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le 18 avril 2003

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807

(2ème partie)

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 avril 2003

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, de sécurité financière,

PAR M. François GOULARD

Député

--

Tome I : Rapport

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Voir les numéros :

Sénat : 166 rect., 206, 207 et T.A. 92 (2002-2003)

Assemblée nationale : 719 et 772.

Marchés financiers.

En soumettant au Parlement un projet de loi sur la sécurité financière, le Gouvernement n'a pas entendu doter notre pays d'une loi Sarbanes-Oxley à la française. Ce projet de loi n'est pas un texte de circonstances : il n'est pas une réponse improvisée à une situation créée par quelques scandales financiers récents.

Il s'inscrit, au contraire, dans la ligne d'un travail permanent d'amélioration des règles qui régissent les activités financières ou la vie des entreprises de notre pays.

Ces règles, pour perfectibles qu'elles soient, n'ont pas été prises en défaut d'inadéquation grave. Le système financier français, dans son ensemble, n'a pas failli et il ne s'agit pas de bouleverser un édifice qui, pour l'essentiel, a fait ses preuves.

Cependant, nous ne pouvons ignorer ce qui se passe l'extérieur de nos frontières. Les scandales qui ont atteint des entreprises américaines peuvent toucher, tôt ou tard, des groupes français. Il y a des leçons à tirer des dysfonctionnements observés ailleurs.

Il est également incontestable que les dispositions adoptées à l'étranger ont des conséquences pour nos entreprises et peuvent, dans certains cas, nous amener à infléchir nos propres règles.

Enfin, les évolutions des marchés, les défis nouveaux auxquels sont confrontées nos entreprises, appellent dans certains cas des adaptations de notre législation qui ne peut rester inchangée dans un environnement économique ou financier particulièrement mouvant.

Toutefois, s'il est une illusion que l'on doit d'emblée dissiper, c'est celle de prétendre tout régler par la loi. Si l'existence de normes juridiques exigeantes et respectées est une condition nécessaire au bon fonctionnement de l'économie de marché, celle-ci ne se laisse pas sans inconvénients enfermer dans des règles excessives qu'elle a tôt fait de tourner. Dans ce domaine, la loi n'est pas faite pour écrire comment les choses doivent être, elle est là pour sanctionner les écarts et favoriser le jeu des mécanismes vertueux.

Ce projet s'inspire d'une telle philosophie ; les dispositions qui nous sont soumises sont, d'une façon générale, destinées à encourager les bonnes pratiques, à renforcer la sanction de ce qui est anormal, mais préservent l'initiative des acteurs économiques et respectent leurs choix d'organisation. L'association des professionnels concernés à la définition des règles qui visent leurs activités est systématiquement recherchée.

S'agissant des opérations et des acteurs des marchés, le regroupement des autorités existantes en une autorité unique est unanimement salué, en même temps qu'est reconnue la qualité de la régulation pratiquée jusqu'à présent.

Fallait-il aller plus loin et fusionner, au sein de la nouvelle autorité, les organismes de contrôle des banques et des assurances ? Sur un plan pratique, on peut faire observer qu'il n'aurait pas été judicieux de brûler les étapes. Il est probable cependant qu'il conviendra de mettre sur pied demain, à l'instar de ce que plusieurs pays européens ont déjà fait, une grande autorité financière unique. A côté de la création de l'AMF, la fusion des commissions de contrôle des assurances et des mutuelles est, dans cette perspective, évidemment une bonne chose.

Les modifications proposées en matière de contrôle légal des comptes sont également très positives. Il est souhaitable que le futur haut-conseil du commissariat aux comptes exerce une autorité morale forte sur une profession dont le rôle est plus crucial que jamais pour la bonne information financière des acteurs économiques. La gouvernance des entreprises fait l'objet de dispositions qui sont bien inspirées ; le piège de l'ingérence illusoire et contre-productive dans la vie des entreprises a été évité.

Des dispositions de nature plus hétérogène mais généralement utiles nous sont également soumises. Elles concernent les OPCVM, la création d'un fonds de garantie des assurances obligatoires ou encore le démarchage financier. Sur ce dernier point, en poursuivant l'objectif louable d'un encadrement aujourd'hui imparfait de certaines pratiques, le texte est probablement allé trop loin dans un formalisme d'inspiration administrative dont l'utilité est plus que contestable.

Enfin, si votre Rapporteur salue l'inspiration générale d'un projet de loi qui améliore notre législation financière sur de nombreux points, il ne peut que regretter l'imperfection de la rédaction de nombreux articles. Il rappelle aussi que l'article 34 de notre Constitution organise le partage entre le domaine de la loi et celui du règlement. Encombrer la loi de dispositions évidemment réglementaires nuit à sa lisibilité et, à la longue, l'abaisse de façon préjudiciable, à un niveau qui n'est pas le sien.

I.- LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI

Sous l'appellation générique de « sécurité financière », le présent projet de loi comporte des dispositions de nature très différente et couvrant un vaste champ de la législation en matière bancaire, financière ou d'assurance d'une part, de la législation relative au droit des sociétés d'autre part.

Le projet, qui comportait 88 articles dans son état initial, est structuré en quatre titres distincts, le premier consacré à la « modernisation des autorités de contrôle » (articles 1er à 38), le deuxième à la « sécurité des épargnants et des assurés » (articles 39 à 59), le troisième à la « modernisation du contrôle légal des comptes et à la transparence » (articles 60 à 87), le dernier aux dispositions relatives à l'outre-mer (article 88).

A.- MODERNISATION DES AUTORITÉS DE CONTRÔLE

1.- La création de l'Autorité des marchés financiers

La régulation des marchés financiers français est actuellement partagée entre trois autorités : la Commission des opérations de bourse (COB), le Conseil des marchés financiers (CMF), le Conseil de discipline de la gestion financière (CDGF). La fusion de ces trois institutions en une « Autorité des marchés financiers » (AMF), dotée d'un statut inédit, permettra de renforcer la capacité de contrôle et de sanction du dispositif de régulation dans le secteur financier, et d'affirmer une plus grande présence française au plan européen et international.

L'AMF se voit assigner trois missions : la protection de l'épargne, l'information des investisseurs et le bon fonctionnement du marché (article 2). Dans ce cadre :

- elle prendra un règlement général, homologué par le ministre chargé de l'économie, qui détaille les droits et obligations des acteurs financiers et précisera le fonctionnement des marchés et des instruments financiers ainsi que le déroulement des introductions en bourse, des augmentations de capital ou des offres publiques d'acquisition (article 8) ;

- elle contrôlera les opérations financières et l'information délivrée au public sur les instruments financiers ; elle veillera au respect des obligations auxquelles sont astreintes les personnes qui font publiquement appel à l'épargne, qui interviennent sur les titres placés par appel public à l'épargne ou qui assurent la gestion individuelle ou collective de portefeuilles de titres ; elle se verra également attribuer de nouvelles compétences de contrôle (démarchage, conseillers en investissements financiers, transactions des dirigeants, commissaires aux comptes des sociétés faisant appel public à l'épargne, gouvernement d'entreprise, etc...) (articles 9, 39, 42 et 72)

- elle disposera d'un pouvoir de sanction propre et pourra également recourir au juge pour faire prononcer des injonctions et des mesures d'urgence (article 13) ou pour signaler des faits constitutifs d'infractions pénales (article 17) ou encore pour se porter partie civile (article 15) ; elle pourra être saisie pour avis par les juridictions dans les matières relevant de sa compétence (article 17).

Enfin, pour s'insérer pleinement dans la vie des marchés, l'AMF disposera d'une compétence de médiation entre les épargnants et les établissements financiers (article 16). Elle coopèrera pleinement à la régulation et à la surveillance des marchés européens et internationaux (articles 2 et 18).

Le projet de loi confère à l'AMF un statut inédit, car celle-ci est qualifiée d' « autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale » (article 2). Ce statut lui permettra de recruter librement des salariés expérimentés du secteur privé et du secteur public, la qualité des équipes étant une condition déterminante de l'efficacité de la régulation (article 7). La personnalité morale permettra également de conforter juridiquement l'affectation directe de ressources prélevées sur les opérations financières et sur les acteurs contrôlés, de l'ordre de 50 millions d'euros par an (article 7).

L'AMF comprendra un collège, autorité de décision de principe, et une commission des sanctions. La composition du collège, qui comprend 16 membres, permet d'assurer un juste équilibre entre les représentants d'autorités publiques et les professionnels. Afin de sécuriser la procédure de sanctions au regard de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et d'une jurisprudence de plus en plus exigeante à cet égard, le projet de loi institue une commission des sanctions de douze membres, totalement distincte du collège (article 3).

L'exercice effectif d'un pouvoir de sanction passe par une réforme profonde de la procédure suivie, assurant une parfaite séparation de ses différentes étapes : l'enquête relèvera du secrétaire général et des services, l'ouverture d'une procédure sera décidée par le collège, la sanction sera prononcée par la commission des sanctions. La procédure et le régime des sanctions seront identiques pour les professionnels, pour leurs salariés et dirigeants, et pour les personnes extérieures à la sphère financière (article 14).

La fusion est déjà en cours de préparation. En octobre 2002, les présidents de la COB et du CMF ont été chargés par le ministre d'une mission de préfiguration de la nouvelle autorité et un comité de pilotage a été mis en place pour coordonner les travaux des groupes techniques chargés d'assurer l'intégration des équipes et l'harmonisation des méthodes.

2.- La simplification des instances consultatives dans le secteur financier

Le projet de loi prend en compte les rapprochements récents des secteurs de la banque et de l'assurance. En effet, les problèmes rencontrés par les consommateurs s'avèrent souvent liés, voire similaires, comme dans le développement du commerce électronique et la conclusion d'un contrat d'assurance rattaché à un crédit bancaire. Les usagers s'adressent à des acteurs dont les stratégies tendent à se rapprocher comme en témoigne la montée en puissance de certaines activités de « bancassurance ».

Pour fournir une réponse globale en matière de régulation, accroître le rôle des consommateurs et dynamiser la concertation au niveau national, le projet de loi prévoit la concentration des compétences consultatives au sein de deux nouvelles instances :

- le Comité consultatif du secteur financier (CCSF), issu de la fusion du Conseil national du crédit et du titre, du comité consultatif (dit « des usagers ») et de la Commission consultative de l'assurance ; ce comité étudiera les relations entre les entreprises et les usagers et associera les représentants de ces deux groupes ; il proposera, par des avis ou recommandations, toutes mesures appropriées dans les domaines relevant de sa compétence (article 21) ;

- le Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (CCLRF), qui se substitue au Comité de la réglementation bancaire et financière (CRBF) et à la commission de la réglementation du Conseil national des assurances ; il associera professionnels, consommateurs et représentants des salariés des différents secteurs ; il émettra un avis sur tout projet de texte (directives, projets de lois, de décrets ou d'arrêtés) en matière financière (article 22).

Ce faisant, le projet de loi restitue l'exercice du pouvoir réglementaire en matière bancaire et financière, aujourd'hui délégué au CRBF, au ministre chargé de l'économie (article 24).

3.- La réforme de l'agrément des entreprises d'assurance

Les décisions en matière d'agrément des entreprises d'assurance et de transferts de portefeuille relèvent aujourd'hui du ministre de l'économie, après consultation de la commission des entreprises d'assurances du Conseil national des assurances. À l'image de ce qui existe en matière d'agrément des établissements de crédit et des entreprises d'investissement avec l'intervention du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (CECEI), le projet de loi prévoit que les décisions en matière d'agrément et de transferts de portefeuille seront transférées à un Comité des entreprises d'assurances, associant des représentants des entreprises concernées (article 25).

4.- La fusion des autorités prudentielles en matière d'assurance

Le projet de loi de sécurité financière procède à la fusion de la Commission de contrôle des assurances (CCA) et de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCMIP) et à la création d'une nouvelle Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCAMIP) (articles 26 à 29)

Cette fusion est la conséquence logique de la transposition aux mutuelles des directives européennes relatives à l'assurance, qui a conduit à l'unification des règles prudentielles auxquelles l'ensemble des acteurs de l'assurance sont soumis. De ce fait, la coexistence de deux commissions distinctes chargées de contrôler le respect de règles identiques est apparue contraire aux règles d'efficacité et de bonne gestion. Elle était d'ailleurs parfois mal comprise du public comme de nos partenaires étrangers et européens.

Pour accomplir sa mission de contrôle, la nouvelle commission s'appuiera sur les corps des commissaires contrôleurs des assurances et de l'inspection des affaires sociales. Ses services seront dirigés par un secrétaire général qui pourra aussi faire appel à des contractuels ou à toute personne compétente dans le cadre de conventions établies à cet effet.

B.- SÉCURITÉ DES ÉPARGNANTS ET DES ASSURÉS

1. Un meilleur encadrement du démarchage bancaire et financier

Le cadre juridique actuel du démarchage financier est constitué d'un ensemble de textes qui se sont superposés et ont rendu le dispositif très complexe. Ainsi, la définition du démarchage n'est pas strictement identique selon les produits financiers concernés. Ce régime est mal connu, aussi bien des consommateurs que des professionnels qui rencontrent au quotidien de nombreuses difficultés pour l'appliquer. Il est enfin obsolète et doit être adapté à l'usage des nouvelles technologies (Internet, messages électroniques, etc.).

La clarification du cadre légal vise à préciser les exigences professionnelles requises pour exercer la fonction de démarcheur, protéger les épargnants, et mettre en place un dispositif permettant d'identifier les responsabilités des différents intervenants (article 39).

La réforme proposée vise d'abord à responsabiliser l'ensemble des intervenants en matière de démarchage. Une personne sera habilitée à exercer l'activité de démarchage par un mandat explicite assorti d'une obligation d'enregistrement auprès des autorités de contrôle compétentes. Une assurance en responsabilité civile professionnelle sera rendue obligatoire. Le démarcheur sera soumis à des obligations de compétence et d'honorabilité. En cas de manquement à ses obligations professionnelles, le projet de loi prévoit un système de sanctions disciplinaires infligées par les différentes autorités de contrôle et, le cas échéant, des sanctions pénales (article 40).

La réforme impose également des obligations en matière d'information des personnes démarchées. L'épargnant devra pouvoir accéder à l'information concernant les produits qui lui sont proposés mais également concernant le démarcheur lui-même. Ce dernier sera tenu, lorsqu'il se rend au domicile de ses clients potentiels, de présenter la carte délivrée par l'établissement pour le compte duquel il agit. Le fichier des personnes habilitées à procéder au démarchage sera consultable par le public.

La protection des personnes démarchées sera également renforcée. Les personnes démarchées disposeront d'un délai de rétractation de 14 jours après la conclusion du contrat, sans pénalité, et sans avoir à motiver leur décision. Enfin, il sera interdit de proposer par voie de démarchage certains produits trop risqués. Pour les produits autorisés, les démarcheurs devront adapter leurs offres aux capacités financières et au degré de connaissance financière de leurs clients potentiels.

2.- La création du statut de conseiller en investissements financiers

A l'heure actuelle, cette activité de conseil n'est régie par aucun texte. Elle est exercée sans protection tant pour les professionnels que pour les consommateurs. L'instauration d'un statut de conseiller en investissements financiers permettra d'entourer l'exercice de cette profession de règles et de garanties pour renforcer la protection des consommateurs (article 42).

Le conseiller en investissements financiers exercera exclusivement une fonction de conseil. S'il souhaite en outre exercer une activité de démarchage ou effectuer de la gestion de portefeuille, il devra obtenir les habilitations nécessaires et doit se conformer aux règles relatives à ces activités.

Le statut de conseiller en investissements financiers sera fondé sur le principe d'autorégulation de la profession afin d'intégrer l'ensemble des professionnels concernés. Les conseillers en investissements financiers devront être enregistrés auprès d'organisations professionnelles. Celles-ci devront à leur tour être agréées par l'Autorité des marchés financiers et faire approuver par celle-ci les règles de compétence et de bonne conduite auxquelles sont soumis leurs membres.

Les conseillers en investissements financiers devront respecter les mêmes conditions de compétence et d'honorabilité que les démarcheurs et disposer d'une assurance en responsabilité civile professionnelle. Comme pour les démarcheurs, un régime de sanctions professionnelles et pénales est prévu en cas de manquement aux obligations professionnelles ou légales (articles 43 et 44).

3.- La création du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages

La défaillance d'une entreprise d'assurance peut avoir pour l'assuré, le bénéficiaire de la garantie ou la victime du dommage des conséquences parfois dramatiques. Le projet de loi prend en compte cette situation.

C'est pourquoi le projet de loi étend la compétence du Fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse, afin de couvrir les cas de défaillance de sociétés, pour les contrats d'assurance-dommages dont la souscription est obligatoire du fait d'une disposition législative ou réglementaire (article 57).

L'obligation d'assurance est, en effet, instituée précisément dans les cas où l'absence de couverture comporte des conséquences sociales particulièrement dommageables, pour l'assuré, pour le bénéficiaire de la garantie ou la victime. Les ayants droit peuvent légitimement s'estimer couverts dès lors qu'ils ont constaté que l'assuré avait satisfait à son obligation d'assurance. Les ressources de la solidarité, limitées, ne permettraient pas de couvrir l'intégralité des assurances contractées par les Français, dont certaines relèvent de la liberté et des choix et styles de vie de chacun.

Le Fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse sera donc rebaptisé Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages. Cette extension des compétences du Fonds maintiendra inchangées les fonctions exercées jusqu'à présent par le Fonds en matière d'assurance automobile.

En cas de défaillance d'entreprises d'assurance-dommages, la mise en jeu du Fonds de garantie vise à couvrir les personnes agissant en dehors du cadre de leur activité professionnelle. En effet, sauf exception, ces personnes seront placées dans une situation défavorable face au professionnel averti qu'est l'assureur.

4.- Les diverses dispositions relatives à la sécurité des épargnants

Les dispositions relatives à la gestion financière permettent de transposer la directive 2001/107 modifiant la directive 85/611 sur les OPCVM et d'aligner le cadre réglementaire français sur les textes européens. Elles permettront aux épargnants français de bénéficier rapidement d'un éventail d'investissements élargis et d'une régulation de la gestion compétitive, évitant ainsi la commercialisation d'OPCVM moins sécurisés tels que ceux régulés dans d'autres pays et désormais commercialisables en France. Ces dispositions concernent l'insertion des dépôts dans la liste des actifs éligibles et confirmation de la faculté d'utiliser des dérivés de crédit (article 45), la suppression de l'obligation d'émettre des parts ou actions à tout moment de la vie du fonds (article 46), l'étanchéité financière des compartiments (article 47) et la suppression, à compter du 13 février 2004, des sociétés de gestion collective à objet exclusif (article 48).

La protection des déposants fait l'objet de mesures variées tendant à renforcer le cadre réglementaire de certaines professions et activités et à sécuriser les flux financiers, notamment au regard de la lutte contre le blanchiment des capitaux : adhésion de l'ensemble des entreprises d'investissement (hormis les sociétés de gestion de portefeuille) au mécanisme de garantie des titres (article 49), dérogation limitée au monopole bancaire au profit des gestionnaires de moyens de paiement, notamment les émetteurs de monnaie électronique (article 50), mise en place de sanctions disciplinaires et pécuniaires plus dissuasives à l'encontre des changeurs manuels (article 51), extension des possibilités d'échange d'information sur les groupes financiers et mixtes entre les autorités de régulations françaises et étrangères (article 52), amélioration du contrôle de la structure capitalistique des entreprises d'investissement (article 53), meilleur encadrement des conditions de cessation anticipée d'activité des établissements de crédit et entreprises d'investissement (article 54) et possibilité pour le Fonds de garantie des dépôts de garantir, à la demande de la commission bancaire, le paiement de l'administrateur provisoire ou du liquidateur d'un établissement de crédit ou d'une entreprise d'investissement (article 55).

5.- Les diverses dispositions relatives à la sécurité des assurés

D'une part, le projet de loi propose que le Fonds de garantie des assurances obligatoires chargé de prendre en charge les majorations des rentes allouées aux victimes d'accidents (accidents provoqués par des véhicules terrestres à moteur et accidents résultant de la circulation sur le sol) (article 58).

Il procède, d'autre part, à la transposition en droit français de la directive concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs, dite « IVème directive sur l'assurance automobile » du 16 mai 2000 (article 59). Sa transposition devait intervenir le 20 juillet 2002 au plus tard.

Cette directive résulte du constat selon lequel la procédure d'indemnisation d'une personne victime d'un accident automobile survenu en dehors de son Etat de résidence est souvent rendue longue et difficile du fait de la barrière de la langue et de la méconnaissance de la réglementation locale. Dans ces conditions, ce texte vise à mettre en place un dispositif permettant à la victime d'un accident automobile de gérer son dossier d'indemnisation depuis son pays de résidence, dans des conditions optimales d'efficacité.

C.- MODERNISATION DU CONTRÔLE LÉGAL DES COMPTES ET LA TRANSPARENCE DANS LES ENTREPRISES

1.- La modernisation du contrôle légal des comptes

Même si le système français de commissariat aux comptes, fort de règles anciennes et solides, n'a pas connu les défaillances observées ailleurs dans le monde, le projet de loi entend l'adapter aux évolutions des enjeux auxquels il est confronté et conserver son actuel degré de sécurité.

Pour organiser une régulation renforcée, une autorité de contrôle externe à la profession est créée. Le Haut conseil du commissariat aux comptes sera composé de personnes représentant les autorités juidiciaires, de personnalités qualifiées et de professionnels (article 61). Il sera chargé de veiller à l'indépendance, à la déontologie et à l'exercice professionnel des commissaires aux comptes, dont il sera également l'organe d'appel en matière disciplinaire et d'inscription. Pour cela, il organise les contrôles de l'activité des professionnels. Son champ d'intervention veille à maintenir l'unité de la profession quelles que soient les personnes contrôlées, mais fait également une large place à la problématique des entreprises faisant appel public à l'épargne. Placé auprès du Garde des Sceaux, il dispose des moyens, des compétences et des pouvoirs lui permettant d'exercer pleinement son rôle. Il bénéficiera, notamment par la présence du président de l'Autorité des marchés financiers, de l'expérience acquise par la COB dans les années récentes en matière de contrôle des comptes des sociétés faisant appel public à l'épargne.

L'interdiction du cumul du contrôle et du conseil, qui existait déjà, est clarifiée et renforcée, notamment avec l'interdiction faite aux réseaux de cumuler les activités d'audit et de conseil au profit d'un même client, sauf lorsque ces prestations concourent à la mission d'audit. Le projet de loi renforce en outre les interdictions de prises d'intérêts par les commissaires aux comptes dans les groupes dont ils sont auditeurs (article 65).

Le Garde des Sceaux pourra, quand cela apparaît nécessaire, ordonner des inspections des commissaires aux comptes, voire suspendre temporairement l'activité d'un commissaire aux comptes (article 61).

Parce qu'elle est primordiale pour la stabilité financière, la problématique particulière des entreprises faisant appel public à l'épargne est en outre pleinement prise en compte, grâce à l'instauration de relations étroites entre le Haut conseil et l'AMF, et à l'attribution à l'AMF de pouvoirs autonomes à l'égard des commissaires aux comptes des entreprises faisant appel public à l'épargne. Ainsi, l'avis de l'AMF sur la proposition de désignation des commissaires aux comptes sera transmis à l'assemblée générale avant leur désignation. Par ailleurs, un devoir d'alerte de l'AMF par les commissaires aux comptes des entreprises faisant appel public à l'épargne est instauré (article 72).

Le projet de loi veille à assurer strictement l'indépendance des commissaires aux comptes à l'égard de la direction de la société. Le conseil d'administration et le conseil de surveillance proposeront donc leur désignation à l'assemblée générale des actionnaires sans que prennent part au vote, pour les sociétés faisant appel public à l'épargne, le directeur général, le directeur général adjoint et les administrateurs ou membres du conseil de surveillance salariés (article 66).

Le projet améliore également les règles de contrôle des comptes par les commissaires aux comptes. Le co-commissariat, spécificité française qui améliore la qualité du contrôle, est réaffirmé, et ses modalités d'exercice sont renforcées. Il est proposé d'instaurer, sans modifier la durée des mandats, la rotation des deux commissaires aux comptes intervient tous les trois ans (article 66), et il est prévu un commissaire aux comptes ne peut certifier les comptes d'une société pendant plus de six ans (article 65).

2.- Le renforcement de la transparence dans les entreprises

La transparence, la qualité de l'information et le gouvernement des entreprises, en particulier des sociétés cotées, sont des facteurs déterminants du retour de la confiance envers les entreprises et les marchés financiers.

Les mesures proposées dans le cadre de ce projet de loi visent à favoriser une plus grande transparence à l'égard de l'assemblée générale, à laquelle seront communiquées les informations relatives à l'organisation des travaux du conseil, au contrôle interne et aux délégations de pouvoirs (article 76). Les commissaires aux comptes feront également un rapport à l'assemblée générale sur ces questions. De même, la rémunération des commissaires aux comptes sera rendue publique (article 78).

Afin de conforter les initiatives en faveur d'un renforcement du gouvernement d'entreprise, ses principaux éléments feront, pour les sociétés cotées, l'objet d'une information du marché sous le contrôle de l'AMF. Pour donner des repères au marché, celle-ci fera par ailleurs un rapport annuel sur les pratiques des sociétés cotées en matière de gouvernement d'entreprise (article 79). Par ailleurs, le projet de loi instaure l'obligation pour toute société faisant appel public à l'épargne de rendre publiques sans délais toutes les transactions effectuées par ses mandataires sociaux ou leurs proches sur les titres de cette société (article 79).

Enfin, pour que les investisseurs aient le pouvoir de mieux faire valoir leurs droits lorsque des fautes graves ont été commises, le projet de loi modifie les dispositions permettant aux associations d'investisseurs d'agir en justice, notamment par la suppression de l'agrément préalable des associations d'investisseurs qui peuvent agir en justice au nom de leurs membres (article 82).

II.- LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

Le Sénat n'a pas bouleversé l'économie générale du projet de loi et a approuvé les grandes orientations de celui-ci. 48 articles sur 88 ont ainsi été adoptés sans modification. Par ailleurs, 29 articles additionnels ont été introduits.

A.- MODERNISATION DES AUTORITÉS DE CONTRÔLE

Le Sénat a entendu renforcer le contrôle exercé par les autorités de régulation. En premier lieu, il a confié à l'AMF un rôle particulier dans la réglementation (article 8), le contrôle (article 10) et la sanction (article 14) des personnes produisant ou diffusant des analyses financières, c'est-à-dire une opinion sur l'évolution prévisible des émetteurs et, en conséquence, sur l'évolution de leur cours de bourse. L'AMF serait ainsi chargée d'établir les conditions d'exercice de cette activité et les règles de bonnes conduites s'appliquant aux personnes physiques placées sous l'autorité ou agissant pour le compte des personnes qui produisent ou diffusent des analyses financières.

Par ailleurs, il a, dans un article additionnel (article 33 bis), affirmé le principe selon lequel les dirigeants d'entreprises qui produisent des analyses financières doivent s'abstenir de toute action auprès des analystes qui compromettrait l'information du marché en privilégiant leurs intérêts propres ou ceux de leurs actionnaires. Une obligation de conservation pendant trois ans de tous les documents préparatoires à l'élaboration des analyses publiées est également créée tant pour les personnes produisant des analyses que pour les agences de notation. S'agissant de ces dernières, le Sénat a également entendu confier à l'AMF le soin d'établir, chaque année, un rapport sur leur rôle, la transparence de leurs méthodes et l'impact de leur activité sur les émetteurs et les marchés financiers (article 33 bis).

En deuxième lieu, le Sénat a revu l'articulation entre les sanctions de l'AMF et les sanctions pénales, en tentant de limiter le cumul de sanctions en vertu du principe non bis in idem (article 14). Par ailleurs, il a souhaité centraliser la poursuite et le jugement des délits boursiers auprès du Tribunal de grande instance de Paris (article 14 bis).

En troisième lieu, le Sénat a souhaité renforcer l'indépendance de la Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance, en lui conférant la personnalité morale, en élargissant ses possibilités de recrutement et en décidant de lui affecter directement le produit de la contribution pour frais de contrôle. En revanche, il a exclu de son champ de contrôle les mutuelles gérant des régimes obligatoires de sécurité sociale (article 26).

B.- SÉCURITÉ DES ÉPARGNANTS ET DES ASSURÉS

Dans un souci d'élargissement du champ d'application des dispositions relatives au démarchage bancaire et financier, le Sénat a décidé qu'elles s'appliqueraient aux prises de contact avec des consommateurs, sollicitées ou non, s'exerçant dans les locaux des services financiers des sociétés de crédit contractuellement liées aux entreprises de grande distribution, dès lors que ces locaux sont situés sur le même site ou à proximité immédiate du magasin dans lequel le consommateur effectue ses achats. L'objectif poursuivi est de renforcer l'information des consommateurs auxquels sont proposés les cartes de paiement ou de crédit propres à certains grands magasins. De même, il a réintroduit dans le champ du démarchage certains produits faisant partie des catégories que le projet interdisait de démarchage : les titres de sociétés en voie d'introduction en bourse et les titres employeurs dans le cadre d'un dispositif d'épargne salariale, lesquels étaient interdits de démarchage faute d'être négociés sur un marché réglementé. Dans le même esprit, il a inclus les mutuelles et des institutions de prévoyance, ainsi que de leurs unions, parmi les établissements et entreprises habilitées par nature à se livrer au démarchage, au motif que ces organismes pratiquent déjà le démarchage et doivent le faire en obéissant aux nouvelles règles. En revanche, il en a exclu les crédits affectés, les locations ventes ou locations à option d'achat, ainsi que les ventes à tempérament, ces opérations étant accessoires à la vente et déjà soumises à des règles protectrices pour le consommateur (article 39).

En ce qui concerne les conseillers en investissements financiers, le Sénat a clarifié les dispositions initiales du projet de loi en ce qui concerne l'habilitation au démarchage des conseillers en investissements financiers : ceux-ci pourront, par nature, proposer leurs conseils par voie de démarchage, mais ne pourront démarcher des services ou produits bancaires ou financiers que s'ils sont mandatés pour le faire. Enfin, il reviendra à l'AMF, et non plus à un décret, de déterminer les conditions de compétence que les conseillers en investissements financiers doivent remplir (article 42).

Dans un souci de mieux prévenir le surendettement, le Sénat a renforcé les exigences en matière de publicité pour le crédit à la consommation (article 59 ter) et élargi les compétences des commissions de surendettement afin de leur permettre de demander au juge de prononcer la déchéance des intérêts en cas d'abus manifeste ou de non respect des règles de publicité en matière de crédit à la consommation (article 59 quater).

En ce qui concerne le fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) (article 57), le Sénat a étendu sa garantie aux victimes de faillites d'entreprises d'assurance dont la liquidation est en cours à la date de promulgation de la loi. Il a également supprimé une distorsion de concurrence entre les entreprises d'assurance agréées en France et les autres, à raison des recours qui peuvent être intentés contre les responsables d'accidents de la circulation. De même, il a supprimé une inégalité de traitement entre le Fonds de garantie des cautions et le FGAO, en ce qui concerne les conditions d'indemnisation des bénéficiaires de contrats de caution. Il a du reste rendu possible la prise en charge par le FGAO des dommages corporels causés par des animaux sans propriétaire (article 58).

Afin de renforcer le rôle des assemblées générales et de responsabiliser les actionnaires, le Sénat a imposé aux sociétés de gestion des OPCVM l'obligation d'exercer les droits de vote attachés aux titres détenus lors des assemblées générales ou, à défaut, de justifier leur non participation aux votes (article 47 sexies).

Par ailleurs, après ceux adoptés au titre I concernant notamment les mécanismes de compensation des créances ou le réseau des caisses d'épargne, le Sénat a, avec la complicité du Gouvernement, contribué à faire de certaines parties du texte un substitut de projet portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, introduisant des dispositions relatives à la création d'OPCVM à contraintes très allégées (article 47 ter), à la titrisation (article 47 quater), aux contrats à terme de marchandises (article 59 octies), aux sociétés de crédit foncier (articles 59 undecies à 59 terdecies).

C.- MODALITÉS DU CONTRÔLE LÉGAL DES COMPTES ET TRANSPARENCE

En ce qui concerne le contrôle légal des comptes, le Sénat a renforcé les modalités de séparation de l'audit et du conseil dans les groupes de sociétés en prenant en compte toutes les prestations fournies par le réseau, auquel le commissaire aux comptes appartient, à n'importe quelle société du groupe, même située à l'étranger (article 65).

Il a également tenté de rendre plus efficace le co-commissariat en posant le principe d'un co-commissariat équilibré, les deux commissaires aux comptes devant mettre en œuvre des « moyens comparables » (article 66). Il a également tenté d'améliorer la procédure permettant à un commissaire aux comptes d'alerter l'AMF en cas de fait ou de décision « de nature à entraîner le refus de certification des comptes » (article 72).

Afin de préserver la collégialité du conseil d'administration, le Sénat a supprimé la disposition selon laquelle les administrateurs ou membres du conseil de surveillance, liés par un contrat de travail à une société faisant appel public à l'épargne, n'auraient pu prendre part à la décision du conseil arrêtant le nom des commissaires aux comptes dont la désignation sera proposée à l'assemblée générale (article 66).

En ce qui concerne les dispositions relatives au droit des sociétés, le Sénat a simplifié les obligations relatives à la transparence des procédures de contrôle interne - le rapport prévu par le projet serait joint au rapport annuel de gestion - tout en prévoyant un mode de diffusion plus large de celui-ci (article 76). Il a élargi aux transactions sur instruments financiers l'obligation pour les dirigeants et mandataires sociaux de rendre public leurs transactions et échanges de titres émis par la société (article 79).

Le Sénat a modifié les dispositions relatives à la communication des conventions libres, en excluant de cette obligation celles qui ne sont « significatives » pour aucune des parties. Par ailleurs, il a relevé de 5 % à 10 % les seuil des droits de vote détenus par le signataire d'une convention pour que celle-ci soit soumise à autorisation préalable (article 80).

Il a souhaité alléger les contraintes pesant sur la création et l'action des associations d'investisseurs agréées, en diminuant les exigences en matière d'agrément (six mois d'existence et au moins 200 membres) et en les autorisant à solliciter les mandats par voie d'appel au public sous quelque forme que ce soit (article 82).

Enfin, le Sénat a introduit trois articles additionnels, le premier harmonisant les dispositions relatives au cumul des mandats pour ceux exercés dans les sociétés entrant dans le périmètre de consolidation (article 84 bis), remplaçant plusieurs sanctions pénales obsolètes par des nullités (article 85 bis) et limitant la transparence des rémunérations des mandataires sociaux aux seules sociétés cotées (article 87 bis).

III.- LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION DES FINANCES

A.- MODERNISATION DES AUTORITÉS DE CONTRÔLE

La commission des finances a souhaité, à l'initiative de M. Charles de Courson, étendre le champ des missions de l'AMF à la surveillance de l'assurance-vie, considérant que celle-ci constituait l'un des produits d'épargne le plus répandu et qu'il est légitime que les épargnants puissent disposer sur l'assurance-vie des mêmes informations que sur les autres produits d'épargne (article 2).

Elle a souhaité renforcer la composition de la commission des sanctions de l'AMF en la dotant de compétences en matière de comptabilité, en prévoyant en son sein la présence d'un magistrat de la Cour des comptes et une personne qualifiée désignée par le président du Conseil national de la comptabilité (article 3).

À l'article 7, elle a adopté un amendement, proposé par M. Charles de Courson, renforçant la transparence des rémunérations des membres de l'AMF et prévoyant la publication d'un rapport annuel et d'un rapport d'audit sur l'exécution de son budget. Elle a également prévu la création d'une contribution pesant sur les conseillers en investissements financiers, estimant qu'il est légitime de les faire participer au financement de l'autorité chargée de leur contrôle.

En ce qui concerne la procédure de sanctions de l'AMF, la commission des finances a rétabli le barème actuel des sanctions pécuniaires en cas de délits boursiers (1,5 million d'euros ou le décuple des bénéfices obtenus) et supprimé le dispositif introduit par le Sénat pour tenter de réduire le cumul de sanctions de l'AMF et de sanctions pénales (article 14).

La Commission des finances est revenue partiellement sur le dispositif adopté par le Sénat en ce qui concerne les analystes financiers et les agences de notation. D'une part, elle a supprimé, à l'initiative de M. Philippe Auberger et contre l'avis de votre Rapporteur, la disposition permettant à l'AMF de définir les conditions d'exercice de l'activité de production et de diffusion des analyses financières par des personnes morales. D'autre part, elle a souhaité limiter les compétences de l'AMF aux seuls analystes diffusant leurs analyses, afin d'exclure les analystes financiers dont les travaux ne sont pas destinés à être diffusés et ne sont établis qu'à l'usage interne des entreprises pour lesquelles ils travaillent (article 8). Enfin, elle a supprimé l'obligation de conservation des documents préparatoires, estimant que cette disposition méconnaissait les conditions réelles d'établissement des analyses (article 33 bis).

En ce qui concerne les compétences de la Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCAMIP), la commission a étendu l'exclusion de toutes les sociétés d'assurance, quel que soit leur statut, gérant un régime obligatoire de sécurité sociale (article 26).

La commission a supprimé l'obligation de réunion conjointe régulière entre la CCAMIP et la Commission bancaire (articles 26 et 30), jugeant que ces deux commissions n'avaient certes pas besoin d'une autorisation législative pour le faire.

Elle a également supprimé une procédure d'injonction qui subsistait dans le code de la mutualité, en contradiction avec les stipulations de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (article 29).

B.- SÉCURITÉ DES ÉPARGNANTS ET DES ASSURÉS

La commission a apporté d'importantes modifications aux dispositions relatives au démarchage.

Si elle a reconnu la nécessité de protéger les épargnants contre le comportement irresponsable et abusif de certains démarcheurs indépendants, plus soucieux de leur commission que de l'intérêt à long terme de leurs clients, elle a jugé que le dispositif proposé était particulièrement lourd et complexe, surtout pour des établissements de crédit et des entreprises d'investissement qui emploient de nombreux démarcheurs. Aussi a-t-elle adopté plusieurs amendements visant à adapter le projet à son véritable enjeu, sans pénaliser inutilement les activités d'entreprises qui ne posent pas de problème. Elle s'est efforcée de recentrer le projet sur son objet, qui est la protection de l'épargnant.

Elle a ainsi modifié les cas dans lesquels les règles du démarchage ne s'appliquent pas (article 39). Elle a introduit une distinction entre le démarchage bancaire et le démarchage financier. Le premier n'étant pas porteur de risques importants pour le client, il n'y a pas lieu que les règles très protectrices créées par le projet s'appliquent aux personnes morales. Le second, plus risqué, doit être encadré, la dérogation demeurant limitée aux investisseurs qualifiés et aux personnes morales dont la taille est supérieure à certains critères qui seront fixés par décret. Dans tous les cas, et sauf exceptions déjà visées dans le même article, les personnes physiques bénéficieront de l'ensemble des protections prévues par le projet.

Dans le même souci de proportionnalité de la loi aux risques encourus par les personnes démarchées, la Commission a exclu du champ des protections liées au démarchage les prises de contact avec des consommateurs s'exerçant dans les locaux des services financiers des sociétés de crédit contractuellement liées aux entreprises de grande distribution, même lorsque ces locaux sont situés sur le même site ou à proximité immédiate du magasin dans lequel le consommateur effectue ses achats : cette disposition, introduite par le Sénat, lui est apparue lourde de conséquences pratiques et sources d'inégalité de traitement entre des établissements financiers, selon qu'ils sont ou non liées à la grande distribution. En outre, la fourniture de services en matière de structure du capital, de stratégie industrielle et de fusions et rachat d'entreprises n'a pas à entrer dans le champ protecteur du démarchage dans la mesure où il n'est, en soi, source d'aucun risque.

Elle a estimé que les prises de contact réalisées à partir de plates-formes téléphoniques sous la responsabilité d'un établissement de crédit ou d'une entreprise d'investissement devaient être exclues du démarchage. En effet, il apparaît irréaliste de faire enregistrer un personnel nombreux afin qu'il donne aux personnes contactées son numéro d'enregistrement alors que celles-ci ne pourront vérifier ni son authenticité, ni même qu'il correspond bien à la personne qui lui parle. Cette contrainte entraînerait donc une délocalisation de ces centres d'appel vers des pays plus libéraux, sans rien apporter à la protection des épargnants.

L'obligation d'enregistrement des salariés ou employés des personnes morales habilitées par nature à se livrer au démarchage (établissements de crédit, entreprises d'investissement ou d'assurance, mutuelles ou institutions de prévoyance) lui est apparue superflue. Si elle demeure justifiée pour les salariés des personnes mandatées pour démarcher (et, en particulier, pour les conseillers en investissement financiers), lesquels ne doivent pas répondre à des critères particuliers au moment de leur recrutement, elle ne semble pas utile pour des personnels déjà soumis à des règles en tant que salariés d'établissements ou d'entreprises étroitement encadrés, et qui travaillent sous l'entière responsabilité de ces derniers. De même, il n'apparaît pas utile d'exiger dans la loi que les organismes financiers délivrent une carte de démarchage à leurs salariés, alors qu'ils ont tout intérêt à leur donner une carte professionnelle attestant de leur appartenance à telle ou telle enseigne. Ces allégements visent seulement des procédures qui apparaissent lourdes, bureaucratiques et inutiles ; les autres règles fixées par le présent projet (relatives au devoir d'information, aux délais de réflexion ou de rétractation, aux sanctions disciplinaires ou pénales en cas de manquement aux obligations professionnelle, notamment) s'appliqueront naturellement à ces salariés démarcheurs.

Toujours dans le même souci, la Commission a levé l'interdiction du démarchage posée par le projet à l'encontre des sociétés civile de placement immobilier et des produits de couverture.

À l'initiative de M. Philippe Auberger, la commission a adopté plusieurs amendements tendant à encadrer davantage les conditions dans lesquelles un émetteur de moyens de paiement, électroniques ou non, pourrait se voir exempter d'agrément par le CECEI (article 50).

En ce qui concerne les dispositions relatives aux assurés, elle a adopté un amendement de M. Michel Hunault modifiant les conditions d'application dans le temps des garanties d'assurance de responsabilité. Il s'agit de permettre aux contractants de déterminer librement le mode de déclenchement des garanties (en « base fait générateur » ou en « base réclamation »). Cette liberté est néanmoins encadrée par l'instauration de nouvelles obligations d'information des assurés (article additionnel avant l'article 57).

À l'initiative de M. Charles de Courson, elle a autorisé le FGAO à financer des actions relatives à la sécurité routière (article 58).

La commission a adopté une nouvelle rédaction globale de l'article 59 ter, reprenant les préconisations du Conseil national de la consommation afin d'assurer une information plus loyale des consommateurs et de renforcer cette information en matière de crédit permanent. En revanche, elle a supprimé l'article 59 quater relatif aux commissions de surendettement, jugeant plus opportun de ne pas anticiper sur la réflexion en cours sur ce douloureux dossier.

C.- MODERNISATION DU CONTRÔLE LÉGAL DES COMPTES ET TRANSPARENCE

En ce qui concerne le contrôle légal des comptes, la commission a entendu assouplir les dispositions adoptées par le Sénat en matière de séparation de l'audit et du conseil dans un groupe de sociétés et tenant compte des prestations fournies par le réseau auquel appartient le commissaire aux comptes. À la stricte interdiction prévue par le Sénat, la commission a préféré un mécanisme plus souple, renvoyant aux normes d'exercice professionnel, établies par la compagnie nationale et homologuées par le ministre après avis du Haut conseil, la détermination des conditions dans lesquelles cette séparation de l'audit et du conseil est applicable en tenant compte notamment de la nature des prestations fournies par le réseau et de leur part dans le montant des honoraires que le groupe verse au réseau. La commission a complété ce dispositif en retenant un amendement de la commission des Lois, prévoyant que le commissaire aux comptes, avant d'être désigné, informe les associés et les actionnaires de la société de l'ensemble des honoraires perçus par le réseau auquel il appartient (article 65).

À l'initiative de MM. Éric Woerth et Jean de Gaulle, la commission a souhaité assouplir l'interdiction d'exercer une fonction dirigeante dans la société auditée aux seuls associés qui ont effectivement certifié les comptes (article 65).

La commission a supprimé la disposition introduite par le Sénat prévoyant que les co-commissaires doivent mettre en œuvre des moyens comparables, jugeant cette disposition particulièrement redoutable pour les petits cabinets qui se verraient de fait écartés du co-commissariat des plus grandes entreprises (article 66). Elle a également supprimé l'obligation de renouvellement différé des co-commissaires, jugeant que cette disposition placerait les commissaires aux comptes dans une situation permanente d'appels d'offre, faisant ainsi peser une pression en faveur d'une baisse des honoraires au détriment de la qualité du travail de certification (article 66).

À l'initiative de MM. Éric Woerth et Jean de Gaulle, la commission a adopté une disposition rendant obligatoire la convocation du ou des commissaires aux comptes à toutes les réunions du conseil d'administration (ou du directoire et di conseil de surveillance), ainsi qu'à toute les assemblées d'actionnaires (article additionnel après l'article 67).

Enfin, afin de limiter une multiplication des alertes infondées de l'AMF par un commissaire aux comptes d'une société faisant appel public à l'épargne, la commission a adopté un amendement précisant que cette obligation ne joue qu'en cas de fait ou de décision justifiant l'intention du commissaire de ne pas certifier les comptes (article 72).

S'agissant du droit des sociétés, la commission a entendu limiter les nouvelles exigences en matière de transparence du fonctionnement des organismes dirigeants aux seuls sociétés cotées, estimant que seules celles-ci ont une responsabilité vis-à-vis des marchés (article 76).

Elle a supprimé l'obligation de communication aux commissaires aux comptes de toutes les conventions portant sur des opérations courantes et conclues à des conditions normales, jugeant cette obligation issue, de la loi du 15 mai 2001, avait montré sa lourdeur et son faible intérêt (article 80).

Enfin, elle a décidé de relever les conditions que le Sénat avait mises à l'agrément des associations de défense des investisseurs (article 82)

TITRE IER

MODERNISATION DES AUTORITÉS DE CONTRÔLE

chapitre ier

Autorité des marchés financiers

Article 1er

Restructuration du titre II du livre VI du code monétaire et financier

Cet article procède à une restructuration du titre II (« Les autorités des marchés financiers ») du livre VI (« Les institutions en matière bancaire et financière ») du code monétaire et financier, en raison de la création d'une autorité unique se substituant aux trois structures existantes.

A l'heure actuelle, ce titre est composé du trois chapitres, consacrés respectivement à la Commission des opérations de bourse (COB), au Conseil des marchés financiers (CMF) et au Conseil de discipline de la gestion financière (CDGF).

Outre la mise au singulier de son intitulé (« L'Autorité des marchés financiers »), ce titre II sera désormais constitué d'un chapitre unique, intitulé « L'Autorité des marchés financiers », divisé en 6 sections :

- section 1 : « Missions » (article L. 621-1),

- section 2 : « Composition » (article L. 621-2),

- section 3 : « Règles de fonctionnement » (articles L. 621-3 à L. 621-5-6),

- section 4 : « Pouvoirs », elle-même divisée en sous-section 1 « Réglementation et décisions » (articles L. 621-6 à L. 621-7-1), 2 « Autorisation des opérations d'appel public à l'épargne » (article L. 621-8), 3 « Contrôles et enquêtes » (articles L. 621-9 à L. 621-12), 4 « Injonctions et mesures d'urgence » (articles L. 621-13 et L. 621-14), 4bis « Sanctions » (articles L. 621-15 à L. 621-17) et 5 « Autres compétences » (articles L. 621-18 à L. 621-21),

- section 5 : « Relations avec les commissaires aux comptes » (articles L. 621-22 à L. 621-25),

- section 6 : « Voies de recours » (articles L. 621-30).

Par ailleurs, les actuels chapitres II et III, ainsi que les articles qui les composent, sont abrogés par l'article 37 du projet de loi, sous réserve du replacement, dans le nouveau chapitre unique, de ceux qui sont maintenus en vigueur.

On observera que la méthode de codification retenue a pour effet de conserver la numérotation des articles applicables à la COB, ce qui conduit à retenir des numéros d'article comportant deux tirets (par exemple L.621-5-1) au risque de rendre encore plus complexe la numérotation en cas d'adjonctions ultérieures. Or, s'agissant d'un code très récent et en l'absence d'une véritable continuité juridique entre la COB et la nouvelle autorité, il y aurait eu peu d'inconvénients à procéder à une nouvelle numérotation du nouveau chapitre unique. Cette solution, aisée au stade de l'élaboration du projet de loi, supposerait, dans le cadre de la discussion parlementaire, un grand nombre d'amendements purement formels de coordination, dont l'examen ne contribuerait évidemment pas à la clarté du débat. C'est pourquoi votre Rapporteur y a renoncé.

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Le Sénat a adopté l'article 1er sans modification.

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Votre Commission a adopté cet article sans modification.

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Section 1

Missions et organisation

Article 2

(article L. 621-1 du code monétaire et financier)

Statut et missions de l'Autorité des marchés financiers

Le présent article procède à une réécriture globale de l'article L. 621-1 du code monétaire et financier, afin de déterminer le statut et les missions dévolues à l'AMF.

- le statut de l'Autorité des marchés financiers

Le nouvel article L. 621-1 définit l'AMF comme une « autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale ».

La reconnaissance du caractère d'autorité indépendante ne constitue pas véritablement une innovation, puisque les trois institutions auxquelles l'AMF se substitue l'étaient déjà, soit par détermination de la loi (COB), soit par la doctrine en raison de leurs caractéristiques (CMF et CDGF).

Il convient cependant de noter que la reconnaissance du statut d'autorité administrative indépendante du CMF a fait l'objet d'un débat. En effet, la loi du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières, qui l'a instituée, l'a qualifiée d'« autorité professionnelle » et l'a dotée de la personnalité morale, ce qui n'est pas le cas des autres autorités indépendantes. Le Conseil d'État l'a qualifié d'« organe administratif » et la Cour d'appel de Paris d'« organisme privé ». Néanmoins, au vu de sa composition collégiale et des pouvoirs de régulation et de sanction qui lui sont reconnus, le CMF a été qualifié, « après hésitation », d'autorité administrative indépendante par le Conseil d'État dans son rapport public pour 2001.

En revanche, la reconnaissance de la personnalité morale à l'AMF constitue une innovation majeure. En effet, la COB n'en est pas dotée et le CMF, qui s'est vu reconnaître ce statut dès sa création, constitue, comme on l'a vu, une exception au sein des autorités administratives indépendantes. Il est à noter que le projet de loi déposé par le précédent gouvernement n'avait pas retenu cette solution.

L'absence de personnalité morale restreint la capacité juridique des autorités administratives indépendantes, limitant leur pouvoir de contracter ou d'ester en justice ou limitant leur autonomie financière. Cependant, force est de reconnaître que cette absence n'a eu guère de conséquences pour la COB, qui se conduit largement comme une personne morale de fait. Même si c'est au nom de l'État, la commission passe d'ores et déjà de nombreuses conventions, son président a qualité pour agir devant toute juridiction non pénale. De plus, elle dispose d'une autonomie financière fondée sur la perception de redevances et de taxes.

La principale conséquence de l'absence de personnalité morale porte sur la responsabilité en cas de faute. En effet aujourd'hui, toute irrégularité commise par la COB dans l'instruction des dossiers et tout dommage causé par elle dans l'exercice de sa mission engage la responsabilité de l'État et non celle de la commission sur ses biens.

Ainsi, à l'avenir, l'AMF aura la pleine responsabilité de ses actes.

En dotant l'AMF de la personnalité morale, le projet de loi fait de celle-ci une personne morale de droit public sui generis comme la Banque de France ou la Caisse des dépôts et consignations. Ainsi, elle aura un statut juridique analogue à celui de la plupart de ses homologues étrangers, renforçant ainsi sa place internationale. Le caractère public d'une telle autorité est d'ailleurs exigé par la directive « Abus de marché » afin de « garantir son indépendance par rapport aux opérateurs économiques et d'éviter les conflits d'intérêts ».

- les missions de l'Autorité des marchés financiers

La nouvelle rédaction de l'article L. 621-1 définit les missions de l'AMF dans les mêmes termes que celles actuellement dévolues à la COB. Ces missions sont donc triples, puisque l'Autorité veillera :

- « à la protection de l'épargne investie dans les instruments financiers et tous autres placements donnant lieu à appel public à l'épargne »,

- « à l'information des investisseurs »,

- « au bon fonctionnement des marchés ».

Cette formulation est suffisamment large pour englober les missions actuellement dévolues au CMF ou au CDGF, d'autant plus que celles-ci ne sont pas précisées explicitement par le code monétaire et financier, qui se borne à énumérer les attributions de ces deux organismes.

La nouvelle rédaction diffère cependant de celle qui est actuellement applicable à la COB. En effet, la dimension internationale de régulation des marchés financiers est explicitement affirmée, puisqu'il est précisé que l'AMF apportera « son concours à la régulation de ces marchés aux échelons européen et international ».

L'absence d'une telle consécration législative n'a pas empêché la COB de tenir toute sa place dans le renforcement de la coopération entre les autorités de régulation.

Au niveau européen, cette coopération s'exerce désormais au sein du Comité européen des régulateurs des marchés de valeurs mobilières (CESR). Suite aux conclusions d'un groupe de sages présidé par M. Lamfalussy, la Commission européenne a institué ce comité en juin 2001, qui prend la suite d'un organisme informel créé en 1997 à Paris (Forum des régulateurs européens, ou FESCO). Chaque État désigne un haut représentant des autorités publiques compétentes en matière de surveillance dans le domaine des valeurs mobilières (en France, c'est le président de la COB qui a été désigné). Le comité bénéficie d'une large indépendance, puisqu'il élit son président en son sein, établit ses propres ressources par contribution de ses membres et organise ses procédures de travail. Il a pour mission, d'une part, de conseiller la Commission européenne sur les projets de mesures d'exécution à élaborer dans le domaine des valeurs mobilières et, d'autre part, de faciliter la coopération entre les régulateurs en établissant des standards de pratiques communes ou en créant des mécanismes appropriés. En septembre 2001, ce comité s'est doté d'un secrétariat permanent qui continue d'être basé à Paris.

Au niveau international, cette coopération s'exerce dans le cadre de l'Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV). Créée en 1974 pour le seul continent américain, elle associe aujourd'hui les autorités publiques de contrôle des marchés financiers de plus de 130 pays. Elle a pour mission de promouvoir l'information mutuelle et la coopération entre ses membres afin d'assurer l'efficacité et l'intégrité du fonctionnement des marchés de valeurs mobilières. Elle tient une conférence annuelle.

La coopération internationale s'exerce également au sein du Forum de la stabilité financière, créé en 1999 par le G7. Il exerce une triple mission, consacrée à la prévention des crises : détection et évaluation des vulnérabilités ; identification et contrôle des actions à entreprendre ; amélioration de la coordination et l'information réciproque. Il regroupe notamment les représentants des pays membres du G7 et de plusieurs organisations internationales (FMI, Banque mondiale, OCDE,...). Comme chaque pays du G7, la France dispose de trois membres, représentant le Trésor, la Banque de France et la COB. Le secrétariat du forum est assuré par la Banque des règlements internationaux basée à Bâle.

Enfin, il convient de noter que l'article L. 621-1, dans sa rédaction actuelle, comporte deux alinéas qui ne figurent plus dans la nouvelle rédaction proposée :

- le premier autorise le président de la COB à agir devant les juridictions non pénales ; il est repris, dans une rédaction modifiée tenant compte naturellement du fait que l'AMF sera dotée de la personnalité morale, dans le nouvel article L. 621-5-2 (cf. article 7 du projet de loi),

- le second exclut du champ de compétence de la COB les instruments créés en représentation d'opérations de banque et les titres de créances négociables ; pour les premiers dont le contrôle relève de la Banque de France, la disposition figurera dans la nouvelle rédaction de l'article L. 621-9 (cf. article 10 du projet de loi) ; s'agissant des titres de créances négociables, la présence de cette disposition dans le code monétaire et financier résulte d'une erreur de la codification, la disposition en cause ayant été abrogée par la loi du 2 juillet 1996 précitée, le contrôle de ces titres entrant pleinement dans le cadre des compétences de la COB et du CMF.

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Le Sénat a adopté l'article 2 sans modification.

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Votre Commission a examiné un amendement de M. Charles de Courson incluant, dans le champ des compétences de la nouvelle Autorité des marchés financiers, les contrats d'assurance-vie.

Votre Rapporteur, a souligné l'importance du sujet : l'assurance-vie est un produit d'épargne et il est légitime que les épargnants puissent disposer de la même information sur l'assurance-vie que sur les autres produits financiers. Or, il faut bien constater que l'information en la matière est souvent déficiente, notamment sur la cascade des prélèvements au bénéfice des assureurs. La mesure proposée est donc opportune et il conviendrait que les méthodes de valorisation de l'assurance-vie suivent celles qui sont pratiquées pour les OPCVM. L'amendement a, au total, pour mérite d'attirer l'attention sur une question très sensible, mais il semble que le Gouvernement n'y soit pas favorable.

M. Charles de Courson a indiqué que si les services du ministère de l'économie et des finances étaient effectivement opposés à un tel amendement, le ministre se montrait plus ouvert. Cela est compréhensible lorsque l'on sait que l'assurance-vie est, en France, le premier mode d'épargne et qu'il n'offre pas les mêmes garanties que celles des autres produits financiers.

M. Philippe Auberger a estimé que la réforme introduite par le texte demeure partielle : les contrats d'assurance-vie sont soumis à des réglementations différentes selon le réseau qui les diffuse. À terme, il faudra probablement aller vers une distinction, comme au Royaume-Uni, entre une autorité de marché et une autorité de contrôle des banques et des compagnies d'assurances.

Votre Commission a adopté l'amendement (amendement n°60) et l'article 2, ainsi modifié.

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Article 3

(article L. 621-2 du code monétaire et financier)

Organisation et composition de l'Autorité des marchés financiers

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 621-2 du code monétaire et financier, précisant l'organisation et la composition de l'AMF.

- paragraphe I : architecture générale

L'Autorité sera constituée de deux instances principales, le « collège » et la « commission des sanctions ». Chacune d'elles pourra créer des sous-formations en leur sein, « commissions spécialisés » pour le collège, « sections » pour la commission des sanctions. En outre, des « commissions consultatives » pourront être créées par le collège.

Le collège a une compétence générale, puisqu'il est précisé que « sauf disposition contraire, les attributions confiées [à l'AMF] sont exercées [par lui]. » Les autres formations n'ont qu'une compétence d'attribution, notamment la commission des sanctions, seule habilitée à prendre les sanctions prévues par le code monétaire et financier (cf. paragraphe IV).

L'institution d'une commission des sanctions, totalement distincte du collège mais partie intégrante de l'Autorité, constitue l'innovation majeure de cet article (1) Elle vise à garantir juridiquement la procédure de sanction au regard des exigences grandissantes de la jurisprudence.

Même lorsqu'elles disposent d'un pouvoir de sanction, le Conseil constitutionnel a, à plusieurs reprises et notamment en ce qui concerne la COB, rappelé que les autorités administratives indépendantes ne sont pas des juridictions. Cependant, le Conseil d'État et la Cour de cassation ont été conduits à juger que, lorsqu'elles font usage d'un tel pouvoir, elles doivent être considérées comme « décidant du bien fondé d'accusations en matière pénale » au sens de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et en ont déduit qu'elles devaient respecter un certain nombre d'obligations procédurales pour, notamment, garantir le droit à un « procès » équitable.

Certes, la jurisprudence admet que les autorités indépendantes ne sont pas tenues de satisfaire à l'ensemble des exigences de la Convention européenne, dans la mesure où leurs décisions sont soumises au contrôle effectif d'un tribunal offrant toutes les garanties exigées. Cependant, à l'instar de la Cour européenne des droits de l'homme elle-même, le juge français considère que l'exigence d'impartialité doit s'apprécier objectivement et qu'il lui appartient donc d'examiner si les craintes du requérant, quant à l'impartialité de l'autorité qui l'a sanctionné, peuvent être regardées comme objectivement justifiées.

C'est ainsi que la Cour de cassation a jugé que la participation du membre du collège de la COB, qui avait été désigné comme rapporteur de l'affaire, au délibéré de la formation de jugement méconnaissant l'exigence d'impartialité, estimant que son rôle d'instruction l'avait amené à préjuger du litige (COBc/Oury, février 1999). Elle a adopté une position analogue en ce qui concerne la présence au délibéré du rapporteur et rapporteur général du Conseil de la concurrence, alors même qu'il ne prenait pas part au vote (Société Campenon Bernard SGE, octobre 1999). En revanche, le Conseil d'État a adopté une solution opposée en ce qui concerne la présence au délibéré du rapporteur du CMF, estimant que celui-ci ne procède qu'à des mesures qui pourraient être décidées par le collège lui-même, qu'il n'est pas à l'origine de la saisine, ne formule pas les griefs et ne prend aucune des mesures de contrainte qui pourraient être assimilées à un préjugement de la culpabilité (Didier, décembre 1999). De même, il a jugé que le fait pour la Commission bancaire de s'auto-saisir d'une affaire entrant dans son domaine de compétences n'était pas contraire à l'exigence d'impartialité, à condition que l'acte d'auto-saisine ne soit pas rédigé en des termes qui puissent être interprétés comme une anticipation de l'issue de la procédure (Société Habib Bank Ltd, octobre 2000 et voir, pour une application de la même logique à propos de la Cour des comptes : décembre 2000, société Labor Metal)).

La procédure suivie devant la COB a fait l'objet d'une remise en cause plus globale encore par la Cour d'appel de Paris (Société KPMG fiduciaire de France, 7 mars 2000). Certes, la Cour considère que « le cumul au sein [de la COB] des fonctions de poursuite, d'instruction et de jugement, critiquée par la requérante, n'est pas, par elle-même, contraire à l'exigence [d'impartialité] ». Cependant, ce considérant peut apparaître comme une simple clause de style. En effet, c'est après avoir constaté que « le collège de la commission a, successivement, (...) décidé de la mise en accusation de la société KPMG sur des faits qu'il a constatés, formulé les griefs visant la personne poursuivie, statué sur sa culpabilité et sanctionné cette dernière », que la Cour a annulé la décision de la COB, jugeant que KPMG était « fondée à soutenir qu'il a été porté atteinte à son droit à un procès équitable (2) ».

Les conséquences de cette évolution de la jurisprudence ont été rapidement tirées. Ainsi, la loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques a modifié sur certains points la procédure suivie devant le Conseil de la concurrence. De même, le règlement intérieur de la COB a été modifié en 2000, pour assurer une répartition des rôles entre le directeur général, le président, le rapporteur et les autres membres du collège, afin de parer à l'objection de manquement apparent à l'exigence d'impartialité.

A cet égard, l'institution d'une commission des sanctions totalement différente du collège de l'AMF constitue une mesure draconienne de sécurisation de la procédure de sanction. Il aurait même été envisagé de « sortir » purement et simplement la commission des sanctions de l'AMF. Il est apparu que cette solution radicale se heurterait aux dispositions de la directive dite « Abus de marché » qui impose aux États membres la création d'une « autorité administrative unique » dotée de tous les pouvoirs de surveillance et d'enquête nécessaires à l'exercice de sa mission.

Néanmoins, force est de reconnaître que l'application du principe de précaution, qui a conduit le Gouvernement à retenir la présente solution, aboutit à renoncer partiellement à l'avantage que constituait l'existence d'une instance unique chargée d'établir la règle, d'en surveiller l'application et d'en sanctionner les manquements. En effet, cette unicité garantit, à tous les stades, l'unité d'interprétation de la règle.

- paragraphe II : le collège

Le collège de l'AMF sera composé de 16 membres, y compris son président, ce qui la place plutôt dans le « haut de la fourchette » de l'ensemble des autorités administratives indépendantes. Cependant, il convient de rappeler que c'est le nombre actuel des membres du CMF, le collège de la COB ne comportant pour sa part que 10 membres.

Au-delà de détermination de la taille du collège de la nouvelle autorité, le projet de loi a dû naturellement concilier les compositions de nature différente de la COB (membres des hautes juridictions de l'État, personnalités qualifiées) et du CMF, « autorité professionnelle » (professionnels, personnalités qualifiées).

Comme pour la COB actuellement, la nouvelle rédaction de l'article L. 661-2 distingue le président du collège des autres membres, puisqu'il sera nommé par décret du Président de la République. En précisant, comme c'est le cas actuellement, qu'il est « soumis aux règles d'incompatibilité prévues pour les emplois publics », l'article L. 621-2 fait de la fonction de président est un emploi public à temps plein. En effet, le premier alinéa de l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires oblige les fonctionnaires à consacrer « l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées » et leur interdit d'« exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit ».

En outre, le collège de l'AMF accueillera, dans les mêmes conditions de désignation, les mêmes membres que la COB - à l'exception naturellement du président du CMF ou de son représentant - , à savoir :

- un conseiller d'État, désigné par le vice-président du Conseil d'État,

- un conseiller à la Cour de cassation, désigné par le Président de celle-ci,

- un conseiller-maître à la Cour des comptes, désigné par le Premier président de celle-ci,

- un représentant de la Banque de France, désigné par le gouverneur,

- le président du Conseil national de comptabilité,

- trois personnalités qualifiées, désignées respectivement par le président du Sénat, celui de l'Assemblée nationale et celui du Conseil économique et social (3) « à raison de leur compétence financière et juridique ainsi que de leur expérience en matière d'appel public à l'épargne et d'investissement de l'épargne dans les instruments financiers » ; cette référence à une compétence en matière d'instruments financiers constitue une précision nouvelle, conséquence évidemment de la reprise des compétences actuelles du CMF.

Héritage du CMF, le collège de l'AMF accueillera également six professionnels, présentant une compétence définie dans les mêmes termes que pour les personnalités qualifiées, et un représentant des salariés actionnaires. Leur mode de désignation demeure celui actuellement retenu pour le CMF : arrêté du ministre chargé de l'économie, après consultation des organisations professionnelles ou syndicales représentatives.

Le nombre de ces membres étant réduit par rapport à l'effectif correspondant du CMF (7 au lieu de 14), le projet de loi a dû renoncer à la répartition précise par type d'entreprises ou d'activités qui figure dans l'actuel article L. 621-1 du code monétaire et financier.

La provenance des six professionnels découle de l'énumération des organisations que devra consulter le ministre. Aux termes de la nouvelle rédaction de l'article L. 621-1, celles-ci devront être représentatives des huit catégories d'entreprises suivantes :

- les « sociétés industrielles et commerciales dont les titres font l'objet d'appel public à l'épargne »,

- les sociétés de gestion d'organismes de placements collectifs,

- les autres investisseurs,

- les prestataires de services d'investissement,

- les entreprises de marché,

- les chambres de compensation,

- les gestionnaires de systèmes de règlement livraison,

- les dépositaires centraux.

Enfin, le projet de loi ne prévoit plus la présence de représentants des salariés des entreprises du secteur financier, comme c'est aujourd'hui le cas au sein du CMF. En fait, la présence de représentants des salariés au sein de ce dernier s'explique par ses compétences disciplinaires et la possibilité qui est la sienne de sanctionner les manquements aux obligations professionnelles en la matière. C'est pour les mêmes raisons que le Conseil de discipline de la gestion financière comprend également un représentant des salariés des organismes de placement collectif. C'est pourquoi, des représentants des salariés seront présents, comme on le verra, au sein de la commission des sanctions de l'AMF.

Cependant, le Gouvernement a souhaité associer les salariés, en choisissant de les représenter au collège de l'AMF au travers de leur éventuelle qualité d'actionnaires.

Alors qu'aujourd'hui, la durée du mandat du président de la COB est supérieure à celle des autres membres (6 ans au lieu de 4), la nouvelle rédaction de l'article L. 621-2 unifie à 5 ans la durée du mandat au sein du collège de l'AMF, soit une durée plus longue que celles des membres de la COB et du CMF (4 ans). Deux exceptions seulement sont prévues puisque cette durée n'est pas applicable au représentant de la Banque de France et au président du Conseil national de comptabilité (dont le mandat est d'une durée de 6 ans renouvelable en vertu de l'article 4 du décret du 26 août 1996).

Afin d'assurer sa totale indépendance, le projet de loi maintient, pour l'AMF, la disposition en vigueur à la COB, selon laquelle le mandat du président n'est pas renouvelable, alors que ce n'était pas le cas pour celui du CMF. En revanche, celui des autres membres du collège (à l'exception, encore, du représentant de la Banque de France et au président du Conseil national de comptabilité) reste renouvelable une fois, comme c'était le cas pour la COB et le CMF.

En outre, le projet de loi retient pour l'AMF la disposition en vigueur au CMF d'un renouvellement du collège par moitié, donc tous les 30 mois. Dès lors, le présent projet inscrit dans la loi la disposition figurant actuellement à l'article 3 du décret du 3 octobre 1996 relatif à la formation et à l'organisation du CMF, selon laquelle en cas de vacance, « pour quelque cause que ce soit », d'un siège de membre du collège, il est procédé à son remplacement pour la durée du mandat restant à courir. Cette disposition est, en outre, complétée afin de prévoir qu'un mandat exercé moins de deux ans n'est pas pris en compte pour l'application des règles de renouvellement. Ainsi, une même personne pourrait siéger jusqu'à 12 ans (2+5+5) au sein du collège.

La nouvelle rédaction de l'article L. 621-2 précise, en outre, que la durée du mandat est décomptée à partir de la date de la première réunion du collège à laquelle participe le membre considéré et que les membres, dont le mandat n'est pas ou ne peut plus être renouvelé, restent en fonction jusqu'à la première réunion du collège dans sa nouvelle composition.

- paragraphe III : les commissions spécialisées et les commissions consultatives

La nouvelle rédaction de l'article L. 621-2 s'inspire des dispositions relatives au CMF (actuel article L. 622-3), pour prévoir la possibilité de créer des « commissions spécialisées » ou des « commissions consultatives » (4).

Le collège pourra donner délégation à des « commissions spécialisées », constituées en son sein, pour prendre certaines décisions individuelles (cf. article 6 du projet de loi). Afin d'assurer une cohérence totale avec le collège, elles seront obligatoirement présidées par le président de l'AMF. Pour sécuriser davantage leur statut, un décret en Conseil d'État en précisera le mode de désignation et le fonctionnement, notamment l'articulation avec la compétence du collège (droit d'évocation ou possibilité de renvoyer une question devant le collège à l'initiative d'un nombre de membres à fixer), le nombre minimal de membres et la liste précise des attributions pouvant être exercées de la sorte.

Contrairement aux dispositions régissant les formations spécialisées du CMF qui excluent la délégation des compétences en matière d'offres publiques, la possibilité de créer une commission spécialisée porte sur l'ensemble des attributions de l'AMF. À titre d'exemple, l'exposé des motifs du projet de loi mentionne « les agréments d'experts indépendants chargés de rendre un avis sur une offre publique de retrait suivie d'un retrait obligatoire » et « les habilitations de prestataires hors Union européenne dans le cadre des accords entre marchés financiers ».

En outre, le collège pourra créer des « commissions consultatives » pour préparer ses décisions et dans lesquelles il pourra, s'il le souhaite, désigner les experts de son choix. Cette disposition s'inspire de l'existence du comité consultatif de la gestion financière (cf. actuels articles L. 621-28 et L. 621-29) et de la possibilité donnée au CMF de demander au ministre de nommer des experts participant avec voix délibérative aux travaux de ses formations spécialisées ou d'y faire participer, à titre consultatif, des personnalités qualifiées (cf. actuel article L. 622-3).

- paragraphe IV : la commission des sanctions

On l'a vu, l'institution d'une commission des sanctions distincte du collège - puisqu'il est précisé que les fonctions de membre de celle-ci sont incompatibles avec celle de membre du collège - constitue la principale innovation dans l'architecture de l'AMF.

Cette commission sera chargée de prononcer les sanctions administratives et disciplinaires prévues à l'article L. 621-15 (cf. article 14 du projet de loi) ou de saisir en référé le président du tribunal de grande instance de Paris pour faire cesser une pratique de nature à porter atteinte aux droits des épargnants (cf. article L. 621-17, non modifié par le projet de loi).

La commission des sanctions sera composée de 12 membres, ce qui est un nombre élevé, mais permettra de constituer deux « sections » de six membres, à l'instar des actuelles formations disciplinaires du CMF.

La commission sera composée de :

- 4 magistrats : deux conseillers d'État et deux conseillers à la Cour de cassation, désignés respectivement par le vice-président du Conseil d'État et le Premier président de la Cour de cassation,

- 6 professionnels, désignés par le ministre chargé de l'économie, dans les mêmes conditions que les professionnels désignés au sein du collège de l'AMF,

- 2 représentants des salariés des entreprises du secteur financier, désigné par le ministre après consultation des organisations syndicales représentatives ; les entreprises concernées sont définies de la même façon que pour la désignation des professionnels (entreprises ou établissements prestataires de services d'investissement, entreprises de marché, chambres de compensation, gestionnaires de systèmes de règlement livraison et dépositaires centraux), à l'exception, bizarrement, des sociétés de gestion d'organismes de placements collectifs.

La nouvelle rédaction de l'article L. 622-2 précise que le président de la commission des sanctions sera élu par les membres de la commission, parmi les magistrats.

L'organisation de la commission des sanctions est analogue à celle du collège (durée du mandat fixée à 5 ans, mandat renouvelable une fois, renouvellement par moitié tous les 30 mois, règles de comblement des vacances,...). La seule différence réside dans le fait que le président de la commission devra être réélu après chaque renouvellement partiel, au contraire de celui du collège. Cette différence s'explique par le fait que le président est élu par la commission elle-même, alors que celui du collège est désigné par décret, sans que le collège soit amené à intervenir de quelque manière que ce soit.

- paragraphe V : statut des salariés désignés pour siéger au sein de l'Autorité

Afin de garantir leur disponibilité réelle pour exercer la mission qui leur est confiée au sein de l'AMF (qu'il s'agisse du collège ou de la commission des sanctions), le paragraphe V pose le principe que ceux-ci « disposent du temps nécessaire pour assurer la préparation des réunions, et pour s'y rendre et y participer ».

Ces dispositions s'inspirent de celles de l'article L. 514-1 du code du travail relatives aux conseillers prud'homaux. Le temps passé est assimilé à du « travail effectif » pour « la détermination des droits aux prestations d'assurances sociales ». Cependant, certaines précisions figurant dans le code du travail ne sont pas reprises : détermination de la durée des congés payés, prestations familiales, droits découlant de l'ancienneté ou non-diminution de la rémunération et des avantages y afférents.

En revanche, le paragraphe impose au salarié une obligation d'informer son employeur, d'une part lors de sa nomination, d'autre part de la tenue de chaque réunion dès réception de la convocation.

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Le Sénat a adopté l'article 3 sans modification.

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M. Charles de Courson a présenté un amendement tendant à prévoir l'élection du président de l'Autorité des marchés financiers parmi les magistrats qui y siègent. Il s'agit d'assurer la plus grande indépendance possible au président.

Votre Rapporteur, s'y étant déclaré défavorable et ayant relevé que le président de la Commission des opérations de bourse avait fait preuve, jusqu'à présent, d'une grande indépendance sans être pour autant magistrat, M. Charles de Courson a retiré l'amendement.

M. Charles de Courson a ensuite présenté un amendement tendant à prévoir l'élection des membres du collège de l'Autorité des marchés financiers issus du Conseil d'État, de la Cour de cassation et de la Cour des comptes, par leurs pairs, afin d'éviter des nominations aléatoires.

Votre Rapporteur a considéré que l'Autorité ne pouvait être comparée à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) et qu'il convenait de s'assurer que les personnes désignées soient les plus compétentes possible.

M. Charles de Courson a relevé qu'aucune compétence n'était spécialement exigée par le projet de loi. Votre Commission a rejeté, sur proposition du Rapporteur, l'amendement.

La Commission a ensuite examiné un amendement rédactionnel de votre Rapporteur, visant à rétablir l'ordre classique des présidents des assemblées chargées de nommer des membres du collège de l'Autorité des marchés financiers.

Votre Commission a adopté cet amendement (amendement n° 61).

M. Charles de Courson a présenté un amendement visant à permettre aux associations de défense des actionnaires minoritaires de désigner des membres au sein du collège de la future autorité des marchés financiers. Son auteur ayant rappelé que le projet de loi leur était finalement destiné, a jugé utile une telle ouverture de la composition du collège.

Votre Rapporteur a fait valoir que les dites associations n'étaient guère structurées et que le texte garantissait l'indépendance des membres du collège.

M. Philippe Auberger a partagé ce point de vue et estimé qu'il ne fallait pas prévoir de contraintes trop strictes pour la nomination des membres du collège.

M. Charles de Courson a alors retiré l'amendement, afin d'en préparer une nouvelle rédaction.

Votre Commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel de votre Rapporteur précisant que le président de l'Autorité des marchés financiers avait qualité pour agir au nom de celle-ci, jugeant que cette disposition avait davantage sa place à l'article 3 (amendement n° 62).

M. Charles de Courson a présenté un amendement permettant le renouvellement, une fois, du mandat du président de l'Autorité des marchés financiers.

Votre Rapporteur, ayant observé que le mandat du président de la Commission des opérations de bourse n'était pas renouvelable pour assurer l'indépendance de celui-ci, l'amendement a alors été retiré.

Votre Rapporteur a présenté un amendement visant à aligner la durée du mandat du représentant de la Banque de France sur celle des autres membres du collège.

M. Philippe Auberger s'est interrogé sur l'intérêt de cet amendement notant que le représentant de la Banque de France était l'un des sous-gouverneurs, le second siégeant à la Commission bancaire.

Votre Rapporteur, ayant rappelé que seul le mandat du président ne doit pas être renouvelable, votre Commission a adopté son amendement (amendement n° 63).

Votre Commission a ensuite examiné un amendement de votre Rapporteur, élargissant la composition de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers, afin d'y prévoir la présence de personnes ayant une compétence en matière de comptabilité.

Votre Commission a adopté l'amendement de votre Rapporteur (amendement n°64).

Votre Commission a adopté un amendement de votre Rapporteur visant à prévoir la consultation des organisations représentatives des salariés des sociétés de gestion d'organismes de placements collectifs pour la représentation des membres de la commission des sanctions (amendement n° 65).

M. Charles de Courson a présenté un amendement permettant aux salariés membres de l'Autorité des marchés financiers de disposer du temps nécessaire pour assurer leurs fonctions.

Votre Rapporteur, a fait observer que le souhait de l'auteur de l'amendement était satisfait par des dispositions figurant au paragraphe 5 de l'article 3. M. Charles de Courson a alors retiré son amendement.

Puis, votre Commission a adopté l'article 3, ainsi modifié.

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Article 4

(article L. 621-3 du code monétaire et financier)

Commissaire du gouvernement et prise de décision

au sein de l'Autorité des marchés financiers

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 621-3, prévoyant la présence d'un commissaire du Gouvernement au sein de l'AMF (paragraphe I) et précisant les modalités de prise de décision (paragraphe II).

- paragraphe I : commissaire du Gouvernement

Le présent article reprend les dispositions relatives au CMF (cf. actuel article L. 622-2), concernant la présence d'un commissaire du Gouvernement et les prérogatives de celui-ci. Il convient de rappeler que, depuis la loi du 2 août 1989 relative à la sécurité et à la transparence du marché financier, la COB n'était plus dotée d'un commissaire du Gouvernement. Cependant, l'actuel article L. 621-3 prévoit qu'un « représentant du ministre chargé de l'économie » peut être entendu par la COB, sauf en matière de décisions individuelles et peut soumettre toute proposition à la délibération de la COB, sauf en matière de décisions individuelles. En pratique, ce représentant du ministre agit comme un commissaire du Gouvernement.

Les pouvoirs du commissaire du Gouvernement auprès de l'AMF sont analogues à ceux du commissaire du Gouvernement auprès du CMF. Il siège auprès de toutes les formations de l'Autorité, y compris donc la commission des sanctions et ses éventuelles sections, « sans voix délibérative ». Cependant, il est précisé que les décisions de la commission des sanctions doivent être prises « hors de sa présence », ce qui n'est pas le cas actuellement au sein du CMF ou du Conseil de discipline de la gestion financière. Rappelons que le représentant du ministre ne peut assister à aucune réunion de la COB relative à toutes décisions de portée individuelle (octroi d'agréments ou de visas, sanctions,...).

Enfin, il peut, sauf en matière de sanctions, demander une nouvelle délibération dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. Aux termes de l'article 8 du décret du 3 octobre 1996 relatif à la formation et à l'organisation du CMF, le commissaire du Gouvernement dispose d'un délai de 3 jours pour demander cette seconde délibération.

- paragraphe II : délibérations de l'Autorité des marchés financiers

Reprenant les dispositions relatives à la COB (quatrième alinéa de l'actuel article L. 621-3) et au CMF (premier alinéa de l'actuel article L. 622-2), ce paragraphe précise que les décisions de chaque formation de l'Autorité sont prises à la majorité des voix et que, en cas de partage égal des voix, la voix du président de la formation est prépondérante.

De même, comme pour la COB (4° de l'actuel article L. 621-5) et le CMF (cinquième alinéa de l'actuel article L. 622-2), il est prévu que, en cas d'urgence constatée par son président, le collège peut statuer par voie de « contributions écrites ». L'article 4 du décret précité relatif à la formation et à l'organisation du CMF précise que, dans ce cas, le président recueille, dans un délai qu'il fixe mais qui ne peut être inférieur à deux jours, les votes des membres, ainsi que les observations du commissaire du Gouvernement. Il est à noter que cette procédure écrite n'est pas applicable à la commission des sanctions, comme elle n'est d'ailleurs pas actuellement quand la COB ou le CMF statuent en matière de sanctions. Il s'agit, en effet, de conserver un caractère collégial aux délibérations en ce domaine.

Au-delà de ces deux dispositions législatives, un dispositif à deux étages détaillera la procédure et le mode de délibération des formations de l'Autorité. Un décret en Conseil d'État fixera les « règles » et son règlement général « les modalités de mise en œuvre de ces règles ».

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Le Sénat a adopté un amendement présenté par sa commission des Finances limitant la présence du commissaire du Gouvernement, en prévoyant qu'il ne pourra pas assister aux votes, non seulement de la commission des sanctions comme le prévoit le projet de loi, mais aussi du collège lorsqu'il délibère de questions à caractère individuel.

La solution adoptée par le Sénat rapproche davantage la situation du commissaire du Gouvernement auprès de l'AMF de celle du représentant du ministre auprès de la COB. Cependant, elle peut se révéler délicate à mettre en œuvre, dans la mesure où la pratique actuelle du CMF - qui devrait perdurer au sein de l'AMF - montre que beaucoup de décisions individuelles sont prises très rapidement (il est alors délicat de distinguer la délibération du vote lui-même) ou ne donne pas lieu à un vote formel et sont prises par consensus tacite.

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Votre Rapporteur, a présenté un amendement de retour au texte initial du projet de loi tendant à prévoir la présence du commissaire du Gouvernement lors des réunions de l'Autorité des marchés financiers, même lorsque ses délibérations concernent des décisions de portée individuelle, son auteur ayant jugé la position du Sénat peu judicieuse.

Votre Commission a adopté cet amendement (amendement n° 66).

M. Charles de Courson a présenté un amendement supprimant la possibilité offerte au commissaire du Gouvernement de demander une deuxième délibération, estimant que ce pouvoir était sans objet et qu'il n'avait jamais été utilisé à la Commission des opérations de bourse.

Votre Rapporteur, s'est déclaré défavorable à l'amendement et a estimé qu'il était normal que l'opposition du commissaire du Gouvernement à certaines décisions puisse se traduire par des demandes de deuxième délibération, même si ce pouvoir est d'un maniement tout à fait exceptionnel.

Votre Commission a ensuite rejeté l'amendement.

Puis, elle a adopté l'article 4, ainsi modifié.

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Article 5

(article L. 621-4 du code monétaire et financier)

Obligations des membres de l'Autorité des marchés financiers

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 621-4 relatives aux obligations imposées aux membres de l'Autorité, qu'il s'agisse d'obligations de nature déontologique (paragraphe I), du respect du secret professionnel (paragraphe II) ou d'honorabilité de ses membres (paragraphe III).

- paragraphe I : obligations de nature déontologique

Le présent paragraphe reprend, en les renforçant, les obligations déontologiques imposées aux membres de la COB (actuel article L. 621-4) ou du CMF (actuel article L. 622-5).

D'une part, chaque membre de l'AMF (collège ou commission des sanctions) devra informer le président de celle-ci des « intérêts », des « fonctions dans une activité économique ou financière » ou des « mandats au sein d'une personne morale » qu'il détient ou exerce ou qu'il viendrait à détenir ou à exercer. Cette obligation d'information est élargie aux intérêts, fonctions ou mandats détenus ou exercés au cours des deux années qui ont précédé la nomination.

Le règlement général du CMF explicite ce qu'il convient de prendre en compte en matière d'intérêts détenus. Il mentionne la liste des « participations en instruments financiers » ainsi que la liste de « tous autres actifs (...) susceptibles de le placer en situation de conflits d'intérêts ».

Comme c'est le cas pour le CMF, il est précisé que ces informations, concernant le président et les autres membres de l'Autorité, sont tenues à la disposition de l'ensemble des membres de l'Autorité. Le règlement général du CMF précise qu'ils doivent en faire la demande auprès du président.

D'autre part, le présent paragraphe interdit à tout membre de l'Autorité de délibérer dans une affaire dans laquelle il a lui-même un intérêt ou dans laquelle une personne morale - au sein de laquelle il a, aux cours des deux années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat - a également un intérêt. Une telle règle, hormis la référence aux deux années précédent la délibération, existe aujourd'hui pour les membres de la COB ou ceux du CMF.

Dans le même esprit, tout membre de l'Autorité ne pourra délibérer dans une affaire dans laquelle il a lui-même représenté une des parties au cours des deux années précédent la délibération ou dans laquelle une personne morale - au sein de laquelle il a, aux cours des deux années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat - a également représenté une des parties au cours de la même période. Il convient de noter que cette période de deux années constitue un moyen terme entre la règle analogue concernant les membres de la COB (36 mois) et celle concernant les membres du CMF (18 mois).

Enfin, le présent paragraphe reprend une disposition concernant actuellement le CMF et confie au président de l'Autorité le soin de prendre les « mesures appropriées » pour assurer le respect de ces obligations et interdictions. En outre, il renvoie au règlement général de l'Autorité le soin de déterminer les « modalités de prévention des conflits d'intérêt ».

- paragraphe II : secret professionnel

Le présent paragraphe astreint au secret professionnel tous ceux qui, d'une manière ou d'une autre, sont appelés à participer à l'exécution des missions confiées à l'AMF :

- membres, salariés et préposés de celle-ci,

- experts et personnes consultées, notamment au sein des commissions consultatives,

- personnes participant ou ayant participé aux contrôles et enquêtes ; les nouveaux articles L. 622-9-1 et L. 622-9-2 (cf. article 11 du projet de loi) énumèrent les personnes auxquelles l'Autorité peut faire appel pour exercer ces contrôles et enquêtes.

Ce paragraphe reprend, en les adaptant, les dispositions actuelles concernant le CMF (actuel article L. 622-6), celles relatives à la COB étant plus succinctes et ne visant que ses membres et agents (actuel article L. 621-11).

Le respect du secret professionnel est assuré dans les conditions prévues à l'article L. 642-1, qui renvoie aux peines prévues à l'article 226-13 du code pénal (soit un an d'emprisonnement et/ou 15 000 euros d'amende). En vertu de l'article 226-14 du même code, il n'y a pas violation du secret professionnel et ces peines ne sont pas applicables dans les cas « où la loi impose ou autorise la révélation du secret ».

D'ailleurs, le présent paragraphe prévoit que le secret n'est pas opposable à l'autorité judiciaire dans deux cas : lorsqu'elle agit dans le cadre d'une procédure pénale d'une part, lorsqu'elle agit dans le cadre d'une procédure de liquidation judiciaire d'une des entreprises soumises au contrôle de l'Autorité en vertu du nouvel article L. 621-9 (cf. article 10 du projet de loi). Dépassant le strict cadre des procédures pénales, le nouvel article L. 621-20-1 (cf. article 17 du projet de loi) permet, en outre, au procureur de la République d'obtenir la « communication de tous les renseignements détenus par [l'Autorité] dans le cadre de l'exercice de l'exercice de ses missions ».

La levée du secret professionnel à l'égard de l'autorité judiciaire pose une difficulté juridique, lorsque le renseignement détenu par l'Autorité provient d'un de ses homologues étrangers dans le cadre de la coopération internationale.

En effet, l'article 16 de la directive « Abus de marché » organise l'échange d'informations entre les autorités compétentes des États membres. Ces informations sont également couvertes par le secret professionnel et l'autorité qui les reçoit ne peut les utiliser que dans l'exercice de ses fonctions telles que définies par la directive ou « dans le cadre de procédures administratives ou judiciaires spécifiquement liées à cet exercice ». Deux exceptions sont prévues à cette limitation de l'utilisation des informations transmises : les obligations incombant à l'autorité qui a reçu l'information dans le cadre des procédures pénales d'une part, si l'autorité qui a transmis l'information y consent. Ces dispositions de la directive sont d'ailleurs transposées dans la nouvelle rédaction de l'article L. 621-21 (cf. article 18 du projet de loi).

Les deux exceptions prévues par le présent article semblent couvertes par les dispositions de la directive. Les procédures pénales sont explicitement mentionnées et on peut considérer que les procédures de liquidation judiciaire d'une personne soumise au contrôle de l'Autorité constituent des procédures judiciaires spécifiquement liées à l'exercice des missions de l'Autorité.

- paragraphe III : honorabilité des membres de l'Autorité des marchés financiers

Le présent paragraphe rend applicables aux membres de l'Autorité les dispositions de la loi du 30 août 1947 relative à l'assainissement des professions commerciales et industrielles.

Cette loi instaure des interdictions d'exercice d'une profession commerciale ou industrielle, directement ou par personne interposée, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui en cas de condamnations pour un certain nombre d'infractions limitativement énumérées. Sont également visées les fonctions de direction, de gérance ou d'administration d'une entreprise, quel que soit son statut juridique et les fonctions de membres du conseil de surveillance ou de commissaire dans toutes les sociétés, quelles que soient leurs formes juridiques. La durée de cette incapacité est fixée par le juge, mais elle ne peut être inférieure à 5 ans.

La liste des condamnations visées est particulièrement difficile à exploiter : puisque cette loi fait référence à l'ancien code pénal. Elle concerne toutes les peines d'emprisonnement en cas de crime et celles d'au moins trois mois sans sursis pour un certain nombre de délits (vol, escroquerie, abus de confiance, recel, attentats aux mœurs, délits prévus par le code du commerce,...).

La référence à la loi de 1947 devrait être provisoire. Les dispositions relatives aux interdictions d'exercer des professions dans le domaine bancaire ou financier, actuellement disparates et non codifiées, devraient faire l'objet d'une réécriture profonde. En effet, le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures de simplification et de codification du droit prévoit, dans son article 27, qu'une ordonnance viendra modifier le code monétaire et financier, afin d'apporter aux dispositions relatives aux interdictions d'exercice des activités bancaires et financières les modifications « qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la nécessité et de la proportionnalité des peines et [pour] assurer l'égalité de traitement entre les différentes professions bancaires et financières ».

Enfin, ce paragraphe interdit de nommer membre de l'Autorité une personne sanctionnée au cours des cinq dernières années au titre des dispositions du code monétaire et financier.

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Le Sénat a adopté deux amendements présentés par sa commission des Finances.

Le premier propose une rédaction nouvelle de l'énumération des personnes soumises au secret professionnel :

- il remplace le terme « salariés » par celui de « personnels », afin de tenir compte de la pluralité des statuts de ceux-ci au sein de l'AMF ;

- il supprime la mention des « personnes consultées », puisque celles-ci n'ont pas vocation à être soumises au secret professionnel ; en effet, il s'agira le plus souvent de représentants des associations professionnelles consultées dans le cadre de l'élaboration d'un texte réglementaire ; en revanche, la mention des « experts nommés dans les commissions consultatives » est maintenue ;

- il supprime la mention des « personnes participant ou ayant participé aux contrôles et enquêtes », celle-ci étant redondante avec celle des « préposés », que l'amendement maintient, qui englobe toutes les personnes associées aux travaux de l'AMF et qui ne sont pas liées avec l'Autorité par un contrat de travail.

Le second précise que le fait d'avoir été sanctionné pour des manquements au code monétaire et financier empêche non seulement d'être nommé membre de l'AMF, comme le prévoit le projet de loi, mais également de le demeurer si la sanction a été prononcée après la nomination de l'intéressé.

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Votre Commission a examiné un amendement de M. Charles de Courson tendant à allonger d'un an la période faisant l'objet d'une information relative aux intérêts détenus par tout membre de l'Autorité des marchés financiers.

Votre Rapporteur a indiqué que le projet de loi prévoyait deux types de délais, l'un relatif aux incompatibilités, qui a été allongé ; l'autre concernant l'obligation de se déporter, et le projet a retenu une solution intermédiaire acceptable.

Votre Rapporteur s'étant donc déclaré opposé à l'amendement, celui-ci a été retiré.

Puis votre Commission a examiné un amendement de M. Charles de Courson visant à étendre le champ d'application de l'incompatibilité, en interdisant la délibération d'un membre de l'Autorité des marchés financiers dans une affaire dans laquelle il aurait eu un intérêt, au cours des deux dernières années. L'auteur a souligné l'existence de deux risques : soit les membres de l'Autorité ont une activité professionnelle et des interférences entre celle-ci et le mandat peuvent avoir lieu, soit on interdit toute activité professionnelle et les membres ne pourront être que des personnes âgées ou en fin de carrière.

Votre Rapporteur s'est déclaré sensible à ces arguments, mais a souhaité que l'amendement fasse référence aux intérêts, passés ou actuels, des membres.

M. Alain Rodet s'est interrogé sur la notion « d'intérêt ». S'agit-il de mandats, de fonctions ou encore du portefeuille des titres détenus ?

Votre Rapporteur a répondu que l'article 5 du projet de loi définissait la notion d'intérêt.

M. Charles de Courson ayant rectifié l'amendement pour tenir compte des conflits d'intérêts en cours, la Commission a adopté cet amendement (amendement n° 67).

Votre Commission a examiné un amendement de M. Charles de Courson visant à renforcer la prévention des conflits d'intérêt par l'extension des devoirs de déport dans les affaires impliquant des proches des membres de l'Autorité des marchés financiers.

Votre Rapporteur, ayant fait observer que l'extension proposée était excessive et que les membres d'une même famille pouvaient parfaitement avoir des points de vue différents, l'amendement a été retiré.

Votre Commission a examiné un amendement de M. Charles de Courson interdisant aux membres de l'Autorité des marchés financiers d'exercer un mandat d'administrateur ou de dirigeant d'entreprise entrant sous la tutelle de l'Autorité des marchés financiers. M. Charles de Courson a souligné qu'il convenait de mieux assurer le contrôle des incompatibilités. Le ministère semble s'être déclaré prêt au risque de conflit d'intérêt, mais le projet de loi ne prévoit aucun mécanisme de sanction à la hauteur de ce risque. Le président de l'Autorité des marchés financiers n'a, par exemple, pas de pouvoir d'investigation.

Votre Rapporteur a estimé nécessaire de ne pas exclure de l'Autorité des marchés financiers des personnes en activité : la matière à traiter est complexe et il faut pouvoir faire appel à des personnes expérimentées.

M. Charles de Courson a admis qu'aucun problème n'avait été constaté jusqu'à présent et que l'affaire de la Commission des opérations de bourse concernait son personnel et non ses membres. Mais il faut souligner une carence en moyens d'investigation.

M. Philippe Auberger a partagé le point de vue du Rapporteur et considéré l'amendement comme disproportionné. C'est au président de l'Autorité des marchés financiers de veiller au respect de règles déontologiques, lesquelles devraient d'ailleurs figurer dans un règlement intérieur. Les services de l'inspection sont à sa disposition pour l'exercice de cette mission.

M. Charles de Courson a retiré l'amendement, en annonçant le dépôt d'une autre version destinée à faire respecter des principes déontologiques.

Il a ensuite présenté un amendement disposant que le secret professionnel des membres du personnel de l'Autorité des marchés financiers n'est pas opposable à la Cour des comptes, par analogie avec ce qui est prévu en faveur du juge pénal.

Votre Rapporteur s'est déclaré prêt à se rallier à un nouvel amendement ayant le même objet, mais visant plus judicieusement le code des juridictions financières et non le code monétaire et financier.

Dans l'attente de cette rédaction, l'amendement a été retiré.

Votre Commission a ensuite adopté l'article 5, ainsi modifié.

Article 6

(article L. 621-5 du code monétaire et financier)

Délégations de pouvoirs au sein de l'Autorité des marchés financiers

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 621-5 afin de préciser les conditions de délégation de pouvoirs au sein de l'AMF.

Il s'inspire des actuelles dispositions relatives à la COB (rédaction actuelle de l'article L. 621-5, issue de la loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques) ou au CMF (actuel articles L. 622-2).

Il renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de fixer les conditions et limites des délégations de pouvoirs autorisées.

D'une part, le collège peut donner délégation au président ou, en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier, à un autre membre, « pour prendre les décisions à caractère individuel relevant de [la] compétence [du collège] ». Il n'est plus fait allusion à l'interdiction de la délégation des décisions en matière de sanctions, puisque celles-ci relèvent désormais de la commission des sanctions et non plus du collège. À titre d'exemple, l'actuel règlement général du CMF prévoit que cette délégation peut porter sur l'approbation d'une extension du programme d'activité d'un prestataire déjà habilité, de l'approbation d'un projet d'exercice du passeport en libre prestation de services d'un prestataire habilité, de l'habilitation de personnes physiques ou morales membres d'un marché réglementé (dès lors qu'elles sont déjà membres d'un autre marché réglementé de l'Espace économique européen) ou de la délivrance de la carte professionnelle de prestataire habilité.

D'autre part, le collège peut donner délégation à une commission spécialisée pour prendre des décisions de portée individuelle (cf. nouvelle rédaction de l'article L. 621-1 proposée par l'article 3 du projet de loi).

Enfin, le président de l'Autorité peut déléguer sa signature dans les matières où il tient de dispositions législatives ou réglementaires une compétence propre. Cette possibilité est ouverte au président de la COB par la loi (actuel article L. 621-5). Le décret du 14 mars 2002 prévoit que cette délégation peut être donnée à un autre membre de la commission pour signer les actes liés à la mise en œuvre de la procédure de sanction, au directeur général ou au secrétaire général ou aux chefs de service pour les autres matières. En revanche, elle n'est prévue que par le règlement général du CMF pour le président de celui-ci : elle ne vaut que pour les actes nécessaires au fonctionnement du conseil et ne peut être donnée qu'au secrétaire général ou à l'un de ses collaborateurs.

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Le Sénat a adopté un amendement rédactionnel présenté par sa commission des Finances, précisant que la délégation ne peut être donnée, en cas d'absence du président, qu'à un autre membre du collège.

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Votre Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 7

(articles L. 621-5-1 à L. 621-5-5 [nouveaux] du code monétaire et financier)

Fonctionnement et ressources de l'Autorité des marchés financiers

Cet article du projet insère dans le code cinq nouveaux articles à la fin de la section 3 (« Règles de fonctionnement »), concernant les services et la gestion du personnel de l'AMF (nouvel article L. 621-5-1), son autonomie financière (nouvel article L. 621-5-2), les taxes constituant ses ressources (nouvel article L. 621-5-3), les règles de recouvrement de celles-ci (nouvel article L. 621-5-4) et son régime comptable (nouvel article L. 621-5-5).

- article L. 621-5-1 : Services et gestion du personnel de l'Autorité des marchés financiers

Ce nouvel article détermine les principes généraux de l'organisation des services de l'Autorité et de la gestion de son personnel. Aujourd'hui, ces dispositions figurent respectivement dans le décret du 3 janvier 1968 portant organisation administrative et financière de la COB et dans le décret du 3 octobre 1996 relatif à la formation et à l'organisation du CMF, voire dans le règlement général de celui-ci.

Le premier alinéa de cet article précise que l'Autorité dispose de services dirigés par un « secrétaire général ». Si le titre change (la COB dispose d'un directeur général et le CMF d'un secrétaire général), les modalités de désignation restent pratiquement identiques : décision du président après avis du collège (ce qui n'est pas le cas aujourd'hui pour la COB) et agrément du ministre chargé de l'économie.

Le deuxième alinéa précise que le personnel de l'Autorité peut relever de trois statuts différents : agents contractuels de droit public, salariés de droit privé, fonctionnaires mis à disposition ou détachés. Outre la présence de fonctionnaires, permise aussi bien pour la COB que pour le CMF, seule la première pouvait employer des contractuels de droit public, les agents du CMF étant obligatoirement des salariés de droit privé.

La mise à disposition de fonctionnaires se fait dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. Elles sont aujourd'hui fixées par le décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'État et à certaines modalités de cessation définitive de fonctions.

Il convient de rappeler que, au 31 décembre 2002, les effectifs de la COB s'élevaient à 270 personnes (235 contractuels de droit public et 35 fonctionnaires détachés) et ceux du CMF à 44 (tous salariés de droit privé).

Le dernier alinéa donne compétence au collège pour, sur proposition du secrétaire général, fixer « le règlement intérieur et les règles de déontologie » applicables au personnel et établir le « cadre général des rémunérations ». Cette disposition s'inspire de la situation actuelle du CMF, puisque l'article 1-3-3 de son règlement général confie au conseil le soin de fixer, dans un règlement intérieur, les règles déontologiques applicables au personnel. En revanche, le régime du personnel de la COB est fixé par le président, après consultation du collège (article 7 du décret du 3 janvier 1968 précité).

Enfin, le dernier alinéa comporte une disposition qui n'a pas d'équivalent à la COB ou au CMF, selon laquelle le secrétaire général « rend compte de la gestion des services » au collège, dans les conditions déterminées par celui-ci.

- article L. 621-5-2 : autonomie financière de l'Autorité des marchés financiers

En précisant que l'AMF dispose de l'« autonomie financière », cet article apparaît largement tautologique, puisque l'autonomie financière constitue l'un des attributs de la personnalité morale. En outre et sur ce point, l'octroi de la personnalité morale à l'Autorité n'apporte guère de modifications par rapport à la situation actuelle de la COB ou du CMF, qui disposent déjà, à l'instar de la plupart des autorités administratives indépendantes, d'une autonomie financière « suffisamment assurée », comme l'écrit le Conseil d'État dans son rapport de 2001.

Le nouvel article L. 621-5-2 n'évoque d'ailleurs qu'une seule manifestation de l'autonomie financière, à savoir que l'Autorité « arrête son budget » sur proposition du secrétaire général. Il s'agit d'une disposition à l'évidence de nature réglementaire, existant déjà pour la COB (article 9 du décret de 1968 précité) et pour le CMF (article 1-2-1 de son règlement général). Il en existerait bien d'autres, dont certaines d'ailleurs ne sont pas mentionnées dans cet article, mais dans l'article L. 621-5-5 (cf. infra). C'est, en effet, cet article qui prévoit que les dispositions de la loi du 10 août 1922 relative à l'organisation du contrôle des dépenses engagées ne sont pas applicables à l'AMF et que le régime comptable de celle-ci sera fixé par décret en Conseil d'État.

Il apparaît à votre Rapporteur que l'existence de deux articles différents ne se justifie pas et que l'ensemble des dispositions afférentes au régime financier et comptable de l'Autorité aurait plus sa place dans le premier d'entre eux, l'article L. 621-5-1.

À l'inverse, la présence, dans cet article, du dernier alinéa, précisant que le président de l'Autorité a qualité pour agir au nom de celle-ci devant toute juridiction, n'est guère justifiée, ses effets dépassant le strict cadre financier pour s'appliquer à l'ensemble de l'activité de l'Autorité. Par ailleurs, on peut se demander si elle ne constitue pas une simple conséquence de l'octroi de la personnalité morale à l'AMF. À tout le moins, elle trouverait plus sa place au sein de l'article L. 621-2 relatif à l'organisation de l'Autorité.

Si l'Autorité continuera, comme la COB ou la CMF actuellement, de disposer de ressources propres, le régime juridique de celles-ci est profondément modifié par l'article L. 621-5-1.

À l'origine financée sur crédits budgétaires, c'est la loi de finances pour 1985 qui a autorisé la COB à percevoir « sur les personnes publiques ou privées des redevances, dans la mesure où ces personnes publiques ou privées rendent nécessaire ou utile l'intervention de la commission ou dans la mesure où elles y trouvent leur intérêt »5. Le montant de ces redevances est fixé par décret en Conseil d'État et celles-ci sont actuellement régies par un décret du 27 décembre 2001(6).

Pour sa part, le CMF dispose également de ressources propres. Baptisées « cotisations » par son règlement général, elles sont dues « d'une part par les personnes dont l'activité relève du pouvoir de contrôle du conseil, d'autre part par les initiateurs d'opérations financières relevant de [sa] compétence ». Le régime de ces cotisations est déterminé par le CMF lui-même et relève actuellement de trois décisions du 19 décembre 2001.

Le régime juridique actuel de ces redevances ou cotisations était, pour le moins discutable. Malgré les précautions sémantiques de la loi de finances pour 1985, il est clair que les ressources perçues par la COB ne sauraient être considérées comme des redevances pour service rendu. À l'évidence, elles ne remplissent guère les critères dégagés par la jurisprudence du Conseil d'État. Elles ne constituent pas la contrepartie directe d'un service rendu au profit des personnes qui les acquittent et il n'existe pas de proportionnalité entre la redevance et le coût réel du service rendu. Comme l'écrit le Conseil d'État dans son rapport de 2001, « le service rendu par l'autorité de régulation d'un marché, s'il profite dans une certaine mesure aux opérateurs, relève plutôt de la mission d'intérêt général d'assurer le bon fonctionnement du marché ». Il en conclut donc que « les « redevances » en cause doivent être rangées parmi les impôts de toute nature avec les exigences constitutionnelles qui en découlent de détermination par la loi de leur régime ».

C'est pourquoi le nouvel article L. 621-5-1 précise que les ressources de l'Autorité sont constituées du produit de « taxes », dont les règles d'assiette, de taux et de modalités de recouvrement sont précisés par le nouvel article L. 621-5-2.

Le dispositif proposé respecte les dispositions de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances. D'une part, l'Autorité peut se voir affecter directement de telles taxes, puisqu'elle remplit une mission de service public. D'autre part, le régime de ces impositions, qui n'affectent pas l'équilibre budgétaire, peut être fixé par une loi ordinaire.

- article L. 621-5-3 : taxes affectées à l'Autorité des marchés financiers

Cet article définit les taxes dont seront redevables les personnes soumises au contrôle de l'Autorité. Il distingue des « droits fixes » (paragraphe I) et des « contributions » (paragraphe II). Tous sont, à l'heure actuelle déjà, perçus par la COB ou le CMF.

Les droits fixes sont dus à raison de certaines taches entrant dans les compétences de l'Autorité. Ils sont au nombre de huit :

1° publication des déclarations de franchissement de seuil ou de clauses d'une convention prévoyant des conditions préférentielles de cession ou d'acquisition d'actions,

2° examen de l'obligation de dépôt d'une offre publique,

3° contrôle d'un document de référence annuel ou du document de base d'une société cotée sur un marché réglementé,

4° autorisation de commercialisation d'un organisme de placement collectif de droit étranger,

5° enregistrement préalable d'un document d'information sur un programme d'émission de titres de créances ou portant sur des contrats financiers à terme,

6° visa d'un document d'information sur l'admission de titres de créances émis sur le fondement de droits étrangers,

7° visa préalable d'un document d'information sur une tranche d'émission de warrants,

8° dépôt d'un document d'information ou d'un projet de contrat-type relatif à un placement en biens divers.

Les contributions variables sont dues à raison des contrôles effectuées par l'Autorité, soit :

- de manière ponctuelle sur une opération particulière : contrôle d'une offre publique d'acquisition, d'une offre publique de retrait ou de garantie de cours (1°) et visa préalable d'un document d'information sur une émission, une cession dans le public, une admission aux négociations sur un marché réglementé ou un rachat de titres (2°),

- soit de manière continue sur les personnes soumises à son contrôle (3°), le montant de la contribution variant avec la nature de l'activité exercée.

Pour conserver en partie la souplesse du régime actuel de ces ressources, l'article L. 621-5-2 ne fixe pas directement le montant des droits fixes ou les taux des contributions variables. Il se borne, pour les premiers, à fixer un montant minimal et maximal et, pour les secondes, un taux plafond. Les montants et les taux effectifs seront déterminés par décret.

Comme le montre le tableau ci-après, les dispositions du présent article reprennent les celles actuellement en vigueur, tant pour la COB (article 8-1 du décret du 3 janvier 1968, issu d'un décret du 29 décembre 2001) que pour le CMF (trois décisions du CMF en date du 19 décembre 2001). Ainsi, les fourchettes définies sont compatibles avec les montants ou taux actuellement en vigueur. Cependant, cette réécriture est l'occasion d'un certain nombre de simplifications : taux ou montant unique se substituant à un barème, suppression des distinctions entre OPCVM, etc.

L'article L. 621-5-3 détermine également la date à laquelle ces droits et contributions sont exigibles. Lorsqu'il s'agit de la délivrance d'un visa préalable, d'une autorisation de commercialisation ou du contrôle d'un document d'information, la taxe est exigible au jour du dépôt du document. Pour l'examen de l'obligation de dépôt d'une offre publique, le droit est exigible à la date de la décision de l'AMF. La contribution est exigible à la date de publication des résultats d'une offre publique ou le jour de la clôture d'un appel public à l'épargne.

La nature des ressources actuelles de la COB et du CMF, et demain de l'Autorité, fait que celles-ci sont très sensibles à l'évolution de l'activité sur les marchés financiers et à celle du niveau des cours. Cette part des ressources sensibles à la conjoncture a ainsi pu atteindre 76 % des ressources de la COB en 1999 et elle est encore de la moitié de celles-ci en 2002. Cependant, elle a entraîné une diminution de plus de 50 % des ressources de la COB au cours de la même période, celles-ci passant de 57,3 à 27,9 millions d'euros. La sensibilité des ressources du CMF est un peu moindre, puisque la part variable a représenté 40 % du total en 1999 et 19 % en 2002. Au cours de la même période, les ressources totales du CMF sont passées de 11,2 à 9,8 millions d'euros (- 12,5 %).

Au regard de cette relative atonie prévisible des ressources, il convient de relever les nécessités d'un renforcement de l'action de l'Autorité résultant, soit du transfert de certaines compétences opéré par le projet de loi (contentieux du Conseil de discipline de la gestion financière, contrôle des démarcheurs et des conseillers en investissements financiers), soit de l'évolution vers une plus grande fragmentation des marchés et une sophistication croissante des produits et des opérations.

Certes, l'AMF va hériter de ses devancières d'un fonds de roulement non négligeable, qui s'élèverait à 55 millions d'euros à la fin de 2003, soit plus d'une année de fonctionnement. Mais d'après certaines simulations financières, il pourrait être sensiblement entamé au cours des toutes prochaines années, surtout si l'AMF optait pour un renforcement de ses moyens, dont nul ne peut nier le caractère souhaitable.

La suggestion de créer des taxes nouvelles moins volatiles, par exemple assise sur la capitalisation boursière des sociétés cotées, a été avancée. Force est néanmoins de constater que l'urgence n'est pas telle que cette question doive être tranchée dans le cadre de la discussion du présent projet de loi, sans un examen attentif de ses éventuelles conséquence et sans un minimum de concertation avec les acteurs de la place.

En revanche, il convient de rappeler que les modifications apportées en 2001 aux ressources de la COB et du CMF ont conduit à en réduire le taux ou le montant. Ces décisions, provoquées par l'importance des ressources procurées par la forte activité sur les marchés au cours des années précédentes, n'avaient évidemment pas anticipé le retournement de la conjoncture.

Dès lors, il conviendrait que le pouvoir réglementaire ne s'estime pas tenu par les taux et montants actuels et utilise effectivement les marges de manœuvre que lui laisse les fourchettes prévues au présent article. Le législateur pourrait l'y inciter en relevant certains des plafonds proposés.

Objet et assiette de la taxe

Autorité de perception actuelle

Montant perçu en 2002

Montant ou taux actuels

Montant ou taux proposés

Droits fixes :

1° publication des déclarations de franchissement de seuil ou de clauses d'une convention prévoyant des conditions préférentielles de cession ou d'acquisition d'actions

CMF

603 000

750 €

compris entre 500 et 1 000 €

2° examen de l'obligation de dépôt d'une offre publique

CMF

154 000

3 200 €

compris entre 2 000 et 4 000 €

3° contrôle d'un document de référence annuel ou du document de base d'une société cotée sur un marché réglementé

COB

330 000

800 €

compris entre 500 et 1 000 €

4° autorisation de commercialisation d'un organisme de placement collectif de droit étranger

COB

938 000

2 000 € lors de la demande initiale, puis 1 500€ les années suivantes

compris entre 1 000 et 2 000 €, dans les deux cas

5° enregistrement préalable d'un document d'information sur un programme d'émission de titres de créances ou portant sur des contrats financiers à terme

COB

319 000

1 500 €

compris entre 1 000 et 2 000 €

6° visa d'un document d'information sur l'admission de titres de créances émis sur le fondement de droits étrangers

COB

287 000

taux de 0,05 0/00 dans la limite d'une assiette de 100 millions d'euros

compris entre 4 000 et 5 000 €

7° visa préalable d'un document d'information sur une tranche d'émission de warrants

COB

1 187 000

150 € par tranche

150 € par tranche

8° dépôt d'un document d'information ou d'un projet de contrat-type relatif à un placement en biens divers

COB

3 000 (7)

8 000 €

compris entre 6 000 et 8 000 €

Contributions variables

contrôle d'une offre publique d'acquisition, d'une offre publique de retrait ou de garantie de cours

CMF

Part fixe :

1 191 000

Part variable :

757 000

droit fixe :

- 11 000 € en cas de centralisation par l'entreprise de marché

- 9 000 € dans le cas contraire

cotisation variable assise sur la valeur des titres présentés à l'offre, aux taux de :

- 0,125 0/00 jusqu'à 75 millions d'€,

0,0625 0/00 de 75 à 150 millions d'€,

0,025 0/00 au-delà de 150 millions d'€,

- les taux sont doublés lorsque les titres sont obligatoirement nominatifs

droit fixe :

- 10 000 € dans tous les cas

contribution variable assise sur la valeur des titres présentés à l'offre, aux taux de :

- 0,15 0/00 au maximum lorsque l'opération ne porte pas sur des titres donnant accès ou pouvant donner accès au capital,

- 0,30 0/00 dans le cas contraire

visa préalable d'un document d'information sur une émission, une cession dans le public, une admission aux négociations sur un marché réglementé ou un rachat de titres

COB

5 046 000

redevance assise sur la valeur des instruments financiers concernés par l'opération, aux taux de :

- 0,15 0/00 pour toute opération réalisée sur un marché réglementé ou par appel public à l'épargne, sans pouvoir être inférieure à 1 000 €,

-

contribution variable selon la valeur des instruments financiers concernés par l'opération, au taux de :

- 0,20 0/00 lorsque l'opération ne porte pas sur des titres donnant accès ou pouvant donner accès au capital

- 0,05 0/00 lorsqu'elle est réalisée sur des titres de créances

3° contrôle continu

a) des prestataires de services d'investissement (hors gestion de portefeuille pour compte de tiers) et des conservateurs et des administrateurs d'instruments financiers

CMF

5 580 000

cotisation fixe par service pour lequel ils sont habilités, variant selon l'importance des fonds propres :

- divisé par 2 (2 400 €) si les fonds propres sont inférieurs à 45 millions d'€,

- 4 800 € s'ils sont compris entre 45 et 75 millions d'€,

- augmenté de 50 % (7 200 €) s'ils sont compris entre 75 et 150 millions d'€,

- augmenté de 100 % (9 600 €) s'ils sont compris entre 150 et 750 millions d'€,

- augmenté de 200 % (14 400 €) s'ils sont compris entre 750 et 1 500 millions d'€,

- augmenté de 300 % (19 200 €) s'ils sont supérieurs à 1 500 millions d'€.

Plafonnement de la cotisation :

- à 250 000 € pour l'ensemble des personnes relevant d'un même groupe,

- lorsque les redevables sont affiliés à un organe central :

- à 100 000 € pour l'ensemble des personnes affiliées à un organe central, si le nombre de personnes est inférieur ou égal à 25,

- à 200 000 €, si ce nombre est compris entre 26 et 40,

- à 250 000 €, si ce nombre est supérieur à 40.

contribution fixe par service pour lequel ils sont habilités, variant selon l'importance des fonds propres :

- compris entre 2 000 et 3 000 € si les fonds propres sont inférieurs à 45 millions d'€,

- multiplié par 2 (entre 4 000 et 6 000 €) s'ils sont compris entre 45 et 75 millions d'€,

- multiplié par 3 (entre 6 000 et 9 000€) s'ils sont compris entre 75 et 150 millions d'€,

- multiplié par 4 (8 000 à 12 000 €) s'ils sont compris entre 150 et 760 millions d'€,

- multiplié par 6 (12 000 à 18 000€) s'ils sont compris entre 760 et 1 500 millions d'€,

- multiplié par 8 (16 000 à 24 000€) s'ils sont supérieurs à 1 500 millions d'€.

Plafonnement de la cotisation :

- à 250 000 € pour l'ensemble des personnes relevant d'un même groupe

- à 250 000 € pour l'ensemble des personnes affiliées à un organe central

b) des membres des marchés réglementés

CMF

cf supra

600 €

compris entre 500 et 1 000 €

c) des entreprises de marchés, des chambres de compensation et des dépositaires centraux

CMF

1 375 000

cotisation calculée en fonction des fonds propres et de l'activité :

- 525 000 € pour Euronext et Clearnet,

- 325 000 € pour Euroclear France

contribution assise sur le produit d'exploitation multiplié par un taux qui ne peut dépasser 0,3 %.

d) des prestataires agréés pour la gestion de portefeuille pour compte de tiers, des organismes de placement collectifs et leur s sociétés de gestion et des intermédiaires en biens divers

COB

21 937 000

redevance assise sur le montant des encours :

- 0,01 0/00 pour les SCPI,

- 0,01 0/00 pour les sociétés de gestion des fonds commun de créances, sans que la redevance puisse être inférieure à 1 500 €,

-0,01 0/00 pour les SICAV,

- 0,01 0/00 pour les sociétés de gestion de SICAV ou de FCP, sans que la redevance puisse être inférieure à 1 500 €,

- 1 500 € ou la somme de 0,005 0/00 des encours gérés sous mandat et de 0,01 0/00 de l'encours des FCP gérés pour les sociétés de gestion de portefeuille

- 0,01 0/00 pour les autres prestataires agréés pour la gestion de portefeuille pour compte de tiers, sans que la redevance puisse être inférieure à 1 500 €

contribution assise sur le montant des encours ou des actifs gérés sous mandat, multiplié par un taux qui ne peut dépasser 0,015 0/00, sans que la redevance puisse être inférieure à 1 500 €

- article L. 621-5-4 : Modalités de recouvrement des taxes

Cet article précise que toutes les taxes décrites à l'article précédent sont liquidées, ordonnancées et recouvrées selon les modalités prévues pour le recouvrement des recettes des établissements publics administratifs de l'État. Le contentieux relatif à ces droits et contributions relève de la compétence du tribunal administratif.

Ces règles de liquidation, d'ordonnancement et de recouvrement sont définies actuellement par le décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique. Ainsi, les recettes sont liquidées par l'ordonnateur sur les bases fixées par la loi et les règlements. Celui-ci établit les ordres de recettes et les remet, accompagnés des pièces justificatives, à l'agent comptable de l'Autorité qui les prend en charge et les notifie aux redevables. Les créances non recouvrées à l'amiable font l'objet d'états rendus exécutoires par l'ordonnateur et leur recouvrement est poursuivi par l'agent comptable, jusque devant le juge. Les créances peuvent également faire l'objet d'une remise gracieuse ou d'une admission en non-valeur.

L'article L. 621-5-4 précise que le délai de paiement est de 30 jours à compter de la réception de l'avis de paiement, tout en renvoyant à un décret le soin de préciser les conditions et la date à laquelle ces droits et contributions sont acquittés. Aujourd'hui, le délai de paiement est fixé à 20 jours en ce qui concerne la COB (article 8-1 du décret du 3 janvier 1968 précité).

En outre, il prévoit une majoration de ces droits et contributions en cas de retard de paiement. La majoration résulte alors de l'application du taux d'intérêt légal mensualisé par mois de retard à compter du 31ème jour suivant la date de réception de l'avis de paiement, tout mois entamé étant compté en entier. Ce taux de pénalité est moins élevé que celui appliqué à l'heure actuelle pour la COB (0,75 % par mois de retard (8) ).

De même, est prévue une majoration en cas de non communication des renseignements demandés nécessaires à la détermination de l'assiette et à sa mise en recouvrement. La dispositions s'inspire de l'article 1728 du code général des impôts, concernant le défaut de déclaration ou de dépôt d'un acte en matière d'impositions recouvrées par la direction générale des impôts : la majoration est de 10 % ; ce taux peut être porté à 40 % si le document concerné n'a pas été déposé dans les 30 jours suivant une mise en demeure notifiée par pli recommandé, et à 80 % s'il n'a pas été déposé dans les 30 jours suivant une seconde mise en demeure notifiée dans les mêmes conditions.

Il est, en outre, précisé que ces majorations ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de 30 jours à compter de « la notification du document indiquant au redevable la majoration qu'il est envisagé de lui appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations ». cette précision s'inspire des dispositions de l'article 1740 ter A du code général des impôts, en cas d'omission ou d'inexactitude dans les factures présentées en matière de TVA.

Ces majorations sont plus faibles que celles qui sont aujourd'hui prévues par le décret du 3 janvier 1968 précité pour la COB. En ce qui concerne le retard de paiement, le taux de pénalité est de 0,75 % par mois de retard. S'agissant de la non communication d'une information, la pénalité est actuellement du « double du montant éludé » et le décret vise également l'hypothèse de la fourniture d'une information inexacte.

Enfin, le présent article précise que les enquêteurs de l'Autorité contrôlent les déclarations et peuvent demander aux redevables tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites.

- article L. 621-5-5 : Régime comptable de l'Autorité des marchés financiers

Comme c'est le cas actuellement pour la COB (actuelle rédaction de l'article L. 621-3), les dispositions de la loi du 10 août 1922 relative à l'organisation du contrôle des dépenses engagées ne seront pas applicables à l'Autorité et celle-ci ne sera donc pas soumis au contrôle d'un contrôleur financier apposant son visa sur les actes d'engagement de dépenses.

En outre, le présent article renvoie la fixation du régime comptable de l'Autorité à un décret en Conseil d'État.

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Le Sénat a adopté six amendements, présentés par sa commission des Finances.

- article L. 621-5-1 (Services et gestion du personnel de l'Autorité des marchés financiers)

Le premier amendement modifie la procédure de désignation du secrétaire général, en renforçant l'implication du collège : celui-ci est saisi d'une proposition du président, en délibère et émet un avis dans le délai d'un mois. Le secrétaire général ne peut être nommé par le président qu'à l'expiration de ce délai.

Le deuxième amendement met en place des institutions représentatives du personnel dans les conditions de droit commun du code du travail, sous réserve d'éventuelles prévues par décrets en Conseil d'État. Il s'agit d'éviter en la matière toute difficulté qui découlerait de la présence de personnels de statuts différents (salariés de droit privé, contractuels de droit public, fonctionnaires détachés ou mis à disposition).

- article L. 621-5-2 (Autonomie financière de l'Autorité des marchés financiers)

Le troisième amendement est un amendement de précision, indiquant que c'est le collège de l'Autorité qui arrête le budget de celle-ci.

Le quatrième amendement a une portée rédactionnelle, afin de ne pas fermer la possibilité pour l'Autorité de bénéficier d'autres ressources que les taxes instituées par le projet de loi (dons et legs, produits divers, voire subventions).

- article L. 621-5-3 (Taxes affectées à l'Autorité des marchés financiers)

Le cinquième amendement précise que les décrets qui fixeront les montants ou les taux des droits et contributions seront pris après avis du collège de l'AMF, afin de renforcer l'autonomie financière de celle-ci.

- article L. 621-5-6 (nouveau) (Application des règles de « pantouflage » aux personnels de l'Autorité des marchés financiers).

Le sixième amendement introduit un nouvel article codifié, transférant au collège de l'Autorité les missions que l'article 87 de la loi du 19 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures a confiées à la Commission de déontologie de la fonction publique de l'État. Il s'agit, pour elle, « d'apprécier la compatibilité avec leurs fonctions précédentes des activités privées que souhaitent exercer des fonctionnaires devant être placés ou placés dans l'une des situations ou positions statutaires suivantes : 1° Cessation définitive de fonctions ; 2° Disponibilité ; 3° Détachement ; 4° Hors cadres ; 5° Mise à disposition ; 6° Exclusion temporaire de fonctions. »

Comme le souligne le rapport de la commission des Finances, « on ne connaît à ce jour qu'un seul cas d'avis négatif rendu par la commission de déontologie, mais très fréquemment les avis favorables sont néanmoins assortis de conditions (interdiction de contacts avec la COB pendant une longue durée, par exemple). » Ainsi, en 2001, la commission de déontologie a émis 15 avis concernant la COB : 10 avis de compatibilité sans réserve et 5 avec réserve.

Le rapporteur de la commission des Finances a estimé qu'une trop grande sévérité en la matière dissuaderait certaines personnes de venir travailler pour l'AMF. Il a donc jugé préférable que l'appréciation de la compatibilité soit portée par l'AMF elle-même, mieux à même de juger de la réalité des fonctions exercées pour elle et les activités privées envisagées par son agent. Il a, d'ailleurs, souligné que cette difficulté ne se posait pas uniquement pour une autorité comme la COB, mais aussi pour d'autres agences de l'État (France Trésor,...).

Le ministre a admis la réalité des difficultés. Mais parce qu'elles débordent du strict cadre de l'AMF, il a souhaité que la question soit traitée globalement, après que M. Berger, président de chambre à la Cour des comptes, aura remis au ministre chargé de la Fonction publique le rapport que celui-ci lui a demandé sur ce sujet.

Le président et le rapporteur de la commission n'ont pas retiré l'amendement, afin de parvenir à une solution acceptable dans l'attente des conclusions du rapport demandé, au cours de la navette.

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Votre Commission a adopté un amendement de votre Rapporteur relatif à la direction des services de l'Autorité des marchés financiers et revenant au texte initial du projet de loi (amendement n° 68).

Votre Commission a examiné un amendement de M. Charles de Courson relatif à la transparence des rémunérations des membres de l'Autorité des marchés financiers et prévoyant la publication d'un rapport annuel et d'un rapport d'audit.

Votre Rapporteur s'est déclaré opposé à cet amendement, relevant que des « indemnités » étaient prévues, et non une « rémunération ».

M. Charles de Courson a estimé que les indemnités en cause n'étaient pas représentatives de frais et qu'elles devaient s'analyser, du point de vue fiscal, comme une rémunération. Le texte doit qualifier ces indemnités.

Votre Rapporteur a rappelé que le système en vigueur n'avait pas posé de problème jusqu'à présent.

M. Louis Giscard d'Estaing s'est déclaré sensible aux arguments de M. Charles de Courson : la transparence est une garantie de bonne gestion des finances publiques.

Votre Commission a adopté l'amendement (amendement n° 69).

Elle a ensuite examiné un amendement de votre Rapporteur, rassemblant dans un seul article codifié l'ensemble des dispositions relatives au régime comptable et financier de l'Autorité des marchés financiers.

M. Philippe Auberger a suggéré que le décret d'application fixe également le régime indemnitaire des membres du collège et de la commission des sanctions.

M. Charles de Courson a craint que ce sous-amendement n'assure pas la transparence des rémunérations des membres de l'Autorité des marchés financiers.

Votre Commission a adopté l'amendement du Rapporteur, modifié à la demande de M. Philippe Auberger (amendement n° 70).

Votre Commission a ensuite adopté un amendement de votre Rapporteur rectifiant le barème de la contribution due par les personnes soumises au contrôle de l'Autorité des marchés financiers (amendement n° 71).

Puis, elle a adopté un amendement de votre Rapporteur prévoyant que les conseillers en investissements financiers contribuent au financement de l'AMF, son auteur ayant souligné que toutes les personnes soumises au contrôle de celle-ci versent une contribution (amendement n° 72).

Votre Commission a ensuite adopté deux amendements rédactionnels et un amendement de coordination de votre Rapporteur (amendements n° 73 et 74).

M. Charles de Courson a ensuite présenté un amendement visant à préciser que les comptes de l'Autorité des marchés financiers sont soumis au contrôle de la Cour des comptes. Votre Rapporteur, a indiqué que cette précision était inutile compte tenu des dispositions inscrites à l'article L. 111-3 du code des juridictions financières, visant les personnes morales de droit public.

M. Charles de Courson a souligné combien il était regrettable qu'un certain nombre d'autorités, comme le Conseil constitutionnel ou le Président de la République, échappent au contrôle de la Cour des comptes. Puis il a retiré cet amendement.

Votre Commission a ensuite adopté l'article 7, ainsi modifié.

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Section 2

Attributions

Article 8

(articles L. 621-6, L. 621-7 et L. 621-7-1 [nouveau] du code monétaire et financier)

Règlement général de l'Autorité des marchés financiers

Le présent article modifie profondément la sous-section 1 de la section 4 (« Pouvoirs ») du chapitre du code consacré à l'AMF. Le paragraphe I modifie son intitulé - qui devient « Réglementation et décisions » au lieu de « Réglementation » -, tandis que les paragraphes II, III et IV procèdent, respectivement, à une réécriture de l'article L. 621-6, de l'article L. 621-7 et insère un nouvel article numéroté L. 621-7-1.

- article L. 621-6 : Typologie des actes pris l'Autorité des marchés financiers

Comme le CMF (cf. actuel article L. 622-7) mais contrairement à la COB pour laquelle la loi évoque une pluralité de règlements (cf. rédaction actuelle de l'article L. 621-6), l'Autorité prendra un « règlement général » pour l'exécution de ses missions. Sa procédure d'adoption est identique à celle des règlements de la COB ou du règlement général du CMF : il est publié au Journal Officiel après homologation par arrêté du ministre chargé de l'économie. Cependant, la consultation préalable de la Banque de France, prévue actuellement pour le règlement général du CMF, n'est pas reprise, puisque cette dernière dispose d'un siège au sein du collège (comme actuellement à la COB).

L'exposé des motifs du projet de loi précise que « l'Autorité devra procéder à de larges consultations avant de prendre les textes ». Cependant, le Gouvernement a jugé qu'inscrire cette obligation serait « trop rigide », suggérant que l'Autorité pourra adopter un « code de conduite » sur les modalités de consultation (utilisation d'Internet, délais, traitement des réponses...), sur l'exemple du Comité européen des régulateurs de valeurs mobilières.

En outre, l'Autorité peut prendre des « décisions de portée individuelle » pour l'application de son règlement général et pour l'exercice de ses autres compétences.

À l'instar de la COB et du CMF aujourd'hui, l'Autorité pourra également publier des « instructions »(9), précisant les modalités pratiques d'application des lois régissant ses domaines de compétence ou de son règlement général. Par exemple, ce seront les instructions qui préciseront les documents à fournir à l'appui des demandes de visa ou de numéro d'enregistrement ou les éléments devant composer les dossiers de demande d'agrément.

Comme la COB, l'Autorité pourra également prendre des « recommandations aux fins de préciser l'interprétation du règlement général ». À l'heure actuelle, les recommandations de la COB sont, le plus souvent, le fruit d'une concertation avec d'autres autorités de tutelle et des praticiens ou usagers consultés, voire réunis au sein d'un groupe de travail.

La disposition actuelle, selon laquelle instructions et recommandations sont transmises pour information au ministre et ne sont publiées qu'à l'expiration d'un délai de 15 jours suivant cette transmission, n'a pas été reprise.

- article L. 621-7 : Objet du règlement général

La nouvelle rédaction de cet article L. 621-7 précise l'objet du règlement général. Celui-ci est structuré en sept paragraphes correspondants à autant d'activités différentes. Pour l'essentiel, et sous réserve de quelques modifications rédactionnelles, cet objet reprend les dispositions actuelles relatives au contenu des règlements pris par la COB (cf. actuels articles L. 621-6 ; L. 621-7 et L. 621-22) ou du règlement général du CMF (cf. actuel article L. 622-7).

Relevaient ainsi des règlements de la COB :

- paragraphe I : « les règles de pratique professionnelle qui s'imposent aux émetteurs faisant appel public à l'épargne, ainsi que les règles qui doivent être respectées dans les opérations sur instruments financiers placés par appel public à l'épargne » (cf. rédaction actuelle de l'article L. 621-6) ;

- paragraphe III (pour l'activité de gestion de portefeuille pour compte de tiers seulement) : « les règles de bonne conduite et les autres obligations professionnelles que doivent respecter à tout moment les personnes [soumises au contrôle de l'AMF] et qui doivent tenir compte de la compétence financière de la personne à laquelle le service est rendu » ;

- paragraphe V : «  les conditions d'exercice de l'activité des prestataires de services d'investissement qui fournissent, à titre exclusif ou principal, le service de gestion de portefeuille pour le compte de tiers et les conditions d'agrément des sociétés de gestion de portefeuille » (1°), « les conditions d'agrément et d'exercice de l'activité des sociétés de gestion d'organismes de placements collectifs » (2°); et « les conditions d'agrément des organismes de placements collectifs » (3°) ;

Sur ces deux derniers points, la compétence actuelle de la COB résulte des dispositions de l'article L. 532-1, selon lesquelles elle délivre l'agrément, et de l'article L. 621-22, selon lesquelles elle est seule compétente pour exercer le contrôle sur ces prestataires de services. Les dispositions proposées n'innovent pas quant à l'étendue du pouvoir que détiendra l'AMF à la suite de la COB, mais leur rédaction a été profondément modifiée, afin d'être plus précise et mieux structurée.

Relevaient du règlement général du CMF :

- paragraphe II : « les règles relatives aux offres publiques d'acquisition portant sur des instruments financiers émis par appel public à l'épargne » (cf. article L. 433-1) ; cependant, cette rédaction marque une extension du champ de cette réglementation à tous les titres faisant appel public à l'épargne, et pas seulement aux instruments cotés sur un marché réglementé ; en vertu de l'article L. 411-1, la notion d'appel public à l'épargne dépasse celle de négociations sur un marché réglementé, puisqu'elle intègre « l'émission ou la cession d'instruments dans le public en ayant recours soit à la publicité, soit au démarchage, soit à des établissements de crédits et des prestataires de services d'investissement » ;

- paragraphe III : « les règles de bonne conduite et les autres obligations professionnelles que doivent respecter à tout moment les personnes [soumises au contrôle de l'AMF] et qui doivent tenir compte de la compétence financière de la personne à laquelle le service est rendu » (cf. 1° du II de l'actuel article L. 622-7) ;

- paragraphe IV : les conditions d'exercice des services d'investissement par les prestataires de services d'investissement (1°), les conditions d' exercice des activités des adhérents des chambres de compensation (2°), les règles applicables aux personnes bénéficiant du régime de la libre prestation de services (4°), les conditions dans lesquelles certains prestataires peuvent intervenir en qualité de « non-ducroire » (5°), les conditions dans lesquelles certaines personnes peuvent être habilitées à fournir les services d'exécution d'ordres pour compte de tiers ou de négociation pour compte propre sur un marché réglementé sans avoir la qualité de prestataires de services d'investissement (6°) et les conditions dans lesquelles l'Autorité approuve les règles des chambres de compensation (7°) ; sur ce dernier point, la rédaction proposée précise, en outre, que cette compétence de l'Autorité s'exerce « sans préjudice » des compétences conférées à la Banque de France en matière de bon fonctionnement et de sécurité des systèmes de paiement (cf. II de l'actuel article L. 622-7) ;

- paragraphe VI : les condition d'exercice des activités de conservation ou d'administration d'instruments financiers par les personnes morales qui effectuent des opérations par appel public à l'épargne et les intermédiaires habilités à ce titre (1°), les conditions d'habilitation, par l'Autorité, des dépositaires centraux ainsi que les conditions dans lesquelles elle approuve leurs règles de fonctionnement (2°), les principes généraux d'organisation et de fonctionnement des systèmes de règlement et de livraison d'instruments financiers et les conditions dans lesquelles l'Autorité approuve les règles de fonctionnement de ces systèmes, sans préjudice des compétences conférées à la Banque de France en matière de bon fonctionnement et de sécurité des systèmes de paiement (3°) (cf. IV de l'actuel article L. 622-7) ;

- paragraphe VII : les principes généraux d'organisation et de fonctionnement que doivent respecter les marchés réglementés, ainsi que les règles relatives à l'exécution des transactions sur instruments financiers admis sur ces marchés (1°), les conditions dans lesquelles l'Autorité propose au ministre la reconnaissance ou le retrait de la qualité de marché réglementé d'instruments financiers (2°), les conditions de dérogation à l'obligation de centralisation des ordres sur des marchés réglementés de l'Espace unique européen (3°) et les règles relatives à l'information de l'Autorité et du public concernant les ordres et les transactions sur instruments financiers admis sur un marché réglementé (4°) (cf. III de l'actuel article L. 622-7) ;

En outre, ce paragraphe étend le champ du règlement général aux « règles de fonctionnement applicables aux marchés d'instruments financiers autres que les marchés réglementés ».

Rappelons que c'est autour du marché réglementé que la réglementation communautaire en matière de marchés de valeurs mobilières s'est bâtie. En effet, la qualification de marché réglementé (attribuée, en France, par arrêté du ministre chargé de l'économie, sur proposition du CMF et après avis de la COB et de la Banque de France) entraîne l'application d'un régime juridique exigeant, notamment en matière de transparence et de diffusion d'informations, obligations qui pèsent sur les marchés eux-mêmes, leurs membres et les émetteurs des instruments financiers qui y sont négociés.

Depuis l'adoption de la première directive sur les services d'investissement en 1993, et grâce à l'évolution des technologies de l'information et de la communication, de nouveaux systèmes multilatéraux de négociation organisés et gérés par les entreprises d'investissement sont apparus, si bien que la distinction entre celles-ci et les marchés réglementés s'est estompée. Ces plates-formes permettent de mettre en relation les clients d'un prestataire, qui peuvent ainsi exécuter leurs ordres. Par ailleurs, on assiste également au développement de systèmes internes au prestataire, permettant à celui-ci d'exécuter les ordres de ses clients.

L'intégration dans un dispositif harmonisé et cohérent de ces nouveaux systèmes de négociation est l'objet principal du projet de nouvelle directive sur les services d'investissement adopté par la Commission en novembre dernier. Le projet de directive repose notamment sur la volonté de créer les conditions d'une concurrence saine entre les différents modes de négociation, en adaptant le cadre réglementaire au risque propre à chacun d'eux.

En donnant à l'Autorité la possibilité d'intervenir en ce domaine, le projet de loi anticipe ainsi l'évolution de la réglementation communautaire.

- article L. 621-7-1 : Intervention de l'État en cas de carence de l'Autorité des marchés financiers

Cet article, inséré à la fin de la sous-section 1, reprend une disposition relative au CMF (cf. actuel article L. 622-23), selon laquelle, en cas de carence de l'Autorité, les « mesures urgentes nécessitées par les circonstances » sont prises par décret. Il convient de noter qu'une telle possibilité n'est pas offerte au Gouvernement en cas de carence de la COB.

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Le Sénat a adopté deux amendements présentés par sa commission des Finances.

- article L. 621-7 (Objet du règlement général)

Le premier amendement prévoit que le règlement général de l'AMF déterminera, en ce qui concerne la production et la diffusion des analyses financières :

- « les conditions d'exercice de l'activité des personnes qui, à titre de profession habituelle, produisent ou diffusent des analyses financières sur les personnes morales émettrices d'instruments négociés sur un marché, ou dont l'admission à la négociation est demandée en vue de formuler et, le cas échéant, diffuser une opinion sur l'évolution prévisible desdites personnes morales et, en conséquence, sur l'évolution prévisible de leur cours de bourse » ;

- « les règles de bonne conduite s'appliquant aux personnes physiques placées sous l'autorité ou agissant pour le compte des personnes qui produisent ou diffusent des analyses financières, à titre de profession habituelle, et les dispositions propres à assurer leur indépendance et la prévention des conflits d'intérêts. »

Cet amendement s'inscrit dans le contexte actuel de mise en cause du rôle et de l'indépendance des analystes financiers, observable depuis l'éclatement de la bulle des valeurs technologiques et les scandales Enron ou WorldCom. C'est d'ailleurs des États-Unis que le mouvement est parti. La presse a mis en évidence les pratiques de certaines banques d'affaires au détriment des investisseurs individuels, leurs analystes recommandant à l'achat les titres de sociétés que d'autres départements de la banque étaient chargés d'introduire sur le marché ou conseillaient dans leur stratégie d'acquisitions (10). Les dix plus grandes banques de Wall Street ont même négocié une amende de 1,4 milliard de dollars en décembre 2002, pour mettre un terme aux poursuites engagées par le ministre de la justice de l'État.

Ce mouvement a touché, à des degrés divers, l'ensemble des places financières et conduit la plupart des autorités de régulation à entamer une réflexion en matière de déontologie et de protection de l'objectivité des analystes financiers.

Aux États-Unis, la loi Sarbanes-Oxley du 30 juillet 2002 durcit les principes encadrant la déontologie des analystes financiers, en prévoyant des règles visant à prévenir et limiter les conflits d'intérêts des analystes financiers (par la séparation de ceux-ci des autres départements de l'entreprise qui les emplois,...) et à organiser la transparence des ceux qui pourraient subsister (rémunération de l'analyste dépendant des opérations réalisées par ailleurs par sa société, fait que l'émetteur du titre analysé est également client de la société qui emploie l'analyste,...). Par ailleurs, la Securities exchange commission (SEC) a lancé une consultation sur ses propositions de renforcement des règles, imposant notamment aux analystes de certifier que leurs analyses correspondent effectivement à leur opinion personnelle.

L'Union européenne s'est engagée dans une procédure d'élaboration d'une nouvelle directive relative aux manquements boursiers, qui obligerait les États membres à s'assurer qu'il existe une « réglementation appropriée pour garantir les personnes qui réalisent ou diffusent des travaux de recherche (...) veillent, avec une attention raisonnable, à ce que l'information soit présentée avec impartialité et mentionne leurs intérêts ou l'existence de conflits d'intérêts en rapport avec les instruments financiers sur lesquels portent cette information ».

La France n'a pas connu d'affaires aussi médiatisées qu'aux États-Unis. Cependant, la situation pourrait évoluer. En octobre 2002, le Crédit Lyonnais a été condamné par le tribunal de grande instance de Créteil à indemniser deux de ses clients ruinés par ses conseils boursiers. En décembre, le groupe LVMH a assigné en justice l'analyste de Morgan Stanley, l'accusant d'avoir privilégié son concurrent Gucci dans ses analyses.

Dès 2000, la COB a rappelé les principes qui doivent guider les analystes dans l'utilisation d'informations financières en s'appuyant très largement sur les règles déontologiques élaborées par la Société française des analystes financiers (SFAF) ou le Cercle de liaison des informateurs financiers en France (CLIFF).

À l'issue de la réflexion d'un groupe de travail auquel la COB a participé, le CMF a modifié son règlement général et élaboré une décision relative aux prescriptions applicables aux prestataires de services d'investissement, produisant et diffusant des analyses financières (décision n° 2002-01 du 27 mars 2002).

Le règlement général du CMF place les analystes parmi les personnes « exerçant des fonctions sensibles » (article 3-2-4) et soumises de ce fait à des obligations particulières. Il leur impose la détention d'une carte professionnelle délivrée par le prestataire de services d'investissement (articles 2-4-1 et 2-4-4) et leur interdit d'émettre des ordres sur un instrument financier pour leur propre compte s'ils sont susceptibles d'émettre une analyse sur son émetteur (article 3-2-5).

Pour sa part, la décision du CMF comporte des règles très précises. Certaines pèsent sur le prestataire habilité à produire ou diffuser des analyses financières. En effet, elle impose :

- la désignation d'une personne exerçant la fonction de « responsable de l'analyse financière », personne physique sous l'autorité de laquelle la production et la diffusion d'analyses financières sont placées ;

- la mise en place de procédures et de moyens adaptés à la détection des situations éventuelles de conflits d'intérêts impliquant l'analyse financière et la gestion des franchissements de la « Muraille de Chine » ; en application de ces procédures, le prestataire prévoit que l'analyste ne peut échanger des informations avec les autres collaborateurs du prestataire à propos d'une opération déterminée, en vue ou en préparation, avant d'avoir obtenu l'accord du responsable de l'analyse financière ; de même, lorsque l'analyste a franchi la « Muraille de Chine », il ne retrouve ses fonctions antérieures qu'avec l'accord du déontologue et du responsable de l'analyse financière ;

- la mise au point d'une procédure relative aux avertissements devant figurer sur une analyse et permettant de mettre clairement en valeur les éléments susceptibles de limiter l'indépendance de l'analyste ; ces avertissements font apparaître : 1° le rôle joué par le prestataire dans l'opération financière sur le marché primaire à propos de laquelle une analyse est produite ; 2° les « participations stables » que le prestataire habilité détient dans le capital de l'entreprise suivie ou que l'entreprise suivie détient dans le capital du prestataire habilité ; 3° le cas échéant, le fait que l'analyse résulte d'une convention entre le prestataire et la société émettrice ; 

- l'établissement d'une procédure déterminant dans quel ordre et selon quelles modalités les études et recommandations des analystes sont diffusées à ses départements internes et aux clients extérieurs et interdit aux premiers de bénéficier d'une quelconque priorité.

D'autres obligations s'imposent à l'analyste lui-même :

- interdiction de percevoir une rémunération spécifique distincte pour une opération à laquelle il participe dans le cadre de l'activité du prestataire habilité relative à la prise ferme, au placement et au conseil aux entreprises (en matière de structure de capital, de stratégie industrielle et de questions connexes ainsi qu'aux services concernant les fusions et le rachat d'entreprises) ;

- possibilité de communiquer avant publication son étude à l'émetteur ou à son conseil, mais l'analyste n'est en aucune façon tenu par les observations de ces derniers et cette communication figure parmi les avertissements accompagnant la publication ;

- obligation d'expliquer, sauf avis contraire du responsable de l'analyse, les raisons d'une interruption de la communication, alors que la personne morale émettrice était auparavant suivie régulièrement ; cette explication doit figurer dans un support d'information identique à celui précédemment utilisé pour ses analyses ;

- interdiction, sauf avis contraire du responsable de l'analyse, de cesser de publier sur une personne morale émettrice pendant une « période raisonnable » suivant l'introduction en bourse de l'instrument ayant fait l'objet d'une première ananlyse ; cette obligation n'est toutefois pas applicable lorsque la première publication a été effectuée dans le cadre d'un contrat passé avec la personne morale émettrice et que cette dernière choisit de rompre le contrat.

Pour sa part, la profession s'est organisée. Ainsi, la SFAF, qui regroupe environ 500 à 600 analystes, a publié un nouveau code de déontologie en mai 2002. Celui-ci remplace le précédent code établi en 1992. Il précise les obligations des analystes et évoque de nombreuses questions en débat, telles que l'utilisation d'informations privilégiées, les conflits d'intérêts, la recherche des informations et des contacts avec les émetteurs, la diffusion des informations ou les opérations personnelles de l'analyste. Affirmant le principe général de la « primauté du client », ce code impose une « objectivité de jugement » : l'analyste ne doit pas favoriser ses intérêts ainsi que ceux de son employeur au détriment de ses clients et « dans tous les cas, il doit être capable de justifier, devant ses pairs, de ses conclusions et de son argumentation ».

L'amendement adopté par le Sénat reprend la définition de l'analyste financier, telle qu'elle figure aujourd'hui dans le règlement général du CMF et renvoie au règlement général de l'AMF le soin de déterminer les « conditions d'exercice » de l'activité des personnes qui produisent et diffusent des analyses financières et les « règles de bonne conduite » s'appliquant aux personnes physiques placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte. La récente décision prise par le CMF rentre parfaitement dans ce cadre.

Ce faisant, l'amendement du Sénat soumettrait aux mêmes règles les analystes issus des banques d'investissement, des sociétés de courtage ou des sociétés de bourse (communément appelés « sell side ») et ceux qui oeuvrent au sein des sociétés de gestion (appelés « buy side »). Or, jusqu'à présent, une distinction était clairement établie entre ces deux catégories d'analystes. Les analystes des sociétés de gestion ont d'ailleurs été relativement épargnés par la polémique en cours, dans la mesure où leurs analyses n'a pas normalement vocation à être diffusée à l'extérieur de leur société. En effet, leur recherche est exclusivement menée à des fins internes pour optimiser la gestion de portefeuille. C'est pourquoi d'ailleurs l'application des règles dites de la « Muraille de Chine » est particulièrement délicate dans les sociétés de gestion. Il n'est pas rare, dans les petites structures, que les gestionnaires produisent eux-mêmes des analyses. Est-il concevable de leur imposer deux séries de contraintes spécifiques ?

Le texte adopté par le Sénat pose également une autre difficulté. Tel qu'il est rédigé, on pourrait considérer qu'il s'appliquerait aux agences de notation qui, comme les analystes financiers, voient leur rôle ou leur comportement présumés vivement contestés.

En effet, la notation consiste à mesurer la capacité d'un émetteur à faire face, en temps et en heure, à ses engagements financiers. Naturellement, et l'expérience le prouve abondamment, toute modification de la note attribuée se traduit plus ou moins rapidement sur l'évolution du cours de bourse. Dès lors, l'activité de notation pourrait répondre à la définition que le Sénat a donné de l'activité d'analyse financière, à savoir produire et diffuser une « opinion sur l'évolution prévisible des [émetteurs] et, en conséquence, sur l'évolution prévisible de leur cours de bourse ».

Votre Rapporteur n'est pas favorable à une telle assimilation, tant la problématique n'est pas la même.

D'une part, il convient de rappeler que la notation résulte d'une démarche volontaire des émetteurs. Elle procède d'un processus interactif, puisque la qualité de la note repose sur la coopération de la société notée, l'agence travaillant sur la base de données confidentielles, concernant aussi bien la situation financière de la société que ses orientations stratégiques. Il est vrai que le fait d'être noté permet à l'émetteur de se faire connaître et de prouver sa solidité financière et que l'accès au marché ou au crédit s'en trouve grandement facilité. La notation est même parfois devenue incontournable. Ainsi, la plupart des fonds d'investissement américains ne peuvent investir dans une émission que si celle-ci a fait l'objet d'une notation par l'une des agences agréées par la Securities Exchange Commission (SEC).

D'autre part, la question de la portée juridique et des conséquences d'une éventuelle législation uniquement hexagonale est clairement posée. À l'heure actuelle, les agences reconnues internationalement sont celles qui ont été agréées par la SEC. Longtemps, elles n'étaient que trois (Standard and Poor's, Moody's, Fitch). Une quatrième (Dominion Bond Rating) l'a été très récemment. Toutes ont leur siège à l'étranger, même Fitch qui, pourtant, est détenue par des capitaux français (11). Dès lors, toute disposition unilatérale adoptée par le seul Parlement français n'aurait donc aucune portée pratique, tant l'activité de notation peut naturellement s'exercer à distance au-delà de nos frontières.

Enfin, il convient de rappeler que la notation est une opinion et qu'à ce titre, contrairement à d'autres intervenants en matière d'information financière - comme les commissaires aux comptes par exemple - qui peuvent voir leur responsabilité engagée, les agences de notation sont protégées par le premier amendement à la Constitution des Etats-Unis, comme l'est la presse.

Votre Rapporteur présentera donc un amendement corrigeant la définition établie par le Sénat, afin de lever toute ambiguïté quant à l'exclusion de la notation financière de son champ. Afin de respecter la structure du code monétaire et financier, dans lequel les différentes activités qu'ils réglementent sont définies dans les livres précédant le livre VI dans lequel figurent les dispositions relatives à l'AMF, cette nouvelle rédaction sera introduite à l'article 33 bis. Ne figurerait plus au présent article 8 du projet de loi qu'un simple renvoi.

- article L. 621-7-1 (Intervention de l'État en cas de carence de l'Autorité des marchés financiers)

Le second amendement prévoit que la possibilité de prendre, par décret, les mesures urgentes nécessitées par les circonstances en cas de carence de l'AMF ne peut être exercée qu'après mise en demeure de celle-ci.

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M. Philippe Auberger a présenté un amendement visant à permettre aux associations représentatives professionnelles concernées par les modifications du règlement général de l'AMF d'être consultées sur ces modifications avant leur adoption par le collège de l'AMF. M. Charles de Courson a présenté un amendement similaire.

Votre Rapporteur s'est déclaré hostile à des consultations externes préalables à l'édiction de règles générales. Il s'est déclaré, en conséquence, défavorable aux amendements. Votre Commission a rejeté ces deux amendements.

M. Philippe Auberger a ensuite présenté un amendement visant à permettre au règlement général de l'AMF de fixer des règles de fonctionnement applicables aux infrastructures multilatérales de négociation.

Votre Rapporteur ayant indiqué qu'une directive communautaire était en cours d'élaboration sur ce sujet, a donné un avis défavorable.

M. Philippe Auberger a retiré cet amendement.

Votre Commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel du Rapporteur (amendement n° 76).

M. Philippe Auberger a présenté un amendement visant à supprimer le contrôle de l'AMF sur les analystes financiers.

Votre Rapporteur a estimé que l'absence totale de contrôle de l'AMF sur les analystes financiers n'est pas souhaitable. Il existe aujourd'hui un contrôle du CMF sur les analystes financiers. Cet amendement pose, de manière plus générale, la question du statut des analystes financiers. La principale difficulté réside dans le fait que l'expression d'analyste financier recouvre des professions très diverses. Il ne faut pas aboutir à un statut des analystes financiers qui leur permettrait de se comporter comme des magistrats indépendants. Le Sénat a sans doute posé des exigences excessives en la matière.

M. Philippe Auberger a souligné qu'on posait des contraintes supplémentaires au contrat de travail qui n'étaient pas justifiées. Le travail des analystes est diffusé et assuré par une entreprise.

M. Charles de Courson a regretté qu'on réglemente une profession sans définir les activités qu'elle recouvre. Faut-il créer dans la loi le concept d'analyste financier au risque d'encourager la demande des professionnels en faveur d'un statut semblable à celui des journalistes, en valorisant la production intellectuelle par rapport au statut du salarié ? Par ailleurs, comment cela s'articulera-t-il au niveau européen ?

Votre Rapporteur a souligné que la demande des professionnels était excessive. Un statut particulier, très protecteur, n'est pas justifié. Par ailleurs, étant donné la vitesse de circulation de l'information, une législation française serait vaine si elle était différente de celle adoptée à l'étranger. En outre, les analystes financiers ne sont pas les seuls à avoir une influence sur l'évolution des cours de bourse, les journalistes financiers jouent également un rôle important. Enfin, il faut distinguer selon que l'information a vocation à être diffusée ou non. C'est seulement dans le premier cas qu'une réglementation peut être souhaitable.

M. Alain Rodet a ajouté que la presse économique ne jouissait pas d'une grande indépendance en France, notamment du fait de la concentration du secteur. Peu de progrès semblent avoir été faits depuis l'analyse de la crise de 1929 dégagée par Galbraith qui a mis en évidence une concentration excessive de l'information. Une partie de la demande des analystes est donc fondée.

M. Philippe Auberger a ajouté que le meilleur antidote au poids des analystes financiers était un contrepoids résultant de l'existence d'autres analystes financiers. Récemment, la COB a interdit à France Télécom d'empêcher la publication par les analystes financiers de leurs travaux sur la situation de la société. Le Sénat a été trop loin.

Votre Commission a alors adopté l'amendement, le Rapporteur se déclarant hostile à cette adoption (amendement n° 77).

Un amendement rédactionnel du Rapporteur relatif aux analystes financiers est devenu sans objet.

Votre Commission a ensuite adopté un amendement présenté par le Rapporteur visant à ne soumettre au contrôle de l'AMF que les analystes qui diffusent leurs travaux (amendement n° 78).

M. Philippe Auberger a présenté un amendement visant à préciser la notion d'indépendance applicable aux analystes financiers : il s'agit d'une indépendance dans leurs appréciations.

Votre Commission a adopté cet amendement, auquel le Rapporteur s'est déclaré favorable (amendement n° 79).

Votre Commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel, présenté par le Rapporteur (amendement n° 80).

Votre Commission a adopté l'article 8, ainsi modifié.

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Section 3

Surveillance et sanctions

Article 9

Modification d'un intitulé

Le présent article modifie l'intitulé de la sous-section 3 de la section 4 (« Pouvoirs ») du chapitre consacré à l'Autorité des marchés financiers, qui devient « Contrôles et enquêtes » au lieu de « Enquêtes ».

Le nombre d'articles du code composant cette sous-section passera de cinq (actuels articles L. 621-9 à L. 621-13) à sept (adjonction de 3 articles nouveaux - articles L. 621-9-1 à L. 621-9-3 - et renvoi de l'actuel article L. 621-13 dans la sous-section suivante).

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Le Sénat a adopté l'article 9 sans modification.

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Votre Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 10

(article L. 621-9 du code monétaire et financier)

Opérations et personnes soumises au contrôle

de l'Autorité des marchés financiers

Le présent article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 621-9, déterminant le champ d'application des pouvoirs d'enquête et de contrôle de l'Autorité des marchés financiers.

Les dispositions actuelles de cet article (la possibilité donnée à la COB de recourir à un commissaire aux comptes ou à un expert judiciaire) seront reprises dans le nouvel article L. 621-9-2 inséré par l'article 11 du projet de loi.

- paragraphe I : Opérations soumises aux contrôle de l'Autorité des marchés financiers

Ce paragraphe rappelle que, à l'instar de la COB (actuel article L. 621-10) ou du CMF (actuel article L. 622-9), l'Autorité est dotée d'un pouvoir de contrôle et d'enquête pour accomplir la mission qui lui est confiée par l'article L. 621-1 (cf. article 2 du projet de loi).

Il précise, en outre, que l'Autorité veille à la régularité des opérations effectuées sur des titres faisant l'objet d'un appel public à l'épargne. Il s'agit d'une extension d'une compétence actuelle du CMF. En effet, en vertu du I de l'actuel article L. 622-9, le contrôle du CMF ne porte aujourd'hui que sur la régularité des opérations effectuées sur les marchés réglementés. Cette extension du champ du contrôle de l'Autorité résulte de l'extension analogue de son pouvoir de réglementation (cf. article 8 du projet de loi).

Reprenant une disposition applicable à la COB (cf. actuel article L. 621-1), le présent paragraphe précise également que le contrôle de l'Autorité ne portera pas sur les marchés d'« instruments créés en représentation des opérations de banques (...) qui ne peuvent être détenus par des organismes de placement collectif en valeurs mobilières »», contrôle qui relève de la Banque de France. La référence aux OPCVM résulte des dispositions de l'article 45 du projet de loi, qui autorise ces derniers à contracter, dans des conditions strictes qui seront définies par décret, des dérivés de crédit. Il s'agit donc de préserver le bloc de compétences de l'AMF en matière de gestion collective.

- paragraphe II : Personnes soumises au contrôle de l'Autorité des marchés financiers

Le paragraphe II confie à l'Autorité le soin de veiller au respect de leurs obligations professionnelles imposées par la loi ou les règlements par les personnes énumérées dans le présent paragraphe.

Cette liste présente naturellement de grandes analogies avec celle définissant le contenu du règlement général de l'Autorité. Sous réserve de quelques modifications rédactionnelles, elle reprend très largement celle des personnes actuellement soumises au contrôle du CMF en vertu de l'actuel article L. 622-9. S'y ajoutent cependant, les personnes aujourd'hui soumises au contrôle de la COB, notamment en ce qui concerne les organismes de placements collectifs, d'autres exerçant des activités aujourd'hui non expressément visées par le code monétaire et financier et celles que le projet de loi entend soumettre désormais au contrôle de l'Autorité.

Outre les personnes morales, ce paragraphe précise que le contrôle de l'AMF s'exerce également sur les « personnes physiques placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte ». Cette mention expresse ne figure pas dans les dispositions actuelles décrivant le champ d'application du contrôle de la COB ou du CMF. Cependant, leur soumission à celui-ci était implicite, puisque ces personnes physiques pouvaient être sanctionnées par la COB ou le CMF à raison des manquements à leurs obligations professionnelles.

Cette liste comporte donc dix catégories. Il s'agit :

- des prestataires de services d'investissement agréés ou des prestataires exerçant leur activité en libre établissement en France (prestataires agréés dans un autre État de l'Espace économique européen ayant implanté une succursale en France) (1°),

- des personnes autorisées à exercer l'activité de conservation ou d'administration d'instruments financiers, y compris les dépositaires d'OPCVM, aujourd'hui soumis au contrôle de la COB (2°),

- des dépositaires centraux et des gestionnaires de système de règlement et de livraison d'instruments financiers (3°),

- des membres des marchés réglementés autres que les prestataires de services d'investissement dûment agréés (visés à l'article L 421-8, il s'agit des personnes physiques ou morales habilitées à fournir les services d'exécution d'ordres pour le compte de tiers et de négociation pour compte propre, les personnes morales dont les membres ou associés sont indéfiniment et solidairement responsables des dettes et engagements de celles-ci, à condition qu'ils soient habilités à fournir les services précités, les personnes physiques ou morales déjà habilitées avant la publication de la loi du 2 juillet 1996 à fournir ces services sur une bourse des valeurs ou sur un marché à terme) (4°),

- des entreprises de marché (5°),

- des chambres de compensation d'instruments financiers (6°),

- des organismes de placements collectifs et de leurs sociétés de gestion, aujourd'hui soumis au contrôle de la COB (7°),

- des intermédiaires en biens divers, qui relèvent actuellement du contrôle de la COB en vertu des articles L. 550-1 à L. 550-5 (8°),

- des personnes habilitées à procéder au démarchage (cf. article 39 du projet de loi) (9°),

- des conseillers en investissements financiers (cf. article 42 du projet de loi)(10°).

Le dernier alinéa reprend les dispositions de l'article L. 622-13 relatif au CMF. L'Autorité est également chargée d'assurer le respect de la législation et de la réglementation applicables par les prestataires de services d'investissement relevant d'un État de l'Espace économique européen usant de la liberté d'établissement ou de la libre prestation de services en France (cf. article L. 532-18). Ce contrôle ne s'étend pas au respect des « normes de gestion » mentionnées à l'article L. 611-3 (montant du capital exigé en fonction des services fournis). Il est, en outre, précisé que l'Autorité examine les conditions d'exercice, par ces prestataires, de leurs activités et des résultats de celles-ci « en tenant compte de la surveillance exercée par les autorités compétentes de l'État membre d'origine ».

Enfin, l'avant-dernier alinéa de ce paragraphe organise le partage des compétences et la coordination entre les différentes autorités de contrôle :

- d'une part, le contrôle de l'Autorité s'exerce « sans préjudice » - c'est-à-dire, le cas échéant, concurremment - des compétences que détient la Banque de France au titre de ses responsabilités en matière de « bon fonctionnement des systèmes de paiement » (cf. article L. 141-4), en ce qui concerne les personnes visées aux 3° et 6°, c'est-à-dire les dépositaires centraux, les gestionnaires de système de règlement et de livraison d'instruments financiers et les chambres de compensation ;

- d'autre part, le contrôle de l'Autorité s'exerce « sous réserve » des compétences de la commission bancaire pour les personnes visées aux 1° à 6°(à l'exception de celles exerçant la gestion collective) ; il s'agit de bien distinguer entre le contrôle prudentiel de ces personnes, qui ne relève que de la Commission bancaire, du contrôle « disciplinaire » de l'autorité de régulation.

Enfin, il est précisé que l'Autorité est « seule compétente » pour contrôler les autres personnes non énumérées ci-dessus, c'est-à-dire les prestataires de services d'investissement gérant des portefeuilles pour le compte de tiers et les OPCVM et leurs sociétés de gestion (à l'instar de la COB actuellement), les intermédiaires en biens divers et les conseillers en investissements financiers. À l'évidence, cette précision n'a qu'une fonction « pédagogique » dont le législateur pourrait peut-être se dispenser.

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Le Sénat a adopté deux amendements présentés par sa commission des Finances.

Le premier complète la liste des personnes soumises au contrôle de l'AMF en y ajoutant les « personnes produisant ou diffusant des analyses financières », par coordination avec l'amendement adopté à l'article 8.

Le second substitue une référence interne au code monétaire et financier, en précisant que le contrôle de l'AMF sur les prestataires de services d'investissement en libre prestation de services s'exercera dans les conditions prévues aux articles qui traitent des modalités de ce contrôle (articles L. 532-19 à L. 532-21).

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M. Jean-Pierre Balligand a présenté un amendement visant donner à l'AMF un droit d'enquête sur l'activité des agences de notation. Il faut souligner le poids des notations et leur incidence sur les marchés.

Votre Rapporteur a souligné le caractère vain d'une réglementation purement française concernant des agences de notation dont aucune n'a son siège en France. En outre, il suffirait aux agences qui ont des équipes installées en France de les localiser à l'étranger pour éviter d'être soumises à la réglementation française. Par ailleurs, le dispositif proposé prévoit que le secrétariat général de l'AMF peut décider de rendre publiques les conclusions des enquêtes portant sur les agences de notation, alors que ce type de décision doit relever de la compétence du collège de l'AMF. L'amendement serait contreproductif.

M. Philippe Auberger a souligné que les agences de notation ne jouent un rôle qu'en matière d'obligations et de crédits aux entreprises et aux collectivités locales. Celles-ci trouvent un intérêt dans la notation.

Le Président Pierre Méhaignerie a ajouté que ce rôle était toutefois limité s'agissant des collectivités locales.

M. Philippe Auberger a précisé que ce rôle était réel, comme le montrait le cas de la ville de Marseille. Il serait effectivement intéressant d'avoir un regard de l'AMF sur les conditions dans lesquelles sont effectuées les opérations de notation, pour les entreprises cotées.

Votre Rapporteur a émis un avis très défavorable à l'amendement, car la législation sera immédiatement contournée. Le rating sera émis depuis Londres ou New York. En outre, cela sera perçu comme un signal négatif par la place financière. Il est vain de vouloir réglementer ce secteur ; en revanche, il est souhaitable, comme c'est le cas aux États-Unis, qu'un rapport soit consacré aux conséquences de ces notes. Enfin, si le travail des agences de notation porte sur les obligations et les conditions d'attribution des crédits, leur influence sur le cours de bourse des sociétés est évidente.

M. Jean-Pierre Balligand a indiqué qu'il ne comprenait pas l'opposition du Rapporteur dans la mesure où sont prévues par le texte, d'ores et déjà, des enquêtes de l'AMF qui concernent des activités mondialisées. Par ailleurs, il existe actuellement des projets de création d'agences de notation en France. Enfin, il convient de remédier aux dysfonctionnements qui ont des répercussions sur les marchés financiers, et en particulier sur les épargnants individuels. Il faut répondre à l'ampleur de la crise : il est anormal que les notes attribuées à certaines sociétés n'aient pas été baissées, alors que de graves problèmes étaient signalés dans ces entreprises.

Votre Rapporteur a souligné le risque qui réside dans l'attribution à l'AMF du rôle de contrôleur des agences de notation : sa responsabilité pourrait être engagée du seul fait qu'une agence de notation n'a pas signalé la dégradation de la situation économique ou financière d'une entreprise. En outre, on ne peut pas ignorer le fait que l'acte de notation s'applique à une place distincte du lieu où elle s'opère.

M. Charles de Courson a partagé la position du Rapporteur. Le travail des agences de notation doit relever de leur seule responsabilité. D'ailleurs des contentieux fondés sur le motif que les dégradations de notes n'étaient pas justifiées sont en cours dans les pays anglo-saxons. Il serait donc préférable de donner à l'AMF la possibilité de saisir les tribunaux. Le bon axe d'attaque est celui de la responsabilité des agences.

Votre Rapporteur a indiqué que le dispositif prévu à l'article 33 bis du projet, à savoir la mission d'observation attribuée à l'AMF et le rapport qu'elle devra publier chaque année sur le rôle des agences de notation, la transparence de leurs méthodes et l'impact de leur activité sur les émetteurs et les marchés financiers, devraient permettre un encadrement efficace. Il serait dangereux d'aller plus loin.

M. Philippe Auberger a souligné que, dans la mesure où l'AMF était déjà compétente pour les notes d'information et la publication des comptes, elle devait également l'être pour la notation. Il convient de donner des pouvoirs à l'AMF s'agissant de l'examen des méthodes et de la déontologie des agences de notation.

M. Alain Rodet a indiqué que les agences de notation avaient perdu beaucoup de leur superbe depuis 1998. Aujourd'hui, il faut saisir l'occasion de davantage encadrer leur travail.

Le Président Pierre Méhaignerie a précisé qu'il partageait le point de vue du Rapporteur.

Votre Commission a alors rejeté cet amendement.

Votre Commission a examiné un amendement de coordination de votre Rapporteur visant à ne soumettre au contrôle de l'AMF que les analystes qui diffusent leurs travaux et non pas ceux dont les études ne sont destinées qu'à leur usage interne.

Votre Commission a adopté cet amendement (amendement n° 81).

M.  Jean-Pierre Balligand a ensuite présenté deux amendements visant à soumettre les agences de notation au contrôle de l'AMF. Ces amendements ont été rejetés par votre Commission.

Votre Commission a, par ailleurs, adopté un amendement rédactionnel présenté par votre Rapporteur (amendement n° 82).

M.  Jean-Pierre Balligand a enfin présenté un amendement visant à prévoir, parmi les critères d'appréciation des agences de notation, la notion de question de l'investissement socialement responsable, dans le projet de loi, alors que ce thème y est, pour l'instant, totalement absent. Il a souligné que cette problématique était très présente à l'étranger, en particulier aux États-Unis. La loi devrait, au minimum, prendre en considération ce problème et inciter les intermédiaires financiers à affiner leurs méthodes d'analyse. Cet amendement va plus loin que les précédents.

Votre Rapporteur a émis un avis négatif, considérant que l'amendement n'était pas lié au texte. Il a ajouté que la loi relative aux nouvelles régulations économiques avait déjà prévu un dispositif voisin.

Votre Commission a rejeté cet amendement.

Votre Commission a ensuite adopté l'article 10, ainsi modifié.

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Après l'article 10

M. Jean-Pierre Balligand a présenté un amendement visant à confier à la Banque de France une mission de cotation des entreprises, par la centralisation des informations au sein d'un fichier bancaire des entreprises.

Après avoir fait remarquer que, d'une part, un tel dispositif relève du domaine réglementaire et, d'autre part, qu'existent déjà une cote des incidents de paiement et une centrale des bilans, votre Rapporteur a émis un avis négatif.

Votre Commission a rejeté cet amendement.

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Article 11

(articles L. 621-9-1 à L. 621-9-3 [nouveaux] du code monétaire et financier)

Conditions de déroulement des enquêtes

de l'Autorité des marchés financiers

Cet article décrit les procédures de contrôle et d'enquête de l'AMF. Son paragraphe I insère trois nouveaux articles, énumérés L. 621-9-1 à L. 621-9-3, précisant les personnes habilitées à mener les enquêtes diligentées l'Autorité pour l'accomplissement de sa mission de contrôle et de surveillance. Le paragraphe II procède à quelques modifications de coordination sur les articles L. 621-10 à L. 621-12.

- paragraphe I : Personnes habilitées à mener des enquêtes

À l'heure actuelle, le président de la COB habilite un certain nombre de personnes à mener les enquêtes, personnes qui doivent remplir des conditions fixées par décret (décret du 23 mars 1990). Ce décret permet d'habiliter des personnes ne faisant pas partie du personnel de la COB (magistrats et fonctionnaires de catégorie A, fonctionnaires de catégorie B ayant au moins 5 ans d'ancienneté, certains personnels de la Banque de France, experts judiciaires). C'est à l'une de ces personnes habilitées que le directeur général de la COB délivre les ordres de mission quand il décide l'ouverture d'une enquête.

En revanche au CMF, les ordres de mission, qui valent habilitation, sont délivrés pour une enquête déterminée par le secrétaire général. En outre, le CMF peut déléguer son pouvoir de contrôle ou recourir à des concours extérieurs (cf. actuel article L. 622-7). Les conditions de ce recours à des contrôleurs extérieurs sont déterminées par le décret du 9 novembre 1998. Ainsi, le CMF peut demander à la COB de mettre à sa disposition un ou plusieurs enquêteurs, solliciter le concours du secrétariat général de la Commission bancaire, recourir aux organes centraux des réseaux mutualistes pour les prestataires qui leur sont affiliés, à un dépositaire central pour les prestataires qui y adhèrent ou des experts-comptables ou des commissaires aux comptes. L'article 4 de ce décret précise que, avant de recourir à un expert-comptable ou à un commissaire aux comptes, le CMF doit s'assurer de son indépendance à l'égard de la personne contrôlée.

L'architecture bâtie par le présent paragraphe devrait rapprocher la situation de l'AMF de celle du CMF. L'article L. 621-9-1 vise les modalités d'habilitation des enquêteurs faisant partie du personnel de l'Autorité. L'article L. 621-9-2 organise le recours à des concours extérieurs dans des conditions analogues à celles du CMF.

● article L. 621-9-1 : Enquêteurs internes à l'Autorité des marchés financiers

Cet article précise que les enquêteurs chargés de mener les enquêtes décidées par le secrétaire général de l'Autorité doivent être habilités. Il est précisé que ce pouvoir d'habilitation appartient au secrétaire général selon des modalités fixées par le règlement général de l'Autorité. De plus, c'est un décret en Conseil d'État qui détermine les conditions d'exercice auxquelles doivent répondre les personnes susceptibles d'être habilitées.

Contrairement à l'actuel article L. 621-10, ce n'est plus le président de la COB qui habilite les enquêteurs. Le fait de confier l'habilitation au secrétaire général de l'AMF répond au souci de sécuriser la procédure de sanction de l'AMF. Dans la mesure où, à l'issue de l'enquête, le collège sera amené à se prononcer sur les suites a y donner, il est apparu préférable de ne pas impliquer son président dans le déclenchement de l'enquête.

● article L. 621-9-2 : Concours extérieurs aux enquêtes

Cet article reprend, d'une part, les dispositions du II de l'actuel article L. 622-9 relatif au CMF et, d'autre part, celles de l'actuel article L. 621-9 relatif à la COB.

Ainsi, l'Autorité pourra, comme le CMF, déléguer aux entreprises de marché et aux chambres de compensation le contrôle de l'activité et des opérations effectuées par les membres d'un marché réglementé et par les prestataires de services d'investissement ayant transmis des ordres sur ce marché. Cette délégation, qui fait l'objet d'un « protocole d'accord », peut être retiré à tout moment.

Elle pourra également, comme le CMF encore, recourir à des « corps de contrôle extérieurs », à des commissaires aux comptes, à des experts inscrits sur une liste d'experts judiciaires ou à des personnes ou autorités compétentes. S'agissant du recours à des commissaires aux comptes, l'AMF ne sera pas limitée, comme le CMF actuellement, au choix des commissaires aux comptes du prestataire contrôlé. Il est précisé que ces personnes peuvent recevoir une rémunération de l'Autorité.À l'heure actuelle, l'article L. 622-9 n'envisage que la rémunération des commissaires aux comptes.

Enfin, comme la COB aujourd'hui, l'Autorité pourra demander aux commissaires aux comptes des sociétés faisant appel public à l'épargne ou à un expert inscrit sur une liste d'experts judiciaires de procéder à « toute analyse complémentaire ou vérification qui (...) parait nécessaire » auprès des personnes ou entités faisant appel public à l'épargne et auprès des personnes soumises au contrôle de l'Autorité en vertu de l'article L. 621-9. Dans ce cas, les frais et honoraires seront à la charge de l'Autorité. Cette faculté est ouverte au secrétaire général, si l'on se trouve dans le cadre d'une enquête, ou au collège de l'Autorité dans les autres cas.

● article L. 621-9-3 : Inopposabilité du secret professionnel aux enquêteurs

Cet article reprend les dispositions aujourd'hui applicables aux enquêteurs de la COB (actuel article L. 621-11) et à ceux du CMF (actuel article L. 622-10). Le secret professionnel ne peut, dans le cadre des contrôles et enquêtes diligentées par l'AMF, être opposé à ses propres enquêteurs ni, le cas échéant, à ceux qui assistent l'Autorité en vertu des dispositions de l'article L. 621-9-2 (entreprises de marché, chambres de compensation, corps de contrôle, personnes ou autorités compétentes). Il est précisé également que les commissaires aux comptes sont déliés du secret professionnel à l'égard de l'Autorité.

Il convient de noter que le deuxième alinéa de l'actuel article L. 621-11 précise que les auxiliaires de justice ne sont pas déliés de leur obligation de secret professionnel vis-à-vis des enquêteurs de la COB. Cette exclusion n'a pas, semble-t-il par erreur, été reprise dans le présent article.

Il convient de rappeler que, en vertu de l'article L. 641-2, le « fait de mettre obstacle à une mission des enquêteurs » de l'Autorité constitue un délit puni de deux ans d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende.

- paragraphe II : Coordination

Ce paragraphe prévoit des modifications de coordination des articles L. 621-10, L. 621-11 et L. 621-12.

À l'article L. 621-10, le premier alinéa relatif à l'habilitation des enquêteurs est supprimé, ces dispositions figurant désormais à l'article L. 621-9-1 (cf. ci-dessus). L'article L. 621-10 ne définit plus que les pouvoirs d'investigation des enquêteurs. Ceux-ci peuvent, pour les besoins de l'enquête, d'une part, se faire communiquer tous documents, quel qu'en soit le support, et en obtenir la copie, d'autre part, convoquer et entendre toute personne susceptible de leur fournir des informations et, enfin, accéder aux locaux à usage professionnel.

À l'article L. 621-11, les deux derniers alinéas sont supprimés, puisque les dispositions du premier (inopposabilité du secret professionnel aux enquêteurs) et celles du second (soumission au secret professionnel des membres et agents de l'Autorité) figurent désormais respectivement à l'article L. 621-9-3 (cf. ci-dessus) et à l'article L. 621-4 (cf. article 5 du projet de loi). L'article L. 621-11 ne comporte plus qu'un seul alinéa autorisant toute personne convoquée à se faire assister d'un conseil de son choix. Cet alinéa est modifié, afin que le décret déterminant les modalités de la convocation et les conditions dans lesquelles l'exercice de ce droit est assuré soit un décret en Conseil d'État et non un décret simple. Cette précision ne fait que confirmer la situation actuelle, puisque les dispositions en question figurent dans le décret en Conseil d'État du 23 mars 1990 précité.

L'article L. 621-12 permet au président du tribunal de grande instance d'autoriser, pour la recherche des infractions portant atteinte à la transparence des marchés (utilisation d'une information privilégiée, diffusion d'informations fausses ou trompeuses, manœuvre ayant pour but d'entraver le bon fonctionnement d'un marché), d'autoriser les enquêteurs à effectuer des visites en tous lieux et procéder à la saisie de document. À l'heure actuelle, la saisine du président du tribunal doit faire l'objet d'une demande motivée du président de la COB. La nouvelle rédaction confie au secrétaire général de l'Autorité la compétence de saisir le président du tribunal, dans le souci de ne pas impliquer le président de l'Autorité dans le déroulement des enquêtes.

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Le Sénat a adopté un amendement présenté par M. Jacques Oudin, rétablissant la disposition actuelle selon laquelle le secret professionnel des auxiliaires reste opposable aux enquêteurs de l'AMF.

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Votre Commission a examiné un amendement de M.  Philippe Auberger visant à éviter le cumul des sanctions. Le projet de loi actuel ne règle, en effet, pas la question des éventuels cumuls de sanctions prononcées à l'encontre des intermédiaires, pour un même fait. Il faut donc éviter que le cumul des deux sanctions ne soit supérieur au plafond de la peine.

Votre Rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement estimant que, concrètement, il n'y a jamais cumul de sanctions pour les mêmes faits.

M. Charles de Courson a souligné que le risque d'un cumul existe.

Votre Commission a rejeté cet amendement, puis a adopté cet article, sans modification.

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Article 12

(article L. 621-13 du code monétaire et financier)

Mesures d'urgence

Le paragraphe I de cet article modifie l'intitulé de la sous-section 4 de la section 4 (« Pouvoirs »). Le nouvel intitulé devient « Injonctions et mesures d'urgence », et non plus « Injonctions et sanctions administratives ». En effet, l'article L. 621-13 relatif aux mesures d'urgence est transféré dans cette sous-section et l'ensemble des articles relatifs aux procédures de sanction fera l'objet d'une nouvelle sous-section spécifique (sous-section 4 bis). Dès lors, la sous-section 4 sera composée de deux articles, l'article L. 621-13 relatif aux mesures d'urgence et l'article L. 621-14 relatif aux injonctions (cf. article 13 du projet de loi).

Le paragraphe II insère l'article L. 621-13 dans la sous-section 4 et y apporte une précision. Cet article autorise le président du tribunal de grande instance à prendre trois sortes de mesures d'urgence : mise sous séquestre des fonds, valeurs et titres appartenant aux personnes mises en cause par l'Autorité ; interdiction temporaire de l'activité ; obligation sous astreinte de consigner une somme d'argent fixée par lui. Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 621-12 dispose que c'est sur demande motivée de la COB que le président du tribunal est saisi. La modification proposée précise que cette demande motivée émane du président de l'Autorité ou, si l'on se trouve dans le cadre d'une enquête, du secrétaire général de celle-ci.

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Le Sénat a adopté l'article 12 sans modification.

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Votre Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 13

(article L. 621-14 du code monétaire et financier)

Injonctions

Le présent article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 621-14 qui est consacré aux injonctions prononcées par l'Autorité elle-même (paragraphe I) ou par le juge à sa demande (paragraphe II).

- paragraphe I : Injonctions prononcées par l'Autorité des marchés financiers

Ce paragraphe s'inspire des dispositions actuelles de l'article L. 621-14 relatives au pouvoir d'injonction de la COB. Il s'inspire également des dispositions relatives au pouvoir de « mise en garde » du CMF en cas de manquement par un prestataire de services d'investissement, une entreprise de marché ou une chambre de compensation à ses obligations professionnelles (actuel article L. 622-15), ou de la COB en ce qui concerne les prestataires de services d'investissement exerçant la gestion pour compte de tiers (article L. 621-24), c'est-à-dire à la possibilité d'ordonner à une personne de mettre fin aux pratiques contraires aux dispositions législatives et réglementaires.

Ce faisant, celles-ci sont modifiées sur quatre aspects.

En premier lieu, la rédaction proposée précise que ce pouvoir est exercé par le collège de l'Autorité. En effet à ce stade, il ne s'agit pas encore de la procédure de sanction proprement dite et la commission des sanctions n'est donc pas encore saisie. De plus, du fait des exigences croissantes de la jurisprudence rappelés dans les commentaires de l'article 3 , il est à craindre que, si ce pouvoir avait été confié à la commission des sanctions, l'injonction ait pu être considérée comme un « pré-jugement » par le juge saisi d'un recours contre une éventuelle sanction ultérieure.

En deuxième lieu, un élément de contradictoire est introduit dans la procédure d'injonction, puisque la personne concernée doit avoir été mise en mesure de présenter des « explications ». Cette possibilité s'inspire des procédures de mises en garde de la COB et du CMF.

En troisième lieu, les conditions nécessaires à la mise en œuvre de la procédure d'injonction sont élargies :

- à l'heure actuelle, cette procédure n'est ouverte qu'en cas de pratiques contraires aux règlements de la COB ; la rédaction proposée l'étend à toutes les pratiques contraires aux dispositions législatives et réglementaires, et non pas uniquement aux dispositions du règlement général de l'Autorité ;

- la procédure n'est pas, actuellement, ouverte à toutes les pratiques, mais uniquement à celles qui ont pour effet de « fausser le fonctionnement du marché », de « procurer aux intéressés un avantage injustifié qu'ils n'auraient pas obtenu dans le cadre normal du marché », de « porter atteinte à l'égalité d'information et de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts », de « faire bénéficier les émetteurs et les investisseurs des agissements d'intermédiaires contraires à leurs obligations professionnelles » ; la rédaction proposée vise également les pratiques qui « sont de nature à porter atteinte aux droits des épargnants ».

Enfin, la rédaction proposée autorise l'Autorité à rendre publiques les injonctions qu'elle prononce. Cette possibilité constitue une mise en œuvre anticipée des dispositions de l'article 14-4 de la directive « abus de marché », qui autorise une telle publicité « excepté dans les cas où [la] publication perturberait gravement les marchés financiers ou causerait un préjudice disproportionné aux parties en cause ».

- paragraphe II : Saisine du président du tribunal de grande instance de Paris

Ce paragraphe reprend les dispositions des actuels articles L. 621-17 et L. 622-20-1 du code concernant la possibilité pour, respectivement, la COB et le CMF de saisir le juge, afin qu'il ordonne à la personne responsable de se conformer à la loi et aux règlements, de mettre fin à l'irrégularité ou d'en supprimer les effets.

La faculté de saisir le juge est élargie, puisqu'elle n'est plus limitée aux pratiques « de nature à porter atteinte aux droits des épargnants » (cas de la COB) ou aux manquements au règlement général du CMF.

La procédure est inchangée : la demande est portée devant le président de grande instance de Paris par le président de l'Autorité, le juge statue en référé et sa décision est exécutoire par provision.

En revanche, les pouvoirs du juge sont réduits. Il continue à pouvoir, même d'office, prendre toute mesure conservatoire et prononcer, pour l'exécution de son ordonnance, une astreinte versée au Trésor public (en cas de poursuites pénales, elle n'est liquidée qu'après que la décision sur l'action publique soit devenue définitive). En revanche, il n'est plus précisé qu'il reste compétent pour connaître des exceptions d'illégalité, c'est-à-dire qu'il n'a plus la possibilité de se prononcer sur la légalité des règlements, et en particulier du règlement général de l'Autorité. Il s'agit donc de revenir à la situation de droit commun, selon laquelle ce pouvoir appartient au juge administratif, d'autant plus que cette faculté, ici ouverte au juge judiciaire, n'a jamais été mise en œuvre.

À l'heure actuelle, l'article L. 621-17 comporte un alinéa prévoyant que, lorsque la pratique en cause est passible de sanctions pénales, la COB ou le CMF informe le Procureur de la République de la mise en en œuvre de la procédure d'injonction devant le président du tribunal de grande instance de Paris. Cet alinéa n'est pas repris. En effet, l'article 17 du projet de loi insère un article L. 621-20-1 obligeant, de manière générale, l'Autorité à aviser sans délai le procureur de la République lorsqu'elle a connaissance d'un crime ou d'un délit.

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Le Sénat a adopté l'article 13 sans modification.

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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.

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Article 14

(article L. 621-15 du code monétaire et financier)

Procédure de sanctions devant l'Autorité des marchés financiers

Le I de cet article insère une nouvelle sous-section, numérotée 4 bis et intitulée « Sanctions », au sein de la section 4. Cette section sera composée de quatre articles, les articles L. 621-15 (procédure de sanctions devant l'Autorité), L. 621-16 (cumul d'une sanction pécuniaire de l'Autorité et d'une amende pénale), L. 621-16-1 (possibilité pour l'Autorité de se constituer partie civile ; cf. article 15 du projet de loi) et L. 621-17 (Sanctions applicables aux conseillers en investissements financiers ; cf. article 43 du projet de loi).

Le II propose une rédaction nouvelle de l'article L. 621-15. Cette nouvelle rédaction, qui comporte cinq paragraphes, vise à rassembler dans un même article l'ensemble des dispositions reprenant les sanctions disciplinaires ou administratives de la COB (cf actuels articles L. 621-15, L. 621-25 et L. 621-26), du CMF (cf. actuels articles L. 622-16 et L. 622-17) ou du Conseil de discipline de gestion financière (cf. actuels articles L. 623-3 et L. 623-4).

Le code monétaire et financier reste largement lacunaire en ce qui concerne la procédure de sanction devant la COB, le CMF ou le Conseil de discipline. Ses différentes étapes ne sont guère distinguées. Les dispositions concernées se bornent à énumérer les personnes susceptibles d'être sanctionnées, les sanctions pouvant être prononcées et à mentionner l'exigence d'une « procédure contradictoire » ou de l'obligation d'entendre la personne mise en cause.

La nouvelle rédaction proposée vise à mieux distinguer les différentes étapes de la procédure, en précisant les modalités de sa mise en œuvre (paragraphe I), en précisant les personnes susceptibles d'être sanctionnées (paragraphe II) et les sanctions applicables (paragraphe III), les modalités de la prise de décision (paragraphe IV) et la possibilité de rendre publique la sanction prononcée (paragraphe V).

- paragraphe I : Mise en œuvre de la procédure de sanctions

Le déclenchement de la procédure de sanction appartient au collège de l'AMF, qui statue sur la base, soit d'un rapport d'enquête ou de contrôle établi par les services de l'AMF, soit en cas de demande formulée par le président de la Commission bancaire ou le président de la Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCAMIP).

Cette possibilité de saisine de l'AMF résulte des dispositions de l'article L. 631-1 qui autorise les « autorités de surveillance » (parmi lesquelles la Commission bancaire et la CCAMIP) à « se communiquer les renseignements nécessaires à l'accomplissement de leurs missions respectives ».

L'exposé des motifs du projet de loi précise qu'un élément de procédure contradictoire sera introduit avant que le collège ne statue, afin que « les personnes mises en cause aient pu prendre connaissance du rapport et formuler leurs premières observations ».

Lorsqu'il décide l'ouverture d'une procédure de sanction, le collège procède à la notification des griefs, c'est-à-dire à l'établissement d'un document énumérant les faits ou pratiques reprochés aux personnes mises en cause. Un mécanisme de prescription est introduit, puisque qu'aucune procédure ne peut porter sur des faits remontant à plus de trois ans, à moins qu'il n'ait été fait, pendant ce délai, un « acte tendant à leur recherche, à leur constatation ou à leur sanction ». Ce délai de prescription de trois ans correspond à la durée de prescription des délits et à celui retenu pour les procédures devant le Conseil de la concurrence.

Comme le CMF actuellement (cf. actuel article L. 622-17), le collège pourra, « en cas d'urgence », suspendre l'activité des personnes morales soumises au contrôle de l'Autorité et des personnes physiques placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte, contre lesquelles la procédure de sanction est engagée. Cette faculté est donnée au collège et non à la commission des sanctions elle-même, afin qu'une telle suspension ne puisse être considérée comme un « pré-jugement » entachant l'impartialité de la commission.

En vertu du nouvel article L. 621-20-1 (cf. article 17 du projet de loi), l'AMF sera tenue d'aviser le procureur de la République lorsqu'elle acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, et de lui transmettre tous les documents en sa possession. Le présent paragraphe précise que, en cas de transmission du rapport d'enquête, le collège de l'Autorité peut être autorisé par le parquet à rendre publique cette transmission. Celle-ci peut, en effet, constituer une sorte d'ultime mise en garde adressée aux personnes mises en cause. Elle pourrait également permettre aux personnes qui en rempliraient les conditions de se porter partie civile.

Le déclenchement de la procédure de sanction par le collège entraîne la saisine de la commission des sanctions de l'Autorité. Celle-ci désigne alors un rapporteur, soit parmi ses membres, soit parmi des « personnalités désignées dans des conditions définies par décret en Conseil d'État ». L'exposé des motifs du projet de loi précise que, « de préférence », le choix portera sur un membre de la commission des sanctions, mais que la possibilité de recourir à des rapporteurs extérieurs a pour projet de « maintenir la plus grande souplesse possible et faire face à des situations où de nombreuses procédures seront en cours ».

Le présent paragraphe ne précise pas le rôle du rapporteur et la façon dont celui-ci accomplit sa mission. Le paragraphe suivant ne mentionne que l'exigence d'une « procédure contradictoire ». Comme actuellement, ces précisions relèvent du domaine réglementaire.

Les conditions dans lesquelles est assuré le caractère contradictoire de la procédure d'instruction par le rapporteur sont précisées dans le règlement intérieur de la COB ou dans le règlement général du CMF, dans des termes assez voisins. Le rapporteur entend la personne mise en cause s'il l'estime nécessaire ou si elle en fait la demande. Elle peut se faire assister de tout conseil de son choix. Le rapporteur notifie les résultats de son instruction à la personne mise en cause, laquelle dispose d'un délai pour y répondre par écrit.

Cependant, il faut bien avoir conscience que le rôle du rapporteur de la commission des sanctions de l'AMF sera très différent de celui du rapporteur devant la COB ou le CMF, puisqu'il ne participe plus à l'« enquête préliminaire » et ne procède plus à la notification des griefs. Son rôle s'apparentera davantage à une mise en état du dossier, résumant l'affaire, rappelant le droit applicable et ne comportant pas de recommandations de sanctions en bonne et due forme.

C'est cette profonde différence qui explique qu'il n'est pas envisagé de prévoir que, comme c'est le cas pour le rapporteur de la COB depuis la réforme de la procédure disciplinaire intervenue en 2000, que le rapporteur devra se retirer lorsque la commission des sanctions délibérera.

La solution retenue par le projet de loi est parfaitement compatible avec la jurisprudence la plus récente de la Cour européenne des droits de l'homme.

Dans un arrêt du 6 juin 2000 concernant les tribunaux de commerce (Morel c/France), elle a estimé que « le simple fait, pour un juge, d'avoir déjà pris des décisions avant le procès ne peut passer pour justifier en soi des appréhensions relativement à son impartialité. Ce qui compte est l'étendue des mesures adoptées par le juge avant le procès. De même, la connaissance approfondie du dossier par le juge n'implique pas un préjugé empêchant de le considérer comme impartial au moment du jugement sur le fond ».

La Cour a appliqué ce raisonnement à la procédure suivie devant le CMF dans un arrêt du 27 août 2002 (Didier c/France). Comme l'indique cet arrêt, « La Cour doit donc rechercher tout d'abord si, durant la phase d'instruction puis de jugement, compte tenu de la nature et de l'étendue des fonctions du rapporteur, ce dernier fit preuve au regard de sa connaissance approfondie du dossier d'un parti pris quant à la décision à rendre par le CMF ». Or, en l'espèce, la Cour note que « le rapporteur (...) ne peut être à l'origine de la saisine (...) [qu'] il ne participe pas à la formulation des griefs ; il n'a pas le pouvoir de classer l'affaire ou, au contraire, d'élargir le cadre de la saisine (...) [que] son travail consiste (...) à « consigner le résultat de ces opérations par écrit » ». La Cour en conclut que « même si le rapporteur participe au délibéré, la circonstance qu'il ait obtenu une connaissance précise de l'affaire du fait d'avoir mené l'instruction ne contrevient en aucune façon au principe d'impartialité ». La Cour a également vérifié si l'appréciation préliminaire opérée par le rapporteur pourrait être considérée comme préjugeant l'appréciation finale. Elle a conclu qu'il n'en était rien, dans la mesure où « cette appréciation préliminaire s'appuie sur un dossier tenu à la disposition de la personne mise en cause », que « ce dossier fait l'objet d'une présentation par le rapporteur lors de la séance avant que les débats ne commencent » et que « la personne mise en cause et, le cas échéant, son conseil, doivent pouvoir prendre la parole en dernier ». La Cour a donc jugé que « l'appréciation finale, résultant du délibéré, intervient avec le jugement et s'appuie sur les éléments produits et débattus à l'audience » et qu'il n'y « aucun motif objectif de croire que la nature et l'étendue des tâches du rapporteur durant la phase d'instruction ait porté atteinte à son impartialité objective lors du délibéré ».

- paragraphe II : Personnes susceptibles d'être sanctionnées

Ce paragraphe énumère les personnes susceptibles d'être sanctionnées par la commission des sanctions de l'Autorité. Cette énumération n'est pas structurée de la même façon qu'actuellement, car la distinction actuelle entre sanctions disciplinaires de la COB ou du CMF (en cas de manquement aux obligations professionnelles par les personnes soumises à leur contrôle) et sanctions administratives de la COB (à l'égard de toute personne portant atteinte au bon fonctionnement des marchés) disparaît.

S'agissant des personnes actuellement justiciables d'une sanction disciplinaire de la part de la COB ou du CMF, les dispositions actuelles distinguent les personnes morales et les personnes physiques. Pour les personnes passibles des sanctions administratives de la COB, les dispositions actuelles s'appliquent à tous, personnes morales ou personnes physiques, professionnels ou non professionnels.

Le paragraphe proposé distingue les catégories de « justiciables » de la commission des sanctions d'une manière quelque peu différente. Celles-ci sont au nombre de trois :

- les personnes morales « professionnelles », c'est-à-dire soumises au contrôle de l'Autorité en vertu du II du nouvel article L. 621-9 (cf. article 10 du projet de loi), qui seraient sanctionnées pour tout « manquement à leurs obligations professionnelles définies par les lois, règlements et règles professionnelles en vigueur » (a),

- les personnes physiques « professionnelles », soumises à l'autorité des précédentes ou agissant pour leur compte, qui seraient sanctionnées pour les mêmes faits (b),

- les autres personnes « non professionnelles », qu'elles soient morales ou physiques (c), qui seraient sanctionnées pour des pratiques qui, en vertu du nouvel article L. 621-14, porteraient atteinte au fonctionnement du marché.

Les personnes visées aux a et b relèvent aujourd'hui de la « juridiction » du CMF (cf. actuels articles L. 622-16 et L. 622-17), ou de la COB en ce qui concerne les prestataires de services d'investissement habilités à fournir le service de gestion de portefeuille pour compte de tiers (cf. actuels articles L. 621-25 et L. 621-26) ou du Conseil de discipline pour les OPCVM (cf. actuel article L. 623-2). Ne sont pas visées les personnes habilitées à procéder au démarchage bancaire ou financier et les conseillers en investissements financiers, qui relèvent d'un régime disciplinaire spécifique qui peut, néanmoins, être mis en œuvre par la commission des sanctions de l'Autorité sous certaines conditions (cf. articles 39 et 43 du projet de loi).

Pour ces personnes, il est également précisé que l'intervention du pouvoir disciplinaire de l'Autorité s'exerce « sous réserve » du pouvoir disciplinaire que la Commission bancaire détient de l'article L. 613-21 du code monétaire et financier. En effet, celle-ci peut sanctionner un établissement de crédit ou un prestataire de services d'investissement qui « a enfreint une disposition législative ou réglementaire afférente à son activité, n'a pas répondu à une recommandation ou n'a pas tenu compte d'une mise en garde ou encore n'a pas respecté les engagements pris à l'occasion d'une demande d'agrément ou d'une autorisation ou d'une dérogation ».

À l'heure actuelle, les personnes visées au c sont justiciables des sanctions administratives de la COB (cf. actuel article L. 621-14).

Enfin, reprenant la rédaction actuelle de l'article L. 621-15, le paragraphe précise que les sanctions sont prises « après une procédure contradictoire » (cf. supra).

- paragraphe III : Sanctions applicables

Actuellement, le barème des sanctions disciplinaires applicables aux professionnels est commun au CMF, à la COB et du Conseil de discipline. Les sanctions diffèrent selon qu'elles s'appliquent à des personnes morales ou à des personnes physiques placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte. Ces sanctions sont l'avertissement, le blâme, l'interdiction à titre temporaire ou définitif de l'exercice de tout ou partie des services (pour les personnes physiques, le retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle), auxquelles peut s'ajouter une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 750 000 € ou au décuple des profits réalisés (60 000 € ou le triple des profits réalisés pour les personnes physiques).

En revanche, s'agissant des sanctions administratives de la COB, le barème actuel est différent et ne distingue pas, comme on l'a vu, entre personnes morales et personnes physiques ou entre professionnels et non professionnels. La sanction encourue est uniquement pécuniaire et ne peut excéder 1,5 million d'euros, ou le décuple des éventuels profits réalisés.

L'unification des sanctions entraîne l'unification du barème de celles-ci. Comme le montre le tableau ci-dessous, il apparaît que :

- les sanctions pécuniaires ont été aggravées pour les professionnels personnes physiques en cas de manquement à leurs obligations professionnelles,

- les sanctions pécuniaires ont été réduites pour les personnes physiques, qu'elles soient professionnelles ou non, en cas de pratiques de nature à fausser le fonctionnement du marché.

Droit actuel

Projet de loi

Sanctions pour manquements aux obligations professionnelles :

Personnes morales

- avertissement

- blâme

- interdiction temporaire ou définitive de l'activité

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 750 000 € ou le décuple des profits réalisés

- avertissement

- blâme

- interdiction temporaire ou définitive de l'activité

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 1 500 000 € ou le décuple des profits réalisés

Personnes physiques

- avertissement

- blâme

- retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 60 000 € ou le triple des profits réalisés

- avertissement

- blâme

- retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 300 000 € ou le quintuple des profits réalisés

Sanctions pour pratiques faussant le fonctionnement du marché

Professionnels personnes morales

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 1 500 000 € ou le décuple des profits réalisés

- avertissement

- blâme

- interdiction temporaire ou définitive de l'activité

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 1 500 000 € ou le décuple des profits réalisés

Professionnels, personnes physiques

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 1 500 000 € ou le décuple des profits réalisés

- avertissement

- blâme

- retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 300 000 € ou le quintuple des profits réalisés

Non professionnels, personnes morales

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 1 500 000 € ou le décuple des profits réalisés

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 1 500 000 € ou le décuple des profits réalisés

Non professionnels, personnes physiques

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 1 500 000 € ou le décuple des profits réalisés

- sanction pécuniaire ne pouvant excéder 300 000 € ou le quintuple des profits réalisés

Cette réduction ne se justifie pas et votre Rapporteur présentera un amendement rétablissant le plafond actuel de la sanction pécuniaire.

Application du principe de personnalisation des sanctions, ce paragraphe reprend une disposition relative aux sanctions administratives de la COB (cf. actuel article L. 621-15), selon laquelle le montant de la sanction doit être fixé en fonction de « la gravité des manquements commis » et en relation « avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements ».

- paragraphe IV : Présence de la personne mise en cause et motivation des décisions

Ce paragraphe reprend les dispositions actuelles relatives à la procédure en matière de sanctions disciplinaires devant la COB, le CMF ou le Conseil de discipline (cf. actuels articles L. 621-25, L. 621-26, L. 622-16, L. 622.17 et L. 623-3), selon laquelle la commission des sanctions de l'Autorité statue par « décision motivée » et qu'aucune sanction ne peut être prononcée sans que la personne concernée ou son représentant « ait été entendu ou, à défaut, dûment appelé ».

Comme en ce qui concerne le caractère contradictoire de la procédure d'instruction par le rapporteur, le règlement intérieur de la COB et le règlement général du CMF précisent actuellement les modalités de mise en œuvre de cette obligation. La personne mise en cause est convoquée au moins 10 jours avant la date de la réunion au cours de laquelle l'affaire sera évoquée. Elle peut s'y faire assister du conseil de son choix, s'exprimer et faire entendre sa défense et doit, en tout état de cause, pouvoir prendre la parole en dernier. Enfin, les membres présents qui participent au délibéré doivent être les mêmes que ceux qui ont entendu la personne mise en cause.

- paragraphe V : Publicité des décisions de l'Autorité des marchés financiers

Reprenant une faculté offerte à la COB (cf. actuel article L. 621-15) et au CMF (cf. actuel article L. 622-18), ce paragraphe autorise la commission des sanctions de l'Autorité à rendre publique sa décision dans les publications, journaux ou supports qu'elle désigne. Dans ce cas, les frais sont supportés par les personnes sanctionnées.

Comme on l'a vu en matière d'injonctions (cf. article 13 du projet de loi), cette possibilité n'est pas contraire aux dispositions de l'article 14-4 de la directive « abus de marché », qui autorise une telle publicité « excepté dans les cas où [la] publication perturberait gravement les marchés financiers ou causerait un préjudice disproportionné aux parties en cause ».

Il convient de noter que le présent paragraphe ne reprend pas deux dispositions applicables à la COB ou au CMF. La première (cf. dernier alinéa de l'actuel article L. 621-25 et IV de l'actuel article L. 622-16) prévoit que la Commission bancaire et le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (CECEI) sont informés de toute mesure d'interdiction à titre temporaire ou définitif de tout ou partie des activités exercées par la personne morale sanctionnée. La seconde (cf. actuels articles L. 621-27 et L. 622-18 du code monétaire et financier) prévoit d'informer, le cas échéant, la Commission européenne et les autorités compétentes des autres États membres des sanctions prises.

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Le Sénat a adopté trois amendements présentés par sa commission des Finances.

Au paragraphe II de l'article L. 621-15, le premier complète la liste des professionnels pouvant faire l'objet de sanctions de la part de l'AMF, en y ajoutant les analystes financiers, par coordination avec l'amendement adopté à l'article 8 du projet de loi. Le deuxième amendement précise que les règles professionnelles dont les manquements peuvent être sanctionnés doivent avoir été préalablement « approuvées » par l'Autorité et donc intégrées dans son règlement général, afin d'éviter de viser des règles professionnelles qui auraient été définies sans que l'on sache « ni par qui, ni comment », selon les termes du rapport de la commission des Finances.

Le troisième amendement, qui a été adopté malgré l'avis défavorable du Gouvernement, insère un nouvel article L. 621-15-1 au sein du code monétaire et financier, visant à résoudre partiellement la question récurrente de la double répression « administrative » et pénale de certains faits portant atteinte au bon fonctionnement des marchés.

Les articles L. 465-1 à L. 465-3 (non modifiés par le présent projet de loi) définissent deux infractions constituant des atteintes à la transparence des marchés :

- le délit et le manquement d'initié, qui consiste pour toute personne (dirigeants d'une société ou non) qui détient, dans le cadre de son activité professionnelle (délit) ou en dehors (manquement), une information privilégiée (information précise, non publiée, concernant les perspectives ou la situation d'un émetteur ou les perspectives d'évolution d'une valeur mobilière), soit à réaliser, directement ou par personne interposée, une ou plusieurs opérations avant que l'information soit publiée, soit à la communiquer à un tiers en dehors du cadre normal de sa profession ou des ses fonctions (article L. 465-1) ;

- le délit de manipulation de cours, qui consiste pour toute personne à exercer ou à tenter d'exercer, directement ou par personne interposée, une manoeuvre ayant pour but d'entraver le fonctionnement régulier d'un marché en induisant autrui en erreur (article L. 465-2).

En application de l'article L. 465-3, les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables de ces deux infractions.

Il se trouve que, dans son règlement n° 90-08, la COB a donné une définition de l'utilisation d'une information privilégiée, pour lequel elle peut prononcer une sanction administrative, pratiquement identique à celle du délit d'initié. Il convient de noter que l'introduction, par le présent article, d'une prescription de trois ans pour les poursuites de l'AMF va contribuer à rapprocher davantage procédure pénale et procédure administrative. Cependant, l'AMF, comme la COB aujourd'hui, n'aura pas, contrairement au juge pénal, à établir l'intention frauduleuse de la personne mise en cause.

Cette situation, selon laquelle les mêmes faits peuvent donc faire l'objet d'une condamnation pénale et d'une sanction de l'autorité de régulation, nourrit, depuis une dizaine d'années, un débat de principe autour de la règle « non bis in idem », dont les professionnels du droit font leur miel, mais qui apparaît largement déconnecté de la réalité. En effet, il apparaît que ce cumul reste très largement théorique, puisque sur les douze dernières années, on recense seulement quatre cas de poursuites parallèles de la COB et du juge pénal.

Les termes de ce débat sont bien connus et les solutions éventuelles guère évidentes.

D'une part, cette situation n'est pas contraire à nos principes constitutionnels. Dans sa décision n° 89-260 DC du 28 juillet 1989 relative à la loi relative à la sécurité et à la transparence du marché financier, le Conseil constitutionnel a, en effet jugé :

- qu'une autorité administrative peut se voir reconnaître un pouvoir de sanction « dès lors, d'une part, que la sanction susceptible d'être infligée est exclusive de toute privation de liberté et, d'autre part, que l'exercice du pouvoir de sanction est assorti par la loi de mesures destinées à sauvegarder les droits et libertés constitutionnellement garantis »,

- que le principe selon lequel une même personne ne peut pas être punie deux fois pour le même fait « ne reçoit pas application au cas de cumul entre sanctions pénales et sanctions administrative », « sans qu'il soit besoin de rechercher [s'il] a valeur constitutionnelle »,

- que « le principe de proportionnalité implique, qu'en tout état de cause, le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues ».

D'autre part, il ne saurait être question de renoncer à toute compétence de l'AMF en la matière. D'ailleurs, le présent projet de loi ne reprend pas la disposition figurant dans le projet présenté par le précédent gouvernement qui, tout en élargissant la définition du délit d'initié, entendait en réserver la répression au juge pénal. Or, tout le monde s'accorde à reconnaître que la procédure administrative est un moyen efficace, parce que beaucoup plus rapide - la durée moyenne d'une procédure est comprise entre 6 mois et un an, alors qu'elle peut atteindre plusieurs années pour le juge pénal - et que la justice pénale peine, malgré les efforts consentis au cours des dernières années, à réprimer efficacement la délinquance économique et financière.

En outre, l'hypothèse d'un dessaisissement de l'AMF se heurte, désormais, aux dispositions de l'article 14 de la directive « Abus de marché » qui prévoit que « sans préjudice de leur droit d'imposer des sanctions pénales, les États membres veillent à ce que, conformément à leur législation nationale, des mesures administratives appropriées puissent être prises ou des sanctions administratives appliquées à l'encontre des personnes responsables d'une violation des dispositions arrêtées en application de la présente directive » et que « les États membres garantissent que ces mesures sont effectives, proportionnées et dissuasives ».

Le dispositif adopté par le Sénat ne vise pas à supprimer toute hypothèse de cumul de procédures, mais, selon les termes de son Rapporteur, de « mieux l'organiser dans le temps » :

1° si l'un des griefs notifiés par le collège constitue un délit boursier, il doit transmettre le rapport d'enquête au Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris,

2° le procureur dispose d'un délai de 10 jours pour indiquer à l'AMF son intention d'engager des poursuites pénales,

3° si le procureur indique, dans ce délai, qu'il est favorable au déclenchement des poursuites, l'AMF dispose d'un délai de six mois pour mener sa procédure de sanction à son terme, l'action publique ne pouvant être déclenchée qu'à l'issue de celle-ci.

Ce dispositif n'apparaît guère satisfaisant. D'une part, le point 1° est parfaitement redondant avec les dispositions de l'article 17 du projet de loi qui font obligation à l'AMF de saisir le procureur de la République dès qu'elle a connaissance d'un crime ou d'un délit. D'autre part, le délai de 10 jours laissé au procureur est singulièrement court pour procéder à l'étude des pièces fournies par l'AMF et interdit, de fait, au procureur de faire réaliser d'autres investigations comme le lui permet l'article 41 du code de procédure pénale. Enfin, le délai de six mois laissé à l'AMF pourrait s'avérer difficile à concilier avec les exigences d'une procédure contradictoire et laisse la porte ouverte à toutes les manœuvres de la personne mise en cause pour empêcher la commission des sanctions de statuer dans le délai. En outre, il apparaît peu conforme aux principes généraux de la procédure pénale de faire dépendre le déclenchement des poursuites de l'issue d'une procédure administrative.

La caractère insatisfaisant du dispositif sénatorial montre à l'évidence que cette question ne pourra trouver sa solution dans une modification des textes, sauf à retenir la seule solution autorisée par le droit communautaire, trop radicale et donc inconcevable, de la dépénalisation des délits boursiers.

La rareté du cumul réel des procédures administrative et pénale montre qu'un partage des tâches s'opère de manière largement pragmatique. Il est arrivé à la COB de transmettre des dossiers au procureur, et de renoncer spontanément à son pouvoir de sanction, notamment lorsque les faits lui faisaient supposer des ramifications vers la criminalité ou la délinquance organisée. Dès lors, la possibilité offerte à l'AMF d'exercer les droits de la partie civile (cf. article 15 du projet de loi) dans le cadre d'une procédure pénale préalablement ouverte, et de renoncer concurremment à son propre pouvoir de sanction, est de nature à inciter l'AMF à passer plus aisément le relais au juge pénal, puisqu'elle ne sera pas complètement exclue de la procédure.

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Votre Commission a examiné un amendement de M.  Jean-Pierre Balligand visant à modifier le délai à partir duquel l'AMF peut mener une enquête. Le projet de loi prévoit, en effet, que la commission des sanctions de l'AMF ne pourra être saisie de faits remontant à plus de trois ans. S'il est bien prévu que ce délai soit interrompu par divers événements, il s'agit ici d'agissements sur les marchés qui, bien souvent, seront largement dissimulés par leurs auteurs. Il convient donc de prévoir que le délai court à compter de la révélation des faits et non de leur réalisation. Il s'agit donc de pérenniser la jurisprudence de la Cour de cassation concernant les délits qui, tel l'abus de bien social, impliquent une dissimulation.

Votre Rapporteur a précisé que le modèle de l'abus de bien social n'était lui-même pas exempt d'inconvénients. En outre, sur les marchés, il n'y a pas de dissimulation et les affaires sont rapidement dévoilées. Enfin, adopter un tel amendement nuirait à la sécurité de la vie des affaires.

Votre Commission a rejeté cet amendement.

Votre Rapporteur a ensuite présenté un amendement visant à revenir au barème des sanctions, actuellement appliqué par la COB, en matière de délits boursiers et d'atteintes au fonctionnement des marchés, en ce qui concerne les professionnels, et d'aligner ainsi le régime applicable aux personnes morales et aux personnes physiques.

M.  Charles de Courson s'est félicité de cet amendement et a rappelé la nécessité de sanctions financières dissuasives tant les profits, dans ce domaine, peuvent être élevés. Il s'est ensuite interrogé sur la signification de l'alternative entre les 1,5 million d'euros et le décuple du montant des profits. S'agit-il d'un plafond ou est-il possible d'aller au-delà ?

Votre Rapporteur a répondu que le texte proposé par l'amendement est celui actuellement appliqué par la COB et que le plafond est le chiffre le plus élevé entre 1,5 million d'euros et le décuple des profits, faisant observer que ceux-ci étaient souvent difficiles à déterminer avec précision.

Votre Commission a adopté cet amendement (amendement n° 83).

Votre Commission a ensuite adopté un amendement similaire de votre Rapporteur concernant les non-professionnels (amendement n° 84).

Votre Rapporteur a enfin présenté un amendement visant à supprimer le III de cet article, introduit par le Sénat. Celui-ci voulait, en effet, trouver une solution au cumul entre sanctions administratives et sanctions pénales. L'intention est, certes, louable mais le dispositif est totalement impraticable, notamment s'agissant des pouvoirs du procureur de la République (amendement n° 85).

Votre Commission a adopté cet amendement. Elle a ensuite adopté l'article 14, ainsi modifié.

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Article 14 bis (nouveau)

(articles 704 et 704-1 [nouveau] du code de procédure pénale)

Compétence exclusive du tribunal de grande instance de Paris en matière de délits portant atteinte à la transparence des marchés

Cet article résulte de l'adoption, malgré l'avis défavorable du Gouvernement, d'un amendement présenté par la commission des Finances du Sénat.

Cet article insère un nouvel article 704-1 au sein du code de procédure pénale, visant à centraliser auprès du tribunal de grande instance de Paris la poursuite, l'instruction et le jugement des atteintes à la transparence des marchés visées aux articles L. 465-1 et L 465-2 du code monétaire et financier.

L'article 704 du code de procédure pénale confie à des tribunaux de grande instance spécialisés en matière économique et financière la poursuite, l'instruction et le jugement d'un certain nombre de délits, parmi lesquels les délits mentionnées ci-dessus. Il s'agit d'une compétence concurrente avec celle des juridictions territorialement compétentes : ainsi, lorsque le délit paraît « d'une grande complexité », le procureur territorialement compétent peut décider de saisir la juridiction spécialisée. Ces juridictions, dont la liste est fixée par un décret du 25 mars 1994, sont au nombre de trente-cinq.

Il est clair que, en matière de délits boursiers, le tribunal de grande instance de Paris est déjà, de fait, compétent pour une part substantielle des procédures engagées, étant donnée la localisation des principaux marchés et du siège de la plupart des intervenants. Par ailleurs, l'article 693 du code de procédure pénale précise que lorsque les critères destinés à déterminer la juridiction compétente (lieu de résidence du prévenu ou de la victime, lieu où le prévenu est trouvé) ne peuvent s'appliquer, la juridiction compétente est celle de Paris, sauf décision contraire de la Cour de cassation.

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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.

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Article 15

(article L. 621-16-1 [nouveau] du code monétaire et financier)

Possibilité pour l'Autorité des marchés financiers d'exercer les droits de la partie civile

Cet article insère, au sein de la sous-section 4 bis (« Sanctions »), un nouvel article L. 621-16-1.

Cet article autorise l'Autorité à exercer les « droits de la partie civile » lorsque des poursuites sont engagées en cas d'atteintes à la transparence des marchés (cf. articles L. 465- 1 et L. 465-2 : utilisation d'informations privilégiées, manœuvre ayant pour effet d'entraver le fonctionnement régulier d'un marché).

Une première tentative d'octroyer cette possibilité à la COB avait eu lieu lors de l'adoption de ce qui allait devenir la loi du 2 août 1989 relative à la sécurité et à la transparence des marchés financiers. Mais, dans sa décision n° 89-260 DC du 28 juillet 1989, considérant que « le respect des droits de la défense fait obstacle à ce que la COB puisse à l'égard d'une même personne et s'agissant des mêmes faits concurremment exercer les pouvoirs de sanction (...) et la faculté d'intervenir et d'exercer tous les droits de la partie civile », le Conseil constitutionnel a déclaré cette disposition contraire à la Constitution.

Tenant compte de cette décision du Conseil, le présent article interdit donc ce cumul de l'exercice des droits de la partie civile et du pouvoir de sanction « à l'égard d'une même personne et s'agissant des mêmes faits ».

L'Autorité n'aurait pas la plénitude des droits reconnus à la partie civile. En effet, son droit essentiel est celui de déclencher l'ouverture des poursuites pénales. Or, cette hypothèse est explicitement exclue, puisque l'Autorité ne pourrait se constituer partie civile qu'en cas de poursuites déjà engagées. Cependant, elle pourra transmettre des dossiers au Parquet - le nouvel article L. 621-20-1 (cf. article 17 du projet de loi) lui en fait d'ailleurs une obligation lorsqu'elle acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit - , celui-ci gardant néanmoins la plénitude de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité des poursuites.

Par ailleurs, selon une jurisprudence relative à l'administration fiscale transposable au cas de l'AMF, celle-ci ne pourra demander des dommages intérêts, puisqu'elle ne peut, à l'évidence, se prévaloir d'un préjudice qui lui soit propre.

Cependant, le fait de se voir reconnaître les droits de la partie civile permettra à l'AMF d'intervenir au cours de l'instruction, de présenter des demandes d'actes d'instruction et de participer aux débats de l'audience.

Il convient de rappeler que, d'ores et déjà, l'AMF peut être associée au déroulement d'une procédure pénale, même sans demander à exercer les droits de la partie civile. Ainsi, la nouvelle rédaction de l'article L. 621-20 (cf. article 17 du projet de loi) permet à l'Autorité - il est vrai à la seule initiative du juge - de déposer des conclusions et de les développer à l'audience. De plus, l'article L. 466-1 permet au juge de demander, en tout état de la procédure, l'avis de la COB lorsqu'il est saisi d'infractions mettant en cause les sociétés qui font appel public à l'épargne ou d'infractions commises à l'occasion d'opérations de bourse. Cet avis est obligatoirement demandé lorsque les poursuites portent sur des infractions portant atteinte à la transparence des marchés.

En choisissant d'exercer les droits de la partie civile dans le cadre d'une procédure pénale, l'Autorité pourra faire bénéficier le Parquet ou le juge d'instruction de son expérience et de sa bonne connaissance de dossiers d'une grande technicité, contribuant ainsi à renforcer l'efficacité de la réponse pénale en la matière.

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Le Sénat a adopté, malgré l'avis défavorable du Gouvernement, un amendement de sa commission des Finances permettant au président de l'Autorité de demander au procureur de la République le déclenchement des poursuites. La rédaction de l'amendement est telle que cette demande de l'AMF ne liait pas le procureur de la République, qui garde ainsi son pouvoir d'appréciation.

Dès lors, on peut se demander, comme le fait d'ailleurs Rapporteur lui-même, si cet amendement n'est pas « quelque peu redondant » avec l'obligation d'aviser le procureur de la République en cas de découverte par l'Autorité d'un crime ou d'un délit.

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Votre Commission a examiné un amendement de votre Rapporteur visant à revenir au texte initial du projet de loi, la modification insérée par le Sénat étant redondante avec les dispositions de l'article 17, quant à la saisine du procureur de la République.

Votre Commission a adopté cet amendement (amendement n° 86) puis cet article, ainsi modifié.

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Article 16

(article L. 621-19 du code monétaire et financier)

Conciliation ou médiation

Cet article modifie l'article L. 621-19 du code monétaire et financier, qui permet aux particuliers de saisir la COB (demain l'Autorité), autorise celle-ci à formuler des propositions de modifications des lois et règlements, prévoit la publication d'un rapport annuel et la possibilité pour son président d'être entendu par les commissions des Finances des deux assemblées.

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 621-19 autorise les particuliers à saisir la COB de « réclamations, pétitions, plaintes qui entrent par leur objet dans sa compétence ». Par souci de clarification de la terminologie, la rédaction proposée ne retient plus que le terme générique de « réclamations », les deux autres termes étant plus désuets, et n'apportant aucune précision supplémentaire.

Par ailleurs, la COB est autorisée à donner à ces réclamations les « suites qu'elles appellent ». Ces suites peuvent naturellement être l'ouverture d'une enquête ou d'une procédure de sanction. Mais, la rédaction proposée permet, en outre, à l'Autorité de proposer « la résolution amiable des différends portés à sa connaissance par voie de conciliation ou de médiation ». Rappelons que la conciliation se distingue de la médiation, en ce sens que l'accord auquel les parties parviennent sous l'égide du conciliateur ne résulte pas d'une proposition formulée par celui-ci.

Ce faisant, elle donne une reconnaissance législative aux efforts de médiation que la COB a engagé depuis de nombreuses années. En effet, celle-ci a désigné, dès septembre 1997, un médiateur qui s'efforce de concilier les parties en désaccord dans le cadre de différends à caractère individuel. Renforcé en 2001, le service de la médiation remplit désormais une double mission :

- il répond aux questions des épargnants particuliers, associations ou encore entreprises qui s'interrogent sur l'information fournie par les sociétés cotées dans lesquelles ils ont investi ou sur la manière dont leurs ordres de bourse ont été exécutés,

- il intervient dans l'hypothèse d'un conflit lorsque les parties concernées veulent essayer de régler le différend à l'amiable afin d'éviter une procédure judiciaire ; encadrée par une charte, cette procédure est gratuite et confidentielle et n'est mise en oeuvre qu'avec l'accord des parties ; en principe, sa durée est de trois mois, sauf décision du médiateur prise avec l'accord des parties.

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Le Sénat a adopté l'article 16 sans modification.

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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.

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Article 17

(articles L. 621-20 et L. 621-20-1 [nouveau] du code monétaire et financier)

Collaboration entre l'Autorité des marchés financiers et les juridictions

Cet article propose une rédaction nouvelle de l'article L. 621-20 relatif à la procédure d'avis à juridiction (paragraphe I) et insère un nouvel article L. 621-20-1 relatif à l'échange d'informations entre l'Autorité et le Parquet.

- paragraphe I (article L. 621-20) : Avis à juridiction

La rédaction actuelle de l'article L. 621-20 permet à toutes les juridictions (civiles, pénales, administratives) d'appeler le président de la COB ou son représentant à déposer des conclusions et à les développer oralement à l'audience. Cette procédure ne fait pas obstacle à la possibilité offerte au juge, par l'article L. 466-1, de demander, en tout état de la procédure, l'avis de la COB lorsqu'il est saisi d'infractions mettant en cause les sociétés qui font appel public à l'épargne ou à d'infractions commises à l'occasion d'opérations de bourse (cf. commentaires de l'article 15 du projet de loi).

Ce paragraphe n'apporte à cet article que des modifications rédactionnelles, qui conduisent, par le recours à une formule générale se substituant à une énumération d'articles du code monétaire et financier, à étendre le champ de cette procédure à l'application de l'ensemble des dispositions entrant dans le champ de compétences de l'Autorité.

- paragraphe II (article L. 621-60-1) : Échange d'informations entre l'Autorité des marchés financiers et le Parquet

Le premier alinéa du nouvel article L. 621-20-1 fait obligation à l'Autorité d'aviser « sans délai » le procureur de la République lorsqu'elle « acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit » et de lui transmettre « tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs ». Il ne s'agit, ni plus ni moins, que d'une reprise des dispositions de l'article 40 du code de procédure pénale, qui impose cette même obligation à « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire ». Se considérant, à juste titre, comme des autorités constituées, la COB et le CMF s'estiment actuellement déjà tenues à cette obligation du code de procédure pénale. En vertu du nouvel article L. 621-4 (cf. article 5 du projet de loi), le secret auquel sont tenus tous ceux qui concourent aux missions de l'Autorité n'est pas opposable à l'autorité judiciaire agissant dans le cadre d'une procédure pénale ou d'une procédure de liquidation judiciaire. Le second alinéa ajoute une nouvelle exception en permettant au procureur de la République, en dehors de toute procédure pénale, d'obtenir de l'Autorité « communication de tous les renseignements détenus par celle-ci dans le cadre de l'exercice de ses missions ».

Dès lors, contrairement aux dispositions de l'article L. 621-4, le présent article se heurte aux dispositions de l'article 16 de la directive « Abus de marché », transposées dans la nouvelle rédaction de l'article L. 621-21 (cf. article 18 du projet de loi). Rappelons que celui-ci prévoit que les informations échangées entre autorités compétentes des États membres sont couvertes par le secret professionnel et que l'autorité qui les reçoit ne peut les utiliser qu'à des fins strictement encadrées. Dans la mesure où le présent article s'applique hors du cadre d'une procédure pénale, la communication au procureur de la République de renseignements, transmis à l'Autorité dans le cadre de l'échange d'informations organisé par la directive, ne sera possible que si l'autorité qui a transmis l'information y consent. Cette réserve, simple application du principe de supériorité du droit communautaire sur la loi interne, gagnerait à être expressément inscrite dans le présent article.

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Le Sénat a adopté l'article 17 sans modification.

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Votre Commission a adopté un amendement de précision de votre Rapporteur (amendement n° 87). Elle a ensuite adopté cet article, ainsi modifié.

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Article 18

(articles L. 621-21 et L. 632-1 du code monétaire et financier)

Échange d'informations avec l'étranger

Le présent article modifie les articles L. 621-21 relatif à la coopération entre la COB et ses homologues étrangers (paragraphe I) et L. 632-1 relatif à l'échange d'informations avec l'étranger de la part du CMF, des entreprises de marché et des chambres de compensation (paragraphe II).

- paragraphe I (article L. 621-21) : Échange d'informations entre l'Autorité des marchés financiers et ses homologues étrangers

L'article L.621-21 autorise la COB, à la demande de ses homologues étrangers, à conduire des enquêtes ou à leur communiquer des informations. Cette autorisation s'applique sans restriction pour les homologues qui relèvent des États membres de l'Espace économique européen et sous réserve de réciprocité pour les autres, ces derniers devant, en outre, offrir les mêmes garanties de secret professionnel.

1°) Afin de lever tout obstacle juridique à ces échanges d'informations, le présent paragraphe complète le deuxième (concernant les autorités compétentes dans les États membres de l'Espace économique européen) et troisième (concernant les autorité compétentes des autres États) alinéas de l'article L. 621-21, afin de préciser que cette transmission d'information se fait par dérogation aux dispositions de la loi du 26 juillet 1968 relative à la communication des documents et renseignements d'ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique à des personnes physiques ou morales ; une précision analogue figure déjà aux articles L. 612-6 et L. 613-13 concernant respectivement le CECEI et la Commission bancaire. Cette loi interdit à toute personne physique de nationalité française ou résidant en France et à toute personne morale y ayant son siège :

- de communiquer, sous quelque forme que ce soit, à des autorités publiques étrangères les documents et renseignements visés « de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, aux intérêts économiques essentiels de la France et à l'ordre public » (article 1er)

- de demander, rechercher et communiquer les mêmes documents et renseignements « tendant à la constitution de preuves en vue de procédures judiciaires ou administratives étrangères ou dans le cadre de celles-ci » (article 1er bis).

Permettre à l'AMF de déroger à l'article premier de la loi de 1968 est contradictoire avec les dispositions de l'actuel quatrième alinéa de l'article L. 621-21 qui prévoit justement que la communication d'informations est « refusée » si l'exécution de la demande de l'autorité étrangère est « de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, aux intérêts économiques essentiels ou à l'ordre public » (12). Ces restrictions sont d'ailleurs autorisées par la directive européenne.

Dans la mesure où l'interdiction prévue à l'article 1er bis de la loi de 1968 s'applique « sous réserve des traités ou accords internationaux et des lois et règlements en vigueur », on peut se demander si l'actuel article L. 621-21 ne constitue pas une disposition législative spéciale écartant, de fait, l'application de l'article 1er bis, rendant ainsi inutile et ambiguë l'insertion proposée.

2°) Le présent paragraphe insère un nouvel alinéa au sein de l'article L. 621-21 précisant que les informations recueillies par l'AMF ne peuvent être divulguées qu'avec « l'accord explicite » des autorités étrangères compétentes qui les ont transmises ou « exclusivement aux fins pour lesquelles ces autorités ont donné leur accord ».

Cet alinéa constitue la transposition des dispositions de l'article 16 de la directive « Abus de marchés ». Rappelons que cet article, qui organise l'échange d'informations entre les autorités compétentes des États membres, lève le secret professionnel couvrant les informations échangées, dans des cas précisément définis, et si l'autorité qui a transmis l'information y consent.

- paragraphe II (article L. 632-1) : Échanges d'informations avec l'étranger par les entreprises de marché et les chambres de compensation

L'article L. 632-1 organise l'échange d'informations entre le CMF, les entreprises de marché et les chambres de compensation d'une part, et leurs homologues étrangers d'autre part. En effet, le CMF peut déléguer le contrôle des opérations réalisées sur un marché réglementé aux entreprises de marché et aux chambres de compensation. Le présent paragraphe apporte, à cet article, deux modifications de coordination avec la création de l'AMF. D'une part, il supprime la mention du CMF (sans la remplacer par celle de l'AMF, puisque les dispositions correspondantes la concernant figurent à l'article L. 621-21). D'autre part, il ajoute les « autorités homologues » de l'AMF aux interlocuteurs des entreprises de marché et des chambres de compensation.

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Le Sénat a adopté l'article 18 sans modification.

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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.

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Article 19

(article L. 621-30 du code monétaire et financier)

Recours contre les décisions de l'Autorité des marchés financiers

Cet article propose une rédaction nouvelle de l'article L. 621-30 déterminant les cas dans lesquels les recours contre les décisions de l'AMF sont de la compétence du juge judiciaire.

La question du partage des compétences entre le juge administratif et le juge judiciaire est particulièrement délicate en ce qui concerne les autorités administratives indépendantes.

Dans sa décision n° 86-224 DC du 12 janvier 1987, par laquelle il a admis le transfert au juge judiciaire du contentieux des décisions du Conseil de la concurrence, le Conseil constitutionnel a fixé les principes qui doivent alors être respectés :

- « conformément à la conception française de la séparation des pouvoirs, figure au nombre des « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République » celui selon lequel, à l'exception des matières réservées par nature à l'autorité judiciaire, relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l'annulation ou la réformation des décisions prises, dans l'exercice des prérogatives de puissance publique, par les autorités exerçant le pouvoir exécutif, leurs agents, les collectivités territoriales de la République ou les organismes publics placés sous leur autorité ou leur contrôle »,

- « dans la mise en oeuvre de ce principe, lorsque l'application d'une législation ou d'une réglementation spécifique pourrait engendrer des contestations contentieuses diverses qui se répartiraient, selon les règles habituelles de compétence, entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire, il est loisible au législateur, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'unifier les règles de compétence juridictionnelle au sein de l'ordre juridictionnel principalement intéressé ».

De fait, les règles applicables à la COB, au CMF et au conseil de discipline sont actuellement dissemblables. Comme le souligne le Conseil économique et social dans son rapport sur les autorités de régulation financières et de concurrence, « il faut être bon spécialiste pour s'y reconnaître et identifier sans se tromper la juridiction compétente »13 :

- s'agissant de la COB : les sanctions disciplinaires sont de la compétence du juge administratif, les sanctions administratives du juge judiciaire ; les décisions relatives à l'agrément des OPCVM, des gérants de portefeuille et des SCPI sont de la compétence du juge administratif, les autres décisions individuelles de la compétence du juge judiciaire ;

- s'agissant du CMF : les sanctions disciplinaires sont de la compétence du juge administratif ; toutes les autres décisions individuelles sont de la compétence du juge judiciaire, à l'exception de l'approbation des programmes d'activités des prestataires de services d'investissement qui relève du juge administratif ;

- s'agissant du conseil de discipline de la gestion financière : les sanctions disciplinaires sont de la compétence du juge administratif.

Dans le respect de ces principes à valeur constitutionnelle, le présent article clarifie la répartition des compétences respectives de juge administratif et du juge judiciaire, par une construction qui donne la part belle au premier.

La rédaction proposée n'évoque pas les recours contre les décisions à caractère réglementaire de l'AMF (règlement général, instructions, recommandations). Ils relèvent donc du juge administratif, ce qui est naturel pour des décisions prises dans l'exercice de prérogatives de puissance publique. C'est d'ailleurs la situation actuelle des décisions réglementaires de la COB (cf. actuel article L. 621-30) et du CMF (cf. actuel article L. 622-25).

S'agissant des décisions de portée individuelle, la rédaction proposée ne distingue plus selon la nature de la décision (sanctions ou autres décisions, et parfois, au sein de ces deux catégories, selon leur objet) comme c'est le cas actuellement pour la COB ou pour le CMF, mais selon l'identité de la personne concernée :

- si celle-ci est un professionnel, c'est-à-dire une personne soumise au contrôle de l'AMF, la compétence appartient au juge administratif,

- si elle n'est pas un professionnel, la compétence appartient au juge judiciaire.

En terme de décisions de la future Autorité susceptible de faire l'objet d'un recours, il apparaît que la place donnée à la compétence du juge judiciaire est numériquement la plus importance. Ainsi, en 2002, la COB et le CMF ont 1 370 décisions relatives aux visas de note d'information ou aux offres publiques, susceptibles demain d'un recours devant le juge judicaire. Par ailleurs, ces deux autorités et le conseil de discipline ont pris une trentaine de décisions de sanctions ou de mises en garde qui relèveront demain du juge administratif, sauf pour celles qui concerneraient des non professionnels. S'agissant du contentieux réel, il apparaît la répartition des tâches est plus équilibrée que ne laisseraient à penser ces chiffres. Depuis 1997, le juge administratif a eu à connaître d'une trentaine de recours contre des décisions des trois institutions auxquelles l'AMF va succéder (pour l'essentiel à l'encontre de sanctions disciplinaires), le juge judiciaire d'une soixantaine (pour l'essentiel à l'encontre de décisions relatives aux OPA ou à l'information des marchés).

La nouvelle répartition proposée par le présent article constitue une évidente simplification de la situation actuelle, parfaitement claire. Néanmoins, une répartition fondée sur la distinction entre professionnels et non professionnels, si elle est relativement simple à mettre en œuvre, présente néanmoins un inconvénient majeur : le cas de personnes impliquées pour des actes analogues dans une même affaire concernant des pratiques énumérées ci-dessus serait dissocié car confié à des juges différents.

La nouvelle rédaction proposée reprend une disposition existant pour les recours devant le juge judiciaire contre les décisions de la COB ou du CMF. Adaptant la procédure du sursis à exécution en vigueur devant le juge administratif, elle prévoit que le recours n'est pas suspensif, sauf lorsque le juge en décide autrement si la décision contestée « est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives » (14).

Enfin, est renvoyé à un décret en Conseil d'État le soin de fixer les modalités d'application de l'article L. 621-30. Il convient de noter que ce sont les décrets d'application des dispositions relatives au contentieux des décisions de la COB (décret du 23 mars 1990) et du CMF (décret du 3 octobre 1996) qui ont centralisé les recours à la Cour d'appel de Paris, qui statue alors en premier et dernier ressort, sa décision étant naturellement susceptible de faire l'objet d'un pourvoi en cassation. D'après les informations recueillies par votre Rapporteur, le Gouvernement n'a pas l'intention de revenir sur cette centralisation.

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Le Sénat a adopté l'article 19 sans modification.

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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.

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Article 20

(articles L. 642-1 à L. 642-3 du code monétaire et financier)

Sanction de la violation du secret professionnel

et de la communication de renseignements inexacts

Cet article restructure le chapitre II du titre IV (« Dispositions pénales ») du livre VI (« Les institutions en matière bancaire et financière ») par coordination avec la création de l'AMF. Actuellement, ce chapitre comporte trois sections, consacrées respectivement à la COB, au CMF et au Conseil de discipline de la gestion financière, et sept articles.

Le présent article modifie l'intitulé du chapitre (il devient « Autorité des marchés financiers » et non plus « Dispositions relatives aux autorités des marchés financiers »)(paragraphe I), propose une nouvelle rédaction de ses deux premiers articles (articles L. 642-1 et L. 643-2)(paragraphe II) et modifie le troisième (article L. 642-3)(paragraphe III). Les autres articles et les trois sections sont abrogés et supprimés par l'article 37 du présent projet de loi.

- paragraphe I (article L. 642-1) : Délit de violation du secret professionnel

La nouvelle rédaction proposée pour l'article L. 642-1 harmonise la liste des personnes pouvant être pénalement sanctionnées en cas de violation du secret professionnel avec celle des personnes soumises à cette obligation (cf. dispositions du II de la nouvelle rédaction de l'article L. 621-4, à l'article 5 du projet de loi).

Il s'agit de toutes les personnes qui concourent à l'exercice des missions de l'AMF. Alors que l'actuelle rédaction ne vise que « les membres et les agents » de la COB, la nouvelle vise « les membres, les salariés et préposés de [l'AMF], les experts et les personnes consultées, les experts ainsi que toute personne participant ou ayant participé aux contrôles et enquêtes ».

Les peines restent celles prévues à l'article 226-13 du code pénal (1 an d'emprisonnement et 15 000 € d'amende). Les peines continuent à ne pas être applicables lorsque la révélation du secret est imposée ou autorisée par une disposition législative (cf. article 266-14 du code pénal).

Il convient de rappeler qu'il existe actuellement des dispositions analogues en ce qui concerne le conseil consultatif de la gestion financière (cf. actuel article L. 642-2), le CMF (cf. actuels articles L. 642-4 et L. 642-5) ou le Conseil de discipline de la gestion financière (cf. actuels articles L. 642-6 et L. 642-7).

- paragraphe II (article L. 642-2) : Délit d'entrave aux enquêtes et contrôles de l'Autorité des marchés financiers

L'article L. 642-2, dans sa rédaction actuelle, sanctionne pénalement la violation du secret professionnel par les personnes qui ont participé aux travaux du conseil consultatif de la gestion financière. Ce conseil étant supprimé par le projet de loi, le présent paragraphe en propose une rédaction nouvelle ayant un objet différent.

Cette nouvelle rédaction reprend, en en élargissant le champ, les dispositions du premier alinéa de l'article L. 642-3 qui sanctionnent pénalement le fait d'avoir mis obstacle à une mission des enquêteurs de la COB.

La nouvelle rédaction vise non seulement les « missions d'enquête », mais également les « missions de contrôle » de l'AMF. Elle incrimine également la communication de renseignements inexacts. Il convient de noter que, lorsqu'un délit d'entrave est pénalement sanctionné, la jurisprudence admet volontiers que la communication volontaire de renseignements inexacts est également constitutive de ce délit (cf. jurisprudence relative à l'entrave aux missions de l'inspection du travail par exemple).

Les peines demeurent inchangées (2 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende).

- paragraphe III : Coordination

Les dispositions du premier alinéa de l'article L. 642-3 ayant été reprises à l'article L. 642-2 (cf. ci-dessus), le présent paragraphe procède à sa suppression.

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Le Sénat a adopté deux amendements proposés par sa commission des Finances, le premier de coordination avec la nouvelle rédaction de la liste des personnes soumises au secret professionnel qu'il a adopté à l'article 5 du projet de loi, le second de portée rédactionnelle.

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Après avoir adopté un amendement rédactionnel de votre Rapporteur (amendement n° 88), votre Commission a adopté cet article, sans modification.

Votre Commission a adopté cet article, ainsi modifié.

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chapitre II

Autorités de régulation des entreprises d'assurance, des établissements

de crédit et des entreprises d'investissement

Section I

Comités consultatifs

Article 21

(articles L. 614-1 du code monétaire et financier ; articles L. 322-15, L. 411-1 et L. 411-4 à L. 411-6 du code des assurances)

Création du Comité consultatif du secteur financier

Le présent article prévoit la création du Comité consultatif du secteur financier, commun au secteur de la banque, de l'assurance et des entreprises d'investissement afin de, comme l'indique l'exposé des motifs, « tenir compte de la convergence croissante des problématiques de ces secteurs ».

Ce nouveau comité se substituera aux trois institutions existantes :

- le Conseil national du crédit et du titre : il est chargé « d'étudier les conditions de fonctionnement du système bancaire et financier, notamment dans ses relations avec la clientèle et dans la gestion des moyens de paiement ». ; présidé par le ministre chargé de l'économie, il comprend en outre 52 membres (dont le gouverneur de la Banque de France, vice-président) (cf. actuels articles L. 614-1 et L. 614-2) ;

- le comité consultatif : il est chargé « d'étudier les problèmes liés aux relations entre les établissements de crédits et leur clientèle » ; présidé par une personnalité qualifiée, il est composé de 21 membres (cf. article L. 614-6 et décret du 24 juillet 1984) ;

- le Conseil national des assurances : il est consulté sur « toutes les questions relatives aux assurances, à la réassurance, à la capitalisation et à l'assistance » ; présidé par le ministre chargé de l'économie, il est composé de 38 membres ; trois commissions sont constituées en son sein (1° commission des entreprises d'assurance, consultée sur les décisions relatives à l'agrément ; 2° commission de la réglementation ; 3° commission de l'assurance « chargée d'étudier les problèmes liés aux relations entre les entreprises [d'assurance] et leur clientèle ») (cf. articles L. 411-1 à L. 411-6 du code des assurances).

La création du nouveau comité consultatif nécessite des modifications du code monétaire et financier (paragraphe I et II) et du code des assurances (paragraphe III).

En toute rigueur, on pourrait s'interroger sur la présence de telles dispositions dans le projet de loi, puisque la création d'organes purement consultatifs relève clairement du domaine réglementaire. Cependant, force est de constater que les institutions auxquelles le nouveau comité va se substituer ont été créées par la voie législative. Il aurait donc fallu, à tout le moins, abroger ces dispositions. Par ailleurs, les dispositions proposées sont succinctes (15) et se bornent à préciser le rôle du comité - dans des termes très généraux -, de décrire les modalités de sa saisine - ce qui n'est pas toujours anodin, notamment en ce qui concerne la possibilité d'auto saisine - et de poser un principe de parité entre représentants des entreprises et représentants des clientèles dans sa composition. Tout le reste est renvoyé à un décret.

- paragraphes I et II : Modifications du code monétaire et financier

1°) Le paragraphe I restructure et modifie l'intitulé de la section 1 du chapitre IV (« Institutions consultatives ») du titre Ier (« Les institutions communes aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement ») du livre VI (« Les institutions en matière bancaire et financière ») du code monétaire et financier.

Cette section est actuellement composée de deux sous-sections (la première consacrée au Conseil national du crédit et du titre, la seconde au comité consultatif), composées respectivement de cinq et un articles. Suite aux modifications prévues par le présent article et par les articles 22, 23 et 37 du projet de loi, elle ne sera plus divisée en sous-sections et sera composée de trois articles (L. 614-1 consacré au Comité consultatif du secteur financier, L. 614-2 consacré au Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières, et L. 614-3 consacré aux dispositions applicables aux salariés nommés au sein de ces deux comités).

Par ailleurs, son intitulé est modifié et devient « Comité consultatif du secteur financier et Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (16)».

2°) Le paragraphe II propose une rédaction nouvelle de l'article L. 614-1, qui précise le rôle, les modalités de saisine et la composition du Comité consultatif du secteur financier.

Le nouveau comité reprend les missions du comité consultatif (premier alinéa de l'article L. 614-6 du code monétaire et financier) et de la commission consultative de l'assurance (premier alinéa de l'article L. 411-6 du code des assurances), puisqu'il est chargé d'étudier les « questions » liées aux relations entre les entreprises du secteur financier (banques, assurances, entreprises d'investissement) et leurs clientèles et pourra « proposer toutes mesures appropriées dans ce domaine, notamment sous forme d'avis ou de recommandations d'ordre général ».

Le comité pourra faire l'objet de saisines émanant :

- soit du ministre chargé de l'économie ;

- soit des organisations (représentants les clientèles ou les entreprises) dont ses membres sont issus ; il s'agit d'une légère restriction par rapport aux dispositions relatives à la commission consultative de l'assurance, qui peut être saisie par toute organisation de consommateurs agréée au plan national, même non représentée en son sein ;

- soit « de sa propre initiative à la demande de la majorité de ses membres », ce qui est le cas aujourd'hui du Conseil national du crédit et du titre, du Conseil national des assurances en général et de sa commission consultative des assurances en particulier ; cette faculté n'a jamais été utilisée dans le passé et elle ne devrait guère l'être à l'avenir, puisque chaque représentant d'une organisation présente au sein du comité aura, même seul, la capacité de le saisir.

La composition du comité, les conditions de désignation de ses membres et de son président, ainsi que les règles d'organisation et de fonctionnement seront fixées par décret. Cependant, la nouvelle rédaction de l'article L. 614-1 impose que les représentants des entreprises et ceux de leurs clientèles soient en nombre égal et que, ensemble, ils constituent la majorité du comité. Cette règle est reprise du comité consultatif « bancaire » et de la commission consultative de l'assurance.

D'après les informations recueillies par votre Rapporteur, ce comité devrait compter une trentaine de membres, chiffre permettant de concilier caractère représentatif et efficacité du travail.

- paragraphe III : Modifications apportées au code des assurances

Ce paragraphe modifie l'intitulé et la structure du chapitre Ier (« Le conseil national des assurances ») du titre Ier (« Organisations générales de l'assurance ») du livre IV (« Organisations et régimes particuliers d'assurance » du code des assurances.

Cet chapitre est actuellement composé de deux sous-sections (la première consacrée à l'organisation et aux attributions du conseil, la seconde à son fonctionnement), composées respectivement de six et ... zéro articles ! Suite aux modifications prévues par le présent article et par les articles 22, 23 et 37 du projet de loi, son intitulé devient « Comités consultatifs » (2°) et il ne sera plus divisé en sous-sections et sera composé de trois articles (L. 411-1 consacré au Comité consultatif du secteur financier, L. 411-2 consacré au Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières, et L. 411-3 consacré aux dispositions applicables aux salariés nommés au sein de ces deux comités). Les articles L. 411-4 à L. 411-6 sont par ailleurs abrogés (4°).

Le paragraphe III (3°) propose une rédaction nouvelle de l'article L. 411-1 du code des assurances, qui se borne à reproduire, selon la technique du code « pilote » et du code « « suiveur », retenue avec un systématisme et un bonheur inégaux par la commission supérieure de codification, l'article L. 614-1 du code monétaire et financier relatif au Comité consultatif du secteur financier.

En outre, ce paragraphe procède à une modification de coordination avec la substitution du Conseil national des assurances par le nouveau comité consultatif à l'article L. 322-15 du code, relatif aux conseils d'administration des sociétés centrales d'assurance (2°). Or, il apparaît que cet article reprend des dispositions abrogées, et devrait donc l'être lui-même.

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Le Sénat a adopté un amendement de coordination présenté par sa commission des Finances, qui procède à la substitution de la référence à la commission consultative de l'assurance par la référence au nouveau comité consultatif à l'article L. 310-8 du code de l'assurance, relatif aux pouvoirs du ministre en matière de documents à caractère contractuel ou publicitaire concernant des opérations d'assurance ou de capitalisation.

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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.

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Article 22

(articles L. 614-1 du code monétaire et financier et L. 411-2 du code des assurances)

Création du Comité consultatif de la législation

et de la réglementation financières

Cet article prévoit la création du « Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières » qui, dans le même esprit que l'article 21, sera commun aux secteurs de la banque, de l'assurance et des services d'investissement.

Actuellement, en matière de réglementation, la situation des trois secteurs n'est pas identique. En effet, pour le secteur de l'assurance, le Conseil national des assurances (notamment sa commission de la réglementation) n'est qu'un organe consultatif, le pouvoir réglementaire appartenant au Premier ministre ou au ministre chargé de l'économie, dans les conditions de droit commun. En revanche, dans le domaine bancaire et financier, le Comité de la réglementation bancaire et financière (CRBF) dispose d'un réel pouvoir normatif, puisqu'il « fixe les prescriptions d'ordre général applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement » dans les domaines énumérés par les articles L. 611-2 à L. 611-6 du code monétaire et financier. Le ministre chargé de l'économie n'est, cependant, pas entièrement dessaisi, puisque les règlements du CRBF doivent être homologués par lui et qu'il préside le comité.

Il apparaît que cette construction, issue de la « loi bancaire » de 1984, représente une particularité française. Elle constitue un détour administratif qui ne se justifie plus guère. Sa suppression alignera totalement la situation des trois secteurs en matière de législation et de réglementation. De plus, la possibilité de consulter les professionnels concernés, que permet la composition du CRBF, est maintenue par la création du nouveau comité consultatif.

- paragraphe I (article L. 614-2 du code monétaire et financier) : Création du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières

La nouvelle rédaction de l'article L. 614-2 précise le rôle de ce comité consultatif.

Dans le cadre d'un champ de compétence élargi à l'ensemble des secteurs de la banque, de l'assurance et des services d'investissement, le comité sera saisi pour avis par le ministre de tout projet de loi ou d'ordonnance (comme actuellement le Conseil national du crédit et du titre ou le Conseil national des assurances) et de toute proposition de directive européenne avant son examen par le Conseil des communautés européennes (comme actuellement le Conseil national des assurances). En revanche, sont exclus les textes portant sur l'Autorité des marchés financiers ou sur des matières entrant dans son champ de compétence. En effet, d ans ces matières, c'est l'Autorité elle-même qui, de par sa composition collégiale, ses propres mécanismes de consultation et sa participation à l'élaboration des textes, assure ce recueil des avis des acteurs concernés.

Par ailleurs, les prérogatives du comité sont renforcées en matière de consultation sur les projets de textes réglementaires. À l'heure actuelle, le Conseil national du crédit et du titre et le Conseil national des assurances ne sont saisis pour avis que des projets de décrets. Le nouveau comité sera, en outre, consulté sur les projets d'arrêtés.

Par ailleurs, en compensation de la perte du pouvoir normatif en ce domaine, les projets de décrets ou d'arrêté ne pourront être « adoptés qu'après l'avis » du comité et il ne pourra être passé outre à un avis défavorable qu'à l'issue d'une deuxième délibération, demandée par le ministre.

La rédaction proposée par le projet de loi comporte une ambiguïté. En effet, elle évoque les projets de décrets et d'arrêtés adoptés après l'avis du comité « qui peut en être saisi par le ministre chargé de l'économie ». Il s'agit de préciser que la saisine du comité appartient formellement au ministre chargé de l'économie, même si le projet de texte provient d'une autre autorité (Premier ministre pour les décrets, autre ministre pour les arrêtés). Prise dans ce sens, cette disposition relève à l'évidence du domaine réglementaire. Présente dans la loi, elle pourrait, au contraire, être interprétée comme signifiant que la saisine du comité n'est pas systématique, s'agissant des projets de décret ou d'arrêté, ce qui n'est pas l'intention du Gouvernement.

Enfin, la nouvelle rédaction de l'article renvoie à un décret le soin de fixer la composition du comité, les conditions de désignation de ses membres et de son président et ses règles d'organisation et de fonctionnement. Selon l'exposé des motifs, le comité sera présidé par le ministre chargé de l'économie (comme le Conseil national du crédit et du titre et le Conseil national des assurances) et « comprendra un membre du Conseil d'État, les présidents des autorités de contrôle de la banque et de l'assurance et des représentants des entreprises, clientèles et personnels de ces secteurs. Le président de l'Autorité des marchés financiers pourrait également participer aux travaux de ce comité en tant que de besoin, ainsi que les représentants des agents généraux et courtiers d'assurance ».

Il apparaît donc que la tâche de ce comité consultatif sera lourde et sans commune mesure avec celles des organes auxquels il succède. D'après certaines estimations, la saisine pourrait porter sur une quarantaine de textes, toutes natures confondues, par an. Dès lors, ce comité pourrait avoir besoin d'un secrétariat relativement renforcé.

- paragraphe II (article L. 411-2 du code des assurances) : Reprise de l'article L. 614-2 du code monétaire et financier

Conformément à la technique « code pilote/code suiveur », la nouvelle rédaction de l'article L. 411-2 du code des assurances se borne à reproduire les dispositions de l'article L. 614-2 du code monétaire et financier.

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Le Sénat a adopté l'article 22, sans modification.

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Votre Commission, après avoir adopté un amendement incluant dans le champ de consultation du comité les projets de règlement communautaire (amendement n° 89) mais excluant les actes réglementaires de portée individuelle (amendement n° 91) et deux amendements rédactionnels de votre Rapporteur (amendements n° 90 et 92), a adopté cet article, ainsi modifié.

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Article 23

(articles L. 614-3 du code monétaire et financier et L. 411-3 du code des assurances)

Dispositions relatives aux salariés membres des comités consultatifs

Le paragraphe I de cet article propose une rédaction nouvelle de l'article L. 614-3 du code monétaire et financier, précisant que les salariés membres des comités consultatifs disposeront, de la part de leur employeur, du temps nécessaire pour préparer les réunions et pour s'y rendre et y participer. Ces dispositions sont rédigées dans les mêmes termes que celles concernant les salariés nommés au sein de l'Autorité des marchés financiers (cf. V de l'article 3 du projet de loi).

Le paragraphe II reproduit ces dispositions au sein de l'article L. 411-3 du code des assurances.

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Le Sénat a adopté l'article 23 sans modification.

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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.

Section 2

La réglementation

Article 24

(article 32 de la loi du 24 janvier 1984 ; articles L. 611-1 à L. 611-6 du code monétaire et financier)

Pouvoir réglementaire du ministre en matière financière

Cet article tire les conséquences de la disparition du Comité de la réglementation bancaire et financière et du transfert du pouvoir réglementaire au ministre. Toutes les références aux règlements du CRBF sont donc remplacées par des références à des arrêtés du ministre chargé de l'économie.

Au paragraphe I, les modifications apportées portent sur l'article 32 de la « loi bancaire » du 24 janvier 1984. Cet article précise que les règlements du CRBF sont susceptibles de recours devant le juge administratif (paragraphe I), ainsi que les décisions du CECEI. Cette précision n'est évidemment pas nécessaire s'agissant d'arrêtés du ministre. Dès lors, cet article peut être abrogé.

Au paragraphe II, les modifications portent sur les articles composant le chapitre Ier (« Comité de la réglementation bancaire et financière ») du titre Ier du livre VI du code monétaire et financier. Ces articles définissent actuellement le champ d'application des règlements du CRBF. Leur maintien dans le code, après la substitution de la référence aux arrêtés du ministre, reste utile pour délimiter le pouvoir réglementaire propre du ministre chargé de l'économie, par opposition au pouvoir réglementaire du Premier ministre. Les modifications portent donc sur les articles L. 611-1 (sa nouvelle rédaction reprend les onze premiers alinéas de l'actuel article L. 611-2), L. 611-2 (réduit à son actuel dernier alinéa), L. 611-3, L. 611-4, L. 611-5, et L. 611-6.

La modification apportée à l'article L. 611-2 procède, par inadvertance, à une extension de son champ d'application, en faisant référence à l'ensemble de l'article L. 611-1, et non pas à son seul deuxième alinéa. La coordination concernant l'article L. 611-4 est déjà prévue à l'article 35 du projet de loi (1° du V) et celle concernant l'article L. 611-5 a besoin d'être adaptée. Enfin, l'article L. 611-6 énumérait des exceptions, au profit du ministre, à la compétence réglementaire du CRBF. Le pouvoir étant rassemblé dans les mains du premier, cet article est devenu inutile et peut donc, non pas être modifié, mais abrogé.

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Le Sénat a adopté l'article 24 sans modification.

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Votre Commission a successivement adopté six amendements de votre Rapporteur, tendant à alléger et simplifier le texte (amendements n° 94 et 96), ou à corriger des erreurs de coordination (amendements n° 93, 95, 97 et 98).

M.  Didier Migaud s'est étonné de la mauvaise rédaction de ce texte.

Votre Rapporteur a confirmé que le texte était effectivement très mal rédigé et que le Sénat n'avait que très approximativement corrigé de nombreuses lacunes ou erreurs de rédaction.

Votre Commission a adopté cet article, ainsi modifié.

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Section 3

L'agrément

Article 25

(articles L. 310-10, L. 310-20, L. 321-1, L. 321-2, L. 321-8 à L. 321-10, L. 321-10-1, L. 322-1-3, L. 322-1-4 [nouveau], L. 322-4, L. 322-4-1, L. 324-1, L. 324-3, L. 325-1, L. 325-1-1, L. 326-2, L. 326-12, L. 326-13, L. 351-4 à L. 351-6, L. 353-4, L. 353-5, L. 354-1, L. 354-2, L. 362-1, L. 362-2, L. 364-1 et L. 413-1 à L. 413-5 [nouveaux] du code des assurances, article L. 631-1 du code monétaire et financier)

Rôle, composition et fonctionnement du Comité des entreprises d'assurance

L'article unique de cette section du projet de loi rénove les modalités d'agrément des entreprises d'assurance : cette compétence passe du ministre de l'Économie et des finances au Comité des entreprises d'assurances, quand jusque-là la profession n'exerçait qu'un rôle consultatif, via la Commission des entreprises d'assurance du Conseil national des assurances.

Cette nouvelle procédure d'agrément a été conçue par symétrie avec celle qui s'applique aux banques sous l'égide du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (CECEI).

- paragraphe I (articles L. 413-1 à L. 413-5 [nouveaux] du code des assurances) : institution du Comité des entreprises d'assurance

Le présent paragraphe crée au sein du titre Ier du livre IV du code des assurances consacré aux organisations générales d'assurance, après le chapitre Ier relatif au Conseil national des assurances et le chapitre II relatif à l'École nationale d'assurance, un chapitre III nouveau intitulé « Le Comité des entreprises d'assurance » et composé de cinq articles.

L'article L. 413-1 (nouveau) définit les missions du comité : « accorder les autorisations ou dérogations individuelles prévues par les dispositions législatives et réglementaires applicables aux entreprises d'assurance et [de réassurance], à l'exception de celles relevant de la Commission de contrôle [des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance]. »

Comme l'illustrent les nombreuses dispositions de coordination prévues au II du présent article, le code des assurances prévoit, aux titres Ier et II du livre III, la compétence du ministre chargé de l'économie pour la délivrance ou le refus d'agrément des entreprises d'assurance ou de réassurance souhaitant exercer sur le territoire de la République. À l'instar de la procédure applicable aux banques, une entité extérieure à l'administration serait désormais chargée de la régulation du secteur - hors l'activité de contrôle et de sanction.

Le régime de l'agrément des mutuelles demeure inchangé : les mutuelles pratiquant des opérations d'assurance et de capitalisation (dites mutuelles du livre II du code de la mutualité) (17) sont agréées par le ministre chargé de la mutualité, après avis du Conseil supérieur de la mutualité (articles L. 211-7 et L. 411-1 du code de la mutualité). Les mutuelles relevant du livre III (1) du code de la mutualité ne sont pas soumises à agrément, mais seulement à inscription au registre national des mutuelles. Quant aux institutions de prévoyance, elles sont soumises à agrément administratif délivré par le ministre chargé de la sécurité sociale (article L. 931-4 du code de la sécurité sociale).

L'article L. 413-2 (nouveau) est relatif à la composition du comité, qui comprend douze membres :

- un président nommé par arrêté du ministre chargé de l'économie ;

- le directeur du Trésor ou son représentant ;

- le président de la Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance ;

- le secrétaire général de ladite commission ;

- un membre du Conseil d'État nommé sur proposition du Vice-président du Conseil d'État ;

- un membre de la Cour de cassation, nommé sur proposition du Premier président de ladite cour ;

- deux représentants des entreprises d'assurance ;

- un représentant des entreprises de réassurance ;

- un représentant du personnel des entreprises d'assurance ;

- deux personnalités qualifiées.

Le texte précise que le représentant des entreprises de réassurance n'a de voix délibérative que « pour les décisions intéressant ces entreprises ».

En outre, un représentant du ministre chargé de l'agriculture « participe aux travaux du comité avec voix délibérative lorsqu'est examiné le cas d'un établissement ou d'une caisse [d'assurance ou de réassurance mutuel(le) agricole] », ces organismes demeurant régis pour leur constitution par le code rural.

Enfin, « les présidents des fonds de garantie compétents en cas de défaillance d'entreprises d'assurance ou leurs représentants participent aux travaux du comité sans voix délibérative pour les décisions intéressant les entreprises qui sont soumises à l'obligation d'adhésion au fonds qu'ils président. » Sont ici visés, de façon suffisamment générale pour que ces dispositions ne deviennent pas rapidement obsolètes, les deux fonds de garantie suivants : le Fonds de garantie des assurés contre la défaillance de sociétés d'assurance de personnes institué par l'article L. 423-1 du code des assurances, et le Fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse mentionné à l'article L. 421-1 du même code, ce dernier fonds étant appelé à devenir, comme le prévoit l'article 57 du présent projet, le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages.

Ainsi, la composition du comité allie le souci de représenter la profession (cinq membres sur douze) et les institutions (quatre membres et le président), les deux personnalités qualifiées complétant le collège.

Alors que le texte renvoie pertinemment à un décret les modalités de désignation des membres du comité et de leurs éventuels suppléants, votre Rapporteur s'interroge sur la nécessité de prévoir dans la loi la durée du mandat des membres du comité, ainsi que les possibilités de renouvellement de mandat.

L'article L. 413-3 (nouveau) précise les modalités de fonctionnement du Comité des entreprises d'assurance, et en premier lieu la voix prépondérante du président.

Le point le plus important pour l'efficacité du fonctionnement d'un comité qui peut être souvent appelé à statuer sans délai, est, là encore, repris du CECEI : « en cas d'urgence constatée par son président, le comité peut statuer par voie de consultation écrite [selon des modalités définies par décret en Conseil d'État] sur une proposition de décision, selon des modalités fixées par décret ». De plus, « le comité peut déléguer à son président le pouvoir de prendre des décisions ou d'accorder des autorisations ou dérogations individuelles », mais cette compétence déléguée ne doit concerner que les décisions les moins importantes, puisque les exceptions sont nombreuses : le comité seul peut statuer en matière « d'agrément, de transfert de portefeuille, de prise, cession ou extension de participation ». Resteraient donc, le cas échéant, dans la main du seul président l'essentiel des actes « de routine », qui ne font pas grief : par exemple, accuser réception auprès d'une entreprise de l'Espace économique européen (EEE) d'une notification d'exercice du droit d'établissement ou de la libre prestation de services, demander un complément d'information relatif à l'honorabilité ou à la compétence d'un nouveau dirigeant d'une entreprise d'assurance, ou encore envoyer les courriers d'usage pour rappeler leurs obligations aux entreprises qui viennent d'être agréées.

La restriction ainsi apportée aux pouvoirs individuels du Président, et donc à la rapidité des décisions, peut être palliée par l'existence de membres suppléants du comité ce qui représente une garantie supplémentaire d'un fonctionnement diligent.

À ce stade, votre Rapporteur souhaite s'attarder sur les pouvoirs qui seraient transférés au Comité des entreprises d'assurance. Parmi ces pouvoirs, il convient de distinguer entre les créations d'entreprises d'assurance ex nihilo et les transferts de portefeuille ou extensions d'agrément. Sur le premier point, d'aucuns pourraient songer à un risque de corporatisme, ou de barrière aux nouveaux entrants qu'un comité comprenant des représentants - par définition installés - de la profession serait éventuellement enclin à dresser. La composition du comité comme l'expérience acquise avec le CECEI permettent d'écarter ce grief.

Sur le second point en revanche, celui des transferts ou extensions, certaines difficultés mineures pourraient survenir. En effet, selon la pratique actuelle, la sous-direction des assurances de la direction du Trésor sollicite, avant de soumettre au ministre une proposition de décision positive ou négative relative à l'agrément, l'avis de la Commission de contrôle des assurances. Procédure officieuse, purement interne et donnant toute satisfaction dans son fonctionnement, elle tire notamment son efficacité du fait de la motivation assez sommaire de l'avis ainsi formulé, les services du ministère accordant, avec raison, toute confiance à l'expertise de la commission de contrôle. En revanche, l'exercice consistant, pour les services de la commission, à justifier devant le comité des entreprises d'assurance un avis donné à l'occasion de l'examen d'un transfert de portefeuille ou d'une extension d'agrément, pourrait se révéler plus délicat.

Votre Rapporteur estime cependant que de telles spéculations ne sauraient conduire à remettre en cause la philosophie de la réforme des modalités de l'agrément proposée dans le présent article. Il reviendra au comité lui-même, lors de l'établissement de son règlement intérieur prévu par le présent article (avec publication au Journal officiel), ou dans l'organisation empirique de son fonctionnement, de faire en sorte que de telles difficultés ne surviennent pas.

L'article L. 413-4 (nouveau) donne pouvoir au directeur du Trésor ou à son représentant, membres du comité, le pouvoir de « demander l'ajournement de toute décision du comité », le soin étant alors laissé au président de « provoque[r], en temps utile, une seconde délibération ». Si les mots ont un sens, cette procédure ne peut jouer qu'une fois pour une décision donnée, puisqu'une seconde délibération est aussi la dernière.

Par ailleurs, dans le silence du texte, votre Rapporteur estime que les voies de recours ouvertes à l'encontre des décisions du comité sont celles qui s'appliquent, selon le droit commun, aux décisions administratives individuelles.

Enfin, l'article L. 413-5 (nouveau) proposé définit certaines règles applicables aux membres, et parmi eux, aux salariés membres du comité. Les membres, « ainsi que les personnes qui participent ou ont participé à ses activités » sont « tenus au secret professionnel sous les peines fixées par l'article 226-13 du code pénal ». Ce dernier article dispose : « La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »

Quant aux dispositions relatives aux quatre membres du comité salariés (ou moins, si les représentants des entreprises d'assurance et de réassurance n'ont pas ce statut), elles prévoient que « les salariés membres du Comité des entreprises d'assurance disposent du temps nécessaire pour assurer la préparation des réunions, pour s'y rendre et y participer. Ce temps est assimilé à du temps de travail effectif pour la détermination des droits aux prestations d'assurances sociales. Les salariés concernés doivent informer leur employeur lors de leur désignation et, pour chaque réunion, dès réception de la convocation ». Il s'agit du même régime, dérogatoire au droit commun du travail, que celui applicable aux salariés membres de l'AMF, du Comité consultatif du secteur financier et du Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (cf. articles 3 et 23 du présent projet de loi). Le même article prévoit de reproduire dans le code des assurances, à l'article L. 411-3, l'article L. 614-3 du code monétaire et financier.

- paragraphe II : dispositions de coordination au sein du code des assurances

Dix séries de dispositions de coordination, qui - à l'exception du  - substituent à la compétence du ministre chargé de l'économie celle du Comité de entreprises d'assurance, composent le présent paragraphe. Par avance, votre Rapporteur renvoie à son commentaire de l'article 26 du présent projet pour l'examen des règles applicables au droit d'établissement et à la libre prestation de services communautaires en matière d'assurance, telles que modifiées par le présent projet de loi.

Le  vise les dérogations à l'interdiction de souscrire une assurance directe auprès d'une entreprise étrangère à l'Espace économique européen (EEE) ou qui n'y dispose pas d'un succursale, l'absence d'opposition à une fusion ou une scission qui ne comportent pas de transfert de portefeuille, et la décision de retrait d'agrément.

Le  vise la notification à la Commission européenne de l'agrément d'une entreprise contrôlée par une entreprise située hors de l'EEE, l'agrément de libre prestation de services, l'agrément spécial des entreprises dont le siège social est situé hors de l'EEE, le pouvoir de saisine du juge pour la suspension des droits de vote attachés à des actions détenues irrégulièrement, la notification à la Commission européenne de toute prise de participation susceptible de conférer le contrôle d'une entreprise française d'assurance à une entreprise hors EEE, l'approbation des transferts de portefeuille, le retrait de l'autorisation de pratiquer la réassurance, la réglementation de l'assurance en libre prestation de services, l'approbation des transferts de portefeuille de contrats souscrits en libre prestation de services ou en régime d'établissement, et la réception des informations relatives à l'exercice du droit d'établissement.

Toutefois, le ministre chargé de l'économie demeure seul destinataire des « conditions générales et spéciales des polices d'assurance, [d]es tarifs, formulaires et autres imprimés » que l'entreprise a l'intention d'utiliser pour couvrir en France, en libre prestation de services, des grands risques ou des engagements en matière d'assurance sur la vie et en capitalisation (second alinéa de l'article L. 351-6 et III de l'article L. 353-4). Ces entreprises sont censément soumises au contrôle de l'État de leur siège social.

Le  vise le sursis à la décision d'agréer une entreprise contrôlée par une entreprise hors EEE, les conditions d'autorisation de pratiquer la réassurance, l'opposition à une prise de participation, certaines modalités d'opposition à une opération de fusion ou de scission sans transfert de portefeuille.

Le  vise les critères retenus pour accorder ou refuser un agrément administratif.

Le  concerne la réception d'informations sur une offre publique d'achat visant une entreprise d'assurance agréée en France et une conséquence du retrait de l'agrément.

Le  vise un cas de retrait d'agrément.

Le  maintient la compétence du ministre chargé de l'économie pour fixer par arrêté certaines modalités d'exercice en France de l'assurance en régime communautaire de libre établissement, c'est-à-dire via une succursale.

Dans la dernière phrase de l'article L. 362-1 ainsi modifié, votre Rapporteur note un oubli de substitution du comité au ministre.

Le , par coordination avec le 2°, remplace le mot « arrêté » par le mot « décision », mais ce changement de genre du substantif nécessite, au même article L. 324-1, une autre modification qui est omise.

Le  propose d'ajouter, au sein de la liste d'entités mentionnées à l'article L. 310-20, qui organise les échanges d'informations entre autorités de régulation et de contrôle du secteur bancaire et du secteur des assurances, le Comité des entreprises d'assurance, mais aussi le CECEI.

Le 10° vise à préciser que le Comité des entreprises d'assurance est l'autorité habilitée à délivrer l'agrément administratif des entreprises françaises d'assurance.

Enfin, le 11° ne contient pas de dispositions de coordination, mais propose d'insérer dans le code des assurances un article L. 322-1-4 nouveau qui, en premier lieu, ouvre la possibilité au comité des entreprises d'assurance de s'opposer à certaines opérations relatives aux sociétés de groupe d'assurance (18). Selon les informations recueillies par votre Rapporteur, il s'agit d'inscrire dans la loi des dispositions actuellement réglées, de façon peu satisfaisante, au niveau réglementaire (aux articles R. 322-160 à R. 322-164 du code des assurances  (19)). Trois types d'opérations sont visés : « la conclusion par une entreprise d'une convention d'affiliation à une société de groupe d'assurance », « la résiliation de celle-ci » et « une mesure d'exclusion de la société de groupe d'assurance ». Le dispositif proposé comprend une procédure de déclaration obligatoire au comité, et un délai déterminé par décret en Conseil d'État pour lui permettre de s'opposer à l'opération projetée, « si celle-ci apparaît contraire aux intérêts des assurés ».

En second lieu, cet article nouveau prévoit un décret en Conseil d'État, non seulement pour définir les modalités d'application de la procédure susvisée, mais également pour « précise[r] les conditions de fonctionnement de ces sociétés de groupe d'assurance », insuffisamment régulées à l'heure actuelle. En effet, attribuer, comme le fait l'article 28 du présent projet de loi, des sanctions en cas d'infraction aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent les sociétés de groupe d'assurance, suppose que lesdites dispositions soient suffisamment précises.

- paragraphe III : modification pour coordination du code monétaire et financier

Ce paragraphe propose, d'une part, de prendre acte, à l'article L. 631-1 du code monétaire et financier, de la fusion de la commission de contrôle des assurances avec la commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance, en remplaçant les deux dénominations actuelles par la nouvelle dénomination unique.

Mais la justification de la place du présent paragraphe, au sein de l'article relatif au comité des entreprises d'assurance, réside dans l'ajout proposé, au sein de l'article précité du code monétaire et financier, de ce comité dans la liste des autorités de régulation et de contrôle autorisées à échanger des informations. Tel est bien l'esprit du titre Ier du présent projet de loi.

Votre Rapporteur vous proposera d'adopter le présent article, modifié par cinq amendements de forme.

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Le Sénat a adopté trois amendements à cet article, présentés par la Commission des finances. Le premier modifie l'article L. 413-2 (nouveau) : cet amendement de rédaction globale fait apparaître plus clairement la composition du comité, au moyen d'une liste numérotée. Par ailleurs, il est prévu que le président du comité, le président et le secrétaire général de la CCAMIP et les présidents des fonds de garantie puissent se faire représenter. Enfin, l'amendement fixe à trois ans, comme au CECEI, la durée du mandat des huit membres autres que le président et les autres personnes siégeant au sein du comité ès qualités, et précise les modalités de nomination de ces huit personnes, par arrêté du ministre chargé de l'économie.

Le deuxième amendement est rédactionnel : il rétablit un accord grammatical au sein de l'article L. 324-1 modifié au 8° du II du présent article.

Le troisième amendement insère un 12° au II du présent article, pour supprimer le second alinéa de l'article L. 351-6 et le III de l'article L. 353-4, visées par votre Rapporteur sous le 2° du présent article. Ces dispositions concernent l'envoi au ministre chargé de l'économie d'informations générales relatives aux tarifs pratiqués par les entreprises souhaitant exercer en libre prestation de services. Le contrôle exercé par l'État d'origine de ces entreprises rendait ce maintien obsolète.

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Votre Commission a adopté trois amendements, rédactionnels, de votre Rapporteur (amendements nos 99, 100 et 101).

Puis, M.  Charles de Courson a retiré un amendement qui tendait à délier du secret professionnel, à l'égard des magistrats de la Cour des comptes, les membres du Comité des entreprises d'assurance, votre Rapporteur renvoyant, comme précédemment pour l'AMF, à une modification du code des juridictions financières, plus pertinente.

Votre Commission a ensuite adopté deux amendements de votre Rapporteur, de rédaction et de coordination (amendements nos 102 et 103).

Votre Commission a adopté cet article, ainsi modifié.

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Section 4

Le contrôle

Article 26

(articles L. 310-9, L. 310-12, L. 310-12-1, L. 310-12-2 à L. 310-12-4 [nouveaux] et L. 321-3 à L. 321-5 du code des assurances)

Missions et composition de la Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance

Le présent article contient l'une des « mesures phares » du présent titre du projet de loi, s'agissant de la modernisation du paysage des autorités de contrôle : la fusion de la Commission de contrôle des assurances (CCA) et de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCMIP) en une nouvelle autorité, logiquement dénommée Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCAMIP).

Entérinant une situation de fait, qui résulte du droit communautaire, cette fusion des autorités de contrôle prudentiel rapproche deux instances qui ont connu dans la période récente un développement similaire, même si les moyens dont elles disposent n'ont aucune commune mesure.

La Commission de contrôle de assurances (CCA), autorité administrative indépendante créée par la loi n° 89-1014 du 31 décembre 1989 portant adaptation du code des assurances à l'ouverture du marché européen, est chargée du contrôle des entreprises d'assurance, de réassurance et de participations d'assurance. Elle a succédé dans ce rôle à la direction des assurances, aujourd'hui disparue (20). Le champ de son contrôle a notamment été modifié, sous l'influence du droit communautaire, par la loi n° 94-5 du 4 janvier 1994 modifiant le code des assurances en vue notamment de la transposition des directives 92/49/CEE et 96/49/CEE du Conseil des 18 juin et 10 novembre 1992, puis par la loi n° 94-679 du 8 août 1994 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier.

La Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCMIP), également autorité administrative indépendante, a été instituée par la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques. Ses pouvoirs ont été notablement renforcés par l'ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001 relative au code de la mutualité et transposant les deux directives précitées. Son contrôle s'est substitué à celui exercé par le ministre chargé de la sécurité sociale et de la mutualité. L'indépendance de la commission est garantie par son fonctionnement collégial et par les modalités de nomination de ses membres.

L'instauration progressive d'un marché commun de l'assurance, marché largement ouvert aux assureurs étrangers comme aux assureurs français eux-mêmes, a bouleversé les traditions juridiques françaises du contrôle des entreprises. La liberté d'établissement, qui permet à toute entreprise régulièrement agréée dans un État membre de l'Union européenne d'ouvrir une succursale sur le territoire d'un autre État membre dans les mêmes conditions que celles qui sont applicables aux entreprises du pays d'accueil, a été proclamée dès 1973 pour les assurances de dommages et en 1979 pour les assurances-vie. L'harmonisation effective a été plus lente à se réaliser. Quant à la liberté de prestation de services, qui doit permettre à une entreprise établie dans un État membre de conclure directement des contrats dans un autre État membre sans y disposer d'un établissement, elle a été reconnue dès 1974 par la Cour de justice des Communautés européennes, mais mise en œuvre sur une vingtaine d'années. C'est à la faveur des directives dites de la troisième génération - les deux directives de 1992 précitées - que la libéralisation générale est devenue réalité, entraînant un changement majeur dans les réglementations nationales du contrôle.

La présente section du projet de loi ne modifie qu'à la marge un dispositif déjà largement harmonisé en termes de procédure. Sur le plan des moyens en revanche, on serait tenté d'analyser le texte comme une absorption de la CCMIP par la CCA.

- paragraphe I (article L. 310-12 du code des assurances) : le statut et les missions de la CCAMIP

Ce paragraphe récrit l'article L. 310-12 du code des assurances issu, comme l'ensemble de la section II du Livre III de ce code, de la loi n° 89-1014 du 31 décembre 1989 précitée portant adaptation du code des assurances à l'ouverture du marché européen, en son article 31.

Le précise dans le texte même du code des assurances que la CCAMIP est une autorité administrative indépendante, catégorie juridique à laquelle appartiennent déjà, de façon certaine, les actuelles CCA et CCMIP.

Pas plus qu'à la CCA ou à la CCMIP aujourd'hui, le présent projet de loi n'attribue à la CCAMIP la personnalité morale, à l'inverse de la solution retenue pour l'AMF. Votre Rapporteur précise que la question n'aurait pas grande importance, s'il ne s'agissait de la question des moyens financiers alloués à la CCAMIP. En effet, comme l'exposé des motifs le mentionne explicitement à propos du choix opéré pour le statut de l'AMF, seul l'octroi de la personnalité morale à une autorité publique lui permet de se voir affecter une recette, au sens du droit budgétaire. Or, ainsi qu'il sera dit infra dans le commentaire des dispositions relatives à la contribution pour frais de contrôle perçue auprès des entreprises et organismes du secteur, le manque chronique de moyens que subissent les actuelles CCA et CCMIP, confronté avec l'excessive modicité de la contribution levée, incite votre Rapporteur à plaider pour un parallélisme des statuts entre la future AMF et la future CCAMIP, nonobstant les différences existant entre les actuelles autorités de contrôle des secteurs financier et assurantiel. S'ajoute à ces arguments le simple souci d'asseoir la crédibilité de la nouvelle CCAMIP. Pour toutes ces raisons, votre Rapporteur est partisan de doter celle-ci, à l'instar de l'AMF, du statut d'autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale.

Le même alinéa du présent paragraphe I étend le champ de contrôle qui est actuellement celui de la CCA. Ce champ est défini tantôt par référence aux activités pratiquées, tantôt par référence au statut des organismes concernés. Le contrôle de la nouvelle commission doit s'appliquer aux entités suivantes :

1.- les entreprises mentionnées aux articles L. 310-1 et L. 310-1-1 du code des assurances, qui visent respectivement toutes les activités d'assurance directe, de personnes comme de dommages (y compris une catégorie résiduelle, les « autres risques »), et les activités de réassurance dissociées de toute assurance directe. Votre Rapporteur signale à cet égard que le présent projet de loi omet de supprimer la redondance ainsi créée au sein de l'article L. 310-12, qui soumet déjà au contrôle, au sixième alinéa, les entreprises relevant de l'article L. 310-1-1. Les entreprises ainsi visées via leurs activités sont les suivantes :

· les sociétés d'assurance constituées en sociétés anonymes, régies par le code de commerce ;

· les sociétés d'assurance mutuelles, qui sont également soumises au code des assurances (21) mais ont un objet non commercial, chacun de leurs adhérents étant à la fois assuré et sociétaire. Ces sociétés ont la faculté d'établir des unions entre elles, sous réserve, pour chaque société, de se réassurer auprès de l'union, dotée d'une personnalité civile distincte ;

· les sociétés de réassurance exerçant cette seule activité, dites entreprises spécialisées de réassurance. C'est la loi du 8 août 1994 précitée qui a étendu le contrôle de solvabilité aux réassureurs spécialisés dont le siège social est situé en France. Jusqu'alors, ces entreprises étaient exclues du contrôle, bien que les opérations de réassurance pratiquées par des entreprises d'assurance directe y fussent soumises. Les réassureurs français spécialisés réalisant plus de 60 % de leur chiffre d'affaires à l'étranger, ils s'estimaient lésés de ne pouvoir se prévaloir d'un visa de bonne gestion, à la différence de leurs concurrents de la plupart des pays développés. Le réassureur n'a certes pas de lien juridique direct avec l'assuré, cependant sa défaillance fragilise la garantie due par l'assureur direct.

Selon le rapport du Conseil national des assurances au Président de la République et au Parlement pour l'année 2002, on recensait 411 sociétés d'assurance ou de réassurance, de droit français à la fin de 2001, contre 412 en 2000 et 408 en 1999, ainsi que 14 succursales d'entreprises étrangères soumises au contrôle des autorités françaises, contre 17 en 2000 et 16 en 1999. Toutes catégories confondues, ce sont 520 entités qui étaient soumises au contrôle de la CCA au 31 décembre 2000, et 522 au 31 décembre 2001 (22). Pour mémoire, les succursales d'entreprises étrangères soumises au contrôle de l'État membre d'origine étaient au nombre de 101 à la fin de 2001, et à la même date, 648 entreprises (contre 629 en 2000) exerçaient leur activité en France en libre prestation de services. Enfin, pour fixer un ordre de grandeur de l'activité des différentes catégories de sociétés relevant du même code, votre Rapporteur signale que, selon le rapport précité, les entreprises d'assurance ont émis 140,7 milliards d'euros de primes en 2000, en hausse de 14,1 % en comparaison avec l'exercice précédent, un total réparti entre les sociétés anonymes pour 94,6 %, les sociétés d'assurance mutuelles pour 4,5 % et les succursales de sociétés extra-communautaires pour 0,9 %. Quant aux entreprises spécialisées en réassurance contrôlées en 2000, elles étaient au nombre de 32, pour un chiffre d'affaires global de 6 milliards d'euros. Toutefois, ce chiffre ne représente pas l'ensemble du marché de la réassurance en France, qui comporte aussi les acceptations des entreprises d'assurance directe (8,8 milliards d'euros en 2000) ;

2.- les mutuelles, unions et fédérations régies par le code de la mutualité, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 19 avril 2001, qui reprend des principes plus que centenaires, et notamment les quatre caractéristiques suivantes : les mutuelles sont des sociétés de personnes et non de capitaux, elles sont à but non lucratif, les excédents éventuels étant investis au profit des mutualistes, elles poursuivent des buts de prévoyance, de solidarité et d'entraide qui ne concernent que des personnes et non des biens, et elles garantissent une égalité de traitement entre leurs membres, donc l'absence de sélection. Les mutuelles peuvent également pratiquer des opérations de réassurance. Selon la Fédération nationale de la mutualité française, 18 millions de mutualistes (23) sont adhérents de plus de 3.000 mutuelles, qui ont collecté en 2001 environ 14,7 milliards d'euros de cotisations et géré plus de 19 milliards d'euros d'encours de placements. On distingue généralement les mutuelles dites « du livre II » (du code de la mutualité), qui pratiquent des opérations d'assurance et de capitalisation dans la limite des principes mutualistes, et les mutuelles « du livre III » qui pratiquent la prévention, l'action sociale et la gestion de réalisations sanitaires et sociales ;

3.- les institutions de prévoyance, unions et groupements régis par le titre III du livre IX du code de la sécurité sociale. Ces institutions sont des personnes morales de droit privé à but non lucratif, administrées paritairement par des employeurs et des salariés, mises en place par la négociation collective, ayant pour objet la prévoyance, la couverture de risques et dommages corporels, ou bien le risque chômage, ainsi que des actions d'entraide. Elles sont aujourd'hui au nombre de 82, en lente diminution du fait des regroupements qui s'opèrent ;

4.- les institutions de retraite supplémentaire régies par le titre IV du livre IX du code de la sécurité sociale, institutions paritaires qui dans le cadre d'une entreprise, d'un groupe d'entreprises ou d'une branche, versent des prestations de retraite s'ajoutant à celles qui sont servies par des institutions de retraite complémentaire. Le mode de constitution des institutions de retraite supplémentaire est identique à celui des institutions de prévoyance. L'article L. 941-1 du code de la sécurité sociale prévoit qu'il ne peut désormais, sauf exception, en être créé de nouvelles ;

5.- les organismes régis par l'article L. 727-2 du code rural. Il s'agit, d'une part, des institutions de retraite complémentaire auxquelles, en application de l'article L. 921-1 du code de la sécurité sociale, doivent être affiliés les salariés agricoles. Elles sont régies par les dispositions du titre II du livre IX dudit code relatives aux instituions de retraite complémentaire, mais fonctionnent avec l'autorisation et sous le contrôle du ministre chargé de l'agriculture. D'autre part, les institutions de prévoyance autorisées, avant la date du 10 août 1994, par le ministre chargé de l'agriculture à fonctionner exclusivement au bénéfice des salariés agricoles sont maintenues. Elles sont régies par les dispositions du titre III du livre IX du code de la sécurité sociale. Toutefois, les attributions du ministre chargé de la sécurité sociale en ce qui concerne ces institutions sont dévolues au ministre chargé de l'agriculture.

Ces quatre dernières catégories d'organismes sont actuellement soumises au contrôle de la CCMIP. Selon les informations recueillies par votre Rapporteur, la CCMIP a examiné sur les dix dernières années 70 rapports, dont 54 rédigés par les membres de l'Inspection générale des affaires sociales, 11 par les membres du secrétariat général de la commission, et 5 par des directions régionales de l'action sanitaire et sociale.

Le tableau suivant permet de comparer l'importance économique respective des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance :

POIDS ÉCONOMIQUE DES ASSURANCES, DES MUTUELLES ET DES INSTITUTIONS DE PRÉVOYANCE EN 2000

(en milliards d'euros)

Mutuelles et caisses autonomes mutualistes (A)

Institutions de prévoyance (B)

Total (A) + (B) *

Sociétés d'assurance

Cotisations ou primes

11

7

18

141

Prestations

9,3

5,5

15

125

Fonds propres

12

8

20

58

Provisions techniques

39,2

12,5

52

763

* S'y ajoutent les institutions de retraite supplémentaire, qui versent 1 milliard d'euros de prestations, et dont les engagements, évalués à 20 milliards d'euros, ne sont que partiellement garantis par des provisions.

Source : Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance.

Votre Rapporteur note que cette disproportion entre les acteurs relevant des actuelles CCA et CCMIP est nettement moins marquée en matière d'assurance complémentaire maladie, où les mutuelles et institutions de prévoyance finançaient en 2000 9,6 % de la dépense de santé pour un montant de 11,7 milliards d'euros, quand les sociétés d'assurance versaient 3,3 milliards d'euros de prestations, soit 2,6 % des dépenses.

Enfin, le 1° du présent paragraphe précise le contenu du contrôle dévolu à la CCAMIP, qui comprend à la fois les dispositions législatives et réglementaires applicables à chaque catégorie d'organismes, et les marges de solvabilité prévues par la voie réglementaire. Ces dispositions reprennent, en substance, le droit existant. Il convient toutefois de mentionner in fine un ajout notable : la surveillance des « modalités de constitution et de fonctionnement des organes délibérants et des organes dirigeants des organismes soumis à son contrôle », qui vise très directement à renforcer le contrôle exercé sur le fonctionnement interne des mutuelles et des institutions de prévoyance, un souci justifié par le constat qui a pu être fait, ces dernières années, de quelques dérives en la matière. Le terme « constitution » vise bien les organes délibérants et dirigeants et non les modalités de constitution des organismes eux-mêmes, qui sont réglées par la procédure d'agrément.

Le poursuit la réécriture de l'article L. 310-12 pour prendre en compte le nouveau champ de contrôle de la CCAMIP. La seconde phrase attribue à celle-ci la compétence d'examen a priori de la solidité administrative et financière des organismes français qu'elle contrôle, lorsqu'ils souhaitent étendre leur activité dans un autre État membre de l'Espace économique européen (24) en y ouvrant une succursale, c'est-à-dire en bénéficiant du régime du droit d'établissement au sens du droit communautaire régissant le marché intérieur de l'EEE. Il revient ensuite à la CCAMIP de transmettre les projets qu'elle estime viables à l'autorité de contrôle de l'État où la succursale est implantée. Cette compétence est aujourd'hui dévolue au ministre chargé de l'économie et des finances en matière de droit d'établissement des entreprises d'assurance agréées en France, la Commission de contrôle des assurances disposant d'ores et déjà de la même compétence en matière de libre prestation de services au regard du droit communautaire.

La rédaction ainsi adoptée semble ouvrir le champ du droit d'établissement aux organismes autres que les entreprises d'assurances ; il n'en est rien, car ni le code des assurances ni celui de la mutualité ne sont modifiés en ce sens par le présent projet de loi. Mutuelles et institutions de prévoyance peuvent déjà exercer en libre prestation de services.

Il est donc possible à ce stade de résumer les modifications apportées par les articles 25 et 26 du présent projet de loi s'agissant de la mise en œuvre du droit d'établissement et de la libre prestation de services, ce que montre le tableau suivant :

MODIFICATIONS APPORTÉES À LA MISE EN ŒUVRE

DU DROIT D'ÉTABLISSEMENT ET DE LA LIBRE PRESTATION DE SERVICES COMMUNAUTAIRES

EEE vers France

France vers EEE

DE (1)

LPS (2)

DE

LPS

Régime actuel

Notification au ministre français

Notification aux autorités de l'État concerné via la CCA

Notification aux autorités de l'État concerné via le ministre français

Régime proposé

Notification au Comité des entreprises d'assurance

Notification aux autorités de l'État concerné via la CCAMIP

(1) Droit d'établissement

(2) Libre prestation de services

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le prévoit l'extension du champ du contrôle des intermédiaires aux opérations relevant des codes de la sécurité sociale et de la mutualité. La CCAMIP pourra donc décider de soumettre à son contrôle, outre les agents généraux ou courtiers d'assurances, quelle que soit leur forme juridique et leur dénomination - comme la CCA en a déjà le pouvoir aujourd'hui -, tous les intermédiaires qui joueraient le même rôle dans le champ des mutuelles et des institutions de prévoyance. Si le sens général de cet alinéa ne fait pas de doute, votre Rapporteur estime que sa rédaction mérite d'être améliorée.

Le étend aux mutuelles et institutions de prévoyance le contrôle déjà exercé à l'heure actuelle auprès des entreprises d'assurance en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, selon les modalités prévues au titre VI du livre V du code monétaire et financier. Votre Rapporteur note par ailleurs que le texte proposé omet de rectifier, dans la fin de cette phrase, un numéro d'alinéa.

Le abroge, d'une part, un alinéa caduc puisqu'il renvoie à la loi n° 97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite, dite « loi Thomas », abrogée depuis par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 dite de modernisation sociale  (25). Il créé simultanément un alinéa tendant à exclure du champ du contrôle de la CCAMIP les opérations de retraite complémentaire obligatoire visées au livre IX du code de la sécurité sociale, c'est-à-dire les régimes intégrés aux compensations AGIRC et ARRCO. Votre Rapporteur ne peut que souscrire à la logique de cette restriction de compétence, déjà prévue dans les mêmes termes pour l'actuelle CCMIP : le contrôle de la gestion des régimes obligatoires de sécurité sociale relève de l'Inspection générale des affaires sociales et de la Cour des comptes.

- paragraphe II (article L. 310-12-1 du code des assurances) : la composition de la commission

Le tableau suivant permet de comparer les compositions respectives des actuelles CCA et CCMIP d'une part, et la composition projetée de la CCAMIP, d'autre part :

COMPOSITION COMPARÉE DE LA CCA, DE LA CCMIP ET DE LA CCAMIP

CCA 

5 membres nommés pour 5 ans par arrêté du ministre chargé de l'économie et des finances

CCMIP

5 membres nommés pour 5 ans par arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé de l'agriculture

Un conseiller d'État, président, choisi parmi les membres de la section des finances et proposé par le vice-président du Conseil d'État

Un conseiller d'État, président, proposé par le vice-président du Conseil d'État

Un conseiller à la Cour de cassation, proposé par le premier président de la Cour de cassation

Un conseiller à la Cour de cassation, proposé par le premier président de la Cour de cassation

Un conseiller maître à la Cour des comptes, proposé par le premier président de la Cour des comptes

Un conseiller maître à la Cour des comptes, proposé par le premier président de la Cour des comptes

Deux personnalités qualifiées

en matière d'assurance et de questions financières

Deux personnalités qualifiées : l'une dans le secteur de la mutualité, l'autre dans celui des IP

Cinq suppléants

Cinq suppléants

Le directeur du Trésor ou son représentant, commissaire du Gouvernement

Le directeur de la sécurité sociale ou son représentant, commissaire du Gouvernement

Remplacé par le directeur des exploitations, de la politique sociale et de l'emploi ou son représentant, lorsque les travaux de la commission concernent la mutualité agricole.

CCAMIP

9 membres : outre le Président et le Gouverneur de la Banque de France, 7 membres nommés pour 5 ans par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie, de la sécurité sociale et de la mutualité

Un président nommé par décret

Un conseiller d'État, proposé par le vice-président du Conseil d'État

Un conseiller à la Cour de cassation, proposé par le premier président de la Cour de cassation

Un conseiller maître à la Cour des comptes, proposé par le premier président de la Cour des comptes

Quatre personnalités qualifiées en matière d'assurance, de mutualité et de prévoyance

Huit suppléants

Le Gouverneur de la Banque de France, président de la Commission bancaire, ou son représentant

Le directeur du Trésor ou son représentant, commissaire du Gouvernement

Le directeur de la sécurité sociale ou son représentant, commissaire du Gouvernement

Source : projet de loi de sécurité financière.

Une fois rappelé le fait que d'ores et déjà, la présidence de la CCA et de la CCMIP est aujourd'hui exercée par le même conseiller d'État, le tableau précédent appelle de la part de votre Rapporteur les observations suivantes :

- le président de la commission, composée de neuf membres titulaires, ne serait plus automatiquement un conseiller d'État ;

- le texte confère à ce président et à son suppléant une légitimité supérieure à celle des sept autres membres nommés, puisque leur nomination est le fait d'un décret et non d'un arrêté interministériel. L'exposé des motifs parle à juste titre d'un « décret du Président de la République », quand le texte ne comporte pas une telle précision. L'application de cette règle ne fait cependant aucun doute ; c'est ici l'article 13 de la Constitution qui s'appliquera. Cette précision est toutefois du domaine de la loi organique ; elle n'est donc pas inscrite dans le présent projet de loi. La procédure est la même pour la nomination du Président de l'AMF ;

- parmi les ministres compétents, celui en charge « de l'économie et des finances » est remplacé par celui en charge « de l'économie », un détail qui n'est pas neutre, et qui correspond à la réalité des compétences ministérielles ;

- le directeur des exploitations, de la politique sociale et de l'emploi au ministère de l'agriculture n'est plus mentionné. Ce ministère ne s'y est pas opposé au stade de la préparation du présent projet de loi.

On note également une redondance entre les premier et sixième alinéas du nouvel article L. 310-12-1 proposé, à propos de la faculté du gouverneur de la Banque de France, de se faire représenter au sein de la commission.

Par ailleurs, le présent projet de loi prend soin d'inscrire dans le code des assurances des garanties d'indépendance de la CCAMIP à l'égard du Gouvernement :

- la nomination par décret de son président ;

- le fait que les commissaires du Gouvernement n'ont pas de voix délibérative. S'ils peuvent demander une seconde délibération, cette prérogative disparaît en matière de sanctions, les commissaires ne pouvant d'ailleurs être présents lors des délibérations concernant une sanction. L'inscription dans la loi de ces précautions résulte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, qui considère les actuelles commissions de contrôle comme des tribunaux au sens de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Rappelons que des dispositions analogues sont prévues en ce qui concerne l'AMF ;

- l'impossibilité, déjà prévue pour les actuelles commissions de contrôle, d'une révocation des membres.

S'agissant plus particulièrement du secrétariat général de la CCAMIP, qui n'est pas mentionné dans le droit existant à propos de la CCMIP, et dont l'actuel article L. 310-12-1 précise, pour la CCA, qu'il est « assuré par le chef du service de contrôle des assurances », plusieurs précisions sont proposées par le présent projet : le secrétaire général est nommé « parmi les membres du corps de contrôle des assurances, par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie, de la sécurité sociale et de la mutualité, après avis du président de la commission de contrôle ». Il n'y aurait donc plus d'automaticité en la matière, ce qui se conçoit si l'on considère l'élargissement du champ de compétences de la commission, mais ce qui pose le problème de la légitimité du secrétaire général et de son degré de dépendance à l'égard du président.

Votre Rapporteur se permet de nier la valeur législative de l'avant-dernier alinéa de l'article proposé, qui prévoit la désignation d'un secrétaire général adjoint « choisi parmi les membres de l'inspection générale des affaires sociales » (IGAS). S'il comprend bien le souci de faciliter la transition avec la configuration actuelle, dans laquelle le secrétaire général de la CCMIP est en pratique issu de l'IGAS, votre Rapporteur estime que le texte proposé s'arrête au milieu du gué : ou bien il s'agit de laisser au décret le soin d'organiser le secrétariat général de la CCAMIP - solution qui a la préférence de votre Rapporteur -, ou bien l'on reconnaît avec lucidité qu'une organisation efficace de la nouvelle commission nécessitera un secrétariat général étoffé, à même d'appréhender les spécificités des différents types d'organismes contrôlés. Mais dans cette dernière hypothèse, il faut alors aller plus loin et prévoir deux secrétaires généraux adjoints, l'un issu du corps de contrôle des assurances, et l'autre de l'IGAS, le secrétaire général demeurant le chef du service de contrôle des assurances, étant donné les ordres de grandeur des sommes en jeu, rappelés supra.

Le présent paragraphe II prévoit la possibilité pour la CCAMIP de « créer en son sein une ou plusieurs commissions spécialisées et [de] leur donner délégation pour prendre des décisions de portée individuelle. » C'est reconnaître avec bon sens les spécificités respectives des différents organismes contrôlés par la commission, au-delà des règles communes qui justifient l'unicité de la CCAMIP ; c'est aussi, peut-être, guider avec un excès de détail son fonctionnement, surtout lorsqu'il est écrit, à la dernière phrase du onzième alinéa proposé : « Il est créé au moins une commission spécialisée compétente à l'égard des organismes régis par le livre III du code de la mutualité. » Pourquoi inscrire ici ce détail dans la loi, et ne préciser que dans le seul code de la mutualité (26) la compétence subsidiaire des directions régionales des affaires sanitaires et sociales pour le contrôle des « petites mutuelles » ? Ce travers n'est pas reproduit pour les créations éventuelles de « commissions consultatives, dans lesquelles [sont nommés] le cas échéant des experts, pour préparer et instruire » les décisions de la commission.

Enfin, est prévue l'organisation « au moins deux fois par an » de réunions conjointes avec la Commission bancaire. Avec les dispositions symétriques insérées dans le code monétaire et financier par l'article 30 du présent projet de loi, cet alinéa constitue la consécration législative du rapprochement entre les deux autorités de contrôle prudentiel, qui pourrait n'être qu'une première étape (27). Votre Rapporteur est cependant dubitatif quant à l'opportunité d'inscrire dans la loi une telle obligation de réunion deux fois l'an.

- paragraphe III (article L. 310-12-2 [nouveau] du code des assurances) : la prévention des conflits d'intérêts

Le présent paragraphe prévoit des règles précises destinées à prévenir tout conflit d'intérêts éventuel pour les membres de la CCAMIP, là où le droit existant ne vise que les rétributions perçues par les membres des commissions, pendant la durée de leur mandat et postérieurement à celui-ci :

Dans le code des assurances, il s'agit du sixième alinéa de l'article L. 310-12-1, qui dispose : « Les membres de la commission ne peuvent, pendant la durée de leur mandat et dans les cinq ans qui suivent l'expiration de celui-ci, recevoir de rétribution d'une entreprise d'assurance. »

Dans le code de la sécurité sociale, auquel renvoie le code de la mutualité, c'est le dernier alinéa de l'article L. 951-3 qui dispose : « Les membres de la commission ne peuvent, pendant la durée de leur mandat et dans les cinq ans qui suivent l'expiration de celui-ci, recevoir de rétribution d'une mutuelle ou d'une union, d'une institution de prévoyance ou d'une entreprise régie par le code des assurances avec lesquelles l'institution de prévoyance, la mutuelle ou l'union établissent des comptes consolidés ou combinés conformément à l'article L. 931-34 du présent livre ou à l'article L. 212-7 du code de la mutualité. »

Le sixième alinéa de l'article proposé, qui vient en substitution des dispositions précitées, reprend l'interdiction de rétribution pendant la durée du mandat, et reste silencieux sur la période suivante. C'est donc la solution déjà retenue pour l'AMF qui s'appliquera. Le délai de cinq ans pouvait en effet être regardé comme dissuasif pour des personnalités qualifiées pressenties comme membres du collège de la commission, quand le code pénal suffit déjà à réprimer d'éventuels trafics d'influence.

Sur d'autres points, la rédaction proposée renforce, les règles déontologiques applicables aux membres de la CCAMIP, y compris son président, et y compris, dans le silence du texte, le Gouverneur de la Banque de France ou son représentant.

Les obligations en cause visent la déclaration au président - qui doit tenir ces informations à la disposition des membres de la commission, et est le garant du respect de ces obligations - de toutes fonctions exercées, et de tous intérêts ou mandats détenus au cours des deux années précédant la nomination ou au moment de celle-ci, ou qui surviendraient en cours de mandat.

À l'objection selon laquelle de telles restrictions ne permettent qu'à des retraités de pouvoir siéger comme personnalités qualifiées, votre Rapporteur répond qu'elle est recevable, mais que telle est déjà la situation pour la CCA et la CCMIP, et que l'indépendance et l'impartialité de la commission de contrôle sont à ce prix.

- paragraphe IV (article L. 310-12-4 du code des assurances) : la contribution pour frais de contrôle et les ressources de la CCAMIP

Les moyens financiers des actuelles commissions de contrôle sont régis selon les modalités suivantes :

- pour le fonctionnement de la CCA, des subventions budgétaires sont inscrites sur les crédits du ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie, à l'article 04 des chapitres 31-90, 31-94, 33-90, 33-91 et 34-98, dont le montant global, en théorie, est voisin du produit des « contributions » instituées à l'article L. 310-9 du code des assurances, que le présent projet propose de supprimer (cf. infra paragraphe VI). Le lien entre le produit des contributions et les moyens alloués à la CCA est toutefois assez lâche, puisque l'article précité dispose seulement que « les frais de toute nature résultant de l'application des dispositions du présent code relatives au contrôle et à la surveillance de l'État en matière d'assurance et de réassurance sont couverts au moyen de contributions proportionnelles au montant des primes ou cotisations définies [à l'alinéa suivant] et fixées annuellement, pour chaque entreprise, par l'autorité administrative. » Dans les faits, le taux de la contribution est fixé en fonction des dépenses de la CCA constatées l'année précédente. Il est actuellement de 0,055 0/00 et a stagné sur la période récente, comme l'indique le tableau suivant :

ÉVOLUTION DE LA CONTRIBUTION DES ENTREPRISES D'ASSURANCE

AUX FRAIS DE CONTRÔLE ET DE SURVEILLANCE

(en millions d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Assiette (*)

105.470

113.593

121.482

105.142

116.731

134.374

Taux (en 0/00)

0,06

0,057

0,056

0,065

0,06

0,055

Produit

6,33

6,49

6,82

6,83

7,05

7,45

(*) Calculée sur les primes de l'année n-2. La baisse du montant de l'assiette retenue pour la contribution 2000 s'explique par la redéfinition du mode de calcul (primes nettes de cessions) et par la conjoncture défavorable pour l'exercice n-2 (-7,1 % du chiffre d'affaires entre 1997 et 1998).

Source : Commission de contrôle des assurances.

Pour 2003, à partir d'une hypothèse d'assiette fixée à 144 424 millions d'euros, le produit de la taxe serait de 7,22 millions d'euros si le taux en était fixé à 0,05 0/00, et de 21,66 millions d'euros s'il était de 0,15 0/00, cette fourchette de taux étant celle prévue par le présent paragraphe (cf. infra).

- pour la CCMIP, bien que beaucoup plus récent, le dispositif est le même : une subvention budgétaire est, depuis la loi de finances pour 2003, inscrite au sein de la section II - Santé, famille, personnes handicapées et solidarité du budget des affaires sociales et de la santé, sur un chapitre 37-02 ad hoc, qui comprend à la fois des moyens de personnel et des moyens de fonctionnement. Auparavant, ces crédits n'étaient pas distincts de ceux alloués à l'IGAS. Le troisième alinéa de l'article L. 951-1 du code de la sécurité sociale dispose que « La commission bénéficie de l'autonomie financière. Ces [sic] ressources sont notamment constituées, dans les conditions fixées par la loi de finances, du produit d'une redevance » mise à la charge des organismes contrôlés. Votre Rapporteur doute que la qualification juridique de redevance soit exacte ; le caractère récent de sa création - elle résulte de l'ordonnance du 19 avril 2001 précitée relative au code de la mutualité - ne permet pas de disposer de jurisprudence sur ce point. Au demeurant, les modifications proposées par le présent projet de loi (cf. infra article 29) font disparaître le mot « redevance » au profit du mot « contribution ». Les alinéas suivants de l'actuel article L. 951-1 déterminent l'assiette de cette contribution et son taux, fixé à 0,05 0/00. Son produit théorique, de l'ordre de 900 000 euros, est effectivement resté théorique puisque la contribution n'a jamais été recouvrée depuis sa création.

Le dispositif proposé par le présent paragraphe pour ce qui apparaît manifestement comme une taxe relevant de la catégorie des impositions de toutes natures, ne vise, pour la détermination de l'assiette de cette « contribution pour frais de contrôle », que « les entreprises soumises au contrôle de la commission en vertu du présent code », à savoir le code des assurances ; les modalités particulières de détermination de l'assiette de cette contribution appliquée aux autres organismes soumis au contrôle demeurent inchangées, mais ne sont pas incluses dans le code des assurances. L'article 29 du présent projet de loi les maintient dans le seul code de la sécurité sociale, et votre Rapporteur renvoie sur ce point à son commentaire critique dudit article 29, ainsi qu'au tableau récapitulatif qui y figure.

Il en va de même pour les modalités de recouvrement de la taxe, dont l'article L. 310-12-4, dans la rédaction ici proposée, prévoit, pour les seules entreprises d'assurance, qu'elles soient identiques à celles applicables « en matière de créances non fiscales de l'État ». Le présent projet de loi ne modifie pas les modalités de recouvrement de la contribution due par les autres organismes, mais ne les inscrit pas non plus dans le code des assurances.

Le taux de la contribution, en revanche, n'est appelé à figurer que dans le code des assurances. Le deuxième alinéa de l'article proposé dispose qu'il est « fixé par décret, [et] compris entre 0,05 et 0,15 0/00 ». Votre Rapporteur ne conteste pas la pertinence de cette fourchette, certes large, mais dont le taux plancher correspond presque exactement aux taux actuels, lesquels ont connu, en particulier pour les entreprises d'assurance, et contre toute logique, une décroissance presque continue depuis l'institution de la contribution. Ce point est d'autant plus important que l'actuelle CCA souffre d'un manque chronique de moyens de fonctionnement : votre Rapporteur ne compte plus les exemples parfois crus qui lui ont été rapportés par la secrétaire générale de la commission, allant de l'absence de logiciel d'exploitation des données diffusées par Reuters sur l'évolution des marchés jusqu'à l'état des locaux qui friserait l'insalubrité, en passant par l'impossibilité pour les services de la commission d'assister à certaines réunions internationales faute de crédits suffisants pour couvrir les frais de déplacement...

Pourtant, les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances pour 2003 font apparaître une meilleure prise en compte des moyens de la CCA : outre le transfert interne d'importants moyens de personnel, en particulier de personnel d'exécution, qui permet une meilleure identification des moyens propres de la commission, la dotation de fonctionnement (chapitre 34-98, article 04) passe à 1,42 million d'euros, dont 430 000 euros de moyens nouveaux. Des mesures nouvelles exceptionnelles, pour un montant d'1 million d'euros (hors ajustements comptables), ont ainsi été autorisées pour rattraper une partie du retard accumulé : des travaux d'entretien dans l'immeuble (500 000 euros), l'abondement du budget des missions pour assurer la représentation extérieure de la commission, la rénovation de l'outil documentaire, la création d'un site Internet, la formation des jeunes contrôleurs.

Le budget de fonctionnement de la CCA pour 2002 et les prévisions pour 2003 sont retracés dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION DU BUDGET DE FONCTIONNEMENT DE LA CCA ENTRE 2002 ET 2003

(en milliers d'euros)

2002

2003

Dotation initiale

Consommation

Dotation initiale

Enveloppe globale

343,1

297,8

541,1

dont reports

12,3

-

12,3

Crédits hors enveloppe globale

114,7

115,8

268,2

Autres dépenses DPMA (*)

-

-

605,8

Total

457,8

413,6

1.415,1

(*) Direction du personnel et de la modernisation et de l'administration au ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie.

Source : Commission de contrôle des assurances.

Quant au total général des dotations de personnel et de fonctionnement, il s'établit à 7,3 millions d'euros. Le produit de la taxe représente environ 7,5 millions d'euros, le coût complet du contrôle qu'elle est censée couvrir revenant à quelque 9,5 millions d'euros, selon les services de la CCA. Le porter à 15 millions d'euros, selon la même source, amènerait le taux de la contribution à 0,08 0/00.

La différence entre dotation budgétaire totale et coût réel de fonctionnement s'explique par deux séries d'éléments : d'une part, certaines lignes sont évaluées de manière forfaitaire, à un montant inférieur à la réalité, comme par exemple les indemnités et charges sociales des commissaires contrôleurs ; d'autre part, ne figurent dans le budget de fonctionnement ci-dessus ni les dépenses d'informatique lourdes, ni les dépenses liées à la gestion du personnel, à la formation, à l'entretien et à l'aménagement des locaux, au gardiennage, etc.

Pour mettre à niveau les moyens de la commission, votre Rapporteur était partisan d'une affectation à la CCAMIP du produit de la contribution, à un taux majoré par rapport à la situation actuelle. Une telle affectation de recettes serait rendue possible si la commission se voyait dotée de la personnalité morale.Votre Rapporteur est enclin à considérer qu'en cas d'affectation de la contribution pour frais de contrôle à la CCAMIP, le Conseil constitutionnel, il n'y aurait pas, en cas d'affectation de recette à la commission de contrôle, de « dépossession » de l'État, puisque ce dernier reverse déjà, en pratique, le produit de la taxe à la CCA, et que ce produit et le taux de la taxe sont déterminés chaque année en fonction des dépenses de la commission au cours de l'exercice précédent. Au contraire, l'État aurait intérêt, en termes budgétaires, à une telle affectation et à l'acquisition par la CCAMIP de l'autonomie financière, puisque le produit de la taxe ne permet pas aujourd'hui de couvrir le coût global du fonctionnement de la CCA.

L'alinéa suivant précise que « les crédits attribués à la commission de contrôle pour son fonctionnement sont inscrits au budget de l'État. » Votre Rapporteur se permet d'insister : il y a, pour la crédibilité de la future CCAMIP, un réel intérêt à « échapper » à la budgétisation, celui de ne pas subir la régulation budgétaire. Témoin le sort de l'actuelle CCMIP, dont la dotation, inscrite pour la première fois, en loi de finances pour 2003, sur un chapitre distinct, a été annulée à hauteur de près de 20 % (170 000 euros sur 863 000) par un décret du 14 mars 2003. On peut également noter sur ce thème les principes de base édictés par l'Association internationale des contrôleurs d'assurance, sur lesquels s'appuiera la prochaine évaluation de contrôle français par le Fonds monétaire international prévue dans quelques mois : 

« L'autorité de contrôle est dotée de l'indépendance budgétaire. Son budget est suffisant pour lui permettre de mettre en œuvre une supervision effective. L'autorité de contrôle doit être capable d'attirer et de retenir un personnel de haute valeur professionnelle, d'engager des experts extérieurs en tant que de besoin, de former ses agents, et de mettre en œuvre l'infrastructure et les outils de contrôle adéquats. »

Il est indiqué au même alinéa que les crédits de fonctionnement de la CCAMIP ne sont pas soumis au contrôle des dépenses engagées ; le président de la commission - et non le ministre - est ordonnateur des dépenses.

- paragraphes V et VI : dispositions de coordination

L'alinéa unique du V s'analyse en une « disposition-balai » destinée à substituer, dans l'ensemble du code des assurances - donc y compris dans les intitulés de section -, la nouvelle dénomination de la commission de contrôle à l'actuelle. Une disposition de ce type n'est pas nécessaire dans les deux autres codes modifiés par la présente section du projet de loi (à l'article 29), dans la mesure où la dénomination de la commission actuellement mentionnée dans ces deux codes - la CCMIP - est le plus souvent abrégée en « commission de contrôle », expression qui n'a bien évidemment pas lieu d'être modifiée. Dans l'écriture de la loi toutefois, le présent paragraphe pose un problème technique de coordination avec le « chapeau » de l'article ; il est, par ailleurs, redondant avec la disposition balai de l'article 35.

Le VI supprime deux types de dispositions du code des assurances :

- d'une part l'article L. 310-9, qui fixe le régime actuel des contributions pour frais de contrôle dues par les entreprises, ce régime étant modifié (cf. supra paragraphe IV). Le projet oublie de modifier en conséquence l'article L. 310-9-1, qui ne se lit actuellement que comme une dérogation aux règles établies par l'article L. 310-9, dont il forme un complément non détachable. Un amendement sera proposé sur ce point ;

- d'autre part les articles L. 321-3 à L. 321-5, issus de l'article 18 de la loi n° 94-5 du 4 janvier 1994 modifiant le code des assurances, en vue notamment de la transposition des directives n° 92-49 et n° 92-96 des 18 juin et 10 novembre 1992. Ainsi qu'il a été dit supra, ces dispositions sont relatives aux règles de notification au ministre chargé de l'économie et des finances auxquelles sont soumises les entreprises françaises qui souhaitent bénéficier du régime du droit d'établissement dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen. L'abrogation de ces dispositions apparaît comme la conséquence logique de l'attribution à la CCAMIP, au 2° du I du présent article, de cette compétence.

Cependant, la suppression de ces trois articles fait disparaître une série de garanties de procédure qui ne sont pas reprises au quatrième alinéa de l'article L. 310-12 du code des assurances tel que modifié par le présent article : la mention d'une liste de documents à fournir pour remplir les formalités de notification, l'existence de délais de traitement des dossiers - trois mois, et un mois seulement en cas de modification de la nature ou des conditions d'exercice des activités de la succursale -, et enfin l'obligation d'information de l'entreprise demanderesse en cas de refus de transmission de son dossier à l'autorité de l'État de la succursale.

Votre Rapporteur note toutefois le caractère réglementaire de telles garanties, si importantes soient-elles en pratique. Et précisément, l'article L. 310-12 renvoie à un décret en Conseil d'État pour la fixation de ces modalités. L'actuel article R. 310-20 du code des assurances offre d'ailleurs des garanties au moins équivalentes à celles visées aux articles L. 321-3 à L. 321-5. En outre, la similitude du traitement des demandes relatives au droit d'établissement et à la libre prestation de services justifie tout à fait le regroupement dans les mains d'une même instance de contrôle, indépendante qui plus est, des prérogatives encadrant les activités d'assurance exercées sous le régime du droit d'établissement et de la libre prestation de services.

À l'amendement de suppression de l'obligation de réunion conjointe de la CCAMIP et de la Commission bancaire, votre Rapporteur ajoutera trois amendements de forme, vous proposant d'adopter le présent article, ainsi modifié.

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Quinze amendements ont été adoptés par le Sénat sur cet article, dont quatorze à l'instigation de la commission des finances.

Le premier d'entre eux aligne, au 1° du I, le statut de la CCAMIP sur celui de l'AMF, en qualifiant la commission d'« autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale », ce que votre Rapporteur ne peut qu'approuver, malgré l'avis défavorable opposé par le Gouvernement.

Toujours au 1° du I, un amendement rédactionnel a été adopté, qui précise qu'il s'agit de bien exclure du champ du contrôle les entreprises d'assurance ayant leur siège social dans un État membre de l'Union européenne exerçant en France via une succursale ou en libre prestation de services. Demeurent soumises au contrôle les succursales, établies en France, d'entreprises ayant leur siège social dans un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen non membre des Communautés européennes, ainsi que dans la Confédération helvétique.

Au 3° du I, un amendement rédactionnel a corrigé l'approximative rédaction initiale, mais de façon incomplète.

Au 4° du I, un amendement de coordination a changé un numéro d'alinéa.

Au 5° du I, par symétrie avec l'exclusion du champ du contrôle de la CCAMIP des opérations de retraite complémentaire obligatoire, un alinéa supplémentaire exclut également de ce champ les opérations de gestion de régimes obligatoires de sécurité sociale effectuées par des organismes mutualistes, en vertu du 4° du I de l'article L. 111-1 du code de la mutualité. Votre Rapporteur souscrit à cette logique. Le contrôle en cette matière est du ressort de l'IGAS et de la Cour des comptes.

Au début du II, la rédaction adoptée par le Sénat clarifie dans le texte du code des assurances la composition de la CCAMIP, en indiquant le nombre total de ses membres (neuf), qualité qui s'applique également au président et au Gouverneur de la Banque de France, lequel, par conséquent, est lui aussi explicitement soumis aux règles relatives aux conflits d'intérêts édictées par ailleurs.

Contre l'avis du Gouvernement, au dixième alinéa du II, a été adopté un amendement de M. Paul Loridant précisant que « les décisions de la commission de contrôle sont prises à la majorité des voix », disposition dont l'utilité n'apparaît pas évidente.

Au treizième alinéa du II, au lieu de donner au président de la CCAMIP qualité pour agir au nom de l'État devant toute juridiction, le Sénat lui a donné qualité pour agir au nom de la commission, indiquant tirer ainsi la conséquence de l'attribution à la CCAMIP de la personnalité morale.

S'agissant des modalités de désignation du secrétaire général de la CCAMIP, à l'antépénultième alinéa du II, le Sénat a prévu de la soumettre à l'avis de la commission et non du seul président. Identique à la procédure prévue pour l'AMF, cette solution convient à votre Rapporteur.

Conformément à l'opinion de votre Rapporteur, l'avant-dernier alinéa du II a été supprimé par le Sénat - le Gouvernement s'en remettant à sa sagesse -, les dispositions relatives au secrétaire général adjoint étant manifestement réglementaires.

Anticipant sur les dispositions de l'article 27 du présent projet de loi, le Sénat a introduit avant le dernier alinéa du II deux alinéas relatifs à la composition du personnel de la CCAMIP et aux règles de déontologie qui lui sont applicables. La commission, dotée de la personnalité morale, peut ainsi recourir à des « agents publics mis à sa disposition dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, [des] agents contractuels de droit public et [des] salariés de droit privé », et non plus seulement à des fonctionnaires ou agents contractuels de droit public comme le prévoyait l'article 27 initial du projet, qui mentionnait aussi la possibilité de recruter en dehors de ce cadre au moyen de conventions ad hoc établies par la commission. Votre Rapporteur souscrit à cette nouvelle rédaction, ainsi qu'à son insertion à cet article du code des assurances, et souligne la nécessité pour la CCAMIP, si elle entend mener une politique de recrutement ambitieuse, de bénéficier à terme d'une ressource affectée. Que l'on ne se méprenne pas toutefois sur la signification de l'élargissement des possibilités de recrutement : dans l'esprit de votre Rapporteur, il ne s'agit en aucune manière de critiquer la compétence des membres du corps des commissaires contrôleurs des assurances, qui est internationalement reconnue, alors que ces fonctionnaires dévoués travaillent aujourd'hui dans des conditions matérielles difficiles.

Quant aux règles déontologiques applicables au personnel, elles sont fixées par la commission sur proposition du secrétaire général. Cette précision n'est pas inutile, puisque la diversification du personnel rend partiel le contrôle exercé par la commission de déontologie compétente pour les seuls fonctionnaires.

Après le III, le Sénat a modifié le régime financier de la CCAMIP, en insérant un nouvel article L. 310-12-3 qui lui confère l'autonomie financière, telle qu'elle existe aujourd'hui pour la CCMIP. Ainsi, la CCAMIP arrête son budget sur proposition du secrétaire général, et « elle perçoit le produit de la contribution établie à l'article L. 310-12-4 ». Votre Rapporteur a déjà dit tout le bien qu'il pensait de cette solution, et son analyse quant à la conformité d'une telle affectation de recettes avec la loi organique relative aux lois de finances. Le compte rendu des débats du Sénat ne permet pas de connaître l'avis que le Gouvernement a émis sur ce point.

Au deuxième alinéa du IV, avec l'accord du Gouvernement, le Sénat a introduit la possibilité de fixer un taux distinct de la contribution pour frais de contrôle lorsqu'elle s'applique aux mutuelles dites « du livre III ». La spécificité de ces organismes peut en effet justifier un taux distinct, bien qu'au minimum égal à 0,05 0/00, qui est le taux actuel.

Un amendement aux troisième et quatrième alinéas du IV présenté comme de conséquence a été adopté avec l'assentiment du Gouvernement. Il comprend cependant plusieurs modifications de fond : la précision des modalités de liquidation, d'ordonnancement et de recouvrement, alignées sur le régime des « établissements administratifs de l'État », formulation qui mériterait d'être clarifiée. Le contentieux relatif à cette contribution est attribué au juge administratif, ce qui semble pourtant aller de soi à votre Rapporteur, s'agissant d'une taxe relevant de la catégorie des impositions de toute nature. Enfin, un décret en Conseil d'État est explicitement prévu pour fixer le régime comptable de la CCAMIP.

La redondance des deux derniers alinéas du IV a été supprimée.

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Votre Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre Rapporteur (amendement n° 104).

Votre Rapporteur a ensuite présenté un amendement (amendement n° 105) visant à exclure du champ de contrôle de la CCAMIP, à l'instar de ce qui est déjà prévu pour les mutuelles et les institutions de prévoyance, les opérations de gestion des régimes obligatoires d'assurance maladie et maternité, et d'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, qui sont effectuées par des entreprises d'assurance.

Votre Commission a adopté cet amendement. Elle a ensuite, sur la proposition de votre Rapporteur, rejeté un amendement de M. Charles de Courson, visant à inclure dans le collège de la Commission de contrôle des dirigeants d'associations représentatives des assurés et des membres des mutuelles et des institutions de prévoyance.

Votre Rapporteur a présenté un amendement (amendement n° 106) visant à supprimer l'obligation prévue par la loi pour la Commission de contrôle et la Commission bancaire de se réunir conjointement deux fois par an. Une telle formalisation législative est inutile.

M. Michel Bouvard, Président, a exprimé son accord et votre Commission a adopté cet amendement. Elle a également adopté deux amendements, rédactionnels et de coordination, de votre Rapporteur (amendements nos 107 et 108).

Votre Commission a ensuite adopté cet article, ainsi modifié.

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Après l'article 26

Votre Commission a examiné un amendement de M. Charles de Courson visant à préciser que le secret professionnel auquel sont tenus les agents de la Commission de contrôle n'est pas opposable aux magistrats de la Cour des comptes.

Votre Rapporteur, tout en exprimant son accord sur le fond, a précisé, comme précédemment, qu'une telle disposition n'avait pas sa place dans le code des assurances, mais plutôt dans le code des juridictions financières.

Votre Commission a rejeté cet amendement.

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Article 27

(article L. 310-12-5 [nouveau], L. 310-13 à L. 310-15, L. 310-19, L. 310-19-1 et L. 310-20-1 [nouveau] du code des assurances)

Pouvoirs de contrôle de la Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance

- paragraphe I (article L. 310-12-5 [nouveau] du code des assurances) : relations entre la CCAMIP et les fonds de garantie

Le présent paragraphe insère, dans la section du code des assurances spécifique à la commission de contrôle, un article de coordination avec d'autres articles du même code relatifs à deux fonds de garantie, l'un existant, l'autre modifié par le présent projet de loi, soit respectivement : le fonds de garantie des assurances de personnes et le fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages. S'y ajoutent les deux fonds de garantie spécifiques, respectivement, aux mutuelles et aux institutions de prévoyance. Les quatre fonds visés sont les suivants :

- le Fonds de garantie des assurés contre la défaillance de sociétés d'assurance de personnes institué à l'article L. 423-1 du code des assurances ;

- le Fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse institué à l'article L. 421-1 du même code, et appelé à devenir le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages en vertu de l'article 57 du présent projet de loi ;

- le Fonds de garantie contre la défaillance des mutuelles et des unions pratiquant des opérations d'assurance institué à l'article L. 431-1 du code de la mutualité ;

- le Fonds paritaire de garantie des institutions de prévoyance institué à l'article L. 931-36 du code de la sécurité sociale.

En l'absence de précisions, pourraient s'ajouter à cette liste le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions visé à l'article L. 422-1 du code des assurance, des fonds non codifiés, tel le fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles contaminés par le VIH, créé par l'article 47 de la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991 portant diverses dispositions d'ordre social, ou encore le Fonds de garantie des dépôts institué par l'article L. 312-4 du code monétaire et financier. Ce dernier fonds est d'ailleurs cité, à l'article L. 310-20 du code des assurances ainsi qu'à l'article L. 951-12 du code de la sécurité sociale, au nombre des entités avec lesquelles des échanges d'informations sont possibles.

Alors que le présent paragraphe dispose, d'une part, que le président du fonds de garantie auquel la commission de contrôle envisage de recourir est entendu par elle, et d'autre part, que les présidents de fonds sont entendus à leur demande :

- l'article L. 423-4 du code des assurances prévoit déjà que la commission de contrôle « entend le président du directoire du fonds de garantie pour toute question concernant une entreprise d'assurance pour laquelle elle envisage de mettre en œuvre [les dispositions du chapitre relatif à la garantie contre les défaillances d'entreprises d'assurances de personnes] », et que « le président du directoire est également entendu, à sa demande », par la commission ;

- l'article L. 421-9-3 (nouveau) du même code dans sa rédaction proposée par l'article 57 du présent projet dispose que la commission de contrôle « entend le représentant du fonds de garantie [des assurances obligatoires de dommages] pour toute question concernant une entreprise d'assurance » et que « le fonds est également entendu, à sa demande, par la commission. » ;

- l'article L. 431-4 du code de la mutualité énonce : « La commission de contrôle mentionnée à l'article L. 510-1 [l'actuelle CCMIP] entend le président du directoire du fonds de garantie sur toute question concernant une mutuelle ou une union pour laquelle elle entend mettre en œuvre les dispositions [de garantie] ». Et le président de la CCMIP ou son représentant « peuvent, à leur demande, être entendus par le conseil de surveillance et le directoire » ;

- l'article L. 931-37 du code de la sécurité sociale dispose que préalablement à sa décision de recourir au fonds paritaire de garantie des institutions de prévoyance, la CCMIP « entend le président et le vice-président du fonds de garantie », et que le président de la commission ou son représentant « peuvent, à leur demande, être entendus par le conseil d'administration du fonds ».

Pour les autres fonds susmentionnés, une telle procédure n'est pas prévue expressément. Dans les faits, la logique suffit à comprendre, sans qu'il soit besoin de le prévoir explicitement dans la loi, que les fonds de garantie visés par les dispositions du présent paragraphe I ne sont que celui des assurances de personnes, celui des assurances obligatoires de dommages, celui des mutuelles et celui des institutions de prévoyance ; en effet, seuls ces quatre fonds ont vocation à intervenir en cas de défaillance d'organismes soumis au contrôle, et sont donc concernés par les questions de solvabilité desdits organismes, tandis que les autres fonds précités interviennent en cas d'absence d'assurance.

Outre l'aspect pratique consistant à insérer de telles dispositions dans cette section du code, votre Rapporteur approuve la formulation générale adoptée, qui couvre tous les fonds de garantie, existants ou à venir.

- paragraphe II (article L. 310-13 du code des assurances) : les moyens humains à la disposition de la CCAMIP

Le supprime la restriction inutilement posée dans l'actuelle rédaction du code des assurances quant au recours de la CCA aux membres de l'IGAS, mis à sa disposition « en tant que de besoin ». Cette suppression est motivée par l'extension du champ du contrôle de la commission aux mutuelles et institutions de prévoyance : ces organismes exercent leur activité dans des domaines et selon des principes que l'IGAS a, davantage que les commissaires contrôleurs des assurances, l'habitude d'appréhender.

Les dispositions correspondantes de l'article L. 951-4 du code de la sécurité sociale sont supprimées à l'article 29 du présent projet de loi.

Il reste que l'IGAS ne peut, compte tenu de l'ampleur de ses missions et du nombre relativement faible d'inspecteurs, ramené au nombre d'organismes à contrôler, effectuer, selon les informations recueillies par votre Rapporteur, qu'un à deux contrôles par an. Ce qui, une fois encore, milite pour un accroissement des moyens financiers de la CCAMIP pour la mettre en mesure d'accroître substantiellement ses moyens en personnel.

Le introduit deux alinéas destinés à préciser la composition du personnel de la CCAMIP. Trois catégories d'agents sont mentionnées :

- des fonctionnaires ;

- des agents contractuels de droit public ;

- à titre subsidiaire, « toute personne compétente dans le cadre de conventions établies à cet effet par [le] secrétariat général ».

À l'heure actuelle, les emplois budgétaires figurant dans les annexes au projet de loi de finances pour 2003 font apparaître les emplois budgétaires suivants :

- 152 emplois pour la CCA, dont 14 cadres A de la fonction publique, commissaires contrôleurs chefs de brigade du contrôle des assurances, ayant tous par ailleurs des compétences d'actuaires - sur lesquels 5 agents, dont un contractuel, sont mis à disposition par d'autres directions du ministère. Les cadres B sont au nombre de 30 (pour un effectif budgétaire de 33) et les cadres C, 40 ;

- 13 emplois pour la CCMIP, dont 1 cadre A titulaire, 1 cadre A mis à disposition par l'IGAS, 6 agents contractuels hors catégorie et 3 commissaires contrôleurs des assurances.

À titre de comparaison, la Commission bancaire emploie actuellement quelque 600 personnes, dont 160 inspecteurs de la Banque de France, et la COB 250 agents.

L'élargissement du champ de recrutement serait une novation importante si le texte était adopté en l'état, puisque seule la CCMIP recourt aujourd'hui de façon « habituelle » à des agents contractuels de droit public, et qu'aucune des deux actuelles commissions de contrôle ne peut recruter, même pour des missions ponctuelles, en dehors de ces catégories d'emploi aux règles contraignantes. Votre Rapporteur se réjouit par conséquent de la formulation équilibrée proposée par le présent paragraphe : le maintien d'une garantie statutaire pour les personnels de la CCAMIP proprement dits, assorti d'une marge de liberté offerte au secrétaire général qui dispose de la base juridique adéquate pour s'attacher, par convention, les services d'un expert. Cette formulation vise à permettre d'intégrer dans la future commission des personnels issus d'autres autorités de contrôle (Commission bancaire, AMF), par analogie avec les dispositions de l'article L. 613-7 du code monétaire et financier relatif à la Commission bancaire.

- paragraphe III (article L. 310-14 du code des assurances) : pouvoir de recevoir communication de documents ; coordination

L'article L. 310-14 prévoit que la commission de contrôle peut demander « toutes informations nécessaires à l'exercice de sa mission » aux entreprises et intermédiaires d'assurance soumis à son contrôle. En particulier, elle peut demander communication de tout document comptable, ainsi que des rapports des commissaires aux comptes. Elle vérifie également que « les publications auxquelles sont astreintes » les entreprises d'assurance, comme par exemple les rapports de solvabilité ou les expertises immobilières des terrains et constructions inscrits au bilan de ces entreprises, sont régulièrement effectuées.

Il a paru utile d'ajouter, au , un alinéa visant les « documents à caractère contractuel ou publicitaire », dont la commission « peut exiger la modification ou décider le retrait », tout en respectant, dans cette procédure, le contradictoire - le texte proposé n'étant peut-être pas assez précis sur ce dernier point. Une telle préoccupation de protection des assurés est louable, et elle établit au profit de la CCAMIP une compétence qui n'existe aujourd'hui qu'au profit de la CCMIP, en vertu de l'article L. 951-5 du code de la sécurité sociale.

Cependant, cette modification n'entraîne pas la modification de l'article L. 310-8 du code des assurances, qui continue de confier cette compétence, pour les entreprises d'assurance, au ministre chargé de l'économie, après avis de la commission de contrôle, ou sans cet avis, en cas d'urgence.

Le , disposition de conséquence, supprime, à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 310-14, la procédure de coopération entre la CCA et la CCMIP pour l'obtention par celle-là auprès de celle-ci des informations nécessaires à l'exercice de la « surveillance complémentaire » de la situation financière de mutuelles ou d'institutions de prévoyance. Cette surveillance complémentaire vise les entreprises ou organismes faisant partie d'un groupe ou apparentés à un autre organisme assureur.

- paragraphe IV (article L. 310-15 du code des assurances) : pouvoir de vérification de la situation financière ; coordination

Le supprime, comme le 2° ci-dessus, la compétence exclusive de la CCMIP lors de l'extension à une mutuelle ou une institution de prévoyance d'un contrôle sur place portant sur une entreprise d'assurance.

Le ajoute deux alinéas. Le premier inscrit, pour coordination, dans le code des assurances, les références à la « surveillance complémentaire » figurant dans les autres codes qui régissent des organismes soumis au contrôle sur place de la nouvelle CCAMIP : l'article L. 212-7-2 du code de la mutualité et l'article L. 933-3 du code de la sécurité sociale. Le second alinéa nouveau prévoit la procédure applicable, d'ailleurs classique, en cas de vérification à effectuer dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen : une demande adressée aux autorités localement compétentes.

- paragraphes V et VI (articles L. 310-19 et L. 310-19-1 du code des assurances) : relations avec les commissaires aux comptes

Ces deux paragraphes conduisent en substance à un alignement des pouvoirs de la CCAMIP sur ceux de la Commission bancaire, s'agissant des relations entretenues avec les commissaires aux comptes des entreprises soumises au contrôle.

Le premier alinéa de l'article L. 310-19, après lequel le paragraphe V insère deux alinéas, dispose que la commission de contrôle peut demander aux commissaires aux comptes de ces entreprises, alors déliés du secret professionnel, « tout renseignement sur l'activité de l'organisme contrôlé ». Les deux alinéas nouveaux prévoient la transmission éventuelle d'informations en sens inverse, de la commission vers les commissaires : d'une part « les informations nécessaires à l'accomplissement de [la] mission [des commissaires aux comptes] », couvertes par le secret professionnel, et d'autre part, « des observations écrites », les commissaires aux comptes étant alors « tenus d'apporter des réponses en cette forme ».

Il n'est pas précisé si les commissaires peuvent s'adresser à la CCAMIP pour lui demander des informations dont ils auraient besoin.

Ces dispositions viendraient compléter des obligations déjà très strictes pesant sur les commissaires aux comptes, tenus en vertu des alinéas suivants de l'article L. 310-19 de signaler « dans les meilleurs délais » à la commission de contrôle tous faits ou décisions entachant d'irrégularité des comptes soumis à leur examen ou faisant craindre une dégradation financière. La commission dispose même - comme le prévoit l'article L. 310-19-1 -, pour faire respecter ces dispositions, du pouvoir de demander au tribunal compétent de relever de ses fonctions le commissaire aux comptes contrevenant, ou de dénoncer l'infraction qu'il aurait commise à l'autorité disciplinaire compétente.

De telles mesures pourraient donc, le cas échéant, être mises en œuvre à l'encontre d'un commissaire aux comptes qui aurait omis de répondre par écrit à des observations écrites de la CCAMIP.

Le paragraphe VI propose de renforcer encore les prérogatives de la CCAMIP à l'égard des commissaires aux comptes, puisque « toute proposition de désignation ou de renouvellement du mandat des commissaires aux comptes dans les organismes soumis à son contrôle » lui serait soumise pour avis, la commission pouvant également, « lorsque la situation le justifie, procéder à la désignation d'un commissaire aux comptes supplémentaire ». Là encore, il s'agit de doter la CCAMIP de pouvoirs similaires à ceux dont la Commission bancaire dispose en vertu de l'article L. 511-38 du code monétaire et financier. Votre Rapporteur mesure bien l'importance pratique de ce pouvoir de passer outre le mauvais vouloir d'une entreprise, même si les conditions de désignation d'office d'un commissaire aux comptes sont sans doute à préciser dans un décret.

Tout en souscrivant à un tel renforcement des pouvoirs de contrôle de la commission, votre Rapporteur s'étonne que la logique de cohérence entre codes différents, appliquée dans le reste du présent projet de loi au code des assurances, ne soit pas ici menée à son terme : les dispositions identiques à celles prévues par les paragraphes V et VI, lorsqu'elles s'appliquent aux mutuelles ou aux institutions de prévoyance, sont respectivement prévues (28) dans le code de la mutualité et dans celui de la sécurité sociale, de sorte que le lecteur du code des assurances peut croire que les pouvoirs détenus par la commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance à l'égard des commissaires aux comptes ne s'appliquent qu'aux entreprises d'assurance.

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Par coordination avec l'adoption à l'article 26 d'un nouveau régime des personnels de la CCAMIP, le Sénat a supprimé, par un amendement de la Commission des finances, l'alinéa ad hoc proposé par le 2° du II du présent article. Ne subsiste donc plus, à l'article L. 310-13 du code des assurances proposé, que la référence à la conclusion de conventions par le secrétaire général, ce qui présente l'avantage de bien distinguer ce type particulier de recrutement de la composition du personnel statutaire, définie dans un autre article du code.

Le Sénat a par ailleurs, à l'instigation de la Commission des finances, introduit un paragraphe VII (nouveau), avec l'accord du Gouvernement, qui insère dans le code des assurances, après l'article L. 310-20 relatif aux échanges d'informations entre toutes les autorités de contrôle du secteur économique et financier, un article L. 310-20-1 (nouveau). Cet article poursuit le but de la constitution d'une « base de données » portant sur la santé, la retraite et la prévoyance, par communication d'informations de la CCAMIP à l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Votre Rapporteur estime l'œuvre utile.

Il vous propose d'adopter, moyennant un amendement de forme, le présent article.

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Votre Commission, après avoir adopté un amendement rédactionnel de votre Rapporteur (amendement n° 109), a adopté cet article, ainsi modifié.

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Article 28

(articles L. 310-17, L. 310-18 à L. 310-18-2, L. 322-2-4, L. 323-1-1 et L. 323-1-2

du code des assurances)

Pouvoirs de sanction de la commission de contrôle et transposition de la directive « Solvabilité I »

Le présent article rénove, dans le code des assurances, les procédures de sanction dont dispose la commission de contrôle : d'une part par coordination avec l'élargissement des missions de la CCAMIP, et d'autre part pour prendre en compte la jurisprudence administrative faisant application de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

- paragraphe I (article L. 310-17 du code des assurances) : pouvoirs de recommandation

Suite à la décision Laurent du Conseil d'État en date du 28 octobre 2002 (29), il est apparu impossible de maintenir en l'état les procédures de mise en garde, d'injonction et de sanction existant au bénéfice de la CCA. En effet, estimant que « la commission de contrôle des assurances doit être regardée comme un tribunal au sens des stipulations de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, auquel s'impose l'exigence d'impartialité, laquelle s'apprécie objectivement », le Conseil a annulé une sanction prononcée par la Commission, après avoir constaté que « le président de la commission de contrôle des assurances a ainsi pris nettement position sur le non-respect, par les entreprises en cause, des obligations légales de solvabilité et sur d'autres comportements fautifs [du requérant], avant que la commission ne délibère, sous sa présidence, et ne prononce la sanction susmentionnée ; que, dans ces conditions, l'exigence d'impartialité doit être regardée comme ayant été méconnue par la commission ; que la décision du 21 avril 2000 doit par suite être annulée ».

En conséquence, l'article L. 310-17, dans la rédaction proposée ne comporte plus la référence à une infraction commise par une entreprise soumise au contrôle, et qui justifierait une mise en garde de la commission, ni la référence à une injonction adressée par elle : ces procédures s'apparenteraient en effet à un « pré-jugement » de la part du « tribunal » qui aurait ultérieurement à prononcer une sanction administrative. En lieu et place de ces dispositions, est prévue la possibilité pour la commission d'adresser une « recommandation », assortie d'une obligation, pour l'organisme ou la personne ainsi visés, « de répondre dans un délai de deux mois ». C'est ce même pouvoir de recommandation que prévoit l'article L. 613-16 du code monétaire et financier pour la Commission bancaire. À l'heure actuelle, la CCA fixe elle-même le délai dont elle assortit ses injonctions.

Votre Rapporteur note que cette rédaction, appelée à figurer dans le code des assurances, utilise le mot « organisme » qui englobe aussi bien les mutuelles et les institutions de prévoyance ; les dispositions de coordination de l'article 29 reprennent, mot pour mot, cette formulation dans chacun des deux autres codes - sécurité sociale et mutualité.

- paragraphe II (article L. 310-18 du code des assurances) : pouvoirs de sanction

Ce paragraphe récrit l'article L. 310-18 en y concentrant tous les pouvoirs de sanction de la CCAMIP, ainsi que, au , leur champ d'application qui est appelé à inclure les sociétés de groupe d'assurance et les entreprises de réassurance, pour lesquelles, respectivement, les actuels articles L. 310-18-1 et L. 310-18-2 prévoient les diverses procédures coercitives applicables.

Les sociétés de groupe d'assurance définies à l'article L. 322-1-2 du code des assurances sont des entreprises dont l'activité principale consiste à prendre des participations dans des entreprises d'assurance ou de réassurance françaises ou étrangères, ou à nouer des liens financiers importants avec de telles entreprises ou avec des mutuelles ou des institutions de prévoyance, pourvu que l'un au moins de ces organismes soit une entreprise d'assurance ayant son siège social en France

En outre, le 1° inclut au nombre des motifs de sanction, en sus des actuelles infractions au droit en vigueur, les « pratiques qui mettent en péril [la] marge de solvabilité » d'une entreprise, d'une part, et « l'exécution des engagements qu'elle a contractés envers les assurés, adhérents ou ayants droit » d'autre part, formulation de nature à renforcer l'aspect « qualitatif » du contrôle et la protection des assurés.

Le texte ne modifie qu'à la marge la gamme des sanctions disciplinaires, qui est aujourd'hui la suivante :

« 1° l'avertissement ;

« 2° le blâme ;

« 3° l'interdiction d'effectuer certaines opérations et toutes autres limitations dans l'exercice de l'activité ;

« 4° la suspension temporaire d'un ou plusieurs dirigeants de l'entreprise ;

« 4° bis la démission d'office d'un ou plusieurs dirigeants de l'entreprise ;

« 5° le retrait total ou partiel d'agrément ;

« 6° le transfert d'office de tout ou partie du portefeuille des contrats. »

Pour coordination, le du présent paragraphe ajoute au 5° ci-dessus le retrait total ou partiel d'autorisation, terme qui vise les activités de réassurance.

Le régime des sanctions pécuniaires prévu au même article n'est pas modifié pour les entreprises d'assurance. Pouvant être prononcée « soit à la place, soit en sus » des sanctions disciplinaires, une sanction pécuniaire doit correspondre à un montant qui soit « fonction de la gravité des manquements commis, sans pouvoir excéder 3 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos calculé sur une période de douze mois. Ce maximum est porté à 5 % en cas de nouvelle violation de la même obligation. »

Le procède, en conséquence de la réécriture de l'article L. 310-17 qui ne comprend plus de procédure d'injonction, à l'abrogation de l'alinéa qui prévoit actuellement l'application de la même gamme de sanctions à l'entreprise qui n'aurait pas déféré à l'injonction de la commission. À cet alinéa se substituerait la modalité de procédure suivante : « La commission de contrôle peut décider de reporter sa décision à l'issue d'un délai qu'elle impartit à l'entreprise, pour prendre toute mesure de nature à mettre fin aux manquements ou pratiques mentionnés au premier alinéa. » Cette formulation est celle qui s'applique actuellement en matière d'injonction ; la logique suivie par le présent projet de loi consiste donc à intégrer, sans la nommer désormais, la procédure d'injonction dans la procédure de sanction, en écartant ainsi la critique liée à la notion de « pré-jugement », puisque dès le stade du constat d'un quelconque manquement, c'est une seule et même procédure de sanction qui se déroulerait, éventuellement en plusieurs étapes, l'une d'elle pouvant consister en un sursis : un délai imparti à l'entreprise fautive pour prendre des mesures correctrices.

Le propose un nouvel alinéa visant à préciser les modalités d'application de la sanction pécuniaire aux sociétés de groupe d'assurance. Pour ces sociétés, la sanction pécuniaire est ainsi calculée : son montant maximum « est défini par référence au chiffre d'affaires de celle des entreprises d'assurance incluses par intégration globale dans la consolidation ou la combinaison dont le total de primes émises au cours du dernier exercice clos est le plus élevé », solution qui ne fait qu'inscrire dans l'article L. 310-18 des dispositions figurant actuellement à l'article L. 310-18-1 que le paragraphe VI propose de supprimer par souci de simplification.

Le est simplement une meilleure rédaction du onzième alinéa de l'article L. 310-18, qui, en outre, prend en compte la nouvelle dénomination de la commission de contrôle. Cet alinéa précise les droits de la défense dans le cadre de la procédure de sanction : respect du contradictoire, information des personnes mises en cause, possibilité pour ces personnes de se faire assister ou représenter. Peut-être conviendrait-il toutefois, dans la rédaction proposée, de préciser que « les intéressés » sont les personnes visées par une procédure de sanction.

Cet article n'épuise pas les possibilités d'action coercitive de la commission de contrôle. Le code des assurances, comme d'ailleurs le code de la sécurité sociale et le code de la mutualité, prévoient :

- la transmission d'informations aux autorités homologues d'autres pays ;

- l'information du ministre chargé de l'économie et des finances en cas de découverte de pratiques anticoncurrentielles ;

- des peines d'amende et d'emprisonnement en cas d'entrave au contrôle de la commission (la mise en cause de la responsabilité pénale d'une personne morale est également prévue) ;

- la saisine par la commission du procureur de la République lorsqu'elle relève des faits de nature à justifier des poursuites pénales.

Enfin, l'exercice des voies de recours demeure inchangé : « les personnes sanctionnées peuvent, dans le délai de deux mois qui suit la notification de la décision, former un recours de pleine juridiction devant le Conseil d'État. »

À titre d'information, votre Rapporteur croit utile d'indiquer, dans l'encadré suivant, l'activité de contrôle récemment exercée par les actuelles commissions :

1.- La CCA

Dans son rapport 2000-2001 précité, la CCA indique qu'au titre des mesures d'urgence et de sauvegarde, la commission a placé deux sociétés d'assurance sous surveillance spéciale, demandé à une entreprise de soumettre un programme de rétablissement financier, désigné trois administrateurs provisoires, suspendu deux opérations, prononcé trois injonctions, et transmis trois dossiers au procureur de la République.

Au titre des sanctions disciplinaires et pécuniaires, la commission a ouvert 11 procédures. Elle a infligé un blâme assorti d'une sanction pécuniaire, deux avertissements assortis d'une sanction pécuniaire, prononcé trois transferts d'office, et retiré quatre agréments.

2.- La CCMIP

Sur les dix dernières années, la commission a examiné 70 rapports, donnant lieu à 35 lettres d'observation, 30 injonctions, 10 administrations provisoires, 3 sanctions disciplinaires, 3 signalements de commissaires aux comptes à leur compagnie régionale et 8 saisines du procureur de la République.

Le secrétariat général a en outre reçu, sur dix ans, près de 300 rapports de contrôle effectués par les DRASS dans le cadre du contrôle déconcentré.

- paragraphe III (article L. 322-2-4 du code des assurances) : extension de l'obligation d'établir un rapport de solvabilité

Le rapport de solvabilité, selon les termes du 1er alinéa de l'article L. 322-2-4 (30), « expose [par écrit] les conditions dans lesquelles l'entreprise garantit, par la constitution des provisions techniques suffisantes dont les modalités de calcul et les hypothèses retenues sont explicitées et justifiées, les engagements qu'elle prend à l'égard des assurés, rappelle les orientations définies en matière de placements, présente et analyse les résultats obtenus et indique si la marge de solvabilité est constituée conformément à la réglementation applicable. Le rapport de solvabilité contient obligatoirement une analyse des conditions dans lesquelles l'entreprise est en mesure, à moyen et long terme, de faire face à l'ensemble de ses engagements. »

Le présent paragraphe propose d'étendre l'obligation d'écrire un tel rapport aux entreprises de réassurance et aux succursales des entreprises étrangères ayant leur siège social dans un État non membre de l'Union européenne. Parmi celles-ci, les entreprises dont le siège social est établi hors de l'Espace économique européen devraient, pour leurs succursales françaises, faire établir un rapport de solvabilité par « le mandataire général représentant la société », formule classique du droit des sociétés.

Par mégarde, les auteurs du présent projet de loi, en précisant ainsi le champ d'application de cet article, ont omis d'y inclure expressément les entreprises françaises.

Le dernier alinéa de l'article L. 322-2-4 modifié - qui devrait par ailleurs viser le « premier alinéa » et non le « précédent alinéa », ce que le présent paragraphe oublie de prévoir -, indique que le rapport de solvabilité est transmis aux commissaires aux comptes et à la CCA. Votre Rapporteur s'interroge sur le point de savoir comment les rapports de solvabilité établis par des succursales d'entreprises étrangères pourraient être transmis aux commissaires aux comptes : de quels commissaires s'agirait-il ? ceux de la succursale ou ceux de la société mère ? En tout état de cause, le deuxième alinéa de l'article L. 310-7 du code des assurances prévoit un décret dont le champ permet le règlement de cette question.

- paragraphes IV et V (articles L. 323-1-1 et L. 323-1-2 du code des assurances) : procédures de redressement et transposition des directives « solvabilité I »

Ces deux paragraphes modifient le chapitre III du titre II du livre III du code des assurances, consacré aux procédures de redressement et de sauvegarde que met en œuvre la commission de contrôle en cas de risque de défaillance d'une entreprise d'assurance ou de réassurance.

Le 1° du IV étend les cas d'intervention en urgence de la commission de contrôle à tout « organisme contrôlé par la commission de contrôle en vertu de l'article L. 310-12 », et non plus aux seules entreprises d'assurance. En conséquence, la surveillance exercée par la commission ne vise plus uniquement la « situation financière » de l'organisme contrôlé mais également « ses conditions de fonctionnement », et la « sauvegarde de l'intérêt des assurés » est étendue aux « membres et ayants droit ».

À nouveau, votre Rapporteur renvoie à son commentaire de l'article 29 pour une critique de la cohérence de l'articulation entre les trois codes modifiés par la présente section du projet de loi. En effet, à partir du deuxième alinéa de l'article L. 323-1-1 modifié, il n'est plus question que de « l'entreprise », c'est-à-dire, implicitement, du seul secteur de l'assurance. De même, le présent paragraphe IV ne mentionne plus que « l'entreprise », à partir du . C'est à l'article 29 que se trouvent des dispositions de coordination dans les autres codes.

Le procède à la transposition en droit interne des directives dites « Solvabilité I », savoir les directives 2002/12/CE et 2002/13/CE, respectivement pour les assurances vie et « non-vie », toutes deux datées du 5 mars 2002. Ces directives améliorent les dispositions régissant le calcul de l'exigence de solvabilité des entreprises d'assurance. Les exigences instaurées en 1973 et 1979 étaient demeurées inchangées pour l'essentiel. En particulier, les directives « Solvabilité I » introduisent l'obligation de satisfaire aux besoins de marge à tout moment, et non seulement à la date du dernier bilan. La date limite de transposition est fixée au 20 septembre 2003. Par ailleurs, l'exercice « Solvabilité II » est déjà en cours, dans le sens d'une meilleure prise en compte des caractéristiques de chaque type d'entreprise d'assurance.

L'éventail actuel des possibilités d'action de la commission de contrôle, dont les modalités d'application relèvent d'un décret en Conseil d'État, est déjà large, concernant l'examen de la situation des entreprises sous l'angle prudentiel :

- les mesures d'urgence nécessaires à la sauvegarde des intérêts des assurés ;

- la mise sous « surveillance spéciale », expression désignant un suivi particulièrement étroit et contraignant ;

- la possibilité de restreindre ou d'interdire la libre disposition de tout ou partie des actifs ;

- la limitation ou la suspension de certaines opérations ;

- la désignation d'un administrateur provisoire, notamment - mais pas seulement - lorsque les dirigeants ont été suspendus.

S'y ajouterait dorénavant, en application des directives susvisées, une procédure particulière destinée à préserver ou à rétablir la solvabilité de l'entreprise contrôlée, en vertu de laquelle « la commission de contrôle [pourrait] exiger de l'entreprise une marge de solvabilité plus importante que celle prescrite par la réglementation afin que l'entreprise soit rapidement en mesure de satisfaire à l'ensemble des exigences de solvabilité », le niveau de cette marge de solvabilité plus importante étant déterminé par décret en Conseil d'État. De surcroît, le texte propose un second point qui donne le pouvoir à la commission, « par entreprise, [de] revoir à la baisse les éléments admis à constituer la marge de solvabilité ». Ces dispositions plutôt absconses, et d'aspect assez peu juridique, sont littéralement reprises des directives précitées (31).

Le V modifie l'article suivant du code des assurances, qui s'applique aux entreprises de réassurance en reprenant quasiment la lettre - de l'article applicable aux entreprises d'assurance. Par volonté de simplification, le - entaché d'une légère erreur de rédaction - renvoie à l'article précédent du code pour la liste des mesures que peut prendre la commission de contrôle, et le abroge les deux alinéas qui, de façon redondante, listent ces mesures.

Votre Rapporteur estime toutefois que l'on peut simplifier davantage encore en supprimant cet article L. 323-1-2 du code. En effet, il devient inutile, puisque les entreprises de réassurance qu'il vise sont déjà couvertes par la nouvelle rédaction de l'article L. 323-1-1 qui mentionne les organismes contrôlés « en vertu de l'article L. 310-12 », lequel, tel que rédigé par le présent projet de loi, fait référence auxdites entreprises de réassurance.

- paragraphe VI (articles L. 310-18-1 et L. 310-18-2 du code des assurances) : dispositions d'abrogation, de conséquence

Le présent paragraphe simplifie le code des assurances en conséquence de la nouvelle rédaction de l'article L. 310-18 prévue au 1° du II : en intégrant les sociétés de groupe d'assurance et les entreprises de réassurance dans le champ de l'article L. 310-18, les articles L. 310-18-1 et L. 310-18-2, qui visent respectivement ces deux catégories, deviennent inutiles.

Par ailleurs, une « disposition-balai » prévoit la substitution dans l'ensemble du code des assurances de la référence « L. 310-18 » aux références aux deux articles qui seraient abrogés.

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La modification apportée au 1° du III par un amendement de la commission des finances du Sénat pour inclure les entreprises françaises malencontreusement écartées de l'obligation de produire un rapport de solvabilité ne vise peut-être pas la bonne référence : en mentionnant l'article L. 310-1, le Sénat touche des activités d'assurance, alors qu'il devrait plutôt être question de champ géographique. Ainsi, c'est la référence au 1° de l'article L. 310-2 qui paraît plus appropriée à votre Rapporteur.

Au 2° du IV, le Sénat a modifié, sur la proposition de sa commission des finances, la rédaction initiale, en posant que l'exigence supplémentaire de marge de solvabilité devait être déterminée non « par décret en Conseil d'État », mais « selon des modalités définies par décret en Conseil d'État ». Or, selon votre Rapporteur, il y a bien une différence entre la détermination du niveau d'une marge, détermination qui doit être exacte, et les moyens par lesquels il s'agit de trier entre des éléments censés constituer une telle marge : d'un côté il s'agit de fixer un seuil - qui n'a pas besoin d'être chiffré, mais peut être un ratio par exemple -, de l'autre il s'agit de définir les éléments auxquels s'applique ce seuil. La rédaction initiale établissait donc de façon pertinente une distinction entre les deux opérations, qui ne sont pas de même nature. Sans quoi il n'y aurait pas grand sens à prévoir deux alinéas distincts. C'est pourquoi votre Rapporteur s'interroge sur la nécessité de rétablir la rédaction initiale, même si cette question est secondaire face à la mauvaise qualité de la norme communautaire à intégrer dans notre législation.

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Votre Commission, après avoir successivement adopté cinq amendements de rédaction (amendement n° 110), de précision (amendements nos 111 et 114), de coordination (amendement n° 112) ou bien de conséquence (amendement n° 113) de votre Rapporteur, a adopté cet article, ainsi modifié.

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Article 29

(articles L. 931-18, L. 951-1 à L. 951-4, L. 951-6, L. 951-6-1, L. 951-7, L. 951-9, L. 951-10 et L. 951-12 du code de la sécurité sociale, articles L. 510-1 à L. 510-3, L. 510-6 à L. 510-9 et L. 510-11 du code de la mutualité)

Modifications pour coordination du code de la sécurité sociale
et du code de la mutualité

Le présent article contient des dispositions de coordination entre le code de la sécurité sociale et le code de la mutualité d'une part, et le code des assurances modifié par les articles 26 à 28, d'autre part.

À cet égard, votre Rapporteur ne peut que critiquer la logique suivie dans la présente section, qui n'est pas cohérente avec le reste du texte. En effet, dans les articles 21 à 24 par exemple, prévaut la logique dite du « code pilote » et des « codes suiveurs » : lorsque des dispositions identiques doivent figurer dans plusieurs codes différents, le ou les « code(s) suiveur(s) » reproduisent le texte du « code pilote » assorti du numéro qu'il porte dans ledit code. Ainsi, toute modification du « code pilote » est automatiquement répercutée dans le ou les « code(s) suiveur(s) », et aucune modification unilatérale d'un seul des codes n'est possible, ce qui est un élément indispensable de sécurité juridique. En outre, le lecteur d'un seul des codes concernés a sous les yeux l'intégralité des dispositions applicables, ce qui ne serait pas le cas si un « code suiveur » se contentait de renvoyer à un article du « code pilote » sans le reproduire.

En revanche, dans la présente section 4 du projet de loi, le choix a été fait par le Gouvernement de ne pas suivre une telle logique. Votre Rapporteur constate ainsi que cette section oscille, selon les articles, entre l'application du code des assurances aux seules entreprises d'assurance et de réassurance - en recopiant, le cas échéant, des dispositions similaires ou identiques dans l'un et/ou l'autre des deux autres codes modifiés -, et son application à l'ensemble formé par les assurances, mutuelles et institutions de prévoyance en tant qu'elles effectuent des opérations d'assurance.

Neuf cas de figure se présentent.

- Cas n° 1 : la modification des trois codes en termes quasi identiques, sans renvoi de l'un à l'autre (exemple : les dispositions permettant à la CCAMIP de revoir à la baisse les éléments constituant la marge de solvabilité, pour les entreprises ou les organismes).

- Cas n° 2 : la modification du code des assurances avec renvoi à celui-ci du code de la mutualité et du code de la sécurité sociale (exemple : la composition de la CCAMIP).

- Cas n° 3 : la modification parallèle du code des assurances et du code de la sécurité sociale, le code de la mutualité renvoyant à ce dernier (exemple : le personnel auquel il peut être fait appel pour le contrôle sur pièces et sur place, les modifications au code des assurances entraînant la modification du code de la sécurité sociale, le code de la mutualité continuant, quant à lui, à renvoyer au code de la sécurité sociale modifié).

- Cas n° 4 : la modification parallèle du code des assurances et du code de la sécurité sociale, le code de la mutualité étant déjà « à jour » (exemple : la surveillance concomitante de la situation financière et des conditions de fonctionnement des entreprises ou organismes).

- Cas n° 5 : la modification du seul code la sécurité sociale pour l'aligner sur les deux autres codes (exemple : l'inclusion de la démission d'office parmi les sanctions disciplinaires).

- Cas n° 6 : la modification parallèle du code des assurances et du code de la sécurité sociale, le code de la mutualité restant muet (exemple : la mention plus ou moins exhaustive des catégories d'organismes ou de personnes concernés par le contrôle).

- Cas n° 7 : la modification parallèle du code de la sécurité sociale et du code la mutualité, le code des assurances prévoyant un régime différent (exemple : le nombre d'administrateurs provisoires pouvant être désignés par la commission de contrôle).

- Cas n° 8 : l'existence de dispositions résiduelles qui demeurent applicables aux seules mutuelles et institutions de prévoyance, le code de la mutualité renvoyant alors au code de la sécurité sociale (exemple : assiette et modalités de recouvrement de la contribution pour frais de contrôle).

- Cas n° 9 : l'abrogation de dispositions devenues inutiles avec la fusion de la CCA et de la CCAMIP (exemple : la transmission d'informations entre les deux commissions ou la saisine de l'une par l'autre).

L'impression générale qui ressort de la lecture de la présente section du projet de loi est que, sans souscrire à la logique du « code pilote » et des « codes suiveurs », le texte s'en approche en s'attachant à faire du code des assurances une sorte de code inclusif, les codes de la sécurité sociale et de la mutualité étant des codes subsidiaires. L'exercice n'est cependant pas mené à son terme, puisque subsistent dans ces codes des particularités qui ne figurent pas dans le code inclusif... ce qui nuit à la cohérence de l'ensemble. Il semble par ailleurs que le texte fasse du code de la sécurité sociale un code « plus inclusif » que celui de la mutualité, qui devient « le plus subsidiaire » des trois codes. Dès lors, il convient sans doute de se résigner à la complexité de ce véritable écheveau, en souhaitant que la simplification accomplie dans le présent projet de loi ne soit bien qu'une étape.

- paragraphe I : modifications pour coordination du code la sécurité sociale

La mise à jour du code de la sécurité sociale nécessite davantage de modifications que celle du code de la mutualité, ce dernier ayant été entièrement réécrit par l'ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001. L'objet du présent paragraphe est donc double : la coordination avec le code des assurances modifié par le présent projet de loi d'une part, mais aussi la mise à niveau avec le nouveau code de la mutualité.

Le  modifie l'article L. 931-18 du code de la sécurité sociale, relatif au redressement et à la sauvegarde, par « la commission de contrôle instituée à l'article L. 951-1 » des institutions de prévoyance en difficulté. L'article L. 951-1 est modifié au 2° du I, de sorte que la référence à cet article demeure valable.

Le a, par coordination avec le 1° du IV de l'article 28 relatif au code des assurances, étend le champ de surveillance de la commission de contrôle aux conditions de fonctionnement des institutions de prévoyance, au-delà de la surveillance financière. Le code de la mutualité comprend déjà ce double aspect. Ces dispositions de coordination se rangent donc sous le « cas n° 4 » mentionné supra.

Le b propose, pour mieux garantir le redressement ou la sauvegarde de l'organisme, de permettre à la commission de contrôle de désigner « un ou plusieurs administrateurs provisoires » au lieu d'un seul à l'heure actuelle. Illustration du « cas n° 7 » visé supra, cette situation aboutit à faire coïncider le code de la sécurité sociale avec le code de la mutualité modifié, en l'espèce, par le 7° du II, le code des assurances continuant quant à lui à ne prévoir que la désignation d'un seul administrateur provisoire. Votre Rapporteur est partisan de rétablir la cohérence entre les trois codes sur ce point.

Le c correspond au « cas n° 1 » susvisé : pour transposer les directives « Solvabilité I » dans le code des assurances, il est prévu, presque mot pour mot, la même procédure d'exigence d'une certaine marge de solvabilité supplémentaire qu'au 2° du IV de l'article 28 pour les entreprises d'assurance. Un seul substantif diffère : l'emploi d'« organisme » au lieu d'« entreprise ».

Le  modifie l'article L. 951-1 du code de la sécurité sociale qui institue l'actuelle CCMIP en prévoyant son champ de contrôle et ses ressources.

Le a, en son premier alinéa, exemple du « cas n° 2 » susmentionné, renvoie au code des assurances en son article instituant la CCAMIP ; la composition de la commission ne figurerait donc plus dans le code de la sécurité sociale ; en outre, ce code ne mentionnerait qu'une partie du champ de compétences de la commission : les institutions de prévoyance, leurs unions et leurs groupements, y compris lorsqu'ils sont régis par le code rural. Le présent projet de loi prévoit pourtant de viser, dans le code des assurances, l'ensemble des organismes contenus dans le champ de contrôle de la CCAMIP, de quelque code qu'ils relèvent. Votre Rapporteur ne se satisfait pas de cette incohérence, même si juridiquement, la formulation retenue par le présent paragraphe est convenable.

Quant au maintien hors du champ du contrôle des « opérations de retraite complémentaire [...] faisant l'objet d'une compensation interprofessionnelle générale », il vise les régimes intégrés à la compensation AGIRC et ARRCO. Cette reproduction quasiment à l'identique de dispositions insérées dans le code des assurances par le 5° du I de l'article 26 se justifie par le fait que les opérations de retraite complémentaire en question sont soumises à des contrôles spécifiques.

L'alinéa suivant relève du « cas n° 4 » ; il propose d'inclure dans le champ du contrôle le courtage d'assurance ou la présentation d'opérations d'assurance, de même que le 3° du I de l'article 26 insère le contrôle de ces activités dans le code des assurances en ce qu'elles concernent les mutuelles et les institutions de prévoyance ; le code de la mutualité y pourvoit déjà dans son domaine (article L. 510-2).

Enfin, le dernier alinéa du a) correspond au « cas n° 8 » : il maintient, « pour les organismes soumis au contrôle de la commission de contrôle en vertu de l'article L. 510-1 du code de la mutualité et [les institutions de prévoyance], et par dérogation aux dispositions de l'article L. 310-12-3 du code des assurances », des modalités particulières pour la détermination de l'assiette et le recouvrement de la contribution pour frais de contrôle. En particulier, il n'est pas fait référence à la notion de « primes » dans la détermination de l'assiette - alors que le code des assurances modifié par le IV de l'article 26 intègre la notion de « cotisations » -, et le recouvrement est confié « aux organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général de sécurité sociale territorialement compétents », ou bien à « un autre de ces organismes », ou encore à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, ces deux dernières entités devant alors être désignées par arrêté ministériel.

Votre Rapporteur note que dans la nouvelle rédaction proposée pour le début de l'article L. 951-1, la CCMIP perd l'autonomie financière qui lui est aujourd'hui expressément garantie. L'octroi à la CCAMIP de la personnalité morale avec affectation de recette résoudrait le problème.

Le b supprime le taux de 0,05 0/00 attaché à la contribution censément perçue, aujourd'hui, auprès des mutuelles et institutions de prévoyance. Dans les faits, cette contribution, prévue par l'ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001, n'a encore jamais été recouvrée. Ces dispositions se rattachent au « cas n° 2 », puisque la fourchette de taux (0,05 à 0,15 0/00) ne figurerait plus que dans le code des assurances, l'article pertinent dudit code étant mentionné dans le code de la sécurité sociale, auquel renvoie, implicitement, le code de la mutualité.

Il est donc possible à ce stade de dresser le tableau des différentes caractéristiques de la contribution pour frais de contrôle telle que prévue dans le présent projet de loi :

CARACTÉRISTIQUES DE LA CONTRIBUTION POUR FRAIS DE CONTRÔLE

Sociétés d'assurance

Institutions de prévoyance

et mutuelles du livre II

Mutuelles du livre III

et institutions de retraite supplémentaire

Assiette

Cotisations émises et acceptées, entre le 1er janvier et le 31 décembre de chaque année, y compris les accessoires de cotisations et coût des contrats et règlements (1), nettes d'impôts, de cessions et d'annulations de l'exercice et de tous les exercices antérieurs, auxquelles s'ajoutent le total des cotisations acquises à l'exercice et non émises.

Cotisations encaissées entre le 1er janvier et le 31 décembre de chaque année.

Taux

Fixé par décret entre 0,05 et 0,15 0/00. (2)

Modalités de recouvrement

Par les comptables du trésor, comme en matière de créances non fiscales de l'État. (3)

Par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général de sécurité sociale territorialement compétents, dans les conditions fixées à l'article L. 951-1 du code de la sécurité sociale.

(1) Le code des assurances y ajoute les coûts de police.

(2) Le Sénat a prévu la possibilité d'un taux distinct pour les mutuelles du livre III.

(3) Le Sénat a prévu que s'appliquent les modalités de recouvrement des recettes des établissements publics administratifs de l'État.

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le  modifie l'article L. 951-2, relatif au « contenu » du contrôle des institutions de prévoyance : respect de la réglementation, solvabilité, capacité à exercer dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen.

Le a corrige la base juridique du contrôle, en remplaçant les « dispositions législatives et réglementaires qui leur sont propres » par celles qui leur sont « applicables » : la norme de référence est bien extérieure aux institutions de prévoyance, et elle s'impose à elles, sous le regard de la commission de contrôle (« cas n° 4 »).

Le b ajoute une référence aux « assurés » et aux « membres » dans les catégories au bénéfice desquelles s'effectue le contrôle : ces termes visent à prendre en compte l'ensemble des missions de la nouvelle CCAMIP, mais l'énoncé des organismes soumis au contrôle ne mentionne que les institutions de prévoyance et les organismes relevant du code rural... Il y a bien là une incohérence, d'autant que le code de la mutualité reste muet sur ce point, même si cette incohérence ne tire pas à conséquence (« cas n° 6 »).

L'alinéa suivant propose d'élargir le champ du contrôle aux « modalités de constitution et de fonctionnement des organes délibérants et dirigeants ». Il s'agit en l'espèce d'un « cas n° 1 », la modification dans les mêmes termes des trois codes sans renvoi de l'un à l'autre : cf. le 1° du I de l'article 26 pour le code des assurances, et le 3° du II de l'article 29 pour le code de la mutualité.

Le c abroge une disposition relative à des échanges d'informations entre commissions de contrôle que la fusion de la CCA et de la CCMIP rendrait inutile (« cas n° 9 »).

Le , qui propose l'abrogation de l'article L. 951-3 du code de la sécurité sociale, est une illustration du « cas n° 2 » : il fait disparaître de ce code la composition de la commission de contrôle, celle-ci ne figurant alors que dans le code des assurances. Sur ce point important, peut-être conviendrait-il d'adopter une logique de « code pilote » et de « code suiveur », en reproduisant dans le code de la sécurité sociale - ainsi que dans le code de la mutualité - l'article L. 310-12-1 du code des assurances proposé par l'article 26 du présent projet de loi.

Le même 4° propose la suppression de l'alinéa de l'article L. 951-4 du code de la sécurité sociale, relatif aux personnels auxquels la commission de contrôle peut recourir. La reproduction de l'article pertinent du code des assurances permettrait de faire figurer dans tous les codes, de façon identique, les dispositions relatives au personnel de la CCAMIP.

Le  contient des dispositions de modification de l'article L. 951-6, relatif aux relations entre la commission de contrôle et les commissaires aux comptes des organismes soumis au contrôle.

Le a reprend terme à terme les modifications introduites par le V de l'article 27 dans le code des assurances et par le a du 4° du II de l'article 29 dans le code de la mutualité (« cas n° 1 »). Il s'agit de permettre à la commission de contrôle de transmettre des informations aux commissaires aux comptes, éventuellement par écrit - leur réponse devant alors être écrite. À l'heure actuelle, les codes ne régissent que les transferts d'information des commissaires aux comptes vers la commission.

Le b simplifie et élargit la base juridique rendant obligatoire le signalement des commissaires aux comptes à la commission de contrôle : il s'agirait dorénavant de la violation des « dispositions législatives et réglementaires [...] applicables », et non des « dispositions du chapitre Ier du titre III du livre IX ou du [titre V] », référence trop lourde et inutilement détaillée. La même simplification est proposée dans le code de la mutualité (b du 4° du II de l'article 29). Cette lourdeur a pourtant été conservée dans le code des assurances, à l'article L. 310-19 (« cas n° 7 »).

Le  est une application du « cas n° 1 » : le code des assurances (au VI de l'article 27) et le code de la mutualité (au c du 4° du II de l'article 29) sont modifiés de manière concomitante, quasiment mot pour mot, pour prévoir l'avis obligatoire de la commission de contrôle lors de la désignation ou du renouvellement des commissaires aux comptes, et la possibilité de la désignation d'un commissaire supplémentaire. Il s'agit de doter la CCAMIP de pouvoirs similaires à ceux de la Commission bancaire.

Le  propose la suppression d'une phrase relative à des échanges d'informations entre les actuelles CCA et CCMIP (« cas n° 9 »).

Le , illustration du « cas n° 1 », consiste en la reprise à l'identique des dispositions insérées dans le code des assurances par le I de l'article 28, et dans le code de la mutualité par le 6° du II de l'article 29 : il s'agit du pouvoir de « recommandation » de la commission de contrôle, qui se substitue à l'actuelle « mise en garde » éventuellement assortie d'une « injonction » (cfsupra le commentaire du I de l'article 28).

Toujours selon le principe de recopie quasi identique dans les trois codes, le  aligne la procédure de sanction entre assurances (cf. le II de l'article 28), mutuelles (cf. le 8° du II de l'article 29) et institutions de prévoyance.

La liste des sanctions était déjà parallèle entre CCA et CCMIP, à un détail près, que le b rectifie, en ajoutant à la liste établie à l'article L. 951-10 un 4° bis qui prévoit « la démission d'office d'un ou plusieurs dirigeants de l'institution de prévoyance ou de l'union » (« cas n° 5 »).

Le c propose l'insertion de trois alinéas après la liste des sanctions. Le premier d'entre eux, qui prévoit la possibilité d'un délai laissé à l'organisme faisant l'objet d'une procédure de sanction, constitue le pendant de l'alinéa introduit dans le code des assurances par le 3° du II de l'article 28, et de celui introduit dans le code de la mutualité par le b du 8° de l'article 29 (« cas n° 1 »). Les deux autres alinéas concernent les sanctions pécuniaires que peut prononcer la commission de contrôle. La modification est ici symétrique dans le code de la sécurité sociale et dans le code de la mutualité, qui reproduit à l'identique les dispositions applicables aux institutions de prévoyance. Le parallélisme se poursuit concernant le cas des groupes, qu'il s'agisse des « sociétés de groupe d'assurance », des « unions » ou des « groupements ». Le principe est que le montant maximum de la sanction pécuniaire est calculé par rapport au chiffre d'affaires ou aux cotisations de la « tête de groupe ».

Le a du 10° supprime un alinéa relatif à la coopération entre les actuelles CCA et CCMIP (« cas n° 9 »).

Le b corrige le nom de la commission de contrôle au sein de l'article qui prévoit, en cas de mise en œuvre de la « surveillance complémentaire », c'est-à-dire la surveillance financière d'un organisme apparenté à l'institution contrôlée, des échanges d'informations entre autorités de contrôle et fonds de garantie du secteur bancaire et financier (« cas n° 6 » : le code des assurances [article L. 310-20] et le code de la sécurité sociale sont coordonnés, le code de la mutualité reste muet).

- paragraphe II : modifications pour coordination du code de la mutualité

Votre Rapporteur a déjà dit l'essentiel sur les modalités retenues dans la présente section du projet de loi pour coordonner les trois codes, et se concentrera donc à ce stade sur les spécificités résiduelles du code de la mutualité.

Le  substitue, au renvoi au code de la sécurité sociale, le renvoi au code des assurances pour les dispositions générales relatives à la CCAMIP.

Le  concerne la spécificité la plus importante du contrôle des mutuelles par rapport à celui des assurances ou des institutions de prévoyance. Reprenant le droit existant, le texte proposé indique que « par dérogation [au cas général], le contrôle des mutuelles et des unions est exercé au niveau régional par l'autorité administrative », à savoir les directions régionales de l'action sanitaire et sociale. Les conditions de mise en œuvre de cette dérogation sont les suivantes :

- « lorsque les mutuelles et les unions relèvent du livre III du [code de la mutualité] », c'est-à-dire pratiquent la prévention, l'action sociale ou la gestion de réalisations sanitaires et sociales, et non des activités d'assurance ;

- lorsqu'elles « ont souscrit une convention de substitution en application de l'article L. 211-5 » du code de la mutualité, substitution qui s'analyse comme une forme de « sous-traitance ». Ne sont ici visées que des mutuelles du livre II, pratiquant des opérations d'assurance et de capitalisation ;

- « lorsqu'elles ont contracté des engagements qui sont inférieurs à des seuils déterminés par arrêté conjoint du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé de la mutualité, pris après avis de la commission de contrôle ». Le droit actuel ne prévoit qu'un arrêté du ministre chargé de la mutualité.

L'alinéa suivant existe déjà tel quel à l'article L. 510-2, n'était la précision « du présent code » attachée à l'article L. 510-11. Sont donc maintenus le « pouvoir d'évocation » de la CCAMIP à l'égard des mutuelles et unions contrôlées à l'échelon régional, ainsi que la compétence exclusive de la commission de contrôle pour le prononcé de sanctions disciplinaires. Ce point est évidemment capital.

Votre Rapporteur s'étonne cependant que cette réécriture de l'article L. 510-2 supprime l'actuel dernier alinéa, relatif au contrôle des intermédiaires d'assurance pour les mutuelles du livre II du code de la mutualité. En effet, la modification du code des assurances prend en compte ces intermédiaires mais aucun renvoi n'y est prévu, même implicitement, sur ce point ; quant à la modification symétrique du code de la sécurité sociale, elle ne couvre que les organismes relevant dudit code. La suppression de cet alinéa n'est donc pas opportune.

Le  propose l'ajout, identique à celui opéré dans les deux autres codes, du contrôle des « modalités de constitution et de fonctionnement des organes dirigeants et délibérants ».

Le  vise à transcrire dans le code de la mutualité les dispositions supplémentaires insérées dans les deux autres codes pour renforcer les pouvoirs de la commission de contrôle à l'égard des commissaires aux comptes.

Le  abroge des dispositions relatives à l'échange d'informations entre CCA et CCMIP, que la création de la CCAMIP rendrait caduques.

Le  constitue le pendant du 8° du I de l'article 29 pour les institutions de prévoyance, et du I de l'article 28 pour les assurances : la mise en garde et l'injonction comme préliminaires à la sanction sont supprimées au profit de la recommandation. Il subsiste cependant à l'article L. 510-8 du code de la mutualité une procédure d'injonction, dans le cas particulier où, après transmission par un commissaire aux comptes d'un « rapport spécial » critiquant des concours financiers accordés par une mutuelle du livre II à une mutuelle du livre III. Cette procédure spécifique est distincte de la procédure de sanction mais le risque est réel qu'elle soit regardée comme contraire aux stipulations de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Votre Rapporteur propose donc un amendement sur ce point.

Le  modifie, dans le code de la mutualité, la procédure de sanction, de façon symétrique par rapport aux deux autres codes : la surveillance est élargie aux « conditions de fonctionnement » des mutuelles et de leurs unions, la commission de contrôle peut désigner, non plus un seul, mais un ou plusieurs administrateurs provisoires, et pour la transposition des directives « Solvabilité I », une exigence renforcée de marge de solvabilité est prévue.

L'article L. 510-10, non modifié, prévoit également la possibilité de désignation d'un ou de plusieurs administrateurs provisoires pour les « établissements et services gérés par des mutuelles ou des unions régies par le livre III ou, à titre accessoire, par des mutuelles relevant du livre II ».

Le  achève l'alignement de la procédure de sanction sur celle prévue dans les deux autres codes, en y intégrant l'étape de l'injonction qui perd cette dénomination critiquée, en prévoyant un sursis sous la forme d'un délai laissé à l'organisme contrôlé pour prendre des mesures correctrices, et en ajoutant à la liste des sanctions administratives les sanctions pécuniaires identiques à celles mentionnées au c du 9° du I de l'article 29 pour les institutions de prévoyance.

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Le Sénat a adopté, au du 1° du I et au c du 7° du II, deux amendements symétriques de coordination avec le 2° du IV de l'article 26, déposés par la commission des finances, et modifiant la rédaction proposée pour la transposition des directives « Solvabilité I » : le niveau de l'exigence supplémentaire de marge de solvabilité serait fixé non « par décret en Conseil d'État » mais « selon des modalités définies » par un tel décret.

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Votre Commission a adopté quatre amendements rédactionnels de votre Rapporteur (amendements nos 115, 116, 117 et 118).

Elle a ensuite examiné deux amendements de votre Rapporteur (amendements nos 119 et 125) visant, par symétrie à la solution proposée à l'article 26 du présent projet, pour les entreprises relevant du code des assurances, à transférer à la Commission de contrôle la compétence jusque-là dévolue au ministre concernant la notification obligatoire effectuée par les organismes et les mutuelles souhaitant ouvrir une succursale dans un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen. Votre Commission a adopté cet amendement.

Elle a également adopté deux amendements symétriques de votre Rapporteur (amendements nos 120 et 124), insérant respectivement dans le code de la sécurité sociale et dans le code de la mutualité l'article du code des assurances qui détermine la composition et l'organisation de la Commission, votre Rapporteur ayant insisté sur cette nécessaire clarification.

Votre Commission a ensuite adopté un amendement de conséquence (amendement n° 121) et un amendement (amendement n° 122) rectifiant une erreur rédactionnelle, présentés par votre Rapporteur.

Elle a ensuite adopté un amendement de coordination (amendement n° 123) de votre Rapporteur.

Votre Commission a également adopté un amendement de conséquence de votre Rapporteur (amendement n° 126), puis un amendement du même auteur (amendement n° 127) visant à supprimer une procédure d'injonction en contradiction avec les stipulations de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle a enfin adopté un amendement, rédactionnel, de votre Rapporteur (amendement n° 128).

Votre Commission a ensuite adopté l'article 29, ainsi modifié.

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Article 30

(article L. 613-3 du code monétaire et financier)

Coopération entre la Commission bancaire et la commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance

Le choix ayant été fait de ne pas fusionner les autorités de contrôle prudentiel du secteur des banques et du secteur des assurances, il convenait néanmoins de rapprocher la nouvelle CCAMIP de la Commission bancaire, première étape, peut-être, vers une future fusion. Votre Rapporteur rappelle pour mémoire qu'un projet de loi portant réforme des autorités financières, préparé sous la précédente législature sans être pour autant inscrit à l'ordre du jour parlementaire, prévoyait un rapprochement entre la CCA et la Commission bancaire via cinq membres communs aux deux commissions, et notamment la participation croisée de chaque président aux travaux de l'autre commission.

Le présent article, en modifiant l'article L. 613-3 du code monétaire et financier relatif à la composition de la Commission bancaire, pose dans la loi une coopération institutionnelle que l'actuelle CCA a déjà engagée avec la Commission bancaire, sur un mode plus informel.

- paragraphes I et II : coordination entre le code monétaire et financier et le code des assurances

Le I propose d'inscrire, au nombre des membres de la Commission bancaire, le président de la CCAMIP créée à l'article 26 du présent projet de loi. Il s'agit d'établir une symétrie avec le II de l'article 26 qui donne au Gouverneur de la Banque de France, président de la Commission bancaire, le statut de membre de la CCAMIP. Cette « participation croisée » est un élément important de la nouvelle architecture des autorités de contrôle. La composition de la Commission bancaire serait ainsi très proche de celle de la CCAMIP, quoiqu'un peu plus restreinte : outre les présidents précités, le directeur du Trésor ou son représentant, un conseiller d'État, un conseiller à la Cour de cassation et deux personnalités qualifiées, ainsi que quatre suppléants pour les quatre derniers membres mentionnés.

Ainsi qu'il a été indiqué supra, si le présent projet de loi demeurait en l'état, la mention de cette coopération ne serait faite en toutes lettres que dans le code monétaire et financier et dans le code des assurances, à l'exclusion du code de la sécurité sociale et du code de la mutualité.

Le II propose l'alignement du mandat des membres de la Commission bancaire, actuellement de six ans sans limitation quant au renouvellement, sur celui des membres de la CCAMIP, qui est de cinq ans et renouvelable une fois, cette durée étant également applicable à l'Autorité des marchés financiers. Cet alignement est de bon sens.

- paragraphe III : coopération institutionnelle entre la Commission bancaire et la CCAMIP

Le présent paragraphe prévoit, pour coordination avec les dispositions « miroir » de l'article L. 310-12-1 du code des assurances introduites par le dernier alinéa du II de l'article 26 du présent projet de loi, la réunion conjointe, « au moins deux fois par an », de la Commission bancaire et de la CCAMIP.

Cette consécration législative est à rapprocher de l'initiative qu'ont récemment prise les présidents des actuelles CCA et Commission bancaire, en signant le 24 octobre 2001 une Charte relative à la coopération en matière de contrôle et d'échange d'informations, approuvée par les membres des deux commissions.

Ensemble de considérations pratiques visant à organiser la coopération entre les secrétariats généraux des deux autorités de contrôle - échange d'informations, d'expérience, de personnels, organisation de programmes de formation initiale réciproques, mise en place de groupes de travail sur des questions d'intérêt commun -, ce texte et sa mise en œuvre ont donné jusqu'à présent toute satisfaction. C'est ainsi que les deux secrétariats généraux ont pu harmoniser leur position relative au phénomène des conglomérats financiers, effectuer des contrôles conjoints d'établissements de crédit possédant une filiale d'assurance, ou encore créer des groupes de travail sur l'assurance caution ou les dérivés de crédit. Votre Rapporteur estime qu'élever de tels échanges au niveau des collèges des deux commissions sera sans doute fructueux, mais qu'une volonté commune de leurs collèges respectifs doit suffire à effectuer un tel rapprochement. Il n'est nul besoin de prévoir, dans la loi, une obligation de réunion conjointe deux fois l'an. Un amendement tend donc à supprimer le présent III.

Votre Rapporteur s'interroge en outre sur l'articulation de ces dispositions nouvelles avec celles instituant un collège des autorités de contrôle des entreprises du secteur financier (article L. 631-2 du code monétaire et financier, introduit par la loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière). Il demeure toutefois convaincu que l'excès de coordination ne nuit pas.

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Pour que la symétrie entre Commission bancaire et CCAMIP soit parfaite, le Sénat a adopté un amendement de la commission des finances permettant au président de la CCAMIP de se faire représenter à la Commission bancaire, comme cela est prévu pour le président de la Commission bancaire au sein de la CCAMIP.

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Votre Commission a adopté un amendement de votre Rapporteur (amendement n° 129) supprimant l'obligation légale pour la CCAMIP et la Commission bancaire de se réunir conjointement deux fois l'an. Elle a ensuite adopté cet article, ainsi modifié.

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Voir la suite du rapport

N° 0807 - Rapport sur le projet de loi de sécurité financière (Sénat, 1ère lecture)(M. François Goulard)

1 () Si le projet de loi déposé par le Gouvernement précédent prévoyait l'existence d'une commission des sanctions, celle-ci était néanmoins composée de membres appartenant au collège plénier.

2 () La Cour va même jusqu'à relever que six membres du collège, dont son président, avaient pris part au délibéré lors des deux réunions, celle au cours de laquelle il a été décidé d'ouvrir une procédure et celle au cours de laquelle la sanction contestée a été prise.

3 () Il convient de noter que dans plusieurs dispositions de notre Constitution, par exemple à l'article 56 relatif à la composition du Conseil constitutionnel, le président de l'Assemblée nationale précède celui du Sénat.

4 () Le mode de désignation et de fonctionnement des « formations spécialisées » est déterminé par l'article 1-1-8 du règlement général du CMF. Il en existe deux, l'une pour les activité de taux et de change, l'autre pour les activités de conservation, de règlement et de livraison d'instruments financiers.

5 () Premier alinéa de l'article 1er de l'ordonnance du 28 septembre 1967

6 () Ce décret a modifié l'article 8-1 du décret du 3 janvier 1968, relatif à l'organisation administrative et financière de la COB.

7 () en 2001

8 () Qui est aussi le taux applicable aux impositions recouvrées par la direction générale des impôts (cf. article 1727 du code général des impôts)[Auteur(s)], "[Partie du livre (facultatif)]," [Titre du livre], [Éditeur/Traducteur (facultatif)], [Édition] éd., vol. [Volume] ([Date de l'original]; [Lieu de publication]: [Maison d'édition], [Publié en]) [Page(s)].

9 () S'agissant du CMF, le code monétaire et financier parle de « décisions de portée générale ».

10 () Leurs recommandations étaient parfois contraires à leur opinion personnelle telle qu'ils l'exprimaient en privé.

11 () N'est présente à Paris qu'une petite équipe d'une quarantaine de personnes, dont une partie importante est chargée de la notation des émetteurs asiatiques.

12 () Les autres cas de refus sont l'existence d'une procédure pénale déjà engagée en France ou l'existence de sanctions définitives sur la base des mêmes faits et contre les mêmes personnes.

13 () M. Jean-Pierre Moussy : « Des autorités de régulation financières et de concurrence : pourquoi, comment ? » (janvier 2003)

14 () Il convient de noter que, dans sa décision du 27 janvier 1987 relative au Conseil de la concurrence, le Conseil constitutionnel avait fait de cette possibilité une garantie essentielle de la défense. Son absence, en l'espèce, l'avait conduit à déclarer non conforme à la Constitution l'ensemble de la loi transférant le contentieux au juge judiciaire, alors qu'il n'avait pas contesté le principe même de ce transfert.

15 () Elles vont se substituer à six articles du code monétaire et financier et à six articles du code des assurances

16 () Institué par l'article 22 du présent projet de loi.

17 () cf. infra le commentaire de l'article 26.

18 () Ce sont, selon les termes de l'article L. 322-1-2 du code des assurances, des entreprises dont l'activité principale consiste soit à prendre ou à gérer des participations dans des entreprises d'assurance ou de réassurance françaises ou étrangères, soit à nouer et à gérer des liens de solidarité financière importants et durables avec des mutuelles, des institutions de prévoyance, des sociétés d'assurance mutuelles, ou des entreprises d'assurance ou de réassurance à forme mutuelle ou coopérative ou à gestion paritaire ayant leur siège social dans l'EEE. L'un au moins de ces organismes doit être une entreprise française d'assurance.

19 () Dans le texte de ces articles introduits par le décret n° 2002-943 du 26 juin 2002, il a fallu notamment écrire, pour rester dans le domaine réglementaire, que « les statuts des sociétés de groupe d'assurance mutuelle doivent prévoir [...] que l'admission ou l'exclusion d'une entreprise affiliée par convention fait l'objet d'une déclaration préalable auprès du ministre chargé de l'économie ». L'inscription dans la loi permet de ne pas viser les statuts, et de prévoir la compétence du Comité des entreprises d'assurance en lieu et place du ministre.

20 () La sous-direction des assurances relève aujourd'hui de la direction du Trésor.

21 () Cette soumission au droit des assurances remonte au décret-loi du 14 juin 1938 unifiant le contrôle de l'État sur les entreprises d'assurance de toute nature.

22 () Source : Commission de contrôle des assurances, Rapport d'activité 2000-2001.

23 () soit 36 millions d'ayants droit, auxquels s'ajoutent les 2,5 millions relevant de la Fédération nationale interprofessionnelle des mutuelles.

24 () L'EEE inclut, outre les quinze États membres de l'Union européenne, la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein.

25 () Cette disposition avait déjà produit son effet, puisqu'elle prolongeait le mandat des membres de la CCA jusqu'au 31 décembre 2000.

26 () cf. infra le commentaire de l'article 29 du présent projet de loi, qui reproduit sur ce point le droit existant.

27 () Votre Rapporteur renvoie sur ce point à son commentaire de l'article 30.

28 () cf. l'article 29 du présent projet de loi et le commentaire de votre Rapporteur.

29 () Une jurisprudence confirmée par décision du 10 mars 2003, toujours au bénéfice de M. Laurent.

30 () introduit par l'article 67 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier.

31 () cf. les 2 et 3 de l'article 20 bis de la directive 73/239/CE (pour l'assurance « non-vie »), et les 2 et 3 de l'article 24 bis de la directive 79/267/CE (pour l'assurance vie).


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