S O M M A I R E
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I. le paradoxe corse : une
économie largement soutenue qui reste cependant fragile, des dépenses publiques
abondantes qui nont pas les effets escomptés (suite)
B. La Corse : point de convergence des sollicitudes de
lÉtat et de lUnion européenne *
1. Un effort
financier global à évaluer objectivement *
a) Au préalable : quelques mises au point indispensables *
b) Les 8,8 milliards de dépenses directes de lÉtat *
c) Le plus fort ratio par habitant de la dotation communautaire
en France *
2. La
contractualisation privilégiée des dépenses nationales et communautaires *
a) Un contrat de plan doublement doté *
b) Une région largement couverte par les divers programmes
communautaires *
· Un effort déjà considérable de
lUnion européenne en 1989-1993 et un soutien accru sur la période 1994-1999 *
· Le " coup de
pouce " du gouvernement français en 1993 *
· Une large palette de programmes
communautaires *
· Vers un programme de transition
accompagnant la sortie de lObjectif 1 *
3. De
dérogations en exceptions : un statut devenu exorbitant du droit commun *
a) Les arrêtés Miot, le décret impérial et leurs avatars *
b) La loi du 27 décembre 1994 portant statut fiscal de la Corse *
c) La loi du 26 décembre 1996 relative à la zone franche de
Corse *
B. La
Corse : point de convergence des sollicitudes de lÉtat et de lUnion
européenne
Limportance des flux financiers de lÉtat et de
lUnion européenne en direction de la Corse témoigne de la volonté de faire
bénéficier lîle dune solidarité renforcée. Les efforts considérables
consentis en faveur de la Corse ne se sont pas relâchés au cours des dernières années.
Au contraire, les montants accordés par lÉtat à la Corse navaient jamais
été aussi importants que dans le cadre du contrat de plan
État Collectivité territoriale de Corse signé le 1er février 1994.
LÉtat engage des crédits pour la Corse ; il accepte également des manques à
gagner : diverses mesures fiscales et létablissement dune zone franche
font bénéficier léconomie insulaire de dérogations coûteuses pour les finances
publiques nationales. Enfin, la Corse attire de nombreux fonds de lUnion
européenne. Son maintien dans les zones classées en Objectif 1 lui permet de
bénéficier pleinement de diverses aides communautaires sur la période 19941999.
" Juste retour ", affirment ceux qui dans
lîle reprochent à la République davoir longtemps négligé la Corse.
Pourtant, il faut le souligner, le développement insulaire nest pas essentiellement
dépendant de moyens financiers supplémentaires.
1. Un effort financier global à évaluer
objectivement
a) Au
préalable : quelques mises au point indispensables
LÉtat est le premier acteur public par le poids
des dépenses quil effectue pour son propre compte et par les crédits quil
distribue aux différentes collectivités locales et aux acteurs économiques. Nul ne
saurait valablement affirmer que la Corse est oubliée ou négligée par la République
dun point de vue financier. Les montants transférés montrent quun effort
considérable de solidarité nationale sexerce en faveur de lîle. Aux
dépenses directes, il convient dajouter les coûts financiers pour lÉtat du
statut fiscal de la Corse et de la mise en place de la zone franche.
Les débats et polémiques autour de la question des dépenses
réellement effectuées en Corse au titre de la solidarité nationale sont nombreux et
récurrents. Cest la raison pour laquelle la commission denquête a cherché
à préciser les termes du débat de façon objective.
Avant de détailler les montants des flux financiers en jeu, il
convient den clarifier la nature.
La détermination de lampleur de la solidarité dont
bénéficie la Corse ne peut se réduire à laddition pure et simple des dépenses
et concours de lÉtat et de lUnion européenne, comme lont fait les
nombreux rapports ou études qui se sont succédés au cours des dernières années.
Ce total intégrerait, en effet, des sommes qui sont dépensées ou
versées en Corse dans les mêmes conditions ou selon les mêmes règles que dans les
autres régions françaises.
Il importe au contraire de déterminer ce qui relève dune solidarité
spécifique à la Corse, cest-à-dire ce qui, dépensé dans lîle,
ne laurait pas été ailleurs. Il ne sagit pas dun exercice
facile ; cependant, il est possible de parvenir à un chiffre suffisamment
significatif.
Dans lensemble des sommes évoquées ci-dessus, trois masses
dinégale importance peuvent être distinguées.
La première masse est constituée des dépenses ou concours
qui, à lévidence, ne relèvent pas dun souci de solidarité spécifique à
la Corse. Il sagit :
- des dépenses réalisées par lÉtat pour son propre compte
(4.969 millions
de francs en 1997) : rémunération des fonctionnaires en poste dans lîle,
pensions versées aux fonctionnaires retraités, autres dépenses de fonctionnement des
services et investissements de lÉtat pour son propre compte ;
- des concours versés aux collectivités locales en application des lois de
décentralisation et des lois générales régissant les concours de lÉtat aux
collectivités locales
: il sagit des concours ou des transferts de droit
commun (dotations budgétaires, fiscalité, compensations dexonérations et de
dégrèvements législatifs ) que les collectivités locales de Corse reçoivent dans les
mêmes conditions que leurs homologues du continent ; ils mettent en uvre des
critères et des modes de calcul dapplication strictement nationale ;
- la moitié des engagements de lÉtat pris dans le cadre du contrat de plan
(1994-1999)
(58 millions de francs par an) ;
- les subventions de fonctionnement ou dinvestissement versées par lÉtat à
des tiers, hors contrat de plan
; ces subventions relèvent de politiques
nationales applicables dans lensemble des régions françaises.
La deuxième masse est constituée, à linverse, de ce qui
relève dun souci de solidarité particulière à la Corse, car il sagit de
concours sans équivalent ailleurs. On peut y intégrer :
- l
a dotation de continuité territoriale (937 millions de francs en
1997),
- le coût du statut fiscal dérogatoire et de la zone franche
(de lordre de
1.500 millions de francs pour 1997, dont 516 millions de francs pour la
zone franche),
- la seconde moitié des engagements de lÉtat pris dans le cadre du contrat de plan
(1994-1999) (58 millions par an)
;
- les crédits exceptionnels accordés hors contrat de plan pour
lapplication du plan de développement
(360 millions de francs sur 6
ans, soit 60 millions de francs par an),
- les crédits provenant de lUnion européenne dans le cadre du DOCUP et des autres
programmes dintérêt communautaire
(1.870 millions de francs sur 6 ans,
soit 312 millions de francs par an) ; en effet, la Corse est la seule région
métropolitaine à bénéficier de lObjectif 1 (à lexception de trois
arrondissements du Nord-Pas-de-Calais qui sont dans le même cas) alors quelle
était au-delà des critères dadmission.
La troisième masse présente un caractère intermédiaire, car
la distinction entre ce qui y relève dune solidarité particulière et ce qui
pourrait se constater dans les autres régions est plus délicate. Cette masse concerne,
en effet, la dotation générale de décentralisation hors continuité
territoriale versée à la Collectivité territoriale de Corse (348
millions de francs)et la fiscalité exceptionnellement transférée en Corse à la
Collectivité territoriale et, dans une moindre mesure, aux deux départements (300
millions de francs). Les transferts de compétences étant plus importants en Corse,
il est naturel que leurs compensations financières naient pas la même ampleur que
dans les autres régions. Cependant, il a été indiqué à la commission denquête
que leur détermination a bénéficié dun certain " coup de pouce ",
notamment lors de ladoption de la loi du 27 décembre 1994 portant statut fiscal de
la Corse.
Ainsi donc, leffort de solidarité spécifique dont bénéficie
la Corse peut être estimé à 2.867 millions de francs. Une partie difficile à
déterminer dune enveloppe globale de 648 millions de francs pourrait
également relever dune telle solidarité spécifique à la Corse.
(en millions de francs)
Concours relevant
dune solidarité spécifique |
2.867 |
- dotation de continuité
territoriale (1997) |
937 |
- statut fiscal
dérogatoire et zone franche (estimation 1997) |
1.500 |
- part des engagements de
lÉtat dans le contrat de plan (par an) |
58 |
- crédits exceptionnels
hors contrats de plan (par an) |
60 |
- crédits dorigine
communautaire (par an) |
312 |
Dès lors, un chiffre proche de 3 milliards de francs annuels
(soit environ 11.500 francs par habitant) constituerait une juste estimation de
leffort de solidarité bénéficiant à la Corse, effort provenant à près de 90%
de la communauté nationale.
Une fois ces précisions apportées, il convient de détailler plus
précisément comment se décomposent les 8,8 milliards de francs de dépenses
directes de lÉtat.
b) Les
8,8 milliards de dépenses directes de lÉtat
Les dépenses directes de lÉtat en Corse (hors
prestations sociales) ont atteint environ 8,804 milliards de francs en 1997.
Ces dépenses se décomposent en trois grandes catégories : les
dépenses que lÉtat effectue pour son propre compte, les concours aux
collectivités locales et les subventions de fonctionnement et dinvestissement
versées à des tiers.
DEPENSES DIRECTES DE LETAT EN CORSE EN 1997
(en millions de francs)
DEPENSES DE LETAT
POUR SON PROPRE COMPTE |
4.949 |
- traitements des agents en
postes dans lîle |
2.304 |
- pensions versées |
2.114 |
- autres dépenses de
fonctionnement des services |
347 |
- investissements de
lÉtat pour son propre compte |
184 |
CONCOURS AUX
COLLECTIVITES LOCALES |
3.362 |
- dotations budgétaires et
concours financiers |
2.347 |
- fiscalité transférée |
362 |
- compensations
dexonérations et de dégrèvements législatifs |
653 |
SUBVENTIONS VERSEES AUX
TIERS |
493 |
- subventions de
fonctionnement |
336 |
- subventions
dinvestissement |
157 |
TOTAL |
8.804 |

Les dépenses de lÉtat pour son propre compte se sont
élevées à 4.949 millions de francs en 1997, soit 56% de lensemble des
dépenses directes de lÉtat en Corse.
Les salaires des 14.000 fonctionnaires civils et militaires
représentent en effet 2.304 millions de francs et les pensions versées 2.114
millions de francs. Sy ajoutent 347 millions de francs (en 1997) au
titre des autres dépenses de fonctionnement ainsi que 184 millions de francs de
dépenses dinvestissement. LÉtat procède en effet régulièrement à des
opérations dinvestissement au titre de constructions neuves et de travaux de
rénovation. Il apparaît ainsi comme un des principaux maîtres douvrage dans ce
domaine au niveau régional.
Les dotations et transferts aux collectivités locales, 2.347 millions
de francs, représentent 70% du total. Les compensations dexonération et de
dégrèvements législatifs atteignent 653 millions de francs et lensemble de
la fiscalité transférée 362 millions de francs.
La Collectivité territoriale, dotée dun budget de 2,2
milliards, a absorbé 1,775 milliard de transferts à elle seule en 1997. Près de
60 % du budget de cette collectivité provient de ces crédits dÉtat. Ceux-ci
sont constitués en premier lieu par la dotation générale de décentralisation (DGD)
1,3 milliard qui elle-même comprend principalement la dotation de
continuité territoriale, laquelle avoisine aujourdhui 1 milliard de francs.
Rappelons que les transferts budgétaires de lÉtat se traduisent par la dotation
générale de décentralisation versée aux départements et aux communes et par la
dotation générale de décentralisation Corse destinée à financer les accroissements de
charges résultant des transferts de compétences opérées par la loi au profit de la
Collectivité territoriale de Corse. En effet, la loi de 1982 transféra à la région
Corse des compétences en matière déducation, de constructions scolaires ; celle
de 1991 organisa des transferts de compétences en matière de routes nationales, de
continuité territoriale, dagriculture, dhydraulique et dans le domaine
culturel. Aujourdhui cette dotation, qui évolue comme la dotation globale de
fonctionnement, représente une part importante des ressources du budget de la
Collectivité territoriale. En 1997, la DGD Corse (1,285 milliard de francs) se
répartissait de la manière suivante :
Continuité
territoriale |
937 millions
de francs |
offices agricole
(ODARC) et hydraulique (OEHC) |
40,7 millions
de francs |
Divers transferts |
307,1 millions
de francs |
Il faut noter que le fonctionnement des six offices et agences de la
Collectivité territoriale de Corse, créés ou confirmés par le statut de 1991, dépend
dun transfert de crédits publics à un niveau important. Malgré leur statut
dEPIC, ces offices ne disposent, pour la plupart dentre eux, daucune
ressource en propre. Leur fonctionnement est financé sur le seul budget de la
Collectivité territoriale de Corse, dans le cas de loffice de lenvironnement
(OEC), de lagence du Tourisme (ATC) et de lagence de développement
économique de la Corse (ADEC). Les autres offices reçoivent du budget de la
Collectivité territoriale une dotation intégrée à la dotation générale de
décentralisation. Cest le cas de loffice des transports (OTC) qui gère
laffectation de la dotation de continuité territoriale entre les compagnies
concessionnaires du service public du transport en vertu des articles 73 et 74 de la loi
du 13 mai 1991. Les deux offices à vocation agricole, lODARC (office de
développement agricole et rural de la Corse) et lOEHC (office déquipement
hydraulique de la Corse) voient leur fonctionnement financé grâce à une quote-part de
la DGD.
La progression des concours financiers accordés aux collectivités
résulte essentiellement des dispositions législatives successives qui, depuis 1991, ont
institué des mécanismes de solidarité financière entre les régions et les
départements français. Les versements en faveur de la Collectivité territoriale de
Corse seffectuent sur le fonds de correction des déséquilibres régionaux. La
dotation globale de fonctionnement (DGF) versée aux deux départements de Haute-Corse et
de Corse-du-Sud résulte notamment de la mise en uvre de la solidarité financière.
Des versements effectués au bénéfice des communes se réalisent également dans le
cadre des dotations de solidarité rurale et de solidarité urbaine.

Source : Préfecture de Corse
Enfin, les subventions de fonctionnement et dinvestissement
versées à des tiers représentaient 493 millions de francs en 1997.
Les subventions de fonctionnement à des
tiers, 336 millions de francs, représentent près de 70% de lensemble des
subventions versées. Leur répartition sectorielle, en intégrant les concours
communautaires éventuellement reçus, est indiqué dans le graphique ci-dessous.
Source : Préfecture de Corse.
Les subventions dinvestissement versées à des tiers
représentent 157 millions de francs. Les opérations subventionnées figurent,
pour lessentiel, à la fois dans le contrat de plan et dans la programmation
communautaire (Docup et programmes dinitiative communautaire). En intégrant les
crédits européens, on observe la répartition sectorielle suivante :
Source :
Préfecture de Corse
c) Le
plus fort ratio par habitant de la dotation communautaire en France
Depuis 1986, la Corse est éligible à de nombreux
programmes communautaires qui lui ont permis de bénéficier de 1,5 milliard
de francs sur la période 1986-1993 du fait de son classement en Objectif 1.
Maintenue dans cette zone pour la période 1994-1999, la Corse est la région de France la
moins industrielle (7,3 % des emplois) ; lagriculture y représente encore
8,2 % de la population active, contre 5,6 % pour lensemble de la France.
Ces chiffres, comme ceux du produit intérieur brut par habitant et du revenu moyen,
témoignent dun retard, que cette région est cependant en passe de combler.
Cest une des raisons pour lesquelles la Corse a largement profité des politiques
régionales : au total depuis 1989, elle aura bénéficié de plus de 3 milliards
de francs pour la période allant jusquen 1999.
Ces crédits sont en croissance sur la période récente. Sont prévus
pour les années 1994-1999 :
- dans le cadre du Document unique de programmation (Docup) 1,650 milliard de francs
de crédits, se décomposant ainsi :
FEDER |
980 MF |
FEOGA |
420 MF |
FSE |
200 MF |
IFOP |
50 MF |
et dans le cadre des Programmes dinitiative
communautaires (PIM), 220 millions de francs.
Au total, le montant des crédits communautaires destinés à la Corse
sélève à 1,9 milliard de francs sur la période 19941999. En termes
de ratio par habitant, la Corse est la région de France qui reçoit la plus forte
dotation de lUnion européenne : la moyenne crédits de lUnion sur
habitant atteint 900 francs en Corse contre 80 francs pour la France entière et
500 francs pour la Guadeloupe.
A cette somme considérable viennent sajouter pas moins de
2,3 milliards de crédits de lÉtat et les 800 millions de dépenses privées
qui en sont les contreparties au titre du Docup. Ainsi le volume global des actions
prévues dans le cadre des programmes européens atteint 4,9 milliards de francs
en tout sur six ans. Sur ces 4,9 milliards, les secteurs concentrant les plus grosses
dépenses sont lagriculture et la pêche (à hauteur de 1,3 milliard
de francs), les infrastructures (pour 1,1 milliard de francs) et la
formation professionnelle et lemploi (pour 580 millions de francs).
2. La contractualisation privilégiée des dépenses
nationales et communautaires
Comparée à dautres régions françaises, la Corse a
incontestablement bénéficié dun engagement de lÉtat soutenu dans le cadre
du contrat de plan en cours dexécution. Par ailleurs, de nombreuses actions sont
aujourdhui financées en Corse grâce à des crédits contractualisés dans le
Document unique de programmation (Docup). Le 29 juillet 1994, la Commission de
Bruxelles adopta, après concertation avec les autorités publiques locales et nationales,
le nouveau programme de lObjectif 1 pour lîle, qui fut doté de 1,650
milliard de francs pour la période 19941999. Le zonage nayant pas été
modifié depuis 1989, lensemble de la population et du territoire corse
continuèrent dêtre couverts par ces programmes avantageux.
a) Un
contrat de plan doublement doté
La Corse est la région de France qui reçoit en terme
de ratio par habitant la plus forte dotation de lÉtat. Pour le contrat de plan
19941998 prolongé jusquen 1999, ce ratio sélève à 2.693 francs
par habitant, hors crédits exceptionnels, alors que la moyenne pour lensemble des
contrats de la métropole sétablit à 1.339 francs, comme le montre le tableau
à la page suivante.
Ce contrat, le troisième passé avec la région Corse, se présente
comme lun des outils dapplication du plan de développement adopté par
lAssemblée de Corse le 29 septembre 1993. Il constitue un moyen privilégié de
mettre en cohérence les politiques et les actions conduites par lÉtat dans
lîle avec les programmations de la Collectivité territoriale. Les orientations du
plan de développement sarticulaient autour des investissements pour les
communications vers lextérieur et dans lintérieur, du renforcement du tissu
économique et de lencouragement des activités nouvelles, de la réorientation du
tourisme vers létalement saisonnier et au profit de lintérieur, de
lamélioration de léquipement agricole, forestier, aquacole, de la
préservation de lenvironnement, et des aides à lenseignement du secondaire
au supérieur.
Les contrats de plan avec les régions françaises
|
Population
totale au
1er janvier 1994
(1) |
Engagement
de lÉtat 1994/ 99 en MF
(2) |
Montant
en francs par habitant =
(2) / (1) |
ALSACE |
1 677 884,00 |
2 253,670 |
1 343,16 F |
AQUITAINE |
2 854 482,00 |
3 047,610 |
1 067,66 F |
AUVERGNE |
1 316 341,00 |
2 455,000 |
1 865,02 F |
BOURGOGNE |
1 621 308,00 |
2 069,440 |
1 276,40 F |
BRETAGNE |
2 834 323,00 |
5 199,390 |
1 834,44 F |
CENTRE |
2 422 349,00 |
2 398,680 |
990,23 F |
CHAMPAGNE ARDENNE |
1 351 281,00 |
1 799,630 |
1 331,80 F |
CORSE |
258 072,00 |
695,010 |
2 693,09 F |
FRANCHE COMTÉ |
1 109 207,00 |
1 810,530 |
1 632,27 F |
ILE DE France |
10 931 587,00 |
11 159,440 |
1 020,84 F |
LANGUEDOC ROUSSILLON |
2 202 672,00 |
3 690,180 |
1675,32 F |
LIMOUSIN |
719 780,00 |
1 541,450 |
2 141,56 F |
LORRAINE |
2 311 006,00 |
4 388,700 |
1 899,04 F |
MIDI PYRENEES |
2 482 933,00 |
4 219,410 |
1 699,37 F |
NORD PAS DE CALAIS |
3 988 183,00 |
8 271,240 |
2 073,94 F |
BASSE NORMANDIE |
1 408 305,00 |
2 223,390 |
1 578,77 F |
HAUTE NORMANDIE |
1 770 540,00 |
2 275,420 |
1 285,16 F |
PAYS DE LA LOIRE |
3 122 414,00 |
2 978,070 |
953,77 F |
PICARDIE |
1 847 906,00 |
2 493,420 |
1 349,32 F |
POITOU CHARENTES |
1 612 530,00 |
2 529,480 |
1 568,64 F |
PROVENCE ALPES
COTE DAZUR |
4 400 355,00 |
4 359,550 |
990,73 F |
RHONE ALPES |
5 535 594,00 |
5 149,900 |
930,32 F |
BASSIN PARISIEN |
|
333,000 |
|
|
|
|
|
TOTAL |
57 779
052,00 |
77
341,610 |
1 338,58
F |
Source : DATAR
TABLEAU FINANCIER GÉNÉRAL du contrat de plan
État - CollectivitÉ territoriale de Corse
(en millions de francs)
CHAPITRES |
ETAT |
COLLECTIVITE
TERRITORIALE DE CORSE |
TOTAL |
Titre I : La Fonction Structurante
|
57,55 |
30,05 |
87,60 |
Communications |
57,55 |
30,05 |
87,60 |
Titre II : La Fonction Productive
|
348,75 |
292,45 |
641,20 |
Tourisme |
38,30 |
37,50 |
75,80 |
Développement
économique |
52,70 |
37,00 |
89,70 |
Agriculture |
193,90 |
152,10 |
346,00 |
Forêt |
53,29 |
55,29 |
108,58 |
Pêche |
10,56 |
10,56 |
21,12 |
Titre III : La Fonction Spatiale
|
31,15 |
30,60 |
61,75 |
Environnement |
23,15 |
24,60 |
47,75 |
Aménagement
de lintérieur (DIM) |
8,00 |
6,00 |
14,00 |
Titre IV : La Fonction Sociale
|
229,08 |
200,45 |
429,53 |
Education |
24,32 |
26,62 |
50,94 |
Enseignement
supérieur |
43,00 |
23,50 |
66,50 |
Recherche |
35,00 |
31,80 |
66,80 |
Culture |
44,60 |
41,60 |
86,20 |
Jeunesse
et Sports |
3,00 |
1,00 |
4,00 |
Affaires
sanitaires et sociales |
8,16 |
4,93 |
13,09 |
Formation
professionnelle |
70,00 |
70,00 |
140,00 |
Droit des
Femmes |
1 |
1 |
2,00 |
Evalutation
|
0,42 |
0,42 |
0,84 |
Suivi
Evaluation |
0,42 |
0,42 |
0,84 |
TOTAL |
666,95 |
553,97 |
1 220,92 |
% par rapport au montant total
|
54,63 % |
45,37 % |
|
|
|
|
|
Politique de la ville |
28,06 |
26,40 |
54,46 |
|
|
|
|
Total y compris
Politique de la ville |
695,01 |
580,37 |
1 275,38 |
% par rapport au montant total
|
54,49 % |
45,51 % |
|
Dotations de lÉtat Crédits
interministériels : 103,45 MF
FIDAR : 76,45 MF
FIAT : 10,00 MF
FRILE : 17,00 MF
Le contrat signé avec la Collectivité territoriale de Corse
apparaît dans son architecture comme un " contrat normal " avec des
accentuations sectorielles justifiées par la situation économique de la Corse et par les
données topographiques de lîle. Dune manière générale, il est
principalement axé sur les entreprises et leur environnement immédiat.
Sur la période concernée, lÉtat sest donc engagé à
apporter une enveloppe de 666,95 millions de francs pour la mise en oeuvre du contrat
et a décidé, lors du comité interministériel à la ville en date du 29 juillet 1993,
de compléter cette action par une dotation particulière pour la politique de la ville à
hauteur de 28,06 millions. Pour sa part, la Collectivité territoriale doit apporter sa
contribution à hauteur de 553,97 millions dans le cadre du contrat de plan et de 26,4
millions dans le cadre de la politique de la ville.
En outre, hors contrat de plan, lÉtat a prévu dapporter
des crédits exceptionnels (360 millions en tout) pour faciliter la réalisation des
secteurs déterminants du plan de développement. Cet appui porte notamment sur le secteur
des routes nationales. LÉtat a accepté de fournir un effort spécifique de 250
millions de francs pour la période du contrat de plan afin daider à la
modernisation du réseau routier structurant la Corse, et en particulier laxe
Ajaccio-Bastia. Des mesures destinées à promouvoir les activités économiques dans
lintérieur de lîle sont programmées grâce à des financements du fonds
interministériel daménagement du territoire (FIAT) à hauteur de 30 millions
de francs. Enfin, des crédits du ministère de lagriculture doivent permettre
toujours hors contrat de plan de moderniser léquipement
hydraulique de la Corse (pour 37 millions) et de restructurer le vignoble et les vergers
(pour 42,8 millions).
Le contrat de plan et le plan de développement font apparaître quatre
grands types dopérations : la fonction dite
" structurante ", qui concerne les aéroports, les chemins de fer, les
routes nationales et les équipements collectifs. Au total, les crédits (y compris ceux
qui ne figurent pas dans le contrat de plan) sélèvent à 346,9 millions
de francs sur lensemble de la période. 721 millions de francs
doivent être mobilisés pour la fonction dite " productive ", qui
concerne le développement économique, lagriculture, la pêche et
laquaculture, de 134,21 millions pour les actions de la " fonction
spatiale ", qui couvre la politique de la ville, lenvironnement,
laménagement de lintérieur et les interventions du FIAT. 429,53 millions
doivent être apportés pour la " fonction sociale " qui porte sur
lenseignement, la formation, la recherche, le sport, les affaires sociales et la
culture. Le total des quatre fonctions atteint plus de 1,6 milliard de francs si les
crédits exceptionnels de lÉtat hors contrat de plan sont pris en compte.
Dans le cadre du contrat de plan, les deux partenaires
lÉtat et la Collectivité territoriale doivent participer
financièrement à hauteur de 55 % pour le premier et de 45 % pour la seconde.
Si les crédits exceptionnels de lÉtat hors contrat sont comptabilisés, la
proportion sétablit à 63,5 % pour lÉtat et à 36,5 % pour la
région. Notons que lÉtat consent un effort proportionnellement plus significatif
pour lagriculture, le développement des entreprises, les communications, les
affaires sanitaires et sociales, et lenseignement supérieur. La Collectivité
territoriale se mobilise davantage, quant à elle, dans les secteurs de
lenseignement secondaire, de la forêt et de lenvironnement.
Le montant des opérations que le contrat de plan doit entraîner, si
lon prend en compte les participations de lUnion européenne, des autres
collectivités et des acteurs privés, sélève à environ 2,35 milliards
de francs. Laide attendue de lUnion européenne, soit en contrepartie,
soit en complément du contrat de plan, représentait en 1994, 250 millions décus
soit 1,675 milliard de francs.
b) Une
région largement couverte par les divers programmes communautaires
· Un effort déjà considérable de lUnion européenne
en 1989-1993 et un soutien accru sur la période 1994-1999
Au cours de cette période, plusieurs programmes ont
couvert la région Corse. Dès 1986, des actions spécifiques avaient été menées grâce
au Programme intégré méditerranéen (PIM) qui visait à aider les régions
méditerranéennes de la France à pallier les effets de lentrée dans le marché
commun de lEspagne et du Portugal. Le programme de lObjectif 1 est venu
renforcer en 1989 cet ensemble de mesures, complété par ailleurs par les initiatives
communautaires telles que Interreg, Stride ou Envireg.
De multiples réalisations dans le cadre de lObjectif 1 et du
PIM ont porté sur le désenclavement de lîle. Le Fonds européen de
développement régional (FEDER) contribua dans ce cadre à lamélioration du
réseau routier et des aménagements portuaires afin de permettre laugmentation du
trafic maritime des marchandises. Il finança des travaux visant à renforcer la capacité
daccueil des quatre aéroports accueillant des vols commerciaux. Cest ainsi
que furent réalisés laménagement de laérogare dAjaccio,
laccroissement des aires daccueil de laéroport de Bastia et
lamélioration des aéroports de Figari et de Calvi. Le deuxième grand axe des
actions communautaires concerna le développement des PME-PMI dans le but de renforcer le
tissu des moyennes entreprises en Corse.
Dans la période 1989-1993, une aide aux investissements dun
montant de 20 millions de francs permit daccompagner le développement de plus
de cinquante entreprises régionales. Dans le cadre de la promotion touristique de
lîle, le FEDER cofinança en outre divers projets culturels, parmi lesquels la
création du musée de la Corse à Corte ou laménagement dun site
archéologique à Aléria. Un quatrième volet fut axé autour de la mise en valeur des
ressources agricoles. Ainsi, au cours de la période
19891993, la Corse bénéficia de près de 130 millions de francs au titre de
ladaptation des structures agricoles. Des cycles de formation furent proposés aux
agriculteurs corses et des initiatives se multiplièrent pour optimiser le stockage, la
transformation et la commercialisation des produits agricoles. 30 millions de francs
furent par ailleurs alloués à laménagement de 13 ports, 7 en Haute-Corse et 6 en
Corse-du-Sud. De même, lUnion européenne contribua à soutenir leffort en
faveur de lenseignement supérieur et participa notamment au projet dextension
des capacités daccueil et déquipement de luniversité de Corte. Parmi
les autres travaux aidés par lUnion européenne, il faut citer
lagrandissement du lycée Fred-Scamaroni de Bastia avec la réalisation dune
unité autonome destinée aux formations du secteur hôtelier, la création dune
structure daccueil aux métiers du tourisme à Ville-di-Pietrabugno, du centre de
formation des apprentis (CFA) de Corse-du-Sud à Ajaccio, du centre municipal de formation
de Propriano et de lInstitut méditerranéen de formation de Borgo.
A ces actions se sont ajoutés les Programmes dinitiative
communautaire (PIC) qui mobilisèrent plus de 270 millions de francs entre 1989 et
1993 pour compléter les programmes de lObjectif 1 et les PIM dans des secteurs
particuliers comme lenvironnement, le développement local et la coopération
transfrontalière.
Cest en juillet 1993 que la liste des zones concernées par les
programmes de lObjectif 1 fut arrêtée. Lensemble du territoire corse fut une
nouvelle fois intégré alors que, du strict point de vue des règles, la Corse
naurait pas dû y figurer.
· Le " coup de pouce " du gouvernement
français en 1993
Un haut responsable de la Commission européenne a
indiqué : " Dans la période actuelle de programmation, entre 1994
et 1999, la Corse est considérée comme région éligible au titre de lObjectif 1
qui, dans notre jargon, désigne les régions considérées en retard de développement,
cest-à-dire celles dont le produit intérieur brut est inférieur à 75 % de
la moyenne communautaire. Celui de la Corse était légèrement supérieur, mais dans la
négociation politique qui a eu lieu en 1993, la Corse a été incluse dans la liste des
régions en retard, qui couvrent actuellement environ 25 % de la population
européenne. La Corse en fait partie, comme les départements doutre-mer français
et le Valenciennois, dans le nord de la France. (....)
Cela avait été un choix du gouvernement français. A
lépoque, quand nous avons négocié lenveloppe de lObjectif 1 pour la
France entre les DOM, la Corse et le Valenciennois, il y ait eu une volonté importante de
donner plus dargent à la Corse, compte tenu dune série de problèmes. La
commission, souple comme souvent, lavait accepté, même si cela ne correspondait
pas à une certaine équité qui veut que lon donne plus dargent là où les
gens sont les plus pauvres. (...)
La commission adresse à chaque État une lettre (...) disant :
" selon lapplication de critères objectifs, identiques à ceux appliqués
pour répartir les crédits entre les pays PIB par habitant, niveau de
chômage, etc voilà quelles seraient les allocations qui nous semblent
raisonnables et justes. Il sest trouvé quà lépoque, le gouvernement
français na pas du tout suivi nos recommandations. Il nétait pas obligé de
le faire, mais surprivilégier la Corse par rapport aux autres territoires de
lObjectif 1 a donné lieu, à nos yeux, à une très grande inégalité par rapport
aux situations objectives. "
· Une large palette de programmes communautaires
La Corse continue sur la période 1994-1999 à
bénéficier des Programmes dinitiative communautaire. Grâce au Programme
" Leader " renouvelé jusquen 1999, des actions de
développement rural sont financées à hauteur de 19,5 millions de francs du FEDER,
du FEOGA et du FSE. Linitiative " Pesca " en faveur de la
reconversion des zones dépendantes du secteur de la pêche, cest-à-dire
lensemble des zones côtières de lîle, est dotée de 2 millions
de francs. Les actions du PIC PME sont également poursuivies. De même, Interreg est
reconduit pour la Corse : avec une dotation de 136 millions de francs, ce
programme constitue, de par son importance, le second programme dont lîle
bénéficie dans le cadre communautaire.
· Vers un programme de transition accompagnant la sortie de
lObjectif 1
La probable sortie de la Corse de lObjectif 1
à partir de 1999 témoigne des progrès accomplis par la région pour combler son retard
de développement. Il convient de sen réjouir à ce titre. Cependant, il est clair
que les flux des crédits européens ont permis sur la période récente la réalisation
de divers projets structurels, notamment en matière de désenclavement. Il est donc
indispensable délaborer pour la Corse un plan de transition qui lui permette de
bénéficier pendant plusieurs années dun soutien particulier de lUnion
européenne.
Interrogé à ce propos par la commission denquête, un haut
fonctionnaire européen a expliqué : " La proposition de la Commission
européenne prévoit de concentrer les fonds dont nous disposerons pour la période
prochaine sur les régions les plus défavorisées. Nous considérons quil faut une
application stricte des critères déligibilité pour les régions dObjectif
1, et la Corse est au-dessus de cela. Il y aura dans la proposition de la Commission une
volonté de ne pas inclure la Corse, ni le Valenciennois dans les régions considérées
en retard de développement au niveau européen et qui reçoivent les deux tiers de la
dotation globale des financements.
Si les États membres suivent la position de la Commission, la Corse ne
sera plus en Objectif 1 à partir du 1er janvier 2000.
Néanmoins, pour ne pas créer de fracture soudaine, nous proposons
une période de transition longue et assez généreuse. Nous proposons la mise en place
dun programme " feasing out " de cinq ans, cest-à-dire de
sortie, graduelle, de sorte que lon aurait encore, pour la prochaine période, un
programme pour la Corse, mais dun montant moins important. Il y aura encore des
financements européens, en tout cas, pour quelques années, mais dune intensité
moindre. Lintensité nest pas déterminée, cela dépendra de la négociation
sur le budget communautaire, dans les prochaines semaines et les prochains
mois. ".
Sans revenir sur léchec du POSEICOR, le gouvernement
français pourrait sappuyer sur larticle 158 nouvellement rédigé du traité
sur lUnion européenne pour inciter cette dernière à mieux prendre en compte les
spécificités insulaires dans lespace communautaire.
3. De dérogations en
exceptions : un statut devenu exorbitant du droit commun
Déjà sous la domination génoise, la Corse bénéficiait
dun régime fiscal qui lui était propre. Celui qui lui est aujourdhui
appliqué dans le cadre de la République est pour une large part directement ou
indirectement issu des dérogations accordées sous le Consulat et lEmpire.
Appliqué dabord à la fiscalité indirecte, ce statut dérogatoire a été, au
cours des dernières années, renforcé et étendu à certaines impositions directes,
notamment par les lois du 27 décembre 1994 portant statut fiscal de la Corse et du 26
décembre 1996 relative à la zone franche de Corse.
Daprès les informations recueillies par la commission
denquête, le coût pour lÉtat de ses nombreuses dispositions dérogatoires
peut être estimé à plus de 1.500 millions de francs en 1997, dont plus du tiers
résulte de lapplication de la zone franche. Le tableau ci-dessous détaille la
répartition de cette dépense fiscale dont bénéficient la Corse et ses habitants.
ÉVALUATION DU COÛT POUR LÉTAT
DU STATUT DÉROGATOIRE DE LA CORSE
(en millions de francs)
Dispositions relatives
à la fiscalité indirecte |
|
l taxe intérieure sur les produits pétroliers
|
8 |
l droit de consommation sur les tabacs
|
184 |
l exonération de fait des droits de succession sur les biens immobiliers situés
en Corse
|
non chiffré (1) |
l exonérations diverses de TVA (trafic des colis postaux
avec le continent, prestations fournies pour les besoins des transports maritimes
avec le continent, transports maritimes de voyageurs ou de marchandises, ventes de vins
produits et consommés en Corse
)
|
non chiffré |
l application de taux particuliers de TVA
|
450 |
l droit de circulation applicable aux boissons
|
non chiffré |
l exonération du droit de licence sur les débits de boissons
|
non chiffré |
l exonération de limpôt sur les spectacles
|
non chiffré |
l non application de la taxe à lessieu
|
non chiffré |
TOTAL
|
642 |
Loi du 27 décembre 1994
portant statut fiscal de la Corse |
|
l suppression des parts de taxe professionnelle perçue au profit du département
et de la Collectivité territoriale
|
250 |
l abattement de 25 % des bases communales de taxe professionnelle
|
70 |
l exonération de la cotisation nationale de péréquation
|
négligeable |
l exonération de la part communale de la taxe foncière sur les propriétés non
bâties
|
13 |
l exonération de limpôt sur les sociétés créées avant le 31/12/98
|
2 |
l exonération de limpôt sur les activités nouvelles créées avant le
31/12/98
|
négligeable |
TOTAL
|
335 |
Loi du 26 décembre 1996
relative à la zone franche de Corse |
|
l exonération limitée des bénéfices des entreprises (impôt sur le revenu,
impôt sur les sociétés)
|
160 |
l exonération de limposition forfaitaire annuelle
|
10 |
l abattement sur des bases communales de taxe professionnelle
|
166 |
l allégement des charges sociales patronales
|
180 |
TOTAL
|
516 |
TOTAL
GÉNÉRAL |
1.493 |
(1) Le rapport Prada en chiffrait le
coût entre 30 et 50 millions de francs en 1989.
Source : Direction générale des impôts
a) Les
arrêtés Miot, le décret impérial et leurs avatars
Fondatrices, les dispositions des arrêtés Miot,
signés à Ajaccio les 7 et 10 juin 1801, et du décret impérial du 24 avril 1811 ont
orienté toute lévolution ultérieure de la fiscalité corse et gardent,
aujourdhui encore, une grande valeur affective.
La valeur législative des arrêtés Miot a été, au XIXème
siècle, sujette à discussion. Cependant, ils étaient considérés par les gouvernements
successifs comme ayant un caractère législatif, avant que celui-ci soit reconnu
effectivement par un arrêt de la Cour de cassation de 1875. De plus, deux dispositions
législatives (loi du 6 janvier 1966 portant réforme des taxes sur le chiffre
daffaires et loi du 21 décembre 1967 portant loi de finances pour 1968) y faisaient
explicitement référence. De même, la valeur législative du décret impérial a été
reconnue par un arrêt de la Cour de cassation rendu en 1956.
Les arrêtés Miot ont réduit dans des proportions importantes les
droits denregistrement acquittés en Corse. Ils ont diminué de moitié les droits
de mutation à titre onéreux et ont substitué une méthode forfaitaire, fondée sur le
montant de la contribution foncière, aux règles habituelles dévaluation de
lassiette des droits de succession sur les immeubles, qui reposaient alors sur la
valeur locative. Le décret impérial a mis fin, quant à lui, à la perception en Corse
des droits indirects, qui étaient constitués à lépoque de diverses taxes
prélevées sur le transport ou la consommation des boissons, de lalcool, du tabac
et des viandes.
Cependant, il ne faut pas se méprendre sur les motivations de ces
mesures dérogatoires. Elles " sont donc nées de simples aménagements
techniques en dehors du souci de privilégier les Corses ; elles sont réalisées
dans le seul intérêt du Trésor : en 1801 pour tourner les difficultés
dapplication des impôts français à une société insulaire traditionnelle, en
1811 pour réaliser de substantielles économies dignes du procédé de la rationalisation
des choix budgétaires ". Inspirés par le souci de simplifier le calcul des
droits de succession, les arrêtés Miot renonçaient à les asseoir sur les valeurs
locatives, celles-ci étant difficiles à établir en Corse en labsence presque
générale de baux ruraux. De même, le décret impérial a majoré la contribution
personnelle et mobilière dun montant égal au produit estimé des droits indirects
supprimés.
Lévolution ultérieure de la fiscalité nationale a rendu
nécessaires des adaptations au régime propre à la Corse, dans des conditions parfois à
la limite de la légalité.
Cest ainsi que la disparition, au 1er janvier 1949, de
la contribution foncière en tant quimpôt dÉtat, a retiré toute base
légale à la méthode dévaluation des successions définie par les arrêtés Miot.
Après avoir tenté en 1951 de faire rentrer la Corse dans le droit commun et dy
retenir, comme partout ailleurs depuis 1918, la valeur vénale au jour du décès pour
base destimation des immeubles, le gouvernement a dû faire marche arrière et tenir
compte des vives réactions suscitées par une telle mesure. Par lettre ministérielle en
date du 2 juillet 1951, il était décidé de déterminer les valeurs imposables en
multipliant le revenu cadastral, retenu pour lassiette des contributions foncières
perçues au profit du département et des communes, par le taux de la taxe
proportionnelle, élément de limpôt sur le revenu. La lettre ministérielle
reconnaissait néanmoins qu " il sagissait là dune
adaptation de larrêté Miot ne reposant sur aucune base légale et dont on ne
saurait soutenir quelle est satisfaisante, puisquelle fait intervenir deux
éléments de calcul empruntés à des impositions différentes ". Ce mode
de calcul a été jugé illégal par la Cour de cassation qui, dans un arrêt Perrino
de janvier 1992, a constaté qu " aucune disposition législative
nest venue apporter une modification expresse ou une dérogation, fût-elle
implicite, au régime spécial ". Depuis lors, les biens immobiliers sont
donc exonérés de fait de tout droit de succession.
Les modifications apportées à la fiscalité indirecte par la
création puis la généralisation de la TVA ont également eu des répercussions
importantes pour la Corse. Dans un premier temps, la loi de finances pour 1963 avait
exonéré de TVA certains produits importés en Corse. Puis, la loi de finances pour 1968
a appliqué une réfaction dassiette de 55 % aux ventes de produits et
prestations de services passibles des taux super-réduit et réduit ainsi que sur un
certain nombre dautres produits ou services, une réfaction dassiette de
25 % aux ventes et locations de voitures automobiles immatriculées en Corse, aux
ventes de produits pétroliers et de tabacs manufacturés et exonéré les transports de
voyageurs ou de marchandises pour la partie du parcours compris entre le continent et
lîle.
Plus ou moins directement inspirées par lesprit du décret
impérial de 1811, plusieurs dispositions dérogatoires sont également applicables en
Corse :
la taxe intérieure sur les produits pétroliers est
réduite de 6,63 francs par hectolitre pour les essences et supercarburants destinés
à être utilisés en Corse ou livrés dans les ports corses pour lavitaillement des
bateaux de plaisance ou de sport ;
le droit de consommation sur les tabacs est fixé à un
taux permettant les ventes au détail en Corse à des prix égaux aux deux tiers, ou à
85 % pour les cigares et cigarillos, de ceux qui sont pratiqués en France
continentale.
Enfin, en raison de lexemption des droits indirects accordée par
le décret impérial de 1811, il nest pas perçu en Corse de taxe à lessieu,
de droit de circulation sur les boissons, de taxe sur les spectacles, de droits de licence
sur les débits de boisson, de taxe sur les appareils automatiques. En effet, selon
linterprétation, pour le moins discutable mais qui résulte de larrêt
précité de la Cour de cassation de 1956, et qui a prévalu jusquà maintenant,
seuls sont applicables en Corse les droits indirects pour lesquels des dispositions
législatives dérogent explicitement au décret impérial.
Mais, il ne sagit pas du seul exemple dinterprétation
extensive de la législation dérogatoire. Lun des mythes largement ancrés dans la
croyance insulaire est que les arrêtés Miot ont dispensé les Corses du dépôt des
déclarations de succession et, donc, du paiement des droits. Or, tel est loin
dêtre le cas.
Le dépôt des déclarations nest pas laissé à la libre
appréciation des héritiers comme le soutiennent ceux qui estiment que larrêté ne
fixe aucun délai. Pour les successions ouvertes à la date de larrêté, un délai
de 90 jours était prévu, pour les autres le seul délai admis étant celui quil
faut à ladministration pour avoir connaissance du décès. Ce qui a servi de base
à linterprétation ultérieure est le fait que larrêté entérine la
dispense de pénalités en cas de non dépôt dans le délai de six mois. Comme
lexpliquait un responsable syndical dans un document annexé au rapport Prada de
1989, " les interprétations de larrêté Miot ayant jeté, depuis
plusieurs décennies, une confusion générale dans les esprits, ladministration
sest trouvée, pendant plusieurs années, relativement désarmée : tantôt
elle exigeait le dépôt des déclarations, tantôt elle ne le faisait pas ".
Daprès les informations recueillies par la commission
denquête, la pratique suivie par ladministration fiscale consiste à ne
relancer les héritiers qui ne déposent pas spontanément leur déclaration que lorsque
les recoupements quelle opère font apparaître un réel enjeu financier. En
moyenne, il apparaît que si relance il y a, celle-ci nintervient quaprès une
période de 12 à 18 mois suivant le décès. Ladministration fiscale recoupe
les informations en provenance de plusieurs sources : fiches-décès transmises par
les mairies dans des délais variables, recoupements bancaires, attestations immobilières
provenant des notaires (notamment celles établies au moment des partages ou des sorties
de lindivision) ou informations relatives aux contrats dassurance-vie. En tout
état de cause, le nombre de déclarations effectivement souscrites est sans commune
mesure avec le nombre de celles qui sont déclarées ouvertes : 168 sur 935 en
Corse-du-Sud et 182 sur 1.384 en Haute-Corse en 1997.
b) La
loi du 27 décembre 1994 portant statut fiscal de la Corse
Avec la loi portant statut fiscal de la Corse, les
dérogations dont bénéficient les insulaires touchent les impôts directs, qui
navaient été, jusque là, concernés que de manière très minime. Lidée,
comme plus tard avec la zone franche, est dutiliser loutil fiscal pour
uvrer au développement économique de lîle et soutenir les entreprises qui y
sont installées : le principal levier choisi est la taxe professionnelle et, pour
lagriculture, la taxe sur le foncier non bâti.
La loi du 27 décembre 1994 supprime les parts de taxe professionnelle
perçues au profit des deux départements et de la Collectivité territoriale de Corse et
réduit dun quart les bases communales de la taxe professionnelle. Elle exonère
totalement, en outre, de la cotisation nationale de péréquation les établissements
situés dans lîle. Lobjectif était de réduire le poids global de la taxe
professionnelle de 60 %. La perte des recettes qui en résulte pour chaque
collectivité est évidemment compensée par lÉtat ; le montant de la
compensation est égal, pour chaque collectivité, au produit des bases exonérées par le
taux voté par elle en 1994. En 1997, le montant de cette compensation sest élevée
à 250 millions de francs pour les deux départements et la Collectivité
territoriale et à 70 millions de francs pour les communes et leurs groupements.
Elle exonère totalement les terres dusage agricole situées en
Corse de la taxe foncière sur les propriétés non bâties perçue au profit des communes
et de leurs groupements. La loi sétait bornée, en outre, à anticiper dune
année lexonération totale de la part départementale qui devait intervenir en 1996
pour lensemble du territoire, la part régionale étant déjà exonérée depuis
1993 dans lensemble des régions. La compensation versée aux communes et à leurs
groupements, calculée dans les mêmes conditions que la compensation de la taxe
professionnelle, a représenté pour lÉtat un coût de 13 millions
de francs en 1997.
Enfin, la loi reconduit jusquau 31 décembre 1998 deux
dispositifs temporaires dexonération de limpôt sur les sociétés en faveur,
dune part, des entreprises nouvelles créées en Corse et, dautre part, des
activités nouvelles exercées en Corse par des entreprises existantes.
Le premier dispositif a été institué par la loi de finances
rectificative pour 1987 et avait été déjà reconduit à quatre reprises. Il concerne
les entreprises nouvelles soumises à limpôt sur les sociétés dans les conditions
de droit commun, créées avant le 31 décembre 1998, et qui exercent lensemble de
leurs activités en Corse dans les secteurs de lindustrie, de lhôtellerie, du
bâtiment et des travaux publics. La loi a étendu lexonération au secteur de
lartisanat. Lexonération porte sur les huit premières années
dexistence de lentreprise.
Le second résulte de la loi de finances pour 1990 et avait déjà
été prorogé à deux reprises. Lactivité nouvelle doit sentendre, soit de
la création de nouveaux établissements, soit du développement de lentreprise par
ladjonction dune nouvelle branche dactivité ; celle-ci doit
sexercer dans les secteurs de lindustrie, du bâtiment, de lagriculture
et de lartisanat. Contrairement au dispositif précédent, celui-ci nest pas
limité aux entreprises exerçant lensemble de leurs activités en Corse et
sapplique donc à une activité nouvelle créée en Corse par une entreprise du
continent. Afin que ladministration fiscale puisse apprécier le caractère
réellement nouveau de lactivité, le bénéfice de lexonération est soumis
à une procédure dagrément administratif préalable. Comme précédemment,
lexonération porte sur les huit premières années dexercice de
lactivité concernée, à condition quelle soit créée avant le 31 décembre
1998.
c) La
loi du 26 décembre 1996 relative à la zone franche de Corse
Annoncée par le Premier ministre lui-même lors de son
déplacement sur lîle en juillet 1996, linstitution dune zone franche
sur lensemble du territoire de la Corse a pour objet de " donner un
nouveau souffle à léconomie corse (
) parce quau fil des années
celle-ci a été progressivement asphyxiée ou anémiée ". " Pour
rattraper le retard accumulé depuis vingt ans, le gouvernement a décidé de manifester
la solidarité de la Nation en érigeant la Corse en zone franche "
poursuivit-il dans son discours prononcé devant lAssemblée de Corse.
Linstauration de la zone franche a, dès lors, profondément
changé la nature du statut fiscal dérogatoire de lîle.
Outre quelle poursuit le processus dallégement de la taxe
professionnelle en Corse, elle institue en effet pour la première fois des exonérations
sur les bénéfices sans commune mesure avec les modestes dispositifs cités ci-dessus.
Elle innove en faisant bénéficier la Corse de mécanismes dexonération des
charges sociales exorbitants du droit commun. En outre, au contraire des autres zones
franches existantes qui ne concernent que des territoires très limités, elle
sapplique à lensemble dune région qui bénéficiait déjà, en tout ou
partie, des dispositifs de soutien de droit commun. Hormis les cantons dAjaccio et
de Bastia, la Corse est, en effet, classée en zone de revitalisation rurale. Elle est, en
outre, classée en zone daménagement du territoire, donc éligible à la prime
daménagement du territoire.
Sans entrer dans le détail des dispositions, la loi du 26 décembre
1996 sapplique aux entreprises existantes qui exercent une activité industrielle,
artisanale, commerciale ou non commerciale, aux entreprises en création ou en extension
et, sur agrément administratif, pour les entreprises de moins de 250 salariés qui
rencontrent des difficultés financières (cest-à-dire qui font lobjet
dune procédure de redressement judiciaire ou lorsque leur situation financière
rend imminente la cessation dactivité) et qui présentent un intérêt économique
et social pour la Corse. Elle prévoit trois types dexonération :
une exonération dimpôt sur les bénéfices (impôt
sur les sociétés ou impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et
commerciaux) limitée à 400.000 francs par période de douze mois et pour une durée
de cinq ans à compter du 1er janvier 1997 ; les bénéfices exonérés
doivent être maintenus dans lentreprise ;
une exonération de la part communale de la taxe
professionnelle, sauf délibération contraire des communes ou de leurs groupements, dans
la limite dun montant de base nette imposable de 3 millions de francs par
établissement, avant application de labattement spécifique de 25 % institué
par la loi de 1994 ;
un allégement de 23,4 % des charges sociales
patronales sur les salaires inférieurs à deux fois le SMIC dans la limite dun
plafond de 1.500 francs par mois et par emploi.
Daprès les éléments recueillis par la commission
denquête, le coût pour lÉtat et les organismes de sécurité sociale
sélèverait au total à 516 millions de francs pour 1997 : 166 millions
de francs au titre de la taxe professionnelle, 160 environ pour lexonération
partielle des bénéfices ou de limpôt sur les sociétés, 10 millions
de francs pour lexonération de limposition forfaitaire annuelle et
environ 180 millions de francs pour lallégement des charges sociales
patronales.
- Cliquer ici pour consulter la suite du rapport
Partie I-C , annoncée ci-dessous.
C. Des doutes légitimes sur lefficacité des
dépenses publiques
- Cliquer ici pour retourner au sommaire général
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