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le 10 mars 2003

N° 678

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 mars 2003.

PROJET DE LOI

relatif au mécénat et aux fondations,

(Renvoyé à la commission des finances, de l'économie générale et du plan, à défaut de constitution

d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

AU NOM DE M. JEAN-PIERRE RAFFARIN,

Premier ministre,

PAR M. JEAN-JACQUES AILLAGON,

ministre de la culture et de la communication.

Impôts et taxes.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le Gouvernement a fait de la promotion des initiatives, du mécénat et des fondations, une priorité de sa politique et une composante de la réforme de l'Etat.

L'implication de tous les citoyens dans des actions d'intérêt général est plus que jamais nécessaire dans notre société, afin de renforcer le lien social et la solidarité. Il faut valoriser l'envie de créer et la générosité de nos concitoyens.

En soutenant le mécénat, le gouvernement souhaite encourager le travail des associations et des fondations, favoriser les initiatives prises par les particuliers et les entreprises dans les domaines qui touchent à l'intérêt général. L'action de la société civile est indispensable aux côtés des politiques publiques.

De plus, le cadre juridique et fiscal du mécénat est un élément essentiel de l'attractivité de notre pays et de son rayonnement dans le monde, notamment dans les domaines de la culture, de la recherche, de la santé, du sport et de la solidarité.

L'essor du mécénat en France date du début des années soixante. Il a été favorisé, sous l'influence d'André Malraux, par la création de la Fondation de France ainsi que par l'introduction de mécanismes d'incitations fiscales. Après une nouvelle impulsion donnée à la fin des années 1980, à la faveur de la loi du 23 juillet 1987 sur le mécénat et de la loi du 4 juillet 1990 sur les fondations d'entreprise, la comparaison avec les autres pays occidentaux montre que le régime français du mécénat reste, peu avantageux, compliqué, et donc au total peu incitatif. En particulier, les réductions d'impôt sur le revenu ou les sociétés sont moins favorables que dans d'autres pays et notre droit des fondations demeure complexe.

Il en résulte une certaine stagnation du mécénat en France, de la part des particuliers comme des entreprises.

Le faible nombre de fondations montre également le manque d'attrait de nos dispositifs réglementaires et fiscaux. Au regard des 12 000 fondations américaines, des 3 000 charity trusts britanniques et des 2 000 fondations allemandes, on ne compte ainsi en France que 476 fondations d'utilité publique, dont deux tiers seraient peu actives, et 78 fondations d'entreprise, auxquelles s'ajoutent environ 500 fondations sous égide de la Fondation de France.

Une relance du mécénat et des fondations apparaît donc nécessaire, surtout au regard des réformes opérées récemment par nos partenaires (Royaume-Uni et Allemagne en 2000) ou en cours (Espagne). Il faut également faire évoluer les esprits pour améliorer l'image du mécénat chez nos concitoyens.

Dans cet esprit, l'objectif du projet de loi proposé à la représentation nationale est de favoriser une plus grande implication des citoyens, des entreprises et de l'ensemble de la société civile, dans l'exercice de missions d'intérêt général, aux côtés de l'Etat et des autres pouvoirs publics.

Pour cela, il est proposé d'améliorer très significativement les avantages fiscaux destinés à encourager la générosité publique, dans le respect de la philosophie des dispositifs actuels, avec le souci de simplifier les textes et les procédures.

Les avantages fiscaux proposés bénéficieront à l'ensemble des citoyens et des entreprises ainsi qu'à l'ensemble des causes d'intérêt général -culturelles, sociales, environnementales, etc.-

La réforme des articles 200 et 238 bis du Code général des impôts, prévue par les articles 1er et 3, permet de consacrer une règle simple et efficace : chaque citoyen et chaque entreprise bénéficieront d'une réduction d'impôt de 60 %. Pour les particuliers il s'agira d'une réduction de l'impôt sur le revenu, et pour les entreprises d'une réduction d'impôt sur les sociétés (ou de l'impôt sur le revenu, en fonction du statut fiscal de l'entreprise).

Pour les particuliers, le plafond de la réduction fiscale sera porté à 20 % du revenu imposable, contre 10 % actuellement, avec une possibilité de reporter l'excédent de la réduction fiscale sur cinq ans.

Pour les entreprises, la réduction fiscale sera plafonnée à 5 0/00 du chiffre d'affaires dans tous les cas, contre 2,25 et 3,25 0/00 actuellement en fonction du statut du bénéficiaire.

L'article 2 double l'abattement au titre de l'impôt sur les sociétés dont bénéficient les fondations reconnues d'utilité publique, qui est porté de 15 à 30 000 €.

L'article 4 permet aux héritiers, donataires et légataires de déduire de l'assiette des droits de succession le montant de leurs dons aux fondations reconnues d'utilité publique.

L'article 5 autorise les fondations d'entreprise à recevoir les dons effectués par les salariés de l'entreprise fondatrice. Actuellement, cette catégorie de fondations ne peut recevoir aucun don ou libéralité en dehors des apports que lui consent l'entreprise fondatrice. Or les salariés sont déjà associés au fonctionnement de la fondation par l'intermédiaire de leurs représentants au conseil d'administration de celle-ci. Il est apparu utile de leur permettre de participer encore davantage à l'action philanthropique de la fondation de leur entreprise par des dons volontaires bénéficiant de l'avantage fiscal prévu à l'article 1er .

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre de la culture et de la communication,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi relatif au mécénat et aux fondations, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté à l'Assemblée nationale par le ministre de la culture et de la communication, qui est chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article 1er

I.- L'article 200 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Dans le premier alinéa du 1, le taux : « 50 % » est remplacé par le taux : « 60 % » et le taux : « 10 % » est remplacé par le taux : « 20 % » ;

2° Le deuxième alinéa du 1 est remplacé par les dispositions suivantes :

« a) De fondations ou associations reconnues d'utilité publique et, pour les seuls salariés des entreprises fondatrices, de fondations d'entreprises, lorsque ces organismes répondent aux conditions fixées au ; » ;

3° Après le sixième alinéa du 1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

 « f) D'organismes sans but lucratif qui procèdent à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté, qui contribuent à favoriser leur logement ou qui procèdent, à titre principal, à la fourniture gratuite des soins mentionnés au 1º du 4 de l'article 261 à des personnes en difficulté. » ;

4° Au septième alinéa du 1, le mot : « sixième » est remplacé par le mot : « septième » ;

5° Après le 1, il est inséré un 1 bis ainsi rédigé :

« 1 bis Pour l'application des dispositions du 1, lorsque les dons et versements effectués au cours d'une année excèdent la limite de 20 %, l'excédent est reporté successivement sur les années suivantes jusqu'à la cinquième inclusivement et ouvre droit à la réduction d'impôt dans les mêmes conditions. »

6° Le 4 est abrogé ;

7° Au 5, les mots : « des 1 et 4 » sont remplacés par les mots : « du 1 ».

II.- Les dispositions du I s'appliquent aux dons et versements effectués à compter du 1er janvier 2003.

Article 2

I.- Au III de l'article 219 bis du code général des impôts, la somme : « 15 000 € »  est remplacée par la somme : « 30 000 € ».

II.- Les dispositions du I sont applicables à l'impôt sur les sociétés dû au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2003.

Article 3

I.- L'article 238 bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le 1 est remplacé par les dispositions suivantes :

« 1 Ouvrent droit à une réduction d'impôt égale à 60 % de leur montant les versements, pris dans la limite de 5 0/00 du chiffre d'affaires, effectués par les entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés au profit :

« a) D'œuvres ou d'organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises notamment quand ces versements sont faits au bénéfice d'une fondation d'entreprise, même si cette dernière porte le nom de l'entreprise fondatrice. Ces dispositions s'appliquent même si le nom de l'entreprise versante est associé aux opérations réalisées par ces organismes ; 

« b) De fondations ou associations reconnues d'utilité publique ou des musées de France et répondant aux conditions fixées au a, ainsi que d'associations cultuelles ou de bienfaisance qui sont autorisées à recevoir des dons et legs et des établissements publics des cultes reconnus d'Alsace-Moselle. La condition relative à la reconnaissance d'utilité publique est réputée remplie par les associations régies par la loi locale maintenue en vigueur dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, lorsque la mission de ces associations est reconnue d'utilité publique. Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de cette reconnaissance et les modalités de procédure permettant de l'accorder ; 

« c) Des établissements d'enseignement supérieur ou d'enseignement artistique publics, ou privés à but non lucratif agréés par le ministre chargé du budget ainsi que par le ministre chargé de l'enseignement supérieur ou par le ministre chargé de la culture ;

« d) Des sociétés ou organismes publics ou privés agréés à cet effet par le ministre chargé du budget en vertu de l'article 4 de l'ordonnance n° 58-882 du 25 septembre 1958 relative à la fiscalité en matière de recherche scientifique et technique .

« Les organismes mentionnés au b peuvent, lorsque leurs statuts ont été approuvés à ce titre par décret en Conseil d'Etat, recevoir des versements pour le compte d'œuvres ou d'organismes mentionnés au a.

« Lorsque la limite fixée au premier alinéa est dépassée au cours d'un exercice, l'excédent de versement peut donner lieu à réduction d'impôt au titre des cinq exercices suivants, après prise en compte des versements effectués au titre de chacun de ces exercices, sans qu'il puisse en résulter un dépassement du plafond défini au premier alinéa.

« La limite de 5 0/00 du chiffre d'affaires s'applique à l'ensemble des versements effectués au titre du présent article.

« Les versements ne sont pas déductibles pour la détermination du bénéfice imposable. » ;

2° Les 2, 3 et 5 sont abrogés.

II.- Les articles 238 bis A et 238 bis AA du code général des impôts sont abrogés.

III.- Le deuxième alinéa de l'article 238 bis AB du même code est ainsi rédigé :

« La déduction ainsi effectuée au titre de chaque exercice ne peut excéder la limite mentionnée au premier alinéa de l'article 238 bis, minorée du total des versements mentionnés au même article. »

IV.- Les dispositions des I à III s'appliquent aux versements effectués au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2003.

V.- Les excédents de versement constatés au cours d'exercices antérieurs à ceux ouverts à compter du 1er janvier 2003 et qui n'ont pas été déduits du résultat imposable peuvent donner lieu à réduction d'impôt, dans les conditions prévues au septième alinéa du 1 de l'article 238 bis, au titre des cinq exercices suivant leur constatation.

Article 4

L'article 788 du code général des impôts est ainsi modifié :

I.- Le II est remplacé par les dispositions suivantes :

« II.- Pour la perception des droits de mutation par décès, il est effectué un abattement sur la part nette de tout héritier, donataire ou légataire correspondant aux sommes versées à titre définitif par celui-ci à une fondation reconnue d'utilité publique répondant aux conditions fixées au  b du 1 de l'article 200 en remploi des sommes, droits ou valeurs reçus du défunt à la double condition :

« 1° Que le don soit effectué, en pleine propriété, dans les six mois suivant le décès ;

« 2° Que soient jointes à la déclaration de succession des pièces justificatives répondant à un modèle fixé par un arrêté du ministre chargé du budget attestant du montant et de la date des versements ainsi que de l'identité des bénéficiaires.

« L'application de cet abattement n'est pas cumulable avec le bénéfice de la réduction d'impôt sur le revenu prévue à l'article 200. »

II.- Après le II, il est ajouté un III ainsi rédigé :

« III.- A défaut d'autre abattement, à l'exception de celui mentionné au II, un abattement de 1 500 € est opéré sur chaque part successorale. »

Article 5

La phrase suivante est ajoutée au dernier alinéa de l'article 19-8 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat : « Elle peut toutefois recevoir des dons effectués par les salariés de l'entreprise fondatrice. »

Fait à Paris, le 5 mars 2003.

Signé : JEAN-PIERRE RAFFARIN

Par le Premier ministre :

Le ministre de la culture et de la communication,

Signé : JEAN-JACQUES AILLAGON

N° 678 - Projet de loi relatif au mécénat et aux fondations


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