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N° 3055

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 15 mai 2001.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES(1) en conclusion
des travaux d'une
mission d'information
(2) sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer, au cours de la guerre du Golfe et des opérations conduites ultérieurement dans les Balkans, à des risques sanitaires spécifiques

et présenté par
M. 
Bernard CAZENEUVE,
Mme Michèle RIVASI et M. Claude LANFRANCA,
Députés.

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TOME I
RAPPORT : 3ÈME PARTIE

LES LEÇONS À TIRER DU CONFLIT
EXAMEN EN COMMISSION - CONCLUSIONS

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

(2) La composition de cette mission figure au verso de la présente page.

Défense.

La commission de la défense nationale et des forces armées est composée de :

M. Paul Quilès, président ; MM. Didier Boulaud, Jean-Claude Sandrier, Michel Voisin, vice-présidents ; MM. Robert Gaïa, Pierre Lellouche, Mme Martine Lignières-Cassou, secrétaires ; MM. Jean-Marc Ayrault, Jacques Baumel, Jean-Louis Bernard, André Berthol, Jean-Yves Besselat, Bernard Birsinger, Jacques Blanc, Loïc Bouvard, Jean-Pierre Braine, Philippe Briand, Jean Briane, Marcel Cabiddu, Antoine Carré, Bernard Cazeneuve, Guy-Michel Chauveau, Alain Clary, François Cornut-Gentille, Charles Cova, Michel Dasseux, Jean-Louis Debré, François Deluga, Claude Desbons, Philippe Douste-Blazy, Jean-Pierre Dupont, Christian Franqueville, Pierre Frogier, Yves Fromion, Yann Galut, René Galy-Dejean, Roland Garrigues, Henri de Gastines, Bernard Grasset, Jacques Heuclin, Elie Hoarau, François Hollande, Jean-Noël Kerdraon, François Lamy, Claude Lanfranca, Jean-Yves Le Drian, Georges Lemoine, François Liberti, Jean-Pierre Marché, Franck Marlin, Jean Marsaudon, Christian Martin, Guy Menut, Gilbert Meyer, Michel Meylan, Jean Michel, Charles Miossec, Alain Moyne-Bressand, Arthur Paecht, Jean-Claude Perez, Robert Poujade, Mme Michèle Rivasi, MM. Michel Sainte-Marie, Bernard Seux, Guy Teissier, André Vauchez, Emile Vernaudon, Jean-Claude Viollet, Aloyse Warhouver, Pierre-André Wiltzer.

La mission d'information sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer, au cours de la guerre du Golfe et des opérations conduites ultérieurement dans les Balkans, à des risques sanitaires spécifiques est composée de :

M. Bernard Cazeneuve, président ; M. Charles Cova, vice-président ; Mme Michèle Rivasi, M. Claude Lanfranca, rapporteurs ; MM. Jean-Louis Bernard, Alain Clary, René Galy-Dejean, Guy Teissier, André Vauchez et Aloyse Warhouver.

INTRODUCTION 9

TROISIÈME PARTIE : LES LEÇONS À TIRER DU CONFLIT 159

I. - ASSURER UN SUIVI DE PHARMACO-VIGILANCE POUR LES MALADES ET LES MILITAIRES ENGAGÉS 159

A. PROCÉDER À UNE ÉTUDE CAS-TÉMOIN CIBLÉE DES SOLDATS POUR EN SAVOIR PLUS 160

1. Une étude épidémiologique à réaliser indépendamment du Service de santé des Armées 160

a) Une question de confiance des soldats plus que de compétence du corps médical militaire 160

b) Un moyen d'identifier les pathologies directement liées au conflit 162

2. Quelle méthodologie adopter ? 164

B. ÉTABLIR UN SUIVI MÉDICAL CONTINU DANS LA DURÉE DES SOLDATS AYANT PARTICIPÉ AUX OPÉRATIONS 166

1. Une mesure élémentaire 166

2. Créer un observatoire indépendant des risques rémanents des militaires 168

II. - GARANTIR L'EFFICACITÉ DES MOYENS ET DES PROCÉDURES DE PROTECTION DES SOLDATS 170

A. ASSURER DES MÉTHODES D'ALERTE ET DES ÉQUIPEMENTS ADAPTÉS AUX CONTRAINTES OPÉRATIONNELLES 171

1. Des efforts indéniablement réalisés 171

2. Une préoccupation toujours nécessaire 174

B. MIEUX CERNER LES RISQUES AFFÉRENTS AUX ARMES INCORPORANT DE L'URANIUM APPAUVRI 175

1. Faire la part des choses sur les conséquences sanitaires des munitions à uranium appauvri 175

2. Faut-il imposer un moratoire sur l'emploi de ces munitions ? 177

III. - REVOIR LES MODALITÉS DE COMPENSATION ET D'AIDE FINANCIÈRES 180

A. UN DISPOSITIF EN VIGUEUR SOUPLE MAIS IMPARFAIT 181

1. Une procédure d'examen des droits à pension lente et pesante 182

a) L'instruction 182

b) La décision 183

c) Le contentieux 184

d) Un processus long et complexe 185

2. Des critères d'imputabilité restrictifs 188

a) Des conditions juridiques encadrées et délimitées 188

b) La souplesse relative du code des pensions militaires d'invalidité 191

B. DES AMÉLIORATIONS POSSIBLES 193

1. Examiner avec bienveillance les demandes de pensions d'invalidité des soldats atteints 193

2. Revoir les critères d'attribution des pensions d'invalidité en faveur des anciens combattants de la guerre du Golfe 195

a) Les solutions américaines 195

b) Elargir le régime de présomption d'imputabilité 196

c) Harmoniser les pensions 198

3. Renforcer les droits des demandeurs dans les procédures 199

CONCLUSION 203

EXAMEN EN COMMISSION 207

TROISIÈME PARTIE :
LES LEÇONS À TIRER DU CONFLIT

Après avoir établi un certain nombre de faits et observé plusieurs constats, la mission d'information se doit de formuler des recommandations. Celles-ci se veulent tout à la fois de portée spécifique, puisque concernant les personnels engagés dans la guerre du Golfe, mais aussi de portée plus générale, certains enseignements se révélant valables pour la prévention des risques encourus par les armées lorsqu'elles se trouvent déployées sur n'importe quel théâtre extérieur.

Si le suivi médical des militaires de l'opération Daguet est au nombre des préoccupations majeures des membres de la mission d'information, l'efficacité de la prévention des risques et l'équité des procédures de réparation leur sont également apparues essentielles. Or, à la lumière des nombreux témoignages recueillis et des expériences étrangères, il semble que des progrès puissent être réalisés.

Certes, les Armées et leur Service de santé n'ont pas attendu pour mettre à profit les enseignements tirés du conflit. Il n'en demeure pas moins que certaines insuffisances ou carences persistent. La mission d'information s'est efforcée d'y apporter des réponses pratiques, utiles et soucieuses de l'intérêt mutuel des soldats et des armées.

I. - ASSURER UN SUIVI DE PHARMACO-VIGILANCE POUR LES MALADES ET LES MILITAIRES ENGAGÉS

Beaucoup de militaires français engagés sur le théâtre de la guerre du Golfe ont ressenti des troubles postérieurement au conflit, parfois plusieurs mois après, voire quelques années. Dans de telles conditions, il n'est pas aisé de distinguer les pathologies résultant directement du conflit de celles dont la cause est tout autre.

Pourtant, outre qu'il permettrait de mieux identifier les paramètres ayant pu déclencher les maladies de certains soldats engagés dans le conflit du Golfe, un suivi médical plus approfondi présenterait l'avantage de rassurer les personnels concernés. En ce sens, la mission d'information considère qu'il s'agit là d'une mesure nécessaire et urgente.

A. PROCÉDER À UNE ÉTUDE CAS-TÉMOIN CIBLÉE DES SOLDATS POUR EN SAVOIR PLUS

Une étude épidémiologique portant sur les militaires français engagés lors de la guerre du Golfe paraît nécessaire. En effet, comme l'a souligné le Professeur Roger Salamon lors de sa seconde audition par la mission d'information le 21 mars 2001 : « On ne peut pas (...) se payer le luxe, dans une situation d'inquiétude, de ne pas offrir à tous les anciens combattants de la guerre du Golfe la possibilité de se faire examiner - dans un hôpital civil ou militaire - avec un protocole qui sera standardisé par un comité scientifique ».

Cette exigence répond à un double souci : répondre aux angoisses de personnes malades, mais aussi mieux comprendre les raisons des pathologies des anciens combattants de la guerre du Golfe.

1. Une étude épidémiologique à réaliser indépen-damment du Service de santé des Armées

Ne pas confier la charge de l'organisation et de la réalisation de l'étude épidémiologique au Service de santé des Armées est un choix qui ne repose pas sur des raisons proprement médicales, mais sur le souci de préserver la confiance des anciens combattants dans la démarche entreprise.

a) Une question de confiance des soldats plus que de compétence du corps médical militaire

L'ensemble des membres de la mission d'information reconnaissent la qualité du travail et la compétence des personnels du Service de santé des Armées. Force est néanmoins de constater que les soldats atteints de pathologies dont ils attribuent la survenance à leur engagement dans l'opération Daguet peuvent éprouver des réticences à faire l'objet d'une étude épidémiologique réalisée par les services du ministère de la Défense, juge et partie en la circonstance.

Au cours de son audition commune avec le Professeur Jean-François Lacronique et M. Pierre Roussel, le 21 mars 2001, le Docteur Abraham Béhar a résumé en quelques mots le besoin des militaires malades de s'en remettre à une structure médicale au-dessus de tout soupçon de partialité :

« (...) je précise d'emblée qu'il ne s'agit pas d'un problème de défiance - je pense qu'il serait bien plus utile, si nous voulons faire une étude épidémiologique, de la confier à un service médical civil. Le rapport de confiance, l'exigence même des personnes qui ont été exposées et qui se plaignent, font apparaître une certaine méfiance à l'égard du Service de santé des Armées.

(...) Bien évidemment, la collaboration du Service de santé des Armées doit être totale ».

Ce sentiment de méfiance est compréhensible au regard de la situation des personnes malades : à tort ou à raison, ces dernières s'inquiètent des incertitudes de diagnostics et soupçonnent que la vérité leur soit cachée alors même qu'il n'existe aucune donnée épidémiologique permettant d'établir de certitude sur le sujet.

A cet égard, ce passage du témoignage de Mme Marie-Claude Dubin devant la mission d'information, le 9 janvier 2001, est révélateur :

« Je suis allée voir un hématologue à l'hôpital Necker qui m'a renvoyée sur le service de deux spécialistes français qui, apparemment, menaient des recherches secrètes sur le syndrome du Golfe. Parallèlement, je suis allée dans les hôpitaux militaires, car je souhaitais confronter leurs méthodes de recherche et les résultats dont je disposais. Pendant plus de trois mois, je me suis donc fait examiner à la fois dans les hôpitaux militaires et dans les hôpitaux civils. A la fin, j'ai obtenu des résultats diamétralement opposés, avec des méthodes de recherche sans doute, elles aussi, diamétralement opposées.

Je ne sais pas si j'ai prouvé quelque chose. J'ai simplement prouvé qu'il était très difficile de savoir ce que l'on avait et que l'on vous facilite guère la tâche ».

Les « deux spécialistes français » dont il est question sont le Professeur Romain Gherardi et son assistant, le Docteur François-Jérôme Authier, médecins des maladies neuro-musculaires à l'hôpital Henri-Mondor de Créteil auditionnés le 28 mars 2001 par la mission d'information. Leurs travaux n'étaient en rien secrets et ne portaient nullement de manière précise sur le « syndrome du Golfe ». Cependant, ils ont conduit des études expérimentales aux résultats desquelles les médecins du Service de santé des Armées n'avaient sans doute pas eu accès au moment des faits relatés par Mme Dubin.

On peut comprendre, dans ces conditions, et les différences de résultats, et la méfiance teintée de lassitude d'une malade qui n'arrive pas exactement à savoir la cause de ses problèmes. En conséquence, par souci d'harmonisation des protocoles et d'apaisement des anciens combattants malades, il semble préférable de confier la tenue d'une étude épidémiologique à une structure civile, indépendante du Service de santé des Armées, quand bien même la compétence et la déontologie de ses personnels ne sauraient être remises en cause.

b) Un moyen d'identifier les pathologies directement liées au conflit

● L'utilité de telles études

Au cours de sa première audition par la mission d'information, le 8 novembre 2000, le Professeur Roger Salamon, président du groupe d'experts indépendants nommés par le Gouvernement, a expliqué l'intérêt d'une étude cas-témoin :

« Pour savoir si un effet est lié à une cause qui a pu se produire des années auparavant sur le territoire du Golfe, la notion de comparabilité est quasiment obligatoire !

Or, cela correspond à une démarche épidémiologique. Lorsqu'on a voulu trouver la cause d'un certain nombre de pathologies assez rares qui touchaient la plèvre et que, par des enquêtes épidémiologiques, on a décelé que le contact à l'amiante était plus fréquent chez les malades qui présentaient un mésothéliome que chez ceux qui n'en avaient pas, on a mis le doigt sur un facteur en suivant une procédure avant tout d'ordre épidémiologique. Ce n'est qu'ensuite que l'on s'est penché sur la question des causes, car ce n'est que dans une seconde étape que l'on cherche une explication, une plausibilité biologique.

Nous serons très souvent obligés, comme l'ont fait les Américains, d'agir ainsi. Nous aurons à prendre en compte la notion de groupe témoin et à procéder à des enquêtes de type "cas témoin" pour éviter d'attribuer à tort certains signes, qui de surcroît sont très diversifiés, à des phénomènes qui peuvent ne pas en être la cause ».

Indéniablement, la conduite d'une étude épidémiologique est essentielle pour déterminer avec une forte probabilité les causes exactes des troubles dont se disent atteints certains militaires français engagés dans l'opération Daguet et, ce faisant, pour mettre en lumière l'existence ou non d'un lien de cause à effet entre leur engagement et ces pathologies.

● La typologie de ces études

Les études épidémiologiques réalisées à ce jour sont de natures diverses. Certaines concernent la mortalité des militaires, d'autres caractérisent leurs types d'affections, d'autres encore s'attardent sur les conséquences de leurs maladies.

Lors de son audition, le 21 novembre 2000, le sous-directeur à la Direction générale de la Santé, le Docteur Yves Coquin, a établi une typologie des études épidémiologiques auxquelles il avait eu accès :

« Concernant la nature des études dont j'ai pris connaissance, le premier type d'études sont des études de mortalité, aussi bien au sein du corps expéditionnaire américain qu'au sein du corps expéditionnaire anglais. Ces études montrent effectivement une surmortalité dans la population de ces deux corps expéditionnaires. L'explication avancée par les auteurs me paraît tout à fait logique et en parfaite concordance avec les données épidémiologiques portant sur la population française, qui montrent aussi une surmortalité des sujets jeunes de sexe masculin, particulièrement élevée en France, du fait d'accidents. Sans vouloir grossir le trait, on peut se dire que ces corps expéditionnaires comptent vraisemblablement des gens qui ont une attitude de négation du danger, chez lesquels la perception du risque n'est pas la même que chez un père de famille. Ces études ne m'ont pas paru de nature à mettre particulièrement « la puce à l'oreille », si vous me permettez l'expression.

Le deuxième type d'investigations sont des études de morbidité, assez générales, qui ont analysé le recours aux soins du corps expéditionnaire du Golfe par rapport à d'autres catégories de militaires au cours de la période immédiate de l'après-guerre du Golfe. Elles n'ont pas montré de différence significative s'agissant du recours aux soins.

Le troisième type d'études générales ont été celles qui ont essayé de déterminer s'il y avait eu des conséquences sur la descendance de ces personnes, en particulier en termes de malformations. Ces études n'ont pas montré d'incidence en termes de malformations. Néanmoins, si vous me permettez d'exprimer un avis personnel, je pense que ces études sont un peu incomplètes pour deux raisons. La première est qu'elles se sont attachées à la survenue de malformations pour des enfants nés immédiatement après la guerre du Golfe d'un père ayant été engagé sur le terrain. Or certaines malformations peuvent se révéler de façon différée par rapport à la naissance. La seconde est que ces études ne se sont pas penchées sur les difficultés à concevoir ou sur le nombre de fausses couches qui auraient pu survenir. Ce sont là des remarques, sur le plan de la méthodologie, qui doivent être prises en compte et qui relativisent un peu la portée de ces études. Je pense notamment à une étude parue dans le New England Journal of Medecine.

Pour le reste et en rappelant à nouveau que je n'ai pas tout lu puisque je n'ai pris connaissance que d'une trentaine d'études, il y a parmi les symptômes rapportés des symptômes qui pourraient donner lieu à une interprétation organique comme, par exemple, le fait d'avoir la diarrhée. L'utilisation de Pyridostigmine à fortes doses est susceptible d'entraîner des troubles digestifs. Cependant, ces études ne se livrent pas à une analyse symptomatique précise de ces patients. Il reste difficile d'imaginer que ces cas de diarrhées n'aient pas été explorés, s'il s'agissait de diarrhées persistantes accompagnées de signes biologiques, de perte de poids ou autres qui autorisent à penser qu'il y a un problème chronique. Rien dans ces études, je le répète, ne montre que tel symptôme revient spécialement fréquemment, ou que tel autre pourrait éventuellement être en rapport avec une intoxication par des organophosphorés ou des para-sympathico-mimétiques ».

Liée à la multiplicité des signes fonctionnels présentés par les militaires malades qui avaient été engagés lors de la guerre du Golfe, cette diversité du champ d'analyse rend complexe tout choix quant au protocole à employer pour étudier le cas des soldats français envoyés dans le Golfe arabo-persique, ce qui, rappelons-le, n'a jamais été fait.

2. Quelle méthodologie adopter ?

Au cours de ses déplacements à Londres et à Washington, ainsi que grâce aux nombreuses auditions qu'elle a pu mener, la mission d'information a acquis la certitude qu'il était illusoire de préconiser des études épidémiologiques comparant un panel représentatif des quelque 25 000 militaires français engagés avec une population témoin, dix ans après les faits1.

Nonobstant le coût important de telles recherches, le principal obstacle réside dans la représentativité des anciens combattants retenus et la comparaison avec une population témoin suffisamment pertinente. En conséquence, ce sont des analyses ciblées et portant sur les militaires plus particulièrement exposés (c'est-à-dire les soldats du groupement de soutien logistique, du 3ème RIMa, du 4ème RD, de l'Etat-major de la Division Daguet, du 6ème REG, du 1er REC et du 2nd REI), qu'il paraît préférable de suggérer. En outre, à la différence des propositions du groupe d'experts, la mission d'information préconise que ces études soient réalisées par plusieurs organismes scientifiques sous l'autorité de l'Institut de veille sanitaire.

Lors de sa seconde audition par la mission d'information, le 21 mars 2001, le Professeur Roger Salamon a exposé la méthode que préconisait au Gouvernement le groupe d'experts indépendants qu'il présidait : « Contrairement aux Américains et aux Anglais, on ne procédera à aucune comparaison de militaires français déployés dans le Golfe, avec des militaires non déployés ou déployés en Bosnie-Herzégovine. En revanche, nous formulerons une autre proposition : parmi les 25 000 militaires, nous trouverons des "cas" - qu'il appartiendra de définir - et des "non-cas" que nous nous efforcerons de comparer par rapport aux expositions qu'ils ont subies. Or, je compte sur vous pour obtenir ce type d'information. De la sorte, la France pourrait réaliser une étude-cas témoin unique en son genre. Si parmi les "cas", on découvre davantage de militaires exposés à des risques que dans le groupe témoin, cela aura une valeur scientifique à même de valider ce que vous pouvez pressentir actuellement ».

La mission d'information, après avoir pris connaissance du rapport du groupe des experts indépendants présidé par le Professeur Roger Salamon, estime que l'envoi de questionnaires aux 25 000 militaires engagés dans le Golfe constitue une base intéressante pour le recueil d'informations nécessaires à la réalisation d'études de mortalité, de morbidité et aussi de descendance.

Néanmoins, les suggestions du Docteur Abraham Béhar présentent elles aussi un intérêt méthodologique important, ce dernier déclarant à la mission d'information :

« D'un point de vue qualitatif, si l'on prend le problème des dossiers de la guerre du Golfe et que l'on s'intéresse seulement au nombre global des leucémies répertoriées, il faut alors faire de grandes études épidémiologiques. En revanche, si l'on s'intéresse à un type très particulier de leucémies, la leucémie à promyélocytes - forme tout à fait exceptionnelle de lésion sanguine -, et que l'on s'aperçoit que sa fréquence est nettement plus élevée parmi les symptômes constatés chez les vétérans de la guerre du Golfe, ce résultat peut prendre de la valeur ».

Et le Docteur Béhar de conclure :

« Est-ce que les grandes études épidémiologiques peuvent aider dans la réflexion ? La réponse est oui, mais à condition que ce ne soit pas un paravent. Il existe en effet un moyen de "noyer le poisson" : lancer de grandes études épidémiologiques dont les résultats seront livrés cinq ou six ans plus tard. On a la possibilité, bien que l'idée ne soit pas populaire en France, d'utiliser des méthodes épidémiologiques qui répondront plus rapidement au problème posé, en recourant à des études cas-témoin. Il s'agit de voir si, dans l'ensemble de nos constats, l'on peut tirer quelques conclusions générales. Dans le cas particulier des "syndromes" du Golfe et des Balkans, une étude cas-témoin sur des leucémies à promyélocytes pourrait aider à avancer ».

En fait, il semble que la recherche de pathologies extrêmement spécifiques chez les anciens combattants de la guerre du Golfe plus particulièrement exposés aux risques permette d'effectuer des comparaisons plus rapides et surtout plus parlantes. La mission d'information estime qu'une étude cas-témoin ciblée sur des leucémies à promyélocytes (comme l'a suggéré le Docteur Abraham Béhar) ou la pratique de biopsies pour la mise en évidence de « myofasciites à macrophages » (comme l'a proposé le Professeur Romain Ghérardi, le 28 mars 2001) seraient susceptibles d'apporter des résultats concrets.

En conséquence, la mission d'information préconise qu'au delà de l'envoi de questionnaires par l'INSERM à l'ensemble des militaires ayant participé au conflit, des études de mortalité, de morbidité et de descendance plus ciblées soient réalisées par des organismes scientifiques indépendants, publics et/ou privés, sur les personnels les plus exposés, à savoir les soldats du groupement de soutien logistique, du 3ème RIMa, du 4ème RD, de l'Etat-major de la Division Daguet, du 6ème REG, du 1er REC et du 2nd REI.

B. ÉTABLIR UN SUIVI MÉDICAL CONTINU DANS LA DURÉE DES SOLDATS AYANT PARTICIPÉ AUX OPÉRATIONS

La Nation est redevable aux hommes qui ont défendu ses intérêts, au péril de leur vie. Bien que la grande majorité des anciens combattants de la guerre du Golfe soit retournée à la vie civile, il est inconcevable de se désintéresser de leur devenir sanitaire.

La mission d'information souhaite donc qu'une attention toute particulière, dépassant le simple suivi des cadres d'active, soit portée aux personnels qui ont participé aux opérations de la guerre du Golfe. Pour se faire, une structure spécifique pourrait être créée.

1. Une mesure élémentaire

Au cours de leur passage sous les drapeaux ou de leur carrière militaire, les soldats engagés bénéficient d'un suivi médical assuré par le Service de santé des Armées.

Le Médecin général Daniel Gautier, actuel directeur du Service de santé des Armées a ainsi rappelé à la mission d'information, à l'occasion de son audition le 8 novembre 2000 : « Tous les militaires actifs font l'objet d'une visite annuelle. De plus, il y a un suivi par l'intermédiaire du "véhicule" que représente le dossier médical individuel ».

De même, le Médecin général Jean Bladé, directeur du Service de santé des Armées à l'époque, a tenu à préciser :

« Chaque militaire, quelle que soit son armée, a son livret médical sur lequel est porté tout ce qui le concerne : visites, hospitalisations, vaccinations, traitements. Les rapports mensuels des unités concernant les pathologies observées font l'objet de rapports de synthèse, certains étant hebdomadaires et d'autres mensuels.

Il en ressort que, lorsque l'ensemble des cas individuels présente des synergies ou des amplitudes anormales, ces données sont analysées par des épidémiologistes dont c'est le métier, à la Direction centrale du Service de santé des Armées.

Je ne crois pas qu'après la guerre du Golfe et dans les quatre années qui ont suivi, c'est-à-dire au long des années où j'étais encore en service et pour lesquelles je peux témoigner de ce que j'ai vu et fait, nous ayons enregistré le moindre signal d'alarme. De même, aucune indication spécifique n'est venue du ministère des Anciens combattants, ministère qui reçoit les demandes de pension ».

Toutefois, dans la mesure où de nombreux anciens combattants de la guerre du Golfe ont quitté l'institution militaire, il est évident que d'anciens militaires sont tombés malades après l'expiration de la période de suivi médical réglementaire du Service de santé des Armées. Beaucoup se sont adressés à des services hospitaliers ou médicaux civils, de sorte qu'il est devenu difficile de conserver une vue d'ensemble des problèmes rencontrés.

De fait, alors même que le suivi médical des anciens combattants de la guerre du Golfe sur le long terme paraît nécessaire, rien n'est véritablement prévu à cet effet. La mission d'information considère qu'une centralisation de la prise en charge sanitaire est nécessaire. A cette fin, une structure spécifique rattachée au ministère délégué à la Santé semble devoir être mise en place.

Dès à présent et dans l'attente de l'installation de l'observatoire des risques rémanents des militaires que la mission d'information souhaite voir mis en place rapidement, une cellule pourrait être créée auprès de la direction générale de la santé, afin de centraliser les diagnostics portant sur les participants à la guerre du Golfe volontaires et effectués gratuitement par les médecins de leur choix, le coût de cette démarche pouvant être pris en charge par le ministère de la Défense.

2. Créer un observatoire indépendant des risques rémanents des militaires

La création d'une antenne administrative et médicale dédiée aux problèmes éprouvés par les anciens combattants de la guerre du Golfe est revendiquée par l'association Avigolfe. Son président, M. Hervé Desplat, n'a pas manqué de renouveler cette demande devant la mission d'information, le 2001, en exigeant : « la mise en place d'une cellule "Golfe" au sein du ministère de la Santé, considérant qu'il s'agit aujourd'hui d'un problème de santé publique : cette cellule étant chargée de centraliser les demandes et d'assurer la gestion médicale et administrative ».

Les membres de la mission d'information, tout en reconnaissant qu'une telle proposition présente de l'intérêt, estiment qu'une telle mesure doit se concevoir dans un cadre plus général, c'est-à-dire la création d'un observatoire indépendant chargé d'étudier les risques sanitaires rémanents des militaires envoyés en opérations extérieures.

Le Professeur Roger Salamon a également préconisé une démarche de ce genre, comme l'illustre l'échange qui suit, tiré du procès-verbal de sa seconde audition :

« Mme Michèle Rivasi, co-rapporteure : [...] Professeur Salamon, nous devons arriver à créer une structure médicale - en dehors du ministère de la Défense - qui pourrait accueillir les vétérans qui sont inquiets de leur état de santé. Cette cellule aurait le mérite d'éviter la dispersion des militaires souffrants.

M. Charles Cova, Vice-président : Notre mission pourrait faire une telle proposition.

M. le Professeur Roger Salamon : Il s'agit d'une demande si sage que tout le monde sera d'accord.

Il faut tirer une autre leçon de ce type de problèmes : il ne faut pas attendre pour s'en préoccuper, les prévenir. Il serait bon de réfléchir à la création d'un observatoire des risques rémanents des militaires français, militaires qu'il conviendrait de suivre, alors même qu'ils ont quitté l'armée, sur le moyen et le long terme.

Les conséquences de la guerre du Golfe pourraient se faire à nouveau jour chez les vétérans d'autres conflits. Il serait dommage qu'on n'exploite pas les leçons de cette expérience ».

D'ores et déjà, ce suivi pourrait s'avérer fort utile pour des soldats engagés dans des missions difficiles, comme ce fut le cas au Rwanda lors de l'opération Turquoise. A cet égard, le témoignage de M. Laurent Attar-Bayrou, président de la Fédération des Anciens des Missions Extérieures est particulièrement révélateur :

« Pour les problèmes psychologiques, on est obligé d'attendre, puisqu'il n'y a pas de débriefing dans les Armées françaises.

Prenons l'exemple du Rwanda. Je peux vous en parler puisque j'y étais dans le cadre d'une opération humaine, puisque la Fédération a aidé la « Bio Force Militaire » où l'on a d'ailleurs dépêché un psychiatre pour interroger les militaires sur place.

Le travail réalisé par les militaires français consistait à déblayer les corps : 170 corps à droite et 170 sur l'autre côté, plus les fosses. Une fosse, ce n'est pas difficile, on creuse la terre, la largeur du godet ; on met les corps dedans ; un coup de chaux ; on remet des corps. Psychologiquement, là c'était palpable.

Il y a eu pourtant peu de demandes de pensions sur l'opération Turquoise. Les participants ont été auditionnés par des psychiatres, mais après on les a lâchés dans la nature ». Ceux qui rentrent de mission sont ainsi lâchés dans la nature. En ce qui concerne ceux qui sont encore sous les drapeaux ou qui vont terminer leur contrat, car les contrats courts - donc les hommes du rang - ne font que neuf ans, on les libère au bout de cette période sans leur avoir réellement donné une formation, alors que ce sont les premières personnes qui ont connu ces problèmes dans la vie civile.

Je ne dis pas que les officiers ou les sous-officiers n'ont pas ces problèmes, mais ils restent plus longtemps dans l'institution militaire, et celle-ci a au moins l'avantage d'avoir un esprit de camaraderie et de corps qui aide les personnes à surmonter d'éventuelles difficultés psychologiques de cet ordre.

On doit étendre ce principe de précaution pour les problèmes psychologiques, puisqu'on a mis dix ans avant de se pencher sur les opérations du Golfe ».

Par ailleurs, outre qu'elle présenterait l'avantage d'intégrer à ce suivi spécifique l'ensemble des personnels engagés sur des théâtres extérieurs (de plus en plus nombreux du fait de la professionnalisation des armées) et ainsi souvent exposés à des risques divers, la solution de l'observatoire des risques rémanents des militaires permettrait également d'anticiper leurs problèmes sanitaires. Telles sont les raisons pour lesquelles la mission d'information se prononce en faveur de cette structure.

II. - GARANTIR L'EFFICACITÉ DES MOYENS ET DES PROCÉDURES DE PROTECTION DES SOLDATS

L'examen attentif du contexte de la guerre du Golfe a mis en relief des défaillances en matière de prévention et de protection des soldats face au risque NBC. La mission d'information s'est inquiétée de savoir comment les enseignements du conflit avaient été tirés. S'il est incontestable que certains équipements de protection NBC ont été améliorés, il n'est pas sûr que le niveau de préparation des forces à ce genre de menace soit véritablement optimal. A cet égard, consacrer davantage de moyens à l'entraînement et à l'équipement NBC des forces serait sans doute utile.

De même, la question des effets des armes à uranium appauvri continue à se poser, même si des analyses ont là aussi, sous la pression des médias et des parlementaires, permis d'aboutir à une connaissance plus précise des risques. Sur ce dernier point, la mission d'information a pris connaissance d'une étude stratégique de long terme de l'US Army2 sur les pénétrateurs à énergie cinétique (c'est-à-dire à base de tungstène et d'uranium appauvri), en date de juillet 1990, soit un mois avant l'invasion du Koweit par l'Irak. Cette étude analyse et compare les risques afférents à l'emploi de pénétrateurs en tungstène et en uranium appauvri, mettant plus particulièrement l'accent sur les conséquences sanitaires d'une exposition des militaires sur le champ de bataille à l'uranium appauvri.

Les autorités militaires américaines étaient donc bien au fait des risques potentiels de l'utilisation de l'uranium appauvri. Il est regrettable que cette information n'ait pas été diffusée à leurs alliés lorsque la décision d'employer des obus à uranium appauvri sur le théâtre d'opération à été prise. Sur le plan des recommandations, une sensibilisation accrue des militaires aux conséquences sanitaires éventuelles des munitions à uranium appauvri apparaît indispensable.

A. ASSURER DES MÉTHODES D'ALERTE ET DES ÉQUIPEMENTS ADAPTÉS AUX CONTRAINTES OPÉRATIONNELLES

Le risque nucléaire, biologique et chimique, dix ans après la guerre du Golfe, demeure toujours réel. La menace, liée à des phénomènes de dissémination, confère des moyens d'action extrêmement dangereux à des Etats ou des groupes terroristes capables de conduire, à tout moment, des menées agressives. Il va sans dire que, dans un tel contexte, les militaires français sont exposés.

Il est donc essentiel que les matériels de protection, qui ont évolué, les procédures de prévention et les crédits alloués à ce pan particulier de la défense soient adaptés aux contraintes opérationnelles.

1. Des efforts indéniablement réalisés

Depuis la guerre du Golfe, les matériels de protection NBC ont évolué : l'AP2C a succédé au Detalac en matière de détection et de contrôle de la présence d'agents neurotoxiques en 1991 ; la tenue S3P est apparue en deux versions (la version Outre-Mer complétant la version Centre-Europe) dès 1990 ; les cartouches filtrantes des appareils normaux de protection à visière panoramique (ANP) ont été modifiées en 1993 et 1995. En revanche, le gant poudreur de décontamination et, en matière de détection nucléaire, le détecteur DOM DOR 309 ainsi que le stylo dosimètre JER, sont toujours en service.

Corrélativement à cette modernisation technique des équipements de protection et de détection, les armées ont renouvelé leurs matériels tout en mettant davantage l'accent sur la préparation des forces et leur familiarisation avec ces outils devenus indispensables.

Dans une réponse écrite à la question n° 54955, posée le 11 décembre 2000 par M. Charles Cova, Vice-président de la mission d'information, le ministère de la Défense a apporté les précisions suivantes à ce sujet :

« 1) Armée de Terre : (...) S'agissant des équipements individuels de protection NBC, tous les militaires de l'armée de terre participant à une opération extérieure sont notamment dotés d'un masque ANP (appareil normal de protection), de deux tenues de combat NBC (type centre-Europe ou outre-mer), de sur-bottes de protection, de sous-gants et de chaussettes carbonés, ainsi que de gants de cuir. La formation des instructeurs NBC est réalisée à l'école de défense NBC de Draguignan. Outre celle qui est dispensée pendant la formation de base de chaque militaire, quinze à vingt heures d'instruction NBC sont organisées annuellement dans les unités de l'armée de Terre et des incidents NBC sont systématiquement inclus dans les exercices du niveau régiment ou supérieur. De plus, la partie NBC des évaluations d'unités fait l'objet d'un contrôle particulier. Enfin, une préparation spécifique à la menace propre à chaque théâtre d'opération est dispensée avant la projection des forces.

2) Marine nationale : la politique de protection des forces projetables contre la menace NBC s'articule autour de deux volets : une protection collective, prévue dès la conception des navires, est installée à leur construction. Elle repose sur le concept de la citadelle, qui permet d'isoler et de confiner l'intérieur du navire face à un environnement extérieur contaminé et de gérer les entrées et sorties de personnel grâce aux sas de décontamination. Une protection individuelle, chaque marin embarqué étant doté d'un équipement de protection (appareil respiratoire avec cartouche filtrante, tenue de protection avec gants et bottes). Les équipements individuels sont en cours de remplacement. Ainsi, 29 000 masques A3P destinés à se substituer à l'ancien modèle ANPO51, 75 000 cartouches filtrantes NBC et 200 masques NBC pour les pilotes d'hélicoptères ont été commandés par la marine depuis 1995 pour un coût de 40 MF. En outre, 3 700 tenues T3P interarmées sont approvisionnées depuis 1998 pour un montant de 4 MF. Pour ce qui concerne les moyens de détection, l'ancien radiamètre DOM 410 est actuellement remplacé par le modèle DOR 309 pour un coût de 6 MF. Cet appareil, en service sur le porte-avions Charles-de-Gaulle et le transport de chalands de débarquement Siroco, va être généralisé à tous les bâtiments de la marine. Les autres matériels (dosimètres, trousse de contrôle chimique) sont renouvelés au fur et à mesure des obsolescences et de l'évolution technologique. Les équipements de protection individuelle sont présentés à tous les marins pendant leur formation initiale, au cours d'une séance consacrée au port effectif du masque à gaz en chambre à air vicié. Cette séance, inscrite dans les objectifs de formation, est renouvelée lors du cursus de spécialité pour l'équipage et lors des stages de qualification sécurité pour les officiers. La partie NBC des cours de spécialité représente environ dix heures d'enseignement. Pour les spécialistes et animateurs de la sécurité, elle est effectuée pendant environ un tiers du temps d'instruction, qui varie de cinq à dix mois. Cette formation est mise en application et entretenue à bord des bâtiments à l'occasion d'exercices procédant de la mise en condition opérationnelle. La qualification opérationnelle prévoit semestriellement la réalisation de cinq exercices NBC ; équipement NBC du personnel, armement du sas de décontamination, mise en place d'une équipe d'investigation extérieure, mise en _uvre d'une équipe d'investigation intérieure, armement du poste de commandement NBC. De plus, chaque année il est demandé aux bâtiments d'opérer une prise de la situation d'étanchéité totale (citadelle) pendant au moins trente minutes. L'entretien des acquis de la formation s'effectue également dans les chambres à air vicié des centres d'entraînement à la sécurité de Toulon et de Brest.

3) Armée de l'Air : (...) Les stocks d'équipement de protection individuelle existants satisfont les besoins de projection. Leurs conditions de stockage et leurs dates de péremption font l'objet d'un suivi tout particulier. Les moyens de protection collective et de décontamination des bases sont, quant à eux, constitués de matériels mobiles stationnés en métropole et susceptibles d'être acheminés en opération extérieure en tant que de besoin. Il est prévu de mettre en place certains équipements qui sont actuellement au stade de développement ou d'expérimentation. Dans la mesure où tous les personnels sont susceptibles de participer à des opérations extérieures, les connaissances de base théoriques et pratiques sur les risques NBC, l'instruction sur les matériels de protection en service et les procédures en vigueur sont intégrées dans la formation initiale. Elles sont révisées régulièrement sur les bases aériennes dans le cadre de l'instruction militaire d'entretien hebdomadaire (moyenne annuelle de douze heures). Une instruction particulière est également organisée au profit des personnels susceptibles d'accomplir une mission en ambiance NBC, au titre de l'instruction professionnelle d'entretien exécutée dans les unités (moyenne annuelle de trente heures). Enfin, le Centre de formation des techniciens de sécurité de l'armée de l'air assure la formation des personnels spécialisés NBC chargés de mettre en _uvre les réseaux d'alerte et de commandement NBC, les équipements collectifs et d'instruire les personnels des bases aériennes (moyenne annuelle de vingt-deux heures). L'entraînement s'effectue au cours d'exercices particuliers. Il s'adresse à des personnels déjà instruits afin de les familiariser à l'application de procédures spécifiques leur permettant de survivre et d'accomplir certaines missions en ambiance NBC. Il suppose de pouvoir mettre en _uvre des systèmes d'armes à l'aide d'équipements adaptés, de connaître les risques dus aux différents agents et de savoir exécuter les procédures de décontamination. Enfin, des stages particuliers sont organisés au profit des personnels désignés pour participer à une opération extérieure »3.

On le voit donc, les armées ont pris en considération l'importance des moyens de lutte NBC. Tant les équipements matériels que les procédures ont été aménagés de manière à roder les forces aux contraintes opérationnelles de protection, lorsque ces dernières s'imposent.

2. Une préoccupation toujours nécessaire

Si la mission d'information constate avec satisfaction l'attention apportée aux mesures de protection individuelles et collectives contre le risque NBC, elle s'interroge néanmoins sur l'adéquation des moyens financiers qui sont accordés à cet effet.

Le tableau suivant retrace les autorisations de programme attribuées à l'armée de Terre pour ses équipements NBC.

ÉVOLUTION DES AUTORISATIONS DE PROGRAMME
DE L'ARMÉE DE TERRE
CONSACRÉES AUX ÉQUIPEMENTS DE PROTECTION NBC

Années

1997 (1)

1998 (1)

1999 (1)

2000 (1)

Equipements individuels de protection

26

144,2

87

49,41

Véhicule de l'avant blindé reconnaissance

7

5,2

6

11,86

TOTAL.

33

149,4

93

61,27

(1) En millions de francs.

Le ministère de la Défense fait valoir, dans la réponse à la question mentionnée précédemment, que « la baisse des crédits des équipements individuels de protection entre 1998 et 2000 est liée à la diminution des effectifs de l'armée de terre »4. On observera tout de même que cette réduction de crédits s'élève à 65,7 %, soit une proportion supérieure à la diminution des effectifs de l'armée de Terre du fait de la professionnalisation.

S'agissant de l'armée de l'Air, les crédits consacrés aux équipements individuels et collectifs de protection NBC ont respectivement représenté 16,5 millions de francs en 1998, 37,2 millions de francs en 1999 (dont une grande part a servi à financer la construction d'abris de protection), et 11 millions de francs en 20005. Là aussi, la tendance à la diminution était importante, de l'ordre de 70 % entre 1999 et 2000.

La mission d'information ne cache pas son inquiétude devant cette diminution de crédits qui ne peut manifestement pas s'interpréter du seul fait de la diminution des effectifs. On ne saurait que trop inviter le Gouvernement à rétablir un niveau de crédits satisfaisant dès à présent. La prévention et la protection contre les risques NBC comporte des incidences potentielles suffisamment graves pour ne pas faire les frais d'ajustements budgétaires. De même, l'acquisition de laboratoires mobiles d'analyse des gaz toxiques, à l'image des systèmes FOX américains, paraît nécessaire.

B. MIEUX CERNER LES RISQUES AFFÉRENTS AUX ARMES INCORPORANT DE L'URANIUM APPAUVRI

A l'évidence, la question des conséquences sanitaires de l'emploi de munitions à uranium appauvri n'a été largement évoquée en France que ces derniers mois. Certes, des études avaient été conduites auparavant, notamment au sein de différents services du ministère de la Défense (Délégation générale pour l'Armement, Service de protection radiologique des Armées...), mais celles-ci étaient restées confidentielles.

La mission d'information est convaincue que la sensibilisation des militaires aux risques d'emploi des munitions à uranium appauvri est indispensable. Pour ce faire, une bonne connaissance scientifique constitue un préalable nécessaire. L'acquisition d'appareils portatifs individuels incorporant des sondes sensibles aux rayonnements alpha, bêta et gamma est elle aussi à envisager, notamment dans la perspective d'une protection des militaires contre les « bombes sales », fabriquées à partir de déchets radioactifs.

1. Faire la part des choses sur les conséquences sanitaires des munitions à uranium appauvri

L'étude stratégique de long terme de l'US Army sur les pénétrateurs à énergie cinétique précitée6, en date de juillet 1990, apporte des précisions très importantes sur le degré de connaissance des risques sanitaires de l'emploi de munitions à uranium appauvri par les autorités militaires américaines. Il y est en effet indiqué, page 2-2 :

« Uranium appauvri : émetteur d'un faible niveau de radiation alpha qui conduit à des cancers quand les expositions sont internes, toxicité chimique causant des dommages au rein. Les risques pour la santé (de l'uranium) ont fait l'objet d'investigations extensives ».

Et cette étude d'ajouter, en page 4-5 :

« Nous réitérons notre recommandation de poursuivre les études sur la santé au combat et les effets environnementaux. (...) les expositions des soldats sur le champ de bataille aux aérosols d'uranium appauvri pourraient être significatives, avec de potentiels effets radiologiques et toxiques. (...) Nous soulignons simplement le potentiel des niveaux d'exposition des militaires durant le combat qui pourrait être inacceptable en temps de paix ».

On notera néanmoins que ce rapport ne faisait que rappeler l'état des connaissances scientifiques établies.

Pour sa part, la mission d'information a entendu de nombreux experts scientifiques. Tous se sont accordés à préciser que la dangerosité chimique de l'uranium appauvri dépendait fortement de plusieurs paramètres non maîtrisables, comme l'illustre ce passage de l'audition du Docteur Abraham Béhar, du Professeur Jean-François Lacronique et de M. Pierre Roussel, le 21 mars 2001 :

« Mme Michèle Rivasi, co-rapporteure : On a entendu un discours surprenant, en France, selon lequel l'uranium appauvri n'était pas dangereux. Je vais poser la question à chacun des experts. Quelle est votre opinion sur ce type de discours ?

M. le Docteur Abraham Béhar : Ce qui m'énerve le plus, ce sont les positions tranchées dans un domaine où les données ne le sont pas. Dire que l'uranium appauvri est ou n'est pas dangereux me paraît être une affirmation qui est à des années-lumière de la réalité.

Dans quel cas l'uranium appauvri est dangereux ou non ? Quand je saisis un morceau d'uranium appauvri comme je le fais avec mon stylo, le danger est quasi inexistant. L'uranium appauvri est-il inoffensif quand des éclats d'obus sont fichés dans le poumon, qui subira pendant de très longues années un bombardement alpha et bêta ? C'est contraire à tous les travaux expérimentaux réalisés.

La vraie réponse est celle que fait la CIPR. La toxicité dépend de la taille des particules, du type d'exposition etc. La vraie question est celle-là : dans quelles circonstances, l'uranium appauvri peut-il être dangereux ? Par conséquent, quelles sont les précautions à prendre dans ces circonstances précises ?

M. le Professeur Jean-François Lacronique : Je suis entièrement d'accord.

M. Pierre Roussel : J'ai là un livre intitulé : "Radionucléides, radioprotection". Ce livre, édité par le CEA, donne les consignes pour la manipulation des différents radionucléides. Il donne en particulier les activités maximales manipulables dans différentes conditions. Par exemple, pour les oxydes insolubles d'uranium manipulés sous une sorbonne en zone contrôlée (le public n'y a pas accès), on trouve 200 000 Becquerels (environ 20 grammes). Mais ce chiffre est établi pour le produit sous forme de masse compacte avec un "facteur de pondération" f de 0,001. Pour le même produit en poudre, de diamètre inférieur à 5 microns, la valeur f est de 1 et la quantité manipulable est divisée par 1000 ; on passe de 20 grammes à 20 milligrammes. Je crois que cette observation conforte les propos du Docteur Béhar ».

La réflexion du Docteur Béhar quant aux circonstances de l'exposition est importante, notamment dans une perspective de prévention des risques. En effet, la situation de soldats manipulant des munitions incorporant de l'uranium appauvri est toute différente de celle de militaires à proximité d'une cible tout juste atteinte par ces mêmes munitions.

Dans la mesure où il est difficile d'anticiper les circonstances d'exposition de nos soldats, il apparaît nécessaire de leur prodiguer à tous, une formation visant à les sensibiliser aux risques potentiels, sous la forme, par exemple, d'un séminaire d'une journée ou bien de l'envoi d'une plaquette d'information. Afin d'en garantir la totale objectivité, cette formation pourrait être assurée par des spécialistes de la radioprotection.

Il y va de l'intérêt de nos armées, alors même que celles-ci achèvent leur professionnalisation et se préoccupent de fidéliser les personnels recrutés.

2. Faut-il imposer un moratoire sur l'emploi de ces munitions ?

Le 17 janvier 2001, le Parlement européen a adopté une résolution demandant, en son paragraphe n° 6, « aux Etats membres faisant partie de l'OTAN de proposer un moratoire sur l'utilisation d'armes à uranium appauvri en application du principe de précaution », et invitant, en son paragraphe n° 7, « l'OTAN à envisager d'autres types de munitions jusqu'au moment où les résultats des enquêtes sur l'uranium appauvri seront connus »7. En revanche, la proposition d'interdiction de fabrication et d'essai de ces armements a été rejetée.

Expert entendu par les parlementaires européens, le Docteur Abraham Béhar s'est fait l'avocat de la démarche d'un moratoire auprès de la mission d'information :

« La résolution qui a été largement votée par le Parlement européen me paraît très utile pour l'ensemble des Parlements nationaux. Il me semble que c'est une résolution modérée, réaliste, très prudente, qui n'affirme rien de façon péremptoire, mais qui termine sur une notion très importante et qui devrait ici vous toucher tous : il s'agit de l'idée que les armes nouvelles représentent, bien après la fin du conflit, un héritage de long terme sur le terrain, pour les civils. Ces nouvelles armes posent le même problème que les mines antipersonnel qui, une fois la guerre terminée, causent des dommages sur les civils. Je voudrais ici souligner le courage du Parlement européen, qui, précisément, a demandé un moratoire sur cette question que les parlementaires européens italiens ont appelé « la guerre écologique ». Il s'agit là d'une réflexion qui pourrait être très utile pour vos travaux ».

Le Ministre de la Défense, M. Alain Richard, a eu l'occasion de faire valoir la position du Gouvernement, en réponse aux questions posées par le Président de la Commission de la Défense de l'Assemblée nationale, M. Paul Quilès, et le Président du groupe parlementaire Démocratie Libérale et Indépendants, M. Jean-François Mattéi, lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement qui s'est tenue le 10 janvier 2001 :

« Nous maintenons notre position qui est de ne pas utiliser ces munitions dans les opérations dans lesquelles nous sommes engagés. C'est une position nationale, comme c'est la règle pour l'emploi des armes lorsqu'il n'y a pas de convention internationale de limitation.

[...] Je vous confirme également que la France détient en quantité limitée de telles munitions pour nos chars, dans l'éventualité où nous aurions à nous confronter à une bataille de chars de haute intensité. En revanche, elle n'en fabrique pas.

En ce qui concerne les décisions de limitation de recours à une arme, la France a une doctrine traditionnelle que je crois légitime et qui consiste à rechercher un consensus international de manière qu'une telle décision de limitation, quand elle est scientifiquement fondée, soit appliquée partout »8.

On observera tout de même que la Société industrielle des combustibles nucléaires a livré 6 559 flèches en uranium appauvri à Giat Industries entre 1995 et 1999, pour le développement et la constitution de stocks d'obus à uranium appauvri. Le détail de ces livraisons est fourni dans le tableau suivant. Il convient toutefois de préciser que la flèche en uranium appauvri ne constitue pas par elle-même l'obus puisqu'il est nécessaire de l'associer à un sabot, assemblage réalisé par Giat Industries. Ce n'est qu'au terme de ce processus industriel que l'on peut considérer comme opérationnelles ce type de munitions.

LIVRAISONS DE FLÈCHES EN URANIUM APPAUVRI
À GIAT INDUTRIES PAR SICN

 

1995
(développement)

1996
(développement)

1997
(qualification)

1998
(série)

1999
(série)

Obus flèche 120 mm

200

104

1 560

60

 

Obus flèche 105 mm

15

11

   

4 541

Obus flèche 140 mm

8

24

     

Divers

36

-

     

TOTAL

259

139

1 560

60

4 541

Source : SICN, 20 mars 2001.

Au demeurant, la position française se justifie par le caractère fortement improbable du renoncement des Etats-Unis à employer ce type de munitions. Il n'est pas inutile, à cet égard, de rappeler que la France n'a pas utilisé d'obus à uranium appauvri au cours de la guerre du Golfe, seules les forces américaines et, dans une moindre mesure, britanniques y ayant eu recours.

Cependant, l'argument de ne pas s'interdire l'emploi de ces munitions dans une perspective défensive doit être relativisé, dans la mesure où des obus au tungstène produisent un effet similaire à ceux qui incorporent de l'uranium appauvri, sans néanmoins comporter les mêmes conséquences sanitaires.

En définitive, si la proposition d'un moratoire sur l'utilisation d'armes à uranium appauvri peut se comprendre au regard des incidences sanitaires potentielles pour les populations et l'environnement, celle d'une révision de la politique d'acquisition d'armes antichars, dans l'hypothèse où la dangerosité des obus à uranium appauvri serait scientifiquement démontrée, a une tout autre portée.

Si la mission d'information a pris bonne note de l'écart de coût entre un obus antichar dont l'ogive est constituée de tungstène et un obus antichar à base d'uranium appauvri, elle ne considère pas pour autant qu'il faille s'en tenir à des considérations économiques pour refuser de réviser la politique d'approvisionnement des armées en munitions antichars, dans l'éventualité où il aurait été scientifiquement démontré que les effets des munitions à uranium appauvri s'avéreraient trop néfastes pour nos soldats, les populations civiles et l'environnement.

III. - REVOIR LES MODALITÉS DE COMPENSATION ET D'AIDE FINANCIÈRES

La réparation des infirmités, handicaps ou maladies contractés lors de l'exercice de leur fonction par les hommes et femmes qui se sont engagés sous les drapeaux pour le service de la nation est un dû de la République que chacun s'accorde à reconnaître.

Aux termes de l'article L.1 du code des pensions militaires d'invalidité :

« La République française, reconnaissante envers les anciens combattants et victimes de la guerre qui ont assuré le salut de la patrie, (...) proclame et détermine, conformément au présent code, le droit à réparation due :

1° Aux militaires des armées (...) affectés d'infirmités résultant de la guerre ;

2° Aux veuves, aux orphelins et aux ascendants de ceux qui sont morts pour la France ».

Support juridique essentiel, avec le guide des barèmes des invalidités, de la compensation matérielle des atteintes physiques subies en service par les militaires français, ce code a été adopté peu après la Première guerre mondiale. Amendé à plusieurs reprises pour tenir compte des évolutions de la connaissance scientifique et médicale, ses principes fondateurs peuvent parfois paraître inadaptés face à des situations de conflit nouvelles. Certaines pathologies lourdes, dont se plaignent notamment un certain nombre d'anciens combattants de la guerre du Golfe, en constituent un exemple révélateur.

Est-ce à dire qu'il faille revoir de fond en comble le système actuel ? Rien n'est moins sûr, de l'avis même du monde combattant. Pour autant, la mission d'information n'exclut pas que des ajustements ponctuels puissent y être apportés, de manière à corriger certaines incohérences d'autant plus préjudiciables que les armées entrent dans une phase de pérennisation de leur professionnalisation. Celle-ci implique en effet que les personnels engagés aient la certitude d'être couverts pour les risques qu'ils encourent soit sciemment (c'est-à-dire les risques liés à l'usage des armes), soit indirectement (du seul fait de leur engagement, à l'image des interrogations qui concernent la guerre du Golfe et les opérations menées dans les Balkans).

A. UN DISPOSITIF EN VIGUEUR SOUPLE MAIS IMPARFAIT

Au cours de son audition par la mission d'information le 6 février 2001, M. Jean-Pierre Masseret, Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants, a insisté sur la souplesse du droit applicable en matière de pensions et indemnisations des militaires :

« Le code des pensions militaires d'invalidité ne mentionne pas les infirmités ou les maladies susceptibles d'être indemnisées. C'est le guide barèmes des invalidités qui fait état de listes d'affections indemnisables, à titre indicatif. Dans ce document, actualisé autant que de besoin, sont pris en compte les cancers depuis 1990, voire même le Sida : s'il s'avère qu'un militaire blessé a été contaminé par le Sida à la suite d'une transfusion sanguine, cela est pris en compte au titre du code des pensions militaires d'invalidité ! C'est un instrument extraordinairement large et complètement ouvert. Il s'agit simplement de prouver le lien de cause à effet entre le fait d'être engagé à tel endroit et la maladie qui survient.[...]

Dans ce propos liminaire, je souhaite faire la démonstration qu'il n'est pas nécessaire de modifier le code des pensions militaires d'invalidité pour permettre la reconnaissance de ce que l'on appelle les "syndromes du Golfe et des Balkans" et faciliter l'indemnisation de la personne concernée, selon des procédures plus ou moins longues ».

Sans chercher à remettre en cause cette analyse, la mission d'information considère néanmoins que certaines dispositions de ce mécanisme posent problème, soit parce qu'elles pénalisent la satisfaction des réclamations des ayants droit par une procédure trop lourde et complexe, soit parce qu'elles excluent un peu rapidement la présomption d'imputabilité pour les cas où la preuve est la plus difficile à établir.

1. Une procédure d'examen des droits à pension lente et pesante

L'établissement des droits à pension relève d'un processus juridique long, notamment en raison des multiples recours possibles, tant pour la personne déboutée que pour l'administration.

La mission d'information s'interroge à ce sujet, dans la mesure où ces pesanteurs peuvent constituer une source de découragement (perçue parfois même comme de la déconsidération) pour des anciens combattants se trouvant dans des situations physiques et matérielles parfois difficiles. Une simplification des procédures serait sans doute bienvenue.

a) L'instruction

L'instruction de la demande de pension se subdivise en deux phases : une instruction administrative et une instruction médicale.

L'instruction administrative vise à réunir tous les éléments de fait propres à établir le droit à pension. Il s'agit :

- de déterminer les affections pour lesquelles la pension est demandée ;

- de se procurer les documents relatifs aux faits de service qui interviendront dans l'appréciation de l'imputabilité de ces affections.

La complexité du cadre juridique et la diversité des sources d'archives font que c'est l'administration qui effectue toutes les recherches utiles à partir des indications fournies par le demandeur.

L'instruction médicale, quant à elle, consiste à recueillir des éléments médicaux d'appréciation. Elle est dirigée par le Médecin chef du centre de réforme de la direction régionale des Anciens combattants concernée, à qui le dossier est remis à l'issue de l'instruction administrative. Elle est effectuée par les médecins-experts de l'administration, agréés et rémunérés par elle.

Le Médecin chef du centre de réforme procède :

- à la désignation du ou des médecins-experts qui examinent le dossier et le candidat à pension, afin de décrire les affections concernées, d'apprécier leur gravité et de conclure sur leur imputabilité au service ;

- à la vérification des conclusions de l'expert : le Médecin chef peut, s'il estime que l'expertise ne l'éclaire pas suffisamment, demander des expertises complémentaires ;

- à la rédaction des propositions de décisions qui seront notifiées aux demandeurs.

Si les propositions de l'administration ne conviennent pas aux demandeurs, ces derniers peuvent saisir une commission de réforme. Celle-ci intervient comme un échelon facultatif et peut émettre un avis contraire aux propositions du Médecin chef du centre de réforme, voire même demander des expertises complémentaires.

La commission consultative médicale, quant à elle, est obligatoirement consultée avant toute décision impliquant la reconnaissance de droits importants, soit quant au montant de la pension qui sera accordée, soit en raison de considérations de doctrine médicale. Son avis est presque toujours suivi.

En ce qui concerne la liquidation du droit à pension, M. le Commissaire général Xavier Rouby, directeur des Statuts et des Pensions, a apporté une précision importante au cours de l'audition du Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants :

« Aucune avance n'est versée dans le cadre de la procédure d'instruction normale. La pension une fois accordée est ensuite versée à titre rétroactif depuis la date de la demande. Si l'instruction du dossier a duré un an, cela donne lieu à un rappel d'un an ».

b) La décision

Les dossiers de pension suivent un parcours différent selon qu'ils concernent des militaires de carrière (la décision est alors prise par le Service des pensions des Armées à La Rochelle) ou des anciens combattants (l'autorité compétente est alors le directeur régional des Anciens combattants).

Deux catégories de décisions peuvent être prises : une décision de rejet ou une décision de concession de pension.

Les décisions de rejet sont signées par le directeur régional des Anciens combattants ou le chef du Service des pensions des Armées, sur proposition du Médecin chef du centre de réforme (proposition qu'ils sont tenus de suivre). En cas de désaccord avec ce dernier, ils peuvent saisir la commission consultative médicale.

En cas de concession de pension, les éléments d'appréciation du droit sont transmis au Service des pensions du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, à Nantes. La pension est alors établie et notifiée au bénéficiaire, à moins que le chef du service en question ne réclame un nouvel examen du droit à pension.

c) Le contentieux

Des juridictions d'exception ont été mises en place pour traiter les contentieux ouverts contre les décisions administratives prises en matière de pensions militaires d'invalidité.

Les tribunaux départementaux des pensions, juridictions de première instance, sont composés d'un magistrat professionnel, d'un médecin privé et d'un Ancien combattant tiré au sort.

Les cours régionales des pensions, qui statuent en appel, sont composées de trois magistrats de cours d'appel.

La cassation des arrêts est assurée par la commission de cassation des pensions du Conseil d'Etat.

Les contestations portées devant les juridictions des pensions relèvent du plein contentieux : les juridictions ne se bornent pas à annuler ou confirmer les décisions administratives ; elles attribuent des droits à pension. Ainsi, elles se prononcent aussi bien sur la question de l'imputabilité que sur l'étendue des droits reconnus, notamment à travers la fixation du taux d'invalidité.

Pour fonder leurs décisions, ces juridictions ont recours aux experts judiciaires inscrits, le plus souvent des médecins libéraux ou des experts des hôpitaux publics, voire même de facultés de médecine.

Il est fréquent que les Cours régionales, en appel, fassent procéder à une nouvelle série d'expertises, qui s'ajoutent à celles diligentées par le tribunal départemental en premier ressort.

Néanmoins, à partir du moment où le tribunal départemental a accordé un droit à pension, le bénéficiaire peut jouir d'une allocation provisoire d'attente jusqu'à l'issue des recours éventuels de l'administration. C'est du moins ce qu'a affirmé M. le Commissaire général Xavier Rouby, directeur des Statuts et des Pensions, lors de l'audition du Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants :

« (...) si un individu qui n'a pas obtenu satisfaction dans le cadre d'une demande de pension, a porté son dossier au contentieux au plan départemental, et que le tribunal des pensions lui a donné satisfaction, il a la possibilité de demander une allocation provisoire d'attente si l'administration va en appel. S'il est débouté lors de cet appel, il devra la rembourser ».

d) Un processus long et complexe

Les démarches à la charge des demandeurs de pensions militaires d'invalidité sont marquées par la lenteur.

Le schéma ci-après, qui illustre la complexité du système en place, explique pour une large part l'étalement des procédures.

M. Jean-Pierre Masseret, Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants, en a lui-même convenu devant la mission d'information :

« Quant à la procédure, elle reste effectivement longue et difficile. Si on considère le dépôt de la première demande de pension, l'instruction administrative et médicale, les avis consultatifs, la décision éventuelle de la commission de réforme, les interventions de la commission consultative médicale, des experts et contre-experts, du tribunal départemental, l'appel et la cassation, un délai d'un an paraît être le minimum de temps nécessaire au traitement des dossiers, pour un système qui reste néanmoins protecteur ».

D'ailleurs, à en juger les propos tenus par M. Laurent Attar-Bayrou, Président de la Fédération nationale des Anciens des Missions Extérieures, le délai moyen d'aboutissement des demandes semblerait se rapprocher d'une durée de deux ans, puisque :

« Pour une première instance, il faut deux ans avant de toucher une pension ».

LE PROCESSUS D'ATTRIBUTION DES PENSIONS D'INVALIDITÉ

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RÉCEPTION ET ENREGISTREMENT DE LA DEMANDE DE PENSION, CONSTITUTION
DU DOSSIER

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De fait, les possibilités de recours offertes à chaque stade de l'examen des requêtes, si elles se justifient pour les demandeurs, ne sont peut-être pas toujours fondées pour l'administration, dans la mesure où celle-ci, une fois qu'elle a déjà fait valoir son point de vue et s'est vue déboutée, ne saurait exciper de recours ultérieurs avec une faible probabilité d'obtenir cette fois-ci gain de cause sur les mêmes fondements sans retarder davantage l'issue de la procédure.

En effet, est-il besoin de rappeler que le Médecin chef du centre de réforme peut procéder à des contre-expertises, que le directeur régional des Anciens combattants peut décider de saisir la commission médicale consultative s'il ne souhaite pas suivre l'avis éclairé du Médecin chef du centre de réforme, et que le chef du Service des pensions du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie peut demander à procéder à un nouvel examen du droit à pension avant, éventuellement, que l'administration se porte au contentieux ?

La mission d'information ne conteste pas l'utilité des recours administratifs internes. Elle s'interroge néanmoins sur l'intérêt d'un aussi grand nombre de voies de contestation, notamment lorsqu'il s'agit de la décision d'attribuer des compensations de revenu à des anciens combattants qui ont servi la France.

A titre de recommandation, il semblerait que la suppression de la possibilité pour le chef du Service des pensions du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie de demander à procéder à un nouvel examen du droit à pension serait de nature à abréger quelque peu la procédure sans fondamentalement porter atteinte aux intérêts de l'Etat. En effet, à partir du moment où les centres de réformes et les directions régionales des Anciens combattants mènent une instruction des dossiers rigoureuse, on ne voit pas pourquoi le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie doit être en mesure de s'opposer à leurs conclusions, si ce n'est pour réaliser d'hypothétiques économies au détriment de la rapidité des procédures d'octroi des pensions.

Cette voie de recours semble donc pouvoir être supprimée, abrégeant ainsi, certes de manière modeste et pour un nombre limité de cas, le parcours, déjà difficile, de personnes dévouées à la nation et qui cherchent avant tout à faire reconnaître leurs droits.

2. Des critères d'imputabilité restrictifs

Pour ouvrir droit à pension, une infirmité ou maladie doit avoir été causée ou aggravée par le service. Cette imputabilité n'existe qu'à deux conditions : l'une de temps et de lieu ; l'autre de relation avec le service. La jurisprudence du Conseil d'Etat ne manque jamais d'examiner l'existence des deux conditions légales. Le constat de l'absence de l'une d'elles suffit à écarter l'imputabilité au service et donc le droit à pension.

Le problème tient au fait que ces critères, s'agissant notamment du déclenchement de maladies, s'avèrent particulièrement rigoureux, quand bien même le code des pensions militaires s'avérerait suffisamment flexible pour prendre en compte toute évolution médicalement constatée.

a) Des conditions juridiques encadrées et délimitées

Le code des pensions militaires d'invalidité prévoit deux modes d'imputabilité au service des infirmités ou maladies.

L'imputabilité par preuve est définie par l'article L.2 du code. Les « infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents » et les « infirmités résultant de maladies contractées » ouvrent droit à pension dès lors que le demandeur aura apporté la preuve :

- de la réalité d'un fait précis de service, par tous moyens ;

- du lien de cause à effet certain, direct et le cas échéant déterminant, entre le fait précis invoqué et l'affection fondant la demande.

En conséquence, les autorités médicales ou administratives en charge de l'instruction doivent écarter tous les éléments appuyant l'argumentaire du demandeur uniquement sur la base de probabilités ou de vraisemblances, même fortes.

L'imputabilité par présomption, quant à elle, est prévue par l'article L.3 du code, à condition :

« 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ;

2° S'il s'agit de maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le trentième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ;

3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée ».

Cette seconde catégorie est plus favorable au demandeur, dans la mesure où il ne peut se voir refuser de droit à pension que si l'administration apporte la preuve de l'absence de lien entre l'affection subie et le service sous les drapeaux.

Cependant, la condition de délai fixée par l'article L.3 du code des pensions militaires d'invalidité est restrictive. M. Jean-Pierre Masseret, Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants a d'ailleurs reconnu son caractère daté et limité :

« Ce délai de trente jours découle d'une époque où les maladies qui se révélaient étaient des maladies à déclenchement rapide ».

En fait, dans l'hypothèse de forclusion des délais pour l'apparition des symptômes de la maladie, hypothèse dont relèvent de nombreux anciens combattants de la guerre du Golfe se plaignant de pathologies diverses, le régime d'imputabilité change : l'imputabilité par preuve succède à celle par présomption.

C'est ce qu'à confirmé à la mission d'information le Commissaire général Xavier Rouby, directeur des Statuts et des Pensions :

« Lorsqu'il est dit que la maladie doit être reconnue dans les quatre-vingt-dix jours du début du conflit ou dans les trente jours suivant la fin du conflit, cela signifie que si la maladie se déclenche pendant ce délai, elle est automatiquement présumée imputable. Néanmoins cela ne signifie pas que si ce délai des trente jours est dépassé, il n'y a aucune possibilité d'indemnisation. Dans ce cas, l'intéressé lui-même doit prouver l'imputabilité de sa maladie au service, alors que dans l'autre cas de figure, c'est à l'administration de prouver le contraire ».

Or, il faut bien reconnaître que cette inversion de la charge de la preuve a des incidences très préjudiciables. En effet, en l'état actuel des connaissances scientifiques et médicales, il est très difficile de prouver le lien entre la survenance de certaines pathologies lourdes, telles des lymphomes ou des leucémies, avec des conditions d'engagement telles que celles de la guerre du Golfe, de sorte que les anciens combattants les plus gravement malades se retrouvent dans une situation matérielle des plus précaires.

Par répercussion, étant entendu que le montant de la pension n'est liquidé qu'une fois la maladie « consolidée », plus celle-ci tarde à se déclarer, plus la reconnaissance du droit à pension est difficile à obtenir, et donc plus les anciens combattants malades (voire même leurs ayants droit) sont susceptibles de ne pas pouvoir bénéficier d'une réparation légitime.

Au cours de l'audition du Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants, la mission d'information a mis en évidence ce problème qui, visiblement, n'a pas été envisagé à ce jour par les pouvoirs publics, comme l'illustre cet extrait du procès verbal de la séance du 6 février 2001 :

« M. le Commissaire général Xavier Rouby : Pour qu'une pension soit accordée, la maladie doit être stabilisée.

Mme Michèle Rivasi, co-rapporteure : Stabilisée, cela veut-il dire identifiée ? Qu'est-ce que cela signifie exactement ?

M. le Commissaire général Xavier Rouby : On indemnise les séquelles d'une maladie. Mais tant que la maladie est évolutive, c'est le problème de la consolidation.

M. Jean-Pierre Masseret, Secrétaire d'Etat : (s'adressant à M. le Commissaire général Xavier Rouby) Prenons le cas d'un cancer, maladie à évolution plus ou moins lente, à quel moment peut-on considérer qu'il est consolidé, s'il apparaît qu'il y a un lien de cause à effet entre le cancer et l'engagement d'un militaire ?

[...] M. le Commissaire général Xavier Rouby : Il faut toujours tenir compte de la date initiale de la demande de pension. Imaginons le cas d'une personne qui dépose une demande de pension et qui, durant l'instruction du dossier, développe une maladie grave et décède : s'il est admis par expertise que la maladie est imputable au service, une pension sera versée à cette personne entre le moment du dépôt de sa demande de pension et la date de son décès ; ensuite sa veuve percevra la réversion.

[...] M. Bernard Cazeneuve, Président : Sans être devin, je peux imaginer les situations auxquelles nous allons être confrontés dans un certain nombre de mois : des veuves de militaires décédés, qui n'ont pas déposé de dossiers, feront des demandes reconventionnelles en expliquant à votre ministère que leurs époux sont décédés en raison de leur implication dans le conflit.

M. Jean-Pierre Masseret, Secrétaire d'Etat : Mais les médecins auront démontré la causalité.

M. Bernard Cazeneuve, Président : La causalité ne sera établie que très a posteriori, au terme des longs travaux épidémiologiques notamment menés par le Professeur Salamon. Les pouvoirs publics, les Ministres, les institutions administratives seront confrontés à une situation très difficile face à des demandes reconventionnelles.

M. Claude Lanfranca, co-rapporteur : Cela pourrait rejoindre l'affaire du sang contaminé.

M. Bernard Cazeneuve, Président : Tout à fait. Dans le cadre de la mission qui nous est confiée, nous souhaitons, en tant que parlementaires, ayant anticipé ces problèmes, formuler des propositions qui soient suffisamment responsables pour pouvoir embrasser l'ensemble des cas pratiques et, en même temps, suffisamment précises pour pouvoir traiter ces cas dès lors que leur réalité aura été établie. (...)

J'aimerais que vous puissiez nous dire comment vous avez anticipé cette situation et éventuellement envisagé les choses, sur le plan méthodologique.

M. Jean-Pierre Masseret, Secrétaire d'Etat : Il est clair que nous n'avons pas anticipé notre action possible sur cette question que nous découvrons ensemble. C'est le problème de la consolidation qui nous a amenés à cette réflexion. Le problème posé est : comment congeler des droits virtuels, en quelque sorte ? On bloquerait un droit de tirage dont une "personne" pourrait bénéficier au bout d'un certain laps de temps, y compris après son décès. Je ne suis pas en mesure de développer une réponse construite sur ce sujet. J'intègre néanmoins cette question dans ma réflexion ».

En conséquence, il est manifeste que certaines situations échappent aux dispositifs prévus par le code des pensions militaires d'invalidité, notamment du fait de l'inversion de la charge de la preuve (l'ouverture des droits à pension s'en trouvant plus difficile pour les victimes de pathologies cancéreuses à déclenchement tardif et à développement rapide, ainsi que pour leurs familles).

b) La souplesse relative du code des pensions militaires d'invalidité

Dispositif législatif, le code des pensions militaires d'invalidité n'est pas resté immuable depuis la loi du 31 mars 1919. Il a subi diverses améliorations législatives. De surcroît, ses principes sont restés suffisamment larges pour couvrir un certain nombre de situations nouvelles afférentes notamment aux maladies contractées par les anciens combattants, sous réserve que soit modifié le guide des barèmes des invalidités (détaillant quant à lui de façon concrète les cas envisageables afin de déterminer le calcul des pensions).

Tel est du moins, en substance, l'argumentaire qu'a développé devant la mission d'information M. Jean-Pierre Masseret, Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants :

« (...) selon les évolutions de la connaissance scientifique et médicale, le dispositif du code des pensions militaires a subi diverses modifications ou adaptations et, d'ores et déjà, le délai de présomption peut être plus long. Par exemple, s'agissant de la tuberculose pulmonaire, le délai, dans certaines conditions, est de dix ans. S'agissant des affections gastro-intestinales, il est de huit ans ; en ce qui concerne les colites, il est de dix ans ; s'agissant enfin des ulcères gastriques du duodénum, des affections rhumatismales, des spondylarthrites ankylosantes et polyarthrites chroniques évolutives, il est de quatre ans ».

Et M. Jean-Pierre Masseret d'ajouter :

« J'ai cité tout à l'heure, selon notre barème, diverses maladies dont l'imputabilité n'est pas limitée à trente jours, certaines allant jusqu'à huit voire dix ans. Sur ce point, je vous fais part de mon opinion toute personnelle. Si des scientifiques et des médecins déterminent qu'à une exposition donnée - uranium appauvri, benzène, etc. -, peuvent y être associées des maladies et que ce type de maladies peut se développer en dix ou douze ans, cela s'inscrit parfaitement dans le code des pensions militaires. En revanche, on peut indiquer dans le guide des barèmes des invalidités que tel concours de situations peut révéler telle maladie dont le délai de déclenchement est de tant. C'est pourquoi je dis que le code des pensions militaires d'invalidité est très souple car les blessures, les handicaps et les maladies sont présentés en termes génériques et très larges, sans jamais être décrits ».

On observera néanmoins que le code des pensions militaires d'invalidité n'intègre des variations de délais dans l'application de la présomption d'imputabilité, qu'une fois que les maladies pouvant résulter de certaines expositions des militaires ont été scientifiquement reconnues et non à titre conservatoire. C'est à la lumière de ce constat que la souplesse du code se heurte au problème de la « consolidation » des maladies, soulevé précédemment.

Compte tenu des incertitudes qui subsistent sur le plan médical en ce qui concerne les pathologies dont se plaignent les anciens combattants de la guerre du Golfe (de même que certains militaires engagés dans les Balkans), cette absence d'anticipation des difficultés par le dispositif applicable pose problème et démontre les limites de sa flexibilité.

B. DES AMÉLIORATIONS POSSIBLES

Ayant soulevé un certain nombre de difficultés rencontrées ou susceptibles de l'être par les anciens combattants de la guerre du Golfe (et même des Balkans), la mission d'information souhaite formuler quelques recommandations, comme il est de son rôle, afin d'y pallier.

A cet égard, les exemples étrangers, notamment américain et britannique, sont riches en enseignements et méritent que l'on s'y réfère.

1. Examiner avec bienveillance les demandes de pensions d'invalidité des soldats atteints

Sur les quelque 26 000 soldats français engagés dans la guerre du Golfe, seulement 200 dossiers de demandes de pensions ont été transmis à ce jour aux services du Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants. Au 15 janvier 2001, 83 demandes ont été rejetées et 117 pensions accordées à des militaires, dont 101 pour séquelles de blessure et 16 pour maladie. Les taux d'invalidité s'échelonnent entre 10 et 100 %.

M. Jean-Pierre Masseret a précisé à ce sujet :

« Parmi les maladies, on relève une tuberculose, des amibiases, des névroses, des hépatites C, des bouffées délirantes, des ulcères, des symptomatologies anxieuses et des décompensations anxieuses, du diabète. Les névroses traumatiques et les psycho-syndromes de guerre, qui sont considérés comme des blessures, sont au nombre de dix, soit environ 10 % de psycho-traumatisés sur l'ensemble des dossiers retenus ».

La mission d'information constate néanmoins que les cas de troubles psychologiques (directement liés au conflit ou déclenchant des déficiences fonctionnelles) ne représentent qu'une petite partie des dossiers qui ont abouti à l'octroi de pensions. Tel est du moins l'élément qui ressort de cet extrait du procès verbal de l'audition du Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants :

« M. Claude Lanfranca, co-rapporteur : S'agissant du caractère d'imputabilité et de cause à effet, un militaire peut rentrer d'une opération extérieure et présenter un syndrome post-traumatique, tout en réussissant plus ou moins à conserver son équilibre. Survient un facteur déclenchant tel que la perte d'un proche ou un accident qui le fait tomber dans la dépression. On considère que l'incident est un facteur déclenchant, mais non pas la cause. Sur le total des dossiers déposés, est-il exact qu'il y ait moins de dix pensionnés pour troubles traumatiques dans le syndrome du Golfe ?

M. Jean-Pierre Masseret, Secrétaire d'Etat : Vos chiffres sont exacts. (...) ».

A titre comparatif, selon les chiffres qui ont été communiqués par l'Unité sur les maladies des anciens combattants de la guerre du Golfe (GVIU) du Ministère britannique de la Défense (MoD) à la délégation de la mission d'information qui s'est rendue à Londres le 7 février 2001, 3 348 des 53 462 militaires du Royaume-Uni déployés du 1er septembre 1990 au 30 juin 1991 ont déposé un dossier de demande de pension ; 1 105 de ces dossiers se fondent sur le « syndrome du Golfe ». Le nombre de pensions obtenues s'élève à 2 900, 938 cas ayant excipé dudit syndrome. Par ailleurs, 1 857 procédures ont été engagées devant les tribunaux civils pour négligence, dont 212 concernent des enfants.

Aux Etats-Unis, le département des Anciens combattants (Veteran affairs) a enregistré quelque 100 000 demandes, dont plus 15 000 se fondent sur des symptômes inexpliqués.

De fait, quand bien même l'ampleur de l'engagement français était sans comparaison avec celui des Américains et deux fois moindre de celui des Britanniques, on ne peut exclure que certains dossiers de demande de pension n'aient pas été présentés par certains anciens combattants français de la guerre du Golfe, soit pour des raisons culturelles (la peur d'avouer des troubles physiques dégradants), soit pour des raisons procédurales (le découragement face aux longues démarches à entreprendre). Il doit néanmoins s'agir d'un nombre de cas assez faible, car, comme l'a souligné le Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants :

« Au point de vue statistique, l'armée française compterait moins de malades que d'autres armées. Ont été évoqués, pour les soldats américains, des vaccins, des insecticides, des conditions d'engagement dans des situations géographiques différentes, etc...

J'observe que nos soldats sont parfaitement informés de leurs droits. Les personnels engagés dans la guerre du Golfe ont bénéficié d'un suivi médical avant, pendant et au retour. M. Alain Richard, Ministre de la Défense, s'est d'ailleurs exprimé sur ce sujet auprès du Service de santé des Armées afin qu'il accepte aujourd'hui toute demande.

Au regard de la médiatisation de cette question depuis un certain temps déjà, nous aurions dû recevoir quantité de dossiers. Or, à ma connaissance, il n'y a pas eu une avalanche de dossiers. J'en déduis donc que les militaires n'éprouvent pas le besoin de se voir reconnaître une maladie dont ils ne souffrent pas ».

Il n'empêche que les dossiers d'anciens combattants de la guerre du Golfe présentant des pathologies lourdes qui viendraient à être déposés ultérieurement doivent être étudiés avec bienveillance et intérêt. D'ailleurs, le Général d'armée Maurice Schmitt, ancien Chef d'Etat-major des Armées, a insisté sur la nécessité d'envisager les demandes d'anciens combattants de la guerre du Golfe se plaignant de pathologies diverses et inexpliquées en leur accordant le bénéfice du doute :

« Vous le concevez, le point délicat, c'est le lien avec le conflit. Il y a, en effet, des cas où les affections sont sensiblement identiques pour tous les intéressés. On peut alors parler de syndrome. Il peut également s'agir de situations très diverses et là - mais ce n'est qu'un avis - je pense qu'il convient de les traiter au cas par cas. Avant de terminer sur ce point, je dirai - et il s'agit là encore d'un point de vue personnel -, que s'il y a doute, il devrait bénéficier au demandeur. Ce sont toutefois les juges et les experts du tribunal des pensions qui sont indépendants à qui il revient de décider en dernier ressort ».

La mission d'information s'associe pleinement à cette préoccupation.

2. Revoir les critères d'attribution des pensions d'invalidité en faveur des anciens combattants de la guerre du Golfe

Le code des pensions militaires d'invalidité fait l'objet d'un consensus de la part du monde combattant. Il n'en demeure pas moins que certaines imperfections peuvent être corrigées. A cet égard, la situation des anciens combattants de la guerre du Golfe peut servir à l'amélioration, à titre précurseur, d'un dispositif essentiel dans la démarche de fidélisation des recrues professionnelles des armées.

a) Les solutions américaines

La législation américaine, le Veterans Programs Enhancement Act du 11 novembre 1998 plus précisément, prend en considération le cas des anciens combattants de la guerre du Golfe qui se disent victimes de pathologies liées à leur service. Un suivi médical gratuit leur est accordé dès lors qu'est établie une relation entre leurs conditions d'engagement et la survenance de leurs maladies. Dans le cas contraire, les frais de médication sont à la charge des malades, en tout ou partie.

S'agissant des compensations financières, les vétérans américains malades ou infirmes en raison de leur participation au conflit contre l'Irak sont éligibles à des pensions versées par le département des Anciens combattants. La législation en vigueur étend le régime de l'imputabilité au service par présomption (et non par preuve) aux anciens combattants qui se plaignent de pathologies chroniques ou inexpliquées apparues à leur retour du Golfe, et dont la liste est la suivante : fatigue chronique ; douleurs musculaires ; maux de tête ; pertes de mémoire ; ulcérations de peau ; diarrhées répétitives ; troubles du sommeil.

Cette éligibilité par présomption initialement prévue pour une durée de deux ans a été reconduite, le 29 avril 1997, jusqu'au 31 décembre 2001.

Associant dépistage des symptômes, suivi médical et compensation (corrélée au niveau des troubles constatés), ce dispositif présente un intérêt certain, en ce qu'il offre des garanties importantes aux anciens combattants de la guerre du Golfe sans pour autant systématiser leur couverture et leur droit à pension sur la base du seul critère de leur participation au conflit.

La mission d'information estime que, sur le plan méthodologique, cette approche est pertinente. Néanmoins, on peut s'interroger quant à sa transposition en France. En tout état de cause, sans envisager cette hypothèse, il est tout à fait possible d'apporter des améliorations sensibles au mécanisme en place.

b) Elargir le régime de présomption d'imputabilité

La mission d'information est sensible au caractère de « couperet » que revêtent les délais prévus par l'article L.3 du code des pensions militaires d'invalidité pour l'application du régime de la présomption d'imputabilité des maladies des anciens combattants à leur service.

Le dispositif américain surmonte cette difficulté, pour ne pas dire cette injustice, en instaurant une exception d'imputabilité par présomption à échéance fixe (actuellement, jusqu'au 31 décembre 2001), légalement reconductible.

La mission d'information, y préfère néanmoins une rédaction nouvelle du second alinéa de l'article L.3 du code des pensions militaires d'invalidité. La formulation qu'elle propose est la suivante :

« 2° S'il s'agit de maladie, qu'elle ait été constatée dans les délais moyens de survenance médicalement admis pour pouvoir être rattachée au moment du service ; ».

La rédaction retenue découle des incertitudes médicales encore persistantes quant à l'éventail des symptômes dont les anciens combattants de la guerre du Golfe se plaignent. L'identification préalable de ces maladies apparaît nécessaire, mais pour ne pas pénaliser les militaires par une définition trop restrictive, il convient d'adopter une définition suffisamment large de la présomption d'imputabilité au service. De fait, l'intérêt de la souplesse du code des pensions militaires d'invalidité s'en trouverait ainsi préservé.

De surcroît, cette modification du code des pensions militaires d'invalidité semble davantage correspondre aux exigences actuelles de protection des soldats professionnels, les armées étant de plus en plus appelées à participer à des opérations extérieures qui comportent des risques de long terme, voire même inconnus. Compte tenu de l'impératif de fidélisation des recrues, il apparaît justifié à la mission d'information que l'Etat manifeste toute son attention en élargissant la présomption d'imputabilité au service pour les malades victimes de pathologies lourdes.

Le rôle de l'expertise médicale s'en trouverait renforcé et, s'agissant des anciens combattants de la guerre du Golfe, il apparaît d'ores et déjà que les conclusions des études épidémiologiques lancées par l'INSERM et l'institut de veille sanitaire suite aux recommandations du groupe d'experts présidés par le Professeur Salamon, le 24 avril dernier, pourraient constituer une base de travail intéressante. Au demeurant, l'administration conservera toujours la faculté de prouver la non imputabilité au service.

Parallèlement, on pourrait envisager qu'un dispositif d'allocation conservatoire soit prévu pour les seuls malades les plus gravement atteints (cancers, lymphomes ...) : cette allocation serait versée à partir du moment où ils auraient déposé un dossier de demande de pension. Ce faisant, le problème de la consolidation des maladies les plus graves serait résolu. Par ailleurs, l'administration pourrait toujours récupérer les montants indus au terme des procédures de décision ou du contentieux sur le droit à pension.

Néanmoins, devant la situation de détresse de certains des anciens combattants de la guerre du Golfe malades et sans ressources, la mission d'information se prononce en faveur d'un mécanisme transitoire d'attribution de pensions pour les malades dont les symptômes demeurent inexpliqués mais qui correspondraient à une liste de pathologies reconnues comme ouvrant droit à une compensation financière, à l'image de ce qu'a décidé le législateur américain. La mesure ne concerne que 3 000 anciens combattants américains sur les quelques 700 000 engagés ; en France, elle n'intéresserait probablement que quelques dizaines de soldats qui ont servi les intérêts de la Nation. Il s'agit là du moyen le plus rapide de répondre le plus justement possible aux attentes de personnes dont le sens du devoir ne saurait être remis en question.

c) Harmoniser les pensions

L'autre problème majeur, quoique moins spécifique aux anciens combattants du Golfe, a trait au fait que les pensions militaires ne sont pas définies selon un barème et un régime uniques.

Au sein même des armées, les pensions sont indexées au taux du grade, ce qui induit des différences notables de traitement entre officiers et hommes du rang, comme l'illustre ce propos de M. Laurent Attar-Bayrou :

« Les Généraux ne seront peut-être pas très heureux, mais il faut rappeler qu'un homme du rang blessé à 85 % touche la pension d'un Général blessé à 10 %. C'est l'une des difficultés du droit français ».

De surcroît, l'indemnisation varie selon les armées, les personnels de la Marine se retrouvant plus avantagés que les militaires de l'armée de Terre, par exemple.

Cette situation, héritage de l'époque où coexistaient plusieurs ministères en charge de la défense nationale (Guerre, Marine...), n'est plus d'actualité au moment où les armées achèvent leur professionnalisation. Le Secrétaire d'Etat à la Défense, chargé des Anciens combattants, M. Jean-Pierre Masseret a lui même reconnu que « ce système n'est pas juste ».

La mission d'information se prononce donc en faveur d'une harmonisation des pensions par alignement de leur montant entre les grades et les différentes armées, sans néanmoins introduire un effet rétroactif de manière à ne pas pénaliser ceux qui les perçoivent déjà.

Ce problème de l'harmonisation est plus complexe encore s'agissant de la divergence des taux prévus par le système des pensions militaires avec les différents barèmes de la Sécurité sociale.

Selon le mécanisme en vigueur, la même réduction de capacité fonctionnelle est diversement appréciée, selon les circonstances de l'accident dont la personne a été victime : les taux d'invalidité applicables peuvent ainsi varier de 15 % à 85 % pour une même infirmité ou maladie. Certains membres de la mission d'information se sont donc prononcés en faveur d'un barème quasi-unique, avec quelques divergences compte tenu du fait que les blessures militaires peuvent être différentes et, surtout, avec un point d'indemnisation différent.

M. Jean-Pierre Masseret a jugé ce propos « cohérent, mais extrêmement difficile à mettre en _uvre ». Et le Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants d'ajouter :

« Certes la valeur différente du point permettrait de traiter différemment l'accident du travail de l'accident subi par un soldat engagé au service de la France. Mais faire adopter un tel changement par le monde combattant demanderait du temps, car c'est un sujet extrêmement délicat d'interprétation ».

3. Renforcer les droits des demandeurs dans les procédures

En corollaire de la complexité du processus juridique conduisant à l'attribution de pensions militaires d'invalidité, les anciens combattants formulent de sérieuses critiques quant aux garanties des demandeurs devant les commissions médicales consultatives, d'une part, et quant au problème du conseil juridique lors du contentieux, d'autre part.

Le premier reproche adressé à la commission consultative médicale, par la voie de M. Laurent Attar-Bayrou, Président de la Fédération des Anciens des Missions Extérieures, est son absence de transparence :

« Lorsque votre dossier est examiné, il peut, avant la Commission de réforme monter à la Commission consultative médicale (CCM) ; tout dépend de la gravité. Très peu de personnes connaissent exactement qui siège à la CCM et qui y décide du devenir de l'invalide. Cela se fait sur dossier. Moi-même, j'ai essayé de venir plaider ma cause, on ne peut pas. On ne peut même pas connaître le nom du Président de cette instance ».

Sur ce point, le Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants a apporté un début de réponse :

« Il s'agit d'un service administratif dont une partie est installée au Val-de-Fontenay, en région parisienne, et l'autre à La Rochelle, auprès du Service des pensions des Armées. Le président de la commission est le Médecin chef Laborde, et le vice-président, le docteur Pujol, médecin militaire lui aussi qui est à La Rochelle. Le Médecin chef travaille avec douze ou quinze médecins militaires répartis sur les deux sites.

Lorsque les dossiers lui parviennent pour avis, le Médecin chef les attribue à des médecins qui les examinent. Aucun délai ne leur est imposé, mais on pourrait néanmoins leur demander s'il est possible d'améliorer ce temps d'examen des dossiers. En principe, ils travaillent plutôt rapidement ».

La seconde critique dont fait l'objet cette instance administrative concerne son mode de fonctionnement, M. Laurent Attar-Bayrou insistant plus particulièrement sur ce point :

« On a un problème avec la Commission consultative médicale (CCM). Vous faites votre demande de pension en première ou en deuxième instance, la Commission de réforme au niveau régional ou départemental accepte votre dossier qui monte à la Commission consultative médicale : il est "sabré sur pièce". Donc, cela revient. Puis, on invoque généralement quelques artifices juridiques sur lesquels vous ne pouvez plus revenir puisqu'il y a présomption ».

Et celui-ci de conclure :

« Tous les Anciens combattants demandent la suppression de la CCM ou, au moins, une transparence afin que les médecins des intéressés soient représentés ».

Plutôt que de recommander la suppression de cette instance administrative d'instruction des dossiers, on proposera de favoriser l'accès des requérants à cette commission consultative, via un entretien de l'ancien combattant avec le médecin en charge du dossier par exemple, de manière à permettre d'éviter certaines contestations, à tout le moins un sentiment d'incompréhension.

L'amélioration des droits des requérants passe aussi par la qualité de leur défense au cours du contentieux. Or, la mission d'information s'étonne de l'insuffisance chronique d'avocats spécialisés en matière de pensions militaires, laquelle porte manifestement préjudice aux anciens combattants demandant une pension.

Il s'agit là d'un point sur lequel M. Laurent Attar-Bayrou, Président de la Fédération des Anciens des Missions Extérieures, a attiré l'attention, lors de son audition le 6 février 2001 :

« (...) il faut (...) qu'il y ait plus d'avocats formés au Code des pensions. Il y a peut-être 13 ou 14 avocats compétents sur ces questions en France. Puisqu'il n'y a plus beaucoup de professionnels intéressés, généralement ce sont des avocats commis d'office, qui sont en début de carrière et vous êtes obligés de leur monter leur dossier. On sera des centaines à vous dire cela ».

Il y a là motif à réflexion, sur les mesures susceptibles d'inciter la profession à améliorer ses compétences sur ce créneau, certes spécifique mais important. Une valorisation pédagogique dans les universités constituerait une amorce de solution. Une formation professionnelle des jeunes avocats tout juste diplômés par l'administration du Secrétariat d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants serait sans doute elle aussi utile.

CONCLUSION

Il n'appartenait pas à la mission d'information en tant qu'organe de contrôle parlementaire de se prononcer sur l'existence ou non d'un « syndrome » de la guerre du Golfe : il revient aux médecins et aux scientifiques d'apporter une réponse à cette question. En France, le groupe des experts désigné par le gouvernement doit y contribuer par ses propositions de méthode et la définition des orientations à donner à des enquêtes épidémiologiques. Néanmoins, le présent rapport donne un certain nombre d'éclairages sur les conditions concrètes dans lesquelles s'est déroulé le conflit pour les soldats français engagés sur le théâtre. A n'en pas douter, il aidera ainsi le travail des médecins tout en participant à la quête de vérité des anciens combattants de la guerre du Golfe.

La mission d'information a mis en exergue plusieurs risques d'exposition, le plus souvent indirects, à des armements potentiellement nuisibles sur le plan sanitaire, qu'il s'agisse des neurotoxiques irakiens ou des poussières d'obus à uranium appauvri utilisés par l'aviation américaine. Si des interrogations subsistent quant à l'incidence exacte de ces expositions sur la santé des militaires français, il est désormais possible d'identifier les régiments et unités les plus particulièrement concernés. Par voie de conséquence, le suivi médical des anciens soldats du Golfe se plaignant d'affections ou de troubles particuliers devrait s'en trouver facilité.

De même, les méthodes de prévention des risques, tant sur le plan médical que sur le plan technique, suscitent quelques doutes quant à leur efficacité. Le constat établi sur des matériels parfois inadaptés ou anciens ainsi que le caractère quelque peu chaotique de la préparation des forces et de la mise en _uvre des procédures de protection contre les armes de destruction massive irakiennes en fournissent l'illustration. En revanche, il ne semble pas pertinent de rendre la Pyridostigmine responsable de tous les maux dont souffriraient les anciens combattants de la guerre du Golfe. Le même raisonnement s'applique tout autant à la substance éveillante dénommée « Virgyl » bien que l'administration de cet eugrégariant par les armées pour une partie seulement de ses personnels mais en anticipation à l'attribution de son autorisation de mise sur le marché (A.M.M.), suscite nécessairement une réflexion de fond.

Certes, des interactions entre vaccins et médicaments ne sont pas à exclure, mais rien ne permet d'incriminer le commandement dans le choix d'en administrer aux forces. C'est plutôt vers les relations qu'entretiennent l'Etat-major et le Service de santé des Armées que doivent se porter les critiques, étant entendu que sans les investigations conduites par la mission d'information, il n'aurait sans doute pas été établi, par exemple, que l'ensemble des militaires français engagés dans le Golfe s'étaient vus prescrire de la Pyridostigmine.

En définitive, les responsabilités relèvent davantage d'impréparations, d'imprécisions voire de dysfonctionnements au sein de la chaîne de commandement, que d'erreurs ou de fautes dans la prévention des risques.

Dans la perspective des leçons à tirer de cette expérience et à la lumière du contexte actuel de professionnalisation des armées, la mission d'information estime qu'il faut étudier avec une réelle bienveillance les situations des anciens combattants malades et, si nécessaire, adapter le code des pensions militaires d'invalidité afin qu'ils puissent bénéficier d'une juste indemnisation.

En outre, il convient d'assurer un suivi de pharmaco-vigilance pour les malades et les militaires engagés et ce, en recensant les cas de soldats atteints dans l'exercice de leurs fonctions tout en réalisant un suivi médical, dans la durée, à titre préventif. Sur ce point, les pays anglo-saxons sont en avance par rapport à la France. Leur expérience est riche d'enseignements et il ne serait pas inutile de s'en inspirer.

La mission d'information a formulé des recommandations concrètes et pratiques. Gageons qu'elles seront suivies d'effets. Il y va de l'attractivité de l'engagement d'hommes et de femmes au service de la défense de la Nation mais également de la confiance entre l'opinion publique et les armées.

dix propositions concrètes formulées
par la mission d'information

1) Après dépouillement d'un questionnaire envoyé aux 25 000 anciens combattants de la guerre du Golfe, confier à plusieurs organismes scientifiques publics et privés, sous l'autorité de l'Institut de veille sanitaire, le soin d'effectuer des études de mortalité et de morbidité ciblées sur les militaires du GSL, du 3ème RIMa, du 4ème RD, de l'Etat-major de la Division Daguet, du 6ème REG, du 1er REC et du 2nd REI ;

2) Lancer des études de descendance concernant les militaires ayant eu des enfants dans les cinq années suivant leur retour du théâtre d'opérations ;

3) Créer, dans l'attente de l'installation d'un observatoire indépendant et ayant compétence pour l'étude des risques rémanents des militaires, une cellule au sein du ministère délégué à la Santé chargée de superviser l'application d'un protocole sur le bilan de santé des militaires ayant participé à la guerre du Golfe, dont l'exécution, sur la base du volontariat, sera intégralement remboursée aux intéressés qui pourront s'adresser aux structures médicales de leur choix ;

4) Augmenter les crédits des trois Armées consacrés aux équipements NBC, à l'entraînement et à la familiarisation des forces avec ces équipements et acquérir des équipements en dotations insuffisantes (laboratoires mobiles de détection des gaz toxiques et radiamètres individuels portatifs) ;

5) Informer et sensibiliser les recrues aux risques radiologiques et chimiques des armes de nouvelle génération, notamment les obus à uranium appauvri et compléter les mentions obligatoires des livrets individuels de vaccinations par le nom du fabricant et le numéro de lot de chacun des sérums ou substances administrés ;

6) Supprimer la possibilité pour le chef du Service des pensions du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie de demander à procéder, au terme de la procédure, à un nouvel examen du droit à pension de manière à abréger les délais d'examen pour les ayants droit ;

7) Etablir, à titre transitoire, la liste des pathologies inexpliquées ouvrant droit à une compensation financière pour les anciens combattants de la guerre du Golfe dont les maladies ne sont pas encore clairement identifiées ;

8) Elargir le régime de présomption d'imputabilité par une nouvelle rédaction du second alinéa de l'article L.3 du code des pensions militaires d'invalidité ;

9) Renforcer les droits des demandeurs dans les procédures, notamment en favorisant l'accès des anciens combattants à la commission consultative médicale via un entretien avec le médecin en charge du dossier et en améliorant la qualité de leurs conseillers juridiques tout à la fois par une valorisation pédagogique dans les universités et par une formation professionnelle des jeunes diplômés par l'administration du Secrétariat d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants ;

10) Mettre à jour au sein des Archives de l'UNSCOM, désormais détenues et exploitées par la COCOVINU (Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations Unies), l'ensemble des données disponibles sur la nature et la composition des toxiques recensés en Irak ainsi que sur leurs lieux de découverte, afin de mieux apprécier certains des risques d'exposition chimique de nos forces par rapport à des dates et à des zones de détection pour lesquelles subsistent des doutes.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du 15 mai 2001, la Commission a procédé à l'examen du rapport de la mission d'information sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer, au cours de la guerre du Golfe et des opérations conduites ultérieurement dans les Balkans, à des risques sanitaires spécifiques (M. Bernard Cazeneuve, Président de la mission, Mme Michèle Rivasi et M. Claude Lanfranca, rapporteurs).

Après avoir rappelé que la Commission avait créé cette mission d'information le 2 octobre dernier afin de faire la lumière sur les risques sanitaires spécifiques auxquels ont pu être exposés les militaires français au cours de la guerre du Golfe, le Président Paul Quilès a ajouté que son mandat avait été élargi aux opérations des Balkans en janvier dernier. Il a ensuite précisé que la mission d'information présentait à la Commission un document principalement consacré à la guerre du Golfe mais qu'elle prévoyait d'établir un second texte qui traitera plus spécialement des opérations des Balkans, au cours du mois de novembre 2001.

Le Président Paul Quilès a souligné que, par l'intermédiaire d'une mission d'information créée en son sein, la Commission avait, une nouvelle fois, après ses rapports sur les crises du Rwanda et du Kosovo, reçu du Gouvernement communication de tous les éléments nécessaires à ses travaux, et notamment de documents opérationnels ou internes au ministère de la Défense déclassifiés à son intention, selon une procédure désormais bien établie. Il a ajouté que la mission d'information avait également procédé à de nombreuses auditions de personnalités politiques, militaires, scientifiques et associatives, le plus souvent en présence de la presse, de manière à donner à ses travaux toute la transparence nécessaire. Il a ensuite indiqué que la mission avait effectué des déplacements en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, pays où l'impact sanitaire des opérations du Golfe sur les militaires qui y ont participé avait déjà donné lieu à de nombreux travaux. Il a également souligné qu'elle avait analysé une masse importante de documents « ouverts » d'origine française et étrangère, émanant soit d'autorités publiques, soit d'organismes à vocation scientifique.

En préalable à la présentation des travaux de la mission par son Président, M. Bernard Cazeneuve, et ses deux rappporteurs, Mme Michèle Rivasi et M. Claude Lanfranca, le Président Paul Quilès a fait ressortir que ces travaux n'étaient pas, par nature, destinés à porter des jugements d'ordre scientifique et médical. Il ne revenait pas, en conséquence, à la mission de « découvrir » l'existence ou non d'un syndrome dit « du Golfe ». Le Président Paul Quilès a néanmoins relevé que la mission avait été attentive aux explications des militaires de tout rang et qu'elle avait pris soin d'entendre les récits, voire les plaintes de ceux qui estimaient que la dégradation de leur état de santé résultait de leur participation aux opérations. Il s'est félicité que son important travail d'investigation lui ait permis de formuler un certain nombre d'interrogations d'intérêt général et de propositions concrètes.

Après avoir souligné l'excellent climat dans lequel s'étaient déroulés les travaux de la mission d'information puis indiqué que ses membres étaient parvenus à une approbation unanime des conclusions présentées à la Commission, M. Bernard Cazeneuve, Président de la mission d'information, a souhaité préciser, à titre liminaire, son contexte de création, ses objectifs et ses méthodes.

Il a tout d'abord souligné que la question des pathologies spécifiques auxquelles auraient pu être exposés les anciens combattants de la guerre du Golfe prenait son origine dans les revendications formulées, dès 1992 et 1993, par des participants américains, canadiens et britanniques à ce conflit. Il a rappelé pour mémoire que du 16 janvier au 28 février 1991, une coalition composée de vingt et un pays, comportant notamment 697 000 Américains, 54 000 Britanniques, 26 000 Français, et 4 500 Canadiens, pour ne parler que des principaux contingents, avait affronté les forces armées irakiennes puis contraint l'Irak, par une victoire militaire, à quitter le sol koweïtien annexé le 2 août 1990.

M. Bernard Cazeneuve a observé qu'en France aussi, des anciens combattants du Golfe s'étaient plaints de pathologies spécifiques, beaucoup plus tardivement cependant. Il s'est notamment référé à la création, en juin 2000, de l'association Avigolfe afin de regrouper des malades qui attribuaient leurs symptômes à leur participation à la guerre du Golfe et faire valoir leurs revendications. Il a aussi indiqué que, sur les quelque 300 demandes de pensions adressées aux services du Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants au titre du code des Pensions militaires d'invalidité, seulement 120 avaient été concédées, essentiellement pour blessures. Il a remarqué au passage que ce faible nombre laissait préjuger l'ampleur des pathologies spécifiques que certains anciens combattants de la guerre du Golfe déclaraient éprouver.

Il a alors fait valoir que la Commission, confrontée aux demandes visant à faire la lumière sur les circonstances exactes de l'engagement des militaires français ayant participé à la guerre du Golfe, s'était montrée soucieuse de répondre aux légitimes attentes de soldats ayant servi les intérêts de la Nation en décidant, le 2 octobre 2000, de créer la mission d'information dont il avait assumé la présidence.

M. Bernard Cazeneuve s'est ensuite attaché à démontrer que, sur le plan méthodologique, cette mission d'information avait voulu procéder avec une rigueur similaire à celle qui caractérise l'application de protocoles scientifiques.

Il a ainsi fait état des nombreuses auditions de responsables politiques, militaires, scientifiques, associatifs, actuels ou de l'époque, qui avaient été réalisées, le plus souvent de manière publique. Il a également mentionné les déplacements effectués par les membres de la mission d'information à Londres ainsi qu'à Washington et New York. Il a particulièrement insisté sur la consultation des nombreux documents secrets déclassifiés par le ministère de la Défense à la demande de la mission d'information.

M. Bernard Cazeneuve a souligné que les membres de la mission d'information avaient cherché en toute liberté à formuler des préconisations de nature à améliorer le sort des anciens combattants présentant des pathologies dont le lien avec l'engagement resterait difficile à déterminer et à promouvoir la sécurité des militaires susceptibles d'être déployés à l'avenir sur d'autres théâtres extérieurs.

Il a néanmoins tenu à rappeler la vocation parlementaire, et non scientifique ou médicale, de la mission d'information, précisant que celle-ci se bornait à participer directement au contrôle de l'Exécutif, sur ses actes passés et présents comme sur la sincérité des informations qu'il destine à l'opinion. Il a estimé que le rôle de la mission d'information ne pouvait être celui d'un groupe d'experts qui serait chargé de découvrir l'existence ou non d'un ou plusieurs « syndromes ».

Soulignant l'avance prise par les Etats-Unis en matière de recensement et de recherche grâce aux travaux effectués, à la demande du Gouvernement fédéral, par la Rand Corporation puis par l'Institute of Medecine, organisme dépendant de l'Académie nationale des Sciences, il a considéré que cette situation n'était pas étonnante, non seulement parce que les premières plaintes d'anciens combattants avaient été adressées aux autorités américaines quelques mois après la fin du conflit, mais également parce que des financements considérables avaient pu être dégagés pour éclaircir les causes des pathologies constatées.

M. Bernard Cazeneuve s'est alors attaché à énumérer, au travers de quelques exemples précis, les faits mis à jour par la mission d'information. Il a tout d'abord rappelé que, dès la première audition publique, celle du Général Michel Roquejeoffre, la mission d'information avait clairement fait préciser quelles avaient été les conditions d'usage d'une substance à vocation préventive contre les toxiques, la Pyridostigmine, alors que dans les mois précédents une réelle confusion caractérisait la communication officielle sur ce point.

Il a ajouté que plusieurs occurrences d'exposition à des toxiques chimiques avaient été mises en évidence pour des unités des forces françaises engagées dans le Golfe. Il a néanmoins précisé qu'il s'agissait de traces de substances toxiques, résultant non pas d'un usage offensif d'armes chimiques par les forces irakiennes mais de résidus liés à des émanations consécutives à des bombardements alliés sur des sites de stockage. Il a fait valoir que ce constat avait pu être dressé précisément parce que la mission avait exigé la transmission des messages d'alerte chimique détenus par les états-majors, puis qu'elle avait confronté les observations qu'elle en avait tirées avec des informations connues de longue date par les autorités militaires et le Congrès aux Etats-Unis.

Abordant le sujet de l'utilisation par les Américains et, dans une moindre mesure, les Britanniques, d'armes incorporant de l'uranium appauvri, M. Bernard Cazeneuve a souligné que la mission d'information avait constaté là encore des contradictions entre différents responsables du haut commandement français sur leur degré d'information, à l'époque, tant sur les risques de ces armes que sur la possibilité même de leur mise en _uvre sur le terrain par les principaux alliés de la France. Il a indiqué que l'analyse des journaux de marche des différentes unités composant la Division Daguet avait permis d'établir que l'exposition de militaires français à des poussières d'uranium appauvri était avérée en conséquence des tirs d'appui effectués par les avions américains A 10 dits « tueurs de chars ». Il a précisé que cette exposition n'était pas due à un impact direct des bombardements ni même à des tirs fratricides analogues à ceux subis par les forces américaines, mais simplement au contact immédiat d'un mélange de poussières d'uranium appauvri et de débris de cibles présent sur les zones d'intervention des militaires français.

Soulignant que cette question des conséquences du recours à l'uranium appauvri donnera lieu à des développements complémentaires et sans doute plus approfondis dans le second rapport de la mission d'information, plus particulièrement consacré aux opérations dans les Balkans, il a estimé qu'elle appelait une interrogation majeure, d'ordre politique, concernant le degré d'information consenti par les Etats-Unis à leurs alliés, pour des opérations conduites conjointement.

M. Bernard Cazeneuve a enfin précisé que la mission d'information avait exploité l'ensemble des comptes rendus d'opérations, des notes et documents internes du Service de santé des Armées, qui avaient été déclassifiés à son usage. Observant que ce travail avait permis, notamment, de mieux comprendre l'organisation du soutien sanitaire des unités combattantes, il a souligné qu'il présentait également l'intérêt d'établir d'utiles comparaisons avec les pratiques médicales en opérations suivies par les principaux alliés de la France.

Il a cité à cet égard l'exemple des vaccinations, dont les pratiques françaises supportaient la comparaison avec celles des Etats-Unis ou de la Grande-Bretagne, notamment en ce qui concerne le nombre des pertes de documents vaccinaux postérieurement au conflit. Il a néanmoins souligné que, parmi les dix propositions que la mission d'information formulait dans son rapport, figurait l'adjonction de mentions obligatoires supplémentaires sur le livret individuel de vaccination, adopté de longue date par les armées françaises.

Il a ensuite souligné que les documents déclassifiés émanant du Service de santé des Armées avaient permis de faire le point sur l'usage en opération d'un médicament nouveau dont le nom de code, à l'époque de la guerre du Golfe, était le « Virgyl ». Précisant que cette molécule, développée conjointement par des chercheurs du Service de santé des Armées et un laboratoire privé, ne disposait pas, à l'époque de son premier usage expérimental en opération, d'une autorisation de mise sur le marché, il a observé que, de surcroît, son administration n'avait pas véritablement eu lieu uniquement sur ordre exprès du commandement.

Il a estimé que cet eugrégariant, dont l'emploi ne poursuit pas une finalité thérapeutique mais un objectif de meilleure disponibilité opérationnelle en repoussant les besoins en sommeil, n'était probablement pas en lui-même dangereux sous réserve que les risques d'un mauvais usage soient écartés. Il a néanmoins mis en exergue l'absence de possibilité réelle d'évaluation ultérieure des effets du « Virgyl », notamment par défaut d'une connaissance exacte des personnels concernés.

S'appuyant sur le bilan du travail accompli, M. Bernard Cazeneuve a insisté sur le caractère quasi « notarial » du rapport de la mission d'information, qui incorpore de nombreuses références et reproductions de pièces officielles. Il a estimé que l'exigence d'objectivité à laquelle s'étaient soumis dès le départ les membres de la mission d'information était de nature à désarmer toute polémique ou mauvaise querelle.

En conclusion, il a salué la forte implication des membres de la mission d'information dans l'élaboration du rapport, en remerciant tout particulièrement les deux rapporteurs qui s'étaient attachés à vérifier les faits en toute objectivité sans donner corps à ce qui relevait des allégations ou des présupposés. Il s'est enfin félicité du caractère constructif des débats que les membres de la mission d'information avaient menés.

M. Claude Lanfranca, rapporteur, a précisé que le contexte d'engagement des quelque 25 000 soldats français ayant participé à la guerre du Golfe avait été au c_ur des réflexions de la mission d'information.

Abordant les facteurs d'exposition aux risques, il a plus particulièrement analysé les problèmes liés aux mesures de prévention et de protection, qu'elles soient proprement médicales ou qu'elles aient trait à des matériels défectueux.

Il a tout d'abord indiqué que la mission d'information s'était notamment intéressée aux mesures de prophylaxie, incriminées par certaines études épidémiologiques étrangères. Il a observé que, si les militaires français avaient fait l'objet des vaccinations réglementaires contre la tuberculose, la diphtérie-tétanos, la typhoïde, la poliomyélite et l'hépatite virale A auxquelles s'était ajoutée une vaccination contre la grippe et la méningite cérébro-spinale, ils n'avaient pas été vaccinés contre le charbon ni contre la peste botulique, à la différence de leurs camarades britanniques ou américains.

Il a estimé qu'il n'était pas possible d'avoir une position tranchée sur la question de l'innocuité de certaines campagnes de vaccination, compte tenu notamment de l'hypothèse d'une implication de leur adjuvant aluminique dans l'apparition de lésions musculaires proches de celles dont les anciens combattants de la guerre du Golfe déclarent souffrir. Il a estimé que des études plus approfondies étaient nécessaires sur ce point.

M. Claude Lanfranca a ensuite évoqué une autre substance médicamenteuse suspectée : le bromure de Pyridostigmine. Après avoir observé que des déclarations contradictoires avaient pu, dans un premier temps, focaliser l'attention sur cette substance, de manière quelque peu exagérée, il a rappelé que la mission d'information avait pu apporter, dès sa première audition publique, des précisions irréfutables, espérant qu'elles avaient mis un terme à la confusion qui avait présidé à la communication du ministère de la Défense sur ce sujet. Il a par ailleurs souligné que le principe d'emploi de ce prétraitement contre le risque chimique avait été arrêté au sein des armées françaises au cours de l'année 1982, conformément aux préconisations médicales de l'OTAN. Il en a conclu qu'il n'était pas anormal en soi que les soldats dépêchés dans le Golfe aient pris de cet antidote.

Il a convenu qu'il n'était pas impossible que, ponctuellement, certains soldats n'aient pas respecté les consignes d'emploi, d'une prise toutes les 8 heures, après ordre du commandement jusqu'à ordre contraire. Il a également observé que cet ordre n'avait pas été donné par écrit, selon les propres dires du Général Janvier, commandant la Division Daguet, mais il ne lui a pas pour autant semblé raisonnable d'incriminer la Pyridostigmine, d'autant que la majorité des affections dont se plaignent les anciens combattants de la guerre du Golfe sont essentiellement musculaires ou articulaires.

M. Claude Lanfranca a ensuite abordé la question de l'usage du « Virgyl » ou Modafinil, substance éveillante administrée pour la première fois sur un théâtre d'opération aux militaires français lors de la guerre du Golfe. Il a indiqué qu'une étude sur huit sujets humains sains, réalisée peu auparavant à l'hôpital d'instruction militaire Larrey de Versailles, n'avait pas fait apparaître de séquelles particulières. Après avoir démontré le caractère rigoureux des conditions d'emploi et de délivrance de cette substance, il a évalué, sur la base des témoignages et rapports d'activité, en l'absence de registres spécifiques tenus par les médecins et les infirmiers, que le nombre des personnels relevant de la Division Daguet qui aurait utilisé le « Virgyl » serait, en toute hypothèse, inférieur à 10 % des effectifs et se situerait vraisemblablement entre 400 et 700.

Il a toutefois observé qu'au cours des opérations, cette substance avait été prescrite par anticipation de l'accord des autorités sanitaires, avant l'autorisation de mise sur le marché.

Evoquant ensuite l'efficacité des matériels de protection et de lutte contre les agents chimiques, bactériologiques et nucléaires, M. Claude Lanfranca a constaté qu'elle avait été mise en doute à plusieurs reprises.

Il a cité, à l'appui de sa démonstration, un rapport du Colonel Claude Baguet, commandant l'école de défense nucléaire, bactériologique et chimique (NBC) de l'armée de Terre, dans lequel il était indiqué que le Detalac, équipement collectif de détection des agents chimiques, connaissait des « pannes fréquentes » et « ne détectait pas l'Ypérite ». Il a ajouté que ce rapport jugeait les détecteurs individuels « en nombre très insuffisant » et s'étonnait de leurs « consignes d'utilisation délirantes ». Enfin, il a souligné que le port du survêtement de protection à port permanent (S3P) y était qualifié de « difficile, voire impossible par temps chaud ».

M. Claude Lanfranca a estimé qu'en règle générale, le retour d'expérience concernant la protection individuelle des militaires était très critique et signalait de nombreuses défaillances, ce qu'illustrait le compte rendu du Médecin chef des services Puygrenier, du 25 mars 1991, faisant notamment état de plusieurs anomalies quant à l'entraînement au port des moyens de protection et à la discipline. Il en a déduit que de telles carences n'étaient sans doute pas restées sans conséquences.

Mme Michèle Rivasi, rapporteure, a souligné qu'à des risques afférents à la prévention sanitaire et technique se sont ajoutés les risques opérationnels.

Elle a observé qu'à la lecture des documents envoyés par le ministère de la Défense et selon les enseignements des différentes auditions, il était apparu que la plupart des dangers envisageables, à savoir les menaces chimiques, biologiques et nucléaires, avaient été pris en considération. Elle a cependant estimé que le déroulement des opérations s'était effectué dans de telles conditions psychologiques et climatiques que les menaces n'avaient pas été forcément toujours maîtrisées.

Elle a ajouté que les militaires avaient été très peu sensibilisés, voire pas du tout, à des risques qui n'étaient pas perçus comme tels à l'époque, à savoir les poussières d'uranium appauvri et les particules de suie dégagées par les puits de pétrole incendiés par les Irakiens.

Constatant que, dix ans après les événements, la mission d'information elle-même avait rencontré quelques difficultés pour accéder à certains documents susceptibles d'apporter des éclaircissements indispensables, tels que les comptes rendus des alertes chimiques des Detalac et les rapports isotopiques des munitions françaises à uranium appauvri, elle a souligné qu'elle était à présent en mesure de préciser la nature et les circonstances des expositions auxquelles les militaires français avaient pu être soumis pendant la guerre du Golfe.

S'agissant de l'exposition aux agents chimiques, elle a indiqué, sur la base de données transmises par le ministère de la Défense, que des détections de contrôle positives, confirmant les alertes des Detalac et attestant ainsi la présence ambiante d'agents chimiques consécutive à des bombardements de dépôts irakiens, avaient été enregistrées par le groupement de soutien logistique de la Cité du Roi Khaled le 19 janvier 1991 à 16 h 30, le groupement de soutien logistique de la zone avancée le 20 janvier à 8 h 00, le 3ème Régiment d'Infanterie de Marine le 21 janvier à 9 h 47, le 4ème Régiment de Dragons le 21 janvier à 13 h50 et l'Etat-major de la Division le 21 janvier à 23 h 30.

Elle a attiré l'attention sur le fait que tous les comptes rendus consécutifs aux alertes des Detalac, qui avaient confirmé la présence de neurotoxiques soulignaient le caractère « infinitésimal » des concentrations relevées. Elle a néanmoins tenu à préciser que les Detalac ne détectaient pas l'ypérite. Prenant acte de la faiblesse estimée du risque encouru par les personnels, elle a néanmoins fait valoir que des témoignages laissaient à penser qu'il n'était pas impossible que certains soldats, isolément, n'aient pas respecté les consignes de sécurité, ou ne l'aient fait que partiellement, notamment parce que, en raison de la fréquence des alertes, beaucoup d'entre eux ne mettaient pas toujours leurs masques de protection. Elle en a déduit que, dans ce cas très particulier seulement, l'exposition avérée à des traces de neurotoxiques ou de vésicants pourrait peut-être ne pas avoir été sans conséquences, tout en précisant qu'il appartiendra aux experts scientifiques, bien que la grande majorité d'entre eux soient militaires, de se prononcer à ce sujet. Elle a d'ailleurs remarqué que, si la Pyridostigmine était un antidote efficace contre le Soman, il n'en allait pas de même contre le Sarin.

Mme Michèle Rivasi a constaté que ces informations recoupaient les éléments recueillis par le Sénat et la Chambre des Représentants américains.

Elle a ajouté que la mission d'information avait également mis à jour une forte présomption de stockage d'armes chimiques sur l'aérodrome d'As Salman, hypothèse évoquée par un compte rendu opérationnel en date du 12 janvier 1991. Elle a conclu que l'éventualité d'une contamination chimique du terrain n'était pas à exclure et que les éléments français amenés à « dépolluer » l'aérodrome, notamment le 6ème REG, ainsi que les unités stationnées aux alentours, pourraient y avoir été exposés, d'autant qu'ils n'avaient pas forcément bénéficié de consignes strictes quant au port de leurs masques de protection.

Evoquant les risques potentiellement induits par l'uranium appauvri, elle a indiqué que la mission d'information avait acquis la conviction qu'ils étaient surtout de nature chimique, une contamination radiologique ne pouvant toutefois être totalement écartée puisque des traces d'uranium 236 ont été décelées dans les urines d'anciens combattants du Golfe par un ancien médecin militaire américain, le Docteur Assaf Durakovic.

La rapporteure a également souligné que, lors de leur déplacement aux Etats-Unis, les membres de la mission d'information avaient eu confirmation que l'uranium appauvri utilisé dans les obus employés dans le Golfe provenait soit du processus d'enrichissement, soit d'un uranium retraité présentant des traces de transuraniens.

Mme Michèle Rivasi a alors expliqué que la mission d'information s'était attachée à mettre en évidence les unités qui avaient été plus particulièrement exposées à l'inhalation éventuelle de poussières d'uranium appauvri à proximité des blindés bombardés avec des munitions comportant cette substance, risque le plus significatif.

Se référant aux différents journaux de marche et d'opération des unités de la Division Daguet, elle a indiqué que, lors de l'offensive terrestre et même après, au moins quatre unités de la Division Daguet s'étaient trouvées sur des sites ou en présence d'objectifs bombardés par les avions A 10 américains, utilisant des munitions à uranium appauvri.

Elle a précisé que s'étaient trouvés dans cette situation le 4ème Régiment de Dragons les 24, 25 et 28 février 1991, le 3ème Régiment d'Infanterie de Marine, les 28 février et 3 mars, et les 1er Régiment Etranger de Cavalerie et 2nd Régiment Etranger d'Infanterie, le 25 février. Elle a conclu à une forte présomption d'exposition des militaires de chacune de ces unités à des poussières d'uranium appauvri.

Elle a estimé par ailleurs qu'il y avait tout lieu de s'interroger sur le niveau de protection des soldats de la Division Daguet face à ces aérosols, au regard des précautions prises par les personnels de la DGA qui expertisent les armes à uranium appauvri (port d'une combinaison étanche, d'une paire de bottes, d'une paire de chaussettes, d'une paire de gants, d'un masque respiratoire et d'un dosimètre, autant de moyens dont les militaires exposés étaient dépourvus sur le théâtre d'opérations).

Mme Michèle Rivasi a enfin abordé la question des fumées des incendies de puits de pétrole. Reconnaissant qu'elles ne constituaient pas en soi le danger sanitaire le plus important auquel les soldats français pourraient avoir été exposés, elle a estimé que ce risque ne pouvait cependant pas être éludé.

Elle a rappelé à cet égard que, selon une note de l'Institut français du pétrole sur l'impact écologique de la destruction des infrastructures pétrolières du Koweït datant de janvier 1991, le nombre de puits de pétrole incendiés dans la région du Golfe arabo-persique au cours du conflit, soit par l'action des troupes irakiennes, soit du fait des combats, s'élevait à 493. Puis, elle a cité les conclusions du rapport final de la campagne d'analyses du laboratoire mobile régional de mesure de la qualité de l'air envoyé au Koweït du 27 mars au 4 avril 1991, soulignant qu'elles mettaient notamment en évidence un risque d'exposition à des pollutions en ozone, dioxyde de soufre, monoxyde de carbone, monoxyde et dioxyde d'azote pour le cantonnement du Détachement français présent dans la ville de Koweït City.

M. Claude Lanfranca a tenu à préciser, à propos des risques afférents à l'uranium appauvri, que les travaux du Docteur Durakovic reposaient sur un protocole scientifique dont la validité n'était pas unanimement reconnue.

Il a ensuite souligné que la mission d'information s'était aussi attachée à formuler des recommandations de portée spécifique concernant les personnels engagés dans la guerre du Golfe, et générale, relatives à la prévention des risques encourus par les armées lorsqu'elles se trouvent déployées sur un théâtre extérieur.

Il a alors indiqué que la mission d'information s'était prononcée en faveur d'une étude épidémiologique portant sur les militaires français engagés lors de la guerre du Golfe, comme l'avait préconisé le Professeur Roger Salamon dans le rapport qu'il avait remis aux Ministres de la Santé et de la Défense au nom du groupe d'experts qu'il présidait.

M. Claude Lanfranca a néanmoins estimé, sur la base des enseignements recueillis au cours des déplacements de la mission d'information et de ses nombreuses auditions, qu'il était illusoire de préconiser des études épidémiologiques comparant un panel représentatif des quelque 25 000 militaires français engagés avec une population témoin, dix ans après les événements. Il a remarqué que, outre le coût important de telles études, le principal obstacle qui s'opposait à leur réalisation dans de bonnes conditions résidait dans la représentativité des anciens combattants retenus et la comparaison avec une population témoin suffisamment pertinente.

Il a indiqué que la mission d'information préférait suggérer, après le dépouillement des réponses au questionnaire envoyé aux 25 000 soldats engagés dans le Golfe, la réalisation par plusieurs organismes scientifiques, sous l'autorité de l'Institut de veille sanitaire, d'études de mortalité, de morbidité et de descendance portant sur les personnels ayant été plus particulièrement exposés aux traces de gaz toxiques et aux poussières d'uranium appauvri.

Observant par ailleurs que rien n'était véritablement prévu afin d'assurer le nécessaire suivi médical des anciens combattants de la guerre du Golfe sur le long terme, il s'est fait l'avocat de la création d'un observatoire des risques rémanents des militaires en opérations extérieures, structure spécifique rattachée au ministère délégué à la Santé, afin de centraliser leur prise en charge sanitaire. Il a fait valoir que, dans l'attente de son installation, une cellule spécifique pourrait être créée à cet effet au sein du ministère délégué à la Santé.

M. Claude Lanfranca a ensuite précisé que la mission d'information avait également cherché à savoir quels enseignements avaient été tirés du conflit en matière de prévention et de protection des soldats face au risque nucléaire, bactériologique et chimique (NBC). Il s'est interrogé sur le niveau de préparation des forces à ce type de menace puis il a souligné que la mission d'information, à l'instar de son Vice-président Charles Cova qui avait récemment interrogé le ministère de la Défense sur ce point, jugeait indispensable de consacrer davantage de moyens à l'entraînement et à l'équipement des forces pour faire face à la menace NBC, notamment au regard des 11 millions de francs et des 49 millions de francs respectivement affectés à cette fin par l'armée de l'Air et l'armée de Terre en 2000.

Il a ensuite reconnu que la question des effets des armes à uranium appauvri continuait à se poser, tout en observant que des analyses avaient là aussi, sous la pression de l'opinion, des médias et des parlementaires, permis d'aboutir à une connaissance plus précise des risques. Il a souligné à ce propos que la mission d'information se prononçait en faveur d'une sensibilisation accrue des militaires aux conséquences sanitaires éventuelles des munitions à uranium appauvri.

Complétant la présentation des propositions formulées par la mission d'information, Mme Michèle Rivasi a précisé qu'il était apparu nécessaire de simplifier les procédures administratives en vigueur dans l'attribution des compensations financières des maladies ou infirmités des anciens combattants, en supprimant la possibilité pour le service des pensions du ministère des Finances de demander le réexamen des dossiers.

Elle a ajouté que la mission d'information souhaitait également que soit encouragée la formation d'avocats spécialisés en matière de pensions militaires d'invalidité. Elle a en outre indiqué que la mission proposait une révision des dispositions de l'article L3 du Code des pensions militaires d'invalidité fixant les critères d'imputabilité au service des pathologies et troubles constatés.

Insistant sur ce point, qu'elle a jugé essentiel au regard de l'impératif de fidélisation des recrues, elle a estimé que le rôle de l'expertise médicale s'en trouverait renforcé. Elle a ajouté que, s'agissant des anciens combattants de la guerre du Golfe, les conclusions des études épidémiologiques lancées par l'INSERM ou à la suite des recommandations de la mission d'information, constitueraient de ce point de vue une base de travail intéressante. Elle a également fait valoir que l'administration conserverait toujours la faculté de prouver la non-imputabilité au service des pathologies et troubles.

Mme Michèle Rivasi a indiqué que la mission d'information proposait aussi qu'un dispositif d'allocation conservatoire soit prévu pour les malades les plus atteints, cette allocation étant versée dès le moment où ils auraient déposé un dossier de demande de pension.

Se référant à la situation de détresse de certains des anciens combattants de la guerre du Golfe malades et sans ressources, elle a indiqué que la mission d'information se prononçait en outre en faveur d'un mécanisme transitoire d'attribution de pensions pour les malades dont les symptômes demeurent inexpliqués dès lors que ces symptômes correspondraient à une liste préétablie de pathologies reconnues comme ouvrant droit à une compensation financière, à l'image de ce qu'avait décidé le législateur américain. Elle a estimé que cette mesure ne concernerait probablement que quelques dizaines de soldats qui avaient servi les intérêts de la Nation et qu'il s'agissait là du moyen le plus rapide de répondre de la manière la plus juste possible aux attentes de personnes dont le sens du devoir ne saurait être méconnu.

Faisant observer que la mission d'information avait formulé des recommandations concrètes et pratiques, elle a souhaité qu'elles soient suivies d'effets le plus rapidement possible, aussi bien pour garantir l'attrait de l'engagement au service de la défense de la Nation que pour maintenir la confiance entre l'opinion publique et les armées. Elle a conclu que la mission d'information en formulant ses propositions avait témoigné de sa préoccupation à l'égard du sort des personnels masculins et féminins engagés sur des théâtres extérieurs.

Se félicitant de la création de la mission, M. Jean-Louis Bernard a estimé qu'elle avait permis d'y voir plus clair sur un sujet qui avait fait l'objet de trop nombreuses assertions erronées de la part de journaux ou d'individus en manque de célébrité. Il a salué le travail méthodique, sans a priori et sans passion, de la mission, qui avait permis de dénouer en grande partie l'écheveau compliqué des questions qu'elle avait à traiter. Il s'est également réjoui de la bonne ambiance dans laquelle s'étaient déroulés ses travaux. Tout en reconnaissant que l'objet de la mission n'était pas de produire un travail scientifique, il a néanmoins souligné qu'elle avait été conduite à se livrer à un exercice de pathologie rétrospective et prospective et a regretté à cet égard qu'elle n'ait pas eu la possibilité de collaborer plus étroitement avec le groupe d'experts présidé par le Professeur Salamon. Il a dit son espoir que cette collaboration s'instaure pour la suite des travaux de la mission d'information.

Evoquant ensuite le fond des problèmes soumis à la mission, il a rappelé qu'elle avait été confrontée à la question de trouver un facteur explicatif commun à la multiplicité et à la disparité des troubles dont souffraient des personnes ayant participé aux opérations militaires dans le Golfe. Il a remarqué à cet égard que ni l'uranium appauvri, ni la Pyridostigmine, ni le Virgyl ne permettaient d'expliquer l'ensemble des pathologies observées. Si l'uranium appauvri peut expliquer le développement des cancers, il n'en reste pas moins que des études épidémiologiques américaines ou conduites par le service national de santé (National Health Service) britannique ont montré qu'on observait moins de pathologies cancéreuses parmi les militaires ayant servi dans le Golfe qu'au sein d'un groupe témoin. S'agissant de la Pyridostigmine, il semble difficile de lier la prise de ce médicament, dont les quantités absorbées par les militaires français sont deux fois moindres que celles dispensées par la médecine civile, à l'apparition de troubles quelque dix ans après.

M. Jean-Louis Bernard a également évoqué l'éventuelle responsabilité des vaccins administrés aux soldats français, se référant sur ce point à l'audition du Professeur Gherardi. Il a rappelé que ce chercheur français avait trouvé des lésions anormales, révélant une accumulation d'aluminium dans la fibre musculaire d'anciens soldats sur lesquels avait été pratiquée une biopsie au point d'injection du vaccin. Il a expliqué que ces lésions pouvaient rendre compte des douleurs et fatigues dont souffraient ces personnes mais également d'autres troubles pouvant résulter de phénomènes de réaction auto-immune bien connus en pathologie. C'est dans cette perspective que la mission propose qu'un droit à pension soit reconnu aux anciens combattants souffrant de pathologies de type musculaire et de lésions de même nature que celles identifiées par le Professeur Gherardi à partir des points de vaccination.

M. Jean-Louis Bernard a ensuite insisté sur le rôle que le stress avait pu jouer dans les pathologies observées. Il a évoqué à ce propos un entretien de la mission avec des experts de la faculté de médecine de Georgetown University au cours duquel les phénomènes de stress, encore mal connus aujourd'hui, mais que l'on observe dans toutes les guerres, avaient été identifiés comme des facteurs pathologiques. La difficulté consiste cependant à établir le lien entre une pathologie et les formes de stress subies par les personnes concernées pendant une guerre mais aussi en raison d'événements personnels ou familiaux survenus par la suite. En tout état de cause, s'agissant de la guerre du Golfe, qui s'est déroulée sur un théâtre éloigné et dans un contexte de menace diffuse, notamment chimique, le stress est un élément à considérer. En l'absence de certitudes toutefois, la question de l'attribution d'un droit à pension pour les pathologies liées au stress reste ouverte.

En conclusion de son intervention, M. Jean-Louis Bernard a indiqué que le groupe UDF approuvait totalement les analyses et les conclusions du rapport.

Le Président Paul Quilès a dit partager les remarques de M. Jean-Louis Bernard sur l'absence de collaboration, qu'il a jugé regrettable, entre la mission et le groupe d'experts présidé par le Professeur Salamon. Il a rappelé à cet égard que, lors du lancement de la mission d'information, il avait insisté sur l'établissement de relations de travail entre les deux instances. Il a à ce propos regretté qu'alors que la mission avait fait la lumière sur les conditions d'emploi des militaires français, les experts n'aient pas tiré profit de ce travail pour les besoins de leurs propres recherches. Il a jugé utile que, pour la suite des travaux de la mission concernant les Balkans, des contacts s'instaurent entre cette dernière et le groupe d'experts.

M. Bernard Cazeneuve a jugé cette absence de collaboration d'autant plus regrettable qu'existait en théorie une parfaite complémentarité entre les travaux du groupe d'experts et la mission parlementaire, le premier ayant pour tâche d'étudier le lien éventuel entre les situations où étaient placés les militaires français et l'existence de pathologies spécifiques, alors que la seconde s'attachait à étudier les conditions d'emploi des forces ayant pu les exposer à des risques sanitaires. Il a relevé à cet égard que le groupe présidé par le Professeur Salamon s'était limité au recensement et à l'exploitation d'une bibliographie déjà constituée par d'autres sans avoir recours aux documents de la mission. Il a également constaté le contenu extrêmement synthétique des préconisations épidémiologiques émises par ce groupe. Il s'est d'ailleurs étonné que la mission n'ait eu connaissance du contenu de ces propositions que très peu de temps avant leur divulgation publique.

Faisant remarquer que l'évolution des conditions d'engagement des forces poserait de plus en plus fréquemment la question des risques sanitaires qui en découlent pour les militaires concernés, M. Robert Gaïa a souligné l'inadaptation du Code des pensions militaires d'invalidité à ces données nouvelles. Il s'est alors demandé si, pour éviter les polémiques dues à l'inadaptation d'un système dépassé, il ne faudrait pas réformer ce code en inversant la charge de la preuve de l'imputabilité au service.

Approuvant ces propos, Mme Michèle Rivasi a souligné que les dispositions du Code des pensions militaires d'invalidité ne laissaient que trois mois à un militaire qui revenait d'un conflit pour faire le lien entre ce conflit et sa pathologie alors que les maladies repérées parmi les anciens combattants de la guerre du Golfe, comme les affections neuro-musculaires ou les leucémies, pouvaient se déclarer après une longue période de plusieurs années. Elle a également jugé qu'il était vraisemblable que les prochains conflits se déroulent dans des environnements chimiques, bactériologiques ou nucléaires. Elle a alors fait ressortir l'importance de la proposition d'inversion de la présomption d'imputabilité au service formulée par la mission d'information.

Elle a également insisté sur les propositions de la mission d'information tendant à supprimer la possibilité pour le ministère des Finances de demander un nouvel examen du dossier de pension une fois la procédure initiale achevée, celle-ci étant déjà très lourde. Elle a enfin souligné que la mission proposait d'améliorer la transparence des conditions d'examen des dossiers par la Commission consultative médicale, la procédure actuelle ne permettant même pas au demandeur de connaître l'identité du médecin qui aura traité sa demande.

M. Charles Cova, après s'être réjoui des conditions de travail de la mission d'information et notamment de la confiance totale qui avait régné entre ses membres, a félicité les rapporteurs pour l'excellente synthèse qu'ils avaient fait d'un volume considérable de documents et de données. Il a ensuite exposé qu'au nom du groupe RPR, il approuvait sans réserve les conclusions de la mission.

Rappelant que la mission proposait l'adaptation à une situation nouvelle du Code des pensions militaires d'invalidité, il a indiqué, à titre personnel, que son seul souci au cours de sa participation à ses travaux avait été de protéger les militaires des conséquences des pathologies dont ils pouvaient souffrir du fait de leur service et de faire en sorte qu'ils puissent être justement indemnisés.

Le Président Paul Quilès a alors félicité le Président, les rapporteurs et les membres de la mission d'information pour l'importance du travail qu'ils avaient accompli et pour l'excellent climat dans lequel ils avaient rempli leur tâche. Il a ensuite insisté sur le progrès que représentait, pour l'information du Parlement, la procédure de transmission de documents classifiés aux missions d'information de la Commission, après déclassification à leur intention. Cette procédure établie au début de la législature et qui faisait à présent jurisprudence avait pu être largement utilisée par la mission d'information sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer à des risques sanitaires spécifiques.

M. Charles Cova a ajouté que, depuis la création de la mission d'information, le Ministre de la Défense avait pris un grand nombre de textes destinés à améliorer la protection des militaires en opérations, notamment dans les Balkans, jugeant que les travaux de la mission d'information avaient contribué à cette attitude. Il y a vu une des justifications essentielles de la constitution de la mission d'information.

La Commission a alors autorisé à l'unanimité conformément à l'article 145 du Règlement la publication du rapport d'information sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer, au cours de la guerre du Golfe et des opérations conduites ultérieurement dans les Balkans, à des risques sanitaires spécifiques.

ANNEXE N° 1

LISTE DES MEMBRES
DE LA
MISSION D'INFORMATION

- M. Bernard CAZENEUVE, Président ;

- M. Charles COVA, Vice-Président ;

- Mme Michèle RIVASI, Rapporteure ;

- M. Claude LANFRANCA, Rapporteur ;

- M. Jean-Louis BERNARD ;

- M. Alain CLARY ;

- M. René GALY-DEJEAN ;

- M. Guy TEISSIER ;

- M. André VAUCHEZ ;

- M. Aloyse WARHOUVER.

ANNEXE N° 2

COMPTE RENDU DU DÉPLACEMENT À LONDRES
LE 7 FÉVRIER 2001
(MINISTRY OF DEFENCE - MOD)

--____--

1. Prise en considération des maladies des Anciens combattants de la guerre du Golfe par le Royaume-Uni

● Historique du problème

Juin 1991 : retour des soldats britanniques du Golfe ;

Fin 1992 : amorce d'un constat de maladies inconnues parmi les vétérans du Golfe aux Etats-Unis ;

Juillet 1993 : le programme télévisuel britannique Newsnight évoque un problème similaire pour des vétérans britanniques ;

Octobre 1993 : mise en place du Medical assessment programme ; seulement deux vétérans se présentent à la fin de 1993 (ils seront 450 à la fin de 1995) ;

Novembre 1995 : la Commission de la Défense de la Chambre des Communes publie son premier rapport sur le sujet ;

Octobre-décembre 1996 : le Gouvernement reconnaît, après l'avoir nié dans un premier temps, que des pesticides à base d'organo-phosphorés ont été utilisés dans le Golfe ; le MoD annonce des recherches sur le sujet par un organisme indépendant ;

14 juillet 1997 : le Gouvernement travailliste publie un document intitulé « New Beginning » qui affirme que sa politique à l'égard des Anciens combattants de la guerre du Golfe sera animée par quatre principes : ouverture et dialogue avec les vétérans, poursuite du medical assessment programme, poursuite des recherches, transparence à l'égard du public ;

Septembre 1997 : craintes au sujet d'éventuelles expositions à des agents chimiques (contexte des incidents de Khamisiyah) ;

1998 : suite à de nombreuses accusations portées par des Anciens combattants de la guerre du Golfe contre le MoD, craintes au sujet d'éventuelles expositions à des poussières d'uranium appauvri.

● l'unité sur les maladies des Anciens combattants de la guerre du Golfe (GVIU)

La question des problèmes sanitaires des Anciens combattants de la guerre du Golfe a été suivie par les services médicaux du MoD jusqu'à 1997, date à laquelle une unité spéciale (GVIU), composée de médecins, de militaires et de fonctionnaires, a été créée pour apporter une réponse collective sur le sujet.

Le GVIU dépend du MoD et de la hiérarchie militaire, même si dans les faits le Chef du GVIU travaille en étroite relation avec le Ministre plus particulièrement concerné par le problème (M. John Spellar).

Le GVIU a pour missions :

- l'information externe des vétérans ;

- la fourniture d'une assistance médicale ;

- une aide aux recherches scientifiques ;

- la collecte des informations pertinentes demandées par le MoD ;

- l'aide aux vétérans dans leurs démarches pour percevoir des compensations et des

pensions ;

- la mise en exergue des leçons à tirer des problèmes rencontrés dans le Golfe.

A l'expérience, le GVIU apparaît à la plus grande partie des vétérans comme une structure utile. Il entretient des relations différenciées avec l'ensemble des organisations d'Anciens combattants de la guerre du Golfe.

A une question concernant la raison du rattachement du GVIU au ministère de la Défense, il a été répondu que le GVIU suit avant tout des problèmes liés à la défense car concernant les soldats. En effet, en 1993, la plupart des vétérans du Golfe étaient toujours dans l'armée et bénéficiaient du système de couverture sociale du MoD.

● Statistiques

75 % des vétérans du Golfe ne font plus partie des armées britanniques aujourd'hui ; ils relèvent par conséquent du système civil de protection sociale.

Nombre de militaires britanniques déployés du 1er septembre 1990 au 30 juin 1991 : 53 462, dont 37 434 pour la British Army, 10 064 pour la Royal Air Force, 5 964 pour la Royal Navy et 1 084 réservistes.

Nombre de patients examinés dans le cadre du medical assessment programme : 3 095 ; nombre de dossiers en attente : 31.

Nombre de pensions demandées : 3 348, dont 1 105 liées au syndrome du Golfe. Nombre de pensions obtenues : 2 900, dont 938 dossiers ont excipé du problème du syndrome.

Nombre de procédures devant les tribunaux civils pour négligence : 1 857, dont 212 concernent des enfants.

Nombre de vétérans décédés au 31 décembre 2000 : 477.

2. Etudes scientifiques sur le sujet du « syndrome du Golfe »

● Les recherches épidémiologiques au Royaume-Uni

Une étude de la King's College Medical School évoque une morbidité supérieure de 2 à 3 %, parmi les vétérans du Golfe, à celle du groupe référent. Elle repose sur des examens cliniques et des comparaisons d'état de santé des personnes à intervalle de 2 à 3 ans.

Une étude la Manchester University concerne également la mortalité des vétérans. Le volet sur les maladies n'a pas encore été publié.

Une étude de la London School of Hygiene and Tropical Medicine aborde, quant à elle, la santé reproductive et les enfants.

Tous ces programmes d'études sont ambitieux car ils portent sur une cohorte de quelque 53 000 personnes. Beaucoup de résultats sont en attente.

● Autres recherches au Royaume-Uni

Il s'agit des études suivantes  : Interactions Research (vaccins - 10 différents, au plus - Pyridostigmine...), Porton Down ; Neuromuscular Study, King's College ; Medical assessment programme (deux études sur les deux premières tranches de 1 000 vétérans publiées ou sur le point de l'être à ce jour) ; Litterature Review (revue des articles scientifiques) effectuée par l'University of Wales.

Il semblerait que les forces britanniques n'aient pas toujours été au courant des vaccins qui leur ont été administrés, notamment au sujet de l'Anthrax.

● Principales recherches américaines

Il s'agit plus particulièrement des recherches suivantes : Hyams et Al, 1996 (symptômes identiques pour les vétérans du Golfe à ceux des vétérans des guerres précédentes) ; Iowa Study, 1997 et Fukuda et Al, 1998 (symptômes et conditions médicales à partir d'une comparaison entre des vétérans du Golfe et des groupes référents) ; Cowan et Al, 1997 et Arameta et Al, 1997 (problèmes pour la descendance) ; Kang et Bullman, 1997 (mortalité des vétérans).

● Etudes de la Rand Corporation

Elles ont porté sur les feux des puits de pétrole, l'uranium appauvri, le stress, la Pyridostigmine, les pesticides, les maladies infectieuses, les agents NBC et les immunisations. Pour chacun de ces facteurs, aucune relation de cause à effet n'a pu être établie ; cependant, le contraire ne peut être également exclu.

A une question concernant les données sur le constat d'hyperplaquettose parmi les vétérans britanniques, il a été répondu qu'aucune information ne mettait en évidence ce type de pathologies.

● Publications du MoD

Elles concernent les organo-phosphorés (à la suite de la reconnaissance de l'usage de pesticides en 1996), les contre-mesures médicales (Pyridostigmine, vaccins dont il est difficile de savoir exactement quels sont les soldats qui s'en sont vus administrer, compte-tenu du manque de carnets de vaccinations relatifs à l'époque considérée), l'uranium appauvri, les événements biologiques et chimiques (pas d'attaques chimiques constatées) et les archives médicales.

Le MoD éprouve visiblement des difficultés à obtenir les données médicales des centres de recherche indépendants. Il a dépensé 6,5 millions de £ pour ses recherches. A titre de comparaison, ce sont 150 millions de $ qui ont été dépensés à cette fin aux Etats-Unis.

3. Analyse des résultats de mortalité des vétérans du Golfe

Les études de mortalité sur les vétérans du Golfe ont été réalisées à la suite des accusations de la presse. D'un point de vue méthodologique, la mort est un paramètre quantifiable et certain (à la différence des maladies) et elle permet d'identifier les maladies rencontrées. La documentation étant abondante, il était plus facile de mener des études sur ce point.

● Méthode

L'analyse a porté sur les 53 462 Anciens combattants de la guerre du Golfe (femmes, réservistes et volontaires inclus). Deux questionnaires maximum étaient adressés à chaque vétéran.

Les banques de données du National Health Service Central Registrer (qui centralise les informations sur l'identité et le suivi médical de tous les assurés sociaux britanniques depuis 1939) ont permis de localiser la quasi totalité des vétérans.

Les Anciens combattants de la guerre du Golfe ont été identifiés en 1996 par le MoD. De 1996 à 1998, le National Health Service les a localisés. A partir de 1997 , les certificats de mortalité ont été centralisés. En 1999, une équipe de chercheurs indépendants les a analysés, ce qui a donné lieu à une publication dans la revue The Lancet.

● Résultats

On constate une surmortalité des Anciens combattants de la guerre du Golfe de 3 % par an par rapport aux groupes référents, ce qui constitue un excès faible et sans véritable signification statistique.

Dans le détail, on observe :

- que les vétérans du Golfe sont moins victimes de maladies en général que le groupe référent dans une proportion de 18 % ;

- que les vétérans du Golfe sont moins victimes de cancers que le groupe référent dans une proportion de 9 % ;

- que les vétérans du Golfe sont moins victimes de maladies cardiaques et associées que le groupe référent dans une proportion de 23 %.

En revanche, les vétérans du Golfe sont davantage victimes d'accidents que le groupe référent dans une proportion de 22 %, et plus particulièrement lorsqu'il s'agit des accidents de voiture (30 %).

En conclusion, l'excédent de mortalité constaté n'a pas de signification statistique, ce que corroborent les études menées en Australie (sur les anciens combattants du Vietnam) et aux Etats-Unis. L'excès de mortalité lié aux accidents de transport tient sans doute à une attitude de relâchement envers le risque, consécutivement aux situations de stress vécues pendant le conflit. Quant au moindre nombre de cancers et de maladies cardio-vasculaires, il s'explique peut-être par l'exercice physique dû au déploiement (les contingents référents étant eux cantonnés dans les casernes lors des événements) et au temps de latence du développement des cancers (même si les leucémies et lymphomes ne sont pas concernés par ce constat puisqu'ils se développent plus rapidement).

Le résultat de cette étude est intéressant dans la perspective des réflexions sur l'uranium appauvri, la période d'utilisation de ce métal au cours du conflit étant plus longue et la quantité utilisée plus importante (300 tonnes) que dans le cas des Balkans (3 tonnes en Bosnie et 9 tonnes au Kosovo).

4. Medical assessment programme

Ce programme d'évaluation a été lancé pour déterminer s'il existait un syndrome du Golfe. En 1993, la question se posait ; désormais, il est acquis qu'il n'existe pas de syndrome du Golfe.

● Méthode

D'un point de vue méthodologique, l'évaluation repose sur un entretien médical (qui se justifie par un souci d'écoute et de compréhension des appréhensions des vétérans du Golfe) et sur des analyses sanguines complètes. Dans un premier temps, le nombre de patients a augmenté, mais depuis quelques années il diminue. Au début, il s'agissait surtout d'anciens militaires ; désormais, autant d'actifs que de retraités se font suivre.

Au cours de l'entretien retraçant l'historique général, l'historique spécifique et l'historique psychiatrique de chaque patient, les médecins identifient les problèmes ou l'absence de problèmes. Dans chaque cas, une longue discussion a lieu afin de les rassurer et de mettre fin à leurs légitimes inquiétudes.

Les problèmes envisagés concernent aussi bien les multivaccinations que les difficultés psychologiques.

Il faut bien garder à l'esprit qu'il n'existe pas de relation évidente entre l'apparition de symptômes et l'existence d'une maladie : certains symptômes sont perçus (mal au dos, courbatures...) alors même que la personne est bien portante.

Trois tranches de 1 000 personnes ont, à ce jour, fait l'objet d'analyses. Les résultats des deux premières sont publiés ou en voie de l'être.

93 % des vétérans examinés ont exprimé leur satisfaction à l'égard du Medical assessment programme, qui n'a toutefois pas une vocation à traiter les pathologies éventuellement constatées, bien que les personnes se plaignant d'affections ou de troubles particuliers puissent être orientées, à partir de ce niveau, vers les spécialistes civils.

● Résultats

80 % des vétérans se portent bien ; parmi les 20 % qui rencontrent des problèmes, la majorité est confrontée à des difficultés d'ordre psychologique. Le supposé « syndrome du Golfe » peut donc être perçu comme une cause explicative toute trouvée à leurs yeux, en ce qui concerne des problèmes qui ont leurs origines ailleurs. A titre d'exemple, l'uranium appauvri n'a pas engendré de cancers pour les 17 victimes américaines de tirs fratricides alors même que leurs organismes en incorporent depuis 10 ans ; de même, les conséquences de l'inhalation de poussières sont avant tout rénales et la durée de l'incubation est de 15 ans.

On constate une même répartition des symptômes exprimés par les militaires professionnels chez les volontaires et civils engagés dans le Golfe. Par ailleurs, les symptômes des Anciens combattants de la guerre du Golfe sont exactement les mêmes que ceux rencontrés par les vétérans de la guerre civile américaine, de la Seconde guerre mondiale et de la guerre du Vietnam, à la seule exception des douleurs musculaires.

A titre illustratif, 25 ans après la Première guerre mondiale, le MoD payait 100 000 pensions à des vétérans qui se plaignaient de pathologies proches de celles des vétérans du Golfe.

5. Problèmes sociaux, pensions...

Les Anciens combattants de la guerre du Golfe bénéficient de l'aide médicale du National Health Service (gratuit).

Pour bénéficier de compensations financières, ils doivent faire la preuve du lien entre leur maladie et le service qu'ils ont effectué dans le Golfe.

Les pensions auxquelles ils peuvent prétendre reposent sur :

- les Arm Forces Skills (compensations financières comblant le manque à gagner) ;

- les War Pension Skills (pensions instaurées après la Première guerre mondiale : après dépôt du dossier, pendant 7 ans, la preuve est à la charge de l'administration ; au-delà, le bénéfice du doute s'applique à la victime).

A titre d'illustration, une incapacité à 100 % ouvre droit à 600 £ par mois.

6. Uranium appauvri

Il est difficile de prouver la causalité de l'uranium appauvri dans la survenance des pathologies des Anciens combattants de la guerre du Golfe.

A l'impact de telles munitions sur leur cible, il se dégage un nuage de poussières avec des retombées rapides sur le sol dans un rayon de 10 à 20 mètres.

Le MoD a insisté sur les explications fournies aux vétérans sur ce sujet, quant aux risques chimiques et radiologiques encourus.

Seulement 2 % des soldats britanniques estiment avoir été exposés à des poussières d'uranium appauvri. Deux personnes sur les 3 000 ayant participé au medical assessment programme répondaient aux critères d'exposition : des analyses approfondies (sang, urine, etc) ont été menées, sans résultat positif.

Une étude a été réalisée sur la base des standards de la Commission internationale radiologique en matière d'absorption de poussières d'uranium appauvri. Par extrapolation aux risques de cancer, il est apparu que si une personne restait dans un char touché par ce type de munitions pendant 3 heures, sans masque et sans protection, le risque de cancer augmentait de 12 sur 100 000. Le risque est donc d'autant plus infime que les conditions envisagées (3 heures, pas de masque et pas de protection) ne pouvaient pas être toutes réunies à la fois.

Depuis le début de l'année 2001, le problème de l'uranium appauvri a pris une dimension politique importante au Royaume-Uni. Un programme d'évaluation volontaire a été lancé en janvier.

Le MoD souhaite un rapprochement avec les autorités médicales indépendantes. Il a même été proposé au Professeur Durakovic de tester les mêmes soldats dès 1999, sans que ce dernier ne réponde favorablement à cette demande de coopération ni ne transmette ses protocoles d'analyse.

7. Compléments épidémiologiques

● Interprétation du problème de la fatigue chronique

Une étude a été conduite sur la fatigue chronique des Anciens combattants de la guerre du Golfe, sans l'accord du Gouvernement britannique mais grâce à des financements américains. Le professeur Simon Weslay, du King's College a présenté les résultats des études qu'il a conduites.

Le champ d'étude a porté sur trois échantillons de 4 250 Anciens combattants du Golfe, de la Bosnie et d'autres affectations en 1991. Malgré les nombreuses difficultés méthodologiques rencontrées pour la localisation des vétérans (65 % seulement de réponses aux questionnaires sur une durée de deux ans du fait de leur grande mobilité inhérente à leur sortie de l'armée), 50 symptômes somatiques liés à la fatigue chronique pour les Anciens combattants de la guerre du Golfe ont finalement été mis en évidence.

Les études cliniques et les études psychiatriques générales situent les vétérans de la guerre du Golfe dans la norme. Il n'en va pas de même des études immunologiques, même s'il est difficile d'en déterminer la proportion explicative

Si le fonctionnement physique des membres des différents groupes ne présente pas de différences notables, les vétérans du Golfe se sentent plus malades que les autres. Trois raisons alternatives ont été envisagées : les vaccinations NBC (notamment contre l'Anthrax et la Coqueluche), surtout lorsqu'elles ont été inoculées sur place ; le stress dû à l'exposition médiatique et enfin l'aspect émotionnel d'une implication dans un conflit.

Après dix ans, il semble néanmoins que la situation s'améliore pour l'ensemble des vétérans.

● Discussion

A une question de savoir si une enquête française sur les 3 000 vétérans du Golfe toujours dans les Armées et sur 3 000 personnes retirées des Armées serait valable, il a été répondu que toute la difficulté consiste à retrouver un échantillon suffisamment important de malades (ce qui n'est pas facile, compte-tenu des mentalités culturelles des soldats, réticents à avouer leurs handicaps, et des changements psychologiques induits par le départ de l'institution militaire).

Les soldats qui ont quitté les Armées sont les plus intéressants à analyser en raison du processus de désocialisation auquel ils ont été confrontés, à l'image, par exemple, d'employés licenciés à la suite d'un plan social dans une grande entreprise.

A une question concernant l'influence psychologique d'un événement affectif sur un vétéran du Golfe ayant subi une forte tension nerveuse au cours du conflit, il a été répondu que les résultats du groupe de la Bosnie étaient différents de ceux du groupe du Golfe alors même que les hasards de la vie rencontrés par les vétérans étaient les mêmes, ce qui tendait à prouver qu'un drame familial n'avait pas nécessairement un caractère déclenchant des pathologies consécutives à la guerre du Golfe.

● Conclusions

L'uranium appauvri ne serait pas à l'origine des pathologies éprouvées par les Anciens combattants du Golfe et de la Bosnie. Les hypothèses portent donc sur les contre-mesures médicales, le stress psychologique dû à la longueur du déploiement et la médiatisation du conflit (ce que corroborent des études américaines).

A l'évidence, les troubles psychologiques rencontrés par les vétérans de la guerre du Golfe sont plus importants que ceux des vétérans de la Bosnie, notamment parce que la nature du stress subi était très différente. Néanmoins, ce genre de problèmes tend à diminuer avec le temps.

Le mystère n'est pas ce qui s'est passé dans le Golfe, mais ce qui ne s'est pas passé en Bosnie. Compte tenu du constat qu'aucune pathologie particulière n'a été décelée parmi les vétérans de la Bosnie cinq ans après les faits, si quelque chose venait à être décelé dans les années à venir au cours du suivi de ces mêmes personnes, cela tendrait à prouver l'implication des médias dans la survenance de ces pathologies et, par conséquent, leur nature psychologique.

ANNEXE N° 3

COMPTE RENDU DU DÉPLACEMENT
AUX ETATS-UNIS
DU 2 AVRIL AU 6 AVRIL 2001

--____--

MARDI 3 AVRIL 2001, À 9 HEURES

Entretien avec le docteur Bernard D. Rostker, ancien « Special Assistant to the Secretary of Defense for Gulf War Illnesses » puis ancien « Special Assistant to the Secretary of Defense for Gulf War Illnesses, Medical Readiness and Military Deployment » (fonction étendue à partir du mois d'août 2000) ;

à la Rand Corporation à Arlington (Virginie).

- Après quelques mots de remerciements du Président Cova, le docteur Rostker a tenu à préciser que le Bureau dont il assumé la charge au sein du Département de la Défense (DoD) s'appelle le OSAGWI. Il avait été initialement conçu (septembre 1996) comme une structure non permanente avant sa transformation et l'extension de ses compétences (août 2000) à la préparation médicale et à l'utilisation de l'expérience acquise pour de futures opérations extérieures. Au terme de l'Administration Clinton, ce Bureau comptait environ 200 personnes.

Le docteur Rostker a ensuite considéré qu'au lendemain de chaque conflit depuis la guerre de Sécession, on constatait l'apparition de maladies ou de troubles difficilement expliquables. Il a rappelé que la création de l'OSAGWI était intervenue à la suite du constat d'insuffisance de prise en compte voire d'attention de la part des rouages administratifs du Pentagone vis-à-vis du suivi médical des veterans.

- Le docteur Rostker a également rappelé qu'une Commission présidentielle sur ce sujet était déjà en place 9 et avait, dès l'époque, formulé des critiques à l'égard du Pentagone face à ses refus de répondre à des questions d'ordre opérationnelles peut-être moins par manque de volonté que par incapacité en raison de l'absence de données précises sur l'état sanitaire des forces : la Commission présidentielle avait d'emblée souligné d'éventuelles possibilités d'exposition au gaz Sarin, non au titre d'activités opérationnelles dans le cadre de l'offensive terrestre mais ultérieurement sur la période des 19 au 21 mars 1991, à l'occasion de la « dépollution » du dépôt d'armes de Khamisiyah en Irak. La Commission présidentielle a donc mis en exergue ces problèmes liés à l'ignorance du Pentagone et après une enquête de six semaines confiée à un « think-thank» privé, la Rand Corporation, une nouvelle orientation a été donnée à la réflexion par le Gouvernement fédéral. La Rand a en effet considéré que les projets de recherche étaient mal « ficelés » car trop orientés sur des questions strictement opérationnelles alors que la vraie question devait être « qu'est-ce qu'ils ont fait exactement au cours des opérations ? » (sic).

A partir de là, le Bureau dirigé par le docteur Rostker a pu bénéficié d'un budget « illimité », passant de ce fait de 12 militaires et de 8 agents sous contrat à 120 personnes pour atteindre les 200 membres au plus fort des activités. A cet égard, le docteur a rappelé qu'une documentation complète sur les activités était disponible sur Internet, notamment sur les « incidents » de Khamisiyah et qu'au sein du Bureau avait été opérée une claire séparation entre les questions médicales et les questions de nature opérationnelle.

Le Sous-Secrétaire chargé des questions de santé au sein du DoD a reçu la mission de coordonner les recherches qui impliqueraient également d'autres organismes comme les Centers for Disease Control and Prevention (CDC).

La Rand Corporation a eu, par contrat, la mission d'analyser l'ensemble des documents médicaux disponibles.

La Commission présidentielle a ensuite ramené à 10 causes principales, les possibilités de déclenchement de maladies ou troubles (vaccins, Sarin, bromure de Pyridostigmine, etc...) en constatant qu'aucune ne semblait, à elle seule, justifier la gamme des symptômes constatés ou rapportés par les veterans.

Dès lors pour les médecins, l'idée d'une cause unique et même d'un syndrome spécifique a été repoussée. Dans le même temps, la Rand Corporation publiait un document sur le stress en estimant qu'il était difficile de conclure définitivement sur ce sujet et sans exclure toutefois un possible rôle de cet élément complexe.

La Commission présidentielle a multiplié les critiques à l'égard du Pentagone (tenues des registres, pertes de documents sur les vaccinations, affaire de Khamisiyah, etc...). S'agissant d'une exposition temporaire au Sarin et au regard des conclusions de la Rand, la Commission présidentielle a estimé que tout complément d'enquête sur ce point ne pouvait relever en tout état de cause de la compétence du DoD dont la crédibilité se trouvait entamée.

Une seconde Commission présidentielle (Presidential Special Oversight Board - PSOB -) a été chargée en 1988 de surveiller l'ensemble des travaux. Son nouveau Président était l'ancien Sénateur Warren B. Rudman, avec lequel le docteur Rostker s'est plu à souligner la qualité des relations qu'il a entretenues.

- Pour sa part, l'Institut de Médecine (IOM), un organisme dépendant de l'Académie nationale des Sciences, a reçu la mission de faire un nouveau point sur l'état de la littérature médicale après celui qui avait été effectué par la Rand.

L'Académie nationale des Sciences est un organisme indépendant, à but non lucratif, de nature privée mais dont les activités sont placées, depuis 1863, sous la garantie du Congrès qui assure la pérennité de ce statut.

Dans un premier rapport, publié à la fin 2000, l'IOM a fait état de ses conclusions sur quatre des causes potentielles de maladies ou de troubles (uranium appauvri, bromure de Pyridostigmine, Sarin et vaccinations). Un comité de spécialistes de 18 professeurs de médecine ou de santé publique, présidé par le professeur Harold C. Sox du Darmouth-Hitchcock Medical Center, s'est spécialement attelé à cette tâche.

· S'agissant de l'uranium appauvri, un travail exceptionnel par son ampleur a été réalisé : à son niveau d'utilisation dans le Golfe, aucune existence de troubles rénaux, spécifiques n'a été relevée. M. Bernard Rostker a tenu à rappeler qu'une abondante documentation existait déjà sur l'uranium appauvri, en tant que métal lourd au même titre que le plomb et le tungstène.

Au sujet de tirs fratricides intervenus au cours des opérations, M. Rostker a mentionné la surveillance de long terme conduite sur 16 soldats blessés et conservant des fragments d'uranium appauvri dans leur organisme (étude commencée dès 1993, par le Baltimore Department of Veterans Affairs Medical Center). Selon lui, les résultats de cette observation seraient analogues aux premières conclusions du groupe d'études constitué par l'OTAN sur le Kosovo. Le docteur Rostker a également insisté sur les informations dont disposeraient les Etats-Unis et qui prouveraient que le régime irakien a financé une campagne internationale contre l'emploi militaire de l'uranium appauvri.

Puis, revenant à la question des tests, il a indiqué que des expériences se poursuivaient à partir des impacts sur les véhicules atteints par des armes incorporant de l'uranium appauvri car les premières données s'avéraient erronées et les détecteurs placés à bord des chars avaient été détruits. Il a précisé que de nouvelles données étaient reconstituées notamment pour des situations de troupes « sous le vent » et que pour toute décontamination, il s'avérait, à tout le moins, indispensable de porter masques anti-poussière et gants de protection.

· Répondant à une question de Mme Michèle Rivasi sur les caractéristiques des détecteurs employés, il a indiqué qu'il s'agissait de boîtiers renforcés constitués d'un mécanisme sous vide à membrane ce qui permettait un recueil et une analyse des particules. En conclusion, le docteur Rostker a estimé que l'uranium appauvri ne présentait pas de risques si des précautions étaient prises. Il a établi une analogie avec les soins dentaires pour lesquels aucun excès de radiologie ne devait être pratiqué mais qui, en tout état de cause, ne pouvaient être à l'origine de cancers foudroyants, en ajoutant qu'en matière de radioactivité tout était question d'ordres de grandeur et qu'un vol aérien vers Denver présentait, en ce domaine, tout autant de possibilités d'exposition ( !).

En outre, M. Bernard Rostker a indiqué que 50 sites avait fait l'objet de prélèvements par carottages au Koweït : aucun ne se caractérise par une élévation de la radioactivité, à l'exception d'un seul pour lequel l'explication est qu'il s'agit d'une décharge de véhicules atteints et que du fait d'un ruissellement des eaux une accumulation de poussières s'était produite.

· En remerciant le docteur Rostker pour la clarté de son exposé, M. Charles Cova, Président de la mission d'information, a évoqué les points suivants : le rôle des Services de santé des Armées américaines qui semblait faire l'objet de controverses, la date à laquelle les premières maladies ont été déclarées ainsi que les critères et pathologies susceptibles d'ouvrir à une indemnisation.

A cet égard, le docteur Rostker a précisé qu'il convenait de distinguer les militaires toujours en service de ceux qui ont quitté les Armées : les premiers doivent s'adresser aux hôpitaux militaires alors que les seconds ont le Département des Anciens combattants (Veterans Affairs) pour interlocuteur. C'est au niveau des services des Anciens combattants que les premières plaintes ont été constatées. En fonction des protocoles de diagnostic de l'ampleur des symptômes observés, il est décidé ou non d'accorder une indemnisation.

Il a précisé que près de 110 000 soldats avaient pu être auscultés ou bénéficiés de tests médicaux, soit 1/6e du total des engagés. 10 % de ces soldats ont subi des « check up » de routine et sur un groupe de près de 80 %, les affections ou maladies constatées présentaient d'autres origines que la présence dans le Golfe. Un groupe de 10 % de soldats parmi ceux qui ont été examinés souffre de diverses affections non expliquées pour lesquelles une présomption d'imputation médicale aux opérations du golfe est possible : une indemnisation « au bénéfice du doute ». 3 000 voire 4 000 d'entre eux pourraient, à ce titre, être indemnisés, selon le docteur Rostker qui a insisté, à nouveau, sur l'absence de troubles pouvant être indiscutablement liés à l'uranium appauvri, à l'exception de 16 militaires dont les organismes recèlent des débris d'uranium appauvri mais qui souffrent de nombreux autres maux en raison de leur nature de grands blessés ou de grands brûlés. Il a toutefois reconnu que pour certains tests cognitifs sur ordinateur, certains parmi ces 16 soldats éprouveraient des difficultés.

- Puis, Mme Rivasi a précisé que s'agissant des Français, on avait relevé, au moyen des Detalac, cinq possibilités d'exposition à des neurotoxiques, voire au Sarin.

Elle a fait état de détections en janvier 1991 effectuées par les forces tchèques et françaises. Le docteur Rostker a indiqué pour sa part qu'il pensait savoir que le ministère de la Défense avait sur ce point précisé au DoD qu'elles relevaient en fait de fausses alertes. De mémoire, il a indiqué avoir fait deux déplacements en France qu'il a daté de 1997 et 1998. Enfin, s'agissant du bromure de Pyridostigmine (bP), il a souligné l'étendue des malentendus sur ce sujet et concernant d'éventuels empoissonnements par des neurotoxiques, il a rappelé qu'une étude du docteur Robert W. Haley, de l'Université « Texas Southwest Medical Center » (Dallas) se fondait sur un protocole trop limité (12 personnes) relatif à l'« incident » d'Al Jubayl.

Le docteur Rostker a, par ailleurs, rappelé que 50 000 soldats avaient fait l'objet d'examens spécifiques du fait de leur présence près de l'« épicentre » du dépôt de Khamisiyah : moins de 1 % d'entre eux appartenant à une même compagnie ont présenté des troubles identiques. En conclusion , il a considéré que la détermination voire l'acharnement de certains veterans et d'associations résultait d'un principe simple : « quand vous êtes malade, vous voulez une explication à tout prix ! ».

MARDI 3 AVRIL 2001, À 10 HEURES 30

Entretien avec le Général de corps d'Armée Dale A. Vesser (E.R.) « Special Assistant to the Secretary of Defense for Gulf War Illnesses » (par intérim) successeur de M. Rostker avec lequel il collaborait, et ses collaborateurs dont le docteur Michael Kilpatrick, « Chief of the Staff of the Special Assistant to the Secretary of Defense for Gulf War Illnesses, Medical Readiness and military Deployments » ;

au 5113 Leesburg Pike - Skyline Tower 4 - Falls Church.

Après avoir souhaité la bienvenue à la mission d'information au nom de M. Donald Rumsfeld, Secrétaire à la Défense, le Général de corps d'Armée Dale Vesser a souligné que les opérations du golfe se caractérisaient par un bon bilan au regard du faible nombre de pertes humaines au sein de la coalition mais par une moins bonne situation en matière sanitaire au regard des divers maux dont ont eu à se plaindre une fraction des troupes depuis leur retour.

Le Général de corps d'Armée Vesser a fait état de contacts entre son service et des responsables français, notamment en matière de vaccinations, en mentionnant deux visites effectuées en France. Il a rappelé à cette occasion que le ministère de la Défense français avait eu une attitude de dénégation au cours des premiers contacts, que le Général de corps d'Armée Vesser a expliquée par le fait qu'aucune plainte particulière d'anciens combattants ne lui était parvenue, contrairement à la situation qui prévalait déjà au sein des forces américaines, mais aussi canadiennes ou encore britanniques. Le Général de corps d'Armée Vesser a ensuite indiqué que son service attendait des informations précieuses à la suite d'une demande adressée à la Garde nationale saoudienne qui allait transmettre jusqu'à 1,5 million de dossiers de militaires et de civils qui seront analysés dans le cadre d'une étude conduite par le « Naval Health Research Center » de San Diego (organisme dépendant de l'US Navy).

A une question de Mme Rivasi relative à l'information donnée par le Haut commandement américain à ses Alliés sur l'emploi d'armes incorporant de l'uranium appauvri (UA), le Général de corps d'Armée Vesser a d'abord précisé que les Américains n'avaient pas été seuls à utiliser de telles armes en citant les Britanniques et que dans les opérations du Kosovo cette information avait été donnée même s'il a convenu que des difficultés ont pu survenir en raison du défaut de formation dont l'ensemble de la communauté militaire a pu souffrir en ce domaine, y compris dans les Armées américaines à l'égard de leurs propres soldats.

Il a ensuite estimé que sa première priorité restait d'établir un bilan médical le plus exhaustif possible afin de définir les soins les mieux appropriés. N'étant pas médecin mais un ancien officier général de l'US Army, il a souligné que sa seconde priorité était qu'une telle situation ne se reproduise plus jamais après une quelconque opération. A cet égard, il s'est félicité que son service soit devenu un Bureau permanent investi d'une nouvelle mission (« le « Readiness Medical ») qui inclut également les familles des militaires dépêchés à l'étranger.

Puis, il a ensuite engagé une présentation des travaux entrepris en précisant que tous ne relevaient pas, au niveau de leur exécution, du Bureau. En matière de communication, il a indiqué que le Bureau avait accompli des efforts très importants : organisations de 13 « Town Hall meetings » et de 19 visites d'unités, réponses à plus de 17 000 E-mails, à 15 800 appels téléphoniques et à près de 5 300 lettres.

· Le Lieutenant-Colonel O'Donnel, médecin militaire du Bureau, a ensuite précisé que les premières plaintes de veterans dataient de la fin de l'année 1991 et du début 1992. Au départ, aucun profil particulier de recherche n'a alors été développé : on s'est fondé uniquement sur les symptômes les plus couramment observés ou décrits.

Le médecin O'Donnel a ensuite présenté le « Comprehensive Clinical Evaluation Program » (CCEP) qui a débuté en 1994 : il s'adresse à tous les veterans ainsi qu'à leurs familles pour un pré-diagnostic de santé gratuit et fait intervenir les centres médicaux régionaux du DoD qui bénéficient, pour les cas les plus complexes, du soutien du Deployed Health Clinical Center du Walter Reed Army Medical Center de Washington (DC). Sur ce point, il a noté que les cas d'« unexplained symptoms » ne sauraient être médicalement parlant assimilés à un « syndrome du Golfe » car ces symptômes se rencontraient couramment chez des populations n'ayant jamais quitté les Etats-Unis. Il a toutefois affirmé que les anciens combattants du golfe rendaient plus fréquemment compte de certains symptômes que d'autres catégories de sujets.

Abordant ensuite la question du Sarin et du Cyclo-sarin, il a souligné que nombre de veterans du Golfe restaient persuadés avoir été exposés à ces toxiques : en tout état de cause, le Département des Anciens combattants (Veterans Affairs) a posé le principe que pour se faire soigner, il convenait préalablement d'accepter de faire établir un bilan et des tests.

Puis, il a indiqué que près de 250 000 soldats avaient absorbé du bromure de Pyridostigmine (bP) « sur ordre du commandement » et que cet antidote présentait une efficacité contre le Soman mais pas à l'égard du Sarin.

Il a conclu que d'après les conclusions de l'Institut de Médecine (IOM) de l'Académie nationale des Sciences, aucune cause unique se saurait être à l'origine d'un syndrome du Golfe.

· Le médecin colonel Abreu, Directeur des enquêtes et analyses du Bureau (ancien membre de la 82ème AirBorne) a précisé que les Detalac français avaient pu effectuer des détections suspectes les 21 et 22 janvier 1991. Il a ensuite évoqué la situation des gaz Sarin et Moutarde échappés de Muhammadiyat après des bombardements en janvier et février 1991 (à environ 350 km de Rafha). Poursuivant sa présentation des cartes figurant dans le dossier remis à la mission d'information, il a également évoqué de possibles détections à proximité immédiate de Rafha (28 janvier 1991) ; ces situations étant au moins susceptibles de concerner potentiellement des unités françaises engagées dans la profondeur (CRAPS). Enfin, s'agissant de l'acide nitrique, il s'est interrogé sur la capacité des Detalac français à distinguer une telle substance en vue d'alertes.

· A une question du Président Cova sur une recrudescence ou, au contraire, une diminution des pathologies constatées, le Docteur Kilpatrick a convenu qu'en dépit de l'intérêt de la presse pour la situation des vétérans du Golfe, il convenait de noter que 17 % seulement de ces vétérans avaient réalisé, à ce jour, un véritable bilan médical. Il a ajouté qu'il devait « honnêtement » répondre que l'on ne disposait pas encore suffisamment d'informations bien que les études réalisées sur le « syndrome du Golfe » étaient déjà plus nombreuses que sur aucune autre « maladie de guerre ». Puis en réponse à Mme Rivasi qui l'interrogeait sur sa possibilité de confirmer ou de s'infirmer que l'U.A. utilisé avait pour origine celle d'un U.A. retraité ou obtenu à la suite d'un procédé classique d'appauvrissement, le médecin colonel Abreu a fait état qu'il s'agissait d'un produit dérivé d'un processus d'enrichissement ou d'une possibilité d'utilisation de l'uranium retraité. Il n'a pas exclu qu'une faible contamination restait concevable au cours d'un tel processus.

Enfin, à une question de M. Cova, il a été répondu qu'effectivement les chars américains de type M1 incorporaient dans certaines parties de leur blindage de l'U.A., ainsi qu'aux niveaux les plus sensibles de la tourelle.

MARDI 3 AVRIL, À 15 HEURES

Entretien avec MM. Daniel Clauw, M.D., et Timothy R. Gerrity, Ph. D. co-directeur du « Chronic Pain and Fatigue Research Center » du Georgetown University Medical Center, Washington D.C. ;

à l'Ambassade de France.

Le Docteur Clauw a d'emblée précisé qu'au long de ses travaux, il n'avait jamais eu à connaître du « sort médical » des militaires français déployés dans le Golfe. Il a toutefois indiqué que les dossiers de vaccinations britanniques étaient mieux tenus que les registres américains ; la France ayant, sur ce point, judicieusement adopté la formule du dossier individuel.

Puis, il a considéré que la méthode tendant à modéliser les maladies « post-guerre du Golfe » restait une ambition scientifique légitime. A cet égard, les travaux entrepris dans le cadre du centre qu'il co-dirige, ont fait l'objet d'une présentation lors d'une conférence de deux journées tenue à la fin janvier 2001 à Alexandria.

Il a présenté différentes fiches figurant dans le dossier remis à la mission d'information et notamment l'analyse du stress en tant que facteur déterminant des symptômes multiformes constitutifs de ce qu'il est convenu de dénommer le « syndrome du Gofle ».

La définition du stress restant en soi difficile, le Docteur Clauw a énuméré diverses possibilités d'aggravation de cet élément au titre desquelles s'inscrivent certaines hypothèses d'infection et également les multi-vaccinations. Il s'agit d'« external challengers or stressors ».

S'agissant des hypothèses fondées sur l'utilisation de l'aluminium en tant qu'« adjuvant » pour certains vaccins, M. Gerrity a déclaré de pas la prendre réellement en compte, bien qu'il ait souhaité que puisse lui être communiqués les travaux engagés sur ce point, en France, par le Professeur Romain K. Ghérardi de l'Hôpital Henri Mondor. M. Cova, Président, a agréé cette possibilité.

Le Docteur Clauw a précisé, qu'il était avéré que les militaires vaccinés sur le terrain peu de temps avant l'engagement subissaient plus fortement le stress que ceux qui avaient été vaccinés dans d'autres conditions, auparavant. M. Claude Lanfranca a considéré que le stress n'était sans doute pas, du moins à lui seul, acceptable comme principal ou unique facteur explicatif, ce que M. Gerrity a confirmé en insistant sur l'état de santé de départ des sujets et même de certaines maladies d'origine. En tout état de cause le stress n'est pas une découverte récente et son rôle est assez bien connu depuis les guerres de Sécession et de Crimée ; les Britanniques ayant relevé ses effets dès ce dernier conflit.

En tout état de cause, le Docteur Clauw a estimé qu'il convenait toujours de s'atteler à lever des interrogations essentielles sur les véritables causes du stress et qu'il n'existait d'ailleurs pas un stress mais des stress.

Reprenant certains développements avancés par le Docteur Clauw, M. Claude Lanfranca a souligné l'importance de mieux connaître les mécanismes du stress, dès lors que l'agencement du système nerveux réagit à certains facteurs générateurs de stress : le rétablissement de l'homéostasie constituant une question essentielle. En conclusion à son propos, M. Lanfranca a constaté la difficulté à quantifier le stress et notamment le caractère plus ou moins durable de ses effets : si le facteur stress est biologiquement identifiable, le défaut de signature biologique du stress s'inscrit au c_ur d'une problématique extrêmement difficile. En conclusion, le Docteur Clauw a rappelé que l'étude de l'Université de Georgetown développait certaines propositions en matière de soins qu'il ne pouvait cependant pas exposer dans leur totalité par manque de temps.

MERCREDI 4 AVRIL 2001, À 9 HEURES

Entretien avec le Docteur John, R. Feussner, Chief Research Development Officer for the Veterans Health Administration accompagné de Mme la Docteure Kelly Brix et de M. Roger Kaplan, fonctionnaire du ministère des Anciens Combattants ;

au Department of Veterans Affairs (VA), 810 Vermont Avenue, N.W., Washington D.C..

Après une présentation par le Président Cova des méthodes de travail de la mission et de son champ de compétence désormais étendu aux Balkans, le Docteur Feussner a souligné le rôle de la coordination de son service pour l'effort de recherche consenti en faveur des maladies et troubles des vétérans du Golfe. A ce sujet, il a rappelé l'implication d'autres organismes publics dans cette démarche aux côtés du Department of Veterans Affairs (VA), en mentionnant plus spécialement le Pentagone, le Department of Health and Human Services (H.H.S.) et les Centers for Disease Prevention and Control (CDC) dont le Centre d'Atlanta assume sur ce thème des missions très importantes.

Le Docteur Feussner préside le « Research Working Group » (RWG) réunissant des hauts responsables de ces administrations au titre du Persian Gulf Veterans Coordinating Board (PGVCB). Cette structure est annuellement tenue de présenter un rapport au Congrès sur l'attribution et l'utilisation des fonds publics par les divers organismes de recherche (publics ou privés) subventionnés dans ce cadre. Dans le dossier remis la mission d'information, figure un exemplaire de ce rapport, de son annexe retraçant chacun des programmes de recherche et les références des équipes concernées ainsi qu'un exemplaire de l'audition de M. Feussner (27 septembre 2000) devant la sous-commission de la Chambre des Représentants chargée de la Sécurité nationale, des Anciens Combattants et des Relations internationales (Subcomittee of the Committee on Governement Reform). Ce texte précise qu'aux 192 projets de recherche en cours, 42 nouveaux projets ont été ajoutés au titre des années fiscales 1999 et 2000 (FY 1999 and 2000). S'agissant des travaux de l'Institut de Médecine (I.O.M.) de l'Académie nationale des Sciences, le VA a conclu, le 24 juin 1998, un contrat de recherche de 27 mois d'un coût total de 1,25 millions de dollars, selon les informations données, à cette occasion, au Congrès.

Le Docteur Feussner a précisé à la mission que 60 % des programmes engagés étaient encore en cours de réalisation pour une enveloppe globale approchant les 155 millions de dollars.

Dépenses du budget fédéral en faveur de la recherche*

(en millions de dollars)

 

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Total
1994/2000

Pentagone

6,2

11

11,7

28,9

12,6

22,2

16,2

100,8

Veteran's Affairs

1,2

2,3

5,3

2,8

4,8

9

11,9

37,3

Département de la Santé (HHS)

2,5

1,6

1,6

1,6

1,5

8,9

Total

7,4

15,8

18,6

31,7

19

32,8

29,6

155

* hors fonds des Agences spécialisées.

(Source : Military and Veterans Health Coordinating Board)

· A la question de Mme Rivasi sur l'existence d'un facteur déterminant pour le déclenchement de maladies (Sarin, bromure de Pyridostigmine, uranium appauvri etc...), le Docteur Feussner a répondu « aucun ».

Il a ajouté que pour l'uranium appauvri, des recherches étaient en cours sur l'animal ainsi qu'un projet de surveillance des militaires ayant reçu des éclats dans le corps : une trentaine de personnes ont ainsi pu être suivies depuis 7 ans et, à ce jour, aucun cas d'empoisonnement patent n'avait été décelé ; l'élimination s'effectuant normalement par les reins. En ce domaine, il a cependant insisté sur la nécessité d'un suivi de long terme pouvant aller jusqu'aux quinze années à venir car la période de latence est longue.

A une autre question de Mme Rivasi sur les travaux du Docteur Durakovic, Mme la Docteur Brix a répondu que ce médecin utilisait des méthodes chimiques particulières et le DoD avait d'ailleurs demandé à plusieurs laboratoires de réaliser des protocoles d'analyse ; elle a également insisté sur l'intérêt se pencher sur les effets de l'uranium appauvri en tant que métal lourd plutôt que sur sa radioactivité. Les mesures de quantité d'uranium appauvri décelées à ce jour dans les urines n'étaient pas ventilées, il convenait aussi de s'interroger sur l'absence de pathologies constatées chez les travailleurs de l'uranium pourtant exposés à des doses très supérieures à celles concernant les militaires du Golfe ou même des Balkans.

M. Jean-Louis Bernard a ensuite évoqué l'exposition à plusieurs facteurs voire l'addition de plusieurs d'entre eux comme causes de troubles et de stress. Il s'est étonné, à cet égard, que dans son exposé devant le Congrès, le Docteur Feussner n'ait fait qu'une seule allusion au stress.

Le Docteur Feussner a répondu qu'il s'agissait de questions cruciales tant que l'on n'avait pu obtenir de preuves irréfutables sur un lien explicite entre une exposition précise et différents facteurs, en ajoutant que sur ces sujets on ne disposait que de données de qualité médiocres : les symptômes décrits se ramenaient souvent à de vagues notions. Concernant le stress, il a indiqué que le problème s'avérait d'autant plus complexe que des controverses perturbent tout débat : pour un Américain moyen, cette notion se rapporte à un contexte psychiatrique alors que les médecins savent qu'il constitue un puisant facteur qui module la vie biologique. 70 études en cours traitent de ce thème mais il existe un risque d'en faire un « concept valise » expliquant tout, voire l'essentiel.

· M. Claude Lanfranca a exprimé son intérêt de constater que chez les travailleurs de l'uranium l'élimination s'effectuait par le rein sans observer de néphrites et il a demandé s'il en allait de même pour les soldats ayant des éclats d'uranium appauvri dans le corps. Le Docteur Feussner a précisé que pour le rein chez cette catégorie, des dommages et altérations restaient probables à long terme.

S'agissant du stress, il a ajouté que cet élément était pris en compte, y compris pour les études sur la Pyridostigmine indiquant que sur ce point la prise « en circonstances anormales » (chaleur, épuisement, etc...) avait fait l'objet d'expertises. Il a notamment cité une étude française sur des cochons d'Inde. Puis, il a noté que l'étude du polymorphisme génétique représentait un travail difficile car il existait de grandes variations d'un individu à l'autre, de même pour le système enzymatique ou l'on ne constatait rien de déterminant.

M. Charles Cova a évoqué, les différences de pratique en matière de vaccinations ou encore pour la durée d'absorption de la Pyridostigmine entre les Etats-Unis et la France tout en constatant l'apparition de symptômes comparables que le stress pouvait d'ailleurs peut-être expliquer, en partie (multiplication des alertes chimiques, port prolongé de vêtements de protection, milieu difficile, etc...). Le Docteur Feussner a répondu que pour chaque conflit, le stress générait un syndrome : le « syndrome du c_ur du soldat » à la Première guerre mondiale, le « syndrome du bombardé » à la Seconde guerre mondiale. Par ailleurs, les questions relatives aux conditions de la démobilisation (l'« après-guerre ») s'avéraient nécessairement distinctes de celles de l'exposition en cours de conflit. A ce sujet, deux grandes d'essais cliniques sont en cours pour un budget de 25 millions de dollars dont l'E.R.T. (Exercise/Behavioral Therapy/Trial).

· A une question de Mme Rivasi sur les conseils que donnerait désormais le VA aux soldats américains, après les expériences du Golfe puis du Kosovo, le Docteur Feussner a tenu à rappeler qu'aucune leucémie n'avait été relevée au sein des forces américaines et que pour ce qui concernait les troupes italiennes, un « battage de presse » avait réussi à masquer le fait que le taux de leucémie des militaires était inférieur de moitié à celui de la population. Il a ajouté qu'une étude britannique de grande envergure comparant la situation des soldats du Golfe et des Balkans ne mettait nullement en évidence l'existence d'un syndrome des Balkans. Selon lui, le Golfe était une guerre alors que les opérations des Balkans correspondent à des déploiements.

Il s'est toutefois déclaré en accord avec la nécessité de mieux faire sur la base de bilans dans tous les domaines : un nouveau système de surveillance médicale mis en _uvre pour les Balkans a d'ailleurs été plus exigeant et rigoureux. Cette amélioration du suivi des militaires reposait sur un conseil de coordination VA/DoD et qui, en outre, se traduisait déjà par une meilleure information des soldats sur les risques susceptibles d'être encourus. Cet effort se traduisait également par la constitution de centres d'excellence tant au sein du VA que du DoD. Enfin, une étude dite de « la cohorte du millénaire » (The Millenium Cohort Study) répondant aux recommandations de l'I.O.M. permettra une collecte systématique d'informations de nature épidémiologique et démographique au long des carrières des personnels et non exclusivement à l'occasion de leur présence dans des opérations extérieures (« avant-pendant-après »).

A la question de M. Cova sur le nombre de soldats indemnisés et sur les modalités de l'indemnisation, M. Feussner a indiqué que 143 000 vétérans du Golfe justifiaient d'un état d'invalidité partielle ouvrant droit à une indemnisation (la première des causes d'indemnisation correspond à des affections aux genoux et au dos), en précisant qu'un peu plus de 3 000 vétérans bénéficiaient, selon les orientations du Congrès, d'une indemnité pour des pathologies inconnues ou inexplicables qui pour certaines s'apparentaient d'ailleurs à des pathologies de fatigue chronique.

MERCREDI 4 AVRIL 2001, À 10 HEURES 30

Entretien avec Mme Joyce Riley von Kleist représentante de l'« American Gulf War Veterans Association » (Versailles - Missouri) ;

à l'Ambassade de France.

Mme Riley a d'abord précisé qu'en sa qualité de réserviste elle avait subi l'ensemble des mesures de santé, y compris les vaccinations effectuées sur les personnels militaires américains dépêchés dans le Golfe. Elle n'a toutefois pas pris part aux opérations, sa date prévisionnelle de départ ayant été trop proche de la fin de l'offensive terrestre. Son état de santé s'est néanmoins détérioré rapidement et elle fut hospitalisée, dès le mois de décembre 1991, pour une maladie voisine de la sclérose en plaques. Elle a toutefois précisé qu'elle ne donnait pas à la mission d'information son sentiment personnel mais celui des combattants désormais malades, de leurs familles et d'une partie croissante de l'opinion publique américaine. Elle a fustigé les déclarations officielles telles que celles prononcées notamment par le Docteur Stephen Joseph, Assistant Secretary of Defense, selon lesquelles « il n'y a jamais eu de syndrome du Golfe », tout en remerciant la mission de bien vouloir l'entendre alors qu'elle n'a qu'un diplôme d'infirmière spécialisée. Elle a présenté à la mission une vidéo montrant des témoignages de vétérans gravement malades et dont certains sont décédés depuis lors, de même que des photographies d'enfants nés après le Golfe et présentant de graves malformations que Mme Riley a imputé à l'exposition chimique, en opération, des pères.

Puis, elle a fait état d'une procédure secrète le « Manhattan Project » qui aurait consisté à effectuer à des vaccinations non autorisées pour expérimentation, en dépit des dénégations du Pentagone. A cet égard, elle a cité le médecin militaire O'Donnel (personnalité rencontrée par la mission) qui, selon Mme Riley, lui aurait confirmé qu'un vaccin anti-sida expérimental aurait fait l'objet d'une utilisation limitée.

A titre personnel, Mme Riley a déclaré avoir subi 10 vaccinations en une seule journée et a été, de ce fait, très malade. Elle a, par ailleurs, indiqué que près de 700 000 données de registres de vaccinations avaient disparu et que tout médecin militaire osant parler, par exemple, de possibles expositions à des gaz, était chassé des Armées, alors que des documents irréfutables de l'UNSCOM prouvaient l'existence d'« incidents » de cette nature à Khamasiyiah.

Mme Riley a estimé que, dans ces conditions, il n'était pas étonnant que près de 90 % des vétérans prennent des médicaments du type « Prozac ». Elle a ensuite fait état d'anciens documents comme celui du Sénateur Rockefeller IV, en 1994, dont il n'existerait que 23 exemplaires ou encore celui du Sénateur Riegle, JR, qui constitue, selon elle, « la Bible des pathologies du Golfe » et que son parti, les Démocrates, aurait ultérieurement dissuadé de se présenter à nouveau aux élections.

S'agissant des éléments cachés à l'opinion, elle a rappelé le précédent de l'« agent orange » employé au Vietnam : sur près de 110 000 demandes d'indemnisation déposées pour des affections mystérieuses ou non diagnostiquées, seulement quelque 3 000 ont été retenues.

Mme Joyce Riley a pu poursuivre ses explications au cours d'un déjeuner offert par la mission d'information au restaurant de l'Ambassade de France.

MERCREDI 4 AVRIL 2001, À 14 HEURES

Entretien avec M. Christopher Shays (Républicains-Connecticut), Président de la sous-commission de la Chambre des Représentants chargée de la Sécurité nationale, des Anciens combattants et des Relations internationale, en présence de ses collaborateurs parlementaires et de Mme Betty Ward-Zukerman du Général Accounting Office (GAO) ;

au Congrès, Langworth Building.

M. Shays a d'abord indigné à la mission que le « syndrome du Golfe » était une réalité et que le débat avait été inutilement compliqué, aux Etats-Unis, du fait de la trop faible coopération et du défaut d'ouverture dont avaient fait preuve le Pentagone et le ministère des Anciens combattants (VA). Il a particulièrement regretté les pertes comme la mauvaise gestion des dossiers relatifs aux expositions des troupes à des toxiques, notamment en raison des affirmations officielles du Pentagone selon lesquelles aucune arme chimique n'avait été utilisée au cours du conflit, du moins à titre offensif. Enfin, s'agissant du bromure de Pyridostigmine (bP), M. Shays a souligné l'absence de précisions données aux militaires sur sa posologie et les inquiétudes lui paraissant fondées quant à toute utilisation d'un médicament à une fin détournée de sa vocation première.

Par ailleurs, il a rappelé qu'en ayant auparavant siégé pendant 18 ans au sein du Congrès du Connecticut, il avait acquis dans son Etat une certaine expérience concernant l'exposition des travailleurs aux substances toxiques.

M. Claude Lanfranca a interrogé M. Shays sur le « Persian Gulf War Act » adopté, en 1998, pour le Congrès. En réponse, le Représentant a fait état des deux conséquences majeures de ce texte :

1) la définition et l'engagement d'un vaste programme de recherche ;

2) l'adoption d'un principe de présomption de maladie accordé sous certaines conditions à des veterans.

Il a précisé que les recommandations d'un rapport de la chambre des Représentants datant de 1997 et remis à la mission d'information, avaient été incluses dans le texte voté par le Congrès. Puis, appelé à participer à une réunion de la majorité républicaine en vue d'un vote, M. Shays s'est excusé auprès des membres de la mission de devoir les laisser s'entretenir avec son « Assistant Chief » qui disposait plus que lui de la « mémoire » de la documentation.

Mme Ward-Zukerman a estimé, pour sa part, qu'un regard des documents dont elle a disposé pour ses travaux du GAO, il semblait peu probable que les troupes françaises aient pu être atteintes par des nuages de toxiques, en reconnaissant qu'en ce domaine il restait difficile de prétendre à une absolue certitude.

A une question de M. Jean-Louis Bernard sur l'indemnisation des veterans, alors que l'on constatait plutôt des troubles d'ordre comportemental d'ailleurs soulignés par la paresse que véritablement organiques, il a été répondu qu'il convenait de distinguer plusieurs niveaux d'incapacité et des groupes de symptômes correspondant à chacun d'eux qui sont détaillés par des textes réglementaires essentiellement des circulaires.

MERCREDI 4 AVRIL 2001, À 15 HEURES 15

Entretien avec M. William Tuerk, Staff director / Chief counsel de la Commission des Anciens combattants du Sénat, accompagné de ses collaborateurs, et avec Mme Mary Schoeller chargée de ses questions au service de la minorité Démocrate du Sénat ;

au Congrès, Salle 4012 du Russel Building.

(Le début de l'entretien a lieu hors de la présence de M. Tuerk, retenu dans une salle attenante par un entretien avec le nouveau membre de l'Administration Bush chargé du secteur).

Après une présentation des travaux de la mission d'information par M. Charles Cova, Président, qui a souhaité connaître les positions de la Commission sur les modalités d'indemnisation et une question de Mme Rivasi sur le rôle précis de la Commission pour la défense des intérêts des veterans, il a été indiqué que l'enveloppe globale consacrée à la recherche sur le syndrome du Golfe dépassait à ce jour, les 150 millions de $ et que le Sénat veillera spécialement à ce que tous les veterans en éprouvant le besoin seront soignés. En outre, il a été précisé que pour avoir la qualité d'ancien combattant la législation exigeait l'accomplissement de deux années d'activité sous les drapeaux sauf le cas spécifique des blessures au combat et, éventuellement, des réservistes appelés en renfort.

Les critiques et controverses suscitées par certains travaux du Congrès témoignaient du fait que cette réflexion était saluée par certains et dénigrés par d'autres, ce qui paraissait normal.

M. Claude Lanfranca ayant souligné que les Etats-Unis comme le Royaume-Uni avaient, bien avant la France, commencé à étudier ces problèmes, il a interrogé ses interlocuteurs sur l'hypothèse qui leur paraissait la plus probable : la réponse a porté sur l'existence d'une multiplicité de facteurs.

Pour sa part, M. Jean-Louis Bernard a posé différentes questions sur le rôle dévolu aux experts afin de déterminer les pourcentages d'invalidité de plaignants en fonction des symptômes observés et du coût budgétaire global consacré à ces indemnisations. En considérant les réponses lui ayant été données M. Bernard a estimé que le système américain n'était pas fondamentalement différent du régime français des pensions militaires d'invalidité, d'autant qu'il retenait des tranches progressives à partir de 10 % d'incapacité professionnelle et que les attributions financières étaient nettes d'impôt.

Puis après l'arrivée de M.Tuerk, M. Charles Cova, Président a demandé quelle était l'appréciation de la Commission sénatoriale sur les travaux diligentés par le Gouvernement fédéral, il lui a été indiqué qu'il s'agissait de travaux de qualité réalisés par des scientifiques généralement réputés mais que leurs résultats paraissaient peu probants : les élus sont, eux, désireux d'accéder à des certitudes. Enfin, en réponse à une question de Mme Rivasi, il a été précisé que le Congrès ne disposait pas d'une cellule d'évaluation scientifique, à l'exception des experts du GAO et de l'Académie nationale des Sciences, des structures que bien que financées par de l'argent public devaient être considérées comme indépendantes.

Par ailleurs, M. Tuerk a rappelé que la Commission sénatoriale en accord avec son Président, le Sénateur Arlen Specter, (Républicain, Pennsylvanie) qui fondait son appréciation sur son expérience professionnelle de Procureur, avait estimé que l'opinion s'était trouvée flouée dans l'« affaire de Khamasiyah ».

Enfin, à une question de Mme Rivasi sur le fait que le Congrès était au courant de l'utilisation d'armes incorporant de l'uranium appauvri, M.Tuerk a indiqué que la Commission du Renseignement du Sénat s'était saisie de cette question et que ses débats avait révélé de nombreuses inexactitudes.

JEUDI 5 AVRIL 2001, À 10 HEURES 30

Entretien avec M. Hans Blix, Président exécutif de la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations Unies (COCOVINU/UNMOVIC) pour l'Irak, ancien Directeur général de l'Agence Internationale de l'Energie atomique (AIEA) ;

au siège des Nations Unies à New York.

Après la présentation par M. Charles Cova, Président, des objectifs de la mission d'information et des thèmes qu'elle a souhaité aborder prioritairement, M. Hans Blix a rappelé que la Commission qu'il dirigeait succédait, en vertu de la Résolution 1284 de décembre 1999, à la Commission spéciale, l'UNSCOM, créée par la Résolution 687 adoptée, dès 1991. Il a précisé avoir pris ses fonctions en mars 2000.

Puis, il a indiqué que l'UNSCOM avait effectivement accompli un important travail de désarmement de sites chimiques comprenant notamment des dépôts de Sarin et d'Ypérite.

M. Blix a également précisé que l'actuelle Commission détenait les archives de l'UNSCOM (qualifiées de « très techniques ») et qu'elle les analysait attentivement.

S'agissant de la sécurité des interventions de l'UNSCOM, M. Blix a rappelé qu'aucun épisode de cette nature n'avait été conduit sans protection pour les personnels d'inspection, à l'exception d'un incident survenu au cours de la première année d'activité de l'UNSCOM.

Mme Rivasi ayant interrogé le Président exécutif de la COCOVINU (UNMOVIC) sur les lieux de bombardement ayant abrité des sites chimiques en Irak et s'il avait eu accès aux cartes américaines en ce domaine, M. Blix a précisé qu'il disposait notamment d'un certain nombre de données sur les sites de missiles qui avaient été répertoriés et qu'en matière chimique et biologique, seuls quelques sites résiduels avaient sans doute pu échapper à des frappes.

M. Cova a demandé quelles étaient les méthodes de « dépollution » qui avaient été mises en _uvre en Irak (explosion ? « pétardement » ? etc.) ; en réponse M. Blix lui a indiqué qu'il vérifierait les techniques alors en usage. En tout état de cause, l'Irak n'a pas déposé de plaintes auprès du Conseil de sécurité pour mise en danger de sa population du fait des destructions, a-t-il été précisé en rappelant que depuis 1998, aucun contrôle objectif n'était plus possible du fait du retrait des inspecteurs du territoire irakien.

Interrogés sur l'uranium appauvri (U.A.) par Mme Rivasi qui a fait état de l'expérience de M. Blix en tant qu'ancien Directeur général de l'AIEA, M. Blix a indiqué que selon ses impressions, il convenait plutôt de s'interroger sur l'effet des vapeurs toxiques que sur la radioactivité de ce métal lourd (« Toxic effect not radiation effect »), en ajoutant que jusqu'en 1997 aucune controverse ne s'était fait jour sur l'uranium appauvri. Il a souligné à cet égard que les Nations Unies disposaient au travers de ses agences d'instruments très complémentaires pour connaître ce phénomène (OMS, PNUE et AIEA), même si l'Irak ne souhaite avoir de contacts sur ce sujet qu'avec la seule OMS.

Puis, M. Blix a insisté sur le fait que du temps de l'UNSCOM, cette structure entretenait des relations étroites avec la Commission des sanctions et que la nouvelle Commission se préparait à pouvoir reprendre à tout moment ses missions de vérification et d'inspection en Irak. A cet égard, il a cité les propositions américaine et, depuis peu, russe visant à rendre possible cette reprise d'activité tout en affirmant sa confiance dans le dialogue poursuivi entre le Secrétaire général de l'ONU et les responsables irakiens. C'est pourquoi, il a insisté sur l'effort de formation en cours des personnels de la Commission (45 personnes) ou susceptibles d'être rapidement mobilisés par elle (jusqu'à 200 personnes), au travers de sessions spécialisées dont l'une a été organisée de façon très satisfaisante à Paris. Sur ce point, M. Blix a expliqué que la COCOVINU (UNMOVIC) disposait de ressources égales à 0,8 % des ventes irakiennes de pétrole dans le cadre du processus « Pétrole contre Nourriture » (sommes placées sur des comptes séquestres en banques).

Plus généralement et en réponse à une observation de M. Jean-Louis Bernard, M. Blix a convenu que, dans une certaine mesure, un éventuel échec de la COCOVINU (UNMOVIC) constituerait un mauvais signal pour la non prolifération : en soulignant que l'AIEA avait été la première institution à manifester une réelle préoccupation envers la Corée du Nord, il a insisté sur le risque d'un « unilatéralisme » américain en considérant d'ailleurs que le projet des Etats-Unis dit « NMD » traduisait un élément de doute de ce pays à l'égard du système multilatéral de lutte contre la prolifération.

Mme Rivasi a conclu qu'il ne fallait toutefois pas faire de l'Irak un « loup » : toute « focalisation » sur ce pays s'avère choquante et probablement contre-productive.

JEUDI 5 AVRIL 2001, À 15 HEURES

Entretien avec M. J. Christer Elfverson, Directeur du Programme Irak (« Office of the Irak Programme ») ;

au siège des Nations Unies.

En premier lieu, M. Elfverson (Suède) a excusé l'absence de son supérieur M. Benon Sevan (Chypre), Directeur exécutif du « Programme Irak » appelé à l'étranger puis a considéré qu'actuellement les Etats-Unis se concentraient plus sur la question des sanctions et de leur respect que du retour des missions d'inspection sur la base d'un terrain d'entente qui restait à établir. Il a toutefois fait état de « petits progrès » notamment en matière sanitaire comme en témoigne une prochaine réunion (dans une dizaine de jours) devant se tenir avec les irakiens, à Genève, sous l'égide de l'OMS et en association avec le PNUE et l'AIEA, afin d'aborder la question des cancers dans la région de Bassorah. L'organisation de cette réunion qui pourtant ne relève pas stricto sensu de la compétence du Bureau « Programme Irak » sera financièrement pris en charge par lui en raison de son objet.

Puis, M. Elferson a ajouté que les conclusions des premières études concernant l'uranium appauvri (U.A.) au Kosovo ne plaisaient pas à l'Irak, en rappelant qu'en février 1998, l'AIEA avait demandé à étudier les effets de l'uranium appauvri en Irak mais s'était heurtée à l'inertie volontaire du Comité des sanctions. Mme Rivasi a, pour sa part, rappelé que l'Irak souhaitait que l'OMS puisse établir un état sanitaire de sa population. A cet égard, M. Elfverson a fait état des différentes données sur la situation sanitaire du pays dont disposent l'OMS, l'UNICEF ou encore la FAO.

M. Lanfranca ayant souhaité connaître la situation de la coordination des intervenants notamment en matière humanitaire, M. Elfverson a précisé qu'il fallait distinguer la région des trois governorats du Nord (zones de présence kurde) contrôlés par l'ONU et qui bénéficiaient, de ce fait, d'une meilleure garantie de répartition des biens et services essentiels que les régions du sud ou s'exerçait une simple observation des importations de biens. A ce sujet, il a considéré qu'au regard des disponibilités dont l'Irak disposait depuis qu'il pouvait librement vendre son pétrole sur le marché international, les dirigeants de ce pays avaient la possibilité d'acquérir à l'étranger des médicaments ou du matériel sanitaire au titre du Programme élargi « Pétrole contre Nourriture ». Ils le faisaient parfois mais privilégiaient d'autres demandes d'importation soumises à l'approbation du Comité des sanctions ; M. Elfverson a fait observer que les principales difficultés résultaient de la désorganisation et de la démoralisation de l'appareil sanitaire de l'Irak qui comptait auparavant parmi les mieux doté en personnel comme en matériel. De plus, si la principale partie des fonds générés par les ventes de pétrole va au Koweit et dans une moindre fraction à d'autres Etats, pour l'indemnisation des dommages subis, les possibilités d'acquisition de biens essentiels et coûteux ne font pas défaut, dès lors que le produit de ces ventes dépasse, à ce jour, 4 milliards de $.

Enfin, s'agissant des programmes de déminage en Irak, il a été précisé qu'en dehors des régions du Nord, l'ONU n'avait actuellement aucune maîtrise sur ces opérations qui ont d'ailleurs été, pour partie, confiées par l'Irak à des entités privées et notamment, au Sud, à une entreprise russe.

JEUDI 5 AVRIL 2001, À 16 HEURES 30

Entretien avec Mme la docteure Sudersham Narula, Responsable du Service médical des Nations Unies assistée de Mme la docteure Agnès Pasquier-Castro (« Senior Medical Officer ») ;

au siège des Nations Unies.

Mme Narula a d'abord rappelé que la question dite du « syndrome du Golfe » n'avait été réellement considérée par les pouvoirs publics que de façon tardive, et après que des anciens combattants ou des militaires ne contactent des parlementaires. Elle s'est toutefois félicitée des récents travaux du PNUE au Kosovo, une région dont, il est vrai, que le gouvernement est assuré par l'ONU.

Puis, elle a précisé que pour ce qui concernait les personnels de l'ONU dépêchés tant au Moyen-Orient que dans les Balkans, aucun incident de nature médicale n'a été rapporté au regard de ce qui s'apparenterait à un « syndrome du Golfe ».

M. Jean-Louis Bernard ayant observé que l'ONU avait bien l'intention de prendre toute sa place sur les sujets du Golfe comme des Balkans, qui concernaient plus d'un million de militaires et une partie importante des populations civiles : la mise en _uvre d'une méthodologie d'étude médicale lui apparaissant très souhaitable.

Mme Narula a répondu que cette tâche revenait, à l'évidence, à l'OMS ce que souhaitaient d'ailleurs les Irakiens qui récusaient, en revanche, les autres agences (par exemple l'AIEA) ce qui posait un problème. Toutefois, nul ne peut contester que les approches de l'OMS, de l'AIEA et la PNUE s'avèrent complémentaires.

Pour sa part, Mme la docteur Paquier-Castro a fait état des difficultés à distinguer dans le foisonnement de la littérature médicale, des tendances ou des lignes de fond irréfutables concernant telle ou telle donnée particulière à la problématique des syndromes dits « du Golfe » et ou « des Balkans ».

VENDREDI 6 AVRIL 2001, À 10 HEURES 30

Entretien avec M. Jean-Marie Guéhenno, Directeur du Département des opérations de maintien de la Paix des Nations Unies, en présence du colonel Thomas K.D. Geburt (Canada) « Chief of staff - Office of the Military Adviser » ;

au siège des Nations Unies.

En premier lieu, M. Guéhenno a souligné que les récents rapports du PNUE et de l'OMS fondaient la position formelle des Nations Unies sur le sujet. S'agissant de l'uranium appauvri (U.A.), il a considéré qu'ils apparaissaient plutôt rassurants, à la condition de mettre en _uvre des précautions essentielles.

Pour ce qui concerne le Kosovo, aux côtés des accidents de la circulation atteignant des « sommets », il existait un risque opérationnel et sanitaire d'importance lié aux mines et qu'au delà de l'U.A., des risques majeurs concernaient également le grand nombre des « cluster bombs » non explosées. Le nombre des accidents de cette nature lui semblant toutefois diminuer au cours des derniers mois, alors qu'en matière sanitaire d'autres catastrophes écologiques de grande ampleur concernent la région et notamment le complexe industriel et minier de Mitrovica.

Mme Rivasi a estimé que cette situation était désormais connue alors qu'il n'en était initialement pas de même pour l'utilisation par les Américains d'armes incorporant de l'U.A.. Sur ce point, M. Guéhénno a reconnu l'avoir su mais de façon, il est vrai, non officielle et à une fonction d'ailleurs non diplomatique. Il a précisé que le rôle de son Département n'était pas de formuler des appréciations sur l'emploi de telle ou telle arme, bien que dans le cas du Kosovo pour lequel l'ONU disposait d'un mandat d'administration, une responsabilité globale pesait sur l'Institution en matière de santé pour les populations et l'ensemble des personnels civils et militaires.

Enfin, il a rappelé qu'une opération spécifique de maintien de la Paix se poursuivait dans la bande démilitarisée entre l'Irak et le Koweït (MONUIK). Il n'avait cependant pas encore eu l'occasion de se rendre dans cette région où des opérations de déminage étaient sans doute toujours exécutées en raison du nombre important de munitions non explosées.

ANNEXE N° 4

LISTE DES DOCUMENTS TRANSMIS
À LA MISSION D'INFORMATIONSUR LES CONDITIONS D'ENGAGEMENT DES MILITAIRES FRANÇAIS AYANT PU LES EXPOSER, AU COURS DE LA GUERRE DU GOLFE, À DES RISQUES DE PATHOLOGIES SPÉCIFIQUES

--____--

I. - Documents envoyés par le ministère de la défense

1. - L'engagement

ORDRES ETAT-MAJOR DES ARMÉES

- ordre d'opération n° 3677 de l'Etat-major des Armées ; 14 septembre 1990 ;

- ordre d'opération n° 3878 de l'Etat-major des Armées ; 30 octobre 1990 ;

- ordre d'opération n° 3897 de l'Etat-major des Armées ; 9 novembre 1990 ;

- ordre du Général d'Armée Maurice Schmitt, chef d'état-major des Armées pour le Général d'Armée Roquejeoffre, commandant les forces françaises ; 16 janvier 1991 ;

- fiche n° 429 de l'Etat major des Armées : Evaluation de la capacité irakienne en guerre chimique et bactériologique ; 27 janvier 1991 ;

- fiche n° 15 de l'Etat major des Armées : Emploi éventuel de déchets radioactifs par l'Irak ; 29 janvier 1991 ;

- note n° 53 de l'Etat major des Armées : chronologie des opérations du 17 janvier 1991 au 28 février 1991 ; 14 mars 1991.

ORDRES COMFOR DAGUET

- ordre d'opération DAGUET n° 1 du Général commandant les forces françaises dans le Golfe ; 11 novembre 1990 ;

- ordre provisoire d'opération n° 399/COMELEF/CEM/OPS/CONDUITE, 7 janvier 1991 ;

- ordre d'opération DAGUET n° 2 du Général commandant les forces françaises dans le Golfe ; 17 janvier 1991 ;

- ordre administratif et logistique n° 2 du Général commandant les forces françaises dans le Golfe ; 17 janvier 1991 (NB : le premier exemplaire était inclus à l'ordre d'opération Daguet n° 1 du 11 novembre 1990) ;

- ajustement et mise à jour de l'ordre d'opération n° 2 de la division DAGUET, émanant du Général commandant les forces françaises dans le Golfe ; 20 février 1991 ;

- ordre d'opération n° 4472 du détachement DAGUET à Koweit City émanant du Général commandant les forces françaises dans le Golfe ; 27 février 1991 ;

- directive opérationnelle émanant du Général commandant les forces françaises dans le Golfe ; 3 mars 1991 ;

- ordre de redéploiement émanant du Général commandant les forces françaises dans le Golfe ; 11 mars 1991 ;

- ordre complémentaire à l'ordre d'opération n° 4472 du détachement DAGUET à Koweit City émanant du Général commandant les forces françaises dans le Golfe ; 24 mars 1991.

ORDRES DIVISION DAGUET

- ordre d'opération n° 1 de la division DAGUET, émanant du Général commandant la division ; 5 octobre 1990 ;

- ordre d'opération n° 2 de la division DAGUET, émanant du Général commandant la division ; 13 octobre 1990 ;

- ordre d'opération n° 3-B de la division DAGUET, complétant l'ordre d'opération n° 3 de la division DAGUET, émanant du Général commandant la division ; 14 janvier 1991 ;

- message n° 859/DIVDAGUET/OPS : ordre de conduite ; 10 mars 1991.

ORDRES LOGISTIQUES ET D'OPÉRATIONS

- ordre d'opération santé de l'opération Daguet ; 16 janvier 1991.

ORDRES ETAT-MAJOR DE L'ARMÉE DE TERRE

- note express de l'Etat major de l'armée de Terre  : Ordre administratif et logistique terre pour le désengagement de l'opération Daguet ; 25 mars 1991.

PLANIFICATION

- fiche n° 1149/DEF/EMAA/3.OPS/DPS : menaces sur la composante Air Daguet ; 29 octobre 1990 ;

- télécopie n° 25/COMAIR/DAGUET : modalités pratiques d'emploi des avions tactiques français dans les actions aériennes au profit des forces terrestres ; 8 novembre 1990 ;

- fax du Commandant en second des forces françaises en Arabie Saoudite et Commandant air pour le Chef d'Etat major de l'armée de l'Air ; 21 février 1991.

BILAN D'ACTIVITÉ DES FORCES AÉRIENNES ENGAGÉES : « DOSSIER CO AIR »

- calendriers des événements marquants à Al Asha et Riyadh (30 septembre 1990 - 31 mars 1991), de la mise en place des aéronefs français, de la mise en place de la défense sol-air et des radars tactiques, de la mise en place des personnels ;

- télécopie du CDT/AIR DAGUET AL AHSA au CO Air ; 7 octobre 1990 ;

- bilans des missions offensives, défensives, des escortes, des missions de reconnaissance, de l'activité aérienne, des munitions air-sol et air-air ;

- message n° 1195/COMFOR DAGUET/RENS ; 18 janvier 1991 ;

- fiche n° 008/DEF/EMAA/GMG/CD du Major général de l'armée de l'Air sur les déploiements de l'armée de l'Air dans le Golfe ; 3 février 1991 ;

- note n° 786/EMIA/ADJOINTAIR/COMELEFF ; 2 mai 1991 ;

- calendrier du retrait des avions de combat français.

BILAN D'ACTIVITÉ DES FORCES TERRESTRES ENGAGÉES

- fiche de l'Etat major de l'armée de Terre  : historique sommaire de la montée en puissance de Daguet ; février 1991 ;

- note d'information de l'Etat major de l'armée de Terre  : Opération Daguet ; 25 mars 1991.

ALERTES CHIMIQUES

- lettre n° O17017 du Directeur de Cabinet de M. le Ministre de la Défense au Secrétaire américain à la Défense en date du 14 mai 1999 ;

- fiche sur les détections chimiques relevées dans le Golfe adressée au Département d'Etat, en complément de la lettre du 14 mai 1999 ; 27 décembre 2000 ;

- étude technique relative aux détections chimiques, et six annexes ;

- message n° 57/GSLAV/BASE DEPOT CRK/CDT/CD du 20 janvier 1991 ;

- message n° 1320/COMFOR DAGUET/RENS ; 20 janvier 1991 ;

- message n° 33/COV/DIV DAGUET/OPS du 21/01/91 ;

- message n° 35/COV/DIV DAGUET/OPS ; 21 janvier 1991 ;

- message n° 49/DIV DAGUET/OPS ; 21 janvier 1991 ;

- message n° 57/COMDIV DAGUET ; 21 janvier 1991 ;

- message sans numéro de l'officier NBC de la division Daguet ; 21 janvier 1991 ;

- message n° 52/COV/DIV DAGUET/OPS ; 21 janvier 1991 ;

- compte rendu de l'Etat-major des Armées au Gouvernement : point de situation de la journée du 21 janvier 1991 ;

- schémas du réseau radio de la division Daguet et procès verbaux d'exploitation des journées des 20 et 21 janvier 1991 ;

- message n° 61/COV/DIV DAGUET/OPS ; 22 janvier 1991 ;

- 5 messages NBC ;

- extrait du rapport de M. Bernard Rostker sur les possibles détections françaises ; 11 août 1997.

COMPTES RENDUS HEBDOMADAIRES DES OPÉRATIONS

- comptes rendus hebdomadaires COMDAGUET des 2, 9, 16, 23 et 30 janvier 1991 ;

- comptes rendus hebdomadaires COMFOR DAGUET des 6, 13, 20 et 27 février 1991.

COMPTES RENDUS QUOTIDIENS DES OPÉRATIONS

- comptes rendus journaliers COMDAGUET de janvier et février 1991, à l'exception de celui du 12 février ;

- messages quotidiens Grand Duc DAGUET de janvier et février 1991, à l'exception de ceux du 22 janvier et des 11 et 14 février ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major de la 6ème division légère blindée (Division Daguet), du 1er janvier au 1er mai 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 2ème RIMa, du 19 février au 18 juin 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 3ème RIMa, du 21 décembre 1990 au 18 avril 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 4ème RD, du 4 janvier au 12 avril 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du Groupement de soutien logistique, du 1er janvier au 25 avril 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major de l'Escadron de reconnaissance du 1er RHP, du 9 janvier au 28 mars 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 1er RPIMa, du 7 février au 27 mars 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 13ème RDP, du 1er juillet 1990 au 31 décembre 1990 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 1er REC, du 1er janvier au 11 avril 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 1er RS, du 22 septembre 1990 au 21 janvier 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 6ème REG, du 1er janvier au 30 juin 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 11ème RAMa, du 12 décembre 1990 au 17 avril 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 1er RHC, du 22 décembre 1990 au 3 mai 1991 ;

- journal des marches et opérations de l'Etat-major du 3ème RHC, du 1er décembre 1990 au 21 avril 1991 ;

- extrait du journal des marches et opérations de l'Etat-major du 2nd REI, du 2 janvier au 20 mars 1991.

AUTRES DOCUMENTS RELATIFS À L'ENGAGEMENT DE LA DIVISION DAGUET

- message n° 8 COMDIV DAGUET portant ordre de déploiement en ZDAE ; 18 janvier 1991 ;

- message n° 19 COMDIV DAGUET en date du 19 janvier 1991 ;

- message n° 25 COMDIV DAGUET en date du 19 janvier 1991 ;

- message n° 696 COMDIV DAGUET en date du 22 février 1991 ;

- ordre n° 697 COMDIV DAGUET pour le 23 février 1991 ; 22 février 1991 ;

- message n° 699 COMDIV DAGUET en date du 22 février 1991 ;

- compte rendu position DAGUET ; 23 février 1991 ;

- télécopie n° 710 portant sur le point de situation DIV DAGUET le 23 février 1991 ; 23 février 1991 ;

- message n° 707 COV COMDIV DAGUET ; 23 février 1991 ;

- compte rendu engagement division DAGUET ; 24 février 1991 ;

- message n° 716 COMDIV DAGUET en date du 24 février 1991 ;

- points de situation DAGUET du 24 février 1991 (07 h 00, 08 h 00, 09 h 00, 10 h 00, 11 h 00, 12 h 00, 14 h 30, 16 h 00) ;

- message n° 730 COMDIV DAGUET : compte rendu de situation du 24 février 1991 ; 24 février 1991 ;

- message n° 727 COMDIV DAGUET en date du 24 février 1991 ;

- points de situation DAGUET du 25 février 1991 ( 09 h 00, 11 h 00) ;

- message n° 734 COV COMDIV DAGUET ; 25 février 1991 ;

- télécopie n° 738 portant compte rendu de situation DIV DAGUET le 25 février 1991 ; 25 février 1991 ;

- points de situation DAGUET du 26 février 1991 (08 h 30, 09 h 00, 18 h 30) ;

- message n° 748 : compte rendu état piste d'As Salman ; 26 février 1991 ;

- message n° 750 : bilan des prisonniers et matériels détruits ou capturés ; 26 février 1991 ;

- message n° 751 : compte rendu événement ; 27 février 1991 ;

- points de situation DAGUET du 27 février 1991 (04 h 00, 08 h 00, 12 h 00) ;

- message n° 664 : bilan des opérations du 27 février 1991 ; 27 février 1991 ;

- point de situation DAGUET du 28 février 1991 (19 h 00).

COMPTES RENDUS QUOTIDIENS POSTÉRIEURS AUX OPÉRATIONS

- messages COMDIV DAGUET/OPS et télécopies portant CRQ ; du 10 au 20 mars 1991 ;

- messages COMDAGUET/OPS, portant comptes-rendus quotidiens ; du 1er au 31 mars 1991 ;

- messages quotidiens Grand Duc /COMFOR DAGUET/RENS ; du 1er au 31 mars 1991, à l'exception des 20, 23 et 28 mars 1991 ;

- messages n° 4866 et 5474/COMFOR DAGUET/RENS portant comptes-rendus hebdomadaires ; 6 et 13 mars 1991 ;

- message n° 1532/DEF/EMP/RENS ; 6 mars 1991.

2. - La prévention sanitaire et médicale

MANUEL MÉDICAL OTAN

- manuel OTAN NP sur les aspects médicaux des opérations de défense NBC ; juin 1980 ;

INSTRUCTIONS, NOTICES ET TEXTES RÉGLEMENTAIRES EN VIGUEUR EN 1991

- instruction du 7 août 1981 sur la pratique des immunisations dans les Armées et ses modificatifs ;

- instruction sur l'organisation et le fonctionnement du service de santé des forces terrestres en opérations du 17 juin 1982 ;

- instruction du 10 janvier 1985 sur la désinfection, la désinsectisation et la dératisation dans les armées de Terre, de Mer et de l'Air ;

- circulaire du 25 janvier 1985 relative aux comptes rendus sur l'état sanitaire des troupes et sur l'activité médico-chirurgicale des formations du Service de santé engagées dans des actions extérieures ;

- concept de soutien sanitaire des forces terrestres engagées en ambiance chimique sur un théâtre d'opérations européen du 5 octobre 1988.

FICHES TECHNIQUES PRODUITES PAR LA DCSSA

- fiche d'information de la sous-direction Action scientifique et technique concernant les problèmes de santé publique susceptibles d'être rencontrés dans la région du Golfe persique ; 13 septembre 1990 ;

- le soutien sanitaire des forces terrestres engagées en ambiance chimique sur un théâtre d'opérations européen ; 1990 ;

- fiche technique concernant le traitement en milieu hospitalier des blessés contaminés par l'ypérite du 5 décembre 1990 et modificatif concernant la conduite à tenir en présence de blessés contaminés par l'ypérite à H + 24 et jours suivants en date du 10 décembre 1990 ;

- télécopie : rappel technique en matière de lutte contre le charbon ; 11 janvier 1991 ;

- note pour la sous-direction Organisation-Logistique : risque « B » : prophylaxie et traitement ; 11 janvier 1991 ;

- le charbon : risque naturel - risque en cas de guerre biologique ; 15 janvier 1991 ;

- conduite à tenir en cas de menace de frappe biologique ; 15 janvier 1991 ;

- opération DAGUET : défense médicale contre les agents nucléaires, biologiques et chimiques ; 12 février 1991.

ÉLÉMENTS TECHNIQUES, NBC

- procès-verbal de la réunion du 20 mars 1990 de la sous-commission de défense médicale contre les effets des armes chimiques ; 19 avril 1990 ;

- message 15 AIR AL ASHA DAGUET ; 9 janvier 1991 ;

- note de la Direction centrale du service de santé des Armées pour l'Etat-major des Armées : les risques biologiques, chimiques et nucléaires, le médicament de l'éveil ; 7 mars 1991 ;

- répertoire TTA 601 bis : les matériels et équipements de défense NBC ; école de défense NBC, 2ème semestre 1999.

CONSIGNES NBC

- message n° 15/AIR AL ASHA DAGUET/CDT/ : plan de protection contre la menace chimique n° 21/AIR AL AHSA DAGUET/CDT ; 11 janvier 1991 ;

- note de service n° 06/2°Rima DAGUET PC relative aux consignes de la garnison de RAFHA ; 25 février 1991 ;

- note de service n° 425/GSL AV/CDT relative au plan de desserrement en cas d'attaque chimique ; 23 octobre 1990.

FACTEURS DE RISQUE - MALADIES INFECTIEUSES

- rapport de mission effectuée au profit des opérations DAGUET, METEIL et BUSIRIS du 22 octobre 1990 au 5 octobre 1990 du 20 novembre 1990 ;

- exploitation du rapport préliminaire et des observations faites par le Médecin en chef DELOLME lors de sa mission dans la péninsule arabique du 22 octobre au 7 novembre ; 28 novembre 1990 ;

- communiqué de la Direction centrale du service de santé des Armées sur les mesures sanitaires concernant la Leishmaniose ; 9 décembre 1991.

UTILISATION DU MODAFINIL

- avis du comité d'éthique du Service de santé des Armées en date du 13 juin 1990 et relatif au projet de recherche « Aide pharmacologique au maintien de l'état d'éveil » ;

- directive du Major général de l'armée de l'Air VALLAT en date du 31 juillet 1991 : utilisation de la substance éveillante VIRGYL ;

- compte rendu de la mission effectuée par le Médecin principal LOUISY auprès des forces françaises dans le Golfe, concernant l'utilisation du VIRGYL ; 30 mai 1991 ;

- rapport du laboratoire central de biologie aérospatiale du centre d'études et de recherches de médecine aérospatiale : gestion de la vigilance au cours des opérations soutenues ; application au conflit du Golfe Persique (1990 - 1991) ; 30 septembre 1991 ;

- message de la direction centrale du service de santé des Armées : médicament à action éveillante ; 18 janvier 1991 ;

- rapport de l'étude de la DRET menée à l'hôpital Pitié-La Salpétrière relative à l'antagonisme des effets d'une privation de sommeil de 36 heures sur les performances psychomotrices et amnésiques de trois doses de CRL 40476 ; décembre 19881 ;

- rapport du Centre d'études et de recherches de médecine aérospatiale (CERMA) n° 91/10 : Aide pharmacologique au maintien de l'état d'éveil - aspects psychologiques et psychopathologiques ; mars 19911 ;

- rapport du CERMA n° 91/20 : Evolution des performances psychomotrices lors d'une privation de sommeil de 60 heures - intérêt d'un apport pharmacologique ; juillet 19911 ;

- rapport du CERMA n° 91/32 : Aide pharmacologique au maintien de l'état d'éveil - aspect vigilance ; octobre 19911 ;

- rapport du CERMA n° 92/0 : rapport de synthèse finale sur les opérations soutenues et la gestion de la vigilance ; mars 19921 ;

- rapport du CERMA n° 92/19 : Aide pharmacologique au maintien de l'état d'éveil - aspect vigilance (2ème partie) ; octobre 1992.

UTILISATION DE PYRIDOSTIGMINE

- note du Médecin général inspecteur JUILLET, directeur central du service de santé des Armées au chef d'Etat major des Armées : pré-traitement des intoxications causées par les agents C : essai de la Pyridostigmine ; 2 novembre 1982 ;

- note du Médecin général inspecteur F SCLEAR, directeur central du service de santé des Armées au chef d'Etat major des Armées : traitement des intoxications par les neurotoxiques de guerre dit « traitement de deuxième génération » ; 27 septembre 1985 ;

- note du Médecin général inspecteur F SCLEAR, directeur central du service de santé des Armées au chef d'Etat major des Armées : protection des personnels contre la menace chimique : pré- et auto- traitement d'urgence ; 7 février 1986 ;

- note de la direction centrale du service de santé des Armées pour l'Etat major de l'armée de l'Air : pré-traitement par la Pyridostigmine dans l'armée de l'Air ; 7 avril 1986 ;

- étude du département de pharmacologie clinique du groupe hospitalier Pitié Salpétrière : pharmacodynamie et évaluation de l'activité cholinestérasique de la Pyridostigmine en administration aiguë et chronique chez des volontaires sains ; novembre 1987 ;

- note du Médecin général inspecteur J MINÉ, directeur central du service de santé des Armées au chef d'Etat major de l'armée de l'Air : pré-traitement par la Pyridostigmine du personnel naviguant de l'armée de l'Air ; 19 septembre 1990 ;

- note de la direction centrale du service de santé des Armées pour l'Etat major des Armées, division « plans programmes espace » : auto-traitement d'urgence des intoxications par les neurotoxiques ; 10 octobre 1990 ;

- réponse du bureau Equipement-ravitaillement de la DCSSA en date du 6 novembre 2000 à une demande d'information rapide formulée par la mission : comprimés de Pyridostigmine - opération DAGUET.

FACTEURS DE RISQUE - VACCINATIONS

- télécopie du COMFOR DAGUET à l'attention du Médecin général VIDELAINE : circulaire n° 1757/894 du 4 mai 1983, gammaglobulinoprophylaxie de l'hépatite virale concernant les personnels militaires affectés dans une zone d'endémie ; 22 février 1991 ;

- note de la direction centrale du service de santé des Armées pour l'Etat major des Armées : risque épidémique de grippe et de méningite cérébro-spinale dans la péninsule arabique du 1er octobre 1990 ;

- note de la direction centrale du service de santé des Armées pour la sous-direction organisation logistique : vaccination antigrippale et antiméningococcique des personnels en opération dans les pays du Golfe arabique ; 11 octobre 1990 ;

- message n° 494/DEF/DCSSA/AST/TEC ; 15 octobre 1990 ;

- note COMELEF DAGUET/CEM/LOG ; 28 décembre 1990 ;

- note du sous-directeur action scientifique et technique de la direction centrale du service de santé des Armées, par délégation du Ministre de la Défense : vaccination antigrippale et antiméningococcique des personnels en opération dans les pays du Golfe arabique ; 30 octobre 1990 ;

- message n° 75. MM/MCS de la direction centrale du service de santé des Armées : mesures immunitaires intéressant les personnels affectés dans la péninsule arabique du 20 novembre 1990 ;

- note de la direction centrale du service de santé des Armées pour l'Etat major des Armées : risque biologique dans la péninsule arabique ; 4 janvier 1991.

SURVEILLANCE ÉPIDÉMIOLOGIQUE SANTÉ PUBLIQUE

- rapport du MCSCN SALVAT, chef du service de santé du GSL concernant un épisode de toxi-infection alimentaire collective ; 9 octobre 1990 ;

- message de la direction centrale du service de santé des Armées : toxi-infection alimentaire ; 11 octobre 1990 ;

- message de la direction centrale du service de santé des Armées : toxi-infection alimentaire ; 12 octobre 1990 ;

- message de la direction centrale du service de santé des Armées : premiers éléments d'enquête toxi-infection alimentaire ; 14 octobre 1990 ;

- message 494/DEF/DCSSA/AST/TEC ; 28 octobre 1990 ;

- message de la direction centrale du service de santé des Armées : surveillance épidémiologique ; 14 avril 1991 ;

- message de la direction centrale du service de santé des Armées : situation épidémiologique ; 16 avril 1991 ;

- message de la direction centrale du service de santé des Armées : compte rendu épidémiologique ; 16 avril 1991 ;

- message du Médecin chef de la cellule santé de l'Etat major interarmées Daguet AMBROSI à la direction centrale du service de santé des Armées : hygiène alimentaire ; 16 avril 1991 ;

- note express de la direction centrale du service de santé des Armées : état sanitaire des troupes et activités des formations du Service de santé assurant leur soutien dans la zone du Golfe persique, de la Péninsule arabique et de la Mer rouge ; 11 octobre 1990 ;

- comptes rendus hebdomadaires sur l'état sanitaire des troupes en opération de la semaine du 1er octobre 1990 au 7 octobre 1990 à celle du 20 mai 1991 au 26 mai 1991.

FACTEURS DE RISQUE - URANIUM APPAUVRI

- fiche de synthèse du dossier technique sur l'impact sanitaire de l'uranium appauvri, établi par la direction centrale du Service de santé des Armées.

CONSIGNES RELATIVES À LA PROTECTION DES PERSONNELS
LORS DES EXPÉRIMENTATIONS DE MUNITIONS À URANIUM APPAUVRI

- étude du réceptacle de la position de tir LTAC2 ; direction des centres d'expertise et d'essais de la DGA, établissement de Bourges, 28 mai 1995 ;

- consignes de sécurité : règles générales d'exploitation du Site de Tir Uranium (STU) ; 11 mai 2000 ;

- mode opératoire : consignes relatives à la conduite à tenir vis-à-vis d'une contamination en milieu U ;17 février 2000 ;

- consigne de sécurité : consignes en cas d'incidents STU ; 11 mai 2000 ;

- consigne de sécurité : transport de matières contaminées STU ; 11 mai 2000 ;

- mode opératoire : destruction par brûlage ou incinération de déchets de tirs souillés en uranium appauvri ; 28 janvier 1997 ;

- consigne de local : local de stockage 300 m2 du STU ; 11 mai 2000 ;

- mode opératoire : local effluents STU ; 11 mai 2000 ;

- consigne de sécurité : essai type, récupération des déchets de tir souillés en uranium appauvri et en matières explosives ; 30 janvier 1997 ;

- mode opératoire : dépouillement de cibles contaminées par de l'uranium appauvri ; 11 mai 2000 ;

- consigne de récupération au STU des déchets de tir souillés en uranium appauvri et en matières explosives ; 29 janvier 1997 ;

- consigne de sécurité : récupération après tir de cassettes réactives ; 7 octobre 1999 ;

- consigne de local : dépouillement de cibles contaminées par de l'uranium appauvri ; 15 mai 2000 ;

- consignes de sécurité : atelier d'expertise STU ; 10 mai 2000 ;

- consigne de poste STU : essais canon de calibre inférieur ou égal à 150 mm, chargement et déchargement du canon ; 5 mai 1999.

MESURES PRISES À L'ÉTRANGER

- bulletins de documentation de l'Ambassade de France à Londres datant des 17 décembre 1996, 24 avril 1997, 16 mai 1997, 29 août 1997 et 21 mai 1998.

3. - Documents de synthèse, retour d'expérience

RAPPORTS DE FIN DE MISSION

- rapport de fin de mission « Opération Daguet » du Médecin chef des services SALVAT ; 16 novembre 1990 ;

- télécopie AIR AL ASHA DAGUET n° 152 portant compte rendu du concept de fonctionnement de la base aérienne de Al Asha en ambiance chimique ; 16 décembre 1990 ;

- compte rendu de mission n° 10985/DA/CAFDA/CAB du Commandant de la défense aérienne au Chef d'Etat major de l'armée de l'Air ; 28 décembre 1990 ;

- compte rendu de la mission effectuée du 8 au 15 janvier 1991 par le pharmacien en chef FAILLY relative à la défense NBC des éléments air stationnés en Arabie Saoudite ; 24 janvier 1991 ;

- rapport d'activité de l'Hôpital Médico-Chirurgical de Transit Air rédigé par le Médecin en Chef C. MOURAREAU ; 2 avril 1991 ;

- rapport de fin de mission du 810e Hôpital mobile de campagne réduit d'active au profit de l'opération Daguet (16 septembre 1990 - 2 avril 1991) ; 25 mai 1991 ;

- rapport du directeur du service de santé des forces françaises stationnées en Arabie Saoudite ; 18 juillet 1991.

STRESS PHYSIQUE ET PSYCHOLOGIQUE

- rapport du Médecin en chef GALLE-TESSONNEAU sur le séjour opérationnel effectué à l'HMCTA de Riyadh dans le cadre de l'opération DAGUET ; 4 juin 1991.

DOCUMENTS DE SYNTHÈSE

- rapport de la direction centrale du service de santé des Armées : le soutien sanitaire de l'opération DAGUET ; décembre 1991 ;

- message n°76/B.A.RIYAD/CDT du Commandant de la base aérienne de Riyadh, le Colonel BARRANS, au Commandant des forces françaises en Arabie Saoudite : compte rendu des enseignements tirés de l'opération DAGUET en matière NBC ; 6 mars 1991 ;

- numéro spécial de la revue Médecine et armées : le Service de santé dans la guerre du Golfe ; 1992 ; - compte rendu du Médecin chef des services PUYGRENIER, Médecin chef de l'Hôpital Médico-Chirurgical et de Transit Air, relatif aux enseignements NBC retirés de l'opération Daguet ; 25 mars 1991 ;

- rapport du Colonel Claude BAGUET, commandant l'école de défense NBC de l'armée de Terre, à M. le Général de corps d'armée commandant les écoles de l'armée de Terre, sous le n°69/EDNBCAT/603°RDNBC/OE ; 27 mai 1991 ;

- conférence du Médecin en chef Y. CUDENNEC, commandant le 810ème hôpital mobile de campagne, à l'école du Service de santé des Armées de Bordeaux ; 10 juin 1992 ;

- rapport du Pharmacien chimiste RAMIREZ, sous le n°103/DSS/2°CA/FFA/OMI ; 25 juin 1991 ;

- rapport n° 1536 du centre d'expériences aériennes militaires de Mont de Marsan : analyse des enseignements relatifs à la protection contre les armes chimiques relevés au cours de l'opération Daguet au sein de l'hôpital médico-chirurgical et de transit air de Riyadh et du dispositif santé de décontamination de l'avant ; 10 octobre 1991 ;

- rapport de la direction centrale du service de santé des Armées : le Service de santé des Armées pendant les opérations du Moyen-Orient - 1990-1991 - Tome 1 (N.B. : le Tome 2 ne contient que des schémas et la liste nominative du personnel du Service de santé ayant participé au conflit du Golfe).

4. - Précisions apportées à la demande de la mission d'information

- fiche d'information thérapeutique relative au MODIODAL, JO du 7 novembre 1999 ;

- fiche n° 1460 DEF EMA MA4 relative à l'éventuelle manipulation d'armes chimiques par des soldats français en 1991 ; 13 novembre 2000 ;

- fiche n° 1010 DEF EMA ESMG relative à M. Bernard VANDOMME ; 7 décembre 2000 ;

- fiche n° 6510/DEF/DCSSA/OL/ER relative à la mise en place d'antibiotiques de prévention et de vaccins antitétaniques à l'occasion des opérations du Golfe ; 8 décembre 2000 ;

- fiche n° 30/DEF/EMA/ESMG ; 12 janvier 2001 ;

- rapport isotopique de 9 échantillons d'uranium appauvri prélevés sur les stocks d'armes françaises qui en incorporent, avec le mode opératoire utilisé ; janvier 2001 ;

- note n° 902/DEF/DCSSA/AST/TEC portant des éléments de réponse à la demande de la mission d'information concernant la nature du suivi médical réalisé par le Service de santé des Armées auprès des troupes ayant participé à l'attaque de Rochambeau le 24 février 1991 ; 1er mars 2001.

II. - AUTRES DOCUMENTS COLLECTÉS PAR LA MISSION D'INFORMATION

1. - Documents confiés par les personnes auditionnées

- note du Chef d'état major particulier du Président de la République pour information technique sur les armes chimiques ; 12 décembre 1988 (source Général Jean Fleury) ;

- rapport final de la campagne d'analyses du laboratoire mobile régional de mesure de la qualité de l'air au Koweït du 27 mars au 4 avril 1991 (source : Institut français du pétrole) ;

- bulletin de liaison du réseau de surveillance de la qualité de l'air en Ile de France ; avril-mai-juin 1991 (source : Airparif) ;

- note de l'Institut français du pétrole sur l'impact écologique de la destruction des infrastructures pétrolières du Koweit ; 30 janvier 1991 (source : Institut français du pétrole) ;

- dossier de présentation de la Société industrielle du combustible nucléaire et de ses activités ; 20 mars 2001 ;

- rapport de l'Institut de protection et de sécurité nucléaire DPHD/2001-01 : état des connaissances sur les risques potentiels associés à l'uranium appauvri utilisé dans les armes ; février 2001 ;

- note de M. Pierre Roussel, Institut de physique nucléaire-CNRS : l'uranium et les armes à l'uranium appauvri ; 2001.

2. - Documents obtenus lors des déplacements

DÉPLACEMENT À LONDRES LE 7 FÉVRIER 2001

- rapport du ministry of Defence sur l'utilisation de pesticides à organo-phosphorés, 6 décembre 1996 ;

- revue The Lancet n° 9148 sur le syndrome du Golfe, publiée le 16 janvier 1999 ;

- rapport sur les incidents consécutifs à la démolition du dépôt de munitions de Khamisiyah en mars 1991, décembre 1999 ;

- réponse du Programme médical d'évaluation des maladies des anciens combattants de la guerre du Golfe aux recommandations de l'audit mené par le King's Fund Health Quality Service, décembre 1999 ;

- rapport du ministry of Defence sur les programmes d'immunisation contre les agents de guerre biologique durant la guerre du Golfe, 20 janvier 2000 ;

- rapport du ministry of Defence sur les éventuelles expositions des forces britanniques à des agents chimiques à Al Jubayl le 19 janvier 1991, 20 janvier 2000 ;

- rapport du ministry of Defence sur les suggestions en matière de détection d'agents de guerre biologiques tirées de l'opération Granby, 18 mai 2000 ;

- rapport du ministry of Defence sur les alertes contre les agents chimiques enregistrées par les forces britanniques au cours de la guerre du Golfe, 20 juillet 2000 ;

- rapport du ministry of Defence sur les risques et dangers sanitaires de l'uranium appauvri, janvier 2001 ;

- brochure d'information du ministry of Defence sur les maladies des anciens combattants de la guerre du Golfe, janvier 2001.

DÉPLACEMENT À WASHINGTON ET NEW YORK DU 2 AU 6 AVRIL 2001

- second rapport de la Commission de la Réforme de l'Administration de la Chambre des Représentants : « L'Administration des Anciens combattants et le Département de la Défense continuent de résister à de fortes évidences reliant des causes toxiques à des effets sanitaires chroniques », 7 novembre 1997 (House Report 105-388) ;

- rapport de la Commission des Anciens combattants du Sénat sur les investigations relatives aux maladies de la guerre du Golfe, 105ème législature, 1998 (S.PRT. 105-39 Part I) ;

- tableaux et cartes remis à la mission d'information (20 pages) par le Général de Corps d'Armée Dale A. Vesser (E.R.) « Special Assistant to the Secretary of Defense for Gulf War Illness, Medical Readiness and Military Deployment » (par interim) ;

- rapport sur « la Guerre du Golfe et la Santé » volume 1, (Uranium appauvri, bromure de Pyridostigmine, Sarin et vaccinations) Institut de Médecine (Académie nationale des Sciences) National Academy, Press -, 2001 (408 pages) ;

- rapport relatif à la revue de la littérature médicale se rapportant aux maladies de la guerre du Golfe - Volume 2 (bromure de Pyridostigmine) par Béatrice Alexandra Golomb -, National Defense Reasearch Institute - RAND -, 1999 ;

- rapport annuel et annexes (2 volumes) du Department of Veterans Affairs sur la recherche bénéficiant de subventions fédérales, juin 1999 ;

- déclaration de M. John R. Feussner, M.D., Chief Research and Developpement Officer de la Veterans Health Administration (Department of Veterans Affairs) devant la sous-commission de la Sécurité nationale, des Anciens combattants et des Relations internationales de la Chambre des Représentants (27 septembre 2000).

3. - Documents en accès libre

- rapport de l'Assistant spécial du Secrétaire américain à la défense pour les maladies de la guerre du Golfe sur l'exposition des vétérans américains à l'uranium appauvri ; 31 juillet 1998 (source : site officiel Internet) ;

- rapport de l'institut de politique environnementale de l'armée de Terre américaine (US Army environmental policy institute) sur les conséquences sanitaires et environnementales de l'utilisation de l'uranium appauvri par l'armée de Terre américaine ; juin 1994 (source : site officiel Internet) ;

- rapport de l'Assistant spécial du Secrétaire américain à la défense pour les maladies de la guerre du Golfe sur l'exposition des vétérans américains aux fumées des incendies de puits de pétrole ; 2 août 2000 (source : site officiel Internet) ;

- rapport de la Central Intelligence Agency sur les renseignements relatifs à la maladie de la guerre du Golfe ; 2 août 1996 (source site internet officiel) ;

- Annexe D de l'étude stratégique de long terme sur les conséquences sanitaires et environnementales des pénétrateurs à énergie cinétique, US Army production base modernisation activity Picatinny Arsenal, New Jersey 07306-3000, juillet 1990 ;

- rapport de l'Observatoire National de l'ANDRA, « Où sont les déchets radioactifs en France ? », édition 2000 (source ANDRA) ;

- Christine Abdelkrim-Delanne : Guerre du Golfe - la sale guerre propre ; le Cherche midi éditeur, janvier 2001.

N°3055 - RAPPORT D'INFORMATION - COMMISSION DE LA DÉFENSE -Engagement des militaires français - Guerre du Golfe - Balkans : risques sanitaires spécifiques -M.Bernard CAZENEUVE, Mme Michèle RIVASI, M.Claude LANFRANCA - Rapport - 3eme Partie

1 Pour plus de détails, la mission d'information renvoie aux comptes rendus de ces déplacements annexés au présent rapport, lesquels évoquent la masse d'études épidémiologiques réalisées, ainsi qu'au procès-verbal de l'audition du Professeur Roger Salamon en date du 21 mars 2001.

2 Appendix D, Kinetic Energy Penetrator Environmental and Health Considerations, US Army production base modernisation activity Picatinny Arsenal, New Jersey 07306-3000, july 1990.

3 Journal officiel des questions et réponses écrites des parlementaires aux Ministres, 2 avril 2001, p.1945 et 1946.

4 Ibidem.

5 Ce dernier chiffre constituait une estimation au 21 décembre 2000.

6 Appendix D, Kinetic Energy Penetrator Environmental and Health Considerations, US Army production base modernisation activity Picatinny Arsenal, New Jersey 07306-3000, july 1990.

7 Document PE 299.417\69 du 17 janvier 2001.

8 JORF des débats du 10 janvier 2001, 1ère séance, p. 124 et 130.

9 Presidential Advisory Committee on Gulf War Veteran's Illnesses (PAC).