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N° 1016

(1ère partie)
______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 juillet 2003

RAPPORT D'INFORMATION

déposé

en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES, DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE

sur l'avenir du transport aérien français et la politique aéroportuaire,

et présenté
PAR M. Yannick FAVENNEC,

Rapporteur,

en conclusion des travaux d'une mission d'information présidée par

M. François-Michel GONNOT,

et composée en outre de Mmes Chantal BRUNEL, Nathalie GAUTIER, Odile SAUGUES, Catherine VAUTRIN et de MM. Pierre COHEN, Stéphane DEMILLY, Jacques DESALLANGRE, Jean-Pierre GRAND, Alain MARTY, Georges MOTHRON, Alain VENOT et Jean-Sébastien VIALATTE,
Député(e)s.

 

INTRODUCTION 9

I. - LES TRANSPORTS AÉRIENS : UN SECTEUR EN PLEIN BOULEVERSEMENT 13

A.- UN CADRE JURIDIQUE INTERNATIONAL EN MUTATION 14

1. Un marché internationalisé depuis ses origines 14

a) Le rôle de l'OACI et des organisations internationales en matière de transports aériens 14

b) La déréglementation américaine et ses conséquences 16

2. Un cadre européen en cours de redéfinition 18

a) La libéralisation du transport aérien européen est engagée depuis la fin des années 80 et effective depuis 1997 18

b) Une remise en cause plus récente par la Cour de justice des Communautés européennes des accords aériens bilatéraux entre les pays membres de l'Union européenne et les États tiers 20

c) Le ciel unique européen 22

B.- UNE ÉVOLUTION DES STRATÉGIES DES COMPAGNIES AÉRIENNES AU COURS DES DERNIÈRES ANNÉES 23

1. Des compagnies « majeures » restructurées dans un paysage aérien bouleversé 23

a) Un secteur profondément remodelé durant la dernière décennie 23

b) Le développement récent des alliances 26

c) Les conséquences de ces évolutions sur les infrastructures aéroportuaires : le développement des hubs 28

2. Apparition des compagnies low costs 33

a) Etat des lieux 33

b) Perspectives d'évolution 37

II. - LA DEMANDE DE TRANSPORT AÉRIEN : AU-DELÀ D'UN RALENTISSEMENT CONJONCTUREL M 88785">41

c) Ces évolutions amènent à s'interroger sur le lien entre la croissance de l'économie et la demande de transport aérien 43

2. Les conséquences sur la demande de transport aérien 45

a) Des conséquences hétérogènes suivant le type de trafic 45

b) Un impact différent suivant les zones géographiques 48

B.- LES PERSPECTIVES D'ÉVOLUTION DU TRAFIC AÉRIEN À MOYEN ET LONG TERME 53

1. L'augmentation prévisible des besoins en déplacement 53

2. Les perspectives de croissance du trafic aérien à long terme 54

a) Les acteurs internationaux du monde aérien prévoient un niveau de croissance important 54

b) Les prévisions de la Direction générale de l'aviation civile pour le trafic français sont plus modérées 56

c) Certaines contre-expertises vont encore plus loin 57

3. Quel impact prévisible sur le trafic aérien français ? 58

a) L'influence de l'emport moyen sur l'augmentation du nombre des mouvements d'avions 58

b) Une partie de l'augmentation du trafic français de passagers peut également être reportée sur le rail 58

III. - L'OFFRE AÉROPORTUAIRE : DES CAPACITÉS CONTRAINTES, POTENTIELLEMENT SATURÉES ET MAL UTILISÉES 73

A.- LA MESURE DE L'OFFRE AÉROPORTUAIRE : UN CONCEPT COMPLEXE 74

1. La capacité aéroportuaire théorique 75

2. La capacité aéroportuaire opérationnelle 75

3. La capacité déclarée 77

4.&# pollution 87

d) La réglementation liée à la protection des milieux naturels 88

2ème partie du rapport

2. Une urbanisation croissante autour des aéroports

a) Règles applicables

b) Les possibilités de rachat des logements les plus exposés sont aujourd'hui limitées

c) Etat des lieux de l'urbanisation

3. Riverains : une acceptation de plus en plus difficile des nuisances générées par le trafic aérien

a) La difficile évaluation du nombre de riverains concernés en région parisienne

b) L'effet du bruit sur la santé des riverains : la notion de gêne sonore

c) Le développement de la concertation et le rôle de l'ACNUSA

d) Les dispositifs mis en place à l'étranger ()

e) Le dispositif français : plans de gêne sonore et mesures d'insonorisation

4. Des restrictions d'exploitation croissantes sur les grands aéroports internationaux

a) La situation en Europe

b) La situation française

c) La réponse internationale

C.- UNE PROBABLE SATURATION DES PRINCIPAUX AÉROPORTS À MOYEN TERME

1. La situation des grands aéroports internationaux à l'étranger

a) Dans le monde

b) En Europe

2. La situation française : des aéroports parisiens saturés alors que certains aéroports de province disposeront de réserves de capacité

a) Aéroports parisiens : la capacité actuelle et future des différents éléments de la chaîne aéroportuaire

b) Principaux aéroports de province

IV. - LA NÉCESSITÉ D'ÉLARGIR LE DÉBAT AU NIVEAU EUROPÉEN

A.- LES RISQUES LIÉS À UNE PRISE DE DÉCISION UNILAT&Eacut justify">a) Le fonctionnement d'un hub en bipôle représente une certaine contrainte pour les compagnies aériennes

b) Cette organisation ne permet pas encore de réduire sensiblement les nuisances et le mécontentement des riverains

c) La spécialisation de certaines plates-formes proches de Francfort

3. L'optimisation de la capacité des plates-formes existantes couplée à une réduction réelle des nuisances : la solution néerlandaise

a) Une gestion durable de la plate-forme existante

b) Un exemple de gestion concertée des nuisances aériennes

V. - LES PROPOSITIONS DE LA MISSION

A.- PREMIER OBJECTIF : UN VRAI CONTRAT AVEC LES FRANCILIENS

Quelles modalités de mise en œuvre de ce contrat ?

1. Proposition n° 1 : Des objectifs clairement définis, un animateur et un financement

a) Un vrai contrat entre l'Etat et l'Ile-de-France

b) L'animateur du contrat pour l'Etat : un délégué interministériel

c) Un financement par une autorité aéroportuaire responsable

Quel contenu pour ce contrat ?

2. Proposition n°2 : Une information transparente

a) La mise à disposition du public d'informations relatives au trafic aérien de leur aéroport

b) Une formation des responsables associatifs

c) L'amélioration du fonctionnement des instances de concertation

d) De nouveaux pouvoirs pour l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA)

3. Proposition n° 3 : Internaliser les coûts environnementaux  en modulant les taxes aéroportuaires de façon plus fine

3ème partie du rapport

4. Proposition n° 4 : Mettre en place des procédures de moindre bruit réellement innovantes

a) Créer une piste alternative pour soulager les riverains des deux aéroports parisiens

b) Optimiser les procédures de navigation aérienne

c) Intensifier les recherches en matière d'automatisation et d'informatisation des procédures de contrôle aérien

5. Proposition n° 5 : Mieux contrôler le respect des procédures

a) Mieux sensibiliser les pilotes et les contrôleurs aux implications environnementales de leurs décisions

b) Mieux sanctionner la transgression des procédures

6. Proposition n° 6 : Améliorer le dispositif d'aide à l'insonorisation

a) Redéfinir le rôle de l'ADEME

b) Assouplir le périmètre d'intervention

c) Élargir la liste des locaux éligibles

d) Instituer et contrôler les objectifs d'insonorisation

e) Définir précisément les travaux pris en charge

f) Réviser le taux et le plafond de l'aide

g) Favoriser les opérations d'insonorisation groupées

7. Proposition n° 7 : Limiter l'urbanisation à proximité des aéroports

a) Renforcer la réglementation existante

b) Réviser rapidement les PEB

c) Renforcer le rôle de l'ACNUSA

8. Proposition n° 8 : Racheter les logements les plus exposés

9. Proposition n° 9 : Développer une véritable politique d'aménagement foncier autour des aéroports

10. Proposition n° 10 : Mieux répartir les retombées fiscales générées par l'activité aéroportuaire et les activités des e c) Un nécessaire redéploiement des activités tout cargo

3. Proposition n° 13 : Donner à l'aéroport de Vatry un véritable rôle au sein du système aéroportuaire français

4. Proposition n° 14 : Maintenir un hub domestique à Clermont-Ferrand

5. Proposition n° 15 : Développer à Lyon un hub vers l'Europe élargie et le Maghreb

6. Proposition n° 16 : Développer le « hub Ibérique » de Bordeaux

7. Proposition n° 17 : Jouer la carte des alliances, en partenariat avec Amsterdam

C.- TROISIÈME OBJECTIF : JOUER LA CHANCE DE LA FRANCE, LES LIGNES À GRANDE VITESSE

1. Proposition n° 18 : Optimiser le fonctionnement du réseau existant

a) Les nécessaires améliorations de la qualité de service

b) Les nécessaires améliorations techniques du réseau

c) De meilleures fréquences

d) Une meilleure connexion des aéroports avec les centres villes : une desserte locale efficace et rapide

2.- Proposition n° 19 : développer les LGV transversales pour interconnecter les aéroports

a) L'intérêt du projet SNCF de connexion Ouest-Orly-Roissy Charles-de-Gaulle-Est

b) La nécessité de renforcer les infrastructures intermodales dans les aéroports

3.- Proposition n° 20 : Développer l'intermodalité

a) La question spécifique de l'intermodalité pour le fret

b) Développer l'intermodalité passagers

4.- Proposition n° 21 : Favoriser la substitution modale dans une perspective d'aménagement du territoire

a) Substitution modale et développement du hub de Lyon

b) Améliorer la desserte vers Bordeaux

D.- EVALUATION DES CONCLUSIONS DE LA MISSION

« Chaque difficulté rencontrée doit être l'occasion d'un nouveau progrès. »

Pierre de Coubertin

MESDAMES, MESSIEURS,

En 1964, pour faire face à la croissance importante du trafic aérien et au mécontentement compréhensible des riverains d'Orly, le gouvernement de l'époque décida de la création d'une deuxième plate-forme en région parisienne, à Roissy-en-France. L'aéroport Roissy Charles-de-Gaulle devait ouvrir ses portes en 1974.

Les pouvoirs publics prévoyaient, dès l'origine, une montée en puissance de l'exploitation et l'installation d'un total de cinq pistes. Deux ont d'abord été construites et mises en service, l'une en 1974, l'autre en 1981. La troisième et la quatrième piste ont fait l'objet de décisions ultérieures plus controversées.

En effet, l'impact prévisible de l'augmentation du trafic aérien sur la gestion des infrastructures aéroportuaires françaises à l'horizon de vingt ou trente ans a été l'objet d'études techniques et de débats politiques abondants et passionnés, depuis plus d'une décennie.

Ainsi, dès septembre 1992, en vue de la construction de la troisième piste, le ministre de l'Equipement de l'époque a demandé à Aéroports de Paris de consulter les communes concernées. Cette consultation, réalisée en 1993, a mis en évidence un intérêt certain des collectivités riveraines pour le projet : 47 des 97 communes interrogées avaient émis un avis favorable. Mais l'annonce de cette construction a provoqué une vive réaction des associations de riverains. Dans ces circonstances, le ministre a chargé, par une lettre du 23 décembre 1994, M. Jacques Douffiagues d'une mission d'étude de la desserte aéroportuaire du grand bassin parisien, dont le rapport d'étape, remis au ministre le 31 juillet 1995, proposait plusieurs séries de mesures pouvant être prises à moyen et long terme :

- le développement concerté et modéré des infrastructures de l'aéroport Charles-de-Gaulle en mettant à l'étude la solution du moindre impact sonore ;

- la mise à l'étude d'un processus de desserrement sur d'autres aéroports proches de Paris et de redéploiement sur les aéroports de province dans une perspective intermodale ;

- la réservation d'un site pour le besoin éventuel d'une nouvelle plate-forme.

Sur la base de ces propositions, une nouvelle lettre de mission, datée du 17 novembre 1995, a chargé M. Jacques Douffiagues de rechercher un site pour la création, le moment venu et le cas échéant, d'un nouvel aéroport international dans le grand bassin parisien, hors de la Région Ile-de-France. Le rapport définitif, remis au ministre en mars 1996, proposait de retenir le site de Beauvilliers, en Eure-et-Loir.

Par la suite, l'enquête publique menée entre le 3 juin e dépasse pas 55 millions.

Par ailleurs, les schémas de services collectifs de transports, adoptés en octobre 2000, et approuvés par décret en Conseil d'État le 18 avril 2002, estimaient que l'offre aéroportuaire du bassin parisien serait insuffisante dans vingt ans, rendant nécessaire la construction d'une nouvelle plate-forme à vocation internationale, dont la localisation définitive sera « arrêtée à l'issue d'un débat public organisé sous l'égide de la Commission nationale du débat public ».

M. Pierre Zémor, conseiller d'État, président de cette Commission, a été chargé de l'organiser, dans le cadre d'une Démarche d'utilité concertée pour un site aéroportuaire international (DUCSAI) menée entre le 5 avril 2001 et le 19 octobre 2001. La DUCSAI a donc uniquement soumis au débat les candidatures de huit sites différents : quatre en région Picardie (Montdidier sud, Chaulnes, Hangest-en-Santerre et Juvincourt), trois en région Champagne-Ardennes (Vatry, Grandes-Loges, Bertaucry)(1), et un site en région Centre (Beauvilliers). Sur ces bases, le précédent Gouvernement a entériné, le 15 novembre 2001, le choix du site de Chaulnes, près d'Amiens, dans la Somme, à 125 km de Paris(2). Ce site présentait l'avantage d'être proche du carrefour de communication des autoroutes A1 et A29, et de la gare TGV d'Ablaincourt-Pressoir, et d'être situé dans une zone faiblement habitée. Il a cependant été rapidement contesté par les élus locaux, de nombreuses associations de défense de l'environnement et des collectifs de riverains.

M. Gilles de Robien, ministre de l'Equipement, des Transports, du Logement, du Tourisme et de la Mer, a donc décidé de remettre à plat le dossier du nouvel aéroport le 25 juillet 2002, en annonçant parallèlement sa volonté de limiter les nuisances sonores aériennes à Charles de Gaulle, et de donner la priorité au développement des aéroports régionaux et de l'intermodalité air-rail. En outre, il a émis le souhait que « l'Assemblée nationale, dans le cadre de ses commissions, se saisisse » de la question de l'opportunité d'une nouvelle plate-forme aéroportuaire, en la replaçant dans la problématique plus globale de « la politique aéroportuaire et l'avenir du transport aérien » en France.

La présente mission d'information parlementaire, constituée le 9 octobre 2002, a donc pour objet d'apporter un regard neuf sur une question qui a été déjà été abordée à de nombreuses reprises par différentes autorités publiques ou instances de concertation. Cette mission doit donc relever un défi, du fait de la qualité des analyses qui ont déjà été menées, mais peut bénéficier d'une opportunité : celle d'apporter de nouveaux éléments de réponse prenant en compte les changements profonds que connaît le secteur du transport aérien depuis une décennie, et surtout depuis la crise de ces deux derni&e de la France en infrastructures aéroportuaires dans vingt ans. Les travaux précédents semblent n'avoir abordé l'Europe que sous l'angle réglementaire, alors qu'en cette période de recomposition économique du secteur des transports aériens, ce sont aussi les synergies envisageables entre les plates-formes et les compagnies européennes qu'il faut évaluer.

A cette fin, la mission s'est concentrée sur l'audition de différents acteurs, observateurs, ou spécialistes du secteur, dont la liste est fournie en annexe. Elle a ensuite réalisé des déplacements fructueux sur de nombreuses plates-formes de province, ainsi que sur les quatre plates-formes européennes à vocation internationale précitées.

A l'issue de ces travaux, les membres de la mission estiment bénéficier, dans le temps qui leur était imparti et avec les moyens qui étaient les leurs, d'une vision plus précise des problèmes et des enjeux du transport aérien français.

La mission est persuadée que la libéralisation du secteur constitue un bouleversement fondamental et qu'il n'est plus possible d'envisager des solutions aussi contraignantes que par le passé. Comme l'indiquait M. Jean-Pierre Blazy dans un rapport parlementaire : «  La réponse à la progression soutenue du trafic ne peut plus être envisagée comme autrefois. (...) la libéralisation du transport aérien a fondamentalement bouleversé les conditions économiques du secteur. Les compagnies aériennes ont dû reconsidérer leur stratégie commerciale pour tenir compte de l'ouverture à la concurrence et le marché est devenu l'élément déterminant de l'avenir d'un site aéroportuaire » (3).

Mais, d'un autre côté, l'exposition de plus de deux millions de Franciliens au nuisances sonores aéroportuaires requiert une prise en compte rapide et complète des pouvoirs publics, car les riverains n'ont que trop attendu, afin d'établir une confiance durable entre les acteurs du transport aérien et les riverains, résidents comme collectivités, qui ont aujourd'hui le sentiment que les services de l'Etat, les autorités aéroportuaires et les compagnies aériennes ne prennent pas réellement en compte leurs préoccupations.

Si Roissy Charles-de-Gaulle est une réussite commerciale qu'il convient de conforter, c'est également une plate-forme contrainte, qui risque d'atteindre très rapidement son niveau de saturation environnementale. En conséquence, il convient de placer la problématique environnementale aéroportuaire au cœur de la politique de développement durable du transport aérien et de mettre en place une politique aéroportuaire de long terme permettant enfin de gérer la croissance prévisionnelle du trafic. L'Etat doit utiliser tous les moyens qui restent en sa possession pour orienter les flux aériens, dans le cadre d'une politique d'aménagement du territoire volontariste.

I. - LES TRANSPORTS AÉRIENS : UN SECTEUR EN PLEIN BOULEVERSEMENT

Enfin, un paysage aéronautique nouveau et bouleversé émerge de la crise actuelle, où quelques grandes compagnies « classiques » survivent dans le cadre d'alliances renforcées, autour de hubs puissants, alors qu'un nouveau type de compagnies voit le jour en Europe, les compagnies « low costs » ou à bas coûts.

La 56ème assemblée annuelle de l'IATA (association internationale du transport aérien), qui s'est tenue à Washington les 2 et 3 juin, s'est déroulée dans un contexte morose, le président de l'Association, M. Giovanni Bisignani, très alarmiste, déclarant : « notre secteur a été frappé par les quatre cavaliers de l'Apocalypse ». Les statistiques sont en effet éloquentes : en 2001 et 2002, les 280 transporteurs membres de l'association ont perdu environ 30 milliards de dollars, ce qui équivaut à l'ensemble des bénéfices réalisés depuis 1945 (4), et supprimé 400 000 emplois.

Les transports aériens sont très sensibles aux fluctuations économiques et aux aléas conjoncturels internationaux. Ce secteur est par ailleurs largement « internationalisé » depuis ses origines, du fait même de la nature de son activité, qui traite certes des vols domestiques, mais surtout des vols internationaux.

De ce fait, dès le début de l'aviation civile marchande, le secteur a fait l'objet de formes plus ou moins élaborées de réglementation internationale. Ce n'est qu'après la deuxième guerre mondiale, notamment du fait des progrès technologiques, que l'on assiste à une véritable organisation internationale des transports aériens, par le biais d'organismes tels que l'OACI (Organisation internationale de l'aviation civile) ou l'IATA (association internationale du transport aérien).

Plus récemment, la déréglementation de ce secteur, mise en œuvre dans les années 70 aux Etats-Unis, a servi de moteur, voire de modèle, à une libéralisation proprement européenne et plus progressive des transports aériens intracommunautaires. Les réflexions communautaires sur l'approfondissement de cette libéralisation ne sont d'ailleurs pas closes et font aujourd'hui l'objet de nombreux débats.

Enfin, la crise actuelle contribue à l'émergence d'un paysage aéronautique nouveau et bouleversé, où quelques grandes compagnies « classiques » prédominent dans le cadre d'alliances renforcées, autour de hubs puissants, alors qu'un nouveau type de compagnies émerge en Europe, les compagnies « low costs » ou à bas coûts. (sécurité, immatriculations, contrôle aérien). Malgré tout, les négociations restent largement interétatiques. Ce n'est qu'après la deuxième guerre mondiale qu'est créée l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI), lors de la conférence de Chicago de 1944.

a) Le rôle de l'OACI et des organisations internationales en matière de transports aériens

Le transport aérien est aujourd'hui largement régi par les règles définies au sein de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI). Cette organisation travaille en étroite collaboration avec d'autres institutions spécialisées des Nations Unies comme l'Organisation météorologique mondiale, l'Union internationale des télécommunications, l'Union postale universelle, l'Organisation mondiale de la santé et l'Organisation maritime internationale. Certaines organisations non gouvernementales participent aussi aux travaux de l'OACI : l'association internationale du transport aérien (IATA, regroupant les entreprises de transport aérien), le Conseil international des aéroports (ACI), la Fédération internationale des associations de pilotes de ligne ou le Conseil international des associations de propriétaires et pilotes d'aéronefs (5).

Ainsi, par exemple, un certain nombre de règles tarifaires ont été définies par l'IATA, qui organise également la coopération entre les compagnies (interlining, pooling agreements, etc.)

L'acte constitutif de l'OACI est la Convention relative à l'aviation civile internationale, qui a été élaborée lors d'une conférence tenue à Chicago en novembre-décembre 1944.

La rédaction de cette convention a vu s'affronter deux thèses opposées, celle des Etats-Unis qui prônaient un bilatéralisme libéral dans le cadre de négociations interétatiques - système qui prévalait avant la deuxième guerre mondiale - et celle des Anglais, qui prônaient un multilatéralisme réglementé, avec la création d'une autorité mondiale habilitée à gérer la réglementation et les droits de trafics.

Le texte final est donc un compromis entre ces deux thèses : le bilatéralisme reste la règle, avec la négociation d'accords bilatéraux de services aériens, mais des règles multilatérales sont applicables à l'ensemble des pays membres de l'OACI. Le Conseil, organe exécutif élu par l'Assemblée pour une durée de trois ans, adopte les normes et les pratiques recommandées groupées dans les Annexes à la Convention relative à l'aviation civile internationale. Les normes concernent le transport, la sécurité et surtout la navigation aérienne.

L'OACI a par ailleurs mis en place un cadre de négociations pour les accords bilatéraux de transports aériens en définissant un certain nombre de libertés de l'air 

- les libertés techniques :

- Première liberté : droit de survol

- Seconde liberté : droit d'effectuer des escales techniques

- les libertés commerciales :

- Troisième (quatrième) liberté : droit de débarquer (d'embarquer) dans un Etat tiers des passagers embarqués dans (à destination de) l'Etat dont l'aéronef a la nationalité.

- Cinquième liberté : droit d'embarquer (de débarquer) dans un Etat tiers des passagers à destination (en provenance) de tout autre Etat contractant.

- les libertés commerciales additionnelles :

- Sixième liberté : cumul de la 3ème et de la 4ème liberté pour assurer le transport entre deux Etats tiers.

- Septième liberté : sixième liberté sans clause restrictive.

- Huitième liberté : droit de cabotage

Dans ce cadre, les liaisons aériennes internationales régulières sont établies sur la base d'accords bilatéraux de services aériens. Ce régime est basé sur la désignation d'un nombre limité de transporteurs, de paires de points pouvant être desservis sur leurs territoires (tableau des routes) par chacun des deux États. Les accords précisent en général les liaisons concernées, les capacités utilisables, le nombre de fréquences exploitables entre les deux pays et les libertés de l'air échangées (en général jamais au-delà de la cinquième).

Le premier accord bilatéral important est signé le 11 février 1946 par les Etats-Unis et le Royaume-Uni (6). Il servira de modèle pour les autres accords.

Les accords aériens restent basés sur la notion fondamentale de pavillon national : sont considérées comme compagnies d'un Etat celles détenues en majorité par des capitaux de la nationalité de cet Etat. Cette clause de nationalité type stipule que chaque partie contractante a le droit de refuser l'autorisation d'exploitation, de la suspendre ou de la révoquer, si elle n'a pas la preuve qu'une part substantielle de la propriété et le contrôle effectif de l'entreprise de transport aérien appartiennent à la partie contractante qui a désigné l'entreprise et/ou à ses ressortissants. Ainsi, lorsqu'Air Lib était majoritairement détenue par British Airways, les autorités tunisiennes et marocaines s'étaient opposées à tout développement de son activité dans leur pays, développement pourtant possible dans le cadre des deux accords bilatéraux concernés si la compagnie était restée française.

Par ailleurs, les prises de participations croisées entre entreprises sont limitées par les règles de nationalité, plus strictes d'ailleurs aux Etats-Unis (25 % au plus de capitaux étrangers) qu'en Europe (49 %), ce qui empêche encore les fusions transcontinentales entre entreprises.

Dans ce cadre, les compagnies européennes sont aujourd'hui beaucoup plus nombreuses et opèrent sur un marché beaucoup plus fragmenté qu'aux Etats-Unis. Ainsi, sur les lignes transatlantiques opèrent plus de 20 compagnies européennes, contre 7 compagnies américaines.

b) La déréglementation américaine chargé de distribuer les subventions (un tiers des compagnies est subventionné en 1938) et de garantir un service sûr et de qualité pour tous les citoyens américains.

Les droits de trafic sont accordés par ce CAB, qui certifie les compagnies et approuve leurs tarifs, leur fusion et les accords qu'elles passent, gère les subventions qui assurent la survie des petites lignes, etc. Cette réglementation très stricte assure malgré tout un développement important du transport aérien américain puisque le trafic des compagnies américaines est multiplié par 300 entre 1938 et 1978. Les petites villes sont desservies par le biais de subventions et de grandes compagnies émergent grâce à la protection contre la concurrence que leur garantit le CAB.

A la fin des années 70, les Etats-Unis disposent de grandes compagnies, puissantes et rentables, le niveau des subventions pour les lignes non rentables est en baisse, et les économistes critiquent l'absence de concurrence par les prix sur ce secteur. C'est dans ce cadre que la vague de déréglementation inclut les transports aériens. Les tarifs sont libéralisés en quatre ans, les droits de trafic internes libres au bout de trois ans et les subventions attribuées dans le cadre du programme « Essential Air Services » (EAS) par enchères. Les lois anti-trusts régissent désormais les fusions et ententes. Le CAB, qui a perdu sa raison d'être, disparaît le 1er janvier 1985.

Dans ce contexte concurrentiel, les compagnies se multiplient jusqu'en 1982-1983 puisque, à côté des 80 compagnies existantes, 120 nouvelles compagnies entrent sur le marché. La concurrence effrénée entraînant notamment une importante baisse des tarifs, les faillites se multiplient en 1983, suivies de nombreuses fusions ou absorptions, qui conduisent à la survie de cinq compagnies majeures. Elles sont aujourd'hui au nombre de dix (7).

Cette déréglementation, par la nécessaire amélioration de compétitivité qu'elle impliquait, a entraîné un bouleversement complet de méthodes de travail et de gestion des compagnies. Elle est à l'origine de la création de techniques de gestion et d'outils commerciaux innovants et toujours en vigueur aujourd'hui : évolution des réseaux « point à point » vers des systèmes « hub and spokes », éclatement de la structure tarifaire et multiplication des tarifs, yield management (8), SIR (screening information request) ou CRS (computer reservations system), FFP (frequent flyer program).

Par ailleurs, cette déréglementation a largement contribué à la libéralisation du trafic international, notamment sur les routes transatlantiques, puisqu'à la même époque, entre 1978 et 1985, les Américains ont renégocié leurs accords bilatéraux dans un sens plus libéral.

Par la suite, en 1992, les Etats-Unis ont proposé aux pays européens de conclure des accords de « ciel ouvert », qui autorisent les Etats-U Suède, Islande, Norvège et Suisse) signent le même type d'accord, rejoints en 1996 par l'Allemagne, la Pologne, la Roumanie, la République Tchèque et, fin 1999, par le Portugal et l'Italie.

La France n'a pas signé d'accord de « ciel ouvert », mais, le 18 juin 1998, un accord prévoyant une libéralisation progressive, jusqu'en 2003. La libéralisation étant aujourd'hui effective, les Américains considèrent cet accord comme un accord de « ciel ouvert ».

Ainsi, vingt ans après la déréglementation, on peut affirmer que les Etats-Unis ont été précurseurs, et ont largement contribué aux évolutions puis au bouleversement du paysage aéronautique mondial. L'Union européenne s'est engagée dans la même voie, mais plus progressivement, à la fin des années 80.

2. Un cadre européen en cours de redéfinition

Au sein de l'Union européenne, la libéralisation du transport aérien est effective depuis le 1er avril 1997. Le processus a su ménager une phase de transition et d'adaptation aux compagnies aériennes, et s'est déroulé sans heurts structurels majeurs, contrairement à ce qui s'était passé aux Etats-Unis, permettant la constitution d'un marché intra-communautaire du transport aérien concurrentiel, mais toujours organisé au niveau national, tant en ce qui concerne le contrôle aérien que les droits de trafic extérieurs à l'Union européenne.

a) La libéralisation du transport aérien européen est engagée depuis la fin des années 80 et effective depuis 1997

Cette libéralisation découle des principes fondamentaux du Traité instituant la Communauté européenne, et notamment de son article 14 :

« Le marché intérieur comporte un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée selon les dispositions du présent Traité ».

Trois règlements importants ont contribué à cette libéralisation progressive :

Licences d'exploitation et notion de transporteur aérien communautaire :

Des licences communautaires délivrées par les États membres mais sur la base de critères communautaires ont été instaurées en 1992 (règlement (CEE) n° 2407/92 du 23 juillet 1992, concernant les licences des transporteurs aériens). La notion de « transporteur aérien communautaire » (c'est-à-dire contrôlé par des intérêts communautaires (9)) s'est ainsi substituée à cel également communautaires. Ainsi, certaines liaisons vitales pour le désenclavement de régions ou indispensables à l'aménagement du territoire font l'objet d'obligations de service public (OSP), et, le cas échéant, d'appel d'offres communautaires pour limiter leur exploitation à un seul transporteur, qui peut, lorsque cela est nécessaire, recevoir une subvention. De même, les États membres peuvent en principe répartir le trafic entre aéroports d'un même système aéroportuaire (10), sous réserve du respect de certains principes de droit communautaire (non discrimination, justification par des raisons impérieuses d'intérêt général, proportionnalité (11)).

Dans ce contexte libéralisé, un élément fondamental de concurrence équitable entre compagnies aériennes est lié à l'accès de l'ensemble des transporteurs aux aéroports, lorsque la capacité aéroportuaire est contrainte.

En conséquence, des règles communautaires ont été édictées de façon à garantir une gestion équitable et non discriminatoire de cet accès, notamment par le biais de l'attribution des créneaux horaires. Le règlement (CEE) n° 95/93 du 18 janvier 1993 fixe des règles communes en ce qui concerne l'attribution des créneaux horaires dans les aéroports de la Communauté. Lorsqu'un aéroport est saturé et qu'il n'y a pas d'autre solution que d'attribuer aux compagnies aériennes des plages de décollage et d'atterrissage de façon à ce qu'elles puissent mettre en place leurs programmes de vols, il est nécessaire de faire intervenir un régulateur (ou coordonnateur (12)).

Ce règlement s'inspire d'un système informel mis en place et géré par l'association Internationale des Transporteurs Aériens (IATA), dans le cadre duquel les compagnies s'étaient fixées des règles d'attribution des créneaux par des coordonnateurs, et qui leur permettaient d'échanger entre elles, deux fois par an, lors de conférences mondiales, les créneaux sur les aéroports du monde entier.

- Principe de libre accès des entreprises communautaires aux liaisons intra-communautaires :

Le règlement (CEE) n° 2408/92 du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intracommunautaires permet, depuis le 1er avril 1997, un libre accès aux liaisons domestiques de chaque Etat (droit de cabotage, « huitième liberté de l'air » au sens de l'OACI). L'extension des libertés de l'air intracommunautaires a été progressive puisque les cinquième et septième libertés de l'air étaient effectives dès le 1er janvier 1995.

Cette libéralisation a eu de nombreuses conséquences tant sur les compagnies que sur les politiques de transport aérien des pays membres. Elle a tout d 'Arial'; font-size: 10pt">En 2003, la Commission a entrepris un processus de révision de ces trois règlements. Elle mène pour le moment une large consultation sur le sujet, afin de réaliser un bilan exhaustif de ce « troisième paquet », certaines dispositions étant devenues obsolètes et d'autres étant mal appliquées ou devant être précisées.

b) Une remise en cause plus récente par la Cour de justice des Communautés européennes des accords aériens bilatéraux entre les pays membres de l'Union européenne et les États tiers

Dans le cadre d'une procédure remettant en cause les accords de « ciel ouvert » conclus avec les Etats-Unis par huit pays membres, la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) a rendu le 5 novembre 2002 plusieurs arrêts déclarant la clause de nationalité type de ces accords aériens bilatéraux contraire au principe de liberté d'établissement établi par l'article 43 (ex. 52) du Traité de Rome qui dispose que « les restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un État-membre dans le territoire d'un autre État-membre sont interdites (....). La liberté d'établissement comporte (....) la constitution et la gestion d'entreprises ».

La Commission européenne estime depuis de nombreuses années que les compagnies européennes souffrent d'une sous-capitalisation chronique et d'une trop grande fragmentation. Plus globalement, le marché européen du transport aérien est encore, selon elle, trop fragmenté. Les arrêts de la CJCE s'inscrivent donc tout à fait dans le cadre des réflexions de la Commission.

Son interprétation de ces arrêts va très loin puisqu'elle prévoit que l'ensemble des compagnies communautaires doivent pouvoir bénéficier depuis l'Union européenne des mêmes possibilités d'accès au marché des pays tiers (ce qui signifie que toute compagnie communautaire pourrait offrir des services aériens vers tous les points situés dans des pays tiers au départ de tout point en Europe sans nécessairement établir une filiale dans le pays concerné).

Dans cette optique, la Commission a publié en février 2003 une communication concernant les relations entre la Communauté et les pays tiers dans le domaine de l'aviation (13) où elle plaide pour une politique extérieure de l'aviation européenne, « en vue de traiter les principaux problèmes auxquels est confrontée l'industrie communautaire et l'Union européenne dans son ensemble ». Elle plaide notamment pour la mise en place d'un espace aérien transatlantique commun (TCAA), dans le but de créer un « marché unique » qui remplacera les différents accords bilatéraux conclus entre les États-membres et les Etats-Unis. La Commission voudrait également poursuivre ce type de politique avec les pays en développement. Elle plaide enfin pour être la voix des États-membres dans les instances internationales de l'aviation civile. membres sur des points mineurs (clause de propriété et de contrôle, SIR, tarifs intracommunautaires, etc.), mais ne touchant pas aux droits de trafic.

Elle a enfin présenté un projet de règlement d'encadrement des négociations bilatérales des États-membres.

La France, comme les autres Etats-membres, va donc, à terme, voir l'ensemble de ses accords aériens (près de 120) renégociés ou modifiés. Au total, en dehors des négociations avec les Etats-Unis. La Commission et les États-membres vont tenter de modifier les accords bilatéraux pour les rendre conformes au traité et à la jurisprudence de la CJCE. A terme, toute compagnie européenne établie dans un pays pourra bénéficier de droits de trafic, quelle que soit sa nationalité avec des pays tiers. La libéralisation progressive, auparavant interne à l'Union, va donc rapidement s'étendre aux relations externes.

Ainsi, le bilatéralisme semble, une nouvelle fois, remis en cause. Le passage au multilatéralisme, éventuellement par un rattachement du transport aérien à l'OMC, solution souhaitée par la Commission européenne depuis de nombreuses années, à laquelle la décision de la CJCE a donné une certaine assise, est toujours rejeté par les Etats-Unis, comme en 1944.

c) Le ciel unique européen

A l'automne 1999, la Commission européenne avait par ailleurs produit une communication intitulée « La création du ciel unique européen », initiative qui faisait suite à un été 1999 marqué par une forte augmentation du trafic et, corrélativement, des retards.

Le document attribuait ces difficultés à l'impact des frontières nationales impliquant un fractionnement des systèmes de contrôle aérien, au tracé du réseau des routes inefficient, aux zones militaires trop nombreuses et peu perméables au trafic civil et au manque de pouvoir de décision d'Eurocontrol. Il envisageait un certain nombre d'évolutions : une autorité européenne et non plus nationale, une réorganisation des routes et de l'espace aérien, une séparation institutionnelle entre autorités réglementaires et opérateurs de service de la navigation aérienne, à la fois au niveau national et au sein d'Eurocontrol, une mise en concurrence des opérateurs pour la fourniture des services selon un système de concession.

Cette communication a été présentée en conseil des ministres des Transports les 9 et 10 décembre 1999, conseil qui a créé un groupe de réflexion à haut niveau sur le sujet (14), qui a rendu ses conclusions en mai 2000.

La Commission a soumis fin 2001 au Parlement européen et au Conseil quatre propositions de règlements : un règlement cadre, un règlement sur les prestataires de services de navigation a& 50441">B.- UNE ÉVOLUTION DES STRATÉGIES DES COMPAGNIES AÉRIENNES AU COURS DES DERNIÈRES ANNÉES

1. Des compagnies « majeures » restructurées dans un paysage aérien bouleversé

Tous les spécialistes s'accordent pour rappeler que le transport aérien est une activité économique plus fragile que d'autres, qui a connu d'énormes difficultés au cours des dernières années. Comme le souligne une note de synthèse de la Direction générale de l'aviation civile (16), « on peut y voir la manifestation d'un phénomène de croissance cyclique du transport aérien et lui attribuer des causes conjoncturelles mais certains analystes croient à cette occasion déceler un phénomène plus structurel : la structure de production des grandes compagnies ne serait plus adaptée à la demande du marché ».

Il est clair que le secteur a été profondément bouleversé au cours des dernières années, qu'il s'est réorganisé autour d'alliances et de plates-formes pivots, alors que de nouveaux acteurs, dotés d'une politique commerciale novatrice, sont apparus et prospèrent.

a) Un secteur profondément remodelé durant la dernière décennie

Ce n'est pas la première fois que le secteur connaît de profonds bouleversements. Mais la crise récente semble la plus dure (17). D'une manière générale, les recettes unitaires ont fortement baissé au cours de la dernière décennie, du fait du développement de la concurrence. En conséquence, les transporteurs ont dû s'adapter et, plus récemment, des restructurations sont intervenues, qui ont nécessité d'importants apports de capitaux.

Aux Etats-Unis, au premier semestre 2003, les dix premières compagnies (18) ont cumulé une perte nette de 3,8 milliards de dollars. A elles seules, les trois premières compagnies ont accumulé des pertes supérieures à 1,8 milliard de dollars.

Malgré tout, US Airways, qui s'était placée sous la protection du « chapitre 11 » de la loi américaine sur les faillites en août 2002, en est sortie fin mars et United pourrait faire de même en 2004, alors qu'elles ont réalisé de sévères réductions des coûts (19). Ce sont ces réductions de coût qui ont pour le moment permis à American Airlines d'échapper à la faillite. L'Etat fédéral américain a débloqué plus de 15 milliards de dollars d'aides suite aux attentats du 11 septembre 2001, et vient encore de débloquer, en avril 2003, 3 milliards supplémentaires.

Delta, North

(en millions de dollars)

Compagnies

Pertes
4e trimestre 2002

Pertes
4e trimestre 2001

Pertes
totales 2002

Pertes
totales 2001

American

- 529

- 798

- 3 500

- 1 800

United Airlines

- 1 500

- 308

- 3 200

- 2 100

US Airways

- 794

- 1 160

- 1 650

- 2 120

Delta

- 363

- 734

- 1 300

1 216

Northwest

- 488

- 216

- 798

- 423

Continental

- 109

- 149

- 451

- 95

Southwest

+ 42,4

+ 63,5

+ 241

+ 511

America West

- 32,5

- 60,9

- 430,2

- 147,9

Jet Blue

+ 15,2

+ 11,1

+ 54,9

+ 38,5

Source : Aeronautique Business.

En Europe, le tableau n'est pas aussi dramatique, mais la plupart des compagnies européennes traversent, malgré tout, une grave crise financière.

SITUATION DES PRINCIPALES COMPAGNIES AÉRIENNES EUROPÉENNES
(exercice 2001-2002)

2001-2002
Exercice
En millions d'euros

Groupe
Air France

Groupe
British Airways

Groupe
KLM

Groupe
Lufthansa

01/04/01
31/03/02

01/04/01
31/03/02

01/04/01
31/03/02

01/04/01
31/03/02

Rapport annuel de la compagnie

Rapport annuel de la compagnie

Rapport annuel de la compagnie

Rapport annuel
de la compagnie

Chiffre d'affaires

12 258

13 618

6 532

16 690

Résultat d'exploitation

235

- 180

- 94

- 316

Résultat net

153

- 232

- 156

- 633

Source : Direction générale de l'aviation civile

La situation s'est partiellement améliorée sur 2002-2003, plus rapidement en tous les cas que pour les compagnies américaines :

(exercice 2002-2003)

2002-2003
Exercice
En millions d'euros

Groupe
Air France

Groupe
British Airways

Groupe
KLM

Groupe
Lufthansa

Chiffre d'affaires

12 690 (20)

10 920

6 485

16 971

Résultat d'exploitation

162

419

- 133

718

Résultat net

120

192

- 416

717

Source : Direction générale de l'aviation civile

Certaines ont malgré tout disparu, les compagnies les plus faibles n'ayant pas survécu à la récente crise du secteur, comme

graphique
Swissair ou Sabena, dont la faillite a été retentissante. Le « feuilleton Sabena » est tout à fait caractéristique des retournements d'alliances qui peuvent conduire à la perte ou au sursis d'une compagnie.

Avant de conclure une alliance avec Swissair en 1995, la compagnie aérienne belge avait tenté d'autres « mariages ». D'abord avec KLM et Luxair, avec SAS, de nouveau avec KLM et British Airways en décembre 1989, et ensuite avec Air France. En 1995, Swissair accepte d'apporter 6,5 milliards de francs belges à Sabena en échange de 49,5 % de son capital. Par ailleurs, en prêtant 4 milliards supplémentaires, elle obtient des « warrants » (pour 12,75 % du capital de la Sabena), qu'elle ne pourra pas exercer avant l'an 2000 pour prendre la majorité des parts.

A la mi-99, le groupe Sabena-Swissair est confronté au divorce avec la compagnie américaine Delta Airlines, avec laquelle ils étaient alliés depuis 1990, puisque Delta prend Air France pour partenaire.

En 2000, suite à un accord entre le gouvernement fédéral et SAirGroup (Swissair), la part suisse passe de 49,5 % à 85 %. En janvier 2001, un accord est conclu entre actionnaires belges et suisses : le gouvernement belge apportera 4 milliards de francs, Swissair en versera 6. En avril, les dettes colossales (98 milliards de francs) et les résultats désastreux de la Sabena conduisent à envisager une nouvelle augmentation de capital ainsi qu'un énième plan de redressement. En juillet, Swissair et l'Etat belge décident de verser 17,3 milliards de francs. Les attentats du 11 septembre 2001 portent un coup définitif à son redressement. Début novembre, Swissair, elle-même en proie à de très graves difficultés financières, refuse de recapitaliser la compagnie, qui est déclarée en faillite le 7 novembre 2001.

L'annonce de la faillite de la Sabena a marqué les esprits. La compagnie avait été créée en 1923 et employait 7 800 personnes. Il en est de même en Suisse où, après la faillite de Sabena, celle de Swissair a conduit à une recomposition du paysage aérien européen, entraînant, plus récemment et après de nombreux rebondissements, la faillite du deuxième pôle aérien français puisqu'Air Lib a disparu début 2003, alors qu'elle transportait 4,3 millions de passagers, laissant « une offre béante sur certaines liaisons intérieures » (21).

La recomposition du paysage aérien européen tend ainsi à faire émerger trois grandes compagnies, ch font-size: 10pt">Dans le contexte actuel, les compagnies aériennes recherchent ces alliances mondiales afin de pérenniser leur développement en pénétrant le marché des autres continents et donc en améliorant leurs résultats par le biais d'une politique commerciale plus agressive et d'économies d'échelle en termes de coût d'exploitation. Par ailleurs, ces alliances constituent parfois une solution aux besoins de développement d'une compagnie au départ d'un aéroport saturé ou très contraint par son environnement (cas de British Airways à Heathrow ou d'Air France à Roissy Charles-de-Gaulle).

Dans un premier temps, le mode de coopération le plus utilisé est celui de l'accord de partage de code, mais les compagnies peuvent avoir recours à d'autres formes de coopération comme la franchise ou des accords d'assistance technique ou commerciale. Le partage de code consiste à commercialiser sous son propre code des sièges sur des vols assurés par un autre transporteur. Ainsi, les compagnies augmentent leur offre respective sans mettre en œuvre des moyens supplémentaires, ni avoir à négocier des créneaux horaires dans le cas d'un aéroport saturé.

Ces accords comportent souvent également des programmes communs de fidélisation de la clientèle et un aménagement des horaires des vols de façon à faciliter les correspondances entre liaisons des compagnies alliées.

Ainsi, Air France et Delta ont signé un accord de partenariat en juin 1999, base de l'alliance globale SkyTeam, qui naîtra le 22 juin 2000 et regroupe à l'époque les compagnies Aeromexico, Air France, Delta Air Lines et Korean Air. En 2001, la compagnie tchèque CSA et Alitalia rejoignent SkyTeam.

Dans un deuxième temps, le développement de ces alliances s'est concrétisé par l'obtention d'immunités antitrust permettant d'aller au-delà de simples accords commerciaux et rendant possible le partage de tout ou partie des recettes perçues par les compagnies alliées. C'est ainsi que, dans le cadre de l'immunité antitrust accordée par les autorités américaines le 18 janvier 2002, Air France, Alitalia, Delta et CSA pourront, dans le courant de l'année 2003, partager, dans une mesure d'ailleurs limitée, leurs recettes sur les routes de l'Atlantique nord.

La Commission européenne, dans une communication du 30 juillet 2002 concernant les alliances Star et KLM/Northwest, a indiqué qu'elle entendait également adopter une position favorable à l'égard de ces partenariats et des alliances en général.

En 2001, les quatre grandes alliances ont réalisé 60 % du trafic mondial :

POIDS DES ALLIANCES STRATEGIQUES EN 2001

Trafic total
(millions de passagers - kilomètres transportés)

Part du trafic mondial en 2001

Star alliance

Air Canada, Air New Zealand, All Nippon Airways, Austrian Airelines Groupe, British Midlands, Lufthansa, Mexicana Airlines, SAS, Singapore Airlines, Thai Airways, United Airlines, Varig

612

23 %

Oneworld

Aer Lingus, American Airlines, British Airways, Cathay Pacific, Finnair, Iberia, LAN-Chile, Qantas

456

17 %

Skyteam

Aeromexico, Air France, Alitalia, Delta Airlines, Korean, CSA, Czech

344

13 %

Wings

KLM, Northwest

175

7 %

TOTAL

1587

60 %

Source: Direction générale de l'aviation civile - septembre 2002

Selon la Direction générale de l'aviation civile, l'ensemble des accords et partenariats d'Air France avec d'autres compagnies a permis à la société d'augmenter son résultat de 117 milliards d'euros sur l'exercice 2001/2002. Le partenariat avec Delta a rapporté plus de la moitié de ce montant. A l'horizon 2005, les accords avec Alitalia devraient représenter un gain annuel de l'ordre de 180 milliards d'euros au total pour les deux compagnies. Cette alliance représente un formidable potentiel de 1 200 avions, et regroupe 173 000 salariés. L'alliance, par le biais d'environ 7 000 vols quotidiens, dessert actuellement 512 destinations dans plus de 110 pays.

- Avenir et perspectives

A moyen terme, pour faire face à la concurrence, les compagnies majeures européennes devront sans aucun doute encore améliorer leur compétitivité, ce qui implique une intégration plus étroite (prises de participation croisées, voire fusions). Ainsi, l'échange de capital entre Air France et Alitalia, qui reste, à ce stade, symbolique, sous-tend un rapprochement plus serré dans le futur, une fois leur privatisation respective achevée. A terme, ces évolutions aboutiront donc à l'émergence de quelques grands transporteurs européens aptes à concurrencer les compagnies américaines.

Par ailleurs, les alliances sont également amenées à croître pour élargir leur réseau et donc leur potentiel commercial. Pour ce qui concerne Skyteam, des discussions sont en cours avec la compagnie russe Aeroflot, et d'autres, moins avancées, sont également conduites avec la compagnie brésilienne TAM, South African Airways, ainsi qu'avec des transporteurs chinois.

Mais le fait le plus marquant pour l'avenir de SkyTeam est l'accord de partenariat conclu le 23 août 2002 entre les compagnies Delta, Northwest et Continental Airlines, qui pourrait entraîner l'entrée dans SkyTeam de ces deux dernières compagnies, actuellement associées à KLM au sein de Wings (22).

Dans cette optique de consolidation, Air France a entamé début 2002 des discussions en vue d'un rapprochement avec KLM. Si Air France restait avec Alitalia pour seule partenaire en Europe, elle risquerait en effet de se trouver affaiblie au sein de SkyTeam, l'entrée de Northwest (allié de KLM aux USA) et de Continental dans l'alliance faisant basculer son centre de gravité vers les Etats-Unis. A terme, la privatisation d'Air France facilitera ce rapprochement, les représentants de KLM estimant qu'une alliance stratégique à long terme, entraînant des opérations capitalistiques, ne peut pas se concevoir avec une compagnie aujourd'hui majoritairement détenue par l'Etat français.

c) Les conséqu révolutionné le secteur des transports aériens, a d'abord été développé par Fedex aux Etats-Unis, sur le site de Memphis. Il consistait pour cette compagnie à trouver une configuration lui permettant de couvrir l'ensemble du territoire américain du jour au lendemain, avec des moyens limités. Elle imagina donc un réseau aérien organisé en forme d'étoile, inspiré par le système de tri et redistribution de chèques utilisé par les réseaux bancaires.

Dans ce système, l'ensemble des villes desservies sont reliées entre elles, non pas par des liaisons directes, « de point à point », coûteuses, mais par l'intermédiaire d'un seul et même point, le « hub », vers lequel toutes les lignes convergeront (« les spokes »).

Mise en correspondance des réseaux Desserte « point à point »

graphique

Les hubs permettent donc d'attirer les clients vers la compagnie qui y est basée pour plusieurs raisons, et notamment :

- la diversité de l'offre, directement (compagnies régionales filiales de la compagnie) et indirectement (pas le biais de l'alliance et des destinations proposées par les partenaires) ;

- les fréquences plus nombreuses (exemple de la navette à Roissy Charles-de-Gaulle).

En général, l'activité de la compagnie basée représente plus de 50 % du trafic de l'aéroport. C'est le cas à Roissy Charles-de-Gaulle pour Air France et Skyteam, à Heathrow pour British Airways et Oneworld, à Francfort pour Lufthansa et Star Alliance et Amsterdam pour KLM et Northwest.

Par ailleurs, plus le taux de correspondance est élevé sur la plate-forme, plus le hub est efficace et rentable.

TAUX DE CORRESPONDANCE DES
PRINCIPAUX AÉROPORTS EUROPÉENS (2001)

Francfort

49,0 %

Amsterdam

47,0 %

Copenhague

46,7 %

Zurich

39,0 %

Charles-de-Gaulle

34,3 %

Rome Fumicino

34,0 %

Londres Heathrow

32,0 %

Vienne

26,0 %

Madrid

24,0 %

Lugano

20,0 %

Athènes

15,0 %

Orly

13,3 %

Munich

28,0 %

Milan Malpensa

15,0 %

Manchester

13,0 %

Genève

7,0 %

Bâle-Mulhouse

7,0 %

Dusseldorf

6,0 %

Lyon

4,5 %

Milan Linate

3,3 %

Source : Direction générale de l'aviation civile

Le trafic de correspondance à Roissy Charles-de-Gaulle

Trafic total en 1999 :

43 469 000 passagers

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Ouvert le 31 mars 1996 à Roissy Charles-de-Gaulle, le hub d'Air France permet aujourd'hui d'organiser les vols autour de six plages horaires de « rendez-vous », arrivées et départs, offrant ainsi aux clients de l'alliance Skyteam des correspondances nombreuses et surtout rapides.

graphiquegraphique

Sources : Bandes OAG - Eté 2002/été 2001 - Rapport d'activité Air France - 2001-2002

La création du hub de Roissy Charles-de-Gaulle a ainsi largement contribué au redressement de la compagnie nationale et contribue encore largement à sa solidité financière actuelle. Ainsi, certaines liaisons long-courrier peu denses, donc difficilement rentables, ont été fermées par des concurrents d'Air France au moment de la crise. Le trafic s'est concentré sur le «squelette» du réseau, formé par les grands hubs et leurs réseaux d'approvisionnement. L'alliance et le hub ont aussi permis, par le partage de codes, de se répartir la présence commerciale et les ressources, en maintenant les fréquences.

On peut également noter que, sur l'exercice 2001-2002, la croissance du nombre de passagers Air France en correspondance (+ 3,5 %) demeure plus rapide que la croissance du nombre total de passagers d'Air France (+ 0,6 %), ce qui confirme que le hub concourt à la croissance de l'activité d'Air France.

Selon Airbus, le développement des hubs devrait amener un essor des gros porteurs, et donc, de l'emport moyen (23). Ainsi, c'est la première fois, avec l'A380, qu'un constructeur a des clients de lancement pour un avion en tout cargo (Fedex a déjà commandé 10 A380 tout cargo qui seront notamment exploités à Roissy Charles-de-Gaulle). Dans ce cadre, la mise en service de très gros porteurs constitue une des solutions face à la congestion des aéroports. L'A380 a une capacité supérieure de 35 % à celle du B747-400, le plus gros porteur de Boeing, ce qui est tout à fait significatif en termes de passagers, mais également en matière de bruit et de pollution.

L'accès à un hub est par ailleurs, selon Air France, un moyen de désenclavement pour les villes de province dont les flux de passagers intercontinentaux sont faibles pour chaque destination et ne justifieraient pas l'exploitation de vols directs (le potentiel requis pour une liaison intercontinentale en vol direct étant, selon la compagnie, de l'ordre de 150 passagers par jour).

L'existence d'un hub efficace à Roissy Charles-de-Gaulle permet de relier chaque jour Rennes à New York, Pau à Hong-Kong, ou encore Montpellier à Mexico, sachant que chacune de ces villes accueillent le siège social d'une ou plusieurs multinationales.

De m&eci rendant l'activité aéroportuaire « insupportable » pour les riverains et les collectivités riveraines, au sens propre comme au sens figuré, d'autant plus qu'ils ne sont pas tous associés à ce dynamisme économique.

Déjà, en 1996, le rapport Févre (25) dressait un état des lieux peu optimiste : « les problèmes majeurs auxquels sont confrontées les parties concernées aujourd'hui trouvent pour une large part leur source dans la conception d'origine de l'implantation. Quatre départements sont limitrophes de l'infrastructure (Seine-Saint-Denis, Seine-et-Marne, Oise, Val d'Oise). L'absence de structures intercommunales adaptées empêche une péréquation des recettes fiscales très importantes liées à l'existence de l'aéroport et des infrastructures satellites. En outre, les liaisons rapides de l'aéroport qui en assurent la desserte routière et ferrée sont toutes orientées nord-sud vers Paris, au détriment de liaisons transversales est-ouest. De fait, l'impact économique, notamment en termes d'emploi, de l'activité de l'aéroport, échappe pour l'essentiel à la zone située à l'ouest de l'aéroport, c'est-à-dire principalement le Val-d'Oise.

Dès lors, il n'est guère surprenant que les communes exposées aux nuisances des mouvements aériens, dont les populations sont peu concernées par les emplois sur le site et qui ne bénéficient pas des retombées fiscales de la plate-forme soient peu enclines au développement de Roissy Charles-de-Gaulle ».

Suite aux débats houleux sur l'extension de Roissy Charles-de-Gaulle en 1996, une mission avait d'ailleurs été confiée au sénateur Jean-Philippe Lachenaud, qui avait remis au ministre, le 12 décembre 1997, un rapport de synthèse des propositions destinées à mieux répartir les retombées fiscales des activités économiques de l'aéroport.

Il était prévu la mise en place d'un fonds de répartition (fonds interdépartemental de solidarité pour l'environnement et le développement économique) destiné à attribuer des fonds aux communes qui subissent les nuisances les plus importantes et qui ne perçoivent pas directement de la plate-forme aéroportuaire les retombées fiscales suffisantes (26). Des fonds de compensation ont été mis en place au 1er janvier 2000, mais ils n'améliorent que très partiellement la situation économique autour de ces plates-formes. En outre, la redistribution se fait uniquement au bénéfice des communes à l'exclusion de toute compensation directe aux riverains.

Problèmes de saturation des aéroports concernés

L'augmentation du nombre de mouvements et la baisse de l'emport moyen de chaque vol, du fait des navettes fréquentes, entraîne un encombrement des plates-formes, une saturation de l'espace aérien et donc des retards et pourrait, à terme, entraîner une saturation des stratégie dite de « niche », en choisissant un segment particulier du marché peu ou mal exploité. Il peut s'agir de marchés régionaux (avec des avions de taille plus réduite), ou de vols à bas coûts (ou low costs). Ce marché « low costs » vise les voyageurs « loisirs », peu disposés à payer un prix élevé pour voyager en Europe, qui désirent faire des séjours courts vers des destinations principalement urbaines. Au cours des dernières années, les compagnies low costs se sont largement développées en Europe, et sont à l'origine d'une partie importante de la croissance du trafic.

a) Etat des lieux

La stratégie des compagnies à bas coûts s'appuie sur celle créée par la compagnie américaine Southwest, première compagnie à avoir développé ce type de vols aux Etats-Unis dans les années 70. Cette compagnie texane, créée en 1971, effectue, dès l'origine, des vols sur des distances moyennes (environ 860 km), entre San Antonio, Dallas et Houston.

Elle devient une compagnie « majeure » en 1990, avec un chiffre d'affaires supérieur à 1 milliard de dollars (5,6 milliards de dollars en 2001) et est, en 2002, la 4ème compagnie américaine en termes de passagers domestiques (64 millions de passagers en 2001). Elle emploie 35 000 personnes et possède 366 Boeing 737 (28). Elle effectue 2 800 vols par jour, avec en moyenne 8 vols par avion et par jour, soit 12 heures d'utilisation moyenne (29). Elle dessert 58 villes dans 30 Etats américains.

Sur l'exercice 2001-2002, elle est bénéficiaire pour la 29ème année de suite, contrairement à toutes les autres compagnies américaines. Elle dispose d'un taux de profit net moyen sur 5 ans de 9,8 % (30).

C'est parce qu'elle a développé une politique commerciale et de gestion innovante qu'elle peut aujourd'hui égaler les plus grandes compagnies « classiques » américaines. Cette « méthode Southwest » a servi de base à la création, plus tardive, de ses consœurs européennes. L'objectif des compagnies à bas coûts est de réduire au maximum les coûts d'exploitation et de gestion, de façon à proposer des tarifs jusqu'à deux ou trois fois inférieurs à ceux des concurrents sur une même ligne (31).

La réalisation de cet objectif passe par une stratégie commerciale quasi identique pour toutes ces compagnies :

- Elles travaillent sur un marché bien précis : elles réalisent uniquement des dessertes « point à point », afin de ne pas avoir à traiter de passagers en correspondance et effectuent des vols de moins de trois heures, uniqueme pour payer des redevances aéroportuaires réduites.

- Elles simplifient au maximum les procédures d'embarquement et de débarquement (places non attribuées), encore une fois pour accélérer les rotations et réduire les besoins en personnel. Dans cette optique, elles commercialisent également les billets directement par téléphone, fax mais surtout Internet, et non par les systèmes informatisés de réservations (SIR) et les agences de voyage, plus coûteux. Les billets étant payés avant le voyage et non remboursables, les recettes sont certaines et rapides (pas de décalage entre recettes et dépenses).

- Afin d'obtenir une diminution de la masse salariale, elles emploient des personnels polyvalents, versent des salaires minimaux, mais introduisent une prime de productivité et un intéressement au capital de la société.

- Elles proposent un service très réduit à bord et des prestations payantes.

Grâce aux tarifs pratiqués, les compagnies à bas coûts attirent non seulement une partie de la demande existante mais elles créent une demande supplémentaire. Ainsi, la Direction générale de l'aviation civile estime que, sur Paris-Dublin, même en se posant à Beauvais (72 km de Paris), la compagnie Ryanair a contribué à augmenter de 30 % le trafic de la ligne. Par ailleurs, si le lancement d'une liaison se fait essentiellement grâce à une clientèle ayant des capacités contributives faibles, capable de déterminer ses déplacements assez longtemps à l'avance, à partir d'un seuil de 2 à 3 fréquences par jour, la compagnie à bas coûts « récupère » une clientèle d'affaires, surtout si elle est implantée près des grands centres économiques, comme c'est le cas d'Easyjet à Orly et Roissy Charles-de-Gaulle.

En Europe, en juin 2002, les compagnies à bas coûts représentaient 8,65 % du trafic sur le marché intra-européen, soit 3 points de plus qu'en 2000. A titre de comparaison, les compagnies à bas coûts américaines représentent plus du quart du marché domestique américain en nombre de passagers transportés.

En France, le développement de ces compagnies est récent mais a été très rapide. Début mars 1996, Virgin Express ouvre une liaison sur Nice-Bruxelles. Depuis, d'autres compagnies sont venues la rejoindre, qui représentaient 5 millions de passagers en 2002 (12 % du trafic intra-communautaire français, 5 % du trafic français total) contre seulement 2,6 millions de passagers en 2001 (7 % du trafic intra-communautaire français, 2,7 % du trafic français total).

Cette part atteint 23,2 % en province contre 5,7 % pour les aéroports parisiens (32). Par contre, comme le rappelle une étude de la Direction des Transports Aériens du Ministère de l'Equipement présentant le bilan chiffré sur les quatre dernières ann&eacut PAR PAYS D'ORIGINE ET DE DESTINATION

Passagers

Part dans le total

2001

2002

2001

2002

France

Royaume-Uni

1 909 791

3 020 188

69,1 %

58,9%

dont trafic de et vers Londres

1 641 369

2 453 046

59,4 %

47,8%

France

Suisse

192 636

442 120

7,0 %

8,6%

France

Irlande

255 487

341 860

9,2 %

6,7%

France

Pays-Bas

217 189

318 442

7,9 %

6,2%

France

Belgique

190 041

307 599

6,9 %

6,0%

France

France

98

282 947

0,0 %

5,5%

France

Allemagne

70

205 048

0,0 %

4,0%

France

Suède

0

174 341

0,0 %

3,4 %

France

Norvège

0

32 955

0,0 %

0,6 %

France

Italie

190

4 204

0,0 %

0,1 %

France

Espagne

0

171

0,0 %

0,0 %

Total

2 765 502

5 129 875

100,0 %

100,0 %

Source : Direction générale de l'aviation civile/SDEEP

graphique

* Europe : Union européenne, Suisse et Norvège mais hors France

Source : Direction générale de l'aviation civile/SDEEP

Par ailleurs, comme le souligne l'étude, « bien qu'assez récemment implantées en France, les compagnies étrangères à bas-coûts sont présentes sur 28 aéroports français », notamment de petits aéroports de province, comme Bergerac, Caen, Dijon, Rouen ou Tours, que ces compagnies contribuent souvent à revitaliser. Il s'agit d'une stratégie délibérée de la part des compagnies à bas coûts, notamment de Ryanair, du fait de la rareté des créneaux disponibles à Paris et du coût d'exploitation de liaisons au départ de ces aéroports.

Les compagnies établies en France sont aujourd'hui au nombre de 10 : Goodjet, Germanwings, bmibaby, My TravelLite et Ciao Fly, établies en 2002 et EasyJet, Ryanair, Buzz, Basiqair et Virgin Express, déjà établies en 2001.

Le marché est malgré tout très concentré, puisque les trois principaux acteurs que sont EasyJet, Ryanair et Buzz détiennent 85 % du marché.

graphique

Source : Direction générale de l'aviation civile/SDEEP

Cette étude confirme leur progression sur le marché français : « Alors que le trafic réalisé par ces compagnies avait déjà augmenté de 51 % en 2000 et de 44 % en 2001, il progresse de 85 % en 2002 par rapport à 2001» (33).

« Une telle progression ne peut s'expliquer en économie de marché que par la rencontre d'une large demande potentielle et d'une forte augmentation de l'offre, avec naturellement à l'origine un produit attractif ».

En 2002, l'offre des compagnies à bas coûts s'est largement améliorée par le biais d'une augmentation du nombre de liaisons exploitées qui sont passées de 52 à 87 en 2002 (+°67 %) et d'une augmentation du nombre de mouvements qui sont passés de 27 405 à 50 205 en 2002 (+ 83 %). En trois ans la progression est conséquente puisque le trafic (34) a quadruplé (+ 299 %) depuis 1999.

b) Perspectives d'évolution

Mais les risques de pression à la baisse des prix ne sont pas exclus, si la création de nouvelles compagnies à bas coûts entraîne une surcapacité de l'offre. La concurrence entre low costs, et avec les charters, risque de s'accentuer, et l'on devrait assister à un certain nombre de regroupements, à l'exemple de Easyjet qui a racheté Go et DeutscheBA en mai 2002, et de Ryanair qui a racheté Buzz en janvier 2003.

Pour autant, alors que les experts les plus optimistes estiment que le marché des compagnies à bas coûts (lignes européennes « point à point » de moins de trois heures) leur serait, à terme, complètement acquis, il apparaît plus raisonnable, selon les prévisions de la Direction générale de l'aviation civile et en s'appuyant sur l'exemple américain, d'évaluer à 20 % du marché intérieur européen la part des compagnies à bas coûts à l'horizon 2010.

II. - LA DEMANDE DE TRANSPORT AÉRIEN : AU-DELÀ D'UN RALENTISSEMENT CONJONCTUREL MARQUÉ, UNE CROISSANCE DURABLE MAIS MAITRISABLE

Synthèse :

La demande de transport aérien enregistre depuis plus de vingt ans une croissance marquée, en dépit de l'impact souvent sensible de la conjoncture économique ou des événements internationaux.

La crise que connaît actuellement le secteur est particulièrement marquée, même si les conséquences sont variables suivant la zone géographique ou le type de vol considérés.

En dépit de ces évolutions récentes, le trafic devrait continuer à croître dans les vingt prochaines années. Malgré tout, les spécialistes divergent sur le niveau de cette croissance.

Par ailleurs, l'augmentation de trafic induite par cette croissance sera plus forte en termes de passagers qu'en termes de mouvements, l'emport moyen ayant tendance à croître sur les aéroports saturés.

Enfin, l'intermodalité devrait également contribuer à la diminution du nombre de vols court courrier, domestiques et intra-européens, du fait du développement des liaisons à grande vitesse (LGV) en Europe.

A.- UN SECTEUR DUREMENT TOUCHÉ PAR LA CONJONCTURE MONDIALE ACTUELLE

1. Un secteur traditionnellement sensible aux variations de la croissance économique

a) Les exemples de la décennie passée

(en millions de passagers)

 

TAUX DE CROISSANCE ANNUEL MOYENS ENTRE 1982 ET 2001 :

Monde

France

Passagers

+ 4,0 %

+ 4,8 %

Fret

+ 4,9 %

+ 3,2 %

Passagers kilomètres transportés

+ 5,1 %

+ 6,2 %

Tonnes kilomètres transportées

+ 5,5 %

nd

Etape moyenne

+ 1,0 %

+ 1,4 %

Source : Direction générale de l'aviation civile, 2002

On constate que le taux de croissance du transport aérien à tendance à réagir fortement aux évolutions de la conjoncture économique et aux événements internationaux, comme le montrent les ralentissements enregistrés par le secteur au moment de la guerre du Golfe en 1991 et la crise asiatique en 1998.

Taux de croissance annuels du PIB mondial et du trafic mondial en tonnes kilomètre transportées (TKT (36)) de 1982 à 1999

graphiquegraphique

Source : Cahier de base du débat DUCSAI, 8 août 2001

b) Les conséquences encore mal évaluées de la conjoncture mondiale actuelle

Le transport aérien connaît actuellement une crise profonde, que les spécialistes considèrent comme la plus grave depuis la deuxième Guerre mondiale. La crise actuelle trouve son origine dans la conjonction de quatre événements internationaux :

- le ralentissement de la croissance économique apparue au début de 2001 aux États-Unis, touchant l'Europe à la fin de l'année 2001 ;

- les effets considérables des attentats du 11 septembre 2001 sur l'évolution de la demande, en particulier aux États-Unis ;

- la guerre récente en Irak ;

- l'épidémie du Syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) qui touche en particulier l'Asie depuis quelques mois.

IMPACT DES ÉVÉNEMENTS DU 11 SEPTEMBRE
SUR LE TAUX DE CROISSANCE DU TRAFIC AÉRIEN
DE PASSAGERS (JANVIER 2001-OCTOBRE 2002)

graphique

Source : Direction générale de l'aviation civile, 2002

Les évaluations disponibles à cette heure ne permettent pas de mesurer de manière fiable les conséquences transitoires de la guerre en Irak, ni celles du SRAS qui peuvent être plus durables. En tout état de cause, l'impact du ralentissement économique mondial et des attentats sur le trafic aérien mondial sont manifestes pour 2001 : l'OACI enregistre 1,62 milliard de passagers réguliers et près de 28,7 millions de tonnes de fret transporté en 2001, soit une baisse de 2 % du trafic aérien de passagers et de 5 % du trafic aérien de fret par rapport à 2000. Le trafic international résiste mieux avec une perte de 1 % du trafic de passagers, sachant que le trafic domestique américain représente l'essentiel de cette baisse.

Pour l'année 2002, les chiffres sont encore négatifs, même si le recul a été sans doute moins prononcé que ne pouvaient le laisser penser les évolutions constatées lors des six premiers mois de l'année. Selon les estimations préliminaires de l'OACI, les aéroports du monde ont accueilli en 2002 un total de 3,271 milliards de passagers, soit un recul de 0,5 % par rapport à 2001.

Les chiffres détaillés fournis par l'OACI font cependant état d'évolutions hétérogènes : le trafic passager international résisterait mieux que le trafic domestique, avec une légère augmentation de 1 % par rapport à 2001. Le trafic fret a pour sa part enregistré une augmentation de 5 % sur la même période.

Les perspectives de croissance du secteur des transports aériens établies par l'OACI pour 2003 restaient relativement soutenues, puisque cet organisme avait prévu un rebond de 7,1 % en 2003 « grâce surtout au redressement général que devrait connaître l'économie mondiale ».

Du fait de la guerre en Irak et de l'épidémie du Syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), ces prévisions ne semblent pas vérifiées durant les premiers mois de l'année 2003, pour autant que l'on puisse en juger à partir des éléments actuellement disponibles. En janvier 2003, l'IATA avait en effet annoncé une augmentation du trafic de 10,97 % mesuré en RPK (revenu passager kilomètre) par rapport à janvier 2002, et une croissance du fret de 11,73 % mesuré en FKT (fret tonne kilomètre) (37)-, mais les mois suivants se sont révélés particulièrement préoccupants. En mars, le trafic mesuré en RPK était en recul de 6,73 % par rapport à mars 2002, principalement à cause du début de la guerre en Irak et de l'annonce de l'épidémie de SRAS. Du fait de ces événements, la baisse du trafic mesuré en RPK est de 9,93 % pour l'Extrême-Orient et de 8,20 % pour le Moyen-Orient. évolutions de la conjoncture économique, que ce soit au niveau mondial ou au niveau local ».

Certaines analyses de long terme du secteur des transports aériens montrent cependant que cette sensibilité aux variations de l'économie mondiale semble tendanciellement de plus en plus faible. Ainsi, selon une étude, certes contestée par certains, réalisée par le cabinet Arthur D. Little, « l'élasticité du trafic aérien mondial au PIB ne cesse de chuter depuis 1970 et se rapproche de 1 »(38). Le tableau suivant met en lumière le fait que le rapport entre la croissance du secteur des transports aériens et la croissance du PIB a tendance à régresser durant les trois décennies passées :

COMPARAISON DES TAUX DE CROISSANCE DU TRAFIC AÉRIEN
ET DU PIB SUR LES TROIS DERNIÈRES DÉCENNIES

1971-1980

1981-1990

1991-2000

Taux de croissance du trafic aérien

6,7 %

4,4 %

3,3 %

Taux de croissance de l'économie

3,7 %

3,0 %

2,6 %

Source : Arthur D. Little

Selon les concepteurs de l'étude, cette convergence traduit « une plus grande maturité des marchés et un poids de plus en plus important du facteur prix (39)».

En outre, le repli du marché des transports aériens en 2001 et en 2002 traduit un « décrochage complet » par rapport à la croissance économique, puisque le trafic aéroportuaire mondial a reculé de près de 0,5 % entre 2001 et 2002, alors que le PIB a continué de croître. Ce décrochage concernerait surtout l'Europe, les États-Unis et le Mexique. Dans la zone Asie-Océanie, au Moyen-Orient et en Amérique Latine, cette corrélation est encore vérifiée, puisque la croissance économique et la croissance du transport aérien sont sensibles dans les deux premières zones, tandis que les deux indicateurs sont négatifs dans la troisième.

La mission d'information a été contactée par de nombreux spécialistes du secteur, qui ont tenu à faire part de leurs observations sur l'analyse du cabinet Arthur D. Little. Ainsi, M. Christian Roger, président de l'Observatoire des Nuisances Aériennes, estime qu'un taux d'élasticité de l'ordre de 2 est une constante du secteur des transports aériens depuis 30 ans. De même, M. Bruno Matheu, directeur général marketing et réseau d'Air France, a souligné le fait que l'observation de la situation actuelle ne doit pas permettre de tirer des conclusions d'ordre théorique concernant le secteur des transports aériens, estimant par ailleurs également que le taux d'élasticité resterait proche de 2.

Les membres de la mission d'information estiment que ces deux catégories d'analyses ne sont pas totalement antinomiques : même si l'élasticité reste importante, il est indéniable, sur le long terme, que la croissance du trafic aérien se rapproche tendanciellement de la croissance du PIB.

2. Les conséquences sur la demande de transport aérien 

a) Des conséquences hétérogènes suivant le type de trafic

- Le trafic de passagers

Comme indiqué précédemment, le trafic mondial de passagers s'est élevé en 2002 à 3,271 milliards de passagers, en repli de 0,5 % par rapport à 2001. Ce repli a touché de manière hétérogène les principaux aéroports mondiaux en nombre de passagers :

COMPARAISON DU NOMBRE DE PASSAGERS AÉRIENS
DES PRINCIPAUX AÉROPORTS MONDIAUX EN 2002

Passagers
(en millions)

Augmentation
2002/2001
(en %)

Atlanta

76,8

+1,3

Chicago-O'Hare

66,56

-1,3

Londres-Heathrow

63,36

+4,3

Tokyo-Haneda

61,07

+4,1

Los Angeles-International

56,22

-8,7

Dallas-Fort Worth

52,82

-4,2

Francfort

48,45

-0,2

Paris Charles-de-Gaulle

48,35

+0,7

Amsterdam

40,73

+3

Denver

35,6

-1,2

Source : Aéroports magazine

Selon les informations recueillies par la mission, le repli du trafic mondial de passagers aurait concerné davantage le trafic domestique, qui reste pourtant prépondérant dans la trafic mondial de passagers, à hauteur de 70 %. En outre, plus de 80 % des passagers aériens mondiaux ne voyagent pas au-delà des limites de leur continent, de sorte que l'étape moyenne d'une liaison aérienne, c'est-à-dire la distance moyenne parcourue par un avion de passager reste assez faible avec 1800 kilomètres parcourus en 2002.

Le trafic de fret aérien

Les analyses de la principale association mondiale de compagnies de fret, The International Air Cargo Association (TIACA) reprennent celles de Boeing (« World air cargo forecast »), qui font état d'une dégradation de la situation. Après avoir enregistré une croissance de 6,2 % en 1999 et de 7,1 % en 2000, le trafic de fret général a chuté de près de 5 % en 2001, à cause du ralentissement économique, qui reste l'un des déterminants fondamentaux de cette activité, ainsi que de l'explosion de la bulle technologique qui avait porté ce secteur en 1999 et en 2000. En Europe, ce ralentissement s'élève même à 7 % en 2001 selon l'Association of European airlines (AEA).

Selon l'OACI, le secteur du fret aérien a cependant connu une nette reprise en 2002, avec une croissance de 5 % mesurée en tonnes kilomètres transportées. Le tableau indique par ailleurs que ce taux de croissance est plus important que la moyenne mondiale pour sept des dix principaux aéroports mondiaux de fret aérien :

COMPARAISON DU TRAFIC DE FRET
DES DIX PRINCIPAUX AÉROPORTS MONDIAUX EN 2002

Aéroport

Fret en 2002
(en millions de tonnes)

Augmentation
2002/2001
(en %)

Memphis

3,39

+28.8 %

Hong Kong

2,48

+18.1 %

Anchorage

2,02

+19.3 %

Séoul-Incheon

2,01

+43.3 %

Los Angeles-International

1,96

+0.3 %

Tokyo-Narita

1,94

+19.7 %

Miami

1,79

-0.9 %

New York-Kennedy

1,75

+6.3 %

Singapour

1,64

+7.1 %

Francfort

1,63

+1.1 %

Paris-Charles de Gaulle

1,62

+2.2 %

Source : Aéroports magazine

Selon la Direction générale de l'aviation civile, les faiblesses de la collecte des statistiques du fret aérien général et postal, notamment à Paris, ne permettent pas d'apprécier globalement les variations des résultats de la France métropolitaine. Les résultats des dix premiers aéroports français montrent cependant des évolutions très contrastées, avec une certaine reprise de trafic pour les aéroports parisiens.

TRAFIC DE FRET ET DE POSTE DES PRINCIPAUX AÉROPORTS
DE LA MÉTROPOLE EN 2002

FRET

POSTE

Trafic en milliers de tonnes

2002

2002/2001

2002/2000

2002

2002/2001

2002/2000

Paris (trafic estimé)

1510,2

+ 3,3 %

245,0

+ 0,5 %

Toulouse-Blagnac

44,9

- 10,1 %

- 0,2 %

8,5

- 38,8 %

- 42,8 %

Marseille-Provence

40,7

+ 0,4 %

+ 2,5 %

19,3

- 5,8 %

- 1,9 %

Bâle-Mulhouse

28,6

- 58,2 %

- 63,1 %

2,7

+ 1,2 %

+ 6,5 %

Lyon-Saint-Exupéry

28,0

- 6,4 %

- 9,4 %

7,3

- 18,4 %

- 20,5 %

Metz-Nancy-Lorraine

17,4

+ 1,5 %

+ 170,9 %

2,5

- 6,2 %

+ 10,4 %

Nice-Côte d'Azur

15,0

- 8,2 %

- 16,1 %

4,0

+ 5,8 %

+ 18,0 %

Saint-Nazaire

9,2

- 17,9 %

- 16,2 %

Nantes-Atlantique

8,5

+ 7,1 %

+ 11,1 %

3,9

- 12,9 %

- 10,4 %

Rennes-Saint-Jacques

8,2

- 0,6 %

+ 35,4 %

4,0

+ 1,9 %

+ 8,3 %

Source : Direction générale de l'aviation civile/Direction des Transports Aériens, 2003

Au sein du secteur du fret, on peut distinguer le fret dit « express », pour lequel les analyses faites par Boeing font état d'une croissance importante pendant la dernière décennie. Actuellement, 75 % du marché mondial de l'express est réalisé par quatre entreprises, dont deux sont américaines (UPS et FEDEX) et deux sont européennes (DHL contrôlée par la Deutsche Post, et TNT contrôlée par la poste néerlandaise). Ces entreprises assurent elles-mêmes tout le transport porte-à-porte et le traitement de la marchandise dans les aéroports, d'où le nom d'« intégrateurs » qui leur est parfois donné.

Le tableau suivant retrace les principales données économiques des quatre grands intégrateurs mondiaux :

SITUATION DES PRINCIPAUX INTÉGRATEURS MONDIAUX EN 2002

FedEx

UPS

TNT Express

DHL

Chiffre d'affaires 2002

22 milliards de dollars

31,3 milliards de dollars

11,8 milliards d'euros

6,2 milliards d'euros

Effectifs

140 000

360 000

40 000

71 000

Nombre de hubs dans le monde

10

14

8

36

Principal hub en Europe

Paris - Charles de Gaulle

Cologne - Bonn

Liège

Bruxelles

Flotte de véhicules

44 200

88 000

19 333

650

 

 

 

 

Source : Direction des transports aériens

Selon les estimations faites par Boeing, ce secteur a enregistré une croissance moyenne de 20,9 % par an depuis 1991 mesurée en revenu tonne kilomètre (RTK). Le trafic express est passé de 3,7 % du trafic de fret total mesuré en RTK en 1991 à 11,8 % en 2001.

Le trafic lié à l'aviation d'affaires

Selon les informations fournies aux membres de la mission par l'European Business Aviation Association (EBAA), au niveau mondial, l'aviation d'affaires représente 22 500 avions propulsés par des turbines, 12 500 avions à réaction et 13 900 sociétés en 2002. L'aviation d'affaires est localisée à plus de 70 % aux Etats-Unis et utilisée à 75 % par des compagnies multinationales.

Ce secteur a connu un ralentissement conjoncturel en 2002, même si la flotte d'avions d'affaires a globalement doublé entre 1989 et 2003, avec une augmentation du nombre d'opérateurs de 5 % en 2002. Selon la National Business Aviation Association (NBAA), le chiffre d'affaires global du secteur a enregistré un repli de 13,9 milliards de dollars en 2001 à 11,9 milliards en 2002, soit un recul de 14 %.

En dépit de cet impact conjoncturel, certaines évolutions structurelles sont très favorable à la croissance économique de ce secteur : d'une part, l'utilisation de l'aviation d'affaires n'est plus réservée à une élite, puisque les passagers sont désormais composés à 43 % de cadres supérieurs, contre seulement 18 % pour les cadres dirigeants. En outre, le dynamisme du secteur est porté par le développement de la formule des achats en multipropriété. Ainsi, 5 827 appareils ont été acquis sous cette forme en 2002, contre seulement 57 en 1990, selon les chiffres fournis par la NBAA. Ce mode d'acquisition permet aux entreprises intéressées, dans le contexte économique morose actuel, d'utiliser les facilités offertes par ce type d'avions sans supporter les coûts élevés qui y sont liés - frais d'achat, d'entretien, d'équipage, de parking...

b) Un impact différent suivant les zones géographiques

Dans la mesure où le marché du transport aérien est très concentré géographiquement, avec des acteurs fortement interdépendants, on pourrait penser que la conjoncture actuelle a touché de manière homogène tous les acteurs. L'Amérique du Nord, l'Europe et l'Asie rassemblent près de 85 % des passagers mondiaux, sachant par ailleurs que le marché intérieur des États-Unis représente à lui seul un tiers des passagers aériens mondiaux. Néanmoins, l'impact de la conjoncture actuelle a &eacu atteint une certaine maturité.

En Amérique latine et dans la zone Caraïbes - qui représentent seulement 7 % de l'activité mondiale - le recul est de 5,3 % par rapport à 2001, avec un effet négatif supplémentaire dû à la dégradation des taux de changes.

ÉVOLUTION DU TRAFIC EN AMÉRIQUE ENTRE 2001 ET 2002

Zone géographique

Nombre de passagers en 2002 (en millions)

Évolution du nombre de passagers entre 2002 et 2001

Part dans le trafic mondial de passagers en 2002

Amérique du Nord

1 254

-2,7 %

38,5 %

Amérique du Sud

219

-3,9 %

7 %

Source : Arthur D. Little, 2003

L'Asie et Océanie

L'Asie a été, avec 16 % du trafic mondial, un moteur de la croissance en 2002, puisque cette région a enregistré une croissance soutenue du trafic de près de 7 %, concentrée principalement sur la Chine, l'Indonésie et le Japon. Cette croissance s'explique par l'importance des vols internationaux dans le trafic de la région. Quelques pays enregistrent même une croissance du trafic aérien supérieure à celle du PIB, comme la Chine avec un taux de croissance du trafic aérien de 35,2 %, cinq fois supérieur à la croissance du PIB, ou l'Indonésie avec un taux de croissance du trafic aérien, sept fois plus important que celui du PIB. C'est un marché en plein développement et peu mature, même si les événements récents, liés au SRAS, remettent en cause sa croissance de court terme.

ÉVOLUTION DU TRAFIC EN ASIE ET OCÉANIE ENTRE 2001 ET 2002

Zone géographique

Nombre de passagers en 2002 (en millions)

Évolution du nombre de passagers entre 2002 et 2001

Part dans le trafic mondial en 2002

Asie

502

+7,0 %

16 % 

Océanie

88

-4,3 %

2,7 %

Source : Arthur D. Little, 2003

- L'Europe

En Europe, il semble à ce stade que l'impact du ralentissement de l'économie mondiale et des attentats du 11 septembre soit plus limité, dans la mesure où le trafic ne baisse que de 0,8 % en volume, principalement à cause de la crise du secteur en Suisse, en Belgique et en Suède. La situation des aéroports européens est stable, puisque le trafic de Londres, malgré les difficultés de British Airways, progresse de 3,2 % en 2002, celui de Paris de 0,7 %, et celui d'Amsterdam de 3 %.

Cette relative stabilité s'explique par la présence de plusieurs hubs intercontinentaux solides en Europe, mais aussi par la progression du trafic des compagnies low costs, puisque les plates-formes européennes accueillant des compagnies à bas prix enregistrent pour la plupart d'entre elles un croissance du trafic assez importante (+17,5 % à Glasgow, +20,2 % à Liverpool, +29,8 % à Toulon, ou encore +49,6 % à Perpignan).

ÉVOLUTION DU TRAFIC EN EUROPE ENTRE 2001 ET 2002

Zone géographique

Nombre de passagers en 2002 (en millions)

Évolution du nombre de passagers entre 2002 et 2001

Part dans le trafic mondial en 2002

Union européenne

885

-0,8 %

27,1 %

Europe occidentale

941

-1,2 %

28,9 %

PECO+ Russie

63

+0,2 %

1,9 %

Source : Arthur D. Little, 2003

- La France

La France représente en 2002 près de 6,5 % du trafic aérien mondial de passagers, enregistrant une croissance de 0,5 % par rapport à 2001. Les liaisons aériennes entre la métropole et l'étranger ont continué à progresser de 2,3 %, alors qu'à l'inverse le recul du trafic aérien domestique s'est élevé à 2,9 %. Les liaisons aériennes internationales, qui représentent plus de 72 % de l'ensemble du transport aérien français, sont donc restées en 2002 le moteur de la croissance de l'activité aérienne française. Cette augmentation est imputable à plusieurs facteurs :

- le trafic vers les destinations touchées par les attentats du 11 septembre est moins développé en France que chez les principaux concurrents (l'Amérique du Nord ne représente que 8 % des passagers, et le Moyen-orient moins de 2 %) ;

- certains marchés ont connu une reprise marquée (le Japon en croissance de 13,2 % ou l'Algérie en croissance de 10,9 %) et tirent le trafic international français à la hausse. En revanche, les transports à destination de l'Europe, et en particulier de la zone euro, sont en légère diminution respectivement de 1 % et de 0,4 % ;

- le hub d'Air France est toujours en phase de croissance ;

- les compagnies à bas coûts ont vu leur trafic vers la France multiplié par quatre depuis 1998 pour atteindre 5,1 millions de passagers en 2002, ce qui représente une augmentation de 85 % par rapport à 2002.

LES FLUX DE TRAFIC AÉRIEN EN FRANCE EN 2002

(en milliers)

Passagers

Mouvements commerciaux

2002

2002/2001

2002/2000

2002

2002/2001

2002/2000

Métropole - International

68 692,4

+ 2,3 %

+ 2,6 %

875,7

- 2,9 %

- 3,3 %

Métropole - Union européenne

36 417,8

+3,1 %

+ 2 ,9 %

585,1

- 2,4 %

- 2,5 %

Paris - International

49 685,1

+ 2,6 %

+ 1,8 %

485,9

- 0,9 %

- 1,2 %

Province - International

19 007,3

+ 1,5 %

+ 4,7 %

389,8

- 5,3 %

- 5,7 %

Métropole - Métropole

24 250,8

- 2,9 %

- 10,2 %

413,7

- 4,9 %

- 10,2 %

Paris - Province

18 429,8

- 3,9 %

- 12,9 %

214,3

- 7,5 %

- 12,9 %

Province - Province

5 821,1

+ 0,3 %

- 0,1 %

199,3

- 2,0 %

- 7,0 %

Total hors Outre-Mer

92 943,3

+ 0,9 %

- 1,1 %

1 289,3

- 3,6 %

- 5,6 %

Métropole - Outre-Mer

3 363,6

- 2,9 %

- 10,4 %

9,2

- 1,1 %

- 11,9 %

Outre-Mer - Domestique

1 908,1

- 4,6 %

- 7,5 %

82,9

- 9,3 %

- 19,8 %

Outre-Mer - International

1 744,4

- 4,1 %

- 8,8 %

57,0

+ 0,7 %

- 11,2 %

Total Outre-Mer

7 016,2

- 3,7 %

- 9,2 %

149,1

- 5,2 %

- 16,2 %

TOTAL FRANCE

99 959,4

+ 0,5 %

- 1,7 %

1 438,5

- 3,7 %

- 6,8 %

* Dans le calcul des flux, le trafic de l'aéroport franco-suisse Bâle-Mulhouse est considéré comme entièrement français

Source : Direction générale de l'aviation civile, 2003

A l'inverse, le trafic aérien domestique a globalement diminué de 2,9 % en 2002, notamment du fait de la baisse de près de 4 % du trafic de passagers entre Paris et la province. La chute de l'activité avec la province a été plus forte sur l'aéroport d'Orly (-5,1 %) que sur Charles de Gaulle (-0,2 %), dans la mesure où ce dernier a bénéficié de l'implantation d'EasyJet développant sa liaison Paris-Nice. Sur les transversales, on trouve en partie les mêmes difficultés, notamment sur les liaisons entre le nord et le sud de la France, à l'exception de certains aéroports comme Clermont-Ferrand qui restent stables.

TRAFIC PARIS-PROVINCE EN 2002

Passagers

Mouvements

2002

2002/2001

2002/2000

2002

2002/2001

2002/2000

Paris - Province

18 429,8

- 3,9 %

- 12,9 %

214,3

- 7,5 %

- 12,9 %

Paris - CDG - Province

4 697,2

- 0,2 %

+ 1,2 %

68,2

- 4,0 %

+ 1,1 %

Paris - Orly - Province

13 732,5

- 5,1 %

- 16,9 %

146,1

- 9,1 %

- 18,2 %

Source : Direction des transports aériens, 2003

Les chiffres du trafic aérien des principaux aéroports de la métropole en 2002 font en outre ressortir un fort déséquilibre au détriment des aéroports de province. Les liaisons radiales de Paris vers la province représentent 77 % du trafic domestique métropolitain, pour plus des trois quarts depuis l'aéroport d'Orly. Les deux aéroports parisiens traitent 77 % du trafic total métropolitain, 72 % du trafic international et 90 % du trafic domestique.

TRAFIC DES 15 PREMIERS AÉROPORTS DE LA MÉTROPOLE EN 2002

Passagers locaux*

Mouvements commerciaux

2002

2002/2001

2002/2000

2002

2002/2001

2002/2000

Trafic en milliers

Paris

Paris-CDG

Paris-Orly

71 401,6

48 258,0

23 143,6

+ 0,6 %

+ 0,7 %

+ 0,6 %

- 2,9 %

+ 0,2 %

- 8,8 %

709,1

501,5

207,6

- 2,9 %

- 2,6 %

- 3,7 %

- 5,1 %

- 1,4 %

- 13,1 %

Nice-Côte-d'Azur

9 183,2

+ 2,3 %

- 1,9 %

176,2

- 8,8 %

- 14,3 %

Lyon-Saint-Exupéry

5 724,6

- 5,5 %

- 3,5 %

114,7

- 9,5 %

- 7,7 %

Marseille-Provence

5 360,5

- 8,2 %

- 15,5 %

86,7

- 6,7  %

- 13,4 %

Toulouse-Blagnac

5 288,5

+ 2,0 %

+ 0,8 %

82,3

- 4,5 %

- 6,0 %

Bâle-Mulhouse**

2 985,0

- 14,8 %

- 19,4 %

85,6

- 11,9 %

- 16,2 %

Bordeaux-Mérignac

2 904,7

- 4,4 %

- 3,4 %

50,5

- 4,9 %

+ 1,1 %

Strasbourg***

1 993,8

- 4,6 %

- 0,9 %

38,9

- 7,5 %

+ 2,2 %

Nantes-Atlantique

1804,2

- 6,0 %

- 4,0 %

36,7

- 8,4 %

- 15,4 %

Montpellier-Méditerranée

1 560,0

+ 1,1 %

- 10,0 %

23,9

- 0,3 %

- 9,6 %

Ajaccio-Campo Dell'oro

1 062,9

- 3,3 %

- 0,4 %

14,6

- 0,0 %

+ 0,4 %

Clermont-Ferrand Auvergne

1 068,8

+ 27,9 %

+ 17,6 %

46,1

+ 27,5 %

+ 19,4 %

Lille-Lesquin

917,9

- 5,2 %

- 7,3 %

22,9

- 5,5 %

- 7,1 %

Bastia-Poretta

823,7

- 5,1 %

- 1,1 %

14,3

+ 2,8 %

+ 4,3 %

Biarritz-Bayonne-Anglet

778,0

- 1,5 %

- 0,0 %

10,0

- 3,2 %

+ 0,3 %

Total des 15 premiers aéroports français

112 849,5

- 0,7 %

- 3,8 %

1 512,5

- 4,6 %

- 7,0 %

Total des aéroports français

120 579,5

- 0,0 %

- 3,3 %

1 718,2

- 3,8 %

- 6,7 %

* Hors transit ** Le trafic de l'aéroport franco-suisse Bâle-Mulhouse est considéré comme entièrement français

***Aéroport fermé en juillet et août 2000

Source : Direction des transports aériens, 2003

La part des aéroports de province dans le trafic aérien métropolitain tend cependant à augmenter, grâce à l'essor des lignes transversales et des liaisons entre la province et l'international. Ainsi, entre 1995 et 2000, le trafic des lignes transversales s'est accru de 50 % contre 17 % pour les lignes radiales et le trafic entre la province et l'international a augmenté de 67 % contre 43 % pour le trafic entre les aéroports parisien et l'international. Ces évolutions vont donc dans le sens d'un soulagement de la desserte parisienne.

La croissance globale des aéroports de province est comparable à celle des aéroports parisiens (4 % à Paris contre 3,5 % en Province entre 1989 et 2001), mais la croissance du trafic vers l'Union européenne des aéroports de province est plus importante que celle des aéroports parisiens (+8,5 % contre +4,9 %).

COMPOSITION DU TRAFIC AERIEN DES AEROPORTS DE PROVINCE ENTRE 1989 ET 2002

(en millions de passagers)

graphique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : Direction générale de l'aviation civile, 2002

La mission estime que cette tendance au rééquilibrage entre le trafic des aéroports parisiens et ceux de la province, au-delà des conséquences prévisibles de la conjoncture actuelle, est un élément fondamental à prendre en compte pour l'évaluation de l'impact de la croissance future du trafic aérien sur les plates-formes françaises.

B.- LES PERSPECTIVES D'ÉVOLUTION DU TRAFIC AÉRIEN À MOYEN ET LONG TERME

1. L'augmentation prévisible des besoins en déplacement

La mobilité des populations devrait être déterminée à l'horizon de vingt ans par plusieurs éléments :

- la croissance économique mais aussi le niveau de richesse de la population mondiale. Cette corrélation devrait entraîner une forte augmentation des besoins en transports aériens dans certains pays d'Asie comme la Chine ou l'Inde, dans lesquels la population est importante mais le niveau de richesse par habitant encore peu élevé, bien qu'en constante augmentation. Pour les pays développés, qui constituent actuellement l'essentiel du transport aérien, mais dont le marché est plus mature, la croissance sera moindre ;

- au niveau européen, certains éléments démographiques permettent malgré tout de prévoir une augmentation de la demande de transport. En effet, les catégories de populations ayant une propension à voyager supérieure à la moyenne - les actifs libérés de leurs charges de famille ainsi que les jeunes retraités, ayant généralement entre 50 et 65 ou 70 ans - voient leur part dans la population totale augmenter. Le nombre de voyageurs âgés progresse en Europe, puisque l'âge moyen est de 43 ans en Allemagne et de 41 ans en France, avec une progression de 6 mois enregistrée chaque année. Mais, si cet argument est valable pour une analyse à l'horizon d'une dizaine d'années, en 2020, la propension à voyager de cette catégorie de population aura considérablement baissé, dans la mesure où la classe d'âge des plus de 70 ans est celle dont les déplacements sont les plus réduits ;

- le nombre des voyages internationaux des Français devrait augmenter si on le compare à celui de leurs voisins européens (24,5 millions de départs à l'étranger tous motifs confondus en 2000, alors que les Allemands ont réalisé à la mê l'allongement de la durée d'activité induite par la réforme des retraites.

2. Les perspectives de croissance du trafic aérien à long terme

Si la majorité des acteurs du secteur des transports aériens convient du fait qu'une augmentation de la demande est prévisible dans les prochaines années, il n'existe pas de consensus sur le niveau de progression de cette demande.

a) Les acteurs internationaux du monde aérien prévoient un niveau de croissance important

Des prévisions de croissance hétérogènes pour le trafic aérien mondial

Airbus et Boeing ont prévu respectivement des taux de croissance de 5,2 % et de 4,7 % pour la période 1999-2009. Leurs prévisions à l'horizon 2020 sont indiquées dans le tableau suivant :

COMPARAISON DU TAUX DE CROISSANCE ANNUEL PRÉVISIONNEL
DU TRAFIC AÉRIEN DES CONSTRUCTEURS D'AVION EN 2020

Airbus

Boeing

Taux de croissance annuel de l'économie

-

2,9 %

Taux de croissance du trafic de passagers mesuré en PRK

4,7 %

4,9 %

Taux de croissance du trafic fret mesuré en FTK

5,5 %

6,5 %

Le tableau suivant présente une synthèse des prévisions de croissance de l'OACI et de l'Airports council international (ACI) à l'horizon de 2020. On constate que ces prévisions s'établissent en moyenne à 4,5 % par an pour le trafic mondial, contre un niveau plus proche de 5 % pour les constructeurs.

SYNTHÈSE DES PRÉVISIONS DE CROISSANCE DE L'OACI ET DE L'ACI
À L'HORIZON 2020

Organisation de l'aviation 
civile internationale (OACI)

Airports council
  international (ACI)

Trafic aérien total

4,3 %

-

Trafic passager

-

3,4 %

Trafic domestique

3,5 %

2,8 %

Trafic international

4,9 %

4 %

Une modification de la structure du marché aérien mondial

Selon les prévisions d'Airbus et de Boeing, la croissance du transport aérien mondial devrait être plus importante en Asie que dans le reste du monde, de sorte que le trafic domestique de ce continent devrait dépasser celui de l'Amérique du Nord en 2020.

ÉVOLUTION DU TRAFIC DOMESTIQUE DE PASSAGERS
PAR GRANDE ZONE GÉOGRAPHIQUE ENTRE 2000 ET 2020

Part du trafic mondial en 2000 
mesuré en revenu passager kilomètre (en %)

Part du trafic mondial en 2020 
mesuré en revenu passager kilomètre (en %)

Trafic domestique de l'Amérique du Nord

25,9

16,4

Trafic domestique de l'Asie

14,0

18,4

Trafic domestique de l'Europe

9,5

11,5

Trafic domestique de l'Amérique latine

2,5

2,2

Source : Prévision de marché d'Airbus, 2002

S'agissant de l'Europe, les prévisions de marché d'Airbus pour la période 2001-2020 distinguent en outre le trafic entre l'Europe et les États-Unis qui devrait augmenter d'un peu plus de 4 % par an, le trafic intra-européen qui devrait augmenter de près de 6 % et le trafic entre l'Europe et l'Asie qui devrait augmenter de près de 6,9 %. En outre, le trafic domestique européen devrait s'établir à 2,6 % par an sur cette période.

b) Les prévisions de la Direction générale de l'aviation civile pour le trafic français sont plus modérées

A l'occasion de l'élaboration des schémas de services collectifs de transport, la Direction générale de l'aviation civile a établi des perspectives de développement du trafic passager pour 2020, reposant sur quatre scénarios différents :

- le scénario du « réseau maillé » suppose que, faute d'entités politiques dotées de pouvoirs suffisants, les solutions libérales s'imposent. La croissance économique est alors soutenue, de l'ordre de 2,9 % par an en France, mais la vie économique est atomisée sur le territoire, impliquant également une croissance forte du transport aérien ;

- le scénario des « compagnies globales » repose sur l'idée que l'économie mondiale est dominée par cinq blocs concurrents (ALENA, Union européenne, Japon, Chine et Russie). Si la croissance économique est aussi soutenue que dans le scénario précédent, le marché du transport aérien se caractérise par une forte concentration entre quelques grandes compagnies ;

- le scénario de « l'Europe des infrastructures » repose sur l'hypothèse selon laquelle l'Union européenne a réussi a mettre en place une politique des transports volontariste, indépendamment du pôle américain et de celui de l'Extrême-Orient. La croissance est alors plus modérée (+2,4 % par an en moyenne) et le transport aérien est amené à se spécialiser sur les créneaux où il n'est pas concurrencé par d'autres modes de transport ;

- le scénario « vie à distance » serait marqué par des phénomènes de rupture : l'Europe connaîtrait une croissance ralentie par rapport à l'Asie ou à l'Amérique, et la France n'aurait une croissance annuelle que de 1,9 %. La France perdrait par ailleurs son rang de première destination touristique mondiale, occasionnant un développement plus marqué des liaisons moyen courrier en provenance de l'Europe.

Lors du débat DUCSAI, elle a confirmé ces quatre scénarios, ainsi que le fait que le scénario « compagnies globales&#

« Réseau maillé »

« Compagnies globales »

« Europe des infrastructures »

« Vie à distance »

Aéroports de Paris

1999

69

69

69

69

2020

120

140

114

93

t.c.a.m.

2,6 %

3,4 %

2,4 %

1,4 %

Aéroports de province
(48 principaux)

1999

49

49

49

49

2020

100

92

76

63

t.c.a.m.

3,5 %

3,0 %

2,0 %

1,2 %

Trafic total des aéroports
(50 premiers)

1999

118

118

118

118

2020

220

232

190

155

t.c.a.m.

3,0 %

3,3 %

2,3 %

1,3 %

Hypothèses de PIB : t.c.a.m.

de 1996 à 2020

2,9 %

2,9 %

2,4 %

1,9 %

t.c.a.m. : taux de croissance annuel moyen

Source : Cahier de base du débat DUCSAI, 8 août 2001

TRAFIC DE FRET DES AÉROPORTS DE PARIS
(EN MILLIERS DE TONNES)

2020

1996-2020
(t.c.a.m.)

Réseau maillé

3 300

4,8 %

Compagnies globales

3 900

4,9 %

Europe des infrastructures

2 650

3,8 %

Vie à distance

2 250

3,3 %

t.c.a.m. : taux de croissance annuel moyen

Source : Cahier de base du débat DUCSAI, 8 août 2001

c) Certaines contre-expertises vont encore plus loin

Dans le cadre du débat DUCSAI, la prévision de la Direction générale de l'aviation civile a été remise en cause par certaines associations de riverains ou de protection de l'environnement. Dans un rapport pour le compte de l'association Sana Terra, le bureau d'étude MVA conclut à une demande de trafic aérien de 99 millions de passagers en 2020. Selon la Direction générale de l'aviation civile, cette estimation, qui s'écarte sensiblement des résultats de la première étude, repose sur un calcul biaisé ne prenant pas en compte l'attractivité touristique de Paris. MVA estime par ailleurs que 11 millions de passagers pourront en 2020 partir d'un aéroport de province plutôt que parisien, alors que la Direction générale de l'aviation civile a établi ce report à 5 millions au plus.

3. Quel impact prévisible sur le trafic aérien français ?

a) L'influence de l'emport moyen sur l'augmentation du nombre des mouvements d'avions

Le nombre prévisible de mouvements sur les aéroports français en 2020 dépend principalement du nombre des passagers aériens annuels envisagé, ainsi que de l'évolution de l'emport moyen des appareils, c'est-à-dire du nombre moyen de passagers par avion atterrissant ou décollant sur les plates-formes françaises.

Compte tenu du fait que l'emport moyen des avions français est actuellement d'environ 100 personnes par appareil, on pourrait donc en conclure que la perspective à l'horizon de 2020 serait de 990 000 à 1,25 million de mouvements sur les aéroports parisiens.

Mais l'emport moyen des aéroports parisiens est aujourd'hui plus faible que ceux constatés à l'étranger : l'emport moyen à Londres-Heathrow est significativement plus élevé, de l'ordre de 130 passagers, et l'emport moyen des cinq aéroports londoniens est de l'ordre de 110.

La Direction générale de l'aviation civile estime que la croissance annuelle moyenne de l'emport des appareils en France sera de 1,7 % par an, ce qui établirait l'emport moyen des appareils à près de 140 passagers par avions en 2020 sur les aéroports parisiens. On peut donc en déduire que la croissance du nombre de mouvements sur les aéroports parisiens pourrait être bien plus faible que celle du nombre de passagers (930 000 mouvements contre un peu plus de 700 000 actuellement) et ce, d'autant plus que la saturation progressive des plates-formes parisiennes aboutira à une rati aéroport, le passager aérien utilise le mode ferroviaire pour se rendre à l'aéroport (42).

graphique

L'intermodalité passagers se développe en France

Le développement de l'intermodalité se fait naturellement sur des trajets très courts (1h à 1h30). Par contre, le transport aérien reste dominant sur les trajets plus longs, où l'acheminement ferré est concurrencé par l'offre aérienne d'acheminement vers les hubs étrangers, et où jouent les freins connus de l'intermodalité : durée globale du voyage, non traitement des bagages de bout en bout, coordination des horaires et des prestations.

L'exemple allemand est intéressant, tout comme les accords passés par différentes compagnies avec Thalys ou la SNCF. Lufthansa a conclu un accord avec la Deutsche Bahn afin d'offrir des voyages qui combinent un trajet ferroviaire entre Stuttgart et Francfort ou Francfort et Cologne, en connexion avec des vols au départ ou à l'arrivée de l'aéroport de cette ville et à destination du reste du monde. Les voyageurs ont la possibilité de réserver un billet unique rail-air en une seule transaction. Ils peuvent enregistrer leurs bagages en arrivant à la gare et bénéficient des mêmes droits que les voyageurs aériens ordinaires en cas de problème, quelle que soit l'entreprise responsable (Lufthansa ou Deutsche Bahn). Si le programme est concluant pour les deux parties, Lufthansa a indiqué à la mission qu'elle comptait développer d'autres accords sur les trajets inférieurs à 2 heures. La compagnie estime pourvoir transférer à terme plus de 10 % de ces vols domestiques vers le rail.

De même, Air France et Thalys (43) ont conclu un accord prévoyant que l'ensemble des clients d'Air France au départ de Bruxelles devant prendre un avion moyen ou long courrier à Paris soit acheminé par train. Pour cela, Air France affrète directement des voitures dans les cinq trains Thalys qui desservent quotidiennement l'aéroport Charles de Gaulle et met en place un guichet et du personnel d'accompagnement à la gare de Bruxelles Midi. Le trajet Thalys est assimilé à un vol Air France dans les systèmes de réservation et les clients ne doivent effectuer aucune réservation supplémentaire. Ils voyagent avec leur seul billet d'avion comme auparavant. Un pré-enregistrement des passagers et des bagages est prévu à la gare de Bruxelles Midi, mais les passagers doivent quand même ensuite se présenter au guichet d'Air France à l'aéroport avec leurs bagages.

Il existe par ailleurs des accords entre la SNCF et certaines compagnies aériennes, sous la marque « TGV'Air », visant à développer et faciliter les acheminements intermodaux air/fer. La SNCF et certaines compagnies aériennes ont négocié ces accords commerciaux qui fixent les conditions de transport (responsabilité des transporteurs vis-à-vis des passagers, quota de places, etc.) et les conditions de commercialisation ( des accords avec la SNCF sur ces destinations : Air France (45), Lufthansa, KLM, United Airlines, American Airlines, Delta Airlines, Emirates, Continental Airlines.

Dans tous ces cas, c'est la compagnie qui préfère renoncer à un acheminement aérien trop déficitaire. Pour Air France, l'objectif de cette suppression était par ailleurs de récupérer des créneaux à Roissy Charles-de-Gaulle. Ainsi, il apparaît une réelle volonté des opérateurs de développer l'intermodalité train-avion, notamment à Roissy Charles-de-Gaulle et Lyon St Exupéry. En 2002, les passagers intermodaux représentaient 1,5 million de personnes à l'aéroport de Charles-de-Gaulle(46), soit 3,11 % du total des passagers aériens de cet aéroport (4,6 % si l'on exclut les passagers aériens en correspondance sur cet aéroport) contre 900 000 en 1999, soit une progression de 66,6 % en 3 ans, ce qui est très encourageant pour le développement de l'intermodalité. Ainsi, selon la SNCF, la gare TGV de Roissy Charles-de-Gaulle dispose d'un très grand potentiel et devrait largement se développer dans les années à venir.

Destinations TGV

Nombre de TGV par jour en 1999

Nombre de TGV par jour en 2002

Bruxelles

5

9

Lyon Part Dieu

7

10

Lille

14

21

Rennes

4

4

Tours

5

6

Montpellier

3

4.5

Source : SNCF

Par ailleurs, selon une enquête réalisée par la Direction générale de l'aviation civile, les passagers intermodaux interrogés en 2002 à l'aéroport Charles-de-Gaulle se rendaient à près de 17 % à Bruxelles, à 15,2 % à Lyon, et à près de 15 % à Lille. Il est à noter que plus de 90 % des passagers intermodaux se sont déclarés satisfaits par cette expérience, même s'ils ont relevé certaines difficultés dans leurs correspondances et dans la signalétique.

- L'intermodalité fret : des évolutions en cours

D'après les informations fournies à la mission, Aéroports de Paris (ADP) ne dispose aujourd'hui que d'une très faible visibilité sur la politique à long terme des opérateurs de fret. Selon l'établissement public, la réorganisation éventuelle, à l'échelle européenne, de la profession pourrait les conduire à revoir leur politique de desserte en déployant et en concentrant leur activité fret sur des plates-formes multimodales spécialisées. Dès à présent, Aéroports de Paris tente de favoriser le développement de moyens de substitution pour le trafic court-courrier ou non captif par l'offre de services ferroviaires rapides. L'analyse statistique des 25 000 mouvements de nuit tout cargo enregistrés à Roissy Charles-de-Gaulle entre 23h00 et 6h00 montre qu'il existe un réel potentiel de report sur des destinations européennes déjà reliées aux lignes à grande vitesse. En 2000, selon Aéroports de Paris, 50 % des mouvements de nuit tout cargo ont été réalisés sur des distances inférieures à 500 km (12 100 mouvements) et 36 % sur des distances comprises entre 500 et 700 km (9 100 mouvements). 50 % des mouvements réalisés à moins de 500 km ont porté sur 5 destinations reliées au réseau TGV (Lyon, Cologne, Londres, Bordeaux et Liège).

Une réflexion est donc engagée sur la création d'une gare intermodale de fret à proximité de Roissy Charles-de-Gaulle. Par ailleurs, Aéroports de Paris développe déjà des partenariats avec des aéroports spécialisés dans ce secteur, comme Liège ou Châteauroux.

Suite aux auditions et aux déplacements que la mission a pu réaliser, il semble que les blocages au développement de ce type de service soient principalement techniques :

1. La faible disponibilité de sillons ferroviaires pour le fret de jour, mais surtout de nuit, en raison notamment des opérations de maintenance uniquement nocturnes opérées sur les lignes à grande vitesse (LGV) françaises.

Le problème est particulièrement critique sur Paris Lyon qui va impossibilité de travailler sur les deux voies à la fois) ;

2. Les difficultés pour accéder aux réseaux des pays communautaires (droits de trafic, compatibilité des infrastructures, disponibilité de trains opérables sur les différents réseaux, etc.).

Les réflexions concernant ce type d'intermodalité sont bien moins avancées que celles concernant les passagers mais elles se développent de façon croissante. Elles revêtent en effet aujourd'hui un intérêt d'autant plus grand que les vols fret, notamment ceux concentrés sur la nuit, sont les plus nuisants pour les riverains des aéroports. Un report croissant de trafic sur le fer permettra de diminuer les créneaux aériens nocturnes et donc les nuisances pesant sur les riverains.

Un accroissement de la substitution modale air-fer

En 2003, les liaisons aériennes françaises concurrencées par le TGV représentent 28 % du trafic passager domestique et 9 % du trafic passager intra-communautaire. Les liaisons aériennes concurrencées par les projets de nouvelles liaisons LGV connus à ce jour représentent par ailleurs 23 % du trafic domestique et 16 % du trafic intra-communautaire, sur la base du trafic 2000.

Selon la SNCF, la mise en service progressive de nouvelles lignes à grande vitesse va continuer à améliorer l'offre de transport ferroviaire, et ramener vers le train des clients qui aujourd'hui s'en sont éloignés du fait de temps de parcours trop longs.

Certains de ces projets permettront des transferts importants de l'avion au fer. On peut notamment citer :

- le TGV-Est,

- le TGV Tours-Bordeaux,

- sa prolongation vers Toulouse.

Certains projets internationaux auront eux aussi un effet important :

- la LGV Londres-Tunnel (CTRL),

- la LGV Bruxelles-Amsterdam (HSL Zuid).

graphique

graphique

Source : SNCF et ministère de l'Equipement

LIGNES TGV EN PROJET

Selon la Direction générale de l'aviation civile, 51 % du trafic aérien domestique de passagers et plus de 25 % du trafic aérien intra-communautaire de passagers feront l'objet d'une concurrence serrée avec le transport ferroviaire en 2020 sur la

millions de voyageurs kilomètres

Sud-Est

8 502

Méditerranée

7 386

Sud-Ouest

5 586

Jonction

5 545

Ouest

4 979

Nord

1 550

Thalys

1 559

Eurostar

2 282

Source : SNCF

Cette concurrence sera principalement concentrée sur les liaisons où la part du mode de transport aérien est importante :

PART DU TRANSPORT AÉRIEN DANS LE TRANSPORT TOTAL (AÉRIEN ET FERROVIAIRE)

EN 2001 PAR RÉGION

graphique

La mise en place de la nouvelle ligne TGV Méditerranée en juin 2001 est un exemple probant de substitution modale, riche d'enseignements pour d'autres liaisons domestiques. Selon les informations fournies par la Direction générale de l'aviation civile, les liaisons aériennes ayant subi un fort impact suite à la mise en service du TGV Méditerranée sont celles pour lesquelles le temps de parcours ferroviaire vers Paris est désormais inférieur à 3h20 (Paris-Marseille, Paris-Montpellier, Paris-Nîmes, et Paris-Avignon).

Sur la ligne Paris-Marseille, où le temps de parcours en TGV est de 3 heures, le trafic aérien a enregistré une baisse de 30 % sur les douze mois suivant l'ouverture de la ligne à grande vitesse. Ce chiffre a été de 23 % sur la ligne Paris-Montpellier, pour un temps de parcours en TGV de 3h20, de 34 % sur la ligne Paris-Avignon pour un temps de parcours de 2h40, et jusqu'à 59 % sur la ligne Paris-Nîmes avec un temps de parcours de 3 heures (ce résultat provient cependant pour partie de la réduction de l'offre d'Air France sur cette liaison dès l'année 2000).

On constate donc que la substitution modale sur les liaisons dont le temps de parcours en TGV est proche de 3 heures est potentiellement très importante. En examinant quelle sont les villes situées à environ de trois heures de Paris en train, et en tenant compte de l'amélioration prévisible des temps de parcours dans les vingt prochaines années, on peut donc en conclure qu'une politique en faveur de la substitution modale pourrait permettre de rationaliser l'utilisation du mode de transport aérien sur des liaisons réalisables en train.

TEMPS DE TRAJET SUR DES LIGNES DIRECTES
AU DÉPART DE PARIS

Données extraites d'un fichier élaboré par le service économique et statistique (SES) de la direction des
affaires économiques et de l'international du ministère de l'équipement, des transports, du logement,
du tourisme et de la mer.

Temps de trajet fer 2000 (minutes)

Temps de trajet fer 2002
(minutes)

Meilleur temps

Temps
moyen

Meilleur
temps

Temps
moyen

IdF- Alsace

Paris - Strasbourg

235

256

232

252

 

Paris - Bâle

290

312

292

325

IdF- PACA

Paris - Nice

392

434

333

348

 

Paris - Marseille

260

270

180

190

 

Paris - Toulon

311

332

230

250

 

Paris - Avignon

202

214

176

197

IdF- Languedoc Roussillon

Paris - Montpellier

257

270

195

208

 

Paris - Perpignan

363

402

285

321

 

Paris - Nimes

231

246

172

184

 

Paris - Beziers

309

330

238

264

 

Paris - Carcassonne

372

404

308

333

IdF- Aquitaine

Paris - Bordeaux

180

193

179

187

 

Paris - Biarritz

297

312

288

314

 

Paris - Pau

309

335

300

324

 

Paris - Périgueux

245

290

246

279

 

Paris - Bergerac

258

288

257

283

 

Paris - Agen

249

280

250

292

IdF- Pays de la Loire

Paris - Nantes

119

129

120

131

IdF- Rhône Alpes

Paris - Lyon

124

125

115

117

 

Paris - Grenoble

180

211

173

194

 

Paris - Annecy

220

239

209

236

 

Paris - St Etienne

170

192

161

185

 

Paris - Chambéry

179

196

169

186

IdF- Midi Pyrénées

Paris - Toulouse

307

341

308

345

 

Paris - Rodez

390

420

387

441

 

Paris - Tarbes

352

392

348

376

IdF- Bretagne

Paris - Brest

254

269

247

271

 

Paris - Quimper

258

278

255

274

 

Paris - Rennes

128

134

123

129

 

Paris - Lannion

252

328

237

260

 

Paris - Lorient

219

236

219

234

IdF- Lorraine

Paris - Metz Nancy

160

176

160

177

 

Paris - Epinal

225

254

228

254

IdF - Auvergne

Paris - Clermont Fd

190

210

189

212

 

Paris - Aurillac

345

366

343

373

IdF - Limousin

Paris - Limoges

171

183

165

184

IdF- Poitou Charentes

Paris - La Rochelle

170

198

170

194

 

Paris - Poitiers

86

96

86

97

graphique

Quel report possible du transport aérien vers le transport ferroviaire en 2020 ?

Lors du débat DUCSAI, la Direction générale de l'aviation civile a fourni une estimation du report de trafic aérien en faveur du TGV s'élevant à 23 millions de passagers en 2020 répartis en :

- 13 millions de passagers annuels reportés par le biais de la substitution modale. Ce chiffre a déjà été intégré de la prévision de trafic de 140 millions de passagers à l'horizon de 2020 sur les aéroports parisiens ;

ESTIMATIONS DES TRANSFERTS SELON LA SNCF (47)

TGV-Est

2 millions de voyageurs

TGV Tours-Bordeaux

2,5 millions de voyageurs

Prolongation TGV Bordeaux vers Toulouse

plus d'un million de voyageurs

LGV Londres-Tunnel (CTRL)

2 millions de voyageurs

LGV Bruxelles-Amsterdam (HSL Zuid)

1 million de voyageurs

Autres projets (augmentation fréquences lignes existantes,
projets allemands, espagnols, etc.)

6 millions de voyageurs

Total (échéance 2020)

Plus de 15 millions de voyageurs

- 3 à 4 millions de passagers reportés par le biais de l'intermodalité. Ce report nécessite des mesures rendant plus attractive l'utilisation du rail, mais non contraignantes ;

- 5 à 8 millions de passagers annuels supplémentaires qui peuvent être reportés par le biais d'une politique plus volontariste, par exemple, l'interdiction de certains vols sur des liaisons à grande vitesse.

Le trafic aérien des aéroports parisiens prévisible en 2020, compte tenu de ces reports, pourrait donc être diminué de 15 à 20 millions de passagers.

Une étude plus récente de la Direction générale de l'aviation civile, en cours de validation, a par ailleurs conduit à une nouvelle estimation de la substitution modale potentielle de passagers de l'avion vers le train à l'horizon 2020, dont les résultats sont décrits dans le tableau suivant :

ESTIMATION DES REPORTS DE TRAFIC
DE L'AÉRIEN VERS LE TGV EN 2020

(en millions de passagers)

Hypothèse de prix

Scénario « prix stables »

Scénario
« prix en baisse »*

Liaisons radiales intérieures

12,6

12,6

Liaisons radiales internationales

9,5

10,7

Ensemble des liaisons radiales

22,1

23,3

* Baisse des tarifs aériens et TGV de 20 % entre 2000 et 2010 et 10 % de 2010 à 2020.

Source : Direction générale de l'aviation civile, 2003

Selon les informations fournies par la Direction générale de l'aviation civile, le scénario « prix en baisse » repose sur une évolution parallèle des tarifs de l'avion et du TGV, dans la mesure où ces derniers seront de plus en plus amenés à évoluer en parallèle à l'avenir. En outre, ce scénario conduit à augmenter la part du trafic du TGV, car selon les calculs de la Direction générale de l'aviation civile, la qualité des infrastructures du TGV permettrait dans ce cas d'augmenter la part de ce mode de transport.

Pour pouvoir comparer ce résultat avec celui issu des travaux menés dans le cadre de la DUCSAI, les spécialistes de la Direction générale de l'aviation civile ont indiqué aux membres de la mission qu'il convenait d'ajouter à cette estimation le report possible de l'avion vers le train par le biais de la complémentarité modale, soit 3 à 4 millions de passagers.

La mission s'interroge sur cette révision substantielle du report potentiel de l'avion vers le TGV en l'espace de deux ans, ce qui semble ouvrir la porte à une vraie réflexion politique sur la multimodalité à l'horizon de 20 ans.

·

· ·

Pour conclure, il convient d'indiquer qu'un groupe de travail sur la complémentarité entre le transport aérien et le transport ferroviaire rapide a été créé par la Direction générale de l'aviation civile et la Direction des transports terrrestres le 12 avril 2002. Il doit examiner les possibilités de développement d'une offre de substitution au transport aérien et les moyens de valoriser la complémentarité intermodale, à l'horizon de 3, 10 et 20 ans.

Ce groupe de travail est présidé par Michel Guyard, chef de l'IGACEM (48). En l'état des travaux du groupe, comme M. Guyard l'a exposé à votre mission, les éléments suivants peuvent être mis en évidence :

- Il convient tout d'abord de ne pas oublier que les services des compagnies aériennes à bas prix connaissent un fort succès qui concurrence le chemin de fer sur des marchés qu'il pensait acquis.

- A l'horizon 2020, les capacités ferroviaires offertes risquent de limiter sur certains tronçons les possibilités de report, tout au moins sans politique d'investissements volontariste.

- Le transfert systématique sur le TGV de voyageurs en correspondance à Roissy Charles-de-Gaulle p&ea techniques ou organisationnels - qui peuvent être surmontés et devront l'être rapidement, et auxquels elle tentera d'apporter des solutions par ses propositions.

III. - L'OFFRE AÉROPORTUAIRE : DES CAPACITÉS CONTRAINTES, POTENTIELLEMENT SATURÉES ET MAL UTILISÉES

Synthèse :

La croissance du trafic aérien français, mais également européen, fait craindre, une saturation des principales plates-formes. Parallèlement, l'augmentation des nuisances liées à celle du trafic entraîne une sensibilité environnementale croissante des riverains des aéroports.

Rappelons que le mode de calcul de l'offre aéroportuaire, c'est-à-dire la mesure des capacités d'une plate-forme, est déterminant pour évaluer l'état de saturation des plates-formes, mais également fort complexe.

Nos voisins européens, comme nous, ont réagi en mettant en place un certain nombre de réglementations à la fois préventives (urbanisme réglementé) et curatives (insonorisations, rachats, indemnisation, restrictions d'exploitation, etc.) autour des aéroports).

Pour autant, les solutions mises en œuvre en France ne semblent pas aujourd'hui totalement satisfaisantes puisqu'elles n'ont pas permis de réduire sensiblement la gêne ressentie par les riverains de ces aéroports en forte croissance. En Ile-de-France, plus de deux millions de personnes (49) sont survolées à moins de 3 000 mètres. Cette situation explosive ne saurait perdurer. Dans le même temps, la multiplication de réglementations nationales et européennes contraint un peu plus des plates-formes déjà proches de la saturation.

Rappelons enfin que, malgré tout, l'Europe, comme la France, disposent de réserves de capacité encore exploitables.

Le transport aérien français connaît aujourd'hui, comme souligné précédemment, une croissance du trafic et, depuis la mise en place du hub d'Air France à Roissy Charles-de-Gaulle, des modifications structurelles, avec le développement important de cet aéroport et celui, corrélatif, des fréquences de décollage et d'atterrissage, du fait de la mise en place de navettes pour alimenter le hub.

Cette évolution n'est pas uniquement française et fait craindre, notamment en Europe, une saturation rapide de ces plates-formes pivots, d'autant plus que l'augmentation des nuisances liée à celle du trafic et la sensibilité environnementale croissante des riverains des aéroports constituent une contrainte non négligeable et aujourd'hui reconnue par les autorités. Pour autant, les solutions mises en œuvre ne semblent pas totalement satisfaisantes, puisqu'elles n'ont pas permis de réduire sensiblement la gêne ressentie par les riverains de ces a&eacu France, avant d'évaluer l'état actuel des capacités aéroportuaires en Europe et en France et la probable saturation de certaines plates-formes pivots dans les années à venir, alors que d'autres sont sous-exploitées.

A.- LA MESURE DE L'OFFRE AÉROPORTUAIRE : UN CONCEPT COMPLEXE

La capacité ou offre aéroportuaire est définie comme le flux d'avions ou de passagers qu'un aéroport est en mesure d'écouler. Cette définition semble a priori simple et de bon sens, mais elle recouvre des notions variées et les nombreux paramètres à prendre en compte la rendent d'autant plus difficile à manier.

En effet, comment comprendre que l'aéroport de Lyon, avec deux pistes, ne comptabilise que 5 millions de passagers et 95 000 mouvements par an, alors que l'aéroport de Manchester écoule un trafic de 15 millions de passagers et de 144 000 mouvements avec une seule piste ? Comment expliquer que Roissy Charles-de-Gaulle écoule 48,3 millions de passagers et 502 000 mouvements avec 4 pistes, alors que Londres-Heathrow totalise plus de 63 millions de passagers et 466 000 mouvements avec deux pistes ?

La capacité aéroportuaire est devenue récemment un élément majeur du débat sur l'évolution des infrastructures aéroportuaires en France. La comparaison des capacités est un argument commercial de poids pour les plates-formes, alors que toute augmentation de capacité fait généralement l'objet de débats houleux avec les élus locaux et les riverains de l'aéroport.

La capacité de développement d'un aéroport peut être calculée en faisant la différence entre sa capacité maximale et son trafic actuel. Ce potentiel pourra intéresser une compagnie désirant développer son hub. D'un autre côté, elle est potentiellement source de nuisances si elle est mal maîtrisée. La notion de capacité maximale est donc largement subjective. Elle est en général plus proche de la notion de capacité déclarée que de celle de capacité théorique.

Il est aisé de retrouver les différents éléments du débat dans les nombreux rapports publiés sur le sujet. Comme le soulignait déjà l'association Sanaterra (51) dans son étude complémentaire au débat DUCSAI, les aéroports de Roissy Charles-de-Gaulle et d'Orly « disposent d'une réserve de capacité physique, mais leur développement est contraint par la pression des riverains. Toutefois, il semble que l'utilisation actuelle de ces aéroports qui résulte en grande partie de la stratégie commerciale des compagnies en réaction à la libéralisation, ne soit pas optimale : il serait possible d'accueillir un trafic supérieur en termes de passagers sans dégrader, voire en améliorant, l'environnement des riverains ».

De même, dans son rapport public 2002 ( ».

Mais, dans ce rapport, la Cour des Comptes effectue une évaluation quantitative des réserves de capacité, en oubliant que, « au-delà des résultats de ces calculs techniques, il convient de tenir compte également des limitations environnementales, dans le cas des aéroports parisiens en particulier, pour évaluer les capacités disponibles » (53).

1. La capacité aéroportuaire théorique

Il s'agit « du débit horaire maximal de mouvements d'aéronefs qui peut être écoulé par le système de piste(s) dans le respect des contraintes de circulation aérienne quand la demande de trafic est continue à l'arrivée et au départ » (54).

C'est la capacité qui serait disponible dans une situation « idéale » (pas de retard, organisation optimale de la file d'attente à l'arrivée et au départ par le régulateur du trafic, pas de perturbation extérieure, notamment météorologique). Elle est exprimée en mouvements d'avions par heure.

2. La capacité aéroportuaire opérationnelle

Le service technique des bases aériennes la définit comme le « débit horaire maximal d'aéronefs qui peut être écoulé par le système de piste(s) au cours d'une période de pointe, en considérant ses pratiques d'utilisation, compte tenu d'un retard des vols acceptable pour les opérateurs ».

Cette définition correspond donc plus à la réalité du fonctionnement d'un aéroport. Elle recouvre trois aspects de ce fonctionnement :

- une pointe de trafic donnée, caractéristique par sa durée et sa structure :

La structure du trafic dépend de la répartition des vols dans la journée (pointes et densité), des types d'appareils utilisés (vitesse de vol différente, espacements entre appareils et temps d'utilisation des pistes différents) et de la répartition entre arrivées et départs. Ces paramètres influencent directement la capacité d'un système d'infrastructures donné, mais dépendent largement de l'organisation du marché du transport aérien. Les leviers d'action sur celui-ci sont très limités.

- des pratiques d'utilisation du système de piste(s) dépendant de la qualité de son alimentation et des marges de sécurité en vigueur :

La qualit& 160;doublet parallèle rapproché » (cas de Montpellier) ;

- de deux pistes croisées, nommées « doublet sécant » (cas de Lille) ;

- de trois pistes (dont une de secours) non parallèles (cas d'Orly) ;

- de deux doublets parallèles rapprochés (cas de Roissy Charles-de-Gaulle).

Les règles internationales et communautaires en vigueur imposent, pour des raisons de sécurité, des règles d'espacement en vol et au sol, en fonction des caractéristiques géographiques du site, de la qualité des instruments dont disposent les contrôleurs, du nombre de contrôleurs en poste à un moment donné, etc.

Si certains des éléments pris en compte sont intangibles (les caractéristiques du site) ou uniformes à une époque donnée (les normes de sécurité et les pratiques techniques), d'autres sont susceptibles d'évoluer s'il devient nécessaire d'augmenter la capacité (aides techniques à la gestion du trafic, plus grand nombre de contrôleurs en poste, etc.).

- un niveau de qualité de service (retard moyen des vols) acceptable pour les exploitants :

Ainsi, par exemple, les compagnies atterrissant et décollant d'Heathrow ont signé avec British Airports Authority (BAA) et le National Air Transport Service (NATS) un accord de service par lequel elles acceptent un retard moyen de 10 minutes au départ et à l'arrivée, ce qui permet à l'aéroport londonien de gérer un plus grand stock d'avions, en les faisant patienter, en vol, dans des « réservoirs » autour de l'aéroport et au sol. Mais cette augmentation de capacité est réalisée au détriment de la qualité de service puisque 29 % des vols au départs d'Heathrow subissent un retard supérieur à 15 minutes, ainsi que 34,4 % des vols à l'arrivée (55), ce qui situe Heathrow en 2ème position des taux de retards par aéroports en Europe (derrière Madrid, à 33,1 % et 32,4 % respectivement). Cette politique n'est pas celle retenue en France, et les aéroports parisiens sont mieux situés dans ce classement (Roissy Charles-de-Gaulle en 6ème position avec respectivement 25 % et 27 % et Orly en 12ème position avec 22,5 % et 30,2 %).

Dans ce cadre, on retient couramment un rendement (rapport entre capacité opérationnelle et capacité théorique) de l'ordre de 70 à 80 % pour les plates-formes peu contraintes et un rendement de l'ordre de 90 % pour les aéroports parisiens, où la pression est plus forte. Une augmentation du rendement peut donc signifier aussi bien une amélioration de la gestion des flux qu'une dégradation de la qualité de service (par création d'une file d'attente, comme à Londres Heathrow).

On peut noter qu l'ensemble des éléments permettant le bon fonctionnement de la chaîne aéroportuaire.

Cette capacité est définie comme « le débit maximal de trafic que l'aéroport est en mesure d'accepter, en prenant en compte l'ensemble des éléments de la chaîne aéroportuaire - espace aérien terminal, système de piste(s), voies de circulation, aire de stationnement, aérogare, accès routier et ferroviaire-, ainsi que certaines contraintes extérieures (notamment environnementales) » (56).

La capacité déclarée peut donc être considérée comme la capacité aéroportuaire opérationnelle « contrainte » par différents paramètres, parfois extérieurs à la gestion aéroportuaire (pression environnementale, desserte routière et ferroviaire notamment). Or, ces derniers ont pris une importance considérable au cours de la dernière décennie, comme souligné ci-après.

Il s'agit donc de l'objectif affiché par l'aéroport, et non d'une donnée théorique comme les deux précédentes. Elle diffère généralement de la capacité opérationnelle. Sur les aéroports contraints, et donc coordonnés (57), on introduit souvent la notion de capacité de programmation, variante de la capacité déclarée.

4. Capacité horaire et capacité annuelle

On ne passe pas de façon uniforme d'une capacité annuelle (généralement exprimée en nombre de passagers par an) à une capacité horaire de pointe (plus souvent exprimée en nombre de mouvements d'avions par heure).

La capacité annuelle en nombre de mouvements est directement liée à la capacité horaire opérationnelle mais cette relation est variable selon les aéroports, essentiellement en fonction de la structure du trafic selon les heures de la journée (nombre d'heures de pointe dans la journée, nombre de jours de pointe dans l'année, typologie des vols- fret, mixte ou seulement passagers d'une part, répartition des vols commerciaux et non commerciaux d'autre part (aviation générale et d'affaires, constructeurs aéronautiques), qui utilisent différemment les services aéroportuaires).

La capacité annuelle en nombre de mouvements est alors transformée en capacité annuelle passagers par une évaluation de l'emport moyen des avions des compagnies opérant sur l'aéroport (58).

Le cahier de base du débat DUCSAI soulignait déjà ce paradoxe : « Selon les aéroports, la capacité peut donc sensiblement varier du fait de la nature même du trafic. Ainsi, à capacités opérationnelles horaires égales, un aéroport

B.- UNE OFFRE AÉROPORTUAIRE DE PLUS EN PLUS CONTRAINTE

Le développement aéroportuaire est aujourd'hui largement contraint, en Europe comme dans l'ensemble des pays développés, par une sensibilité plus grande des populations riveraines des aéroports aux questions environnementales. Dans ce cadre, depuis de nombreuses années, un certain nombre de mesures réglementaires, et de recommandations, ont été prises tant au niveau international (annexes de l'OACI) qu'au niveau national, la question du bruit étant, entre toutes, la plus sensible.

Ainsi, par exemple, en France, la réglementation « environnementale » aéroportuaire, est bien focalisée sur la politique de lutte contre le bruit au voisinage des aéroports, et repose actuellement sur un ensemble de textes législatifs et réglementaires, dont trois lois constituent la base :

- la loi n° 85-696 du 11 juillet 1985 relative à l'urbanisme au voisinage des aérodromes, institue, à titre « préventif », les plans d'exposition au bruit (PEB) qui permettent de limiter l'urbanisation au voisinage des aérodromes. Ses dispositions ont été intégrées aux articles L.147-1 à L.147-6 du code de l'urbanisme ;

- la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit, organise, à titre « curatif », un dispositif d'aide aux riverains dans le cadre de plans de gêne sonore (PGS). Ses dispositions sont intégrées au code de l'environnement ;

- la loi n° 99-588 du 12 juillet 1999 (59) a créé une autorité indépendante de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA) afin d'améliorer la transparence et la concertation sur les questions aéroportuaires.

Par ailleurs, plus récemment, la sensibilité environnementale et une évaluation plus précise des coûts environnementaux et sociaux du trafic aéroportuaire, ont conduit un certain nombre de pays à mettre unilatéralement en place des restrictions croissantes d'exploitation sur leurs principaux aéroports, massivement situés dans des zones urbanisées et donc les plus contraints. En réponse, l'OACI et la Commission européenne ont émis des recommandations précises listant les mesures à mettre en œuvre afin de préserver l'équilibre aéroportuaire tout en réduisant au maximum les nuisances subies par les riverains.

1. De nombreuses exigences environnementales à respecter

a) La difficile réduction du bruit à la source

- Des progrès très importants au cours des vingt dernières années. Ceux-ci ont commencé à équiper, dans les années 80, les familles d'avions moyen-courriers mono couloirs de type Airbus A320 et Boeing 737 (61).

Dans le domaine du bruit, selon les informations fournies à la mission d'information par la Snecma, la surface de l'empreinte acoustique au sol a été divisée par sept en trente ans. Ainsi, pour un avion de 100 places, la surface de la zone exposée à un niveau de 85 décibels est de 0,9 km² aujourd'hui contre 6,5 km² en 1970. En tendance, le gain a été de un décibel par an sur la période 1970-1990. Durant les années 90, l'optimisation des technologies a permis de continuer à progresser mais sur un rythme plus lent, de 0,5 décibel par an.

Le schéma ci-dessous résume ces évolutions, en comparant les empreintes de bruit provoquées par le décollage d'un Boeing 727, dans sa version d'origine, de deux versions plus tardives d'un même B727 et d'un Boeing 757, appareil très récent, qui répond à la fois aux normes OACI « chapitre 3 » et « chapitre 4 » :

graphique

Au total, les progrès réalisés sur les moteurs d'avion à réaction ont permis de réduire les émissions de bruit des nouveaux types d'avion d'une vingtaine de décibels en trente ans.

- Des programmes de recherche ambitieux

Les prochaines générations, comme celle de l'Airbus A380, vont continuer à bénéficier d'améliorations nouvelles. Celles-ci porteront encore sur les moteurs mais aussi sur le bruit des turbulences aérodynamiques autour de l'avion et sur l'allègement de l'avion. C'est en effet ce type de bruit qui devient prédominant à l'atterrissage du fait de moteurs aujourd'hui plus silencieux.

Dans ce cadre, d'importants programmes de recherche sont menés en Europe et aux Etats-Unis qui garantissent que ces progrès seront poursuivis. Ainsi, au niveau européen, l'industrie aéronautique s'est regroupée au sein d'ACARE (Advisory Council for Aeronautical Research in Europe), afin de définir les objectifs de progrès à l'horizon 2020.

La « feuille de route » qui en est ressortie, appelée « Vision for 2020 », se donne comme objectif une division du niveau du bruit par deux par rapport aux standards actuels (62).

De même, en France, Snecma consacre, sur ses fonds propres, plus du quart de son budget de recherche - développement, à des programmes qui ont des effets directs sur l'environnement, que ce soit le bruit, la consommation, la pollution, ou bien les matériaux et procédés de fabrication. Sur dix ans, Snecma a engagé plus de 200 millions d'euros dans des programmes de recherche, afin de réaliser des progrès sensibles au cours des dix prochaines an d'euros sont consacrés au programme « SILENCE(R) » sur cinq ans (2001-2005) (63). Ce programme, lancé le 1er avril 2001, dont la Snecma est chef de file, est le plus vaste projet de recherche européen jamais lancé en matière de bruit des avions.

Il implique 51 partenaires européens et vise une réduction du bruit de six décibels au décollage et à l'atterrissage (soit dix-huit décibels en cumul pour les trois points de contrôle correspondant à la réglementation internationale) en 2008.

De nombreux autres programmes européens de recherche visent également, plus ou moins directement, à réduire les nuisances sonores aéroportuaires :

JEAN (jet exhaust aerodynamics and noise) et TURBONOISECFD (Turbomachinery noise source CFD models for low noise aircraft engine designs) :

Développement de codes de calcul aéro-acoustiques pour une conception silencieuse des composants des moteurs (systèmes d'éjection des gaz pour JEAN et turbomachines pour TURBONOISECFD.

RAIN (reduction of airframe and installation noise) :

Réduction du bruit aérodynamique cellule (trains d'atterrissage, volets d'aile)

RANNTAC (reduction of aircraft noise by nacelle treatment and active control) :

Technologies nacelle pour la réduction d bruit (traitements acoustiques avancés, contrôle actif du bruit)

RESOUND (reduction of engine source noise through understanding and novel design) :

Réduction du bruit du moteur (conception silencieuse des soufflantes, contrôle actif du bruit)

SOURDINE (study of optimisation procedures for decreasing the impact of noise) :

Optimisation des procédures opérationnelles à moindre bruit

Source : site Internet de la DG Transports - Commission européenne

- Une réduction du bruit à la source encore possible mais marginale

Comme l'a rappelé la Snecma lors de son audition par la mission, l'une des caractéristiques essentielles de l'industrie aéronautique est la durée de ses cycles. Un grand programme moteur (de type CFM56) peut avoir une durée de vie de plus de cinquante ans. Quant à la maturation technologique, elle exige un minimum de dix à quinze ans. Aussi la technologie ne peut apporter qu'une réponse progressive, au rythme de son introduction dans la flotte en service.

Par a réfléchir à des moteurs plus lourds et de plus grand diamètre, mais plus défavorables en termes de consommation de carburant. Il est donc essentiel de bien hiérarchiser les priorités en matière d'environnement, car elles conditionneront non seulement le dimensionnement des budgets de recherche, mais également la sélection d'architectures moteur et de technologies adaptées.

L'exemple de l'A380 est, à cet égard, significatif. Il fallait en effet qu'Airbus conçoive un appareil qui puisse se poser partout (problème du Quota Count à Londres, mais également aujourd'hui des seuils envisagés à Roissy Charles-de-Gaulle). Pour atteindre cet objectif de bruit et les normes très strictes définies au « chapitre IV » de l'annexe 16 de la Convention de l'OACI, c'est la première fois dans l'histoire de l'industrie aéronautique que l'on a dévalorisé la performance énergétique de l'appareil (augmentation de la consommation de carburant).

La performance sonore de l'A380 est remarquable. En effet, dans le cadre de la réglementation OACI, la norme de bruit de chaque appareil est calculée en fonction de sa masse au décollage, avec un plafond de bruit maximal déterminé par la masse du B747 que l'on considérait à l'époque comme l'avion le plus lourd envisageable. Ainsi, l'A380 ne bénéficiant pas de l'augmentation de bruit attachée à l'augmentation de masse excédant celle du 747, il se voit pénalisé et, avec 285 tonnes de plus que l'A340-300, il aura une performance sonore identique.

b) La réglementation du bruit des avions

Agir sur les flottes d'avions pour diminuer les nuisances sonores suppose en effet de pouvoir mesurer le bruit des appareils. En la matière, la réglementation est largement internationale, puisqu'elle a été mise en place par l'OACI (64), par le biais de la certification acoustique.

- Les normes de l'OACI

La certification acoustique consiste à mesurer le bruit selon des procédures très rigoureuses et reconnues par tous au plan international. Ces procédures précisent par exemple la position des enregistreurs (permettant de mesurer le niveau de bruit à différentes étapes de l'utilisation des appareils), la météo acceptable, le poids de l'avion, le bruit ambiant maximal acceptable... De plus, ces mesures sont effectuées directement par les États ou sous la surveillance étroite d'experts internationaux.

Ces mesures permettent de classer les avions en fonction de leur niveau de bruit. Les avions à réaction sont aujourd'hui classés en quatre catégories :

- Les plus anciens d'entre eux sont dits « non certifiés ». Ces avions ont en général été retirés de la circulation depuis de nombreuses années ;

Par ailleurs, sans attendre cette échéance, il peut déjà être utilisé pour certifier ou re-certifier les avions actuellement les plus modernes et qui peuvent donc briguer ce plus haut « diplôme » acoustique (Boeing 757 ou Airbus 380 par exemple).

La classification OACI permet d'avoir une action globale sur les flottes : elle incite les constructeurs à faire des efforts et les compagnies à s'équiper de modèles modernes.

Si l'on s'appuie sur cette classification internationale, des progrès sensibles ont été réalisés : ainsi, en 1989, selon Aéroports de Paris, 2,57 % des mouvements à Roissy Charles-de-Gaulle étaient le fait d'appareils non certifiés, 36,54 % d'appareils « chapitre 2 » et 57,89 % d'appareils « chapitre 3 ». En 1999, 93,36 % des mouvements ont été réalisés par des appareils « chapitre 3 », seulement 6,46 % par des appareils « chapitre 2 » et 0,19 % par des appareils non-certifiés. En 2003, ce sont quasiment 100 % des vols qui sont réalisés en « chapitre 3 ».

De nouvelles dispositions sont débattues au sein de l'OACI pour restreindre l'usage des avions « chapitre 3 » les plus bruyants. Parmi ces avions figurent des avions initialement « chapitre 2 » qui ont été munis de « hushkits », c'est-à-dire d'atténuateurs de bruit, de façon à atteindre les limites du chapitre 3.

Au niveau européen, la réglementation a suivi les évolutions de certification puisque les avions non certifiés ont été interdits d'exploitation dès 1989, alors que l'adjonction d'avions « chapitre 2 » à une flotte européenne a été interdite en 1990. La directive n° 92/14 (CEE) du 2 mars 1992 (67) a ensuite imposé leur retrait progressif d'exploitation. Ce retrait est achevé depuis le 1er avril 2002.

Le règlement n°2408/92 (CEE) du 23 juillet 1992 (68) avait pour sa part autorisé, sans le rendre obligatoire, le retrait anticipé des appareils « chapitre 2 » sur les aéroports européens en période nocturne. Il en était de même pour les avions « hushkittés ».

Enfin, le 29 avril 1999, l'Union européenne a adopté un règlement n° 925/99 (CEE) (69) qui interdit de nouvelles immatriculations d'appareils munis de « hushkits » à partir du 4 mai 2000.

- Les limites des indicateurs de mesure du bruit

Les normes OACI, décrites précédemment (70) cherché à élaborer des « indices d'exposition au bruit » des avions plus proches du ressenti des riverains des aéroports.

Cet indicateur est un outil mathématique, qui sert à représenter une situation réelle complexe, et doit permettre une mesure et des comparaisons de la situation du bruit en différents points géographiques (72), à différents moments de la journée et de l'année. Lorsqu'il est annuel, il sert le plus souvent à définir les zones « nuisantes » autour des aéroports, permet de préciser les règles d'urbanisme dans ces périmètres et d'ouvrir droit à des aides financières pour l'isolation. La précision et la justesse du calcul sont donc très importantes.

Un indice annuel d'exposition au bruit est calculé en 4 étapes :

1. On choisit d'abord une unité pour mesurer le niveau de bruit instantané :

Il existe différentes unités pour mesurer le niveau de bruit instantané :

·__Le dB(A) : Décibel (73) pondéré A. Pondération des fréquences en fonction de la sensation physiologique de bruit. Cette unité est construite pour représenter une sensation d'intensité sonore (l'oreille étant plus sensible aux sons aigus qu'aux sons graves).

Source

Fréquence de l'intensité sonore

Poids lourd sur autoroute à 10 m

92 dB (A)

TGV à 300 km/h à 100 m

89 dB (A)

Automobile sur autoroute à 10 m

84 dB (A)

A330 pendant le décollage à 700 m

80 dB (A)

A320 pendant le décollage à 300 m

80 dB (A)

Rue animée

75 dB (A)

Automobile au ralenti à 30 m

58 dB (A)

Source : site Internet de la Direction générale de l'aviation civile

·__Le PNdB : Perceived Noise Decibel. Pondération des fréquences en fonction de la gêne induite (forte pondération des fréquences moyennes à élevées, qui sont les plus génératrices de gêne). C'est l'unité retenue par la France.

2. On choisit ensuite un « descripteur d'évènement » :

Là encore, plusieurs possibilités existent :

·__Soit on retient un niveau de crête (lorsque le bruit est à son maximum), solution retenue par la France :

- La max : niveau maximum de la crête en dB(A)

- PNL max : niveau maximum de la crête en PNdB (descripteur français).

·__Soit on considère le niveau représentatif de la « dose de bruit » pendant le passage d'avion :

- SEL : niveau constant en dB(A) pendant 1 seconde véhiculant la même énergie que le niveau réel fluctuant sur la durée ;

- Laeq (t) : niveau constant en dB(A) pendant une durée t véhiculant la même énergie que le niveau réel fluctuant sur cette même durée t ;

- EPNdB : Effective Perceived Noise Decibels. Niveau, exprimé en PNdB, prenant en compte la durée pendant laquelle le niveau de bruit est supérieur à 10dB. L'EPNdB est l'unité de base pour la certification des avions à réaction et se caractérise par une forte pondération des fréquences moyennes à élevées fortement génératrices de gêne.

3. On choisit un modèle de cumul pour l'indice quotidien.

- _en _choisissant une durée d'exposition (durée sur laquelle l'exposition au bruit est calculée), généralement égale à 24h (cas français) ;

- en découpant cette durée d'exposition en plusieurs périodes distinctes (en France, période de jour de 6h00 à 22h00 et période de nuit de 22h00 à 6h00) ;

- en appliquant des pondérations pour certaines périodes (facteur pondérant de 10 pour la nuit en France) ;

- en cumulant les impacts sonores produits par chaque mouvement ;

Indice

Descripteur 
d'événement

Pondération soirée

Pondération nuit

Pays utilisateurs 
(exemples)

IP

PNLmax

1

10

France

LAEQ

SEL en dB(A)

1

1

Royaume-Uni

LDN

SEL en dB(A)

1

10

USA

LDEN

Laeq en dB(A)

5

10

Pays scandinaves

Source : Ministère de l'environnement

4. On choisit enfin une journée de référence pour le calcul de l'indice annuel :

En France, on calcule le trafic moyen sur les douze mois de l'année.

L'indice actuellement utilisé en France est appelé « indice psophique » (IP) et est sensé caractériser la gêne sonore correspondant au bruit moyen perçu pendant une année en un point donné. Cet indice n'étant pas considéré comme satisfaisant, il va être remplacé par un indice calculé en Laeq. Mais l'utilisation d'outils acoustiques pour caractériser la gêne sonore se heurte, en France comme dans d'autres pays, à la différence entre le bruit calculé et la gêne ressentie.

c) La réglementation de la pollution

Au cours des trente dernières années, l'impact de l'aviation sur l'atmosphère a été mieux évalué, notamment grâce à de très nombreux travaux scientifiques en France et au niveau international (74). Dans ce cadre, et notamment pour tenir compte des conséquences des émissions polluantes sur l'effet de serre, les émissions des réacteurs d'avion font l'objet de normes de certification de l'OACI depuis 1981 (75). La troisième partie de cette annexe définit ces normes.

Les produits qui résultent de la combustion du kérosène dans les moteurs sont les mêmes que pour tout moteur à combustion : gaz carbonique, vapeur d'eau, oxydes d'azote (Nox), composants organiques volatils, oxyde de carbone, dioxyde de soufre et fumées. Les normes de l'OACI portent sur les oxydes d'azote (NOx), les composés organiques volatils, le monoxyde de carbone et les fumées. Le kérosène contenant du soufre et sa combustion produisant donc du dioxyde de soufre, c'est la teneur en soufre du kérosène qui est normalisée (76).

Par ailleurs, l'OACI a adopté, en 1999, sur proposition de la France et de ses partenaires européens, une nouvelle norme d'émission des oxydes d'azote pour les nouveaux moteurs certifiés à partir du 31 décembre 2003. Cette norme représente une réduction de 16 % par rapport à la norme précédente applicable depuis le 1er janvier 1996.

Au niveau européen, la réglementation concerne plus globalement l'air ambiant et introduit un certain nombre de taux plafonds. L'ensemble des mesures aujourd'hui mises en œuvre dans ce domaine découle de la directive n° 96/02 (CEE) du 27 septembre 1996 concernant l'évaluation et l style="font-family: 'Arial'; font-size: 10pt">Sur une grande plate-forme aéroportuaire il est aujourd'hui indispensable de mettre en œuvre un dispositif très complet (77) de recueil et de traitement des pollutions afin de protéger les milieux naturels. La pollution du site peut en effet provenir de trois sources :

- la pollution chronique est provoquée par différents types de dépôts sur les sols : gaz d'échappement, maintenance et avitaillement en carburant, exercices d'incendie, nettoyage des véhicules au sol, lavage des zones de stationnement, traces de caoutchouc dues à l'usure des pneus des avions, etc. ;

- la pollution saisonnière est liée à l'élimination du verglas sur les aires de stationnement et de circulation et au dégivrage des avions ;

- la pollution provoquée par des accidents (déversement de carburant ou d'autres substances).

Par ailleurs, les eaux de ruissellement des aérodromes sont soumises au cadre réglementaire défini aux articles 19 à 30 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau (78), aujourd'hui intégrés au code de l'environnement. Moyennant des traitements relativement simples, tels que ceux mis en œuvre à Orly et à Roissy Charles-de-Gaulle, elles satisfont les normes de rejet les plus sévères.

Enfin, concernant la protection des espèces naturelles, il convient de rappeler que l'aéroport constitue un écosystème, certes original, mais qui fait, comme tout écosystème, l'objet de protections particulières (79). Ainsi, plus de seize aérodromes français font partie des Zones Importantes pour la Conservation des Oiseaux (ZICO) en Europe (notamment Montpellier, Nîmes ou Colmar). La lutte contre le péril aviaire (80) doit donc tenir compte de ce cadre réglementaire complexe et utiliser des méthodes reconnues et non dommageables pour l'écosystème (lutte écologique, visant à supprimer ce qui attire l'animal sur l'aéroport, effarouchement, etc.).

 Suite du rapport

N° 1016 - Rapport d'information sur l' avenir du transport aérien français et la politique aéroportuaire (M. Yannick Favennec)

1 () Le responsable de la DUCSAI, M. Pierre Zémor, a cependant d'emblée considéré que la candidature de Vatry était « ambiguë », dans la mesure où le projet du Conseil général de ce département portait essentiellement sur la récupération d'une partie du fret traité par Roissy Charles-de-Gaulle.

2 () Rappelons que la distance entre Tokyo et Narita (67 km) ou entre Montréal et Mirabel (60 km) a été jugée critique par les usagers et surtout par les opérateurs du transport aérien.

3 () Rapport d'information n° 1671 de M. Jean-Pierre Blazy, député, au nom de la commission de la production et des échanges de l'Assemblée Nationale, « Réconcilier développement aéroportuaire et qualité de l'environnement », 1999.

4 (1) Cf. Note de synthèse et d'actualité de la Direction des transports aériens/SDEEP, Direction générale de l'aviation civile, « Le transport aérien dans la tourmente », avril 2003.

5 () Au niveau européen, outre l'activité propre à l'Union européenne, la Conférence Européenne de l'Aviation Civile (CEAC) est une instance de concertation pour les directeurs généraux de l'aviation civile. De leur côté, les compagnies européennes sont regroupées au sein de l'AEA (pour les grandes compagnies) et de l'ERA (pour les compagnies régionales).

6 (1) Accord dit "Bermudes I", renégocié en 1977 dans le cadre de la libéralisation du trafic international.

7 () United, American, Delta, Northwest, US Airways, Continental, America West, Alaska Airlines, ATA, Southwest Airlines.

8 () Technique d'optimisation des revenus totaux de la société, par le biais d'une gestion plus fine de la recette unitaire, grâce à un contrôle et un ajustement simultanés de l'offre et de la demande (contrôle de la demande par l'ajustement des prix et les restrictions à la réservation et contrôle de l'offre par l'ajustement des capacités disponibles).

9 () Ce qui signifie en particulier que son capital est détenu à plus de 50 % par des capitaux communautaires.

10 (2) C'est-à-dire de « deux aéroports ou plus regroupés pour desservir la même ville ou conurbation » (par exemple, système aéroportuaire parisie administrations de l'aviation civile et des responsables militaires de la navigation aérienne des États membres de la Communauté, ainsi que de représentants de la Suisse et d'Eurocontrol.

15 () Voir le rapport n° 392 de M. Thierry Mariani, député, au nom de la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale, « L'Europe de la navigation aérienne peut-elle prendre son envol ? », 21 novembre 2002.

16 () Note de synthèse et d'actualité de la Direction des transports aériens/SDEEP, Direction générale de l'aviation civile, « Le transport aérien dans la tourmente », avril 2003.

17 () Voir perspectives d'évolution de la demande (II).

18 () Résultat net au premier semestre 2003 (en milliards de dollars) : United ( - 1,3), American (- 1,04), Delta (-0,47), Northwest (- 0,4), US Airways (- 0,28), Continental (- 0,22), America West (- 0,062), Alaska Airlines (- 0,056), ATA (- 0,011), Southwest Airlines (+ 0,024).

19 () Licenciements, réduction des autres coûts, immobilisations d'avions, annulation de commandes, etc.

20 () A titre de comparaison, le chiffre d'affaires de Ryanair Holdings est sur la même période de 1 112 millions d'euros et celui du groupe Easyjet de 1 299 millions d'euros.

21 (1) Note de synthèse et d'actualité de la Direction des transports aériens/SDEEP, Direction générale de l'aviation civile, « Le transport aérien dans la tourmente », avril 2003, p. 6.

22 (1) Cet accord commercial de partage de codes sur le continent nord-américain envisage une extension à leurs alliées européennes respectives.

23 (1) Voir glossaire.

24 () Cf. Etude ACI Europe sur l'impact économique et social des aéroports, « Emploi et prospérité en Europe », septembre 1998.

25 () Rapport d'information n° 2797 de M. Charles Fèvre, député, au nom de la commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale, « Le ciel peut-il attendre », 21 mars 1996.

26 () Financé par une taxe sur les activités aéroportuaires, un prél&egra France, sur ses lignes domestiques, utilise en moyenne ses avions 9,46 heures par jour pour 7 vols et, sur ses lignes Europe, 9,84 heures pour 5 vols journaliers.

30 () Contre 5,87% en moyenne pour les compagnies aériennes américaines.

31 () Mais les tarifs sont d'autant plus bas que les passagers effectuent la réservation longtemps à l'avance. Tous les tarifs ne sont donc pas réduits, contrairement à ce qu'annoncent ces compagnies, d'autant plus que les prix affichés n'incluent en général ni les redevances et taxes applicables, ni les frais annexes (paiement par carte bancaire par exemple).

32 () Incluant Beauvais.

33 (1) L'étude est restreinte aux services assurés par les compagnies étrangères touchant la France ; elle couvre les liaisons internationales et intérieures. Elle ne traite pas du trafic de la compagnie Air Lib.

34 () Nombre de passagers.

35 () Avec des marges opérationnelles plus importantes que dans le reste du secteur (jusqu'à 23 % pour Ryanair sur les deux derniers exercices, selon la Direction générale de l'aviation civile).

36 () Voir glossaire.

37 () Les instruments de mesure du trafic aérien sont différents selon que les sources sont françaises ou anglo-saxonnes : en France, le trafic est mesuré en passager kilomètre transporté (PKT) et en tonne kilomètre transporté (TKT), ce qui met en évidence les évolutions du volume, conformément à la méthode analytique des ingénieurs français. Dans les analyses anglo-saxonnes, les mesures sont faites en revenu passager kilomètre (RPK) et en fret tonne kilomètre (FKT) ce qui correspond à une vision plus économique du secteur mettant en évidence les flux financiers liés au trafic aérien.

38 () Ce résultat a été largement diffusé dans le numéro hors série de mai 2003 de la revue « Aéroports magazine » éditée par Aéroports de Paris (ADP).

39 () Ainsi, durant les années 70, la croissance du transport aérien restait tributaire de l'évolution du PIB à 80 % et du facteur prix à 20 %. A partir des années 2000, cette croissance n'est plus soumise que pour 50 % à celle du PIB, mais pour 40 % à celle du facteur prix (les 10 % restants sont imputables au développement des services).

43 () C'est également le cas d'American Airlines, sur la liaison entre Roissy Charles-de-Gaulle et Bruxelles, et de KLM entre Amsterdam-Schiphol et Anvers.

44 () Les accords les plus récents sont ceux de Continental Airlines avec la SNCF, entrés en vigueur le 1er février 2003.

45 () Le partenariat entre Air France et Thalys est sensiblement différent de celui qui lie la compagnie française à la SNCF, car il prend la forme d'un contrat d'affrètement de voitures Thalys (15 voitures quotidiennement, soit 600 sièges), et non d'achat de places isolées.

46 () Pour plus de 2 millions de voyageurs aillant emprunter la gare TGV en 2002.

47 () Les chiffres de voyageurs transférés sont à la date de chaque projet.

48 () Il comprend un rapporteur, Jean-Noêl Chapulut, membre de la 4ème section du CGPC, un secrétaire, David Ranfaing, chargé d'études au service des bases aériennes de la Direction générale de l'aviation civile et des représentants des administrations (Direction générale de l'aviation civile, DTT, Délégation à l'intermodalité, DAEI-SES, DAC Centre-Est, DRE/DDE Pays de la Loire/Loire Atlantique), des entreprises ferroviaires (RFF, SNCF), des entreprises du secteur aérien (ADP, aéroport de Bâle-Mulhouse, Air France).

49 () Voir étude ACNUSA p. 102.

50 () Voir étude ACNUSA p. 102.

51 () Recherche d'alternatives à la création d'un troisième aéroport parisien, Sanaterra, étude MVA Ltd, octobre 2002.

52 () « Les aéroports de Paris », p. 390 et suivantes, Cour des Comptes, rapport annuel 2003.

53 () Cahier des charges de la DUCSAI, août 2001.

54 () Selon le service technique des bases aériennes (STBA) de la Direction générale de l'aviation civile.

55 () Association of European Airlines, 4th quarter 2002, Airlines delays in Europe.

60 () Cf. glossaire.

61 () Famille de moteurs CFM56 de Snecma, par exemple.

62 () Les émissions de CO2 doivent également être divisées par deux et les oxydes d'azote (NOx) devraient être divisés par 5.

63 () Financé à 50 % par la Commission européenne.

64 () Annexe 16 de la convention OACI.

65 () Fokker 28, Boeing 707, 727 et premiers modèles de Boeing 737 et 747.

66 () Tous les Airbus, les derniers Boeing ainsi que les versions plus récentes des Boeing 737 et 747.

67 () Relative à la limitation de l'exploitation des avions relevant de l'annexe 16 de la convention relative à l'aviation civile internationale, volume 1 deuxième partie chapitre 2, deuxième édition (1988).

68 () Concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intracommunautaires.

69 () Relatif à l'immatriculation et à l'exploitation, dans la Communauté, de certains types d'avions à réaction subsoniques civils modifiés et munis d'un nouveau certificat indiquant leur conformité avec les normes du volume I, deuxième partie, chapitre 3, de l'annexe 16 de la convention relative à l'aviation civile internationale, troisième édition (juillet 1993).

70 () Voir p. 83.

71 () Cf. Glossaire.

72 () Cf. annexe pour visualisation du réseau de mesure parisien.

73 () Le décibel (dB) est l'unité retenue pour le niveau sonore. Il se calque sur la sensibilité différentielle de l'ouïe, puisqu'un écart de 1 décibel entre 2 niveaux de bruit correspond sensiblement à la plus petite différence de niveau sonore décelable par l'oreille humaine.

74 () Par exemple, rapport de l'Académie des Sciences « Impact de la flotte aéri relative à l'élimination des déchets et aux installations classées pour la protection de l'environnement.

78 () La loi sur l'eau du 3 janvier 1992 précise dans ses articles 19 à 30 les mesures de police et les sanctions en cas de rejet non conforme aux règlements.

79 () Même si les aérodromes sont des milieux « simples », ils sont capables de satisfaire dans certains cas les trois besoins vitaux d'un grand nombre d'animaux (nutrition, reproduction repos dès lors que la physionomie leur convient). Par exemple, des oiseaux tels les perdrix grises, les faisans, des mammifères comme les lièvres, les lapins, les campagnols, nombre d'invertébrés (insectes, mollusques), effectuent leur cycle vital complet dans l'enceinte aéroportuaire. (Source : SSBA-SE/Direction générale de l'aviation civile).

80 () C'est-à-dire les rencontres d'oiseaux avec des aéronefs donnant lieu à des retards de trafic ou à des dommages de toute nature.