DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 165

Réunion du jeudi 15 novembre 2001 à 9 heures

Présidence de M. Maurice Ligot,
Vice-Président

I. Echange de vues avec MM. Philippe Mahoux, Président du Comité d'avis fédéral pour les questions européennes du Sénat de Belgique, et Pierre Chevalier, Député de Belgique, dans le cadre de la mission qui leur a été confiée par le Gouvernement belge sur l'état d'avancement des débats nationaux sur l'avenir de l'Union

Après que le Président Maurice Ligot se soit déclaré heureux d'accueillir des collègues du Parlement de Belgique, M. Philippe Mahoux, sénateur belge a souhaité présenter l'objectif de la mission qui leur a été confiée, à son collègue Pierre Chevalier, député et à lui-même, par le Premier ministre belge, M. Guy Verhofstadt. Il s'agit de prendre les contacts nécessaires avec les parlements nationaux des Etats membres et des pays candidats en vue de faire rapport à la présidence concernant l'état d'avancement des débats nationaux sur l'avenir de l'Union.

Le Président Maurice Ligot a alors présenté la manière dont se déroule ce débat en France, aussi bien au niveau gouvernemental qu'en ce qui concerne la participation de l'Assemblée nationale. Suite à l'adoption par les chefs d'Etat et de gouvernements de la Déclaration de Nice lançant un débat sur l'avenir de l'Union, le Président de la République et le Premier ministre ont décidé de promouvoir une organisation décentralisée des discussions pendant toute l'année 2001, en chargeant les préfets de région d'organiser des forums associant les élus locaux et européens, les représentants des milieux économiques, sociaux et associatifs ainsi que des organisations non gouvernementales. Ces forums ont débuté au mois de mai 2001, le dernier d'entre eux s'étant tenu à Rennes le 29 octobre. Il est évidemment difficile de faire un bilan de ces forums régionaux. Certains ont regretté le fait que leur organisation ait été confiée aux préfets de région, d'autres ont critiqué qu'en certaines occasions les étudiants n'aient pas été invités. Il reste qu'il s'agit d'un effort louable d'élargir le débat sur la construction européenne en dehors des cercles spécialisés, même si, et cela a été relevé par Hubert Védrine lui-même lors de son audition dans le cadre des « Mardis de l'Europe », ces forums régionaux auront surtout impliqué les militants de la cause européenne et moins la majorité silencieuse de notre pays, c'est-à-dire les concitoyens qui ont une attitude somme toute ambivalente et contradictoire vis-à-vis de l'Europe, à la fois critiquant l'excès de réglementation européenne et réclamant plus d'Europe dans des domaines comme le social et l'éducation. Le Gouvernement a mis en place un groupe de personnalités, présidé par Guy Braibant, Conseiller d'Etat, qui doit assurer la synthèse des travaux des forums régionaux. L'objectif est de faire remonter au Gouvernement un certain nombre de messages des élus, des experts de la chose communautaire, mais aussi de la société civile, avant le Conseil européen de Laeken.

Le Président Maurice Ligot a ensuite indiqué que l'Assemblée nationale avait souhaité prendre une part active au déroulement de ce débat et la Délégation pour l'Union européenne a été bien évidemment en première ligne des initiatives qui ont été prises. C'est ainsi que la Délégation a procédé à la constitution d'un groupe de travail présidé par Alain Barrau et composé d'un rapporteur pour chacun des thèmes de l'après-Nice. Ce groupe a procédé avant l'été à un certain nombre d'auditions de juristes. La Délégation a également procédé à des auditions de hautes personnalités (Jacques Delors, Hubert Védrine, Valéry Giscard d'Estaing, Joschka Fischer, Jean-Luc Dehaene, les ministres tchèque et hongrois des affaires étrangères et, prochainement, Michel Barnier, Nicole Fontaine, Giorgio Napolitano et, pour conclure, Pierre Moscovici) sur l'avenir de l'Union tous les mardis à 17h30. C'est ce que l'on appelle les « Mardis de l'Europe ». Ces auditions ont pour particularité d'être ouvertes à tous les députés, au corps diplomatique et à un large public d'étudiants, de journalistes et de responsables d'associations. La Délégation a ensuite noué un dialogue approfondi avec ses homologues des pays des Etats membres et des pays candidats, soit dans le cadre de la COSAC, soit de manière bilatérale. C'est ainsi qu'une délégation de la Commission des affaires européennes du Bundestag est venue dernièrement à Paris et qu'une réunion parlementaire franco-allemande, co-présidée par les Présidents Raymond Forni et Wolfgang Thierse, est prévue pour le 10 décembre, avec pour perspective l'adoption d'un texte commun sur l'avenir de l'Europe.

Le Président Maurice Ligot a ensuite évoqué le lancement sur le site internet de l'Assemblée nationale d'un cyberforum sur l'avenir de l'Union offrant la possibilité au grand public de répondre à un questionnaire qui a obtenu un grand succès puisque près de 1 500 internautes y ont répondu, soit en exprimant un choix à partir de propositions, soit en rédigeant des réponses libres.

Il a enfin présenté l'organisation, à l'initiative des Présidents Alain Barrau et Raymond Forni, les 7 et 8 novembre dernier, des Assises sur l'avenir de l'Europe. Pendant la journée du 7 novembre, deux forums se sont déroulés en simultané, l'un sur les objectifs de la construction européenne, l'autre sur l'architecture institutionnelle. La séance solennelle de clôture des Assises s'est tenue, elle, le 8 novembre dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. Etait convié à ces Assises un public très large composé de tous les députés et de tous les sénateurs, des députés français du Parlement européen, mais aussi des représentants d'associations, des experts, des représentants des forums régionaux ainsi que des étudiants et des citoyens intéressés par les questions européennes. L'intérêt de ces Assises est que ce large public a pu librement s'exprimer, aussi bien pendant les deux forums du 7 novembre qu'au cours de la séance de clôture dans l'hémicycle. Pierre Moscovici a eu ainsi à répondre à un nombre important de questions d'étudiants, de chercheurs, d'associatifs et d'élus.

M. Philippe Mahoux a remercié le Président Maurice Ligot pour la précision de ses propos. Il a indiqué que la mission qui lui a été confiée par le Premier ministre de Belgique visait à écouter et à recueillir des informations sur les débats qui ont été menés dans chacun des pays membres et des pays candidats. A l'issue d'une tournée européenne - dont Paris constitue la dernière étape des visites dans les Etats membres - il a dressé le constat de l'intensité du débat politique et parlementaire sur l'Europe. Il a néanmoins déploré que le débat sur l'avenir de l'Union se limite à l'intérieur de la sphère politique et ne sensibilise que très indirectement le grand public aux enjeux de la construction européenne. Différentes techniques ont pourtant été employées telles que l'envoi de questionnaires (tous les foyers Luxembourgeois ont ainsi reçu un questionnaire sur l'Europe et le taux de réponse, encourageant, a été de 10 %) ou encore l'utilisation d'Internet.

Le Président Maurice Ligot a alors souhaité préciser que l'envoi d'un questionnaire à l'ensemble de la population n'était envisageable que dans des pays de taille modeste, comme le Luxembourg.

M. Philippe Mahoux a ensuite rappelé que la nécessité d'engager un débat sur l'avenir de l'Union, qui est inscrite dans la Déclaration sur l'avenir de l'Union annexée au Traité de Nice, est un élément positif dans la perspective prochaine de l'élargissement.

Le Président Maurice Ligot est alors revenu sur l'objectif assigné aux débats nationaux. Il a déclaré qu'il ne s'agissait pas de rechercher des solutions que les responsables politiques ne trouvent pas eux-mêmes mais de mieux cerner ce que l'opinion pense de la construction européenne. Il a alors souligné la difficulté d'établir une synthèse à partir d'éléments contradictoires, ou tout au moins pluriels. C'est ainsi que dans les réponses au questionnaire Internet de l'Assemblée nationale, les préoccupations sociales sont prioritaires alors que les véritables problèmes européens actuels se posent davantage en termes de défense et de sécurité. Il existe donc un décalage entre les attentes des citoyens et la réalité des enjeux européens.

M. Pierre Chevalier a ensuite pris la parole pour féliciter les autorités françaises pour le dynamisme du débat européen qu'elles organisent depuis six mois. Il a néanmoins regretté que, partout en Europe, le discours adressé aux citoyens par les responsables politiques soit trop à sens unique. Il faudrait cesser de les interpeller en leur demandant ce que l'Europe peut leur apporter et inverser la formule en les questionnant sur ce qu'ils peuvent eux-mêmes apporter à l'Europe. Evoquant le slogan des opposants irlandais à la ratification du traité de Nice lors du référendum du printemps dernier « If you don't know, vote no » [si vous ne savez pas, votez non], il a insisté sur le besoin d'information qu'ont les citoyens sur les politiques de l'Union.

Le Président Maurice Ligot s'est alors interrogé sur le fait de savoir si les forums régionaux avaient atteint leurs objectifs, alors que des franges entières de la population n'ont pas d'avis sur l'Europe. Les citoyens sont en effet plus ou moins sensibilisés aux questions européennes selon leur origine socioprofessionnelle. C'est ainsi que, par exemple, les agriculteurs ou les chefs d'entreprises se sentent plus concernés que d'autres par le débat européen.

Mme Nicole Catala a indiqué que la connaissance de l'Europe était très inégale parmi les citoyens. Si celle-ci a semblé relativement large chez les jeunes lors des assises
- dans la mesure où la plupart des universités dispensent aujourd'hui un enseignement ou des informations sur l'Europe -, si elle est de fait assez étendue dans le monde agricole, elle s'avère plus limitée dans la population de plus de quarante ans. L'ordonnance de 1986 supprimant en France la réglementation des prix et la mise en place du marché unique étant des données relativement récentes, il est normal que l'Europe et la mondialisation soient moins familières aux yeux de la population âgée. De plus, les institutions européennes sont par nature très différentes des institutions nationales. On peut cependant être optimiste : la campagne au moment de la ratification du traité de Maastricht en France a par exemple montré un réel intérêt de la population à l'égard des questions européennes.

Selon elle, le défaut d'information des citoyens sur l'Europe vient aussi des responsables politiques, qui n'ont pas suffisamment bien expliqué les enjeux de la construction européenne. Le fait de parler de fédération d'Etats-nations est un exemple révélateur : on ne peut avoir en même temps une fédération et des Etats-nations, sauf à marier la carpe et le lapin ; il faut donc choisir entre les deux.

Evoquant le cas de la Grande-Bretagne, où l'Europe est assez mal connue du grand public, M. Gabriel Montcharmont a exprimé son désaccord sur le lien établi par Mme Nicole Catala entre la liberté économique et la connaissance de l'Europe. Celle-ci est une construction complexe qu'il n'est pas aisé d'expliquer, en particulier sur les médias, où le temps de parole des hommes politiques est très limité. Il a estimé que même si beaucoup de citoyens n'ont qu'une connaissance indirecte de la construction communautaire, celle-ci est acceptée dans l'opinion. L'approbation de l'euro, qui constitue pourtant un bouleversement important, le montre.

M. Philippe Mahoux a indiqué que la difficulté à expliquer la complexité valait aussi pour les Etats eux-mêmes : c'est le cas notamment en Belgique. Mais si on explique que la complexité est le prix à payer pour avoir la paix, les citoyens sont prêts à l'accepter.

Il a d'autre part évoqué les problèmes que soulevait l'association des parlements nationaux à la construction européenne : faut-il créer une deuxième, voire une troisième chambre à côté du Parlement européen ? Quelle forme devrait-elle prendre : une COSAC renforcée, un congrès, une assemblée ad hoc dotée de compétences spécifiques ? Devrait-elle être chargée du contrôle du respect du principe de subsidiarité, comme le soutient le Premier ministre belge, par exemple ; et si oui, selon quelles modalités ?

Le Président Maurice Ligot a répondu que ces problèmes n'avaient pas donné lieu à des débats particuliers. Il a indiqué que si la double fonction - exécutive et législative - du Conseil des ministres pouvait convenir au début de la construction européenne, il n'était plus possible de maintenir ce dispositif - qui nie l'institution parlementaire, et ce, notamment dans la perspective de l'élargissement. La proposition faite par M. Jean-Luc Dehaene, consistant à ce que le Conseil des ministres siège alternativement comme pouvoir exécutif et comme pouvoir législatif ne lui a pas paru convaincante. Il s'est dit plutôt favorable à la création d'une deuxième chambre qui, parallèlement au Parlement européen, serait composée de représentants des parlements nationaux. En effet, ceux-ci incarnent les souverainetés nationales et délèguent une grande partie de leurs compétences aux instances communautaires. Reste dès lors à savoir quelle serait la nature de cette chambre, ses pouvoirs, si elle aurait une compétence en matière de subsidiarité, et, dans ce cas, si celle-ci serait de nature juridique ou juridictionnelle. Mais cette idée de deuxième chambre issue des parlements nationaux, qui est défendue par de nombreux élus, suppose du même coup de revoir l'organisation et le fonctionnement du Conseil des ministres.

Mme Nicole Catala a rappelé que beaucoup de réflexions avaient été menées depuis 1994 pour renforcer le rôle de la COSAC ; elle a souligné que ces réflexions s'étaient heurtées au fait que la majorité des délégations nationales, au sein de cette instance, avaient considéré qu'elles n'étaient pas réellement mandatées pour prendre des décisions, ce qui implique que les prises de position de la COSAC restent soumises à la règle du consensus et que la COSAC ne peut, par conséquent, être réellement décisionnaire. Notant que, par ailleurs, la voie du Congrès ou de la Conférence ne constituait pas une solution satisfaisante
- comme l'ont montré les Assises de Rome -, elle a considéré que la question de l'organisation institutionnelle du contrôle du principe de subsidiarité, contrôle politique et juridictionnel, restait par conséquent posée.

Elle a évoqué la solution que constituerait la création d'une instance particulière composée d'un nombre réduit de membres, élus dans les parlements nationaux, qui serait compétente pour exercer un contrôle en amont de la subsidiarité et qui pourrait en outre, éventuellement, être saisie des matières relevant des deuxième et troisième piliers.

M. Pierre Chevalier a estimé que le Conseil, lorsqu'il exerce des compétences législatives, devrait siéger en public ; il s'est par ailleurs déclaré partisan d'une présidence élue. S'agissant de la COSAC, il a exprimé un certain scepticisme, craignant que celle-ci ne suive l'exemple du Conseil de l'Europe, dont il a estimé, à partir de son expérience personnelle, que l'on pouvait douter de son efficacité et de sa lisibilité vis-à-vis de l'opinion publique. Il a néanmoins considéré que le renforcement des moyens de la COSAC pourrait constituer une voie pour une meilleure efficacité de cet organe. Quant à l'idée même de la création d'une « seconde chambre », il a évoqué le point de vue des länder allemands qui considèrent être bien représentés par le Bundesrat et qui estiment que les institutions existantes - parlements nationaux et Parlement européen - doivent jouer pleinement leur rôle et ne pas en sortir, ce qui n'impliquerait par conséquent pas de modification du système actuel.

Il a souligné qu'il ne fallait envisager de mettre en place une seconde chambre que si l'on était en mesure de fixer précisément le rôle que l'on souhaitait confier à cette nouvelle institution. Il s'est enfin déclaré opposé au système du double mandat, faisant référence à son expérience de parlementaire belge.

M. Philippe Mahoux s'est déclaré très intéressé par les rapprochements évoqués par M. Maurice Ligot entre les positions des parlementaires allemands et français, alors même que les opinions exprimées par les Allemands ne semblent pas en faveur de la création d'une deuxième chambre et considérent que l'articulation actuelle des institutions européennes et satisfaisante. A propos de la COSAC, il a noté que la création d'un secrétariat propre renforcerait la légitimité de cette instance.

Le Président Maurice Ligot a indiqué que la Délégation n'avait pas fixé de position collective sur la question de la seconde chambre. Il a ensuite souligné qu'actuellement les parlements nationaux n'avaient pas de place en tant que tels dans les institutions européennes, leur contrôle en amont des projets de textes européens n'ayant pas un caractère décisionnaire et la transposition des directives en droit national ne laissant aucune marge de man_uvre.

M. Pierre Chevalier a estimé que le problème se situait au niveau national, les parlements devant être à même d'exercer un contrôle effectif sur leur gouvernement.

Prenant l'exemple des difficultés de la transposition en droit belge de la directive sur la brevetabilité du vivant, M. Philippe Mahoux a rejoint l'opinion exprimée par M. Pierre Chevalier, considérant que les contestations de la directive auraient dû s'exprimer en amont et que les discussions apparues au stade de la transposition révélaient plutôt une carence du parlement national.

Le Président Maurice Ligot a considéré que tout partait de l'ambiguïté du Conseil des ministres, organe central ambivalent dont on ne pourra faire croire qu'il puisse être indéfiniment un exécutif et un législatif. Une institution qui exprime des oppositions d'intérêts entre Etats mais pas des oppositions d'idées entre partis ne peut prétendre être un véritable pouvoir législatif. La légitimité démocratique repose sur des parlements nationaux où peuvent s'exprimer une majorité et une opposition. A cet égard, le Conseil des ministres, lorsqu'il exerce le pouvoir législatif, n'est pas démocratique. Il faut donc le remplacer, dans l'exercice de ce pouvoir, par une Chambre des Etats composée de représentants des parlements des Etats membres.

Mme Nicole Catala a jugé, au contraire, que le Conseil des ministres était une institution irremplaçable et qu'y toucher comporterait le risque de superposer des affrontements politiques aux affrontements nationaux. Pour prendre une comparaison avec nos procédures nationales, le Conseil des ministres intervient par décrets-lois ou ordonnances. La question n'est pas de le supprimer, mais d'améliorer le contrôle en amont et en aval. Sinon, on aboutira à une foire d'empoigne entre les représentants de 25 Etats dans une Chambre incapable d'aboutir à des compromis comme parvient à le faire le Conseil des ministres au terme de séances-marathons.

Le Président Maurice Ligot a estimé que l'Europe était incapable de fonctionner normalement à vingt-cinq ou trente Etats membres avec les institutions actuelles et que le sentiment d'appartenance à l'Europe n'existerait vraiment qu'avec le renforcement du lien démocratique. Aucun Français n'est capable de s'y retrouver dans les institutions européennes actuelles et de dire quel est son député européen. Le renforcement du lien des citoyens avec la démocratie européenne est nécessaire mais difficile à réaliser, car la réforme oscillera entre les préoccupations d'efficacité et celles de représentativité démocratique qu'il faudra pourtant concilier.

M. Pierre Chevalier a demandé si le Premier ministre français viendrait présenter des propositions à l'Assemblée nationale avant le Conseil européen de Laeken.

Le Président Maurice Ligot a répondu qu'il ne le ferait pas afin d'éviter le risque d'un désaccord avec M. Chevènement et le parti communiste et d'une dislocation de sa majorité plurielle à six mois des élections présidentielles et législatives. Il a estimé que l'idée du Congrès était une façon de noyer le poisson et que tous ceux qui ont le souvenir de cette formule n'en veulent pas. Ce serait, selon lui, vraiment une tour de Babel contrairement au Parlement européen qui est une institution organisée.

Après l'expérience négative des Conférences intergouvernementales d'Amsterdam et de Nice et l'expérience positive de la Convention sur la Charte des droits fondamentaux, une Convention devrait préparer des propositions pour la nouvelle CIG. Il faut faire confiance à la Convention, même si c'est avec une grande marge d'incertitude, dans la mesure où elle interviendra dans un domaine totalement différent, qui n'est plus celui des idées, des concepts et des préoccupations générales comme pour la Charte, mais celui des mécanismes institutionnels précis pour garantir un fonctionnement efficace. Il n'est pas certain que la présentation de toute une série de schémas par la Convention ne placera pas la CIG devant le même embarras que précédemment. Il est en tout cas nécessaire que les pays candidats participent à la Convention et l'enrichissent de la diversité de leurs opinions.

M. Philippe Mahoux a demandé si les propositions de la présidence belge sur la composition et le mandat de la Convention ne rencontraient pas d'objections.

M. Maurice Ligot a déclaré que la société civile ne peut pas être membre de la Convention en tant que telle mais elle doit pouvoir exprimer ses opinions et ses positions aux institutions représentatives, gouvernementales et parlementaires, élues pour l'exercice d'un mandat, qui recueilleront leurs points de vue.

S'agissant d'un délai entre la fin de la Convention et la CIG, selon son opinion personnelle, un travail de synthèse paraît de toute façon nécessaire avant la fin de la Convention, mais la Délégation est toujours en réflexion sur ce point.

En ce qui concerne le praesidium et le profil du président de la Convention, M. Maurice Ligot a déclaré que, parmi les personnalités éminentes qui peuvent prétendre à ce rôle de président, son choix politique et sentimental se porterait volontiers vers un ancien président de la République qui a été l'un des grands moteurs de l'Europe, et qu'en tout état de cause, ce président contribuerait à la synthèse des propositions. Il est enfin difficilement envisageable que la Convention élise son président et la meilleure formule serait une désignation par le Conseil des ministres ou le Conseil européen.

II. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

¬ Agriculture

La Délégation a tout d'abord levé la réserve d'examen parlementaire sur deux propositions de règlement du Conseil, la première portant organisation des marchés dans le secteur de la viande ovine et caprine (document E 1759), la seconde modifiant le règlement CEE n °2204/1990 établissant des règles générales complémentaires de l'OCM dans le domaine du lait et des produits laitiers en ce qui concerne les fromages (document E 1788). Le Président Maurice Ligot a émis des craintes quant à la situation des éleveurs d'ovins à la suite des recommandations portant sur la consommation des animaux adultes atteints de la tremblante du mouton.

¬ Commerce extérieur

La Délégation a pris acte de la proposition de décision du Conseil établissant la position de la communauté dans la conférence ministérielle de l'OMC concernant l'adhésion de la République populaire de Chine à l'OMC (document E 1837). Le Président Maurice Ligot a estimé que l'adhésion de la Chine, acceptée à la Conférence de Doha, aurait d'importantes répercussions sur le commerce mondial.

Puis la Délégation a examiné la proposition de règlement du Conseil établissant certaines concessions sous forme de contingents tarifaires applicables à l'importation de tomates originaires du Maroc (document E 1844). Le rapporteur a rappelé les fortes réserves exprimées par le Gouvernement français à l'égard de ce texte qui constitue un motif d'inquiétude pour les producteurs français. Tout en levant la réserve d'examen parlementaire, la Délégation a soutenu fermement la position du Gouvernement français.

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur le projet de décision de la Commission modifiant l'annexe de la décision n °244/2001/CECA de la Commission relative à l'administration de certaines restrictions à l'importation de certains produits sidérurgiques en provenance de Russie (document E 1847) et sur la proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CEE) n° 2658/87 et suspendant, à titre autonome, les droits du tarif douanier commun sur certains produits industriels (document E 1849).

¬ Espace de liberté, de sécurité et de justice

La Délégation a examiné l'initiative de la Suède visant à modifier l'acte du Conseil du 12 mars 1999 arrêtant les règles relatives à la transmission de données à caractère personnel par Europol à des Etats et à des instances tiers (document E 1749). Le Président Maurice Ligot a rappelé que la Délégation avait désigné M. Pierre Brana comme rapporteur sur les questions relatives à Europol et Eurojust et que le renforcement des mesures de contrôle étaient justifiées par la situation actuelle. La Délégation a décidé de lever la réserve d'examen parlementaire sur ce texte.

Puis la Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur deux initiatives de la Suède visant à l'adoption de deux projets de décision, le premier portant modification de la décision 1999/C 149/02 du 29 avril 1999 étendant le mandat d'Europol à la lutte contre le faux monnayage et la falsification des moyens de paiement (document E 1770), le second portant modification de la décision cadre 2000/383/JAI du Conseil du 29 mai 2000 visant à renforcer par des sanctions pénales la protection contre le faux monnayage en vue de la circulation de l'euro (document E 1772).

Enfin, la Délégation, après avoir examiné la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les paiements transfrontaliers en euro (document E 1799), a décidé d'appuyer la position du Gouvernement français sur la nécessité que le texte final réintroduise les chèques dans le champ d'application de l'alignement tarifaire proposé par la Commission.

¬ Pêche

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur la proposition de décision du Conseil renouvelant pour trois ans l'accord de pêche entre la Communauté européenne et la République du Cap-Vert (document E 1833), la proposition de décision visant à libéraliser progressivement le commerce des poissons et produits de la pêche entre Chypre et l'Union européenne (document E 1840), et les propositions de décision et de règlement du Conseil renouvelant pour cinq ans l'accord de pêche avec la République de Guinée-Bissau (documents E 1845 et E 1846).

¬ Questions budgétaires et fiscales

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur la demande des Pays-Bas concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur les eaux minérales (document E 1830). Elle a ensuite décidé, tout en levant la réserve d'examen parlementaire, d'appuyer la position du Gouvernement français sur la lettre rectificative n° 2 à l'avant-projet de budget pour 2002, en vue d'obtenir le rétablissement de 165 millions d'euros sur la ligne relative aux dépenses du régime d'achat spécial de la viande bovine (document E 1850).

¬ Santé

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil, établissant des normes de qualité et de sécurité pour la collecte, le contrôle, la transformation, le stockage et la distribution du sang humain (document E 1671).

¬ Transports

La Délégation a ensuite examiné la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les comptes-rendus d'événements dans l'aviation civile (document E 1656), les propositions de décision du Conseil concernant l'accord entre la Communauté européenne et la Roumanie établissant certaines conditions pour le transport de marchandises par route et la promotion du transport combiné (document E 1692) et la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au relevé statistique des transports par chemin de fer (document E 1715). Elle a levé la réserve d'examen parlementaire sur ces textes.

¬ Divers

La Délégation a enfin levé la réserve d'examen parlementaire sur la proposition de règlement du Conseil portant modification et mise à jour du règlement (CE) n° 1334/2000 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations de biens et technologies à double usage (document E 1843).