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Document E4326
(Mise à jour : 19 janvier 2011)


Recommandation de la Commission au Conseil visant à autoriser la Commission à ouvrir et à conduire des négociations avec l'Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV) sur les conditions et les modalités d'adhésion de la Communauté européenne.


E4326 déposé le 9 mars 2009 distribué le 23 mars 2009 (13ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2008) 0577 final du 26 septembre 2008, transmis au Conseil de l'Union européenne le 26 septembre 2008)

Ce document a été présenté par M. Robert LECOU , rapporteur, en remplacement de M. Thierry MARIANI , au cours de la réunion de la Commission du 1er avril 2009.

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I. L’ORGANISATION INTERNATIONALE DE LA VIGNE ET DU VIN (OIV)

L’OIV est une organisation intergouvernementale dont les objectifs sont les suivants :

- indiquer à ses membres les mesures permettant de tenir compte des préoccupations des producteurs, des consommateurs et des autres acteurs de la filière vitivinicole ;

- assister les autres organisations intergouvernementales et non gouvernementales, notamment celles qui poursuivent des activités normatives ;

- contribuer à l’harmonisation internationale des pratiques et normes existantes et, en tant que de besoin, à l’élaboration de normes internationales nouvelles afin d’améliorer les conditions d’élaboration et de commercialisation des produits vitivinicoles et la prise en compte de l’intérêt des consommateurs.

Afin d’atteindre ces objectifs, l’OIV formule des recommandations relatives aux conditions de production viticole, les pratiques œnologiques, la définition et la description des produits, l’étiquetage et les conditions de mise sur le marché. Elle soumet à ses membres toutes propositions concernant la garantie d’authenticité des produits de la vigne, en particulier vis-à-vis des consommateurs, notamment en ce qui concerne les mentions d’étiquetage, la protection des indications géographiques (aires vitivinicoles, appellations d’origine contrôlée).

Les décisions sont soumises au consensus qui est le mode normal de décision de l’Assemblée générale pour l’adoption des propositions de résolution de portée générale.

L’OIV regroupe 44 Etats membres dont 21 Etats membres de l’Union européenne( 1) et certains territoires et organisations peuvent assister à ses travaux en qualité d’observateurs

II. LA PROPOSITION DE LA COMMISSIONEUROPEENNE

Actuellement, la Communauté européenne n’a aucun statut officiel au sein de l’OIV. Elle est cependant régulièrement invitée en tant que représentant de la Communauté européenne, à assister aux travaux de l’Assemblée générale et des groupes d’experts. Elle ne peut toutefois pas participer aux travaux du Comité exécutif.

En application de la nouvelle OCM vitivinicole, la charge d’approuver les nouvelles pratiques œnologiques ou des modifier celles qui existent sera transférée, à compter du 1er août 2009, à la Commission européenne qui évaluera les pratiques œnologiques admises par l’OIV et les ajoutera, le cas échéant, à la liste des pratiques admises par l’Union européenne.

En conséquence, pour la Commission européenne, le transfert de compétences du Conseil à la Commission pour les pratiques œnologiques, la référence explicite faite aux travaux conduits par l’OIV pour l’adoption de nouvelles pratiques œnologiques ainsi que la reprise pure et simple des méthodes d’analyse de l’OIV nécessitent une évolution de la situation actuelle.

La Commission européenne propose donc d’ouvrir et de conduire des négociations avec l’OIV sur les conditions et les modalités d’adhésion à part entière de la Communauté européenne à cette organisation. Une fois cette adhésion effective, la Commission et les Etats membres participeront conjointement aux travaux de l’OIV. Elle propose que soient instituées des procédures internes de coordination et une répartition du droit de vote et du droit d’intervention en fonction du type de compétences (exclusive, nationale et partagée).

La Commission européenne fait valoir le parallèle avec le «  Codex alimentarius  » et la FAO. Le Codex Alimentarius (Code alimentaire) est un programme mixte de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) fixant les normes de sécurité alimentaire qui servent de référence pour le commerce international des denrées alimentaires.

Depuis 1994 et l’entrée en vigueur des accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) relatifs à l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires (accord SPS) et aux obstacles techniques au commerce (accord OTC), la pertinence juridique des normes du Codex a été accrue. En effet, ces deux accords font désormais référence aux normes du Codex, impliquant que ce dernier est utilisé comme fondement de l’évaluation des mesures et des règlements nationaux.

A l’heure actuelle, tous les Etats membres de l’Union européenne, ainsi que la Communauté européenne en tant que telle depuis la fin de l’année 2003, sont membres de la commission du Codex Alimentarius (CCA) qui est l’organe chargé de la mise au point du Codex.

III. LES RESERVES DE VOTRE COMMISSION

- Le parallèle avec le Codex n’est pas pertinent. En effet, le Codex et la FAO regroupent la quasi-totalité des Etats alors que l’OIV n’en regroupe que certains. Le poids de l’Union et de ses Etats membres n’est pas prédominant au sein de la FAO (27 voix sur 192) et du Codex (27 voix sur 175), alors que l’Union serait prépondérante au sein de l’OIV (70 % des voix). Par ailleurs, alors que les normes arrêtées par le Codex servent de référence pour l’accord SPS, les recommandations de l’OIV n’ont pas de caractère normatif sauf pour l’Union européenne qui en en transcrit certaines.

- L’OIV est avant tout une organisation intergouvernementale à vocation technique et scientifique. Son rôle est donc d’organiser les débats et les échanges techniques entre experts mandatés par les Etats membres qui les mettent à la disposition de la Communauté internationale. Les Etats membres choisissent ensuite l’adoption ou non des mesures issues des travaux de ces groupes d’experts. L’OIV n’a en aucun cas un rôle législatif et les travaux qui y sont conduits sont très en amont. L’objectif est d’éclairer les Etats membres sur les mesures qu’ils pourraient prendre au sein de leur propre législation.

Il est donc important de conserver cette capacité d’échange et de confrontation des idées qui risque de disparaître si l’Union européenne en adhérant à l’OIV se substitue aux Etats membres. La diversité des opinions et des avis sera gommée par la parole unique de la Commission européenne. Certaines positions de la Commission européenne peuvent être très différentes de celles de certains pays membres. Sa récente proposition d’autoriser le coupage des vins blancs et rouges afin d’en faire du rosé, en dehors de toute préoccupation de la qualité de la vinification, en est une parfaite illustration.

Par ailleurs, les relations avec les pays tiers seraient déséquilibrées car ceux-ci se trouveraient face à un interlocuteur unique représentant 70 % de la production et de la consommation mondiale.

Dans ces conditions, M. Robert LECOU , rapporteur, a proposé que la Commission chargée des affaires européennes rejette la proposition visant à l’adhésion de l’Union européenne à l’OIV. Plusieurs Etats membres, dont la France, ont suggéré que l’Union européenne opte pour le statut d’observateur, ce qui lui permettrait de participer à l’ensemble des groupes d’experts ainsi qu’au Comité exécutif (COMEX) sans droit de vote.

Devant la forte minorité de blocage contre cette mesure, la Commission européenne et la présidence tchèque ont jugé préférable de suspendre la proposition, qui ne figurait d’ailleurs pas à l’ordre du jour du Conseil « Agriculture » du 23 mars 2009. A ce jour, aucune date n’a été fixée pour la reprise des discussions.

Mme Valérie ROSSO-DEBORD et M. Guy GEOFFROY ont précisé qu’ils souscrivaient tout à fait aux remarques du rapporteur.

La Commission a ensuite rejeté ce texte.

(1) Afrique du Sud, Algérie, Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Brésil, Bulgarie, Chili, Chypre, Croatie, Espagne, Finlande, France, Géorgie, Grèce, Hongrie, Irlande, Israël, Italie, Liban, Luxembourg, ARY Macédoine, Malte, Maroc, Mexique, Moldavie, Monténégro, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Pérou, Portugal, République tchèque, Roumanie, Russie, Serbie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Turquie et Uruguay. Six Etats membres de l’Union européenne n’ont pas adhéré à l’OIV : le Royaume-Uni, la Pologne, le Danemark, la Lituanie, la Lettonie et l’Estonie. Ont le statut d’Etats observateurs, la Bolivie, la Tunisie et L’Ukraine et le statut d’observateurs, certaines associations comme l’Assemblée des régions européennes viticoles, l’association internationale des juristes du droit de la vigne et du vin, la Fédération internationale des vins et spiritueux…