Document mis en distribution le 24 juin 2004 N° 1632 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 2 juin 2004. RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 1326, autorisant l'approbation de la convention européenne du paysage, PAR M. ROLAND BLUM, Député -- SOMMAIRE ___ INTRODUCTION 5 I - LA CONVENTION DE FLORENCE COMBLE UNE LACUNE II - LA CONVENTION DE FLORENCE JETTE LES BASES EXAMEN EN COMMISSION 11 ANNEXE : TABLEAU RÉSUMANT LES PRINCIPALES DISPOSITIONS Mesdames, Messieurs, L'Assemblée nationale est saisie du projet de loi autorisant l'approbation de la convention européenne du paysage (n° 1326). Ce projet de loi, déposé le 22 décembre 2003, porte sur une convention élaborée dans le cadre du Conseil de l'Europe. Celle-ci a été ouverte à la signature à Florence le 20 octobre 2000. Elle vise à remédier aux lacunes du droit européen en matière de définition et de protection du paysage. Très largement compatible avec la législation française, son approbation ne soulève pas de difficultés particulières et constitue, en revanche, un signal à l'attention des pouvoirs publics européens pour qu'ils renforcent leurs politiques paysagères et contribuent plus efficacement à l'amélioration du cadre de vie de nos concitoyens. I - LA CONVENTION DE FLORENCE COMBLE La convention européenne du paysage a été adoptée par le Conseil de l'Europe à Strasbourg le 19 juillet 2000. Elle a été signée par la France le 20 octobre 2000 à Florence. Elle résulte de propositions élaborées par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe, qui s'inscrivent dans le prolongement de la Charte du paysage méditerranéen, adoptée en1994 à Séville par les régions d'Andalousie, du Languedoc-Roussillon et de Toscane. L'Agence pour l'environnement de l'Union européenne a pour sa part recommandé, dans un rapport publié en 1995, que le Conseil de l'Europe prenne l'initiative d'élaborer une convention européenne sur le paysage. C'est sur cette base que la convention a été rédigée et adoptée, après une concertation entre les élus d'une part et un comité scientifique regroupant juristes et spécialistes de l'aménagement du paysage d'autre part. La convention de Florence constitue le premier instrument européen spécialement consacré au paysage. Elle vient ainsi compléter les différents instruments de protection du patrimoine et de l'environnement en vigueur que constituent les conventions suivantes : - la convention de Paris sur le patrimoine culturel (1954) ; - la convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique conclue à Londres (1969) et révisée à Malte (1992) ; - la convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe conclue à Berne (1979) ; - la convention pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l'Europe, conclue à Grenade (1985). Par ailleurs, à ce jour, la notion de paysage n'est que partiellement prise en compte par le droit international. Ainsi, la convention de l'UNESCO de 1972 concernant le patrimoine mondial culturel et naturel ne protège que les sites ayant une valeur universelle exceptionnelle, ce qui demeure particulièrement restrictif. Certaines conventions régionales, comme la convention de Salzburg de 1991 sur la protection des Alpes ou la convention Benelux de 1982, comportent quant à elles des mesures de protection du paysage, mais elles ont un champ d'application territorialement limité. Les conventions sur l'environnement existantes mentionnent pour leur part le paysage sans en donner de définition précise et sans énoncer de principes devant guider les politiques mises en œuvre en la matière. Ainsi, la convention d'Espoo du 25 février 1991 sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière évoque-t-elle la notion de paysage, sans lui donner de définition opposable. De même, la convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement du 25 juin 1998 ne traite pas spécifiquement de l'impact paysager des politiques d'aménagement, mais des atteintes environnementales au sens large. La convention adoptée par le Conseil de l'Europe, en définissant la notion de paysage et de politique du paysage, comble donc une lacune du droit international. II - LA CONVENTION DE FLORENCE JETTE LES BASES La convention de Florence, dans son préambule, fait explicitement référence à la notion de développement durable et affirme la nécessité de protéger le paysage en ce qu'il constitue une ressource commune qu'il convient de protéger, de gérer et d'aménager dans le cadre d'une coopération entre pays européens. Elle apporte ensuite une définition précise du paysage, lui donnant ainsi une véritable dimension juridique. Il est ainsi défini comme « une partie du territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l'action de facteurs naturels et/ou humains et de leurs interrelations ». La convention définit également la notion de « politique du paysage », comme « la formulation par les autorités publiques compétentes des principes généraux, des stratégies et des orientations permettant l'adoption de mesures particulières en vue de la protection, la gestion et l'aménagement du paysage ». Enfin, elle donne un contenu aux notions d'objectif de qualité paysagère, de protection, de gestion et d'aménagement des paysages. La convention doit s'appliquer à l'ensemble du territoire de chaque Etat partie et elle concerne aussi bien les espaces naturels, que ruraux, urbains et périurbains. Elle vise aussi bien les paysages remarquables, que les paysages du quotidien et les paysages dégradés. Son objectif est de promouvoir la protection, la gestion et l'aménagement des paysages et d'organiser la coopération européenne dans ce domaine. A cette fin, la convention de Florence se fonde sur trois principes : - l'importance du paysage pour la qualité de vie des populations, indépendamment de sa beauté et de sa localisation ; - l'incitation des Etats parties à mettre en œuvre des politiques publiques spécifiques portant sur les paysages ; - le droit à la participation des citoyens et des élus en matière de paysage conformément aux stipulations de la convention d'Aarhus. Le droit français est d'ores et déjà conforme, pour l'essentiel, à la convention. La loi du 2 mai 1930 sur la protection des monuments naturels et des sites, aujourd'hui intégrée au code de l'environnement, ou la loi du 8 janvier 1993 relative à la protection et la mise en valeur des paysages et modifiant certaines dispositions législatives en matière d'enquête publique, qui figurent dans le code de l'urbanisme, sont pleinement compatibles avec les objectifs de la convention. De même le code rural, le droit forestier et les règles applicables en matière d'aménagement du territoire sont conformes aux stipulations la convention1. L'étude d'impact transmise par le Gouvernement considère qu'hormis certaines carences textuelles portant sur la référence explicite à la notion de paysage, les réformes à apporter apparaissent très ponctuelles, « leur introduction progressive à l'occasion de réformes législatives ou réglementaires ne devant poser ni problèmes techniques, ni problèmes sociaux. » Cette étude insiste, par ailleurs, sur le fait qu'une « attention particulière devra cependant concerner l'extension et l'approfondissement de la participation du public ». L'adoption de la présente convention n'entraînera donc pas de bouleversement majeur de notre ordonnancement juridique. Elle devrait en revanche conduire les pouvoirs publics français à mieux prendre en compte les paysages quotidiens et les paysages dégradés dans les politiques d'aménagement, ce dont on ne peut que se féliciter. La convention permettra également de favoriser le renforcement de la coopération en Europe en matière de politique paysagère. La France, qui dispose de quatre établissements d'enseignement supérieur de formation des paysagistes et qui mène une politique active en faveur du paysage, a donc tout intérêt à l'entrée en vigueur rapide de cette convention. Pour entrer en vigueur, la convention doit être ratifiée par au moins dix Etats. Cette condition est remplie depuis le 1er mars 2004, puisqu'à ce jour elle a été ratifiée par les Etats suivants : l'Arménie, la Croatie, le Danemark, l'Irlande, l'ex-République Yougoslave de Macédoine, la Lituanie, la Moldova, la Norvège, la Roumanie, Saint-Marin, la Slovénie et la Turquie. Il importe donc que la France rejoigne rapidement ce groupe de pays. Votre Rapporteur propose à la Commission d'adopter le présent projet de loi. La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 2 juin 2004. Après l'exposé du Rapporteur, le Président Edouard Balladur a demandé si les Etats concernés par cette convention étaient uniquement les Etats membres du Conseil de l'Europe. M. Guy Lengagne a souhaité savoir pour quelle raison l'Union européenne était concernée par la convention. Le Rapporteur a répondu que la convention était ouverte à la signature des 46 Etats du Conseil de l'Europe, à celle de tout Etat européen non membre du Conseil de l'Europe et à celle de la Communauté européenne, étant donné qu'elle exerce des compétences entrant dans le champ d'application de la convention. Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (no 1326). * * * La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi. NB : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 1326).
N° 1632 - Rapport de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi n° 1326, autorisant l'approbation de la convention européenne du paysage (rapporteur : M. Roland Blum) 1 Voir la liste des textes concernés en annexe. © Assemblée nationale |