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Document E3038
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 89/552/CE du Conseil visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle.


E3038 déposé le 21 décembre 2005 distribué le 22 décembre 2005 (12ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2005) 0646 final du 13 décembre 2005, transmis au Conseil de l'Union européenne le 15 décembre 2005)

M. Michel Herbillon, rapporteur, a présenté ce document au cours de la réunion de la Délégation du 23 janvier 2007.

En 1989, l’adoption de la directive « Télévision sans frontières » (TVSF) a constitué une grande victoire pour la France et, plus généralement, pour la culture européenne.

Comme souvent, la Commission européenne ne souhaitait aborder cette question que sous l’angle économique, ignorant le volet culturel de ce sujet. Notre pays a alors fait valoir que les industries culturelles ne pouvaient pas être abandonnées aux seules règles du marché, qui menaceraient les plus faibles et conduiraient vers une uniformisation des cultures. L’« exception culturelle » fut ainsi constamment invoquée durant les négociations d’un texte marquant l’émergence des politiques audiovisuelles européennes.

Après trois années de négociations rigoureuses contre les partisans d’une déréglementation du secteur, la position française finit pas s’imposer.

En fait, la directive TVSF a bien été adoptée sur la base de dispositions du traité concernant la libre circulation des services (article 47, paragraphe 2 et article 55), mais l’Europe a accepté d’introduire des exceptions à ce principe strictement économique de la libre circulation, en fixant des quotas de production et de diffusion des œuvres européennes. Pour mémoire, il faut ainsi rappeler que les articles 4 et 5 et de la directive TVSF imposent aux chaînes de télévision de réserver au moins 50 % de leur temps de diffusion à des œuvres européennes et au moins 10 % de leur temps d’antenne ou de leur budget de programmation à des œuvres européennes émanant de producteurs indépendants.

La prise en compte de l’exception culturelle par la directive TVSF a constitué un moment essentiel à plusieurs titres :

– au plan national, elle a permis de pérenniser et de défendre le modèle français de l’intervention dans le domaine culturel ;

– au niveau communautaire, elle a permis d’étendre ce modèle français. Par exemple, dès l’année suivante – en 1990 – la Communauté européenne adoptait le programme MEDIA de soutien à l’industrie européenne du film et de programmes de télévision ;

– dans les enceintes internationales, la directive TVSF a pu être présentée comme un acquis communautaire permettant de s’opposer aux pressions des Etats-Unis lors des négociations du GATT en 1993, puis de celles menées au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à partir de 1995.

Elle a également constitué un point d’appui favorisant l’adoption par l’UNESCO de la déclaration universelle sur la diversité culturelle du 2 novembre 2001, puis de la convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles du 20 octobre 2005. Désormais, la réflexion internationale sur la diversité culturelle est menée dans d’autres forums que la seule OMC et échappe donc à une prise en compte exclusivement commerciale.

La directive TVSF peut donc être perçue comme un instrument fondateur. Depuis son adoption, la terminologie a évolué puisque la notion de diversité culturelle a remplacé celle d’exception culturelle mais ces deux notions ne se placent pas sur le même plan : la diversité culturelle est la finalité poursuivie, tandis que l’exception culturelle est un moyen d’atteindre l’objectif de diversité culturelle. Ce changement sémantique a surtout permis d’obtenir un front uni européen lors des négociations de l’OMC, puisque le Royaume-Uni, la Suède et les Pays-Bas réfutaient l’exception culturelle.

Depuis 1989, l’audiovisuel a connu de grandes évolutions, qui n’ont pas touché uniquement la terminologie. Le secteur audiovisuel communautaire a d’abord vu son environnement profondément bouleversé avec l’intervention croissante d’acteurs du secteur privé, naturellement plus sensibles aux préoccupations économiques et financières que les chaînes du service public. Cette évolution a elle-même été favorisée par les mutations technologiques de ces deux dernières décennies : après le développement du câble et du satellite, qui avait justifié une première révision de la directive TVSF en 1997, la révolution du numérique autorise la diversification des supports. On est ainsi passé de 50 chaînes de télévision dans l’Union au début des années 80 à environ 2000 à 3000 chaînes aujourd’hui (la marge d’incertitude illustre à elle seule le foisonnement actuel).

Au niveau national, les innovations liées au numérique ont conduit le Gouvernement à déposer le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, examiné la semaine prochaine par notre Assemblée. De la même façon, au niveau communautaire, la Commission propose de réviser la directive TVSF.

Après avoir mené de nombreuses consultations en 2004 et en 2005, la Commission a publié sa proposition en décembre 2005. Les travaux ont avancé à un rythme soutenu et, le 13 novembre 2006, le Conseil « Education, jeunesse et culture » a adopté une orientation générale, précédant d’un mois le vote du texte par le Parlement européen en première lecture dans le cadre de la procédure de codécision.

De nombreuses convergences peuvent être relevées entre les textes adoptés par le Conseil et le Parlement européen, en particulier s’agissant de l’extension du champ d’application de la directive aux services à la demande, qui sont aussi qualifiés – dans un langage technocratique – de services non linéaires (SNL). En la matière, un point fondamental mérite d’être souligné : les services à la demande seront désormais soumis au respect de règles relatives à la diversité culturelle.

Les textes adoptés par le Conseil et le Parlement européen divergent encore cependant sur deux points importants : tout d’abord, la question du principe du pays d’origine et des abus auxquels il peut donner lieu ; ensuite, le délicat problème de l’encadrement publicitaire.

I. LA DIVERSITE CULTURELLE : UN ACQUIS CONFIRME ET ETENDU

Dans le domaine de la diversité culturelle, deux éléments sont à mettre en avant : le maintien du statu-quo pour les quotas applicables aux chaînes de télévision et la promotion de la diversité culturelle dans les services à la demande.

Le statu-quo sur les quotas n’était pas acquis d’avance.

Ce mécanisme donne des résultats globalement satisfaisants. En 2004, le temps moyen de diffusion réservé aux œuvres européennes par toutes les chaînes couvertes par la directive dans les 25 Etats membres a été de 63 %, alors que l’obligation communautaire n’est que de 50 % (la législation française a fixé, quant à elle, un taux de 60 %). De même, la proportion moyenne de diffusion d’œuvres européennes émanant de producteurs indépendants a été de 31 %, soit un ratio largement supérieur au taux de 10 % visé par la directive de 1989 (là aussi, certaines normes nationales sont plus exigeantes et, par exemple, le Royaume-Uni et les Pays-Bas ont fixé une proportion de 25 %).

Sans développer à ce stade les difficultés liées à la définition des œuvres européennes, on doit se féliciter de ces résultats, pour la préservation de notre identité culturelle européenne. La télévision occupe aujourd’hui dans la vie quotidienne de nos concitoyens une place considérable. Selon Médiamétrie, chaque foyer français passe chaque jour 5 h 37 devant la télévision et la durée d’écoute quotidienne des individus de plus de quatre ans a été de 3 h 24 en 2006. La lecture de ces chiffres donne la mesure de l’enjeu des quotas. Cet enjeu n’est d’ailleurs pas simplement culturel, puisque comme le président américain Hoover le signalait dans les années 1930, «  Dans les pays où pénètrent les films américains, nous vendons deux fois plus d’automobiles américaines, de phonographes américains, de casquettes américaines  ». Les productions manufacturières énumérées méritent d’être actualisées, mais cette citation illustre bien l’interdépendance des questions culturelles et économiques.

Pourtant le système des quotas institué par la directive TVSF de 1989 ne fait toujours pas l’unanimité au sein de l’Union. Au moins trois commissaires souhaitaient le supprimer à l’occasion de la révision de la directive. De même, lors des premières réunions, un membre du Gouvernement allemand, se faisant le relais des positions des Länder, a envisagé un amendement de suppression des quotas. Le premier aspect positif de la proposition de révision de la directive TVSF réside donc dans le choix de la commissaire Viviane Reding, en charge de la société de l’information et des médias, de ne pas toucher au mécanisme des quotas, ce qui finalement permet de le conforter.

On aurait éventuellement pu souhaiter que la révision ajoute aux bases juridiques de la directive, une référence à l’article 151 du traité, introduit postérieurement à 1989 par le traité de Maastricht, qui dispose que «  la Communauté tient compte des aspects culturels dans son action au titre d’autres dispositions du traité, afin notamment de respecter et de promouvoir la diversité des cultures  ». Toutefois, cette lacune juridique est largement compensée par l’extension aux services à la demande d’obligations liées à la diversité culturelle.

L’un des objectifs premiers de la révision proposée par la Commission était de faire rentrer les services à la demande dans le champ d’application de la directive.

La législation communautaire établit, jusqu’à présent, une distinction entre les services de radiodiffusion télévisuelle relevant du champ d’application de la directive TVSF et les services de la société de l’information, relevant de la directive sur le commerce électronique (directive 2000/31/CE). Pour se conformer au principe de neutralité technologique, et éviter que toute diffusion par la télévision numérique ne soit régie par les seules règles de droit économique de la directive e -commerce – conduisant, à terme, au démantèlement de la réglementation consacrée spécifiquement à la télévision – la Commission a donc proposé d’étendre aux services à la demande les principes généraux prévus par la directive TVSF, tels que ceux relatifs à la protection des mineurs, à l’identification des communications commerciales et à l’identification du fournisseur de contenu. Un tel encadrement s’impose d’autant plus que les films pornographiques occupent une place non négligeable dans le contenu de ces services.

Cette extension du champ de la directive doit être appréciée au regard du développement actuel des services à la demande. On peut ainsi rappeler qu’au premier semestre 2006, ce sont deux millions de vidéos à la demande qui ont été achetées dans notre pays et qu’il existe plus d’une vingtaine de plateformes en France. Selon certaines projections citées par notre collègue sénateur, Louis de Broissia, à l’occasion de sa communication devant la Délégation du Sénat, les services de vidéo à la demande devraient représenter plus de 10 % du marché de la télévision et environ 25 % du marché du cinéma à l’horizon 2010 en France. Même si M. Nicolas de Tavernost, président du directoire de M6 et de l’Association des télévisions commerciales, nous a indiqué que tous les opérateurs perdaient de l’argent aujourd’hui dans ce créneau, il est probable que la situation évoluera rapidement. Il est donc essentiel de l’encadrer dans une approche ajoutant la dimension culturelle à la perspective économique.

La proposition de la Commission s’est heurtée, dans un premier temps, à une forte opposition du Royaume-Uni, soutenu par le Danemark, les Pays-Bas, le Portugal, la Slovaquie et la République tchèque. Ces Etats estimaient, contre l’évidence, que l’extension du champ de la directive aux services à la demande conduirait à réglementer des domaines n’ayant qu’un rapport éloigné avec les programmes audiovisuels, tels que la presse en ligne, les blogs, le web 2.0, voire l’ensemble des contenus en ligne sur Internet, empiétant ainsi sur le champ de le directive relative au commerce électronique. Cette opposition a été relayée par les dirigeants de Google , dont le vice-président s’est déplacé à Bruxelles le 30 octobre 2006.

Finalement, l’ensemble des Etats a accepté l’extension du champ de la directive, lors du vote par le Conseil de l’orientation générale, dans la mesure où la définition des services à la demande a été précisée, aussi bien dans l’article premier que dans les considérants 13 et suivants. Cette définition a de nouveau été affinée lors du vote du Parlement européen. Elle s’appuie désormais sur la notion de « responsabilité éditoriale », permettant d’exclure du champ de la directive les blogs et les autres contenus produits par les utilisateurs, ou encore toutes les formes de correspondance privées comme les messages électroniques. Par ailleurs, il est expressément indiqué que les versions électroniques des journaux et des magazines ne sont pas couverts par la directive.

Ce compromis sur la définition des services à la demande a été délicat à établir, car il importait de se laisser des marges pour intégrer de nouveaux services susceptibles d’apparaître dans l’avenir. Lors de son audition, le Conseil supérieur de l’audiovisuel – dont le champ d’intervention devra être modifié en conséquence par le législateur – a estimé que le texte adopté par le Conseil restreignait un peu trop les services à la demande à la vidéo à la demande, tout en reconnaissant qu’une définition trop étendue rendrait le dispositif ingérable. Selon les informations dont nous disposons, la Commission devrait s’en tenir dans sa proposition révisée à une rédaction proche de celle adoptée par le Parlement européen, ce qui paraît satisfaisant.

La véritable bonne surprise des négociations est que, non seulement, les services à la demande seront assujettis à des principes minimaux, mais qu’ils devront aussi veiller au respect de la diversité culturelle.

Très tôt, la France a fait part de sa volonté de voir les services à la demande contribuer à la promotion de la diversité culturelle, en faisant valoir la nécessité de traduire concrètement les engagements pris par l’Union européenne lors de la signature de la convention UNESCO du 20 octobre 2005. Cet objectif était loin d’être partagé par tous et, lors des consultations préalables, cinq Etats avaient manifesté leur hostilité. Seules, la Belgique, la Pologne et l’Italie semblaient comprendre notre position.

Pourtant, selon une étude réalisée en mars 2006, force est de constater que les contenus proposés aujourd’hui sont souvent en majorité d’origine extra-européenne, dans une proportion qui varie entre un tiers et plus de 80 % selon les services. En outre, l’entrée en force des opérateurs télécoms dans l’économie du cinéma – France Telecom vient de créer une filiale pour coproduire dix à quinze films par an – donne lieu à des interrogations sur les régulations à mettre en œuvre pour continuer à promouvoir le cinéma européen.

La Commission européenne a entendu le message des autorités françaises, mais elle s’est contentée, dans sa proposition, d’un dispositif minimaliste, invitant les Etats membres à veiller à ce que les fournisseurs de services promeuvent, «  lorsque cela est réalisable et par des moyens appropriés  », la production des œuvres européennes, ainsi que l’accès à ces dernières.

Les arguments français ont cependant sensibilisé nos partenaires et les textes actuellement en discussion ne se limitent plus à la simple énonciation du principe de la prise en compte de la diversité culturelle par les services à la demande, mais précisent les modalités de mise en œuvre de ce principe. Les dispositions du considérant 35 et de l’article 3 septies , dans la version adoptée par le Parlement européen, dont la Commission devrait, selon ses dires, s’inspirer dans sa proposition révisée, prévoient à présent que la promotion des œuvres européennes pourrait prendre la forme d’un nombre minimal de ces œuvres proportionnel au chiffre d’affaires, d’une proportion minimale d’œuvres européennes dans les catalogues de vidéo à la demande (avec un sous-quota pour les œuvres créées par des producteurs indépendants, comme en matière télévisuelle) ou encore d’une présentation avantageuse des œuvres européennes créées par des producteurs indépendants dans les guides de programmes électroniques. Ce ne sont là que des exemples, prenant en compte les particularités des services à la demande, et donnant entière satisfaction à notre pays.

Cette avancée significative coïncide avec l’annonce de trois autres bonnes nouvelles pour la culture européenne. En premier lieu, le Président de la Commission a annoncé, le 11 décembre dernier, qu’il suspendait le projet de recommandation sur la rémunération au titre de la copie privée, projet dont le ministre de la culture et de la communication a rappelé ici même qu’il était susceptible de remettre en cause la compensation équitable pour la copie privée. Ensuite, Mme Reding a fait savoir, fin décembre, que le régime actuel d’aides publiques au cinéma devrait être prolongé jusqu’à fin 2009. Enfin et surtout, la Communauté et treize Etats membres, parmi lesquels la France, ont ratifié, le 18 décembre, la convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, autorisant son entrée en vigueur le 18 mars 2007, puisque 39 pays ont désormais déposé leurs instruments de ratification. Ces nombreuses avancées seront certainement saluées par le prochain rapport du groupe de travail de l’Assemblée nationale et du Bundestag sur la diversité culturelle. Il faut d’ailleurs rappeler qu’à l’initiative de la présidence allemande, il y aura en avril prochain une conférence à Essen sur la diversité culturelle et la mise en œuvre de la convention de l’UNESCO.

II. DEUX QUESTIONS PROBLEMATIQUES : LES ABUS LIES AU PRINCIPE DU PAYS D’ORIGINE ET L’ENCADREMENT PUBLICITAIRE

Le principe du pays d’origine (PPO) constitue le fondement de la directive TVSF, l’épine dorsale de la construction du marché intérieur des services de médias audiovisuels.

En vertu de ce principe, un organisme de radiodiffusion établi dans un Etat membre peut librement diffuser sur le territoire d’un autre Etat membre dès lors qu’il respecte la législation de son pays d’établissement. Il n’est, en revanche, pas tenu au respect du droit du pays de réception, y compris lorsque celui-ci a édicté des règles plus strictes que celles énoncées dans la directive TVSF, en application du principe de subsidiarité.

Dès lors, certains organismes de radiodiffusion sont tentés, pour contourner les régimes juridiques les plus stricts, de s’établir sur le territoire des Etats les moins-disants juridiquement, alors qu’ils diffusent principalement vers le territoire d’autres Etats membres. C’est le cas, par exemple, d’une chaîne en suédois établie en Ecosse pour s’affranchir de la réglementation suédoise concernant la protection de la jeunesse dans le domaine de la publicité.

Il peut également y avoir des chaînes n’ayant pas réalisé à proprement parler une délocalisation, mais dont la diffusion s’adresse manifestement à des téléspectateurs situés dans un autre Etat. La France est confrontée à une telle situation avec RTL 9, leader en audience des chaînes « mini-généralistes » en français, dont le statut luxembourgeois lui permet notamment de diffuser deux fois plus de films par an qu’une chaîne française, de ne pas respecter des quotas d’œuvres francophones, ou encore d’avoir un encadrement publicitaire plus souple. Comme le notait le ministère de la culture et de la communication lors de son audition, notre pays étant l’Etat européen soumis à la plus forte régulation dans le secteur audiovisuel, il est particulièrement exposé à de tels contournements.

La France n’est pas le seul Etat concerné et lors des consultations menées par la Commission, plusieurs pays rassemblés dans un informel « groupe des 13 » (dont la France constituait le quatorzième membre officieux) ont émis le souhait qu’une réflexion soit engagée sur la question des contournements abusifs du PPO.

La Commission européenne a proposé de codifier dans le corps même de la directive la jurisprudence de la CJCE sur les contournements abusifs, issue de l’affaire C-23/93, dite « TV 10 S.A. », et qui n’est reprise, jusqu’à présent, que dans les considérants de la directive TVSF. Ces dispositions autoriseraient explicitement un Etat membre à prendre, en cas d’abus ou de comportement frauduleux, des « mesures appropriées » à l’encontre d’un fournisseur de service de média établi dans un autre Etat membre. Ces mesures ne pourraient intervenir qu’au terme d’une concertation bilatérale entre les deux Etats concernés et seraient soumises au contrôle de la Commission qui vérifierait leur compatibilité avec le droit communautaire.

La procédure proposée par la Commission - et aménagée par le Conseil et le Parlement européen - n’apparaît pas pleinement satisfaisante, en raison de son formalisme extrême, de son caractère non contraignant, et de l’incertitude pesant sur la nature exacte des « mesures appropriées ».

Les autorités françaises auraient préféré une révision des critères pris en compte pour déterminer le pays d’établissement, afin de faire prévaloir le critère du lieu où œuvre une partie importante des effectifs employés par la chaîne de télévision mise en cause sur le critère du lieu où sont prises les décisions éditoriales, puisque le premier critère est plus facile à vérifier que le second. La France estimait également nécessaire de préciser le critère des décisions éditoriales, en préconisant de viser les décisions éditoriales « quotidiennes », afin de mieux appréhender la réalité. En dernier lieu, notre pays souhaitait améliorer la procédure de lutte contre les délocalisations abusives, en définissant un faisceau d’indices propres à identifier une telle délocalisation abusive : on suggérait, par exemple, des indices tenant à la langue du programme ou à l’origine des ressources.

La Commission et plusieurs Etats (Allemagne, Royaume-Uni, Luxembourg notamment) ont très vite fait part de leur opposition catégorique à toute modification des critères pris en compte pour déterminer le pays d’établissement. Dans l’autre camp, le « groupe des 13 » s’est progressivement réduit à un « groupe des 6 » (Autriche, Belgique, Irlande, Lettonie, Lituanie, Suède), non susceptible de constituer une minorité de blocage et, de plus, très divisé quant aux motifs de l’action engagée : la Suède défend, par exemple, une approche éthique, tandis que l’Autriche a une vision plus économique du problème. En tout état de cause, la position des partisans d’une révision des critères du pays d’établissement a été très affaiblie par le vote du Parlement européen, dans la mesure où ce dernier a accepté la procédure de concertation bilatérale proposée par la Commission, se contentant d’ajouter un considérant (le considérant 23 bis ) élargissant le faisceau d’indices permettant d’établir un abus : il pourrait être fait référence désormais à l’origine des recettes publicitaires, et/ou d’abonnement, à la langue principale du service ou encore à l’existence de programmes ou de communications commerciales visant spécifiquement le public de l’Etat membre de réception.

Il semble peu réaliste aujourd’hui d’obtenir davantage sur cette question, même si les textes en discussion ne satisfont que partiellement les demandes françaises.

La Commission nous ayant fait savoir, lors de son audition, que le texte adopté par le Parlement européen lui semblait meilleur que celui de l’orientation générale du Conseil, notre action doit surtout viser maintenant à l’amélioration de ce texte, pour qu’il ne soit pas repris en l’état dans la proposition révisée de la Commission.

Sur l’initiative de parlementaires britanniques, le texte du Parlement européen prévoit, en effet, qu’un Etat ne peut adopter des « mesures appropriées » contre la chaîne accusée d’abus que si elle s’est établie sur le territoire d’un autre Etat «  uniquement  » afin d’éviter les règles plus strictes du premier Etat. Une telle restriction est de nature à priver la procédure prévue de toute portée pratique lors d’un contentieux devant la CJCE, alors même que l’on a déjà émis des réserves sur le caractère opérant de cette procédure. Il importe donc d’obtenir que le mot « uniquement » ne soit pas repris dans le texte de la proposition révisée de la Commission.

La seconde question problématique a trait aux règles de publicité. Elle porte à la fois sur le problème très technique des insertions publicitaires et sur le « placement de produit ».

Les recettes publicitaires constituent la principale source de revenus pour les radiodiffuseurs de télévision dans l’Union européenne. En 2004, le marché de la publicité télévisuelle a atteint environ 26 milliards d’euros pour l’Union à 15. S’agissant de la France, ce montant était de 4,2 milliards d’euros en 2006. Les dispositions régissant la publicité ont une apparence très technique, mais leurs implications économiques et culturelles sont très importantes.

La volonté de la Commission est d’alléger les règles actuelles pour garantir la viabilité économique du secteur audiovisuel. Elle propose d’abord de supprimer la limitation journalière fixée à 3 heures pour les chaînes généralistes, limitation rarement atteinte en pratique. Elle prévoit, ensuite, de supprimer la règle des 20 minutes minimum entre deux pauses publicitaires, tout en maintenant la limitation horaire de publicité à 12 minutes par heure d’horloge. Enfin, pour les œuvres cinématographiques, les programmes pour enfants et les émissions d’information, une seule interruption serait autorisée par tranche de 35 minutes, au lieu de 45 minutes actuellement.

Ce dernier point a donné lieu à des débats passionnés devant le Conseil et le Parlement européen. Ces deux institutions se sont finalement déclarées en faveur d’une interruption par tranche de 30 minutes, soit un assouplissement plus fort que celui préconisé par la Commission. Néanmoins, le débat est loin d’être clos.

D’abord, parce que le vote du Parlement européen n’a été acquis qu’à une seule voix de majorité (324 voix contre 323 et 23 abstentions) et va à l’encontre de la position de la commission de la culture favorable au statu quo des 45 minutes. Ce vote a surtout traduit une opposition droite/gauche, sauf du côté des parlementaires français qui, tout bord politique confondu, ont voté, comme l’aile gauche du Parlement européen, pour le maintien des 45 minutes, tout en se déclarant prêt à accepter les 35 minutes proposées par la Commission.

Ensuite, des voix nombreuses se sont élevées contre le choix des 30 minutes. Le ministre français de la culture et de la communication a jugé nécessaire de maintenir un juste équilibre entre la liberté de diffusion, l’intégrité des œuvres et la protection des téléspectateurs, en particulier les plus jeunes. De même, la fédération européenne des réalisateurs de l’audiovisuel a appelé à poursuivre les discussions, afin de respecter la valeur culturelle et artistique des œuvres audiovisuelles.

Il apparaît souhaitable que la proposition révisée de la Commission maintienne le texte actuel de la directive, prévoyant une interruption publicitaire par tranche de 45 minutes. En outre, la Commission devrait s’opposer à l’extension de la règle des 12 minutes de publicité par heure aux services à la demande, car cette initiative du Parlement européen semble difficile à mettre en œuvre.

Le second volet de la question publicitaire touche à un domaine où règne une forte hypocrisie, celui du placement de produit.

Il s’agit d’une forme de communication commerciale consistant à inclure ou à faire référence à un produit, un service ou une marque dans un programme. La définition figurant dans la proposition initiale de la Commission ne visait que les cas moyennant paiement ou autre contrepartie, mais le Parlement européen a précisé qu’il pouvait y avoir, ou pas, paiement ou autre contrepartie. Cette technique publicitaire est une pratique courante dans les films cinématographiques et tout amateur des « James Bond », par exemple, est familiarisé avec le placement de produit. Autorisée au Royaume-Uni, interdite en Allemagne, il ne fait l’objet, jusqu’à présent, d’aucun encadrement communautaire. La Commission a surtout souhaité intervenir pour que les téléspectateurs disposent d’éléments d’information leur permettant d’identifier ce type de publicité.

Dans la proposition initiale, le placement de produit était donc admis, en principe, mais faisait l’objet de nombreuses restrictions (en particulier, il était prohibé dans les journaux télévisés, les émissions pour enfants et les documentaires). Le Conseil et le Parlement européen ont choisi une approche inverse, interdisant par principe le placement de produit, tout en prévoyant des dérogations. L’orientation générale du Conseil et le texte voté par le Parlement européen se différencient néanmoins dans les modalités de mise en œuvre de ces dérogations : le Conseil confie aux Etats membres la possibilité d’autoriser expressément le placement de produit dans un certain nombre de programmes (films, séries conçues pour la télévision, émissions sportives et divertissements) ; le Parlement européen propose quant à lui que ces dérogations soient de droit dans les programmes précités (les divertissements étant cependant exclus) et que les Etats ne soient donc doter que d’une capacité d’interdire (et non plus d’autoriser). La Commission européenne nous a fait part de sa préférence pour ce dernier mécanisme.

Les débats sur le placement de produit sont particulièrement ardus du fait de la fermeté de l’Allemagne sur cette question. La France fait preuve d’un plus grand pragmatisme en raison de l’apport de cette technique au financement du cinéma. Le ministère de la culture et de la communication nous a toutefois précisé qu’il interdirait probablement le placement de produit dans les téléfilms et les séries conçues pour la télévision. A cet égard, il faut bien souligner que, contrairement à ce que l’on pourrait penser, les chaînes de télévision et leurs régies publicitaires se montrent plutôt réservées sur le placement de produit, perçu comme un concurrent de la publicité traditionnelle, profitant aux producteurs et non pas aux chaînes. Elles sont beaucoup plus favorables au parrainage, qui dissocie clairement l’espace commercial de l’espace éditorial ou culturel et qui ne donne pas prise à des exigences de la part de l’annonceur (sur la date et l’heure de programmation, par exemple).

Le principe de réalisme doit nous conduire à soutenir la proposition adoptée par le Parlement européen (à savoir une interdiction de principe assortie de dérogations auxquelles les Etats peuvent s’opposer). Ce soutien s’accompagne cependant d’une réserve : dans son souci d’informer le téléspectateur, le Parlement est allé trop loin en prévoyant un signal toutes les 20 minutes au moins dans les émissions comportant du placement de produit. Cette omniprésence aboutirait à renforcer l’impact publicitaire et dénaturerait les œuvres concernées.

Le problème de l’encadrement publicitaire illustre surtout l’importance du principe de subsidiarité dans le domaine audiovisuel, où la compétence de l’Union n’est qu’une compétence d’appui.

Tout comme la directive initiale adoptée en 1989, la proposition de révision préserve la faculté laissée aux Etats membres d’adopter, au plan national, des règles plus strictes que celles énoncées par la directive et étend cette faculté aux services à la demande.

Or, le droit français est effectivement plus strict que la directive TVSF sur plusieurs points, notamment en matière de publicité et de quotas d’œuvres audiovisuelles. En l’absence d’évolution de notre législation nationale, plusieurs débats engagés à l’occasion de la révision de la directive apparaissent donc relativement théoriques aux professionnels français du secteur, engagés dans d’autres discussions au plan national.

Le syndicat national de la publicité télévisée (SNPTV) nous a ainsi déclaré que la proposition communautaire allait dans le bon sens et que, selon lui, la difficulté résidait dans la transposition des dispositions relatives à la publicité par le décret n° 92-280 du 27 mars 1992. Ce décret fixe, par exemple, une limitation horaire de publicité en se référant à la notion d’heure glissante, alors que le texte de la directive utilise la notion d’heure d’horloge, plus souple dans sa mise en œuvre. De la même façon, M. Nicolas de Tavernost, président de M6, conteste aussi le fait que les chaînes hertziennes privées ne puissent couper les films et téléfilms que par un seul écran publicitaire, en vertu de l’article 73 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, tandis que la directive TVSF autoriserait au moins deux coupures. Tous ces professionnels font valoir que le marché français de la publicité télévisée est assez peu développé au regard de celui de nos principaux partenaires (4,2 milliards d’euros en 2006, contre 5,3  en Allemagne, 5,5 en Italie et 7 au Royaume-Uni) et qu’il existe un paradoxe dans le fait d’exiger des chaînes la production de fictions supplémentaires sans accorder les recettes appropriées. Tous ces arguments ont été examinés par notre collègue Philippe Leroy dans son rapport d’information (n° 413 [2004-2005]), fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification, sur l’évaluation de l’impact de la libéralisation de la publicité télévisée.

Dans ce débat franco-français, le Gouvernement a déjà annoncé qu’il n’avait pas l’intention de modifier la législation en vigueur, d’autant que le marché publicitaire est déjà confronté, depuis le 1er janvier 2007, à une évolution significative liée à l’autorisation de la publicité télévisée pour le secteur de la distribution. Seule une réflexion sur le cadre juridique existant en matière de placement de produit semble envisageable à court terme. Cette position nationale conforte notre souhait, d’une part, de voir la directive en discussion maintenir à 45 minutes le délai entre deux interruptions publicitaires (ou, tout au plus, le réduire à 35 minutes, mais surtout ne pas retenir le délai de 30 minutes) et, d’autre part, renforcer la lutte contre les délocalisations abusives, car il est certain que plus les écarts entre les législations européenne et française seront importants, plus les tentations de délocaliser pour s’affranchir de nos règles nationales seront grandes.

Les questions liées aux quotas d’œuvres audiovisuelles européennes suscitent également plus d’interrogations au niveau national qu’au niveau communautaire.

La France, comme cinq autres Etats membres, a imposé des pourcentages plus élevés que ceux prévus par la directive (60 % d’œuvres européennes, contre 50 % exigés par la directive). Elle a surtout usé de sa faculté de prévoir des règles plus détaillées, par exemple en se référant aux heures de grande écoute pour la prise en compte des quotas ou encore en fixant des quotas d’œuvres « d’expression originale française », des quotas pour les rediffusions, ainsi qu’un nombre maximum de films à diffuser chaque année. Toutes ces contraintes, prévues par le décret n° 90-66 du 17 janvier 1990, font l’objet de vives critiques par les chaînes de télévision, qui les jugent inadaptées, voire allant à l’encontre des objectifs recherchés.

L’examen du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur donnera l’occasion de discuter d’une autre difficulté purement nationale, celle de la définition de l’œuvre audiovisuelle. On doit rappeler que le Sénat a adopté un amendement visant à créer un sous quota d’« œuvres patrimoniales », pour restreindre les possibilités d’attribuer la qualification d’œuvres audiovisuelles – prises en compte dans les quotas prévus par la directive TVSF – à des émissions de télé-réalité ou à des magazines. Il faut préciser que de telles discussions n’ont pas lieu d’être en Italie, où les œuvres de plateau ont été exclues dans la définition nationale des œuvres audiovisuelles. De même, en Allemagne, une définition positive des programmes à prendre en compte a été établie.

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D’un point de vue général, le bilan actuel des négociations de la révision de la directive TVSF semble très positif pour notre pays. Les dispositions concernant la diversité culturelle dans les services à la demande sont même quelque peu inespérées, si l’on se réfère aux positions prises par la plupart de nos partenaires au début des négociations.

Actuellement, les amendements votés par le Parlement européen sont examinés par le groupe de travail « Audiovisuel » du Conseil, qui doit tenir trois réunions d’ici le 9 février (la première a déjà eu lieu le 15 janvier). Un Conseil informel pourrait se réunir dans la foulée, ce qui devrait conduire la Commission européenne à présenter une proposition révisée fin février. Une position commune du Conseil est attendue en mai 2007. Par la suite, il y aura probablement une seconde lecture du Parlement européen, puis une procédure de conciliation. Ce texte ne devrait donc pas être adopté définitivement avant le second semestre 2007 (sous présidence portugaise), voire le premier semestre 2008 (sous présidence slovène).

On peut ajouter, pour conclure, que la nature mouvante et évolutive du domaine audiovisuel conduira certainement à des révisions régulières de la directive.

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Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

M. Jérôme Lambert a estimé, s’agissant du paragraphe 5 de la proposition de conclusions, qu’il serait préférable que la Délégation prenne fermement position en faveur du maintien du délai actuel autorisant une seule interruption publicitaire par tranche de 45 minutes, sans affaiblir cette prise de position en ajoutant, comme le propose le rapporteur, « ou, tout au plus, de le fixer à 35 minutes ». Il a proposé que ce dernier membre de phrase soit supprimé.

Le rapporteur, a indiqué que les parlementaires européens français, tous partis politiques confondus, avaient déjà annoncé qu’ils pourraient accepter un délai de 35 minutes. Le débat se situe désormais entre une durée de 30 minutes ou de 35 minutes, le maintien du délai actuel n’étant plus envisagé par les principaux acteurs de la négociation. Il a précisé que l’abaissement de ce délai ne conduirait pas à une modification de la législation française, qui maintiendra le délai à 45 minutes.

M. François Guillaume a apporté son soutien à la suggestion de M. Jérôme Lambert. Il a constaté, à l’occasion de son rapport sur l’évolution de la procédure de révision de la directive télévision sans frontières, présenté sous la dixième législature, que de nombreuses chaînes de télévision souhaitaient s’affranchir des quotas de diffusion d’œuvres européennes parce qu’il est plus facile d’acquérir les droits de diffusion de films ou de téléfilms déjà amortis sur le marché américain. Il s’est donc félicité du maintien du système actuel de quotas mais a souligné que de nombreuses difficultés d’application subsistent, en ce qui concerne les horaires de diffusion et la définition des œuvres audiovisuelles notamment. La législation française est heureusement plus stricte que la directive s’agissant des horaires de diffusion, afin d’éviter que les œuvres européennes ne soient systématiquement diffusées à des horaires de faible audience. Il a suggéré de reprendre le concept d’« œuvre patrimoniale », introduit par un amendement sénatorial au projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, adopté en première lecture par le Sénat le 22 novembre dernier, visant à créer un sous quota pour la diffusion de ces oeuvres.

Le rapporteur, a indiqué n’avoir pas repris le concept d’œuvre patrimoniale car il s’agit d’un amendement à notre législation nationale, qui ne serait pas transposable dans le cadre du débat sur la révision de la directive télévision sans frontières, dans la mesure où le texte communautaire laisse aux Etats membres le soin de définir les œuvres audiovisuelles. La question de la diffusion des œuvres européennes aux heures de grande écoute est effectivement cruciale : il faut absolument éviter que ces œuvres ne soient diffusées « la nuit et l’été », pour reprendre le titre du rapport au ministre de la Culture de Mme Catherine Clément sur l’offre culturelle à France Télévisions.

Mme Anne-Marie Comparini a insisté sur l’importance de supprimer le terme « uniquement » figurant dans le texte adopté par le Parlement européen sur le principe du pays d’origine, qui n’autoriserait un Etat membre à adopter des mesures appropriées en cas d’abus ou de fraude que si le fournisseur de services de médias s’est établi dans un Etat membre « uniquement » afin d’éviter les règles plus strictes de l’Etat souhaitant prendre ces mesures appropriées. Elle a estimé que ce débat n’était pas sans rappeler les difficultés soulevées par le principe du pays d’origine figurant dans la proposition de directive relative aux services.

Le rapporteur, a accepté de modifier le paragraphe 5 dans le sens souhaité par ses collègues, en supprimant la référence au délai de 35 minutes.

M. Christian Philip, Président, a souligné que, compte tenu du délai d’adoption de cette proposition de directive, auquel s’ajoutera le délai de transposition, les modifications envisagées ne seront sans doute effectives qu’en 2009 au plus tôt.

A l’issue de ce débat, la Délégation a adopté les conclusions suivantes :

«  L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 89/552/CE du Conseil visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres relatives à l’exercice d’activités de radiodiffusion télévisuelle (COM [2005] 646 final / E 3038),

1. Approuve l’extension du champ d’application de la « directive TVSF » aux services à la demande, ce qui permettra d’encadrer ces nouveaux services par des principes généraux relatifs notamment à la protection des mineurs ;

2. Se félicite de l’introduction de dispositions visant à mettre en œuvre la promotion des œuvres audiovisuelles européennes dans les services à la demande et souligne que ces mesures sont conformes aux engagements souscrits par la Communauté européenne et par les Etats membres ayant signé et ratifié la convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles ;

3. Estime que la procédure de concertation bilatérale destinée à lutter contre les contournements abusifs du principe du pays d’origine n’est pas pleinement satisfaisante, en raison de son formalisme, de son caractère non contraignant et de l’incertitude pesant sur la nature exacte des « mesures appropriées » susceptibles d’être adoptées par l’Etat souhaitant prévenir un abus ou un comportement frauduleux ;

4. Insiste, en particulier, sur le risque de voir cette procédure perdre tout caractère opérant si la directive révisée restreignait trop les conditions fixées pour qu’un Etat puisse prendre des mesures appropriées en cas d’abus ou de fraude. A cet égard, le texte adopté par le Parlement européen apparaît excessif, en prévoyant que des mesures appropriées ne pourraient être envisageables qu’à condition que le fournisseur de services de médias se soit établi sur le territoire d’un autre Etat membre « uniquement » afin d’éviter les règles plus strictes de l’Etat souhaitant prendre ces mesures appropriées ;

5. S’oppose à ce que la transmission de certains films conçus pour la télévision, des œuvres cinématographiques, des émissions pour enfants et des journaux télévisés puisse être interrompue par des écrans publicitaires une fois par tranche de 30 minutes. Afin de ne pas dénaturer les œuvres et de ne pas accroître les tentations de contournement abusif du principe du pays d’origine à l’encontre des Etats faisant usage de leur faculté d’édicter des règles plus strictes que celles de la directive, il serait opportun de ne pas modifier le délai actuel fixé à 45 minutes;

6. Juge difficile de mettre en œuvre l’extension aux services à la demande de la règle plafonnant à 12 minutes par heure d’horloge le temps consacré à la publicité ;

7. Se déclare favorable à l’établissement d’un cadre communautaire pour le placement de produit, mais suggère de ne pas informer les téléspectateurs de façon disproportionnée, ce qui porterait atteinte aux œuvres audiovisuelles concernées et, en fin de compte, renforcerait l’impact de la publicité.  »