DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 161

Réunion du jeudi 25 octobre 2001 à 9 heures

Présidence de M. Alain Barrau

 

I. Communication du Président Alain Barrau sur la transposition des directives

Le Président Alain Barrau a présenté une communication sur la transposition des directives.

Il a considéré que le recours récent à l'habilitation législative pour résorber partiellement les retards de transposition des directives communautaires montrait l'inefficacité des solutions juridiques pratiquées jusqu'à présent pour les transpositions des directives par voie législative ou réglementaire. Il a alors rappelé son intervention au cours de l'examen, par l'Assemblée nationale, du projet de loi d'habilitation, soulignant la nécessité impérieuse d'améliorer le dispositif de transposition, et sa proposition de loi permettant aux Délégations pour l'Union européenne des deux Chambres de se saisir pour avis des projets de loi déposés dans ce cadre. Il est paradoxal, en effet, que le Parlement soit associé, en vertu de la Constitution, à l'élaboration des normes communautaires, mais ne le soit plus dans la phase d'intégration des directives dans le droit positif.

Pour mettre fin à ce paradoxe et permettre une association effective de l'Assemblée nationale à l'ensemble du processus d'élaboration, d'adoption et de transposition des normes européennes, il importe que la Délégation, qui a examiné le projet de norme européenne, puisse suivre également, sous une forme ou sous une autre, sa transposition.

Au cours du débat sur la ratification du traité de Nice, en juin 2001, le ministre chargé des affaires européennes a énuméré les mesures prises, après arbitrage du Premier ministre, pour répondre aux préoccupations insistantes de parlementaires de tous les groupes :

- instauration, d'une nouvelle procédure par laquelle le Gouvernement fera connaître tous les deux mois, aux Délégations pour l'Union européenne, les directives communautaires nécessitant une transposition par voie législative, en indiquant  explicitement le délai correspondant;

- communication régulière aux Délégations d'un document récapitulant l'ensemble des procédures de transposition ;

- organisation d'une réunion annuelle de suivi des transpositions sous l'égide du cabinet du Premier ministre ;

- création d'un groupe de travail informel sur les modalités du suivi parlementaire de la transposition des directives.

Ce groupe a proposé plusieurs mesures comportant notamment la diffusion au Conseil d'État et aux assemblées, chaque trimestre, du tableau récapitulatif de l'état des transpositions, tenu à jour par le SGCI ; la transmission aux Délégations pour l'Union européenne de la fiche d'impact juridique simplifiée qui doit être réalisée pour chacun des textes transmis en application de l'article 88-4 de la Constitution et, pour les textes spécialement retenus par chaque Délégation, d'un avis du SGCI portant sur les textes de droit interne concernés, les difficultés posées par le texte et les premiers éléments de la position française ; enfin la, diffusion spécifique aux présidents des Délégations des télégrammes diplomatiques relatifs aux négociations sur les textes adressés aux assemblées au titre de l'article 88-4.

Le groupe de travail a enfin envisagé les améliorations pouvant être apportées au dispositif législatif, dans le cadre constitutionnel en vigueur, afin d'engager le plus rapidement possible la procédure de transposition. Il a souhaité l'insertion plus fréquente des transpositions dans des lois dont ce n'est pas l'objet principal. Cela permettrait de tirer parti des projets à l'ordre du jour pour assurer la transposition de directives connexes et aussi de banaliser l'exercice de la transposition. Pour les projets de loi dont la transposition est l'objet principal, il conviendrait de faciliter les contacts, en amont du dépôt de projet de loi, entre les représentants de l'exécutif et les parlementaires qui ont suivi ce sujet dans le cadre de l'article 88-4. Par ailleurs, si le recours aux projets de loi transposant diverses dispositions communautaires peut être envisagé pour assurer la transposition de directives essentiellement techniques, en revanche il conviendrait de ne recourir aux ordonnances qu'à titre très exceptionnel, pour des motifs d'urgence et faute d'une autre solution satisfaisante dans le délai imparti pour la transposition.

Le Président Alain Barrau a déclaré que bien entendu, les parlementaires conservent la faculté, si une transposition ne leur paraît pas engagée de manière suffisamment déterminée, de déposer des propositions de loi de transposition.

Il a indiqué que les propositions du groupe de travail n'engageaient pas le Gouvernement, mais qu'il avait bon espoir d'en voir une partie reprise, notamment à travers la modification de la circulaire du 9 novembre 1998 du Premier ministre sur la transposition des directives. Il s'est félicité de l'association de l'administration de l'Assemblée nationale à ce type de travaux conduits par l'exécutif, et a relevé, pour s'en réjouir, le bon climat dans lequel se sont déroulés les contacts qu'il a pris avec le président de la Délégation pour l'Union européenne du Sénat.

Sous le bénéfice des aménagements que la réflexion ultérieure pourrait amener à apporter au dispositif ainsi esquissé, le Président Alain Barrau a proposé d'expérimenter la procédure nouvelle à travers l'étude des problèmes posés, d'une part, par la transposition par le « paquet rail », c'est-à-dire les directives du 26 février 2001 (n° 2001/12, 2001/13, et 2001/14), et d'autre part par la décision-cadre du 26 juin 2001 concernant le blanchiment d'argent. D'une manière générale, il a proposé à la Délégation de poser le principe que le parlementaire qui a examiné le texte au cours de sa négociation dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution - ou encore les parlementaires qui au sein de la Délégation suivent particulièrement le secteur d'activité concerné - en suivent la transposition et qu'à cette fin, des contacts informels soient organisés, préalablement au dépôt du projet de loi de transposition, entre ces parlementaires et les représentants de l'exécutif.

En conclusion, le Président Alain Barrau a considéré que les nouvelles propositions constituaient une avancée de nature à accroître la participation du Parlement dans le contrôle de l'application des normes européennes.

M. Maurice Ligot a demandé si les propositions du groupe de travail donneraient lieu à une modification de la circulaire du 9 novembre 1998.

Le Président Alain Barrau a répondu par l'affirmative, en indiquant que si ces propositions avaient d'ores et déjà été approuvées par les administrations concernées, elles devaient être entérinées par une décision réglementaire.

M. Pierre Brana s'est déclaré heureux de ces nouvelles avancées. Il a souhaité savoir pourquoi, concernant les projets de loi ayant pour objet exclusif la transposition des directives, était évoquée la procédure des parlementaires en mission.

Le Président Alain Barrau a indiqué que si cette procédure pouvait être justifiée pour respecter la compétence du Gouvernement concernant l'élaboration des projets de loi, on ne pouvait y recourir qu'exceptionnellement et il valait mieux que les parlementaires soient associés de façon informelle.

M. Gérard Fuchs s'est félicité qu'après cinquante années de construction européenne, on cherche enfin à trouver un dispositif efficace de transposition des directives communautaires. Il s'est cependant inquiété du stock de directives anciennes non transposées dans le cadre de la dernière loi d'habilitation et souhaité qu'on réfléchisse à la mise en _uvre de leur transposition.

Rappelant que ce stock comportait beaucoup de mesures de caractère réglementaire, le Président Alain Barrau a distingué, parmi celles qui avaient un caractère législatif, deux principaux cas de figure : celles qui concernent des textes communautaires récemment examinés par la Délégation - qui pourraient être traitées très vite - et celles qui concernent des textes plus anciens, qu'il faudra régler progressivement.

II. Compte-rendu de M. Gérard Fuchs sur la XXVème COSAC qui s'est tenue à Bruxelles les 4 et 5 octobre 2001

M. Gérard Fuchs a indiqué que la COSAC s'était réunie à Bruxelles les 4 et 5 octobre sous la co-présidence d'Herman De Croo, président de la Chambre des Représentants, et de Philippe Mahoux, président du Comité d'avis fédéral du Sénat pour les questions européennes du Parlement belge et que participaient, au titre de la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, Mme Nicole Catala et lui-même.

Il a d'abord souligné la grande densité des débats, l'ordre du jour de la réunion couvrant en effet un très large éventail de thèmes : la présidence belge et le débat sur l'avenir de l'Union, l'emploi, le modèle social européen et les négociations dans le cadre de l'OMC, la sécurité alimentaire et le développement durable, une politique commune en matière d'asile et d'immigration. La présence du Gouvernement belge aux travaux de la COSAC a par ailleurs été remarquable : : Mme Laurette Onkelinx, vice-premier ministre et ministre de l'emploi - qui a fait une forte impression sur les participants par son dynamisme - Mme Magda Aelvoet, ministre de la protection et de la consommation, de la santé publique et de l'environnement, M. Olivier Deleuze, secrétaire d'État à l'énergie et au développement durable, M. Antoine Duquesne, ministre de l'intérieur ont introduit les différents thèmes en discussion pour leur domaine de compétence avant de répondre aux questions des délégués. Le thème de la présidence belge et de la réforme institutionnelle a été brillamment présenté par le premier ministre belge, M. Guy Verhofstadt qui s'est également prêté au jeu des questions-réponses.

Cette participation importante du Gouvernement belge a permis que la COSAC de Bruxelles soit le lieu d'un dialogue fructueux entre les parlementaires nationaux - qui ont pu exprimer leurs demandes, leurs interrogations, voire leurs craintes sur les différents sujets à l'ordre du jour - et les représentants de la présidence en exercice du Conseil - qui ont pu prendre note d'un certain nombre de demandes exprimées par les délégués. Sur certains points, comme celui du statut des pays candidats au sein de la Convention, le Premier Ministre belge a même pu inviter les parlementaires nationaux à prendre position par voie de résolutions. Au fil des réunions, la COSAC se confirme ainsi comme étant le lieu d'expression collective des parlements nationaux sur les questions européennes et un interlocuteur intéressant pour la présidence du Conseil.

M. Gérard Fuchs s'est également félicité de ce que la COSAC ait adopté une contribution de bonne qualité adressée au Conseil européen. Certes, sur certains points, les formulations peuvent être jugées trop tièdes et très générales en raison de la règle du consensus qui prévaut pour l'adoption des contributions - seulement tempérée par la possibilité pour une délégation de s'abstenir sans empêcher l'adoption du texte - qui impose de toute évidence de trouver des compromis acceptables pour tous. Dès lors qu'une disposition est trop précise ou trop nouvelle, il y a toujours la menace de blocage de telle ou telle délégation. De plus, certaines délégations - les Danois, les Suédois et les Britanniques notamment - invoquent régulièrement les difficultés qu'elles ont à prendre position sur des questions qui n'ont pas été préalablement débattues dans leur commission : ces délégations estiment que faute de mandat de leur commission, il leur est difficile de prendre position à moins justement que les disposition incriminées ne soient rédigées de façon vague et peu contraignantes. Ces éléments expliquent que les contributions de la COSAC s'apparentent trop souvent une collection de vœux pieux.

M. Gérard Fuchs a toutefois estimé que ce constat critique devait être tempéré de deux façons. Tout d'abord, la tradition semble désormais bien établie que chaque COSAC se conclue par l'adoption d'une contribution exprimant la position unanime des parlementaires nationaux. Ce simple constat constitue un progrès considérable par rapport à ce qui se passait il y a quelques années encore : pendant très longtemps, les délégués de la COSAC se séparaient sans avoir pu se mettre d'accord sur le moindre texte faute d'avoir pu réunir l'accord unanime des participants ; la présidence de la COSAC en était alors réduite à diffuser un relevé de conclusions qui était établie sous sa responsabilité propre - et qui ne pouvait à ce titre engager l'ensemble de la COSAC comme nos contributions actuelles. Par rapport à cette période, la COSAC a donc gagné en crédibilité. Ce progrès est du aux méthodes d'examen et de discussion qui ont été expérimentées avec succès lors de la COSAC de Versailles et qui depuis ont été reprises par chaque nouvelle présidence : les délégations ont jusqu'à une date donnée avant le début de la COSAC pour déposer leur projet de contribution ; la présidence de la COSAC fait ensuite un texte de synthèse qui est seul débattu et amendé notamment lors d'une réunion préparatoire limitée aux seuls présidents de délégation qui s'avère jouer un rôle crucial dans l'émergence du consensus. Parce que les textes sont diffusés à l'avance et discutés avant même l'ouverture de la conférence, les délégations n'ont plus le sentiment d'être prises au dépourvu et peuvent plus facilement procéder aux compromis nécessaires à l'adoption du texte final.

M. Gérard Fuchs s'est ensuite félicité du contenu même de la contribution adoptée à Bruxelles qui, sur un point au moins, va plus avant que la position actuelle du Conseil. Il s'agit de l'idée de convention qui a fait l'objet d'un large débat. Si la nécessité de réunir une telle enceinte avant la convocation d'une conférence intergouvernementale en 2004 au plus tard suscite un accord général (malgré les réticences persistantes de certains, notamment les suédois), des divergences sont apparues entre délégations sur la composition et le rôle de cette convention. Les Allemands ont déposé un amendement demandant que la représentation des parlements des pays candidats soit "égale" à celle des parlements des États membres au sein de la Convention, et non "adéquate" comme le proposait le texte de la présidence. De façon très significative, cet amendement n'a pas été retenu mais il témoigne de la position allemande qui souhaite un élargissement de la composition de la convention aux pays candidats alors même qu'ils ne font pas encore partie de l'Union. Un débat a également eu lieu sur l'idée figurant dans la contribution d'un forum "permettant aux citoyens et à la société civile, en maximisant leur participation, d'apporter leur contribution aux travaux de la Convention". Cette rédaction qui n'est sans doute guère satisfaisante, ne serait-ce que d'un point de vue formel, est le résultat d'un débat avec les délégations nordiques qui auraient souhaité être moins précis sur les modalités de l'association de la société civile.

Mais, a poursuivi M. Gérard Fuchs, c'est sur le rôle d'une éventuelle Convention que les débats ont été les plus vifs. Un accord a pu être trouvé par le président De Croo qui dispose que la Convention devra définir un projet cohérent "porteur de solutions aux problèmes auxquels celle-ci est confrontée". L'expression "projet cohérent" demeure ainsi dans la contribution finale. L'intérêt de cette formulation est qu'elle va au delà de celle retenue par le dernier Conseil - qui se contente de faire référence à de simples "options". Certes, et chacun en est convenu au cours des débats à Bruxelles, la Convention ne saurait être une sorte d'assemblée constituante chargée d'écrire la future constitution de l'Union. Pour autant, le rôle de la Convention ne doit pas être non plus de dresser la liste des désaccords : si le texte ou le rapport qui sera issu de ses travaux consiste à établir sur chacun des sujets la liste des options possibles, il n'est pas besoin de réunir pendant un an plus près d'une centaine de personnes : ce travail peut être fait de chaque capitale sans qu'il soit nécessaire de se réunir à Bruxelles. L'intérêt de la Convention est d'esquisser, quitte à ce qu'elle présente sur des points précis les alternatives possibles, une architecture institutionnelle globale qui soit plus transparente et plus compréhensible des citoyens. Il est acquis - et cela résulte des traités eux-mêmes - que ce sera ensuite aux gouvernements de décider du nouveau projet de traité. Mais, à définir de manière trop modeste le mandat de la Convention, on risque de réduire son travail à une simple agrégation d'opinions diverses et contradictoires et de limiter ainsi son apport à la méthode de révision des traités.

M. Gérard Fuchs a souhaité en conclusion amorcer une réflexion sur l'avenir de la COSAC. Le rôle des Parlements nationaux dans l'architecture européenne constitue un des thèmes retenu à Nice pour la future révision des traités. L'idée a été à plusieurs reprises avancée de créer à côté du Parlement européen une deuxième chambre composée de représentants des parlements nationaux dont le rôle serait de participer au contrôle du principe de subsidiarité. Cette proposition est loin de faire l'unanimité au sein de la COSAC : elle suscite même l'opposition d'une très forte majorité de délégations au-delà même de celle traditionnelle du Parlement européen. Les motifs qui peuvent conduire à rejeter cette idée sont en effet solides : quasi-impossibilité pour les parlementaires nationaux d'effectuer un double mandat alors que la tendance dans tous les pays de l'Union est justement de limiter les cas de cumul ; risque de rendre le système institutionnel de l'Union encore plus compliqué en ajoutant une instance de plus ; et, surtout, risque pour cette deuxième chambre de n'avoir qu'un faible impact auprès des opinions publiques alors que sa mise en place est justement destinée à relayer leurs préoccupations. Car de deux choses l'une : soit la chambre des parlements nationaux se voie attribuer des pouvoirs réels en matière de co-décision des textes législatifs aux côtés du Parlement européen - et le risque alors est d'alourdir une procédure déjà très complexe et de l'empêcher de fonctionner ; soit, comme c'est la tendance de la plupart des projets, cette chambre n'aurait que des pouvoirs consultatifs (débat sur l'état de l'Union ou sur la mise en œuvre du principe de subsidiarité) - et dans ce cas ses travaux risqueraient de rester parfaitement confidentiels (comme ceux du comité des régions). Si un contrôle politique du principe de subsidiarité est sans aucun doute nécessaire, sa mise en œuvre doit impliquer les parlements nationaux sans qu'il soit besoin de créer une seconde chambre qui s'apparenterait vite à une sorte de coquille vide. Aussi c'est encore l'idée d'un renforcement de la COSAC qui semble recueillir l'accord majoritaire des délégations. A la différence de beaucoup d'assemblées parlementaires internationales, la COSAC ne dispose ni de siège permanent, ni de secrétariat permanent, ni de budget propre - ce qui limite considérablement ses moyens d'action. Elle dispose en revanche d'une légitimité mieux établie et d'une base juridique sûre depuis que son rôle est évoqué dans le protocole au traité d'Amsterdam sur le rôle des parlements nationaux. Une majorité de délégations semble donc être d'accord pour réfléchir aux moyens de poursuivre la montée en puissance de cette conférence et de renforcer sa place encore balbutiante dans le système institutionnel européen. L'idée a été ainsi évoquée d'élargir la représentation de la COSAC aux autres commissions permanentes de façon que les délégations représentent l'ensemble de leur assemblée d'origine mais ce cheminement est difficile à suivre compte tenu de la diversité en nombre et en rôle des commissions permanentes des parlements des États membres.

M. Jean-Bernard Raymond s'est félicité de l'éclairage donné par le rapporteur sur la montée en puissance et l'utilité croissante de la COSAC au fil de ses réunions. Il s'est interrogé sur la place qui sera donnée aux représentants des pays candidats dans la future Convention, ces derniers souhaitant y jouer un rôle actif et être plus que de simples observateurs. Une décision en ce sens permettrait de conforter la position des pays ou élus qui sont favorables à l'intégration européenne.

Le Président Alain Barrau a estimé que la réussite de l'élargissement passait notamment par un rôle actif de la France et l'utilisation de l'acquis important que constitue l'accord de Nice, obtenu sous présidence française, qui ouvre la voie à l'élargissement.

Le problème de la présence des pays candidats à la Convention a déjà été évoqué aux Mardis de l'Europe par le ministre des affaires étrangères, M. Hubert Védrine : la France est favorable à leur présence et propose de fixer à trois par pays le nombre de leurs représentants (1 pour l'exécutif et deux parlementaires). Cependant, deux problèmes doivent encore être tranchés : la liste des pays admis à la Convention et le rôle final de cette Convention. S'agit-il de rapprocher les points de vue et de faire inventaire des différentes positions ? La Convention se conclura-t-elle sur un vote à la majorité sur un texte unique, ce qui limiterait la marge de manœuvre de la CIG et des Gouvernements, ou sur différentes propositions alternatives et hétérogènes ? Cette question devrait être tranchée au Conseil européen de Laeken.

Le Président Alain Barrau, pour sa part, a souhaité que les pays candidats puissent être partie prenante à la Convention, tant au plan exécutif que parlementaire.

Il s'est interrogé sur l'évolution de la position du Parlement européen au sein de la COSAC et sur le point d'appui que peut constituer cette dernière pour la Présidence belge.

M. Pierre Brana a tout d'abord souhaité savoir quelle forme pourrait prendre la participation de la société civile aux travaux de la Convention. Puis, évoquant une mission qu'il avait effectuée dans les pays baltes, il a souligné que les pays candidats se prononçaient plutôt en faveur d'un texte final de la Convention, sanctionné par un vote auquel leurs représentants pourraient participer. Enfin, il a regretté que le débat sur la sûreté nucléaire ait mis seulement en avant le type de centrale nucléaire dans les pays de l'Est alors que deux éléments sont tout autant fondamentaux pour la sûreté nucléaire : d'une part, la qualité de la maintenance, qui n'est pas techniquement appropriée dans les PECO, d'autre part la qualification des personnels, l'accident de Tchernobyl ayant montré que les conséquences de l'explosion avaient été aggravées par le manque de formation des personnels aux situations de catastrophe.

Soulignant que le rôle des Parlements nationaux constitue l'une des questions les plus importantes que la Convention aura à débattre, M. Maurice Ligot a relevé une contradiction entre l'opposition face à la création d'une seconde chambre européenne représentative des Parlements nationaux et l'approfondissement du rôle politique de la COSAC qui apparaît de plus en plus comme pouvant devenir la Chambre des Parlements. Après avoir rappelé les conclusions de la réunion de travail avec la commission des affaires européennes du Bundestag, qui s'était tenue la veille, il a souhaité une prise de position commune entre Français et Allemands à la Convention dans le double objectif d'améliorer le rôle du Parlement européen et la participation des Parlements nationaux à partir de l'exemple de la COSAC, dans laquelle, il faut le reconnaître, le rôle du Parlement européen tend à s'effacer.

Il a ensuite abordé la question d'une seconde chambre parlementaire des institutions européennes, en affirmant au préalable que le Conseil européen ne pouvait pas devenir cette seconde chambre, car ce serait alors prendre le risque de confondre pouvoirs législatif et exécutif, et en regrettant le caractère quelquefois surréaliste du débat : soit on considère que toute seconde chambre ralentit le travail parlementaire et il faut alors en tirer les conséquences en supprimant les Sénats dans les pays européens qui ont un parlement bicaméral, soit on restreint cette seconde chambre européenne à un rôle consultatif et on ne peut alors lui reprocher son manque d'intérêt, au moment où l'évolution de la COSAC montre au contraire l'intérêt d'un organe consultatif. La Convention devra se prononcer clairement sur la représentation des Parlements nationaux, qui est démocratique et permet d'associer les souverainetés nationales au processus européen en privant d'ailleurs les souverainistes de leurs arguments.

Le Président Alain Barrau a fait observer que la Délégation pour l'Union européenne devra préciser sa position sur la place des Parlements nationaux dans la construction européenne avant que la Convention ne commence ses travaux. Il a indiqué que la position du Sénat français en faveur d'un Sénat européen se heurtait à l'hostilité de beaucoup d'États membres car elle était considérée comme une attaque à l'encontre du Parlement européen. C'est pourquoi il est nécessaire de privilégier une formule qui associe à la fois des représentants des Parlements nationaux et du Parlement européen. C'est tout l'intérêt de la COSAC d'avoir montré qu'une telle association était fructueuse et qu'il pouvait en être tiré un modèle pour résoudre la question du contrôle de la subsidiarité. L'idée émise par le Premier ministre français d'un Congrès qui associerait Parlements nationaux et Parlement européen n'affaiblit en rien les pouvoirs de ce dernier et permet au contraire de progresser sur la question précise de la répartition des compétences entre l'Union européenne et les États membres.

M. Gérard Fuchs, en réponse aux intervenants, a constaté que les rapports entre le Parlement européen et la COSAC s'étaient progressivement normalisés. Il a rappelé le texte de son amendement à la contribution adressée par la COSAC au Conseil européen, relatif au rôle de la Convention. Il a souligné que la rédaction définitive adoptée par la COSAC sur ce point (« La Convention devrait être chargée de présenter à la CIG de 2004 un projet cohérent porteur de solutions aux problèmes auxquels celle-ci est confrontée ») était le fruit d'un compromis proposé par la présidence belge. Il a évoqué le caractère concret et précis des débats de la COSAC sur le mandat d'arrêt européen. Il s'est interrogé sur les modalités d'une participation de la société civile à la Convention, dans la mesure où le processus d'élaboration d'un nouveau traité est plus complexe que la préparation d'une charte des droits fondamentaux. Il a jugé que seuls les parlementaires démocratiquement élus pouvaient être considérés comme représentatifs, ce qui ne devait pas cependant conduire à négliger la société civile.

Le Président Alain Barrau a estimé que la Convention devait pouvoir auditionner des ONG sur des thèmes précis.

M. Gérard Fuchs a constaté que la COSAC n'avait pas avancé sur la représentation des pays candidats à la Convention. Il lui est apparu nécessaire d'associer à la Convention les États susceptibles d'adhérer à l'Union européenne avant 2004, date de la ratification du traité. Il a observé, en conclusion, que la COSAC serait à l'avenir à la fois un lieu d'expression politique, qui s'affirmera progressivement comme interlocuteur du Conseil européen, et une instance de contrôle de la subsidiarité. Il s'est toutefois déclaré réservé sur un éventuel pouvoir législatif de la COSAC.

III. Examen des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport du Président Alain Barrau, la Délégation a examiné deux textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

¬ Commerce extérieur

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur la proposition de décision du Conseil autorisant la tacite reconduction ou le maintien en vigueur des dispositions dont les matières relèvent de la politique commerciale commune, contenues dans les traités d'amitié, de commerce et de navigation et dans les accords commerciaux, conclus par les États membres avec les pays tiers (document E 1790).

¬ Environnement

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme d'action communautaire pour la promotion des organisations non gouvernementales ayant pour but principal la défense de l'environnement (document E 1778). Il s'agit de prévoir la poursuite jusqu'au 31 décembre 2006 du soutien apporté à ces organisations et de modifier le cadre juridique existant. Le texte proposé étend la durée du programme de 4 à 5 ans, pour un montant global de 32 millions d'euros, élargit le champ géographique, incluant les pays associés, Chypre, Malte et la Turquie, ainsi que les pays des Balkans, et simplifie le système de sélection et de suivi.

IV. Informations relatives à la Délégation

- La Délégation a désigné M. Pierre Brana rapporteur d'information sur Europol et Eurojust ainsi que sur le mandat d'arrêt européen ;

- Le Président Alain Barrau a rappelé que, dans le cadre des Mardis de l'Europe, M. Joschka Fischer, ministre allemand des affaires étrangères serait entendu le mardi 30 octobre à 17 H 45, et que le mercredi 31 octobre au matin la Délégation organisait un colloque sur l'Union européenne face à la mondialisation. Il a enfin souhaité une participation active des membres de la Délégation aux Assises sur l'Avenir de l'Europe organisées les 7 et 8 novembre prochain.