Version PDF
Retour vers le dossier législatif

Document

mis en distribution

le 9 avril 2003

graphique

N° 676

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 mars 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI (n° 342), autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Espagne relatif à l'exploitation, à l'entretien, à la sécurité et, le cas échéant, à l'évolution du tunnel routier du Somport (ensemble un échange de lettres),

PAR M. JEAN GLAVANY,

Député

--

Traités et conventions

SOMMAIRE

___

INTRODUCTION 5

I - L'ÉVOLUTION DU TRAFIC À TRAVERS LES PYRÉNÉES 7

A - LA COMPOSITION ET LA RÉPARTITION MODALE DU TRAFIC 7

1) Les transports de marchandises 7

2) Les transports de voyageurs 8

B - LA COMPARAISON AVEC LA SITUATION DANS LE MASSIF ALPIN :
     UNE CROISSANCE PLUS FORTE DU TRAFIC DANS LES PYRÉNÉES
     ET UNE PART ENCORE PLUS IMPORTANTE DE LA ROUTE
9

C - L'INCIDENCE DE LA MISE EN SERVICE DU TUNNEL SUR
     L'ÉVOLUTION DU TRAFIC
10

II - LES MODALITES D'EXPLOITATION DU TUNNEL ET LES
     AMÉNAGEMENTS À ACHEVER
12

A - LES STRUCTURES D'EXPLOITATION ET DE CONTRÔLE DE LA
     SÉCURITÉ DU TUNNEL
12

B - L'EXERCICE DE LA POLICE DE LA CIRCULATION FACILITÉ
     POUR UN CONTRÔLE PLUS EFFICACE
14

1) La limitation de vitesse et les moyens de contrôle 14

2) Les risques de collision entre poids lourds 14

3) La compétence élargie des agents de chacun des deux Etats 15

C - LES CONDITIONS DE SÉCURITÉ DU TUNNEL RENFORCÉES DEPUIS LA
     CATASTROPHE DU TUNNEL DU MONT BLANC EN 1999
15

D - LES EFFECTIFS CHARGÉS D'ASSURER LA SÉCURITÉ DANS LE TUNNEL 16

E - LES AMÉNAGEMENTS À RÉALISER EN AVAL DU TUNNEL 16

III - FACE À L'ÉVOLUTION DU TRAFIC TRANS-PYRÉNÉEN,
      DES REPONSES AUJOURD'HUI INSUFFISANTES
19

A - LA RÉALISATION D'UNE NOUVELLE LIGNE À GRANDE VITESSE
     PERPIGNAN - FIGUERAS
20

B - L'AVENIR INCERTAIN DE LA TRAVERSÉE FERROVIAIRE PAU CANFRANC 20

C - POUR UN NOUVEAU CORRIDOR FERROVIAIRE TRANS-PYRÉNÉEN 22

CONCLUSION 24

EXAMEN EN COMMISSION 26

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet l'approbation de l'accord, signé entre l'Espagne et la France le 11 octobre 2001, relatif à l'exploitation, à l'entretien, à la sécurité et à l'évolution du tunnel routier du Somport, accord qui a été complété par un échange de lettres des 11 octobre 2001 et 14 février 2002.

Le tunnel du Somport a été inauguré le 17 janvier 2003. Il n'est ouvert, dans un premier temps, qu'aux véhicules légers et aux poids lourds. L'ouverture au transport de matières dangereuses n'aura lieu que lorsque l'ensemble des travaux de mise en sécurité sera terminé.

Cet ouvrage, long de 8,602 kilomètres et large de 10,50 mètres, entre dans la catégorie des grands tunnels européens, après ceux du Fréjus (12,870 kilomètres) et du Mont-Blanc (11,6 kilomètres). La chaussée comprend deux voies de circulation, les deux entrées étant situées à environ 1100 mètres d'altitude, le tunnel devrait être praticable toute l'année.

L'ouverture du tunnel, longtemps attendue - les travaux de réalisation avaient débuté en 1994 -, permettra le désenclavement des deux régions frontalières et sera très favorables aux échanges économiques comme touristiques.

La catastrophe du tunnel du Mont-Blanc étant intervenue pendant la construction de cet ouvrage, les aménagements prévus à l'origine ont été modifiés avant l'ouverture à la circulation, afin que soient mis en place les équipements et normes de sécurité les plus récentes. Ceux-ci sont en effet très complets et apportent toutes les garanties nécessaires.

En revanche, l'on peut concevoir des inquiétudes en ce qui concerne l'évolution du trafic routier, et du trafic poids lourds en particulier, à travers le tunnel et dans les vallées ainsi reliées. Le trafic quotidien est aujourd'hui de 1000 véhicules dont 150 camions. Les prévisions effectuées pour 2013 sont plus inquiétantes : le trafic s'élèverait à environ 2500 véhicules, dont 470 camions.

Dès aujourd'hui et a fortiori en prévision de l'augmentation du trafic, le réaménagement (traversée sécurisée des villages, contournement, par exemple) de l'infrastructure routière desservant le tunnel (la route nationale 134) doit être mené à bien : il figure d'ailleurs dans plusieurs contrats de plan successifs. Or cet aménagement connaît un retard très regrettable.

Cette nouvelle traversée du massif doit s'accompagner d'autres aménagements plus en amont, afin d'éviter que cet ouvrage n'attire des flux disproportionnés par rapport à la capacité des vallées qui constituent le versant français du tunnel.

Enfin, les différents problèmes soulevés pendant la construction et lors de l'ouverture du tunnel du Somport révèlent les tensions qui affectent de façon plus générale les modes de transport et les infrastructures dans la région frontalière.

I - L'ÉVOLUTION DU TRAFIC À TRAVERS LES PYRÉNÉES

A - La composition et la répartition modale du trafic

1) Les transports de marchandises

Les échanges entre la péninsule ibérique et les pays de l'Union européenne ont connu une augmentation soutenue durant la décennie 1991-2000. Cette augmentation s'est traduite, sur les deux principaux passages à travers les Pyrénées - c'est à dire Le Perthus sur l'autoroute A9 et Biriatou sur l'autoroute A63 - par un trafic de poids lourds qui a été multiplié par plus de 2,3 pour atteindre en l'an 2000 environ 7 000 poids lourds par jour sur l'A63 et 8 000 poids lourds par jour sur l'A9. Les taux de croissance annuelle se situent ces dernières années entre 7 et 13 %.

Le trafic des poids lourds, mesuré en 2000 au col du Somport, s'élevait, lui, à 140 poids lourds par jour.

Les échanges de marchandises représentent environ 50% du trafic en mode routier, dont la moitié s'effectue entre les régions voisines des Pyrénées dans les deux pays.

Parallèlement à cette hausse du trafic routier, le trafic de marchandises par la voie maritime a augmenté d'environ 40% et de 30% par voie ferrée.

Sur les neuf dernières années, le mode routier a globalement capté 82 % de l'augmentation des échanges, le mode maritime 16% et le mode ferroviaire 2% seulement.

Les tableaux ci-dessous donnent une répartition des différents modes de transport provenant de l'office de statistiques européen Eurostat. Il est précisé que ces données sont sensiblement inférieures aux statistiques issues des services responsables des infrastructures en raison de la non prise en compte du poids des emballages et de certains transports.

Tableau 1 : transports de marchandises
entre l'Espagne et le reste de l'Europe en 2000

Route

Maritime

Ferroviaire

Total

Millions de tonnes

32,9 MT

28,9 MT

1,0 MT

62,8 MT

Pourcentage

52,4 %

46,0 %

1,6 %

100 %

Données Eurostat : ces données sont sensiblement inférieures aux statistiques issues des services du Ministère de l'équipement et des transports, en raison de la non-prise en compte du poids des emballages et de certains transports.

Tableau 2 : transports de marchandises entre la France et l'Espagne en 2000

Route

Maritime

Ferroviaire

Total

Millions de tonnes

25,3 MT

5,9 MT

1,6 MT

32,8 MT

Pourcentage

77,1 %

18,0 %

4,9 %

100 %

Source : Ministère de l'équipement et des transports

Cette évolution, si elle devait se poursuivre sur les même bases dans les prochaines années, ne manquerait pas de soulever des problèmes importants sur le réseau autoroutier et routier en France, puisque la moitié du trafic routier qui traverse les Pyrénées transite, via la France, vers les autres pays de l'Europe.

2) Les transports de voyageurs

En 2000, plus de 97 000 véhicules légers par jour ont en moyenne franchi la frontière franco-espagnole, dont un tiers par les routes situées à l'intérieur du massif, un tiers par les autoroutes littorales et un tiers par les autres routes côtières. Ceci représente une augmentation globale d'environ 6 % par rapport à l'année 1999.

La saisonnalité de ces trafics est très marquée : les flux doublent durant les mois de juillet et août.

Au cours des dix dernières années, le trafic de voyageurs sur l'ensemble des deux liaisons autoroutières a augmenté de 42 %. Le trafic sur le corridor atlantique (autoroutes A 8 et A 63) a augmenté davantage et de manière plus constante 1.

Durant ces dernières années, on a également constaté une augmentation du trafic ferroviaire de voyageurs ; ainsi, pour l'année 2000, le nombre de voyageurs utilisant les services internationaux assurés par les trains « Talgo » a été évalué à environ 660 000.

Toutefois, de même que pour le transport de marchandises par le train, ce mode de transport ne représente qu'une faible partie du total des voyageurs tous modes confondus.

B - La comparaison avec la situation dans le massif alpin : une croissance plus forte du trafic dans les Pyrénées et une part encore plus importante de la route

La situation du trafic dans les Pyrénées présente certaines similitudes à celle des Alpes : les massifs de montagne sont également des zones frontalières avec des flux de poids lourds importants sur un nombre de passages restreint. Face aux problèmes que pose le trafic dans ces massifs, les pays concernés sont dans des situations différentes qui risquent de les opposer. La France, comme la Suisse et l'Autriche, est un pays de transit, ce qui peut conduire ces pays à vouloir réduire les nuisances de ce type de trafic. L'Italie et l'Espagne, qui dépendent largement pour leurs échanges européens des passages transalpins et transpyrénéens, souhaitent au contraire faciliter le transit en multipliant les points de passages et en réduisant les coûts.

La traversée du massif alpin s'effectue principalement par trois couloirs : le Fréjus (route) et Mont-Cenis (fer), le Mont-Blanc et Vintimille. Les Pyrénées n'offrent aujourd'hui que deux franchissements majeurs.

Transports de marchandises empruntant les franchissements alpins français

Année 2001

Fréjus

Mont-Cenis

Mont-Blanc

Vintimille

Ensemble

Routier

25,8 MT

0,0 MT

NS

14,1 MT

39.9 MT

Fer

0,0 MT

8,6 MT

NS

0,9 MT

9.5 MT

Total

25,8 MT

8,6 MT

15,0 MT

49.4 MT

Si depuis 1994, le trafic des marchandises par les tunnels nord alpins stagne, le trafic au passage de Vintimille a augmenté de 50 % entre 1994 et 2001.

Cette croissance importante reste encore largement inférieure à celle observée sur les franchissements autoroutiers pyrénéens.

Si l'on compare la répartition modale du transport, on constate que la part de la route dans les Pyrénées (95 % des transports terrestres) est encore très largement supérieure à celle des Alpes (80 % des transports terrestres), déjà peu satisfaisante.

Votre Rapporteur tient à souligner que le problème du trafic pyrénéen est de même ampleur que le trafic transalpin. Les statistiques sont révélatrices des difficultés.

Ainsi, le passage des poids lourds à travers les Alpes, c'est-à-dire de la France vers l'Italie (par Vintimille, Fréjus et Mont-Blanc), vers la Suisse (par le Simplon, le Saint Gothard et le San Bernardino) et d'Autriche en Italie (par le Brenner et le Tarvis) s'élevait en 1999 à 6 239 000 poids lourds avec un taux moyen journalier de plus de 17 000 véhicules. Ces traversées s'effectuent donc à travers cinq points de passage.

Les statistiques relatives à la traversée des Pyrénées font apparaître que le nombre de passages de poids lourds était de 6 008 000 en 2000, avec un taux moyen journalier de 16 450 véhicules. Ces chiffres sont similaires à ceux des passages alpins mais se réalisent à travers les seuls deux principaux passages : le Perthus et Hendaye-Irun, qui concentrent 90% du trafic.

C'est pourquoi si le développement du ferroviaire à travers les Alpes, notamment avec la liaison Lyon-Turin, est indispensable, la réflexion sur l'aménagement de la traversée des Pyrénées l'est tout autant, sinon davantage.

C - L'incidence de la mise en service du tunnel sur l'évolution du trafic

La mise en service du tunnel du Somport devrait avoir une incidence modérée sur l'évolution du trafic des poids lourds. Les prévisions de trafic réalisées par le Ministère de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer indiquent que si 250 poids lourds sont attendus par jour en 2003, la montée en puissance du trafic porterait les passages à 470 poids lourds en 2013.

Afin d'éviter les nuisances et la dégradation de l'environnement qu'entraînerait une croissance du trafic dans la vallée d'Aspe, le Gouvernement s'est engagé à réaliser des déviations permettant d'équilibrer le trafic entre les différentes voies de passage à travers le massif. Selon les informations apportées par le Ministère, le calendrier prévisionnel de réalisation des déviations restant à réaliser s'établit de la manière suivante :

- les déviations de Bedous et de Gurmençon - Asasp sont prévues dans l'actuel contrat de plan 2000 - 2006 ;

- les déviations d'Oloron-Sainte-Marie, de Cete-Eygun et d'Urdos devront être inscrites au prochain contrat de plan.

Votre Rapporteur conçoit les plus grandes inquiétudes quant aux conséquences de l'accroissement du trafic prévu aux différents passages routiers trans-pyrénéens, et en particulier à travers la vallée d'Aspe.

Alors que l'évolution du report modal des trafics vers les modes ferroviaire et maritime s'inscrit dans les orientations politiques recommandées par l'Union européenne, la volonté manifestée par notre pays semble insuffisante et le calendrier de réalisation des projets de développement du trafic ferroviaire trop lent.

Votre Rapporteur abordera cette question très importante dans la dernière partie du présent rapport. Mais, d'ores et déjà, il tient à souligner que les deux problèmes sont liés : compte tenu de l'évolution considérable du trafic routier transpyrénéen et, sans l'étude de la réalisation d'une percée consacrée au ferroutage, il est à craindre que la petite percée du Somport attire dans les années qui viennent un trafic de poids lourds tout à fait excessif qui mettrait en péril les équilibres de la vallée.

C'est une catastrophe écologique prévisible, l'embolie camionnaire des Pyrénées, qu'il faut à tout prix éviter.

II - LES MODALITES D'EXPLOITATION DU TUNNEL
ET LES AMÉNAGEMENTS À ACHEVER

Avant de décrire ces modalités, les caractéristiques de l'ouvrage seront brièvement rappelées.

Le tunnel a une longueur totale de 8,608 km dont 2,849 km sur le territoire français. Il admet une circulation dans les deux sens et se compose d'une chaussée de neuf mètres de largeur roulable ; son gabarit est de 4,55m en hauteur.

L'ouvrage comporte 86 niches de sécurité, fermées et pressurisées, implantées de chaque côté de la chaussée tous les 200 m ; 9 refuges fermés et pressurisés, implantés tous les 800 m (6 dans la section espagnole et 3 dans la section française) ; 9 galeries de retournement et, enfin, 5 aires d'arrêt.

Outre les équipements habituels d'exploitation et de sécurité, le tunnel dispose d'un réseau de télésurveillance, d'un réseau de détection incendie, d'un système de radio communication et d'un système de télétransmission des informations.

La ventilation et le désenfumage du tunnel sont assurés par un système de ventilation et d'évacuation des fumées semi-transversal assuré par soufflage d'air frais le long du tunnel à partir de gaines de ventilation alimentées par trois usines.

A - Les structures d'exploitation et de contrôle de la sécurité du tunnel

Deux autorités régiront l'exploitation, l'entretien et la sécurité dans le tunnel : la commission intergouvernementale et le comité de sécurité.

La « commission intergouvernementale franco-espagnole du tunnel routier du Somport » comprendra une délégation française et une délégation espagnole constituées de 8 membres chacune au plus, dont au moins un membre du comité de sécurité du tunnel, conformément à l'article 3 de l'accord relatif à l'exploitation, à l'entretien, à la sécurité et, le cas échéant, à l'évolution du tunnel, signé à Perpignan le 11 octobre 2001.

La composition de la délégation française sera fixée par décret de la manière suivante : _deux membres représentant le ministre de l'intérieur, _un membre représentant le ministre des affaires étrangères, _un membre représentant le ministre de la défense,_deux membres représentant le ministre chargé des transports, dont le président de la délégation, _un membre représentant le ministre chargé de l'environnement, et enfin, _le président de la délégation française au comité de sécurité.

Cette configuration correspond, à l'exception du président de la délégation française au comité de sécurité, à celle de l'actuelle commission technique mixte du tunnel du Somport fixée par décret du 3 mai 2002.

Il convient de noter que la composition de la commission technique mixte a été modifiée pour la faire évoluer vers une commission intergouvernementale de contrôle (CIG) analogue à celles mises en place pour les autres grands tunnels transfrontaliers du Fréjus et du Mont-Blanc. Cette disposition permet aux services chargés de la sécurité civile ou de la police de la circulation de participer aux travaux de cette commission qui se voit par ailleurs confier un rôle permanent de contrôle de l'exploitation et de la sécurité du tunnel.

Les membres de la délégation française sont désignés par arrêté de chaque ministre concerné.

Le comité de sécurité du tunnel routier du Somport comprendra, conformément à l'article 4 de l'accord du 11 octobre 2001, une délégation française et une délégation espagnole constituées chacune de 4 membres.

La délégation française comprendra deux membres proposés par le ministre de l'intérieur et deux membres proposés par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

L'exploitation de l'ensemble du tunnel a été confiée à l'Espagne par l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement français et le Gouvernement espagnol signées à Madrid le 31 juillet 2001 et le 20 août 2001.

Les coûts prévisionnels d'exploitation et d'entretien du tunnel sont de l'ordre de 5,485M d'euros. La prise en charge de ces dépenses s'effectuera à raison de 2/3 par la partie espagnole et d'un tiers par la partie française.

Pour fournir l'ensemble des prestations liées à l'entretien et l'exploitation du tunnel, l'Espagne a conclu un marché de travaux, dans le cadre d'une procédure d'appel d'offres européen, avec le groupement d'entreprises espagnoles ETRA, API et VIDAL.

Les équipements d'exploitation du tunnel sont télécommandés depuis le centre d'exploitation principal installé à la tête espagnole. Un centre d'exploitation secondaire est installé à la tête française et permet, en cas de nécessité, d'assurer un pilotage des équipements.

B - L'exercice de la police de la circulation facilité pour un contrôle plus efficace

1) La limitation de vitesse et les moyens de contrôle

Un règlement de circulation dans le tunnel a été élaboré par les autorités des deux pays. Il a été adopté par la voie d'un accord sous forme d'échange de lettres signées à Malaga le 26 novembre 2002 entre les Gouvernements des deux pays. Le décret (2003-116) portant publication de cet accord a été publié au Journal officiel du 15 février 2003.

Conformément aux dispositions de l'article 6 du règlement de circulation du tunnel du Somport, la vitesse maximum est limitée à 80 km/h pour tous les types de véhicules. Aucun véhicule ne peut, par ailleurs, circuler à l'intérieur du tunnel à une vitesse inférieure à 50 km/h.

Les contrôles de vitesse sont assurés par la gendarmerie nationale pour la partie française du tunnel et par la Guardia Civil pour la partie espagnole.

En phase transitoire, ces contrôles s'effectuent ponctuellement à partir de radars traditionnels mis en place par la gendarmerie à l'intérieur du tunnel.

Courant 2003, un dispositif permanent de contrôle automatique de la vitesse, identique à celui mis en place dans le tunnel du Mont-Blanc, sera installé dans la partie française du tunnel. Un dispositif analogue sera également installé dans la partie espagnole.

2) Les risques de collision entre poids lourds

Compte tenu, d'une part, de la configuration du tunnel (chaussée bidirectionnelle de 9 m de largeur roulable) et, d'autre part, des dispositions figurant dans le règlement de circulation du tunnel précité, notamment l'interdiction de dépassement dans le tunnel et le respect d'une distance de sécurité de 150 m minimum, les risques de collision entre poids lourds sont très faibles.

Ces dispositions font l'objet d'un contrôle permanent par les forces de polices présentes aux deux têtes du tunnel à partir du dispositif de vidéo surveillance du tunnel.

3) La compétence élargie des agents de chacun des deux Etats

L'échange de lettres donne un fondement juridique à la compétence des agents de chacun des deux Etats sur le territoire de l'autre pour verbaliser et intercepter pour des infractions commises sur leur territoire. Il précise en outre le droit applicable ("dans les conditions et selon les modalités prévues par leur législation nationale", ce qui signifie selon la législation du lieu où l'infraction a été commise). Ce dernier point permet de clarifier l'ambiguïté qui aurait pu être introduite par l'emploi du terme "nonobstant" au 4ème alinéa de l'article 9 de l'accord.

En effet, l'échange de lettres indique clairement que les agents de chacun des deux Etats sont autorisés « à intercepter et à verbaliser les contrevenants, dans la partie de la zone de contrôles située sur le territoire de l'autre Etat, dès lors que l'infraction a été commise dans la partie de la zone de contrôles située sur le territoire de leur Etat ». Ceci complète et applique la règle générale posée par le 3ème alinéa de l'article 9 de l'accord.

C - Les conditions de sécurité du tunnel renforcées depuis la catastrophe du tunnel du Mont Blanc en 1999

A la suite de l'incendie survenu dans le tunnel du Mont-Blanc, le comité d'évaluation des tunnels a formulé en juillet 1999 plusieurs recommandations visant à renforcer les conditions de sécurité du tunnel du Somport. Celles-ci prévoient :

· le creusement de galeries d'interconnexion entre le tunnel du Somport et le tunnel de la liaison ferroviaire Pau-Canfranc au droit de chacun des refuges piétons du tunnel routier. Ces galeries sont destinées à permettre l'accès des secours dans les refuges à partir du tunnel ferroviaire dans le cas où l'accès par le tunnel routier ne serait pas possible ou insuffisant ;

· l'édification d'un local d'accueil des moyens de secours stationnés en permanence à la tête française du tunnel, sur la plate-forme située en rive droite du gave d'Aspe. Ce local constituera également le point d'appui logistique pour le personnel chargé du contrôle du trafic et de l'exploitation de l'ouvrage ;

· le renforcement des capacités de désenfumage du tunnel par mise en œuvre d'un dispositif télécommandé d'obturation des bouches de ventilation d'air frais dès lors, qu'un certain niveau de trafic aura été atteint ;

· la réalisation de divers travaux d'équipements complémentaires et notamment la sonorisation des refuges, le renforcement de certains dispositifs de signalisation et de maîtrise du trafic (caméras de télévision, panneaux à message variable) et la mise en place de barrières télécommandées.

L'ensemble de ces travaux a été réalisé préalablement à la mise en service du tunnel le 17 janvier 2003.

De plus, plusieurs équipements d'aide à l'usager, dont le principe a été demandé par le comité de sécurité ont été réalisés. Ils comprennent notamment le renforcement de l'éclairage lumineux signalant les portes des abris, la mise en place d'une main courante tactile, la mise en place d'un dispositif d'aide à la perception de l'interdistance entre les véhicules (balises lumineuses), le renforcement de la signalisation des niches de sécurité, la peinture en zébras de la zone médiane de la chaussée, et, enfin, l'asservissement de l'ouverture des portes d'évacuation des abris côté tunnel ferroviaire.

Par ailleurs, afin de donner à l'ouvrage un niveau de sécurité équivalent à celui qui résulterait de l'application de l'instruction technique annexée à la circulaire interministérielle n° 2000-63 du 25 août 2000 relative à la sécurité dans les tunnels du réseau routier national, les autorités françaises et espagnoles ont décidé, par l'accord sous forme d'échange de lettres signées à Madrid le 31 juillet 2001 et le 20 août 2001, de doubler le nombre des refuges et des galeries de liaison avec le tunnel ferroviaire. Ces travaux sont en cours de réalisation dans la partie espagnole du tunnel et seront entrepris à partir d'avril 2004 dans la partie française.

D - Les effectifs chargés d'assurer la sécurité dans le tunnel

Côté français, une brigade de 23 gendarmes est affectée au tunnel du Somport pour assurer les contrôles de police : présence permanente de 3 gendarmes à la tête du tunnel.

Côté espagnol, les contrôles sont assurés par la Guardia civil dont une caserne est implantée à Canfranc.

Les premiers secours et de lutte contre l'incendie sont assurés par le personnel de l'entreprise exploitante du tunnel (50 personnes) : à chaque tête du tunnel, est prévue la présence permanente d'une patrouille de trois agents formés à l'école nationale de la sécurité civile de Madrid.

En cas d'incendie ou d'accident grave, il sera fait appel aux services départementaux d'incendie et de secours des Pyrénées-Atlantiques, côté français, et aux services de la protection civile, côté espagnol.

E - Les aménagements à réaliser en aval du tunnel

La modernisation de la RN 134 en vallée d'Aspe, entre Oloron et le tunnel du Somport, est régie par un cahier des charges approuvé par les ministres de l'équipement et de l'environnement en 1994. Les deux ministres avaient affirmé en commun le 1er juillet 1999 que cet axe n'avait pas vocation à devenir un itinéraire de grand transit routier international et que son aménagement se limiterait à une seule chaussée, sans perspective d'aménagement ultérieur de capacité.

La moitié de cet équipement est aujourd'hui aménagée ou en voie de l'être. La poursuite de l'aménagement devra prendre en compte différents éléments. Tout d'abord, la compatibilité avec les aménagements afférents à la réouverture de la ligne Pau-Canfranc-Saragosse (à l'étude). Ensuite, les conséquences en termes de trafic des projets d'aménagements, en amont, des voies rapides « Pau-Oloron » et « Langon-Pau ».

L'évolution du trafic devra être observée attentivement. Le trafic moyen attendu à l'horizon 2008 est de 1897 véhicules par jour, dont 214 poids lourds. Une augmentation supérieure à cette prévision serait néfaste à l'équilibre de la vallée.

On notera que le Ministère de l'Environnement a demandé à l'association régionale de surveillance de la qualité de l'air (Airaq) de réaliser une campagne de mesures avant la mise en service du tunnel et en conditions d'exploitation normale.

III - FACE À L'ÉVOLUTION DU TRAFIC TRANS-PYRÉNÉEN,
DES REPONSES AUJOURD'HUI INSUFFISANTES

En 2000, le trafic de marchandises entre la Péninsule ibérique et le reste de l'Europe s'élevait à 158 millions de tonnes, tous modes confondus, dont 93 millions de tonnes par voie terrestre. La part du ferroviaire est très faible : 7,6 millions de tonnes, soit moins de 5%. Le trafic de poids lourds est très important : 17 000 poids lourds par jour traversent le massif des Pyrénées, dont près de 7 600 à Biriatou et 8 400 au Perthus.

Une étude réalisée par SYSTRA a établi des prévisions de flux de marchandises à partir des données de l'année 2000. Ceux-ci s'élèveront à 332 millions de tonnes en 2020 et 400 millions en 2030, dont 220 par voie terrestre.

Face au trafic déjà important et à ces évolutions, quelles sont les projets d'infrastructures prévus ?

Depuis plusieurs années, les gouvernements français et espagnol ont choisi de privilégier l'amélioration des liaisons existantes à l'est et à l'ouest des Pyrénées.

C'est ainsi qu'il a été décidé de développer la capacité et les performances des réseaux et installations au passage de Hendaye-Irun, sur la façade atlantique, en facilitant, en particulier, le passage de la frontière, où la différence de normes entre l'Espagne et le reste de l'Europe a pour effet de stopper ou de ralentir le trafic de voyageurs et plus encore du fret.

Du côté du corridor méditerranéen, le développement du passage de Cerbère-Port-Bou devrait renforcer les possibilités de transport de fret ferroviaire, notamment grâce à la ligne nouvelle Montpellier - Perpignan - Figueras - Barcelone.

_Enfin, est également évoquée la promotion du cabotage maritime par lignes régulières tant en Méditerranée que sur l'arc Atlantique-Mer du Nord.

Mais ces aménagements, pour leur partie terrestre, n'auront qu'un impact très léger sur la répartition du trafic, et, selon l'étude citée, le transport terrestre de fret prévu à l'horizon 2030 restera pour 85% routier - soit 30 000 poids lourds par jour. Une telle évolution est inacceptable.

Face à cette menace à caractère tant économique, que social et environnemental, votre Rapporteur souhaite présenter les différents aménagements nécessaires à moyen et long terme.

A - La réalisation d'une nouvelle ligne à grande vitesse Perpignan - Figueras

Le projet de ligne nouvelle à grande vitesse entre Perpignan et Figueras, décidé par un accord franco-espagnol du 10 octobre 1995, semble aujourd'hui en bonne voie. Cette nouvelle ligne ferroviaire à écartement européen sera destinée par priorité au trafic international de voyageurs et de marchandises. Selon une déclaration des ministres français et espagnol des transports réunis en juillet 2001, les caractéristiques de la ligne autoriseraient le développement du ferroutage.

Elle s'inscrit dans le cadre d'une liaison à grande vitesse « TGV sud-européen » entre l'Espagne et la France. Le projet s'insère dans une perspective de réseau plus large, incluant la mise en service du TGV Méditerranée en juin 2001, les projets de contournement de Nîmes et Montpellier, la liaison à grande vitesse depuis Madrid et l'ouverture de la nouvelle ligne Barcelone-Madrid en 2004.

La procédure d'attribution de la concession de la construction et de l'exploitation de cette section internationale a récemment abouti ; le contrat de concession est en cours de négociation entre la commission intergouvernementale et ce concessionnaire.

B - L'avenir incertain de la traversée ferroviaire Pau Canfranc

La ligne ferroviaire traversant la vallée d'Aspe et reliant Pau à Canfranc, puis Saragosse, a vu son exploitation interrompue depuis 1970 entre Oloron et Canfranc, à la suite d'un accident.

Avant sa fermeture, le trafic international de fret qui l'empruntait était de 80.000 tonnes par an soit 3% environ du trafic ferroviaire à travers les Pyrénées, tel qu'il était évalué pour la décennie 1970-1980 (soit 2,6 millions de tonnes d'après une étude de 1990).

Selon une étude conduite en 1990 par le groupe de travail franco-espagnol constitué sur cette question, le coût du réaménagement nécessaire pour la mise en circulation des trains a été évalué à environ 152 millions d'euros. La mise en place d'une ligne plus performante représenterait, quant à elle, un investissement beaucoup plus important, de l'ordre de 1,22 milliards d'euros.

Compte tenu de l'intérêt des autorités et associations régionales de part et d'autre de la frontière pour la réouverture de cette ligne, un nouvel examen du dossier a été engagé à la suite du séminaire intergouvernemental franco-espagnol de septembre 1999. Une première étude avait été conduite par la région Aquitaine en partenariat avec l'Etat, la SNCF et le département des Pyrénées Atlantiques. Parallèlement le ministère de Fomento en Espagne avait entrepris l'étude de l'amélioration de la ligne existante entre Saragosse et Canfranc. La capacité de la ligne en matière de fret a été estimée à 1,4 million de tonnes nettes par an dans les conditions actuelles, et à 2,4 millions, voire 3 millions de tonnes dans l'hypothèse d'une utilisation maximale des capacités, en utilisant notamment les circulations de nuit.

L'analyse prévisionnelle des bilans économiques et des comptes d'exploitation a fait apparaître des taux de rentabilité interne et socio-économique très faibles au regard des investissements réalisés.

Un groupe de travail franco-espagnol a été constitué en juin 2001, afin de procéder à de nouvelles études d'opportunité de la réouverture de la ligne : aspects socio-économiques prenant en compte les travaux déjà réalisés, aspects techniques d'expertise des voies et des tunnels notamment suite à l'absence d'entretien des ouvrages, et nouveaux scénarios envisageables.

Tout d'abord, sur le plan technique, est envisagé le scénario de mise à écartement UIC de la partie Canfranc-Saragosse, avec électrification à 25000V, avec une charge à l'essieu de 22,5 tonnes, et un gabarit B.

En outre, les études communes portent sur les domaines suivants : l'utilisation des tunnels (remise en état, exploitation, sécurité notamment au regard de l'utilisation du tunnel ferroviaire pour la sécurité du tunnel routier du Somport et réciproquement), les perspectives de trafic, les aspects socio-économiques enfin.

L'objectif du groupe de travail est de permettre aux ministres, à partir des conclusions de ces études qui devraient être remises mi-2003, de décider de l'ouverture d'une ligne ferroviaire à exploitation mixte principalement destinée au fret et d'en concevoir le financement. Aucun calendrier de réouverture de cette ligne n'a encore été avancé.

A ce jour, le montant des investissements envisagés sur la partie française de la ligne peut être estimé à 300 millions d'euros au minimum. Ce montant ne prend pas en compte l'augmentation des coûts d'exploitation (à la charge des entreprises ferroviaires) générée par la recherche d'une augmentation du tonnage transporté. Le Ministère des transports juge « vraisemblable » que la mise en service du projet entraîne un déficit d'exploitation pour les entreprises ferroviaires exploitant la ligne.

Il convient de préciser que cette ligne, compte tenu de ses caractéristiques de courbure et des pentes existantes, ne se prête pas au développement du ferroutage et ne pourra pas constituer « l'autoroute ferroviaire » que les prévisions d'évolution du trafic trans-pyrénéen rendront, à moyen ou long terme, nécessaire.

C - Pour un nouveau corridor ferroviaire trans-pyrénéen

Ces différents aménagements seront encore insuffisants pour éviter la congestion des voies autouroutières côtières et la dégradation de l'environnement du massif pyrénéen.

Cependant, l'augmentation de la part du ferroviaire, à l'horizon 2020-2030, ne se fera qu'en fonction des capacités à acheminer des marchandises dans des conditions de délai, de fiabilité et d'intéropérabilité avantageuses.

La réalisation d'un nouvel axe transpyrénéen central, reliant Saragosse, centre logistique de l'Espagne, au bassin d'emploi Tarbes/Pau, par Huesca-Biescas-Pierrefitte-Nestalas-Lourdes, permettrait de changer la physionomie du transport entre la péninsule ibérique et le reste de l'Europe. L'on estime que le ferroviaire pourrait alors attirer à lui 32% des flux terrestres, soit 70 millions de tonnes.

Un tel projet, consistant en un tunnel de 42 kilomètres creusé à basse altitude (moins de 500 mètres), a suscité l'approbation de la plupart des élus de la région ; les régions de Midi-Pyrénées, Aquitaine, Limousin, Aragon soutiennent le projet, ainsi que Valence et l'Alentejo. Les autorités politiques de la Catalogne prennent également progressivement position en faveur de cette traversée qui aurait lieu sous le Vignemale, où selon elles, pourrait être réalisé un transfert modal de la route vers le rail.

Votre Rapporteur soulignera que le Livre blanc sur la politique européenne des transports retient dans ses projets prioritaires trois liaisons ferroviaires entre la France et l'Espagne : deux liaisons à grande vitesse, principalement destinées aux voyageurs, et la liaison ferroviaire à grande capacité à travers les Pyrénées qui, selon la Commission européenne, permettrait d'absorber la forte augmentation de trafic marchandise à travers le massif.

Ce nouvel axe serait complémentaire des autres aménagements et améliorations prévus sur les trois traversées déjà existantes. L'ensemble des travaux permettrait alors, à l'échéance des années 2020 ou 2030, d'équilibrer les flux entre les différentes voies.

Votre Rapporteur demande au Gouvernement d'entreprendre les études relatives à la faisabilité de ce projet, qui ne pourrait intervenir que dans un cadre européen, incluant des financements européens. Les premières études ont montré que face au coût élevé du projet, les avantages en termes d'aménagement du territoire, de développement local ou de préservation de l'environnement sont également importants.

CONCLUSION

La montée en puissance du trafic à travers les Pyrénées laisse craindre une saturation des passages, tant côtiers qu'intérieurs, à moyen terme. En particulier, le flux prévisible de camions entraînera la dégradation de l'environnement dans le massif.

L'ouverture du tunnel routier du Somport était nécessaire, mais elle ne doit pas avoir pour conséquence de freiner la recherche d'un rééquilibrage entre les modes de transport entre la péninsule ibérique et le reste de l'Europe, en particulier en ce qui concerne le trafic de marchandises.

Différents modes de transport doivent être développés pour un avenir viable du transport dans la région : le développement du cabotage maritime, les améliorations de capacité sur le corridor atlantique, la réouverture à moyen terme de la ligne ferroviaire Pau-Canfranc-Saragosse, et, enfin, le nouveau corridor ferroviaire transpyrénéen à l'échéance 2020.

Le rapport sur le fret ferroviaire, effectué à la demande du Premier ministre par les sénateurs Hubert Haenel et François Gerbaud et présenté le 12 mars dernier, constate que le déclin du fret ferroviaire est alarmant : passé de 29% des marchandises transportées en 1970 à 14% aujourd'hui, ce mode de transport risque un déclin irréversible, si des mesures ne sont pas prises à temps par les pouvoirs publics. Ce rapport juge nécessaire de maintenir les perspectives de réalisation de grands projets de fret à l'horizon 2020 ou 2030 tels que le Lyon-Turin ou la traversée centrale des Pyrénées, ajoutant que la réalisation de ces projets nécessitera des financements spécifiques.

Votre Rapporteur regrette vivement que le rapport sur les grands projets d'infrastructures de transport, présenté le 5 mars par la mission d'audit du Conseil général des Ponts et Chaussées et de l'Inspection générale des Finances, n'accorde pas un rôle plus important au projet Lyon-Turin, et ne semble pas prendre en compte l'intérêt, à moyen et long terme, de la traversée centrale des Pyrénées.

Au bénéfice de ces observations, votre Rapporteur vous propose d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 5 mars 2003.

Après l'exposé du Rapporteur, à une question du Président Edouard Balladur demandant si ce problème était soulevé dans l'audit commandé par le Gouvernement sur les grandes infrastructures de transport en France, M. Jean Glavany a répondu qu'il l'ignorait, l'audit n'ayant pas encore été rendu public à ce jour.

M. Michel Destot a confirmé que se posaient également dans les Alpes deux problèmes, l'un économique et l'autre de sécurité. S'il n'y a pas de nouvelle liaison transalpine ferroviaire entre la France et l'Italie - si la liaison de transport de fret Lyon-Turin n'est pas réalisée - l'axe économique principal reste le tunnel du Mont-Cenis et le tunnel du Mont-Blanc, et l'on va vers une catastrophe sur le plan de la sécurité et de l'écologie et plus généralement, vers une véritable catastrophe économique. Ces grandes infrastructures ont certes un coût très élevé, et il n'appartient pas à l'Etat français de financer à lui seul ces travaux, dans la mesure où les travaux de la partie française exigent déjà plus de 10 milliards d'euros. Ces projets ne peuvent que s'envisager dans un cadre européen, c'est pourquoi il faut en convaincre en permanence nos partenaires européens.

Le Président Edouard Balladur a demandé si le fait que la France soit un pays de transit de notre pays, traversé par des transporteurs qui ne s'arrêtent pas, lui apportait une quelconque richesse. Une bonne partie du trafic alpin supporté par la France est due au fait que la Suisse interdit le passage de poids lourds sur ses autoroutes. Une déviation d'une partie du trafic de transit porterait-elle préjudice à notre économie ? Il semble que cette question n'ait pas fait l'objet d'étude économique approfondie.

M. Jean Glavany a confirmé que notre pays devait en effet se poser la question de l'intérêt économique de ce trafic routier ; néanmoins dans le cas de la péninsule ibérique, la géographie ne laisse guère d'autre choix. La question du péage ou de la taxe sur le passage de camions doit être posée, car cette taxe existe dans d'autres pays, en particulier en Allemagne, qui fait payer aux camions en transit une taxe de passage sur ses voies gratuites.

De grandes infrastructures de transport comme l'axe ferroviaire Lyon-Turin ou la traversée centrale des Pyrénées par ferroutage sont les seules solutions possibles pour désengorger le trafic routier catastrophique en termes écologiques et de sécurité, mais ce type d'infrastructures ne peut être financé que par une contribution des routiers, système qui a déjà été mis en place dans d'autres pays d'Europe.

M. Michel Destot a ajouté qu'une infrastructure telle que le TGV Lyon-Turin a aussi pour objet de réaliser un réseau entre différentes villes : Grenoble, Chambéry, Saint-Etienne seront mieux connectées à l'ensemble du sillon alpin. Cela est vrai tant pour les voyageurs que pour le fret, pour lequel on a besoin de réseaux interconnectés et de plateformes logistiques. L'ensemble des réseaux qui permettront de circuler entre Munich, Madrid, Genève, Lyon, Perpignan et Barcelone apportera une véritable irrigation économique. Dans ce cadre plus large, il ne s'agit pas d'un simple transit sans bénéfice pour notre pays.

M. Roland Blum a demandé si les systèmes prévus pour la sécurité permettraient à l'avenir d'éviter la confusion entre l'intervention des différents services de sécurité français et italiens qui a malheureusement eu lieu lors de l'accident du tunnel du Mont-Blanc. Y a-t-il une unité de coordination des interventions en cas d'accident ?

M. Jean Glavany a précisé que la gestion du tunnel avait été unifiée entre les deux pays autant que possible : commission intergouvernementale et comité de sécurité composés de représentants des deux pays, outre les équipements de sécurité portés aux normes les plus récentes.

Le Président Edouard Balladur a ajouté que le problème était rendu plus compliqué par l'exercice des pouvoirs de police et de contrôle de la sécurité relevant de chaque Etat. Le contrôle des matières dangereuses est de la responsabilité des douanes, et la lutte contre l'incendie est de la responsabilité des communes et des départements. Le respect de la limitation de vitesse est contrôlé par la gendarmerie. En outre, deux sociétés et deux Etats sont impliqués dans l'exploitation, aussi, malgré les efforts apportés à la rédaction du traité, il est à craindre que la situation ne reste assez complexe. Une nouvelle convention sera bientôt soumise au Parlement concernant le tunnel du Mont-Blanc, qui ne remet pas en cause cette division des compétences.

M. Jean Glavany a précisé que le traité relatif au tunnel du Somport comportait cependant une nouveauté : les Etats s'autorisent mutuellement à poursuivre sur le territoire de l'autre Etat une infraction, constatée dans le premier Etat. Il y a donc là un début d'unification.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 342).

*

* *

La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l'accord figure en annexe au projet de loi (n° 342).

N° 0676 - Rapport sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord France-Espagne sur le tunnel du Somport (M. Jean Glavany)

1 Le trafic VL observé en 2000 sur les principaux franchissements routiers était les suivants : _Le Boulou A9 : 14 300 VL/jour ; Le Perthus N9 : 7 740VL/jour ; Bourg Madame N20 : 5 700VL/jour ; La Croisade N22 : 7 770 VL/jour ; Biriatou A63 : 11 870 VL/jour ; Béhobie N10 : 11 690 VL/jour ; Hendaye D912 : 18 730 VL/jour.


© Assemblée nationale