Version PDF
Retour vers le dossier législatif

graphique
N°1544
______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 avril 2004.

RAPPORT D'INFORMATION

déposé en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA MISSION D'INFORMATION COMMUNE SUR L'ÉVALUATION
DES CONSÉQUENCES ÉCONOMIQUES ET SOCIALES
DE LA LÉGISLATION SUR LE TEMPS DE TRAVAIL (1)

Président
M. Patrick OLLIER,

Rapporteur
M. Hervé NOVELLI,

Députés.
--

TOME I

RAPPORT

__________________________________________________

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

La mission d'évaluation sur les conséquences économiques et sociales de la législation sur le temps de travail, est composée de : M. Patrick Ollier, Président ; M. Nicolas Perruchot, Vice-Président ; MM. Jean-Paul Anciaux, Maxime Gremetz, Secrétaires ; M. Hervé Novelli, Rapporteur ; MM. Jacques Bobe, Yves Boisseau, Mme Chantal Brunel, MM. François Calvet, Pierre Cohen, Christian Decocq, Mme Catherine Génisson, MM. Franck Gilard, Joël Giraud, Maurice Giro, Louis Giscard d'Estaing, Gaëtan Gorce, Gérard Hamel, François Lamy, Robert Lamy, Jean Le Garrec, Daniel Mach, Alain Madelin, Pierre Morange, Martial Saddier, Jean-Charles Taugourdeau, Philippe Tourtelier, Alfred Trassy-Paillogues, Francis Vercamer, Philippe Vuilque.

S O M M A I R E

_____

Pages

S O M M A I R E

Pages

INTRODUCTION

première partie : Une législation complexe, issue de la juxtaposition de lois successives, qui engendre une situation affectant de diverses manières les entreprises et les salariés

I.- Une législation complexe

A.- l'ambivalence d'un dispositif centré sur le partage du travail

1.- La mesure de la durée du temps de travail : entre durée légale, durée collective affichée et durée effective du travail

2.- Le régime des heures supplémentaires : système complexe, évolutions multiples

3.- Créer des emplois : une condition qui s'affaiblit au fil des lois

B.- Un dispositif censé préserver la compétitivité des entreprises

1.- Des allègements de charges sociales conditionnés : une politique qui, n'ayant pas tenu toutes ses promesses, a été progressivement détachée de son objectif d'origine

2.- Le défi des réorganisations au service de la flexibilité

3.- Le cas particulier du temps de travail (modulé) des cadres

4.- La redéfinition du travail à temps partiel

5.- La maîtrise des coûts salariaux à l'épreuve des SMIC multiples

C.- La loi Fillon est venue apporter les assouplissements les plus urgents

II.- L'état des lieux : une situation qui affecte de diverses manières les entreprises et les salariés

A.- Les 35 heures concernent deux tiers des salariés du secteur marchand

1.- Des accords d'entreprise et de branche imposés

2.- Une certaine hétérogénéité liée à l'empilement des dispositifs

3.- La taille des entreprises constitue le principal facteur de discrimination dans le passage aux 35 heures des différentes catégories de salariés

B.- L'ensemble des trois fonctions publiques est passé aux 35 heures

1.-  Une réforme initiée au plan national

2.- Une réforme déclinée ensuite dans les différentes unités

III.- Le constat de la complexité du droit de la durée du travail conduit à une remise en cause de l'intervention législative

A.- Le constat de la complexité des règles du droit du travail

B.- Des causes spécifiques s'agissant des règles du droit du travail

1.- Les raisons de la complexité du droit du travail

2.- Les raisons de la complexité du droit de la durée du travail

C.- De la complexité du droit à son illisibilité et à l'insécurité juridique : la remise en cause de l'intervention législative

deuxième partie : Des effets macro-économiques difficiles à évaluer

I.- Un lourd impact pour les finances publiques qui continuera à se manifester au cours des prochaines années

A.- L'impact sur les finances publiques de la mise en œuvre de la RTT dans le secteur privé

1.- La parenthèse du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC)

2.- Un coût préoccupant pour le budget de l'Etat

B.- L'impact sur les finances publiques de la mise en œuvre de la RTT dans les fonctions publiques

1.- Fonction publique d'Etat

2.- Fonction publique territoriale

3.- Fonction publique hospitalière

4.- Entreprises publiques

C.- Un impact préoccupant pour l'avenir des finances publiques

D.- Les limites du raisonnement en « coûts nets »

II.-  Des effets sur l'emploi « nets » difficiles à évaluer

A.- La fragilité des modèles ex-ante : l'identification complexe d'effets macroéconomiques nombreuX

1.- Un principe d'équilibre établi sur des bases assez consensuelles

2.- Des modèles multiples reposant sur des hypothèses fragiles

B.- L'insuffisance des évaluations ex post : les 35 heures ne connaissent que les prémices de l'évaluation

1.- Une situation encore nouvelle

2.- Des méthodes d'évaluation fondées sur des techniques statistiques éprouvées, mais qui souffrent toutefois d'un nombre non négligeable de limites

C.- De l'évaluation aux évaluations ? ou le regret unanime de l'absence de source autre que la DARES

1.- La position presque monopolistique de la DARES : la question de l'organisation statistique de l'Etat

2.- La difficulté à faire apparaître d'autres instances d'évaluation

3.- Des propositions : améliorer l'accès aux données publiques ; l'organisation de « conférences de consensus »

III.-  L'économie française peut-elle réellement supporter les 35 heures ?

A.- La mise en cause des capacités de croissance de l'économie française

1.- L'exception française en matière de réduction du temps de travail : la diminution du nombre des heures travaillées

2.- L'exception française en matière de productivité : les gains réalisés en termes de productivité horaire n'ont pu qu'imparfaitement compenser la baisse du nombre d'heures travaillées par tête

3.- A long terme, la mise en question de l'évolution du potentiel de croissance ainsi que de l'enrichissement de la croissance en emplois

4.- La théorie économique comme le bon sens conduisent à s'interroger sur l'existence de solutions alternatives à une politique de réduction du temps de travail

B.- Une menace sur la compétitivité française, l'attractivité du territoire et des effets sur les politiques de délocalisation ?

1.- L'impact de la politique de réduction du temps de travail sur la compétitivité française

2.- L'impact de la politique de réduction du temps de travail sur l'attractivité du territoire et son corollaire, les politiques de délocalisation

Troisième partie : de lourdes conséquences sur l'organisation et la gestion des entreprises et de l'administration

I.- Le « choc des 35 heures » pour les entreprises : comment gérer la RTT ?

A .- Des stratégies de gestion des 35 heures diverses et fonction des contextes initiaux

1.- La transformation d'une contrainte en moteur de changement : le cas des grandes entreprises

2.- Les 35 heures comme contrainte supplémentaire d'organisation : l'exemple des petites et moyennes entreprises

B.- Un bouleversement pour les entreprises

1.- Les 35 heures : une relance du dialogue social dans l'entreprise ?

2.- Les coûts induits par les 35 heures et les problèmes de compétitivité des entreprises

II.- Des conséquences sur l'organisation des fonctions publiques

A.- Des effets contrastés selon les différentes fonctions publiques

1.- Des enjeux économiques divers : la difficile mesure des gains de productivité ; la question de l'emploi

2.- Des effets sociaux et organisationnels difficilement comparables selon les différentes fonctions publiques

B.- La situation très préoccupante de l'hôpital

1.- Le « passage aux 35 heures », révélateur d'une situation qui préexistait ?

2.- Les effets sociaux et psychologiques contrastés de la réduction du temps de travail

3.- Les effets organisationnels des 35 heures : un facteur indéniablement aggravant

quatrième partie : Les conséquences sociales des 35 heures : une France à plusieurs vitesses

I.- Les 35 heures imprègnent la sociÉTÉ française : la France rythmée par la RTT

a.- Les 35 heures ont-elles accentué les TRAitS de la société de loisirs ?

1.- Le développement de la société des loisirs : un phénomène ancien

2.- En leur donnant encore plus de place, les 35 heures ont encore accentué les inégalités d'accès aux loisirs

B.- Vers une « RTT-isation » de la société française ?

1- Dilatation du temps hors travail et repli sur la sphère privée

2- Arythmie et bouleversement des temps sociaux

II.- Les 35 heures divisent la société française

A.- Le sentiment partagé d'un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée ne cache pas des disparités réelles

1. Un jugement globalement positif quant à l'amélioration de la vie quotidienne

2. De nombreuses nuances qui s'expliquent par l'hétérogénéité des situations

B.- Les 35 heures ont renforcé les lignes de fracture au sein du monde du travail

1. - L'accentuation du clivage entre les salariés des PME et des grandes entreprises

2. - Le renforcement des clivages entre les salariés au sein même de l'entreprise

Les enseignements de l'étude faite pour le Syndicat des entreprises de travail temporaire (SETT)

c.- les 35 heures génératrices d'exclusion  et de réduction du lien social

1. Les 35 heures facteur d'exclusion des salariés les moins performants

2. Les 35 heures facteur d'accroissement des clivages entre secteur public et secteur privé et entre bénéficiaires ou non bénéficiaires de la RTT

III.- Faut-il parler d'un changement de la nature du lien entre l'individu et le travail ?

A.- Malgré le changement de nature du travail, celui-ci demeure une référence et un facteur d'intégration sociale

B. - LEs 35 heures ont amorcé un phénomène de distanciation de l'individu a son travail porteur d'inquiétudes pour l'avenir

1.- La montée de l'absentéisme : un effet des 35 heures ?

2.- Le constat d'une démotivation croissante

conclusion et PROPOSITIONS

I.- gérer le présent tant dans le secteur privé que dans les fonctions publiques

a.- renforcer le principe de la dérogation des accords d'entreprise aux accords de branche

B.- compenser les contraintes supportées par les petites et moyennes entreprises

C.- remédier aux principaux dysfonctionnements dans les fonctions publiques

II.- préparer l'avenir : repenser le partage des compétences entre la loi et la négociation collective, afin de renvoyer la question de la durée du travail à la compétence des partenaires sociaux

a.- repenser le partage des compétences entre la loi et la négociation collective

1.- La Position commune du 16 juillet 2001 sur les voies et moyens de l'approfondissement de la négociation collective

2.- L'apport des travaux juridiques récents

3.- L'établissement d'un « pacte de négociation » (rapport de Virville, 2004)

b.- à terme, renvoyer la durée du travail a la négociation collective

1.- La définition de la durée légale du travail : l'article L. 212-1 du code du travail

2.- L'origine de cette définition de la durée légale

3.- L'étonnante exception française en matière de durée légale du travail

4.- Renvoyer la durée du travail à la négociation collective

III.- parallèlement à l'ensemble de ces changements, faciliter le développement du dialogue social dans l'entreprise

a.- Le renforcement de la représentativité des partenaires sociaux

b.- Le renforcement de la responsabilité des partenaires sociaux

Propositions

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

EXAMEN DU RAPPORT

Contributions

35H : La réforme qui marche

1)  Les auditions ont permis de rappeler que les lois Aubry sont intervenues dans un contexte social atone, figé par le refus obstiné du CNPF de négocier sur la RTT.

2)  Loin de tarir la négociation sur la réduction du temps de travail, les lois Aubry ont par conséquent permis de la relancer :

3)  Les deux lois sur la RTT ont par ailleurs contribué à faire évoluer qualitativement la négociation collective :

II. Il ressort des auditions que les 35 heures ont bien dopé la croissance et l'emploi.

1) Les auditions ont tout d'abord permis de rappeler dans quel contexte économique et social le gouvernement de Lionel Jospin avait décidé de faire feu de tout bois :

2) Au total, sur la période 1997/2001, il apparaît que le pari a été tenu, pour l'essentiel, avec la création de plus de 2 millions d'emplois :

3) Dans ce cadre, tous les avis concordent pour estimer à environ 350 000 les emplois créés grâce à la RTT et à 50 000 ceux qu'elle a permis de sauvegarder.

4) Enfin, les auditions ont convergé pour conclure que ces résultats ont été obtenus sans mettre en péril la compétitivité de notre économie.

III. Il ressort des auditions que les 35 heures ont eu un impact limité et maîtrisé sur les finances publiques.

1) Les 35 heures ont été financées pour un coût raisonnable pour nos finances publiques. Les économistes auditionnés ont rappelé que c'est tout d'abord au niveau de l'économie tout entière que la question du financement et plus exactement du bouclage des 35 heures doit être envisagée et non pas dans un cadre strictement comptable.

2) Il est clair que la déconnexion des allègements de la RTT va réduire en revanche l'effet emploi et augmenter le coût pour la collectivité de chaque emploi créé.

IV. Il ressort des auditions que les 35 heures ont eu un effet positif sur les conditions de vie et de travail de la très grande majorité des salariés.

V. Il ressort des auditions que les 35 heures n'ont pas contribué à dévaloriser le travail.

Valoriser le travail, n'est-ce pas d'abord et surtout créer de l'emploi ?

Dès lors, il faut refuser le raisonnement moralisateur qui laisserait entendre qu'il serait honteux de travailler moins :

Conclusion

impact du passage aux 35 heures - janvier 2004

Enquête auprès des entreprises de la 1ère circonscription du Loir-et-Cher

1. Un objectif : mesurer l'impact des 35 heures sur le terrain

2. Une méthode : organiser une consultation ouverte et représentative

3. Le constat général est extrêmement négatif

4. Les entreprises passées à 35 heures souffrent de l'impact économique et financier, mais aussi social et organisationnel des 35 heures

A. Pour 50% des entreprises concernées par la nouvelle législation sur le temps de travail, l'impact économique et financier des 35 heures a été négatif. Pour les 50% restants, l'impact a été neutre et aucune entreprise ne signale un effet positif sur son activité

B. Pourtant, bien plus que les conséquences financières et économiques, ce sont les retombées d'ordre social qui sont stigmatisées

C. Au nombre des griefs adressés à la loi, figure enfin, en deuxième place après les problèmes sociaux, les difficultés de gestion et d'organisation dans les entreprises induites par la loi.

5. 80 % des entreprises non concernées par la mise en œuvre des 35 heures y sont extrêmement hostiles

Conclusion : 70 % des entreprises souhaitent une réforme plus importante des 35 heures et proposent des pistes à cet effet