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TOME II
SOMMAIRE DES AUDITIONS
LES TEMOIGNAGES DES EXPERTS

Les témoignages sur les aides

__  Monsieur Jean-Louis GUIGOU, Délégué à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (12 janvier 1999).

__ Jean-Luc VO VAN QUI (DARPMI), Daniel MATHIEU (DGEFP), François Hiller (DGEFP), Madame Karima Madi (DGEFP), Monsieur Roland Smolar (DGEFP), Madame Isabelle Moures (DGEFP), Monsieur Jean-Paul Blouard (UNEDIC), Madame Hélène Vodé (UNEDIC), Messieurs Didier Coulomb (Direction de la technologie), Pascal Colombani (Direction de la technologie), Pierre Radanne (ADEME), Jean-Marie Sépulchre (ANVAR), Jean-Michel Etienne (Ministère de l'équipement), Alain de Cointet de Fillain (DREE), Gérard Bornier (DREE), Christian Badaut (DiGITIP), Lionel Toutain (DIGEC), Pierre Pouessel (Restructurations de défense), Philippe Labernede (Restructurations de défense), Stéphane Le Moing (Ministère de l'agriculture), Madame Sibylle Slattery (Ministère de l'agriculture) et Monsieur Bruno Depresle (Direction du tourisme) (21 avril 1999).

__  Annexe sur les dispositifs d'aide aux entreprises dans les Etats membres de l'Union européenne.

__  Madame Martine LAQUIEZE, Chef du bureau des interventions économiques et de l'aménagement du territoire à la direction générale des collectivités locales (10 février 1999).

Avertissement

Conformément aux alinéas 1er et 3 de l'article 142 du règlement de l'Assemblée nationale qui disposent que « les personnes entendues par une commission d'enquête sont admises à prendre connaissance du compte-rendu de leur audition », (les intéressés ayant la faculté de produire des observations par écrit), toutes les personnalités entendues ont été invitées à faire part des observations éventuelles que pouvait appeler de leur part le procès-verbal de leur audition.
Certaines n'ayant pas cru devoir donner suite à cette invitation, la Commission a été amenée à considérer que leur silence valait approbation et le procès-verbal les concernant est publié dans le texte qui leur a été soumis.
En outre, un certain nombre de personnalités ont eu l'obligeance de transmettre à la Commission divers documents, soit avant, soit à l'issue de leur audition. Le volume de ces dépôts ou de ces envois est tel qu'il a été matériellement impossible de les reproduire au sein du présent rapport qui s'en tient strictement aux procès-verbaux des auditions.
Seul le relevé des aides reçues par le groupe Moulinex, tel qu'il a été fourni par sa direction, fait exception dans la mesure où ce relevé constitue une information essentielle à la réflexion de la commission d'enquête, celle-ci regrettant que les autres groupes n'aient pu fournir les mêmes renseignements avec autant de précision.

Le témoignage de la Délégation à l'aménagement du territoire sur la prime à l'Aménagement du Territoire

Audition de M. Jean-Louis GUIGOU,
Délégué à l'aménagement du territoire et à l'action régionale

(extrait du procès-verbal de la séance du mardi 12 janvier 1999)

Présidence de M. Alain FABRE-PUJOL, Président

M. Jean-Louis Guigou est introduit.

M. le Président lui rappelle que les dispositions législatives relatives aux commissions d'enquête lui ont été communiquées. A l'invitation du Président, M. Jean-Louis Guigou prête serment.

M. Jean-Louis GUIGOU : Monsieur le Président, Messieurs les parlementaires, c'est un grand honneur pour moi de venir vous exposer ce que je sais, mais peut-être serez-vous déçus car je ne sais sans doute pas tout !

Ce que je sais, je vais vous le dire et, franchement, si je devais résumer mon propos en répondant à l'interrogation « est-ce que les grands groupes abusent des fonds publics, prennent des primes, se délocalisent et partent ? »,  je me limiterais à répondre par la négative ! Nous verrouillons tout et nous contrôlons tout grâce à l'outil qui est à notre disposition et je n'ai nullement connaissance de turpitudes ou de dysfonctionnements. L'outil que nous avons est un bon outil !

Je vais vous présenter de quels contrôles la prime d'aménagement du territoire - la PAT - que nous distribuons fait l'objet. J'ai précédemment témoigné devant une autre commission - celle que présidait M. Glavany sur la Corse - mais les choses étaient fort différentes puisque, autant je maîtrise totalement les 420 millions de francs de prime d'aménagement du territoire que j'attribue, autant, sur les contrats de plan, je délègue des crédits dont il est bien difficile de savoir ce qu'il en advient car j'en perds le contrôle !

Je voudrais donc aujourd'hui vous parler de deux outils : le premier, très important qui est la prime d'aménagement du territoire, le second, relativement mineur en comparaison, qui est constitué par l'aide que nous apportons aux grands groupes industriels afin de faciliter leur ancrage territorial et les procédures d'essaimage.

La PAT a été considérablement rénovée - je vous laisserai le dossier qui la concerne, M. le Président - par le décret du 6 février 1995 qui est intervenu simultanément à la loi Pasqua. En dépit de cette coïncidence de date, les deux systèmes sont déconnectés et le décret de la PAT ne doit pas sa naissance à la loi Pasqua mais au fait que l'Europe nous oblige, tous les cinq ans, à réviser notre zonage : nous sommes en train de préparer les zonages pour la période allant de 2000 à 2006 qui doivent faire l'objet d'un décret à paraître soit en décembre 1999 - si nous sommes prêts à temps -, soit en janvier ou février 2000.

Nous travaillons donc sur la base du décret dont je vais vous laisser une copie. De quoi s'agit-il ? Nous disposons d'une masse globale - je vous donne le bilan arrêté hier soir - de 550 millions de francs par an.

En réalité, compte tenu du fait que la PAT est constituée de crédits que nous allouons pour des créations d'emplois sur une durée de trois ans, je récupère parfois des autorisations de programme non utilisées ce qui explique que, dans la loi de finances, ce n'est pas le chiffre de 550 millions de francs que l'on voit apparaître mais un chiffre de 350 millions de francs ou de 400 millions de francs.

Cela étant, comment les choses fonctionnent-elles ? Le droit est le suivant : la PAT est le seul outil de l'État - et je me permets, messieurs les parlementaires d'y insister - au profit de l'emploi - car c'est par emploi qu'elle est versée - au profit de zones préférentielles et qui soit lié à des investissements réels !

Les seuils sont les suivants : 20 millions de francs d'investissement et 20 emplois créés. S'il n'y a pas au minimum 20 millions de francs d'investissement et 20 emplois, il n'est pas possible de recevoir la prime d'aménagement du territoire ; d'où une demande très forte, non seulement des parlementaires mais aussi des milieux socioprofessionnels, pour que soit baissé le seuil de la PAT à 15 millions de francs et à 15 emplois créés.

Lors du CIADT du 15 décembre 1998, le Premier ministre m'a autorisé à baisser les seuils mais sans les arrêter et je dois négocier avec le ministère des finances et les autres ministères afin de savoir à quel niveau les fixer. Bien évidemment, si je travaille à l'heure actuelle sur une autorisation plancher de 550 millions de francs de PAT dont je dépense effectivement 450 millions, il faut considérer - si nous passons d'un seuil de 20 emplois à 15 emplois - qu'il me faudra de 100 millions de francs à 200 millions de francs supplémentaires car de nombreuses PME et PMI viendront s'inscrire dans cette nouvelle fourchette et M. Sautter est bien prévenu qu'une baisse du seuil imposera d'accroître la masse financière de la PAT.

Telle est donc la règle, du moins celle qui est applicable à la PAT dite « industrielle » et lorsque je parle de 20 emplois, c'est d'emplois industriels dont il s'agit. Mais nous avons aussi une PAT dite « tertiaire » qui soutient le tertiaire industriel, c'est-à-dire les services aux entreprises.

De plus en plus, les entreprises externalisent les fonctions ou font appel à des prestataires de services, l'entreprise se concentrant sur sa fonction essentielle. En conséquence, l'entreprise quelle qu'elle soit - mais c'est encore plus vrai pour les grandes groupes - s'entoure, un peu à la façon de la reine au sein d'une ruche, de nombreuses entreprises de services. Certaines, grâce à l'informatique, peuvent être éloignées mais quoi qu'il en soit, nous voyons les grands groupes s'entourer de satellites toujours plus nombreux pour des raisons de proximité, d'innovation etc.

La PAT « tertiaire » qui est versée pour 20 emplois n'est soumise à aucun seuil d'investissement, puisqu'il s'agit de services, et elle s'applique à un zonage qui exclut la seule Ile-de-France, comme en témoigne la carte que je vous ai fournie et sur laquelle vous voyez apparaître également, en jaune, la PAT industrielle au taux plafond de 50 000 francs par emploi créé qui peut être portée jusqu'à 70 000 francs dans les zones les plus démunies.

Messieurs, je me permets de vous poser une question. Nous sommes en mesure de mettre beaucoup d'argent en des endroits où la prime n'est pas utilisée puisque nous avons en effet 10  %  du territoire zoné qui ne reçoit aucun projet. Ne serait-il pas dès lors plus judicieux de faire bénéficier du zonage PAT les piémonts qui ont un tissu industriel plutôt que des zones pour lesquelles il faudrait prévoir d'autres outils puisque, même lorsque nous les « zonons », personne ne vient s'y installer ?

M. Robert PANDRAUD : Nous vous en poserons d'autres car la Région Ile-de-France correspond à un grand vide : nous en parlerons tout à l'heure...

M. Jean-Louis GUIGOU : Oui, il est clair que la région Ile-de-France se trouve exclue du zonage PAT industrielle et du zonage PAT tertiaire « services aux entreprises » : il n'y a pas à le cacher ; vous pouvez le contester, nous obliger à transformer cet état de choses et nous verrons ce que nous pourrons faire mais, pour le moment, je vous décris, moi, ce qui existe.

M. Roger PANDRAUD : Si je me suis permis de vous faire cette remarque - et je m'en excuse auprès du Président - c'est parce que vous nous avez dit que vous nous posiez une question ...

M. Jean-Louis GUIGOU : Tout à fait !

J'en arrive maintenant aux contrôles sur les entreprises. La question est la suivante : quelles sont nos possibilités de vérifier que les groupes industriels utilisent bien les primes d'aménagement que nous leur versons ?

Nous avons quatre moyens de le faire.

Le premier moyen est le caractère graduel du versement de la prime. Ce versement est en effet conditionnel puisque, lorsque la PAT est octroyée, le chef d'entreprise ne reçoit pour lancer son programme qu'un tiers de son montant. A la suite, le chef d'entreprise dispose de trois ans pour la réalisation du programme et nous versons le solde au fur et à mesure de la réalisation de celui-ci. Normalement, au bout de la troisième année, tout doit avoir été exécuté et si les emplois ne sont pas créés, il n'y a pas de prime !

Le deuxième moyen consiste à faire figurer dans notre règlement que les entreprises ne peuvent pas créer d'emplois par transfert d'emplois à partir d'autres zones car ce serait trop beau de payer des primes d'aménagement du territoire pour faire venir des salariés établis dans d'autres régions. En conséquence lorsqu'une entreprise ou un grand groupe nous réclame une prime, nous lui demandons la localisation de l'ensemble de ses salariés et nous vérifions que ce sont bien des emplois nets qui sont créés.

M. le Rapporteur : Puisque vous parlez d'entreprises, ces entreprises peuvent appartenir à un groupe. A l'intérieur de ce groupe, une entreprise "A" peut-elle bénéficier d'une prime qui se traduirait malgré tout par des transferts de salariés venant d'une entreprise "B" appartenant au même groupe ?

M. Jean-Louis GUIGOU : Non. Une clause stipule que : « Les créations d'emplois auxquelles se sont engagées les entreprises ne peuvent résulter de transferts de personnels d'autres sites ».

Donc, il ne peut pas y avoir de transferts de salariés d'un site à un autre. Si, pour une raison quelconque, un établissement d'une entreprise est créé et qu'il y a transfert de quelques salariés de l'entreprise A vers l'établissement B, nous ne primons pas ces transferts. Nous ne primons que les emplois nets créés hors tout transfert entre les établissements d'un groupe.

Le troisième moyen de contrôle tient au fait que les emplois créés doivent être maintenus deux ans au moins après la fin du programme. Si une entreprise licencie la quatrième année, elle est obligée de restituer la PAT. Notre contrôle s'étend donc sur cinq années : les trois années pendant lesquelles s'effectue l'investissement et deux ans après !

Vous pouvez nous objecter : « Messieurs, vous verrouillez le système pendant cinq ans, mais la sixième année - après avoir touché la prime - les entreprises peuvent agir à leur guise! » Vous avez en mémoire les exemples de JVC, Panasonic ou encore Hoover à Dijon qui d'ailleurs dans ce dernier cas - je l'ai vérifié - n'a pas reçu de prime ! JVC et Panasonic pour lesquels nous avions payé sont, eux, partis de Longwy après y être restés - j'ai contrôlé les dates - durant huit ans : en huit ans, nous considérons que les richesses créées, les impôts locaux, les taxes professionnelles et les emplois nous ont largement dédommagés des primes versées. Mais on peut comprendre et on peut admettre en toute logique que la sixième année on nous fasse des infidélités.

La quatrième moyen de contrôle est un verrou très intéressant qui consiste en ce que seules soient primées les créations d'emploi se traduisant par des contrats à durée indéterminée. La PAT n'encourage donc pas les entreprises à embaucher pour des emplois précaires !

Tels sont donc les contrôles qui nous permettent de vérifier que l'argent public versé aux grands groupes n'est pas dépensé abusivement et de faire en sorte que l'infidélité par rapport au territoire soit relativement limitée.

Maintenant, si vous le permettez, dans la troisième partie de mon exposé, je vais vous donner connaissance - avec un document que vous laisserai, M. le Président - des résultats de la prime d'aménagement pour 1998 et des réformes que nous engageons.

En qualité de délégué à l'aménagement du territoire et à l'action régionale, je préside le CIALA c'est à dire le Comité interministériel d'aide à la localisation des activités. C'est le CIALA qui réunit, une fois par mois ou deux fois par trimestre environ, l'ensemble des ministères et des directions intéressés dont le Trésor, le Budget, le ministère de l'Agriculture etc. Nous traitons de façon interministérielle les dossiers expertisés par tous les ministères sur la base des rapports adressés par les préfets. Nous n'allouons aucune prime si nous n'avons pas une double expertise, celle d'un bureau privé et celle du préfet.

Quelles sont les transformations que nous aimerions opérer ? Ce sont les opérations que je vais vous exposer.

Partons des résultats : nous dépensons 66 %  des 450 millions de francs de la PAT - j'y reviendrai - pour des projets industriels, 17 %  pour des projets agro-alimentaires et 17 %  pour des projets de tertiaire industriel.

Nous considérons que, sur le tertiaire industriel, nous sommes en déficit, c'est-à-dire que nous devrions accroître nos possibilités d'intervention. En effet, de plus en plus, les entreprises font appel à du tertiaire industriel et nous sommes en déficit notamment dans deux secteurs : d'une part, ce qu'on appelle les call centers , c'est à dire les bureaux de téléphonistes qui distribuent des informations sur un grand nombre de sujets - tant aux personnes qu'aux entreprises - ainsi, dernièrement, l'entreprise Hutchinson a-t-elle créé mille emplois de standardistes dans cette branche qui connaît, du fait du commerce électronique, un essor si considérable qu'il s'agit d'une révolution ; d'autre part, sur la logistique, c'est-à-dire sur l'aide apportée dans le domaine des transports.

Par ailleurs, nous aimerions, je le répète, pouvoir verser la prime d'aménagement du territoire au minimum à partir de la création de quinze emplois et donc baisser les seuils. Mais il faut prendre garde ! A certains parlementaires et à certains ministères, tel celui de la Ville, qui aimeraient que nous descendions ce seuil beaucoup plus bas, je dis que dans les quartiers dégradés où il convient de créer des emplois pour trois ou quatre personnes, ce n'est pas à la PAT - laquelle serait, pour des emplois de proximité, un marteau-pilon - qu'il faut avoir recours.

En revanche, je prétends - et là, j'aimerais recevoir votre soutien - que nous disposions d'un outil intéressant créé par la loi Pasqua et que M. Juppé a vainement tenté de relancer : c'est le FNDE - le Fonds national pour le développement des entreprises. A ce titre, l'actuelle majorité nous a octroyé 200 millions de francs, mais j'ai les plus grandes peines à mobiliser ces 200 millions de francs autorisés au titre de ce FNDE - qui est pourtant un outil formidable - puisque je ne travaille que sur 80 millions de francs que j'emploie pour des prêts d'honneur, pour alimenter les plates-formes d'initiative locale, pour faire du capital-risque, pour venir en soutien aux comités locaux de bassins d'emplois. Nous aidons à chaque fois deux ou trois emplois ce qui en fait un outil très efficace. Or le ministère du Budget nous martyrise au motif qu'il n'aime pas cet outil qu'il considère comme du « bricolage » : certes, c'est du « bricolage » mais du « bricolage efficace ».

Nous aimerions donc avoir d'une part une prime d'aménagement du territoire versée à partir d'un seuil de quinze emplois pour toucher les PME-PMI et d'autre part le FNDE pour soutenir les créations d'un, de deux, de trois, voire d'une dizaine ou d'une quinzaine d'emplois de proximité.

M. le Président : Pensez-vous que le FNDE pourrait venir appuyer, au niveau national, le dispositif qui existe sur les zones franches urbaines ?

M. Jean-Louis GUIGOU : M. le Président, votre question est tout à fait d'actualité et très pertinente. J'ai en effet reçu de la Délégation interministérielle à la Ville, qui se sent très menacée sur les zones franches, une proposition de coopération pour élargir la PAT. J'ai très vite réagi à cette proposition - elle date d'avant-hier - en conseillant à ses auteurs de ne pas venir sur le terrain de la PAT et en leur expliquant que, s'ils venaient me prendre des zonages PAT, ils risqueraient, compte tenu de la densité de la population, de m'absorber. En effet, la compétition européenne fait que nous sommes contraints de réduire nos zones d'aide à la différenciation. En conséquence, je vais déjà avoir une contraction des zonages qui, si on les fait dévier du rural ou du semi-rural vers de l'urbain dense, fera naître une révolte dans nos campagnes qui sera politiquement insupportable !

La réponse que je fais donc à la Délégation interministérielle à la Ville est globalement la suivante : « ne venez pas pondre vos oeufs, ni chercher un secours dans les zonages PAT, mais aidez-nous plutôt à faire en sorte que Bercy, par le biais du FNDE, nous donne l'outil très performant qui est prévu par la loi ! »

En effet, nous venons en appui du système bancaire par les prêts d'honneur, par les plates-formes, par la BDPME - la Banque de développement des PME - etc. avec des effets multiplicateurs extraordinaires. Si nous avions la possibilité de travailler véritablement sur 200 ou 300 millions de francs au lieu de 80 millions de francs comme c'est actuellement le cas, nous aurions un effet multiplicateur de 1 milliard à 1,5 milliard de francs de prêts réels ce qui serait un aubaine et ferait un malheur dans les banlieues avec tous ces jeunes qui veulent réparer des caddies, monter des stations de réparation de bicyclettes, des ateliers de mécanique, des boulangeries etc... Mais la PAT est un outil trop lourd, qui est bon pour Toyota, International Rectifier et, en tout cas, pour un minimum de quinze emplois. Je vous en prie, croyez-en mon expérience, ne faites pas descendre les seuils plus bas car la PAT s'en trouverait complètement diluée et perdrait toute efficacité.

M. le Rapporteur : D'autant, M. le Délégué, que l'objectif des zones franches est tout de même un peu différent.

J'ai l'honneur d'habiter dans une zone franche qui a créé trente-six emplois pour les habitants du quartier et cela nous intéresse peu - je dis peu - de créer des entreprises qui feraient venir des travailleurs d'ailleurs ; ce qui nous intéresse c'est que trente-six habitants du quartier aient pu trouver un emploi et je conviens avec vous que la marteau-pilon dont vous parliez tout à l'heure n'est pas du tout adapté à ce genre de situations. Cela dit, dans la suite du débat, je serai amené à vous poser une autre question sur les zones franches...

M. Jean BESSON : Je me bornerai à deux observations rapides.

Premièrement, concernant les zones franches, je voudrais attirer votre attention sur le fait qu'il existe un danger supplémentaire puisque, dans leur définition et dans les aides accordées, c'est volontairement que l'on n'a pas pris les précautions qui ont été prises pour la PAT. Donc, si on attribue la PAT dans les mêmes conditions que les aides fiscales qui sont octroyées aux zones franches, on court à des catastrophes !

J'ai eu la responsabilité de conduire la politique de la Ville dans ma région jusqu'à l'année dernière et je peux vous citer l'exemple d'une entreprise de 150 salariés implantée dans une zone franche de mon département qui, pour pouvoir bénéficier des avantages de la zone franche, s'est scindée en trois entreprises de 50 salariés - chiffre plafond pour pouvoir en bénéficier - et qui, aujourd'hui, est en train de « rafler » dans le département tous les marchés publics en produisant entre 20 et 30  %  moins chers que ses concurrents, détruisant ainsi tout l'équilibre de l'emploi dans sa branche professionnelle de façon totalement perverse ! Je crois donc qu'il faut faire très attention.

Ma seconde remarque sera d'un ordre tout à fait différent. Je suis d'accord pour reconnaître avec vous qu'il ne faut pas utiliser le marteau-pilon , mais cela me gêne que le seuil d'application de la PAT ne doive pas aller au-dessous de quinze emplois. Je suis toujours un peu choqué de la distorsion qui existe en termes d'échelle : parler de quinze emplois pour Toyota au niveau national me fait mal ! Quinze emplois est un seuil qui concerne les petites et les moyennes entreprises mais qui ne peut pas concerner un grand groupe. Je ne dis pas qu'il ne faut pas aider les grands groupes mais je ne suis pas sûr que ce soit ceux que nous avons le plus besoin d'aider pour développer notre économie et je si on me disait que le seuil pour Toyota ou tout autre grand groupe était de 150 emplois, je m'en réjouirais car quinze emploi est un seuil applicable au PME, celui applicable aux toutes petites entreprises restant, au surplus, encore à définir.

M. Jean-Louis GUIGOU : Je vais maintenant vous commenter un document, dont vous avez une photocopie, qui concerne les résultats. Je vous en donnerai assez rapidement lecture avant d'insister sur quelques points.

Nous avons travaillé l'année dernière sur 220 dossiers, en 1997 sur 203 dossiers. Les emplois prévisionnels créés en trois ans - puisque les emplois ne sont pas créés immédiatement mais sur trois ans - sont au nombre de 15 000 contre 13 920 l'année antérieure. On enregistre donc une moyenne de 82 emplois par dossier ce qui nous situe à la fois loin des 2 000 emplois de Toyota et des quinze emplois envisagés pour le seuil que je préconise!

En matière d'investissement prévisionnel, nous avons permis, grâce à la PAT, un investissement de 20 milliards de francs : on met 430 millions de francs et on sort 20 milliards de francs d'investissement contre 15 milliards de francs l'année antérieure. Le total des primes attribuées fait ressortir que nous avons dépensé en 1998, 467 millions de francs contre 580 millions en 1997, soit 2,5 millions de francs en moyenne par dossier et 31 000 francs par emploi créé. Messieurs, comme le plafond est de 50 000 francs par emploi créé, je considère que nous avons là un outil assez efficace qui permet un bon usage des fonds publics et que l'on s'en tire pas mal en créant 15 000 emplois à 30 000 francs !

M. Robert PANDRAUD : Je voudrais aborder le problème de la concurrence des aides publiques au sein de l'Europe, voire à l'extérieur de la Communauté européenne, car on finit par aboutir à une échelle de perroquet.

Est-ce que cette concurrence est admissible dans le cadre d'un marché unique et dans le cadre d'une ouverture généralisée de nos frontières ? C'est un peu la situation que nous retrouvons dans certaines parties du territoire national - au moins en ce qui concerne les PME-PMI - avec la concurrence entre les divers avantages offerts par telle ou telle commune ou tel ou tel département, sauf qu'au plan européen la situation est autrement dommageable. Qu'on puisse venir vous voir, je le comprends très bien, mais qu'on vous dise « si vous refusez de cracher au bassinet, on part en Ecosse ou en Irlande ... »

M. Jean-Louis GUIGOU : Ce que je crains le plus, pour ma part, c'est un effet pervers non révélé de la monnaie unique qui consisterait, sur les franges du continent européen, à créer des « petits Hongkong » de la dévaluation. Vous ne rentrez pas dans la monnaie unique, comme le Portugal, et en dévaluant de 15 %  par an, vous créez un petit Hongkong à la frange et une zone de développement comme l'a fait Hongkong par rapport au continent chinois. Un petit pays tel que le Grèce - il n'est pas besoin qu'il soit de grande dimension - peut parfaitement jouer le jeu d'une forte dévaluation compétitive et provoquer très rapidement des dégâts. C'est un risque mais je n'y peux rien !

M. Robert PANDRAUD : C'est aussi la chance de la Corse indépendante !

M. Jean-Louis GUIGOU : Peut-être, mais nous nous éloignons du sujet !

J'ai volontairement ouvert la porte à la critique mais vous allez voir que les chiffres qui vont suivre prouvent que, malgré tout, les grands groupes industriels internationaux sont plus sages qu'on a souvent tendance à le penser ou qu'on est en train de le dire. Vous voyez que les projets étrangers ont représenté 40 %  des projets aidés mais qu'ils sont plus créateurs d'emplois et porteurs de plus d'investissement que les projets français puisqu'ils comptent pour 53 %  dans les emplois créés sur les 15 000 et pour 79 %  des investissement prévisionnels sur les 20 milliards de francs. Vous constatez donc que les investissements étrangers sont faibles en nombre mais très créateurs d'emplois et qu'ils ont des effets de levier sur l'investissement qui sont très importants.

Donc, finalement, hormis JVC et Panasonic qui nous ont « planté un drapeau » au bout de huit ans, nous n'avons pas de récriminations particulières à formuler à l'encontre de ces stratégies.

M. Alain COUSIN : Compte tenu de l'expérience qui est la vôtre, considérez-vous que l'intervention de la DATAR a eu un effet levier réel pour que ces groupes s'installent en France et non pas ailleurs en Europe ?

M. Jean-Louis GUIGOU : Vous abordez là un autre sujet qui m'absorbe beaucoup - mais je ne pense pas que vous puissiez m'aider en ce domaine - je veux parler de notre système de prospection à l'étranger qui se livre à une compétition énorme !

L'Europe et l'euro vont constituer une zone de stabilité dans laquelle les grands groupes industriels japonais, asiatiques et américains vont vouloir entrer, ce qui est en train de déstabiliser l'économie britannique car les entreprises anglaises font savoir à Tony Blair que, soit la Grande-Bretagne adhère rapidement à l'euro, soit elles-mêmes franchissent la Manche pour être dans la zone euro.

Nous avons, à la DATAR, un système qui fonctionne très bien puisqu'avec 70 personnes réparties dans le monde entier, qui nous coûtent globalement 50 millions de francs, qui sont des « mercenaires de la prospection », qui cherchent des opportunités, des industriels capables de se délocaliser, nous disposons d'un service d'intelligence économique qui, pour un coût de quelques dizaines de millions de francs, nous permet de bien nous situer dans cette course internationale à la détection d'entreprises.

Nous établissons des corrélations et, chaque fois qu'il y a une absorption à la bourse, nous savons qu'une délocalisation va intervenir dans les six mois. Nous disposons des critères susceptibles de nous avertir dans quel secteur - chimie, fibre optique etc. - elle peut se produire. Nous transmettons ces informations à nos agents à l'étranger pour qu'ils fassent des propositions aux industriels intéressés.

Nous avons en fait un système à trois étages - c'est l'un des aspects très porteurs de la DATAR - puisque ces 70 personnes disséminées à travers le monde sont constamment en relation avec la dizaine de personnes qui, à Paris, négocient entre autres choses la PAT et la taxe professionnelle, qui sont elles-mêmes en relation avec les soixante personnes des commissariats qui sont, en France, sur le terrain, de sorte qu'en une seule journée les informations circulent pour savoir s'il y a besoin d'un aérodrome international à tel endroit, de tant d'hectares à tel autre etc. C'est là un système que je tiens absolument à maintenir car, par ce biais, pour répondre à votre question, la DATAR apporte un service irremplaçable.

M. Alain COUSIN : Que ce service soit apporté par la DATAR j'en suis absolument convaincu, mais est-ce que, selon vous, la PAT a une influence décisive sur les implantations opérées en France ou avez-vous l'impression - je ne suis pas sûr que l'on puisse faire une analyse très fine - que la plupart d'entre elles auraient eu lieu de toute façon ?

M. Jean BESSON : Y a-t-il un effet d'aubaine ?

M. Alain COUSIN : S'agit-il d'un effet d'aubaine ou d'un réel effet levier ?

M. Jean-Louis GUIGOU : Tous les cas existent !

Au cours d'un même mois, aux environs de janvier 1997, j'ai sablé le champagne et j'ai pleuré. J'ai bu le champagne quand le groupe Toyota s'est installé en France alors qu'il lui restait à choisir entre le Nord et l'Est où se trouve tout un district industriel regroupant les équipementiers : Mercedes, Peugeot, Renault, Citroën, Alsthom.

Les responsables de Toyota - qui ont une stratégie de localisation - ont choisi la France pour plusieurs raisons au sein desquelles l'impact de la prime a été sans doute relatif. Notre prime, dont le niveau a été définie par l'Europe, n'était pas énorme puisqu'elle représentait 8 %  de l'investissement sur lesquels l'État n'a versé que 20 millions de francs au titre la PAT, l'essentiel étant pris en charge par les collectivités locales à travers la taxe professionnelles et les dérogations permises à ce sujet par notre législation.

Le lendemain en revanche, j'ai pleuré et je vais vous dire pourquoi : International Rectifier est parti d'une ville où il y avait un projet de reconversion, à partir des nouvelles technologies, d'un site qui nous pose de graves problèmes d'environnement.

Je vous résume l'affaire. International Rectifier vient de Los Angeles pour s'installer dans un département du Sud-Ouest puis disparaît pour s'installer finalement en Irlande, alors qu'il y avait eu de notre part un appel très clair, que j'avais « aligné » pour 250 millions de francs de PAT - sur les 500 millions dont je dispose, ce qui revient à dire que l'affaire aurait absorbé 50 %  de mon potentiel - bien que International Rectifier ne soit nullement comparable à Toyota qui créant 2 000 emplois et investissant 4 milliards de francs ne me réclamait que 20 millions de francs...

Est ce pour des raisons de dérogation fiscale que le groupe est parti s'installer en Irlande ? Lorsque j'ai demandé à notre représentant à New York de faire des investigations pour connaître le pourquoi de la chose, quelles ont été les réponses obtenues ? Vous allez être stupéfaits... car la PAT n'a finalement pas été un élément essentiel de la stratégie... Savez-vous quelle a été la motivation essentielle ? C'est abominable ! Le directeur du groupe a été dépêché au chef-lieu du département, s'y est installé, y a loué une maison pour préparer la localisation. Il se trouve qu'il a reçu un appel du maire de la ville qui lui a dit qu'il était le patron du lieu ; le lendemain un coup de fil du président du Conseil général qui a fait valoir son autorité ; le surlendemain un appel du président du Conseil régional pour revendiquer la sienne ; puis du préfet du département... puis du préfet de région. Après un mois d'un tel traitement, ce directeur a décrété ne rien comprendre à notre système et a préféré s'en aller. Vous vous rendez compte ? Nous créons nous-mêmes le désarroi !

M. Robert PANDRAUD : Nous n'y comprenons rien nous-mêmes et ne savons pas à qui nous adresser...

M. le Président : Mais nous sommes plus patients que les Américains !

M. Jean-Louis GUIGOU : Savez-vous comment Toyota s'y est pris ? Le groupe, pour régler tous les problèmes administratifs, nous a obligés à avoir comme interprète un membre du corps préfectoral parlant le japonais et nous avons, pour ce faire, rappelé une personne en poste à Tokyo qui parlait couramment cette langue et nous l'avons détachée auprès de Toyota en qualité d'interlocuteur administratif unique !

M. le Rapporteur : C'est ce qu'en plaisantant l'on pourrait appeler « le guichet unique » !

M. Jean-Louis GUIGOU : Tout cela ne mérite pas de grands développements mais vient en quelque sorte illustrer mon propos !

Vous me permettrez maintenant de vous parler d'une autre pratique que nous avons, au delà de la PAT, avec les grands groupes. Il s'agit du thème « Grandes entreprises et développement local ».

L'expérience nous prouve que les grandes entreprises deviennent de plus en plus fidèles au territoire où elles sont implantées et recherchent des partenariats avec les PME-PMI, les universités, les centres de formation et s'installent durablement pour profiter de ce que l'on appelle « les économies externes ». Certes, nous avons encore quelques entreprises de type colonial qui viennent, qui profitent, qui exploitent et qui disparaissent, mais de plus en plus nous avons des entreprises qui "s'incrustent" parce qu'elles veulent bénéficier d'un environnement propice et qui demandent aux élus d'assurer la formation professionnelle, un bon service de transport, des conditions favorables à l'exportation... A côté des économies d'échelle internes aux entreprises, la compétition mondiale imposent en effet aux entreprises de bénéficier de ce que l'on appelle les économies externes.

A ce sujet, laissez-moi vous raconter l'anecdote de Hoover qui illustre bien notre déficit de communication, notre faible ouverture à la concertation, notre faible souci d'assurer aux entreprises étrangères l'environnement dont elle se soucient.

Informé du déménagement de Hoover, je me suis rendu à Dijon pour rencontrer le chef de cette entreprise et lui demander les raisons de son départ. Il m'a répondu : « C'est simple ! Imaginez un tarmac et un gros porteur. Imaginez que Hoover soit ce gros porteur qui arrive sur ce tarmac qu'est Dijon. Il y a deux solutions : soit on le met, comme c'est la cas en France, dans le fond du tarmac où on le laisse seul, soit - comme c'est le cas en Allemagne - on avance des passerelles et on le ravitaille ! En termes réels, lorsqu'une entreprise s'implante en Allemagne, le président de l'Université rend visite au chef d'entreprise, se présente, met ses laboratoires et ses ingénieurs à sa disposition, demande que réciproquement l'entreprise accueille ses étudiants ; le bourgmestre rend une visite le lendemain ; le directeur de la Poste le surlendemain ; ce qui fait qu'après un mois, l'ensemble des fils de connexion de l'avion se trouve branché. En France, personne n'est venu me voir, ni le maire, ni le président du Conseil général, ni président de l'Université, ni président de la Chambre de commerce : je suis là comme au club Méditerranée... je prends donc mes primes, je refais le plein de carburant et je m'envole... »

Alors que nous souffrons d'un tel déficit, nous nous apercevons que, de plus en plus, les grandes entreprises veulent nouer des liens avec leur environnement. C'est pourquoi nous avons lancé l'opération « Entreprises et développement local » qui a débuté avec Citroën à Rennes et qui prévoit de multiples actions.

Nous consacrons à cette opération au total 4 millions de francs, nous travaillons sur dix bassins d'emploi et nous avons un contrat avec les grandes entreprises qui créent un minimum de cent emplois par bassin d'emploi. Nous constatons que les grandes entreprises sont à l'évidence de plus en plus intéressées par la possibilité de disposer d'un tissu PME-PMI diversifié et actif. Pour le moment nous dépensons donc 4 millions de francs de FNADT mais nous sommes disposés à aller beaucoup plus loin et à signer avec les grands groupes industriels qui en seraient d'accord le contrat que je viens d'évoquer. C'est dans cet esprit que, comme avec Peugeot à Sochaux ou Michelin à Clermont-Ferrand, nous recherchons des lieux abritant de grandes entreprises afin de pouvoir passer des contrats avec elles. Nous aimerions, en effet, que cette expérience porteuse puisse être généralisée pour fixer l'entreprise, la rendre moins éphémère et beaucoup plus « territorialisée ».

Voilà, M. le Président, j'en ai terminé et suis disposé à répondre à toutes les questions qui pourront m'être posées.

M. Robert PANDRAUD : Concernant l'Ile-de-France, on me demande de prendre date mais cela fait dix ans que je le fais et les résultats sont identiques quels que soit d'ailleurs les délégués à l'aménagement du territoire !

J'ai été « ravi » de constater notamment que le Hainaut avait été classé en zone éligible 1 par Bruxelles quoique le taux de chômage, entre autres, y soit très inférieur à celui de la Seine-Saint-Denis !

La région Ile-de-France compte des bassins d'emploi qui souffrent beaucoup alors que - ce qui m'a toujours beaucoup choqué même si le phénomène, je dois le dire, se ralentit un peu - la DATAR y fait de la prospection pour délocaliser les entreprises, aidée en cela par la plus - value financière que dégagent lesdites délocalisations ; ce qui ne l'empêche d'ailleurs pas de consentir des efforts pour attirer vers certaines zones de l'Ile de France des capitaux venant de l'étranger sinon même d'autres régions françaises, ce qui relève d'un certain illogisme !

M. Jean-Louis GUIGOU : Sur ce sujet, il est clair que la doctrine de la DATAR, héritée du Général de Gaulle, était quand même de parvenir à une répartition équilibrée sur le territoire des hommes et des activités et d'éviter dans la région Ile-de-France la surconcentration de la richesse, des capitaux, des hommes, des pouvoirs, de la culture. Un désencadrement de la province et une surconcentration en Ile-de-France, qui déborde maintenant la région elle-même, constituent un vrai danger.

En conséquence, la doctrine de la DATAR était de prendre aux riches pour donner aux pauvres. Or, il se trouve que, depuis 1990, le riche - l'Ile-de-France - quoiqu'en moyenne toujours riche - commence à souffrir de profonds dysfonctionnements. Nous avons donc engagé avec le préfet Thoraval, puis avec le préfet Duport, une série de travaux que nous allons publier sous la forme de quatre rapports internes à l'administration qui feront le point sur la situation exacte de la région Ile-de France qui, messieurs, n'est plus uniformément riche puisqu'elle comprend aussi des zones de pauvreté qui, par rapport à la province, sont dans un état lamentable.

M. Robert PANDRAUD : Absolument !

M. Jean-Louis GUIGOU : On y trouve le maximum de jeunes non formés, sans emploi et le maximum de jeunes sans abri. Nous sommes là confrontés à une situation explosive qui m'a conduit à engager une démarche auprès du ministre de l'Intérieur pour l'en tenir informé.

Il faut savoir que la région Ile-de-France, qu'abandonnent chaque année 50 000 personnes âgées, absorbe durant la même année 40 000 jeunes venus de province où ils ont été formés aux frais des régions !

Nous sommes devant un système diabolique où d'une part les départements ont la charge de former les jeunes et de recevoir les personnes âgées, de l'autre une région Ile-de-France dont la population jeune et vigoureuse a des enfants que les écoles ne suffisent plus à accueillir au point que nous craignons des mouvements importants du corps enseignant dans la première et la deuxième couronne tant la situation devient invivable.

En résumé, Paris et l'Ile-de-France ne sont plus le Paris et l'Ile-de-France du Général de Gaulle et de Paul Delouvrier c'est à dire une région dynamique et équilibrée où l'on pouvait pendre des usines comme Citroën au quai de Javel pour les transplanter à Rennes. Paris souffre, Paris s'affaiblit, Paris est en train de chasser les investissements internationaux, Paris n'est plus cette Belle au bois dormant. La ville de Paris doit maintenant relever d'une politique de l'aménagement du territoire et je n'ai pas honte de dire face à des élus du plateau de Millevaches et du Larzac - car le discours que je vous tiens, je le tiens sur le mont d'Aubrac - : « Messieurs, vous souffrez de dépopulation et de désertification, mais Paris soufre de traumatismes encore bien pires ! »

C'est tout l'aménagement du territoire qui doit être repensé et c'est pourquoi j'ai arrêté le service de délocalisation des entreprises qui existait à la DATAR et qui avait pour tâche de prendre des entreprises à Paris pour les installer en province d'où ce chômage record en Ile-de-France et ces appels aux CRS pour rétablir le calme

J'ai fermé ce service et je ne délocalise plus aucune entreprise de l'Ile-de-France mais je n'ai pas encore franchi le pas, M. le ministre, qui consiste à dire que je vais donner une prime d'aménagement du territoire à Paris car je m'aperçois quand même que Paris aspire encore beaucoup de richesses de la province et que je n'ai donc pas de raison de l'aider.

Je terminerai sur un point qui est, pour nous, crucial : l'objectif 2 des Fonds européens va comprendre du « rural » et de l' « urbain ». Or le département de Seine-Saint-Denis demandant à bénéficier des fonds européens, la question que je vous pose est la suivante : est-ce qu'au titre de la solidarité nationale les fonds dont je dispose ne doivent-ils pas être destinés aux zones qui sont réellement en voie de dépopulation et de marginalisation et n'est-il pas préférable que ce soit Neuilly qui aide la Seine-Saint-Denis puisque la richesse y jouxte la pauvreté ? Il faudrait que les quartiers et les communes riches de Paris soient solidaires des zones plus pauvres du même espace ! S'il n'y a pas d'abord de solidarité de proximité, je ne vois pas pourquoi l'État apporterait son aide.

M. le Rapporteur : Vous parlez d'or !

M. Robert PANDRAUD : Vous avez théoriquement raison encore qu'une collectivité riche n'est pas uniquement celle où habitent des gens riches et c'est là d'où vient une grande partie des difficultés...

Au demeurant, il y a certaines zones de la banlieue londonienne qui sont aidées par Bruxelles alors que la Seine-Saint-Denis attend toujours sans voir rien venir - ou fort peu - de la solidarité européenne et se trouve contrainte de s'adresser à qui elle peut, faute de quoi, ainsi que vous l'avez fort justement souligné, la situation va devenir vite explosive car ce ne sont pas les zones franches, aussi intéressantes qu'elles puissent être, qui vont résoudre le problème.

M. Jean-Louis GUIGOU : Mais les Hauts-de-Seine pourraient consentir un effort en faveur de la Seine-Saint-Denis ! Il y a une telle proximité entre la richesse et la pauvreté d'un département à l'autre !

M. Robert PANDRAUD : Je suis en tout cas constant dans mes idées et je pense que pour remédier aux fractures géographiques et sociales, il fallait tout faire, sauf la décentralisation ! Seul l'État en effet est capable de promouvoir une solidarité nationale. Partant de là, quelle solidarité pouvons-nous maintenant mettre en place ? Faire appel aux bonnes oeuvres ? Je n'ai jamais cru à la charité à la sortie des églises ...

M. le Président : M. Pandraud, je crois que nous aurons l'occasion de reprendre ce débat au sein de notre hémicycle dans les jours qui viennent. Etant élu d'une ville qui connaît les mêmes phénomènes que la Région parisienne  - la montée du chômage, l'arrivée de personnes âgées, le départ des jeunes, l'absence d'aides etc. - il est vrai que, comme un certain nombre d'entre nous, je me pose aussi des questions relatives à la solidarité nationale par rapport à l'arc méditerranéen, mais tout cela fera l'objet du long débat sur la politique d'aménagement du territoire et de la politique intercommunale que nous a proposé M. Chevènement.

M. le Rapporteur : Je viens du département de Seine-Maritime où l'on constate que deux courbes évoluent de la même manière : celle des grandes fortunes et celle des Rmistes !

La Seine-Maritime est l'un des premiers départements de France pour le nombre d'assujettis à l'impôt sur les grandes fortunes et l'un des premiers départements de France pour le nombre de Rmistes : le parallélisme existe. Si vous le voulez vous pourrez en parler à Charles Revet que vous devez connaître, je pense, et qui s'en plaint également mais il ne lui appartient pas, bien évidemment, au niveau départemental de faire évoluer le niveau de l'impôt sur les grandes fortunes que la commission proposera peut-être au Gouvernement de relever de façon afin de faire face à un certain nombre de problèmes ....

M. René LEROUX : Les courbes seront toujours les mêmes !

M. le Rapporteur : Peut-être !

J'ai trouvé, M. le Délégué, que vous aviez une vision un peu angélique, surtout dans la dernière partie de votre exposé, concernant l'intérêt que les entreprises manifestent à l'égard du développement local car l'exemple que vous avez cité au tout début de votre propos, montre également combien elles savent voir où sont leurs intérêts avant de s'intéresser à la manière dont peut se développer le territoire.

Plus que des questions, ce seront des demandes que j'aurai à formuler : vous serait-il possible de nous transmettre un document sur l'ensemble des aides gérées par la DATAR - ou qui existent par ailleurs au niveau national en faveur des entreprises - afin de nous aider à débroussailler ce maquis dans lequel il est extrêmement difficile de se retrouver. La DATAR dispose-t-elle d'un tableau présentant ces aides, précisant leur cadre juridique, leur montant, leur ventilation régionale, la typologie de leurs bénéficiaires de façon à ce que nous puissions en avoir la vision la plus précise possible ?

Les entreprises jouent aussi bien des aides très locales - vous parliez tout à l'heure des exonérations de taxe professionnelle - que des aides de la DATAR, que des primes qui peuvent venir de l'échelon européen. Dans ces conditions, pourriez-vous mettre à notre disposition un document présentant les dispositif d'aides qui ont cours au sein de l'Union européenne?

Enfin , comme il est beaucoup question des zones franches et même si vous avez pris soin, avec juste raison, d'établir le distinguo entre le champ d'action de la DATAR et les zones franches, pourriez-vous nous transmettre les informations dont vous pourriez disposer à leur sujet ?

M. Jean BESSON : Ma question est une question de stratégie économique car, même si je ne suis pas spécialement matheux, j'aime, lorsque je regarde les chiffres, comprendre ce qu'ils veulent dire !

Or, je constate d'après les chiffres que vous nous avez communiqués que les projets des groupes qui représentent quantitativement 69 %  de l'ensemble ont généré 81 %  des emplois ce qui veut dire que les indépendants qui représentent 41 %  de projets n'ont généré que 19 %  des emplois, ce dont on pourrait déduire que les projets de groupes sont plus porteurs d'emplois et de perspectives d'avenir pour l'emploi que les indépendants.

Pourtant, pour aboutir en terme d'emplois à ce pourcentage, les groupes ont eu besoin de 92 %  d'investissement alors que les indépendants pour aboutir à créer 19 %  des emplois n'ont eu besoin que de 8 % des investissements ce qui voudrait dire que pour créer un emploi les indépendants ont besoin de moins investir que les groupes. Y a-t-il là une mine à prospecter et peut-on en conclure qu'il est possible avec moins de moyens d'offrir davantage d'emplois en se consacrant plus à cette catégorie ou faudrait-il voir là une cause du déficit chronique des indépendants ?

M. René LEROUX : J'ai une remarque à formuler qui m'est inspirée par les propos très intéressants que vous avez tenus avec passion tout à l'heure concernant votre engagement, que l'on peut comprendre, à soutenir Paris et l'Ile-de-France.

Lorsque vous parliez de la question du départ des jeunes vers Paris que notre président a lui aussi évoquée, il aurait fallu ajouter que, nous députés du bord de mer, nous recevons en contrepartie sur le littoral les personnes âgées qui ont cessé d'être productives. C'est là un véritable problème et je vous demanderai de bien vouloir nous confirmer les conclusions d'une étude rapportée par l'ANEL - l'Association nationale des élus du littoral - qui faisait état que 80 %  de la population habiteraient, dans les vingt prochaines années, sur le littoral ce qui signifierait que l'on va vider les régions de France qui sont particulièrement aidées pour regrouper en bord de mer la totalité d'une population âgée qui, en termes de soins et d'assistance, va coûter très cher aux collectivités de toutes les régions concernées.

M. Alain COUSIN : En ce qui me concerne, je crois, pour l'essentiel à la démarche et à la très grande importance de la DATAR dont je pense qu'elle est sous-estimée par tous les gouvernements quels qu'ils soient et qui, de ce fait, ne lui donnent pas le rôle qui devrait être le sien. J'applaudis notamment à cette opération « Entreprises et développement local ». Pour connaître un peu le dossier, j'estime qu'il s'agit d'une très bonne initiative dont il sera effectivement intéressant de suivre l'évolution et l'impact local.

J'ai, pour ma part, une interrogation concernant les aides publiques car, si je ne m'abuse, les aides sont à la demande de l'Europe plafonnées en fonction de l'investissement. Or, j'ai le sentiment que nous sommes peut-être une fois de plus les meilleurs de la classe, que dans le cadre européen les autres n'appliquent pas ces règles avec autant de scrupules que nous, d'où mon interrogation sur la manière dont s'opèrent les contrôles.

Par ailleurs, vous avez parlé de 70 personnes qui prospectent à l'étranger pour le compte de la DATAR. Je me demande si cet effort ne devrait pas être amplifié. Toutefois, puisque vous parliez également de 60 personnes dans les commissariats locaux et je me pose la question de savoir s'il ne serait pas utile d'opérer quelques transferts de façon à avoir davantage de personnel à l'étranger et un peu moins en France puisque je sais, pour m'intéresser, pour ne pas dire pour me passionner, pour cette question, que les commissariats ne font qu'assurer localement les informations qui leur parviennent de l'étranger sur des dossiers qui ne sont hélas pas tellement nombreux et instruisent, du coup, des dossiers PAT et FNADT qui ne le sont guère plus, ce qui les conduit, au bout du compte, à empiéter sur le travail des autres et à le dupliquer participant ainsi à la désorganisation que vous avez évoquée à propos d'une ville du Sud-Ouest. Peut-être y a-t-il une réflexion à conduire - je suis disposé à y participer - pour mieux coordonner les efforts et l'activité localement et faire en sorte que les personnels des commissariats se consacrent davantage à la prospection à l'étranger.

M. Jean-Louis GUIGOU. Suite à votre demande, M. le Rapporteur, je m'engage à adresser au Président un résumé sur les quatre verrous dont je vous ai parlé, à vous adresser un tableau des aides à finalité régionale où figurera la somme des aides distribuées par l'ensemble des ministères et des collectivités territoriales ainsi que les comparaisons européennes. Pour ce qui concerne les zones franches, je demanderai que soit établi un récapitulatif.

Vous avez demandé, M. Besson, si les grands groupes industriels étaient plus capitalistiques tandis que les petites entreprises seraient davantage « intensive labour » et plus créatrices d'emplois. Il est vrai que les grandes entreprises internationales sont beaucoup plus capitalistiques et que, si elles déplacent du capital, elles déplacent peu d'hommes. C'est une règle à peu près générale que je simplifierai grossièrement de la manière suivante : les Américains veulent créer de l'emploi aux États-Unis et exporter du capital mais sans exporter le travail ! Ce qui est internationalement mobile, ce sont le capital et les machines - ce ne sont pas les hommes - et donc les entreprises internationales ne créent pas tellement d'emplois, si ce n'est par les activités induites qui ont des effets multiplicateurs.

Concernant Paris, l'Ile-de-France et la concentration des populations, je vous dirai, quitte à vous surprendre, qu'un prospectiviste japonais a émis, il y a un ou deux ans, l'idée qu'au baby-boom des années 1960-1970-1980 allait succéder un papy-boom, qu'ils allaient aussi bien l'un que l'autre être créateurs d'emplois et qu'il fallait donc créer les industries correspondantes.

Pour illustrer la logique du raisonnement, je vous donne en exemple la Côte d'Azur qui regorge de vieilles dames propriétaires de grandes fortunes pour lesquelles il faut des masseurs, des blanchisseurs, des joailliers, des lunetiers et j'en passe qui relancent l'activité. En suivant l'évolution démographique de cette région, nous nous sommes aperçus qu'après une phase de forte augmentation de personnes âgées, il y avait un rajeunissement de la population du fait des métiers nombreux et souvent insoupçonnés qu'elles nécessitent.

Il y a donc toute une réflexion sur tous les services qui en découlent. A Avignon, qui est une ville dont la population vieillit, je suis surpris de voir sur le marché que je fréquente assez régulièrement que des jeunes, labellisés par un groupe, portent les paquets de qui le demande. Ce sont des détails mais il ne fait pas négliger le fait qu'aux personnes âgées correspond tout un secteur d'activités...

Concernant la concentration des personnes autour du littoral, votre remarque, M. le député est tout à fait pertinente. En effet, nous avons observé - et j'ai les projections démographiques qui en témoignent et que je tiens à votre disposition - que commune par commune et département par département, sur une longue période jusqu'en 2020, les Français quitteront les montagnes et les coteaux pour « se mettre les pieds dans l'eau » que ce soit le long des fleuves - le Rhône, le Rhin, la Garonne, la Loire - ou le long des côtes ! On obtient ce que l'on appelle des effets en T entre les fleuves et les côtes qui se généralisent sur notre territoire et qui amènent la population à se concentrer autour des points d'eau. Nous ignorons si ce sont les effets inconscients du réchauffement de la planète ou du retour à la nature mais il y a là un phénomène assez surprenant : heureusement que la DATAR a mis en place le Conservatoire du littoral qui fait, messieurs, un travail d'une remarquable qualité !

M. Jean BESSON : Absolument !

M. Jean-Louis GUIGOU : Vous m'avez ensuite interrogé sur le plafond des aides : elles sont limitées à 25  % : la commission européenne au nom de la concurrence nous interdit de dépasser 25 %  de l'investissement réalisé. Pour ce qui a trait à nos commissariats, une remarque très pertinente a été formulée qui m'amènera peut-être par la suite à faire une suggestion , mais M. le député, vous avez raison de dire que la DATAR doit intervenir à un niveau où elle ne fasse pas concurrence aux collectivités territoriales, c'est-à-dire dans la prospection à l'étranger et éviter que ses commissariats sur le terrain n'empiètent sur le travail des comités d'expansion et autres agences créées à la suite de la décentralisation.

Je suis en train de réformer radicalement les commissariats : je travaille notamment avec Martin Malvy et les agences mais si l'État n'apporte plus de valeur ajoutée, je suis disposé à fermer mes commissariats. Or il se trouve - messieurs les parlementaires, je porte à votre connaissance cette information qui a constitué pour moi une surprise - que les élus qui nous enjoignent de partir, réclament de la DATAR qu'elle construise des routes, des TGV mais qu'elle supprime ses commissariats sur le terrain au motif que se sentant maîtres des lieux, ils n'ont plus besoin d'elle !

Je reçois des très fortes critiques émanant des maires et des présidents de conseils généraux et régionaux qui estiment que l'État n'a pas à être sur le terrain alors qu'à l'opposé les chefs d'entreprise réclament sa présence au prétexte qu'ils sont lassés des querelles que se livrent les élus et qu'il ont besoin d'un arbitre pour débloquer certaines situations. Je suis donc, malgré moi, présent sur le terrain en attendant que le jeu de la décentralisation atteigne un âge adulte et que ces conflits qui mettent le patronat dans un état de dépendance prennent fin ! C'est assez surprenant !

Dans l'immédiat, je reste donc sur le terrain par le biais des commissariats mais je suis tout disposé à les faire évoluer et à prendre du champ. Nous allons mettre tous les commissariats au niveau interrégional. J'ai un commissariat au niveau départemental et la décision a été prise de l'abandonner car je ne veux pas avoir affaire à un président de conseil général. Je prétends me situer au minimum au niveau des régions et normalement au niveau de deux ou trois régions.

La suggestion à laquelle j'ai fait allusion est la suivante : je serais très heureux qu'une commission parlementaire s'intéresse à DATAR 2000 et à la question de savoir comment réformer la DATAR. Je travaille sur le sujet mais si une commission s'en emparait, vous ne pouvez vous pas imaginer quelle performance pourrait atteindre cette institution qui fait déjà travailler soixante personnes à Paris y compris le samedi et le dimanche, pour étudier la loi, les fonds structurels, les contrats de plan, les zonages, les maillages au niveau des agglomérations et des pays. Vous ne pouvez pas mesurer la performance de cette administration de mission et le peu de cas que l'on en fait parfois !

M. Jean BESSON : Puisque vous avez parlé de transparence de la fiscalité et d'harmonisation au niveau européen, j'ai envie de vous dire : « Oui, mais c'est insuffisant ! » En effet, la transparence de la fiscalité ne permettra que de faire apparaître la réalité des choses, à savoir que certaines distorsions de la fiscalité aboutissent très concrètement à ce que l'on peut appeler des distorsions de concurrence. Or, je pense qu'en matière d'aménagement du territoire dont nous nous préoccupons dès maintenant, les aides ne doivent pas être un apport homothétique de ce qui existe mais avoir pour vocation de redresser les distorsions ce qui signifie qu'en la circonstance l'équité n'est pas l'égalité mais bien la dissymétrie et donc que si l'on se borne à la transparence et à l'harmonisation on ne fera qu'accroître les difficultés.

M. Jean-Louis GUIGOU : Tout à fait !

M. Yvon ABIVEN : Ma remarque portera sur la disparité Paris-province à propos de laquelle je me réjouis des propos tenus et des accents gaulliens que émaillaient votre discours lorsque vous parliez de faire payer les riches pour donner aux pauvres. S'il y a des dysfonctionnements dans la région parisienne, il n'en reste pas moins vrai que les provinces continuent à s'appauvrir. Il y a eu, il est vrai, une volonté de remédier à cette situation durant les années 1960-1970 par une politique de délocalisation et je pense notamment à la pointe de Bretagne et au développement de l'électronique dans les Côtes d'Armor et dans le Finistère. Ce mouvement s'est arrêté dans les années 1980 alors que l'on pensait que la décentralisation aurait pris le relais ...

Je suis content de vous avoir entendu dire que la répartition des aides se fait de manière transparente contrairement à ce qui se passe ailleurs mais je crois quand même qu'il convient de se demander pourquoi l'Ecosse attire les entreprises alors que l'on nous reproche d'être excentrés et qu'on nous prédit, du fait de notre position en Europe, un piètre avenir économique qui se limite à l'accueil des personnes âgées. Il est vrai que jusqu'à présent, nous avions des jeunes très bien formés - le département du Finistère est celui où la formation est la plus avancée - mais que nous constatons aujourd'hui un exode très important de cette tranche de population.

Je crois donc qu'il faut et revoir le problème de la décentralisation, et engager l'étude sur la DATAR 2 000.

M. Jean-Louis GUIGOU : Vous me permettrez d'apporter juste un élément de réponse à cette dernière intervention en ajoutant que nous observons que l'Ecosse, l'Irlande et le Portugal se développent sans être au centre de l'Europe. Les économistes l'expliquent par l'existence de phénomènes identitaires très forts : les Ecossais veulent se libérer des Anglais, les Irlandais également et les Portugais veulent se libérer des Espagnols.

Je crois à de tels phénomènes identitaires très forts et c'est la raison pour laquelle on voit apparaître une interrégion entre la Bretagne, les Pays de Loire et une partie du Poitou-Charentes : une grande région de l'Ouest atlantique est en train de se structurer et je dirai, pour terminer, que nous ne serions pas opposés à ce que vous nous suggériez d'introduire dans les critères d'attribution de la PAT un critère de périphéricité. Pourquoi ne pas introduire cet élément d'éloignement par rapport au centre, au lieu de ne travailler que sur le niveau de chômage et le stock d'entreprises ?...

C'est une demande qui émane de M. Raffarin et de nombreuses autres personnes mais que nous ne parvenons pas à la faire passer : si dans le rapport parlementaire vous suggériez que les PAT soient en partie pondérées par des phénomènes de périphéricité parfaitement mesurables par le calcul du temps que l'on met pour accéder à Paris, peut-être l'idée avancerait-elle et peut-être parviendrait-on à établir une carte PAT quelque peu étonnante...

M. Jean ESPILONDO : On pourrait aussi envisager d'introduire le critère de proximité de la frontière et les différences importantes qui peuvent se produire d'un côté à l'autre ! Comme le rappelait M. Besson tout à l'heure, on peut trouver des disparités importantes entre les charges sociales, les impôts et autres taxes. L'euro va remettre tout à plat mais, jusqu'à présent , c'était un maquis où personne ne pouvait se retrouver. Maintenant que les choses vont être beaucoup plus claires, les gens vont apprécier très vite les différentes situations fiscales et des phénomènes qui étaient latents jusqu'à présent risquent de s'en trouver accentués.

Le témoignage des administrations centrales attributrices d'aides

Compte rendu de la réunion de travail du mercredi 21 avril 1999
entre M. Alain FABRE-PUJOL, Président, et M. Daniel PAUL, Rapporteur,
et les représentants des administrations centrales attributrices d'aides

MM. Jean-Luc Vo Van Qui (DARPMI), Daniel Mathieu (DGEFP), François Hiller (DGEFP), Mme Karima Madi (DGEFP), M. Roland Smolar (DGEFP), Mme Isabelle Moures (DGEFP), M. Jean-Paul Blouard (UNEDIC), Mme Hélène Vodé (UNEDIC), MM. Didier Coulomb (Direction de la technologie), Pascal Colombani (Direction de la technologie), Pierre Radanne (ADEME), Jean-Marie Sépulchre (ANVAR), Jean-Michel Etienne (Ministère de l'équipement), Alain de Cointet de Fillain (DREE), Gérard Bornier (DREE), Christian Badaut (DIGITIP), Lionel Toutain (DIGEC), Pierre Pouessel (Restructurations de défense), Philippe Labernede (Restructurations de défense), Stéphane Le Moing (Ministère de l'agriculture), Mme Sibylle Slattery (Ministère de l'agriculture) et M. Bruno Depresle (Direction du tourisme) sont introduits. (1)

M. le Rapporteur : Dans le cadre de sa mission, notre commission butte sur une difficulté précise : dresser une liste exhaustive de toutes les aides publiques qui peuvent être attribuées aux entreprises. C'est la raison pour laquelle, un mois avant la remise de mon rapport, je souhaite établir un bilan des dispositifs existants au sein de l'administration française.

Dans cette optique, il serait utile que nous puissions disposer d'une estimation chiffrée de ce que représente, au sein du budget de chaque ministère ou de chaque organisme public, l'aide ou les aides en question et savoir quelles sont les méthodes d'évaluation des crédits attribués ?

Après un exposé des règles générales d'attribution, je vous propose donc de nous préciser les sommes en jeu et de nous présenter vos méthodes d'évaluation.

M. Jean-Luc VO VAN QUI (DARPMI) : Lorsque vous parlez d'aides, entendez-vous les aides attribuées aussi bien aux petits commerçants qu'aux grands groupes, ou les aides spécifiques aux grands groupes ?

M. le Rapporteur : C'est la question que nous nous posons depuis la mise en place de la commission d'enquête. Il est très difficile, en effet, de déterminer le périmètre d'un groupe, et les quelque cinquante témoins que nous avons auditionnés ont tous mis en avant cette difficulté, dans la mesure où la filiale de la filiale d'une filiale peut faire partie d'un groupe, alors que personne n'en a conscience. Ainsi, lors de l'audition des responsables d'un groupe comprenant 2 500 filiales, nous n'avons pas eu le sentiment que son président directeur général avait une connaissance intime de l'ensemble de ses filiales. Il ne sera donc pas inutile de parler des aides destinées aux PME, dans la mesure où elles peuvent être membres d'un groupe, sans que les uns ou les autres le sachent.

M. Daniel MATHIEU (DGEFP) : Ma sous-direction s'occupe principalement de formations en alternance. Les dispositifs en cause sont l'apprentissage et les contrats d'insertion en alternance, mis en place depuis 1983 par les partenaires sociaux - contrat de qualification, contrat d'adaptation et contrat d'orientation.

Dans ces dispositifs, la part des grandes entreprises est relativement limitée. Ainsi, 75% des contrats de qualification sont conclus dans des entreprises comprenant jusqu'à quarante neuf salariés. Même si les groupes sont parfois atomisés, il n'empêche que ces entreprises ne sont pas rattachées à un groupe d'importance nationale. En revanche, seulement 25 % des contrats de qualification sont conclus dans les entreprises de plus de 50 salariés.

S'agissant de l'apprentissage, la situation est encore plus marquée puisqu'il est principalement artisanal, et près de 90 % des contrats s'effectuent dans des entreprises de moins de cinquante salariés.

Face à cette situation, le gouvernement a souhaité, en liaison avec les partenaires sociaux, développer le recours aux contrats d'insertion en alternance ou à l'apprentissage dans les grandes entreprises, notamment par des discussions directes avec certains groupes d'importance nationale.

Deux points méritent d'être signalés. D'abord, aucun moyen financier spécifique n'a été dégagé pour accompagner les grandes entreprises dans ce type de démarche. Ensuite, les résultats en sont limités. Ainsi, si le groupe Renault va assez loin, d'un point de vue qualitatif, dans l'accompagnement et l'insertion de jeunes en difficulté, le nombre de jeunes concernés reste quantitativement peu important par rapport à celui employé dans l'ensemble des petites entreprises qui recourent à ces dispositifs.

Ces aides, qui ne touchent donc que marginalement les grandes entreprises, sont de trois types. Pour une partie des dispositifs concernés, les exonérations de cotisations sociales sont prises en charge par l'Etat, dans le cadre de l'apprentissage et du contrat de qualification. Elles sont importantes : 4,5 milliards de francs par an pour l'apprentissage ; 2,7 milliards pour le contrat de qualification.

Ce dispositif est perçu par les entreprises comme une aide de droit. Ainsi, le fait qu'il existe une exonération complète de cotisations de sécurité sociale, voire de charges sociales, pour l'apprentissage est perçu comme allant de soi. Il n'empêche que le coût pour le budget de l'État est important.

Depuis 1994, ces dispositifs ont été assortis avec des modalités variables de primes à l'embauche, mises en place dans le plan de relance de l'alternance qu'Edouard Balladur avait engagé lorsqu'il était Premier ministre. Aujourd'hui, il n'en subsiste plus que deux dispositifs : les contrats de qualification et l'apprentissage. Dans les cas de contrats de qualification, la prime à l'embauche est de 5 000 à 7 000 francs, selon la durée du contrat, alors que dans le contrat d'apprentissage, elle s'élève à 6 000 francs. Depuis l'année dernière, elles ne sont versées que pour les embauches de jeunes ne disposant pas du baccalauréat.

S'agissant du contrat de qualification, le coût est assez limité et s'élève à 600 millions de francs.

Pour l'apprentissage, nous avons mis en place, à l'occasion de la réforme de 1996, un dispositif de soutien à l'effort de formation dont l'objet est de compenser les coûts de formation internes à l'entreprise. Le coût du dispositif est important puisqu'en 1998, la dépense budgétaire s'élevait à 4,7 milliards.

Pour conclure, une partie seulement des 13 milliards de francs accordés aux dispositifs bénéficie aux grandes entreprises qui ont procédé à l'acte de recrutement et de formation d'un jeune. De notre point de vue, aussi bien pour l'artisanat que pour le groupe d'importance nationale, c'est le même objectif de formation de jeunes qui est poursuivi et qui justifie le versement des aides.

Quant à l'évaluation du dispositif, en dehors d'une déception relative à l'implication des grandes entreprises dans le développement de l'alternance, nous ne disposons de rien de spécifique aux grandes entreprises. Globalement, toute taille d'entreprises confondue, les dispositifs de formation en alternance et les aides apportées par l'État nous paraissent justifiés dans la mesure où l'on constate de forts taux de réussite aux qualifications préparées. En ce qui concerne l'apprentissage, on note une évolution très sensible, et les taux de réussite des jeunes aux diplômes sont aujourd'hui très proches de ceux des jeunes formés à temps plein dans les lycées professionnels. Les résultats sont également positifs s'agissant de l'insertion à l'emploi, puisque ceux qui ont déjà connu l'entreprise ont une trajectoire d'intégration dans un emploi durable beaucoup plus courte que les autres.

M. le Rapporteur : Serait-il possible de disposer de la ventilation entre les différents secteurs économiques concernés, en fonction de la taille des entreprises ? Car certains des groupes que nous avons auditionnés sont constitués d'une myriade de petites entreprises. Quels sont les dix plus gros consommateurs de crédits ?

Vous avez parlé d'une prime forfaitaire, d'exonérations de charges, et d'une aide par heure de formation qui n'existe que pour le contrat d'apprentissage.

M. Daniel MATHIEU (DGEFP) : En effet.

M. le Rapporteur : Or, je croyais que ce dispositif existait également pour le contrat de qualification.

M. Daniel MATHIEU (DGEFP) : Pour l'ensemble des dispositifs, les coûts de formation externe ne sont pas pris en charge par le budget de l'Etat. Les formations des apprentis sont ainsi financées par la taxe d'apprentissage et les fonds des régions, compétentes, depuis 1983, en matière d'apprentissage.

Les formations en alternance, délivrées hors de l'entreprise - dans le cadre des contrats de qualification, d'adaptation et d'orientation -, notamment à l'occasion d'actions d'orientation externe, sont financées par l'entreprise ou par les fonds mutualisés de la formation professionnelle. Ceux-ci s'élèvent à 6 milliards de francs et ne relèvent pas des crédits de l'Etat. C'est la raison pour laquelle je n'en ai pas parlé.

Une ventilation par secteur pourra vous être communiquée aisément pour les aides mises en place en 1996, mais beaucoup plus difficilement pour les exonérations. Sous réserve de vérification avec la comptabilité publique, j'ai l'impression qu'on ne dispose pas de « compte-client ». Autrement dit, si on peut identifier les caractéristiques de l'entreprise qui bénéficie de l'aide, il n'existe pas de centralisation du fichier nous permettant d'identifier les plus gros consommateurs.

M. le Rapporteur : Pour le contrat d'adaptation, il n'y a pas eu de dotation budgétaire depuis 1994. Qu'en est-il pour le contrat d'orientation ?

M. Daniel MATHIEU (DGEFP) : Le contrat d'orientation bénéficie d'une exonération de cotisations de sécurité sociale, mais celle-ci n'est pas compensée par le budget de l'Etat. Cette situation trouve son origine dans le nombre très limité de contrats - bien qu'il augmente de plus en plus -, mais aussi dans la nature même de ce contrat dont l'objet est l'orientation.

M. François HILLER (DGEFP) : Les engagements de développement de la formation (EDDF) constituent une incitation accordée aux entreprises, afin qu'elles s'engagent dans des démarches de développement des ressources humaines, qu'elles ne réaliseraient pas ou peu en l'absence d'aides spécifiques. La logique du dispositif est de marier aussi étroitement que possible les stratégies des ressources humaines et économique de l'entreprise.

Conçues en 1984 pour encourager l'accroissement global des dépenses de formation, les EDDF sont désormais ciblés sur les catégories de salariés ou d'entreprises qui ont le moins accès à la formation, c'est-à-dire les salariés les moins qualifiés et les entreprises de petite taille.

S'agissant de la procédure, notre schéma comporte plusieurs volets. Les EDDF nécessitent tout d'abord des accords cadres, nationaux ou régionaux, conclus avec les branches professionnelles, en association avec les représentants des employeurs et des salariés. Ensuite, il existe des accords régionaux, territoriaux, ou encore couvrant l'espace régional, à vocation interprofessionnelle. Et enfin, résiduellement, un certain nombre de contrats, de conventions bilatérales entre l'État et les entreprises peuvent être conclus.

La gestion et le suivi sont quasiment totalement déconcentrés : les directions régionales sont en charge du conventionnement, alors que les directions départementales de l'emploi, du travail et de la formation professionnelle sont en charge de l'instruction. Dans tous les cas, une association systématique des partenaires sociaux est prévue.

Que l'on soit dans le cadre d'un accord de branche ou d'une autre forme d'intervention, une convention entre l'État et l'entreprise bénéficiaire est toujours conclue. Le suivi est effectué par les directions régionales qui vérifient la bonne exécution des conventions et qui attribuent le solde de l'aide au prorata des réalisations effectives. Le cas échéant, elles peuvent faire appel à un expert technique extérieur qui jugera de la pertinence du projet ou de sa bonne exécution. Enfin, une évaluation en fin d'accord-cadre avec les branches - ces accords, je le précise, sont pluriannuels et valent, au maximum, pour une durée de quatre ans -, est réalisée par un expert extérieur. Elle est cofinancée par la profession et l'Etat.

Quant aux montants en jeu, ils s'élèvent à 400 millions de francs de crédits budgétaires au cours des années 1996 à 1998.

M. le Rapporteur : Un inspecteur du travail est-il spécifiquement chargé de contrôler le système ou cette mission est-elle exercée par chaque intervenant de la direction du travail ?

M. François HILLER (DGEFP) : Les entreprises bénéficiaires sont, comme les autres, soumises au contrôle de l'inspection du travail, et il arrive que des contrôles soient diligentés à l'occasion d'une demande d'aide, mais cela n'est pas systématique et nous n'avons pas donné d'instructions aux services pour qu'un tel contrôle soit systématique.

Le contrôle de l'exécution des conventions, quant à lui, est effectué soit sur pièces, lorsque les montants sont peu élevés, soit par un expert technique extérieur, pour des montants supérieurs. En général, il s'agit d'un expert qualifié de la sphère du service public.

Mme Karima MADI (DGEFP) : Le fonds national de l'emploi (FNE) est un fonds spécifique du ministère de l'emploi, créé en 1963 pour accompagner les restructurations des entreprises. Sa préoccupation principale est double : d'abord, soutenir les démarches de gestion prévisionnelle des emplois au sein des entreprises ; ensuite et surtout, atténuer les conséquences sociales des restructurations sur l'emploi et les qualifications.

Nos mesures obéissent à trois axes d'intervention majeurs.

Le premier axe permet d'adapter les compétences des salariés à l'évolution de leur emploi et des qualifications dans l'entreprise. Nous mobilisons ainsi trois instruments : d'abord une aide au conseil qui peut être utilisée par les entreprises, en cas de changement d'organisation, ou pour accompagner la formation. Cette aide peut être en partie financée par l'Etat.

Ensuite, des aides à la formation qui peuvent être mobilisées soit lorsqu'une menace pèse sur les emplois, soit lorsque l'entreprise a besoin de recourir à des embauches dans un bassin d'emploi où elle trouve difficilement à embaucher.

Enfin, les préretraites progressives, avec embauches compensatoires, permettent aux entreprises de faire travailler à temps partiel des salariés âgés en contrepartie d'embauches de demandeurs d'emploi, en particulier.

Le deuxième axe d'intervention du FNE est le plus important. Il consiste à éviter les licenciements des salariés, et à favoriser leur reclassement. Deux séries de mesures sont mobilisées.

Les premières, internes, encouragent le maintien dans l'emploi des salariés, grâce aux dispositifs de la loi « Robien » et de la loi « Aubry », accompagnant la réduction du temps de travail, mais aussi grâce aux aides à la formation, aux conventions de chômage partiel, aux aides pour le passage à temps partiel des salariés, et aux conventions de préretraites progressives qui peuvent permettre à des salariés âgés de travailler à temps partiel.

Les secondes, externes, permettent d'apporter un appui au salarié dans sa recherche d'emploi. Trois séries d'instruments sont mobilisés. D'abord les congés de conversion : ils permettent de mettre en place au sein de l'entreprise une antenne emploi qui aide le salarié à rechercher et à retrouver un emploi au sein d'une autre entreprise. Ensuite, les cellules de reclassement qui obéissent à la même logique, mais qui sont réservées à des entreprises de moins de 2 000 salariés. Enfin, l'allocation temporaire dégressive permet d'accompagner le salarié qui retrouve un emploi dans un lieu différent et à des niveaux de salaires différents. Elle constitue le financement du différentiel de rémunération entre les entreprises de départ et d'arrivée du salarié lorsque la nouvelle rémunération est inférieure.

Troisième axe de nos interventions : il s'agit d'une mesure - l'allocation spécifique du FNE (AS-FNE) - qui permet le retrait d'activité des salariés. Elle consiste à verser une allocation aux salariés âgés qui quittent leur entreprise. Cette mesure n'est utilisée qu'en cas de licenciement économique ou de la mise en oeuvre d'un plan social.

Je veux revenir sur les principes d'action qui guident la mobilisation des outils du FNE. Ils ont été rappelés aux directions départementales du travail et aux directions régionales dans diverses instructions dont la dernière date du 11 juillet 1997.

La priorité de mobilisation de nos mesures est bel et bien relative au reclassement interne et au maintien dans l'emploi. Le reclassement externe et les retraits d'activité des salariés âgés doivent être limités, et l'octroi tient compte des efforts réalisés par l'entreprise en matière de reclassement.

Comment les outils que je viens de présenter sont-ils mobilisés ?

Il existe plusieurs points communs. Ces dix instruments nécessitent la signature d'une convention avec l'Etat. L'octroi des mesures n'a pas un caractère automatique, et les taux de cofinancement de l'entreprise sont modulés en fonction de la taille de l'entreprise. Nous tenons également compte des efforts de reclassement effectués par l'entreprise. Dans tous les cas, l'aide est temporaire.

Elle est accordée par convention pour une période maximale d'un an, et toutes les conventions intègrent des clauses de « rendez-vous bilan » : l'entreprise est tenue de revenir à la direction départementale du travail pour faire un bilan de l'exécution des conventions signées. Par ailleurs, la loi du 28 juillet 1994 sur les exclusions a reforcé cette obligation en ajoutant un nouvel alinéa à l'article L.322-4 du code de travail, lequel oblige l'employeur, lorsqu'il réalise un bilan après un an, bilan destiné à l'origine à ses partenaires sociaux, à l'adresser également à la direction départementale du travail afin que soit contrôlée l'exécution des engagements pris.

Nous avons remis au Rapporteur un tableau retraçant l'évolution des sommes depuis 1996. En 1998, les dépenses se sont élevées à quatorze milliards de francs, et à dix sept milliards en intégrant les incitations à la réduction collective du temps de travail. La plus importante des mesures restent l'AS-FNE, dont le coût s'élève à neuf milliards.

Quant à la répartition par taille d'entreprise, elle dépend des mesures. Les entreprises de plus de 500 salariés sont ainsi concernées, selon les mesures, à des hauteurs allant de 3 % à 30 %. Une répartition plus précise pourra néanmoins vous être communiquée ultérieurement.

S'agissant de l'évaluation de nos outils, nous réalisons un bilan de l'exécution des conventions de manière systématique. Nous disposons également d'autres instruments de mesures d'ordre macro-économique. Il s'agit d'informations fournies soit par l'ANPE, soit par la DARES qui élabore des données statistiques à partir des conventions conclues avec les entreprises.

M. Roland SMOLAR (DGEFP) : Notre mission a la charge de deux dossiers : les conventions promotion de l'emploi, et l'aide aux chômeurs, créateur ou repreneur d'entreprise (ACCRE).

L'ACCRE concerne la création d'entreprise par des publics demandeurs d'emploi indemnisés, ou non indemnisés, mais inscrits depuis six mois à l'ANPE. L'aide correspond à une exonération des charges sociales pendant un an, et à un accompagnement des chômeurs créateurs d'entreprise. La loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes et la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions ont crée des outils complémentaires pour les jeunes de moins de 30 ans et les bénéficiaires de minima sociaux. A savoir, une avance remboursable et un accompagnement renforcé pour les créateurs ou repreneurs d'entreprise (dispositif dénommé encouragement au développement d'entreprises nouvelles EDEN). Ce dispositif est en cours de mise en place, et les premiers postulants devraient en bénéficier à l'automne prochain.

L'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise n'intéresse que les très petites entreprises. Celles-ci sont, à 80 %, des entreprises de services.

Les créateurs peuvent également bénéficier d'accompagnement sous la forme de chéquiers-conseils. Il s'agit d'aides, sous la forme de dix huit chèques-conseils d'une valeur individuelle de 400 francs sur lesquels 300 francs sont pris en charge par l'État et les 100 francs restants par le créateur d'entreprises.

Les chéquiers-conseils représentent une dépense budgétaire de 40 millions de francs. Quant à l'avance remboursable, 400 millions de francs sont inscrits en loi de finances, bien que la mesure ne soit pas encore effective. L'exonération des charges sociales n'est pas compensée.

Le dispositif des conventions de promotion de l'emploi ne repose ni sur un texte législatif, ni sur un texte réglementaire. Une convention, en effet, est un acte juridique entre un organisme et l'État pour promouvoir des initiatives permettant le développement de nouvelles formes d'emploi ou d'accompagnement des chômeurs créateurs, ou encore d'aides à l'insertion de publics en difficultés. A l'heure actuelle, ce dispositif est passé au niveau national ou au niveau déconcentré.

Au plan national, l'enveloppe s'élève à dix millions de francs. Elle aide essentiellement des réseaux associatifs, dans le secteur de la création d'entreprise, de l'insertion par l'économique, ou dans les nouvelles formes de travail - groupement d'employeur, pluriactivité.

Au plan déconcentré, on retrouve les mêmes formes d'aides destinées à des associations locales, mais aussi au développement de services nouveaux. Les conventions de promotion de l'emploi déconcentrées ont ainsi permis de développer les services d'aide à la personne, des associations d'emplois familiaux, l'aide au démarrage ou aux études de faisabilité pour des entreprises d'insertion.

Les entreprises n'ont que marginalement accès aux conventions promotion de l'emploi : il s'agit essentiellement des organismes de conseil qui sont conventionnés pour une étude de la direction départementale du travail, soit par une entreprise d'insertion qui confie une étude de marché à un cabinet de conseil.

Au plan national, les conventions peuvent s'élever à 800 000 francs pour les grands réseaux. Au plan local, par contre, les montants sont beaucoup plus faibles, et il est recommandé de ne pas dépasser 150 000 francs par convention, le montant devant correspondre, au maximum à 50 % du coût de l'étude ou de l'action envisagée avec le partenaire.

Au plan déconcentré, les moyens s'élèvent à environ 100 millions par an. Les entreprises sont très marginales, et seuls les cabinets d'ingénieries bénéficient des aides au titre des conventions de promotion de l'emploi.

M. le Rapporteur : Qu'entendez-vous par « grands réseaux » ?

M. Roland SMOLAR (DGEFP) : Le COORACC ou le CNEI, par exemple, sont des grands réseaux de l'insertion par l'économique. Les réseaux du développement local sont constitués, par exemple, par le comité de liaison des comités de bassin d'emploi ou les réseaux de groupement d'employeur - la FFGE ou le CNCE-GEIQ.

M. le Rapporteur : Les aides concernent les très petites entreprises.

M. Roland SMOLAR (DGEFP) : En effet, et 50 % des entreprises aidées par l'État au titre de l'aide aux chômeurs créateurs d'entreprises ont un salarié après un an de mise de création.

M. le Rapporteur : Mme Madi, vous nous avez indiqué que neuf milliards de francs avait été dépensés au titre de l'AS-FNE en 1998. Or, dans la loi de finances pour 1999, moins de cinq milliards de crédits ont été ouverts. Pouvez-vous nous expliquer cette réduction ?

Mme Karima MADI (DGEFP) : Depuis la circulaire du 11 juillet 1997 qui met l'accent sur les mesures de reclassement interne, le Gouvernement entend diminuer le recours aux mesures d'âge à partir d'un bilan soulignant le caractère non entièrement satisfaisant du retrait des salariés âgés d'activités. En France, en effet, les taux d'activité pour les salariés âgés sont parmi les plus faibles d'Europe. Telle est la raison de cette diminution de crédits, qui témoigne de la volonté de recourir moins souvent à ce genre de mesures.

M. le Rapporteur : Cela dit, le dispositif de l'ARPE qui, pour les salariés âgés, est identique à l'AS-FNE, monte en puissance.

Mme Karima MADI (DGEFP) : Certes, mais il est financé par les partenaires sociaux.

M. le Rapporteur : J'ai cru comprendre qu'il y avait une participation de l'UNEDIC dans le financement des préretraites progressives et dans les allocations spéciales du FNE. Comment le système fonctionne-t-il ?

Mme Karima MADI (DGEFP) : Les modalités du financement et du cofinancement des conventions sont très techniques : je vous propose donc de vous les communiquer par courrier. C'est bel et bien l'UNEDIC qui gère et qui verse les allocations aux salariés concernés. L'État participe également au dispositif, qui fonctionne par régularisations et par versements.

Mme Isabelle MOURES (DGEFP) : Si vous souhaitez en savoir davantage, nous pouvons vous faire parvenir un dossier précisant les modalités du système.

M. le Rapporteur : Dans les documents que vous nous avez déjà transmis, j'ai pris connaissance de l'intervention de fonds de concours par lequel était apportée une part du financement des dispositifs.

Mme Karima MADI (DGEFP) : C'est la participation des entreprises au financement qui passe par un fonds de concours. Lorsqu'un salarié adhère à une convention de l'AS-FNE, l'entreprise est tenue de verser à un fonds de concours une part de participation à l'allocation versée au salarié lors de son départ en préretraite, jusqu'à ce qu'il puisse liquider sa pension à taux plein.

M. Jean-Paul BLOUARD (UNEDIC) : Le montant de la participation financière de l'UNEDIC à l'AS-FNE s'élève à 1,2 milliards en 1998. Un montant de 1,1 milliard est prévu pour 1999.

Vous nous avez interrogés sur le dispositif de l'allocation de remplacement pour l'emploi (ARPE). Il ne s'agit pas d'une aide directe aux entreprises, mais d'une allocation qui s'adresse aux individus. Ce dispositif permet aux salariés qui réunissent un nombre d'années de cotisation à la sécurité sociale suffisant - plus de quarante ans, voire quarante trois ans - de bénéficier jusqu'à l'âge de leur départ à la retraite, d'une allocation équivalent à 65% du salaire qu'ils percevaient lorsqu'ils étaient actifs.

Naturellement, les salaires des personnes embauchées en compensation sont plus faibles que ceux des partants. Ainsi, une enquête (UNEDIC-CREDOC novembre 1996) a montré que le montant de ces salaires était, en moyenne, de 30 % inférieur aux salaires des partants.

Fin 1998, il y avait environ 80 000 bénéficiaires et, depuis la mise en place du dispositif, plus de 120 000 embauches compensatrices ont été réalisées.

Quant à la répartition par secteur, elle fait apparaître une très forte prépondérance du secteur industriel qui représente 56 % des départs anticipés. A l'inverse, les secteurs de services sont sous-représentés avec moins de 36 %.

S'agissant des entreprises qui ont recours au dispositif, on observe qu'il s'agit plutôt de moyennes ou de grandes entreprises : 41%. Les plus petites, celles qui comprennent moins de dix salariés, ne représentent que 11%.

La dotation globale engagée depuis la mise en oeuvre du dispositif représente 17, 8 milliards, et concerne des années qui sont postérieures à l'an 2 000, puisque des personnes sont entrées jeunes dans le dispositif, et n'en sortiront qu'en 2 014. Le coût du dispositif - les dépenses de prestations, non comprises les contributions aux caisses de retraite complémentaire -, s'est élevé à 5,7 milliards en 1997, 7,7 milliards en 1998, et 8,9 milliards prévus pour 1999.

M. le Rapporteur : Quel est la part de l'État dans le dispositif ?

M. Jean-Paul BLOUARD (UNEDIC) : L'État ne participe pas au financement, dans la mesure où un fonds spécifique a été créé pour financer le dispositif.

M. le Rapporteur : Le dispositif est-il entièrement financé par le fonds paritaire de l'emploi ?

M. Jean-Paul BLOUARD (UNEDIC) : Oui.

En ce qui concerne les embauches compensatrices, 61 % d'entre elles concernent des salariés de moins de trente ans, et 42 % des salariés de moins de vingt six ans. Ces salariés sont embauchés massivement pour des contrats à durée indéterminée, et à temps plein pour 72 % d'entre eux.

M. le Rapporteur : Quelles sont vos exigences en matière de maintien de l'emploi ?

Mme Hélène VODE (UNEDIC) : L'employeur est obligé de compenser le volume d'heures de travail prévu au contrat de travail ayant cessé pour la durée restant à courir depuis la cessation d'activité du salarié partant, jusqu'à son 60ème anniversaire, ou pour un contrat à durée déterminée jusqu'au terme du contrat de travail du salarié, étant précisé que ce contrat doit avoir une durée minimum de six mois.

M. le Rapporteur : Quels sont les contrôles opérés pour s'assurer que cette obligation est respectée ?

Mme Hélène VODE (UNEDIC) : Un suivi de l'obligation d'embauche est assuré, l'ASSEDIC, au terme d'un délai de trois mois, qui court à compter de l'acceptation de la demande de cessation d'activité, opère un contrôle et appellera une pénalité égale aux allocations versées, majorées de 50 %.

M. le Rapporteur : Certes, mais que se passe-t-il si la personne est licenciée à la suite de son embauche ?

Mme Hélène VODE (UNEDIC) : Le régime d'assurance chômage n'est pas en mesure de faire une actualisation de la situation de l'intéressé, à l'intérieur de l'entreprise.

M. le Rapporteur : On rencontre le même type de problème pour les dispositifs concernant les préretraites progressives, puisque la Cour des comptes a constaté un suivi plutôt lacunaire, et en particulier, que des salariés étaient licenciés alors qu'ils n'auraient pas dû l'être, dans la mesure où ils avaient été embauchés pour compenser des départs.

Des dispositions ont-elles été prises depuis la publication de rapport de la Cour des comptes pour corriger ces lacunes ?

Mme Karima MADI (DGEFP) : L'instruction du juillet 1997 a rappelé l'impératif de suivi de l'accomplissement des conventions, en réponse aux remarques de la Cour des comptes.

M. le Rapporteur : Nous avons rencontré de nombreuses difficultés à définir la notion de groupe. Avez-vous précisé son contenu ?

M. Jean-Paul BLOUARD (UNEDIC) : Non, la notion de groupe n'est pas prise en compte dans le système d'information du régime d'assurance chômage.

M. le Rapporteur : Vous ne pouvez donc pas savoir quels sont les groupes qui ont une tendance à utiliser de manière importante tel ou tel dispositif, voir à l'inscrire dans leur stratégie.

M. Jean-Paul BLOUARD (UNEDIC) : Non. En revanche, on peut procéder à une analyse sectorielle plus détaillée que celle que je vous ai indiquée.

M. le Rapporteur : Pourriez-vous nous communiquer la liste des entreprises qui bénéficient le plus largement de ces dispositifs ?

M. Jean-Paul BLOUARD (UNEDIC) : Les informations que je vous ai fournies prennent appui sur le fichier national des ASSEDIC. Celui-ci permet de suivre les individus et constitue un fichier à vocation statistique. Nous ne disposons donc d'aucun élément d'identification directe des entreprises ou des individus.

M. le Rapporteur : Vous ne disposez donc d'aucune information sur le type d'entreprise ou de groupe...

M. Jean-Paul BLOUARD (UNEDIC) : A partir des fichiers gérés par les ASSEDIC, il serait possible de faire cette recherche.

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : La direction de la technologie propose deux types d'aides pour les entreprises : les aides du fonds de la recherche technologique (le FRT) qui relèvent du chapitre budgétaire 66-04 et les diverses aides à la formation par la recherche en entreprise, qui figurent au chapitre budgétaire 43.80.

Le fonds de la recherche technologique a pour vocation de financer des projets de recherche qui intéressent conjointement des industriels de petites ou de grandes entreprises, et des laboratoires publics. Son montant a varié depuis une quinzaine d'années entre 400 millions et 1,6 milliard par an.

Sur le long terme, on peut constater que les grands groupes bénéficient deux fois plus de ce fonds que les petites entreprises. Par petites entreprises, j'entends une entreprise de moins de 500 salariés qui, dans certains cas rarissimes, peut être affiliée à un grand groupe. Nous avons fait un effort pour que les petites entreprises puissent profiter plus largement de ce fonds, et en 1998, elles en ont bénéficié davantage que les grandes entreprises.

Par ailleurs, les projets de recherche bénéficient de taux de subvention modulés entre les grands groupes et les petites entreprises. Pour un grand groupe, ils s'élèvent de 20 à 35 %, selon qu'il est associé ou pas à une petite entreprise.

L'évaluation, quant à elle, est réalisée par deux expertises - la première sur le projet lui-même, la seconde sur son accomplissement - au terme desquelles nous versons la subvention. Dans l'hypothèse où nous ne disposerions pas des factures correspondantes ou d'un rapport d'évaluation suffisant, nous pouvons demander le reversement de la subvention.

Les aides sont attribuées soit projet par projet, soit par programmes thématiques. Certains d'entre eux ont d'ailleurs généré des aides importantes à des grands groupes : Rhône-Poulenc, le secteur automobile, le secteur électronique.

J'en viens au chapitre 43.80.

Certaines aides ne concernent que les petites entreprises : il s'agit des aides pour les techniciens supérieurs, celles pour les diplômes de recherches technologiques, ainsi que les dispositifs destinés aux post-doctorants.

Les conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE) sont, quant à elles, destinées tant aux PME - 40 % du montant - qu'aux grands groupes. Ces conventions financent une thèse réalisée en commun entre un laboratoire public et une entreprise. Le dispositif qui existe depuis 1981 a également été maintenu pour les grands groupes, dans la mesure où nous considérons que la rédaction d'une thèse est un travail lourd, et qu'il nécessite un encadrement suffisant.

La sélection et l'expertise sont effectuées par l'association nationale de la recherche technique (ANRT) où un comité technique décide ou non d'attribuer une CIFRE au vue d'un dossier qui contient des éléments sur l'entreprise ainsi que le contrat entre le chercheur et cette dernière. Une évaluation est réalisée au terme du travail et peut conduire à ce que l'on demande le remboursement de l'aide.

M. le Rapporteur : Les montants des CIFRE attribuées aux groupes les plus importants qui figurent dans le document que vous nous avez communiqué sont-ils cumulés sur la période 1981-1998 ?

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : Oui. Aujourd'hui, nous attribuons un peu moins de 700 CIFRE par an.

M. le Rapporteur : Avez-vous le sentiment de faire un effort particulier en direction des grands groupes ?

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : Dans le passé, nous avons financé de façon très importante, dans le cadre des grands programmes, ce type de groupes. Nous le faisons beaucoup moins aujourd'hui. Cela étant, financer la recherche d'un grand groupe, lié à un laboratoire public et à des petites entreprises, nous paraît utile pour le développement de la recherche industrielle.

M. le Rapporteur : Dans votre document, vous citez Rhône-Poulenc que nous avons eu l'occasion d'auditionner. Or, votre perception de l'utilité des aides et celle du président directeur général de Rhône-Poulenc sont très différentes, puisque celui-ci considère qu'elles ne jouent qu'un rôle marginal.

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : Le chiffre que je vous ai présenté est un montant cumulé sur treize ans. Par ailleurs, l'aide à Rhône-Poulenc est liée à un très grand programme : Bioavenir.

Aujourd'hui, la politique en direction des grands programmes a été abandonnée. Au vue des évaluations de certains grands programmes, nous considérons que nous devons désormais privilégier des associations qui permettent davantage d'interactions entre laboratoires publics et petites entreprises. Dans le cadre de réseaux de recherches technologiques, nous essayons de diversifier les projets de recherche.

M. le Rapporteur : Quelle est votre définition du groupe ?

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : Nous n'avons pas distingué les PME des entreprises de moins de 500 salariés. De nombreux « groupes » sont donc, dans notre nomenclature, des entreprises de taille moyenne. Nous ne disposons pas de classifications qui nous permettent de distinguer un grand groupe d'une grande entreprise. Quoiqu'il en soit, je ne pense pas qu'une telle distinction changerait beaucoup le fond de l'analyse.

M. le Rapporteur : A l'avenir, sur quelle définition des groupes comptez-vous vous appuyer ?

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : Nous comptons d'abord disposer d'une définition beaucoup plus fine des PME, et distinguer - conformément à la définition de la Commission européenne -, les entreprises de moins de 250 salariés et les autres. Par ailleurs, nous identifierons, comme l'ANVAR, les entreprises de moins de 2 000 personnes. Enfin, nous retiendrons la définition des grands groupes de l'ANVAR : nous disposerons alors d'une palette beaucoup plus fine.

M. le Rapporteur : Certains dispositifs font intervenir l'indépendance comme critère pour bénéficier de l'aide. Comment pouvez-vous vérifier le respect de cette condition ?

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : L'essentiel se fait au moment du dépôt du dossier, lequel doit comporter plusieurs informations sur la société - bilans financiers, comptes de résultats, documents sur l'identification de la société. En cas de doutes, nous procédons à des vérifications auprès de l'entreprise.

Cela dit, un contrôle se fait sur pièces, au fil du temps, et des rapports intermédiaires et à l'issu de la convention sont prévus avec les entreprises.

M. le Rapporteur : A l'issue de la convention, si vous découvriez que l'entreprise en question n'était plus indépendante, pourriez-vous prendre des sanctions ?

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : C'est à examiner au cas par cas.

M. le Rapporteur : De 1985 à 1998, il y eu une évolution notable du montant global des crédits pour la recherche industrielle, puisque de 1 076 millions, nous passons à 412 millions.

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : Le montant à été relevé à 630 millions dans la loi de finances pour 1999. Nous sommes en train de sortir du grand creux dans lequel nous nous étions installés.

M. le Rapporteur : Par ailleurs, en pourcentage, il n'y a pas de rééquilibrage entre les grands groupes et les autres entreprises.

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : Nous ne pouvons pas rattraper les années 1985 à 1997 en une seule année, surtout avec des montants moindres.

M. le Rapporteur : Lors de son audition, la direction de Rhône-Poulenc nous a beaucoup parlé de son programme Bioavenir. Serait-il possible de connaître le montant des sommes qui ont été versées dans ce cadre ?

M. Didier COULOMB (Direction de la technologie) : De mémoire, le montant est de l'ordre de 600 millions de francs, mais je crois que les documents que je vous ai communiqués retracent, année par année, l'évolution des montants. Au total, Rhône-Poulenc a dû bénéficier de 700 à 800 millions de francs en quinze ans, pour l'ensemble des programmes.

M. Pierre RADANNE (ADEME) : Sur un budget global de 2,1 milliards, près de 400 millions - 20 % - sont consacrés à la recherche et sont destinés, pour les deux tiers aux grandes entreprises. Nous aidons très peu les laboratoires publics et nous travaillons sur un domaine très finalisé et très appliqué.

L'ADEME consacre près de 400 millions de francs d'aides aux conseils, aux études ou aux diagnostics, et 1,4 milliard d'aides aux travaux.

L'activité la plus importante de l'ADEME a trait aux déchets. En mettant en oeuvre la loi de 1992, nous devons aider les collectivités locales et les entreprises à éviter la mise en décharge directe des déchets, afin de développer la collecte sélective et l'incinération. Nous disposons de crédits importants, destinés aux entreprises, mais il est assez difficile de savoir ce qu'ils deviennent. Sur le milliard destiné aux déchets, 200 millions sont destinés aux déchets industriels banals, essentiellement traités par les petites entreprises, alors que 800 millions reviennent aux collectivités locales, dont les deux tiers se retrouvent chez des délégataires de services publics. Ainsi, ce sont essentiellement la Lyonnaise des eaux et Vivendi qui sont destinataires de certaines aides pour des travaux d'investissement : incinération, collecte sélective, etc.

Nous nous adressons également à des entreprises à forte composante technologique : Rhône-Poulenc, les constructeurs automobiles et les chimistes.

Trois types d'aides peuvent être distingués.

Les premières sont le fruit de l'histoire. Des politiques sont financées par des prélèvements fiscaux, et les aides sont essentiellement destinées aux grands groupes, au titre de la pollution de l'air. Sont assujettis à la taxe uniquement des émetteurs de pollution à partir d'un seuil d'importance. Les aides ne sont redéployées qu'à ces secteurs.

Second mécanisme. Certains systèmes de taxes sont imposés à des flux, par exemple, les déchets, sans pré-affectation de l'usage. On peut alors orienter les flux vers les collectivités locales ou les entreprises grâce aux systèmes d'aide.

Troisième mécanisme : les crédits budgétaires. Ils permettent d'avoir des aides sur des objets beaucoup plus ouverts que ne le permettaient les systèmes fiscaux, avec une priorité aux PMI.

L'ensemble de notre mode de fonctionnement est en cours de révolution, et dans le loi de finances 1999, le Parlement a voté la mise en place de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) qui abolira l'ensemble des anciennes taxes. Les comités de gestion de ces taxes ont été supprimés et nous retrouvons avec un budget constitué entièrement de ressources budgétaires. Notre prochain conseil d'administration devrait revoir l'ensemble des mécanismes financiers de l'ADEME.

Nous avons également constaté que nous ne respections pas les règles d'encadrement communautaire : vis-à-vis des grands groupes, se pose le problème de la conformité des aides d'État à l'article 92 du traité de Rome, selon lequel sauf cas particuliers, les aides publiques ne doivent pas excéder 15 % de l'investissement pour les grands groupes, sauf si elles soutiennent la recherche. Si l'ADEME ne déclarait pas à Bruxelles les aides concernant la pollution de l'air jusqu'à présent, l'ensemble des régimes d'aides que nous sommes en train de mettre en place sera déclaré, afin de respecter le traité de Rome. En conséquence, des aides dont le taux s'élevait à 40 % auront désormais un taux de 15 %.

La mise en place de la TGAP nous permettra de disposer d'une fongibilité entre nos systèmes d'aides et entre leurs bénéficiaires. Le type de blocage existant sur la pollution de l'air, interdisant de viser l'ensemble des entreprises, et permettant d'aider uniquement les grand émetteurs de pollution, va disparaître. De petites entreprises assez polluantes, situées dans des sites urbains, pourront désormais profiter d'aides.

Nous disposons également d'aides destinées uniquement aux PME. Nous sommes en train de travailler à la mise en place de fonds de garantie, s'adossant sur le mécanisme de la SOFARIS qui permettra de donner aux PME des capacités d'investissements supplémentaires.

L'ADEME distribue environ 5 000 aides par an, à 13 000 « clients » qui, pour une bonne moitié, sont des collectivités locales. Les aides ont clairement un effet redistributif sur le territoire national : on peut donc facilement suivre leur utilisation. La réglementation nous impose de nombreux mécanismes de comptage, que ce soit pour la pollution ou pour l'énergie.

L'absence de comptabilité analytique est une de nos faiblesse. Nous tenons très bien nos comptes, mais nous avons énormément de difficultés à suivre notre action. Mais dans le cadre du passage à l'an 2 000, nous devrons mettre à plat la totalité de notre système informatique afin de disposer d'un système de gestion comptable correspondant aux obligations légales pour les établissements publics industriels et commerciaux et d'une série d'éléments de comptabilité analytique qui nous permettront de recomposer la distribution de nos aides à travers les grands programmes, tout en disposant d'une comptabilité « matière » : l'ADEME comptera non seulement ses francs, mais également ses tonnes afin de pouvoir publier en fin d'année, le résultat réel de son action.

M. le Rapporteur : Alors que des aides sont accordées aux collectivités locales, vous laissez entendre qu'elles finissent par bénéficier à des groupes, délégataires de services publics.

M. Pierre RADANNE (ADEME) : Le mot « bénéficier » peut être pris en plusieurs sens. Les collectivités locales exploitent parfois leurs installations de chauffage et leurs installations de déchets directement en régie, mais l'essentiel des collectivités locales utilisent des délégataires de service public.

Il y a eu, c'est vrai, des effets d'aubaine lors de la distribution de certaines d'aides, mais notre système, comme je l'ai rappelé, va être considérablement transformé afin que les investissements soient ramenés aux règles publiques. En outre, nous sommes en train de sortir d'une culture du « tout subvention », classique en France, pour entrer dans une conception plus immatérielle de notre rôle.

Nous disposons d'une expertise publique que l'on doit pouvoir utiliser pour garantir la qualité des projets au banquier, quitte à bonifier par des mécanismes de type « fonds de garantie », afin de rassurer le banquier dans son engagement. Mais nous avons hérité de systèmes d'aides dont les taux s'élevaient à 15 %, 20 %, voire 30 %. Or, lorsqu'on essaie de consolider l'investissement par un fonds de garantie, l'aide publique se situe au environ de 3,5 %, ce qui permet de garantir le banquier sur le tiers de l'investissement.

Nous avons donc un travail de modernisation de l'État à engager, afin de maximaliser l'utilisation de l'argent public.

M. le Rapporteur : Parallèlement aux aides qui bénéficient directement aux grands groupes, certaines d'entre elles permettent aux collectivités locales de les faire travailler.

M. Pierre RADANNE (ADEME) : Certes, mais conformément à des contraintes données par les pouvoirs publics, et sur des commandes passées par les communes.

M. le Rapporteur : Mais le système solvabilise une certaine demande...

M. Pierre RADANNE (ADEME) : Oui, mais nous sommes extrêmement vigilants quant aux coûts des équipements : une grande partie de notre action, d'ailleurs, vise à réduire les factures. Un maire qui commande une décheterie n'a, en effet, ni la connaissance technique, ni la capacité d'effectuer un contrôle sur les coûts. Notre activité d'instruction pour l'attribution de financements constitue d'abord un moyen de corriger et de contrôler les projets. Et dans de nombreux cas, nous avons à faire des corrections de surdimensionnement physique et financier des équipements, car certains groupes - mais ils ne sont pas les seuls - sont très habiles.

M. le Rapporteur : Je viens d'un département où l'on commande de nombreux incinérateurs. Le seuil maximal de 15 % dont vous avez parlé inclut-il l'argent versé par le Conseil général ?

M. Pierre RADANNE (ADEME) : Les 15 %, conformément à l'article 92 du traité de Rome, sont constitués par le cumul des aides publiques. Cet encadrement communautaire vise strictement le secteur concurrentiel, et lorsqu'une collectivité locale est donneur d'ordre, y compris vis-à-vis d'entreprises, sur un secteur qui n'est pas concurrentiel - un service public de collectivités locales - le système échappe à l'encadrement communautaire. Mais imaginez une régie de municipalité qui répondrait à l'appel d'offre de la ville voisine : on serait alors dans la situation d'un service public, qui se mettrait en situation concurrentielle.

M. le Rapporteur : Pourquoi, jusqu'à présent, seules les aides se rapportant à la pollution atmosphérique étaient-elles notifiées ?

M. Pierre RADANNE (ADEME) : Je ne sais pas qui est responsable de cette « amnésie ». En principe, c'est l'État qui doit notifier, mais il ne l'a pas fait. A la fin des années 80, le contrôle effectué par Bruxelles portait sur les aides d'Etat. N'était pas reconsolidé l'ensemble de tous les systèmes des organismes publics, et des collectivités territoriales. Aujourd'hui, Bruxelles a la volonté d'y voir un peu plus clair afin de tendre vers une reconsolidation de l'ensemble.

M. Jean-Marie SEPULCHRE (ANVAR) : L'ANVAR est un établissement public industriel et commercial, sous tutelle du ministère de la Recherche et de la Technologique, du ministère de l'Industrie ainsi que du secrétariat d'État aux Petites et Moyennes Entreprises.

Sa mission consiste à accorder l'aide à l'innovation, telle qu'elle est définie par le décret du 31 mai 1997. Cette aide, mise en place en 1979, est interdite aux grands groupes depuis dix ans. Aujourd'hui, pour se voir accorder par nos délégations régionales une aide, une entreprise doit posséder un effectif de moins de 2 000 personnes, et ne doit pas appartenir à un groupe. Le dossier d'une entreprise comprenant plus de 2 000 personnes est réglé au niveau du siège - 97 % de nos dossiers étant décentralisés. Les entreprises dont le chiffre d'affaires représente 10 milliards de francs et plus sont exclues de l'aide. Nous ciblons donc les petites et moyennes entreprises, et la taille moyenne des entreprises que nous aidons est de cinquante personnes.

Depuis l'origine de la mise en place de l'aide à l'innovation, 57 340 dossiers ont été accordés et concernaient 24 656 entreprises. Aujourd'hui, nous gérons des aides à hauteur de 1,4 milliard de francs par an, dont plus d'un milliard pour les avances remboursables qui consistent en des prêts à taux zéro accordés aux entreprises pour développer un projet innovant.

Près d'un milliard de francs par an est donc accordé, sous forme d'avances remboursables, aux petites entreprises. Ces aides, en moyenne remboursées cinq ou six ans après leur attribution, nous reviennent à 50% environ.

Nous gérons également d'autres aides dont certaines sont liées à des politiques de recherche. Je pense aux conventions de recherche pour les techniciens supérieurs (CORTECHS) ou aux aides au recrutement pour l'innovation (ARI). Il s'agit de subventions qui sont attribuées aux petites entreprises, notamment pour permettre l'embauche d'ingénieurs, de chercheurs ou de docteurs, afin de créer des services de recherches et de développement dans les petites entreprises. Nous gérons enfin des aides aux projets jeunes, des aides pour les réseaux de diffusion technologique, des aides aux inventeurs indépendants qui souhaitent breveter une invention mais aussi des aides aux entreprises qui, ayant atteint une certain taille, feront appel aux nouveaux marchés boursiers.

La répartition de ces aides reste largement centrée sur des secteurs traditionnels : l'industrie, à 60 % ; les services et autres, à 30 %.

S'agissant de la taille des entreprises aidées, un tiers compte moins de dix salariés, un tiers, de dix à cinquante salariés, et un peu moins de 25 % ont plus de cinquante salariés.

Quant aux montants d'aides moyens pour les projets de développement, ils avoisinent 1 milliard de francs et près de 1 000 projets d'aides au développement sont réalisés par an, sous forme d'avances remboursables et avancent 1 MF.

Nous tenons à la disposition de la Commission les répartitions des cent premières aides par an depuis 1979. Le tournant qui a consisté à sortir les grands groupes du système d'attribution des aides prend son sens en 1992, où plus aucune entreprise appartenant à un grand groupe ne figure parmi les entreprises aidées. Seules exceptions : les aides aux sociétés de recherches sous contrat, subventionnées pour mener des programmes de recherches technologiques. Ces sociétés doivent être indépendantes des grands groupes pour être éligibles aux aides de l'ANVAR, mais peuvent toutefois transférer les résultats de leurs recherches à leurs clients, lesquels peuvent être des grands groupes.

L'ANVAR participe également à des opérations de réseaux, soit sur appels d'offre, pour les transports terrestres, soit sur les nouveaux réseaux qui regroupent des grandes entreprises, des laboratoires publics, et des petites entreprises. Mais nous ne participerons à ces opérations qu'au niveau de la coordination générale et pour l'aide aux jeunes PME.

Dernier exemple où il peut exister des liens entre petites et grandes entreprises, l'ANVAR ne finançant directement que les petites : les programmes liés à des programmes européens, ou Eurêka, pour lequel l'ANVAR assure le secrétariat pour la France. Lorsqu'il y aura des combinaisons de projets de recherche et de développement entre des petites et des grandes entreprises, l'ANVAR pourra aider les petites entreprises, et aura connaissance des projets des grandes.

Nous rencontrons de nombreuses difficultés pour l'évaluation. Pendant des années, notre système d'évaluation était binaire : nous mettions en place des avances remboursables : une action qui réussissait remboursait son aide, alors qu'une action qui échouait ne la remboursait pas. Nous avons tenté d'affiner le système, en travaillant par enquête ou par sondage, afin d'examiner, au-delà de la réussite apparente des programmes, si nous ne pouvions pas améliorer l'évaluation.

Il nous est extrêmement difficile de déterminer une adéquation simple entre le montant des aides et le volume de l'emploi. De nombreuses entreprises dont le programme a réussi nous expliquent que si nous ne les avions pas aidées, elles n'auraient pas pu innover et aurait dû disparaître. Nous avons bien tenter de mettre en place des outils, dont la fiabilité n'est pas encore assurée, afin de vérifier s'il existe un effet multiplicateur de nos aides. Nous tentons actuellement de mener une enquête dont les résultats ne sont pas encore disponibles.

L'évaluation est cependant une de nos préoccupations permanentes en matière de gestion : tous nos dossiers sont gérés en ligne par notre ordinateur central. Nos chargés d'affaires et nos délégués régionaux sont fortement incités, lorsqu'une entreprise demande une nouvelle aide, à vérifier si elle en a déjà bénéficié auparavant, et qu'elles en ont été les résultats. Cet historique de gestion permet difficilement les comparaisons sur longue période, et en valeur économique, l'évolution du nombre d'emplois ou des bilans des entreprises nécessitent un travail particulier.

Nous sommes donc en mesure d'évaluer un dossier, mais nous pouvons difficilement en tirer des conclusions générales.

M. le Rapporteur : S'agissant des conditions d'éligibilité à l'aide à l'innovation, pourriez-vous nous éclairer sur la manière dont vous structurez les catégories, dans la mesure où l'on voir apparaître un critère de taille, alors que vous avez mis en avant un critère de type chiffre d'affaires pour la définition de la notion de groupe ?

M. Jean-Marie SEPULCHRE (ANVAR) : Nous avons retenu un seuil de chiffre d'affaires, afin d'exclure les grands groupes du bénéfice de nos aides. Ces critères sont le fruit de l'histoire et de l'évolution de la répartition des aides selon les structures. La description de nos aides et les « catégorisations » relèvent de la décision de notre conseil d'administration. Nous avons donc retenu des critères d'expérience, que ce dernier a approuvés.

Nos chargés d'affaires connaissent parfaitement le tissu industriel et économique des régions. Lorsqu'il existe des incertitudes quant à l'appartenance d'une société à un groupe, on effectue des recherches d'actionnariat. Si un groupe participait à une start up de façon minoritaire, cette dernière resterait éligible.

M. Jean-Michel ETIENNE (Ministère de l'équipement) : Je vais vous présenter les aides qui s'adressent au secteur du bâtiment et des travaux publics. Pour l'essentiel, elles sont limitées aux fonds régionaux d'aide au conseil (FRAC).

Les fonds régionaux d'aide au conseil sont des procédures déjà anciennes. Elles ont été initiées dans le IXième plan, généralisées dans le Xième, et poursuivies dans le XIième. Elles prennent la forme d'aides cofinancées à parité avec les conseils régionaux, s'adressant à des entreprises de moins de 500 salariés, non filiales d'entreprises de plus de 500 salariés.

Ces aides ont des montants unitaires limités à 200 000 francs, et prennent la forme d'une aide au conseil, ou d'aide au recrutement de cadres.

L'État a engagé, au titre du plan actuel, 78 millions de francs sur une période quinquennale, auxquels s'ajoutent les engagements correspondants des régions.

Les évaluations sont gérées de manière déconcentrée par les directions régionales de l'équipement qui établissent chaque année un rapport d'activité comprenant la liste des entreprises bénéficiaires. A l'issue de l'échéance des périodes de plan, un organisme extérieur établit un rapport d'évaluation.

Le jugement que nous portons sur ces procédures est fonction du volumes des crédits attribués, et 30 millions de francs pour le secteur du BTP, c'est peu de chose quand il réalise un chiffre d'affaires annuel de 480 milliards de francs. Cela dit, nous considérons que nos procédures ont un caractère incitatif assez utile, et parfois exemplaire.

D'une manière générale, les crédits sont essentiellement dédiés à des conseils en matière de gestion de la qualité, domaine dans lequel le secteur de la construction est en retard par rapport aux autres secteurs professionnels, et aux entreprises étrangères.

M. le Rapporteur : Votre dispositif est mis en oeuvre essentiellement dans le cadre des contrats de plan Etat-région, j'imagine.

M. Jean-Michel ETIENNE (Ministère de l'équipement) : En effet, et ils ne s'adressent pas à des grands groupes.

M. Jean-Luc VO VAN QUI (DARPMI) : Je distinguerai deux grands types d'intervention.

D'abord, les interventions réalisées sur la base de crédits du secrétariat d'État à l'Industrie. Elles sont abondées de crédits des conseils régionaux et de crédits européens, gérés par nos services.

Ensuite, les interventions qui se réduisent au fonds d'industrialisation de la Lorraine (FIL) dont les crédits proviennent de notre organisme, mais qui concernent des opérations menées par le préfet de la région Lorraine, sans que nos services interviennent nécessairement.

Le premier type d'intervention est destiné aux PMI.

Une première procédure - la procédure de diffusion des techniques -, consiste à encourager une entreprise à utiliser une technique largement répandue dans les entreprises technologiques ou dans les grands groupes, mais peu répandues dans les PMI.

Nous intervenons sur des entreprises qui peuvent comprendre jusqu'à 2 000 personnes, non contrôlées par des groupes de plus de 2 000 personnes. Cela étant, le tableau de répartition par taille d'entreprise montre que 95 % des entreprises comptent moins de 250 personnes.

Le coût global de l'opération s'élève à 200 millions de francs pour le ministère.

D'autres procédures s'adressent aux entreprises de 500 personnes, non contrôlées par un groupe de plus de 500 personnes : FRAC, Fonds régional d'aide technique (FRAT) et aides au conseil.

La répartition par taille d'entreprise montre que plus de 90 % des interventions sont destinées à des entreprises de moins de 100 personnes.

Les crédits engagés, toutes sources confondues, s'élèvent à 90 millions pour le FRAC, à 162 millions pour l'aide au conseil, et à 5 millions pour le FRAT.

Enfin, les aides aux PMI comprennent une aide à l'investissement, par le fonds de développement des PMI (FDPMI), qui, dans le cadre des règles communautaires, est destiné aux PMI de moins de 250 personnes, non contrôlées à plus de 25 % par un groupe de plus de 250 personnes. On peut constater que 95% des aides vont à des entreprises de moins de 100 personnes, pour un coût de un milliard.

Nous pouvons distinguer trois types d'évaluation.

D'abord, celles relatives au suivi. Un an après la fin de l'intervention, il s'agit de faire visiter l'entreprise. Cette opération s'effectue sur la base d'un échantillon.

Ensuite, les évaluations régionales sont laissées à l'initiative des partenaires régionaux - conseil régional, préfet, nos services -, et sont effectuées sur la base d'un travail confié à un intervenant extérieur, cabinet de conseil ou universitaires. L'objectif est d'aller plus loin que le suivi et, un an après l'opération, de constater les résultats.

Enfin, l'évaluation nationale : on réalise une enquête sur la base d'un échantillon national, en faisant appel à un consultant extérieur, et en essayant de tenir compte des enseignements des évaluations partielles.

Les grands groupes peuvent-ils bénéficier des aides attribuées aux PMI ?

Pour qu'un grand groupe bénéficie d'une telle aide, il faut qu'il y ait eu négligence ou faute du service instructeur - notre direction régionale -, des membres des comités régionaux des aides parmi lesquels siègent le trésorier payeur général et un représentant de la Banque de France, lesquels sont particulièrement bien dotés de moyens pour savoir si une entreprise est bel et bien contrôlée par un groupe, et enfin du préfet et du contrôleur financier local. Les inspections n'ont révélé des problèmes de ce type que dans une seule région, l'île de la Réunion.

Le FIL est un fonds spécial, créé en réponse aux difficultés particulières de la Lorraine. L'aide est instruite et décidée par les services du préfet de région, afin de soutenir des projets créateurs d'emploi ou correspondant à un maintien d'emplois.

Les interventions ont considérablement varié dans le temps : après avoir été très importantes, elles sont aujourd'hui relativement faibles. Ainsi, en 1996, 34 millions de crédits ont été consacrés à ce fonds, 91 millions en 1997, et 25 millions en 1998. Elles sont fortement dépendantes de la mise en oeuvre de projets importants.

Durant les trois dernières années, un groupe norvégien de Golbey, de 3 000 personnes a obtenu 30 millions pour un projet créateur de 150 emplois. Un groupe italien de papeterie, quant à lui, a obtenu 20 millions pour un projet créateur de 221 emplois.

M. le Rapporteur : Je suis en train de faire un rapide calcul. 30 millions de francs ont été attribués à un groupe norvégien ayant créé 150 emplois, ce qui représente 200 000 francs par emploi... Je me prends à rêver à un fonds de réindustrialisation de la région havraise...

M. Jean-Luc VO VAN QUI (DARPMI) : Mon service n'est en rien responsable de l'exécution de ce dispositif.

Le groupe CGTEl a reçu 5 millions pour la création de 350 emplois, Garnier Thibault, 4 millions pour la création de 15 emplois, et la filature de Cheniménile, 4 millions pour le maintien de 259 emplois, le groupe Transalliance, pour la logistique, 4 millions pour la création de 107 emplois, et le groupe textile Thirion, 3,8 millions pour la création de 40 emplois.

M. le Rapporteur : Pourriez-vous nous communiquer la liste des dix plus gros bénéficiaires de cette véritable « mine d'or ».

M. Jean-Luc VO VAN QUI (DARPMI) : Oui.

M. le Rapporteur : La DATAR intervient-elle dans le dispositif ?

M. Jean-Luc VO VAN QUI (DARPMI) : Mon service n'est pas appelé à intervenir dans ce dossier. Mme le préfet de Lorraine traite de cette affaire.

M. le Rapporteur : Quel est le service qui est chargé d'instruire ce dispositif ?

M. Jean-Luc VO VAN QUI (DARPMI) : Le secrétariat général aux affaires régionales de la préfecture de Lorraine.

M. Alain de COINTET de FILLAIN (DREE) : Deux types d'aides peuvent être distingués : les aides à l'exportation - essentiellement les garanties de la COFACE - et les aides mises en oeuvre sur la base de financements publics - les prêts et les dons du Trésor, pour l'essentiel.

S'agissant des garanties délivrées par l'Etat, le système français est comparable à celui des différents pays de l'OCDE. L'État couvre, au travers de la COFACE, les risques pris par les entreprises, pour l'exécution de marchés à l'étranger, et par les banques, pour les financements mis à la disposition d'emprunteurs étrangers, afin de permettre la réalisation des projets. Ces garanties sont mises en jeu pour des entreprises dont le contrat est interrompu, comme cela s'est passé au moment de la révolution en Iran, par exemple. La COFACE indemnisera alors directement les entreprises.

Cette garantie est mise en jeu de manière beaucoup plus fréquente au travers de la garantie délivrée aux banques, afin de financer le contrat que réalise l'entreprise française à l'étranger. Les financements sont d'une durée assez longue, et le sinistre survient lorsque, souvent, plusieurs années après que la décision a été prise, le pays rencontre des difficultés de paiement - ce qu'on appelle, dans les pays en voie de développement, la crise de la dette.

Les dépenses ne surviennent pas de manière linéaire, et, au cours des trois dernières années, l'assurance-crédit a dégagé un résultat positif de plusieurs milliards de francs, reversé au budget de l'Etat, après avoir connu, pendant une période d'une quinzaine d'années, des déficits d'une grande ampleur.

Les critères de décision sont essentiellement de type financier, d'analyse des risques, et les garanties sont apportées aux entreprises après la réalisation d'une analyse du risque du pays qui sera l'emprunteur. Les interventions d'État peuvent donc plutôt se mesurer en termes de montants de garanties qui sont délivrées, plutôt qu'en termes de coût de la procédure pour l'Etat.

Le deuxième chapitre d'intervention concerne les prêts et les dons du Trésor.

Le système a évolué de manière importante durant les dernières années.

Les prêts du Trésor à des Etats étrangers sont engagés dans le cadre de notre aide publique au développement en faveur des pays en voie de développement, avec lesquels nous avons des relations assez intenses. Il s'agit de prêts à des conditions préférentielles, puisqu'ils ont une durée très longue et se font à des taux d'intérêt très favorables.

Au moment où ils sont consentis, ils apportent un avantage important au pays emprunteur. Les dépenses budgétaires s'élevaient à 1,8 milliards de francs en 1998. Globalement, lorsqu'on examine les flux de remboursement et les flux de paiement, le compte spécial du Trésor est aujourd'hui à peu près équilibré, et nos volumes de prêts sont très inférieurs à ce qu'ils étaient il y a une dizaine d'années.

Les prêts du Trésor sont utilisés dans le cadre de l'aide au développement, pour appuyer nos entreprises, afin de leur permettre d'acquérir des positions dans des pays à fort potentiel de développement. Jadis, nous avions une approche par pays, et près de vingt cinq pays étaient éligibles à ces financements. Aujourd'hui, nous mettons en avant une approche différente, avec des enveloppes financières qui ont été très fortement réduites au fil des années : il s'agit désormais de mettre les projets en concurrence, et d'allouer nos financements à la destination d'une quinzaine de pays éligibles, sur la base d'une décision du ministre des Finances, au cas par cas, en s'appuyant sur un avis donné par un comité interministériel, et qui apprécie les retombées que peuvent attendre nos entreprises.

J'en viens aux dons d'aide extérieure.

Historiquement, ils servaient à financer essentiellement le même type d'intervention, mais dans les pays les plus pauvres, à l'égard desquels notre aide était plus généreuse. Aujourd'hui, nous avons totalement changé le système. Nous disposons désormais d'un mécanisme qui permet de financer des études - essentiellement de faisabilité -, pour des projets qui pourraient être réalisés par des entreprises françaises à l'étranger. Ces financements sont apportés aux entreprises françaises, dans 80 % des cas sous forme d'avances remboursables.

Ainsi, en deux ans, 460 millions de francs ont été engagés pour 175 projets, dans une cinquantaine de pays.

Les montants d'aide par projet n'excèdent pas 5 millions de francs, en règle générale.

M. le Rapporteur : Où cela figure-t-il dans le budget ?

M. Alain de COINTET de FILLAIN (DREE) : L'intervention la plus importante pour les entreprises - les garanties de contrats ou de prêts -, est réalisée au travers du budget des charges communes, et relève donc du titre I.

M. Christian BADAUT (DIGITIP) : Les programmes d'aides spécifiquement gérés par la direction générale à l'Industrie, les Technologies de l'Information et la Poste (DiGITIP) sont dirigés vers la recherche et le développement industriel pré-compétitif, conformément aux dispositions de la Commission européenne. Ces programmes, en effet, sont autorisés par un encadrement communautaire datant de 1986.

Dans ce cadre, nous avons obtenu une autorisation de la Commission pour deux grands programmes : un programme dit « grands projets innovants » (GPI), datant de 1989, et un second dit « filières électroniques » dont l'autorisation date de 1986.

Ces deux programmes sont déclinés en actions spécifiques, évoluant au fur et à mesure des progrès technologiques afin de conserver leur effet d'incitativité, sans que le cadre des interventions financières défini en 1986 et 1989 ait été modifié, en particulier la nature des aides, le taux d'intervention et les critères d'attribution.

Les aides de la DiGITIP se répartissent en 400 millions de francs affectés aux Grands Projets Innovants et 1,2 milliards de francs affectés à la Filière Electronique.

Les grands projets innovants concernent des technologies « clés », lesquelles sont recensées dans une étude que notre ministère a publié en 1995, date à laquelle nous avons rénové nos projets. Elle recense tous les domaines industriels critiques où la France devrait se positionner.

Les projets aidés ont été menés par de grandes entreprises ou par des PMI. Ces entreprises peuvent travailler en collaboration avec d'autres entreprises ou des laboratoires publics. Les aides sont attribuées sous forme d'avances remboursables en cas de succès, transformées en subventions en cas d'échec.

Les dépenses éligibles sont des dépenses de personnel supplémentaire affecté à la recherche, pour un projet précis et les équipements nécessaires au projet de recherche.

Pour la filière électronique, un plafond de 50 % est mis en place. Pour les grands projets innovants, le plafond s'élève à 30 %, pouvant être porté à 40 % si la recherche s'effectue sous forme coopérative, en associant plusieurs entreprises.

Le document que je vous ai remis comprend la liste des programmes correspondant à ces deux grandes rubriques. Les grands projets innovants se limitent aux appels à proposition sur les technologies clés, alors que les filières électroniques concernent notamment les programmes relatifs à la société de l'information, les programmes de recherche en télécommunication, le programme de soutien à la recherche développement de l'ex SGS-Thomson, à quoi s'ajoute toute une série de nouveaux programmes menées dans le cadre d'Eurêka et qui concernent pour l'essentiel les composants micro-électroniques et autres technologies liées à l'information et à la communication.

Depuis 1989, les seuls nouveaux programmes que nous avons notifiés à la Commission concerne tout ce qui relève de la quote-part française du financement d'actions Eurêka, de manière à ne pas avoir de difficultés au plan communautaire.

Par an, nous aidons en moyenne entre 200 et 250 entreprises. Notre budget s'élève à environ 1,650 milliards, contre 1,950 milliards en 1996.

En cumulant les aides accordées depuis 1991 jusqu'à aujourd'hui, 19 milliards d'aides ont été attribués à des actions concernant ce type de recherches industrielles, dont 12 milliards pour les grandes entreprises, soit un peu plus de 60 %, dont 50 % attribués à Thomson, et 15 % pour Bull.

Les aides accordées à Bull sont en décroissance forte, puisqu'elles passent de 500 à 100 millions. Les différentes composantes de Thomson Multimédia ou de Thomson CSF passent de 500 à 170 millions. La seule intervention qui demeure constante concerne SGS-Thomson, dont la raison sociale est désormais STMicroelectronics ; cette permanence répond à une double logique : d'une part, les efforts de recherche industrielle de cette société dans le domaine de la micro-électronique s'inscrivent parmi les grandes priorités technologiques de la DiGITIP, telles qu'elles ont été redéfinies en 1995, d'autre part, le soutien de l'État a été contractualisé dans le cadre d'un programme pluriannuel.

SGS-Thomson concerne l'essentiel de sa recherche micro-électronique en France, bien qu'elle ait des activités de production à l'étranger, en Italie et à Malte. Depuis 1992, cette société a créé 2000 emplois de recherche en France et devrait réaliser, au cours de la période 1998-2002, 11 milliards de francs de dépenses de recherche et développement en France. Grâce au succès de ses travaux de recherche industrielle, STMicroelectronics a comblé la plus grande partie de son retard technologique et se situe aujourd'hui au 9ème rang mondial dans son secteur.

M. le Rapporteur : Thomson et Bull sont donc les principaux bénéficiaires des aides.

M. Christian BADAUT (DIGITIP) : Oui, mais la tendance est à la décroissance, et sur les 1,650 milliards, 350 millions sont affectés à SGS-Thomson, dans le cadre d'un projet individuel d'aide, notifié et autorisé par la Commission de Bruxelles. Il s'agit d'un programme de recherches mené en coopération avec des PMI, de plus grandes entreprises, ainsi que des laboratoires publics. C'est pourquoi la Commission a reconnu la conformité de ce programme à son cadre.

M. Lionel TOUTAIN (DIGEC) : La direction du Gaz, de l'Electricité et du Charbon supervise et répartit les crédits du fonds d'industrialisation des bassins miniers (FIBM), créé en 1984, de façon à accompagner la reconversion des régions minières et charbonnières.

Les crédits du FIBM sont inscrits sur une ligne budgétaire du secrétariat d'État à l'Industrie, pour la dernière fois cette année. L'an prochain, une ligne budgétaire du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie sera mise en place.

La DiGEC répartit les crédits entre les onze régions charbonnières dont les mines sont encore en activité, ou ont fermé depuis moins de dix ans. Une fois répartis, les crédits sont gérés au niveau des préfets, en liaison très étroite avec le groupe Charbonnages de France, et en particulier avec ses sociétés de conversion : SOFIREM et FINORPA.

Le FIBM n'a pas pour vocation d'accorder une aide directe aux entreprises. Il accompagne la création d'un environnement susceptible d'attirer des entreprises. Cela ne signifie pas que l'on s'interdise les subventions directes, mais en général, il ne s'agit pas d'aides aux entreprises : nous aidons plutôt des districts à aménager des zones industrielles, par exemple.

Certaines aides sont toutefois exceptionnellement attribuées aux entreprises. Je pense, en particulier, à SGS-Thomson qui a été aidé à deux reprises pour mettre en place des usines en Provence et qui a bénéficié à deux reprises de 30 millions pour créer 770 emplois. Cela dit, lorsque nous aidons des entreprises, il s'agit en général de petites entreprises pour lesquellesnous mettons en place des aides à la création d'entreprise.

Le FIBM peut également intervenir sur des actions de formation et de recherches, de façon à attirer des emplois dans des zones minières. Il soutient les écoles des mines de Douai ou d'Albie. L'an prochain, il interviendra à Gardanne de façon à créer des BTS liés à la fin de l'extraction minière, et à lancer la ré-industrialisation de Gardanne dans le domaine de l'électricité.

Quant aux montants, ils sont en décroissance constante, et l'objectif est qu'un jour, il n'y en ai plus. Comme on compte de moins en moins de mineurs, nous avons de moins en moins de suppressions d'emplois à accompagner. Je vous rappelle que dans les années 1960, 220 000 mineurs travaillaient. Aujourd'hui, il n'y en a plus que 10 000.

En 1997, nos crédits s'élevaient à 160 millions ; en 1998, à 143 millions, et 120 millions sont inscrits au budget pour 1999.

Quels sont les mécanismes qui nous permettent de mesurer l'incidence de l'aide versée ?

Nos mécanismes comprennent un suivi local et un suivi national.

S'agissant du suivi local, chaque préfet envoie en principe en fin d'année un rapport sur l'utilisation des crédits et sur l'incidence en terme de créations d'emploi, rapport adressé au secrétariat d'État à l'Industrie. Depuis 1995, le Conseil général des mines est chargé d'assurer un suivi continu, au travers d'audits réalisés sur un bassin minier donné.

M. le Rapporteur : Quelle part d'aides bénéficie directement aux entreprises ?

M. Lionel TOUTAIN (DIGEC) : Lorsqu'une aide directe est mise en place pour une entreprise ?

M. le Rapporteur : C'est toujours via la collectivité, j'imagine.

M. Lionel TOUTAIN (DIGEC) : Pas toujours, bien que l'on s'y efforce. Quelquefois, le projet est trop important pour qu'une collectivité en soit le support.

Cela dit, les aides aux entreprises restent exceptionnelles, car on s'efforce d'aider des collectivités ou des sociétés d'aménagement.

M. Pierre POUESSEL (Restructurations de défense) : Le fonds pour les restructurations de la Défense (FRED) a été créé en 1992, à l'initiative de M. Pierre Joxe, lorsqu'il était ministre de la Défense. Il vise à concourir au redéveloppement des bassins d'emploi affectés par les restructurations de notre appareil de défense et des industries qui lui sont associées.

Les crédits du FRED sont inscrits en titre VI, au chapitre 66-50, article 40 du budget du ministère de la Défense. Les modalités d'emploi de ces crédits sont régis par une circulaire du 27 mai 1997.

Pour l'essentiel, le FRED peut contribuer au financement de deux grands types d'actions.

Premièrement, des actions collectives, visant à renforcer le tissu économique local, ou à concourir à la réhabilitation de friches militaires. Les dix plus grosses opérations subventionnées sont donc des actions collectives.

Deuxièmement, l'aide aux PME-PMI, soit, au sens de la Commission de Bruxelles, des entreprises de moins de 250 salariés, dont le chiffre d'affaires est inférieur à 260 millions de francs. Nous intervenons pour des aides à l'investissement ou pour des aides à la création d'emplois, à raison de 21 000 francs par emploi créé.

Il reste que dans la circulaire du 27 mai 1997, nous avons prévu une possibilité d'intervenir en direction d'entreprises plus importantes, de grands groupes. Mais cette possibilité est très encadrée, puisqu'elle ne peut intervenir qu'à hauteur de 10 % du montant des autorisations de programme annuelles, et en complément d'une aide publique. Nous avons déjà traité dix dossiers de ce type : huit concernaient des compléments apportés à la prime d'aménagement du territoire, pour lesquels nous sommes intervenus sous la forme d'aides à la création d'emplois. Les aides accordées pour l'ensemble de ces dix dossiers se sont élevées à 8 millions de francs.

S'agissant du montant du FRED, il s'élevait de 1992 à 1996, à environ 100 millions de francs par an. La loi de programmation a prévu de 1996 à 2002, une enveloppe de 950 millions de francs. En 1999, nous disposons d'un montant d'autorisations de programme et de crédits de paiement de 202 millions de francs.

S'agissant de l'évaluation, l'ensemble du dispositif est largement déconcentré. Les demandes sont formulées auprès des préfets qui réunissent une commission locale comprenant les services de l'État concernés. Les dossiers nous sont ensuite adressés avec l'avis de commission locale. Une commission nationale qui se réunit tous les deux mois examinent les dossiers de subventions supérieures à 500 000 francs. Les crédits sont alors délégués au préfet de département, lequel assure un suivi.

M. le Rapporteur : Vous avez évoqué les services du préfet. De quels services s'agit-il ?

M. Pierre POUESSEL (Restructurations de défense) : Essentiellement les services chargés des aides à l'emploi et ceux de la direction départementale du travail.

M. Stéphane LE MOING (Ministère de l'agriculture) : Les restitutions à l'exportation constituent la seule aide bénéficiant aux grands groupes.

Ces restitutions ont trois caractéristiques. Elles sont d'abord 100 % communautaires, financées en totalité sur le budget du FEOGA-Garantie. Elles s'adressent ensuite à tous types d'entreprises, donc aux grands groupes. Il s'agit d'entreprises de l'agro-alimentaire qui, pour exporter sur le marché mondial, et compte tenu des prix du marché mondial et de leur secteur d'exportation, ont besoin de bénéficier d'une subvention à l'exportation.

La troisième caractéristique me paraît la plus importante par rapport à l'objet d'étude de votre commission. Si les aides sont versées à des entreprises, leur financement vise, en réalité, à soutenir le cours des matières premières agricoles qui, de fait, ne sont pas exportées par les agriculteurs, mais par des entreprises de négoce ou de première transformation.

Les aides sont donc très particulières puisque si elles sont bel et bien destinées aux entreprises, le bénéficiaire réel est l'agriculture française.

Les principaux secteurs concernés sont le sucre, le lait et les céréales, et sans subventions, il est clair que la production communautaire aurait plus de mal à trouver preneur.

Les aides sont gérées dans un cadre très particulier - l'organisation mondiale du commerce -, et ont fait l'objet d'âpres négociations lors de la discussion de l'Uruguay Round. Au demeurant, elles sont strictement encadrées par les accords de Marrakech. La gestion des restitutions fait donc l'objet de plafonds.

S'agissant de l'avenir des aides, le résultat des négociations qui s'engagera à la fin de l'année, sur un nouveau cycle de négociations multilatérales, sera déterminant. Ces restitutions à l'exportation seront la cible principale des Américains, pour lesquels la suppression des subventions à l'exportation constitue une priorité.

M. le Rapporteur : Pour résumer la situation, les aides les plus importantes sont destinées aux groupes.

M. Stéphane LE MOING (Ministère de l'agriculture) : De fait, le système n'est pas discriminant entre grandes et petites entreprises. Exporter des matières premières pour lesquelles il faut compenser la différence entre un prix communautaire et un prix du marché mondial constitue l'unique critère.

M. le Rapporteur : Cela étant, il vaut mieux être riche et en bonne santé, pour être sûr de bénéficier de beaucoup d'aides !

M. Stéphane LE MOING (Ministère de l'agriculture) : Cela dépend beaucoup des secteurs.

Mme Sibylle SLATTERY (Ministère de l'agriculture) : Les aides sont accordées mécaniquement, en fonction des quantités de produits exportés.

M. le Président : J'ai eu l'occasion d'appeler l'attention du ministre de l'agriculture sur l'avenir de l'agriculture méditerranéenne.

Dans le cadre des négociations mondiales, des redistributions dans les montants des aide sont-elles envisagées, entre les secteurs de l'agro-alimentaire, notamment ?

M. Stéphane LE MOING (Ministère de l'agriculture) : Ce n'est pas la problématique sur laquelle la Commission, comme les Etats membres, travaillent. Par contre, un phénomène de redistribution très fort est en cours, mais entre le mécanisme des restitutions et les autres politiques mises en oeuvre pour l'agriculture européenne. Cette évolution va dans le sens que vous souhaitez, dans la mesure où la nouvelle politique agricole commune compte développer les aides au développement rural, qui de fait, bénéficient largement aux régions du sud de la France.

Cette évolution avait déjà été engagée par la précédente réforme de la PAC. La part des restitutions, qui était le coeur du budget agricole dans les années 1960 à 1980, a tendance à diminuer très fortement et ne représente plus qu'une partie minoritaire de dépenses communautaires.

M. le Président : Les restitutions qui se pratiquent dans l'industrie agro-alimentaire pour la transformation des fruits ou la conservation des légumes sont plutôt marginales.

M. Stéphane LE MOING (Ministère de l'agriculture) : Certes, mais historiquement, les restitutions ont été mises en oeuvre pour aider les secteurs qui exportent. Or, le secteur des fruits et légumes est d'abord dirigé vers le marché national. Il ne s'agit pas d'un secteur relevant de la grande exportation. Encore une fois, les restitutions constituent un outil pour exporter sur les marchés tiers, ce qui concerne essentiellement les céréales et le sucre, les produits laitiers et la viande bovine.

Je vous rappelle que le secteur de la viticulture bénéficie lui aussi de très peu d'aides, et il se porte plutôt bien...

Mme Sibylle SLATTERY (Ministère de l'agriculture) : S'agissant de la viticulture, seuls les vins de table bénéficient de restitution. Or, comme la France en exporte très peu, ce sont surtout les Espagnols et les Italiens qui touchent des restitutions à l'exportation. Cela dit, ces aides restent marginales.

L'idée même de la restitution découle du prix fort que l'on payait au producteur pour maintenir son revenu à un niveau rémunérateur. La politique agricole commune, mise en place il y a trente ans entendait favoriser le producteur, en rémunérant ses produits à un prix élevé. Pour exporter, il fallait compenser ce prix fort, vis à vis de l'exportateur.

M. Bruno DEPRESLE (Direction du tourisme) : S'agissant de la formation et de la démarche qualité, les aides sont uniquement destinées à des associations : des organismes de formation ou des structures qui rassemblent des organismes locaux de tourisme, des structures de normalisation, des fédérations professionnelles ou encore des chambres consulaires. Si les aides bénéficient à des associations, les bénéficiaires ultimes sont les petites entreprises ou l'ensemble d'une profession, mais jamais un grand groupe ou une grande entreprise.

Le montant des aides vous est indiqué dans le dossier que je vous ai communiqué, et je n'y reviens pas. Vous pouvez constater que la part du fonds social européen est significative.

Au-delà des aides accordées au titre de la formation et de la démarche qualité, on peut distinguer les aides de l'administration centrale, et les aides consenties dans le cadre des contrats des plans Etat-région.

L'administration intervient dans le cadre des titres IV et VI.

Le titre IV concerne essentiellement les aides aux associations de tourisme, dans le cadre de conventions signées avec les associations. Le montant des aides s'élève à 7 millions par an.

Pour mémoire, la direction du tourisme a participé jusqu'en 1996 à des audits demandés par des entreprises confrontés aux problèmes de la restructuration de leurs dettes. Car, à partir de 1993, de nombreuses petites entreprises de l'hôtellerie ont été confrontées à de graves difficultés. Nous avons donc mis en place un fonds de garantie à la SOFARIS, doté de 30 millions en 1995, lui permettant ainsi d'apporter une garantie aux banquiers. Jusqu'en 1996, nous avions accompagné ce dispositif d'une contribution à des audits que pouvaient demander des petits hôtels, lesquels n'avaient pas obtenu la restructuration demandée auprès de leur banquier. Le système n'a pas marché : nous l'avons donc abandonné.

Le titre VI concerne des aides accordées aux associations de tourisme, regroupant des villages de vacances et, dans une moindre mesure, les auberges de jeunesse. Les aides sont dispensées dans le cadre du programme de rénovation du patrimoine des associations de tourisme, qui a été sollicité depuis 1990 pour un montant de 200 millions de francs.

Dans la sélection des dossiers pouvant bénéficier de ce plan patrimoine, le critère de l'aménagement du territoire est important.

Les contrats de plan sont également inscrits à notre budget. Pour le XIième plan, en incluant le fonds national d'aménagement et de développement du territoire, pour sa partie contractualisée, la dotation s'élevait à 330 millions sur six ans. Les aides sont surtout dirigées vers les projets en maîtrise d'ouvrage publique, dans une moindre mesure, à des projets de PME. Depuis 1997, nous avons lancé une étude avec la Caisse des dépôts et consignations, afin de mieux connaître le financement de l'économie touristique, à la fois privé et public. Une première version de cette étude a été publiée en février 1998 et permet d'avoir une vision très précise des crédits européens - 550 millions pour 1995. L'estimation de la totalité des financements publics s'élève à 2,5 milliards par an - un tiers pour l'Europe et l'Etat, un tiers pour les régions, un tiers pour les départements.

Une seconde version de cette étude devrait être publiée prochainement. Il s'agit d'un travail de longue haleine qui nous permettra de répondre aux demandes de la Commission européenne sur les aides publiques du tourisme.

Nos méthodes d'évaluation sont rappelées dans le dossier que je vous ai remis. Selon les cas, il existe des comités de suivi nationaux ou locaux.

Les missions d'évaluation économique et financière instituées en 1995 permettent, par ailleurs, d'évaluer a priori la pertinence de tel ou tel projet.

(1) s'agissant non d'une réunion pleinière de la Commission mais d'une réunion de travail entre le rapporteur et les représentants des diverses administrations attributrices d'aides, le président a considéré que la formule de prestation de serment ne s'imposait pas.

ANNEXE

Les dispositifs d'aide aux entreprises dans les Etats membres de
l'Union européenne

A. Les aides au niveau national occupent une place importante dans tous les États membres

1.- Les pays à compétence économique répartie

Le cadre fédéral de sa loi fondamentale fait de l'Allemagne l'archétype de ce modèle : l'État fédéral n'a que des compétences d'attribution parmi lesquelles ne figure rien qui se rapporte aux interventions économiques. Il se contente d'accorder des prêts bonifiés pour certains types de projets précis : PME, création d'entreprises, environnement, innovation, recherche. Ces programmes sont gérés par des établissements publics sous tutelle du ministère fédéral de l'économie. Il intervient aussi en coopération avec les Länder dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire et pour garantir certains prêts aux PME. Il n'exerce un contrôle sur les interventions économiques des Länder que lorsqu'il est impliqué financièrement et seulement pour préserver ses propres intérêts.

En Belgique, la fédéralisation achevée en 1993 a conduit au transfert de nombreuses compétences du pouvoir central vers les Communautés linguistiques et les Régions. Dans le domaine économique et social, l'État fédéral ne conserve que quelques compétences en matière de sécurité sociale et de droit du travail. Il intervient également pour l'octroi de garanties à l'exportation et au niveau de la fiscalité des entreprises, essentiellement par des allégements fiscaux : encouragement au renforcement des fonds propres, déductions pour investissement, report d'imposition...

C'est dans le contexte difficile de l'après-guerre que l'État fédéral autrichien a conçu des programmes d'aides à la création et au développement d'entreprises. Appelé à nationaliser des secteurs industriels entiers, il a constaté le désavantage global de compétitivité des PME par rapport aux grandes entreprises publiques comme privées. Des programmes d'aides ont été lancés, axés sur le concept général d'amélioration des structures industrielles (Gewerbestrukturverbesserung). Ils ont ensuite été différenciés pour répondre à des besoins plus spécifiques des entreprises en matière de modernisation de leur appareil productif, d'investissement en recherche et développement, d'internationalisation. Trois grands établissements publics interviennent pour garantir ou bonifier les prêts accordés par les banques commerciales.

L'État espagnol étant hybride, ni unitaire ni fédéral, il partage un grand nombre de compétences avec les dix-sept communautés autonomes. Il dispose d'un certain nombre d'instruments d'aides à l'emploi et au développement et des aides sectorielles. Les aides régionalisées à l'investissement accordées par le ministère de l'Economie et des Finances ont été redéfinies conformément aux normes communautaires par la loi cadre de 1985 « Ley de Incentivos Regionales », dite LIR. Elle met en place trois types d'aides : des subventions à fonds perdus destinées à financer une partie de l'investissement, une bonification du taux d'intérêt des prêts et une réduction des charges sociales. S'ajoutent à ce programme des aides financées par le fonds de compensation inter-territorial et les aides du « Programme de coopération économique local de l'État ». Quant aux aides sectorielles, elles sont gérées par les ministères techniques correspondants : le ministère du Travail pour les aides favorisant l'embauche de chômeurs et le ministère de l'Industrie pour les aides à l'industrie textile, au développement des biotechnologies et des technologies chimiques, et les aides pour le secteur minier. Les ministères de l'Economie et des Finances et de l'Agriculture disposent aussi d'un certain nombre de dispositifs.

L'État italien propose un grand nombre de mécanismes d'aide au niveau national, relevant de lois parfois plus que trentenaires parfois très récentes, qui visent essentiellement deux objectifs : le soutien à l'investissement d'une part, le développement des efforts de recherche et développement d'autre part. L'investissement est particulièrement aidé dans les zones en difficultés : les subventions nationales sont alors complétées par des aides communautaires ou locales ; pour le reste du pays, ce sont surtout les PME, particulièrement nombreuses et dynamiques en Italie, qui sont l'objet d'aides publiques. Ce sont elles aussi dont l'effort de recherche et développement est favorisé par le financement d'un Fonds pour la recherche appliquée et par des crédits d'impôt.

2.- Les pays à compétence économique concentrée

Au Royaume-Uni, où la forte différenciation entre les régions que forment les quatre « nations » contraste avec le forte centralisation de la politique publique, la conception et la mise en _uvre de la politique d'aide aux entreprises relèvent soit directement de l'administration gouvernementale, soit des agences parapubliques, les quangos. L'action du gouvernement en matière d'aide aux entreprises et celle des trois ministères principalement impliqués dans la politique régionale s'exécutent de trois manières : le financement direct de programmes nationaux de développement économique par le Department of Trade and Industry et le Department of the Environment, Transport and the Regions, le financement d'organisations régionales intermédiaires de type parapublic dédiées au développement économique, comme l'English Partnership en Angleterre ou le Scottish Enterprise en Ecosse, et la création de diverses mesures incitatives destinées soit à des catégories d'entreprises (comme les PME), soit à des secteurs d'activité (comme la haute technologie).

L'action de l'État néerlandais est relayée par les Sociétés de Développement Régional, créées par le ministère des Affaires économiques il y a une vingtaine d'années. Initialement conçues pour maintenir l'emploi dans les régions affectées par la fermeture des mines et des usines de textile, elles ont désormais pour principal objectif de développer les activités économiques de substitution aux secteurs en déclin, dans les régions où elles opèrent, en aidant au financement des investissements tant étrangers que locaux.

Les interventions directes de l'État relèvent pour leur part de deux orientations : le soutien aux PME, par le ministère de l'économie, et la négociation de rulings, c'est-à-dire d'accords négociés, dans le domaine fiscal. Ce sont surtout ces derniers qui concernent les groupes. Elaborés par deux brigades placées sous la tutelle du ministère des Finances, ils peuvent être de plusieurs types : dans le cadre de la participation-exemption propre au régime fiscal des sociétés mères et filiales, un ruling peut ajouter à l'exonération des dividendes la possibilité de faire échapper à l'impôt sur les sociétés les plus-values sur participations substantielles ; dans le cas de la succursale étrangère d'une société néerlandaise, un ruling prévoit une certaine répartition du profit de l'activité de financement ; les services intra-groupes peuvent être rémunérés selon la méthode du coût de revient majoré ou du prix de revente... Ces accords, valables pendant quatre ans renouvelables, ont une valeur contraignante pour l'administration : ils permettent de prévenir les conflits et de garantir à l'entreprise les avantages et règles spécifiques ainsi élaborés. 5 500 entreprises filiales de groupes internationaux ont conclu un ruling, dont 60% en matière de participation-exemption. L'État fédéral détient ainsi une capacité d'action considérable pour faciliter l'implantation de grands groupes. Ce dispositif est actuellement l'objet de l'attention de la Commission européenne dans le cadre de son analyse des mesures fiscales susceptibles d'être considérées comme « trop » compétitives et non cohérentes avec les objectifs de l'Union. Monsieur Vanden Abeele, directeur de la DG XXI, chargée de la fiscalité et des questions douanières, a expliqué au cours de son audition que « leur système relatif aux holdings crée des conditions de concurrence fiscale telles qu'elles expliquent des mouvements, soit de création de holdings artificielles, soit de création d'entreprises aux Pays-Bas, au détriment de la création d'entreprises dans d'autres pays ».

En Finlande, c'est aussi l'État qui établit des dispositifs d'aides ciblés principalement sur la recherche, le développement de produits, la formation et l'amélioration à long terme de la compétitivité des PME. Sur le terrain, quinze centres régionaux pour l'emploi et le développement, services déconcentrés de l'État, promeuvent l'emploi au niveau local. Le ministère du Travail s'appuie en outre sur quelques grands programmes destinés à inciter à la création d'emplois. Enfin, le programme des Centres d'expertise, coordonné par le ministère de l'Intérieur, vise à améliorer la compétitivité des régions, à partir de pôles de haute technologie. Plusieurs administrations d'État sont ainsi en charge de dispositifs d'aides nationales aux entreprises.

L'État irlandais a en revanche recours à trois agences publiques dotées de compétences complémentaires : l'Industrial development Agency (IDA), Forbairt et le FAS (équivalent de l'ANPE) dans une moindre mesure. La première est sous la tutelle du ministère de l'Industrie et du Commerce, devenu ministère de l'Entreprise, du Commerce et de l'Emploi ; Forbairt dépend du second. Alors que le rôle de Forbairt est concentré sur les PME, l'IDA est chargée des activités de promotion et de prospection des entreprises à capitaux étrangers. Elle offre une assistance sous forme d'allégements fiscaux et d'aides financières. Les premiers consistent en une réduction à 10% de l'impôt sur les société, une exemption d'impôts locaux et une double déduction des frais de loyer pendant dix ans, l'accélération de l'amortissement des acquisitions de bâtiments et équipements neufs, une réduction des impôts locaux de deux tiers pendant dix ans, tous ces allégements, sauf le premier, étant réservés aux entreprises établies dans certaines zones. Les aides financières sont dépourvues de condition de localisation : il s'agit de subventions en capital, de subventions pour formation du personnel, pour l'emploi, à la recherche et au développement, pour étude de faisabilité. D'autres aides financières sont octroyées au niveau régional par des agences mandatées par l'État mais à compétence locale : la Shannon Free Airport Development Company et la Udaras Na Gaeltachta.

Ce n'est donc pas parce que les aides sont plus centralisées que les dispositifs sont plus simples et lisibles : les entreprises ont toujours plusieurs interlocuteurs. Le contrôle du volume des aides devrait en revanche être facilité par l'unicité de la source de financement, et la légalité mieux respectée.

B. Les interventions économiques des collectivités locales posent des problèmes spécifiques

1.- Les pays à compétence économique répartie

Alors que l'État fédéral allemand fixe les règles générales et conduit quelques interventions économiques ciblées, les Länder sont placés au c_ur de l'action et disposent d'une très grande liberté d'initiative.

Ils peuvent ainsi créer à leur guise, généralement sous forme de sociétés commerciales, parfois sans autre apport financier que le leur et en en prenant la pleine responsabilité, des organes aux objectifs variés : promotion de produits ou de zones, recherche d'implantation d'entreprises étrangères, soutien aux entreprises locales ou aux créations d'entreprises nouvelles, prises de participation en capital, distribution de prêts, bonifications d'intérêts, caution, capital-risque, réalisation d'équipements.... Les Länder prennent à leur charge 41% du total des subventions selon les sources officielles, ce qui traduit une progression de leur contribution par rapport à celle de l'État fédéral : cette évolution s'explique par les contraintes plus fortes que subissent les gouvernements régionaux, par la politique de rigueur que souhaite afficher le gouvernement fédéral ou par l'effet d'éviction produit par le contrôle communautaire des aides d'État obligeant les pouvoirs publics à se replier sur des procédures plus décentralisées et moins voyantes. Dans la mesure où le niveau élevé des aides des Länder correspond à une telle stratégie, les contrôles de l'État fédéral ne peuvent être que légers.

Pour ce qui est des échelons infra-Länder, les régions dans certaines zones et surtout les communes, leur rôle est variable. A l'Est, ils sont faibles et ont trop de difficultés à assurer le fonctionnement normal des services publics élémentaires pour y ajouter des actions économiques risquées. A l'Ouest, la densité démographique et urbaine permet à un certain nombre de capitales régionales d'affirmer des politiques économiques fortes. Dans tous les cas, ces efforts ne peuvent se concrétiser qu'en s'intégrant dans la politique économique du Land. Les évaluations établissent la part des aides financées par les communes à 3% du total.

Parmi les autres pays à compétence économique répartie, la situation belge est singulière. Dans le cadre de la fédéralisation achevée en 1993, les trois régions exercent une responsabilité à peu près totale en matière économique, chacune prenant ses décisions de manière indépendante.

En Autriche, les Länder ont une marge de man_uvre suffisante pour mettre en place des programmes très ciblés, axés notamment sur la recherche, les transferts de technologie, l'environnement, le commerce extérieur... Les responsabilités des collectivités locales ont été accentuées par l'importance croissante de la politique d'aménagement du territoire. Les modalités d'intervention des Länder et des organismes qui leur sont associés sont variées : subventions, bonification d'intérêt, octroi de prêts, de garanties, de prises de participation.

La situation espagnole est particulièrement complexe dans la mesure où les différentes composantes de l'État n'ont pas le même degré d'autonomie, ni le même niveau de développement. La Catalogne et le Pays Basque dispose d'une large autonomie et de gros moyens financiers propres. Ils possèdent ainsi des réseaux souvent très complexes associant la région aux grandes villes et aux regroupements de communes rurales, afin d'organiser les aides aux entreprises. D'une manière générale, l'ensemble des Communautés autonomes mène une politique de lutte pour l'emploi reposant sur la mise en place de centres de formation en alternance, la création de cellules de recherche et développement destinées à la mise en adéquation des compétences aux techniques modernes et aux nouvelles technologies, le versement de subventions à la création d'entreprises individuelles. Les municipalités, étant donnés leurs compétences limitées et leur budget restreint, peuvent au mieux intervenir par la mise à disposition de terrains, des facilités concernant les autorisations de construction, l'aménagement d'infrastructures.

Les régions et communes italiennes jouent un rôle important dans le domaine économique aux côté de l'État. Comme en Espagne, les régions qui interviennent le plus dans le domaine économique sont les régions les plus développées, même si elles ne disposent pas de compétences élargies, contrairement à la Sardaigne et la Sicile. L'État, toujours soucieux de travailler à la réduction de l'écart entre le Nord et le Sud, compense les initiatives locales du Nord en accordant un intérêt prioritaire au régions du Sud. Dans tous les cas, les actes des conseils régionaux doivent se situer dans le cadre législatif national. En outre, une conférence États-régions réunit périodiquement, autour du président du Conseil, des présidents de régions et de provinces autonomes. Les décisions des régions sont soumises à un contrôle de légalité de la part du gouvernement ou de son représentant. Elles disposent d'un budget de 550 millions de francs, dont 6,6% sont consacrés aux aides aux entreprises, et chacune possède son propre dispositif d'aides et ses propres intermédiaires administratifs.

D'une manière générale, on constate que dans les États européens où la compétence économique est répartie, un niveau est particulièrement privilégié, celui des régions, qui comptent entre deux et dix millions d'habitants. L'État joue essentiellement trois rôles : il assure la péréquation financière au profit des régions les plus défavorisées, il entretient des relations directes et permanentes avec l'Union européenne, il effectue une régulation générale pour éviter surenchères ruineuses et prises de risques excessifs.

2.- Les pays à compétence économique concentrée

Dans les pays à compétence économique concentrée, parmi lesquels figurent le Royaume-Uni mais aussi l'ensemble des pays du Nord et les pays les plus pauvres (Portugal et Grèce), les seuls fonds susceptibles de favoriser les projets des entreprises sont en principe inscrits au budget de l'État. Les collectivités locales n'ont qu'une capacité d'action limitée : d'une part, leurs finances ne leur permettent pas, sauf pour les grandes villes, d'intervenir en matière économique (Portugal, Grèce, Irlande, Pays-Bas) ; d'autre part, la loi limite leur droit d'intervenir dans le financement d'aides aux entreprises (Portugal, Grèce, Finlande, Danemark, Suède, Luxembourg). Cet encadrement n'exclut pas que les collectivités locales puissent néanmoins avoir une certaine influence dans ce domaine sur le terrain.

Au Royaume-Uni, une réforme de l'administration territoriale est en cours depuis plusieurs années : elle vise à substituer au système traditionnel des comtés et districts un niveau unique dit de « district unitaire » constitué soit par une grande ville, soit par un « bassin d'emploi » regroupant une population de 50 000 à 200 000 habitants. Quoi qu'ils disposent d'un conseil élu, ces nouveaux districts ne sont dotés que de marges de man_uvre très faibles, en raison de limitations aussi bien législatives que financières. Ils ne peuvent par exemple pas emprunter sans autorisation préalable. Aussi semble-t-il que ce soit surtout par le biais de l'urbanisme que les collectivités locales sont associées au développement économique de leur territoire. Dans le cadre du « Local Government and Housing Act » de 1989, les grandes villes peuvent acquérir, restaurer et mettre à la disposition des entreprises des friches industrielles ou d'autres terrains, voire des bâtiments, dont elles aident l'acquisition par les entreprises. Mais les sommes en jeu demeurent limitées : dans le budget 1998-1999, l'ensemble des aides à l'investissement directement gérées par les collectivités locales équivaut à 201 millions de livres seulement (soit 1,925 milliards de francs, soit 293,6 millions d'euros).

Dans les autres pays, on retrouve de la même façon la présence des collectivités locales dans le processus d'intervention pour le développement économique sous des formes d'aides indirectes. Elles tentent d'influencer la localisation des entreprises grâce à l'aménagement de parcs industriels et technologiques, et parfois, sans que leur capacité d'action soit précisément établie par la loi, par des prises de participation au capital d'entreprises, des acquisitions de terrain, des constructions de bâtiments industriels avec de larges facilités de paiement, ainsi que par des réductions sur le prix des services publics d'eau et d'électricité.

En Grèce par exemple, les moyens d'intervention des collectivités locales sont limités sur le plan juridique, puisqu'elles ne sont pas autorisées à accorder des aides directes (subventions ou prêts) aux entreprises privées, et sur le plan fiscal, l'essentiel de leurs ressources provenant de dotations d'État ou de fiscalité transférée. Leurs possibilités légales d'action consistent en la création de sociétés municipales ou mixtes chargées de certains services, de structures de formation professionnelle et à développer des zones d'activité économique.

Ainsi, même sans attributions économiques spéciales, les élus locaux ne manquent pas d'exercer leurs attributions générales en vue de s'efforcer de favoriser efficacement le développement économique et la création d'emplois.

Le témoignage de la Direction générale des collectivités locales sur les aides des collectivités territoriales

Audition de Mme Martine LAQUIEZE,
Chef du bureau des interventions économiques et de l'aménagement du territoire à la direction générale des collectivités locales

(extrait du procès-verbal de la séance du 10 février 1999)

Présidence de M.  Alain FABRE-PUJOL, Président

Mme Martine Laquieze est introduite.

M. le Président lui rappelle que les dispositions législatives relatives aux commissions d'enquête lui ont été communiquées. A l'invitation du Président, Mme Martine Laquieze prête serment.

Mme Martine LAQUIEZE : Je compte articuler mon exposé introductif en trois parties.

La première portera sur les enjeux financiers que comportent les aides des collectivités locales aux entreprises, la seconde sur les règles de droit qui régissent ces interventions et la troisième sur les perspectives d'une réforme à propos de laquelle le gouvernement travaille actuellement.

Le premier problème auquel est confronté celui qui étudie les interventions des collectivités locales en faveur des entreprises, c'est la rareté de l'information statistique. Il n'y a qu'une source : l'enquête que réalise chaque année la direction de la Comptabilité Publique à partir des comptes administratifs des collectivités locales qui a, certes, le mérite d'être exhaustive mais qui a également ses limites.

La première est constituée par le retard avec lequel l'information est diffusée puisque, fondés sur les comptes administratifs des collectivités locales, les résultats ne sont connus que deux après la clôture de l'année de gestion : ainsi la dernière enquête dont nous disposons, parue fin 1998, se fonde-t-elle sur les comptes administratifs de 1996 !

La deuxième faiblesse tient aux lacunes de l'échantillon recensé puisque seules sont étudiées les communes de plus de 5 000 habitants lesquelles ne représentent guère que 5 % des 36 000 communes et ne couvrent que 60 % de la population. 40 % de la population et surtout 95 % des communes sont ainsi laissés de côté.

La troisième limite, dont la Cour des Comptes a pris note, tient dans l'imperfection du recensement des aides puisqu'il n'existe pas de nomenclature des interventions économiques et qu'en conséquence la qualification des aides recensées varie en fonction de l'appréciation de chaque comptable.

Au demeurant les aides au logement social sont recensées avec les interventions économiques, recensement dont je ne suis pas persuadée de la pertinence. De même, entrent dans la catégorie des aides directes toutes les aides à l'immobilier d'entreprise ; or, juridiquement ce sont des aides indirectes.

Ces considérations montrent que la seule source disponible n'est malheureusement pas totalement fiable. Ceci dit, elle a le mérite de révéler certaines grandes constantes, notamment la plus importante, la masse financière : le poids des interventions en faveur du secteur privé est, bon an mal an, de l'ordre de 14 milliards de francs.

La structure de ces interventions montre que les communes et leurs groupements représentent 42 % du total. Les régions viennent en deuxième position avec 34 %, et les départements en troisième position avec 24 %.

M. le Président : Est-ce que les sociétés d'économie mixte sont comprises dans les aides des collectivités locales ?

Mme Martine LAQUIEZE : Ce ne sont pas des groupements de communes. Au regard du droit français, les sociétés d'économie mixte sont des organes de droit privé régies par la loi de 1966 sur les sociétés commerciales. Certes, elles dérogent grandement à cette loi par la structure de leur capital qui est majoritairement public, mais elles restent soumises au droit privé et comme tel ne sont absolument pas comptabilisées dans les interventions des collectivités locales.

S'agissant des secteurs aidés, très logiquement la première place est occupée par l'industrie, le commerce et l'artisanat, secteurs d'intervention privilégié des collectivités locales lesquels absorbent 43 % de la masse totale des aides publiques. En seconde position vient le logement qui représente 23 %. L'agriculture arrive en troisième position avec 12 %. Le tourisme se situe à 5% et les BTP à hauteur de 4 %. Mais ces chiffres ne sont pas très stables et varient assez fortement : ainsi, le BTP se situait-il à 8 % en 1995. Les proportions sont donc un peu fluctuantes même si, en gros, les ordres de grandeur sont respectés. S'agissant de la classification des aides entre aides directes et indirectes, les communes et les groupements accordent à peu près 40 % des aides directes, les départements 24 %, et les régions 36 %. Pour les aides indirectes, la prédominance des communes et des groupements est encore plus forte, puisqu'ils accordent 46 % des aides, les départements 23 %, et les régions 31 %.

En fait, près de la moitié des interventions économiques sont le fait des communes et de leurs groupements, ce qui bat en brèche l'idée que les régions exerceraient une sorte de rôle prééminent en matière d'interventions économiques. Ce démenti, qu'apporte l'analyse statistique, mérite d'être d'autant plus d'être noté que le poids des communes est vraisemblablement sous-estimé dans ce recensement puisque celles de moins de 5 000 habitants n'y figurent pas.

Malgré l'importance des chiffres que je viens de citer, je crois bon de rappeler que le montant total des dépenses à finalité économique des collectivités locales représente, selon l'enquête de la Cour des Comptes de 1996, de 1 à 5 % de leurs budgets. C'est donc un poste de dépenses relativement marginal, même si en valeur absolue les sommes sont élevées.

C'est là que s'arrête la pertinence de l'outil statistique, puisqu'on ne mesure pas l'impact de ces financements sur le développement des entreprises et sur leur création. Aucun outil ne permet de recenser de façon systématique au niveau national l'influence de ces interventions. On ne sait chiffrer de façon objective et absolue ni le nombre d'emplois créés, ni la durée de survie des entreprises créées à l'aide de fonds publics.

Ceci tient, pour partie sans doute, à l'absence d'instruments de mesure, mais aussi vraisemblablement à la grande difficulté pratique à mesurer l'efficacité des aides, pour deux raisons essentielles :

1) les facteurs qui pèsent sur la décision d'investir sont multiples,

2) il est très difficile d'évaluer leurs poids respectifs dans la décision finale du chef d'entreprise qui crée ou qui développe une affaire.

Une question revient souvent lorsqu'on évoque l'intervention publique en faveur de la création des entreprises : est-ce efficace ou non ? Elle est très difficile à trancher. Les seuls éléments objectifs sont contenus dans le rapport particulier de la Cour des Comptes de 1996 mais ce rapport se limite à des exemples ponctuels.

Ainsi, les Chambres régionales et la Cour des Comptes font état de la pertinence et de l'efficacité de certaines aides à l'immobilier d'entreprises en Alsace, de l'accompagnement à la création d'entreprises dans l'Isère et le Jura qui seraient une réussite. La réussite de la participation de la Région Midi-Pyrénées à une société de capital investissement est également citée.

Mais des contre-exemples viennent atténuer ce constat. Dans divers départements, les montants engagés ont pu parfois atteindre de 15 à 20 millions de francs, sommes considérables investies malheureusement en pure perte puisqu'aucun emploi ne semble avoir été créé !

Bref, on sait que, dans certains cas, cela peut fonctionner mais il n'y a pas de vérité absolue, ni de réponse très tranchée à la question «est-ce utile ou non ?» Cela dépend du diagnostic préalable et de nombreux autres facteurs et on ne peut pas dire que, dans l'ensemble, ce soit totalement efficace.

Ce premier constat sur les enjeux étant brossé, je rappelle d'un mot le cadre juridique dans lequel se situe l'intervention des collectivités locales. Il se fonde sur deux principes. Le premier est issu du droit communautaire, de l'article 92 du Traité de l'Union Européenne de 1957 qui dispose que sont incompatibles avec le Marché Commun, car faussant la concurrence, toutes les aides attribuées aux entreprises au moyen de ressources dites d'Etat, la Commission entendant ce terme au sens large puisqu'elle y comprend toutes les ressources d'origine publique. C'est donc un principe général d'interdiction, sauf dérogation ou exception admise dans certains cas.

Le second principe, de droit interne, est celui de la liberté du commerce et de l'industrie issu de l'article 7 de la loi du 17 mars 1791 ; principe sur lequel est encore fondé, en France le droit des interventions économiques et qui peut se résumer assez simplement en ce que toute intervention publique dans le secteur privé est interdite, sauf ce qui est expressément admis et autorisé par la loi. L'interdiction constitue le principe général, l'autorisation étant l'exception.

Les compétences économiques des collectivités locales sont donc des compétences d'attribution qui résultent, pour l'essentiel, des lois de décentralisation de 1982 et 1983, plus précisément de la loi du 2 mars 1982 ainsi que de l'article 4 de la loi du 7 janvier 1982 portant approbation du plan intérimaire pour 1982 et 1983. Depuis lors, ces dispositions ont été codifiées aux articles 1511-1 à 5 du Code général des collectivités territoriales ainsi que dans divers articles relatifs aux communes, aux départements et aux régions.

La pierre angulaire de ce droit est la distinction entre les aides directes et indirectes. Les premières, limitativement énumérées par la loi, sont au nombre de quatre : la prime régionale à la création d'entreprise, la prime régionale à l'emploi, les bonifications d'intérêts, les avances et les prêts à un taux inférieur à celui du marché. La Région en a la prérogative, les départements, les communes et leurs groupements ne pouvant intervenir que dans la limite des plafonds fixés par des décrets du 22 septembre 1982. Les départements et les communes ne peuvent donc intervenir que si la Région le fait au préalable et si son intervention n'a pas, à elle seule, atteint les plafonds d'intervention.

Les aides dites indirectes sont libres et ne sont pas vraiment définies à l'exception du régime des aides à l'immobilier d'entreprise c'est à dire l'achat ou la location de bâtiments ainsi que les rénovations de friches industrielles. Dans ce domaine, et conformément au décret du 22 septembre 1982, les possibilités offertes aux collectivités locales sont les suivantes : 

- s'agissant des friches industrielles, les collectivités peuvent les rénover et les remettre à la disposition d'industriels, déduction faite du coût de la rénovation ;

- s'agissant de l'aide à l'achat ou à la location de bâtiments, les collectivités locales, toutes confondues, ont le droit d'attribuer des aides dans la limite de 25 % de la valeur vénale des bâtiments, selon les conditions du marché.

Ainsi peuvent-elles accorder un rabais de 25 % sur le prix de vente ou de location de bâtiments qui leur appartiennent. Toutefois cette aide est «zonée» et ne peut bénéficier qu'aux entreprises situées dans les zones énumérées à l'annexe 1 du décret sur la prime de l'aménagement du territoire, c'est-à-dire en gros dans les zones éligibles à ladite prime pour les projets industriels mais, tout récemment, un décret du 7 juillet 1998 a étendu ce dispositif aux entreprises situées dans les zones éligibles à la prime d'aménagement du territoire pour les projets tertiaires, c'est-à-dire pour le secteur des services. Le rabais doit être fixé dans la double limite de 25 % de la valeur du bâtiment et de 900 000 F en valeur absolue ; précision intéressante puisqu'elle témoigne de la montée en puissance du droit communautaire et de la sévérité accrue de la Commission quant à l'application du principe d'interdiction des aides publiques. Le décret de 1982, notifié à la Commission Européenne de Bruxelles, avait conduit celle-ci à accepter ce rabais de 25% mais, au moment de la négociation sur l'extension de ces dispositions aux zones dites tertiaires, la Commission a tenu à être plus restrictive puisqu'elle nous a imposé ce double plafond de 25 % du prix de vente et de et 900 000 F en valeur absolue.

Voilà le régime sur lequel fonctionnent, ou plus exactement sont censées fonctionner les interventions des collectivités locales car l'expérience, ainsi que divers rapports d'enquêtes parlementaires, de même que celui de la Cour des Comptes de 1996 ont montré que ce régime n'était pas ou peu appliqué ; pour une raison essentielle d'ailleurs : du fait de sa rigidité - aujourd'hui les chefs d'entreprise ont du mal à s'engager à créer et à maintenir des emplois - il n'est pas très bien adapté aux besoins des entreprises. Au surplus les aides dont elles ont besoin ne sont pas tant des primes à la création d'emplois que des subventions directes à l'investissement, ce qu'actuellement aucune collectivité ne peut en principe accorder.

Ce régime rigide est donc largement inappliqué, une enquête menée par la DGCL en 1995 ayant montré que 80 % des aides étaient attribuées de façon irrégulière. Le contrôle de légalité s'exerce, en effet, assez peu dans ce domaine parce que tout le monde a conscience de l'inadaptation de la norme juridique aux besoins des entreprises et du développement local.

Ceci m'amène à évoquer la réforme en préparation et ses objectifs. Ils se définissent en creux. Le premier est la définition d'une règle du jeu claire pour l'ensemble des acteurs du développement local. Le second consiste à accorder une plus grande sécurité juridique à la fois aux entreprises et aux collectivités locales. Le troisième vise à mettre en place un dispositif plus souple pour permettre aux collectivités locales de s'adapter aux besoins des entreprises.

Pour cela, trois types modes d'intervention sont prévus :

1) une aide à la création et au développement d'entreprises, particulièrement les petites et les moyennes, qui seraient les bénéficiaires principales des interventions des collectivités locales,

2) un accès plus facile des entreprises aux crédits,

3) le renforcement de leurs fonds propres, en autorisant les collectivités locales à y participer.

S'agissant des aides à la création et au développement, le dispositif général envisagé est celui d'un régime dans lequel les collectivités locales détermineraient elles-mêmes librement les conditions d'attribution de l'aide dans la limite d'un plafond d'intensité fixé par la loi ou plus exactement d'un décret fondé sur une habilitation législative, les plafonds étant déterminés par rapport aux maximum admis par le droit communautaire.

En gros, et de façon à adapter le droit français aux contraintes communautaires, ce dispositif s'inspire très largement de l'encadrement relatif aux petites et moyennes entreprises fixé par la Commission. Il essaie de transposer en droit interne français, législatif ou réglementaire, des encadrements qui ne sont pas des normes juridiques à proprement parler mais des lignes directrices que la Commission publie au Journal Officiel des Communautés Européennes et dont elle s'inspire pour décider de la conformité ou de la non conformité des différentes aides d'État visées par l'article 92 du Traité relatif à la libre concurrence.

L'encadrement PME-PMI dont s'inspire cet avant projet de loi admettrait des intensités d'aides de 7,5 % de l'investissement pour les entreprises ayant de 50 à 250 salariés et de 15 % pour celles ayant de 0 à 50 salariés. Dans la limite de ces plafonds d'intensité, les collectivités locales pourraient attribuer aux entreprises qui se créeraient ou se développeraient des subventions dont elles détermineraient librement les conditions d'utilisation, la seule obligation étant de subventionner effectivement des investissements matériels ou immatériels ; les aides au fonctionnement n'étant pas autorisées afin d'éviter d'entretenir les entreprises dans une logique de dépendance à l'égard des fonds publics.

Le deuxième volet de l'avant projet de loi porte sur l'accès aux crédits. Souvent, les petites PME en création ont des difficultés à accéder aux prêts bancaires. Les collectivités locales disposent d'outils permettant de faciliter cet accès, notamment les garanties d'emprunt, ou plus récemment, grâce à la possibilité de prendre en charge une partie des commissions de garantie facturées par les établissements de crédit aux entreprises.

Le dispositif prévu par cet avant-projet de loi consisterait à autoriser les collectivités locales à doter les établissements de crédit spécialisés dans l'attribution de garanties et à en déterminer les conditions d'emploi et les catégories d'entreprises susceptibles d'en bénéficier. Cependant, la décision d'attribuer ou non la garantie au coup par coup, c'est-à-dire la sélection du risque, serait le fait de l'établissement de garanties lui-même, la collectivité ciblant par convention les entreprises susceptibles de bénéficier de son aide et l'analyse du risque restant du ressort des professionnels du crédit.

Au demeurant, ce dispositif existe déjà : ce sont les sociétés issues de la loi «Galland», mais il présente l'inconvénient d'obliger les collectivités locales, pour doter les fonds de garantie, à prendre des actions donc des participations au capital de ces sociétés. Or, pour une collectivité publique, cette prise de participation comporte un risque financier majeur puisqu'étant actionnaire elle garantit la totalité du passif.

Le troisième volet porte sur le renforcement des fonds propres. Pour l'instant, seules les régions peuvent participer au capital de sociétés d'investissement régionales, les départements et les communes ne pouvant y être autorisés que par décret en Conseil d'Etat. L'avant-projet de loi envisage donc d'ouvrir cette participation de plein droit aux départements tout en maintenant naturellement ce qui existe pour les régions. Toutefois la participation des communes continuerait à être subordonnée à une autorisation donnée par décret en Conseil d'Etat, parce que la prise de participation dans le capital de sociétés de capital risque est toujours un investissement qui présente des dangers, qui suppose une surface financière relativement importante.

Les pourcentages de prise de participation maximum envisagés seraient d'un peu moins de 50 % pour les régions, de 20 % pour les départements, la faiblesse de ce dernier pourcentage résultant de l'expérience qui montre qu'il ne faut pas favoriser à l'excès la création de sociétés d'investissement départementales car la surface géographique n'est pas suffisante et les projets à financer suffisamment nombreux. Le taux de 20 % devrait inciter trois départements au moins à se regrouper pour faire émerger des projets suffisamment importants afin de justifier la création d'une société de capital/investissement.

Une deuxième possibilité serait ouverte à l'ensemble des collectivités locales qui consisterait à doter les sociétés de capital/ investissement à capitaux privés ou mixtes de fonds de réserve alimentés par des subventions des collectivités ; ces fonds de réserve ayant pour objet d'améliorer la rentabilité des placements effectués dans ces sociétés de capital. Mais, afin qu'il y ait un partage de risque entre capitaux privés et capitaux publics, il serait envisagé d'imposer un cofinancement de la société de capital/investissement au moyen de son capital propre et du fonds de réserve, la collectivité publique ne pouvant, en tout état de cause, intervenir seule.

De la même façon que pour les fonds de garantie, la collectivité qui aurait doté le fonds de réserve auprès d'une société de capital/investissement, définirait par convention les entreprises «cibles» qu'elle souhaiterait aider, mais les décisions individuelles de prise de participation seraient prises par le comité des engagements de la société de capital risque, ce afin d'assurer une professionnalisation de ce type d'intervention dès lors qu'en matière d'ingénierie financière le calcul d'une prise de risque n'est pas la vocation première des collectivités publiques et de leurs services.

Le troisième possibilité offerte aux collectivités locales consisterait à prendre en charge une partie des commissions prélevées par les organismes qui garantissent les apports en fonds propres.

Enfin, une mesure plus marginale mais qui présente sans doute un grand intérêt, notamment dans le monde rural  pourrait consister à donner une base juridique certaine et incontestable à l'intervention des collectivités locales au sein des plates-formes d'initiatives locales c'est-à-dire des associations de la loi de 1901 spécialisées dans la création des très petites entreprises ; l'intervention des collectivités en leur faveur ayant fait l'objet de jurisprudences divergentes, une décision notamment ayant considéré cette intervention comme irrégulière.

Je terminerai cet exposé par une ou deux mesures qui pourraient apporter une première réponse aux interrogations de votre commission, notamment sur les délocalisations. Le projet de loi pourrait comporter une mesure susceptible de les décourager en prévoyant que toute entreprise qui ferait une demande de subvention auprès d'une collectivité publique devrait déclarer au préfet les subventions dont elle a déjà bénéficié au cours des cinq dernières années et si tel était le cas elle ne pourrait en obtenir de nouvelles pour se réinstaller ailleurs.

Cette disposition permettrait de lutter contre les comportements des chasseurs de primes, certains chefs d'entreprise semblant en effet parfois plus soucieux de recueillir des subventions que de créer de véritables richesses et de développer le territoire de la commune sur laquelle ils s'installent.

M. le Président : Nous vous remercions. Nous aurons des réflexions sans doute à mener dans le cadre de notre travail législatif.

Des propositions sont actuellement à l'étude au sein du ministère - je pense au projet Zucarelli - dont un volet nécessitera beaucoup de débats et d'interrogations, ne serait-ce que parce que des parlementaires sont encore détenteurs de mandats locaux, et s'interrogent sur la posture des collectivités territoriales au regard des interventions économiques et financières et fiscales.

M. le Rapporteur : Compte tenu du troisième point que vous avez décrit, à savoir la réforme en préparation, certaines questions tombent d'elles mêmes.

Il est clair que si ce projet vient rapidement en discussion - l'Assemblée n'étant pas maîtresse de son ordre du jour, c'est le gouvernement qui en décidera - il modifiera considérablement le dispositif actuel.

Je suis tenté de dire - mais c'est une impression - qu'il répond à certaines questions, qu'il installe les collectivités locales comme étant - je vais utiliser un terme trivial - les vaches à lait du développement. Vous pourrez évidemment corriger cette expression, je suis prêt à admettre qu'elle est exagérée.

Par contre, ce qui nous soucie tous ici, c'est le dispositif d'aides. C'est un mille-feuilles, et je ne suis même pas sûr que le mot suffise. Et il n'y a aucun moyen de contrôle du retour !

Pour ce qui concerne les délocalisations, le projet de loi propose un système qui oblige l'entreprise, si elle demande une aide, à déclarer celles perçues depuis cinq ans.

Mais pour celles qui ne se délocalisent pas, qui restent sur place et ne font pas ce qu'il était envisagé qu'elles fassent, quel dispositif va permettre que les collectivités locales, mises à contribution, plus encore demain avec un tel projet, aient un retour sur investissement ?

Mme Martine LAQUIEZE : Cette question m'amène à apporter les précisions suivantes.

D'abord le souci de protéger les finances des collectivités locales n'est pas totalement absent du projet. Une première mesure envisageable serait le plafonnement des interventions des collectivités locales par rapport à un certain pourcentage de leurs recettes de fonctionnement. Pour les communes, il serait de l'ordre de 5 %, pour protéger en quelque sorte les élus, notamment les maires des petites communes, de la pression qu'exercent parfois les chefs d'entreprise, à laquelle il est souvent difficile de résister, surtout quand à la clé on fait miroiter des emplois

M. le Rapporteur : Ce pourcentage correspond au total des aides apportées à plusieurs  entreprises ?

Mme Martine LAQUIEZE : L'enveloppe des dépenses d'interventions économiques annuelles ne pourrait excéder 5 % des recettes réelles de fonctionnement du budget d'une collectivité. C'est le plafond cité par la Cour des Comptes dans son rapport.

C'est une première protection. C'est une garantie que des budgets ne seront pas mis en péril pour aider une entreprise.

Cette règle, qu'on pourrait par simplification appeler la règle du ratio prudentiel, aurait un autre avantage: elle permettrait de mesurer en temps réel, au moment du vote des budgets primitifs, le volume global des interventions des collectivités locales en les obligeant à individualiser le montant des dépenses prévues ou réalisées en faveur des entreprises pendant l'année.

Cette mesure serait de nature à améliorer la connaissance statistique du volume d'interventions des collectivités locales.

S'agissant de l'expression que vous avez employée tout à l'heure, «les vaches à lait», je rappelle que ce sont des possibilités qui seraient offertes, mais bien entendu les assemblées délibérantes décidaient souverainement. Par culture et par tradition, je me refuse à croire qu'elles pourraient se contenter de signer des chèques en blanc à des entreprises dont elles n'auraient pas au préalable vérifié les potentialités de croissance et de création d'emplois.

Enfin, les conventions par lesquelles les collectivités locales attribueraient des aides aux entreprises détermineraient également les éventuelles conditions dans lesquelles elles pourraient être remboursées.

Le dispositif imaginé par le gouvernement essaie de préserver au maximum la souplesse d'intervention des collectivités locales. C'est la grande différence par rapport aux régimes antérieurs. Ce sont les assemblées délibérantes elles-mêmes qui détermineraient les conditions d'attribution de l'aide, éventuellement celles de remboursement, et les subordonneraient, si elles le souhaitent, à des créations d'emplois. Les régimes seraient arrêtés par les assemblées elles-mêmes, de façon à permettre l'ajustement le plus étroit possible aux besoins des entreprises.

Au fond, ces aides seraient le résultat d'une négociation entre l'exécutif local et son assemblée, et la demande des chefs d'entreprise.

M. le Président : Ce système peut éventuellement fonctionner, à condition qu'il y ait un accord sur la définition et la multiplicité des aides.

Je pense qu'il est possible de s'arranger sur tout cela. En gardant une certaine fraîcheur d'esprit on doit pouvoir arriver à démultiplier et à dépasser largement les 5 %.

M. Jacques FILLEUL : L'esquisse de la réforme accapare maintenant notre réflexion. Cette première ébauche bouleverse la situation actuelle et passée.

A priori l'implication des collectivités locales serait importante et comme ce sera légalisé par un texte, ce sera obligatoire : ou elles le font, très bien, ou elles ne le font pas, et les entreprises iront voir ailleurs !

Au surplus, avec les communautés de communes ou d'agglomérations, c'est l'EPCI qui va prendre la décision et non pas la commune. Cet élément doit entrer en ligne de compte.

Le dispositif d'évaluation mérite également d'être travaillé, étant donné ce que peut représenter pour une collectivité l'accueil ou non d'une entreprise en termes d'apport financier, direct ou indirect, car, quelle que soit sa taille, il y a toujours un entraînement économique.

Je reçois assez mal cette idée des 5 % des recettes de fonctionnement. Là encore, les plus pauvres feront les soumissions les plus basses. Donc sera entérinée la réalité actuelle : les entreprises iront vers les plus riches.

Je ne dis pas que la démarche est condamnable, je n'irai pas jusque-là, mais elle est peut-être trop simpliste et trop technocratique. Sur le terrain, la situation est bien plus compliquée, d'autant plus que très souvent, dans une collectivité locale, l'exécutif ne peut pas négocier à livres ouverts. En effet, il y a aussi une opposition d'une autre sensibilité politique, et malheureusement parfois des difficultés à lui indiquer avec quel type d'entreprise on négocie, parce que les membres de cette opposition peuvent avoir leurs amis politiques majoritaires dans la commune d'à côté. L'exécutif sera piégé quelque part, il faudra trouver des solutions pour éviter cela. Si ce texte arrive ainsi à l'Assemblée, il y aura d'énormes débats.

M. le Rapporteur : Avec les couteaux sur la table.

M. Jacques FILLEUL : J'ai l'impression.

Un point technique maintenant. Une zone d'activités industrielles, c'est d'abord un prix de revient. Aucune ville aujourd'hui ne vend ses terrains à ce prix-là, il est même complètement oublié dans les négociations. Est-ce selon vous une aide directe ou indirecte ? Elle est très importante mais est-elle répertoriée dans les comptes administratifs des collectivités locales ?

M. Robert PANDRAUD : Vous nous avez un peu surpris, Madame, et déconcertés avec le résumé du projet de loi Zucarelli. Nous avons des excuses, nous venons de voter le projet de loi de Mme Voynet, nous sommes en train de discuter un projet de loi de M. Chevènement. Nous sommes un peu submergés. Nous avons beaucoup à assumer en tant que malheureux élus du peuple que nous sommes.

Nous avons tous un peu l'impression que ce qui nous est dit ne correspond pas toujours à ce que nous vivons sur le terrain. Si les collectivités de base se battent pour obtenir telle ou telle entreprise, si c'est au détriment des collectivités d'origine, si le bilan emploi n'est pas positif en la matière, ce peut-être un beau problème pour la majorité municipale de la commune où s'installe l'entreprise.

Mais en définitive, ce qui nous intéresse tous, c'est la balance de l'emploi. S'il s'agit d'en retirer 300 en Ile-de-France pour en créer 200 à Quimper, je n'ai rien contre, mais s'il faut payer, c'est à la ville ou à la région de le faire, et sûrement pas au contribuable national.

Si, à l'inverse, une entreprise, grâce à des capitaux étrangers, s'implante sur le territoire avec un solde positif d'emplois, il ne faut pas fixer de critères trop restrictifs. Les élus sont astucieux, ils vont vite détourner la loi. Je ne pense pas que vous me démentirez quand je dirai que le contrôle de légalité est difficile, lourd, que le contrôle du comptable porte souvent plus sur des détails que sur des procédures, que le contrôle de la Chambre régionale des comptes est fait a posteriori, et souvent par sondages.

Je m'interroge. Ne sommes-nous pas dans un monde totalement virtuel ? Je ne vous demande pas de répondre. Ne sommes-nous pas en train de passer à côté de la réalité que nous connaissons ?

C'est une réflexion qui s'adresse plutôt aux membres de la commission qu'à vous, Madame.

M. Jean-Michel MARCHAND : Un exemple précis. Vous parlez d'aides à la création et au développement d'entreprises, mais il y a aussi celles au maintien des entreprises. Je prends l'exemple des mises aux normes environnementales. Lorsqu'une entreprise a des centaines de salariés, qu'elle doit se mettre aux normes, il faut des investissements lourds.

Il n'y a pas forcément une menace de délocalisation, mais les élus doivent prendre en compte la réalité, et participer à l'amélioration globale de l'environnement.

Est-ce que ce problème est pris en compte dans votre projet ? D'après mes échos, on essaie de trouver des «combines» pour la contourner, parce que la difficulté est telle que personne n'acceptera de voir une entreprise fermer si elle ne peut avoir des aides, quitte à ce qu'elles soient remboursables.

Nous aurons besoin sans doute de nous pencher sur ce projet, parce que sur le terrain, la situation n'est pas aussi simple que celle que vous avez exprimée.

Mme Martine LAQUIEZE : Je commence par la dernière question. Pardonnez-moi la simplification excessive d'un exposé rapide. Dans le dispositif nouveau, il est prévu la possibilité pour les collectivités locales de subventionner les travaux engagés par les entreprises pour se mettre aux normes, avec un taux dérogatoire pour le dépassement.

S'agissant du décalage au fond entre la réalité et la pratique, et du reproche auquel le fonctionnaire que je suis est toujours un peu sensible, du caractère trop technocratique de cet avant-projet de loi, je crois qu'il faut garder à l'esprit qu'actuellement il y a en effet un décalage considérable entre le droit et la pratique.

Je reviens sur quelques chiffres. Les formes d'aides directes que j'ai évoquées tout à l'heure, c'est-à-dire la prime régionale à l'emploi, à la création d'entreprise, les bonifications d'intérêts, les prêts et avances, ne représentent plus qu'une part marginale des aides, y compris des aides directes.

Déduction faite des zones d'activités et des aides au terrain, sur les 10 milliards d'aides directes de 1996, les primes ont représenté 156 millions de francs soit 1,5 %, les bonifications d'intérêts 188 millions de francs soit 1,7 %, les prêts et avances 2 milliards, soit 20 % à peu près. C'est dû au fait que c'est une forme d'aide très souple et un moyen de renforcer les fonds propres.

Et enfin, les subventions diverses ont atteint 8 milliards, soit 77 % du total. Donc 77 % des aides sont actuellement illégales. L'une des ambitions de ce projet de loi est de faire mieux coïncider les droit et la pratique. Ces subventions diverses attribuées par les collectivités locales seraient ainsi légalisées dès lors qu'elles ne dépasseraient pas un certain plafond ce dans le double but de protéger leurs budgets et de préserver le principe de concurrence.

Dans la limite de ces taux d'intensité qui sont nécessaires pour préserver la concurrence et respecter les contraintes communautaires, les collectivités locales pourraient attribuer des subventions à l'investissement dans des conditions qu'elles détermineraient elles-mêmes.

Ceci n'est ni théorique ni technocratique ni déconnecté de la réalité. C'est au contraire à partir de l'expérience que ce dispositif a été envisagé. Les quelques instruments de mesure disponibles montrent que 77 % des aides attribuées par les collectivités locales sont d'ores et déjà des subventions à l'investissement. Ce principe serait consacré par le droit.

En effet, il n'est pas possible de régler les relations entre le représentant local de l'État et les collectivités locales à coup de contrôle de légalité. Pour que le droit ait quelques chances d'être appliqué, il faut essayer de faire en sorte qu'il réponde à une demande et à une attente.

Je crois que ce dispositif qui, encore une fois, donne une grande souplesse à l'intervention des collectivités locales, correspond à ce qui se pratique maintenant. Je ne pense pas du tout que ce soit déconnecté de la réalité, puisque c'est à partir de ce constat que ce système a été conçu.

C'est la raison pour laquelle je suis un peu étonnée de cette réaction qui tend à discerner un décalage entre la pratique et la réalité. C'est maintenant qu'il est observé. L'ambition du projet est de mieux faire coïncider les deux.

Plus marginalement, s'agissant des aides au terrain, elles sont comptabilisées comme des aides indirectes. Le principe du Code général des collectivités territoriales actuel est en effet la liberté des aides indirectes. Ceci présente un danger pour les entreprises, car la distinction entre aides directes et indirectes n'a aucun sens en droit communautaire.

M. Jacques FILLEUL : Un terrain peut être donné gratuitement.

Mme Martine LAQUIEZE : Rien ne l'empêche, mais c'est extrêmement dangereux à mon sens. En toute bonne foi, l'aide peut être donnée et reçue par l'entreprise et en toute régularité au regard du droit interne. Mais en principe, elle doit faire l'objet d'une notification au coup par coup, sinon la Commission, en cas de plainte d'un concurrent, pourrait éventuellement demander à l'entreprise le remboursement de l'équivalent de la subvention nette, c'est-à-dire le coût du terrain au prix du marché, situation très dangereuse parce qu'elle est susceptible de pénaliser l'entreprise qui aurait en toute bonne foi reçu une aide.

M. Alain COUSIN : Est-ce que les aides seraient toujours subordonnées au nombre d'emplois créés ?

Mme Martine LAQUIEZE : Pas forcément. Les collectivités auraient à décider. Les régimes d'aides seraient fixés par les assemblées délibérantes. La seule limite posée par le projet de loi serait en termes d'intensité, au regard de la masse budgétaire pour protéger les finances locales, et du volume de l'aide pour faire coïncider le droit interne, donc la norme de droit national avec la norme européenne évitant ainsi que les collectivités, et les entreprises surtout, puissent bénéficier en toute bonne foi d'aides qu'elles seraient obligées de rembourser quelques années plus tard.

C'est une contrainte impérative qui s'impose à la République française comme à tous les Etats européens. La difficulté juridique tient au fait que ce ne sont ni des règlements ni des directives. En gros, nous sommes obligés d'introduire dans le droit français des normes de la Commission qui sont chez nous du niveau de la circulaire.

Mais il ne faut pas oublier que le Traité de 1957 a donné à la Commission une compétence exclusive pour apprécier les dérogations à ce principe général d'interdiction d'aides d'un État susceptibles de fausser la concurrence. Nous sommes dans un cadre juridique très contraint.

M. Jacques FILLEUL : Est-ce que l'avant-projet de loi tient compte de l'intercommunalité ?

Mme Martine LAQUIEZE : Oui, de deux façons.

La première, s'agissant des fameux ratios prudentiels, les collectivités locales ne pourraient pas consacrer plus d'une certaine fraction de leurs recettes réelles de fonctionnement aux interventions économiques. S'agissant des groupements, cette part serait, pour les encourager, de 50 %.

Par ailleurs, si les communes devaient intervenir seules, les taux d'intensité d'aides seraient légèrement minorés. Par rapport à ceux de droit commun qui sont de 7,5 et 15 % pour les petites et moyennes entreprises, la commune ne pourrait intervenir qu'à hauteur de 3 % de l'investissement pour une entreprise moyenne ou 10 % pour une petite.

En revanche, un groupement retrouverait la faculté d'intervenir à la même hauteur que le Département ou la Région, c'est-à-dire 7,5 et 15 %.

M. le Président : Nous sommes très dubitatifs. Nous n'allons pas continuer à empiéter sur la réflexion de nos collègues de la commission des lois.

Vous avez rappelé à juste titre que le droit communautaire comportait le principe d'interdiction générale des aides économiques des collectivités et de l'État mais c'est un principe que tout le monde a joyeusement foulé au pied.

Qu'en est-il de nos partenaires européens ?

De quels droits de suite disposent les collectivités locales quand un groupe important s'installe sur un territoire donné puis le quitte sans crier gare alors que des efforts ont été faits en termes de fiscalité locale, voire nationale, des aides directes et indirectes octroyées ? Quelle en est l'efficacité ?

Mme Martine LAQUIEZE : Il existe un premier moyen ouvert à toute personne : la voie contentieuse, dans la cas où les aides attribuées le seraient irrégulièrement.

N'importe quelle personne ayant intérêt à agir, éventuellement la collectivité locale, peut former devant la juridiction compétente un recours pour demander l'annulation de mesures irrégulières mais. si elles sont régulières, même si elles gênent ou contrarient une autre collectivité, il n'y a pas de moyen de s'y opposer.

S'agissant de ce qui se passe au niveau communautaire, des aides en effet sont attribuées par d'autres Etats membres. Elles sont soumises exactement au même contrôle par la Commission, et les situations juridiques instables et incertaines, attribuées notamment par l'Allemagne à des entreprises, font l'objet de demandes de remboursement et d'un suivi de la Commission.

J'ai eu une information sur la procédure engagée par la Commission européenne contre les lander banks, c'est-à-dire les banques publiques allemandes qui prennent des participations dans les entreprises : la Commission a décidé d'ouvrir une procédure. Il y a tout lieu de penser qu'elle débouchera sur des demandes de reversement d'aides irrégulièrement attribuées.

Le contrôle sur les interventions françaises s'exerce de la même façon et dans les mêmes termes sur l'ensemble des interventions dans les pays de la Communauté.

M. le Président : Vous avez commencé votre propos en parlant de la rareté des informations statistiques et l'absence de nomenclatures pertinentes. Est-ce donc de la seule compétence de la Direction de la Comptabilité Publique ?

Mme Martine LAQUIEZE : Oui.

M. le Président : En fait, il y a une accumulation d'informations mais absence totale de coordination ! Est-ce que des réflexions sont en cours pour y remédier ?

Mme Martine LAQUIEZE : Non. Je ne peux que confirmer la rareté de la source statistique. La seule mesure envisagée dans cette perspective est, dans l'avant projet de loi, l'obligation faite aux collectivités locales de contenir leurs dépenses d'interventions économiques au sein d'une enveloppe exprimée en pourcentage de leurs recettes réelles de fonctionnement.

Cela permettrait, nous l'espérons, d'enrichir la source statistique, de l'actualiser surtout, c'est-à-dire d'avoir un recensement en temps réel, également de définir une nomenclature pour calculer le rapport entre le montant total des dépenses prévues et le ratio de 5 % des recettes réelles de fonctionnement.

Vraisemblablement, cela pourrait prendre la forme d'un état annexe au budget, mais cela relèverait d'une instruction.

M. le Rapporteur : Les autres pays de la Communauté européenne, je suppose, ont aussi adapté leur législation dans ce domaine, y compris en Allemagne ou en Irlande, aux directives européennes.

Est-ce qu'à la DGCL, vous avez une étude comparée des situations des collectivités locales au regard des demandes des entreprises en matière d'aides ?

Mme Martine LAQUIEZE : Non.

M. le Rapporteur : Même pour les principaux pays partenaires de la France ?

Mme Martine LAQUIEZE : Oui. Cette information manque. Cela étant, la norme est applicable dans tous les pays de la même façon, et les mêmes contrôles s'y exercent.

L'article 92 du Traité s'impose de la même manière à tous les Etats membres. Soit leur norme juridique interne est conforme à la norme européenne, et leurs interventions sont régulières. Soit elles ne le sont pas, et dans ce cas les interventions sont irrégulières et exposées à la même insécurité juridique que les nôtres.

En France, le décalage est patent entre le droit communautaire et celui interne.

M. le Rapporteur : J'ai bien noté, par ailleurs, qu'au travers de cet éventuel projet de loi, une incitation très forte au-delà des 250 F par habitant dans les agglomérations allait venir s'exercer sur les communes éventuellement récalcitrantes à entrer dans une communauté de communes, au risque d'en subir les conséquences en matière d'aides aux entreprises.

Mme Martine LAQUIEZE : Il est clair que ce projet comporte un volet encouragement au regroupement intercommunal, surtout en matière d'interventions économiques.

M. le Rapporteur : Comme nous sommes à 24 heures à peu près du vote de la loi sur l'intercommunalité, c'est un élément de réflexion.

Mme Martine LAQUIEZE : Les projets sont cohérents entre eux.

M. le Président : Après ils sont soumis à la sagesse du Parlement.

M. Jacques FILLEUL : Ces aides seraient-elles inscrites en fonctionnement ou en investissement dans les budgets des collectivités locales ? Si c'est en fonctionnement, il y aura des hausses d'impôts ou des suppressions de personnel. Il faudra bien trouver des moyens. Selon moi, ce sera quasiment obligatoire.

Les villes qui voudront se développer économiquement n'auront pas de marge de manoeuvre financière suffisante pour répondre aux sollicitations des entreprises. Je pense qu'il faudrait l'inscrire en section d'investissement.

Mme Martine LAQUIEZE : Ce problème n'a pas tout à fait échappé au gouvernement, c'est une autre des contraintes qui pèsent sur cet avant projet de loi, et qui n'est pas issue du Traité de 1957, mais de la M14, qui a une logique comptable patrimoniale, et qui impose l'inscription en dépenses de fonctionnement des subventions, puisqu'elles ne sont pas assorties d'une contrepartie patrimoniale.

C'est une contrainte comptable, mais qui pèse en effet sur l'avant-projet de loi. Nous avons essayé de l'atténuer en prévoyant que ces dépenses seraient amorties dans des conditions à préciser par décret. Tout ce qu'il sera possible de faire pour atténuer les effets de la contrainte purement comptable sera effectué, avec la mise en place d'un système d'amortissement permettant de lisser la charge sur plusieurs années.

C'est le dispositif envisagé, dès lors que le principe retenu étant celui d'une comptabilité patrimoniale applicable aux collectivités locales, il n'est pas possible de comptabiliser en investissement des subventions pures et simples. Mais il est prévu d'étaler la charge sur plusieurs années.

M. le Président : Je commence à comprendre pourquoi on demande aux membres des conseils d'administration des sociétés d'économie mixte de ne pas participer aux débats ni aux délibérations des conseils municipaux.

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