DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 71

Réunion du jeudi 18 mars 1999 à 9 heures 30

Présidence de M. Alain Barrau, Vice-Président

- Examen de textes soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution (propositions d'actes communautaires)

La Délégation a examiné, outre deux propositions d'actes communautaires qui ont déjà fait l'objet d'une analyse et pour lesquelles la réserve d'examen parlementaire avait été maintenue, six projets de textes récemment soumis à l'Assemblée nationale.

Présentant à nouveau le document E 1016 (modification de la décision n° 1692/96 concernant les ports maritimes, ports intérieurs et terminaux intermodaux), M. Alain Barrau, Rapporteur, a rappelé que ce document avait fait l'objet d'un premier examen par la Délégation le 26 mars 1998 : la Délégation avait alors décidé de réserver sa position et de réexaminer ce texte à un stade plus avancé de son élaboration. Certains Etats membres avaient au demeurant estimé prématurée la présentation de ce texte au Conseil, puisque la Commission n'avait pas déposé le rapport prévu à l'article 21 de la décision n° 1692/96/CE sur les orientations communautaires pour le développement du réseau transeuropéen de transport.

Le Rapporteur a souligné que ce projet continuait de susciter des réserves de la part de huit Etats membres, dont la France. Non seulement la Commission n'a toujours pas déposé le rapport qui lui était demandé, mais la modification proposée est plus large que celle qui était prévue. La France estime également que la Commission aurait dû développer dans un livre blanc - comme elle l'avait elle-même envisagé - des réflexions sur la révision des orientations retenues en 1996 pour le développement de ce réseau.

Il a donc suggéré d'interroger le ministre délégué sur ce point lors de son audition par la Délégation le 1er avril prochain.

Soulignant l'importance de ce texte, M. Gérard Fuchs a estimé qu'il devrait faire l'objet d'un rapport d'information. La Délégation a donc décidé de maintenir la réserve d'examen sur ce texte.

Le Rapporteur a rappelé que le document E 1102 (modification de la directive concernant le rapprochement des textes frappant les cigarettes et les tabacs manufacturés) avait déjà fait l'objet d'un examen approfondi par la Délégation le 9 juillet 1998. La Délégation avait alors décidé de maintenir la réserve d'examen en raison des objections que suscitait ce projet : la Commission préférait modifier le droit en vigueur, plutôt que de mener à son terme les procédures contentieuses à l'encontre de plusieurs Etats membres commettant des infractions au droit communautaire ; l'absence d'harmonisation des droits d'accises sur les cigarettes en Europe et la possibilité ouverte par le texte de déroger au respect du seuil minimal de perception de 57 % paraissaient contestables, de même que l'absence de réflexion sur les problèmes posés par la taxation des produits du tabac en termes de santé publique. Tout en soulignant que certains points restaient en discussion - notamment l'extension de la dérogation pour le tabac vendu en Corse - le Rapporteur a indiqué que la proposition de directive ne portait pas atteinte aux intérêts français et ne soulevait pas de difficulté majeure pour les autres Etats membres.

Après que Mme Nicole Feidt se soit interrogée sur le sort de la dérogation applicable au tabac vendu en Corse et que M. Gérard Fuchs, approuvé par le Rapporteur, eut estimé que cette question devait être replacée dans l'ensemble du dossier concernant la Corse, la Délégation a décidé de lever la réserve d'examen parlementaire.

La Délégation a délibéré de la proposition de règlement du Conseil définissant les projets d'investissement à communiquer à la Commission en cas de projet de nouvelle installation nucléaire ou de modification d'une installation existante (E 1207). Le Rapporteur a indiqué que le Portugal, la Grèce, l'Italie, l'Irlande, le Danemark et l'Autriche seraient favorables à l'obligation de communication, telle qu'elle est prévue, des projets relatifs à la gestion du combustible irradié et au démantèlement d'installations. Contrairement à l'Autriche et au Danemark, la France, le Royaume-Uni et la Belgique approuvent le relèvement des plafonds financiers à partir desquels les projets d'investissement doivent être communiqués à la Commission. Enfin, la France, la Suède, l'Irlande, le Royaume-Uni, la Belgique et l'Espagne souhaiteraient encadrer davantage le droit de publication des informations accordé à la Commission. Le Rapporteur a souligné la nécessité d'un meilleur encadrement de la procédure de publication des informations par la Commission, de manière à trouver un juste équilibre entre l'utilité de rendre publiques des informations générales et le souci de ne pas porter atteinte aux intérêts des industriels.

Sous réserve de cette observation, la Délégation a estimé que ce texte n'appelait pas, en l'état actuel de ses informations, un examen plus approfondi.

Abordant l'examen de la proposition de directive relative à certains aspects juridiques du commerce électronique dans le marché intérieur (document E 1210), M. Alain Barrau a évoqué les obstacles qui freinent le développement du commerce électronique dans l'Union européenne, en particulier l'insécurité juridique résultant de réglementations nationales divergentes et les coûts économiques qui en résultent. La Commission propose donc d'établir un cadre juridique léger et flexible, qui s'appliquerait à l'ensemble des services de la société de l'information et assurerait la liberté d'établissement, ainsi qu'un haut niveau de protection des consommateurs. La proposition de directive tend à préciser les conditions de mise en oeuvre du principe de libre circulation et à fixer les principes de la fourniture de services de la société de l'information (définition des prestataires de services, régime de leur responsabilité, promotion de codes de conduite, création de recours juridictionnels adaptés).

Souhaitant obtenir des précisions de la part de la Commission européenne, la France a émis une réserve générale d'examen. Compte tenu de la portée de ce projet, le Rapporteur a souhaité que la Délégation lui consacre un rapport d'information et a fait part de la candidature de M. François Guillaume.

M. Gérard Fuchs a également souhaité que la Délégation travaille de manière approfondie sur ce texte et procède à une approche comparative des questions qu'il soulève - en étudiant notamment les dispositifs en vigueur aux Etats-Unis et au Japon - afin de favoriser une identité européenne en ce domaine.

Approuvant ces propos, Mme Béatrice Marre a souligné que les questions relatives au commerce électronique étaient au c_ur des débats préparatoires aux prochaines négociations commerciales de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

A l'issue de ce débat, la Délégation a décidé de maintenir la réserve d'examen parlementaire et de procéder, lors d'une prochaine réunion, à la désignation d'un rapporteur.

La Délégation a noté que la proposition de règlement portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (E 1211) avait pour seul objet - en dépit de son intitulé - la codification à droit constant de l'ensemble des dispositions régissant cette OCM et qui sont actuellement dispersés dans plusieurs textes distincts. Ce texte n'appelle donc pas d'observations particulières.

Le Rapporteur a exposé les grandes lignes de la proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un accord de coopération douanière et d'assistance mutuelle en matière douanière entre la Communauté européenne et Hong Kong (E 1212), qui comporte des dispositions relatives à l'échange de données à caractère nominatif. Il a évoqué, à l'égard de ce projet, la portée du principe de subsidiarité, ainsi que l'intérêt que peuvent revêtir, parallèlement aux accords conclus par la Communauté, les accords bilatéraux de coopération en matière douanière.

Il s'est enfin interrogé sur le principe même de la négociation d'un accord de coopération douanière avec Hong Kong, dans la mesure où ce territoire, désormais rattaché à la Chine, ne dispose pas de manière évidente de la capacité de signer un accord international.

Après les observations de M. Gérard Fuchs, la Délégation a décidé de s'informer des travaux du groupe des questions économiques qui s'est réuni tout récemment pour examiner ce projet d'accord.

Compte tenu de cette précision, la Délégation a levé la réserve d'examen sur ce texte.

Le Rapporteur a souligné que le livre blanc sur le commerce (E 1214) était soumis à la Délégation au titre des nouvelles dispositions de l'article 88-4 de la Constitution, issues de la loi du 25 janvier 1999, qui donnent la faculté au Gouvernement de soumettre au Parlement « tout document émanant d'une institution de l'Union européenne ». M. François Loncle a considéré que ce document méritait d'être analysé au regard des choix opérés par la France en faveur de la grande distribution au détriment du petit commerce.

M. Alain Barrau a évoqué ensuite une proposition de décision et une proposition de règlement du Conseil relatifs aux possibilités de pêche et à la contrepartie financière prévues par l'accord entre la Communauté économique européenne et la République des Seychelles concernant la pêche au large de cet Etat, pour la période du 18 janvier 1999 au 17 janvier 2002 (E 1222). Après les observations de M. Gérard Fuchs, qui s'est inquiété de la contrepartie prévue pour développer la pêche locale et a souhaité que la Délégation soit informée, de manière générale, sur les contreparties prévues par les accords de ce genre, la Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire.

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Evoquant, à la demande de M. Alain Barrau, Vice-Président, l'ordre du jour de la prochaine réunion, M. Didier Boulaud a fait état de l'adoption par le Parlement européen, le 10 mars dernier, des propositions de directive relatives aux chemins de fer communautaires (E 1163). Après avoir insisté sur les enjeux sociaux de ces textes, il a précisé que le Parlement européen avait largement suivi les thèses de la Commission. Il s'est félicité de ce que les rapporteurs du Parlement européen, MM. Pavlos Sarlis et Johannes Swoboda, aient accepté d'être entendus par la Délégation le jeudi 25 mars prochain.

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