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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mardi 25 novembre 2014

Séance de 21 heures 15

Compte rendu n° 22

Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, Président

– Suite de l’examen du projet de loi relatif à la réforme de l’asile (n° 2182) (Mme Sandrine Mazetier, rapporteure)

La séance est ouverte à 21 heures 15.

Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, président.

La Commission poursuit l’examen du projet de loi relatif à la réforme de l’asile (n° 2182) (Mme Sandrine Mazetier, rapporteure).

Article 7 (chap. III du titre II du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) : Examen des demandes d’asile par l’OFPRA

La Commission est saisie de l’amendement CL220 de Mme Pascale Crozon.

Mme Pascale Crozon. L’amendement est défendu.

Mme Sandrine Mazetier, rapporteure. Je suggère le retrait de cet amendement. L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) n’est pas une juridiction. Si la demande n’a pas été examinée par l’office dans le délai prévu, le demandeur ira devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA).

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL28 de Mme Chaynesse Khirouni, CL50 de M. Marc Dolez et CL76 de M. Denys Robiliard.

Mme Chaynesse Khirouni. Le présent projet de loi prévoit dix cas de procédures accélérées, ce qui pourrait avoir des conséquences sur l’examen des demandes en procédure normale. Alors que la complexité des parcours nécessite un minimum de temps d’examen, cette disposition risque de conduire à exclure d’emblée les demandes. L’amendement vise donc à limiter les cas de procédures accélérées aux seuls cas de fraude sur l’identité, aux demandes manifestement infondées telles qu’elles sont définies par le comité exécutif du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et pour les personnes qui font l’objet d’une procédure en rétention.

M. Marc Dolez. L’amendement CL50 est défendu.

M. Denys Robiliard. Mon amendement vise aussi à limiter le recours à la procédure accélérée aux cas de fraude sur l’identité, aux demandes manifestement infondées et aux personnes qui font l’objet d’une procédure en rétention.

Mme la rapporteure. La procédure accélérée doit être encadrée – j’ai moi-même déposé plusieurs amendements en ce sens, notamment pour en exclure les mineurs –, mais elle n’en est pas moins utile. Au stade de l’OFPRA, la procédure accélérée ne change rien aux conditions d’examen de la demande par l’officier de protection de l’office : l’entretien est le même, la présence d’un tiers est possible. Cette procédure n’a d’éventuelles conséquences qu’au niveau de la CNDA, qui peut d’ailleurs la reclasser en procédure normale. Je vous invite donc à retirer ces amendements.

La Commission rejette successivement les amendements CL28, CL50 et CL76.

Puis elle en vient à l’amendement CL190 de Mme Marie-Françoise Bechtel.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Il s’agit de revoir l’architecture de cet article pour le rendre plus lisible. Sans changer le fond du texte, l’amendement propose de classer plus clairement les cas dans lesquels l’office décide ou non de recourir à la procédure accélérée et les cas dans lesquels il est tenu de statuer selon cette procédure.

Mme la rapporteure. L’important est que, quelle que soit l’origine du classement en procédure accélérée, l’OFPRA peut décider à tout moment de revenir à une procédure normale. Je vous invite donc à retirer cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL221 de Mme Pascale Crozon.

Mme Pascale Crozon. Cet amendement précise les conditions dans lesquelles l’OFPRA doit examiner les demandes de personnes provenant de pays d’origine sûrs. Parmi ces pays, la France compte notamment le Ghana où l’homosexualité est un crime puni de vingt-cinq ans de prison. Ce pays ne peut donc pas être considéré comme sûr pour tout le monde, et la situation des demandeurs doit être examinée au regard des motifs de persécution qui sont invoqués. Cet amendement transpose les dispositions de l’article 36 de la directive 2013/32/UE.

Mme la rapporteure. Je vous invite à retirer votre amendement, car il est satisfait. D’une part, il ne paraît pas utile d’inscrire dans la loi les catégories consacrées par la Convention de Genève, car cela nous obligerait à le faire dans nombre d’autres articles du texte. D’autre part, je l’ai dit, l’OFPRA, qui est seule à connaître du fond de la demande, pourra toujours reclasser un dossier en procédure normale.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL301 de Mme Maud Olivier.

Mme Catherine Coutelle. La procédure accélérée ne doit pas être appliquée aux personnes victimes de la traite des êtres humains même lorsqu’elles sont arrivées sous une fausse identité, comme c’est très fréquemment le cas.

Mme la rapporteure. Je demande le retrait de cet amendement, qui me paraît satisfait. Il est fréquent que les demandeurs d’asile entrent sur le territoire sous une fausse identité, et l’OFPRA ne classe pas un dossier en procédure accélérée pour ce seul motif. En outre, je le répète, il a toujours la possibilité de reclasser le dossier si la procédure normale paraît adaptée au cas individuel.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL93 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement est dans le même esprit que le précédent. Il est vrai, madame la rapporteure, que l’OFPRA n’applique pas forcément la procédure accélérée aux personnes qui sont arrivées sous une fausse identité. Néanmoins, cette pratique peut évoluer dans le temps, au gré des changements de gouvernement. Je pense donc qu’il est nécessaire de préciser que la procédure accélérée ne peut être appliquée au seul motif que la personne est entrée sur le territoire avec de faux papiers : seuls les documents présentés à l’OFPRA, à l’appui de la demande d’asile, doivent être pris en compte.

Mme la rapporteure. Je vous suggère de retirer cet amendement. L’OFPRA doit pouvoir utiliser les documents produits à divers stades de la procédure et qui pourraient révéler, par exemple, des demandes d’asile multiples ou une usurpation d’identité. Les officiers de protection de l’office savent que les demandeurs d’asile doivent souvent utiliser de faux documents d’identité ou de voyage pour quitter leur pays, et ces documents ne sont pas visés par le projet de loi.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL78 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Cet amendement vise à dissiper toute équivoque : seuls les documents présentés au moment de la demande d’asile sont pris en considération, et non pas ceux qui ont été utilisés pour le voyage.

Mme la rapporteure. Cette préoccupation me paraît d’autant plus justifiée que j’ai déposé un amendement assez proche qui satisfera le vôtre. Je vous suggère donc de retirer votre amendement au profit du mien.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL94 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement de repli vise à préciser les conditions dans lesquelles une demande d’asile peut passer en procédure accélérée au motif que le demandeur a soulevé des questions sans pertinence. Le concept de « question soulevée » apparaît par ailleurs inadapté et imprécis.

Mme la rapporteure. Je vous suggère de le retirer au profit de mon amendement CL331.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL331 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement permettra de juger de la pertinence des questions soulevées par le demandeur non seulement en fonction d’un droit éventuel à l’asile, mais aussi au regard d’une éventuelle protection subsidiaire.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL95 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement propose de ne pas rendre automatique le recours à la procédure accélérée en cas de demande de l’autorité administrative. L’OFPRA doit rester seul juge de la nécessité de l’application de cette procédure. Cela paraît plus conforme à l’article 4 de la directive qui ne parle que d’une « autorité responsable de la détermination qui sera chargée de procéder à un examen approprié des demandes ». Ce serait en outre une mesure de simplification.

Mme la rapporteure. Cette possibilité est déjà prévue par l’alinéa 21 de l’article 7 qui permet à l’OFPRA de reclasser un dossier en procédure normale. Votre amendement me paraissant satisfait, je vous suggère de le retirer.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL96 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Il s’agit d’obliger l’administration à motiver une décision de classement en procédure accélérée.

Mme la rapporteure. Dans les faits, l’administration justifiera par écrit des éléments ayant conduit à la mise en œuvre de la procédure accélérée en cas de recours après un refus de protection. Il ne paraît pas opportun d’alourdir la procédure en prévoyant expressément dans la loi une décision écrite et motivée. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL222 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté, l’amendement propose, à l’alinéa 16, de changer le temps du verbe « présenter » pour le mettre au présent. Il doit être clair que la décision se prendra au moment de la demande d’asile, au vu des documents qui viennent à l’appui de cette demande et non pas de ceux qui auraient pu être présentés lors du passage de la frontière.

Mme la rapporteure. Cette préoccupation est justifiée, mais, étant donné que nous sommes à l’article 7 qui concerne la demande de protection et l’instruction du dossier par l’OFPRA, je ne pense pas qu’il y ait un risque de confusion quant à la nature des documents en cause. À la lecture de l’article, il est clair que l’on se situe au niveau de l’enregistrement par l’autorité administrative et que c’est à celle-ci que le demandeur a éventuellement présenté de faux documents d’identité. Utiliser le temps présent risquerait, au contraire, de conduire à exclure de l’examen de l’OFPRA des cas d’usurpation d’identité ou de demandes d’asile multiples.

M. Guillaume Larrivé. Je ne voudrais pas paraître excessivement répressif, mais, dans l’hypothèse où un ressortissant étranger aurait présenté de faux papiers à l’autorité préfectorale ou à la police aux frontières – ce qui est plutôt un indice de fraude –, nous pourrions envisager d’en tenir compte. Le fait que le demandeur s’adresse à la République française en lui mentant ne justifie-t-il pas l’application de la procédure accélérée ?

Mme la rapporteure. Je vous suggère de passer un peu de temps dans les associations qui accompagnent les demandeurs d’asile et de rencontrer des personnes qui ont obtenu le statut de réfugié. Pour sortir de pays où elles étaient victimes de tortures et de persécutions et entrer en Europe, elles ont souvent dû utiliser des faux papiers.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL97 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Le recours à la procédure accélérée en cas d’entrée illégale sur le territoire apparaît contraire à la Convention de Genève, selon laquelle il ne peut être reproché à un demandeur de pénétrer irrégulièrement sur le territoire d’un État. L’amendement propose donc de supprimer l’alinéa 17.

Mme la rapporteure. J’ai déposé un amendement visant à allonger le délai prévu à l’alinéa 17, qui me semble trop court. En revanche, il ne me semble pas opportun de supprimer totalement ce cas de recours à la procédure accélérée, prévu par l’article 31, paragraphe 8, de la directive « Procédure ». Il n’est pas illégitime de vouloir traiter rapidement une demande d’asile présentée de façon excessivement tardive sans raison valable. Mais le caractère tardif d’une demande peut se justifier par des raisons valables : état de santé, difficultés de compréhension, etc.

L’amendement est retiré.

L’amendement CL223 de Mme Chantal Guittet est retiré.

La Commission examine l’amendement CL37 de M. Éric Ciotti.

M. Guillaume Larrivé. Le projet de loi prévoit la possibilité pour l’OFPRA de statuer en procédure accélérée lorsque l’autorité administrative chargée de l’enregistrement de la demande d’asile constate que, sans raison valable, le demandeur qui est entré irrégulièrement en France ou s’y est maintenu irrégulièrement n’a pas présenté sa demande d’asile dans le délai de quatre-vingt-dix jours à compter de son entrée dans notre pays. L’exigence d’un délai bref pour formuler une demande d’asile après l’entrée sur le territoire est légitime, mais le délai de quatre-vingt-dix jours est trop long et nous proposons de le raccourcir à soixante jours.

Mme la rapporteure. Monsieur Larrivé, je vous souhaite vraiment de ne jamais avoir à faire de démarches dans un pays dont vous ne maîtrisez pas la langue et dont l’organisation administrative ne vous est pas familière. Je pense au contraire que le délai de quatre-vingt-dix jours est trop bref. Il correspond au délai pour un court séjour, mais ne tient pas assez compte de l’état psychologique ou de santé du demandeur, ou du fait qu’il peut manquer d’informations, lesquels risquent de retarder la présentation de la demande. Quant au fait de parler de raison « impérieuse » permettant de déroger au délai, il s’agit d’une notion trop rigide qui ne laisse place qu’à peu d’appréciation. J’émets donc un avis défavorable à cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL332 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Je propose de porter le délai de quatre-vingt-dix jours à quatre mois.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL333 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le présent amendement vise à simplifier la rédaction concernant ce cas de placement en procédure accélérée. Le terme « imminente », en particulier, n’a pas de contenu précis. Dans ces conditions, il est préférable de mentionner une mesure d’éloignement, sans qualificatif et, à l’alinéa 18, de supprimer les mots « prononcée ou imminente ».

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements identiques CL98 de M. Sergio Coronado et CL224 de M. Denys Robiliard tombent.

La Commission en vient à l’amendement CL99 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Il paraît redondant d’ajouter la notion de sécurité publique, qui est d’ailleurs une composante de l’ordre public. Cet amendement propose donc de simplifier la formulation pour l’aligner sur d’autres dispositions du texte qui ne mentionnent que l’ordre public.

Mme la rapporteure. Je vous suggère de le retirer, car ces notions sont tout à fait habituelles en droit des étrangers et correspondent à des concepts utilisés par les juridictions.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL334 de la rapporteure et CL207 de Mme Chantal Guittet.

Mme la rapporteure. Il s’agit de prévoir une disposition plus favorable pour les mineurs isolés présents sur le territoire et qui y sollicitent l’asile et, par suite, de ne pas transposer l’article 25, paragraphe 6, de la directive « Procédure ». Si cette directive permet dans trois cas seulement l’application de la procédure accélérée aux fins d’examen de leurs demandes d’asile, la situation spécifique et la particulière vulnérabilité de ces mineurs non accompagnés justifient qu’il n’y ait pas de dérogation – sauf le cas de l’asile à la frontière – au principe de l’examen de leur demande d’asile selon la procédure normale. Au besoin, l’OFPRA pourra d’ailleurs examiner prioritairement leur demande d’asile, comme cela est prévu à l’article L. 723-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), créé par l’article 6 du projet de loi.

Mme Chantal Guittet, rapporteure pour avis de la commission des Affaires étrangères. Je retire mon amendement CL207 au profit de celui de Mme la rapporteure.

L’amendement CL207 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL334.

En conséquence, les amendements identiques CL100 de M. Sergio Coronado et CL225 de Mme Pascale Crozon tombent.

La Commission en vient à l’amendement CL302 de Mme Maud Olivier.

Mme Catherine Coutelle. Nous souhaitons que la notion de vulnérabilité et ses critères d’application soient inscrits dans le texte, plutôt que renvoyés à la directive. Le fait de les inscrire dans l’article 7 permettra leur utilisation par l’OFPRA et pas seulement au niveau de l’accueil et de l’hébergement.

Mme la rapporteure. C’est précisément pour cette raison que je demande le retrait de votre amendement qui induit une confusion. Telles que vous les définissez, les vulnérabilités sont celles qui doivent être prises en compte pour l’accueil et l’hébergement et non pas celles qui conduisent l’OFPRA à appliquer des garanties procédurales spécifiques lors de l’examen de la demande au fond.

Mme Catherine Coutelle. Comment l’OFPRA va-t-il prendre en compte la vulnérabilité à un moment où la France est mise en demeure de le faire ?

Mme la rapporteure. Nous y reviendrons lors de l’examen d’amendements sur d’autres articles. Prenons l’exemple de l’entretien avec l’officier de protection : il est obligatoire, mais un demandeur d’asile peut en être dispensé s’il est dans l’incapacité psychologique de le supporter. D’autres amendements proposent que, dans le cadre des vulnérabilités prévues par la directive concernant la torture ou les traitements inhumains et dégradants, l’entretien se tienne avec un interprète et un officier de protection du même sexe. Nous tenons compte des vulnérabilités : c’est, je crois, ce que vous recherchez.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL335 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à mieux préciser les vulnérabilités qui peuvent entrer en considération lors de l’examen de la demande et qui peuvent justifier que l’OFPRA adapte les modalités d’examen. Ainsi l’OFPRA pourra tenir compte des informations qui lui auront été transmises par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), mais il pourra également s’appuyer sur ses propres informations. Cet amendement renforce ainsi la prise en considération des vulnérabilités tout en garantissant l’indépendance de l’OFPRA et l’autonomie de la procédure d’examen.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL102 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. La dernière phrase de l’alinéa 29 prévoit que « l’office tient compte également, le cas échéant, du fait qu’il est raisonnable de considérer que le demandeur peut se prévaloir de la protection d’un autre pays dont il est en droit de revendiquer la nationalité ». En instaurant une double incertitude, on met à mal l’objectif de clarté et de prévisibilité de la loi. C’est pourquoi cet amendement propose de simplifier la phrase en supprimant les mots « qu’il est raisonnable de considérer » après l’alinéa 29.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL83 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. D’une certaine façon, cet article précise le régime de la preuve. Selon la recommandation n° 19 de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) sur le présent texte, il y aurait lieu de supprimer toute référence à la preuve dans les dispositions du projet de loi. C’est l’intime conviction qui prime dans la pratique de l’OFPRA et de la CNDA, mais cette notion est très difficile à définir, même si l’on peut se référer au très beau serment que prêtent les jurés en cour d’assises.

Je propose de rédiger ainsi l’alinéa 30 : « L’office peut, au regard des informations dont il dispose sur le pays d’origine, reconnaître la qualité de réfugié en considérant la cohérence et la plausibilité des déclarations du demandeur. »

Ma proposition ne satisfait pas totalement à la recommandation de la CNCDH puisqu’elle n’est pas contraignante et qu’elle est très synthétique. En pratique, on peut reconnaître le caractère fondé d’une demande en analysant la cohérence et la plausibilité des déclarations du demandeur en fonction de la situation de son pays. Il est difficile et non souhaitable d’aller plus loin dans la définition de la preuve, en mettant en place le système relativement complexe prévu par l’alinéa 30 de l’article 7 du projet de loi.

Mme la rapporteure. Tout en comprenant le sens de votre amendement, je pense que vos scrupules sont un peu excessifs : dans l’alinéa 30, il est question d’« indice sérieux », et non de preuve. En outre, cet alinéa 30 est une transposition exacte de l’article 4, paragraphe 4, de la directive « Qualification ». Je demande le retrait de cet amendement.

M. Denys Robiliard. Je n’ai pas en mémoire tous les articles des directives, dont certains sont obligatoires et d’autres optionnels, mais je pense que la position de la CNCDH est très fondée sur la nature de la pratique de l’OFPRA et de la CNDA. C’est pourquoi je maintiens mon amendement.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Je suis un peu surprise, mon cher collègue : votre amendement, tel que je le lis, me semble plus restrictif que le texte selon lequel le fait que le demandeur ait déjà fait l’objet de « menaces » ou « d’atteintes graves » constitue « un indice sérieux ». Il n’y a pas forcément de lien entre les informations sur le pays d’origine dont dispose l’officier qui examine le dossier et la cohérence des déclarations du demandeur. Les mailles de votre filet sont plus lâches que celles qui figurent à l’alinéa 30. Si j’avais à appliquer votre texte, je serais bien embarrassée.

M. Denys Robiliard. Je vais retirer mon amendement pour en clarifier la rédaction. Contrairement à Mme Bechtel, je pense que les mailles de mon dispositif sont moins lâches que celles prévues par le texte.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL103 de M. Sergio Coronado et CL158 de Mme Jeanine Dubié.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à supprimer l’exception de l’asile « s’il existe de bonnes raisons de penser que ces persécutions ou atteintes graves ne se reproduiront pas. » Le concept de « bonnes raisons » est flou et pourrait faire l’objet de multiple recours. Par ailleurs, il permet de refuser une demande d’asile fondée, sur une simple présomption.

Mme la rapporteure. La disposition que vous proposez de supprimer est une transposition exacte de l’article 4, paragraphe 4, de la directive « Qualification ». Une personne a pu être victime de persécutions dans un pays qui a évolué dans l’intervalle : l’indice sérieux ne peut pas avoir un caractère permanent. Sur l’autre rive de la Méditerranée ou en Ukraine, par exemple, les situations sont mouvantes. Une victime de persécutions peut, trois ans plus tard, ne plus être du tout en danger en cas de retour dans son pays. Avis défavorable.

La Commission rejette successivement les amendements CL103 et CL158.

Puis elle examine l’amendement CL51 de M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. Cet amendement vise à supprimer l’article L. 723-5 qui prévoit que l’OFPRA peut demander au demandeur d’asile de se soumettre à un examen médical pour évaluer la crédibilité de ses déclarations. Cette possibilité n’est pas suffisamment encadrée, notamment au regard du secret médical.

Mme la rapporteure. Les dispositions que vous souhaitez supprimer sont une transposition des articles 18 et 25 de la directive « Procédure ». Je souligne que le demandeur d’asile est libre de refuser l’examen médical, ce qui n’empêchera pas l’office de statuer. Par ailleurs, des dispositions réglementaires viendront préciser les garanties qui entourent le dispositif légal. Je suggère donc le retrait de cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL227 de Mme Pascale Crozon.

Mme Pascale Crozon. Cet amendement vise à transposer dans la loi les règles européennes de l’entretien individuel qui sont essentielles pour permettre l’expression de la vérité, notamment dans les cas de violences sexuelles ou de persécutions au motif de l’orientation sexuelle. Les tiers admis à l’entretien ne doivent en aucun cas être membres de la famille. Les conjoints doivent être entendus séparément et en dehors de la présence de parents. Si l’office suspecte qu’un mineur ait pu subir des persécutions, il peut l’entendre individuellement. S’il peut procéder à un entretien collectif lorsqu’il l’estime nécessaire, cela ne peut être qu’en complément de l’entretien individuel.

Mme la rapporteure. Cet amendement très concret et très protecteur des droits des personnes, mineures ou majeures, témoigne d’une excellente connaissance de la situation. J’y suis très favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis, elle en vient à l’amendement CL6 de la commission des Affaires étrangères.

Mme Chantal Guittet, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères. Cet amendement vise à ce que soit mieux précisée la connaissance de la langue de la personne qui est interrogée.

Mme la rapporteure. Cette rédaction offre probablement plus de garanties aux demandeurs d’asile. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL228 de Mme Pascale Crozon.

Mme Pascale Crozon. Cet amendement vise à transposer une disposition européenne. Il s’agit de permettre aux personnes qui invoqueraient des persécutions ou atteintes graves de nature sexuelle de demander à être entendues par un officier de même sexe et en présence d’un interprète de même sexe. Ces discriminations fondées sur le sexe sont conformes au code pénal qui les autorise lorsqu’elles sont proportionnées à l’objectif de protection des victimes de violences sexuelles.

Mme la rapporteure. Avis très favorable.

Mme Marie-Françoise Bechtel. J’approuve cet amendement, mais je m’étonne de la restriction induite par la formule « dans la mesure du possible ».

Mme la rapporteure. C’est qu’il n’est pas toujours possible de trouver une femme interprète pour certains dialectes.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL336 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement, qui vise à élargir le cercle des associations qui peuvent accompagner le demandeur à l’entretien, m’a été inspiré par nombre d’auditions et suggéré par la quasi-totalité de mes collègues présents ce soir.

M. Patrick Mennucci. Quelle est la procédure d’agrément pour les associations ?

Mme la rapporteure. Elles sont agréées par l’OFPRA, pour éviter que des organisations, qui pourraient n’être que le faux nez de persécuteurs, n’assistent à l’entretien.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CL5 de la commission des Affaires étrangères tombe.

L’amendement CL104 de M. Sergio Coronado est retiré.

La Commission examine l’amendement CL106 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. La qualité et la clarté du récit sont extrêmement importantes dans la prise en compte de la demande d’asile. Cet amendement vise à permettre au conseil d’intervenir pendant l’entretien, de manière très limitée, pour rectifier une erreur de traduction. Il n’y a pas nécessairement de traducteur pour chaque langue et une seule erreur de traduction peut nuire à l’ensemble d’un entretien.

Mme la rapporteure. M. Coronado a raison de souligner le caractère décisif de la préparation de l’entretien et de la compréhension de la traduction, mais il prête des talents immenses aux avocats dont je doute qu’ils puissent traduire toutes les langues. Je suis défavorable à cet amendement, même s’il soulève un problème important, celui de l’interprétariat. L’avocat n’a pas à se substituer à un interprète professionnel.

M. Sergio Coronado. Les demandeurs d’asile, notamment les Syriens et les Kurdes, sont parfois assistés de conseils qui sont issus de leur communauté, ce qu’on essaie d’éviter autant que possible. Quoi qu’il en soit, le conseil maîtrise parfois mieux la langue dans laquelle le demandeur s’exprime que l’interprète qui lui est dévolu. Son intervention viserait à rectifier une erreur de traduction, pas à se substituer à l’interprète présent.

Mme la rapporteure. Le conseil a toujours la possibilité, à la fin de l’entretien, de porter des observations. S’il a constaté une erreur manifeste de traduction, il peut non seulement le dire, mais l’écrire.

M. Patrick Mennucci. Il faut faire attention, car ces personnes, issues de la même communauté, peuvent raconter une histoire qui n’est pas celle du demandeur. Pour plus de sûreté, il vaut mieux s’en tenir à la possibilité de faire des observations sur la traduction.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL85 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Le texte prévoit que l’avocat ou le représentant d’association peut intervenir à la fin de l’entretien, alors qu’il me semble que les réflexions – ou les petites rectifications de la part de quelqu’un qui maîtriserait parfaitement la langue – sont plus utiles en cours d’entretien, sous le contrôle de l’officier de protection. La crainte de l’OFPRA est que le tiers vienne polluer l’entretien s’il n’est pas cantonné à son rôle actuel : audition, prise de notes, observations finales. Il me semble que l’on peut lui donner un rôle plus actif sans perturber l’entretien entre le demandeur et l’officier de protection.

En matière de procédure pénale, la France a mis beaucoup de temps à accepter que l’avocat joue un rôle d’abord dans le cabinet du juge d’instruction, puis dans les locaux de garde à vue. En l’occurrence, cela s’apparente au régime de la garde à vue. Dans le cabinet d’instruction, l’avocat peut poser des questions et faire des observations au cours de l’interrogatoire, sous le contrôle du juge. S’il n’est pas nécessaire de prévoir autant de formalisme, il ne faut pas que la personne qui accompagne le demandeur soit réduite au silence pendant tout l’entretien. C’est trop lourd et parfois contre-productif, y compris pour la manifestation de la vérité.

Mme la rapporteure. La procédure dont il est ici question n’a rien à voir avec la garde à vue. Il s’agit d’un entretien au cours duquel le demandeur d’asile explique ce qui lui est arrivé à un officier de protection de l’OFPRA. Pour les raisons précédemment évoquées, je suis défavorable à ce que le conseil intervienne durant l’entretien.

La Commission rejette l’amendement.

L’amendement CL107 de M. Sergio Coronado est retiré.

La Commission examine l’amendement CL191 de Mme Marie-Françoise Bechtel.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Il me semble que la possibilité pour l’officier de protection de procéder à un entretien sans que le demandeur soit accompagné d’un avocat ou du représentant d’une association doit être articulée avec l’assurance que l’intéressé a bien été informé de son droit à être assisté. C’est prévu au stade de l’accueil, me dit-on. Je ne vois pas très bien à quel endroit, sans compter que l’accueil peut être défaillant. Il me semble qu’il appartient à l’officier de s’assurer, fût-ce d’une phrase, que le demandeur sait qu’il a la possibilité de se faire accompagner. Une telle disposition est fréquente, notamment dans les procédures disciplinaires.

Mme la rapporteure. Je suis défavorable à cet amendement. Ce n’est pas à l’OFPRA de s’assurer que cette information a été donnée. Quand une personne fait sa demande d’asile, l’autorité administrative doit l’enregistrer dans les trois jours. Ensuite, le demandeur est accueilli par l’OFII : sa situation personnelle est prise en compte ; il est orienté vers un lieu d’hébergement ; il bénéficie d’un accompagnement juridique et social ; la procédure lui est expliquée et on l’aide à retracer son parcours. Au stade de l’OFPRA, nous ne devons pas introduire des dispositions qui alourdiraient la procédure et permettraient à certains de soulever des moyens liés à un défaut d’information en la matière.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Je ne suis pas convaincue. Au stade de l’accueil, l’intéressé se verra remettre un livret où il est indiqué qu’il peut se faire accompagner d’un avocat ou d’un représentant d’association. Quand il se présente à l’OFPRA, l’officier peut procéder à l’entretien même s’il voit que l’intéressé n’est pas accompagné. Le fait de s’assurer d’une phrase qu’il a bien été informé de son droit à être accompagné n’alourdit pas la procédure. Il est même du devoir de l’officier de l’OFRA, s’il veut que la procédure soit correcte, de s’assurer qu’il en a bien été informé. Sans ce qui est une disposition très banale dans les procédures administratives, il me semble qu’il y a un chaînon manquant.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL108 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à supprimer la possibilité de clôture créée dans ce projet de loi, qui aura des conséquences importantes pour le demandeur d’asile puisqu’elle aboutira au non-examen de la demande. Elle pourra intervenir dans des cas très divers : lorsque le demandeur, sans raison valable, n’aura pas introduit sa demande auprès de l’office dans les délais impartis ; lorsqu’il ne se sera pas présenté à une convocation pour un entretien à l’office ; lorsqu’il aura fui ou quitté sans autorisation le lieu où il était hébergé ; lorsqu’il n’aura pas respecté ses obligations de présentation et de communication aux autorités, sauf s’il en a informé lesdites autorités dans un délai raisonnable.

Le demandeur faisant l’objet d’une décision de clôture ne pourra obtenir la réouverture de son dossier qu’une seule fois. Cette décision est une première en droit administratif français. Je souhaite pouvoir permettre le recours.

Mme la rapporteure. Je ne suis pas favorable à la suppression pure et simple de la procédure de clôture qui peut se justifier dans certaines hypothèses. Je suggère d’en restreindre les cas comme le prévoit l’un de mes amendements.

M. Sergio Coronado. Je conçois parfaitement que la clôture puisse se justifier, mais pas que le demandeur n’ait aucun recours.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission examine l’amendement CL109 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à verser au dossier du demandeur les observations formulées à la fin de l’entretien par son avocat ou le tiers qui l’accompagne. Il est indispensable que ces observations soient contenues dans le dossier, afin de leur donner une utilité concrète.

Mme la rapporteure. Cette précision supplémentaire est très utile et permet d’éclairer les débats que nous avons eus précédemment. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques CL110 de M. Sergio Coronado et CL160 de Mme Jeanine Dubié.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à permettre une transmission automatique des transcriptions aux demandeurs et à leurs conseils. Cette mesure est de simplification, l’envoi sur demande pouvant être plus chronophage qu’un envoi automatique.

Mme la rapporteure. Nous n’avons pas le même point de vue sur la simplification et les économies. L’envoi systématique, qui n’est nullement réclamé par la directive, compliquera et alourdira inutilement la tâche de l’OFPRA. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques CL111 de M. Sergio Coronado, CL161 de Mme Jeanine Dubié et CL229 de Mme Pascale Crozon.

M. Sergio Coronado. L’exception prévue à l’alinéa 45, qui porte sur la transmission tardive des transcriptions en cas d’utilisation de la procédure accélérée, ne se justifie pas. C’est pourquoi nous proposons de supprimer l’alinéa.

Mme Jeanine Dubié. Aucun impératif d’accélération n’impose de priver les demandeurs d’asile qui font l’objet d’une procédure accélérée d’une garantie procédurale simple, en l’espèce la remise en amont de la retranscription de l’entretien OFPRA. D’une part, cette garantie est facilement accessible. D’autre part, une privation de ce droit, à laquelle s’ajoutent des délais restreints devant la CNDA, constitue une entrave, discriminatoire au droit au recours effectif pour cette seule catégorie de demandeurs d’asile.

Mme Pascale Crozon. Mon amendement est défendu.

Mme la rapporteure. La communication de la transcription lors – et non pas en amont – de la notification de la décision de l’OFPRA, en cas d’application de la procédure accélérée, est autorisée par l’article 17 de la directive « Procédure ». Il s’agit, alors que cette procédure accélérée a été mise en œuvre et que l’OFPRA n’a pas reclassé le dossier en procédure normale, de ne pas alourdir le travail de l’office et de ne pas allonger excessivement les délais, sans néanmoins priver l’intéressé d’une garantie. La disposition en cause du projet de loi me paraît donc tout à fait acceptable.

La Commission rejette les amendements.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il faudra qu’on m’explique pourquoi, parfois, les signataires ne votent pas pour les amendements qu’ils ont déposés.

Mme la rapporteure. C’est qu’un rapporteur peut convaincre ses collègues !

La Commission examine l’amendement CL417 du Gouvernement.

Mme la rapporteure. La directive « Procédure » permet aux États membres de prévoir un enregistrement de l’entretien personnel. Cette possibilité est évoquée à l’article 19 du présent projet de loi. Il importe de réglementer l’accès à ce type de document afin qu’il ne fasse pas l’objet d’utilisations malveillantes, de tentatives de déstabilisation de certains officiers de protection, etc.

Tel est l’objet du présent amendement qui prévoit notamment un accès dans des conditions sécurisées, une interdiction de diffusion et, par ailleurs, un accès uniquement après notification de la décision de rejet de l’OFPRA, en conformité avec l’article 17, paragraphe 5, de la directive « Procédure ». J’y suis donc favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis, elle examine l’amendement CL112 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à prévoir que la décision d’irrecevabilité prise par l’OFPRA soit écrite et motivée.

Mme la rapporteure. C’est une précision utile. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient aux amendements identiques CL7 de la commission des Affaires étrangères et CL113 de M. Sergio Coronado.

Mme Chantal Guittet, rapporteure pour avis de la commission des Affaires étrangères. Il convient de préciser que la protection au titre de l’asile dont bénéficie le demandeur dans un autre État membre de l’Union doit être effective.

Mme la rapporteure. Depuis l’adoption du « protocole Aznar », qui accompagnait le traité d’Amsterdam, la protection accordée par les États membres de l’Union européenne est présumée effective. Cela justifie que le mot « effective » ne soit pas inséré ici. Pour autant, cela ne signifie pas un blanc-seing donné à tous les États qui peuvent être attaqués en manquement à leurs obligations. Par ailleurs, la présomption de protection peut être renversée. Enfin, la décision d’irrecevabilité reste une faculté, et non une obligation, pour l’OFPRA. J’émets donc un avis défavorable à cet amendement.

M. Sergio Coronado. La possibilité d’attaquer les États qui ne respectent pas les engagements qu’ils ont pris ne change pas le sort qui est fait aux demandeurs : certains États européens ne sont pas en mesure d’assurer l’effectivité de la protection ; des dizaines d’articles de presse dénoncent les conditions d’accueil en Grèce et en Italie. Loin d’être superflue, la précision sur l’effectivité me semble même être obligatoire.

Mme la rapporteure. C’est à la Commission européenne – et non pas à la France – qu’il revient de faire respecter l’effectivité des droits dans l’Union. Les États membres peuvent être attaqués en manquement et la Commission peut constater une défaillance du système d’asile, comme en Grèce et en Italie. D’ailleurs, la France ne renvoie plus les réfugiés vers des États dont la défaillance a été constatée par la Commission.

M. Sergio Coronado. Certes, il ne revient pas à la France d’attaquer les États dont le système est défaillant, mais il s’agit d’en tenir compte au cours de la procédure. La France ne renvoie plus les réfugiés vers des États défaillants, mais elle l’a fait et rien ne dit qu’un changement politique ne viendra pas affecter la manière dont l’OFPRA se comporte. Je suggère que cette bonne pratique soit consacrée dans le texte de loi.

La Commission rejette les amendements.

L’amendement CL86 de M. Denys Robiliard est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL337 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’objet de cet amendement est multiple.

Il distingue entre retrait explicite et renonciation implicite. En effet, la directive « Procédure » distingue nettement entre le retrait explicite d’une demande d’asile – conformément à l’article 27 de la directive qui n’impose aucun formalisme particulier, la consignation d’une clôture d’examen par l’OFPRA dans le dossier du demandeur étant suffisante – et le retrait ou la renonciation implicite. L’article 28 de la directive permet à l’OFPRA de prendre formellement une décision de clôture dans certains cas « lorsqu’il existe un motif sérieux de penser qu’un demandeur a retiré implicitement sa demande ou y a renoncé implicitement ».

Il vise à préciser également davantage la nature des délais que doit respecter le demandeur pour éviter une décision de clôture d’examen.

Il propose de placer l’expression « sans justifier de raison valable » en facteur commun à deux motifs. Il est indispensable en effet de réserver le cas où des circonstances particulières, indépendantes de la volonté du demandeur, l’auraient empêché d’introduire sa demande dans les délais impartis.

Il tend à supprimer le cas de clôture d’examen lorsque le demandeur a quitté sans autorisation son lieu d’hébergement, qui peut être un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) ou un lieu d’hébergement d’urgence. En effet, la demande d’asile constitue une problématique distincte des considérations liées à l’hébergement ou à la présentation aux autorités. Le sort réservé à la demande d’asile ne saurait donc être lié à ces considérations d’absence ou de présence dans les lieux d’hébergement.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CL52 de M. Marc Dolez, CL8 de la commission des Affaires étrangères, CL115 et CL114 de M. Sergio Coronado, CL24 de Mme Chaynesse Khirouni, CL230 de Mme Pascale Crozon, CL9 de la commission des Affaires étrangères, CL116 et CL117 de M. Sergio Coronado tombent.

La Commission examine les amendements CL418 du Gouvernement et CL118 de M. Sergio Coronado, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme la rapporteure. L’amendement CL418 apporte une précision bienvenue concernant le recours contentieux à la suite d’une décision de clôture prise par l’OFPRA. Je rappelle qu’il ne s’agit pas d’une décision au fond et que le demandeur peut demander sans formalité, dans un délai de neuf mois, la réouverture de son dossier. Si l’office refuse, le demandeur a la possibilité d’engager un recours contentieux devant le tribunal administratif, mais il ne pourra le faire, bien évidemment, que s’il a bien déposé au préalable la demande de réouverture. Votre rapporteure est favorable à ce dispositif conforme à l’article 46 de la directive « Procédure ».

L’amendement CL118 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL418.

Elle en vient à l’amendement CL231 de Mme Pascale Crozon.

Mme Pascale Crozon. Lorsqu’une demande de réexamen est recevable, c’est-à-dire lorsqu’il existe des faits nouveaux à l’appui de la demande d’asile, le texte dispose que l’OFPRA peut ne pas procéder à un entretien. Nous pensons qu’il convient de distinguer les faits nouveaux qui corroborent la première demande et les faits nouveaux qui conduisent à identifier une vulnérabilité particulière. En effet, les victimes de traite ou de violences sexuelles n’évoquent pas toujours, par honte, par pudeur, ou simplement par impossibilité de l’exprimer, la situation dans laquelle elles se trouvent. Il faut parfois un long processus de maturation pour qu’elles arrivent à intégrer ces faits à leur histoire personnelle et à accepter d’en parler. Dans ce cas – et c’est l’objet de cet amendement –, il faut que l’office procède à un nouvel entretien.

Mme la rapporteure. Le projet de loi offre de bonnes garanties concernant la détection et la prise en compte des vulnérabilités pendant toute la durée de la procédure, y compris après la décision définitive, si elles sont de nature à modifier l’appréciation précédente. Votre amendement étant satisfait, je vous suggère de le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL53 de M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. Il s’agit de garantir l’entretien avec le demandeur d’asile lors de l’examen préliminaire.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Si toute demande de réexamen donne lieu à un entretien, il deviendra impossible de réduire les délais, ce qui est contraire à l’esprit de la réforme.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques CL162 de Mme Jeanine Dubié, CL232 de M. Denys Robiliard, CL338 de la rapporteure et CL119 de M. Sergio Coronado.

Mme Jeanine Dubié. Il serait totalement injuste et contraire à la Convention de Genève de priver un demandeur d’asile de protection internationale, alors qu’il encourt des persécutions, au seul motif que l’élément nouveau est né de l’action du demandeur.

Cette disposition imprécise et dangereuse expose la France à une condamnation par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour violation du droit de mener une vie privée et familiale normale et pour discrimination. Elle peut en outre être contredite par la nouvelle rédaction de l’article L. 713-4 prévue par l’article 4 du projet de loi.

M. Denys Robiliard. L’alinéa 75 que nous proposons de supprimer est strictement contraire à la Convention de Genève. Si une personne risque effectivement d’être persécutée pour une des raisons énoncées dans la Convention, je ne vois pas comment la loi française pourrait lui refuser le statut de réfugié. Sans doute y a-t-il là une inadvertance de rédaction.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, les amendements CL10 de la commission des affaires étrangères et CL120 de M. Sergio Coronado tombent.

Puis la Commission adopte l’article 7 modifié.

Section 2 : Dispositions relatives à l’examen des demandes d’asile à la frontière

Article 8 (art. L. 213-8-1 et L. 213-8-2 [nouveaux], L. 213-9, L. 221-1 et L. 224-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) : Refus d’entrée sur le territoire au titre de l’asile

La Commission est saisie de l’amendement CL87 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. L’alinéa 4 vise à appliquer la procédure dite « Dublin » aux demandes d’asile formulées par les personnes se présentant à la frontière. Alors que les demandeurs concernés sont forcément dans une situation précaire et inconfortable, cette procédure est complexe et peut faire l’objet de recours spécifiques. Elle ne me paraît donc pas du tout adaptée. Le fait que l’étranger demandeur puisse entrer sur le territoire français si sa demande n’est pas manifestement infondée n’empêchera pas l’examen de sa demande par l’État qui en a la compétence au sens du règlement Dublin du 26 juin 2013.

Mme la rapporteure. Le règlement Dublin III prévoit que la présentation d’une requête de prise en charge auprès d’un autre État membre intervienne immédiatement et au plus tard dans un délai d’un mois en cas de rétention, y compris à la frontière. L’État requis dispose alors d’un délai de quinze jours pour répondre. À défaut de réponse, il est réputé avoir donné son accord. Par conséquent, le refus d’entrée d’un demandeur d’asile « dublinable » est possible dans le délai maximal de maintien en zone d’attente – soit vingt jours portés à trente jours dans certains cas – si la requête, la réponse et le transfert ont lieu très vite. La procédure concernera principalement des étrangers munis d’un visa Schengen ou enregistrés dans le fichier national des étrangers comme provenant d’un autre État membre. Avis défavorable.

M. Denys Robiliard. Je sais bien qu’il existe une procédure d’urgence. Mais après le délai de quinze jours laissé à l’État requis s’ouvre un nouveau délai de recours alors que le demandeur d’asile ne peut être maintenu en zone d’attente que pendant vingt jours. Dans ces conditions, il paraît difficile, voire impossible, de suivre la procédure Dublin.

M. Guillaume Larrivé. J’aimerais que le groupe majoritaire se rende compte du caractère profondément anti-européen de cet amendement. Sans doute l’intention est-elle généreuse, mais la suppression proposée revient à considérer qu’il n’existe pas de partage des responsabilités entre les États membres en matière d’examen des demandes d’asile !

Concrètement, lorsqu’un étranger arrive à Roissy et est accueilli en zone d’attente, les autorités de la République française sont parfaitement fondées à rechercher si cette personne a déjà déposé une demande d’asile dans un État appartenant à la même communauté de droit que nous. Pourquoi la France serait-elle seule légitime à examiner les demandes d’asile, sans se soucier de ce qu’ont pu déjà faire ses partenaires ?

L’amendement doit aussi être rejeté pour ces raisons de fond.

M. Denys Robiliard. Le recours ouvert par le règlement Dublin est suspensif et le tribunal a lui-même un délai pour statuer. Je maintiens que la procédure ne peut « tenir » dans le délai de vingt jours de maintien en zone d’attente et je ne vois pas en quoi la volonté de rendre ce recours effectif serait anti-européenne. De toute façon, la procédure Dublin peut se poursuivre en dehors du cadre de la zone d’attente, où la liberté de la personne est du reste très limitée puisqu’il s’agit d’une sorte de rétention qui ne dit pas son nom. Il n’y a rien d’idéologique dans ma position : je ne fais qu’additionner les différents délais.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL339 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il est très difficile pour l’OFPRA de démontrer, dans le délai prévu de quatre-vingt-seize heures et en zone d’attente, que le demandeur bénéficie déjà d’une protection dans un État membre ou d’une protection effective dans un État tiers. Je propose donc de supprimer ces deux cas d’irrecevabilité.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de précision CL340 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CL341 du même auteur.

Mme la rapporteure. Le caractère manifestement infondé de la demande suppose de démontrer, comme le prévoit l’alinéa 7, que la demande est manifestement dénuée de pertinence au regard des conditions d’octroi de l’asile ou manifestement dépourvue de toute vraisemblance en ce qui concerne le risque de persécution ou d’atteinte grave. Ajouter le critère du « caractère incohérent, contradictoire, faux ou peu plausible » des déclarations du demandeur ou des documents produits ne semble guère pertinent et laisse penser que l’on procède déjà à un examen au fond de la demande d’asile.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Je retire mon amendement CL193, qui arrive plus loin dans la discussion, au bénéfice de celui-ci.

La Commission adopte l’amendement.

Elle étudie ensuite l’amendement CL233 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Je propose de définir la demande « manifestement infondée » par l’absence de tout lien entre les déclarations ou documents du demandeur et les motifs de protection. Ce critère, que l’on trouve ailleurs dans le texte, me paraît clair et suffisant.

Mme la rapporteure. Je suggère le retrait.

L’amendement est retiré.

Les amendements CL121 de M. Sergio Coronado et CL193 de Mme Marie-Françoise Bechtel sont également retirés.

La Commission adopte ensuite l’amendement CL342 de la rapporteure.

Elle est saisie de l’amendement CL88 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. L’exception à l’avis conforme de l’OFPRA introduite au début de l’alinéa 9 mettrait notre législation en contradiction avec l’article 33 de la Convention de Genève, qui fixe le principe de non-refoulement vers le pays d’origine. Elle se heurte également à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Mme la rapporteure. La possibilité, pour le ministère de l’Intérieur, de refuser l’accès au territoire existe depuis toujours et n’a jamais donné lieu à une condamnation de la France au titre de la Convention de Genève. Je propose néanmoins, dans l’amendement suivant, que ce refus ne soit possible qu’en cas de « menace grave » pour l’ordre public, afin d’éviter toute banalisation.

Du reste, une des avancées de ce projet de loi est que l’avis de l’OFPRA lie désormais, sauf en ce cas, le ministre chargé de l’asile.

M. Guillaume Larrivé. Je suis défavorable à l’amendement de M. Robiliard comme à celui de Mme la rapporteure. Le ministre chargé de l’immigration, qui est également le ministre chargé de la sécurité intérieure, préserve l’ordre public et la sécurité de nos compatriotes. La circonstance que l’OFPRA – qui, contrairement au pape, n’est pas infaillible – donne un avis ne doit pas nécessairement le lier. À chacun son métier ! L’office procède à une appréciation qualitative de la demande et de la qualification des faits au regard du droit d’asile ; le ministre de l’Intérieur, quant à lui, dispose d’autres informations – de notes de la direction générale de la sécurité intérieure, par exemple – et peut considérer qu’il est de sa responsabilité de refuser l’entrée en France d’un étranger. Pourquoi, dans une partie du groupe majoritaire, cette méfiance viscérale à l’endroit du pouvoir régalien et, tout particulièrement, du ministre chargé de la police ? La police, que je sache, est républicaine et son but est la protection des Français !

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite les amendements identiques CL343 de la rapporteure et CL122 de M. Sergio Coronado.

Elle en vient à l’amendement CL123 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à préciser que la menace qui justifierait un refus du ministère de l’Intérieur doit être spécialement motivée. Il répond à une recommandation du Défenseur des droits.

Mme la rapporteure. Le Conseil d’État exige déjà que la décision du ministre soit précisément motivée pour justifier du refus d’accès au territoire d’un demandeur qui aurait reçu un avis positif de l’OFPRA. Si tel n’est pas le cas, il procède à l’annulation. Le Défenseur des droits est donc satisfait.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL344 à CL348 de la rapporteure.

Elle en vient à l’amendement CL350 du même auteur.

Mme la rapporteure. Pour répondre notamment aux préoccupations exprimées par Mme Coutelle et les membres de la délégation aux droits des femmes, il est proposé de reprendre les termes de l’article 24, paragraphe 3, de la directive « Procédures » définissant les violences graves que l’OFPRA doit prendre en compte pour déterminer le caractère fondé ou manifestement infondé de la demande d’asile en zone d’attente.

Mme Catherine Coutelle. Dans son avis sur le projet de loi, la CNCDH demande que l’on intègre la vulnérabilité mieux qu’on ne le fait actuellement, non seulement en matière d’accueil, mais aussi tout au long du parcours du demandeur d’asile.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte également l’amendement rédactionnel CL349 du même auteur.

Elle étudie ensuite les amendements CL54 de M. Marc Dolez, CL124 de M. Sergio Coronado, CL234 de Mme Pascale Crozon et CL351 de la rapporteure, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. Marc Dolez. Mon amendement vise à supprimer toute possibilité de maintenir les mineurs isolés demandeurs d’asile en zone d’attente.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Je propose pour ma part de renforcer le caractère exceptionnel de ce maintien, sachant toutefois qu’on ne peut l’exclure tout à fait, dans l’intérêt même du mineur.

M. Sergio Coronado. Cela me paraît injustifiable dans tous les cas. Mon amendement rejoint celui de M. Dolez.

Mme Pascale Crozon. Le mien renvoie au droit commun, qui fait obligation à l’autorité administrative d’alerter le procureur de la République, lequel désigne un administrateur ad hoc dans un délai de vingt-quatre heures.

Mme la rapporteure. Je comprends les intentions de mes collègues, mais nous devons mesurer le risque qui peut exister à permettre à des mineurs de sortir d’une zone d’attente en les confiant, par exemple, à l’aide sociale à l’enfance, avant qu’ils ne disparaissent et ne soient récupérés par des réseaux de traite. Malheureusement, ce cas de figure s’est déjà présenté. Mieux vaut s’assurer que l’administrateur est bien là et comprend bien la situation, voire renvoyer l’enfant dans un autre pays où un adulte de sa famille pourra le prendre en charge. J’y insiste, il arrive que l’admission sur le territoire aille à l’encontre de la protection du mineur.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette successivement les amendements CL54, CL124 et CL234.

Puis elle adopte l’amendement CL351.

Elle en vient à l’amendement CL125 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Le projet de loi n’apporte aucune précision sur les conditions de la privation de liberté. Pourtant, celles-ci sont très clairement définies par la directive européenne, spécifiquement à l’article 10-4 auquel je vous renvoie et que cet amendement vise à retranscrire.

Mme la rapporteure. Je vous suggère de le retirer et de le réserver au projet de loi relatif au droit des étrangers en France, dans la mesure où il ne vise pas spécifiquement les demandeurs d’asile.

M. Guillaume Larrivé. L’amendement est partiellement satisfait par le droit existant. Dès 2002-2003, en effet, le ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, avait pris le soin de passer une convention avec l’association Anafé pour que des intervenants d’associations de protection des droits de l’homme soient présents dans les zones d’attente. Je tiens à remercier M. Coronado pour cet hommage ! (Sourires.)

M. Sergio Coronado. L’Anafé fait état de ce dispositif, mais c’est pour constater une forme de continuité dans les politiques migratoires et d’asile…

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL163 de Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. Reprenant les conclusions du rapport d’évaluation sur la réforme de l’asile que M. Arnaud Richard et moi-même avons publié au nom du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC), cet amendement tend à faciliter la prolongation du maintien des étrangers en zone d’attente lors de la procédure de demande d’asile à la frontière.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’une des rares dispositions du rapport du CEC que le projet de loi ne reprend pas. Bien que l’OFPRA considère la demande d’asile comme manifestement infondée dans 80 % des cas en zone d’attente, le juge des libertés et de la détention peut, à l’issue du délai de quatre-vingt-seize heures, autoriser l’entrée sur le territoire des étrangers en raison de l’existence de garanties de représentation. Ceux-ci vont ensuite déposer une demande d’asile classique à l’OFPRA, ce qui engorge la procédure au détriment des vrais demandeurs d’asile. Mais, en supprimant la faculté pour le juge des libertés et de la détention de tenir compte uniquement des garanties de représentation de la personne pour décider de sa remise en liberté, la disposition proposée porterait atteinte à l’office du juge dans son rôle de garant de la liberté individuelle au regard de la Constitution. Ne serait-ce que pour cette raison, je ne peux être favorable à cet amendement que je vous suggère de retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CL281 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Cet amendement vise à faire passer le délai de recours de quarante-huit à quatre-vingt-seize heures de manière à assurer l’effectivité de ce droit. Lorsqu’une décision lui est notifiée un vendredi soir, il n’est pas simple pour une personne étrangère d’établir elle-même son recours, sachant que même l’Anafé ne peut être présente sept jours sur sept.

Mme la rapporteure. Cet amendement n’étant pas spécifique aux demandeurs d’asile, je vous suggère de le retirer et de le déposer sur le projet de loi relatif au droit des étrangers en France.

Par ailleurs, la France a introduit un recours suspensif au bénéfice du demandeur d’asile en zone d’attente dans la loi du 20 novembre 2007, afin de répondre aux exigences posées par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Gebremedhin contre France. Ce délai n’a jamais été considéré comme insuffisant par aucun juge depuis lors, même s’il doit être examiné le week-end.

M. Denys Robiliard. L’amendement s’inscrit bien dans le cadre de ce projet de loi puisque l’article L. 213-9 qu’il tend à modifier concerne l’asile.

Sur le fond, l’administration considère que la mesure est exécutoire une fois le recours expiré. Je me réfère dans mon exposé sommaire à l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 26 avril 2007 que vous mentionnez, mais je sais qu’une instance engagée par l’Anafé est actuellement pendante sur cette question. Il sera jugé un jour ou l’autre que le délai de quarante-huit heures est insuffisant. Que se passe-t-il quand une décision est notifiée le Vendredi saint et que s’écoulent ensuite le samedi, le dimanche et le lundi de Pâques ?

M. Guillaume Larrivé. Je remercie la rapporteure d’avoir relevé la grande sagesse de la loi Hortefeux, qui a transcrit de manière très rapide l’arrêt du 26 d’avril 2007. L’avis du Conseil d’État a été pris et le Conseil constitutionnel, saisi par le groupe socialiste, a examiné le sujet sans rien trouver à redire. La question est tranchée. Pourquoi changer sans cesse les règles ?

Mme la rapporteure. En l’espèce, la loi du 26 novembre 2007 – dont c’est un des seuls points positifs – ne faisait que tirer les conséquences de l’arrêt auquel M. Robiliard et moi-même nous référons.

Je précise aussi que les juges assurent une permanence les week-ends.

Puisque vous évoquez l’infaillibilité pontificale, monsieur Larrivé, je rappelle que le pape actuel a réservé son premier déplacement à l’île de Lampedusa et qu’il a attiré l’attention de l’Europe entière sur la situation des demandeurs d’asile et des personnes qui recherchent protection. Puisse ce geste inspirer vos votes à l’avenir !

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL126 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Il s’agit d’introduire une disposition initialement prévue dans le projet de loi renforçant la protection du secret des sources des journalistes, dont nous attendons l’inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale depuis près d’un an. L’amendement, adopté à l’époque en commission des Lois à l’initiative de la rapporteure Marie-Anne Chapdelaine, vise à permettre aux parlementaires de visiter les zones d’attentes et les centres et locaux de rétention et les locaux de retenue mentionnés à l’article L. 611-1-1, et prévoit que ces parlementaires puissent être accompagnés par un journaliste titulaire d’une carte de presse. Il semble cohérent de l’intégrer à un article qui modifie les conditions de recours en zone d’attente.

Mme Marie-Anne Chapdelaine. Je voterai cet amendement, tout en regrettant que le Gouvernement n’ait toujours pas inscrit le projet de loi sur la protection des sources à notre ordre du jour. Il me semble que c’est un bon texte sur lequel nous sommes parvenus à un consensus.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. J’ai écrit au Premier ministre pour lui demander cette inscription. Le président de la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, M. Patrick Bloche, a d’ailleurs effectué la même démarche sans que nous soyons concertés.

M. Erwann Binet. Une disposition à peu près identique permettant la visite des journalistes dans les zones d’attente et les lieux de rétention administrative figure dans le projet de loi que nous examinerons ultérieurement. Je crains que deux dispositions similaires n’en viennent à se croiser lors de la navette !

Mme la rapporteure. Je suis tout à fait d’accord avec l’amendement, mais je regretterais que nous l’adoptions en commission. Je propose à M. Coronado d’attendre soit l’examen du texte rapporté par M. Binet, soit la séance publique puisqu’il s’agit d’un amendement d’appel et qu’il appartient au Gouvernement d’y répondre.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. De par leur fonction, les députés et les sénateurs peuvent visiter les lieux de privation de liberté. Ils n’ont pas besoin d’y être autorisés ! La disposition ne peut porter que sur la possibilité pour les journalistes de les accompagner.

M. Sergio Coronado. Je retire l’amendement pour le présenter à nouveau en séance publique. Comme l’a souligné la rapporteure, le débat engage le Gouvernement.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission adopte l’article 8 modifié.

Avant l’article 9

La Commission est saisie de l’amendement CL352 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de garantir à tout demandeur d’asile en rétention le droit à bénéficier d’une assistance linguistique et juridique, ainsi que la possibilité de déposer une demande d’asile, après le délai de cinq jours mentionné à l’article L. 551-3 du CESEDA, lorsqu’elle est motivée par des faits survenus postérieurement à l’expiration de ce délai.

L’amendement permet d’éviter que le délai de cinq jours soit systématiquement contourné pour des motifs d’opportunité. Il est conforme aux objectifs fixés par les directives européennes et permet également d’éviter un contentieux sur l’effectivité ou non du recours à l’interprète.

La Commission adopte l’amendement.

M. Denys Robiliard. Compte tenu de cette adoption, je retire les deux amendements suivants.

Les amendements CL235 de Mme Audrey Linkenheld et CL282 de M. Denys Robiliard sont retirés.

Section 3 : Dispositions relatives à l’examen des demandes d’asile en rétention

Article 9 (art. L. 556-1 et L. 556-2 [nouveaux] du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et art. L. 777-2 du code de justice administrative) : Examen des demandes d’asile en rétention

La Commission est saisie de l’amendement CL127 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Le Conseil d’État a considéré que le délai de cinq jours mentionné à l’article L. 551-3 ne courait pas notamment si les circonstances qui justifient la demande apparaissent pendant la rétention administrative ou si le demandeur n’a pas eu d’assistance juridique et linguistique effective.

Mme la rapporteure. L’amendement est satisfait par l’adoption de l’amendement CL352.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement de simplification CL353 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CL128 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Il s’agit de ne maintenir en rétention que les demandeurs qui ont eu auparavant la possibilité d’accéder à la procédure d’asile. Cette précision figure dans la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et du Conseil d’État.

Mme la rapporteure. La directive « Procédures » ne prévoit pas une telle limitation. De plus, la CEDH n’a pas toujours sanctionné la France pour avoir maintenu en rétention un demandeur d’asile en cas de première demande : dans l’affaire M.E. contre France du 6 juin 2013, la Cour a donné raison à la France pour avoir refusé l’asile à un ressortissant égyptien, en situation irrégulière en France depuis trois ans, qui avait déposé sa première demande d’asile à l’occasion de sa rétention après avoir fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL236 de Mme Audrey Linkenheld.

Mme Pascale Crozon. La Cour de justice de l’Union européenne puis le Conseil d’État ont considéré que la rétention d’un demandeur d’asile, même si la demande a été formulée après que celui-ci a fait l’objet d’une mesure d’éloignement, n’est possible que si sa demande n’est présentée que pour faire obstacle à l’éloignement et qu’il est nécessaire de maintenir l’intéressé dans un centre pour éviter qu’il ne se soustraie à la mesure. Les deux juridictions ont donc limité la rétention du demandeur d’asile à des cas exceptionnels que l’amendement vise à expliciter.

Mme la rapporteure. Cet amendement se réfère à l’arrêt Arslan, antérieur à la directive « Accueil » qui précise désormais les critères que vous évoquez. Il est donc satisfait et je suggère son retrait.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL354 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CL355 du même auteur.

Mme la rapporteure. Il s’agit de préciser que, si le préfet ne maintient pas le demandeur en zone d’attente, ce dernier est libre et ira déposer sa demande d’asile dans les conditions de droit commun.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle étudie les amendements CL129 de M. Sergio Coronado, CL283 de M. Denys Robiliard et CL164 de Mme Jeanine Dubié, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. Sergio Coronado. Mon amendement vise à mettre en place une procédure de recours direct à la Cour nationale du droit d’asile. Cette saisine serait bien plus simple que la procédure actuellement prévue par le projet de loi, qui impose le passage par un tribunal administratif. Ce recours exceptionnel risque d’encombrer les tribunaux, qui ne disposent pas de l’expertise de la CNDA sur ces sujets alors même qu’ils sont contraints de prendre leurs décisions dans des délais très brefs.

M. Denys Robiliard. Mon amendement procède du même esprit. La CNDA est un juge spécialisé qui a accès à une documentation à la fois juridique et concernant la situation des droits de l’homme dans l’ensemble des pays du monde. Donner à un juge administratif le pouvoir de rendre suspensif le recours devant la CNDA paraît inadapté.

Au surplus, cet examen successif du même dossier par deux juridictions dans un bref délai ne paraît pas conforme à l’objectif actuel de simplification ! Une double saisine est inutilement complexe et coûteuse. Mieux vaut concentrer le sujet du recours, y compris son caractère suspensif, devant la seule CNDA.

Mme Jeanine Dubié. Le projet de loi prévoit la possibilité de contester devant le tribunal administratif, avec un effet suspensif, la décision initiale de maintien en rétention prise par la préfecture lorsque celle-ci estime que la demande était formulée dans le dessein de faire échec à l’exécution d’une mesure d’éloignement. Toutefois, le demandeur d’asile en rétention ne dispose pas d’une voie de recours suspensive sur le fond de sa demande, qui permettrait de contester la décision de rejet ou d’irrecevabilité prise par l’OFPRA. Des demandeurs pourraient ainsi être éloignés du territoire sans que les motifs de persécutions et les craintes en cas de retour à ce titre aient pu être examinés par une instance d’appel.

Il est donc indispensable d’instaurer en rétention un recours suspensif devant la CNDA, afin de permettre au demandeur de contester au fond la décision de rejet ou d’irrecevabilité avant la mise en œuvre d’une mesure d’éloignement.

Mme la rapporteure. Avis défavorable à ces trois amendements qui poursuivent le même objectif.

L’amendement CL129 aurait pour effet de maintenir en rétention un demandeur cinq jours de plus que le dispositif prévu par le Gouvernement. En outre, le demandeur d’asile se voit déjà accorder plusieurs chances de sortie. L’OFPRA peut en effet estimer que sa demande relève de la procédure ordinaire ou qu’il doit obtenir le statut de réfugié, auxquels cas il sort de rétention. Et, s’il est maintenu en rétention après l’examen par l’OFPRA, il peut former un recours devant le tribunal administratif pour sortir de rétention jusqu’à ce que la CNDA statue sur son recours. Le filtre du tribunal administratif paraît adapté à un contrôle de l’évidence : il s’agit de vérifier que la demande n’a pas pour seul but de contourner une mesure d’éloignement et non d’examiner la demande au fond. Le juge administratif a l’habitude de ce type de procédure d’urgence.

Enfin, l’amendement supposerait de trouver une solution budgétaire pour financer le transfert du demandeur à Montreuil afin qu’il y soit entendu par la CNDA dans les délais impartis ou pour mettre en place de la vidéo-audience dans tous les tribunaux à proximité des centres de rétention administrative, ce qui, aujourd’hui, n’est pas réaliste.

M. Guillaume Larrivé. Je ne voterai pas l’amendement de M. Robiliard, mais je trouve qu’il pose une question légitime quant à l’articulation de l’office de trois juges : le juge des libertés et de la détention – qui me semble rester, en cette matière également, le juge de la rétention –, le juge administratif et la CNDA. Le dispositif de l’article 9 est d’une très grande complexité procédurale pour les fonctionnaires chargés d’appliquer la loi comme pour les demandeurs. La voie tracée par l’amendement mérite donc d’être examinée avec le Gouvernement à la lumière du contentieux administratif en ces matières.

La Commission rejette successivement les amendements CL129, CL283 et CL164.

Elle en vient ensuite à l’amendement CL130 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Il s’agit de remplacer le délai de quarante-huit heures, qui ne prend pas en compte l’impossibilité de demander l’asile pendant les week-ends, par un délai de trois jours ouvrés. Nous devons nous soucier de l’effectivité de l’accès au droit dans ces procédures.

M. le rapporteur. Avis défavorable pour les raisons qui ont été énoncées à propos de l’amendement CL281 de M. Robiliard. L’une des options envisagées pour unifier le contentieux et simplifier la procédure était de supprimer la CNDA, comme le proposait le rapport de M. Touraine et de Mme Létard, et de tout renvoyer aux tribunaux administratifs. Ce n’est pas l’option que souhaite votre rapporteure, ni même, je crois, celle que souhaitent les auteurs des trois amendements précédents.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement l’amendement de clarification CL356 et l’amendement de correction d’une erreur matérielle CL357, de la rapporteure.

Enfin, elle adopte l’article 9 modifié.

Avant l’article 10

La Commission est saisie de l’amendement CL39 de M. Éric Ciotti.

M. Éric Ciotti. Aux termes de la directive dite « Retour » du 16 décembre 2008, il doit être systématiquement proposé à un étranger en situation irrégulière soumis à une obligation de quitter le territoire français la possibilité de le faire volontairement dans un délai qui ne saurait être inférieur à sept jours. Aujourd’hui, ce délai est de trente jours, ce qui me semble excessif. Je propose d’en revenir à sept jours, conformément aux règles européennes. On accuse souvent ces règles d’être laxistes en matière d’immigration, mais, en l’occurrence, c’est plutôt le cas de la législation française !

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Cet amendement n’a rien à voir avec la procédure d’asile. Il concerne le projet de loi relatif au droit des étrangers. Je précise que le délai de sept jours est le minimum prévu par la directive. C’est vous-mêmes, lorsque vous étiez dans la majorité, qui l’avez fixé à trente jours !

M. Éric Ciotti. Tout n’a pas été parfait dans cette période… (Sourires.)

La Commission rejette l’amendement.

Chapitre III
Dispositions relatives à la Cour nationale du droit d’asile

Article 10 (art. L. 731-2, L. 732-1, L. 733-1, L. 733-1-1 et L. 733-4 [nouveaux] du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ; art. L. 233-5, L. 234-3 et L. 234-4 du code de justice administrative ; loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique) : Cour nationale du droit d’asile

La Commission est saisie de l’amendement CL419 du Gouvernement.

Mme la rapporteure. Cet amendement de conséquence précise que le contentieux des décisions de clôture ne relève pas de la CNDA, mais bien des tribunaux administratifs. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CL40 de M. Éric Ciotti tombe.

La Commission examine ensuite l’amendement CL358 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à clarifier les alinéas 3 et 4 de l’article 10 en rappelant que l’objet et les délais de recours devant la CNDA sont en facteur commun aux deux procédures – ordinaire ou accélérée – et en précisant que, pour la procédure normale, le principe est la collégialité assortie du délai de jugement de cinq mois.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL284 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. M. Larrivé faisait judicieusement remarquer que seul le pape est infaillible. Encore eût-il fallu préciser que cette infaillibilité ne s’exerce que lorsque celui-ci s’exprime ex cathedra. Mais un homme seul peut évidemment se tromper, ce qui plaide en faveur de la collégialité. L’examen en formation collégiale me semble particulièrement important dans le cadre de la CNDA, puisqu’un des membres de cette instance est proposé par le Haut Commissaire des Nations unies pour les réfugiés et possède de ce fait une connaissance approfondie de la situation dans les pays d’origine.

Par cet amendement, je propose que l’examen en formation collégiale soit étendu aux décisions d’irrecevabilité.

Mme la rapporteure. Avis défavorable : alors que la réforme a pour objectif de réduire les délais, vous proposez en l’espèce de porter le délai de cinq semaines à trois mois. Quant au choix entre juge unique et formation collégiale, il donnera lieu sans nul doute à de beaux débats dans l’hémicycle.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL131 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement a pour objet de rétablir la collégialité au sein de la CNDA. En effet, aucune urgence ne justifie que celle-ci statue en formation de juge unique. Cette « nouvelle formation de jugement », qui n’a jamais existé au sein de cette cour, ne permettra aucune économie budgétaire et aucun redéploiement d’effectifs, dès lors que les formations de jugement collégiales actuelles ne comportent qu’un seul juge professionnel.

En conséquence, la transformation des formations collégiales en formations de juge unique aurait pour seul but d’éliminer de la formation de jugement les rapporteurs et les représentants du HCR. Or ces assesseurs apportent une expertise technique précieuse sur ces dossiers d’asile souvent fort complexes sur les plans juridique, géopolitique et humain.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. La présence d’un juge unique ne veut pas dire que les audiences seront privées. Elles demeureront publiques et tout le monde pourra y assister. Je vous proposerai d’ailleurs de préciser dans un amendement ultérieur que le fait qu’il y ait un juge unique ne signifie pas qu’il n’y ait pas de rapporteur. Qui plus est, selon les informations qui m’ont été transmises, le juge unique devrait être un magistrat professionnel, président de chambre doté d’une longue expérience de magistrat – notamment de juge unique au tribunal administratif. Enfin, je vous proposerai d’instaurer des critères d’expérience pour la désignation du juge unique au sein de la CNDA s’il n’est pas un magistrat permanent et de prévoir qu’il statue toujours après présentation du rapport par un rapporteur – ce qui n’est pas prévu par le projet de loi en l’état.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de simplification rédactionnelle CL359 de la rapporteure.

Elle en vient ensuite à l’amendement CL132 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement de repli vise à prévoir une procédure de retour à la collégialité pour la CNDA, en fonction des besoins de l’affaire, comparable à la sortie de la procédure accélérée prévue pour l’OFPRA en première instance.

Mme la rapporteure. Votre amendement est satisfait par l’amendement que nous venons d’adopter qui spécifie que le président de la CNDA dispose de la faculté de renvoyer toute affaire en formation collégiale dès lors qu’elle soulève une difficulté sérieuse en droit ou en fait.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission aborde les amendements CL165 et CL166 de Mme Jeanine Dubié et CL11 de la commission des Affaires étrangères, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Jeanine Dubié. L’encadrement du délai dont dispose la CNDA pour statuer sur un recours ne doit pas se faire au détriment de la qualité du processus d’examen des dossiers ni de celle des décisions qu’elle prend. Tout en préservant l’intention du législateur de traiter plus rapidement les procédures accélérées, l’amendement CL165 vise à maintenir a minima un délai de trois mois pour l’examen des recours par la Cour, et l’amendement CL166, un délai de deux mois.

Mme Chantal Guittet, rapporteure pour avis au nom de la commission des Affaires étrangères. L’amendement CL11 est défendu.

Mme la rapporteure. Avis défavorable à ces trois amendements. Allonger ce délai ne rendrait pas forcément service à la Cour qui risque, s’ils étaient adoptés, de ne pas avoir les moyens de remplir les objectifs qui lui sont assignés par le projet de loi. Il est en effet impératif qu’elle se prononce plus rapidement sur les recours contre les décisions de l’OFPRA.

La Commission rejette successivement les amendements CL165, CL166 et CL11.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL360 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CL29 de M. Éric Ciotti.

M. Éric Ciotti. Cet amendement vise à supprimer l’octroi automatique de l’aide juridictionnelle pour interjeter appel auprès de la CNDA.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Cet amendement ferait perdre beaucoup de temps et d’argent à la puissance publique. L’aide juridictionnelle est de plein droit. Or vous proposez qu’elle ne soit accordée qu’au cas par cas après examen des demandes. Cela supposerait de maintenir des demandeurs d’asile en centre d’accueil ou de maintenir l’allocation temporaire d’attente qui, une fois le projet de loi adopté, prendra le nom d’allocation de demandeur d’asile, pendant le délai d’instruction de la demande d’aide juridictionnelle.

M. Éric Ciotti. Mon raisonnement est exactement inverse : c’est le dispositif de l’aide juridictionnelle qui coûterait très cher et qui allongerait considérablement les délais d’instruction de la CDNA, ce qui va à l’encontre des objectifs supposés du projet de loi.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CL361 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à ne supprimer le bénéfice de plein droit de l’aide juridictionnelle que dans le cas où un recours est manifestement irrecevable. En effet, dans cette hypothèse, la Cour n’examine pas le dossier au fond et il n’y a pas d’audience.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement CL314 de Mme Maud Olivier.

Mme Catherine Coutelle. Le rapport d’activité que la Cour nationale du droit d’asile remet au Parlement doit comprendre des données quantitatives et qualitatives sexuées, et décrire les actions de formation de ses agents et magistrats sur cet aspect en particulier.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL362 de la rapporteure.

Elle examine en discussion commune l’amendement CL12 de la commission des Affaires étrangères et l’amendement CL167 de Mme Jeanine Dubié.

Mme Chantal Guittet, rapporteure pour avis de la commission des Affaires étrangères. L’amendement CL12 est défendu.

Mme Jeanine Dubié. L’intégration du rapporteur à la formation de jugement, à la place d’une personnalité qualifiée, nous semble permettre de renforcer la cohérence de la jurisprudence et de simplifier la gestion logistique des audiences. Cet amendement reprend une des conclusions de notre rapport d’information sur l’évaluation de la politique d’accueil des demandeurs d’asile.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Le rapporteur est un acteur essentiel de la procédure, car il est le seul à avoir instruit le dossier de manière approfondie. Il présente à la Cour un rapport établissant les éléments de fait et de droit relatifs à chaque demande d’asile, mais, depuis le 16 août 2013, il ne prend plus part au délibéré.

Cet amendement traduit une demande de certains rapporteurs de la CNDA à laquelle je n’adhère pas. La formation de jugement comporte un président qui est un magistrat professionnel et deux assesseurs, ce qui me paraît équilibré : l’un nommé par le HCR, l’autre par le vice-président du Conseil d’État sur proposition des ministres présents au conseil d’administration de l’OFPRA. Le projet de loi prévoit que les assesseurs seront désormais nommés en raison de leurs compétences dans le domaine juridique et politique, mesure qui me paraît positive. Le rôle du rapporteur doit donc se limiter à éclairer les membres de la formation de jugement.

L’amendement CL167 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CL12.

Elle examine ensuite l’amendement CL363 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Afin d’assurer la cohérence des décisions de la CNDA, je propose que les juges et les assesseurs vacataires aient l’obligation d’être présents au moins à douze journées d’audience par an, soit une fois par mois en moyenne.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL364 de la rapporteure.

La Commission en vient à l’amendement CL285 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Cet amendement vise à faire en sorte que, à tout moment, le président de la CDNA ou son délégataire statuant en tant que juge unique puisse décider de renvoyer une affaire devant une formation collégiale.

Mme la rapporteure. Cet amendement est partiellement satisfait par un amendement adopté précédemment, qui prévoit que, en cas de difficulté sérieuse, la Cour dispose de cette faculté.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission est saisie de l’amendement CL365 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Par cohérence avec l’objectif d’harmonisation des décisions de la Cour, cet amendement vise à introduire des critères d’expérience pour la désignation des juges uniques : un magistrat non permanent, qui n’aurait jamais eu à connaître du contentieux de l’asile au cours de sa carrière, ne pourra être désigné juge unique sans avoir au préalable participé à des audiences en formation collégiale pendant au moins un an.

L’amendement prévoit aussi qu’une personnalité qualifiée, souvent dénommée « assesseur », qui, par définition, est vacataire à la CNDA, doit également disposer d’une certaine expérience du contentieux de l’asile en formation collégiale : elle ne pourrait être nommée juge unique qu’après trois ans d’ancienneté minimum à la CNDA.

En revanche, nous proposons de laisser à la Cour la possibilité de nommer un magistrat permanent comme juge unique dans la mesure où ne pourront être nommés présidents permanents que des magistrats ayant au moins quinze ans d’expérience en juridiction administrative et qui auront déjà eu à statuer en tant que juge unique au sein de la juridiction administrative.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL367 de la rapporteure et CL133 de M. Sergio Coronado.

Mme la rapporteure. L’amendement CL367 ouvre la possibilité pour le requérant de demander le huis clos et de l’obtenir de droit s’il a subi un viol, un acte de torture ou des actes de barbarie accompagnés d’agressions sexuelles. En effet, les faits relatés lors d’une audience peuvent être douloureux.

M. Sergio Coronado. L’amendement CL133 ne limite pas l’obtention de droit du huis clos aux seuls cas énumérés par la rapporteure dans son amendement.

La Commission adopte l’amendement CL367.

En conséquence, l’amendement CL133 tombe.

La Commission en vient à l’amendement CL237 de Mme Pascale Crozon.

Mme Pascale Crozon. Cet amendement vise à mettre en cohérence les dispositions applicables aux audiences de la CDNA avec le code de procédure pénale, dont l’article 306 permet au président de séance d’interdire l’accès de la salle d’audience aux mineurs, afin de les préserver lorsqu’un récit pourrait les choquer.

Mme Catherine Coutelle. Lorsque nous nous sommes rendus à l’OFPRA et à la CNDA, a été soulevé le problème de l’accueil des mineurs pendant que leurs parents sont en entretien. L’OFPRA s’est ainsi fait l’écho de l’absence de structures d’accueil, ce qui est également le cas à la CNDA, alors que les récits des parents sont parfois insupportables pour leurs enfants.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL303 de Mme Maud Olivier.

Mme Catherine Coutelle. Nous proposons de préciser que, pour les victimes de proxénétisme ou de traite des êtres humains, le huis clos est prononcé de droit si le demandeur le sollicite.

Mme la rapporteure. L’amendement est partiellement satisfait par celui que nous avons adopté précédemment.

La Commission rejette l’amendement.

Ensuite, elle aborde l’amendement CL238 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Dans un souci de simplification, je propose que le huis clos soit de droit sur simple demande du demandeur d’asile. Cela évitera la casuistique, d’autant plus que les cas énumérés dans l’amendement que nous avons adopté tout à l’heure ne correspondent qu’à des faits allégués, jusqu’à ce qu’ils soient établis par la décision de la Cour, si les juges estiment que ces faits correspondent à la définition de la Convention de Genève ou qu’ils satisfont aux conditions de la protection subsidiaire.

Il s’agit d’une mesure strictement procédurale, certaines personnes ayant besoin d’une certaine sérénité pour s’exprimer. C’est notamment le cas des demandeurs d’asile qui craignent que des représentants de leur gouvernement ne soient présents en salle d’audience.

S’il est bon que la justice soit publique, je ne vois pas ce qui pourrait s’opposer à ce principe fondamental protecteur des demandeurs d’asile, qui ne doivent y renoncer que d’eux-mêmes.

Mme la rapporteure. J’ai pour ma part proposé dans l’amendement que nous avons adopté de restreindre le huis clos de droit aux faits de viol et de torture, et aux actes de barbarie accompagnés d’agressions sexuelles. Dans les autres cas, je propose que le requérant ait la faculté de demander le huis clos, mais qu’il revienne au juge de décider lui-même s’il accède à cette demande.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous nous trouvons ici face à une contradiction entre la volonté de protéger les requérants de certaines circonstances et le principe de publicité des débats – qui, lui aussi, vise à protéger le requérant. Si l’on peut prévoir certains cas où le huis clos est de plein droit, dans les autres, il convient de laisser aux magistrats une marge d’appréciation.

M. Sergio Coronado. Je comprends que deux exigences s’opposent. Cela étant, selon les associations qui ont été auditionnées par la rapporteure, il n’est pas souhaitable d’énumérer dans la loi les cas dans lesquels un demandeur d’asile se trouve dans une situation de vulnérabilité, comme vous le proposez dans l’amendement que nous avons adopté. Car, non seulement les situations particulières sont complexes à exprimer, mais, en outre, une telle énumération pourrait aller jusqu’à constituer une prime à la torture. Enfin, les demandeurs d’asile ne souhaitent pas forcément devoir énoncer publiquement les actes dont ils ont été victimes pour pouvoir bénéficier du huis clos. Il serait donc préférable de prévoir qu’un demandeur peut bénéficier du huis clos s’il le souhaite et le juge nécessaire, sans restreindre cette possibilité à certains cas.

Mme Catherine Coutelle. La CNDA nous a décrit des cas dans lesquels ce sont les proxénètes et les mafieux eux-mêmes qui forcent les prostituées à demander l’asile afin qu’elles obtiennent des papiers. Or, lorsqu’un juge ne s’aperçoit pas de la présence de ces proxénètes dans la salle d’audience, et que, par conséquent, il ne demande pas le huis clos, la parole des prostituées se libère difficilement.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je ne me prononcerai pas sur le fond. Néanmoins, il me paraît impossible que la Commission adopte l’amendement CL238 après avoir adopté tout à l’heure l’amendement CL367 et ce, pour des raisons de cohérence.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL366 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement a pour objet de prévoir la présence du rapporteur à l’audience, que le recours soit examiné par une formation collégiale ou par un juge unique.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL368 du même auteur.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à permettre à l’un des membres d’un couple de demander à la Cour que son affaire soit appelée à l’audience séparément de celle de son conjoint.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement CL286 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Puisque nous venons d’adopter le système des clôtures, que nous avons maintenu des irrecevabilités et qu’il sera désormais possible que des recours soient traités par un juge unique, il ne me paraît plus nécessaire de maintenir le mécanisme des ordonnances – qui permet le rejet d’un recours sans qu’un demandeur d’asile ait pu s’expliquer dans le cadre d’une audience. Une ordonnance constitue certes une décision judiciaire, mais qui ne satisfait pas aux règles minimales de procédure. Lorsque l’on juge sur dossier, on va effectivement beaucoup plus vite, mais ce n’est plus de la justice. Pour ces raisons, je propose la suppression de l’article L. 733-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Retirer cette possibilité à la Cour reviendrait à rallonger ses délais de jugement pour des affaires qui ne le méritent pas.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL369 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à rappeler la nature contradictoire du contentieux devant la Cour, sauf lorsque cela peut compromettre la sécurité du demandeur, la sécurité nationale ou la sécurité des sources d’information.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL421 du Gouvernement.

Mme la rapporteure. Cet amendement, auquel je suis favorable, tend à encadrer les conditions dans lesquelles l’enregistrement sonore d’un entretien devant l’OFPRA peut être invoqué à l’appui d’une contestation devant la CNDA.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de coordination CL370 de la rapporteure.

Enfin, elle adopte l’article 10 modifié.

Chapitre IV
Dispositions relatives à l’accès à la procédure d’asile et à l’accueil des demandeurs

Article 11 : Modification de l’intitulé du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

La Commission adopte l’article 11 sans modification.

Article 12 (art. L. 741-1, L. 741-2, L. 741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) : Enregistrement de la demande d’asile

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL134 et CL135 de M. Sergio Coronado, CL371 de la rapporteure et CL239 de M. Denys Robiliard.

M. Sergio Coronado. L’amendement CL134 vise à supprimer la disposition prévoyant que l’autorité administrative détermine l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride. Il vise également à préciser que l’enregistrement d’une demande doit se faire dans les trois jours. Il arrive en effet trop souvent que le dépôt d’une demande soit retardé, alors que l’enregistrement constitue une mesure fondamentale pour accéder à une demande d’asile.

Mme la rapporteure. Je propose à M. Coronado de retirer ses amendements. S’agissant de l’amendement CL134, d’une part, la mention du délai de trois jours sera introduite par mon amendement CL371 et, d’autre part, il n’est pas dans les prérogatives de l’OFPRA de déterminer l’État membre responsable de l’examen d’une demande au titre du règlement « Dublin III ». Quant à l’amendement CL135, il sera satisfait par un amendement ultérieur.

L’amendement CL371 vise donc à inscrire dans la loi le délai d’enregistrement de trois jours prévu par la directive du 26 juin 2013. Il tend également à préciser que la domiciliation du demandeur d’asile n’est plus une condition préalable à l’enregistrement de sa demande.

Les amendements CL134, CL135 et CL239 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CL371.

La Commission aborde les amendements identiques CL67 de Mme Audrey Linkenheld, CL136 de M. Sergio Coronado et CL168 de Mme Jeanine Dubié.

M. Denys Robiliard. L’amendement CL67 est défendu.

M. Sergio Coronado. L’amendement CL136 vise à préciser que l’attestation de demande d’asile remise au demandeur vaut titre provisoire de séjour, afin de lui permettre d’effectuer certaines démarches.

Mme Jeanine Dubié. Cet amendement tend à prévoir explicitement dans la loi que l’attestation de demande d’asile vaut titre provisoire de séjour afin que les détenteurs d’une telle attestation puissent bénéficier des droits sociaux liés au droit de séjour.

Mme la rapporteure. Le ministre nous a indiqué tout à l’heure que cela était déjà le cas. Cela étant, afin qu’il puisse le réaffirmer dans l’hémicycle, je vous invite à retirer vos amendements et à les redéposer en vue de leur examen en séance publique.

M. Denys Robiliard. J’accepte de retirer mon amendement, mais je tiens à préciser la raison pour laquelle je l’ai déposé : le projet de loi opère un changement de terminologie, substituant à la notion de « droit au séjour » celle de « droit au maintien ». Or, comme c’est du droit au séjour que les demandeurs d’asile tiraient plusieurs droits sociaux, on a pu craindre que certaines administrations sociales ne déduisent de ce changement de terminologie que l’accès aux droits sociaux des demandeurs d’asile était remis en cause. C’est afin de prévenir d’éventuelles difficultés d’interprétation que nous proposions cette clarification.

Pour éviter une telle difficulté, il a également été envisagé de maintenir la notion de droit de séjour le temps de l’examen des demandes d’asile. Cependant, le ministre ne souhaitant pas retenir cette deuxième solution, il conviendrait effectivement qu’il nous apporte des éclaircissements dans l’hémicycle.

L’amendement CL67 est retiré.

La Commission rejette les amendements CL136 et CL168.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL169 de Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. Cet amendement vise à supprimer l’exigence de domiciliation préalable à toute démarche de demande d’asile.

Mme la rapporteure. Il est satisfait par l’amendement CL371 que nous venons d’adopter.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL240 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. L’amendement CL240 a pour objet d’anticiper les éventuelles difficultés que pourrait rencontrer l’administration à respecter le bref délai qui lui est imparti pour procéder à l’enregistrement des demandes d’asile. Nous proposons que, si elle n’a pas respecté ce délai, les formalités soient réputées remplies. Le demandeur d’asile pourra alors saisir l’OFPRA même s’il n’est pas encore en possession du justificatif d’enregistrement de sa demande.

Les problèmes de preuve auxquels un étranger peut être confronté peuvent être réglés lorsqu’il est accompagné et qu’il peut faire la démonstration qu’il a effectivement accompli les diligences qui lui étaient imparties et que c’est l’administration qui n’a pas rempli sa mission à temps.

Mme la rapporteure. Avis défavorable. Une telle disposition mettrait le demandeur dans une situation étrange : sa demande n’étant pas enregistrée, il n’aurait pas droit ni à l’accueil en CADA ni à un accompagnement juridique et social. Qui plus est, il lui faudrait de toute façon expliquer pourquoi il demande la protection. Votre proposition entraînerait donc davantage de difficultés qu’elle ne semble en résoudre.

M. Denys Robiliard. Le délai d’enregistrement des demandes est actuellement fixé par décret à quinze jours. Or, on compte parfois jusqu’à plusieurs mois avant que certaines demandes ne soient enregistrées. Il importe donc de faire en sorte que les demandeurs ne soient pas bloqués par le silence de l’administration. Ce n’est pas parce que la règle en vertu de laquelle le silence de l’administration vaut acceptation vient d’entrer en vigueur qu’il ne faut pas se prémunir contre une telle situation. Cet amendement permettrait au demandeur d’asile d’accélérer la procédure, conformément à l’esprit du projet de loi.

Mme la rapporteure. Il est vrai que le délai actuel, fixé à quinze jours par décret, n’est respecté ni en région parisienne ni dans la région Rhône-Alpes. Mais n’oubliez pas que le délai de trois jours est imposé à la France par la directive de 2013 : si l’administration ne l’applique pas, notre pays pourra faire l’objet d’une procédure en manquement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL208 de Mme Chantal Guittet.

M. Christian Assaf. Nous proposons de permettre aux associations de déposer des demandes d’asile au profit de mineurs non accompagnés.

Mme la rapporteure. Avis défavorable : trop vague, l’expression « association agissant au profit » du mineur non accompagné présente un risque pour la sécurité des mineurs, alors que les administrateurs ad hoc sont désignés selon une procédure qui garantit leur probité.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL372 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à préciser que le procureur de la République devra « immédiatement » être avisé par le préfet des demandes d’asile présentées par des mineurs étrangers isolés et qu’il devra « sans délai » désigner les administrateurs ad hoc chargés de les accompagner.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CL241 de Mme Audrey Linkenheld et CL137 de M. Sergio Coronado tombent.

La Commission adopte l’amendement de simplification rédactionnelle CL373 de la rapporteure.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement CL242 de Mme Audrey Linkenheld.

Enfin, elle adopte l’article 12 modifié.

Après l’article 12

La Commission examine l’amendement CL170 de Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. L’objectif de cet amendement est de contribuer à la réorganisation du premier accueil du demandeur d’asile en simplifiant son parcours et en réduisant les délais de la procédure de demande d’asile. Cet amendement ne crée pas de charges nouvelles, car il vise à une organisation plus cohérente et plus efficace des services déjà présents au sein de l’organisation territoriale de l’État.

Mme la rapporteure. Cette proposition est issue du rapport d’évaluation de la politique d’accueil des demandeurs d’asile dont Mme Dubié fut la co-rapporteure. Cela étant, je ne suis pas favorable à l’idée de créer des guichets uniques rassemblant partout en France les services de l’OFPRA et l’OFII. En effet, je suis attachée à l’indépendance de l’OFPRA et au maintien d’une distance entre cet organisme et le terrain. Je vous suggère donc de retirer l’amendement.

Mme Jeanine Dubié. Je le retire, mais le présenterai à nouveau en séance publique.

L’amendement est retiré.

Article 13 (art. L. 742-1 à L. 742-6, L. 111-7, L. 531-2, L. 551-1, L. 561-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et art. L. 777-3 du code de justice administrative) : Procédure de détermination de l’État responsable de l’examen de la demande d’asile

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL374 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CL375 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il est proposé de limiter la possibilité d’assigner à résidence les demandeurs d’asile relevant de la procédure « Dublin » au seul cas où ils risqueraient de fuir.

La Commission adopte l’amendement.

Ensuite, elle aborde l’amendement CL376 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’amendement a pour objet de porter de deux à six mois la durée de l’assignation à résidence des demandeurs d’asile relevant de la procédure « Dublin ».

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL138 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Nous proposons de limiter les possibilités de renouvellement de l’assignation à résidence, afin d’assurer le respect des exigences de proportionnalité.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CL287 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Cet amendement concerne la légalité de l’assignation à résidence et précise le délai dans lequel le juge des libertés et de la détention pourrait statuer à son propos. S’il convient de confier à ce magistrat le soin de se prononcer sur une telle question, c’est qu’il statue également en matière de rétention. Nous aurions donc intérêt à constituer un bloc de compétences, en matière de restrictions à la liberté de déplacement, qui soit dévolu au juge judiciaire.

Mme la rapporteure. Je suis surprise que, en dépit de votre souci de simplifier les procédures, vous vouliez confier au juge des libertés et de la détention le soin de se prononcer sur des mesures administratives qui, en toute logique, relèvent du juge administratif.

M. Denys Robiliard. Je vais retirer mon amendement. Mais j’attire votre attention sur le fait que la rétention est également une mesure administrative. Pour autant, en application de l’article 66 de la Constitution, il revient au seul juge judiciaire d’en connaître.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il s’agit là d’un débat que nous avons souvent au sein de notre Commission. Une telle interprétation de l’article 66 de la Constitution est très contestable, le juge administratif ayant été reconnu dans nombre de cas comme beaucoup plus protecteur des libertés individuelles que le juge judiciaire.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL377 de la rapporteure.

Puis elle examine en discussion commune les amendements identiques CL27 de Mme Chaynesse Khirouni et CL243 de M. Denys Robiliard, et les amendements identiques CL378 de la rapporteure et CL171 de Mme Jeanine Dubié.

Mme Chaynesse Khirouni. Le projet de loi prévoit un recours suspensif contre les décisions de transfert des demandeurs d’asile vers un autre État membre. Or le délai pour former ce recours est de sept jours, ce qui nous paraît insuffisant. Nous proposons de le porter à trente jours en raison de la complexité de certains dossiers.

M. Denys Robiliard. L’amendement CL243 est défendu.

Mme la rapporteure. Tandis que mes collègues proposent de porter ce délai à trente jours, je suggère d’instaurer un délai de quinze jours.

Mme Jeanine Dubié. L’amendement CL171 est défendu.

Les amendements CL27 et CL243 sont retirés.

La Commission adopte les amendements CL378 et CL171.

Elle adopte également l’amendement rédactionnel CL379 de la rapporteure.

Elle en vient à l’amendement CL289 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Compte tenu de la technicité du règlement « Dublin », il importe de maintenir la collégialité du recours en annulation des décisions de transfert de demandeurs d’asile devant le juge administratif. On exige de plus en plus de celui-ci qu’il se prononce en dehors du cadre habituel – sans rapport ni intervention du rapporteur public – sur des décisions qu’il se doit d’étudier en profondeur. Ne confondons pas vitesse et précipitation.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL290 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. N’ayant pu obtenir que le juge statue en formation collégiale, je souhaiterais toutefois qu’il puisse disposer des conclusions du rapporteur public.

Mme la rapporteure. Je vous suggère de retirer cet amendement et de le retravailler d’ici à l’examen du projet de loi en séance publique. En effet, il supprime l’alinéa 16, et par conséquent, l’obligation de publicité de l’audience – ce qui est fâcheux puisque vous souhaitez rétablir la présence du rapporteur public.

M. Denys Robiliard. Je retire mon amendement au profit de celui de M. Coronado, l’amendement CL139.

L’amendement est retiré.

Elle en vient à l’amendement CL139 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à maintenir les conclusions du rapporteur public, qui sont indispensables à une bonne justice, dès lors que la procédure se déroule avec un juge unique et que le contentieux est technique.

Mme la rapporteure. Je vous suggère de retirer votre amendement et de le redéposer pour la séance publique, afin que le Gouvernement puisse vous donner son avis. En tout état de cause, la disposition que vous proposez n’existe pas dans le droit en vigueur, sauf en matière de contentieux fiscal.

L’amendement est retiré.

La Commission aborde l’amendement CL140 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. L’amendement CL140 a pour objet d’étendre de quarante-huit heures à trois jours ouvrables le délai au-delà duquel une décision de transfert peut faire l’objet d’une exécution d’office si une décision de placement en rétention ou d’assignation à résidence a été notifiée avec la décision de transfert. Je le retire, puisqu’un précédent amendement ayant le même objet a déjà été rejeté par la Commission.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL291 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Je retire cet amendement de conséquence d’un de mes amendements précédemment rejeté.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission adopte l’amendement rédactionnel CL380 de la rapporteure.

Enfin, elle adopte l’article 13 modifié.

Article 14 (art. L. 743-1 à L. 743-5 et L. 311-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) : Droit au maintien sur le territoire français

La Commission examine l’amendement CL244 de M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Cet amendement vise à revenir sur la disposition du projet de loi qui transforme le droit au séjour en un droit au maintien sur le territoire français. Je précise que ce changement sémantique n’entraîne aucune modification d’ordre juridique – le droit au séjour cessant avec l’examen de la demande d’asile. En revanche, il induit un changement dans la manière d’aborder les demandes d’asile, la notion de maintien laissant supposer qu’on envisage un débouté futur. La notion de droit au séjour le temps de l’examen me donne au contraire l’impression que l’on peut être face à un réfugié ou à une personne pouvant bénéficier d’une protection subsidiaire.

Mme la rapporteure. Le ministre nous a expliqué tout à l’heure que l’intention du Gouvernement était de distinguer le demandeur d’asile du réfugié et que l’attestation de demande d’asile permettait le maintien sur le territoire, et donc le droit au séjour, et correspondait à l’ouverture de droits qu’il a énumérés.

Toutefois, je vous suggère de retirer votre amendement et de le rectifier d’ici à la séance publique, en substituant à la notion de « droit au séjour », qui concerne les seuls réfugiés, celle d’« autorisation provisoire de séjour ».

M. Denys Robiliard. Faire référence à une autorisation provisoire de séjour ne me paraît pas changer fondamentalement la donne. De plus, de nombreux étrangers ont droit au séjour à divers titres sans qu’on les confonde pour autant avec les réfugiés. Cela étant, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission étudie les amendements CL26 de Mme Chaynesse Khirouni, CL172 de Mme Jeanine Dubié et CL141, CL142 et CL143 de M. Sergio Coronado, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Chaynesse Khirouni. Cet amendement propose de donner accès à des formations et au marché du travail six mois après la délivrance de l’attestation au demandeur d’asile, conformément aux articles 15 et 16 de la directive « Accueil ».

Mme Jeanine Dubié. Cet amendement a pour objet d’inscrire le droit au travail et à la formation professionnelle dans la partie législative du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Le droit au travail s’avère essentiel à l’exercice des autres droits fondamentaux et à la préservation de la dignité humaine ; il constitue un vecteur d’émancipation économique et sociale des individus. L’emploi est aussi un aspect important de l’intégration qui renforce chez l’individu le sentiment de dignité, de respect et d’estime de soi et qui lui permet d’accéder à l’autonomie financière.

Ces droits constituent un enjeu politique, social, économique et humain majeur, et doivent être reconnus dans la loi pour que leur effectivité soit garantie.

Toutefois, le quatrième alinéa de l’article 11 de la directive « Accueil » du 27 janvier 2003 précise que, « [p]our des motifs liés à leur politique du marché du travail, les États membres peuvent accorder la priorité aux citoyens de l’Union et à ceux des États parties à l’accord sur l’Espace économique européen, ainsi qu’aux ressortissants de pays tiers en séjour régulier ». Ainsi, il est possible de prévoir des dispositions particulières pour l’accès à l’emploi des demandeurs d’asile, et nous proposons que ce droit soit octroyé « sous réserve de l’obtention de l’autorisation de travail, délivrée par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) ».

M. Sergio Coronado. Ce sujet requiert un débat politique : le propos liminaire de Mme la rapporteure m’a satisfait en partie, mais je rejette l’argument de M. le ministre de l’Intérieur selon lequel l’accès à la formation et au marché du travail créerait un appel d’air. Les pays accordant ce droit – l’Espagne, la Suède et la Finlande – ne sont pas les récipiendaires principaux des demandes d’asile. En revanche, ce droit s’avère essentiel pour la dignité et l’intégration, et il diminue le coût de l’accueil. Qu’on me permette de faire état de mon expérience personnelle : lorsque nous sommes arrivés en France, mon frère et moi avons été très aidés de voir nos parents se lever le matin pour travailler.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’un grand et beau sujet qui mérite un débat en séance publique en présence de M. le ministre. Je vous demande donc de retirer les amendements CL26, CL172, CL141 et CL142 ; je serais en revanche favorable à l’adoption de l’amendement CL143, à condition que le délai d’accès aux formations professionnelles soit de neuf mois – et non de six comme le prévoit l’amendement – après la délivrance de l’attestation. Notre Commission aurait ainsi reconnu le droit à la formation, et il resterait à l’Assemblée à se prononcer dans l’hémicycle sur celui au travail.

M. Sergio Coronado. J’accepte de retirer les amendements CL141 et CL142, et de réécrire le CL143 dans le sens voulu par Mme la rapporteure.

Les amendements CL26, CL172, CL141 et CL142 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CL143 ainsi rectifié.

Puis elle examine les amendements CL55 de M. Marc Dolez, CL292 et CL312 de M. Denys Robiliard, et les amendements identiques CL157 de M. Sergio Coronado et CL310 de M. Denys Robiliard, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. le président Jean-Jacques Urvoas.  Les amendements CL55, CL292, CL312, CL157 et CL310, ainsi que les amendements CL309, CL 308 et CL305 de M. Denys Robiliard, qui seront examinés ensuite, proposent de supprimer les alinéas 5 à 10 de l’article 14.

M. Marc Dolez. L’amendement CL55 vise à supprimer les dérogations, posées par le projet de loi, au droit au maintien sur le territoire français jusqu’à la décision définitive de l’OFPRA et de la CNDA.

M. Denys Robiliard. Mes amendements reposent sur le même fondement.

M. Sergio Coronado. Le mien également.

Mme la rapporteure. J’émets un avis défavorable à l’adoption de ces amendements, car ils créent de nouveaux recours suspensifs qui allongent les délais de maintien sur le territoire de certains demandeurs d’asile et qui se trouvent en contradiction avec l’objectif de la réforme.

La Commission rejette successivement les amendements CL55, CL292, CL312, CL157 et CL310.

Elle adopte ensuite l’amendement de correction CL381 de la rapporteure.

Puis elle rejette successivement les amendements CL309, CL308 et CL305 de M. Denys Robiliard.

La Commission en vient à l’amendement CL382 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement propose que la procédure d’extradition ou de remise sur mandat européen ou sur demande d’une cour pénale internationale ne soit possible qu’après le prononcé d’une décision définitive d’extradition et en aucun cas vers le pays d’origine du demandeur d’asile.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CL192 de Mme Marie-Françoise Bechtel.

Mme Marie-Anne Chapdelaine. La notion selon laquelle l’étranger « fait l’objet d’une extradition » ne semble pas parfaitement claire. Il semble s’agir du cas dans lequel l’étranger fait l’objet d’une procédure d’extradition en cours et non d’une simple demande d’extradition : ce point reste donc à préciser, ce qui est l’objet de cet amendement.

Mme la rapporteure. Je suggère le retrait de l’amendement, qui est déjà satisfait.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL383 de la rapporteure.

La Commission adopte l’article 14 modifié.

Après l’article 14

La Commission étudie l’amendement CL41 de M. Éric Ciotti.

M. Éric Ciotti. Cet amendement vise à supprimer l’aide médicale d’État (AME) dans sa forme actuelle pour lui substituer un dispositif qui ne concerne que les soins urgents dont l’absence mettrait en jeu le pronostic vital, pourrait conduire à une altération grave et durable de l’état de santé ou créerait un risque épidémique.

Mme la rapporteure. Cet amendement n’a pas grand rapport avec la réforme de l’asile. Avis défavorable.

M. Éric Ciotti. Il ne s’agit pas d’un cavalier puisque les déboutés du droit d’asile se trouvent en situation irrégulière sur le territoire national, mais bénéficient de cette aide. Le coût de celle-ci ne cesse de croître et atteint aujourd’hui 1 milliard d’euros ; l’équilibre du dispositif se trouve rompu, car il ne correspond plus à sa conception de départ et favorise le développement de filières d’immigration médicale irrégulière.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL246 de M. Christophe Sirugue.

Mme Marie-Anne Chapdelaine. Le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté, adopté le 21 janvier 2013, contient, dans son volet sur la lutte contre le non-recours aux droits, l’engagement d’unifier les trois régimes de domiciliation : le régime de droit commun, celui de l’AME et, enfin, celui de l’admission au séjour au titre de l’asile. La loi ALUR du 26 mars 2014 a unifié une partie des régimes de la domiciliation, mais, faute d’avoir supprimé le troisième alinéa de l’article L. 264-2 du code de l’action sociale et des familles excluant du droit à la domiciliation les personnes non citoyennes de l’Union européenne, a laissé perdurer un dispositif qui pose de nombreuses difficultés. Cet amendement propose donc de rattraper cet oubli et de supprimer cette disposition ; le droit à la domiciliation représentant un instrument contre la précarité et la pauvreté, on doit le garantir pour toute personne en faisant la demande, sans conditions ni restrictions.

Mme la rapporteure. Je propose au groupe SRC de retirer cet amendement, car son adoption ne garantirait pas la domiciliation au moment de l’enregistrement de la demande et compliquerait la procédure en introduisant un nouvel acteur – le centre communal d’action sociale (CCAS) –, ce qui irait à l’encontre de la politique du guichet unique. Par ailleurs, cet amendement créerait une nouvelle charge pour les CCAS des grandes villes, alors que l’on cherche à alléger le poids de leurs obligations.

Je partage l’objectif de cet amendement, mais il s’avérerait contre-productif s’il était adopté. M. le ministre a pris des engagements à ce sujet lors de son audition de cet après-midi, et je vous demande donc de retirer cet amendement.

Mme Marie-Anne Chapdelaine. Le CCAS pourrait agir pour une catégorie, et une association pour une autre. J’accepte de retirer l’amendement pour le retravailler, mais si M. le ministre ne nous donnait pas l’assurance que le droit de domiciliation sera garanti, nous porterions cette question en séance publique.

L’amendement est retiré.

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La séance est levée à 0 heures 45

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Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Nathalie Appéré, M. Christian Assaf, Mme Marie-Françoise Bechtel, M. Erwann Binet, Mme Colette Capdevielle, Mme Marie-Anne Chapdelaine, M. Éric Ciotti, M. Sergio Coronado, Mme Pascale Crozon, M. Marc Dolez, M. Guy Geoffroy, M. Yves Goasdoué, Mme Marietta Karamanli, M. Guillaume Larrivé, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Sandrine Mazetier, M. Patrick Mennucci, Mme Elisabeth Pochon, M. Jean-Jacques Urvoas, M. Jacques Valax

Excusés. - M. Jean-Michel Clément, Mme Laurence Dumont, M. Alfred Marie-Jeanne, M. Bernard Roman, Mme Maina Sage, M. Roger-Gérard Schwartzenberg

Assistaient également à la réunion. - Mme Catherine Coutelle, Mme Jeanine Dubié, M. Jean-Jacques Guillet, Mme Chaynesse Khirouni, M. Denys Robiliard