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le 8 juillet 2004

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N° 1634

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 2 juin 2004.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 813 autorisant l'approbation des protocoles d'application de la convention alpine du 7 novembre 1991 dans le domaine de la protection de la nature et de l'entretien des paysages, de l'aménagement du territoire et du développement durable, des forêts de montagne, de l'énergie, du tourisme, de la protection des sols et des transports.

PAR M. MICHEL DESTOT,

Député

--

SOMMAIRE

___

INTRODUCTION 5

I - LES ALPES 7

A - UNE RÉGION AU CœUR DE L'EUROPE 7

B - AVEC UN ÉCOSYSTÈME SENSIBLE ET VULNÉRABLE 7

II - LA CONVENTION ALPINE ET SES PROTOCOLES D'APPLICATION 9

A - UNE CONVENTION CADRE... 9

1) Un ensemble d'obligations générales 9

2) Dotée de règles institutionnelles 9

B - ET DES PROTOCOLES D'APPLICATION DÉTAILLÉS 10

1) Protocole « Protection de la nature et entretien des paysages » 11

2) Protocole « Aménagement du territoire et développement durable » 13

3) Protocole « Forêts de montagne » 14

4) Protocole « Protection des sols» 15

5) Protocole « Energie » 15

6) Protocole « Tourisme » 17

7) Protocole « Transports » 18

CONCLUSION 19

EXAMEN EN COMMISSION 20

ANNEXE : ETAT DE RATIFICATION DE LA CONVENTION CADRE 20

Mesdames, Messieurs,

Considérant qu'une exploitation croissante de la part de l'homme peut constituer une menace de plus en plus grande pour le territoire alpin et ses fonctions écologiques et que seule l'harmonisation des intérêts économiques avec les exigences écologiques peut éviter ces dégâts, les Pays de l'arc alpin (la République Fédérale d'Allemagne, la République française, République italienne, la Principauté du Liechtenstein, la Principauté de Monaco, la République d'Autriche, la Confédération Suisse, la République de Slovénie) et l'Union Européenne1, ont convenu d'établir la Convention alpine, qui a été signée à Salzbourg le 7 novembre 19912.

La Convention sur la protection des Alpes a pour objet l'harmonisation des politiques des Parties, et vise la sauvegarde de l'écosystème naturel ainsi que la promotion du développement durable des Alpes, tout en protégeant les intérêts économiques et culturels des populations qui y habitent et des Pays adhérents.

Pour atteindre ces objectifs, les Parties contractantes, aux termes de la Convention, ont négocié entre 1994 et 2000 sept protocoles sectoriels d'application, qui sont aujourd'hui soumis à l'approbation.

I - LES ALPES

A - Une région au cœur de l'Europe

Environ 13 millions de personnes habitent l'arc alpin, qui couvre une superficie de 191 287 km2, englobant sept pays, environ 100 régions et, selon la définition de la Convention alpine, 6187 communes. Les Alpes constituent l'un des plus grands espaces naturels d'un seul tenant en Europe et un cadre de vie, un espace économique, culturel et récréatif au cœur de l'Europe, se distinguant par sa nature, sa culture et son histoire spécifiques et variées, auquel participent de nombreux peuples et pays. Les Alpes sont un cadre de vie et un espace économique pour la population qui y habite, et revêtent également une importance particulière pour les régions extra-alpines, notamment comme support de voies de communication essentielles. Elles sont un habitat et un refuge indispensables pour nombre d'espèces animales et végétales menacées.

Du point de vue de la géographie humaine, on constate dans les Alpes un phénomène d'urbanisation croissante auquel s'oppose un dépeuplement accru. Tandis que les villes continuent de se développer, formant des agglomérations toujours plus vastes et que les vallées de basse altitude présentent également une forte croissance de population, les petites communes de montagne ont par contre de plus en plus tendance à se dépeupler. On n'enregistre une croissance de la population que dans quelques villages de montagne pour lesquels le tourisme représente la principale source de revenus.

Cet antagonisme entre urbanisation et dépeuplement croissants dans l'espace alpin s'observe à plusieurs niveaux. A grande échelle, on constate une opposition entre le centre des Alpes qui connaît un véritable boum et le sud-ouest des Alpes qui connaît un exode rural croissant. Sur le plan régional, on note un contraste entre les centres régionaux, qui peuvent être des agglomérations urbaines ou des communes touristiques, et les régions environnantes qui ne bénéficient pas des mêmes infrastructures. Enfin, à petite échelle, les fonds de vallée, plus urbanisés, s'opposent aux vallées latérales et aux versants de montagne, plus ou moins délaissés.

B - Avec un écosystème sensible et vulnérable

Ces dernières années, les fortes précipitations tombées sur un sol déjà saturé ont provoqué de nombreux glissements de terrain, coulées torrentielles et inondations, parfois dévastateurs, dans la plupart des pays alpins3. Ces concentrations de catastrophes naturelles ont fait de dizaines de victimes et provoqué des dégâts matériels et des dommages économiques qui se comptent en milliards.

L'espace alpin et ses fonctions écologiques sont de plus en plus menacés par l'exploitation croissante de l'homme et la réparation des dommages, quand elle est possible, ne peut se faire qu'au prix d'intenses efforts, de coûts élevés, et, en règle générale, sur de longues périodes.

Il s'avère que le montant des dégâts occasionnés par les catastrophes naturelles ne cesse de croître en raison de l'exploitation toujours plus intensive du sol. Mais une autre source d'inquiétude réside dans le fait que les situations extrêmes d'origine météorologique sont manifestement plus fréquentes que lors des dernières décennies.

La question se pose de savoir si nous sommes en présence d'une récurrence de phénomènes météorologiques d'origine naturelle ou déjà de manifestations d'un changement climatique influencé par les activités humaines. Le fait qu'une concentration d'événements naturels extrêmes ait déjà entraîné mort et désolation dans les pays alpins au 19ème siècle complique les efforts entrepris pour apporter des preuves fondées scientifiquement de la corrélation entre l'influence des activités humaines et le changement climatique.

Les Alpes constituent donc une zone géographique unique en Europe qui présente des caractéristiques naturelles particulières et impose des conditions spéciales aux activités humaines. Il faut faire en sorte que ces activités soient compatibles avec les exigences écologiques. Les conditions sociales, politiques et économiques des sociétés alpines sont très diverses et il est devenu indispensable que ces sociétés formulent des approches communes pour aborder les défis environnementaux que la civilisation se doit de relever.

II - LA CONVENTION ALPINE ET SES PROTOCOLES D'APPLICATION

La Convention alpine est un traité de droit international conclu pour assurer une politique globale de protection de l'écosystème alpin, particulièrement sensible et vulnérable, et un développement durable de l'espace alpin.

A - Une convention cadre...

C'est dans cette perspective que la Convention sur la protection des Alpes (Convention alpine) a été signée à Salzbourg (Autriche) le 7 novembre 1991 par sept pays (Allemagne, Autriche, France, Italie, Liechtenstein, Suisse et ancienne Yougoslavie - remplacée le 29 mars 1993 par la Slovénie) ainsi que par la Communauté européenne. La Principauté de Monaco est devenue partie signataire fin 1994. Le texte de la Convention est entré en vigueur le 6 mars 1995, trois mois après le dépôt du troisième instrument de ratification.

1) Un ensemble d'obligations générales

La Convention définit un ensemble d'obligations générales relatives à la sauvegarde et à la protection de cet écosystème montagnard parmi les plus importants d'Europe afin d'assurer le développement durable de l'ensemble de la chaîne alpine. Elle ne constitue en réalité qu'un cadre général dans lequel doivent s'inscrire de façon adéquate les politiques que les parties contractantes mènent dans cette zone. Outre l'adoption de protocoles spécifiques, les instruments de mise en œuvre incluent notamment un effort conjoint de recherche et une observation systématique dans les domaines qui intéressent la Convention, ainsi que l'échange d'informations juridiques, scientifiques, économiques et techniques pertinentes.

2) Dotée de règles institutionnelles

Le cadre institutionnel de la Convention alpine permet de consigner globalement et par écrit la protection et l'exploitation durable dans les Alpes, de les fixer légalement dans un processus continu et de contrôler l'exécution des dispositions prises (art. 5, al. 4). La Convention demande l'institution d'une Conférence des parties contractantes (Conférence alpine). En vertu de l'art. 6 de la Convention et sous réserve de l'approbation des Parties contractantes, la Conférence alpine se voit notamment confier la tâche de décider des modifications de la Convention, des protocoles et de leurs modifications, et de constituer des groupes de travail. Elle délibère le plus souvent par consensus (art. 7, al. 1).

Il est institué en tant qu'organe exécutif un Comité permanent de la Conférence alpine, composé des délégations des Parties contractantes (art 8). Sa fonction est d'appliquer les décisions et de veiller à leur suivi. Il prépare notamment toutes les sessions de la Conférence alpine.

Le Secrétariat permanent est le seul organe prévu par la Convention alpine n'ayant pas été institué par la Convention elle-même. L'article 9 de la Convention, en effet, prévoit que la Conférence alpine peut décider par consensus de l'établissement d'un Secrétariat permanent, au titre de service exécutif complémentaire. Sur la base de cette disposition la Conférence alpine a décidé, lors de sa VIe réunion, d'instituer un Secrétariat permanent, dont le siège est à Innsbruck, avec un Bureau à Bolzano.

L'art. 1, al. 2 et 3, ainsi que les articles 10 et suivants de la Convention ont également des fonctions institutionnelles. Ils formulent des dispositions relevant de la procédure juridique concernant l'entrée en vigueur, la dénonciation et la modification de la Convention ainsi que la possible remise de déclarations par les Parties contractantes.

La Convention alpine est faite en français, allemand, italien et slovène, les quatre textes faisant également foi ; un exemplaire sera déposé dans les archives d'Etat de la République d'Autriche, dépositaire de la Convention.

B - Et des protocoles d'application détaillés

Les protocoles d'application prévoient des étapes concrètes, des modalités d'action et de développement, mais aussi des mesures conformes aux principes du développement durable.

À l'heure actuelle, neuf protocoles ont été négociés entre 1994 et 2000, dont sept sont aujourd'hui soumis à votre ratification. Aux termes de la Convention alpine (cf. art. 2), les Parties contractantes sont invitées à prendre des mesures appropriées dans les domaines supplémentaires suivants: «Population et culture», «Qualité de l'air», «Régime des eaux» et «Gestion des déchets». Aucun de ces thèmes n'est pour l'heure en cours de traitement. Les Parties contractantes ont convenu d'un commun accord de ratifier et de concrétiser tout d'abord les neuf protocoles mentionnés avant de mettre en chantier de nouveaux protocoles éventuels.

En vertu de la conception de la Convention alpine et de ses protocoles d'application, il incombe aux Etats signataires de réaliser les mesures et les objectifs fixés en recourant à des moyens appropriés. De ce fait, ni les dispositions de la Convention ni celles de ses neuf protocoles ne sont directement applicables. Au plan national, elles n'ont donc pas d'influence directe sur les droits et devoirs de chacun. Dans la mesure où le droit national ne satisfait pas aux exigences de la Convention, les Etats signataires sont tenus de procéder aux adaptations qui s'imposent. Les obligations générales contenues dans la Convention sont décrites plus en détail dans les protocoles.

Là où le droit national des Parties contractantes ne contient pas encore les instruments nécessaires à la prise en compte de ces aspects de la Convention, ces parties doivent adapter leurs bases légales.

Il convient de relever les mécanismes prévus par la Convention alpine en cas de différend.

En ratifiant le protocole sur le règlement des différends, une partie s'engage à accepter un éventuel jugement arbitral et à prendre les dispositions nécessaires. Le protocole sur le règlement des différends ne prévoit toutefois pas de mesures de sanction en cas de non-application du jugement arbitral (cf. ch. 2.2.10).

1) Protocole « Protection de la nature et entretien des paysages »

Le protocole a pour objectif d'assurer la protection, la gestion et, si nécessaire, la restauration de la nature et des paysages de manière à garantir durablement le fonctionnement des écosystèmes, la préservation de la faune et de la flore ainsi que de leurs habitats, le pouvoir de régénération et de production à long terme du patrimoine naturel ainsi que la diversité, l'originalité et la beauté de la nature et des paysages dans leur ensemble (art. 2, al. 2, let. f, de la Convention alpine; art. 1 du protocole).

Pour atteindre cet objectif, le Protocole fixe une série de dispositions générales (chapitre Ier) que les Parties s'engagent à respecter, parmi lesquelles :

La coopération internationale (art. 3), en particulier en ce qui concerne la cartographie,  la désignation, la gestion et la surveillance d'aires protégées et d'autres éléments des paysages naturels et ruraux dignes d'êtres protégés;

La prise en considération des objectifs du présent protocole dans les autres politiques (art. 4), en particulier dans les secteurs de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, de la qualité de l'air, de la gestion des ressources en eau ou encore dans les secteurs de l'éducation, de la recherche et de l'information;

La participation des collectivités territoriales (art. 5), un article standard introduit dans tous les textes des protocoles d'application à la suite de l'intervention de la Suisse. Les Parties contractantes sont invitées à déterminer l'échelon territorial le plus adapté à la mise en œuvre et à y faire participer les collectivités territoriales directement concernées.

Pour faire face à tous ces engagements, les Parties s'engagent à adopter et à mettre en œuvre des mesures spécifiques (chapitre II). Elles fixent des inventaires, des objectifs ainsi que des mesures et des instruments de la planification. Un principe est que toute utilisation ayant un effet sur l'espace alpin ménage la nature et les paysages (art. 10). Cette protection de base est renforcée par un dispositif (articles 11 à 19) qui prévit la création d'espaces protégés et parcs nationaux qui garantissent la protection des espèces animales sauvages ou des biotopes naturels. Le protocole, qui définit une politique volontariste en matière de protection de la nature et des paysages, doit néanmoins tenir compte des intérêts de la population locale. Il reconnaît aussi le rôle décisif et la responsabilité particulière qui incombent à l'agriculture et à la sylviculture.

Le chapitre III traite de la recherche, de la formation et de l'information. Il invite les Parties à encourager les actions de recherche notamment dans les domaines prioritaires définis à l'annexe II du protocole et à veiller à ce que les résultats des activités nationales de recherche et d'observation soient intégrés dans un système commun d'observation et d'information, accessible au public (article 20).

Par ailleurs, le chapitre IV prévoit un dispositif de contrôle et d'évaluation du respect des obligations fondé sur la remise de rapports et l'adoption de recommandations, et donc cohérent avec le profil d'instrument d'orientation que possède le protocole, même si certaines de ces dispositions revêtent un caractère plus contraignant (articles 22 à 24).

Enfin, les dispositions finales du chapitre V décrivent le lien entre le protocole et la convention (article 25), les modalités de signature, d'approbation, et chargent le gouvernement autrichien d'être dépositaire du protocole (articles 26 et 27). Le protocole entre en vigueur trois mois après la date à laquelle trois Etats ont déposé leur instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation.

Les dispositions du chapitre III (recherche, formation et information), du chapitre IV (contrôle et évaluation) et du chapitre V (dispositions finales) sont plus ou moins les mêmes pour tous les protocoles d'application. Ces chapitres seront par la suite mentionnés, que s'ils présentent un intérêt particulier.

2) Protocole « Aménagement du territoire et développement durable »

L'objectif fixé par ce protocole est d'assurer une utilisation économe et rationnelle des sols et promouvoir un développement sain et harmonieux du territoire. Pour y arriver le protocole recommande une planification prospective et intégrée de l'espace alpin, d'harmoniser les normes qui en découlent, et de tenir compte notamment des risques naturels.

Les dispositions générales du chapitre 1er (articles 1 - 7) définissent les objectifs d'un développement global qui concilie les aspects économiques, socioculturels et écologiques de l'espace alpin. Ainsi, le respect des identités régionales et des spécificités culturelles est un des objectifs.

Les obligations fondamentales des Parties contractantes (article 2) prévoient en autre un renforcement du rôle des collectivités territoriales. Leur participation conformément au principe de subsidiarité est précisée à l'article 7.

Les mesures spécifiques, énoncées au chapitre II, décrivent les instruments d'aménagement du territoire et de développement, ainsi que leur contenu (articles 8, 9).

L'article 10 impose une étude d'impact qui prenne en compte non seulement les effets sur la nature et le paysage mais aussi les conditions de vie de la population résidante lorsque un projet, public ou privé, est susceptibles de porter des atteintes importantes et durables à la nature et aux paysages.

Dans le cadre de leur droit national, les Parties examinent l'opportunité de mesures économiques et financières de nature à favoriser le développement durable de l'espace alpin qu'il s'agisse d'internaliser certains coûts dans le prix de prestations offertes aux utilisateurs (article 11), de soutenir des projets transfrontaliers ou d'instaurer une péréquation4 entre les collectivités territoriales (article 12). A cet effet, il est également possible de recourir à des instruments complémentaires qui ne sont pas explicitement mentionnés dans le protocole (article 13).

3) Protocole « Forêts de montagne »

Le préambule souligne la fonction protectrice des forêts de montagne contre les risques naturels. Les Parties contractantes se déclarent convaincues que certains problèmes ne peuvent être résolus que dans un cadre transfrontalier.

Les dispositions générales (chapitre 1er) décrivent les objectifs du protocole, la prise en considération des objectifs dans les autres politiques, la participation des collectivités territoriales ainsi que la coopération internationale.

L'article 1 définit la gestion respectueuse, proche de la nature et durable de la forêt de montagne comme condition sine qua non pour la sylviculture. Ce principe, s'il implique une exploitation de la forêt respectant sa régénération naturelle, est également un contrat qui garantit aux générations futures le droit de disposer de la forêt et de tirer parti de toutes ses fonctions.

L'article 2 met l'accent sur les autres politiques ayant un impact certain sur la conservation des forêts de montagne (par exemple, notamment, la réduction des polluants atmosphériques impliqués dans les pluies acides, l'harmonisation nécessaire des décisions de régulation du grand gibier, la réduction, voire l'interdiction, du pâturage en forêt).

Le chapitre II énumère les différentes fonctions (protection, production, rôle écologique et social) remplies par la forêt de montagne sur lesquelles la gestion forestière doit s'appuyer pour atteindre les objectifs définis par la Convention alpine. La fonction protectrice de la forêt de montagne est particulièrement mise en avant (art. 6).

Le protocole met en exergue la nécessité d'une planification (article 5), notamment en ce qui concerne la création d'infrastructures (article 9 sur les dessertes forestières). Il prévoit la possibilité d'allouer des aides pour compenser financièrement les contraintes qu'induisent les fonctions spécifiques remplies par la forêt de montagne (article 11) et l'engagement des Parties à délimiter un nombre et une étendue suffisants de réserves de forêt naturelle, afin de garantir le devenir de la forêt de montagne (article 10).

4) Protocole « Protection des sols»

Le préambule souligne les particularités et la vulnérabilité des sols alpins et relève l'importance que revêtent des sols intacts pour la population vivant et travaillant dans l'espace alpin. Il rend attentif aux dangers qui menacent les sols si ceux-ci ne sont pas utilisés de manière adaptée au lieu et conforme aux exigences de l'environnement. Vu les multiples répercussions qu'entraîne l'utilisation du sol, sa protection concerne les domaines politiques les plus divers. Le préambule souligne également le caractère particulier des sols qui sont des collecteurs de polluants et constituent en eux-mêmes des écosystèmes dont la régénération ne se fait que très lentement - contrairement à l'air et à l'eau.

Les dispositions générales du chapitre 1er définissent les sols comme « base vitale » de tout écosystème, et qui doivent faire l'objet d'une protection préventive et à long terme (article 1er).

A l'article 2, les Parties contractantes s'engagent à accorder la priorité aux aspects de protection des sols par rapport aux aspects d'utilisation si des atteintes menacent gravement et durablement des fonctions essentielles des sols. Le Parties se déclarent également disposées à examiner la possibilité de soutenir les mesures visées par le présent protocole pour la protection des sols alpins par des mesures fiscales et/ou financières.

Enfin, les art. 4 et 5 des dispositions générales règlent la participation des collectivités territoriales et esquissent le contenu de la coopération internationale.

Les mesures spécifiques (chapitre II) s'articulent autour du principe majeur du protocole : l'utilisation économe et précautionneuse des sols. Les parties conviennent entre autres à préserver les sols rares et particulièrement précieux sur le plan de leur formation géologique (art. 6) et de délimiter et de cartographier les zones à risques et les zones alpines menacées par l'érosion (art. 10 et 11). Un lien est également établi ici avec le protocole «Tourisme » pour contenir les impacts négatifs des infrastructures touristiques sur les sols alpins (art. 14). Enfin, les Parties contractantes s'engagent à réduire autant que possible, de manière générale et préventive, les apports de polluants en limitant les émissions à leurs sources ainsi qu'à établir des inventaires des sites contaminés et des programmes de gestion des déchets (art. 15).

5) Protocole « Energie »

Le protocole «Energie» a pour objectif d'imposer une production, distribution et utilisation de l'énergie ménageant la nature et le paysage et compatible avec l'environnement, et d'encourager des mesures d'économie d'énergie.

Le préambule souligne notamment la sensibilité environnementale de l'espace alpin en ce qui concerne les activités de production, de transport et d'emploi de l'énergie.

L'objectif du chapitre 1er est, en premier lieu, la création de conditions-cadre ainsi que l'adoption de mesures tendant a réaliser une situation énergétique de développement durable dans le massif alpin (art. 1).

Les engagements fondamentaux sont précisés à l'article 2, sous forme d'une série de recommandations détaillées, appelant notamment chaque Partie contractante à harmoniser sa planification énergétique avec son plan d'aménagement général de l'espace alpin, à adapter les infrastructures énergétiques présentes dans l'espace aux besoins de protection de l'environnement, à évaluer l'impact sur l'environnement alpin de projets de construction de grandes infrastructures énergétiques.

Les Parties sont invitées à respecter les principes de conformité du protocole avec les accords internationaux en vigueur et d'interdépendance des politiques définies dans les protocoles sectoriels d'application de la convention alpine (art. 3) ; d'association des collectivités territoriales directement concernées à l'élaboration et à la mise en œuvre de mesures prises en application du protocole (art. 4) ; de concertation entre les Parties contractantes sur tous les projets pouvant avoir des effets transfrontaliers (art. 13) et de la possibilité donnée aux Parties contractantes de prendre des mesures qui complètent celles prévues par le protocole (art. 14).

Les dispositions spécifiques du chapitre II insistent sur l'obligation pour les Parties contractantes d'adopter un large éventail de mesures (portant notamment sur l'amélioration de l'isolation des bâtiments, l'optimisation des rendements des installations de chauffage) visant à la réalisation d'économies d'énergies ainsi qu'à leur utilisation rationnelle dans l'espace alpin (art. 5).

Ensuite le protocole décline par sous-secteur (énergie hydroélectrique, énergie à partir de combustibles fossiles, énergie nucléaire, transport et distribution d'énergie) des mesures qui, en dépit de la diversité des termes employés, s'analysent en réalité comme des recommandations portant d'une part, sur la nécessité d'optimiser l'utilisation des installations existantes avant d'envisager des constructions nouvelles (art. 7 à 10) et, d'autre part, sur l'harmonisation, voire la connexion, des systèmes nationaux de contrôle des émissions ainsi que de surveillance de la radioactivité, s'agissant de l'énergie nucléaire visée à l'article 9.

Les articles 12 et 13 engagent les Parties à soumettre tout projets énergétiques à des études d'impact sur l'environnement et les effets transfrontaliers, qu'ils pourraient engendrer.

6) Protocole « Tourisme »

Le protocole «Tourisme» souligne la nécessité de contribuer à un développement durable de l'espace alpin en passant par un tourisme respectueux du paysage et de la nature. Le volet «Tourisme» a une importance particulière dans le cadre de la Convention alpine, car il touche à un secteur économique vital pour la population alpine. Son but est d'assurer la compétitivité du tourisme dans les Alpes tout en renforçant la protection de l'environnement.

Les dispositions générales du chapitre 1er énoncent des principes portant sur la coopération internationale entre les collectivités territoriales de l'espace alpin que les Parties contractantes s'engagent à faciliter (article 2), sur l'interdépendance des politiques définies dans les sept protocoles sectoriels d'application de la convention alpine (article 3), sur l'association des collectivités territoriales directement concernées à l'élaboration et à la mise en œuvre de mesures prises en application du protocole (article 4), et sur la possibilité donnée aux Parties contractantes de prendre des mesures qui complètent celles prévues par le protocole (article 21).

Les mesures spécifiques du chapitre II définissent des principes de planification à appliquer, tels une maîtrise de l'offre et des flux touristiques (art. 5, 8), des politiques d'hébergement (art. 11), des réductions du trafic et transports touristiques (art. 13), ainsi qu'une limite des pratiques sportives (art. 12, 14, 15, 16).

Les particularités environnementales de la localité ou de la région intéressée et donc les limites de charge imposables doivent être considérés. Une étude préalable devra évaluer les conséquences des certains projets susceptibles d'avoir un impact notable sur l'environnement (art. 9).

L'art. 10 contraint les Parties à délimiter des zones de tranquillité où l'on renonce aux aménagements touristiques.

L'art. 12 commande de mener, dans le domaine des installations de transport touristiques (funiculaires, téléphériques et téléskis), une politique ménageant les paysages et qui soit compatible avec l'environnement mais attentive aussi à la sécurité et au rendement économique. Il convient par ailleurs de démonter les installations hors d'usage et de remettre en état les surfaces inutilisées.

7) Protocole « Transports »

Le volet « Transports » de la Convention alpine a pour but de réduire les nuisances et les risques dans le secteur du transport interalpin et transalpin, de telle sorte qu'ils soient supportables pour les hommes, la faune et la flore ainsi que pour leur cadre de vie et leurs habitats.

Les objectifs généraux du protocole (art. 1) sur les transports sont les suivants: réduire le volume et les dangers du trafic dans et au travers des Alpes, en particulier en détournant vers le rail une grande partie du transport, surtout de marchandises, grâce au développement d'infrastructures appropriées et de compensations respectant les principes du marché; garantir le maintien d'un trafic intra-alpin et transalpin à un coût économique acceptable en augmentant l'efficacité des réseaux de transport et en promouvant les moyens de transport les plus écologiques et les plus économes en ressources naturelles; et garantir une concurrence loyale entre les différents moyens de transport.

Les mesures spécifiques du chapitre II souligne la nécessité de développer une stratégie générale de la politique des transports, basée sur une gestions rationnelle et sure des différents moyens et mode de transports (art. 7). L'accent porte également sur la nécessité d'évaluation préalable des risques et de consultation intergouvernementale lorsqu'il est décidé de construire ou de modifier des infrastructures de transport (article 8) et sur celle d'appliquer le principe pollueur-payeur en vue d'aboutir à une meilleure répartition du trafic entre les différents modes de transport (article 14).

Une série de mesures définit pour chaque sous-secteur (transports publics [article 9] ; transports ferroviaires et fluvio-maritimes [article 10] ; transports routiers [article 115] ; transports aériens [article 12]) les dispositions techniques du protocole

Enfin, le protocole prévoit un suivi et un contrôle (art. 15, 16) des mesures concrètes prises sur la réduction des nuisances que les Parties doivent tenir à jour.

CONCLUSION

Aujourd'hui, dans les Alpes comme ailleurs, de nombreux problèmes économiques et écologiques dépassent le cadre des frontières nationales; ils doivent donc être résolus à l'échelle alpine ou même dans un contexte européen. Par ailleurs, une approche commune est nécessaire pour garantir un développement socio-économique, culturel et écologique autonome de ces régions face aux grands centres. La Convention alpine et le large éventail de ses protocoles constituent un cadre adéquat pour la collaboration internationale dans tous ces domaines.

La Convention alpine et la ratification des protocoles n'entraîneront cependant aucune charge financière nouvelle pour la France car elles n'influencent pas directement les instruments de protection ni les mesures d'encouragements existants.

La mise en œuvre de la Convention alpine et de ses protocoles s'effectuera essentiellement par la prise en compte des objectifs et des engagements prévus par ces textes dans les projets actuels et futurs de la France. Elle n'impose aucune modification du droit interne en vigueur.

Au vu de ces observations, votre Rapporteur vous recommande l'adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 2 juin 2004.

Après l'exposé du Rapporteur et suivant ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (no 813).

*

* *

La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte des protocoles figure en annexe au projet de loi (n° 813).

État de ratification de la convention cadre

 

Signature

Ratification

Document publié

Document déposé le

Entré en application le

A

07.11.91

08.02.94

Bundesgesetzblatt Nr.477/1995 vom 21.07.1995

08.02.94

06.03.95

CH

07.11.91

16.12.98

Bundesgesetzblatt BBI 1997 IV 657(d), FF 1997 IV 581 (f) 

28.01.99

28.04.99

D

07.11.91

16.06.94

Bundesgesetzblatt Teil II Nr.46/1994 vom 8.10.1994

05.12.94

06.03.95

F

07.11.91

30.11.95

Journal officiel Nr.95 1270 du 7.12.1995

15.01.96

15.04.96

FL

07.11.91

21.04.94

Liechtensteinisches Landesgesetzblatt 1995/Nr.186

28.07.94

06.03.95

I

07.11.91

14.10.99

Legge 14 ottobre 1999, n. 403
Gazzetta Ufficiale n. 262 - 8.11.99

27.12.99

27.03.00

MC

20.12.94

14.10.99

Ordonnance Souveraine n°14082 en date du 21juillet 1999 publiè au journal de Monaco le 30 juillet 1999

 22.12.98

 22.03.99

SLO

29.03.93

22.03.95

Uradni list Republike Slovenije (Mednarodne pogodbe) Nr.19/Beilage Nr.5 - 31.3.1995

22.05.95

22.08.95

EU

07.11.91

26.02.96

Journal officiel de la Communauté européenne
n° L61/31-36 du 12.3.1996

04.03.96

14.04.98

Source : Site du Secrétariat permanent de la Convention alpine

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N° 1634 - Rapport sur le projet de loi autorisant l'approbation des protocoles d'application de la convention alpine du 7 novembre 1991 (M. Michel Destot)

1 La Communauté européenne a approuvé la Convention alpine en février 1996 (JO no L 61 du 12 mars 1996, p. 31). Elle s'est donc engagée, selon les règles du droit international public, à mettre en œuvre ses principes et ses objectifs. Son approbation confirme aussi que la Convention est compatible avec le droit communautaire.

2 Monaco a adhéré en 1994 à la Convention, qui est en vigueur depuis le 6 mars 1995.

3 Voir à ce sujet le rapport 2003 « Dangers naturels et Convention alpine » établi par l'Office fédéral du développement territorial (ARE) de Suisse.

4 Des mesures compensatoires entre collectivités territoriales sont expressément mentionnées

5 Voir déclarations du gouvernement français du 10 mai 2004


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