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Première séance du mercredi 27 octobre 2004

32e séance de la session ordinaire 2004-2005



Présidence de M. Jean-Louis Debré

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

LICENCIEMENT ÉCONOMIQUE

M. le président. La parole est à Mme Janine Jambu, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

Mme Janine Jambu. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.

Au mépris du débat national et d'une concertation approfondie avec les partenaires sociaux, le Gouvernement a choisi d'intégrer en toute hâte les articles du projet Larcher sur les licenciements économiques dans le projet de loi sur la cohésion sociale qui est débattu en ce moment au Sénat et que nous examinerons bientôt dans cet hémicycle.

Un tel empressement est révélateur de la gravité du projet. Il s'agit tout simplement de permettre aux chefs d'entreprise de s'exonérer des obligations du code du travail liées au plan de sauvegarde de l'emploi et de priver les salariés de la possibilité d'obtenir l'annulation des licenciements.

C'est le démantèlement du dispositif acquis avec la loi de 1989, amélioré en 1993 et visant à protéger les personnels des entreprises de plus de cinquante salariés contre les excès de l'arbitraire patronal en matière de licenciement collectif.

Avec ce texte dicté par les entrepreneurs chers à M. Seillière, l'avenir promis aux salariés est synonyme de précarité, d'insécurité professionnelle et d'individualisation de la galère.

Dès lors, comment pouvez-vous assumer la contradiction de cette position avec les objectifs affichés par le Président de la République, visant à œuvrer à la cohésion sociale en favorisant l'emploi, le logement et la formation ?

En donnant plus de pouvoir à ceux qui ont le regard rivé sur le taux de rentabilité de l'actionnariat et en supprimant un à un tous les garde-fous conquis par le monde du travail, c'est à une véritable désintégration sociale que vous ouvrez la voie.

M. Richard Cazenave. Quelle est la question ?

Mme Janine Jambu. Nous vous demandons solennellement, monsieur le ministre, de retirer ces dispositions néfastes du projet de loi sur la cohésion sociale. Y êtes-vous prêt ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux relations du travail.

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail. Madame la députée, en matière de licenciement économique, notre législation est inadaptée.

Centrée sur une gestion à chaud des crises, elle pousse à la confrontation plutôt qu'au dialogue.

Mais surtout, elle est profondément inégalitaire, puisqu'elle laisse sans aucune garantie de reclassement plus de 80 % des salariés confrontés au licenciement économique.

Cette situation, vous l'avez paradoxalement aggravée en votant la loi du 17 janvier 2002 dite - je dis bien « dite » - de modernisation sociale.

M. Francis Delattre. Une honte !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Dès le mois de janvier 2003, le Gouvernement en a suspendu les dispositions et a appelé les partenaires sociaux à déterminer par la négociation des règles plus efficaces et plus équilibrées. Il leur a laissé pour cela un délai de dix-huit mois, qui a été porté à deux ans à l'initiative du Sénat.

Malgré onze séances de négociation, les partenaires sociaux n'ont pu trouver un accord. Aussi, me conformant au calendrier qui leur avait été annoncé lorsqu'ils ont été reçus en juin, fin août, puis début octobre, nous avons élaboré un avant-projet de loi tenant compte des points de convergence apparus lors des négociations.

Ce projet comporte trois lignes directrices.

La première est d'encourager la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences au sein des entreprises et des branches.

La seconde est de favoriser le traitement négocié - si possible à froid - des restructurations par la conclusion d'accords de méthode.

M. André Chassaigne. Bien sûr ! Comme cela, tout sera permis !

M. le président. Pouvez-vous en terminer, monsieur le ministre ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. J'entends des bruits sur certains bancs, monsieur le président.

M. le président. C'est malheureusement le cas pour tout le monde !

M. le ministre délégué aux relations du travail. La troisième ligne directrice consiste à offrir à tous les salariés un dispositif de reclassement plus efficace et plus égal.

Présenté au CNC et soumis au Conseil d'État, ce projet a été amendé pour prendre en compte les différents points de vue.

La décision du Premier ministre de l'inscrire dans le projet de loi de cohésion sociale par lettre rectificative est un choix de cohérence, puisque ce texte s'inscrit pleinement dans l'accompagnement du retour vers le plein-emploi. C'est aussi un choix respectueux du Parlement.

M. Jérôme Lambert. Et du MEDEF !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Mieux vaut une lettre rectificative que certains amendements nocturnes comme ceux qui avaient été déposés au cours du débat sur la loi de modernisation sociale ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jérôme Lambert. Maigre ovation !

ADHÉSION DE LA TURQUIE À L'UNION EUROPÉENNE

M. le président. La parole est à M. Jean Leonetti, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Jean Leonetti. Monsieur le Premier ministre, au cours du débat organisé à l'Assemblée nationale sur l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, la grande majorité des députés du groupe UMP se sont prononcés contre l'adhésion, mais pour le développement d'un partenariat privilégié avec ce grand pays.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Il n'y a pas eu de vote !

M. Jean Leonetti. Le Président Jacques Chirac a appelé hier, entre autres solutions, à la création de liens forts, en dehors de l'adhésion, qui permettraient, selon nous, d'accompagner ce grand pays sur le chemin de la démocratie et de la laïcité.

Vous avez rencontré hier le Premier ministre turc, M. Erdogan. Quel message lui avez-vous transmis au nom de la France ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Leonetti, hier, en effet, à l'issue du conseil des ministres franco-allemand, le Président Chirac et moi-même avons rencontré le Premier ministre turc, M. Erdogan, dans le bureau du chancelier Schröder.

Le Premier ministre turc nous a interrogés sur la décision du 17 décembre et les suites qui lui seraient données.

Le Président de la République a répondu clairement que, en premier lieu, c'est à l'unanimité que doit se prendre - si elle se prend - la décision d'ouvrir les négociations en vue d'une adhésion de la Turquie à l'Union européenne et, deuxièmement, que toute démarche de négociation doit évidemment se faire dans une perspective d'adhésion.

Mais il a ajouté que la Turquie doit être bien consciente que trois issues sont possibles.

La première est le succès, entraînant l'adhésion de la Turquie, ce qui, pour les Français, se traduira par un référendum.

La seconde est la rupture. En cas de désaccord complet, la rupture s'imposera, hypothèse non souhaitable, mais possible.

La troisième issue qu'il nous faut envisager serait que nous ayons fait des progrès importants dans la négociation, mais que, sur des points clés, la Turquie ou l'Union européenne ne veuille pas céder, parce que des valeurs fondamentales sont en cause. Dans cette hypothèse, il faudra trouver un lien nouveau entre les deux partenaires.

Telles sont les trois issues possibles.

Ce que nous avons dit clairement au Premier ministre de la Turquie, c'est que l'ouverture des négociations n'entraînera pas automatiquement l'adhésion. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

RECHERCHE

M. le président. La parole est à M. Pierre Cohen, pour le groupe socialiste.

M. Pierre Cohen. Monsieur le Premier ministre, la politique de votre gouvernement a réussi à mettre la recherche française à genoux (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), ce qui a provoqué une mobilisation sans précédent des personnels de la recherche et la démission de bon nombre de directeurs de laboratoire.

La plupart de nos élites vous ont demandé à leur tour, voire vous ont sommé, d'abandonner cette politique suicidaire.

Des états généraux de la recherche ont lieu demain et après-demain à Grenoble. Un débat s'engagera ensuite en vue d'élaborer une loi d'orientation et de programmation à la fin de 2005.

Le budget de la recherche pour 2005 aurait pu être un signal fort qui aurait montré que vous aviez admis vos erreurs et que vous étiez prêts à relever le défi. Mais force est de constater que, malgré vos déclarations tapageuses, les chercheurs eux-mêmes ont déjà dénoncé un budget en trompe l'œil.

M. Richard Cazenave. Quels chercheurs ?

M. Pierre Cohen. Ainsi, vous vous étiez engagé à consacrer un milliard d'euros par an pendant trois ans à ce secteur. Qu'en est-il pour 2005 ? 350 millions seulement iront aux laboratoires, ce qui ne correspond même pas aux coupes claires et aux gels successifs qui se sont élevés à près de 500 millions en deux ans. En fait, vous vous êtes simplement aligné sur le budget pour 2001.

Ensuite, dans la précipitation et sans étude permettant d'évaluer l'efficacité d'une telle mesure, vous proposez une défiscalisation en augmentant le crédit impôt- recherche, alors qu'il ne garantit pas une véritable relance des efforts de recherche dans le secteur privé.

Enfin, le dernier tiers de la somme prévue va au financement d'une agence qui n'est même pas encore créée, ce qui introduit un flou sur les mesures incitatives déjà existantes et sur votre propre projet d'aide aux fondations.

M. Jean-Michel Ferrand. Quelle est la question ?

M. Pierre Cohen. Mais le plus inquiétant est l'abandon du plan pluriannuel d'emplois scientifiques impulsé par Lionel Jospin et Roger-Gérard Schwartzenberg, nécessaire pour relever le défi des dix prochaines années en matière de postes et atteindre les efforts de recherche que nous avons fixés à 3 % du PIB en 2010.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Quelle est la question ?

M. Pierre Cohen. C'est d'autant plus catastrophique que vous n'apportez aucune réponse aux jeunes qui se détournent désormais des carrières scientifiques et encore moins à ceux qui seront tentés par le métier de chercheur.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Quelle est la question ?

M. Pierre Cohen. La désindustrialisation et le rapport entre les sciences et la société sont deux défis majeurs qui nécessitent des moyens et une grande réforme.

J'en viens à ma question (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire). Pensez-vous que, n'étant pas au rendez-vous en ce qui concerne les moyens consacrés à la recherche, vous disposerez de la confiance du pays pour mener à bien cette grande réforme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.- « Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) )

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le député, s'il est un sujet qui s'accommode mal de la caricature, c'est celui de la recherche. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Il est exact que la crise de la recherche s'est nouée sur une décision mal comprise du Gouvernement. Mais les chercheurs ont démontré à cette occasion qu'elle avait un passé et des racines bien plus profondes que cet événement. La vérité, c'est que notre système de recherche est en crise depuis des années...

M. Gilbert Biessy. C'est exact.

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. ...parce que nous n'avons su, ni les uns ni les autres, apporter la réponse nécessaire à l'évolution mondiale de ce secteur.

S'il est un sujet sur lequel nous devrions tous faire preuve de modestie, c'est donc bien celui-là. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Aujourd'hui, les chercheurs ont engagé un effort de réflexion dans le cadre des états généraux de la recherche, à Grenoble, où François d'Aubert et moi-même serons présents demain. Nous attendons par ailleurs la remise du rapport du CIP.

À l'issue de ces débats et après avoir pris connaissance de ce rapport, nous vous proposerons un projet de loi d'orientation et de programmation, qui vous sera soumis au printemps. Il permettra d'envisager sereinement l'avenir des carrières scientifiques, ce qui n'était pas possible dans le passé, en l'absence de toute loi de programmation des emplois.

Nous avons, dans le projet de budget pour 2005, engagé l'effort nécessaire pour donner un nouvel élan à notre recherche, puisque celle-ci bénéficiera, l'année prochaine, de 10 % de crédits supplémentaires.

M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas vrai !

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. On ne trouve aucun exemple d'un tel effort au cours des vingt dernières années. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

La recherche française a besoin d'une réorganisation structurelle. Il faut répondre aux questions de l'évaluation des chercheurs, du lien entre les grands organismes et la recherche universitaire, de l'accueil des jeunes et de l'attractivité des carrières scientifiques. Ces questions, qui se posent depuis des années, sont jusqu'à présent restées sans réponse. Nous allons y répondre, et j'espère que vous nous y aiderez. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

FRUITS ET LÉGUMES

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le ministre d'État, les producteurs de fruits et légumes viennent de subir, sur l'ensemble du territoire national, une crise sans précédent. Ces producteurs sont, en effet, parfois payés à peine la moitié du prix de revient de leurs productions, alors qu'il s'agit d'une filière moderne, dynamique, vitale pour notre agriculture, qui emploie plus de 200 000 personnes. Quant aux consommateurs de France, ils se voient proposer un kilo de pommes, payé 40 centimes d'euros au producteur, au prix de 2,40 euros sur les étals de nos supermarchés.

Un premier constat s'impose, monsieur le ministre d'État : l'accord du 17 juin ne les a pas protégés.

Les causes de la crise sont malheureusement connues. Tout d'abord, les charges sociales sont trop élevées, notamment au vu de la compétition intracommunautaire. Au cours de l'examen à l'Assemblée nationale du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, Hervé Gaymard s'est engagé à nous faire des propositions lors de la deuxième lecture au Sénat. Nous en avons pris acte. Monsieur le ministre de l'agriculture : de l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace !

Ensuite, et surtout, le rapport de force est complètement déséquilibré entre la grande distribution et le monde de la production : 5 centrales d'achat contre 360 organisations de production. Il est d'ailleurs regrettable que nos collègues UMP aient refusé une commission d'enquête sur ce sujet (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), car bien des pratiques restent à éclaircir et à assainir.

Notre question porte sur ce point. Lors de l'examen du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, M. Gaymard nous a renvoyés au rapport Canivet, que nous avons lu avec le plus grand soin. Certes, le problème de la filière des fruits et légumes y est reconnu - comment pourrait-il en être autrement ? -, mais les propositions sont vraiment désespérantes et écartent de façon sommaire et très contestable l'une des voies les plus prometteuses : celle du coefficient multiplicateur. Je précise à l'attention de ceux qui ne sont pas spécialistes de ces questions que ce dispositif consiste à obliger la grande distribution à mieux rémunérer les producteurs en corrélant le prix de vente et le prix d'achat aux producteurs. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Dionis Du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Je tenais à dire, monsieur le président, que M. Ferrand a déposé une proposition de loi en ce sens, soutenue par 121 députés, et je souhaitais lui rendre hommage.

M. Jean-Michel Ferrand. Il faut la voter !

M. le président. Vous ne posez pas votre question à M. Ferrand, mais au Gouvernement.

M. Jean Dionis du Séjour. Dans ce contexte, et au-delà de l'avis de M. Canivet, quelle est, monsieur le ministre d'État, votre position sur le coefficient multiplicateur...

M. le président. Merci, monsieur Dionis Du Séjour !

M. Jean Dionis du Séjour. ...et, plus généralement, que comptez-vous faire pour rééquilibrer le rapport de force entre producteurs et distributeurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député,...

M. le président. Pardonnez-moi, monsieur Sarkozy. Monsieur Gremetz, veuillez ôter votre casque : tous les moyens ne sont pas bons pour attirer l'attention des médias ! (Huées puis applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vous avez la parole, monsieur le ministre d'État.

M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, si je vous ai bien compris, après avoir adressé un reproche aux députés du groupe UMP, vous souhaitez que le Gouvernement retienne l'une de leurs propositions de loi. Ce point méritait d'être souligné.

Si la situation et la législation actuelles étaient satisfaisantes, M. Gaymard et moi n'aurions pas eu à gérer la crise très difficile de l'été dernier. Le prix de revient d'un kilo de tomates se situe aux alentours de 0,70 euro chez nous, alors qu'il est de 0,15 euro en Pologne. Ce n'est donc pas facile.

Le rapport Canivet est important parce que son auteur est le premier magistrat de France. Nous pouvons donc lui faire confiance quand il estime que, malheureusement, la proposition remarquable de Jean-Michel Ferrand, qui consiste à instaurer un coefficient multiplicateur, n'est pas conforme au droit communautaire.

M. Jean-Michel Ferrand. Ce n'est pas vrai !

M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est celui qui aura à en juger qui le dit. Le rôle du Gouvernement n'est pas d'adopter une législation dont nous savons qu'elle sera condamnée par les tribunaux. (Protestations sur divers bancs.)

J'ai pris contact, à la demande du Premier ministre, avec le président Barroso (Mouvements divers), pour étudier ce que, avec M. Gaymard, nous pourrions faire pour retenir cette proposition. En disant : « Ce n'est pas vrai ! », vous vous faites plaisir, monsieur Ferrand. Le but n'est pas de condamner des agriculteurs à la désespérance en leur faisant de fausses promesses et en leur proposant de fausses solutions. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Monsieur Glavany, à votre place, je ne prendrais pas la parole sur ce sujet ! (Huées puis applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Si M. Gaymard et moi avons à gérer une situation épouvantable pour les agriculteurs, c'est de votre faute et de la vôtre seule. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Évitons les interpellations personnelles.

M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Les contrats-types obligatoires, les prix garantis, le plafonnement des marges arrière : nous savons, monsieur le député, que les prix agricoles - et c'est ce que dit le rapport Canivet - ne peuvent pas se fixer dans le cadre normal.

M. François Sauvadet. C'est vrai !

M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. D'ici à trois semaines, nous vous ferons, avec M. Gaymard, des propositions précises, utiles et applicables par les juridictions. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

LOI D'ORIENTATION SUR L'ÉCOLE

M. le président. La parole est à M. Richard Dell'Agnola, pour le groupe UMP.

M. Richard Dell'Agnola. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, il y a tout juste un an, le Gouvernement lançait le grand débat national sur l'école qui a été voulu par le Président de la république et qui doit aboutir, dans les prochains mois, à une nouvelle loi d'orientation. Quinze ans après la loi de 1989, tous les acteurs du monde éducatif - enseignants, parents, élèves - attendent une redéfinition de cette mission essentielle qu'est l'éducation pour la génération qui vient.

Vous avez souhaité associer l'ensemble des Français à ce grand chantier. (« Ce n'est pas vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Il y a eu 26 000 réunions publiques, 50 000 messages électroniques et 1 800 courriers. Cette consultation d'une ampleur sans précédent a permis d'établir un diagnostic au plus près des réalités du terrain et de dégager les grands axes qui guideront, demain, l'élaboration de la loi. (« Allo ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

La remise, il y a quelques jours, du rapport Thélot a constitué une deuxième étape de ce débat, avec, à la clé, toute une série de propositions, notamment le retour à un socle commun de connaissances, gage de la réussite de tous les élèves.

Jeudi dernier, un nouveau pas a été franchi avec le lancement de la concertation avec les partenaires sociaux. Le Premier ministre et vous-même avez reçu, lors d'une première réunion de travail, les organisations syndicales et les associations de parents d'élèves. Cette dernière phase de dialogue avant l'élaboration de la loi est essentielle à la réussite de ce chantier.

Monsieur le ministre, pouvez-vous informer la représentation nationale du déroulement de cette première table ronde, nous dire quels sont les thèmes de travail retenus et nous préciser le calendrier des prochaines rencontres ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le député, vous avez eu raison de le souligner, l'école est l'affaire de la nation, et nous voulons la rénover avec le concours de tous, sans préjugés, sans parti pris, sans nous laisser enfermer dans une vision partisane de l'avenir de l'école. Ainsi, le Premier ministre a choisi de lancer un grand débat national dont vous avez eu raison de dire qu'il est sans précédent, une commission d'experts indépendants a été sollicitée, dont les conclusions figurent dans le rapport Thélot, et j'ai invité tous les groupes politiques à me faire connaître leurs propositions.

Le Premier ministre a réuni, le 21 octobre dernier, l'ensemble des organisations représentatives pour leur proposer une méthode de travail, laquelle a été acceptée par tous. Cinq groupes seront réunis, afin de traiter respectivement des finalités de la scolarité obligatoire - notamment de la question essentielle du socle de connaissances -, de l'ouverture de l'école sur le monde actuel - avec la question stratégique de l'apprentissage des langues -, des premiers apprentissages, des filières des lycées et des métiers de l'éducation. Les fédérations de parents d'élèves et les personnels de direction seront également sollicités pour participer à ce débat.

Lorsque nous aurons finalisé ces propositions, les partenaires sociaux seront à nouveau reçus pour en débattre. Le calendrier que nous nous sommes fixé est serré, car nous voulons que le projet de loi d'orientation sur l'école soit présenté en conseil des ministres au début du mois de janvier prochain.

M. le président. Merci, monsieur le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Je conclus en disant que notre école doit être adaptée avec audace, mais aussi en tenant compte de l'héritage historique dont nous sommes tous, ici, les garants. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

CALENDRIER ÉLECTORAL

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier, pour le groupe UMP.

M. Jérôme Chartier. Monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, vous avez annoncé, ce matin, dans une communication au conseil des ministres, le report des élections municipales et cantonales au mois de mars 2008. Il est vrai que l'année 2007 était une année d'embouteillage électoral, puisque pas moins de cinq élections - municipales, cantonales, présidentielle, législatives et sénatoriales - étaient prévues en sept mois.

Il n'y a jamais de solution idéale lorsque l'on touche aux rendez-vous électoraux, mais, en l'espèce, la nécessité du report s'imposait, et vous vous en êtes tenu à trois principes qui me paraissent justes.

Le premier, c'est celui de la séparation des rendez-vous nationaux et des rendez-vous locaux (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) entre lesquels s'écoulera une période de près de neuf mois qui permettra d'assurer la sérénité des campagnes électorales.

Le deuxième est le maintien du rendez-vous en une seule année. Celui-ci n'aura pas lieu entre mars 2007 et septembre 2007, mais entre mai 2007 et mars 2008, soit dans une période de onze mois exactement.

M. Bernard Roman. Ce n'est pas une question !

M. Jérôme Chartier. Néanmoins, trois questions se posent. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Manuel Valls. Il y en a deux de trop !

M. Jérôme Chartier. Premièrement, quelles conséquences ces élections municipales auront-elles sur la durée du mandat des élus de mars 2008 ? (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Deuxièmement, quelle sera la durée du mandat des conseillers généraux élus en mars 2004 : seront-ils renouvelables en mars 2010 ou en mars 2011 ?

Troisièmement, quand comptez-vous présenter à la représentation nationale le projet de loi relatif au report des élections municipales et cantonales ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, il est un point sur lequel tous, ici, nous serons d'accord : le calendrier électoral pour 2007 est, en l'état actuel des choses, intenable. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Maurice Leroy. Pour qui ?

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cinq élections en sept mois, vous l'avez dit, ce n'est pas possible, pour des raisons pratiques, qui tiennent à l'organisation, au financement et au contrôle des élections, pour des raisons juridiques, car il faut prévoir le parrainage des candidats à l'élection présidentielle - il y a donc télescopage avec les élections locales - et pour des raisons politiques, car cette année embouteillée sur le plan électoral risquerait de décourager les électeurs et d'alimenter l'abstention.

À partir de là, comme toujours en démocratie, il faut faire un choix. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Deux options s'offraient. La première était celle du double report : celui des élections municipales et cantonales au mois de septembre 2007 et celui des élections sénatoriales à la fin de l'année 2007.

Mme Martine David. Cela aurait été très bien !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La seconde était celle du report unique : celui des élections municipales et cantonales de 2007 à mars 2008, mois pour mois.

M. Jean Auclair. Très bien !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si j'ai proposé, ce matin, en conseil des ministres, qui l'a accepté, que l'on retienne la deuxième option, c'est parce qu'elle a le mérite de la clarté : élections nationales en 2007, élections locales en 2008. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Elle a le mérite de la sérénité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) puisque le temps de préparation et de campagne électorale étant préservé, nous respectons le processus électoral et les électeurs.

Elle a le mérite de la simplicité...

Plusieurs députés du groupe socialiste. Pas du tout !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ...puisqu'il suffira de prolonger d'un an le mandat des conseillers généraux élus en mars 2004 pour qu'il aille jusqu'à son terme légal.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Magouilleur !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Enfin, elle respecte la démocratie tout en permettant une adaptation à l'esprit du quinquennat. Comme il est d'usage, après délibération en conseil des ministres le projet de loi sera soumis au Conseil d'État, puis présenté à l'Assemblée nationale d'ici à la fin de l'année. L'esprit et le temps démocratiques seront donc parfaitement respectés (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

TÉLÉVISION NUMÉRIQUE TERRESTRE

M. le président. La parole est à M. Didier Mathus, pour le groupe socialiste.

M. Didier Mathus. Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et de la communication. En préambule, je voudrais faire observer à M. Fillon, qui affirme que les crédits de la recherche augmenteront de 10 % en 2005 sous la pression des chercheurs, que ces mêmes crédits avaient préalablement diminué de 20 % en 2003 et 2004 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Monsieur le ministre, alors que la télévision numérique terrestre devait voir le jour au mois de mars prochain, le Gouvernement semble prêter main-forte au groupe Bouygues et à TF1, ainsi qu'à M6, qui s'opposent depuis deux ans à l'application de la loi. La télévision numérique de terre n'est pas un simple projet technique, mais un enjeu démocratique, puisqu'elle permettrait à tous les téléspectateurs de recevoir près de trente chaînes, dont quatorze gratuites, sans modifier leur antenne ni changer leur téléviseur.

Tout est prêt pour un démarrage dès le mois de mars, mais cette multiplication des chaînes mettrait fin au monopole privé de TF1 et de M6 qui captent aujourd'hui, à eux seuls, plus de 70 % des recettes de publicité. On comprend que c'est là que le bât blesse pour le Gouvernement, alors que tout est fait pour que l'ensemble des médias reste aux mains d'une oligarchie proche du pouvoir (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

En retenant l'idée dilatoire lancée par TF1 d'une nouvelle norme technique, celle de la haute définition, qui obligerait les téléspectateurs à acheter un téléviseur spécial coûtant environ 5 000 euros, auquel il faudrait ajouter un décodeur de 200 euros, le Gouvernement retiendrait un système qui n'a cours dans aucun autre pays au monde, et qui ne bénéficierait qu'à quelques foyers privilégiés.

La manœuvre est claire : il s'agit de tuer dans l'œuf toute tentative de déploiement d'une télévision numérique gratuite pour tous, afin de préserver les intérêts de TF1 et de M6.

M. Bernard Deflesselles. C'est scandaleux de dire cela !

M. Didier Mathus. Au moment où ce numérique terrestre connaît de grands succès populaires dans les pays où le même modèle gratuit prédomine, la France s'apprêterait donc, contre l'avis unanime du Conseil supérieur de l'audiovisuel, à faire un choix incompréhensible. Il est vrai que depuis la dernière élection présidentielle, l'UMP n'en finit pas de payer ses dettes à la société de Martin Bouygues, dont on connaît les liens personnels étroits avec M. Sarkozy (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le ministre, devant une telle soumission du Gouvernement à des intérêts particuliers...

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ces propos sont honteux !

M. Didier Mathus. ...ne serait-il pas plus simple de laisser votre fauteuil à M. Le Lay, PDG de TF1, puisqu'en tout état de cause, c'est lui qui dicte aujourd'hui la politique du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Scandaleux !

M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, je déplore vivement que vous preniez le ton de la polémique et de la caricature pour traiter d'un sujet si important pour nos concitoyens (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Glavany. Vous offrez du temps de cerveau disponible à Coca-Cola !

M. le ministre de la culture et de la communication. Il me semble utile de rappeler que la TNT n'est pas un sigle barbare incompréhensible, mais la promesse d'une offre audiovisuelle élargie pour l'ensemble de nos concitoyens grâce à une technologie qui est désormais à portée de main. Cela étant, nous ferions preuve d'inconséquence si nous omettions de procéder, avant que la décision définitive ne soit prise, à un certain nombre de vérifications...

M. Didier Mathus. Trois ans de retard, c'est long !

M. le ministre de la culture et de la communication. ...dans l'intérêt même de nos concitoyens, futurs téléspectateurs. Les vérifications sont d'ordre juridique et technologique et elles ont pour objet de s'assurer que la norme technique retenue sera véritablement performante. Sur instruction du Premier ministre, je me suis rendu à Londres en compagnie du président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, pour assister sur place à une expérience réussie. Cette démarche n'a rien de dilatoire, mais vise au contraire à permettre au Premier ministre et au président du Conseil supérieur de l'audiovisuel d'annoncer très prochainement aux Français le choix de la norme qui rendra possible l'accès à quinze chaînes supplémentaires gratuites, ce qui n'est pas négligeable.

Il n'y a là aucune manœuvre (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et je vous serais reconnaissant de ne pas utiliser le terme de « décodeur », qui peut, à tort, laisser craindre l'arrivée d'une nouvelle technologie à la fois compliquée et payante. Le Premier ministre va confirmer, dans les jours ou les semaines qui viennent, le lancement de cette nouvelle offre télévisuelle, ce qui n'exclut pas que d'autres normes, pour d'autres types de télévision, puissent ensuite voir le jour (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) De grâce, ne confondez pas et ne caricaturez pas tout : la télévision gratuite pour tous grâce à la TNT, en 2005, constitue une première étape et d'autres suivront (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe socialiste. Vendu !

EXTRADITION DE CESARE BATTISTI

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié, pour le groupe UMP.

M. Richard Mallié. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice. Permettez-moi, monsieur le président, d'associer à cette question mes collègues Franck Gilard et Pierre Lellouche.

Le 6 juin 1978, le gardien de prison Antonio Santoro est abattu de deux balles dans le dos.

Le 16 février 1979, Lino Sabbadin, boucher, est assassiné froidement pour s'être opposé à un vol avec violence ; Pierluigi  Torregiani, bijoutier, est assassiné pour les mêmes raisons, et son jeune fils présent sur les lieux reçoit une balle dans la colonne vertébrale, qui le laissera paraplégique.

M. Alain Marsaud. Eh oui !

M. Richard Mallié. Le 16 avril 1979, le policier Andrea Campagna est abattu de cinq balles à bout portant pour avoir participé à l'arrestation des assassins du bijoutier Torregiani.

En 1990, la justice italienne a condamné par contumace Cesare Battisti, ancien terroriste d'extrême gauche, à la réclusion à perpétuité pour ces meurtres.

Treize ans plus tard, le 3 janvier 2003, l'Italie demande l'extradition de Cesare Battisti, qui vit libre en France depuis fort longtemps (« Inadmissible ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il y a quatre jours, M. le Premier ministre peut enfin signer le décret autorisant l'extradition de Battisti, ce dernier ayant épuisé toutes les voies de recours. Or, depuis le début de la procédure d'extradition, de multiples voix se sont élevées à gauche, celles des bien-pensants, celles des donneurs de leçons, celles des moralisateurs, celles des Verts et des groupes d'extrême gauche, en un mot, celles de l'opposition (Exclamations sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Depuis dix mois, elles se sont répandues sans discontinuer dans la presse, multipliant les comités de soutien et les pétitions. Tout cela, non pour dénoncer ces assassinats odieux, mais pour fustiger notre gouvernement d'avoir donné suite à la demande italienne d'extradition...

M. le président. Monsieur Mallié, je vous prie de poser votre question !

M. Richard Mallié. ...et pour placer Battisti sous la protection de la ville de Paris,...

M. Alain Marsaud. C'est scandaleux !

M. Richard Mallié. ...en omettant scrupuleusement d'évoquer la vingtaine de meurtres qu'on lui attribue.

Face à cette polémique partisane, scandaleuse et choquante, je demande à M. le garde des sceaux de réaffirmer, pour ceux qui ne l'auraient pas entendue, la voix de la raison et de la responsabilité. La démocratie et l'État de droit commandent en effet de répondre favorablement à cette demande d'extradition (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, la voix de la raison ne peut appeler à autre chose qu'au respect du droit (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

L'Italie a effectivement demandé l'extradition de M. Battisti.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Pas l'Italie, Berlusconi !

M. le garde des sceaux. Vous avez rappelé les faits qui ont été reprochés à M. Battisti et qui ont motivé sa condamnation. La cour d'appel de Paris a donné un avis favorable à cette extradition et, sur ma proposition, le Premier ministre a signé le décret d'extradition. C'est aussi simple que cela (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Je voudrais faire trois rappels. Premièrement, M. Battisti a été condamné dans des conditions jugées conformes à la Convention européenne des droits de l'homme, après que l'Italie a modifié sa législation en 1989 pour se mettre en conformité avec cette convention. Deuxièmement, le Gouvernement considère que l'on ne peut pas, d'un côté participer à la construction d'un espace judiciaire européen permettant de lutter efficacement avec nos voisins européens contre le terrorisme et la grande criminalité, et de l'autre ne pas respecter nos engagements internationaux (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Troisièmement, le Gouvernement a respecté ses engagements, car c'est dans les traités internationaux que la parole de la France s'exprime (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

CONDUITE SOUS L'INFLUENCE DE STUPÉFIANTS

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dupont, pour le groupe UMP.

M. Jean-Pierre Dupont. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Monsieur le ministre, il ne se passe pas de jour sans que la presse ne se fasse l'écho d'accidents dus à la consommation de drogue. J'en ai encore eu, récemment, un bien triste exemple dans ma circonscription.

Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Et l'alcool ?

M. Jean-Pierre Dupont. Depuis la loi votée en janvier 2003 à l'initiative de Richard Dell'Agnola, la France dispose d'un arsenal législatif qui permet de sanctionner sévèrement les personnes conduisant sous l'influence de stupéfiants, mais aussi de réaliser des contrôles de dépistage aléatoires sur les routes, à l'instar de ce qui se pratique en matière d'alcool. C'est une avancée très importante qui s'inscrit dans la politique de lutte contre la violence routière voulue par le Président de la République.

Pour l'instant, les seuls tests reconnus légalement sont le dépistage par l'urine et l'analyse de sang. Ils permettent non seulement de déterminer la présence de drogue chez les conducteurs, mais aussi de préciser la date de consommation. Les contrôles, qui se multiplient depuis quelques mois, semblent confirmer l'importance de la consommation de drogue, notamment du cannabis, par les conducteurs.

Ces contrôles constituant une procédure lourde et difficile à mettre en œuvre, des opérations ont été menées en Vendée et en Seine-Saint-Denis pour expérimenter de nouveaux tests par la salive, plus simples d'utilisation. Ces tests salivaires, qui existent depuis longtemps chez nos voisins européens, en particulier en Allemagne, sont fiables et leur mise sur le marché est très attendue en France, car elle doit permettre de franchir une nouvelle étape dans la lutte contre la consommation de stupéfiants.

Monsieur le ministre, nous connaissons votre engagement dans la lutte contre la drogue. Pouvez-vous nous indiquer quand les tests salivaires seront généralisés en France, quels sont les résultats des opérations menées par les forces de l'ordre durant ces derniers mois et, de façon plus générale, quel bilan vous dressez de l'application de cette loi deux ans après son vote par le Parlement ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


M. Dominique de Villepin,
ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, la conduite sous l'influence de stupéfiants se révèle particulièrement meurtrière, à l'origine de 15 % des accidents graves dans notre pays et même du quart d'entre eux dans les villes les nuits de weed-end. Nous le voyons bien, notre société paie là un prix très élevé. Lutter contre ce phénomène constitue donc une priorité dans les actions que nous menons en matière de sécurité routière.

La loi de février 2003 a prévu le cadre avec le délit afférent. Dès lors, il fallait nous doter d'un outil technique indispensable à l'application de cette loi. J'ai commandé cet outil au centre d'études et de recherches de la logistique de la police nationale, qui a créé un test salivaire simple et pratique qui s'effectue au bord des routes. Ce test, qui a été validé, a été adopté et peut donc, à présent, être largement utilisé.

Comme vous l'avez rappelé, on y a d'ores et déjà eu recours dans le cadre d'opérations menées dans les Yvelines et en Seine-Saint-Denis. Les résultats des derniers tests établis en septembre dernier ont fait apparaître que, sur quarante et une interpellations, essentiellement à la sortie de boîtes de nuit, trente-huit jeunes âgés de seize à vingt-huit ans étaient véritablement sous l'emprise de stupéfiants.

L'usage de ce test, qui reste cependant onéreux puisqu'il coûte entre quinze et vingt euros, doit donc être généralisé. Cela s'est fait en Allemagne, où il est utilisé à titre préventif et répressif, et en Italie, avec une vocation uniquement répressive. Nous avons nous aussi la volonté de généraliser l'emploi d'un tel test dans le courant de l'année 2005. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

CONSTRUCTION DE LOGEMENTS

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.

Les promesses faites par M. Borloo en matière de logement ne sont pas crédibles. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Hier, le secrétaire d'État au logement, a imputé, comme à l'habitude, la terrible gravité de la crise du logement au précédent gouvernement. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Et c'est scandaleux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) En effet, 44 000 logements neufs ont été financés en 2001, contre 43 000 en 2003. Qui trompe les Français ? (« Vous ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

De même, 112 000 logements ont bénéficié de l'aide à la réhabilitation en 2000, contre 80 000 seulement en 2003. Qui trompe donc les Français ?

Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est scandaleux !

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Non, c'est faux !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Dans le budget 2005, vous faites bénéficier près de 300 000 ménages d'un allégement de l'impôt sur la fortune (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) mais vous en avez sorti 200 000 de l'aide au paiement des loyers. Pour qui gouvernez-vous donc ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Aujourd'hui, au Sénat, s'ouvre le débat sur le projet de loi de prétendue cohésion sociale qui prévoit la construction en cinq ans de 500 000 logements sociaux. Hélas, le Gouvernement pour lequel la crise du logement ne justifie pas des choix prioritaires n'a pas accordé les crédits nécessaires et les engagements pris ne pourront pas être tenus.

Les locataires, et c'est un autre scandale, sont rançonnés pour remplir vos caisses. Vous exigez des bailleurs sociaux qu'ils avancent la trésorerie de l'État. Vous leur devez plus de 500 millions d'euros, soit l'équivalent d'une année des subventions qui leur sont promises dans le futur plan.

M. le président. Monsieur Le Bouillonnec, posez votre question, je vous prie.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Or qui paie cette dette colossale ? Les locataires qui subissent depuis des mois la hausse des loyers.

« Borloo, magicien ou bonimenteur ? » s'interrogeait un prestigieux quotidien. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ma question exprime le même et terrible doute : êtes-vous le ministre de la cohésion sociale ou bien plutôt celui de l'illusion sociale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État au logement.

M. Marc-Philippe Daubresse, secrétaire d'État au logement. Monsieur Le Bouillonnec, la grande cause nationale du logement mérite mieux que de la politique politicienne. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Elle requiert de la vérité. Vous n'empêcherez pas les chiffres de parler. Je maintiens que, dans les vingt dernières années, le record historique à la baisse de production de logements sociaux est détenu par le gouvernement Jospin, en 1999, avec 40 000 logements produits quand il en fallait 80 000. (Mêmes mouvements.)

C'est donc le gouvernement Jospin qui nous a fait entrer dans la crise et c'est le gouvernement Raffarin qui nous en fera sortir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Monsieur Le Bouillonnec, y a-t-il deux catégories d'élus socialistes ? D'un côté, ceux que je rencontre tous les jours dans toutes les villes de France et qui disent merci pour le plan de cohésion sociale de Jean-Louis Borloo (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste) et, de l'autre, ceux, qui me tiennent un autre discours à l'Assemblée nationale ? Ceux qui, comme Jack Lang, disent devant des millions de téléspectateurs : « Le plan de Jean-Louis Borloo est un bon plan » (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et ceux qui souffrent aujourd'hui d'amnésie, un peu comme vous, monsieur Le Bouillonnec ? A Montpellier, au congrès HLM, vous m'avez dit en effet : « Si vous tenez les engagements pris légitimement à la demande du président Delebarre, je soutiendrai votre plan ».

M. Michel Delebarre. Moi, je n'ai rien dit !

M. le secrétaire d'État au logement. Mais, aujourd'hui, à l'Assemblée nationale, vous affirmez le contraire. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Souffrez-vous donc de schizophrénie ?

Monsieur Le Bouillonnec, regardez plutôt le budget du logement pour 2005.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est fait !

M. le secrétaire d'État au logement. À périmètre équivalent, il augmente de 8 %. Pour les aides personnelles au logement, c'est plus 333 millions d'euros, soit plus 7 %. Alors, arrêtez de dire des mensonges ! Face à la réalité de la crise du logement, il y a ceux qui, comme vous, se cherchent des excuses et ceux qui, comme nous, ont trouvé des moyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

AVENIR DE DCN

M. le président. La parole est à M. Charles Cova, pour le groupe UMP.

M. Charles Cova. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question, à laquelle s'associe M. Guy Teissier, président de la commission de la défense, s'adresse à Mme la ministre de la défense.

Madame la ministre, en ma qualité de rapporteur des crédits de la marine, j'ai bien évidemment porté une attention toute particulière à votre discours pour lequel vous avez inauguré, lundi dernier, le 19e salon EURONAVAL. À cette occasion, vous avez signé avec votre homologue italien un accord de coopération portant sur vingt-sept frégates multimissions, dont dix-sept pour la France.

Cet accord est important car il confirme, d'une part, une politique de coopération que vous avez su relancer et défendre avec conviction dès votre arrivée au ministère, et conforte, d'autre part, le bien-fondé de la création d'ARMARIS en juillet 2002. Il s'agit de la société commune à DCN et à Thales pour la maîtrise d'œuvre des programmes navals à l'exportation.

Mais, vous le savez, madame la ministre, la réussite de ce programme entre l'Italie et la France ne peut occulter le fait que l'industrie navale en Europe est très dispersée : 21 industriels et 23 chantiers navals, contre 4 industriels et 6 chantiers navals aux États-unis. Comment, dans ces conditions, pouvons-nous rester compétitifs, non seulement en France mais aussi en Europe ?

Aussi, je ne peux qu'approuver votre stratégie et celle du Gouvernement. Je rappelle vos propos : « Clarifier le secteur de l'industrie navale, c'est rapprocher ceux qui conçoivent les navires de ceux qui conçoivent leurs systèmes de combat ». En Allemagne, c'est quasiment fait entre HDW et Thyssen-Krupp. En Angleterre, on parle du printemps 2005.

Notre pays ne peut rester en dehors de ce processus, d'où votre annonce d'ouverture de capital de DCN afin qu'elle puisse saisir toutes les opportunités d'alliances, d'abord en franco-français puis au niveau européen, le capital de la société mère ou de ses filiales restant majoritairement public.

M. le président. Monsieur Cova, je vous invite à poser votre question.

M. Charles Cova. J'y viens, monsieur le président.

C'est une décision majeure que je soutiens et c'est l'occasion, madame la ministre, de vous poser une double question.

Avec la disposition prévue en loi de finances rectificative pour 2004 ouvrant le capital de DCN, l'industrie française est-elle en mesure de répondre à temps aux défis de la consolidation européenne et aux attentes des pays partenaires ?

La transformation en deux ans de DCN en société de droit commun est aussi l'illustration du remarquable soutien apporté par son personnel au travers du contrat d'entreprise.

M. le président. Il faut conclure, monsieur Cova. Je vous rappelle qu'un autre orateur doit poser une question après vous.

M. Charles Cova. L'ouverture du capital est-elle susceptible de remettre en cause le cadre juridique de ce personnel ?

M. le président. Si je vous presse, chers collègues, c'est que cette séance n'est retransmise par la télévision que jusqu'à seize heures. Et chacun doit bénéficier des mêmes droits.

La parole est à Mme la ministre de la défense.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur Cova, la transformation de DCN est une réussite. La société est même en avance sur son plan pluriannuel. Elle remplit totalement les demandes de la marine avec un excellent résultat en termes de coût et d'efficacité.

Aujourd'hui, nous avons la possibilité de passer à une nouvelle phase. Je suis persuadée que, face à la concurrence internationale, seules les sociétés de dimension européenne auront la possibilité de résister. C'est la raison pour laquelle je souhaite que DCN puisse s'appuyer sur des partenaires qui l'aident, aux plans commercial et industriel, à avoir cette dimension qui, ensuite, permettra des rapprochements et des alliances au niveau européen.

C'est le but du texte tendant à prévoir l'ouverture du capital, qui intervient alors même que DCN et Thales poursuivent leurs discussions. Ce texte donnera toutes ces chances à DCN en introduisant la souplesse qui permettra les rapprochements nécessaires. Bien sûr, il sera présenté aux personnels.

Ce texte constitue aussi pour l'entreprise la garantie qu'elle restera publique, que l'unité du groupe sera maintenue et, pour les personnels, que leurs droits et statut seront préservés.

J'ai fait en sorte enfin que ce texte intervienne maintenant, et non pas au détour d'un amendement déposé à la sauvette comme cela a parfois été le cas, parce que j'ai souhaité une totale transparence vis-à-vis des parlementaires et des personnels. C'est en s'appuyant en effet sur la qualité des personnels et sur cette nouvelle souplesse offerte que nous gagnerons le pari de la réussite de DCN. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

FERMETURE DE TRÉSORERIES DANS LA CREUSE

M. le président. La parole est à M. Jean Auclair, pour le groupe UMP.

M. Jean Auclair. Mon intervention s'adresse à Dominique Bussereau et concerne tous les élus municipaux, notamment ceux des départements ruraux.

Mes chers collègues, j'ai mal à ma Creuse ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est un des plus beaux départements et il y fait bon vivre. Mais samedi, à la suite de l'assemblée générale de l'Association des maires, une image bien triste de la Creuse a été véhiculée par les médias nationaux à l'initiative des conseillers généraux et régionaux socialistes. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Conservateurs et ringards, ils ont poussé des élus municipaux à démissionner sans qu'eux-mêmes démissionnent, à part un qui n'est pas maire.

La raison de ce numéro de basse politique politicienne est la fermeture de cinq trésoreries où le nombre d'opérations s'échelonne entre 0,6 et 2,5 par jour. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Monsieur le secrétaire d'État, il serait temps de dire aux Français que l'opération « Bercy en mouvement » qui condamne ces trésoreries est l'œuvre de M. Fabius alors ministre des finances. (Huées sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

À cette époque, à gauche, c'était silence radio. Mais, alors que se profile l'élection du président de l'Association des maires de France, la démagogie et le populisme s'emparent de plusieurs conseils généraux de gauche. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Louis Idiart et M. Patrick Lemasle. Pas vous !

M. Jean Auclair. Monsieur le secrétaire d'État, je vous demande de dénoncer cette comédie politique d'un niveau pitoyable. À l'UMP, nous sommes attachés plus que quiconque au service public, au service au public et je dis bien à un service au public de qualité.

M. le président. Monsieur Auclair, posez votre question.

M. Jean Auclair. En milieu rural, un café-restaurant, un multiservices, un distributeur de carburants, des professionnels de la santé, c'est sans doute pour la population plus important qu'une trésorerie peu fréquentée. Et si ces services à la population disparaissent, les élus démissionnent-ils ? Non !

Il serait temps de dire aux élus locaux que le Gouvernement a la volonté de développer les territoires ruraux en accompagnant la demande de nouveaux services.

La gauche demande un moratoire des services publics donc le statu quo d'une carte vieille de cinquante ans. Elle n'a pas encore compris que la société évolue, qu'elle est en perpétuelle mutation.

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, très honnêtement, l'avenir du monde rural ne doit-il pas passer par une nouvelle cartographie, une modernisation et une amélioration de la qualité des services publics ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le député Auclair, comme vous le savez, le Gouvernement, et en particulier le Premier ministre, est particulièrement attaché à la défense de la ruralité. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) 

Plusieurs députés du groupe socialiste. Laquelle ?

M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas vrai !

M. Patrick Lemasle. En fermant les bureaux de poste et les autres services publics ?

M. le secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire. Cet attachement a été rappelé très solennellement, ce matin, en conseil des ministres.

Le cas de la Creuse, dont on parle en effet beaucoup, a fait l'objet d'une manipulation politique et médiatique parfaitement orchestrée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) La fermeture de ces cinq trésoreries n'a été effectuée, comme vous l'avez rappelé, monsieur le député, qu'après concertation entre le préfet, le trésorier-payeur général et les élus.

M. Patrick Lemasle. Lesquels ?

M. Jean-Louis Idiart. Ce n'est pas vrai !

M. le secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire. Nous devons être raisonnables : chacune de ces cinq trésoreries recevait moins de deux visiteurs par jour. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Louis Idiart. Embauchez des fonctionnaires !

M. le secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire. Cela dit, il nous faut naturellement trouver des solutions pour défendre notre ruralité. Nous allons donc organiser dans ces trésoreries des permanences les jours de marché et installer des connexions informatiques entre les mairies concernées et le Trésor public.

M. Michel Delebarre. Ah !

M. le secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire. Mais le plus important pour votre département, monsieur Auclair, qui est un bon exemple car il représente parfaitement le monde rural, est le classement de la totalité de son territoire en zone de revitalisation rurale. C'est une mesure réellement favorable à la ruralité et qui répond à vos attentes.

Par ailleurs, conformément aux souhaits du Président de la République et du Gouvernement, toute la région Limousin sera prochainement reliée au réseau Internet à haut débit. Encore une mesure en faveur de la modernité et de l'avenir du monde rural !

Vous le voyez, monsieur Auclair, nous prenons très au sérieux l'avenir du monde rural. C'est une priorité du Gouvernement, qui ne se laissera pas abuser, dans une période comme celle-ci, par des manipulations politiques que vous avez, à juste titre, dénoncées ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de Mme Paulette Guinchard-Kunstler.)

PRÉSIDENCE DE MME PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER,

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

    2

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2005

Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 (nos 1830, 1876).

Discussion générale (suite)

Mme la présidente. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Marc Bernier.

M. Marc Bernier. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État à l'assurance maladie, mes chers collègues, le vote de la loi du 9 août dernier, relative à la politique de santé publique, répondait à la volonté reconnue par tous et défendue ardemment par vous, monsieur le secrétaire d'État, de poser les fondements d'une rénovation de notre politique sanitaire.

En effet, s'il était reconnu que la France disposait d'un système de soins curatifs parmi les meilleurs au monde, il n'en demeurait pas moins que certains secteurs de la santé publique présentaient, en termes d'indicateurs, deux points faibles : d'une part une mortalité prématurée, due principalement à une politique de prévention lacunaire ; d'autre part, des inégalités de santé entre les catégories de populations, les sexes, ou encore les différentes régions.

Or, si la loi du 9 août 2004 permet désormais de nous doter d'une organisation sanitaire rééquilibrée, au bénéfice d'une politique de prévention que le présent projet de loi propose de financer, permettez-moi cependant de vous interroger, monsieur le secrétaire d'État, sur le financement de la mise en œuvre du dépistage systématique du cancer du sein.

Cette maladie, dont la prévention est l'un des objectifs majeurs figurant en annexe du projet de loi relatif à la politique de santé publique, a le triste privilège d'être la première cause de décès par cancer chez la femme, malgré les nombreux efforts consentis en la matière, notamment pour informer des sujets les plus sensibles.

Si l'on compare notre situation à celle des autres pays européens, ces dernières années ont été marquées par un développement encore insuffisant du dépistage et des inégalités dans l'accès à de telles prestations sanitaires, faute d'avoir prévu une politique et un financement appropriés.

Au vu de ces éléments, j'ai eu l'honneur d'être mandaté par Jean-Michel Dubernard, au titre de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, l'OPEPS, afin de rédiger un rapport sur les résultats du dépistage du cancer en sein en France. L'étude a mis en évidence la justification médicale des campagnes programmées et régulières de dépistage de ce cancer. Selon des statistiques concordantes, ces campagnes permettraient une réduction significative de la mortalité par cancer du sein dans les populations étudiées, et par voie de conséquence une réduction importante des coûts liés aux thérapies induites.

Veuillez m'excusez d'aborder un tel sujet sous un angle purement pécuniaire, mais je reste convaincu que la prévention doit être une priorité évidente, pour les patientes, mais aussi pour notre régime d'assurance maladie.

Dans le cadre de cette étude, j'ai pu néanmoins constater l'insuffisante participation des femmes invitées à subir un examen de dépistage organisé. Le taux de participation s'élevait en effet à 38 %, alors que la préconisation européenne est de 70 %.

L'autre point noir est le retard de la prise en charge, puisque le délai moyen entre la date du dépistage et celui du premier traitement est de 2,6 mois, alors que la recommandation européenne est de quatre semaines. Ces difficultés résultent principalement de l'insuffisance des moyens accordés précédemment, que ce soit pour l'information ou les équipements.

Même si le programme français de dépistage organisé du cancer du sein reste assez performant s'agissant du taux de rappel, du taux de cancers détectés et de la valeur prédictive de la biopsie, notre système doit être amélioré selon trois objectifs.

Le premier concerne la nécessaire substitution des actions de « dépistage organisé » au « dépistage individuel », surtout en identifiant mieux les actions relevant du « dépistage organisé» de celles relevant d'actions individuelles. Cette distinction pourrait permettre de ne prendre en charge que les dépenses engagées lors du dépistage organisé, à l'exception des actions réalisées par les femmes présentant un risque particulier - je pense notamment aux risques familiaux ou aux suivis génétiques. Favoriser les programmes organisés permettra d'accroître la qualité globale du dépistage et d'en évaluer plus facilement les résultats, tout en assurant une meilleure maîtrise médicalisée des dépenses d'assurance maladie.

Le deuxième objectif serait de limiter le remboursement des dépistages aux femmes âgées de cinquante à soixante-quatorze ans et aux femmes présentant un risque particulier, sur la demande argumentée du médecin, comme le suggère la communauté scientifique. L'opportunité de supprimer ou de réduire la prise en charge des examens hors dépistage organisé peut être discutable, mais elle se base néanmoins sur les expériences et les résultats obtenus dans les autres pays européens.

Troisième objectif : il serait intéressant de pouvoir standardiser les indicateurs d'efficacité, par exemple la taille des tumeurs, aux niveaux régional et national et de faire réaliser une évaluation dans quelques départements ciblés, ce qui permettra d'apprécier la qualité du dépistage et les coûts qui lui sont associés.

De plus, il faudrait pouvoir combler les lacunes accumulées en termes d'équipements et - c'est un sujet qui me tient à cœur - anticiper les effets de la diminution prévisible des effectifs des radiologues, des gynécologues et des médecins généralistes, afin de garantir un égal accès au dépistage, notamment dans les zones déficitaires.

Enfin, l'organisation du programme de dépistage doit être modernisée pour mieux informer les femmes concernées et réduire les inégalités d'accès, souvent dues à des raisons sociales ou psychologiques.

Il importe également d'associer les médecins traitants, afin qu'ils soient les vecteurs privilégiés d'un système plus préventif que curatif.

Quant à l'assurance maladie, elle devrait pouvoir disposer de moyens nouveaux pour améliorer son système d'information, pour identifier les dépistages spontanés et pour faciliter la prise en charge immédiate des traitements.

Aussi, monsieur le secrétaire d'État, connaissant votre attachement à la lutte contre le cancer, je vous demande de nous garantir le financement d'une telle politique, qui est l'un des objectifs majeurs figurant en annexe du projet de loi relatif à la politique de santé publique. Pour ce faire, je vous propose que soit mise en place une évaluation de l'état du dépistage organisé du cancer du sein pour vérifier l'amélioration du taux de participation et dresser le bilan coût/efficacité de la politique de prévention qui sera mise en œuvre.

Partageant votre souci de sauver notre système de santé et de protection sociale, je vous apporterai mon soutien en vue de l'adoption de ce projet de loi, puisqu'il respecte les engagements législatifs que nous avons adoptés cet été, notamment pour « soigner mieux en dépensant mieux », et pour assurer l'égalité des citoyens devant l'offre de soins. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, tout le monde s'accorde aujourd'hui à reconnaître que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale n'est pas un budget d'action, mais en réalité un budget de transition. En effet, il faut attendre une loi organique qui refondra l'ensemble de l'architecture comptable des lois de financement de la sécurité sociale.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. L'architecture juridique !

M. Pascal Terrasse. Juridique, mais également comptable.

Cette loi organique aurait dû être présentée à l'automne - c'est ce qui nous avait été annoncé.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Après le PLFSS !

M. Pascal Terrasse. En réalité, depuis la mise en place du plan Juppé, notre système de financement de la sécurité sociale est un patchwork : il manque de lisibilité. Le président Debré, reprenant des éléments de la Cour des comptes, le faisait d'ailleurs lui-même remarquer, en déclarant que depuis que sont votées ici les lois de financement de la sécurité sociale, le manque de lisibilité, patent, décrédibilise le Parlement.

Ce budget n'est pas seulement un budget de transition : il est également insincère, irréaliste et, c'est vrai, il décrédibilise fortement le Parlement.

M. Gérard Bapt. C'est tout à fait exact ! Cela n'est pas assez dit !

M. Pascal Terrasse. Je m'explique. Le niveau de fixation de l'ONDAM est non seulement un enjeu financier - cela a été répété pendant les débats sur la réforme de l'assurance maladie -, mais aussi un enjeu de crédibilité politique.

M. Gérard Bapt. Tout à fait !

M. Pascal Terrasse. Or que constatons-nous ?

L'ONDAM « rebasé » est cette année de 131 milliards d'euros et l'ONDAM prévisionnel pour 2005 a été fixé à 134,9 milliards d'euros. Ainsi, année après année, les objectifs que nous devons atteindre ne sont donc pas respectés. Cela pose toute une série de questions sur lesquelles je voudrais vous interpeller, monsieur le secrétaire d'État.

À l'occasion de la réforme de l'assurance maladie, vous avez indiqué que si les dépenses dépassent de plus de 0,75% ce qui est prévu, une procédure d'alerte permet au Parlement de modifier la donne. Or c'est clair : il faudra faire appel à ce système dès le début de l'année prochaine !

Pour les secteurs sanitaire et médico-social, soit « on taille dans le lard » - mais je ne crois pas que ce soit votre intention -, soit on laisse filer les dépenses d'assurance maladie.

L'exemple le plus parlant est l'hôpital. Si l'on s'en tient aux actions normales du financement de l'hôpital - avec la réforme de la tarification, les GVT et tous les systèmes liés aux dépenses traditionnelles et normales - la hausse des dépenses est évaluée 4,74 %. Or vous proposez un financement qui progressera de 3,6 %. L'hôpital va donc encore être en déficit, et cela n'est pas acceptable.

De la même façon, pour le secteur médico-social - dont j'aurais souhaité obtenir les chiffres officiels car il était habituel de nous communiquer les dépenses par secteur d'activité -, d'après les chiffres qui nous sont fournis par vos services l'évolution serait de 5,2 %. Or sur ce pourcentage - et il serait très intéressant que vous puissiez nous apporter les éléments contraires -, 2,5 % correspondent à des mesures nouvelles. Ce secteur bénéficiera donc en réalité d'une hausse de 2,7 %.

En outre, la réforme Fillon, relative aux 35 heures, qui supprime les aides Aubry représentera un surcoût de 3 % pour l'ensemble des associations qui gèrent le secteur médico-social.

Mme Chantal Bourragué. Ce sont les 35 heures qui ont coûté cher !

M. Pascal Terrasse. Les grandes associations vous ont d'ailleurs signalé qu'en l'absence d'un « rebasage » plus important en matière de dépenses, environ 13 000 emplois pourraient être supprimés dès l'année 2005.

Il faut ajouter une mesure prise par vous-même correspondant au 0,2 % de la formation professionnelle, le GVT à 1,1 %, et, enfin, l'inflation.

Par conséquent, le pourcentage d'augmentation retenu pour le secteur médico-social, pour des dépenses objectives, obligatoires, devrait être de 5,8 %. Or vos objectifs tournent autour de 2,5 %. Votre système, en asphyxiant le secteur médico-social, aura de lourdes répercussions sur les personnes âgées et les personnes handicapées.

J'en viens à la branche vieillesse.

Lors des débats sur les retraites, j'avais signalé à M. Fillon que la réforme des retraites allait entraîner, dès l'année 2005, des déficits. Il m'avait répondu - M. Bertrand était d'ailleurs présent - que le déficit interviendrait en 2006 et que serait créé un prélèvement vieillesse de 0,2 % sur la masse salariale à partir de 2006. J'avais alors exprimé mon désaccord, expliquant que ces mesures allaient mettre la caisse nationale d'assurance vieillesse en difficulté dès 2005.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Vous êtes contre les carrières longues !

M. Pascal Terrasse. Il ne suffit pas de prendre des mesures, il faut aussi les financer, monsieur le secrétaire d'État ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Gilles Artigues. Parole d'expert !

M. Pascal Terrasse. En l'occurrence, votre imprévoyance politique place les comptes sociaux dans une situation d'alerte particulièrement grave.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Quelle remise en cause du gouvernement Jospin !

M. Pascal Terrasse. Pour conclure, je dirai que plus vous mettez les comptes sociaux en difficulté, plus les assurés sociaux et les petits paient ! Aujourd'hui, lorsque vous diminuez les impôts des plus fortunés, en l'occurrence l'impôt sur les grandes fortunes, ce sont évidemment les petits assurés sociaux qui trinquent ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Door. C'est petit !

M. Pascal Terrasse. Voilà pourquoi nous pensons que ce PLFSS, en plus d'être insincère et sans envergure, est dangereux pour l'ensemble des assurés sociaux. Monsieur le ministre, nous aurons l'occasion de vous le rappeler tout au long de l'année 2005, et à toutes celles et ceux qui ne sont pas contents de m'entendre ici, nous saurons le leur rappeler le moment venu. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Bourragué.

Mme Chantal Bourragué. Madame la présidente, madame la ministre de la famille et de l'enfance, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, si vous me le permettez, je vais m'attarder, pour la branche « famille », sur l'article 24 du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cet article prévoit le doublement de la prime d'adoption, qui passe de 812 euros à 1 624 euros en 2005.

La prime d'adoption, désormais adossée à la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, permet à tous les types de parentalité une reconnaissance identique. Je tiens à affirmer à Mme Fraysse que ce n'est pas de la démagogie, mais une mesure juste et concrète.

Rappelons que, depuis janvier 2004, environ 50 000 primes à la naissance sont versées chaque mois aux familles françaises. Ce sont plus de 550 000 familles qui ont bénéficié de l'allocation de base de la PAJE, dont plus de 1 000 familles au titre de l'adoption. Dans 43 % des cas, cette allocation est versée pour la naissance d'un premier enfant. C'est un réel progrès pour les familles.

La PAJE n'est pas qu'une prime de naissance ou une allocation, c'est aussi un complément de libre choix d'activité, qui aide les parents souhaitant réduire leur activité. C'est aussi un complément de libre choix du mode de garde pour les parents qui confient leur enfant à une assistante maternelle ou à une garde d'enfant à domicile.

La PAJE est une mesure concrète. Elle améliore la vie des familles. Le bilan est là : 750 000 familles ont perçu le complément d'activité et 100 000 le complément de libre choix du mode de garde.

Face à des tels chiffres, il est difficile de parler de démagogie.

Madame la ministre, vous prenez désormais en compte les besoins réels des parents désireux d'adopter un enfant, qui subissent des contraintes spécifiques induisant des démarches longues et coûteuses : frais de dossier, nombreux déplacements en France ou à l'étranger, paiement de frais d'entretien de l'enfant dans certains pays étrangers. Je suis certaine que ces familles seront sensibles à cette nouvelle reconnaissance. La démarche de l'adoption − courageuse, volontaire et généreuse − ne doit pas être semée d'embûches ni réservée aux plus aisés.

Au-delà, vous posez les bases de la réforme de l'adoption. Quoi qu'en dise Mme Mignon, votre réflexion n'a pas simplement débouché sur une mesure symbolique de doublement de la prime d'adoption. Nous connaissons tous les difficultés auxquelles se heurtent les couples désireux d'adopter un enfant. Or vous voulez améliorer la procédure de l'adoption et, depuis plusieurs mois, vous conduisez la concertation avec les associations, le Conseil supérieur de l'adoption et un groupe de travail à l'Assemblée nationale, présidé par Mme Michèle Tabarot et auquel je participe. La réforme que vous envisagez doit permettre d'aboutir à une procédure d'adoption plus simple et plus juste.

Permettez-moi, madame la ministre, d'attirer votre attention sur deux points majeurs qui montrent à quel point cette réforme est nécessaire.

Lors de votre audition, vous avez mentionné la hausse du nombre des pupilles de l'État. Ce fait paraît fort étonnant quand on sait que de nombreuses familles sont en attente d'adoption. A priori, toutes les lois existent pour que ces enfants soient adoptés. Il faut relancer les évaluations et les actions dans chaque département.

En ce qui concerne l'adoption internationale, les couples français ont parfois le sentiment d'être défavorisés. Il semble que des rigidités spécifiques à notre pays rendent cette démarche plus difficile pour les Français. La réforme que vous souhaitez engager devra prendre en compte ces dysfonctionnements. Il faut que les candidats à l'adoption aient facilement accès à toutes les informations qui leur sont utiles.

Vous demandez aux services consulaires d'apporter un appui renforcé aux familles, avec la création d'un « référent adoption ». De plus, vous envisagez de créer une agence française de l'adoption qui accompagnera les familles adoptives dans leurs démarches. Ces mesures vont dans le sens d'une meilleure harmonisation de procédures toujours trop complexes.

Cependant, en harmonisant les dossiers, gardons-nous de les surcharger. La simplicité est un gage d'efficacité. La souplesse doit aussi nous permettre de nous adapter aux évolutions des différents pays.

Au total, 24 000 familles sont aujourd'hui dans l'attente d'un enfant, et l'on ne constate que 5 000 adoptions chaque année, dont 3 500 à l'étranger. Les couples français en attente d'adoption ne veulent plus se sentir pénalisés quand ils cherchent à adopter un enfant étranger en attente de parents. Nos administrations − dont je tiens à saluer le dévouement − et nos choix de réforme doivent être guidés par l'intérêt primordial de l'enfant, qui est de trouver une filiation stable. On ne peut imaginer ce que représente, pour un enfant adopté, son inscription sur le livret de famille. Cette filiation reconnue s'accompagne, pour lui, de la stabilité affective.

Bien sûr, je voterai le projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Élisabeth Guigou.

Mme Élisabeth Guigou. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale,...

M. Pascal Terrasse. Le ministre ne vous écoute pas !

Mme Élisabeth Guigou. ...mes chers collègues, c'est le troisième projet de loi de financement de la sécurité sociale présenté par ce gouvernement, qui a donc eu, depuis 2002, le temps de mettre en œuvre ses décisions et qui a pu, l'été dernier, faire voter sa réforme de l'assurance maladie. La situation de notre système de protection sociale est donc l'entier produit de sa politique.

Or que constatons-nous ? La sécurité sociale s'est embourbée : elle est aujourd'hui menacée de banqueroute financière.

Votre politique, monsieur le ministre, fragilise durablement notre système de protection sociale. Cette année, pour la première fois, toutes les branches de la sécurité sociale sont déficitaires.

M. Pascal Terrasse. C'est unique, en effet !

Mme Élisabeth Guigou. Alors que le gouvernement Jospin avait restauré l'équilibre des comptes, vous l'avez détérioré à une vitesse sans précédent.

M. Jean-Pierre Blazy. Dès leur arrivée !

M. Philipe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Elle n'a pas compris, encore ?

Mme Élisabeth Guigou. En 2001, le régime général était excédentaire de 1,2 milliard d'euros ; il est devenu déficitaire de 14 milliards en 2004.

M. Pascal Terrasse. Ça, c'est de la gestion !

Mme Élisabeth Guigou. Pour l'assurance maladie, le déficit a été multiplié par six en trois ans, passant de 2,1 milliards d'euros en 2001 à 13,2 milliards en 2004. Il s'agit de la plus forte dégradation financière de l'histoire de la sécurité sociale.

En matière de dépenses de l'assurance maladie, vous avez fui vos responsabilités, d'abord en laissant filer les dépenses en 2002 et 2003, puis en engageant, l'été dernier, une réforme en trompe-l'œil qui, au lieu de réorganiser l'offre de soins, se contente de reporter sur les générations futures la note − très salée : 35 milliards d'euros − de vos déficits, passés, actuels et même futurs.

M. Jean-Pierre Door. Mémoire courte !

Mme Élisabeth Guigou. Vous vous félicitez avec raison que, depuis un an, les dépenses de santé augmentent moins vite. Tant mieux. Je remarque cependant que, après le pic de 2002 et 2003, vous revenez au rythme des années 1997-2001.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ce n'est pas vrai !

Mme Élisabeth Guigou. Ce ralentissement bienvenu vous a conduit à fixer un ONDAM optimiste. Je ne vous le reprocherai pas. Ce n'est qu'un objectif et ce n'est pas un crime d'être optimiste. Mais j'ai deux motifs d'inquiétude. Le premier est votre politique hospitalière. Les hôpitaux estiment que les reports de charges accumulés représenteront plus de 600 millions d'euros en 2005, et, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, vous ne prévoyez que 300 millions d'euros. Plus grave, pour contenir les dépenses, vous avez annoncé hier dans la presse que vous exigiez que les hôpitaux réalisent, en trois ans, pas moins de 850 millions d'euros d'économies sur leurs achats.

M. Jean-Pierre Blazy. Exorbitant !

Mme Élisabeth Guigou. Cela conduira de nombreux établissements à augmenter leurs reports de charges, à fermer des services ou à comprimer leurs effectifs. C'est grave.

M. Pascal Terrasse. C'est l'asphyxie !

Mme Élisabeth Guigou. À ce niveau de restriction financière, il ne s'agit plus de rationalisation des tâches : on met en danger la qualité des soins à l'hôpital.

Autre sujet d'inquiétude : l'abandon des grands programmes de prévention. Pour renforcer en amont la lutte contre les grandes causes de mortalité et de maladies en France, Bernard Kouchner et moi-même avions lancé, lors de la Conférence nationale de la santé en mars 2001, une série de grands plans pluriannuels de santé publique pour lutter contre le cancer, les maladies cardiovasculaires, le diabète, l'asthme, l'insuffisance rénale chronique, la mucoviscidose, le sida, les hépatites, les maladies émergentes ou orphelines, le suicide. Nous ne nous étions pas contentés d'effets d'annonce, puisque nous avions doté ces programmes, dans le budget du ministère de la santé − c'est-à-dire en plus du projet de loi de financement de la sécurité sociale et de l'ONDAM − d'une enveloppe spécifique de 1,1 milliard de francs. Qu'est-il advenu de ces financements ? Allez-vous les reprendre ?

De quel financement allez-vous doter le programme que nous avions lancé, avec Paulette Guinchard-Kunstler et Bernard Kouchner, contre la maladie d'Alzheimer dont souffrent 800 000 Français ? Pour permettre aux familles de souffler et aux malades de recevoir des soins adaptés, nous avions décidé la création de plus de 7 000 places dans les structures d'accueil de jour. Rien n'a été fait depuis 2002...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est faux !

Mme Élisabeth Guigou. ...et les associations ont d'ailleurs manifesté leur colère, le 22 juin dernier, au Trocadéro à Paris. Depuis, vous avez fait des annonces. Mais où sont les financements, monsieur le ministre ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ils y sont !

Mme Élisabeth Guigou. Nous aimerions avoir des précisions à ce sujet.

Pour ce qui est des recettes de l'assurance maladie, vos prévisions sont, hélas, irréalistes et insincères. Vous tablez sur une progression accélérée de la masse salariale de 4 % en 2005, après 2,6 % en 2004 et alors que rien ne permet d'envisager une baisse du chômage en 2005. Vous savez bien que le taux de croissance du PIB sur lequel vous fondez vos prévisions budgétaires est fortement compromis, en l'absence de toute politique de soutien volontariste à la croissance et à l'emploi de votre part, par le ralentissement de la croissance mondiale et par le prix du baril de pétrole − 50 dollars − qui est bien plus élevé que l'hypothèse de 35 dollars retenue par la loi de finances.

M. Jean-Pierre Door. Quel défaitisme !

Mme Élisabeth Guigou. Les seules recettes nouvelles et certaines proviennent de l'augmentation des charges sur les malades : le forfait hospitalier porté à 16 euros, la franchise de 1 euro sur les consultations, la hausse de la CSG.

Au total, avec cette politique qui sacrifie l'hôpital, qui rogne sur les programmes de prévention, qui table sur des recettes imaginaires, arrivez-vous au moins à réduire significativement le déficit ? Même pas. Pour 2005, vous espérez un déficit de 8 milliards d'euros pour l'assurance maladie. Cet objectif de déficit est aussi abyssal que celui de 2003 : la différence, c'est que nous sommes au lendemain d'une réforme de l'assurance maladie qui était censée rééquilibrer son financement.

Je ne reviendrai pas sur la branche famille, car Marie-Françoise Clergeau a été extrêmement éloquente hier sur ce sujet. Il est vrai que vous pénalisez les familles les plus modestes, sans vous donner les moyens de favoriser les équipements collectifs.

Je m'interroge également sur la réforme du statut des assistantes maternelles que l'on sollicite de plus en plus et qui ont droit, elles aussi, à une progression de carrière.

Mme Marie-Josée Roig, ministre de la famille et de l'enfance. En décembre !

Mme Élisabeth Guigou. Mais je veux aborder, pour conclure, un sujet très peu évoqué, qui semble être tombé dans la trappe qui sépare vos attributions de celle de M. Borloo : la question des accidents du travail. On sait que l'automatisation et l'intellectualisation du travail n'ont en rien supprimé la souffrance physique et mentale au travail. Au contraire, on dénombre 2 000 accidents du travail par jour en France, qui occasionnent une incapacité au moins temporaire. Leur coût social, cumulé avec celui des maladies professionnelles, est évalué à 3 % de la richesse nationale annuelle, soit l'équivalent de plus d'une dizaine de lundis de Pentecôte supplémentaires par an. Les enquêtes européennes soulignent non seulement la progression du stress des travailleurs et des facteurs de charges mentales, mais aussi une véritable épidémie de troubles musculo-squelettiques d'origine professionnelle, due à la généralisation du travail sur écran. Une action collective s'impose. Le gouvernement Jospin et la précédente majorité avaient apporté une première réponse avec la loi contre le harcèlement moral. Mais il faut aller plus loin.

La branche accidents du travail transfère une partie des charges qui relèvent de son régime à l'assurance maladie, alors que l'Institut de veille sanitaire estime à plus de 10 000 le nombre de cancers d'origine professionnelle, et que moins de 800 sont reconnus et indemnisés par la branche accidents du travail. Avez-vous l'intention d'organiser une évaluation contradictoire et révisable chaque année du coût des accidents du travail et des maladies professionnelles que vous ne compensez, cette année, qu'à hauteur de 300 millions d'euros ?

À propos de l'amiante, vous avez rappelé, monsieur le ministre, que le gouvernement auquel j'ai appartenu avait créé le Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante et le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Pour le premier, je vous sais gré d'avoir demandé aux entreprises de payer désormais une partie des préretraites amiante de leurs salariés − c'est l'article 21 du projet de loi. C'est une bonne mesure, et nous vous en remercions. Mais, pour le FIVA, la situation est préoccupante. Après avoir réduit de moitié les dotations du FIVA entre 2002 et 2004, où elles sont passées de 200 à 100 millions d'euros, vous revenez cette année au montant initial de 200 millions. Cela demeure insuffisant pour assurer l'indemnisation de l'ensemble des victimes, évaluée à 300 millions d'euros par le FIVA.

Il est particulièrement injuste de faire peser sur les victimes du travail la contribution forfaitaire de 1 euro pour des actes médicaux qui sont de la responsabilité directe de l'employeur. Là aussi, vous pourriez transférer cette charge sur les employeurs.

Enfin, je vous rappelle votre engagement − inscrit à l'article 54 de la loi relative à l'assurance maladie - de réunir les partenaires sociaux dans un délai de un an, afin de réformer la gouvernance de la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Les associations représentatives des usagers devraient y être associées. Mais où en est-on ? Je ne peux me contenter de l'annonce laconique, que vous avez faite hier soir, d'une prochaine réunion. Il est grand temps de repenser dans son ensemble la politique nationale de prévention, de réparation et de tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles.

C'est une réforme ambitieuse autour de la notion de réparation intégrale des préjudices subis qu'il faut engager. La réparation des accidents du travail n'a pas évolué comme le droit commun de l'indemnisation. Comment justifier la réparation forfaitaire et le fait que le préjudice économique, moral ou esthétique, soit moins bien indemnisé pour un accident du travail que pour un accident de la route ? Nous avons besoin d'un système qui sache à la fois valoriser les efforts de prévention et sanctionner les manquements à la sécurité. Il faut reprendre les propositions du rapport Masse que nous avions commandé. Pourquoi ne pas créer, comme aux États-Unis, des labels pour identifier publiquement les entreprises en fonction de leurs performances sanitaires ?

Il faut retrouver l'esprit de la loi de 1898, première grande loi d'assurance sociale de la IIIe République. Vous avez dit hier soir vouloir réunir les partenaires sociaux pour réformer la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Qu'allez-vous leur demander ? Quel sera l'apport de l'État à cette réforme indispensable ? Enfin, je m'interroge : pourquoi M. Borloo n'est-il pas ici, à vos côtés, pour traiter de cet important sujet qui, tout autant qu'une question sanitaire, représente un élément majeur de cohésion sociale ?

En conclusion, monsieur le ministre, je redoute les effets de votre politique sur notre système de protection sociale. Des prévisions insincères, aussi bien en dépenses qu'en recettes, des mesures qui pèsent outrageusement sur l'hôpital public et qui pénalisent les plus modestes, les malades et les familles, un silence abyssal sur les accidents du travail et les maladies professionnelles : les sujets d'inquiétude s'accumulent. Vous ne pourrez pas indéfiniment jouer les illusionnistes. Le temps viendra où il vous faudra rendre des comptes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Paul-Henri Cugnenc.

M. Paul-Henri Cugnenc. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, je voudrais dans cette courte intervention insister sur deux points, le plan cancer et le dossier de l'hôpital.

Demain doivent se tenir les troisièmes états généraux des malades du cancer à Vincennes, sous le patronage du chef de l'État et de M. le ministre de la santé. Nous serons, je pense, plusieurs à porter le message des parlementaires.

Je voudrais d'abord saluer la dynamique qui a été impulsée dès le début du quinquennat, et dont les effets sont aujourd'hui visibles.

Ce plan avait le souci de rattraper notre retard en matière de prévention...

Mme Chantal Bourragué. Eh oui !

M. Paul-Henri Cugnenc. ...de mieux organiser le dépistage, de mettre en place des soins de meilleure qualité centrés sur le patient avec une parfaite coordination entre les soins de ville et les soins d'hôpital, et d'assurer un accompagnement plus adapté, plus attentif, plus personnalisé.

Ce plan avait également l'ambition de favoriser un autre enseignement, d'améliorer la formation de nos élèves dans un cadre novateur, de sortir en quelque sorte l'enseignement universitaire cancérologique de son ghetto et d'établir les relations qui s'imposent entre cette discipline et toutes les autres spécialités.

Je voudrais par ailleurs insister sur les résultats de la réorganisation autour de la notion de cancéropôle aux niveaux régional et interrégional, avec des hôpitaux de référence et des unités de recherche. Une dynamique a été très efficacement impulsée à cet égard dans la région Midi-Pyrénées dont il faudrait s'inspirer dans d'autres régions de France, en particulier en Ile-de-France. L'association entre la notion scientifique de cancéropôle et les impératifs cliniques de pôles régionaux et interrégionaux de cancérologie est positive. L'Institut national du cancer qui se met actuellement en place est le résultat de cette dynamique.

S'agissant de l'hôpital public, vous avez, monsieur le ministre, proposé d'augmenter, dans le cadre de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, sa dotation de 3,6 % .

M. Jean-Pierre Blazy. Ce n'est pas suffisant !

M. Paul-Henri Cugnenc. La majorité des députés de l'UMP sont prêts à vous soutenir, considérant qu'il s'agit d'une position raisonnable. Mais comme nous venons encore de l'entendre, cette position n'est pas consensuelle. Nous observons qu'une grande fédération hospitalière nationale, dont la totalité du budget est d'ailleurs fournie par l'hôpital public, n'est pas d'accord sur cet objectif et demande que l'augmentation soit de 4,7 %.

M. Jean-Pierre Blazy. Exactement !

M. Paul-Henri Cugnenc. Certes l'hôpital public doit maintenir l'excellence partout où elle existe.

M. Jean-Pierre Door. Oui.

M. Paul-Henri Cugnenc. Les moins optimistes d'entre nous diront : partout où l'excellence existe encore.

Une autre priorité est de moderniser et d'adapter l'organisation de l'hôpital, pour éviter les gaspillages et permettre de dynamiser les investissements des uns et des autres.

Il faut également remédier au désenchantement hospitalier, comme l'a souligné avec beaucoup d'insistance le pertinent rapport de notre excellent collègue René Couanau. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Pascal Terrasse. Mais il est vieux, ce rapport, il a au moins deux ans !

M. Paul-Henri Cugnenc. Mais l'essentiel, avant même l'augmentation des budgets, est peut-être de favoriser l'épanouissement de ceux qui travaillent à l'hôpital et en particulier de tous les soignants. Les soignants ne doivent plus être considérés à l'hôpital comme le sont parfois dans nos mairies, nos conseils régionaux ou nos conseils généraux, les groupes d'opposition. Les soignants doivent bénéficier d'une possibilité d'épanouissement auprès du malade. Il s'agit sûrement de l'un des éléments essentiels qui peut permettre d'améliorer l'efficacité de nos hôpitaux.

Nous faisons le pari, monsieur le ministre, que les textes que vous avez proposés permettront une réduction des dépenses pour tenir l'objectif que vous vous êtes fixé. Dans la loi relative à l'assurance maladie en particulier, nous savons que la mise en place du dossier médical personnalisé évitera de multiplier les examens et permettra de maîtriser l'envolée des dépenses.

Nous savons que la création de la Haute autorité de santé, avec l'élaboration de référentiels et la recommandation de bonnes pratiques, va dans le bon sens.

Mme la présidente. Monsieur Cugnenc, vous avez largement dépassé votre temps de parole.

M. Jean-Pierre Door. Mais son intervention est tellement bonne !

M. Paul-Henri Cugnenc. Nous savons que la réforme de l'organisation interne de l'hôpital permet de faire des économies sans pour autant augmenter le budget de manière obscurantiste.

Nous savons que la tarification à l'activité irait également dans le bon sens.

M. Pascal Terrasse. Ce serait dramatique, elle conduirait à la fermeture de 300 hôpitaux !

M. Jean-Pierre Blazy. Ce serait une condamnation à mort !

Mme la présidente. Monsieur Cugnenc, pouvez-vous conclure, s'il vous plaît ?

M. Paul-Henri Cugnenc. Je termine, madame la présidente, en insistant sur la nécessité des restructurations hospitalières, qui représentent un élément fondamental dans notre analyse sur les économies budgétaires. Cela concerne les centres hospitaliers universitaires, car leur répartition doit obéir à des impératifs sanitaires et non à des considérations purement politiques et économiques.

M. Jean-Pierre Door. Très bien !

M. Paul-Henri Cugnenc. Cette restructuration concerne également les hôpitaux généraux, pas nécessairement pour fermer un grand nombre d'hôpitaux généraux...

M. Pascal Terrasse. C'est pourtant ce qui va se passer !

M. Paul-Henri Cugnenc. ...mais pour fixer des missions différentes avec sûrement des soins aigus organisés de manière différente et des centres d'accueil pour d'autres pathologies qui doivent être maintenues dans un certain nombre de nos hôpitaux généraux.

M. Pascal Terrasse. Parlez-en au maire de Saint-Affrique !

Mme la présidente. Monsieur Cugnenc, je vous prie de conclure.

M. Paul-Henri Cugnenc. Au prix de cette réorganisation et de cette nouvelle motivation pour les personnels soignants, nous pensons, monsieur le ministre, que l'augmentation que vous proposez pour l'hôpital public dans le cadre de l'ONDAM permettra l'épanouissement du système hospitalier français.

M. Jean-Pierre Blazy. Tu parles d'une motivation !

Mme la présidente. Monsieur Cugnenc !

M. Paul-Henri Cugnenc. Nous vous faisons confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.

M. Jean-Paul Bacquet. Le projet de loi que vous nous présentez aujourd'hui, monsieur le ministre, s'inscrit dans la continuité de la politique du Gouvernement en matière d'assurance maladie, qui vise, lentement mais scrupuleusement, à rompre la solidarité nationale au profit des assurances privées. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Pascal Terrasse. C'est vrai !

M. Jean-Paul Bacquet. En effet, après trois ans de gestion du Gouvernement, un bilan provisoire s'impose.

Le bilan de M. Mattei est catastrophique. Faite de colmatages budgétaires, de déremboursements, de non-décisions, son action a conduit à un déficit, qu'il a lui-même décrit comme abyssal : plus de 13 milliards d'euros en 2004 rien que pour la branche assurance maladie !

M. Pascal Terrasse. Heureusement que Xavier Bertrand est arrivé pour mettre de l'ordre !

M. Jean-Paul Bacquet. Les prescriptions n'ont cessé de progresser et les résultats obtenus sur les génériques ne sont pas à la hauteur des ambitions - peut-être la cause est-elle plus due à l'effet du droit de substitution contre lequel vous aviez voté qu'aux décisions que vous avez prises, dont la mise en place du tarif forfaitaire de responsabilité qui fait injustement porter l'effort sur le malade.

À la suite d'une canicule qualifiée de catastrophe sanitaire par tous, même par le ministre de l'intérieur et le secrétaire d'État aux personnes âgées, sauf par M. Mattei qui n'y a vu qu'une catastrophe naturelle, vous avez pris la succession de M. Mattei.

Depuis, monsieur le ministre, personne ne peut vous reprocher de ne pas occuper l'espace médiatique car tout est bon pour assurer votre image de ministre présent et faisant feu de tout bois sur tout problème de santé publique.

M. Jean-Pierre Door. C'est une bonne image !

M. Jean-Paul Bacquet. Ainsi, vous alertez l'opinion publique sur le risque que constitue l'alcoolisation des femmes enceintes mais vous êtes frappé d'un mutisme inquiétant lorsque l'Assemblée nationale remet en cause la loi Évin.

M. Jean-Louis Bernard. Oh ! Ça suffit !

M. Jean-Pierre Blazy. C'est vrai !

M. Jean-Paul Bacquet. Il semble même, selon la presse, que vous utilisez à votre profit les dossiers de vos collègues ministres pour vous les attribuer.

Ces opérations de promotion ne nous empêchent pas de voir que la pseudo-réforme que vous avez engagée pour, dites-vous, sauver et pérenniser la sécurité sociale, n'est dans les faits qu'un énième plan de colmatage financier, avec diminution des remboursements et augmentation des prélèvements : 3 milliards de ressources nouvelles avec l'augmentation de la CSG et une contribution des entreprises ; 2 milliards d'économies sur les médicaments, les arrêts de travail, les dépenses hospitalières, la hausse du forfait hospitalier et la nouvelle contribution d'un euro par consultation.

Ce plan de rafistolage n'empêche pourtant pas le bateau de prendre l'eau de toutes parts, comme en témoigne la récupération de la soulte d'EDF. En outre, l'état catastrophique du FIPSA, le fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, suscite de graves inquiétudes quant à une augmentation prévisible des prélèvements pour les agriculteurs.

La légère embellie récemment observée dans les comptes sociaux vous a permis d'exprimer, à grand renfort de communication, votre satisfaction, légitime certes mais qui frôlait la surprise. N'êtes-vous pas allé presque jusqu'à avouer à demi-mot que vous n'y étiez pour rien, et jusqu'à évoquer un effet psychologique de votre réforme ?

Vous vouliez responsabiliser les acteurs, mais vous n'êtes pas sans savoir que la renégociation conventionnelle qui débute, après tant de pressions de la part des professions de santé pour obtenir des espaces de liberté tarifaire, ne sera pas sans effets sur les finances de l'assurance maladie, ou même, pire, sur la définition des soins remboursés.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Mais il n'est pas question de ça !

M. Jean-Paul Bacquet. Vous espérez des économies sur le contrôle des arrêts maladie, mais vous vous gardez bien de rappeler que vous avez refusé la motivation des arrêts de travail et des transports médicaux lors de la précédente législature, alors que c'était un véritable outil de maîtrise médicalisée, qui permettait de prévenir les abus potentiels.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Parlons de justification médicale !

M. Jean-Paul Bacquet. Au moment où les statistiques de l'assurance maladie nous informent que 93 % des arrêts ont été jugés médicalement justifiés par les médecins-conseils, arrêts essentiellement dus à une augmentation des ALD qui sont attribués par les médecins-conseils et qui concernent souvent des gens de plus de cinquante-cinq ans appartenant à la catégorie des employés et des ouvriers, je m'étonne de votre mutisme pour remettre en cause la capacité de ceux qui accordent les ALD et qui contrôlent les arrêts de travail.

M. Pascal Terrasse. Parole de médecin !

M. Jean-Paul Bacquet. Vous voulez réorganiser le système de soins, mais, sous couvert d'une maîtrise médicalisée, vous ne faites qu'organiser une nouvelle forme de maîtrise financière en vous défaussant de mesures impopulaires et injustes sur l'UNCAM. Cet organisme ne sera bientôt plus qu'une « machine à dérembourser ».

Mme Élisabeth Guigou. Exactement !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. C'est tout le contraire !

M. Jean-Paul Bacquet. M. Madelin lui-même le déclarait dans la presse récemment. Et cette déresponsabilisation massive de l'État irait jusqu'à subordonner la permanence des soins aux organismes d'assurance maladie !

Vous voulez garantir des soins de qualité pour tous, mais vous ouvrez grand la porte aux assurances privées, seulement accessibles aux plus aisés, et qui pourront bientôt prendre en charge les soins que la sécurité sociale ne pourra plus financer.

Je crains, monsieur le ministre, que vous n'engagiez notre système de protection sociale vers un système où seuls les plus riches pourront se soigner décemment, parce que vos propositions conduisent à l'impasse et ce au moment où vous faites des cadeaux fiscaux à ces mêmes plus riches, notamment en baissant l'impôt sur les grandes fortunes.

M. Pascal Terrasse. Absolument !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Ne serait-ce pas caricatural ?

M. Pascal Terrasse. Non, c'est la réalité !

M. Jean-Paul Bacquet. Vous vous engagez dans une impasse lorsque vous annoncez un déficit de la branche maladie de 8 milliards d'euros fin 2005, alors que les efforts demandés aux Français seront encore plus importants.

Quelle confiance peut-on avoir dans vos prévisions, en particulier pour l'ONDAM ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Vous pouvez avoir confiance !

M. Jean-Paul Bacquet. A vous écouter, je crois entendre M. Mattei qui annonçait lors de son premier PLFSS un ONDAM volontairement élevé pour être sûr qu'il soit respecté - ce qui évidemment n'a pas été le cas puisque tout dépassement était autorisé.

Oui, monsieur le ministre, derrière ce PLFSS sans souffle et totalement irréaliste se cache une dérive inéluctable vers l'accumulation des déficits, dérive qui sera gravissime pour les générations à venir, non seulement parce qu'elles seront moins nombreuses et devront donc cotiser plus, mais parce que, en plus, elles devront s'acquitter de la dette que nous leur aurons laissée.

Oui, monsieur le ministre, la vérité c'est qu'après trois ans de gestion de votre gouvernement, ou plutôt de laisser-faire, la sécurité sociale se trouve dans un état de délabrement jamais atteint et doit faire face à un déficit incommensurable.

M. Pascal Terrasse. Dans quel état allez-vous laisser le pays ?

M. Jean-Paul Bacquet. La seule question qui se pose aujourd'hui, c'est de savoir non pas si nous basculerons vers une véritable privatisation de l'offre de soins, mais quand cela se produira. Alors, monsieur le ministre , prenez au moins l'engagement de présenter un projet de loi de finances rectificative s'il y a dépassement, afin de ne pas vous décharger systématiquement des responsabilités gouvernementales sur le grand Manitou que vous venez de nommer à la présidence de l'UNCAM et de ne pas remettre en cause le rôle du politique dans la mise en place de la protection sociale et la définition d'une politique de santé publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, en juin 2003, j'intervenais en ce même lieu, en duo avec Xavier Bertrand, sur le projet de loi instituant le plus grande réforme de notre système de retraite depuis la création de la sécurité sociale.

M. Pascal Terrasse. Parlez-en aux veuves et aux fonctionnaires !

M. Denis Jacquat. Dans le cadre de ce PLFSS 2005, et plus particulièrement dans son chapitre consacré à l'assurance vieillesse, nous appliquons progressivement cette réforme.

Après plusieurs mois de concertation menée par le Gouvernement avec l'ensemble des partenaires sociaux, un consensus avait été trouvé afin de sauvegarder le système de retraite par répartition. Ainsi, 2003 fut l'année des promesses et 2004 est celle des concrétisations.

M. Pascal Terrasse. Des élections aussi !

M. Denis Jacquat. En effet, nous pouvons être satisfaits quant au nombre de décrets publiés dans le cadre de la réforme des retraites d'août 2003, puisque, à ce jour quasiment deux tiers des décrets annoncés sont parus. Georges Colombier, notre rapporteur pour l'assurance vieillesse en ayant excellemment parlé à cette tribune et dans son rapport, je me bornerai à évoquer certains points.

Tout d'abord, je tiens à souligner que les mesures phares de cette loi, telle la possibilité d'un départ anticipé pour les personnes ayant eu des carrières longues, ont pu être mises en oeuvre grâce à la publication dans de brefs délais des décrets afférents.

J'aimerais aussi attirer votre attention sur la réforme du régime des pensions de réversion. Nous pouvons nous féliciter de la faculté d'écoute dont le Gouvernement a su faire preuve,...

M. Jean-Pierre Blazy. Il a reculé !

M. Denis Jacquat. ...lorsqu'il s'est agi de suspendre le décret relatif à la réforme du mode de calcul des pensions de réversion à la suite de la vague d'inquiétudes...

M. Jean-Pierre Blazy. Légitimes !

M. Denis Jacquat. ...qu'avait soulevée cette mesure. Le fait de consulter le Conseil d'orientation des retraites est une excellente décision. Il est indispensable d'attendre les résultats de l'étude qui lui a été confiée pour mettre en oeuvre de nouvelles mesures attendues avec impatience par les veuves. Les dates de réunion avec le COR sont déjà fixées.

S'agissant de la branche vieillesse, le déficit actuel de ses comptes est essentiellement causé par la montée en charge des départs anticipés à la retraite.

Pour ce qui est de la disposition relative aux industries électriques et gazières, les IEG, il m'apparaît nécessaire que le Gouvernement veille à garantir que le montant total de la soulte assurera la neutralité financière de l'opération de base.

M. Bernard Perrut. C'est essentiel !

M. Denis Jacquat. En tant que président du conseil de surveillance de la CNAV, je tiens à vous préciser que je suis et resterai extrêmement vigilant à ce propos.

Je souhaiterais également attirer votre attention sur la création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie - CNSA - par la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. En tant que rapporteur de ce projet de loi, je tiens à dire que nous pouvons nous réjouir de la création de ce texte qui réforme le monde social en France en créant une prise en charge globale de la perte d'autonomie.

J'attache une attention particulière à l'adoption du terme « agence » à la place de celui de « caisse », comme le préconisent M. Briet et M. Jamet dans leur rapport. C'est dans un souci de transparence que cette agence centralisera les cotisations destinées à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

Je suis profondément satisfait d'apprendre qu'au second semestre 2004, 155 millions d'euros ont déjà été versés pour les personnes âgées. Grâce à la mise en place de ce dispositif, la création d'une Agence nationale de solidarité pour l'autonomie - ANSA - favorisera de façon globale les personnes en perte d'autonomie, permettra de développer le secteur de l'aide à domicile et donnera plus de moyens aux établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes grâce à la création de 10 000 nouvelles places en maison de retraite et le recrutement de 15 000 postes de personnels de soins supplémentaires auprès des personnes âgées dans le milieu institutionnel.

Je tiens à réaffirmer mon attachement à un financement national de la perte d'autonomie, afin d'éviter toute inégalité dans l'attribution des aides aux personnes concernées. Depuis la création, en 2001, de l'allocation personnalisée d'autonomie, qui vous est si chère, madame la présidente, nous voilà enfin assurés de sa pérennisation. En effet, après avoir longtemps milité et militant encore en faveur de la création d'un cinquième risque au sein de la sécurité sociale, je ne peux que me montrer satisfait au terme de cette année riche en avancées pour les personnes en perte d'autonomie.

M. Jean-Pierre Blazy et Mme Danièle Hoffman-Rispal. C'est plutôt une année riche en reculs !

M. Denis Jacquat. Il y a avait urgence à agir et de bonnes décisions ont été prises. Comme je le disais en mai dernier lors de la discussion du projet de loi pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, il est nécessaire que s'instaure un débat régulier autour de la prise en charge de la perte d'autonomie. L'examen annuel du projet de loi de financement de la sécurité sociale serait un moment propice.

Nous devons absolument changer notre regard sur les personnes en perte d'autonomie et il est de notre devoir de préparer la vieillesse des Français. La tâche est difficile, et la critique est facile. Madame et messieurs les ministres, vous pouvez compter sur nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Delnatte.

M. Patrick Delnatte. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la branche famille du PLFSS pour 2005 se caractérise par sa continuité avec celui de l'année dernière. J'en veux pour preuve l'appui qui est donné à la politique familiale en faveur de la petite enfance lancée par M. Christian Jacob.

Je ne crois pas que l'on puisse parler des « espérances déçues d'une politique familiale », comme le fait notre rapporteure Marie-Françoise Clergeau. Bien au contraire, les attentes des familles ont reçu des réponses après les cinq années du gouvernement Jospin. Ce dernier avait même attendu trois ans avant de penser à installer un ministère délégué à la famille.

Depuis 2002, des mesures concrètes ont été prises. Dès 2003, une allocation forfaitaire avait été distribuée aux familles ayant au moins trois enfants à charge , car nous savons que les familles nombreuses sont en moyenne plus pauvres que les autres familles. Mais les marges de manœuvre restaient limitées pour un gouvernement qui prenait juste ses fonctions.

C'est donc le PLFSS 2004 qui a marqué les premières grandes avancées de la politique familiale depuis le début de la législature. La prestation d'accueil du jeune enfant est une mesure simple, équitable et efficace parce qu'elle repose sur la liberté de choix par les parents du mode de garde. Depuis le 1er janvier 2004 et jusqu'à la fin 2006, la PAJE se substitue aux anciennes prestations. L'allocation de base et la prime à la naissance doivent concerner à terme 200 000 familles de plus que dans le système antérieur. Ce sont 850 millions d'euros supplémentaires, dont 350 millions dès 2005 qui, grâce à la PAJE, bénéficieront aux parents de jeunes enfants.

Cette progression des prestations servies par la CNAF n'est pourtant en rien liée à ce premier déficit de la branche famille depuis 1998. La branche ne souffre pas d'un déficit structurel. Elle doit faire face à des transferts, principalement la contribution de la branche au FSV au titre des majorations de pension pour enfants qui fut décidée par le gouvernement Jospin. Il convient donc de saluer la stabilisation à 60 % du taux de transfert de la branche famille au FSV, ce qui représente tout de même une charge de près de deux milliards d'euros.

Mme la rapporteure s'inquiète aussi du manque de crèches dans les grandes villes.

M. Jean-Pierre Blazy. Elle a raison !

M. Patrick Delnatte. Effectivement, leur construction a été insuffisante depuis 1991 et nous devons poursuivre le rattrapage de ce retard. Je tiens à rappeler qu'un « plan crèches » a été décidé pour continuer les efforts précédents. Dès l'année dernière, 200 millions d'euros de crédits ont été ouverts pour la création, à l'horizon de 2007, de 20 000 places supplémentaires. En 2004, 50 millions d'euros de crédits ont été dépensés et la CNAF a confirmé la réussite de ce « plan crèches ». Il en sera de même en 2005.

La combinaison de la PAJE, du plan « crèches », de la future loi sur les assistantes maternelles, qui doit être inscrite le plus rapidement possible à l'ordre du jour de notre assemblée, et des allégements fiscaux pour les emplois à domicile permettra aux parents de choisir librement le mode de garde de leurs jeunes enfants pour concilier vie familiale et vie professionnelle. L'ensemble de la politique familiale est donc cohérent.

La Conférence de la famille s'est penchée cette année sur l'adolescence, âge où se forme le caractère de nos plus jeunes générations et qui demande donc une attention particulière. C'est pourquoi la mesure phare d'un entretien de santé personnalisé en classe de cinquième est à saluer. Certains critiquent un objectif louable, mais qui révèle notre impuissance à organiser un service de médecine scolaire. Mais avec les maisons de l'adolescence qui se mettent en place à travers la France, c'est bien au contraire une nouvelle médecine de l'adolescence qui est créée. Je me permettrai de souligner au passage que nous avons connu des périodes où les gouvernements prenaient des décisions qui n'avaient rien à voir avec les propositions de la Conférence de la famille. Nous , nous tenons compte de ses propositions.

Il reste à s'interroger, madame la ministre, sur le soutien financier à l'adolescence. On sait que les adolescents, source de joie et d'animation dans les familles, font aussi augmenter le budget des foyers. Aussi, il conviendrait de réfléchir à un dispositif de soutien à leur scolarité, leurs activités sportives, culturelles et caritatives.

M. Jean-Pierre Blazy. Très bien !

M. Patrick Delnatte. Enfin, on ne peut que saluer la mesure prise en faveur des familles adoptantes. L'adoption est une solution pour des couples qui ont un projet parental et pour des enfants qui attendent de l'affection. Le doublement à 1 624 euros de la prime à l'adoption s'inscrit dans le cadre de la réforme de l'adoption annoncée par le Premier ministre dont l'objectif est de doubler le nombre des adoptions. Les parents en quête d'adoption supportent en effet des coûts élevés , en particulier pour une adoption à l'étranger . Bien évidemment, le coup de pouce qui est donné ne répond pas à tous les besoins et l'appui des conseils généraux, partenaires de l'État pour les procédures d'adoption, me semblerait très utile.

L'année 2005 s'annonce sous de bons auspices avec une politique familiale qui concerne toutes les familles et un effort continu en direction des plus fragilisées.

Nous vivons une époque pleine d'interrogations. Après une période où la famille était stigmatisée comme synonyme d'oppression et d'archaïsme, le mot famille est devenu magique. Il est mis à toutes les sauces. Ce double excès déstabilise l'attente et le vécu de nos concitoyens. Les familles veulent être rassurées et confortées dans leur double vocation : favoriser l'épanouissement naturel de chacun de ses membres et contribuer au progrès d'une société qui se projette dans l'avenir pour se perpétuer. Les politiques publiques en faveur des familles doivent les accompagner et les soutenir dans leur vocation. C'est bien la voie qu'ont choisie le Gouvernement et sa majorité et qui nécessitera de poursuivre sans répit les efforts entrepris. Bien évidemment, nous comptons sur vous, madame la ministre. Soyez assurée de notre soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, l'un des volets importants de ce projet de loi concerne les personnes âgées. C'est d'ailleurs un thème que votre gouvernement met en avant dans sa communication, invoquant une augmentation des crédits de l'ordre de 11 % de ce que vous appelez « l'ONDAM personnes âgées ».

Cela me conduit d'ailleurs à faire une première remarque. En introduisant une segmentation de la prise en charge des soins en fonction d'un critère d'âge et de dépendance, cette notion contrevient aux principes fondateurs de la sécurité sociale. Le conseil d'administration de la CNAM l'a rappelé à juste titre dans un avis récent.

Vous stigmatisez , en outre, une nouvelle fois les dépenses de santé des plus âgés. Vous en faites les boucs émissaires de la dérive des comptes de l'assurance maladie. Il suffit, pour s'en rendre compte , de relire la fiche n° 10 de votre plaquette de présentation du PLFSS. Encore une fois, je le répète, cette approche est injuste.

Au moins discutons-nous encore des crédits destinés aux personnes âgées en perte d'autonomie dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Nous craignons, non sans raison, le démantèlement de l'assurance maladie qui se dessine au fil des multiples textes législatifs déjà adoptés ou que vous vous apprêtez à nous soumettre. Ainsi que nous l'avons souligné au printemps dernier, tant que son rôle n'est pas clairement défini, la création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie porte en germe cette menace. M. Jacquat ne vient-il pas de formuler la même demande ? Nous proposons donc d'amender le texte afin de bien préciser que l'ensemble des soins aux personnes âgées relèvera de l'assurance maladie elle-même, tandis que la CNSA se bornera à prendre en charge la perte d'autonomie.

Le Gouvernement ferait un pas utile en acceptant une clarification que nous réclamons depuis des mois. En garantissant le maintien du principe d'universalité de l'assurance maladie, vous témoigneriez de votre bonne foi, ce qui rassurerait tous les acteurs concernés et rencontrerait l'assentiment de beaucoup de nos collègues, bien au-delà des seuls rangs socialistes. À l'inverse, votre refus probable nous porterait à croire que les financements nouveaux que vous annoncez ne seront bien souvent que de simples transferts.

Les parlementaires ont d'ailleurs bien du mal à s'y retrouver. La tuyauterie incroyablement complexe que vous mettez en place pour financer le plan Vieillissement et solidarité rendra le système fort peu transparent et largement illisible. Nous ne connaissons d'ailleurs toujours pas officiellement les suites que vous entendez donner au rapport commandé à MM. Briet et Jamet sur le sujet. Il semblerait que vous renonciez à ses préconisations les plus contestées, mais peut-être allez-vous nous éclairer au cours de ce débat, sans attendre la deuxième lecture du projet de loi sur le handicap. Je rappelle qu'il s'agit de mesures qui devraient en principe entrer en vigueur dans deux mois seulement.

Quoi qu'il en soit, ce flou volontaire ne masque pas une évidence : l'effort en faveur des personnes âgées sera sans commune mesure avec celui promis par votre gouvernement il y a tout juste un an, après le drame de la canicule. Le Premier ministre s'était alors engagé à un effort budgétaire de l'ordre de 850 millions d'euros par an pour les personnes âgées en perte d'autonomie, ce qui correspondait à la moitié de la contribution patronale de 0,3 % affectée à la CNSA. Or les chiffres annoncés ne correspondent qu'à la moitié de cette somme.

Pour la prise en charge des personnes âgées en établissement, hors APA, M. Douste-Blazy et M. Falco nous ont annoncé en commission il y a un mois la somme de 210 millions provenant de la CNSA. La semaine dernière, toujours en commission, nos rapporteurs nous ont cité un autre chiffre : 365 millions. Au-delà de la confusion, nous pouvons cependant dresser le constat suivant : si l'on retranche l'augmentation de l'ONDAM médico-social qui aurait eu lieu de toute manière, comme chaque année, l'effort supplémentaire qui sera accompli en 2005 peut être évalué à environ 200 millions d'euros, c'est-à-dire moins que l'an dernier hors transferts de la CNSA.

En définitive, le progrès réalisé dans la prise en charge de la perte d'autonomie ne correspond, dans ce projet de loi de financement, qu'au quart de vos engagements, la CNSA ne faisant que se substituer à des financements existants, sans drainer des ressources nouvelles. Nous sommes bien loin des 680 millions d'euros inscrits pour les établissements médico-sociaux à l'article 13 de la loi sur l'autonomie des personnes âgées, et correspondant à 40 % de la totalité des crédits. C'est ce que nous avons voté en juin dernier.

Monsieur Bertrand, je vous ai écouté attentivement hier soir...

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je vous en remercie, madame la députée.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. ...et vous nous avez demandé de ne pas vous faire de procès d'intention, selon vos propres termes. C'est pourquoi j'ai tenu à démontrer, chiffres à l'appui, ce qu'il en était réellement.

L'article 13 de la loi prévoit explicitement 40 % pour les établissements médico-sociaux. Aujourd'hui, l'article 3 du projet de loi de financement de la sécurité sociale n'affecte plus que 48 % de ce pourcentage initial. Que sont devenus les 52 % restants ? Nous vous demandons au moins une réponse. Ce n'est pas un procès d'intention mais nous savons compter et nous connaissons les chiffres. Or vous ne répondez pas. Tous les professionnels du secteur de la prise en charge des personnes âgées arrivent d'ailleurs aux mêmes conclusions que nous.

Il est à craindre que la cagnotte ainsi constituée - les prélèvements nouveaux seront bel et bien mis en œuvre - n'ait finalement pour seul objet que de combler une partie du déficit accumulé depuis 2002 par l'assurance maladie. Pour résumer, la fameuse journée de solidarité serait en grande partie consacrée à financer le passage à 20 euros des consultations médicales.

M. Jean-Pierre Blazy. C'est scandaleux !

M. Jacques Domergue. Que ne faut-il pas entendre !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Il s'agirait là d'un véritable détournement des fonds prélevés aux salariés, ce qui n'est pas sans soulever quelque problème de principe.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Il faut en finir avec ces abus de vocabulaire !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Les besoins pour assurer la prise en charge des personnes âgées sont pourtant immenses, vous le savez bien. Les signatures des conventions tripartites avec les établissements d'hébergement, dans le cadre de la réforme de la tarification, devraient avancer à un rythme plus soutenu. Quelles critiques n'ai-je pas entendu depuis deux ans sur leur nombre insuffisant ! Deux ans après, il n'y en a pourtant pas beaucoup de signées.

M. Jean-Pierre Blazy. Le bilan n'est pas brillant !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Les financements du plan Alzheimer, Mme Guigou vient de le relever, restent nettement en dessous des besoins. L'amélioration de l'encadrement dans les établissements comme la création de nouvelles structures devraient être accélérées et amplifiées. La modernisation et la professionnalisation du secteur de l'aide à domicile devraient faire l'objet d'efforts bien plus considérables. À cet égard, le Fonds de modernisation de l'aide à domicile, mis en place par Mme Paulette Guinchard-Kunstler, reste un outil largement négligé depuis deux ans, alors qu'il s'agit d'un enjeu majeur pour l'avenir.

Si l'argent récolté par la CNSA ne pouvait être intégralement dépensé pour ces actions, faute de personnel qualifié en nombre suffisant - ce que j'entends régulièrement -, rien ne vous interdit de l'utiliser pour les investissements de modernisation réclamés par les professionnels. Il n'est pas besoin de faire preuve de beaucoup d'imagination pour dépenser effectivement les crédits. Ce qui vous manque, c'est la volonté politique pour tenir vos promesses.

En réalité, avant d'être soutenues, les personnes âgées sont d'abord largement mises à contribution par la politique de votre gouvernement. Elles ont ainsi vu leurs cotisations nettement accrues après la réforme de la sécurité sociale adoptée cet été. Et la valse-hésitation sur la question des pensions de réversion montre bien vos intentions en la matière. Nous resterons particulièrement vigilants sur vos décisions en la matière. Vous aurez en outre imposé aux salariés une journée de travail gratuite, en les culpabilisant et en invoquant la solidarité entre les générations, mais, au vu de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, force est de constater que bien peu du produit de cette mesure bénéficiera aux personnes âgées en 2005.

Monsieur le secrétaire d'État, j'espère que vous pourrez nous éclairer sur ces points essentiels. Mme Paulette Guinchard-Kunstler vous a interrogé en commission la semaine dernière, M. Jean-Marie Le Guen l'a fait hier soir, mais nous n'avons toujours pas de réponse. Je vous demande donc à mon tour, monsieur le secrétaire d'État, quelles seront l'an prochain les modalités concrètes de prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et quelles conclusions vous allez tirer du rapport Briet-Jamet. Enfin, où iront les fonds perçus par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie en 2005 puisque l'ensemble des crédits qui auraient dû être destinés aux personnes âgées ne figure pas dans ce texte ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente. Je vous remercie, madame la députée, d'avoir rigoureusement respecté votre temps de parole.

La parole est à M. Jacques Domergue.

M. Jacques Domergue. Madame la ministre de la famille et de l'enfance, monsieur le secrétaire d'État à l'assurance maladie, le PLFSS que nous examinons aujourd'hui s'inscrit dans la continuité de la loi sur l'assurance maladie promulguée le 13 août 2004. Il constitue le deuxième volet d'une politique volontariste qui a pour objectif d'améliorer les comptes de l'assurance maladie tout en maintenant le niveau du système de santé français. C'est dire l'importance de nos débats dans l'hémicycle et la nécessité d'une pédagogie permanente auprès non seulement de nos concitoyens mais également des professionnels de santé.

Avec un déficit de 13,2 milliards d'euros prévu pour 2004, niveau insupportable pour les comptes sociaux, notre crédibilité ainsi que celle du Gouvernement serait entamée si nous ne faisions rien. Nous devons rééquilibrer les comptes de l'assurance maladie sans mettre en danger l'efficacité de notre système de soins. Telle est la limite que nous devons respecter.

Pour améliorer les performances, les modes d'organisation et poursuivre la modernisation, trois conditions doivent être réunies. Il faut d'abord que nous en ayons la ferme volonté politique, et je sais que c'est le cas. Ensuite, nous devons faire œuvre de pédagogie. À cet égard, les derniers chiffres de la consommation médicale semblent marquer une inflexion, comme si le seul fait d'en parler avait fait faire prendre conscience aux acteurs que le changement de comportement de chacun peut permettre de sauvegarder un système de santé qui profite à tous. Enfin, il est nécessaire de mettre en place un plan de maîtrise médicalisée des dépenses, et non pas comptable ; c'est en ce sens qu'a été élaborée votre réforme.

Dès lors, quoi de plus normal que de fixer l'ONDAM à 3,2 % pour 2005 ? Certains, sur ma gauche, diront que c'est irréaliste.

M. Jean-Pierre Blazy. Tout à fait !

M. Jacques Domergue. Mais, selon moi, il s'agit d'un objectif volontariste : si nous n'affichons pas notre détermination, notre crédibilité en fera les frais. Personne n'aurait compris si vous aviez arrêté un taux plus élevé, et votre action aurait risqué d'en être discréditée.

Je note au passage que l'ONDAM pour les personnes âgées augmentera de 11,4 % et que, dans le domaine médico-social, les créations de places pour personnes handicapées seront poursuivies. Je tiens, monsieur le secrétaire d'État, à saluer l'effort que vous accomplissez en faveur des plus vulnérables d'entre nous.

Je centrerai mon propos sur la politique de santé hospitalière, plus précisément sur les problèmes spécifiques à la chirurgie et à la mise en place de la tarification à l'activité qui inquiète tous les acteurs de l'hospitalisation, publique et privée.

Vous avez laissé entendre devant notre commission que l'ONDAM hospitalier serait probablement de 3,6 %. Interrogé hier dans Les Échos, vous déclariez que les hôpitaux devaient économiser 800 millions d'euros...

M. Jean-Pierre Blazy. Ils ne pourront pas ; ils sont étranglés !

M. Jacques Domergue. ...alors que la Fédération hospitalière de France estime à 776 millions d'euros les reports de charges pour 2004. Comment se faire une idée claire de la situation ?

Aujourd'hui, l'hôpital public est responsable de plus de 50 % des dépenses de santé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme Jacqueline Fraysse et M. Michel Liebgott. Pourquoi « responsable » ?

M. Jean-Pierre Blazy. Votre défiance est éclairante !

M. Jacques Domergue. Il apparaît comme un puits sans fond.

M. Jean-Pierre Blazy. Forcément ! L'hôpital privé ne soigne pas !

M. Jacques Domergue. Rééquilibrer les finances des hôpitaux sans décider les réorganisations fonctionnelles et les restructurations nécessaires équivaudrait à transfuser un malade sans arrêter l'hémorragie.

Gagné par la morosité, l'hôpital public se trouve empêtré dans une bureaucratie de plus en plus lourde, des conflits sociaux larvés et, surtout, une productivité de plus en plus faible. Évoquer la notion de productivité suffit à tendre le climat social, activer les syndicats et mobiliser les personnels.

Mme Maryse Joissains-Masini. C'est vrai !

M. Jean-Pierre Blazy. Ils ne sont pas mobilisés, peut-être !

M. Jacques Domergue. Nous ne pouvons pas cautionner plus longtemps un statu quo délétère pour l'ensemble du système français. Nous savons tous que la mise en place des 35 heures (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) a signé la ruine de l'hôpital public.

Mme Maryse Joissains-Masini. Cela a été une véritable catastrophe !

M. Jacques Domergue. Elle a apporté la preuve d'une incohérence totale dans la gestion du personnel soignant.

Le « toujours plus » prôné par la Fédération hospitalière de France n'est pas défendable tant qu'on n'aura pas mené à bien la restructuration du paysage hospitalier et fait comprendre aux acteurs du système que l'offre de soins n'est pas exclusivement publique et qu'elle est aussi privée.

M. Jean-Pierre Blazy. Nous sommes d'accord sur ce point !

M. Jacques Domergue. Le plan Hôpital 2007 et la nouvelle gouvernance, articulés autour des pôles médicaux, sont attendus non seulement avec impatience, mais également avec quelque inquiétude. Les directeurs d'hôpitaux seront-ils capables de mettre en place le nouveau mode d'organisation transversal de l'hôpital public...

M. Jean-Pierre Blazy. Les services de médecine se trouvent à l'hôpital public !

M. Jacques Domergue. ...articulé sur les activités médicales, qui remet en cause la gestion centralisatrice ? Peut-on croire que les chefs de pôles se verront un jour confier la délégation de signature, comme la loi le prévoit ? La fongibilité des enveloppes, qui caractérise toute activité des entreprises dans le secteur marchand, y compris dans la santé, sera-t-elle applicable au domaine public ?

Si vous pouvez nous l'assurer, monsieur le secrétaire d'État, alors la confiance sera rétablie entre l'administration et les soignants dans l'intérêt des malades, avec une optimisation des moyens matériels et humains mis à disposition.

C'est là que réside le vrai gisement d'économies.

Je crains cependant que l'absence d'accord, cet été, avec les chirurgiens publics, à l'occasion de la crise de la chirurgie, n'ait été une occasion manquée pour offrir à l'hôpital public la possibilité d'un second souffle. Entamer dans un premier temps de manière expérimentale pour les chirurgiens une revalorisation proportionnée à l'activité sans toucher - c'est important - au statut unique de praticien hospitalier, puis l'étendre à toutes les spécialités à forte pénibilité et à forte responsabilité, était, selon moi, l'étape indispensable au sauvetage de l'hôpital public. Je crains, monsieur le secrétaire d'État, que la revalorisation de la chirurgie privée, qui était indispensable et s'avérait urgente, ne creuse encore plus le fossé qui sépare la chirurgie publique de la chirurgie privée.

M. Bruno Gilles. Excellente analyse !

M. Jean-Pierre Blazy. C'est un point sur lequel nous sommes entièrement d'accord !

M. Jacques Domergue. Comment pourrons-nous conserver dans les hôpitaux généraux des praticiens hospitaliers si la chirurgie publique n'est pas revalorisée de manière urgente et proportionnée à l'activité ?

M. Jean-Pierre Blazy. Tout à fait !

M. Jacques Domergue. Certes, la tarification à l'activité aidera à un rapprochement indispensable des deux cultures, mais comment pourra-t-on défendre une disparité dans les tarifs qui peut aller, dans les GHS publics et privés, parfois de un à quatre, ce qui ne laisse pas d'inquiéter ?

Cette situation se traduira par la nécessité de mettre en œuvre des mécanismes de compensation, notamment des enveloppes supplémentaires pour les GHS privés, comme une extension de la liste des produits et prothèses, dans l'attente d'un meilleur équilibre entre les deux secteurs d'activité.

Le conseil national de la chirurgie que vous avez créé le 17 juin dernier et que vous m'avez demandé de présider, monsieur le secrétaire d'État, se réunira, dans la soirée, à proximité de l'hémicycle, en vue de formuler des propositions dans ce sens. La revalorisation de 12,5 % des honoraires chirurgicaux libéraux inscrite dans le projet de loi de finances est le premier signe indiquant que vous avez perçu le message des chirurgiens en crise. Le conflit social avec les chirurgiens a été désamorcé, mais le problème de fond persiste. Sous-représentés depuis toujours dans les instances syndicales, les chirurgiens se font difficilement entendre. Leurs revendications demeurent légitimes.

Sauver la chirurgie française, c'est, certes, avant tout, permettre aux établissements privés de continuer de fonctionner. Il conviendra de se montrer vigilant sur la mise en place de la tarification à l'activité. Néanmoins c'est aussi redonner à la chirurgie publique les moyens de ses ambitions.

M. Jean-Pierre Blazy. Très bien !

M. Jacques Domergue. La chirurgie est en effet une et indivisible, monsieur le secrétaire d'État.

M. Jean-Pierre Blazy. Comme la République !

M. Jacques Domergue. Elle est certainement la discipline médicale la moins coûteuse et la plus efficace, car la plus immédiate. Elle est surtout la discipline médicale qui a le plus bénéficié des transferts de technologies. La chirurgie n'a pas fini de nous surprendre. Malheureusement, elle est souvent marginalisée. Je ne prendrai qu'un seul exemple.

Des moyens importants sont mis à la disposition du plan Cancer, mais la place de la chirurgie y est quasiment inexistante alors qu'elle reste, aujourd'hui encore, le premier traitement des cancers ; ne l'oublions pas. Le pragmatisme chirurgical est une source d'économies encore partiellement inexploitée. Les chirurgiens peuvent contribuer à contenir les dépenses de santé en édictant des référentiels avec des sociétés savantes. Je pense aux arrêts de travail et aux transports sanitaires, d'un coût respectif de 7 milliards et 3,6 milliards d'euros. Des économies peuvent être réalisées sur ces dépenses sans remettre en cause la santé des Français, ce qui est primordial.

Mme Hélène Mignon. C'est vrai !

M. Jacques Domergue. Ne pas remettre en cause la santé des Français : telle est, en effet, la limite que nous devons nous fixer pour toute réforme que nous voudrions engager.

Encore faut-il, monsieur le secrétaire d'État, qu'il reste des chirurgiens en France. Vous le savez, la filière est en crise. Le problème du coût des assurances n'est toujours pas réglé et ce ne sont pas les mesures compensatoires, prises à la marge, qui rassureront les jeunes et les pousseront à entrer dans la filière.

Le seul moyen d'équilibrer les comptes de l'assurance maladie et de sauvegarder notre système solidaire, auquel tous les Français sont très attachés, passe, nous en convenons, par un changement des comportements. C'est le pari que nous devons gagner. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez toute notre confiance et nous vous aiderons dans cette tâche. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Monsieur le secrétaire d'État, à vous entendre, 2005 serait l'année d'une nouvelle fondation de la sécurité sociale, grâce au rééquilibrage progressif des recettes et des dépenses.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Tout à fait !

M. Michel Liebgott. Pourtant, rappelez-vous qu'il n'y a pas si longtemps les comptes de la sécurité sociale étaient au vert, non pas au rouge, comme aujourd'hui. Il ne s'agissait pas, à l'époque, d'une nouvelle sécurité sociale grignotant petit à petit les acquis, mais simplement d'une période où un autre gouvernement se montrait avant tout soucieux de favoriser la croissance économique au bénéfice de tous les Français. Les fruits en étaient partagés et la sécurité sociale en profitait, car les meilleures recettes sont celles du travail.

En matière de dépenses, vous fixez l'objectif global de l'augmentation à 3,2 % : personne n'y croit !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Si !

M. Michel Liebgott. Cette prévision est fondée sur la mise en place de dispositifs dont vous êtes incapables de chiffrer l'impact et dont vous avez mal évalué les contraintes techniques, juridiques, voire sociétales, de mise en application, ce qui retarde d'autant cette dernière ; je pense notamment au dossier médical personnalisé.

Nous regrettons l'absence d'une véritable politique de santé publique. Nous sommes renvoyés à quelques bonnes pratiques et à une promesse, déjà tenue : la revalorisation des honoraires des médecins. Les personnels des hôpitaux auxquels l'on demande des efforts supplémentaires apprécieront !

En matière de recettes, ce sont toujours les mêmes qui paient. Votre politique est simple : vous partez du principe que seuls les salariés, les retraités et les malades doivent payer : c'est l'euro à chaque consultation, la hausse des prélèvements sur les salaires et les retraites - la CSG et la CRDS -, sans oublier évidemment l'allongement de la dette sociale pour nos enfants, voire nos petits-enfants. Ainsi que vous nous l'aviez déjà démontré lors du vote sur l'autonomie des personnes âgées, mieux vaut s'assurer les faveurs du MEDEF que de répondre aux attentes de l'ensemble de la société française !

Par-delà ces considérations générales, j'évoquerai trois questions plus précises.

La première concerne les malades de l'amiante.

Ce dossier traîne depuis trop longtemps. Trop de salariés sont encore obligés aujourd'hui de se lancer dans des procédures longues et coûteuses pour faire reconnaître leurs droits, même s'ils finissent par obtenir satisfaction devant les tribunaux. Je tiens ici à soulever plus particulièrement le cas des salariés de la sidérurgie et des mines, qui attendent d'être reconnus. Les députés du groupe socialiste et moi-même avons demandé la création d'une commission d'enquête sur le sujet. Nous avons également déposé un amendement à votre projet de budget qui permettra d'aller dans le même sens.

Ma deuxième question porte sur la branche famille du projet de loi de finances.

Pour la première fois depuis 1998, elle sera en déficit. Cette situation nouvelle est tout à fait emblématique d'une démarche générale, que j'ai dénoncée, après beaucoup d'autres.

Mme Bourragué l'a certes rappelé, et nous en prenons acte : la prime d'adoption a été doublée. Mais, très franchement, comme cette prime ne couvre que de très loin les frais engagés par les familles,...

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Ce n'est pas sa destination.

M. Michel Liebgott. ...nous étions en droit d'attendre plus et, surtout, beaucoup mieux, sur un dossier aussi essentiel que celui de l'avenir des familles.

Au début de cette année, le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale, présidé par Jacques Delors, a publié un rapport sur la pauvreté des enfants en France. Les résultats sont édifiants : 8 % des mineurs français, soit un million d'enfants, vivent en dessous du seuil de pauvreté défini par l'INSEE.

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Mais à quelle date ?

M. Michel Liebgott. Une telle situation est inacceptable au XXIsiècle, dans un pays riche.

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Tout à fait !

M. Michel Liebgott. Elle n'étonnera cependant pas les élus locaux, qui sont nombreux ici. Ils voient, tous les jours, dans les mairies, affluer des demandes d'aides de la part des familles. Les causes sont simples : les enfants sont les premières victimes de la situation sociale de leurs parents. Lorsque ces derniers travaillent mais ont des revenus modestes, ce qui est le plus souvent le cas, notamment par rapport au coût de la vie, se pose le problème de la garde, qui s'avère trop onéreuse. Les mères font alors souvent le choix d'arrêter de travailler. La situation est encore plus préoccupante pour les familles monoparentales.

Nous attendions donc de votre part un signe, madame la ministre. Mais, en dépit des tentatives répétées de la part des députés du groupe socialiste, vous vous contentez de renvoyer tous les problèmes à une conférence sur la famille en 2005.

Vous avez en revanche estimé qu'il était plus urgent de favoriser les familles les plus aisées. Votre politique frise la caricature puisque le Gouvernement, soutenu par la majorité, adapte le seuil de l'ISF et accorde des aides à la garde d'enfants à 40 000 familles aisées, voire très aisées, alors qu'un million d'enfants vivent sous le seuil de pauvreté !

Mme Maryse Joissains-Masini. Toujours les mêmes tartes à la crème !

M. Michel Liebgott. Enfin, - troisième et dernière question - par-delà les grands discours de principe sur le logement, regardons la réalité en face. Différents décrets relatifs aux aides au logement et aux prestations familiales pénaliseront durement les familles modestes. L'UNAF, dans un communiqué de juillet dernier, ne s'y est d'ailleurs pas trompée : elle a dénoncé le fait que près de 6 000 familles ne bénéficieront plus de l'allocation de rentrée scolaire ou de l'allocation de base de la prime d'accueil du jeune enfant, la PAJE. Il convient d'y ajouter les 130 000 familles qui ne percevront plus d'aide au logement en raison de l'augmentation de 15 à 24 euros du seuil de non recouvrement des aides au logement et les 90 000 autres qui verront ces mêmes aides supprimées en raison de la modification de l'assiette des ressources.

En conclusion, madame la ministre de la famille, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, votre projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 ne fait que traduire et confirmer les craintes que nous avons exprimées l'été dernier lors de la discussion de la réforme de l'assurance maladie. Ce projet, une fois de plus, n'est pas une bonne nouvelle pour les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Je consacrerai mon intervention à deux points fondamentaux : la situation financière de l'hôpital public et la permanence des soins.

Monsieur le secrétaire d'État, non seulement vous affichez pour 2005 un ONDAM à 3,6 %, ce qui est notoirement insuffisant pour nos hôpitaux mais, de plus, vous prétendez leur imposer un objectif d'économies de 850 millions d'euros sur trois ans. Vous contraignez donc les hôpitaux déjà en difficulté à se serrer encore davantage la ceinture !

La situation faite à l'hôpital public est dramatique. On estime à l'heure actuelle, pour l'ensemble des hôpitaux du pays, à 650 millions d'euros le montant des reports de charge, dont 200 millions d'euros pour l'Île-de-France. À ces 650 millions d'euros, il conviendrait d'ajouter encore près d'une centaine de millions d'euros, si tous les emplois étaient pourvus.

De nombreux hôpitaux sont déjà dans le rouge et doivent quémander des aides, que vous leur accordez au prix exorbitant d'un plan d'ajustement drastique. Je pense notamment à l'hôpital d'Argenteuil, dans le Val-d'Oise, mon département.

Les hôpitaux qui ne sont pas encore en déficit n'en connaissent pas moins, quant à eux, d'énormes difficultés. Le déficit de l'hôpital de Gonesse, toujours dans le Val-d'Oise, s'élèverait à 4 millions d'euros si tous les postes budgétaires étaient pourvus, Plus généralement en Île-de-France, le nombre de postes vacants d'infirmier - 3 000 postes - et d'aide-soignant - plus de 1 000 postes - est extrêmement préoccupant. La situation est intenable pour le personnel comme pour les malades, et vous ne pourrez pas continuer encore longtemps à prétendre que c'est la faute aux 35 heures.

Dans ces conditions, vos exigences d'économies à hauteur de 150 millions d'euros dès 2005 ne sont pas réalistes. Elles sont, de plus, insupportables.

J'attends avec intérêt les réponses que vous apporterez à mes questions, monsieur le secrétaire d'État.

Comment, en effet, parvenir à réaliser de telles économies alors que, dans le même temps, les assurances ont augmenté de 35 % en 2004 et augmenteront encore en 2005 ? Comment l'hôpital public peut-il financer l'innovation pharmaceutique, de plus en plus coûteuse ? Monsieur le secrétaire d'État, vous demandez aux hôpitaux publics de réaliser des économies sur les achats, qu'ils ont été déjà largement contraints de faire, sans attendre votre dernière circulaire aux agences régionales d'hospitalisation. Vouloir aller encore plus loin, c'est condamner les hôpitaux publics à l'asphyxie.

Une telle politique s'inscrit, de plus, dans le contexte du nouveau cadre budgétaire de la tarification à l'activité. Selon ce que vous avez vous-même annoncé, la part du financement des hôpitaux adossée à l'activité sera vraisemblablement fixée entre 20 et 30 % en 2005. Or les missions de l'hôpital public ont vocation à être assurées grâce à l'octroi d'une enveloppe globale de missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation, le MIGAC.

Cette enveloppe doit permettre d'honorer la parole de l'État et les engagements pris lors de la conclusion des contrats d'objectifs et de moyens avec les différents établissements hospitaliers. Son rôle sera également de financer sur une base stable et pérenne les activités d'intérêt général de l'hôpital public. Or, jusqu'à présent, ces dernières n'ont pu être évaluées de façon rigoureuse et concertée. La détermination des enveloppes concernées n'a pu être arrêtée, puisque la part financière des MIGAC ne sera connue qu'a posteriori.

Dans ce contexte, comment remplir les objectifs du service public hospitalier ? J'espère que nous aurons des réponses claires à l'issue de la discussion générale. L'enveloppe MIGAC sera-t-elle à la hauteur ? L'enjeu est crucial et il n'est que temps de lever ces incertitudes : comment votre Gouvernement entend-il respecter la parole prise par l'État lors de la négociation des contrats d'objectifs et de moyens avec les établissements ? Comment compte-il garantir la pérennité des missions d'intérêt général confiées aux hôpitaux publics ?

L'autre point sur lequel je souhaite intervenir concerne les incertitudes qui planent sur la permanence des soins.

Depuis le début des années 2000, les maisons médicales se sont développées sur tout le territoire. Il en existerait aujourd'hui entre cent et cent cinquante, selon les estimations ; il faudrait d'ailleurs que nous disposions de données plus précises. Ces structures sont devenues, malgré les embûches, un modèle d'organisation des médecins libéraux face à la problématique de la garde. Pourtant, les maisons de garde se situent hors de tout cadre juridique, la notion recouvrant une multitude d'organisations et de fonctionnements distincts. Elles n'ont vu le jour que grâce à l'opiniâtreté d'acteurs convaincus. Leur rôle est doublement positif : d'une part elles garantissent la permanence des soins le soir et les week-ends, d'autre part elles contribuent à désengorger les services d'urgences hospitaliers, dont on sait qu'ils sont dramatiquement débordés.

Ce dispositif innovant doit être encouragé. Pourtant, c'est le flou qui prévaut quant à son avenir en raison d'un financement précaire.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Vous serez bientôt rassuré !

M. Jean-Pierre Blazy. Nous verrons !

Le fonds d'aide à la qualité des soins de ville - le FAQSV - participe pour une grande part au financement de ces structures, mais son apport est insuffisant et, surtout, non durable puisqu'il est supposé cesser dès 2006. Une épée de Damoclès est donc suspendue au-dessus de ces maisons médicales : que va-t-il se passer en 2006 ? Je vous demande, là aussi, de nous rassurer.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Vous n'aviez qu'à venir aux réunions de la commission !

M. Jean-Pierre Blazy. Une évaluation de ces maisons médicales par les caisses nationales d'assurance maladie est en cours, mais ses résultats ne seront connus qu'en décembre. Il faut donc lever dès à présent les incertitudes

Sur ces deux questions essentielles, je souhaite, monsieur le ministre, que vous apportiez les précisions indispensables que les personnels hospitaliers et les médecins sont les premiers à attendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Après avoir écouté les interventions dans la discussion générale et mon collègue, Jean-Luc Préel, sur les diverses branches du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je voudrais, monsieur le secrétaire d'État, appeler, au nom de l'UDF, votre attention sur un point très important du texte : son article 28 qui apporte des mesures d'équilibrage financier au régime de retraites de la branche des industries électriques et gazières, dénommées plus communément IEG. L'étude précise de ces mesures présente, à mon sens, un grand intérêt et ne manquera pas de retenir votre attention.

On nous demande en effet de voter un article visant à maintenir en l'état le régime des retraites des IEG alors qu'on ne dispose pas des réponses aux questions de fond.

Première question : quel est le coût et le mode de financement de l'adossement des retraités des IEG au régime général, et qui va payer ce coût ?

Le PLFSS prévoit un coût de 6,9 milliards d'euros. Or ce chiffre est aujourd'hui dépassé. La somme s'élèvera en fait à 9 milliards d'euros, dont 1,3 correspond aux majorations pour enfants qui seront imputées sur le fonds de solidarité vieillesse, donc payées par les contribuables français, qui financent le FSV par la CSG. De plus, le FSV est en déficit : 429 millions d'euros en 2004 et 1,16 milliard en 2005. Cette imputation, dont il est à noter que le PLFSS ne tient pas compte, aggravera d'au moins 100 millions le déficit, annuité qui correspond au 1,3 milliard. À terme, donc, il faudra relever la CSG de l'équivalent d'un dixième de point pour payer cette somme.

Quant aux 7,7 milliards restants, 60 %, soit 4,6 milliards, correspondant à la partie du personnel affecté au transport et à la distribution, seront payés par les consommateurs de gaz et d'électricité à travers une contribution dont on ne connaît toujours ni l'assiette ni le taux, mais dont l'article 28, en son dernier alinéa, propose le doublement du taux. Pour cette seule composante, il faudra déjà produire 500 millions d'euros. Les 40 % restants, soit 3,1 milliards, seront payés, à 95 %, par le peuple français sous la forme d'une soulte versée par EDF et GDF et résultant d'une amputation sur les fonds propres, qui sont propriété de la nation.

Deuxième question : quel est le coût et le mode de financement de l'adossement des retraites des IEG à l'AGIRC et à l'ARRCO, et qui va payer ce coût ?

Les présidents de ces organismes demandent 9 à 10 milliards d'euros, mais le ministre des finances a déclaré devant la commission des finances que le versement serait compris entre 0 et 1 milliard. Un tel écart s'explique par le fait que le Gouvernement négocie une dégradation de la couverture complémentaire, en limitant par exemple le niveau des salaires pris en compte. Cependant le coût, quel qu'il soit, sera supporté pareillement à 60 % par les consommateurs d'électricité et de gaz et à 40 % par un prélèvement sur les propriétés de la nation française.

Troisième question : comment les IEG, en particulier EDF, vont-elles pouvoir provisionner le régime chapeau ?

L'article 4 du règlement 1606 du 19 juillet 2002 impose le provisionnement des régimes de propre assureur dans l'ensemble des régimes spéciaux de l'Union européenne. Mais quel sera le niveau de provisionnement ? Le régime chapeau représente un coût de l'ordre de 47 milliards d'euros à provisionner, soit à peu près la moitié du coût total du régime existant. Il faudra donc provisionner 40 %, c'est-à-dire la partie correspondant au personnel qui n'appartient pas au secteur régulé de transport et de distribution, mais au secteur de la production, soit 19 milliards. EDF, qui représente 83 % de cette somme, devra provisionner environ 15 milliards.

Comment une entreprise qui a 18 milliards de fonds propres pourra-t-elle provisionner 15 milliards au titre du régime chapeau et au moins 2 milliards sur les 40 % de l'adossement au régime général, étant donné, de surcroît, que l'on suppose arriver à zéro pour le régime complémentaire, mais que plus celui-ci est dégradé, plus il faut augmenter la provision au titre du régime chapeau ? La réponse est claire, mes chers collègues : on nous demandera une nouvelle fois une recapitalisation d'EDF, à hauteur de plusieurs milliards d'euros, comme il a fallu le faire, pour de tout autres raisons, avec France Télécom pour 9 milliards d'euros. C'est encore le contribuable qui paiera.

L'UDF a soutenu une position très courageuse lors du débat sur la réforme des retraites : pour tous les régimes spéciaux, la seule solution est l'extinction progressive : ceux qui en bénéficient continuent à en bénéficier leur vie durant, mais tous les nouveaux entrants doivent être assujettis au régime général. C'est la seule manière de respecter le passé en maintenant les droits acquis tout en préparant l'avenir. Hélas ! nos amendements n'ont pas été retenus,...

Mme la présidente. Monsieur de Courson, vos cinq minutes de temps de parole sont écoulées.

M. Charles de Courson. ...si bien que nous nous retrouvons dans la situation d'aujourd'hui.

Il faudra donc, avant que nous votions sur l'article 28, que le Gouvernement précise le taux et l'assiette de cet impôt nouveau, car on a essayé de nous faire croire qu'il n'y aurait pas de majoration pour le consommateur.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. C'est pourtant vrai !

M. Charles de Courson. Ce n'est pas la réalité ! On nous propose le doublement du taux au motif que l'on ne connaît pas l'assiette.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. C'est la vérité !

M. Charles de Courson. C'est inexact : depuis le vote de la loi, la commission de régulation de l'électricité a fixé les taux. On parle d'au moins 800 millions de produit et d'un taux qui resterait insuffisant.

Le groupe UDF, attaché aux principes de justice sociale et d'égalité entre les Français, a donc déposé un amendement pour rappeler qu'on ne peut réformer que dans la justice : à terme, tous les Français devront relever du régime général. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Mme Maryse Joissains-Masini. Très bien !

Mme la présidente. La discussion générale est close.

La parole est à M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, c'est une manière de « service après-vote » que je remplis en répondant aux intervenants : après une réforme, il est légitime que des questions soient posées. Certaines sont de bonne foi ; il en est d'autres sur la sincérité desquelles on peut s'interroger.

Pour les questions relatives à l'assurance maladie, voire à la politique de santé, je vais donc apporter quelques éléments aux différents orateurs qui ont bien voulu animer cette discussion générale et qui, j'en suis persuadé, auront aussi à cœur de nous aider à enrichir ce texte au cours de la discussion des articles.

Oui, monsieur Perrut, la sécurité sociale est bien au cœur du pacte social français. Nous pensons qu'il y a là de quoi faire la fierté d'un pays. J'ai eu l'occasion de le dire à maintes reprises : ce système est original, mais il peut être durablement préservé.

Vous avez rappelé les enjeux du texte, notamment la traduction financière de la réforme de l'assurance maladie et de celle des retraites. Nous n'avons pas voulu céder à la tentation de la maîtrise comptable, car, comme vous l'avez souligné, c'eût été une erreur et une faute.

Vous avez également relevé que la Caisse nationale pour la solidarité et l'autonomie mettra en œuvre des moyens supplémentaires. Je crois en effet que ces moyens vont se traduire très vite et très concrètement sur le terrain par une meilleure prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées. Or tel est bien, au-delà des outils, l'objectif que nous nous sommes fixé.

Nous sommes parfaitement conscients des difficultés de financement du FFIPSA, mais nous sommes aussi attentifs à préserver la spécificité du modèle de protection sociale des agriculteurs. Le Gouvernement a ainsi repris, lors du débat de cet été, plusieurs amendements, émanant en particulier du groupe UMP, sur cette question. Il a également missionné les trois inspections générales pour analyser l'ensemble des facteurs, notamment démographiques et économiques, qui peuvent expliquer les difficultés financières actuelles. À partir de ces travaux, le Gouvernement prendra ses responsabilités pour garantir la pérennité du régime agricole : nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion de certains amendements.

Monsieur Door, je suis entièrement d'accord avec vous : nous allons de l'avant et nous nous attachons à la mise en œuvre des réformes votées depuis 2002.

M. Jean-Pierre Blazy. Nous nous en sommes aperçus, hélas !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. C'est cela aussi, assurer le suivi des politiques publiques !

Sur la réforme de la loi organique, je vous confirme, à vous et à de nombreux autres intervenants, le calendrier indiqué par le Gouvernement. Nous souhaitons déposer un projet au Parlement pour un premier examen avant la fin de l'année, mais nous tiendrons compte des impératifs avancés par les présidents des deux assemblées, qui veulent disposer de tout le temps nécessaire pour étudier les textes législatifs qui sont présentés. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.) Bien qu'il fixe l'ordre du jour prioritaire, le Gouvernement tient à respecter les prérogatives du Parlement.

Par cette réforme, nous visons plusieurs objectifs : donner un cadre pluriannuel aux objectifs de dépense ; permettre un vote plus lisible par branche, ce qui rejoint le souhait exprimé par M. Perrut ; affirmer la « sanctuarisation » des recettes de la sécurité sociale : nous l'avons déjà fait dans le texte voté en juillet, mais nous pensons qu'il faut aller plus loin et utiliser la garantie qu'offre la loi organique. Ce dernier objectif s'inscrit également dans le prolongement du principe de compensation posé depuis 1994.

Il sera aussi question de définir une démarche « objectifs-résultats » parce que, en la matière, si l'on dépasse le cadre annuel, il est important de mettre en pratique ce qui ne se fait pas suffisamment à mon sens dans les politiques publiques, à savoir l'évaluation.

Je suis persuadé que, sur ce texte, nous aurons une vraie discussion. Pour de nombreux parlementaires, la fixation de l'ONDAM est une préoccupation. Même si nous avons progressé dans cette voie depuis le vote de la loi du 13 août 2004, nous pouvons certainement y apporter des améliorations et des enrichissements.

Monsieur Door, vous m'avez aussi interrogé sur la convergence de la tarification à l'activité pour 2012. Notre objectif est clair. La convergence entre établissements et entre public et privé permettra de disposer en 2012 d'une échelle tarifaire unique. Nous commencerons au 1er mars 2005 et c'est le conseil de l'hospitalisation qui nous fera des propositions sur les modalités pratiques pour y parvenir.

S'agissant de l'ordonnance sur l'hôpital, le projet en est travaillé avec la majorité des syndicats et représentants du monde hospitalier. Il présente trois évolutions pour l'hôpital : la simplification du régime budgétaire et comptable, la création d'un Centre national de gestion pour les directeurs d'hôpitaux et un assouplissement de l'organisation interne.

A propos de l'amiante, nous avons souhaité que les petites entreprises, notamment celles du secteur des chantiers navals, qui sont très concernées, soient moins touchées par la contribution que nous mettrons en place. Le projet de loi prévoit que chaque premier redevable de cette contribution sera exonéré, ce qui bénéficiera d'abord et avant tout aux très petites entreprises, les TPE.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Très bien !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur Colombier, vous avez eu raison de noter la rapidité de l'application de la loi sur les retraites. Le Gouvernement a souhaité mettre en place rapidement les dispositions les plus importantes. Il en allait tout simplement de la pérennité de nos régimes de retraite et de la mise en œuvre des mesures de justice sociale.

Le pouvoir d'achat des retraites étant fréquemment évoqué en ce moment, je vais rappeler, à ce propos, quelques mesures de la loi sur les retraites.

Tout d'abord, la garantie du niveau de vie des retraités est maintenant inscrite dans la loi, noir sur blanc. Nous lui avons donné un contenu précis depuis le PLFSS de l'an dernier.

Ensuite, les pensions les plus modestes ont été spécifiquement améliorées. En 2008, aucun salarié n'aura une pension inférieure à 85 % du SMIC. Avant la réforme des retraites, le pourcentage garanti était à peine de 61 %.

On peut enfin noter l'amélioration de la situation des pluri-pensionnés et celle des Françaises et des Français qui ont commencé à travailler très jeunes, grâce au dispositif des carrières longues.

Sur les pensions de réversion, nous reprendrons nos travaux à partir des conclusions du Conseil d'orientation des retraites, comme nous avons eu l'occasion de l'indiquer, Philippe Douste-Blazy et moi-même.

Pour ce qui est de l'adossement du régime IEG, le montant de la soulte garantit sa neutralité pour les salariés du secteur privé. L'accord du conseil de la CNAVTS le montre. Le Gouvernement s'engage à organiser le suivi de cet accord dans le temps.

Le décret relatif au droit à l'information des assurés en matière de retraite est actuellement soumis à l'avis du Conseil d'État, cet avis étant lui-même tributaire de celui que doit émettre la CNIL sur ce sujet qui m'a particulièrement tenu à cœur quand j'exerçais mes fonctions parlementaires. La mise en place de ce droit à l'information constituera une très grande avancée.

Malgré ces contraintes, soyez assuré que tout sera fait pour que ce décret soit publié avant la fin de l'année, de même que celui sur la retraite progressive, qui changera foncièrement l'approche de la retraite et permettra de remonter le taux d'activité des seniors dans notre pays.

Par ailleurs, je confirme que la CNSA permettra de renforcer la médicalisation des établissements et services pour personnes en perte d'autonomie, de consolider le concours national de l'État en faveur de l'APA et de créer la prestation de compensation au handicap dans le cadre du projet de loi relatif à l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

L'objectif poursuivi, monsieur Colombier, est bien de corriger les inégalités territoriales, tout en s'appuyant sur le savoir-faire des conseils généraux en matière de prestations individuelles aux personnes en perte d'autonomie, comme c'est déjà le cas pour l'APA. Le PLFSS assure à ce titre les mesures nécessaires au fonctionnement de la CNSA en 2005.

A cette occasion, je veux préciser qu'il n'est pas envisagé de réduire les crédits d'action sociale de la CNAVTS au titre de l'aide à domicile des personnes âgées, dont la dépendance relève des GIR 5 et 6.

M. Georges Colombier, rapporteur. Très bien !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je n'oublie pas Mme Clergeau, mais ses questions relèvent davantage de la compétence de Mme Roig.

M. Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances, qui fut aussi l'un des principaux acteurs de la réforme de l'assurance maladie durant cet été, a souligné avec raison qu'il n'y avait pas de fatalité à ce que l'ONDAM soit dépassé. Je suis tout à fait d'accord avec lui. Cela nous permet de donner rendez-vous aux Cassandre qui ont pu s'exprimer dans cet hémicycle. S'ils ne veulent pas aujourd'hui nous faire crédit de nos ambitions, j'espère qu'ils sauront au moins constater les résultats de la politique mise en œuvre...

M. Gilles Artigues. Très bien !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. ...et du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. Jean-Pierre Blazy. Ne vous inquiétez pas !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je souhaite qu'ils soient aussi bruyants pour souligner les résultats, quand ils seront là. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Je remarque simplement que ces mêmes députés ont été particulièrement discrets la semaine dernière quand certains chiffres ont souligné qu'une politique de longue haleine, discrète, construite, comme l'a été celle de la CNAM depuis des années, commençait à porter ses fruits et que les comportements étaient susceptibles d'évoluer.

Ces députés, qui ne se sont pas privés de nous poser des questions, auraient pu souligner que les évolutions de comportements vis-à-vis du médicament, qu'ils considéraient comme foncièrement impossibles, ...

M. Jean-Pierre Blazy. Nous n'avons jamais dit cela !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. ...ont eu lieu.

En matière de politique relative aux antibiotiques, il faut savoir qu'une baisse de consommation de 16 % en deux ans est bonne à la fois pour la santé des Français et pour la sécurité sociale.

M. Jean-Pierre Blazy. Nous sommes d'accord !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Elle permettra une économie annuelle de 100 millions d'euros de dépenses inutiles.

M. Gérard Bapt. C'est grâce aux mesures prises par M. Kouchner !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Quand on joue la carte de la qualité des soins pour les Français, c'est également bon pour notre système de sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Gérard Bapt. Vous tombez dans votre système de défense habituel : avant vous, rien n'existait !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Pour l'évolution des comportements, il n'y a pas de fatalité à ce qu'elle s'applique sur tous les bancs !

M. François Guillaume. Jamais pour les socialistes !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Nous savons tous que le respect de l'ONDAM exige une mobilisation de tous les acteurs.

Nous sommes, comme vous, monsieur Bur, déterminés à œuvrer pour une gestion hospitalière plus transparente et plus efficace. C'est le sens des réformes en cours, qu'il s'agisse de la nouvelle gouvernance pour l'hôpital ou de la tarification à l'activité.

Vous avez souligné les marges d'économies existant en matière de médicaments. Je rappelle que le Gouvernement prévoit que seront réalisées 2,3 milliards d'euros d'économies, notamment grâce au développement du médicament générique et à une politique de prix dynamique.

Sur la réforme de la loi organique, nous souhaitons comme vous nous engager dans une logique « objectifs-résultats », même si je crois que la démarche de la LOLF n'est peut être pas totalement transposable aux lois de financement de la sécurité sociale. En effet la philosophie qui vise à apporter une véritable transparence pour une meilleure prise de décision et de responsabilité des parlementaires ne peut qu'être commune à ces deux démarches.

Nous devons également débattre du périmètre des mesures qui figureront dans ces lois de financement, afin de favoriser à la fois un débat efficace et, surtout, ce que je comprends, mesdames et messieurs les députés, le renforcement du contrôle du Parlement.

Je veux aussi souligner votre apport à la réforme de l'assurance maladie, qui trouve sa traduction et son prolongement dans le cadre de ce PLFSS. Les amendements que vous avez déposés, monsieur Bur, démontrent votre attachement à la réussite de cette réforme et au retour à l'équilibre des comptes de l'assurance maladie.

Je tiens à saluer la qualité de l'intervention du président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, M. Jean-Michel Dubernard, qui a souligné avec raison que si la question du montant et de l'évolution de la dépense de santé était très importante, il était au moins aussi important de s'intéresser à la qualité de la dépense sociale et à l'équité des efforts de financement demandés à nos concitoyens. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Gérard Bapt. Ça oui : vous vous y intéressez !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Dépenser mieux est au cœur de nos préoccupations. En la matière, les Français sont prêts à consentir un effort, dans la mesure où celui-ci est de nature à donner des résultats et s'il vaut pour tous. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Blazy. Quel beau discours !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Ce que nous avons voulu faire à travers cette réforme a été bel et bien compris par les Français. Au fil des réunions que nous organisons Philippe Douste-Blazy et moi-même dans toute la France, et au travers de certaines enquêtes d'opinion car, même si elles ne constituent pas un baromètre fiable, ...

M. Jean-Pierre Blazy. Et les élections ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. ...elles sont significatives quand il y a convergence, il apparaît que les Français ont le sentiment que cette réforme va clairement dans le bon sens, que les efforts qui leur ont été demandés, et qui sont équitables, porteront leurs fruits. Je vous rejoins tout à fait sur ce point, monsieur le président Dubernard.

J'ai d'ailleurs déjà évoqué les objectifs de cette réforme, qui vise d'abord à proposer un outil plus efficace au Parlement car nous sommes convaincus du rôle majeur du pouvoir législatif dans le pilotage de la sécurité sociale et de ses finances.

Je tiens à remercier M. Bertho Audifax d'avoir replacé le projet de loi de financement dans son contexte et d'avoir montré l'engagement de notre gouvernement et de notre majorité parlementaire dans la réforme indispensable de ce pan de notre protection sociale.

Monsieur le député, vous faites confiance, comme nous, à l'engagement de vraies relations conventionnelles. Celles-ci sont indispensables à la mise en place d'une réelle maîtrise médicalisée, qui permettra de prolonger les évolutions de dépenses que nous constatons aujourd'hui.

Le Gouvernement répondra à votre demande de soutien du développement de la qualité des soins ainsi qu'à celle de la commission sur le Fonds pour l'amélioration de la qualité des soins de ville, sujet auquel le président Dubernard est également particulièrement sensible.

J'ai en outre bien noté votre proposition sur le dossier médical personnel. Je me félicite qu'un département d'outre mer puisse d'ores et déjà se porter candidat.

Mme Fraysse voit dans la réforme de l'assurance maladie une privatisation de la sécurité sociale, au détriment de nos concitoyens. Ce n'est pas notre cas. Je pensais que nous regardions dans la même direction, mais, visiblement, nous n'avons pas la même lecture de ce texte.

Il n'y a en effet absolument aucune modification du périmètre de remboursement du régime obligatoire d'assurance maladie. Et si certains pensaient qu'il y aurait, à l'occasion de cette réforme, une privatisation, ils en sont pour leurs frais.

Mme Muguette Jacquaint. Attendons !

M. Jean-Pierre Blazy. Vous n'avez pas encore fait tout ce que vous vouliez faire !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Ceux qui, d'un autre côté, auraient espéré une étatisation du système d'assurance maladie, en sont également pour leurs frais. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Nous pensons, pour notre part, que le système de protection sociale à la française a de l'avenir. Néanmoins, pour que tel soit le cas, il faut que les gouvernants prennent leurs responsabilités. Il est vrai que cela n'a pas toujours été fait par le passé. Je peux donc bien comprendre votre étonnement de voir des acteurs politiques prendre en main l'avenir de leurs concitoyens. (Mêmes mouvements.)

Les Français ont compris, eux, que notre objectif principal est de préserver les principes fondamentaux de la sécurité sociale. Ils ont compris aussi, après le débat de cet été, que, sur certains bancs, que je pourrais situer géographiquement à ma gauche, l'objectif était bien différent. Pendant ce débat en effet, des parlementaires du groupe socialiste et du groupe communiste ont remis en cause la médecine libérale. Qu'ils prennent leurs responsabilités. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Nous n'avons jamais dit cela !

M. Gérard Bapt. Des noms !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur Bapt, ne vous inquiétez pas : je peux même citer votre nom. Dans vos propos, on distingue bien votre volonté de préserver l'avenir de la sécurité sociale. Sauf que cela ne passe pas, d'après vous, par le maintien de l'exercice libéral de la médecine. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Gérard Bapt. Fait personnel : je n'ai jamais dit cela !

Mme Muguette Jacquaint. Le Gouvernement a si bien traité les médecins libéraux !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Selon nous, les deux formes d'exercice de la médecine sont compatibles. Nous avons le courage de le dire. Toujours est-il que vous devriez avoir le courage de reconnaître le fond de votre pensée. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bruno Gilles. Si cela les agace tant, c'est que c'est vrai !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je tiens à votre disposition les propos des uns et des autres à ce sujet.

Sur la soulte EDF, je ne pense pas que la concertation approfondie qui a eu lieu avec la CNAV ait abouti à un résultat défavorable aux intérêts des salariés, bien au contraire. Nous avons veillé à assurer la neutralité de cette réforme dans tous ses aspects, y compris en ce qui concerne le choix de la méthode d'évaluation de la soulte. Il s'agissait pour nous d'un point important.

Monsieur Audifax, la réforme de la tarification à l'activité ne conduit pas à l'augmentation des inégalités, bien au contraire, (« Mais si ! » sur les bancs du groupe socialiste) et vous avez eu raison de le souligner. Son objectif est d'assurer une plus juste répartition des ressources entre les établissements et les activités en fonction de la charge réelle qu'elles représentent.

Ceux qui, aujourd'hui, regrettent la disparition du budget global sont sans doute les mêmes qui, à l'époque, disaient que le budget global serait la mort de l'hôpital public. Je tiens à le souligner, pour rafraîchir la mémoire des différents acteurs.

M. Gérard Bapt. Mais qui regrette le budget global ? Des noms !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Comme dans la plupart des pays développés, la France met en œuvre une tarification assise sur les activités médicales en préservant, comme vous le soulignez, monsieur Audifax, les spécificités de son système hospitalier et la complémentarité entre le secteur public et le secteur privé, ainsi que les contraintes du service public hospitalier qui seront désormais financées de façon transparente par l'enveloppe des réunions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation.

La T2A ne porte pas atteinte à la qualité du service rendu au patient. En répartissant les ressources de façon plus juste entre les établissements, elle permet de mieux prendre en compte la situation des hôpitaux qui connaissent une progression d'activité...

M. Jean-Pierre Blazy. Et les autres disparaîtront ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. ...en leur donnant les moyens de financer cette progression et, ce faisant, de maintenir la qualité des soins délivrés au patient.

Pour M. Gorce, rien n'est réglé. S'il se réfère à l'action du précédent gouvernement en la matière, il ne doit certes pas savoir ce qu'est une réforme, a fortiori une réforme courageuse.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Il n'y en a pas eu !

M. Gérard Bapt. Toujours la même ritournelle !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Il a parlé d'ardoises. Je ne referai pas les comptes, mais faisait-il allusion à celles laissées au gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, qui étaient effectivement importantes ?

M. Bruno Gilles. Ce sont les spécialistes de l'ardoise !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je ne rejoindrai les propos de M. Gorce que sur un point : beaucoup reste à faire. Comme les Français, nous en avons conscience, et nous ne perdons pas de vue que l'évolution de notre système social nous conduira à prendre nos responsabilités. Le précédent gouvernement ne l'avait pas fait.

M. Gérard Bapt. Tel un orgue de barbarie, vous jouez toujours le même air !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Pour notre part, nous sommes fidèles à notre ligne de conduite et nous entendons avancer et garantir le système social, conformément à ce qu'attendent les Français.

M. Gremetz prétendait que la réforme ne passerait pas et qu'elle n'était pas acceptée par les Français. Encore une fois, j'ai le sentiment qu'il parlait pour lui. Ses propos ont d'ailleurs été démentis par les faits, avec l'infléchissement très sensible de la progression des arrêts de travail, le ralentissement de l'évolution des remboursements de l'assurance maladie et, surtout, la modification de certains comportements dont j'ai déjà fait état.

Mme Jacqueline Fraysse. Il ne faut pas avoir honte pour dire cela !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. S'agissant du financement du FCAATA, M. Gremetz estimait très insuffisantes les mesures proposées, visant à associer les employeurs au financement de la cessation d'activité anticipée des salariés victimes de l'amiante. C'est pourtant la première fois que l'on met en place un système de financement équilibré, permettant de sensibiliser les entreprises aux risques liés à l'exposition à l'amiante sans remettre en cause les droits des salariés, qui sont intégralement préservés.

Monsieur Gilles, dans le cadre de la réforme de la tarification à l'activité, la loi de financement de la sécurité sociale a permis la mise en œuvre de coefficients géographiques s'appliquant aux tarifs des prestations hospitalières des établissements de santé implantés dans certaines zones pour tenir compte de facteurs spécifiques modifiant de façon permanente et substantielle le prix de ces prestations. La région Île-de-France bénéficiera ainsi, en 2005, d'un coefficient géographique de 7 %. En effet, les études préalables à l'instauration de la tarification à l'activité ont montré que plusieurs facteurs expliquaient les surcoûts, notamment le niveau des salaires et celui des prix de l'immobilier et des services.

M. Jean-Pierre Blazy. C'est vrai !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. En dehors de la Corse et des départements d'outre-mer, l'Île-de-France est la seule région dont la situation particulière justifie un coefficient correcteur concentrant tous les facteurs de surcoût. Pour Marseille, comme pour d'autres grandes villes françaises, il ressort des études effectuées que le surcoût lié à l'indemnité de résidence ne peut à lui seul justifier que lui soit étendu le bénéfice du coefficient géographique, même si la ville et sa région méritent des attentions particulières. Je m'en entretenais d'ailleurs dernièrement avec le sénateur-maire de Marseille, au cours d'un déplacement dans cette fort belle ville.

Monsieur Préel,...

M. Jean-Luc Préel. Je croyais avoir été oublié !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Il n'y avait aucun risque, monsieur Préel. Vous savez bien que le Gouvernement accorde toujours beaucoup d'attention à vos interventions. J'avoue toutefois ne pas avoir reconnu, dans la description que vous en avez faite, la réforme votée l'été dernier.

Ainsi il n'y a pas d'étatisation dans cette réforme. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Elle comporte, en revanche, de vrais progrès dans la régionalisation. J'avais cru comprendre que cette voie vous intéressait. Je pense notamment aux missions régionales de santé, qui constituent une avancée importante, et à l'expérimentation d'agences régionales de santé.

M. Gérard Bapt. Grâce à M. Dubernard !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je tiens à le préciser parce que c'est un point qui a été soulevé avec beaucoup d'acuité lors du débat parlementaire par le président de la commission, Jean-Michel Dubernard.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Et par l'ensemble de la commission !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Cette démarche régionale peut maintenant être engagée. Il appartiendra à l'ensemble des acteurs de terrain de s'en saisir et de s'en servir, avec enthousiasme et dans les meilleures conditions de coordination possibles.

Vous avez parlé de l'ONDAM 2005, monsieur Préel. Je répète donc que l'objectif de l'ONDAM pour l'année prochaine est crédible. Il prend en compte toutes les mesures nouvelles susceptibles d'intervenir en 2005. Je ne sais si je réussirai à vous convaincre mais je vous donne, à vous comme à d'autres parlementaires de cet hémicycle, rendez-vous. Vous devrez alors accepter de reconnaître que nous avons réussi, si c'est le cas.

M. Jean-Luc Préel. Très volontiers. Mais cela vaut pour vous aussi !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Ne vous inquiétez pas, je n'ai pas pour habitude de me dérober quand on me donne des rendez-vous.

Votre question sur ce sujet me permet d'ailleurs de préciser la répartition des enveloppes de l'ONDAM en 2005 : les soins de ville augmenteront de 2,1 %, 3,1 % en tenant compte de l'euro par consultation ; l'ONDAM hospitalier sera à 3,6 % ; les dépenses en faveur des personnes handicapées progresseront de 5,4 % et celles pour les personnes âgées croîtront de 11,4 %.

S'agissant des différentes questions liées aux retraites, je souhaite vous apporter quelques éléments.

A cet égard je réitère les engagements du Gouvernement d'assurer la convergence de traitement entre les maîtres du public et ceux du privé. J'avais d'ailleurs répondu ici même à une question posée au Gouvernement à ce sujet. Suite à une démarche initiée par M. Yves Censi et cosignée par de nombreux parlementaires, une partie des engagements liés à cette convergence est honorée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. D'autres éléments trouveront leur place dans les vecteurs législatifs adaptés. Ce sujet est évoqué depuis des années ; il a vocation à devenir réalité le plus rapidement possible.

En ce qui concerne les pensions de réversion, je crois que, comme moi, vous avez le plus grand respect pour les travaux du conseil d'orientation des retraites, celui-ci ayant fait la preuve, depuis de nombreuses années, de la qualité, de la pertinence de ses travaux et, surtout, du caractère consensuel tant de sa composition que de ses conclusions. C'est sur la base de ses travaux, qui seront disponibles à la fin du mois de novembre, que le Gouvernement prendra ses responsabilités.

Le plan d'économies sur les achats à l'hôpital prévoit que 150 millions d'euros seront gagnés pour la seule année 2005.

M. Jean-Pierre Blazy. Ce n'est pas sérieux !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je rappelle que l'engagement consenti par le Gouvernement en faveur de l'hôpital représentera 2 milliards d'euros supplémentaires à la fin de l'année 2005.

J'indique cependant de la façon la plus claire que, pour l'hôpital comme pour l'ensemble de notre système de santé, il ne s'agit absolument pas de dépenser moins, ni à la fin de 2005 ni à la fin de 2007. Nous dépenserons davantage, mais nous devons avoir le souci constant de dépenser mieux, ce qui est synonyme d'amélioration de la qualité des soins, à l'hôpital comme en médecine de ville.

M. Jean-Pierre Blazy. Les hôpitaux ne vous ont pas attendu !

M. Gérard Bapt. L'APHP a un plan d'économies depuis deux ans !

Mme la présidente. Monsieur Bapt !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. S'il n'est pas contestable, comme M. Préel l'a souligné, que certains hôpitaux connaissent des tensions budgétaires importantes,...

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Ce n'est rien de le dire !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. ...l'aide exceptionnelle de 300 millions d'euros que j'ai décidée cet été pour aider les établissements à entrer dans la T2A sans passif a permis aux ARH de négocier avec les établissements en difficulté des plans de retour à l'équilibre, dont la réalisation devra se poursuivre sur plusieurs exercices.

M. Jean-Pierre Blazy. Moyennant quoi ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Un bilan sera dressé avec la FHF au début de l'année 2005, lorsque nous connaîtrons les résultats de la gestion 2004.

Enfin, la réforme du régime budgétaire et comptable des hôpitaux se traduira en 2006 par la mise en place d'un état prévisionnel des recettes et la sincérité des comptes, les établissements étant dotés d'un outil moderne de gestion.

M. Vittel a fait part de la confiance qu'il avait dans la démarche du Gouvernement. Nous avons, en effet, voulu associer les professionnels de santé, comme d'ailleurs les partenaires sociaux, à l'ensemble des étapes de la réforme. Nous continuons à le faire dans la phase de mise en œuvre. Les textes relatifs à l'évaluation des pratiques professionnelles et à l'accréditation seront élaborés dans les prochaines semaines, en liaison avec les représentants des professionnels. Beaucoup repose sur les discussions conventionnelles.

Je suis optimiste, car depuis plusieurs mois, de nombreux progrès ont pu être constatés. Tous les sujets sont aujourd'hui sur la table. Il importe que chacun prenne ses responsabilités, mais j'ai le sentiment que ces discussions s'ouvrent dans un climat favorable.

M. Bapt est revenu longuement sur le financement de la dette sociale et sur le fonctionnement de la CADES.

M. Gérard Bapt. Oui, nous voudrions en savoir davantage !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Faut-il rappeler que le véritable transfert sur les générations futures aurait surtout consisté à n'engager aucune réforme de l'assurance maladie ?

M. Gérard Bapt. Je ne parlais pas de la réforme mais de la CADES !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je n'aurai pas la cruauté de souligner que c'est effectivement la solution qui avait été retenue sous le gouvernement de Lionel Jospin.

M. Bernard Perrut, rapporteur. Hélas !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Nous avons décidé de ne pas agir dans la continuité de ce que vous aviez fait, ou plutôt de ce que vous n'aviez pas fait.

M. Gérard Bapt. Dont acte !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je vous remercie, monsieur le député.

Vous vous êtes donc inquiété des conditions de financement de la CADES. Que ne l'avez-vous fait lorsque le Gouvernement précédent a doublé, à compter de l'année 2000, le rythme des versements que la CADES devait à l'État, détériorant ainsi les capacités de la caisse à rembourser la dette sociale ? Soyez pleinement rassuré pour l'avenir : les charges de la CADES sont clairement définies et les ressources qui lui sont affectées lui permettront de faire face sans difficulté à sa mission d'amortissement de la dette, dans des conditions de liquidité dont la qualité est unanimement reconnue par les marchés financiers et les agences de notation.

Monsieur Bernier, vous avez souligné l'importance de la prévention. Je partage tout à fait cet avis. Avec la loi du 9 août 2004, le Gouvernement dispose désormais d'un cadre d'action adapté pour développer une politique de prévention globale, au niveau national tant que local, en association avec les acteurs locaux. Il est vrai que nous devons maintenant accomplir de gros progrès.

Le système de santé français est, certes, reconnu comme l'un des meilleurs en matière curative mais, dans le domaine de la prévention, nous pouvons faire mieux. Vous connaissez l'investissement de ce gouvernement et du Président de la République dans la lutte contre le cancer. En la matière, nous avons réalisé un bond considérable avec le déploiement sur l'ensemble du territoire du dépistage du cancer du sein.

Cela étant, je suis d'accord avec vous sur la nécessité d'évaluer ces dispositifs. Je pense d'ailleurs que chacun, sur quelque banc qu'il siège, conviendra que toute politique publique doit comporter son dispositif d'évaluation. En la matière, les engagements financiers sont là : en 2005, le plan Cancer bénéficiera de 100 millions d'euros supplémentaires pour développer la prévention et dispenser davantage de soins à nos concitoyens.

M. Terrasse a évoqué la question de la loi organique, en insistant sur la nécessité d'une plus grande lisibilité des projets de loi de financement de la sécurité sociale. Sur ce point, je ne peux que le rejoindre. C'est pour renforcer cette lisibilité et le contrôle du Parlement que le Gouvernement s'est engagé à réformer la loi organique de 1996.

Il s'est également inquiété de l'ONDAM médico-social. Qu'il se rassure : les moyens que nous dégageons sur le secteur sont considérables puisque les augmentations auront été de 6,8 % en 2003, 7,4 % en 2004, de 7 % en 2005. C'est plus que ce que le précédent gouvernement a fait dans ce domaine,...

M. Bernard Perrut, rapporteur. C'est sûr !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. ...avec une progression de 2,3 % en 1997 et culminant à 6,4 % en 2002.

Mme Guigou a voulu comparer les évolutions des dépenses de santé sous les différentes majorités. Je ne suis pas certain que cela soit très pertinent. En tout cas, cette comparaison n'est pas défavorable au gouvernement actuel. Tous les experts de la Cour des comptes et du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie s'accordent à reconnaître que la dynamique des dépenses est un phénomène que l'on observe depuis le milieu des années 90.

Quant aux plans de santé publique, à une certaine époque, on les a surtout multipliés comme autant d'effets d'annonce. Avec le plan Cancer, l'action en matière de prévention routière et le plan Santé-environnement, nous construisons, pour notre part, un plan structurel avec des moyens et des résultats d'ores et déjà constatables.

En matière d'accidents du travail, le montant que la branche AT-MP paie à l'assurance maladie est réévalué tous les trois ans. Cela s'est fait aussi sous la responsabilité du précédent gouvernement et de Mme Guigou. C'est une procédure tout à fait cohérente.

M. Cugnenc a très justement contribué à rétablir la vérité en matière de prévention, à l'instar de M. Bernier. Notre politique de prévention et de traitement du cancer, impulsée par le Président de la République, est une grande avancée et une vraie réussite. La mise en place du cancéropole constitue également un progrès considérable dans la lutte contre le cancer par le soutien à la recherche. Une meilleure coordination des parcours de soins du patient favorisera la diffusion et la généralisation des actions de prévention.

M. Bacquet, bien que constatant les résultats obtenus sur les médicaments génériques, les conteste. Pourtant, les chiffres s'imposent à tous. J'avais cru comprendre qu'ils faisaient consensus et que chacun s'en réjouissait. Je rappelle que nous sommes passés d'une boîte de médicaments sur treize pour les génériques en 2002 à une boîte sur huit aujourd'hui. Ce changement de comportement ne me semble pas près de s'arrêter. Pour ma part, je m'en réjouis.

Concernant les indemnités journalières, il estime que notre politique en la matière ne va pas jusqu'au bout des possibilités de contrôle. Je pense que la réforme votée cet été donne à l'assurance maladie tous les outils nécessaires pour s'assurer que les abus ne pourront perdurer. Autant je suis attaché au principe de l'arrêt de travail, autant je pense important, dans un système solidaire, de mettre un terme aux fraudes et aux abus. Ainsi que je l'ai déjà souligné, les mesures prises par la CNAM portent leurs fruits.

M. Denis Jacquat a exprimé sa satisfaction de voir que le Gouvernement a décidé de suspendre les effets du décret sur les pensions de réversion. J'ai déjà eu l'occasion d'en parler mais je tiens à préciser que le Gouvernement agira selon quelques grands principes : assurer la garantie du pouvoir d'achat des retraités, donner visibilité et sécurité aux titulaires de pensions de réversion.

Je rappelle, en outre, que les pensions de réversion déjà liquidées ne subiront aucune modification.

M. Jean-Pierre Blazy. Nous verrons. Nous avons été échaudés !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Madame Hollman-Rispal, vous souhaitez une clarification du rôle que jouera la CNSA. Je peux vous rassurer sur ce point puisque, lors du débat de la loi sur le handicap, au Sénat, ce dernier a adopté l'architecture que le Gouvernement a présentée. La CNSA exercera une triple mission : elle contribuera au financement de la prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées, assurera une répartition équitable des crédits médico-sociaux d'assurance maladie sur l'ensemble du territoire et apportera une expertise technique sur les différents sujets liés à la perte d'autonomie.

Ses dépenses se ventileront de la façon suivante : financement des établissements et services médico-sociaux afin d'accompagner les efforts déjà très importants de l'ONDAM médico-social, contribution au financement de l'APA, financement de la prestation de compensation du handicap, promotion des actions innovantes pour la prise en charge des personnes âgées.

Il s'agit, je tiens à bien le préciser, non pas de remplacer la mission de l'assurance maladie mais bel et bien d'améliorer la prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées de notre pays.

Je me permets de rappeler que le taux d'évolution de l'ONDAM-personnes âgées a été, au cours de certains exercices de la précédente législature, inférieur à 5 %. Avec un objectif fixé à 11,4 %, nous continuons de contribuer de façon dynamique à la médicalisation des établissements et à la création de nouvelles places.

M. Domergue est intervenu sur la chirurgie publique. En la matière nous sommes parvenus à un accord unanime des quatre syndicats de praticiens hospitaliers pour étudier les solutions qu'il a évoquées dans le cadre des négociations statutaires. C'est un sujet qui, je le sais, tient particulièrement à cœur à M. Jean-Michel Dubernard. Les négociations ont débuté et nous respecterons cet engagement.

Il m'apparaît comme à vous nécessaire, monsieur Domergue, de reconnaître la pénibilité de certaines activités, celle de la chirurgie au premier chef. J'ai été frappé de constater que, lors du choix des postes d'interne, il y a quelques semaines, la chirurgie s'est placée en dernier. C'est un signe qui nous montre qu'il n'est que temps de réagir en la matière.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Cela fait un moment qu'il faut réagir !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Concernant les économies annoncées à l'hôpital, monsieur Blazy, les choses sont claires. Je pensais avoir été suffisamment précis, mais le fait que vous insistiez sur ce point montre qu'il me faut y revenir.

En 2003, la mission d'expertise a étudié quinze hôpitaux et évalué à 14 % en moyenne les économies réalisables sur une cinquantaine de produits. Les résultats de cette étude sont à votre disposition. Vous pourrez constater, d'ailleurs, que, pour certains produits comme l'oxygène médical, le prix peut varier de un à cinq. Je fais remarquer que l'achat au meilleur prix permettra de dégager des sommes qui seront plus utiles pour financer d'autres besoins à l'hôpital. Il ne s'agit que de cela, monsieur le député !

M. Jean-Pierre Blazy. Nous verrons !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Faites-nous ce crédit !

M. Jean-Pierre Blazy. Pour l'instant !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. En 2004, quatorze établissements ont été accompagnés par quatre cabinets-conseil dans la mise en œuvre d'un plan de réduction des prix d'achat et celui-ci a, d'ores et déjà, porté ses fruits.

Nous pensons qu'il est possible de réaliser des économies de 10 % sur les consommables et les textiles à usage unique - je dis bien « à usage unique » car j'ai entendu certains propos qui m'obligent à remettre les choses au point - de 11 % sur les fournitures de bureau - que l'on ne vienne donc pas nous parler de diminution de l'accès aux soins en la matière ! - de 15 % sur un certain nombre de dispositifs médicaux stériles et de 20 % sur les matériels informatiques. Les sommes dégagées, j'y insiste, nous seront bien utiles pour améliorer la qualité des soins.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Voilà une saine gestion !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je précise, par ailleurs, que les missions d'intérêt général des MIGAC recouvrent deux champs : les missions développées quasi exclusivement par les CHU et les centres anti-cancéreux - enseignement, recherche, innovation, activité de référence - et les autres missions, qui recouvrent des activités aussi diverses que les soins aux détenus, les banques de tissus et les permanences d'accès aux soins de santé telles que les SAMU.

Comme je l'ai indiqué hier en réponse à une motion de procédure, l'objectif du Gouvernement est la transparence absolue et un lourd et rigoureux travail d'identification est en cours à partir de ce que font les établissements.

M. Jean-Pierre Blazy. Voilà qui n'est ni clair ni rassurant !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. C'est pourtant transparent, monsieur le député !

Monsieur de Courson, votre présentation des résultats des discussions que nous avons menées sur la soulte n'est conforme ni à la réalité ni à l'esprit dans lequel le Gouvernement a travaillé. Pour avoir, dans une autre vie, fréquenté avec vous les bancs de la commission des finances, je connais votre souci du détail et le soin que vous mettez à aller au fond des choses, mais j'estime que, en choisissant la méthode prospective et des paramètres cohérents - une actualisation sur vingt-cinq ans, à hauteur de 2,5 % avec un taux de reprise des droits à 100 % - le Gouvernement a fait le bon choix - cela nous semble, en effet, être la solution la plus cohérente et la plus conforme aux intérêts des différents acteurs - et œuvré pour que cette opération soit neutre pour le régime général. Je crois que nous avons atteint nos objectifs.

Quant à la taxe, je précise à nouveau qu'elle n'induira pas d'augmentation de prix pour le consommateur. Cependant tout n'est pas encore fixé, puisque son assiette et son taux dépendront aussi des négociations en cours avec les organismes complémentaires.

Nous avons eu, c'est vrai, une démarche pragmatique. Nous avons pris en compte les réalités sociales de notre pays pour mener à bien cet adossement. L'accord que nous avons trouvé avec la CNAV montre d'ailleurs que nous sommes dans le vrai. Un certain nombre de sujets sont encore à aborder mais le Gouvernement a agi dans ce dossier comme dans les autres avec ambition mais dans la concertation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de la famille et de l'enfance.

Mme Marie-Josée Roig, ministre de la famille et de l'enfance. Je commencerai par rappeler à Mme le rapporteur pour la famille un point fondamental : les dispositifs financés par la branche famille doivent être en adéquation avec ses ressources. Si j'entends vos revendications, madame Clergeau, en matière de prestations, par rapport aux adolescents notamment, il me semble que votre position ne tient pas vraiment compte de la situation financière de la branche. Je comprends cependant qu'il vous soit difficile de vous déclarer satisfaite du retour à l'équilibre en 2005 puisque le déficit de 2004 est imputable au mécanisme de transfert instauré par le gouvernement Jospin entre la branche famille et le FSV. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Comme l'a rappelé Xavier Bertrand hier, ce transfert compense les recettes du FSV qui ont été confisquées par le gouvernement Jospin pour financer les 35 heures et une partie de l'allocation pour personne âgée, l'APA.

En ce qui concerne les mesures adoptées par la conférence de la famille en 2004, vous négligez de prendre en compte ce que nous avons décidé au-delà de la mesure PLFSS sur les entretiens de santé en 5e. Il est réducteur de prétendre que nous avons eu une approche strictement médicale. Nous avons, au contraire, privilégié une approche globale de l'adolescence, ce qui a d'ailleurs été reconnu par l'ensemble des partenaires sociaux et des mouvements familiaux lors de la conférence de la famille du 29 juin dernier.

En effet, nous avons pris des mesures qui valorisent l'engagement personnel des adolescents et favorisent leur entrée dans la vie associative ou leur engagement civique. Nous faciliterons leur accès à des jobs de vacances pour stimuler leur connaissance du monde du travail grâce à une exonération inscrite au projet de loi de finances pour 2005.

Nous allons également favoriser leur accès aux activités culturelles et de loisir.

Quant aux entretiens de santé, sur lesquels M. Perrut et M. Door se sont interrogés, je précise qu'ils seront effectués par des médecins.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. C'est heureux !

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Tout médecin, quel que soit son statut, pourra y participer sous réserve du respect d'un cahier des charges. Il pourra s'agir aussi bien d'un médecin libéral - le cas échéant, du médecin traitant - que d'un médecin hospitalier ou de santé scolaire. Comme 700 000 adolescents sont visés, les 2 000 médecins scolaires ne suffiront pas à la tâche. C'est pourquoi il faudra avoir également recours aux médecins libéraux.

Madame la rapporteure, je ne peux vous laisser insinuer que le Gouvernement n'a pas poursuivi l'effort en faveur des structures collectives et a privilégié les modes de garde individuels.

La PAJE a augmenté considérablement l'aide aux familles modestes pour qu'elles puissent - enfin ! - avoir recours à une assistante maternelle. Ces familles ont maintenant 150 euros - soit 1 000 francs - de plus par mois.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Sauf celles à qui on les a enlevés !

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Ce mode de garde va se démocratiser et ne sera plus seulement réservé aux familles aisées.

Par ailleurs, outre la PAJE elle-même, nous avons prévu 200 millions d'euros pour un nouveau plan d'aide à la création de places de crèches. Celui-ci est entré en application en février 2004 et permettra la création de 20 000 places de crèches supplémentaires. Il n'est donc pas exact de dire que les modes de garde individuels sont favorisés par rapport aux autres.

En outre, je ne vois pas en quoi la loi sur les responsabilités locales induirait un désengagement de l'État dans le financement des modes collectifs de garde : non seulement ces crédits relèvent de la branche famille et non du budget de l'État, mais cette compétence est déjà décentralisée depuis vingt ans.

Vous m'avez également interrogée sur la revalorisation des allocations logement. Sur ce sujet, je répondrai en même temps à M. Le Guen, Mme Mignon, Mme Guigou et M. Liebgott.

J'ai veillé à ce que les mesures de rationalisation des allocations logement prises par le ministère du logement n'aient pratiquement aucun impact sur les prestations familiales.

À cet égard, les bénéficiaires de prestations familiales telles que l'allocation pour jeune enfant - l'APJE -, l'allocation d'adoption, l'allocation de rentrée scolaire - l'ARS -, l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée - l'AFEAMA - au titre de sa majoration et l'allocation de garde d'enfant à domicile - l'AGED - au titre de sa partie versée sous condition de ressources, conservent le bénéfice des mesures d'abattement sur les ressources.

Je me demande vraiment d'où sort le chiffre, tout à fait fantaisiste, de 60 000 familles qui seraient touchées.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il n'est pas fantaisiste du tout !

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. En ce qui concerne la cotisation de l'État au titre des prestations familiales de ses agents, dont la gestion sera désormais assurée par la CAF, dès 2005, je vous indique qu'elle sera désormais imputée sur le budget des charges communes de l'État pour un montant de 2,4 milliards d'euros environ. Le taux de cotisation de l'État sera relevé de 5,2 à 5,3 %.

Pour ce qui est des emplois familiaux, l'augmentation du plafond pour la déduction fiscale n'est pas une mesure « clientéliste », comme vous voulez le faire croire.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Si !

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Sachez tout de même qu'avec 15 000 euros, vous ne financez pas un emploi à domicile à plein-temps

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Enfin ! C'est impossible. Vous ne parlez pas des mêmes familles !

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Sur la base de trente-cinq heures rémunérées au niveau du SMIC, il faut compter au moins 20 000 euros par an pour rémunérer, à l'année, une aide familiale à domicile. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le Gouvernement a porté à 20 000 euros le plafond applicable pour une aide à domicile s'occupant d'une personne invalide.

Vous m'avez également interrogée sur la création d'un fonds spécial pour financer les unions et les associations familiales. Ce fonds existe déjà au titre d'une loi datant de 1951. Deux enveloppes distinctes sont créées pour le financement respectif du fonctionnement et des interventions des unions dans le PLFSS. Un objectif de maîtrise financière et de clarification est ainsi poursuivi.

A M. Liebgott qui a évoqué les les enfants pauvres, je réponds que le Gouvernement est bien entendu actif sur ce sujet. Les différentes contributions et les constats dressés en la matière, notamment le rapport du CERC, nous ont conduits à organiser la prochaine conférence de la famille autour du thème des familles fragiles. Monsieur Liebgott, les conférences de la famille ne sont pas seulement un exercice de communication. Ce sont de grands moments de rencontre et d'écoute, d'où résultent de véritables réalisations, comme l'APAJE.

De plus, dans le prolongement du comité interministériel de lutte contre l'exclusion qui s'est tenu en juillet dernier, nous avons instauré un groupe de travail sur les familles monoparentales. C'est en effet au sein de ces familles que nous trouvons le plus d'enfants pauvres.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. À ce moment-là, il faut prendre des mesures !

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Des mesures seront prises dès que le comité de travail aura rendu ses conclusions.

J'ai bien noté l'intérêt que vous portez, monsieur Audifax, à la question de l'évolution des congés maternité en cas de naissance prématurée. Vous rejoignez les préoccupations du ministère de la famille et de l'enfance, et j'aurai l'occasion de m'exprimer sur ce sujet dans le cadre de l'examen des amendements.

Madame Mignon, j'ai déjà répondu à un certain nombre de vos questions, qui rejoignaient celles de Mme Clergeau.

Vous avez aussi évoqué le comité de suivi de l'allocation de présence parentale, que j'ai réuni hier.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il n'avait pas été réuni depuis deux ans !

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Cette aide, je le rappelle, concerne les familles qui doivent faire face à une situation grave et douloureuse provoquée par la maladie, le handicap ou l'accident d'un enfant.

Nous travaillons à une réforme de cette aide dans deux directions : assouplir la formule du congé de présence parentale et revoir les modalités de l'allocation versée dans ces situations. Il apparaît qu'elle ne répond pas tout à fait aux objectifs qui lui étaient assignés au départ et, en tout cas, incomplètement aux attentes des parents.

Comment mieux informer les familles et les employeurs de l'existence de ce dispositif qui, comme en témoigne le faible taux de recours à cette allocation - 331 personnes, alors que l'on en avait prévu 15 000 - reste trop méconnu ? Il faudra peut-être modifier le terme même, qui ne recouvre pas suffisamment la nature de cette allocation.

Enfin, je ne peux pas vous laisser remettre en cause notre souhait de diversifier et, partant, d'étendre l'offre de garde en recourant aux crèches d'entreprise.

Je rappelle que le Gouvernement a décidé de faciliter le recours aux crèches privées grâce à trois mesures : premièrement, en les rendant éligibles au plan Crèches ; deuxièmement, en leur permettant de recevoir des subventions des CAF, pour réduire significativement les coûts restant à la charge des parents ; troisièmement, en rendant éligibles les dépenses tant d'investissement que de fonctionnement au « crédit impôts-famille ».

Le sort des pupilles de l'État a été abordé par Mme Bourragué. Je suis particulièrement attentive à cette question. Un tiers d'entre eux, soit 2 000 enfants, ne peuvent être adoptés chaque année. Nous travaillons activement à mieux identifier les raisons de cette insuffisance, pour pouvoir y remédier. Ce serait une avancée dans le domaine de l'adoption.

L'Agence française de l'adoption - l'AFA - sera installée aux côtés des organismes autorisés pour l'adoption. Elle assumera des fonctions d'opérateur, accompagnera les familles d'adoption dans leurs démarches à l'étranger et sera également garante pour les pays d'origine des enfants, qui ont tendance à refuser les adoptions individuelles. Nous pourrons continuer à avoir accès à ces pays, grâce à cette garantie.

Nous avons eu à cœur de créer une parité de droits entre un enfant adopté et un enfant issu d'une filiation. Nous savons que cela ne recouvre pas totalement les frais exposés par une famille qui part à l'étranger adopter un enfant. Le doublement de cette prime est la marque que nous prenons en compte la reconnaissance que nous devons à ces familles qui désirent adopter des enfants et à leur souci de donner une famille à des enfants adoptables.

Monsieur Delnatte, j'ai été très sensible à vos propos, en particulier à votre conclusion sur l'importance que revêt la politique familiale pour notre société. Je vous rejoins pleinement sur cette idée que la politique familiale doit veiller à soutenir et à accompagner les familles dans leur projet d'enfant. Ce thème sera au centre de nos préoccupations au cours de la préparation de la prochaine conférence de la famille, qui mobilisera, dans les semaines à venir, les groupes de travail déjà en place. Cette conférence, comme l'a annoncé M. le Premier ministre, sera consacrée aux enjeux démographiques et au soutien aux familles fragiles ou fragilisées.

Monsieur Liebgott, vous avez également évoqué la situation des familles monoparentales, en particulier les difficultés des modes de garde spécifiques. Ces dernières années, les conférences de la famille ont débouché sur des mesures concrètes. Celle de 2005 ne fera pas exception à cette règle.

Je pense qu'il serait également souhaitable que nous puissions, au cours du mois de décembre, inscrire le texte du statut des assistantes maternelles à l'ordre du jour de l'Assemblée. Nous sortirons très rapidement les décrets d'application.

Je pense avoir répondu, dans les meilleurs délais, aux questions des différents orateurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Motion de renvoi en commission

Mme la présidente. J'ai reçu de M. Alain Bocquet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 7, du règlement.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à exprimer ici le profond mécontentement du groupe des député-e-s communistes et républicains concernant le déroulement de l'examen du PLFSS en commission, la semaine passée. Alors que le travail était prévu sur trois jours, du mardi après-midi au jeudi matin, notre commission ne s'est réunie que mardi après-midi et mardi soir.

Jamais un PLFSS n'a été examiné dans ces conditions. Si l'intention était de boucler, pour ne pas dire bâcler, l'examen des amendements en cinq heures, il aurait au moins fallu être prévenu.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Pas du tout ! vous auriez parfaitement pu venir en commission.

M. Bruno Gilles. Nous, nous étions là !

Mme Muguette Jacquaint. On ne peut être présent en commission que lorsque l'on a été prévenu des heures et des dates exactes de réunion.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Mme Clergeau était là !

Mme Muguette Jacquaint. Ces conditions de travail justifieraient à elles seules le renvoi en commission, mais des enjeux sur le fond, peuvent tout autant y contribuer.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 intervient après une série de réformes régressives pour notre système de protection sociale, dont la dernière en date, en juillet dernier, portait sur la réforme de l'assurance maladie.

Cette dernière a, selon M. Philippe Douste-Blazy, conduit le Gouvernement à présenter aujourd'hui un PLFSS « plutôt court », selon sa propre expression, pour ne pas dire vide, malgré l'immensité du chantier et des « restes à réaliser ».

Pourtant, faut-il rappeler encore les chiffres des déficits records qui s'accumulent pour ce gouvernement : déficit record pour le régime général, avec 14 milliards d'euros en 2004 - le chiffre a presque quintuplé par rapport à 2002 - ; déficit historique pour l'assurance maladie, avec 13,2 milliards d'euros ; enfin, menace de déficit pour les autres branches dès 2005.

Aussi, permettez-moi de revenir sur l'avertissement que je m'étais permis de lancer, il y a deux ans, au ministre de la santé. Je lui avais dit que le Gouvernement se refusait à envisager une quelconque mesure sérieuse de nature à enrayer le déficit, afin qu'il puisse exploiter ce dernier pour privatiser le système. Ces propos résonnent aujourd'hui comme un écho.

En effet, votre réforme de l'été dernier nous a ni plus, ni moins resservi de vieilles recettes vouées à l'échec pour contenir les dépenses et a mis en place un dispositif de gouvernance qui ouvrira, petit à petit, même si ce n'est pas le cas pour l'instant, la voie à la privatisation.

Néanmoins, vous ne cessiez d'affirmer la nécessité de votre réforme de l'assurance maladie pour résorber de toute urgence le « déficit abyssal » de celle-ci, pour colmater la fuite des « 23 000 euros par minute » giclant des comptes de la sécurité sociale. Ce déficit historique serait sans aucun doute, disiez-vous alors, la cause de la disparition de notre système de sécurité sociale. Tout était bon pour faire peur à nos concitoyens et exiger d'eux toujours plus de sacrifices.

En fait, vous n'avez jamais eu - ni votre prédécesseur d'ailleurs - l'intention de combler les finances de notre système d'assurance maladie. Il n'y a qu'à considérer les mesures prises par le Gouvernement pour s'en convaincre.

Vous appuyant sans retenue sur la culpabilisation, vous avez organisé la traque médiatique à la chimère pour résorber le déficit. Fraudeurs en puissance de l'assurance maladie, nous sommes tous devenus la cible des sacrifices que vous imposez à coups de déremboursements, de contrôles, de sanctions et de pénalisations.

Or vous savez, comme nous tous, ici, que la fraude des assurés sociaux en matière d'assurance maladie ne représente que 0,46 % des dépenses de santé et que le nombre des arrêts de travail abusifs est de l'ordre de 1 pour 100 000.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Nous n'avons pas les mêmes chiffres.

Mme Muguette Jacquaint. Il aurait fallu dire à nos concitoyens que les dépenses de santé croissantes sont une caractéristique des pays développés. La raison tient essentiellement à l'amélioration technique des pratiques médicales et au vieillissement des populations, qui bénéficient d'une meilleure prise en charge. Leur nombre est structurellement en hausse. Le Haut conseil pour l'assurance maladie l'a lui-même reconnu.

Dès lors, il fut facile de saisir les motivations réelles de vos pseudos efforts partagés : accroître par tous les moyens la part financière des assurés sociaux dans la prise en charge de leurs dépenses, afin de laisser libre cours aux acteurs privés de l'assurance maladie.

Dans un premier temps, vous inventez le déremboursement d'un euro. Je parle de déremboursement, bien que vous préfériez utiliser le mot « franchise », peut-être pour, d'ores et déjà, nous mettre dans le bain du vocable des assurances. Vous augmentez le forfait hospitalier de trois euros, après l'avoir accru de 2,45 euros. Vous augmentez la CSG et la CRDS pour l'ensemble des salariés et retraités en élargissant l'assiette de la première et en augmentant le taux des deux. Vous renforcez la rigueur des protocoles d'ALD et des maladies chroniques, en transférant à la charge de ces malades les coûts d'une prise en charge dorénavant considérée comme injustifiée.

Néanmoins le pire restait à venir : non content d'organiser le transfert de charge des dépenses de santé vers les assurés et les malades en réduisant le périmètre de prise en charge des dépenses, votre texte s'emploie dans un second temps à dynamiter l'actuelle architecture de la branche maladie de la sécurité sociale par le biais d'un double mouvement d'étatisation et de privatisation. Les complémentaires privées se verront ainsi actrices de la mise en place du panier de soins socialement pris en charge. L'objectif n'est autre que de leur ouvrir un boulevard dans la gestion de l'assurance maladie. Il s'agit donc bien d'un processus, certes progressif, de privatisation de l'assurance maladie, ne vous déplaise !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Quel manque de confiance à l'égard du mouvement mutualiste, madame !

Mme Muguette Jacquaint. Ce faisant, vous avez opté pour un choix de société où les assurés sociaux ne relèveront plus que du champ de la couverture maladie strictement individuelle, pour le plus grand bénéfice des acteurs privés de l'assurance maladie et du patronat en général.

Ainsi, votre texte procède d'un choix qui prépare une catastrophe parfaitement prévisible en matière de santé et de justice sociale. Vous savez comme moi que l'on ne fait pas d'économies, pas plus sur le plan financier que sur le plan sanitaire, en incitant les malades à retarder leurs visites chez le médecin, comme vous le suggérez implicitement. Cela n'aboutit qu'à multiplier le risque d'une maladie plus grave dont le coût social sera plus élevé.

C'est donc un PLFSS pour la forme que vous nous présentez, dans la mesure où des choix essentiels ont déjà été opérés voilà deux mois ; d'autres le seront dans quelques semaines avec les lois organiques réformant le mode d'élaboration du financement de la sécurité sociale.

Pourtant, et j'y insiste, la réalité des comptes de la sécurité sociale méritait une mobilisation d'envergure sur trois questions fondamentales que je vais traiter plus particulièrement pour justifier la motion de renvoi en commission et tenter de vous convaincre de son opportunité. Beaucoup d'autres se posent également, que nous aborderons en temps voulu durant l'examen de ce projet. Ces trois enjeux sont le financement, la politique du médicament et l'avenir de l'hôpital.

Ainsi que je l'ai déjà souligné, tous les indicateurs sont au rouge. Le déficit du régime général qui était de 3,4 milliards d'euros en 2002 a grimpé à 11,5 milliards en 2003 et il s'élèvera à 14 milliards cette année. Pour la seule branche maladie, il était de 6,1 milliards d'euros lorsque vous avez pris le pouvoir ; il est passé à 11,9 milliards pour atteindre 13,2 milliards en 2004. Autrement dit, le déficit du régime général a quasiment quintuplé depuis votre arrivée et celui de la branche maladie a doublé. Voilà votre œuvre, voilà le résultat de vos mesures de répression sous couvert de contrôle des dépenses, de vos mesures de déremboursement et de diminution de prise en charge !

On peut toujours agiter le chiffon rouge et exiger, comme vous le faites, toujours plus de sacrifices de la part des assurés sociaux, mais il n'y aura bientôt plus assez de crans à la ceinture pour continuer à la serrer !

Si vous persistez seulement à vouloir maîtriser « la pente des dépenses », comme vous dites, sans toucher aux ressources, alors votre action fera le lit d'un démantèlement encore plus poussé de notre sécurité sociale et c'en sera définitivement terminé de l'esprit de 1945. Mais n'est-ce pas la volonté de beaucoup d'entre vous, et particulièrement du MEDEF ?

Le déficit, ou plutôt cette tendance à organiser le déséquilibre financier de l'assurance maladie - exercice dans lequel vous montrez un réel talent -, résulte d'un sous-financement structurel.

Il faut au contraire garantir des ressources pérennes pour la sécurité sociale. C'est le sens de nos amendements de financement : M. le ministre de la santé n'a-t-il pas lui-même reconnu que « le déficit est d'abord dû à l'atonie des recettes » ?

Cela suppose également que l'on déconnecte le financement de la protection sociale des ressources fiscales hasardeuses, particulièrement des taxes sur les tabacs et sur l'alcool ; vous-mêmes en avez fait, me semble-t-il, l'expérience à vos dépens, monsieur le ministre.

En 2003, un supplément important de ressources - près de 1 milliard d'euros - était espéré du relèvement des taxes sur le tabac. Il ne s'est en définitive élevé qu'à 200 millions d'euros en raison d'une hausse du prix du tabac inférieure aux prévisions et d'une diminution des ventes plus marquée que celle prévue dans les estimations. À croire la Cour des comptes, les informations disponibles laissent entendre qu'il devrait en être de même en 2004. Le supplément attendu de recettes sur le tabac sera donc probablement inférieur au montant prévu dans la loi de financement de la sécurité sociale, c'est-à-dire 1,2 milliard d'euros.

Malgré tout, vous comptez bien récidiver en alourdissant la fiscalité sur les tabacs au mépris des engagements de votre ministre des finances, qui plus est pour financer des actions qui ne relèvent en aucune façon de la lutte contre le tabagisme. On pourrait plus facilement imaginer vous suivre dans cette politique si le moindre centime allait financer des centres de lutte contre le tabagisme, la généralisation de la prise en charge de substituts nicotiniques ou encore des actions de prévention. Mais non, rien de tout cela n'est envisagé !

Ajoutons que la trésorerie a dû absorber l'augmentation sensible des restes à recouvrer du régime général - remboursement des mesures en faveur de l'emploi, versement des cotisations et contributions dues par l'État - passés de 3,22 milliards d'euros en 2002 à 3,93 milliards en 2003. Ces restes à recouvrer, déjà non négligeables tout au long de ces dernières années, ont connu une hausse significative en 2003. Au titre du seul financement des exonérations sociales liées à des mesures en faveur de l'emploi, les restes à recouvrer atteindront en fin d'année 1,3 milliard d'euros, soit une augmentation de 20,1 % par rapport à l'année précédente !

La Cour des comptes nous conforte dans notre conviction d'agir efficacement sur les ressources pérennes et de stopper le développement endémique des aides publiques sans contrepartie.

Inégalités sociales et régionales de santé, insuffisance grave de la santé au travail et de la prévention, asphyxie de l'hôpital public, manque criant d'emploi et de formation qui fait plonger la démographie médicale, telles sont les questions que devrait affronter une véritable réforme afin de construire un système de santé mieux coordonné et plus efficace. Or ce projet de loi est largement insuffisant au regard de ces enjeux et mérite que notre commission se réunisse de nouveau pour apporter les correctifs qui s'imposent.

Oui ou non, est-il possible d'obtenir d'importantes ressources supplémentaires, capables d'abonder de manière pérenne les caisses de la sécurité sociale, tout en respectant les principes fondamentaux qui ont présidé à sa création ?

Cette question renvoie avant tout à celles de l'emploi et de la croissance économique. C'est la remontée du chômage qui, ces deux dernières années, a creusé le trou de la sécurité sociale. De ce point de vue, la politique gouvernementale consistant à comprimer les dépenses publiques et sociales et, par le fait, à plomber la consommation, principal ressort de la croissance, n'augure évidemment rien de bon. Or il faut savoir qu'un point de produit intérieur brut en moins signifie un manque à gagner de 2 milliards d'euros de cotisations sociales. Et 100 000 chômeurs de plus font perdre, entre les recettes en moins et les prestations chômage en plus, 1,3 milliard d'euros à la sécurité sociale.

Je n'oublie pas non plus votre course effrénée en faveur des exonérations de cotisations sociales patronales pour les entreprises. Elles auront représenté au total plus de 20 milliards d'euros en 2004 et devraient atteindre 24 milliards l'année prochaine.

Ces choix idéologiques sont censés réduire le coût du travail, donc créer des emplois. En fait ils se traduisent par un échec : le niveau des emplois créés en France ne s'est pas sensiblement amélioré, bien au contraire, puisque de nombreux emplois sont détruits. Il faut donc trouver un autre moyen d'encourager véritablement la création d'emplois.

La bonification d'emprunts bancaires ciblée et contrôlée, que nous proposons, en est un. Le but est de développer une véritable alternative par la baisse sélective des charges financières du crédit. Malheureusement, comme M. Seillière, votre gouvernement balaye d'un revers de main toute idée de prélèvement supplémentaire à la source sur la richesse créée par le travail, arguant - sans toutefois jamais fournir de véritable démonstration - que cela jouerait contre l'emploi.

Et si, contrairement à ce que vous affirmez, il était envisageable d'affecter une plus grande part de cette richesse à la santé tout en développant l'emploi ? Cette réforme comporterait deux volets.

Le premier consisterait en une taxation des revenus financiers des entreprises qui, pour l'heure, échappent à toute cotisation sociale. Ces revenus, pour l'essentiel produits des jeux de la Bourse, représentent la bagatelle de 200 milliards d'euros. S'ils étaient soumis à une cotisation du même taux que celle prélevée sur les salaires pour la sécu, celle-ci engrangerait d'un coup près de 20 milliards d'euros de ressources nouvelles. Certes, je vous le concède, une telle recette serait par nature aléatoire dans la mesure où les profits en question peuvent fortement fluctuer d'une année à l'autre. Toutefois un tel prélèvement n'en aurait pas moins une haute portée en incitant les entreprises à se détourner de la spéculation et à s'orienter vers des investissements productifs.

Le second volet, essentiel celui-là, serait une refonte de la cotisation patronale. Aujourd'hui, plus une entreprise embauche et verse des salaires élevés, plus elle paie de cotisations. À l'inverse, une société qui comprime ou précarise l'emploi, qui limite les salaires et privilégie la croissance financière, contribuera moins à la protection sociale. Aussi le système actuel pénalise-t-il les entreprises et industries de main-d'oeuvre, comme le BTP ou la métallurgie, tout en avantageant des secteurs comme celui des assurances et des banques. Notre réforme consisterait à inverser cette logique.

L'idée est de pratiquer un taux de cotisation amoindri pour les entreprises qui augmentent la part des salaires dans la valeur ajoutée et, à l'inverse, alourdi pour celles qui seraient tentées de la réduire. Cette réforme aurait le mérite d'enclencher une nouvelle logique d'efficacité fondée non sur la baisse des coûts salariaux, mais sur le développement des dépenses humaines, sociales et d'innovation, autrement dit sur le développement de l'emploi et sur l'élévation des salaires et de la formation. Ce serait une manière de responsabiliser non plus seulement les individus, mais également les employeurs vis-à-vis des finances de la sécurité sociale, en pesant sur le mode de gestion des entreprises. Tout en assurant des ressources durables à la protection sociale, notre réforme aurait enfin le mérite de véritablement réhabiliter le travail.

Telles sont les pistes que nous vous avons soumises et que nous jugeons indispensable de prendre en compte. Vous-même avez reconnu cet été que non seulement nous avions des propositions, mais surtout qu'elles étaient financées. Autrement dit, pour audacieuses qu'elles paraissent, nos propositions de financement sont opérationnelles.

On nous dit également que les difficultés des comptes de la sécurité sociale sont dues à une surconsommation de médicaments.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. C'est incontestable !

Mme Muguette Jacquaint. Or des choix peu judicieux, contre lesquels nous nous sommes élevés, ont été faits depuis trois ans.

Si nous demandons le renvoi en commission, c'est aussi parce que nous avons des propositions pour améliorer la dépense dans ce domaine, sans entraver l'accès de tous aux médicaments, bien au contraire.

Selon la Cour des comptes, le poste de ces dépenses a augmenté de 42 % entre 2000 et 2003, soit presque deux fois plus vite que l'ensemble des soins de ville qui, eux, ont progressé de 25 % dans la même période.

Le remboursement des médicaments représente désormais 34,5 % des dépenses de l'assurance maladie pour les soins de ville et, au total, en intégrant les dépenses hospitalières, la charge pour l'assurance maladie est de l'ordre de 22 milliards d'euros.

En dépit des réformes lancées depuis 1999, la régulation du secteur du médicament ne dispose pas encore des instances et des mécanismes permettant de garantir un meilleur usage des produits remboursés. En effet, les mécanismes mis en place et susceptibles d'obtenir le meilleur prix ne sont guère opérants. Les importations de médicaments en provenance de pays où ils sont moins chers ne sont en effet autorisées que depuis très peu de temps - janvier 2004 - et les pouvoirs publics n'en permettent toujours pas le remboursement par l'assurance maladie.

La dégressivité des prix dans le temps au fur et à mesure que le produit devient plus ancien tarde à être traduite dans les faits. Contrairement à la pratique qu'il avait amorcée en 2002, le comité économique des produits de santé n'a décidé aucune baisse de prix en 2003. Or aucune raison ne justifie que les prix demeurent stables pendant tout le cycle de vie des produits, contrairement à ce qui est constaté sur les marchés de tous les autres types de produits.

M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !

Mme Muguette Jacquaint. Par ailleurs, la procédure simplifiée de fixation des prix - système du dépôt de prix - mise en place en 2003 par Jean-François Mattei, et que nous avions jugée inefficace et même perverse, n'a pas abouti jusqu'à présent à des résultats probants. D'après vos informations, seulement cinq molécules auraient fait l'objet de cette procédure censée accélérer l'accès aux médicaments innovants.

Enfin, les récentes mesures d'abaissement du coût des médicaments menacent l'extension progressive des ventes de génériques. En effet, la politique en faveur des génériques - droit de substitution accordé aux pharmaciens, incitation des médecins à prescrire en dénomination commune - peut être paradoxalement affectée par l'instauration en 2003, dans certaines classes de médicaments, du tarif forfaitaire de responsabilité - TFR - qui consiste, pour abaisser les coûts, à rembourser un produit princeps sur la base du produit du générique.

Ainsi, lorsque le prix du produit princeps s'est aligné à la baisse sur le tarif remboursé, le taux de pénétration du générique sur le marché a augmenté plus faiblement, voire a régressé. Certes, la baisse de prix obtenue par le TFR représente un gain pour l'assurance maladie, mais les entreprises sont aussi incitées à relancer la promotion des princeps, ce qui, à terme, peut éliminer les génériques du marché ou ralentir leur croissance, tant que les producteurs de génériques ne seront pas suffisamment puissants.

Pour résumer, les mécanismes de contrôle et de régulation restent très insuffisants et n'ont pas été adaptés à la vive progression des dépenses. De l'aveu même du rapport de la Cour des comptes, « les moyens consacrés à l'évaluation du service rendu et à la fixation des tarifs de remboursement demeurent très faibles ».

L'inscription d'un nouveau produit sur la liste, qui vaut admission au remboursement, n'est possible que s'il apporte une amélioration ou permet des économies, mais cette règle n'est pas respectée. En outre, la liste n'est pas actualisée, en dépit de l'obsolescence de nombre de ces dispositifs. L'admission au remboursement de nombreux produits rendant un service similaire interdit les économies d'échelle. Enfin, la prescription reste très peu encadrée, ce qui peut entraîner l'achat de produits plus coûteux que nécessaire.

Au regard de ces dysfonctionnements, nous voulons apporter des réponses claires et cohérentes : c'est le sens de nos amendements sur la politique du médicament.

L'industrie du médicament est l'un des secteurs d'activité les plus profitables de l'économie mondiale, notamment de l'économie française.

M. Jean-Marie Le Guen. Très juste !

Mme Muguette Jacquaint. Avec parfois des seuils de rentabilité de l'ordre de 15 %, les entreprises pharmaceutiques font des profits considérables sur le dos des malades et des assurés sociaux.

En effet, l'industrie pharmaceutique oriente la recherche en fonction du profit et au mépris des besoins. Elle commercialise, sous le nom d'innovation, un principe actif à peine modifié pour éviter qu'il ne tombe dans le domaine public ; cela concerne les molécules les plus rentables.

Instaurer une maîtrise publique de l'industrie pharmaceutique, un droit de contrôle des salariés, des professionnels de santé et des associations de malades sur les choix de recherche et de production et sur la fixation des prix des médicaments, serait la meilleure méthode pour répondre aux besoins.

Aussi, proposons-nous la création d'un Conseil national du médicament, composé de représentants des directions et des salariés des laboratoires pharmaceutiques, des chercheurs du public et du privé, de la sécurité sociale, de la conférence nationale de santé. Sa mission consisterait à fixer des objectifs de santé publique à l'ensemble de l'industrie pharmaceutique

Autre piste : l'autonomie de décision de l'industrie pharmaceutique en matière de recherche ou de fabrication des médicaments soulève un grave problème d'ordre éthique et économique. Pour quelles raisons peut-on justifier l'abandon de la recherche médicale concernant des pans entiers de la médecine ? A-t-on le droit de laisser de côté les personnes atteintes de pathologies non rentables, comme les maladies orphelines, ou les populations de pays pauvres qui ne disposent pas des ressources nécessaires pour acheter les médicaments, sans moyens de se soigner ?

En France, la complexe réglementation qui entoure la mise sur le marché des médicaments et le contrôle de leur efficacité facilitent la liberté de mouvement de l'industrie pharmaceutique. Les firmes ont repéré les faiblesses du système et les exploitent à l'envi. L'existence concomitante du comité économique des produits de santé - le CEPS - qui fixe le prix des médicaments et de la commission de transparence de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé - l'AFSSAPS - qui classe les médicaments en fonction de leur efficacité et du service médical rendu - le SMR - après leur commercialisation, conduit à cette aberration : les firmes pharmaceutiques peuvent faire entrer dans les officines des produits dénommés médicaments sur la base de tests qu'elles réalisent elles-mêmes, produits qu'ensuite la commission de transparence classe parfois dans les catégories de médicaments les plus médiocres pour justifier un remboursement minimal ou nul.

Nous voulons mettre un terme à ces jeux commerciaux qui permettent aux laboratoires de laisser commercialiser des produits peu actifs au détriment de la recherche de produits actifs mis à la disposition du plus grand nombre.

Enfin, nous proposons d'obliger les industries pharmaceutiques à inscrire les molécules innovantes sur la liste des médicaments remboursables. En effet, certains médicaments considérés comme très utiles n'ont pas été ou ne sont pas actuellement remboursés car la demande n'a volontairement pas été faite par l'entreprise exploitante.

Dès lors, certains laboratoires ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché ne déposent pas de demande de remboursement par l'assurance maladie. Cette démarche permet aux industriels de la pharmacie d'éviter que des médicaments à service médical rendu important - les molécules innovantes - restent en dehors de toutes les procédures visant à autoriser leur remboursement par l'assurance maladie. En conséquence cela empêche la fixation d'un prix raisonnable pour ce médicament. Très concrètement, il s'agit d'éviter toute liberté du prix des médicaments pour permettre de les rendre ainsi accessibles aux malades.

D'une façon générale, il faut tendre vers l'idée que le prix d'un médicament doit pouvoir être revu à la baisse, passée la période d'amortissement des frais liés à son expérimentation.

De tout cela, la commission n'a pas assez délibéré. Pourtant, il s'agit bien de réponses concrètes, utiles qui ont, de surcroît, l'avantage de répondre aux recommandations de la Cour des comptes.

J'en viens à l'hôpital.

Nos hôpitaux souffrent monsieur le ministre, et ils sont nombreux à être au bord de la faillite. L'hôpital va mal, très mal. Le plan Hôpital 2007 a accéléré l'étranglement de nos établissements.

Aujourd'hui, l'hôpital vit une grave crise. Étranglé financièrement depuis plus de vingt ans par les politiques de maîtrise comptable, l'hôpital public n'a plus les moyens de répondre à ses missions. Je tiens à dire qu'on ne peut pas dans le même temps louer son dévouement, notamment au moment de la canicule, et le tenir pour responsables des déficits.

La liste des établissements en grande difficulté ne cesse de s'allonger. Selon les travaux de la conférence des directeurs généraux de CHU 85 % du patrimoine a plus de vingt ans, 35 % de l'ensemble est vétuste, c'est-à-dire près de 3,5 millions de mètres carrés, 60 % des établissements ont reçu un avis défavorable des commissions de contrôle sur le risque d'incendie.

Selon la fédération hospitalière française, à la fin de l'année 2005, il manquera 850 millions d'euros aux hôpitaux en raison de l'insuffisance des dotations et du report de charges toujours plus élevé d'année en année.

Malgré leur mobilisation et les nombreux appels qu'ils ont lancés, les personnels de santé ne sont toujours pas entendus ni par le Président de la République ni par le Gouvernement. Non seulement les moyens nouveaux ne sont pas débloqués, mais, fait plus grave, les plans d'austérité et de démantèlement se poursuivent.

C'est d'abord le cas avec le plan Hôpital 2007 dont l'objectif est de faire passer les établissements de santé de la sphère du sanitaire stricto sensu, dans celle de l'économie et de l'entreprise.

Complet, ce plan amorce en effet une véritable privatisation de la santé aux moyens d'une ouverture au capital privé des financements du bâti et de l'équipement de l'hôpital public, d'une organisation des services hospitaliers sur le mode de l'entreprise privée et, surtout, par l'introduction d'une nouvelle norme de gestion : la tarification à l'activité. Les établissements sont aujourd'hui des entités administratives assurant un service sanitaire. Par ces mesures, le Gouvernement ambitionne de les faire devenir des entités économiques gestionnaires assurant un certain niveau de rentabilité économique et financière.

Cette volonté de transformer les établissements de santé en centres de profit conduira ces derniers à rechercher un minimum de retours sur investissement. Les conséquences de ces pratiques sont connues : sélection des malades en fonction de la rentabilité financière des pathologies et déséquilibre régional de l'offre sanitaire hospitalière. Finalement, c'est le malade qui paiera la facture.

C'est aussi à l'aune de la qualité des soins et du nombre des actes dispensés qu'il faut mesurer les conséquences de la mise en place de la tarification à l'activité. Là encore, celle-ci risque fort de contribuer à diminuer la qualité de la prestation de santé : non la valeur du geste médical lui-même mais la capacité à répondre à un besoin de santé.

Toutefois, la question de la qualité du geste médical reste posée. Comme elle s'inscrira dans le cadre des stratégies d'investissement économique de l'établissement, elle répondra à un calcul coûts-avantages et non plus à un impératif médical.

Avec cette nouvelle technique de gestion, qu'en sera-t-il de la couverture du territoire en établissements de santé ? Au mieux, on peut espérer une spécialisation des établissements dans les régions où la densité de population permet une rentabilisation des investissements. En revanche, dans les autres régions, il y a peu de chances pour que les établissements restent en activité, ce qui accentuera le phénomène de la désertification et les inégalités régionales.

Enfin, il y a fort à parier que cette spécialisation se fera au détriment de la qualité des prestations médicales dans les établissements de santé. Le raisonnement le plus évident consiste à imaginer que, comme d'autres secteurs d'activité, les établissements se lanceront dans une guerre des salaires pour attirer les meilleures compétences et les meilleurs matériels. Or cet effet « pôle de compétences » va avoir pour conséquence non seulement de créer des files d'attente à l'entrée des établissements, mais aussi de vider les autres établissements de leur demande propre. Là encore, on risque de déséquilibrer le jeu de l'offre et de la demande de soins dans certaines zones géographiques, toujours au détriment des malades.

Voilà autant de raisons qui nous conduisent à rejeter avec force ce plan. Les missions de service public de l'hôpital, sa spécificité doivent être reconnues et réaffirmées et non pas gommées. Il faut disposer de l'ensemble des éléments de comparaison entre les deux secteurs. Aussi demandons-nous la suspension du plan Hôpital 2007 et le déblocage de moyens de fonctionnement pérennes grâce à l'ouverture de négociations avec les représentants syndicaux sur tous les sujets qui concernent l'hôpital : son organisation interne, ses modalités de financement mais aussi la formation de ses personnels et le déroulement des carrières.

C'est le troisième aspect qui motive la demande du groupe des député-e-s communistes et républicains de renvoi en commission.

Très technique et peu ambitieux, ce projet de loi de financement pour 2005 poursuit les orientations engagées par le précédent PLFSS, par le plan Hôpital 2007 et la réforme de l'assurance maladie. Il peaufine l'oeuvre des différentes lois relatives à l'organisation de la sécurité sociale et aux prestations pour mieux réduire la part des ressources qui pourraient leur être consacrées.

Pourtant, les données économiques comme les besoins méritaient une action d'ampleur, déconnectée des mesures éculées du Gouvernement cherchant à conjuguer diminution des dépenses et procédures de contrôle et de sanction.

Nous avons formulé des propositions qui méritent d'être retravaillées en commission au regard des problématiques qu'elles soulèvent. Pour toutes ces raisons, je vous invite à voter cette motion de renvoi en commission.

Mme Jacqueline Fraysse. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Madame la présidente, je ne peux entendre sans réagir les propos de Mme Jacquaint sur la manière dont les travaux de la commission se sont déroulés.

La préparation de l'examen du PLFSS a été accompagnée de nombreuses auditions, organisées par les trois rapporteurs, dont vous trouverez les comptes rendus en annexe des rapports : cinquante-deux au total, sans compter celles auxquelles Mme Clergeau a procédé. J'ajoute qu'elles étaient ouvertes à tous les groupes politiques.

Par ailleurs, je tiens à remercier le Gouvernement d'avoir fait en sorte que les auditions aient lieu après la diffusion de l'avant-projet de loi, voire, pour certaines, après le dépôt du projet de loi lui-même. Le calendrier des travaux du Gouvernement est en nette amélioration et je vous en félicite, monsieur le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Merci !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. La commission a consacré à ce projet six séances, d'une durée totale de neuf heures et dix minutes. Elle a été saisie de 256 amendements. Trente et un ont été adoptés : vingt-cinq émanant des rapporteurs, quatre du groupe UMP et deux du groupe socialiste.

En dehors de Mme Fraysse, qui est venue à la deuxième réunion, nous n'avons pas vu de députés du groupe communiste.

Mme Muguette Jacquaint. Mais si, je suis venue !

M. Bernard Perrut, rapporteur. Oui, mais trop tard !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. On ne vous a pas vue et je le regrette vivement car nous aurions pu aborder des sujets intéressants, comme vous l'avez fait dans votre motion de renvoi en commission.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la santé et la protection sociale.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Madame la députée, vous avez évoqué de nombreux sujets, dont certains, il faut le reconnaître, ont déjà été longuement étudiés cet été. C'est la raison pour laquelle, afin de ne pas allonger nos débats, je vous répondrai en quatre points.

D'abord, s'agissant de la philosophie de la réforme de l'assurance maladie, vous revenez sur le débat de cet été en essayant de démontrer que notre objectif ultime serait la privatisation de l'assurance maladie. Ce n'est pas vrai ! C'est justement pour éviter une telle privatisation que nous souhaitons mettre en place une réforme équitable le plus rapidement possible.

Après que nous avons passé cet été plus de cent cinquante heures à examiner de manière détaillée le plan du Gouvernement, je m'étonne que vous continuiez à faire une analyse aussi archaïque. L'objectif qui nous anime est de sauvegarder l'assurance maladie à la française : avec un paiement à l'acte, une liberté de prescription et d'installation pour les médecins, une liberté de choisir son médecin pour les patients. Les Français, eux, l'ont compris, madame Jacquaint. L'amorce de la modification de leurs comportements montre que nous les avons convaincus : une mobilisation de tous sera efficace pour sauver le système.

Ensuite, s'agissant du médicament, vous n'avez sans doute pas eu le temps de vous pencher sur le plan que nous lui avons consacré. Il comporte quatre axes : le développement des génériques, l'adaptation de la taille des conditionnements - le décret sortira dans les jours qui viennent -, la maîtrise du médicament à l'hôpital ainsi que le bon usage du médicament. Nous en attendons 2,3 millions d'économies d'ici à 2007. Je ne peux donc laisser dire que rien n'est fait dans ce domaine.

Par ailleurs, s'agissant de l'hôpital, je suis profondément convaincu qu'il possède les ressources nécessaires à son évolution et à sa modernisation. Je place en lui ma confiance, dans la pespective de lui redonner ambition et espoir, car les réformes ne se font pas à la place de ceux qui les vivent. Je veux continuer à lutter contre les rigidités, qu'elles concernent les relations entre les acteurs ou les modes de financement et de gestion interne. Je veux permettre à l'hôpital de devenir plus moderne et plus responsable en lui en donnant les moyens.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Très bien !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Les difficultés sont réelles. Pour autant, la sinistrose et le découragement ne sont pas de mise. Il convient de mettre en garde contre cet état d'esprit. L'hôpital est riche des femmes et des hommes qui y travaillent. Il faut agir avec eux pour plus de justice et de solidarité. Nous consacrons presque 2 milliards supplémentaires à l'hôpital public cette année : vous ne ferez croire à personne qu'il n'y a pas d'augmentation des crédits. Cela dit, nous souhaitons aussi réaliser des économies, en particulier sur les achats.

Enfin, s'agissant de la lutte contre les abus, je ne peux que saluer le sens de la précision dont vous avez fait preuve, madame Jacquaint : ils représenteraient 0,46 % des dépenses de l'assurance maladie. Bravo ! Quoi qu'il en soit, dans un système dans lequel la dépense de santé est prise en charge par la collectivité, les abus éventuels doivent tous être combattus.

Mme Muguette Jacquaint. Personne ne dit le contraire !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je suis ravi que nous aboutissions aux mêmes conclusions. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Les mesures que nous avons prévues en la matière sont de nature à résoudre les problèmes de financement que nous devons régler.

Mme Jacqueline Fraysse. Elles ne suffiront pas !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. En effet on ne peut demander aux Français de consentir des efforts sans mettre un terme aux situations manifestes d'abus ou de fraude.

M. Jean-Marie Le Guen. Quel moral d'acier ! Qui vole un œuf vole un bœuf !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je suis content que M. Le Guen soit un peu plus modéré. La raison fait petit à petit son chemin.

M. Bruno Gilles. Il vient d'arriver !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Nous gardons à l'esprit que c'est la collectivité qui paie les dépenses d'assurance maladie. À l'inverse des socialistes et des communistes, nous pensons qu'un euro prélevé sur les deniers publics et dépensé doit être un euro efficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. Dans les explications de vote sur la motion de renvoi en commission, la parole est à M. Claude Leteurtre.

M. Claude Leteurtre. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le monde hospitalier est impatient et inquiet. Certes, il est riche des hommes et des femmes qui y travaillent mais ils ont besoin de moyens. Or, dans les trois ans qui viennent, 20 à 30 % des plateaux techniques fermeront.

Tout le monde est conscient de la nécessité des restructurations, mais avec la tarification à l'activité, qui induit une concurrence nationale, seulement 10 % des surcoûts sont pris en compte. Cela crée une difficulté majeure. En tant que président de l'union hospitalière du Nord-Ouest, je connais beaucoup d'établissements qui donnent pour consigne de diminuer l'activité. Autrement dit, mieux vaut souffrir d'une affection grave en début d'année qu'à la fin. Et vous le savez bien, monsieur le ministre.

Mme Jacquaint a demandé le renvoi en commission mais M. Dubernard a un grand talent pour faire avancer les choses, tout le monde le reconnaît. (« Ah ! » et applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

En revanche, même si les rapporteurs ont aussi beaucoup de talent, je trouve qu'ils ont du mal à se détacher du discours du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. C'est parce que c'est un beau discours !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. À l'UDF, vous avez la pensée unique !

M. Claude Leteurtre. Le dialogue est nécessaire et il faut donc passer à l'examen des amendements. Voilà pourquoi le groupe UDF ne votera pas la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bertho Audifax.

M. Bertho Audifax. Je serai très bref car beaucoup d'arguments ont déjà été échangés.

Pendant vingt ans, des réformes indispensables ont été repoussées. Le Gouvernement s'est attaché, par les grandes réformes que nous avons votées depuis deux ans, à préserver l'avenir de la protection sociale des Français. Madame Jacquaint, vous avez bien voulu reconnaître, à la fin de votre intervention, la cohérence de notre pensée sur toutes ces réformes et je vous en remercie.

Vous avez parlé d'une anomalie de 1 % sur les indemnités journalières, mais les chiffres de la Cour des comptes font état de 6 % et même de 16 % pour certaines caisses.

M. Jean-Marie Le Guen. C'est 1 % en masse financière et 6 % pour le nombre des personnes !

M. Bertho Audifax. Nos rapporteurs ont analysé minutieusement ce PLFSS pour 2005 et les commissions ayant examiné tous les amendements proposés, le groupe UMP ne votera pas la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Il est quelque peu irritant de recevoir des leçons de morale sur l'utilisation des fonds publics alors que l'on parle sans arrêt de la situation à Papeete, de M. Flosse et que nous savons comment a été dépensée une partie de l'argent public ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cette majorité n'avait, me semble-t-il, pas vraiment de leçon à nous donner sur le sujet.

M. Bruno Gilles. Ça n'a aucun rapport !

M. Jean-Marie Le Guen. L'on comprend que Muguette Jacquaint s'interroge sur l'efficacité de l'action publique dans la lutte contre les abus. Certes, 6 % des personnes fraudent en matière d'indemnités journalières, 1 % en termes de masse financière, ce qui est condamnable, mais les experts s'accordent à reconnaître que les entreprises omettent de déclarer à l'AT-MP 3 milliards d'euros. Il faudrait que le Gouvernement ait la volonté de ramener le MEDEF à la raison à propos des sous-déclarations d'accidents du travail et de maladies professionnelles pour faire rentrer 3 milliards d'euros.

M. Bruno Gilles. Vous avez eu six ans pour le faire !

M. Jean-Marie Le Guen. Le premier acte du proconsul a été de dresser les salariés de l'assurance maladie les uns contre les autres afin qu'ils surveillent, tels des policiers, chaque personne qui sera en accident du travail ou en maladie professionnelle. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Vous fantasmez !

M. Jean-Marie Le Guen. S'agissant de l'hôpital, les difficultés sont réelles et M. Leteurtre l'a fort justement souligné. Je ne prétends évidemment pas qu'elles sont uniquement de la responsabilité de l'action du Gouvernement.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Vous faites preuve d'un peu plus de modestie. Voilà qui est bien !

M. Jean-Marie Le Guen. La situation est effectivement difficile et pour de multiples causes. Je n'y reviendrai pas.

Cela étant, il est certain qu'on ne peut pas continuer à payer le monde hospitalier avec des déclarations. Or vous multipliez les effets d'annonce en avançant des centaines de millions, voire des milliards d'euros mais ces chiffres ne sont que des fictions et ils se recoupent avec d'autres chiffres et d'autres annonces.

Il se trouve que vous avez été pris à ce même jeu puisque, pour faire montre d'un peu de rigueur, vous avez annoncé, dans un journal économique, que 850 millions d'euros d'économies seront réalisés à l'hôpital sur les bouteilles d'oxygène et autres taille-crayons. Vous croyiez, à l'époque, être crédibles et montrer que vous aviez un sens de la rigueur dans la gestion.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Nous l'avons !

M. Jean-Marie Le Guen. Cependant les professionnels hospitaliers ont entendu qu'on allait, une fois de plus, leur prendre de l'argent...

M. Bruno Gilles. Vous les avez aidés à comprendre cela !

M. Jean-Marie Le Guen. ...alors que vous annoncez tous les jours des plans. Or ils savent, car ils connaissent la situation financière concrète des établissements, qu'ils sont tous dans le rouge et que le rebasage pour 2004 est insuffisant de plus de 350 millions. Ils savent aussi qu'il manque 500 millions d'euros dans le budget que vous avez prévu pour l'année prochaine. Et vous osez faire preuve en permanance d'arrogance (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...

M. Bruno Gilles. L'arrogance, c'est la gauche !

M. Jean-Marie Le Guen. ...alors que, depuis 2002, vous ne cessez de vous tromper sur l'ONDAM puisque les dépassements cumulés atteignent 22 milliards d'euros.

Certes, je sais bien que ce qui vous a précédé n'existe pas et que ce qui vous succédera ne vous intéresse pas. Il n'y a que vous à un moment donné. Dans ces conditions, permettez-nous de nous interroger sur votre capacité à réaliser le projet en discussion.

Nous avons le sentiment que la discussion générale ne nous a pas apporté les informations nécessaires. Néanmoins, nous avons entendu que tous les chiffres pour 2005 étaient dans cet ONDAM. Si les syndicats médicaux vous suivent à la lettre, il n'y aura rien de plus dans la négociation que la progression de 3,1 % de l'ONDAM de ville. C'est en tout cas ce que j'ai cru entendre de votre collègue Xavier Bertrand tout à l'heure.

M. Pierre-Louis Fagniez. Il a bien parlé !

M. Jean-Marie Le Guen. Peut-être me suis-je trompé. Peut-être ai-je trop tendance à croire, comme d'autres, que vous dites à un moment la vérité. Le problème, c'est qu'on ne sait jamais quand ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. )

M. Bruno Gilles. Quelle arrogance !

M. Paul-Henri Cugnenc. Il a davantage de talent que de sincérité !

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Le groupe communiste soutient bien évidemment la demande de renvoi en commission pour les raisons que Mme Jacquaint a expliquées.

Je souhaite cependant revenir sur le travail qui a été accompli en commission d'autant que M. Dubernard lui-même a dit ne pas en être satisfait.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Parce que certains députés de certains groupes n'étaient pas là !

Mme Jacqueline Fraysse. Pour ma part, je ne suis pas satisfaite de la manière dont ce travail a été mené. Je rappelle en effet que la commission avait été convoquée le mardi 19 octobre à seize heures quinze et qu'aucune séance n'était prévue le soir. Elle était convoquée également le mercredi 20 octobre à neuf heures trente, de même que l'après-midi et le soir. Finalement, la commission a siégé jusqu'à vingt et une heures le mardi 19 octobre sans que nous en soyons informés. Et lorsque je suis arrivée le mercredi matin 20 octobre, elle avait déjà dépassé l'examen de l'article 30.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Cela veut dire que la commission a bien travaillé !

Mme Jacqueline Fraysse. Nous n'avons donc pas pu examiner correctement les amendements. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Vous ne pouvez pas reprocher à la commission d'avoir travaillé jusqu'à vingt et une heures !

M. Jean-Marie Le Guen. Pourquoi vingt et une heures ?

Mme Jacqueline Fraysse. Cela ne figurait pas dans la convocation !

M. Jean-Marie Le Guen. Il devait y avoir un match de football !

Mme Jacqueline Fraysse. Je serais venue si j'avais su qu'on siégerait après le dîner.

M. Bernard Perrut, rapporteur. Quelle mauvaise foi !

Mme Jacqueline Fraysse. Non, je ne suis pas de mauvaise foi !

Mme la présidente. Madame Fraysse, ne vous laissez pas distraire. Veuillez poursuivre !

Mme Jacqueline Fraysse. M. le ministre a déclaré que les fraudes et les excès seront désormais son seul et unique cheval de bataille. Les difficultés de la sécurité sociale seraient donc dues aux fraudeurs, aux médecins qui prescrivent n'importe quoi, aux excès tous azimuts, à des gens malhonnêtes. Selon lui quand on aura réglé ce grand problème national de malhonnêteté en matière de soins, de santé et de dépenses, le problème de la protection sociale sera réglé. Ce n'est pas vrai, monsieur le ministre, et vous le savez.

Évidemment, personne ne vous reprochera de lutter contre les excès et les fraudes.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est déjà bien !

Mme Jacqueline Fraysse. Néanmoins chacun sait qu'il s'agit avant tout d'un problème de recettes, de révision du financement de la protection sociale. Malgré tout vous refusez absolument de vous y attaquer. Bien que vous vous en défendiez, vous préparez la casse de ce système solidaire, donc la privatisation de notre protection sociale. C'est une évidence, mais vous n'aimez pas qu'on vous le dise. Pourtant, c'est ce que nous vivons.

M. Paul-Henri Cugnenc. Vous n'êtes pas très convaincante !

Mme Jacqueline Fraysse. Vous parlez de liberté - liberté du choix du médecin, liberté d'installation - mais quid de la liberté d'attendre un mois pour passer un scanner, de la liberté de ne plus pouvoir consulter bientôt de gynécologue,...

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. On n'est pas en Union soviétique ici !

Mme Jacqueline Fraysse. ...de la liberté de ne plus avoir d'anesthésistes ou de la liberté des urgentistes de travailler nuit et jour ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Muguette Jacquaint. Très bien !

Mme Jacqueline Fraysse. Voilà la liberté que vous nous préparez !

Je vous invite, monsieur le ministre, à lire la lettre ouverte que viennent de nous adresser les internes des hôpitaux publics. Vous verrez qu'ils ne partagent pas tout à fait votre enthousiasme en matière de liberté, de conditions de travail et de contraintes d'installation.

Mme la présidente. La parole est à M.  le président de la commission.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Je ferai parvenir à Mme Fraysse une note détaillée concernant les horaires et le fonctionnement de la commission ainsi qu'un relevé de présence des membres du groupe communiste.

Mme la présidente. Je mets aux voix la motion de renvoi en commission.

(La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)

Mme la présidente. J'informe l'Assemblée que l'article 1er et le rapport annexé sont réservés, à la demande du Gouvernement, jusqu'après l'article 35.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    3

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SEANCE

Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq, deuxième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, n° 1830 :

Rapport, n° 1876 tomes 1 à 5, de MM. Bernard Perrut, Jean-Pierre Door, Mme Marie-Françoise Clergeau et M. Georges Colombier, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ;

Avis, n° 1877, de M. Yves Bur, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures quinze.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot