Les îles Saint-Barthélemy et Saint-Martin sont distantes de vingt-cinq kilomètres, et leurs habitants doivent acquitter une taxe de 1,13 euro pour les vols intérieurs et de 4,51 euros pour les vols internationaux.

J’avoue être gêné par la mesure que vous proposez : elle ne peut s’interpréter que comme une exonération pour un territoire particulier et comme un refus de jouer la solidarité. Nous demandons l’égalité au sein de la République. Or c’est l’égalité des droits, mais c’est aussi l’égalité des devoirs. Avis défavorable.

M. Daniel Gibbes. Je retiens que l’on pénalise encore une fois ces petits territoires. Cette mesure concernerait non seulement Saint-Barthélemy, mais aussi d’autres îles, notamment en Polynésie. Le devoir de solidarité doit aussi être apprécié au regard des distances. Je propose d’exonérer non pas tous les petits trajets, mais uniquement les trajets inférieurs à cinquante kilomètres. À mon avis, les sommes en question ne sont pas si importantes, alors que l’enjeu est grand tant pour la population de Saint-Barthélemy que pour les compagnies aériennes qui desservent ce territoire.

La Commission rejette l’amendement.

Article 47 (nouveau)
(art. 1519 J et 1599 quinquies C du code général des impôts)

Redevance communale et régionale géothermique

Issu d’un amendement de votre rapporteur, l’article 47 propose d’instituer, sur le modèle de la redevance départementale et communale des mines prévue aux articles 1519 et 1587 du code général des impôts, une redevance communale et régionale en matière de production électrique au moyen de la géothermie. En effet, les installations géothermiques de forte puissance ne vont pas sans inconvénient environnemental et sanitaire pour les populations du voisinage. Il est donc normal que les collectivités territoriales qui accueillent ces activités bénéficient d’une compensation financière qui leur permettra, en retour, d’améliorer la vie des habitants qui ont à subir les nuisances en question.

Si le dispositif proposé est d’envergure nationale, il est proposé de le limiter aux installations d’une puissance supérieure à 3 mégawatts, de sorte qu’il ne concerne pour l’heure que la centrale de Bouillante (Guadeloupe) et peut-être demain, si sa capacité de production continue à croître, le site expérimental de Soultz-Sous-Forêts (Alsace).

Les taux proposés sont particulièrement raisonnables. Rapportés à la production pour l’année 2014 du site de Bouillante, soit 83 gigawattheures, ils équivalent à une recette annuelle de 160 000 euros pour la commune et 290 000 euros pour la région.

Votre rapporteur s’est interrogé quant à la nature de la contribution demandée – taxe ou redevance. Il s’est prononcé en faveur de la redevance, considérant que :

– la production d’électricité nécessite la présence d’un fluide géothermal dans le sous-sol ;

– l’article L. 110-1 du code de l’environnement indique clairement la propriété de la nation sur les ressources de l’environnement en général et du sous-sol en particulier (67) ;

– l’article L. 112-1 du code minier mentionne que « relèvent du régime légal des mines les gîtes renfermés dans le sein de la terre dont on peut extraire de l’énergie sous forme thermique, notamment par l’intermédiaire des eaux chaudes et des vapeurs souterraines qu’ils contiennent, dits "gîtes géothermiques" », et que ce régime légal des mines se voit appliquer la redevance départementale et communale des mines mentionnée ci-dessus ;

– l’industriel peut être regardé comme usager du patrimoine commun, en l’occurrence du gîte géothermique, dont son usage exclut de surcroît les autres opérateurs économiques potentiellement intéressés ;

– la production d’électricité est directement proportionnelle à la puissance du fluide géothermal et au prélèvement de chaleur opéré dans le sous-sol.

En conséquence, il reviendra au pouvoir réglementaire d’établir les modalités de recouvrement de la contribution.

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La Commission est saisie de l’amendement CL189 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’instaurer une redevance qui serait versée par les centrales géothermiques aux communes et aux régions. Un site est déjà exploité à la Guadeloupe, et il existe des potentialités à la Martinique. Le ministère de l’Environnement était favorable à cette mesure, mais j’ai cru comprendre que la position du Gouvernement avait évolué et qu’il y serait désormais plutôt hostile. On discute de cette question depuis des années, et il y a toujours eu un accord. Il fallait au préalable que le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), qui exploitait auparavant le site de la Guadeloupe, revoie sa stratégie, ce qu’il a fait.

La Commission adopte l’amendement. L’article 47 est ainsi rédigé.

Article 48 (nouveau)
(art. 1649 decies du code général des impôts)

Établissement du cadastre en Guyane

Issu d’un amendement présenté par M. Gabriel Serville, l’article 48 modifie l’article 1649 decies du code général des impôts. Le droit en vigueur prévoit notamment que, dans les départements et régions d’outre-mer, il est procédé, aux frais de l’État, à l’établissement et à la conservation d’un cadastre parcellaire destiné à servir de support aux évaluations à retenir pour l’assiette de la contribution foncière des propriétés bâties, de la contribution foncière des propriétés non bâties et des taxes annexes à ces contributions.

Or, en Guyane, les bases d’imposition relatives à la fiscalité directe demeurent beaucoup plus faibles qu’en France hexagonale. La problématique revêt une importance majeure : de la connaissance des bases cadastrales dépend le niveau de recettes fiscales des collectivités territoriales. Les élus locaux ont déploré le manque de volontarisme des services de l’État sur cette question.

Il est donc proposé de rappeler que le cadastre a vocation à couvrir l’intégralité du territoire et que les commissions chargées de le constituer se réunissent régulièrement. Compte-tenu des circonstances de fait, des méthodes dérogatoires peuvent être utilisées pour sa constitution. Il est ainsi prévu de les déterminer par décret simple, et non par décret en Conseil d’État comme l’exige la rédaction actuelle de l’article 1649 decies.

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La Commission en vient à l’amendement CL128 de M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. En matière de fiscalité directe de droit commun, les bases d’imposition demeurent beaucoup plus faibles outre-mer qu’en France hexagonale. Dans le souci de préserver et d’améliorer les recettes fiscales des collectivités territoriales, cet amendement vise à améliorer l’identification des bases d’imposition. Cette problématique concerne tous les départements d’outre-mer, mais plus spécifiquement la Guyane. Elle revêt une importance particulière : de la connaissance des bases cadastrales dépend le niveau des recettes fiscales des collectivités territoriales. Les élus locaux mettent souvent en avant le manque de volontarisme des services de l’État sur cette question, qui relève pourtant de la responsabilité de ces derniers. Il est nécessaire d’organiser la procédure et d’imposer une obligation de résultat.

M. le rapporteur. Je ne vois aucune raison de s’opposer à cet amendement. Le Gouvernement m’a indiqué y être hostile, mais je n’ai pas compris les raisons de sa position. Il s’agit d’améliorer l’identification des bases d’imposition, ce qui peut servir tant au Gouvernement qu’aux collectivités concernées. Avis favorable.

M. Ibrahim Aboubacar. Je soutiens cet amendement. L’identification des bases d’imposition est une vraie difficulté non seulement en Guyane, mais aussi dans le jeune département de Mayotte, où la fiscalité en vigueur dans les autres départements et régions d’outre-mer a été introduite le 1er janvier 2014. À cause de cette faiblesse, le nombre de contribuables ne dépasse guère 30 % de la population à Mayotte.

M. le président Dominique Raimbourg. Si vous souhaitez que la mesure s’applique à Mayotte, cela suppose qu’un amendement en ce sens soit déposé et adopté en séance publique.

M. Ibrahim Aboubacar. Je ferai sans doute une proposition en ce sens.

M. le président Dominique Raimbourg. D’une manière générale, il serait opportun de réfléchir à la liste des territoires concernés ou intéressés d’ici à la séance publique.

La Commission adopte l’amendement. L’article 48 est ainsi rédigé.

Article 49 (nouveau)
(art. 37 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer)

Taux supplémentaire d’octroi de mer régional

Prévu par la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004, l’octroi de mer est une taxe applicable à la plupart des produits importés en vigueur dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution. Elle est perçue par l’administration des douanes.

L’octroi de mer est une ressource financière majeure des communes, dont il peut représenter près de la moitié des recettes fiscales. Les conseils régionaux et les assemblées uniques peuvent y adjoindre un octroi de mer régional perçu au profit de la région, dont elles fixent le taux dans la limite légale de 2,5 %. Des dispositifs existent pour éviter que le cumul du taux normal et du taux régional atteigne un niveau confiscatoire.

Issu d’un amendement du rapporteur, l’article 49 permet de porter à 5 % le taux maximal d’octroi de mer régional au seul bénéfice des collectivités ayant signé le plan de convergence prévu à l’article 4 du présent projet de loi. Il s’agit là d’une faculté et non d’une obligation ; votre rapporteur souhaitait affecter d’office les recettes supplémentaires générées aux dépenses d’investissement prévues par le plan de convergence, mais s’est heurté au principe d’universalité budgétaire.

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La Commission examine l’amendement CL199 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il existe, pour faire simple, deux octrois de mer : celui qui finance les communes et l’octroi de mer régional qui alimente la section de fonctionnement du budget des régions. Actuellement, le taux de ce dernier ne peut dépasser 2,5 %. Je propose de donner aux exécutifs régionaux la faculté – il ne s’agit donc pas d’une obligation – d’augmenter ce taux jusqu’à 5 % et de consacrer les recettes supplémentaires au financement des investissements prévus dans le cadre des plans de convergence. Le Gouvernement n’y est pas hostile, mais on m’a indiqué que l’affectation des recettes aux investissements plutôt qu’au fonctionnement soulevait une difficulté juridique, ce qui m’étonne un peu.

Cette faculté ne sera pas donnée sans réciprocité : seules les collectivités qui auront signé au préalable un plan de convergence avec l’État pourront l’exercer. L’objectif est donc de financer la trajectoire de convergence, qui peut durer jusqu’à vingt ans – à Saint-Barthélemy, cependant, les indicateurs sont d’ores et déjà supérieurs aux critères nationaux. Rappelons que les plans de convergence ne sont eux-mêmes pas une obligation.

La Guyane est un cas particulier : le Gouvernement est prêt à lui appliquer cette mesure immédiatement sans la signature préalable d’un plan de convergence, car il existe déjà un pacte d’avenir pour la Guyane. Je n’ai pas été d’accord : selon moi, il faut trouver une solution spécifique. Accorder une telle possibilité à un exécutif régional sans contrepartie, c’est-à-dire sans obligation de s’inscrire dans un parcours de convergence, serait agir avec une certaine légèreté.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. C’est un sujet très important, du point de vue tant des choix politiques que des choix économiques. Le choix politique qui est fait, c’est d’indiquer que la convergence aura un prix ou un coût qu’il faudra financer. Dès lors, la question suivante se pose : qui va payer ? Il me semble évident que l’État doit apporter une contribution, notamment pour favoriser l’égalité sociale. Cependant, il doit aussi y avoir une dynamique de progrès, une création de valeur ajoutée et de richesse. Pour ma part, j’ai toujours défendu que le deuxième volet, fondamental, de ce projet de loi devait être l’égalité par le travail et l’activité. C’est le meilleur moyen de garantir le caractère durable de l’accès à l’égalité. Car l’activité génère aussi des droits, notamment en contribuant à l’élévation des cotisations de base. Ce point me semble très important.

Le rapporteur propose de donner la possibilité aux régions ou aux collectivités territoriales uniques d’augmenter le taux de l’octroi de mer. Or celui-ci, il faut le rappeler, pèse sur le coût des marchandises, c’est-à-dire sur le panier de la ménagère et le coût de la vie. D’ailleurs, après les grèves de 2009, qui ont suscité de longs débats, nous avons été obligés de demander à certaines collectivités de diminuer le taux de l’octroi de mer pendant une durée donnée, tout en travaillant sur la régulation et en luttant contre les monopoles avec la loi Lurel, afin de faire baisser le prix des produits de première nécessité, notamment du riz et du lait, qui coûtaient 40 à 45 % plus cher que dans l’Hexagone.

Pour ma part, du point de vue purement politique, je ne suis pas favorable à la doctrine qui consiste à asseoir systématiquement l’économie et le financement de l’investissement sur la consommation massive de produits importés. Or les recettes de l’octroi de mer sont liées à la dynamique des importations et de la consommation : plus on importe et plus on consomme, plus ces recettes sont élevées ; c’est une spirale incroyable ! Ce faisant, loin de chercher à financer un développement endogène, on sacralise un système condamnable en soi, car créateur d’inégalités.

Je ne remets pas en cause l’amendement, mais je suggère que l’on étudie de très près ses conséquences économiques afin, le cas échéant, de le compléter en séance publique.

M. Ibrahim Aboubacar. Nous partageons le même souci : j’avais moi-même déposé un amendement en ce sens mais il a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. On ne peut, dans le cadre d’une stratégie visant à assurer l’égalité réelle, mobiliser la solidarité nationale, notamment par le biais de dispositifs de défiscalisation, sans ouvrir des perspectives de financement local de ces dispositifs. Ne sachant si l’on trouvera le moyen de borner les choses lorsque l’on abordera les plans de convergence du titre II, je propose que l’on adopte cet amendement en l’état. C’est une perspective que nous devons ouvrir d’autant que le dispositif est facultatif et que le conseil régional ne prendra sa décision qu’au terme d’un vaste débat avec les autres collectivités, l’État et les acteurs économiques.

M. le rapporteur. J’indique pour la clarté du débat qu’il ne nous a pas été permis de préciser – pour des raisons de recevabilité financière – que cette possible recette supplémentaire serait affectée à l’investissement. Il nous faudra donc trouver une formulation adéquate d’ici à la séance publique. L’amendement qui vous est soumis prévoit une augmentation possible jusqu’à 5 % pour les collectivités ayant signé un plan de convergence.

La Commission adopte l’amendement CL199. L’article 49 est ainsi rédigé.

Article 50 (nouveau)
(art. 44 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer)

Réduction des frais d’assiette et de recouvrement de l’octroi de mer

Issu d’un amendement de votre rapporteur, l’article 50 modifie le régime de l’octroi de mer de sorte que le prélèvement pour frais d’assiette et de recouvrement opéré par l’État soit limité à 1,5 %, et non à 2,5 % comme le prévoit actuellement la loi du 2 juillet 2004.

Votre rapporteur a pu constater sur le terrain combien les montants prélevés excédaient les charges réellement supportées par les services des douanes pour la collecte de l’octroi de mer.

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La Commission aborde l’amendement CL235 du rapporteur.

M. le rapporteur. Je me dois de vous dire que le Gouvernement est très fermement défavorable à cet amendement. Les frais d’assiette et de recouvrement que l’État perçoit sur l’octroi de mer s’élèvent jusqu’à 2,5 %. Ils permettent de payer les services de l’État et les primes des douaniers. Or, tout calcul fait, on sait aujourd’hui que des sommes importantes échappent aux collectivités et qu’un taux d’1,5 % serait très largement suffisant.

La Commission adopte l’amendement. L’article 50 est ainsi rédigé.

L’amendement de repli CL253 du rapporteur est retiré.

Article 51 (nouveau)
Rapport sur la rationalisation du dispositif de zones franches outre-mer

Les dispositifs fiscaux et sociaux de soutien à l’activité de droit commun ont tendance à se superposer outre-mer (zones franches urbaines, zones de revitalisation urbaine, zones franches d’activité, zones de revitalisation rurale). Les opérateurs industriels peuvent éprouver des difficultés à maîtriser l’environnement normatif, d’autant qu’existent aussi des mécanismes de défiscalisation et de crédit d’impôt spécifiques – notamment ceux créés par la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, dite « LODEOM ».

Afin de clarifier la situation et de disposer d’un état des lieux complet, l’article 51, issu d’un amendement présenté par votre rapporteur, sollicite du Gouvernement, dans les douze mois suivants la promulgation de la loi, la remise d’un rapport pour pouvoir établir, à partir de l’année 2019, une zone franche globale pour l’ensemble des outre-mer, à l’image de ce qui a déjà été fait pour la Corse en 1997.

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La Commission en vient à l’amendement CL230 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement a trait aux zones franches globales. Sa rédaction ne pose pas de problème de recevabilité puisque nous y demandons la remise, par le Gouvernement au Parlement, d’un rapport permettant la création de telles zones d’ici à 2019. Il existe en effet toutes sortes de dispositifs dans les outre-mer – zones franches d’activité (ZFA), zones de revitalisation rurale (ZRR), zones franches urbaines (ZFU), quartiers prioritaires de la politique de la ville etc. –, ce qui pose un problème de lisibilité et de compréhension. La date proposée laisse le temps nécessaire au Gouvernement pour revoir ce zonage – ce qui peut a priori être opéré à enveloppe constante. Il n’est pas opposé à la mesure qui ne tombe pas dans ce que l’on appelle « le triennal ».

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Tout en soutenant cet amendement, je voudrais apporter une précision. Il existe actuellement plusieurs types de zonages mais ils ne sont pas de même nature du tout. Les zones de revitalisation urbaine (ZRU), qui peuvent devenir des ZFU, sont concentrées dans des quartiers urbains et ont une dimension purement économique, visant à faciliter le retour de l’activité. L’idée de créer des zones franches globales est très intéressante mais doit tenir compte de la nécessité de remplacer les zones franches d’activité qui ont été créées par la LODEOM et qui vont arriver à terme. Il faut maintenir la prolongation, pendant deux ans, de ces ZFA et ouvrir la perspective de création des zones franches globales – que j’ai pour ma part appelées zones franches expérimentales – en les focalisant sur la production et l’exportation, et non seulement sur des avantages donnés pour stabiliser l’économie existante. « I have a dream » mais ce rêve ne se réalise jamais… Pour favoriser la mutation du modèle économique, améliorer le partage des richesses et assurer une croissance durable, il faut absolument que les aides fiscales soient en cohérence avec les axes et filières que l’on veut développer.

Je trouve très bien de proposer la remise d’un rapport au Parlement. J’irai plus loin en séance en demandant au Gouvernement de s’engager, d’une part, à prolonger de deux années les zones franches d’activité existantes et, d’autre part, de se préparer à faire des propositions très concrètes – sachant que se tiendra très bientôt une élection présidentielle – concernant des zones franches expérimentales ou globales.

M. le président Dominique Raimbourg. Je tiens à souligner la difficulté que pose le paragraphe II de cet amendement – qui risque de fragiliser l’ordonnance à venir : comme l’a jugé le Conseil constitutionnel, le Parlement ne peut invoquer l’article 38 de la Constitution pour habiliter de lui-même – et par anticipation – le Gouvernement à prendre des ordonnances. Seul ce dernier peut demander au premier de l’habiliter à le faire. Il faudrait donc supprimer ce II.

M. le rapporteur. Je m’apprêtais à faire la même remarque : l’amendement doit être rectifié.

Pour rassurer notre collègue Serge Letchimy, je précise que le Gouvernement proposera en séance une prorogation de deux à trois ans des zones franches d’activité. Je souhaiterais un délai de trois ans afin qu’il n’y ait pas de rupture entre le dispositif actuel et la possible entrée en vigueur, d’ici à 2019, des zones franches globales.

La Commission adopte l’amendement CL230 rectifié. L’article 51 est ainsi rédigé.

TITRE XIII (nouveau)
DISPOSITIONS RELATIVES À LA STATISTIQUE ET À LA COLLECTE DE DONNÉES

Le présent titre, issu d’un amendement de votre rapporteur, regroupe des dispositions relatives à la statistique et à la collecte de données. Il comprend trois articles additionnels qui visent à faire sortir les outre-mer de la « cécité statistique » (68) dans laquelle elles se trouvent.

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La Commission examine l’amendement CL300 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement insère un titre XIII dans le projet de loi, regroupant les dispositions relatives à la statistique et à la collecte de données.

La Commission adopte l’amendement. Le titre XIII est ainsi rédigé.

Article 52 (nouveau)
Extension des enquêtes statistiques réalisées par l’État aux collectivités d’outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie

Cet article additionnel, issu d’un amendement de M. Philippe Gomes, dispose que toute enquête statistique réalisée par l’État ou l’un de ses établissements publics sur l’ensemble des départements d’outre-mer doit être étendue à la Nouvelle-Calédonie et aux collectivités d’outre-mer.

L’absence de statistiques de qualité est un réel handicap pour la mise en place de politiques publiques efficaces et leur évaluation dans beaucoup de territoires ultramarins. Dans le rapport qu’il a remis au Premier ministre, votre rapporteur soulignait par exemple que l’enquête annuelle de l’INSEE sur les revenus fiscaux et sociaux des ménages demeurait cantonnée au territoire hexagonal. Par ailleurs, l’Institut de la statistique et des études économiques (ISEE) de Nouvelle-Calédonie et l’Institut de la statistique en Polynésie française (ISPF) n’utilisent pas les mêmes méthodologies que l’INSEE et souffrent d’un manque évident de moyens.

Il est que temps que les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités et assurent un égal traitement statistique des outre-mer par rapport à l’Hexagone.

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La Commission est saisie de l’amendement CL38 de M. Philippe Gomes. 

M. Daniel Gibbes. Il s’agit de rendre obligatoire l’extension à la Nouvelle Calédonie et aux collectivités d’outre-mer en général toute enquête statistique réalisée par l’État ou l’un de ses établissements publics sur l’ensemble des départements d’outre-mer.

La situation actuelle conduit malheureusement à des lacunes préoccupants dans la connaissance de la situation économique et sociale du pays et rend plus incertains la préparation et le pilotage des politiques publiques.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement. L’article 52 est ainsi rédigé.

Après l’article 52

La Commission examine l’amendement CL9 de M. Daniel Gibbes.

M. Daniel Gibbes. Saint-Martin est devenu une collectivité d’outre-mer régie par l’article 74 de la Constitution. Or, en matière statistique, nous sommes très mal lotis : le dernier PIB disponible date de 1995 et n’a été révélé qu’en 2003, ce qui complique la gestion du territoire. Nous demandons donc que, pour la collectivité de Saint-Martin, l’État mette à jour les indicateurs de richesse tous les deux ans au moins, comme c’est le cas en Martinique et en Guadeloupe.

M. le rapporteur. Je comprends cette demande mais rien ne justifie l’instauration d’une différence de traitement, dans la définition des indicateurs, au profit d’une seule collectivité. Avis défavorable.

M. Daniel Gibbes. Il s’agit d’une collectivité d’outre-mer qui traverse aujourd’hui quelques difficultés. Des décisions doivent être prises. Disposer d’indicateurs statistiques aussi importants – même pour un petit territoire – n’est pas un luxe. Saint-Martin est une collectivité depuis 2008 ; or, encore une fois, le dernier PIB disponible date de 1995.

M. le rapporteur. Nous sommes bien conscients de la situation particulière de Saint-Martin. Mais cet amendement relève du domaine réglementaire. En outre, il ne vise pas à pallier l’absence de statistiques – qui est patente et qui a posé problème au niveau européen lorsqu’il a fallu calculer le PIB de Saint-Martin en tant que région ultrapériphérique (RUP) – mais à « mettre à jour » des indicateurs qui n’existent pas. Nous allons combler ce déficit statistique dans tous les territoires et lorsqu’on ne pourra le faire par la loi, on le fera par convention entre tous les instituts producteurs de statistiques. Je vous demande donc de retirer votre amendement.

M. Daniel Gibbes. J’ai pour habitude de maintenir les amendements que j’ai déposés, par principe. Mais j’entends votre réponse, monsieur le rapporteur. Peut-être arriverons-nous à trouver une autre solution en séance publique.

M. Ibrahim Aboubacar. Notre collègue n’exprime pas ici une demande de traitement différencié mais au contraire d’égalité de traitement entre Saint-Martin et les autres collectivités. Ayant à connaître pour avis du budget des collectivités d’outre-mer, je dois dire que cette lacune pose une vraie difficulté sur ce territoire. Nous avons voté l’an dernier une disposition générale en la matière. Peut-être cet amendement ne relève-t-il pas directement du domaine législatif mais la question doit être réglée.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. J’ai pu constater la finesse des chiffres dont nous disposons ici dans l’Hexagone – et je dis « nous » pour ne pas laisser penser que je m’exclus de ce collectif – pratiquement à l’année ou au mois près. Les statistiques du chômage sont lissées semaine par semaine et sont des enjeux politiques majeurs pour toute la nation. Ce n’est pas le cas outre-mer.

Il est scandaleux de donner à piloter des avions sans données de base. Or, c’est exactement ce qui se passe dans la plupart des collectivités d’outre-mer, ce qui m’a poussé, en tant qu’ex-président de région de Martinique, à créer un outil statistique propre. Je me demande comment le Gouvernement prend ses décisions sans chiffres datant de moins de cinq ou dix ans. C’est inacceptable ! Je ne partage pas du tout les opinions politiques de notre collègue Gibbes mais je souhaite vraiment que l’on regarde d’ici à la séance publique quelle réponse on peut apporter au problème qu’il soulève, ne serait-ce qu’en termes d’engagement de l’État. Comment gouverner un pays, donner des orientations, changer de modèle économique sans statistiques ?

M. le président Dominique Raimbourg. L’INSEE n’intervient-il pas de la même manière en outre-mer que dans l’Hexagone ?

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis. Pas du tout.

M. le rapporteur. Je comprends le problème. Nous avons même créé, avec l’amendement CL300, un titre relatif à la statistique et à la collecte des données. L’information statistique, qui relève d’une mission de service public, n’est pas remplie dans les outre-mer car l’INSEE n’a pas les moyens d’y faire la même chose que dans l’Hexagone. C’est cette lacune qu’il faut combler. Mais s’il faut inventer des outils spécifiques à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, en Polynésie française ou ailleurs, on ne s’en sortira pas. Ce n’est pas d’une mise à jour qu’il s’agit. Mayotte est confrontée au même problème : ce fut la croix et la bannière lorsqu’il a fallu discuter avec l’Union européenne et faire admettre le PIB de l’île. Cette collectivité n’a pu fournir à la Cour des comptes le chiffre de la population : son Premier président a dû s’adresser à aux Nations-Unies pour l’avoir ! C’est vous dire dans quelle situation nous nous trouvons dans les outre-mer. Je n’ignore pas ce problème : j’ai dû moi-même croiser bien des informations pour rédiger mon rapport.

M. Daniel Gibbes. J’entends vos arguments mais vous savez bien, Monsieur le rapporteur, que si j’avais demandé la création d’un outil statistique, mon amendement aurait été déclaré irrecevable. Je remercie notre collègue Letchimy d’avoir pris ma défense. Il y a urgence si le Gouvernement et l’État veulent donner une véritable visibilité à ces territoires qui, aussi petits soient-ils, font partie de la République française. Je demande à nos collègues ici présents d’être sensibles à cette question. Imaginez un bateau sans boussole : où peut-il aller ? Que peut-il faire ?

M. le président Dominique Raimbourg. Le problème existe – tout le monde le reconnaît. Il s’agit d’un amendement d’appel mais sa rédaction ne permettra peut-être pas de trouver une solution. Que vous retiriez votre amendement pour le déposer à nouveau en séance publique ou que vous le mainteniez par principe et soyez battu dans l’hémicycle, l’important est que le débat ait lieu et que chacun sache que le traitement statistique de l’outre-mer est différent de celui de l’hexagone, ce qui est pour le moins anormal.

L’amendement CL9 est retiré.

Article 53 (nouveau)
Rapport sur les méthodes de calcul du seuil de pauvreté

Issu d’un amendement de votre rapporteur, cet article additionnel prévoit la remise au Parlement, par le Gouvernement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport sur les bases et les périmètres de calcul des taux de pauvreté des populations des outre-mer et des populations hexagonales, afin d’harmoniser les méthodes de calcul.

Les méthodes de calcul sont en effet aujourd’hui différentes : l’INSEE les établit dans les territoires ultra-marins en référence au revenu médian local, et non au revenu médian national. Selon cette première méthode, le taux de pauvreté s’établit à 17 % à La Réunion et 27,6 % à Mayotte mais il bondirait respectivement à 49 % et 92 % s’il était calculé par rapport au revenu médian national.

Il s’agit donc là de remédier à une inégalité de traitement statistique, qui ne permet pas aujourd’hui de prendre la pleine mesure de la pauvreté dans les territoires d’outre-mer.

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La Commission aborde l’amendement CL228 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’harmoniser les méthodes de calcul des taux de pauvreté entre les différents territoires.

La Commission adopte l’amendement. L’article 53 est ainsi rédigé.

Article 54 (nouveau)
Rapport sur l’intégration du PIB des collectivités d’outre-mer dans la comptabilité nationale

Issu d’un amendement de votre rapporteur, cet article additionnel prévoit la remise au Parlement, par le Gouvernement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport sur les modalités d’intégration du PIB des collectivités d’outre-mer dans le calcul du PIB français.

La comptabilité nationale ne prend en effet pas en compte la richesse produite par les collectivités de Polynésie française, Wallis-et-Futuna, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et de la Nouvelle-Calédonie, c’est à dire quatorze milliards d’euros par an.

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La Commission étudie l’amendement CL229 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement concerne les modalités d’intégration du PIB des collectivités d’outre-mer dans le calcul du PIB français : cela représente quatorze milliards d’euros !

Mme Maina Sage. Nous recherchons les moyens d’assumer de nouvelles charges. Compte tenu de l’importance que peut avoir le suivi du PIB national et du fait que, dans les collectivités d’outre-mer, quatorze milliards d’euros ne sont pas pris en compte, cet amendement permettrait de rattraper très largement les objectifs nationaux à atteindre. Un rapport est cependant nécessaire puisque nous avons une fiscalité propre. J’ajoute que le fait d’être en dehors des radars contribue à la méconnaissance de nos territoires, qui, comme les départements d’outre-mer, sont pourtant une vraie richesse pour la France.

M. Gomes ainsi que d’autres collègues des COM ont la volonté d’étendre les enquêtes statistiques. Mais en dehors des quelques amendements que nous venons d’examiner, le nouveau titre que vous avez créé sur les dispositions en faveur de l’amélioration de la connaissance statistique n’apporte pas grand-chose de plus. En vue de la séance publique, il serait bon, Monsieur le rapporteur, que nous puissions étoffer ce titre et le faire figurer en premier et non en treizième position. Avant d’élaborer des plans de convergence, il faut en effet que nous disposions de données fiables – et donc qu’il y ait un investissement exceptionnel dans nos territoires pour améliorer les connaissances dans les domaines économique, social, culturel et environnemental. Sans cela, ce texte n’aura pas de réalité.

Mme Catherine Coutelle. Nous discutons ici du PIB. Or, de nouveaux indicateurs de richesse sont définis à l’article 8 du projet de loi. Je le précise car je souhaite que figure parmi ces nouveaux indicateurs celui de l’égalité entre les femmes et les hommes. Je tiens aussi à souligner qu’à la demande d’Ibrahim Aboubacar, Mmes Orphé et Duby-Muller ont rendu, au nom de la Délégation aux droits des femmes, un rapport sur l’égalité entre les femmes et les hommes à Mayotte. Nous avons essayé d’y formuler des recommandations que nous avons reprises ici par amendement.

La Commission adopte l’amendement CL229. L’article 54 est ainsi rédigé.

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M. le président Dominique Raimbourg. Je vous remercie, chers collègues, des efforts que vous avez consentis, hier soir et ce matin, pour que nos travaux progressent à un rythme soutenu. Ils se concluent après une audition salle Lamartine, quatre réunions des commissions saisies pour avis et de la commission des Lois et une de la délégation aux outre-mer. Plagiant le poète, je rappelle que partis d’un projet de loi comprenant quinze articles, par un prompt renfort nous nous vîmes en examiner une centaine en arrivant au port… Un tel enchérissement est rarissime !

Je vous invite à participer à partir du mardi 4 octobre à l’examen en séance publique de ce projet de loi, que je vais maintenant mettre aux voix.

La Commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

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En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique (n° 4000), après engagement de la procédure accélérée, dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF

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Dispositions en vigueur

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Texte du projet de loi

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Texte adopté par la Commission

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TITRE IER

TITRE IER

 

STRATÉGIE EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ RÉELLE OUTRE-MER

STRATÉGIE EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ RÉELLE OUTRE-MER

 

Article 1er

Article 1er

 

Dans un objectif d’égalité réelle, la réduction des écarts de développement que connaissent les populations d’outre-mer au sein du peuple français constitue une priorité de la Nation.

La République reconnaît aux populations des outre-mer le droit à l’égalité réelle au sein du peuple français.

 

À cette fin, et dans le respect des compétences dévolues à chacun, l’État, les collectivités territoriales d’outre-mer et leurs établissements publics, la Nouvelle-Calédonie, ses provinces et leurs établissements publics contribuent, par les politiques publiques qu’ils mettent en œuvre, à réduire les écarts de niveaux de développement en matière économique, sociale, environnementale et les différences d’accès aux services publics et à la culture entre le territoire métropolitain et les territoires des collectivités mentionnées aux deuxième et troisième alinéas de l’article 72-3 de la Constitution, ainsi que les écarts constatés au sein de chacun d’entre eux.

La République leur reconnaît le droit d’adopter un modèle propre de développement durable pour parvenir à l’égalité dans le respect de l’unité nationale.

   

Cet objectif d’égalité réelle constitue une priorité de la Nation.

   

À cette fin, et dans le respect des compétences dévolues à chacun et du principe de solidarité nationale, l’État et les collectivités mentionnées aux deuxième et troisième alinéas de l’article 72-3 de la Constitution engagent des politiques publiques appropriées visant :

   

– à résorber les écarts de niveaux de développement en matière économique, sociale, sanitaire, de protection et de valorisation environnementales, de différence d’accès aux soins, à l’éducation, à la culture et aux services publics entre le territoire hexagonal et leur territoire ;

   

– à réduire les écarts de niveaux de vie et de revenus constatés au sein de chacun d’entre eux.

   

Les politiques de convergence mises en œuvre sur la base de la présente loi tendent à créer les conditions d’un développement durable, à accélérer les efforts d’équipement, à favoriser leur inclusion dans leur environnement régional, à participer à leur rayonnement national et international, à valoriser leurs atouts et leurs ressources, à assurer l’accès de tous à l’éducation, à la formation, à l’emploi, au logement, aux soins, à la culture et aux loisirs ainsi qu’à instaurer l’égalité entre les femmes et les hommes et à lutter contre toutes les formes de discriminations.

amendement CL202 (Rect)

 

Article 2

Article 2

 

Les politiques publiques et les objectifs mentionnés à l’article 1er sont définis en concertation par l’État, les collectivités territoriales régies par l’article 73 de la Constitution et leurs établissements publics en tenant compte des caractéristiques et des contraintes particulières des collectivités territoriales d’outre-mer mentionnées à l’article 73 de la Constitution et à l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, ainsi que de la richesse de leur patrimoine culturel et naturel, de leur contribution à la diversité de la Nation et de leur rôle stratégique pour le rayonnement de la France.

Les politiques publiques et les objectifs mentionnés à l’article 1er de la présente loi sont définis en concertation par l’État, les collectivités territoriales régies par l’article 73 de la Constitution et les établissements publics de coopération intercommunale en tenant compte des caractéristiques et des contraintes particulières des collectivités territoriales d’outre-mer mentionnées au même article 73 et à l’article 349 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, ainsi que de la richesse de leur patrimoine culturel et naturel, de leur situation géographique, de leur contribution à la diversité de la Nation et de leur rôle stratégique pour le rayonnement de la France.

amendements CL225 et CL108

 

Ces politiques publiques peuvent notamment être mises en œuvre au moyen d’expérimentations prévues aux articles 37-1 et 72 de la Constitution, d’adaptations prévues à l’article 73 de la Constitution et d’habilitations prévues à l’article 73 de la Constitution.

Ces politiques publiques peuvent notamment être mises en œuvre au moyen d’expérimentations en application des articles 37-1 et 72 de la Constitution et d’adaptations et d’habilitations prévues à l’article 73 de la Constitution.

amendement CL240

 

Article 3

Article 3

 

Les politiques publiques et les objectifs mentionnés à l’article 1er sont définis en concertation par l’État, les collectivités territoriales régies par l’article 74 et leurs établissements publics, la Nouvelle-Calédonie, ses provinces et leurs établissements publics en tenant compte des caractéristiques et des contraintes particulières de ces collectivités, notamment celles mentionnées à l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne pour les collectivités relevant de ce Traité, ainsi que de la richesse de leur patrimoine culturel et naturel, de leur contribution à la diversité de la Nation et de leur rôle stratégique pour le rayonnement de la France. L’État apporte un concours actif dans le cadre de la mise en œuvre de cette démarche.

Les politiques publiques et les objectifs mentionnés à l’article 1er de la présente loi sont définis en concertation par l’État, les collectivités territoriales régies par l’article 74 de la Constitution et les établissements publics de coopération intercommunale, la Nouvelle-Calédonie, ses provinces et les établissements publics de coopération intercommunale en tenant compte des intérêts propres de chacune de ces collectivités au sein de la République, notamment celles mentionnées à l’article 349 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne pour les collectivités relevant de ce traité, ainsi que de leur environnement régional, de la richesse de leur patrimoine culturel et naturel, de leur contribution à la diversité de la Nation et de leur rôle stratégique pour le rayonnement de la France. L’État apporte un concours actif dans le cadre de la mise en œuvre de cette démarche.

amendements CL226,
CL243 et CL2

   

Ces politiques publiques peuvent notamment être mises en œuvre au moyen d’expérimentations en application des articles 37-1 et 72 de la Constitution et d’adaptations prévues à l’article 74-1 de la Constitution.

amendement CL11

   

Article 3 bis (nouveau)

   

La mise en place et le maintien de liaisons territoriales continues entre les différentes composantes du territoire de la République constituent un enjeu de souveraineté et une priorité de l’action de l’État. La continuité territoriale s’entend du renforcement de la cohésion entre les différents territoires d’un même État, notamment les territoires d’outre-mer, et de la mise en place ou du maintien d’une offre de transports continus et réguliers entre les territoires et la métropole. Cette continuité territoriale doit pouvoir être assurée indépendamment de l’obtention d’une quelconque autorisation préalable émanant d’un État tiers.

amendement CL16

   

Article 3 ter (nouveau)

   

La République s’assigne pour objectif la construction de 150 000 logements dans les territoires d’outre-mer au cours des dix années suivant la promulgation de la présente loi. Cet objectif est décliné dans les instruments de mise en œuvre de la convergence prévus au titre II.

amendement CL169

 

TITRE II

TITRE II

 

DISPOSITIONS EN FAVEUR DE LA CONVERGENCE

DISPOSITIONS EN FAVEUR DE LA CONVERGENCE

 

Chapitre Ier

Chapitre Ier

 

Instruments de mise en œuvre de la convergence

Instruments de mise en œuvre de la convergence

 

Article 4

Article 4

 

I. – L’État, les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et leurs établissements publics élaborent, pour le territoire de chacune de ces collectivités, un plan de convergence en vue de réduire les écarts de développement. Ce plan définit les orientations et précise les mesures et actions visant à mettre en œuvre de manière opérationnelle les objectifs visés à l’article 1er.

I. – L’État, les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et les établissements publics de coopération intercommunale élaborent, pour le territoire de chacune de ces collectivités, un plan de convergence en vue de réduire les écarts de développement. Ce plan définit les orientations et précise les mesures et actions visant à mettre en œuvre de manière opérationnelle les objectifs mentionnés à l’article 1er de la présente loi.

amendement CL224

 

II. – Pour atteindre les objectifs visés à l’article 1er, le plan comprend :

II. – (Alinéa sans modification)

 

1° Un volet relatif au périmètre et à la durée du plan, comprise entre dix et vingt ans ;

1° Un volet relatif à son périmètre et à sa durée, comprise entre dix et vingt ans ;

amendement CL241

 

2° Un diagnostic économique, social, financier et environnemental ;

2° (Sans modification)

   

2° bis (nouveau) Un diagnostic portant sur les inégalités de revenu et de patrimoine, les discriminations et les inégalités entre les femmes et les hommes ;

amendement CL290

 

3° Une stratégie de convergence de long terme sur le territoire en tenant compte des institutions, du régime législatif et de la répartition des compétences propres à chaque collectivité. Cette stratégie détermine le niveau de réduction des écarts de développement à atteindre à son terme. Elle fixe les orientations fondamentales pour y parvenir et prévoit des actions en matière d’infrastructures, d’environnement, de développement économique, social et culturel, de santé et d’accès aux soins, d’éducation, de formation professionnelle, d’emploi, de logement, d’accès à la justice, de sécurité, de télécommunications, d’accès aux services publics, à l’information, à la culture et au sport ;

3° Une stratégie de convergence de long terme sur le territoire en tenant compte des institutions, du régime législatif et de la répartition des compétences propres à chaque collectivité. Cette stratégie détermine le niveau de réduction des écarts de développement à atteindre à son terme. Elle fixe les orientations fondamentales pour y parvenir et prévoit des actions en matière d’infrastructures, d’environnement, de développement économique, social et culturel, d’égalité entre les femmes et les hommes, de santé et d’accès aux soins, d’éducation, de lutte contre l’illettrisme, de formation professionnelle, d’emploi, de logement, d’accès à la justice, de sécurité, de télécommunications, d’accès aux services publics, à l’information, à la mobilité, à la culture et au sport ;

amendements CL44, CL25 et CL27

 

4° Un volet regroupant l’ensemble des actions opérationnelles en matière d’emploi, de santé, de jeunesse, de logement et de gestion des ressources naturelles figurant dans les outils de planification pluriannuelle élaborés au niveau national et déclinés au niveau de chaque territoire ultra-marin ;

4° Un volet regroupant l’ensemble des actions opérationnelles en matière d’emploi, de santé, d’égalité entre les femmes et les hommes, de jeunesse, de lutte contre l’illettrisme, de logement et de gestion des ressources naturelles figurant dans les outils de planification pluriannuelle élaborés au niveau national et déclinés au niveau de chaque territoire ultramarin ;

amendement CL45 et CL26

   

4° bis (nouveau) Un volet relatif aux contrats de convergence ou aux autres mesures contractuelles prévues pour sa mise en œuvre ;

amendement CL200

 

5° Un volet contenant les demandes d’habilitation et d’expérimentation ainsi que les propositions de modification ou d’adaptation de dispositions législatives et réglementaires fondées sur les articles 37-1, 72 et 73 de la Constitution et le code général des collectivités territoriales, et portées par les collectivités compétentes ;

5° (Sans modification)

 

6° Un volet contenant la programmation financière des actions et des projets inscrits dans le plan ;

6° (Sans modification)

 

7° Un tableau de suivi des actions et projets faisant état, selon l’ordre de priorité qui leur aura été assigné par les signataires, de tout ou partie des indicateurs prévus au dernier alinéa de l’article 8 de la présente loi ;

7° (Sans modification)

 

8° Toute mesure contractuelle nécessaire à sa gouvernance, à sa mise en œuvre et à son évaluation.

8° (Sans modification)

 

III. – Les documents de planification et de programmation conclus entre l’État d’une part, les collectivités territoriales et leurs établissements publics d’autre part, ainsi que ceux adoptés unilatéralement par l’une ou l’autre des parties en vertu d’une disposition édictée par l’État tiennent compte de la stratégie de convergence définie dans le plan.

III. – Les documents de planification et de programmation conclus entre l’État d’une part, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale d’autre part, ainsi que ceux adoptés unilatéralement par l’une ou l’autre des parties en vertu d’une disposition édictée par l’État sont compatibles avec la stratégie de convergence définie dans le plan.

amendement CL246

 

IV. – Le plan de convergence fait l’objet d’une présentation et d’une discussion au sein de la conférence territoriale de l’action publique mentionnée à l’article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales. Ce débat porte notamment sur l’articulation et la coordination de ces politiques entre les différents niveaux de collectivités et l’État.

IV. – Le plan de convergence fait l’objet d’une présentation et d’un débat au sein de la conférence territoriale de l’action publique mentionnée à l’article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales. Ce débat porte notamment sur l’articulation et la coordination de ces politiques entre les différents niveaux de collectivités et l’État.

amendement CL245

 

V. – Le plan de convergence est signé par l’État, les collectivités et les établissements publics VI 

V. – Le plan de convergence est signé par l’État, les collectivités et les établissements publics de coopération intercommunale dans les douze mois suivant la promulgation de la présente loi et au plus tard le 1er juillet 2018.

amendement CL205

 

VI. – Le plan de convergence peut être révisé, partiellement ou totalement, à mi-parcours ou en cas de modification substantielle apportée aux outils de planification et de programmation qu’il contient.

VI. – (Sans modification)

 

Article 5

Article 5

 

L’État propose aux collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, à la Nouvelle-Calédonie, à ses provinces et à leurs établissements publics de conclure un plan de convergence tenant compte des institutions, du régime législatif et de la répartition des compétences propres à chaque collectivité et inspiré du plan présenté à l’article précédent.

L’État propose aux collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, à la Nouvelle-Calédonie, à ses provinces et aux établissements publics de coopération intercommunale de conclure un plan de convergence tenant compte des institutions, du régime législatif et de la répartition des compétences propres à chaque collectivité et inspiré du plan mentionné à l’article 4 de la présente loi.

amendement CL227

   

Pour les collectivités régies par l’article 74 et la Nouvelle-Calédonie, le plan de convergence comprend un volet institutionnel.

amendement CL4

   

En Nouvelle-Calédonie, le plan de convergence propose les voies permettant une révision du dispositif de la continuité territoriale et les voies permettant notamment un alignement des prix des services bancaires sur ceux constatés en métropole ainsi que l’extension locale de l’ensemble des missions de la Banque publique d’investissement.

amendements CL31, CL34 et CL35

   

Article 5 bis (nouveau)

   

Les plans de convergence mentionnés aux articles 4 et 5 peuvent être déclinés en contrats de convergence, d’une durée maximale de six ans, pendant toute leur durée d’exécution.

   

Les contrats de convergence sont élaborés et signés par l’État et les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution selon des modalités précisées par décret en Conseil d’État. Les contrats de plan ou contrats de développement conclus entre l’État et la collectivité peuvent constituer un volet de ces contrats de convergence.

   

L’État propose aux collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, à la Nouvelle-Calédonie et à ses provinces, de conclure des contrats de convergence tenant compte du régime législatif et de la répartition des compétences propres à chaque collectivité inspirés des présentes modalités.

amendement CL201

 

Article 6

Article 6

Code général des collectivités territoriales

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

(Sans modification)

Art. L. 1111-9. – I. – Les compétences des collectivités territoriales dont le présent article prévoit que l’exercice nécessite le concours de plusieurs collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales sont mises en œuvre dans le respect des règles suivantes :

   

1° Les délégations de compétence sont organisées dans le cadre de la convention territoriale d’exercice concerté prévue au V de l’article L. 1111-9-1 ;

   

2° La participation minimale du maître d’ouvrage, prévue au deuxième alinéa du III de l’article L. 1111-10, est fixée à 30 % du montant total des financements apportés par des personnes publiques ;

   

3° À l’exception des opérations figurant dans le contrat de plan conclu entre l’État et la région, les projets relevant de ces compétences peuvent bénéficier de subventions d’investissement et de fonctionnement soit de la région, soit d’un département.

1° Au 3° du I de l’article L. 1111-9, après les mots : « entre l’État et la région » sont insérés les mots : « et dans le plan de convergence outre-mer » ;

 

II. – La région est chargée d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l’exercice des compétences relatives :

   

1° À l’aménagement et au développement durable du territoire ;

   

2° À la protection de la biodiversité ;

   

3° Au climat, à la qualité de l’air et à l’énergie ;

   

4° (Abrogé)

   

5° (Abrogé)

   

6° (Abrogé)

   

7° À l’intermodalité et à la complémentarité entre les modes de transports, notamment à l’aménagement des gares ;

   

8° Au soutien à l’enseignement supérieur et à la recherche.

   

III. – Le département est chargé d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l’exercice des compétences relatives à :

   

1° L’action sociale, le développement social et la contribution à la résorption de la précarité énergétique ;

   

2° L’autonomie des personnes ;

   

3° La solidarité des territoires.

   

Il est consulté par la région en préalable à l’élaboration du contrat de plan conclu entre l’État et la région en application de la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification afin de tenir compte des spécificités de son territoire.

   

IV. – La commune ou l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre auquel elle a transféré ses compétences est chargé d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l’exercice des compétences relatives :

   

1° À la mobilité durable ;

   

2° À l’organisation des services publics de proximité ;

   

3° À l’aménagement de l’espace ;

   

4° Au développement local.

   

V. – Les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs groupements pour l’exercice des compétences mentionnées aux II à IV sont débattues par la conférence territoriale de l’action publique prévue à l’article L. 1111-9-1.

   

Art. L. 1111-10. – I. – Le département peut contribuer au financement des projets dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les communes ou leurs groupements, à leur demande.

   

Il peut, pour des raisons de solidarité territoriale et lorsque l’initiative privée est défaillante ou absente, contribuer au financement des opérations d’investissement en faveur des entreprises de services marchands nécessaires aux besoins de la population en milieu rural, dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, ainsi qu’en faveur de l’entretien et de l’aménagement de l’espace rural réalisés par les associations syndicales autorisées.

   

II. – (Abrogé)

   

III. – À l’exception des collectivités territoriales et groupements de collectivités territoriales de Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Martinique, Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, toute collectivité territoriale ou tout groupement de collectivités territoriales, maître d’ouvrage d’une opération d’investissement, assure une participation minimale au financement de ce projet.

   

Sans préjudice de l’application de l’article 9 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, cette participation minimale du maître d’ouvrage est de 20 % du montant total des financements apportés par des personnes publiques à ce projet.

   

Pour les projets d’investissement en matière de rénovation des monuments protégés au titre du code du patrimoine, cette participation minimale du maître d’ouvrage est de 20 % du montant total des financements apportés par des personnes publiques, sauf dérogation accordée par le représentant de l’État dans le département.

   

Pour les projets d’investissement destinés à réparer les dégâts causés par des calamités publiques, cette participation minimale du maître d’ouvrage peut faire l’objet de dérogations accordées par le représentant de l’État dans le département, au vu de l’importance des dégâts et de la capacité financière des collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales intéressés.

   

Pour les projets d’investissement en matière d’eau potable et d’assainissement, d’élimination des déchets, de protection contre les incendies de forêts et de voirie communale qui sont réalisés par les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de Corse ou par les communes membres d’un tel établissement lorsque les projets n’entrent pas dans le champ de compétence communautaire, cette participation minimale du maître de l’ouvrage est de 10 % du montant total des financements apportés par des personnes publiques.

   

Pour les opérations d’investissement financées par le fonds européen de développement régional dans le cadre d’un programme de coopération territoriale européenne, la participation minimale du maître d’ouvrage est de 15 % du montant total des financements apportés par des personnes publiques.

   

IV. – Par dérogation aux dispositions du présent article, les collectivités territoriales peuvent financer toute opération figurant dans les contrats de projet État-région et toute opération dont la maîtrise d’ouvrage relève de l’État ou de ses établissements publics.

2° Au IV de l’article L. 1111-10, après les mots : « les contrats de projet État-région » sont insérés les mots : « ou dans les plans de convergence outre-mer ».

 

V. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.

   
 

Article 7

Article 7

 

I. – La deuxième partie du même code est ainsi modifiée :

I. – (Sans modification)

 

1° Après l’article L. 2563-6, il est ajouté un article L. 2563-7 ainsi rédigé :

 
 

« Art. L. 2563-7. – Le rapport sur les orientations budgétaires mentionné à l’article L. 2312-1 présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de la commune. » ;

 
 

2° L’article L. 2564-19 est ainsi rédigé :

 

Art. L. 2564-19. – Le vingtième alinéa de l’article L. 2313-1 est applicable à Mayotte à compter du 1er janvier 2014.

« Art. L. 2564-19. – Le rapport sur les orientations budgétaires mentionné à l’article L. 2312-1 présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de la commune. » ;

 
 

3° L’article L. 2564-19 devient l’article L. 2564-19-1 ;

 

Art. L. 2573-39. – Les articles L. 2312-1 et L. 2312-2 et, à compter de l’exercice 2009, l’article L. 2312-3 sont applicables aux communes de la Polynésie française.

4° L’article L. 2573-39 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

 
 

« Le rapport sur les orientations budgétaires mentionné à l’article L. 2312-1 présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de la commune. »

 
 

II. – La troisième partie du même code est ainsi modifiée :

II. – (Sans modification)

Art. L. 3541-1. – L’article L. 3313-1 n’est pas applicable au Département de Mayotte.

1° L’article L. 3541-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

 

Le budget et le compte administratif arrêtés du Département de Mayotte restent déposés à l’hôtel du Département où ils sont mis sur place à la disposition du public dans les quinze jours qui suivent leur adoption ou éventuellement leur notification après règlement par le représentant de l’État. Ces documents peuvent également être mis à la disposition du public dans chaque canton, dans un lieu public.

   

Le public est avisé de la mise à disposition de ces documents par tout moyen de publicité au choix du président du conseil général.

   

L’article L. 4313-2, à l’exception de la seconde phrase du 9°, et l’article L. 4313-3 sont applicables au Département de Mayotte.

   
 

« Le rapport sur les orientations budgétaires mentionné à l’article L. 3312-1 présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire du Département. » ;

 
 

2° Après l’article L. 3443-2, il est ajouté un article L. 3443-3 ainsi rédigé :

 
 

« Art. L. 3443-3. – Le rapport sur les orientations budgétaires mentionné à l’article L. 3312-1 présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire du département. »

 
 

III. – La quatrième partie du même code est ainsi modifiée :

III. – (Sans modification)

 

Après l’article L. 4434-9, il est ajouté un article L. 4434-10 ainsi rédigé :

 
 

« Art. L. 4434-10. – Le rapport sur les orientations budgétaires mentionné à l’article L. 4312-1 présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de la région. »

 
 

IV. – La cinquième partie du même code est ainsi modifiée :

IV. – (Sans modification)

 

1° Après le chapitre II du titre II du livre VIII de la cinquième partie, il est ajouté un chapitre III ainsi rédigé :

 
 

« Chapitre III

 
 

« Dispositions financières

 
 

« Art. L. 5823-1. – Le rapport sur les orientations budgétaires mentionné à l’article L. 2312-1 présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de l’établissement public de coopération intercommunale. » ;

 

Art. L. 5842-9. – Les articles L. 5211-36 à L. 5211-40-1 sont applicables en Polynésie française.

2° À l’article L. 5842-9, après le premier alinéa, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

 
 

« Pour l’application de l’article L. 5211-36, le rapport sur les orientations budgétaires mentionné à l’article L. 2312-1 présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de l’établissement public de coopération intercommunale. »

 
 

V. – La septième partie du même code est ainsi modifiée :

V. – (Alinéa sans modification)

Art. L. 71-111-3. – Dans un délai de dix semaines précédant l’examen du budget, un débat a lieu au sein de l’assemblée de Guyane sur les orientations budgétaires de l’exercice ainsi que sur les engagements pluriannuels envisagés.

1° À l’article L. 71-111-3, après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

1° (Alinéa sans modification)

 

« Ce débat présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de la collectivité. » ;

« Ce débat porte également sur l’état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de la collectivité. » ;

amendement CL247

Le projet de budget de la collectivité est préparé et présenté par le président de l’assemblée de Guyane qui est tenu de le communiquer aux membres de l’assemblée de Guyane avec les rapports correspondants, douze jours au moins avant l’ouverture de la première réunion consacrée à l’examen dudit budget.

   

Le budget primitif, le budget supplémentaire et les décisions modificatives sont votés par l’assemblée de Guyane.

   

Art. L. 72-101-3. – Dans un délai de dix semaines précédant l’examen du budget, un débat a lieu au sein de l’assemblée de Martinique sur les orientations budgétaires de l’exercice ainsi que sur les engagements pluriannuels envisagés.

2° À l’article L. 72-101-3, après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

2° (Alinéa sans modification)

 

« Ce débat présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de la collectivité. »

« Ce débat porte également sur l’état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de la collectivité. »

amendement CL248

Le projet de budget de la collectivité est préparé et présenté par le président du conseil exécutif de Martinique qui est tenu de le communiquer aux membres de l’assemblée de Martinique avec les rapports correspondants, douze jours au moins avant l’ouverture de la première réunion consacrée à l’examen dudit budget.

   

Le budget primitif, le budget supplémentaire et les décisions modificatives sont votés par l’assemblée de Martinique.

   

Code des communes de Nouvelle-Calédonie

   

Art. L. 212-1. – I. – Le budget de la commune est proposé par le maire et voté par le conseil municipal.

VI. – L’article L. 212-1 du code des communes de Nouvelle-Calédonie est complété par un alinéa ainsi rédigé :

VI. – (Sans modification)

II. – Dans les communes de 3 500 habitants et plus, le maire présente au conseil municipal, dans un délai de deux mois précédant l’examen du budget, un rapport sur les orientations budgétaires, sur les engagements pluriannuels envisagés ainsi que sur la structure et la gestion de la dette. Ce rapport donne lieu à un débat au conseil municipal, dans les conditions fixées par le règlement intérieur prévu à l’article L. 121-10-1. Ce débat fait l’objet d’une délibération spécifique.

   

III. – Dans les communes de plus de 10 000 habitants, le rapport mentionné au II du présent article comporte, en outre, une présentation de la structure et de l’évolution des dépenses et des effectifs. Ce rapport précise notamment l’évolution prévisionnelle et l’exécution des dépenses de personnel ainsi que l’évolution des rémunérations, des avantages en nature et du temps de travail. Il est transmis au représentant de l’État en Nouvelle-Calédonie et au président de l’établissement public de coopération intercommunale dont la commune est membre ; il fait l’objet d’une publication. Le contenu du rapport ainsi que les modalités de sa transmission et de sa publication sont fixés par décret.

   
 

« IV. – Le rapport sur les orientations budgétaires mentionné au présent article présente un état d’avancement des mesures prévues par le plan de convergence outre-mer couvrant le territoire de la commune. »

 

Code général des collectivités territoriales

 

Article 7 bis (nouveau)

   

Le livre Ier de la septième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

Art. L. 7121-1. – Les organes de la collectivité territoriale de Guyane comprennent l’assemblée de Guyane et son président, assistés du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Guyane.

 

1° L’article L. 7121-1 est complété par les mots : « et du grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenguées » ;

Titre XII

Autres organismes

 

2° Le chapitre Ier du titre XII devient le chapitre IV bis du titre II et est ainsi modifié :

Chapitre Ier

Le conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenge

 

a) L’intitulé du chapitre est ainsi rédigé : « Le grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenguées » ;

Art. L. 71-121-1. – Le conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenge est placé auprès du représentant de l’Etat dans la collectivité territoriale de Guyane.

 

b) À l’article L. 71-121-1, devenu l’article L. 7124-11, les mots : « conseil consultatif », sont remplacés par les mots : « grand conseil coutumier » ;

   

c) L’article L. 71-121-2, devenu l’article L. 7124-12, est ainsi rédigé :

Art. L. 71-121-2. – La composition, les conditions de désignation des membres du conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenge, son organisation et ses règles de fonctionnement sont fixées par décret.

 

« Art. L. 7121-12. – Le grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenguées est composé de :

   

« – six représentants des autorités coutumières et traditionnelles amérindiennes désignés par leurs pairs ;

   

« – six représentants des autorités coutumières et traditionnelles bushinenguées désignés par leurs pairs ;

   

« – deux représentants désignés par les organismes et associations représentatifs des populations amérindiennes ;

   

« – deux représentants désignés par les organismes et associations représentatifs des populations bushinenguées ;

   

« – quatre personnalités qualifiées désignées par arrêté du ministre chargé de l’outre-mer.

   

« Le grand conseil coutumier élit en son sein au scrutin secret un bureau, dans les conditions prévues par son règlement intérieur. Les membres du bureau composé d’un président, de deux vice-présidents et d’un secrétaire, qui sont élus pour la moitié de la durée du mandat des membres du conseil et rééligibles. » ;

   

d) L’article L. 71-121-3, devenu l’article L. 7121-13, est ainsi rédigé :

Art. L. 71-121-3. – Les membres du conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenge sont désignés pour six ans.

 

« Art. L. 7121-13. – Les membres du grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenguées sont désignés pour six ans.

Toute personne désignée pour remplacer un membre du conseil consultatif exerce son mandat jusqu’à expiration du mandat de la personne qu’elle remplace.

 

« Toute personne désignée pour remplacer un membre du grand conseil coutumier exerce son mandat jusqu’à expiration du mandat de la personne qu’elle remplace.

Le mandat des membres du conseil consultatif est renouvelable.

 

« Le mandat des membres du grand conseil coutumier est renouvelable.

   

« Le renouvellement du grand conseil coutumier intervient au plus tard dans le mois précédant la fin du mandat de ses membres.

   

« Le grand conseil coutumier peut décider à la majorité absolue de ses membres de procéder au renouvellement intégral du grand conseil coutumier. Le nouveau grand conseil coutumier poursuit jusqu’à son terme le mandat du conseil dissous.

   

« Les sièges devenus vacants en cours de mandat sont pourvus dans les trois mois de la constatation de la vacance.

   

« Le grand conseil coutumier a pour objet d’assurer la représentation des populations amérindiennes et bushinenguées de Guyane, et de promouvoir leurs intérêts juridiques, économiques, socio-culturels et environnementaux. » ;

   

e) L’article L. 71-121-4, devenu l’article L. 7121-14, est ainsi rédigé :

Art. L. 71-121-4. – Tout projet ou proposition de délibération de l’assemblée de Guyane emportant des conséquences sur l’environnement, le cadre de vie ou intéressant les activités culturelles des populations amérindiennes et bushinenge est soumis à l’avis préalable du conseil consultatif.

 

« Art. L. 7121-14. – Tout projet ou proposition de délibération de l’assemblée de Guyane emportant des conséquences sur l’environnement, le cadre de vie ou intéressant les activités culturelles des populations amérindiennes et bushinenguées est soumis à l’avis préalable du grand conseil coutumier.

Le conseil consultatif délibère sur le projet ou la proposition dans le mois de sa saisine. S’il ne s’est pas prononcé dans ce délai, son avis est réputé avoir été donné.

 

« Le grand conseil coutumier délibère sur le projet ou la proposition dans le mois de sa saisine. S’il ne s’est pas prononcé dans ce délai, son avis est réputé avoir été donné.

   

« Il est saisi, selon les cas, par l’assemblée de Guyane ou son président, par le conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Guyane, ainsi que par le représentant de l’État en Guyane. » ;

Art. L. 121-5. - Le conseil consultatif peut être saisi par l’assemblée de Guyane ou son président, par le conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation, ainsi que par le représentant de l’Etat dans la collectivité territoriale, de toute question intéressant l’environnement, le cadre de vie ou les activités culturelles des populations amérindiennes et bushinenge.

 

f) À l’article L. 71-121-5, devenu l’article L. 7121-15,les mots : « conseil consultatif », sont remplacés par les mots : « grand conseil coutumier » ;

   

g) L’article L. 71-121-6, devenu l’article L. 7121-16, est ainsi rédigé :

Art. 71-121-6. – Le conseil consultatif peut décider à la majorité absolue de ses membres de se saisir de toute question entrant dans le champ des compétences de la collectivité territoriale de Guyane et intéressant directement l’environnement, le cadre de vie ou les activités culturelles des populations amérindiennes et bushinenge.

 

« Art. L. 7121-16. – Le grand conseil coutumier peut également s’autosaisir sur tout projet ou proposition de délibération de la collectivité territoriale de Guyane intéressant directement l’environnement, le cadre de vie ou les activités culturelles des populations amérindiennes et bushinenguées.