DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 168

Réunion du mercredi 28 novembre 2001 à 16 heures 15

Présidence de M. Alain Barrau

Audition de M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, sur les résultats de la Conférence ministérielle de l'OMC à Doha (audition ouverte à l'ensemble des députés et à la presse)

M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, a d'abord remercié les parlementaires français présents à Doha d'avoir répondu à l'invitation du Gouvernement. Il a souhaité tirer quelques enseignements de la Conférence de Doha, tout en indiquant qu'il est encore trop tôt pour tirer un bilan définitif des négociations.

Il a d'abord considéré que les leçons de Seattle, tant sur la forme que sur le fond, avaient été tirées à Doha dans un sens qui satisfaisait - en partie - les ambitions de l'Union européenne concernant le prochain cycle. Celle-ci défendait à Doha un cycle large et non un cycle étroit de libéralisation des échanges. Le résultat ainsi obtenu consacre tous les efforts déployés par la France pour que soit conservée une approche équilibrée, qui est aussi - aux yeux du ministre - celle des députés et de la société civile. Les membres de l'OMC ont donc convenu de libéraliser les échanges et d'améliorer le fonctionnement du système commercial multilatéral, par un renforcement des règles et une meilleure intégration des pays en développement. Certes, Doha n'est qu'une étape, un essai qu'il faut maintenant transformer.

Le secrétaire d'Etat a ensuite estimé que Doha avait apporté deux inflexions majeures. En premier lieu, l'OMC a adopté un Agenda pour le développement, qui comprend quatre chapitres importants. La déclaration sur l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle liés au commerce et la santé publique (ADPIC) constitue une avancée importante. La France avait lancé en mai 2001 un appel à ses partenaires européens pour que ceux-ci appuient une initiative forte en ce domaine et elle s'est mobilisée tout au long de la Conférence pour obtenir ce résultat important, en liaison avec des ONG telles Act-up et MSF. Cette déclaration donne une interprétation équilibrée de l'accord, sans le remettre en cause sur le fond.

Les participants de la Conférence ont en outre accordé une dérogation aux pays ACP, afin que le régime commercial asymétrique dont ils bénéficient avec l'Union européenne soit reconnu par l'OMC. La décision sur la mise en _uvre des accords de Marrakech marque une étape importante, très attendue par les pays en développement. Les membres de l'OMC ont pris également des engagements en faveur d'une adhésion rapide des pays les moins avancés ayant le statut d'observateur dans l'organisation et d'un accès - sans restriction - de leurs produits aux marchés des pays riches. Enfin, le traitement spécial et différencié en faveur des pays en développement doit être pris en compte dans tous les éléments de la négociation, y compris dans le domaine agricole. Il a été décidé aussi d'instituer des groupes de travail sur les liens entre le commerce et la dette et les transferts de technologie. Les membres de l'OMC ont également convenu de renforcer l'assistance technique aux pays en développement. Le secrétaire d'Etat à insisté sur le fait que ces acquis résultaient directement des demandes des pays en développement. Enfin, la déclaration appelle l'OMC et les institutions financières internationales à mener des politiques plus cohérentes.

M. François Huwart a ensuite évoqué la deuxième inflexion apporté au système commercial multilatéral, le renforcement de la régulation.

Dans le domaine de l'environnement, les relations entre les règles de l'OMC et les dispositions de nature commerciale des accords multilatéraux sur l'environnement doivent être clarifiées. Le principe de précaution sera abordé dans le cadre de cet exercice.

L'articulation des règles de l'OMC avec la Convention sur la biodiversité, d'une part, et la protection des savoirs traditionnels, d'autre part, qui constituent deux demandes fortes des pays en développement, devront être traitées par le Conseil sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce. L'Union européenne a obtenu que soit établi un registre multilatéral des indications géographiques pour les vins et les spiritueux, l'extension de cette protection devant être étudiée par le Conseil ADPIC.

Les décisions concernant la négociation d'accords sur l'investissement et la concurrence ont été reportées à la prochaine Conférence ministérielle de l'OMC, mais elles ne sont pas bloquées. L'accord sur l'antidumping et l'accord sur les subventions seront réexaminés pour être clarifiés.

En ce qui concerne la cohérence et la coopération entre les organisations internationales, la déclaration ministérielle appelle à un renforcement des relations entre l'OMC et les institutions de Bretton Woods, le PNUD, l'OCDE et les secrétariats des accords multilatéraux sur l'environnement.

Aucun progrès en revanche n'a été enregistré dans la relation entre l'OMC et l'OIT, en raison de l'hostilité déclarée des pays en développement et du faible enthousiasme des Etats-Unis.

Le secrétaire d'Etat s'est réjouit par ailleurs de l'accession de la Chine et de Taïwan, qui tendent à renforcer l'universalité de l'OMC. De même, la réforme prévue de l'Organe de règlement des différends et le renforcement de la transparence confortent la légitimité de l'OMC, qui change ainsi de méthode de travail.

M. François Huwart a alors abordé le volet de l'ouverture des marchés pour se féliciter, en premier lieu, du résultat obtenu dans le domaine agricole. L'Union européenne, et la France en particulier, ont su résister à toutes les pressions pour préserver le calendrier de réforme de la PAC, qui ne sera pas prise en otage par les négociations à l'OMC.

Dans le domaine des services, le maintien de la négociation par listes positives permet de ne pas libéraliser les secteurs qui ne sont pas offerts : les services publics seront donc préservés.

La négociation qui s'engagera sur les tarifs industriels aura des conséquences positives pour les entreprises, notamment les PME qui pourront bénéficier de la réduction des pics tarifaires. Les biens et les services environnementaux feront l'objet d'une négociation spécifique.

Enfin, la possibilité d'accords anticipés est prévue, mais le principe de l'engagement unique garantit la globalité et la cohérence des résultats obtenus dans les différentes négociations.

En conclusion, M. François Huwart a déclaré que le plus dur est à venir, une fois les négociations lancées. Il a considéré par ailleurs que la négociation avait fait apparaître de nouveaux rapports de force, riches d'enseignement pour l'avenir. L'Inde est apparue isolée, le Brésil en position de force. On a pu en outre constater un rapprochement entre les pays les moins avancés et les ACP et les pays membres du groupe africain. Quoiqu'il en soit, Doha permet à l'OMC de s'engager dans la poursuite d'une meilleure gouvernance, reposant sur trois piliers : la régulation, le développement et l'ouverture. Enfin, le secrétaire d'Etat a jugé que la France avait joué un rôle positif dans les négociations, en partie grâce à la méthode de concertation appliquée par le Gouvernement. Celle-ci doit continuer à porter ses fruits. Aussi, un comité général de suivi des négociations va-t-il être mis en place pour continuer le dialogue dans la transparence et apporter au Gouvernement l'expertise de toutes les parties.

En écho aux regrets exprimés par M. François Huwart, M. Pierre Brana a lui aussi déploré l'absence du social dans le nouveau cycle de négociations de l'OMC, rappelant que des pays tels que la Chine, qui vient d'entrer à l'OMC, le Pakistan, ou encore l'Inde font travailler les enfants par millions et ne sont tenus par le respect d'aucune règle dans ce domaine.

Face au refus des pays en développement d'intégrer toute dimension sociale dans les négociations, il s'est interrogé d'une part sur ce que l'on peut attendre des travaux de la commission mondiale des personnalités qui doit être créée et d'autre part sur la nature et les objectifs exacts du comité de négociations commerciales de l'OMC qui doit être mis en place au plus tard le 31 janvier 2002.

M. René André a, pour sa part, constaté que l'unité des positions défendues par les Etats membres de l'Union européenne à Doha avait vite volé en éclat puisque quelques jours plus tard, à l'occasion du Congrès du SPD, MM. Gehrard Schröder et Tony Blair convenaient publiquement de la nécessité de renationaliser la politique agricole commune et de lutter contre les subventions.

Ne partageant pas la vision des résultats de la Conférence de Doha présentée par M. François Huwart, M. François Guillaume a estimé qu'il ne restait pas grand chose des ambitions affichées avant l'ouverture de cette réunion, qu'il s'agisse du dumping social - il a convenu qu'il fallait traiter ce sujet mais avec des propositions réalistes et suggéré la mise en place d'un système d'encouragement à la suppression progressive du travail des enfants - du dumping monétaire ou de la lutte contre le dumping environnemental. Rien n'a été décidé sur le système de règlement des différends qui n'est pas satisfaisant. Quant à l'agriculture, les engagements pris n'ont, selon lui, qu'un caractère général, sans réciprocité, et ne pourront obliger les Etats-Unis à supprimer leurs deficiency payments. Il a estimé que les Etats-Unis avaient obtenu ce qu'ils voulaient, à savoir la possibilité de mettre en _uvre les premiers résultats des négociations sans attendre l'évolution des autres dossiers, avec le risque pour l'Union européenne que ces dossiers n'aboutissent jamais.

Il a enfin relevé qu'une fois de plus, c'était l'Union européenne qui consentait le plus gros de l'effort en faveur des pays les moins avancés et qu'au total ce bilan ne donnait aucune raison de se réjouir.

M. François Huwart a tout d'abord souhaité replacer les négociations dans leur contexte. Il a rappelé que l'OMC, organisation regroupant 142 pays et fonctionnant par consensus, supposait de trouver des accords très difficiles et que les positions des différents pays devaient être discutées par un ensemble de pays qui avaient pris conscience de leur force depuis le sommet de Seattle, même s'ils ne disposent pas encore de toutes les compétences pour faire valoir cette force. La recherche permanente d'un compromis éloigne l'équilibre obtenu des positions prises au départ.

Il a également souligné que les textes de négociation avant le sommet de Doha ne prévoyaient aucune disposition sur l'environnement ou les questions d'investissement et de concurrence mais étaient même défavorables sur les sujets préoccupant l'Union européenne comme l'agriculture ou les textiles. Par rapport à ces textes initiaux, de réels progrès ont été accomplis et l'avenir des négociations commerciales a été préservé même si tous les résultats ne sont pas entièrement satisfaisants. Il y a donc un paradoxe, souligné par les pays les moins avancés, à considérer que l'OMC a des impacts importants sur la vie des citoyens dans le monde et à inclure dans les négociations des sujets qui ne relèvent pas de sa compétence, comme les questions sociales ou environnementales.

A cet égard, M. François Huwart a marqué sa déception sur les questions sociales, véritable « chiffon rouge » agité par l'Union européenne devant les pays en développement qui considèrent ce sujet comme une problématique de pays riches dont le développement a contribué à l'épuisement des ressources naturelles.

Il a rappelé que les Etats-Unis avaient compliqué l'incorporation des questions sociales dans les négociations commerciales internationales en mettant en avant à Seattle la menace de sanctions commerciales. Le dialogue entre l'OMC et l'OIT est d'autant plus difficile à mettre en _uvre que le fonctionnement tripartite de l'OIT ne favorise pas le dialogue institutionnel. La commission mondiale de personnalités pourrait sensibiliser les différents partenaires et instaurer la confiance des pays en développement sur les questions sociales. De même, l'amélioration du fonctionnement de l'OMC a permis la mise en place de structures de négociation plus transparentes et davantage ouvertes aux pays qui avaient eu le sentiment d'être exclus à Seattle.

En ce qui concerne les questions agricoles, le secrétaire d'Etat a fait remarquer que la France avait fait preuve de fermeté en contribuant à ce que le mandat du Commissaire Pascal Lamy soit respecté ce qui avait permis à l'Union européenne d'atteindre les buts qu'elle s'était fixés. La mention « sans préjudice du résultat des négociations », qui concerne également l'accès aux marchés, donne l'avantage de retirer des contraintes dans les futures négociations et neutralise les risques, en particulier ceux qui auraient été liés à la fixation d'un calendrier. Les subventions dans le secteur de l'agriculture sont très mal perçues par de nombreux pays, qui ne prennent pas assez conscience que l'Union européenne est allée au-delà des accords de Marrakech et que les soutiens internes accordés par les Etats-Unis d'Amérique sont aussi, sinon plus importants, que les aides européennes.

M. François Huwart a souligné que le préambule de la Déclaration finale de Doha reconnaissait la spécificité de l'agriculture qui ne peut être considérée comme un secteur marchand comme les autres. Il a appelé l'attention sur le fait qu'au débat sur les subventions aux exportations agricoles se superposa it un débat sur la libéralisation du secteur agricole, la force de conviction des pays les plus offensifs du groupe de Cairns commençant à se réduire, d'après les impressions recueillies à Doha, alors que la libéralisation complète du secteur agricole risque d'être préjudiciable aux économies agricoles fragiles des pays pauvres. Le texte de Doha garantit le rythme d'évolution de la politique agricole commune qui doit prendre en compte le rythme de l'élargissement de l'Union européenne et la résolution des crises sanitaires en Europe.

Le système de règlement des différends commerciaux, qui fait la force de l'OMC mais mobilise bien des critiques, doit être amélioré sur deux plans : d'une part, les sanctions ne doivent pas frapper des secteurs étrangers aux différends commerciaux, d'autre part il est nécessaire de construire une jurisprudence à l'aide de juges professionnels et sur la base d'un accord entre pays souverains reconnaissant la légitimité des sanctions.

Les résultats obtenus à Doha ne placent pas l'Union européenne dans un piège pour l'avenir car ils déterminent un véritable équilibre entre ouverture et régulation des marchés.

Evoquant les résultats concrets de la Conférence de Doha sur l'accès aux médicaments, M. Jean-Claude Lefort a demandé si l'Union européenne et la France pourraient accorder des licences à des pays qui en feraient la demande et qui n'auraient pas la capacité de produire eux-même des médicaments génériques. Il a souhaité connaître l'avis du ministre sur la hiérarchie des normes, compte tenu de l'attitude des Etats-Unis sur les normes relatives à l'environnement. Il lui a semblé notamment que les normes qui concernent les droits de l'homme devaient prévaloir sur les règles commerciales. Il a constaté que l'Europe s'était retrouvée isolée à Doha sur de nombreux sujets (agriculture, environnement, normes sociales) et il a interrogé M. François Huwart sur les alliances possibles pour permettre à l'Union européenne de peser davantage dans les conférences internationales. Il a enfin souhaité obtenir quelques précisions sur le comité du suivi des négociations, dont la création a été annoncée par le ministre.

Mme Chantal Robin-Rodrigo a souligné le rôle personnel de M. Huwart et du commissaire européen Pascal Lamy pour défendre les intérêts de l'agriculture française à Doha. Elle a estimé que si l'accès aux médicaments génériques constituait une avancée, cela ne bénéficierait qu'aux pays en voie de développement capables de produire eux-mêmes ces médicaments. Elle a souhaité que des solutions soient proposées aux autres Etats. Elle a enfin suggéré que le rôle de l'OMC soit à l'avenir restreint au règlement des litiges commerciaux, afin de respecter les compétences d'autres organisations internationales, comme la FAO ou l'OIT.

M. Maurice Ligot, appelant l'attention sur l'importance du secteur du textile dans notre économie, a interrogé le ministre sur les résultats de la Conférence de Doha en ce qui concerne cette industrie.

Le Président Alain Barrau a souligné les résultats significatifs de la Conférence de Doha, notamment en ce qui concerne l'accès aux médicaments. Il a estimé que M. Huwart et le commissaire européen Pascal Lamy avaient permis à l'Union européenne de se faire entendre et de parler d'une seule voix. Il a considéré qu'à la suite des attentats terroristes du 11 septembre, il était difficile de ne pas déboucher sur un accord à Doha, en raison de la pression internationale sur l'issue des négociations. Il a souhaité appeler l'attention du ministre sur trois aspects importants de la Conférence :

- si l'existence de la PAC est une bonne chose, l'Europe ne devant pas se limiter à être une zone de libre-échange mais mettre en place des politiques communes, l'énergie de la délégation française a consisté à obtenir le maintien des acquis de la politique agricole commune. Or, la PAC est contestée à la fois par les partisans d'une libéralisation totale des échanges, comme les Etats-Unis, et par certains Etats du Sud qui souhaitent pouvoir exporter leurs productions. La volonté réformatrice de ceux qui, dans notre pays, souhaitent une évolution de la PAC ne doit pas être interprétée comme une remise en cause de la PAC et une victoire des partisans du libéralisme ;

- comment faire en sorte que l'attention portée au respect du droit du travail et à la préservation de l'environnement ne soit pas perçue comme le moyen de maintenir artificiellement des règles protectionnistes à l'encontre des pays du Sud ?

- comment éviter l'isolement de l'Europe au cours de la négociation par rapport aux pays émergents, comme l'Inde et le Brésil, et comment les convaincre que nous pouvons partager les mêmes valeurs ?

En réponse, M. François Huwart a apporté les précisions suivantes :

¬ Agriculture

Il a tenu à souligner que, dans un souci d'équilibre entre les différents sujets, la délégation française n'avait pas consacré l'essentiel de son énergie aux questions agricoles. Des limites à ne pas franchir avaient été définies pour préserver une vision sociétale de l'agriculture qui ne peut être considérée comme une simple activité commerciale. M. François Huwart a ensuite souligné que l'agenda des négociations adopté à Doha mentionnait la délicate question des soutiens internes à l'agriculture pratiqués par certains pays, qui doivent être interdits lorsqu'ils provoquent des distorsions de concurrence. S'exprimant sur le dossier des subventions communautaires à l'exportation, il a indiqué que celles-ci représentent désormais moins de 10% du budget de la PAC contre 50% il y a dix ans. Il a rappelé l'engagement pris à Marrakech de poursuivre une réduction des ce type de subventions tant que cela n'est pas incompatible avec les intérêts agricoles européens.

¬ Le contexte des négociations et le poids de l'Europe dans le rapport de forces

Tant les incertitudes qui pèsent depuis plusieurs mois sur l'économie mondiale que les conséquences des tragiques attentats du 11 septembre ont augmenté la pression pour aboutir à un accord commercial à Doha.

M. François Huwart s'est démarqué des critiques dénonçant un certain isolement de l'Europe. Composée de 15 pays - et bientôt de 27 - l'Union constitue la première puissance commerciale au monde. Il a déclaré que l'acceptation à Doha d'une dérogation pour l'accord de Cotonou avait permis de renforcer nos liens avec les pays africains. Il a également fait part du soutien du Japon et de la Corée sur le chapitre agricole, tandis que des fissures apparaissent au sein du Groupe de Cairns dont l'alliance objective avec les Etats-Unis n'est plus si évidente.

¬ Les médicaments

L'accord conclu à Doha acte le droit de fabriquer sous licence obligatoire des médicaments génériques à bas prix, permettant ainsi à des pays qui n'ont pas la capacité d'en produire de pouvoir en bénéficier. Pour autant, cet accord ne démantèle pas les règles régissant le droit de la propriété intellectuelle et ne s'applique qu'aux seules situations d'urgence ; s'il apporte un rééquilibrage qui était souhaitable, il devra néanmoins être complété par un travail indispensable d'accompagnement et une réelle mobilisation des aides techniques. Sur ce sujet, il a rappelé qu'un effort significatif avait été fait par la France lorsque le Premier ministre a déclaré au cours d'un déplacement en Afrique du Sud que 10 % du montant de l'allégement de la dette devrait être consacré à la lutte contre le sida.

¬ L'environnement

M. François Huwart a estimé qu'il était difficile d'exiger de l'OMC qu'elle fasse plus pour l'environnement que ce qui est demandé aux enceintes spécialisées dans ce domaine. Mais l'accord de Doha constitue une ouverture sur laquelle la France est prête à réfléchir.

¬ Le secteur textile

Le recours à un système de gestion des quotas par accumulation aurait constitué un véritable risque pour l'industrie textile française ; or cette option redoutée n'a heureusement pas été adoptée. Il faut aborder la question de l'ouverture supplémentaire du marché textile dans un esprit d'équilibre et le bilan de Doha n'a pas, à cet égard, ajouté à la situation difficile dans laquelle se trouve ce secteur.

¬ Le rôle de l'OMC

L'OMC doit-elle se borner aux questions commerciales ? Après avoir rappelé l'impact du développement des échanges commerciaux dans le monde, M. François Huwart a convenu de la légitimité de l'OMC à traiter des questions périphériques au commerce. Cela suppose de mieux intégrer l'OMC dans le système international en assurant la promotion d'une véritable coopération avec les autres organisations internationales, et notamment avec la Banque mondiale. Chacune des organisations internationales doit prendre en compte la réalité des autres.

En conclusion, M. François Huwart s'est déclaré convaincu que les rapports de force au sein de l'OMC seront désormais profondément modifiés. L'Union européenne doit trouver les moyens d'un dialogue convaincant auprès des pays les moins favorisés afin d'améliorer l'image et la perception de nos idées qui concourent à l'humanisation de la mondialisation.

Le Président Alain Barrau a remercié M. François Huwart d'avoir répondu à l'invitation de la Délégation pour l'Union européenne. Plaidant pour le nécessaire renforcement du contrôle démocratique sur ces enjeux importants et complexes, il a souhaité que ce dialogue constructif puisse se poursuive avec le ministre afin de mieux répondre aux attentes légitimes des citoyens.