Commander ce document en ligne
Retour vers le dossier législatif

AVANT LE TITRE IER

Suivant l'avis défavorable de Mme Françoise de Panafieu, rapporteure, la commission a rejeté un amendement présenté par M. Francis Vercamer visant à affirmer que le citoyen est placé au cœur des dispositifs institutionnels de lutte contre l'exclusion.

TITRE IER

MOBILISATION POUR L'EMPLOI

Chapitre ier

Service public de l'emploi

Article 1er

Définition du service public de l'emploi et création des maisons de l'emploi

Cet article, en fixant les contours du service public de l'emploi et en instituant les maisons de l'emploi, constitue le cœur de la réforme institutionnelle des politiques de l'emploi.

1. L'état des lieux

a) Un dispositif d'intervention éclaté

Après la Libération, l'Etat s'est imposé comme acteur unique de la politique de l'emploi. Mais, depuis, le paysage institutionnel s'est progressivement compliqué. D'une part, sont nés des organismes « généralistes » ou plus spécialisés dont l'objet est de couvrir tel ou tel aspect de cette politique : l'assurance chômage (UNEDIC-ASSEDIC) a été créée en 1958, l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) et l'Association pour l'emploi des cadres (APEC) en 1966, l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) en 1967, l'Association nationale de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH) en 1987... D'autre part, de nouveaux donneurs d'ordres de cette politique, voire opérateurs, se sont imposés : les collectivités territoriales dans le contexte de la décentralisation depuis 1982 (création du réseau d'accueil, d'information et d'orientation des jeunes), les entreprises dans le cadre de leurs obligations de reclassement. Enfin, la diversification des prestations d'aide offertes aux entreprises en recherche de collaborateurs comme aux demandeurs d'emploi a conduit l'ANPE à recourir aux compétences d'un nombre croissant de prestataires de services.

On ne peut que partager le constat de M. Jean Marimbert selon lequel « la France a le dispositif d'intervention sur le marché du travail le plus éclaté d'Europe ».

L'aide au placement, c'est-à-dire la fonction d'intermédiation sur le marché du travail, a été la première des politiques de l'emploi et reste au centre de celles-ci. Son évolution se caractérise aussi par un éclatement croissant, antinomique d'un monopole légal partiellement écorné et non respecté dans les faits.

b) Un monopole du placement purement théorique

Dès 1904 (25), la loi a réglementé l'activité de placement, soumettant les bureaux de placement payants à autorisation, les gratuits à déclaration et imposant aux communes urbaines l'ouverture de bureaux municipaux ; en 1928, le régime de l'autorisation préalable a été étendu aux bureaux de placement gratuits. Le système a connu diverses évolutions avant d'être au lendemain de la Seconde Guerre mondiale étatisé : dans l'optique dirigiste du moment et alors que l'on manquait de main-d'œuvre, l'orientation des travailleurs disponibles vers les secteurs économiques prioritaires était recherchée à travers l'étatisation de l'activité de placement (les bureaux de placement payants sont interdits et les bureaux gratuits progressivement supprimés) et l'instauration d'une obligation pour les employeurs de déclarer leurs emplois vacants.

L'ANPE a ensuite hérité du monopole de placement, qui se concrétise dans le droit en vigueur par trois dispositions des articles L. 311-1 et L. 311-2 que le présent article 1er modifie : l'agence assure le service public du placement ; les demandeurs d'emplois doivent s'y inscrire ; les employeurs doivent lui notifier leurs emplois vacants.

Cependant, il a toujours existé des aménagements ou exceptions légaux à ce monopole.

La diffusion d'offres d'emploi par la presse a été autorisée et encadrée. L'affichage a été interdit, mais ont été exemptées de cette règle les offres d'emplois « domestiques » et d'emplois d'intérim (articles L. 311-4, modifié par l'article 3 infra du présent projet, et D. 311-5 du code du travail).

La loi a défini des cadres particuliers pour les activités de placement exercées, dans un cadre lucratif ou non, au bénéfice de certaines professions : les prestataires de services à la personne (cf. régime des associations et entreprises intermédiaires édicté à l'article L. 129-1 du code du travail), les artistes (cf. article L. 762-3 du même code).

Il existe aussi des dérogations de portée générale. Depuis 1986, peuvent « concourir au service public du placement » des établissements publics, organismes paritaires ou associations agréés par l'Etat ou conventionnés par l'ANPE ; de même, les employeurs peuvent avoir une activité de placement pendant leurs opérations de reclassement ; enfin, les communes peuvent exercer une activité de placement sous réserve de passer convention avec l'Etat et l'ANPE. Les années récentes ont vu se multiplier les situations où l'ANPE a de fait délégué sa fonction de placement ; il en est ainsi, par exemple, vis-à-vis du réseau associatif « Cap Emploi » pour les personnes handicapées. S'agissant des communes, il existait déjà au moment du contrôle de la Cour des comptes sur l'ANPE (donc en 1999 ou 2000) 1 728 conventions enregistrées avec l'agence. La Cour s'interrogeait d'ailleurs sur le respect du principe d'égalité dans ce cas de figure, dans la mesure où, d'après le texte même de l'article L. 311-9 du code du travail, les communes interviennent « en faveur de leurs administrés à la recherche d'un emploi » et que la communication à l'ANPE de toutes les offres d'emploi recueillies par les structures communales n'est pas garantie.

Par ailleurs, le monopole de placement, dépourvu dans la loi de sanction pénale, a toujours été interprété d'une manière souple, n'empêchant pas le développement d'activités privées très proches de la fonction d'intermédiation entre les entreprises et les demandeurs d'emploi qui constitue l'objet même du placement : conseils en recrutement, chasseurs de têtes, entreprises d'intérim plus orientées de fait vers la sélection de candidats pour de futurs emplois pérennes de leurs clients (pré-recrutement) que vers la simple fourniture de personnels de remplacement...

Quant aux entreprises, le ratio entre les offres qu'elles transmettent à l'ANPE et leurs recrutements effectifs montre qu'il y a fort longtemps qu'elles ne respectent guère l'obligation légale de dépôt des offres.

Evolution depuis 2000 des dépôts annuels d'offres d'emploi
et « part de marché » de l'ANPE

2000

2001

2002

2003

Offres d'emploi

3 232 577

3 107 000

3 031 073

2 990 398

Part de marché (1)

36,7 %

33,4 %

33,7 %

35% (2)

Source : ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale (questionnaire budgétaire).

(1) Mode de calcul : rapport entre les offres collectées par l'ANPE et une estimation du volume des embauches réalisée par la DARES.

(2) La notion de « part de marché » de l'ANPE a été récemment abandonnée en tant qu'indicateur du contrat de progrès, en raison du peu de fiabilité et de l'hétérogénéité des sources statistiques. On estime que la part de marché de l'Agence se situe à fin 2003 à 35 %.

La « part de marché » de l'ANPE n'était que de 24,8 % en 1993, puis a atteint 39,7 % en 1996 (chiffres extraits du rapport public 2000 de la Cour des comptes) avant de connaître un certain déclin comme on peut l'observer sur le tableau ci-dessus.

2. Les grandes lignes de la réforme

Les conclusions des rapports de MM. Balmary et Marimbert étant retracées dans l'exposé général du présent rapport, on rappellera seulement leurs principaux enseignements :

- Faute d'une simplification radicale des structures maintes fois recommandée - depuis M. François-Xavier Ortoli, commissaire général du plan, en 1966 - mais qui n'apparaît guère réalisable, il s'agit de mettre en place « une chaîne articulée de services orientés vers le retour à l'emploi » en s'inspirant des réformes conduites par nos partenaires européens. Pour ce faire, comme le montre le bilan encore mitigé, en termes qualitatifs, de la coopération opérationnelle entre l'UNEDIC et l'ANPE pour la mise en œuvre du plan d'aide au retour à l'emploi (PARE), des progrès considérables sont à faire en termes : de coordination des acteurs, ne serait-ce que pour éviter les redondances ; de fixation d'objectifs par les donneurs d'ordres aux prestataires des interventions pour l'emploi, et de suivi effectif de la réalisation de ces objectifs et de partage de l'information et d'évaluation des interventions.

- La question de l'emploi est trop centrale dans le champ politique pour envisager un retrait de l'Etat dans ce domaine. Son « maître d'œuvre délégué » de la politique nationale de l'emploi, l'ANPE, doit conserver également un rôle central, notamment pour la prescription des mesures publiques d'aide au retour à l'emploi.

- Le mouvement continu de « territorialisation » de la politique de l'emploi, légitimé par les situations très variables de l'emploi (en matière de chômage, mais aussi de métiers porteurs) selon les bassins, doit être poursuivi.

Le présent article 1er donne satisfaction à ces préconisations, tout en procédant à des clarifications qui s'imposent pour des dispositions légales désuètes. Il propose de délimiter le périmètre du service public de l'emploi en y distinguant trois cercles concentriques. Il met en place un pilotage plus intégré du système en instituant une convention pluriannuelle entre l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC qui déclinera des objectifs, des modalités de coordination et d'évaluation. Il tend enfin à créer des maisons de l'emploi afin d'assurer la coordination territoriale des politiques de l'emploi et leur adaptation aux réalités locales.

3. Les dispositions proposées

Le tend à substituer, dans les intitulés du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code du travail et de la section 1 de ce chapitre, la notion de « service public de l'emploi » à celle de « service public du placement ».

Cette modification terminologique rend compte des modifications de contenu des articles.

Le propose une réécriture de des articles L. 310-1 et L. 310-2 du code du travail.

Article L. 310-1 du code du travail

Cet article, dans le droit en vigueur, précise simplement que les dispositions du code relatives au « placement » s'appliquent « notamment » aux salariés des professions libérales, des offices et des associations (outre, implicitement, qu'à ceux des entreprises commerciales et industrielles).

Cette précision a un sens tant que la loi établit une obligation pour les employeurs comme pour les demandeurs d'emploi de passer par l'ANPE, mais ne s'impose plus dès lors que ce monopole légal sera supprimé.

La nouvelle rédaction qui est proposée de l'article L. 310-1 a un objet tout autre : elle tend à définir l'activité de placement, qui n'est pas pour l'heure définie par le code du travail. La définition retenue est simple : le placement consiste à offrir «  à titre habituel » des services « visant à rapprocher offres et demandes d'emploi ». Il est ajouté : « sans que la personne physique ou morale assurant cette activité ne devienne partie aux relations de travail susceptibles d'en découler » ; cette précision vise à distinguer l'activité de placement de celle d'intérim déjà définie à l'article L. 124-1 du code, qui implique une relation triangulaire, le contrat de travail étant passé, comme on sait, entre le salarié et l'entreprise de travail temporaire.

Article L. 310-2 du code du travail

Dans sa version actuelle, cet article pose le principe de la gratuité de l'activité de placement.

La nouvelle rédaction proposée reprend en partie ce principe et en pose un nouveau :

- Le premier alinéa du nouvel article L. 310-2 dispose que les services de placement sont offerts aux salariés comme aux employeurs sans discrimination au sens de l'article L. 122-45 du présent code, c'est-à-dire en raison de l'origine, du sexe, des mœurs, de l'orientation sexuelle, de l'âge, de la situation de famille, des caractéristiques génétiques, de l'appartenance ou non, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, des opinions politiques, des activités syndicales et mutualistes, des convictions religieuses, de l'apparence physique, du patronyme, de l'état de santé ou du handicap (sauf inaptitude médicalement reconnue). Il est précisé que les offres d'emploi ne peuvent comporter de référence à ces caractéristiques.

Cette affirmation de la non-discrimination est pleinement cohérente avec l'article L. 122-45 précité, qui pose déjà, notamment, l'interdiction d'exclure une personne d'une procédure de recrutement sur la base d'un des critères susmentionnés. Elle est également imposée par la convention n° 181 de 1997 de l'Organisation internationale du travail (OIT), qui reconnaît l'existence des « agences d'emploi privées » en réglementant leur activité, et que la France pourra et compte ratifier suite à la suppression du monopole légal de l'ANPE.

- Le second alinéa reprend le principe de gratuité de l'activité de placement, mais en restreignant explicitement son application aux seules « personnes à la recherche d'un emploi ». La facturation de services de placement aux employeurs est donc clairement autorisée ; en revanche, la rédaction est quelque peu ambiguë quant aux salariés : le principe de gratuité s'impose-t-il pour toutes les personnes en recherche d'emploi, y compris, par exemple, un cadre supérieur cherchant à changer d'entreprise, ou seulement pour les demandeurs d'emploi en situation de chômage, les personnes répondant aux critères d'inscription à l'ANPE ? La rapporteure considère que la gratuité doit être garantie par principe aux personnes en recherche d'emploi, qu'elles se trouvent ou non au chômage.

La référence à l'article L. 762-3 du présent code permet de réserver un cas particulier préexistant, celui du placement à titre onéreux des artistes du spectacle : sans doute conviendrait-il de viser aussi les agents sportifs dont les conditions de licence et de rémunération sont fixées par l'article 15-2 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives.

Du côté des employeurs, l'ouverture à la concurrence de l'activité de placement implique logiquement la facturation des prestations. Cela pose la question de l'avenir du service universel gratuit « de base » qu'assure aujourd'hui, de fait, l'ANPE en recueillant les offres d'emploi et en adressant des demandeurs d'emploi aux entreprises.

Article L. 311-1 du code du travail

Le réécrit l'article L. 311-1 du code du travail. Il s'agit d'un des éléments les plus importants de la présente réforme car cette réécriture :

- supprime le premier alinéa en vigueur de l'article L. 311-1, qui fonde actuellement la mission de l'ANPE en lui confiant l'activité de placement ;

- propose une définition d'une notion nouvelle dans la législation, le « service public de l'emploi », dont elle fixe le champ et les intervenants ;

- inscrit les relations entre l'Etat, l'assurance chômage et l'ANPE dans le cadre formalisé d'une convention pluriannuelle.

a) La notion de service public de l'emploi

La notion de service public de l'emploi (SPE) a émergé dans une circulaire en 1984, sans base légale ni réglementaire. Le SPE tel qu'alors défini inclut les services extérieurs du ministère du travail, l'ANPE et l'AFPA, et est constitué en étroite association avec l'assurance chômage.

Puis, en 1986, le présent article L. 311-1 du code du travail, relatif dans sa version actuelle au service public du placement, a été complété afin de préciser que peuvent également concourir à ce service public des établissements publics, des organismes paritaires ou des associations agréés à cette fin par l'Etat ou conventionnés par l'ANPE. Cette précision avait pour objet de reconnaître dans la loi le rôle d'organismes tels que l'APEC ou les associations Cap Emploi (pour le placement des personnes handicapées).

Le présent projet propose d'inscrire dans la loi l'expression « service public de l'emploi » et d'en fixer le contenu et les acteurs.

Le SPE comprendra « le placement, l'indemnisation, l'insertion, la formation et l'accompagnement des demandeurs d'emploi ».

Le SPE reposera sur trois catégories d'acteurs :

- ceux qui l'assurent : services de l'Etat, ANPE, assurance chômage et AFPA ;

- ceux qui y participent : tout organisme public ou privé dont l'objet consiste en la fourniture de services relatifs au placement, à l'insertion, à la formation et à l'accompagnement des demandeurs d'emploi, les entreprises et associations d'insertion (visés à l'article L. 322-4-16 du code du travail), les entreprises de travail temporaire ainsi que les agences de placement privé mentionnées créées par le présent projet à l'article L. 312-1 du code ;

- les collectivités territoriales, ainsi que leurs groupements (précision apportée par le Sénat), qui y concourent. Le renvoi aux articles L. 311-9 et suivants du code du travail vise notamment la disposition en vigueur qui autorise depuis 1986 les communes à exercer une activité de placement, ainsi que les futures maisons de l'emploi.

Il est à noter que le projet de loi fait le choix de placer l'assurance chômage dans le premier cercle du service public de l'emploi, ce qui ne va pas nécessairement de soi et est d'ailleurs mal vécu par les partenaires sociaux gestionnaires de l'UNEDIC. En effet, le positionnement de l'assurance chômage, gérée paritairement, au regard de la notion (juridique) de service public a été l'objet de débats dont le rapport de M. Jean Marimbert rappelle les principaux arguments :

- l'assurance chômage est issue d'un accord des partenaires sociaux en 1958 et a été depuis lors effectivement gérée par eux (ce qu'on ne peut pas nécessairement dire de l'assurance maladie...) ; les tribunaux judiciaires restent seuls compétents pour trancher les contentieux opposant les assurés à l'UNEDIC ;

- cependant le principe et les règles fondamentales de l'assurance chômage sont inscrits depuis longtemps dans la loi et c'est le pouvoir réglementaire qui donne autorité aux conventions des partenaires sociaux en les agréant (ou se substitue à eux en cas de carence) ; plus techniquement, le pouvoir qu'ont les ASSEDIC de délivrer à l'encontre de leurs débiteurs des contraintes emportant à défaut d'opposition tous les effets d'un jugement (article L. 351-6 du code du travail) constitue une véritable prérogative de puissance publique réservée aux collectivités publiques et aux personnes de droit privé chargées d'un service public ;

- d'un point de vue moins juridique, il est clair que l'Etat ne peut se désintéresser de l'indemnisation du chômage, par exemple accepter le risque d'une interruption des paiements d'allocations ou laisser les partenaires sociaux chambouler le régime brutalement, cela à cause des conséquences sociales, mais aussi des conséquences sur son propre budget. Du fait du phénomène de vases communicants entre les différentes allocations d'assurance, de solidarité et d'aide sociale, les comptes publics enregistrent en effet rapidement les conséquences des décisions prises en matière d'indemnisation (cf. la décision de réduire en 2004 la durée d'indemnisation et la décision consécutive, finalement abandonné, de limiter la durée de versement de l'ASS). Outre le financement structurel du régime de solidarité (allocation de solidarité spécifique-ASS et autres), l'Etat a assuré le sauvetage financier de l'assurance chômage lorsqu'elle était en crise (au début des années 1980, puis 1990).

Plus généralement, il convient de rappeler à quoi renvoie la notion de service public dans la tradition française : un service public, ce n'est pas une administration - ou un ensemble hiérarchisé d'administrations -, c'est une mission, une activité de service dont le caractère d'intérêt général justifie qu'elle soit soumise à des règles différentes de celles applicables aux autres activités de service, notamment en matière d'accès universel à tous, sur tout le territoire, dans des conditions non-discriminatoires et acceptables en termes de coûts (ce qui peut justifier la gratuité pour des usagers tels que les demandeurs d'emploi).

A cet égard, le présent article ne fait que constater qu'un certain nombre d'organismes ont déjà une mission générale (vis-à-vis de tous les demandeurs d'emploi), exclusive et comportant au moins un élément de monopole légal, qui relève du service public de l'emploi tel qu'il en définit le contenu ; ces organismes seront donc nommés en tant que membres du premier cercle : ceux qui assurent le SPE. D'autres intervenants, notamment des opérateurs privés, n'ont pas une mission de service public, mais tout ou partie de leurs activités rentrera dans le champ défini comme celui du SPE ; il est donc indiqué qu'ils participeront à celui-ci (en étant soumis à ses règles de non-discrimination et de gratuité pour les demandeurs d'emploi).

Le fait, pour tel ou tel acteur, d'être nommé ou non en tant que membre de tel ou tel « cercle » du SPE n'emporte donc ni mise sous tutelle, ni a contrario déshonneur : il s'agit seulement du constat que leur activité relève à un plus ou moins grand degré de celle du SPE.

b) La formalisation des relations entre les principaux acteurs

La coordination entre les trois acteurs majeurs, l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC, a jusqu'à présent été formalisée par des conventions bipartites, parfois systématiques, mais plus souvent ponctuelles, liées à des projets communs. Depuis 1990, les relations entre l'Etat et l'ANPE sont régies par des contrats de progrès. Les modalités de la mise en œuvre du PARE, notamment le financement des moyens supplémentaires qu'y a consacré l'ANPE, ont été prévues en 2001 par des conventions Etat-UNEDIC-ANPE, Etat-ANPE et UNEDIC-ANPE. Plus ponctuellement, d'autres conventions ont été passées.

Le projet de loi tend à institutionnaliser les relations conventionnelles entre les trois acteurs en les inscrivant dans un cadre pluriannuel. Le Sénat a souhaité y associer l'AFPA, partie prenante du premier cercle du service public de l'emploi, en prévoyant d'adjoindre à la convention tripartite une annexe qu'elle signerait.

Le contenu de la future convention tripartite est défini, afin qu'elle puisse contribuer à la mise en place d'un dispositif de pilotage. Elle déterminera les principaux objectifs de l'action du SPE, les modalités de coordination entre les différents organismes, les critères d'évaluation des interventions, les modalités de diffusion des bonnes pratiques et les modalités de recueil et de transmission des données relatives aux besoins de main-d'œuvre.

Il convient de signaler que l'introduction des principaux objectifs du SPE dans les objets de la convention est perçue par certains comme une forme d'ingérence de l'Etat dans la gestion de l'assurance chômage

Par ailleurs, le gouvernement souhaite que la convention permette notamment, grâce à la mise en commun des données nominatives, de parvenir, d'ici fin 2006, à la constitution d'un dossier unique du demandeur d'emploi accessible aux organismes chargés du suivi et du placement de celui-ci. A cette fin, il est prévu qu'à défaut de convention, les modalités de coordination et de partage des informations entre services et organismes seront réglées par décret en Conseil d'Etat. Les partenaires sociaux rencontrés par la rapporteure ont souligné les dysfonctionnements actuellement liés à l'absence de système informatique unique entre organismes : obligation pour les demandeurs d'emploi de solliciter successivement les différents guichets, retard des rendez-vous pour les entretiens... Cette question est donc importante.

Le texte proposé mentionne également des « conventions territoriales de développement de l'emploi » qui pourront adapter et préciser les objectifs fixés par la convention nationale dans des conditions définies par cette dernière.

Il convient de souligner la nécessité de bien articuler le nouveau mécanisme conventionnel national avec celui, déjà en place, des conventions de gestion de l'UNEDIC (en particulier, il serait problématique que les périodes couvertes soient différentes). Au niveau régional, l'enjeu d'articulation porte en particulier sur les stages de formation pour les demandeurs d'emploi, dont l'organisation et le financement seront totalement transférés aux régions après la fin 2008 (cf. articles 8 et 13 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales).

Le du présent article 1er modifie un intitulé de section dans le code du travail en coordination avec la création des maisons de l'emploi (voir infra).

Article L. 311-10 du code du travail

Le crée une nouvelle structure, la maison de l'emploi, dont les missions seront définies à l'article L. 311-10 du code du travail.

Dans sa rédaction en vigueur, cet article prévoit que les collectivités territoriales ont la faculté de concourir à l'insertion professionnelle et sociale de « certaines catégories » de demandeurs d'emploi en passant une convention avec l'Etat et éventuellement l'ANPE. Cette disposition devient superfétatoire dès lors que l'article L. 311-1 du code dans sa nouvelle rédaction (voir supra) intègre la mission d'insertion au service public de l'emploi, auquel les collectivités territoriales pourront concourir selon ce même article.

Cette disposition peut donc être remplacée par celle qui institue les maisons de l'emploi. Le projet de loi donne trois missions aux maisons de l'emploi :

- coordonner les actions menées dans le cadre du SPE ;

- exercer des actions en matière de prévision des besoins de main-d'œuvre et de reconversion des territoires, notamment en cas de restructuration ;

- fournir diverses prestations aux demandeurs d'emploi (accueil, orientation, insertion, accompagnement, aide à la création d'entreprise...), ainsi qu'aux salariés (en place). Cette dernière mission est facultative et n'intègre pas le placement stricto sensu (intermédiation sur le marché du travail).

L'objet premier des maisons de l'emploi est donc la coordination des politiques de l'emploi et la prise en compte de la dimension territoriale. Elles pourront aussi conduire à la mise en place d'un « guichet unique » pour les entreprises et les demandeurs d'emploi, avec les avantages que l'on peut imaginer (amélioration du service et mutualisation des moyens).

Le ressort territorial d'une maison de l'emploi ne pourra, selon le texte, dépasser une région. En fait, le gouvernement souhaite mettre en place 300 maisons de l'emploi d'ici 2006, soit par création de structures nouvelles, soit par labellisation et développement des structures existantes.

Il convient de souligner que la démarche retenue est souple et repose sur le volontariat : le besoin de coordination des acteurs est sans doute inégal selon les territoires, plus ou moins ressenti selon les sensibilités. Il ne s'agit donc pas d'imposer une nouvelle structure uniforme qui se superposerait aux autres, mais de reconnaître, d'encourager, de généraliser les initiatives diverses qui ont déjà vu le jour spontanément.

Enfin, le projet de loi instaure la possibilité d'une aide de l'Etat aux maisons de l'emploi, renvoyant ses modalités à un décret en Conseil d'Etat. Effectivement, l'article 38 du présent projet, consacré aux dispositions de programmation, ainsi que le projet de loi de finances pour 2005, prévoient des moyens conséquents : dès 2005, 120 millions d'euros en crédits de paiement et 300 millions en autorisations d'engagement pour les investissements ; sur 2005-2009, 680 millions d'euros d'investissements. Dès 2005, l'Etat financera 7 500 emplois nouveaux pour les maisons de l'emploi (auxquels s'ajouteront ceux que voudront bien mettre à disposition les institutions existantes).

Article L. 311-10-1 du code du travail

Le définit la forme juridique et les règles de fonctionnement des maisons de l'emploi :

- Elles pourront prendre la forme d'un groupement d'intérêt public (GIP), qui est effectivement la forme communément retenue pour ce genre de structures de coopération, mais d'autres formes ne sont pas exclues. Dans cette dernière hypothèse, il n'est posé aucune règle quant à la forme juridique, les membres, les moyens de ces maisons de l'emploi.

- S'agissant des maisons de l'emploi constituées en GIP, elles associeront au minimum l'Etat, l'ANPE, l'assurance chômage et une ou plusieurs collectivités territoriales ou intercommunalités.

- Sont également posées des règles habituelles de fonctionnement : rôles respectifs du conseil d'administration, de son président et du directeur, agrément de la convention constitutive par l'Etat.

- Les moyens, notamment en personnels, des maisons de l'emploi seront normalement mis à disposition par leurs membres ; elles pourront cependant embaucher leurs propres agents, sous un statut de droit privé.

- Des conditions de contrôle sont fixées : les maisons de l'emploi seront contrôlées par l'Inspection générale des affaires sociales et la Cour de comptes. Sur ce dernier point, on peut se demander si les maisons de l'emploi, structures territoriales, devraient relever du champ de compétences de la Cour des comptes ou de celui des chambres régionales des comptes. Le renvoi par le projet de loi à l'article L. 133-2 du code des juridictions financières, qui pose un principe de compétence de la Cour pour le contrôle de tout organisme dans lequel d'autres personnes morales soumises à son contrôle sont majoritaires en capital ou en voix - ce qui sera le cas des maisons de l'emploi - mais « sous réserve de la compétence attribuée aux chambres régionales », devrait entraîner l'application des règles de répartition de compétence de droit commun : le Cour sera compétente pour les GIP-maison de l'emploi dotés d'un comptable public (ce point n'étant pas précisé par le projet) et ceux où l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC réunis apporteront la majorité des moyens ; les chambres régionales devraient logiquement l'être dans le cas contraire.

Article L. 322-2 du code du travail

Le a pour objet d'introduire une représentation des collectivités territoriales dans le « comité supérieur de l'emploi », instance consultative auprès du ministre en charge du travail qui est actuellement composée de membres de l'administration et de représentants des syndicats de salariés et des organisations patronales. Le rôle des collectivités territoriales dans les politiques sociales et économiques justifie cette évolution.

Cette mesure répond à une préconisation de M. Marimbert, qui considère que l'amélioration du pilotage de la politique de l'emploi ne doit pas passer par la création de nouvelles structures, mais par le renforcement de celles qui existent, dont le comité supérieur de l'emploi.

Le regroupe deux dispositions.

Article L. 351-26 du code du travail

L'article L. 351-26 du code du travail, qu'il est proposé de supprimer, définit le « conseil d'orientation et de surveillance des institutions chargées du placement, de l'indemnisation et du contrôle des demandeurs d'emploi ».

Cette instance a été créée par la loi en 1993, mais, malgré l'intérêt de ses missions, qui incluent la coordination des actions de l'Etat, de l'ANPE et de l'UNEDIC, a été mise en sommeil rapidement. A l'avenir, la mission de consultation sur les politiques de l'emploi devrait être concentrée sur le comité supérieur de l'emploi (voir supra).

L'article L. 351-26 encourageait aussi à la conclusion de conventions départementales entre les services de l'Etat, de l'ANPE et de l'assurance chômage. Comme la Cour des comptes l'a relevé dans son insertion portant sur le contrôle de la recherche d'emploi dans le rapport public 2003, une majorité de départements ont fini par être couverts par de telles conventions. L'institution des maisons de l'emploi devrait cependant fournir un cadre de coordination locale beaucoup plus puissant.

Article L. 311-2 du code du travail

L'article L. 311-2 édicte actuellement la double obligation, pour les demandeurs d'emploi comme pour les employeurs, de recourir à l'ANPE.

Le projet de loi laisse subsister l'obligation d'inscription des demandeurs d'emploi, qui apparaît essentielle dans l'optique d'une politique coordonnée d'aide au retour à l'emploi, mais supprime celle de notification des offres d'emploi par les employeurs, qui n'a jamais été respectée comme on l'a vu.

*

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté un amendement de suppression de l'article de M. Maxime Gremetz.

Article L. 310-2 du code du travail

La commission a adopté un amendement de précision de la rapporteure.

Puis, après un débat dans lequel sont intervenus M. Gaëtan Gorce et Mme Hélène Mignon, elle a rejeté un amendement de M. Gaëtan Gorce visant à garantir la gratuité du placement des demandeurs d'emploi, sur l'avis défavorable de la rapporteure, qui a observé que l'ouverture à la concurrence de l'activité de placement implique que les entreprises rémunèrent éventuellement ce service, la gratuité pour les demandeurs d'emploi étant quant à elle garantie par la loi.

La commission a ensuite rejeté un amendement de Mme Jacqueline Fraysse ayant le même objet.

M. Francis Vercamer a présenté un amendement tendant à ce que les curriculum vitae ne comportent ni le sexe, ni l'âge, ni la nationalité, ni la photographie du candidat à l'embauche.

La rapporteure a fait observer qu'une telle pratique existait aux Etats-Unis mais qu'en France il semblait préférable de laisser aux partenaires sociaux le soin d'établir un code de bonnes pratiques.

Mme Martine Billard a jugé cet amendement très positif, les enquêtes montrant clairement que la première source de discrimination repose sur l'apparence physique.

Mme Hélène Mignon a fait observer que la simple mention du nom de famille et de l'adresse, que l'amendement laisse subsister dans les curriculum vitae, constitue une source de discrimination.

M. Michel Liebgott a estimé que les pouvoirs publics devaient avant tout faire des propositions concrètes de lutte contre les discriminations à l'embauche des personnes de couleur. Le nom de famille en lui-même apparaît souvent comme le principal facteur de discrimination.

M. Bernard Perrut a estimé que l'amendement a le mérite de poser un problème important. Cependant, l'adopter pourrait conduire les pouvoirs publics à s'exonérer de mener des actions fortes, y compris auprès des organismes publics, afin de changer les mentalités. Ainsi, une sous-préfecture du Rhône a eu l'initiative de réunir des chefs d'entreprise pour lutter contre ces formes de discrimination. Ce type d'action doit être privilégié.

M. Jean-Paul Anciaux a jugé que cet amendement ne constitue pas la solution au problème. Il est préférable d'avoir une démarche pédagogique afin d'être au plus près de la réalité du terrain des embauches.

M. Francis Vercamer a répondu qu'il avait déposé plusieurs amendements tendant à lutter contre les discriminations « par petites touches ». Le présent amendement ne constitue pas une contrainte lourde et ne bouleverse pas le droit d'embaucher librement. Une enquête a montré qu'une personne issue de l'immigration a cinq fois moins de chances d'avoir un entretien d'embauche et une personne handicapée quinze fois moins de chances qu'un candidat « normal ».

M. Jean Le Garrec a douté de l'efficacité de la réponse au problème de la discrimination à l'embauche proposée par l'amendement.

Le président Jean-Michel Dubernard a estimé que l'amendement est intéressant et va dans le sens d'une évolution décelable depuis quelques années. Si l'expérience menée dans le Rhône s'est révélée intéressante, c'est avant tout parce qu'elle a sensibilisé les employeurs au problème. Mais dès lors que le nom de famille est présent sur un curriculum vitae, c'en est fini de l'anonymat et il peut y avoir discrimination.

A l'issue du débat, la commission a rejeté l'amendement de M. Francis Vercamer.

Article L. 311-1 du code du travail

La commission a rejeté un amendement de Mme Jacqueline Fraysse tendant à inscrire en deuxième position les collectivités locales dans la liste des acteurs mobilisés pour l'emploi.

Mme Hélène Mignon a ensuite présenté un amendement tendant à intégrer les missions locales et les permanences d'accueil, d'information et d'orientation (PAIO) dans le « premier cercle » du service public de l'emploi.

La rapporteure a fait valoir qu'insérer les missions locales et les PAIO dans le premier cercle aurait une incidence juridique importante, car les organismes de ce premier cercle sont prescripteurs de prestations de formation dont le non-suivi peut justifier des sanctions contre les demandeurs d'emploi ; élargir le premier cercle durcirait donc les contraintes qui leur sont imposées. Il convient de reconnaître autrement la mission de service public des missions locales.

M. Gaëtan Gorce a dénoncé le manque de cohérence de la définition du périmètre du service public, qui intègre par ailleurs des organismes privés susceptibles d'être à l'origine de sanctions contre des demandeurs d'emploi.

M. Michel Liebgott a rappelé que le gouvernement et sa majorité sont favorables la suppression des emplois-jeunes. Il faut donc apporter un soutien aux organismes qui assurent le suivi des jeunes demandeurs d'emploi. C'est pourquoi il est nécessaire d'intégrer les missions locales et les PAIO dans le premier cercle du service public de l'emploi.

M. René Couanau a fait observer qu'aux termes du projet de loi le service public de l'emploi comprend le placement, l'indemnisation, l'insertion, la formation et l'accompagnement des demandeurs d'emploi. Or le placement et l'indemnisation sont deux missions que n'assurent pas les missions locales et qu'elles ne pourraient pas assurer du fait de leur structure associative légère.

M. Gaëtan Gorce a indiqué qu'il est possible de trouver une solution pour résoudre cette difficulté en intégrant les missions locales et les PAIO au service public de l'emploi sans leur attribuer toutes ces missions. Des conventions pourraient préciser les objectifs qui seraient les leurs au titre de leurs missions de service public.

M. Bernard Perrut a rappelé que l'ANPE travaille d'ores et déjà avec les missions locales et partage certains de ses moyens avec elles. Cependant, il paraît difficile de les ranger aux côtés de l'Etat, de l'ANPE et de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) dans le premier cercle. Il est suffisant que le projet de loi insère ces missions locales dans le code du travail et qu'elles fassent partie du deuxième cercle du service public de l'emploi.

La rapporteure a fait observer que les stages de formation sont prescrits par l'ANPE et qu'on ne pouvait pas mettre les missions locales au même plan que cet organisme public.

Mme Hélène Mignon a objecté que les missions locales s'occupent de trouver des stages aux personnes en recherche d'emploi.

M. Jean-Paul Anciaux a indiqué que les missions locales n'ont vocation ni à dispenser des stages, ni à diriger des demandeurs d'emploi vers des stages, ni à les placer dans l'emploi.

A l'issue du débat, la commission a rejeté l'amendement de M. Gaëtan Gorce, puis un autre amendement du même auteur ayant le même objet.

La commission a examiné un amendement de M. Bertho Audifax posant l'obligation de participer au service public de l'emploi pour les organismes publics ou privés visés au deuxième alinéa de l'article L. 311-1 du code du travail.

M. Bertho Audifax a expliqué que, si le présent article prévoit que le service public de l'emploi relève de la responsabilité des organismes publics, avec une possibilité de participation des organismes privés, il convient de souligner que le rôle des organismes semi-publics ou privés, tels que les chambres consulaires ou les centres de formation agricole, ne doit pas être négligé.

La rapporteure s'est déclarée défavorable à l'amendement, au motif qu'il n'est pas possible d'imposer à tous les organismes publics et privés, notamment les entreprises de travail intérimaire, qui sont visés par cet alinéa de participer au service public de l'emploi en ayant notamment une activité de placement : leur participation ne peut être facultative.

En conséquence, M. Bertho Audifax a retiré l'amendement.

La commission a examiné deux amendements identiques de M. Maxime Gremetz et de Mme Martine Billard tendant à supprimer la possibilité pour les entreprises de travail temporaire et les agences de placement privé de participer au service public de l'emploi.

Mme Martine Billard a jugé très inquiétant que les entreprises de travail temporaire aient la possibilité de participer au placement des demandeurs d'emploi, dans la mesure où ces dispositions pourraient conduire à accroître significativement leur précarité. En effet, s'ils refusent une offre de ces entreprises, ils seront désormais considérés comme ayant refusé une proposition du service public de l'emploi et leur revenu de remplacement pourrait donc être réduit, comme le prévoit l'article 7 du projet de loi.

La rapporteure s'est opposée à l'amendement, en soulignant tout d'abord l'importance de bien distinguer ce qui relève respectivement du premier et du deuxième cercles du service public de l'emploi, puisque, dans ce dernier cas, le texte ne prévoit pas de sanctions pour les demandeurs d'emploi qui ne répondraient pas aux prescriptions des organismes concernés. En outre, le projet de loi ne fait que reconnaître et encadrer davantage la situation actuelle en matière de placement : l'ANPE ne recueille déjà qu'un tiers des offres d'emploi ; l'avantage de la légalisation du placement privé est qu'on peut à cette occasion l'encadrer.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté les deux amendements.

La commission a ensuite examiné un amendement de Mme Hélène Mignon prévoyant que l'AFPA et les missions locales sont également signataires de la convention pluriannuelle Etat-ANPE-UNEDIC.

M. Michel Liebgott a expliqué que la participation de l'AFPA et des missions locales au service public de l'emploi, qui doit être effective et non pas virtuelle, implique qu'elles soient aussi parties prenantes de la convention conclue entre les différents partenaires concernés.

La rapporteure a rappelé, d'une part, que le Sénat a d'ores et déjà modifié le projet initial afin d'associer l'AFPA à la convention tripartite et, d'autre part, que les missions locales constituent un réseau sans véritable autorité hiérarchique : il n'apparaît pas évident que leur conseil national, qui n'est qu'une « tête de réseau », puisse les engager au niveau national.

M. René Couanau a estimé que, si l'on peut tout à fait comprendre les intentions des auteurs de l'amendement, le rôle de l'AFPA n'est pas, de même que pour les missions locales, d'assurer le placement ou l'indemnisation des demandeurs d'emploi. Il aurait donc été préférable de distinguer plus clairement les différentes composantes du service public de l'emploi et d'améliorer en conséquence la rédaction de l'article L. 311-1, qui n'apparaît pas opportune en l'état actuel.

Le président Jean-Michel Dubernard a suggéré qu'une nouvelle rédaction de cet amendement soit présentée lors de la prochaine réunion de la commission afin de répondre aux remarques constructives de la rapporteure et des commissaires.

Après avoir observé qu'il n'appartient pas non plus à l'ANPE d'assurer l'indemnisation des demandeurs d'emploi et s'être interrogée sur la définition du service public de l'emploi, Mme Hélène Mignon a retiré l'amendement.

Mme Hélène Mignon a également retiré un amendement similaire prévoyant que la convention pluriannuelle est également conclue avec l'AFPA.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté trois amendements de Mme Jacqueline Fraysse :

- le premier prévoyant que la convention détermine les conditions dans lesquelles le financement public des objectifs de l'activité du service public de l'emploi est assuré ;

- le deuxième proposant qu'un rapport annuel soit remis aux élus locaux afin de définir la nature et les moyens de ces objectifs ;

- le dernier précisant que seules les informations objectives « strictement » nécessaires aux services du ministère de l'emploi, de l'ANPE et des organismes d'assurance chômage soient transmises et figurent sur le dossier unique du demandeur d'emploi.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Francis Vercamer prévoyant la détermination par la convention des modalités de constitution et d'accès au dossier unique du demandeur d'emploi.

M. Francis Vercamer a précisé qu'il s'agit ainsi d'insister sur l'institution d'un dossier unique du demandeur d'emploi, tout en admettant que cela relève sans doute davantage du domaine réglementaire.

La rapporteure a jugé l'amendement contre-productif, dans la mesure où le principe du dossier unique figure d'ores et déjà implicitement dans le c) de l'article L. 311-1, qui prévoit notamment, dans la rédaction que lui donne l'article 1er du projet, qu'à défaut de convention les modalités de coordination des actions et de transmission mutuelle des informations des services du ministère de l'emploi, de l'ANPE et des organismes de l'assurance chômage seront fixées par décret en Conseil d'Etat. Ces dispositions traduisent ainsi l'engagement fort du gouvernement de veiller à une coordination accrue entre les acteurs concernés : à défaut d'accord des partenaires, il agira par décret.

Puis, la commission a rejeté l'amendement, ainsi qu'un amendement de coordination du même auteur.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté un amendement de Mme Jacqueline Fraysse visant à mentionner les collectivités « locales », et non pas les collectivités « territoriales, ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale » (EPCI) dans l'intitulé de la section 5 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code du travail.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer visant à inscrire les groupements de collectivités territoriales dans l'intitulé de la section 5 susmentionnée.

M. Francis Vercamer a expliqué que les EPCI sont également concernés par cet article.

La rapporteure a répondu que ces groupements sont déjà implicitement visés, car faisant partie des collectivités territoriales.

M. Bernard Perrut a cependant rappelé que le Sénat a déjà modifié l'article L. 311-1 du code du travail afin de mentionner les groupements de collectivités. Par cohérence, il semble donc opportun de les mentionner également dans le cas présent, car il s'agit là davantage d'un oubli que d'un problème de nature juridique.

Suivant l'avis favorable de la rapporteure, la commission a adopté l'amendement.

Article L. 311-10 du code du travail

Après que la rapporteure a émis un avis défavorable, la commission a rejeté un amendement de Mme Jacqueline Fraysse précisant que les plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi (PLIE) et les missions locales sont intégrés dans les maisons de l'emploi.

La commission a examiné un amendement de M. Bernard Perrut visant à préciser que le ressort des maisons de l'emploi doit être adapté à la configuration des bassins d'emploi.

M. Bernard Perrut a expliqué que la notion de bassins d'emploi, un peu oubliée dans le projet de loi, est reconnue par l'Etat et correspond aux réalités économiques et sociales, voire historiques et culturelles des territoires.

La rapporteure s'est déclarée favorable à l'amendement.

M. Jean Le Garrec a également approuvé l'amendement en soulignant son importance au regard, notamment, de la cohérence et de la logique du texte. Il permet de donner une vision dynamique aux maisons de l'emploi et, dans cette perspective, il pourrait également être envisagé d'introduire la notion de « pays ».

M. Gaëtan Gorce a souhaité avoir des précisions sur les intentions du gouvernement concernant les maisons de l'emploi. En particulier, quels seront les rapports entre le service public de l'emploi et celles-ci ? Qui aura la fonction de pilotage des politiques de l'emploi ? Qui dirigera les nouveaux groupements d'intérêt public (GIP) ? Les services de l'Etat seront-ils sous l'autorité des collectivités locales ? Quelles seront, d'autre part, les modalités de financement des maisons de l'emploi et selon quelles conditions le partage de ce financement entre les collectivités locales et l'Etat sera-t-il, le cas échéant, défini ?

Quant à leur positionnement géographique, l'amendement de M. Bernard Perrut permet tout à la fois de clarifier et de complexifier le dispositif prévu par le projet de loi, dans la mesure où leur zone d'intervention devra comporter trois agences locales de l'emploi et être adaptée aux bassins d'emplois. Surtout, s'agira-t-il d'un service de proximité, à l'image des job centers au Royaume-Uni, qui permettrait de répondre à un vrai besoin au niveau local ou au contraire d'un comité de pilotage de la politique de l'emploi, ce qui là encore pose le problème de la définition des compétences respectives de l'Etat et des collectivités locales et présente un risque réel de confusion ?

Pour clarifier le dispositif, le groupe socialiste souhaite donc déposer des amendements lors de la prochaine réunion de la commission afin de confier ce rôle de coordination aux agences locales pour l'emploi et faire de ces maisons de l'emploi de véritables lieux de terrain, qui permettraient concrètement de réunir l'ensemble des acteurs concernés.

Le président Jean-Michel Dubernard a relevé le caractère architectural de cette conception, alors qu'il s'agit de mettre en place un réseau, point d'ailleurs évoqué par M. Gaëtan Gorce lui-même.

Après avoir jugé que le projet de loi constitue davantage un texte de solidarité que de cohésion sociale, M. Francis Vercamer a estimé que s'il paraît intéressant que la zone d'intervention des maisons de l'emploi soit adaptée aux bassins d'emploi, ceux-ci se caractérisent cependant par une forte hétérogénéité, puisqu'un bassin peut recouvrir 600 000 habitants (cas de Lille). L'amendement serait pervers s'il conduisait à la création d'une seule maison de l'emploi par bassin.

Après avoir rappelé que l'amendement permet de recentrer utilement le dispositif sur l'identité et les spécificités des territoires, M. Jean-Paul Anciaux a estimé qu'en tout état de cause la loi n'a pas vocation à définir précisément un dispositif visant à répondre à toutes les situations locales. Ainsi, dans certains territoires, les dispositions de cet article permettront simplement de formaliser une coordination déjà existante et, dans d'autres, de la mettre réellement en œuvre en réunissant par exemple plusieurs bassins d'emploi. Les maisons de l'emploi sont donc avant tout un concept visant à appréhender au plus près du terrain les besoins en matière d'emploi et de mettre en synergie tous les acteurs, aussi bien institutionnels qu'associatifs, avec l'emploi pour seule finalité. Il est en effet nécessaire d'adapter le service de l'emploi dans la mesure où, par définition, le public concerné n'est pas mobile puisqu'il n'en a pas les moyens.

M. René Couanau a d'abord fait part de son désaccord avec la proposition de M. Bernard Perrut. Il convient de laisser la plus grande marge de manœuvre possible à l'initiative locale, sans mettre en place une architecture trop rigide. Certes la notion de bassin d'emplois est floue mais elle est meilleure que celle de « pays », qui inquiète de nombreux élus qui lui préfèrent l'exercice de l'intercommunalité.

M. Denis Jacquat a souligné la nécessité d'un dispositif efficace placé sous le signe de la proximité. Le dispositif sera particulièrement utile dans les zones où les personnes concernées ne se rendent pas naturellement à l'agence locale pour l'emploi.

Mme Martine Billard a noté que le débat montre que tout le monde met ce qu'il veut sous la notion de maison de l'emploi. Si chacun s'accorde à retenir l'objectif de la synergie des moyens, cette politique nécessite-t-elle un article de loi ? Selon le projet, les maisons de l'emploi « peuvent bénéficier d'aides » : il ne s'agit donc pas d'une obligation. Or, il est annoncé la création de 300 maisons : vont-elles toutes bénéficier d'aides ? La discussion montre bien que la baudruche est en train de se dégonfler.

M. Patrick Roy a noté que ce texte flou donne lieu à un débat qui prouve les difficultés à cerner ce que seront les maisons de l'emploi. L'indication donnée par le ministre de « maisons virtuelles » n'éclaire pas les parlementaires. Vouloir réunir dans un même lieu les services concourant à la gestion de l'emploi est une bonne chose. Cependant, il faut privilégier la proximité : à cet égard, on peut se demander si le chiffre de 300 maisons suffira. Les débats et les interrogations qui se posent sur tous les bancs soulignent que la maison de l'emploi est un concept obscur. Ces maisons devraient bénéficier d'aides, ce qui fait courir le risque de voir des secteurs privilégiés et d'autres abandonnés en fonction du montant des aides versées.

M. Dominique Dord a précisé qu'il ne s'agit pas d'établir un guichet unique, mais un réseau unique. Le guichet unique présente l'inconvénient d'éloigner l'usager du guichet.

En réponse aux intervenants, la rapporteure a indiqué que le gouvernement avait fait le triple choix de la souplesse : souplesse s'agissant de la forme de la maison de l'emploi qui peut être un groupement d'intérêt public (GIP) ou une autre structure. Souplesse s'agissant des participants : il existe seulement un noyau dur obligatoire réunissant l'ANPE, une collectivité locale, l'UNEDIC et l'Etat, auxquels s'adjoindront d'autres partenaires librement. Souplesse relative à la définition des missions : il existe une base obligatoire mais l'accueil des demandeurs d'emplois reste facultatif. Dans ce contexte, durcir les dispositions relatives aux maisons de l'emploi ne fera qu'en compliquer la mise en place. On ne part pas de rien, puisque de nombreuses initiatives locales ont déjà fait preuve de leurs succès. C'est le moment de mettre un coup de projecteur sur ces initiatives. La mise en réseau des différents acteurs est indispensable afin d'éviter que les demandeurs d'emploi ne perdent trop de temps dans les démarches. Une structure fédératrice permettra de faciliter leur parcours.

Suivant l'avis favorable de la rapporteure, la commission a adopté l'amendement.

La commission a ensuite examiné en discussion commune deux amendements de M. Gaëtan Gorce et M. Francis Vercamer visant à rendre obligatoire la mission d'accueil et d'orientation des demandeurs d'emploi pour les maisons de l'emploi.

M. Gaëtan Gorce a constaté qu'il existe autant de définition de la maison de l'emploi que d'intervenants. Si l'objectif recherché est la mise en réseau, une convention définissant les rôles de chacun aurait suffi. Le texte propose de créer une structure supplémentaire dotée de personnels et de financement. Or ce qui fonctionne, ce sont les structures proches du terrain. La maison de l'emploi ne permet pas de clarifier l'actuelle répartition des compétences. Il s'agit d'une auberge espagnole qui ne sera pas efficace. Le choix n'a pas été fait entre la maison de proximité et le comité de pilotage.

M. Jean Le Garrec a souligné l'importance de l'adjectif « virtuel » relevé par M. Patrick Roy. Cette notion permet d'identifier de multiples formes à partir d'une base commune.

M. Francis Vercamer a relevé que les deux problèmes qui se posent sont, d'une part, l'insuffisante coordination des acteurs et, d'autre part, l'inadéquation entre l'offre et la demande d'emplois. La maison de l'emploi doit coordonner ces deux équations sur un territoire donné. Si cette maison n'est que « virtuelle », le succès ne sera pas au rendez-vous. Il faut donc lui attribuer un pouvoir accru de coordination.

M. Michel Liebgott a souligné que l'adjectif « virtuel » avait été lancé par le ministre lui-même, si bien qu'on devrait plutôt parler de « maison Borloo ». En fait, le dispositif à venir consistera à délivrer un label « maison de l'emploi » à des organismes existants et à financer quelques autres structures. Mais qui sera chargé d'octroyer le label ? Quels seront les financements, alors que des actions concrètes d'insertion menées par des associations souffrent d'une insuffisance de moyens ?

M. Rodolphe Thomas a insisté sur les nécessaires mutualisation et coordination des moyens dans un bâtiment unique, afin d'éviter aux chômeurs un véritable parcours du combattant.

M. Gaëtan Gorce a remarqué que la dénomination exacte de ces maisons devrait plutôt être celle de « maisons du chômeur ». Il a résumé sa perplexité quant aux maisons de l'emploi en observant que « le cœur a ses réseaux que le réseau ne connaît pas ».

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté les deux amendements.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a également rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz précisant que les maisons de l'emploi participent à l'accompagnement « professionnel et social » des demandeurs d'emploi.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer visant à ce que les maisons de l'emploi se substituent à l'Etat pour la conclusion des conventions d'attribution des aides à divers contrats aidés et à l'insertion par l'activité économique.

La rapporteure a observé qu'en l'absence de forme juridique unique des maisons de l'emploi et de garantie qu'elles couvriront tout le territoire cette délégation générale de compétences est impossible.

La commission a rejeté cet amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer visant à ce que les maisons de l'emploi mènent des actions de sensibilisation relatives à la discrimination à l'embauche et à l'emploi.

La rapporteure s'en étant remis à la sagesse de la commission, la commission a adopté l'amendement.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté un amendement de M. Francis Vercamer visant à ce que les maisons de l'emploi puissent passer avec les entreprises des conventions dans le but de favoriser la diversité sociale du recrutement.

La commission a également rejeté un amendement de M. Yvan Lachaud visant à intégrer automatiquement les missions locales et les plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi dans les maisons de l'emploi.

Article L. 311-10-1 du code du travail

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté un amendement de Mme Jacqueline Fraysse rédigeant intégralement l'article L. 311-10-1 du code du travail.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Gaëtan Gorce imposant la forme du groupement d'intérêt public pour les maisons de l'emploi.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer substituant le terme « structure » au terme « groupement » dans la définition de la forme juridique que pourront prendre les maisons de l'emploi.

M. Francis Vercamer a indiqué qu'en l'absence d'identification juridique, les maisons pour l'emploi ne pourront pas passer valablement des conventions.

La rapporteure a donné un avis défavorable à cet amendement en rappelant l'inexistence juridique des « structures d'intérêt public ».

La commission a rejeté cet amendent, ainsi que, sur avis défavorable de la rapporteure, un autre amendement M. Francis Vercamer permettant le recours au statut associatif pour les maisons de l'emploi.

La commission a examiné un amendement de M. Gaëtan Gorce permettant la signature de conventions d'objectifs par les maisons de l'emploi avec les structures d'insertion par l'économique.

M. Gaëtan Gorce a indiqué que des conventions constitueraient le moyen le plus souple et le mieux à même de respecter les spécificités locales et les missions de l'ANPE.

La rapporteure a donné un avis défavorable à cet amendement au motif que rien dans la rédaction actuelle n'interdit de signer des conventions et que cette précision est donc superfétatoire.

La commission a rejeté cet amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Gaëtan Gorce tendant à intégrer obligatoirement les missions locales aux maisons de l'emploi.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, qui a souligné qu'afin d'éviter tout blocage, le texte ne porte que sur le noyau dur du dispositif autour duquel pourra s'articuler la diversité des déclinaisons locales, la commission a rejeté cet amendement.

La commission a de même rejeté trois amendements de M. Gaëtan Gorce tendant respectivement à intégrer obligatoirement aux maisons de l'emploi : l'AFPA ; les organisations syndicales, patronales et représentant les demandeurs d'emploi ; l'ensemble des acteurs précités.

M. Bertho Audifax a retiré un amendement intégrant aux maisons de l'emploi des élus des employeurs et des salariés.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz intégrant les missions locales aux maisons de l'emploi, un amendement de Mme Martine Billard y intégrant les associations de demandeurs d'emploi, après qu'elle a indiqué que la possibilité d'associer les demandeurs d'emploi lorsqu'ils sont organisés constitue pour eux une démarche positive, et un amendement de M. Francis Vercamer y intégrant les représentants syndicaux et patronaux, après qu'il a souligné que le fait d'omettre ces représentants est illusoire car ce sont bien les entreprises qui, in fine, créent l'emploi.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté un amendement de M. Gaëtan Gorce permettant la signature de conventions d'objectifs avec les structures d'insertion par l'économique ainsi qu'un amendement de M. Yvan Lachaud associant les maisons départementales des personnes handicapées et l'Association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés (AGEFIPH) aux maisons de l'emploi.

M. Bertho Audifax a retiré son amendement posant le caractère paritaire du conseil d'administration des maisons de l'emploi.

La commission a examiné un amendement M. Francis Vercamer confiant à leur président et non à leur directeur la faculté d'engager les maisons de l'emploi vis-à-vis de tiers.

M. Rodolphe Thomas a indiqué que la responsabilité doit incomber au président.

Mme Hélène Mignon a relevé que cet amendement permet enfin d'aborder la question, bien incertaine, du management opérationnel de ces structures.

M. René Couanau a indiqué que le mode de fonctionnement des maisons de l'emploi, qui est le mode de fonctionnement classique des GIP, est parfaitement décrit dans cet article, ce qui peut d'ailleurs être source de rigidité.

M. Jean Le Garrec a souligné que l'on passe directement du virtuel au rigide, ce qui témoigne du flou artistique qui entoure ce dispositif. Il s'est inquiété des éventuels transferts de personnels de l'ANPE et a exhorté la commission à abandonner ce concept introuvable de maison de l'emploi au bénéfice de celui plus opératoire de lieu d'animation collective permanente.

M. Gaëtan Gorce a indiqué que si l'on était dans un montage local on pourrait se contenter de solutions pragmatiques en rapport avec le contexte. Si l'on est en revanche dans une démarche nationale, se pose un vrai débat politique concernant l'orientation du fonctionnement des maisons de l'emploi et l'autorité qui les manage. Les doutes qui pouvaient exister avant la réunion présente au sujet des maisons de l'emploi sont désormais levés : on se demandait à quoi elles correspondaient, on a compris qu'elles ne correspondent à rien en particulier.

M. Rodolphe Thomas a souligné que ce dispositif reposera avant tout sur la volonté politique des élus : les responsabilités doivent appartenir au président, non au directeur.

M. Jean-Paul Anciaux a rappelé les divers échecs du passé et souhaité que l'on encourage les expériences qui ont d'ores et déjà montré leur efficacité en matière de synergies.

M. Patrick Roy a indiqué qu'il n'est pas dans l'intention du groupe socialiste de donner des leçons en ce domaine mais qu'il est en revanche urgent d'obtenir des éclaircissements.

M. Bernard Perrut a rappelé que sur le plan juridique le fonctionnement décrit correspond déjà au fonctionnement des missions locales.

M. René Couanau s'est insurgé face à cette profusion de détails relatifs au fonctionnement, qui relève à l'évidence du domaine réglementaire.

Après que la rapporteure a indiqué que des simplifications du dispositif pourraient effectivement être proposées ultérieurement, la commission a rejeté cet amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer définissant les membres possibles d'un GIP-maison de l'emploi : Etat, collectivités locales, organismes paritaires collecteurs agréés, partenaires sociaux, associations, structures d'insertion par l'activité économique, chambres consulaires et entreprises.

M. Rodolphe Thomas a précisé qu'il s'agit d'inclure les chambres consulaires et les entreprises parmi les partenaires associés aux maisons de l'emploi.

Considérant cette précision inutile, la rapporteure s'est déclarée défavorable et la commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné trois amendements concernant la composition du comité supérieur de l'emploi, les deux premiers de M. Gaëtan Gorce y introduisant l'un les représentants des régions et les associations de chômeurs, l'autre seulement ces dernières, le troisième de Mme Martine Billard ayant le même objet que l'amendement précédent.

Mme Martine Billard a déclaré que l'article L. 322-2 du code du travail, dans la rédaction que lui donne le projet de loi et qui n'a pas été modifiée par le Sénat, précise que des représentants des collectivités territoriales sont présents dans le comité supérieur de l'emploi. Les régions qui, de surcroît, sont compétentes en matière de formation professionnelle doivent donc être mentionnées, de même que les associations de demandeurs d'emploi.

M. Bernard Perrut a fait observer que ces amendements rapprochent le dispositif proposé de la structure juridique des comités de bassin d'emploi.

Considérant ces précisions superflues puisque la région est une collectivité territoriale et que les syndicats de salariés, mentionnés par le projet de loi, représentent aussi les salariés en recherche d'emploi, la rapporteure s'est déclarée défavorable à l'adoption de ces amendements.

La commission a rejeté les trois amendements.

La commission a examiné un amendement de Mme Martine Billard, obligeant les employeurs à notifier toute place vacante aux maisons de l'emploi.

Mme Martine Billard a indiqué qu'il s'agit de transférer aux maisons de l'emploi la mission de recueillir des offres d'emploi.

M. Gaëtan Gorce a considéré que cet amendement introduit un risque d'inégalité entre les différents demandeurs d'emploi.

La rapporteure s'est déclarée défavorable en rappelant que le projet supprime l'obligation de dépôt des offres d'emploi.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article 1er bis

Codification de la définition des missions locales

Cet article additionnel, introduit par le Sénat à l'initiative de sa commission des affaires sociales, a pour objet de codifier la définition des missions locales pour l'insertion des jeunes et de leur conseil national.

Article L. 311-10-2 du code du travail

Le nouvel article L. 311-10-2 qu'il est proposé d'insérer dans le code du travail reprend mot à mot la définition des « missions locales pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes » inscrite à l'article 7 de la loi n° 89-905 du 19 décembre 1989 favorisant le retour à l'emploi et la lutte contre l'exclusion professionnelle.

L'insertion est effectuée dans la section 5, intitulée « Rôle des collectivités territoriales et des maisons de l'emploi », du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code, intitulé « Service public de l'emploi » (ces deux intitulés étant issus de l'article 1er du projet supra) ; les deux nouveaux articles relatifs aux missions locales se placeront juste après ceux relatifs aux maisons de l'emploi.

Le rôle des missions locales dans la politique territoriale de l'emploi, à l'égal des maisons de l'emploi qu'elles ont précédées, sera ainsi reconnu.

Article L. 311-10-3 du code du travail

De la même manière, le nouvel article L. 311-10-3 qu'il est proposé d'insérer reprend mot à mot la définition du Conseil national des missions locales inscrite à l'article 8 de la loi précitée du 19 décembre 1989.

Par cohérence, il conviendrait de supprimer formellement les articles 7 et 8 précités de la loi de 1989, qui n'ont plus lieu d'exister. Il faut également veiller à la coordination avec le nouveau droit à l'accompagnement des jeunes en difficulté prévu à l'article 9 du présent projet.

*

La commission a adopté trois amendements de la rapporteure : le premier autorisant les missions locales à recruter des personnels sous statut de droit privé, le deuxième reconnaissant la mission de service public de l'emploi assurée par les missions locales et le troisième de coordination.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté un amendement de M. Francis Vercamer associant les missions locales aux maisons de l'emploi.

La commission a adopté un amendement de coordination de la rapporteure.

La commission a adopté l'article 1er bis ainsi modifié.

Article 2

Réglementation de la publicité et de la diffusion des offres d'emploi

Cet article vise à adapter la législation relative aux « petites annonces » d'offres d'emplois, d'une part pour réprimer certains abus, d'autre part pour y tenir compte de la suppression du monopole légal de l'ANPE et de l'évolution technique : il n'y a plus seulement la presse, mais aussi internet...

Le, en réécrivant les deux premiers alinéas de l'article L. 311-4 du code du travail, a d'abord pour effet de supprimer l'interdiction en vigueur de l'affichage et de la diffusion par tout autre moyen des offres d'emploi, interdiction à laquelle la diffusion par voie de presse constituait une dérogation réglementée.

En effet, la suppression de l'obligation des employeurs de déposer leurs offres à l'ANPE (par le paragraphe VIII de l'article 1er supra) entraîne nécessairement la reconnaissance de leur droit à faire connaître ces offres par tout moyen, sous réserve d'une réglementation destinée à empêcher les abus.

Tel est l'autre objet du présent paragraphe I : il encadre la diffusion par voie de presse des offres d'emploi, et ce d'une manière plus rigoureuse que dans le droit en vigueur : il prohibe la vente de « feuilles d'offres ou de demandes d'emploi », mais précise que ne relèvent pas de cette catégorie les publications qui n'ont pas pour objet « manifeste » les opérations de placement par voie d'annonces et dont moins de la moitié de la surface est consacrée aux offres et demandes d'emploi.

Il résulte de cette rédaction que seront autorisés les journaux gratuits de petites annonces d'emplois, mais pas les journaux payants ; la publication d'offres d'emploi dans la presse en général sera par ailleurs autorisée, mais sous réserve que ces annonces ne couvrent pas plus de la moitié des journaux. Cette réglementation nouvelle correspond à une application pratique du principe de gratuité des services d'aide au placement pour les demandeurs d'emploi.

Le vise à prendre en compte l'apparition des moyens de diffusion électronique en complétant une disposition prévoyant que « tout employeur qui fait insérer [dans la presse] une offre anonyme d'emploi est tenu de faire connaître son nom ou sa raison sociale et son adresse au directeur de la publication » : cette règle devra s'appliquer pour toute diffusion par un moyen de communication accessible au public. Le texte proposé manque toutefois de précision en ce qu'il n'indique pas à qui les coordonnées de l'employeur devront être transmises quand il aura recouru à une diffusion par internet, par exemple : le responsable d'un site internet n'est pas vraiment un « directeur de publication » comme le vise actuellement la loi ; il convient de trouver une formule plus large permettant de viser tout responsable d'un moyen de diffusion.

Le supprime en premier lieu une disposition obligeant les organes de presse à transmettre à l'ANPE les annonces d'emplois reçues, disposition qui n'a plus de sens après la suppression de l'obligation de dépôt des offres à l'agence par les employeurs. Par ailleurs, toujours pour tenir compte de l'existence d'internet, il étend aux offres d'emplois « diffusées » la faculté offerte par la loi à l'ANPE et aux services du ministère du travail de demander aux organes de presse de leur transmettre les coordonnées des employeurs qui ont fait paraître des offres anonymes.

Le, dans la même optique, étend à toutes formes de diffusion d'offres d'emplois un ensemble de règles applicables actuellement aux seules annonces de presse : prohibition des discriminations d'âge, des allégations mensongères et des annonces en langue étrangère (avec dérogations).

Le précise la notion d'allégation fausse ou susceptible d'induire en erreur dans les offres d'emplois en ajoutant, dans la liste existante (et non exhaustive) d'éléments de tromperie présentée dans la loi, le caractère effectivement disponible ou non de l'emploi.

Enfin, le étend à tous les moyens de communication la dérogation existante, au bénéfice des journaux rédigés dans une langue étrangère, à l'obligation de diffuser les offres d'emploi en français.

*

La commission a adopté deux amendements de précision de la rapporteure.

Elle a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Après l'article 2

La commission a examiné un amendement de Mme Cécile Gallez élargissant la composition du conseil d'administration des hôpitaux au député de la circonscription.

Se rendant aux arguments de la rapporteure, M. Bernard Perrut a déclaré que l'amendement était retiré.

Article 3

Autorisation et réglementation de l'activité de placement

La suppression du monopole de placement de l'ANPE, résultant des modifications apportées par l'article 1er supra aux articles L. 311-1 et L. 311-2 du code du travail, s'accompagnera nécessairement d'une réglementation de la nouvelle activité concurrentielle de placement.

La convention n° 181 précitée de l'OIT, que notre pays envisage de ratifier, rend compte de cette nécessité en se donnant pour double objectif de permettre aux « agences d'emploi privées » d'opérer tout en protégeant les chômeurs qui recourront à leurs services (article 2, § 3, de la convention) ; elle dispose donc que les Etats doivent encadrer l'activité de placement privée afin de garantir le respect de la liberté syndicale, la non-discrimination, la gratuité des services pour les demandeurs d'emploi et la protection des données personnelles relatives aux travailleurs, qui doivent être limitées aux éléments pertinents pour l'accès à l'emploi.

Le présent article propose donc de soumettre les opérateurs de placement privés à un régime de déclaration administrative et prévoit l'édiction (par décret en Conseil d'Etat) d'une réglementation relative aux données nominatives qu'ils recueilleront. On rappelle que les garanties nécessaires en matière de gratuité des services pour les demandeurs d'emploi et de non-discrimination sont par ailleurs données par l'article L. 310-2 du code du travail nouvellement rédigé par l'article 1er du projet de loi.

Au-delà des garanties fondamentales susmentionnées, l'on peut s'interroger sur l'ensemble de garanties économiques et sociales, d'obligations qualitatives, de contrôles qu'il conviendrait ou non d'imposer aux nouveaux opérateurs.

Le rapport de M. Marimbert souligne que les expériences récentes d'ouverture à la concurrence de l'activité de placement chez nos voisins européens ont été marquées par des degrés de libéralisation inégaux, entre les deux extrêmes de l'assimilation de celle-ci à une activité commerciale normale et du maintien de procédures d'agrément. La rapidité de l'expansion du placement privé a naturellement été inversement proportionnelle au degré de contrôle administratif maintenu. Les expériences que le rapport présente comme les plus intéressantes sont selon lui caractérisées par une volonté « d'inscrire l'apport attendu des initiatives privées dans le cadre d'une véritable stratégie publique d'animation du marché du travail », l'Etat conservant la responsabilité de l'architecture du système qu'il met en place, fixant des objectifs aux opérateurs et en assurant le suivi.

Spontanément, des opérateurs privés auront tendance à aller vers les clients les plus intéressants, qui sont déjà ceux que ciblent les conseils en recrutement : les cadres et autres salariés « à potentiel » du côté des salariés ; les grandes entreprises du côté des employeurs. Faut-il accepter cet effet d'écrémage en admettant que l'ANPE continuera à s'occuper des personnes et des entreprises moins « intéressantes » ou faudra-t-il inciter (ou contraindre) les opérateurs privés à s'occuper aussi des chômeurs de longue durée non qualifiés, par exemple ? Le projet de loi s'inscrit dans une logique plutôt « libérale » en prévoyant un régime déclaratif destiné à assurer un contrôle strict des garanties fondamentales de gratuité pour les salariés et de non-discrimination (sexuelle, syndicale, raciale ou autre) mais pas un contrôle plus qualitatif centré sur la prise en considération d'objectifs sociaux et économiques.

Le I du présent article commence par abroger les dispositions en vigueur, remontant à 1945, qui organisaient la suppression des bureaux de placement payants et l'extinction progressive des bureaux gratuits antérieurs. Il les remplace par trois articles nouvellement rédigés du code du travail.

Article L. 312-1 du code du travail

Le nouvel article L. 312-1 institue une obligation de déclaration pour toute personne physique ou morale de droit privé dont les services de placement constituent l'activité « principale ». Cette déclaration devra être effectuée à l'« autorité administrative », qui n'est pas plus amplement définie, mais dont on peut penser qu'il devrait s'agir des services extérieurs du ministère du travail, car ils seront chargés du contrôle (voir infra).

Il est précisé que la fourniture de services de placement sera exclusive de toute autre activité lucrative, sauf le conseil en recrutement ou en insertion professionnelle et la fourniture d'intérimaires. Cette précision éclaire le critère d'activité « principale » susmentionné : en fait l'activité de placement sera nécessairement exclusive, sauf dans les cas où elle se combine avec celles de conseil en recrutement ou de fourniture d'intérimaires. D'ores et déjà, la distinction entre le « placement » stricto sensu (encore interdit en principe aux entreprises concernées) et ces activités est difficile à faire ; l'absence d'obligations déclaratives pour les « chasseurs de tête » ou les entreprises de travail temporaire qui pratiqueraient marginalement le placement évitera des contentieux.

Aux obligations déclaratives seront adjointes des obligations statistiques, afin que l'Etat puisse conserver une vision exhaustive du marché du travail.

Enfin, le projet exempte de déclaration les catégories d'opérateurs privés de placement déjà autorisés par la loi : les associations et entreprises intermédiaires pour les services à la personne en vertu de l'article L. 129-1 du code du travail ; les agents artistiques en vertu de son article L. 762-3 (il faudrait y ajouter les agents sportifs) ; les entreprises conduisant des actions de reclassement pour leur personnel en vertu du dernier alinéa de l'article L. 311-1 dans sa rédaction en vigueur.

Article L. 312-2 du code du travail

L'article L. 312-2 habilite l'inspection du travail à contrôler les opérateurs de placement et le respect de l'ensemble de leurs obligations (la référence à l'article L. 310-2 renvoyant aux principes de gratuité et de non-discrimination). Les contrevenants pourront être suspendus trois mois.

Article L. 312-3 du code du travail

L'article L. 312-3 renvoie les modalités d'application des articles précédents à un décret en Conseil d'Etat. Ce décret traitera aussi des données nominatives utilisées par les opérateurs de placement.

Le II introduit une disposition transitoire et donc non codifiée.

Selon le deuxième alinéa de l'article L. 311-1 du code du travail dans sa rédaction en vigueur, des établissements publics, organismes paritaires et associations agréés par l'Etat ou conventionnés par l'ANPE peuvent concourir au service public du placement. De fait, l'ANPE a largement délégué sa fonction de placement, par exemple au réseau associatif « Cap Emploi » pour les personnes handicapées et à l'APEC pour les cadres. Le présent paragraphe dispense de déclaration les acteurs de droit privé (associations) déjà agréés ou conventionnés.

*

Article L. 312-1 du code du travail

La commission a examiné un amendement de M. Gaëtan Gorce et un amendement de Mme Martine Billard soumettant à une procédure d'agrément de l'autorité administrative l'activité de placement exercée par des organismes privés.

M. Gaëtan Gorce a indiqué que les organismes privés, et notamment les entreprises, vont être autorisés à participer à une mission de service public, ce qui aura des conséquences importantes sur la situation des chômeurs, qui pourront subir des sanctions pour ne pas avoir obéi aux prescriptions de ces intervenants privés. Une simple procédure déclarative est insuffisante pour assurer les garanties nécessaires. Le placement doit être une activité contrôlée et encadrée. La faculté ouverte aux entreprises de travail temporaire d'avoir une activité de placement, par exception au principe d'exclusivité de celle-ci, est également inquiétante.

Mme Martine Billard a fait observer que la rédaction actuelle risque de générer l'apparition d'escrocs sur le marché du placement. Le conseil en recrutement et en insertion professionnelle est un champ très large, qui laisse une entrée possible à diverses sectes ayant déjà envahi le champ de la formation professionnelle. Il faut instaurer un agrément et un minimum de contrôles afin de protéger les personnes fragilisées et vulnérables.

La rapporteure s'est déclarée défavorable à ces amendements ; selon le projet, les activités de placement seront déclarées et contrôlées par l'inspection du travail, ce qui suffira à sanctionner les irrégularités. De surcroît, les personnes en recherche d'emploi ne rémunèrent pas les organismes de placement, ce qui élimine tout risque d'escroquerie.

La commission a rejeté les deux amendements.

La commission a rejeté deux amendements de M. Maxime Gremetz, le premier instituant également un régime d'agrément, le second précisant que le service de placement est exclusif de toute autre activité lucrative.

La commission a adopté un amendement de précision de la rapporteure.

Article L. 312-2 du code du travail

La commission a adopté un amendement de précision de la rapporteure.

Elle a examiné un amendement de Mme Jacqueline Fraysse et un amendement de M. Gaëtan Gorce permettant la fermeture définitive d'un organisme de placement à titre de sanction.

M. Gaëtan Gorce a indiqué que face à des faits graves portant préjudice aux demandeurs d'emploi, les organismes en cause doivent être contraints de cesser définitivement leur activité.

La rapporteure s'est déclarée défavorable, indiquant que si des escroqueries ou des faits discriminatoires justifiant une sanction aussi sévère sont constatés, c'est au juge pénal qu'il appartiendra de la prononcer.

La commission a rejeté ces amendements.

La commission a rejeté un amendement de Mme Martine Billard tendant à prévoir la fermeture de l'organisme de placement en cas de récidive.

Article L. 312-3 du code du travail

La commission a rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz destiné à mieux encadrer les échanges d'informations nominatives entre organismes de placement.

Mme Martine Billard a présenté un amendement tendant à prévoir une durée limitée pour la conservation des informations nominatives par les organismes de placement.

Après que la rapporteure a fait valoir que la loi informatique et libertés ainsi qu'une directive communautaire de 1995 prévoient déjà cette mesure, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

Article 3 bis (nouveau)

Coordination

L'article L. 312-1 du code du travail tel que réécrit par l'article 3 du présent projet précise que les entreprises de travail temporaire (intérim) pourront fournir des services de placement. Or, actuellement, l'article L. 124-1 du même code dispose que l'activité de fourniture de travail temporaire est exclusive de toute autre, ce qui est incompatible. A l'initiative de sa commission des affaires sociales, le Sénat a donc inséré à l'article L. 124-1 un rappel de l'exception à cette exclusivité qu'instaure l'article L. 312-1.

*

La commission a rejeté un amendement de suppression de l'article de M. Maxime Gremetz.

La commission a adopté l'article 3 bis (nouveau) sans modification.

Article 4

Sanction pénale du non-respect de l'obligation de gratuité

L'article L. 361-1 du code du travail punit de six mois de prison et/ou de 3 750 € d'amende les infractions aux articles L. 312-1 et suivants du code du travail, c'est-à-dire aux dispositions en vigueur prohibant l'activité privée de placement (en organisant l'extinction des bureaux de placement antérieurs à 1945). La suppression de cette prohibition implique naturellement celle de cette incrimination, ce qu'effectue le présent article.

Cette suppression est opérée par la substitution d'une nouvelle incrimination qui encourra donc les mêmes peines : le non-respect de l'obligation de gratuité des services de placement pour les demandeurs d'emploi, qui est posée au second alinéa de l'article L. 310-2 du code du travail tel que réécrit par l'article 1er du présent projet.

*

La commission a adopté l'article 4 sans modification.

Article 5

Autorisation à l'ANPE de créer des filiales et de prendre des participations

Cet article tend à autoriser l'ANPE à prendre des participations et à créer des filiales pour l'exercice de ses missions d'assistance aux demandeurs d'emploi et aux employeurs pour leurs recrutements (comme tout établissement public, elle reste régie par le principe de spécialité). Ces filiales pourront facturer leurs services aux employeurs.

Cette faculté ouverte à l'agence de développer des activités payantes, en s'associant le cas échéant avec des opérateurs privés, lui permettra, par exemple, de conduire des actions de reclassement engagées par des entreprises dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi. Elle représente la contrepartie légitime de la perte du monopole légal du placement.

Il paraît également utile, comme l'observe dans son rapport M. Balmary, que l'ANPE, qui a très largement externalisé des tâches dans la période récente comme le manifeste le tableau ci-après, conserve un certain socle de compétences lui permettant de juger de la qualité de ses prestataires. Le fait d'exercer, dans le cadre concurrentiel, le même type d'activités constitue un moyen de préserver ce socle de compétences en interne.

La formulation retenue par le projet, selon laquelle « les filiales peuvent fournir des services payants », laisse planer une ambiguïté sur la faculté des services non filialisés de l'agence de vendre leurs prestations. L'obligation de filialiser les services payants « concurrentiels » aurait l'avantage de cantonner leur développement, afin de garantir a contrario le maintien de moyens suffisants pour assurer le service public « traditionnel ». D'autres solutions sont possibles, comme celle suggérée par le rapport précité : définir dans les contrats de progrès Etat-ANPE l'équilibre entre les activités de l'agence pour le compte de l'Etat et ses activités au service d'autres commanditaires.

A l'initiative de sa commission des affaires sociales et du gouvernement, le Sénat a enrichi le contenu du décret d'application en Conseil d'Etat prévu en spécifiant qu'il fixera la nature des activités pouvant être filialisées, ce qui devrait permettre d'identifier a contrario un cœur de métier correspondant au « service universel de base » que l'ANPE devra continuer à proposer dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui.

Le Sénat a également précisé la rédaction sur un autre point qui était sujet à débat : les conditions de la concurrence entre l'ANPE et les opérateurs privés. Le décret en Conseil d'Etat devra apporter « les garanties de nature à prévenir toute distorsion de concurrence ».

Volume de prestations sous-traitées par l'ANPE

2001

2002

OBJECTIFS 2003

PRESTATIONS D'ACCOMPAGNEMENT

426 000

747 000

980 000

- DONT SOUS-TRAITANCE

260 000

530 000

PART DE LA SOUS-TRAITANCE EN %

61

71

62 AU 1ER TRIMESTRE

BILANS DE COMPÉTENCE

4 000

118 000

180 000

- DONT SOUS-TRAITANCE

4 000

118 000

PART DE LA SOUS-TRAITANCE EN %

100

100

100

ATELIERS

402 000

829 000

1 300 000

- DONT SOUS-TRAITANCE

241 000

556 000

PART DE LA SOUS-TRAITANCE EN %

60

67

64 AU 1ER TRIMESTRE

EVALUATION

108 000

153 000

310 000

- DONT SOUS-TRAITANCE

108 000

153 000

PART DE LA SOUS-TRAITANCE EN %

100

100

100

Source : rapport de l'instance d'évaluation du Commissariat général du plan présidée par Dominique Balmary.

*

La commission a été saisie de deux amendements de suppression de l'article présentés par M. Gaëtan Gorce et Mme Martine Billard.

M. Gaëtan Gorce a fait valoir que le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale n'a pas apporté de justification précise lors de son audition par la commission sur les motifs conduisant à remettre en cause le monopole de l'ANPE. On affirme que l'appel à des organismes privés permettra de favoriser le rapprochement des offres et des demandes d'emploi. Cependant, cette réforme risque de créer un marché de l'emploi à deux vitesses où les demandeurs d'emploi les plus en difficulté n'auront accès qu'aux seuls services de l'ANPE.

M. Jean-Paul Anciaux a estimé que si la réforme n'était pas engagée, il faudrait exclure effectivement l'ensemble des organismes privés de l'activité de placement. En outre, le secteur associatif est également très présent et l'association des trois types d'organismes, publics, privés et associatifs, est à même de donner les meilleurs résultats en matière de placement.

Mme Martine Billard a rappelé qu'il existe déjà un organisme privé chargé du placement des cadres sans emploi, l'Association pour l'emploi des cadres et a exprimé la crainte que l'application du droit de la concurrence ne conduise à rogner les ailes de l'ANPE au nom de l'égalité de concurrence entre les organismes privés et les organismes publics.

La rapporteure a rappelé que le monopole de l'activité de placement de l'ANPE n'est pas respecté, puisqu'un tiers seulement des offres d'emplois y sont déposées. La faculté d'intervenir dans le champ concurrentiel sera pour l'agence la contrepartie de l'ouverture du placement à la concurrence. Au demeurant, selon les indications fournies par son directeur général, les activités filialisées ne devraient représenter que de l'ordre de 1 % du budget de l'ANPE.

M. Michel Liebgott s'est inquiété du sort des travailleurs qui veulent faire évoluer leur carrière en changeant d'emploi. L'ANPE restera-t-elle gratuite non seulement pour les chômeurs, mais aussi pour les salariés cherchant un autre emploi ?

La rapporteure a indiqué que les prestations de l'ANPE fournies à la personne demandant un emploi seraient toujours gratuites ; ce ne sont que celles demandées par les entreprises qui pourront être payantes.

A l'issue du débat, la commission a rejeté les deux amendements de suppression de l'article.

Elle a également rejeté un amendement de M. Gaëtan Gorce donnant un statut public aux agents des filiales de l'ANPE par des agents publics.

La commission a adopté l'article 5 sans modification.

Article 6

Activation des dépenses de l'assurance chômage

Le présent article a pour objet de donner une base légale générale et pérenne aux mesures d'activation des dépenses de l'assurance chômage.

Comme l'observe le rapport de M. Jean Marimbert, l'évolution vers l'activation des dépenses de l'assurance chômage a été un processus de longue haleine. Dès les années 1980, les partenaires sociaux ont mis en place des prestations qui s'inscrivaient dans une logique de soutien au retour à l'emploi, comme les conventions de conversion, l'allocation formation reclassement (AFR), les conventions de coopération. Les conventions de conversion ont été instituées en 1986 au bénéfice de salariés licenciés : ceux-ci percevaient pendant six mois une allocation de conversion co-financée par leur ex-employeur et l'UNEDIC et bénéficiaient d'une aide au reclassement assurée par des équipes spécialisées constituées de personnes de l'ANPE. L'AFR créée en 1988 permettait à des demandeurs d'emploi de percevoir une allocation égale à celle d'assurance chômage en suivant un stage de formation professionnelle. Enfin, les conventions de coopération issues d'un accord interprofessionnel de 1994 visaient à faciliter le reclassement de demandeurs d'emploi depuis plus de huit mois en versant une aide à l'employeur les embauchant.

Puis, l'instauration du PARE-PAP en 2001 a traduit une volonté de généralisation (tous les demandeurs d'emploi indemnisés étant visés) d'une conception « active » de la dépense d'indemnisation, puisqu'il s'est agi de mettre au point un plan d'aide au retour à l'emploi pour chacun et d'exiger en contrepartie des engagements.

Pratiquement, les partenaires sociaux ont défini alors différents modes d'« activation », qui ont ensuite été inscrits dans la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel :

- l'aide à la mobilité géographique ;

- l'aide dégressive à l'employeur embauchant en contrat à durée indéterminée un demandeur d'emploi indemnisé inscrit depuis plus de douze mois ;

- l'aide individuelle à la formation, qui peut financer un SIFE ou SAE ;

- le financement par l'UNEDIC des actions d'évaluation et d'accompagnement de l'ANPE ;

- le financement de contrats de qualification (le principe du financement éventuel par l'UNEDIC de contrats de qualification pour les chômeurs de vingt-six ans et plus avait été posé à titre expérimental par la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions ; il a été prorogé par la loi n° 2001-624 précitée, puis pérennisé par la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social pour les nouveaux contrats de professionnalisation qui ont remplacé les contrats de qualification.

Par ailleurs, l'article 120 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale a institué un dispositif dit « PARE anticipé » qui permet aux salariés subissant un licenciement économique de bénéficier de mesures d'évaluation des compétences et d'accompagnement en vue du reclassement pouvant être financées par l'UNEDIC dès leur période de préavis, donc avant qu'ils ne perçoivent des allocations chômage.

Le I du présent article 6 tend à poser comme un principe pérenne l'« activation » des dépenses d'indemnisation en l'insérant dans le code du travail, ce qui n'est pas le cas des mesures existantes, et en l'élargissant : ne sont plus visés nommément différents dispositifs, mais toutes mesures « favorisant la réinsertion professionnelle ».

L'autonomie de gestion de l'assurance chômage est cependant préservée, et même renforcée : l'« activation » de ses moyens, qui n'est pas obligatoire, sera effectuée dans les limites fixées par les parties signataires de la convention UNEDIC pluriannuelle et pour des mesures que cette convention aura définies.

Cette rédaction paraît inspirée du souci de mettre fin aux imperfections juridiques qui ont entraîné l'annulation récente par le Conseil d'Etat (26) de plusieurs annexes, accords d'application et arrêtés d'agrément de la convention UNEDIC, aux motifs, entre autres, que :

- dès lors que l'article 1er précité de la loi du 17 juillet 2001 renvoyait à un décret le plafonnement financier des mesures d'activation prévues et confiait à l'ANPE la prescription de l'aide à la mobilité instituée, les partenaires sociaux ne pouvaient, dans un accord d'application de la convention UNEDIC, confier aux ASSEDIC le soin de déterminer les orientations relatives à la distribution de cette aide et de fixer l'enveloppe financière afférente ;

- plus généralement, l'article L. 352-2 du code du travail donnant à l'ensemble des organisations syndicales et patronales représentatives le droit de participer aux négociations sur l'indemnisation du chômage, les organisations signataires de la convention UNEDIC ne pouvaient renvoyer à une commission paritaire composée des seuls représentants de ces organisations la fixation de diverses règles d'application.

A contrario, la rédaction proposée par le projet de loi, reconnaissant le rôle de l'assurance chômage et la responsabilité particulière des organisations qui acceptent d'endosser sa gestion en signant périodiquement des conventions, réserve bien aux parties signataires de cette convention la fixation des « limites » aux mesures d'activation, ce qui peut être lu comme leur donnant compétence pour l'ensemble des mesures nécessaires à leur application.

Par ailleurs, il est proposé que les bénéficiaires potentiels des mesures d'activation soient :

- d'une part, les chômeurs percevant l'allocation d'assurance (les bénéficiaires de l'ARE-aide au retour à l'emploi étaient 1,74 million en avril 2004), ce qui exclut les chômeurs non indemnisés ou relevant du régime de solidarité (principalement de l'ASS : 334 000 bénéficiaires en avril 2004) ;

- d'autre part, par anticipation, les salariés licenciés pour motif économique durant leur préavis, dans la continuité de l'ouverture effectuée par l'article 120 de la loi de modernisation sociale.

La gestion de ces mesures sera assurée par l'ANPE, selon le modèle PARE, ou par d'autres organismes « participant au service public de l'emploi » au sens de l'article L. 311-1 du code du travail réécrit par le présent projet (ce qui couvre notamment les prestataires divers de formation et d'aide au retour à l'emploi, les entreprises de travail temporaire et les nouveaux opérateurs de placement privés), dans des conditions prévues par la convention pluriannuelle Etat-ANPE-UNEDIC instituée dans le même article.

Le II supprime l'article 1er précité de la loi du 17 juillet 2001, devenu inutile compte tenu de la portée plus générale de la disposition introduite par le présent article 6.

Pour les mêmes raisons, la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 351-8 du code du travail, issue de l'article 120 précité de la loi de modernisation sociale, pourrait également être supprimée.

*

La commission a adopté un amendement de coordination de la rapporteure.

La commission a adopté l'article 6 ainsi modifié.

Article 7

Réforme du régime des sanctions administratives
à l'encontre des demandeurs d'emploi

Le présent article comporte une réforme du régime des obligations des demandeurs d'emploi et des sanctions administratives qui peuvent leur être appliquées.

Cette réforme est d'une portée mesurée. Elle vise à rendre plus effectif le régime disciplinaire qui existe déjà, en levant des ambiguïtés juridiques sur les pouvoirs des différentes administrations et en clarifiant les obligations des demandeurs d'emploi, mais aussi en prévoyant une meilleure graduation des sanctions et en garantissant les droits des personnes concernées à travers la mention légale d'une procédure contradictoire.

1. Un dispositif en vigueur inadapté

Le dispositif de contrôle et de sanction des demandeurs d'emploi en vigueur, qui fait intervenir les services de l'Etat, ceux de l'assurance chômage et l'ANPE, apparaît, selon plusieurs rapports récents, inadapté.

- On se souvient des négociations ayant précédé la mise en place en 2001 du PARE (plan d'aide au retour à l'emploi)-PAP-ND (projet d'action personnalisé pour un nouveau départ). Les partenaires sociaux avaient envisagé dans un premier temps de confier à l'assurance chômage des pouvoirs de contrôle inédits vis-à-vis des demandeurs d'emploi, avant d'être contraints par le gouvernement d'alors de revoir leur copie. Le PAP-ND a cependant gardé pour objet, entre autres, de rappeler aux demandeurs d'emploi indemnisés leur obligation de recherche d'emploi.

Le rapport d'évaluation précité de l'IGAS sur la mise en œuvre du PAP-ND produit des données sur les radiations effectuées par l'ANPE : en 2002, il y aurait eu environ 17 000 radiations de la liste des demandeurs d'emploi de l'ANPE pour refus d'emploi, refus de formation et fausse déclaration, soit 5 % de l'ensemble des radiations, dont le plus grand nombre (370 000) sont liées à des non réponses à des convocations. La multiplication des convocations à des entretiens à l'ANPE qu'a entraînée le programme PAP-ND apparaît comme responsable de l'augmentation des radiations que l'on relève ; à cet égard, l'IGAS constate que l'absence des chômeurs aux entretiens auxquels ils sont convoqués est souvent liée à la reprise d'un emploi (qui n'a pas été déclarée), mais considère aussi que les publics les plus en difficulté ne sont peut-être pas assez conscients des conséquences d'une absence à un entretien, ce qui justifierait un effort particulier d'information.

- Le rapport de M. Jean Marimbert relève « les difficultés persistantes de la coordination concernant le contrôle de la recherche d'emploi ». Le dispositif est effectivement complexe, qui fait intervenir les services du contrôle de la recherche d'emploi (SCRE) dépendant des directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP), mais aussi ceux de l'ANPE, qui peuvent radier de la liste des demandeurs d'emploi, et ceux des ASSEDIC, qui peuvent suspendre le versement des prestations.

Une convention tripartite Etat-UNEDIC-ANPE a été conclue sur la question en 2001, disposant que les ASSEDIC peuvent saisir les DDTEFP en cas de non-présentation à leurs convocations, en présence d'indices de fraude ou en présence de doutes sur la réalité de la recherche d'emploi ; les services de l'Etat doivent alors traiter le dossier dans les deux mois, l'assurance chômage pouvant suspendre le paiement des allocations dans l'intervalle.

Cette organisation entraîne des incertitudes juridiques : le pouvoir de suspension des allocations par l'assurance chômage a été remis en cause par une décision de justice (tribunal de grande instance de Paris, 2 juillet 2002) au motif qu'il s'agirait d'une sanction que ne pourraient prendre que les services de l'Etat. Il a également été contesté dans le seul cas particulier où la suspension est fondée sur un doute quant à la réalité de la recherche d'emploi, car l'article L. 351-18 du code du travail confie le contrôle de la recherche d'emploi aux seuls services de l'Etat.

- La Cour des comptes a consacré dans son rapport public 2003 un développement au contrôle de la recherche d'emploi tel que mis en œuvre par les services extérieurs de l'Etat. Elle y fait plusieurs constats sévères (également faits par M. Marimbert) sur la situation dans la période 1999-2001 qu'elle a analysée : les moyens humains des SCRE sont insuffisants (une circulaire demande un contrôleur pour 10 000 demandeurs d'emploi ; on serait seulement à 0,7 ou 0,8, voire moins) ; leur formation continue est incomplète ; l'activité des services, mesurée en nombre de convocations envoyées et d'entretiens effectués, est également inférieure de moitié ou plus aux normes fixées par le ministère... Compte tenu d'une part de ces moyens et de cette activité limités, d'autre part du fait que la seule sanction effective dont disposent les services est selon le code du travail (27) l'exclusion du droit à l'assurance chômage, sans possibilité de sanction graduée, le nombre de sanctions prononcées est faible : 2 000 en 1999 et 2000, 1 700 en 2001, moins de 1 400 en 2002. Cela représente selon les années 0,06 à 0,09 % des demandeurs d'emploi indemnisés.

A cet égard, il est intéressant de comparer le contrôle de la condition de recherche d'emploi opéré chez les demandeurs d'emploi avec celui effectué dans le cadre d'une autre allocation conditionnelle, le RMI, dont le versement peut être, rappelons-le, suspendu pour non-respect de la condition d'insertion (signature et respect d'un contrat d'insertion). On pourrait penser qu'étant donnée la nature du RMI, revenu d'existence vital pour ses bénéficiaires, qui sont par définition des personnes en grande difficulté, l'application faite de la condition d'insertion serait moins sévère que pour l'ensemble des demandeurs d'emploi, dont la situation est en moyenne moins difficile. Or on constate que le taux moyen de suspensions-sanction du RMI au titre de la clause d'insertion s'est élevé à 3,6 % en 2003 (28), soit une « sévérité statistique » quarante ou cinquante fois plus grande que pour les demandeurs d'emploi indemnisés !

La Cour critique également la faiblesse de la coordination entre les services de l'Etat, de l'ANPE et des ASSEDIC : formellement, l'article L. 351-26 du code du travail « encourage » depuis 1993 la signature de conventions départementales tripartites ; or ce n'est apparemment qu'en 2003 qu'une majorité de départements (63) ont pu être couverts par ces conventions. Sur le terrain, il apparaît que l'activité de contrôle des SCRE est effectuée de manière prédominante en auto-saisine plutôt que suite aux radiations prononcées par l'ANPE et aux signalements des ASSEDIC. Sur ce point, la rapporteure ne peut que rendre compte de l'agacement que suscite chez les partenaires sociaux gestionnaires de l'assurance-chômage, tant patronaux que syndicaux, le peu de répondant des services de l'Etat aux signalements des ASSEDIC : il semblerait qu'une part très significative de ces signalements ne reçoive même pas de réponse dans les deux mois réglementaires et que 10 à 20 % seulement (des chiffres divers ont été produits selon les ressorts territoriaux connus par les personnes auditionnées) conduisent à une suppression de l'allocation.

Considérant que la situation est peu satisfaisante, la juridiction financière conclut dans son rapport précité en appelant à une réforme : « Soit l'Etat intensifie son contrôle, institue une échelle de sanctions plus graduée que celle qui existe et accroît la coopération avec l'ANPE et l'assurance chômage, soit il partage ce pouvoir avec les opérateurs de terrain, et en particulier l'assurance chômage qui pourrait alors disposer d'un pouvoir de sanction ». Les termes de cette alternative sont également posés par le rapport de M. Marimbert.

2. La nécessité d'un régime de sanctions

L'existence de régimes d'indemnisation du chômage paraît impliquer inéluctablement celle d'obligations sanctionnées pour ceux qui en bénéficient, sauf à se placer dans une logique strictement assurantielle où l'allocation serait la contrepartie inconditionnelle - une fois liquidée comme une pension de retraite - des cotisations versées.

M. Jean Marimbert insiste sur la difficulté d'une question qui renvoie aux ambiguïtés de la société quant aux exigences vis-à-vis des demandeurs d'emploi - entre sévérité de principe affichée et traitement des cas individuels plutôt libéral - et aux contradictions du droit. Le préambule de la Constitution de 1946 affirme en effet tout à la fois le devoir pour chacun de travailler et le droit d'avoir un emploi ou d'obtenir de la collectivité des moyens d'existence, établissant un lien entre droits et obligations en matière d'emploi. Cette conception est sans doute la plus valable : la rigueur vis-à-vis des demandeurs d'emploi ne peut être justifiée que si, par ailleurs, l'effort de la collectivité en vue de les ramener à l'emploi est le plus grand.

Si l'on regarde nos voisins européens, qui sont nos premiers concurrents et partenaires et dont le système social est comparable au nôtre, on constate qu'ils ont mis en place des dispositifs de réduction, de suspension provisoire ou de suppression des allocations chômage fondés sur les mêmes motifs qu'en France : fraude, absence aux convocations, refus d'emploi ou de formation... Et la tendance est plutôt au durcissement de ces dispositifs.

Le rapport précité observe que certains pays s'efforcent de préciser les obligations des demandeurs d'emploi notamment en matières d'emplois « compatibles » dont le refus peut être sanctionné, par exemple en chiffrant le temps de déplacement maximal afférent à un emploi géographiquement compatible ou l'écart de salaire maximal entre ancien et nouvel emploi qui doit être accepté sous peine de perte de l'indemnisation. La fixation de telles règles, pour l'auteur du rapport, a le mérite de sortir du non-dit et du double langage qu'il perçoit en France, caractérisés par la coexistence d'une stigmatisation générale et injuste des demandeurs d'emploi « profiteurs », d'une règle générale abstraite et d'une application peu rigoureuse.

Tableau comparatif des sanctions concernant la recherche d'emploi

Convocations/présentations obligatoires

Sanctions

Allemagne

Suivi personnalisé, convocations de suivi par l'agent responsable du demandeur.

2 semaines d'interruption des droits pour non présentation à un examen médical ou psychologique ; au moins 12 semaines pour refus d'emploi ou refus de participer à une mesure d'insertion professionnelle.

Belgique

2 fois par mois auprès du bureau de contrôle du lieu de résidence (obligatoire), 1 fois par mois pour les demandeurs de plus de 50 ans ou justifiant de 20 ans au moins comme travailleurs salariés ou travailleurs handicapés

4 à 52 semaines d'exclusion.

Sursis possible.

Espagne

Convocations de suivi par les organismes chargés de l'indemnisation ou du placement.

Interruption des droits :

- 1 mois pour non-présentation à convocation ;

- 3 mois ou exclusion définitive pour refus d'emploi ou action de formation ;

- 6 mois ou exclusion pour fraude.

Grande-Bretagne

Entretien préalable puis tous les 15 jours (obligatoire) ; entretien approfondi après 13 semaines puis à 6 mois.

2 à 4 semaines d'interruption pour refus de formation ou mauvaise conduite ; jusqu'à 26 semaines pour refus d'emploi.

Italie

Entretien préalable, puis à 6 mois, puis à 12 mois + entretiens selon les besoins

Radiation pour refus d'emploi ou formation.

Luxembourg

Entretien préalable, suivi personnalisé, présentation une fois par mois auprès du conseiller + entretiens selon les besoins.

7 jours d'exclusion pour non présentation à entretien (30 jours pour récidive).
Exclusion définitive pour refus d'emploi ou formation.

Source : ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale (réponse au questionnaire budgétaire).

3. La réforme proposée

Article L. 311-5 du code du travail

Le I du présent article modifie l'article L. 311-5 du code du travail, lequel pose le principe de l'existence d'une liste des demandeurs d'emploi tenue par l'ANPE et définit les obligations des demandeurs d'emploi inscrits et les conditions de radiation de la liste.

C'est sur la définition de ces cas de radiation que portent les modifications proposées par le projet de loi :

- Actuellement, peuvent être radiées les personnes qui refusent d'accepter un emploi « compatible avec leur spécialité ou leur formation antérieure, leurs possibilités de mobilité géographique compte tenu de leur situation personnelle et familiale, et rétribué à un taux de salaire normalement pratiqué dans la profession et la région ». D'une part, le A tend à supprimer dans cette phrase le mot « antérieure », ce qui aura pour effet d'autoriser la radiation des demandeurs d'emploi refusant un emploi compatible avec une formation suivie pendant leur période de chômage. D'autre part, ce paragraphe précise que pour l'appréciation des possibilités de mobilité géographique, il devra être tenu compte des aides à la mobilité proposées : cette mesure, qui constitue également un élargissement des cas de radiation, résulte du constat de la diffusion insuffisante des aides à la mobilité, le plus souvent méconnues alors qu'elles font l'objet d'un effort budgétaire (dans le cadre de la mise en place du PARE, l'UNEDIC avait prévu de consacrer, en 2002 puis 2003, 80 millions d'euros par an à ces aides ; toutefois, cette mesure ne paraît plus applicable suite à l'arrêt précité du Conseil d'Etat en date du 11 mai 2004).

- Le B apporte des précisions de coordination : en lien avec la définition du service public de l'emploi donnée par l'article 1er du présent projet, il est spécifié que c'est le refus des seules actions de formation prescrites par les organismes qui constituent le noyau dur du SPE (directions départementales du travail, ANPE, UNEDIC-ASSEDIC et AFPA) qui pourra entraîner la radiation. De même, puisque l'article L. 351-17 du code du travail, définissant les cas d'exclusion des indemnités chômage, renverra désormais au présent article L. 311-5 (cf. paragraphe III du présent article 7, voir infra), convient-il de disposer que c'est le refus de répondre aux convocations des « services et organismes compétents » et non de la seule ANPE qui justifiera d'être sanctionné. On peut toutefois s'interroger sur le champ des organismes « compétents » dont les convocations présenteront un caractère impératif : outre les organismes tels que l'ANPE et les ASSEDIC, cela inclut-il les prestataires d'actions prescrites par eux, par exemple des organismes de formation ?

Article L. 351-16 du code du travail

Le II de l'article 7 procède à une réécriture du premier alinéa de l'article L. 351-16 du code du travail, lequel a pour objet de définir la notion de « recherche d'emploi » à laquelle est subordonné, selon l'article L. 351-1 du code, le droit au revenu de remplacement versé par l'assurance chômage.

Dans le droit en vigueur, cette condition est satisfaite si les intéressés :

- sont inscrits comme demandeurs d'emploi ;

- accomplissent des actes positifs de recherche d'emploi.

L'avant-projet de loi, tel qu'il a été transmis au Conseil économique et social, prévoyait un net durcissement de ce dispositif :

- en précisant que les actes de recherche d'emploi devaient être non seulement positifs, mais aussi répétés ;

- en introduisant une nouvelle obligation pour les demandeurs d'emploi : participer « à toute action d'aide à la recherche d'emploi, d'insertion et de formation qui leur est proposée par le service public de l'emploi ».

Il est à noter que la portée de cette contrainte nouvelle ne devait pas être exagérée, dans la mesure où le refus de répondre aux convocations des « services compétents » et celui de suivre une formation constituaient d'ores et déjà des motifs d'exclusion (article L. 351-17 du code : voir infra), sous réserve de la possibilité d'un « motif légitime » de refus. La nouvelle disposition aurait pu cependant s'appliquer, par exemple, au cas du refus d'un entretien d'accompagnement ou d'évaluation prescrit par l'ANPE, mais effectué par un prestataire extérieur comme c'est le cas le plus souvent maintenant.

En tout état de cause, le texte du projet de loi tel qu'il a été déposé par le gouvernement au Parlement est revenu sur ce durcissement envisagé pour proposer une définition de la condition de recherche d'emploi qui s'écarte peu du droit en vigueur. L'obligation d'actes répétés de recherche n'y était pas reprise. Il était simplement précisé que :

- ces actes sont effectués « en vue de retrouver un emploi », ce qui permet explicitement de prendre en compte au bénéfice du demandeur d'emploi les actes qui ne relèvent pas de la recherche d'emploi stricto sensu, mais aussi, par exemple, les formations ;

- ces actes sont accomplis soit à l'initiative du demandeur d'emploi, soit sur « proposition » des organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 311-1 du code, à savoir les services du travail, l'ANPE, les ASSEDIC et l'AFPA.

Cette dernière précision paraît ne guère avoir de portée juridique : dans un domaine de droit disciplinaire exercé sous le contrôle du juge, la règle du droit pénal selon laquelle la loi est d'interprétation stricte doit s'appliquer. En conséquence, le terme « proposition » impliquant le droit de refuser, on voit mal comment pourrait être fondée en droit une décision d'exclusion contre un chômeur pour avoir refusé une proposition du service public de l'emploi.

A l'initiative de sa commission des affaires sociales, le Sénat a quant à lui réintroduit la notion d'actes « répétés » de recherche d'emploi et précisé que celle-ci pouvait aussi viser une création ou reprise d'entreprise.

En tout état de cause, et quelle que soit la définition de la condition de recherche d'emploi que l'on retienne, il serait utile, dans une optique d'alignement formel, de transposer ou de mentionner cette définition, telle que donnée au présent article L. 351-16 du code du travail, à l'article L. 311-5 précité du même code, qui prévoit à son quatrième alinéa le cas de radiation de la liste des demandeurs d'emploi pour défaut de recherche d'emploi (ou, à l'inverse, de renvoyer, dans le présent article L. 351-16, à l'article L. 311-5).

Article L. 351-17 du code du travail

Le III de l'article 7 apporte une modification importante au régime disciplinaire des demandeurs d'emploi en instituant, conformément à la recommandation de la Cour des comptes et de M. Jean Marimbert, une graduation des sanctions : désormais,l'allocation chômage pourra non seulement être supprimée, mais aussi, réduite.

Ce paragraphe a également pour objet de garantir un alignement formel des motifs d'exclusion de l'assurance chômage prévus à l'article L. 351-17 du code du travail sur ceux de radiation de la liste des demandeurs d'emploi prévus à l'article L. 311-5 du même code (modifié par le I du présent article : voir supra).

Actuellement, ces motifs sont définis dans des termes quasiment identiques dans les deux articles :

- refus d'un emploi dit « compatible » ou « convenable » (cf. commentaire du paragraphe I) ;

- refus d'une formation ;

- refus de répondre aux convocations ;

- refus de se soumettre à une visite médicale d'aptitude ;

- fausse déclaration.

Il existe toutefois quelques différences minimes. Notamment, le refus de suivre une formation, sans plus de précision, constitue un motif de radiation de la liste, alors que l'exclusion de l'assurance chômage ne peut être fondée que par le refus de certains types d'actions de formation (celles de pré-qualification, de promotion et d'acquisition et d'entretien des connaissances).

Le présent projet de loi propose que l'article L. 351-17 renvoie désormais à l'article L. 311-5 de sorte que les motifs de radiation et d'exclusion soient nécessairement définis dans les mêmes termes.

Enfin le présent paragraphe maintient toutefois une mention spécifique de la fraude et de la fausse déclaration, car il propose un régime plus sévère dans ce cas de figure : la seule sanction prévue restera alors la suppression des allocations, sans peine intermédiaire ; de plus, le remboursement des sommes indûment perçues sera demandé.

*

La commission a rejeté un amendement de suppression de l'article de M. Maxime Gremetz.

Article L. 311-5 du code du travail

M. Gaëtan Gorce a présenté un amendement tendant à réécrire la définition de l'emploi dit compatible qu'un demandeur d'emploi doit accepter sous peine de sanction. Il a en effet estimé que les dispositions contenues dans le projet de loi sont trop imprécises, notamment pour fonder un contrôle administratif ou judiciaire.

Mme Martine Billard s'est inquiétée de l'introduction dans cette définition de l'emploi compatible d'une référence aux aides à la mobilité géographique : comment prendra-t-on en compte le conjoint en activité d'une personne qui serait conduite à accepter un emploi très éloigné de son logement ? Le code du travail vise la situation personnelle et familiale du demandeur d'emploi, mais le projet de loi se soucie peu des conjoints.

La rapporteure a estimé qu'il est nécessaire d'inciter les demandeurs d'emploi à la mobilité géographique. Par ailleurs, les références à une situation salariale antérieure, comme le propose l'amendement de M. Gaëtan Gorce, figeraient trop les situations au détriment de l'emploi.

A l'issue du débat, la commission a rejeté l'amendement de M. Gaëtan Gorce.

Puis, elle a adopté un amendement de coordination de la rapporteure.

La rapporteure faisant valoir que seul un motif pénal pouvait fonder un refus de sortie du territoire, la commission a rejeté quatre amendements de M. Yvan Lachaud, présentés par M. Francis Vercamer, prévoyant la radiation de la liste des demandeurs d'emplois de ceux qui s'absenteraient du territoire sans prévenir les services compétents et/ou s'absenteraient de leur domicile au-delà de trente-cinq jours annuels dans les mêmes conditions.

La commission a ensuite adopté un amendement de la rapporteure intégrant dans les critères d'inscription sur la liste des demandeurs d'emploi le suivi des actions d'aide à la recherche d'emploi prescrites par l'ANPE et les organismes du service public de l'emploi.

Puis, la commission a été saisie de deux amendements tendant à supprimer le 2° du B du I de l'article 7 de M. Gaëtan Gorce et de Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard a expliqué qu'il convenait de maintenir la mention des convocations de l'ANPE, et non des « organismes compétents », au cinquième alinéa de l'article L. 311-5 du code du travail afin d'éviter des radiations abusives. On peut en effet craindre qu'un organisme privé ne cherche à obtenir de bons résultats de placement en obtenant des radiations dans des conditions douteuses.

M. Gaëtan Gorce s'est inquiété de la faible prise en compte des droits des demandeurs d'emploi. En contrepartie des mesures de contrôle, il conviendrait de demander aux organismes de placement et de formation des efforts particuliers d'accompagnement. Il est notamment dangereux de permettre qu'une convocation par des organismes privés simplement déclarés puisse conduire à une radiation. Ce pouvoir doit être réservé à l'ANPE.

M. Michel Liebgott a fait état du risque des demandeurs d'emploi soient poussés à accepter des offres d'emploi dégradées afin d'éviter une radiation.

La rapporteure a reconnu que la rédaction du projet de loi n'était pas parfaite étant donné le caractère peu précis des termes « organismes compétents ». Il conviendrait de ne viser que les organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 311-1 du code du travail ainsi que ceux mandatés par eux. Un amendement en ce sens pourrait être envisagé de préférence aux amendements de suppression déposés.

A l'issue du débat, la commission a rejeté les amendements de M. Gaëtan Gorce et de Mme Martine Billard.

Article L. 351-17 du code du travail

La commission a examiné un amendement de M. Gaëtan Gorce de rédaction globale de l'article L. 351-17 du code du travail

M. Gaëtan Gorce a estimé important de préciser les institutions susceptibles de prendre des décisions de suppression ou de réduction des allocations chômage. C'est pourquoi cet amendement précise les cas où une sanction peut être prise à l'encontre du bénéficiaire qui doit toujours disposer d'une procédure de recours pour contester les décisions prises à son encontre.

Sur l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté cet amendement.

La commission a adopté l'article 7 ainsi modifié.

Article 8

Organisation et procédures du contrôle de la recherche d'emploi

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 351-18 du code du travail relatif au contrôle de la recherche d'emploi.

Il répond aux observations précitées de la Cour des comptes sur la nécessité d'une réforme du dispositif actuel tout en optant, entre les deux options qui étaient proposées, pour la moins radicale : le pouvoir de sanction restera dans les mains des seuls services de l'Etat.

Eu égard à la faiblesse juridique affectant pour l'heure les décisions de suspension d'allocation prises par l'assurance chômage (cf. commentaire de l'article 7), le présent article propose en premier lieu une clarification :

- Il est précisé qu'un décret en Conseil d'Etat fixera les conditions dans lesquelles les ASSEDIC pourront suspendre ou réduire les revenus de remplacement à titre conservatoire (la décision définitive, seule sanction à proprement parler, restant du ressort des directions départementales du travail).

- La participation des agents de l'ANPE et des ASSEDIC à la mission de contrôle de la recherche d'emploi est explicitée dans la loi, ce qui devrait garantir le fondement juridique des suspensions conservatoires prononcées par les ASSEDIC pour recherche d'emploi « douteuse », ce point méritant sans doute d'être mieux clarifié

Le présent article reprend par ailleurs la notion de sanction graduée introduite à l'article 7 et pose le principe d'une procédure contradictoire, effectivement légitime dans le cadre d'une procédure de sanction. Le Sénat, à l'initiative du gouvernement, a précisé que le demandeur d'emploi aurait le droit d'être entendu pour exposer sa situation, éventuellement assisté d'une personne de son choix, avant la décision du représentant de l'Etat. On peut s'interroger sur l'opportunité de prévoir également cette procédure contradictoire pour la décision de suspension que peuvent prononcer en amont les ASSEDIC.

Enfin, cet article renvoie à un décret en Conseil d'Etat ses modalités d'application, notamment les conditions d'accès des agents chargés du contrôle aux fichiers fiscaux et sociaux (accès déjà prévu par le droit en vigueur), ainsi que les conditions de suspension conservatoire des allocations par l'assurance chômage.

*

La commission a examiné trois amendements de suppression de l'article de M. Gaëtan Gorce, de Mme Martine Billard et de M. Maxime Gremetz.

Mme Martine Billard a jugé essentiel que le contrôle de la recherche d'emploi reste de la compétence exclusive des agents publics relevant du ministère chargé de l'emploi. De plus, cet article comporte la possibilité de réduire - et non pas seulement supprimer - les allocations, ce qui revient à porter une appréciation quasiment morale sur le comportement du chômeur. En outre, cet article ne prévoit pas les conséquences d'une réduction des allocations chômage. Qu'en sera-t-il par exemple des droits annexes comme les aides complémentaires accordées par les collectivités locales ou l'accès à la couverture maladie universelle (CMU) ? Faut-il prévoir un nouveau calcul de ces droits annexes, ce qui conduirait à un transfert de charges ?

M. Patrick Roy s'est étonné que ce texte dont l'objectif est de favoriser la cohésion sociale comporte de nombreux articles visant à augmenter l'exclusion en multipliant les possibilités de sanctions. Où est la cohérence de ce texte qui risque d'augmenter la précarité plutôt que de favoriser l'insertion ?

La rapporteure a admis que le texte de l'article comporte des insuffisances, d'où l'amendement qu'elle propose ensuite pour améliorer le texte.

En conséquence, la commission a rejeté ces amendements.

La rapporteure a présenté un amendement de rédaction du deuxième alinéa de l'article L. 351-18 du code du travail, qui poursuit trois objectifs :

- clarifier le pouvoir de suspension à titre conservatoire des allocations chômage reconnu aux ASSEDIC, le texte du projet renvoyant seulement à un décret pour définir cette procédure ;

- étendre la procédure contradictoire, déjà prévue pour les décisions définitives des services de l'Etat, aux décisions de suspension provisoire ;

- instaurer une collégialité, le dernier mot restant toutefois au représentant de l'Etat, pour les décisions définitives car l'enjeu de ces décisions rend difficile de les faire reposer sur une seule personne.

Quant à la question de l'introduction d'une faculté de réduire les allocations, le fait est que le système actuel ne comporte aucune gradation des sanctions, alors qu'il est plus pédagogique de prévoir une procédure d'avertissement graduée avec la possibilité de réduire les prestations.

Tout en estimant que l'amendement proposé est équilibré, M. Jean Le Garrec s'est demandé s'il ne faudrait pas prévoir que la commission collégiale comporte une représentation des services sociaux, par exemple des centres communaux d'action sociale, pour ne pas limiter la décision au payeur et au contrôleur, mais permettre un éclairage sur l'environnement social.

Mme Martine Billard s'est inquiétée du fait que cette procédure revient à faire évoluer les allocations chômage vers une logique de droit différentiel, comme les minima sociaux, alors que ces prestations sont en fait un droit lié à l'exercice d'une activité professionnelle antérieure. Comment sera déterminée la réduction des allocations ? N'est-il pas anormal que le montant de cette réduction soit lié au salaire antérieur ? L'évolution des allocations chômage vers un « reste à vivre » n'est pas acceptable.

La rapporteure a souligné que les allocations chômage n'ont jamais été un droit inconditionnel mais sont, et ont toujours été, conditionnées à la recherche active d'un emploi.

Tout en étant d'accord sur le fond avec la rapporteure, M. Francis Vercamer s'est interrogé sur le point de savoir s'il ne revient pas au juge de déterminer l'étendue de la réduction des droits, l'appréciation de l'importance d'une fraude relevant traditionnellement de la justice.

Pour résumer l'ensemble du débat, le président Jean-Michel Dubernard a souligné que la rapporteure a bien compris les critiques émises par les auteurs des amendements précédents, ce que traduit la rédaction nouvelle qu'elle propose, plus conforme aux droits des allocataires. Même si la rédaction proposée n'est pas parfaite, il a invité les commissaires à adopter cet amendement qui pourra être amélioré ultérieurement.

La commission a adopté l'amendement, ce qui a rendu sans objet un amendement de Mme Martine Billard supprimant la possibilité de réduire l'allocation d'assurance chômage, ainsi qu'un amendement de M. Maxime Gremetz rendant suspensive la demande d'audition du demandeur d'emploi.

La commission a adopté un amendement de coordination de la rapporteure.

La commission a adopté l'article 8 ainsi modifié.

Chapitre ii

Insertion professionnelle des jeunes

Section 1

Actions en faveur des jeunes éloignés de l'emploi

Avant l'article 9

M. Jean Le Garrec a attiré l'attention de la rapporteure sur le fait qu'en dépit d'une lecture attentive de sa part des passages du projet de rapport consacré à l'insertion professionnelle des jeunes, de nombreux points lui demeurent obscurs. Le programme TRACE (trajectoire d'accès à l'emploi) a-t-il disparu ? Est-il régionalisé ? Est-il remplacé par le contrat d'insertion dans la vie civile (CIVIS) ? Qu'en est-il de l'existence de deux CIVIS distincts ?

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer prévoyant la remise au Parlement d'un rapport portant bilan du programme TRACE.

La rapporteure a observé que son rapport fournirait réponse à nombre des interrogations formulées à l'occasion de la présentation de cet amendement : le bilan demandé existe.

La commission a rejeté l'amendement.

Article 9

Réforme du contrat jeune en entreprise et instauration d'un droit
à l'accompagnement vers l'emploi pour les jeunes en difficulté

Cet article regroupe deux mesures différentes en faveur de l'emploi des jeunes les moins qualifiés : une réforme du dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise (SEJE), dit contrat jeune en entreprise, et la création d'un droit à l'accompagnement vers l'emploi pour les jeunes en difficulté.

1. La réforme du contrat jeune en entreprise

Article L. 322-4-6 du code du travail

Le I du présent article 9 modifie le dispositif SEJE défini à l'article L. 322-4-6 du code du travail.

a) Le succès du SEJE auprès des jeunes détenteurs de diplômes professionnels

Le contrat jeune en entreprise a été créé par la loi n° 2002-1095 du 29 août 2002. Il repose sur le versement d'une aide de l'Etat aux entreprises et aux associations qui embauchent un jeune de seize à vingt-deux ans révolus et d'un niveau de formation inférieur au baccalauréat. Cette embauche doit avoir lieu en contrat à durée indéterminée (CDI) et dans des conditions identiques à celles faites aux autres salariés de l'entreprise. L'aide de l'Etat est fixée forfaitairement à 225 euros par mois pour un contrat de travail à temps plein rémunéré au SMIC ; ce montant est modulé suivant la quotité de temps de travail et la rémunération, jusqu'à 130 % du SMIC. La gestion de ce dispositif a été confiée à l'UNEDIC.

Le tableau ci-après rend compte du succès du dispositif.

Les effectifs en contrat jeune en entreprise

Effectifs depuis l'instauration du SEJE au 1er juillet 2002

Au 30 juin 2003

Au 30 juin 2004

Demandes enregistrées

86 638

170 780

Entrées effectives (flux)

80 778

159 230

Ruptures de contrats

7 416

52 334

Jeunes présents (stock)

72 089

106 896

Source : ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale (réponse au questionnaire budgétaire).

Une étude (29) portant sur les 136 000 embauches en contrat jeunes effectuées jusqu'en décembre 2003 permet de tirer quelques enseignements sur les publics concernés par ce dispositif et son rôle d'insertion :

- Le contrat jeunes a été plébiscité par les très petites entreprises (TPE) : 11 % des contrats ont été signés par des entrepreneurs qui n'avaient pas de salariés auparavant et 45 % par des employeurs de un à dix salariés.

- Le niveau de qualification moyen des bénéficiaires est relativement élevé : 50 % ont obtenu le CAP ou le BEP et 13 % ont été en terminale ; à l'opposé, 19 % seulement appartiennent aux niveaux « V bis » et « VI » (études arrêtées avant la classe de seconde ou la dernière année de CAP-BEP) qui sont les publics prioritaires du programme TRACE.

- L'âge moyen est également assez élevé : 42 % des contrats ont été passés avec des jeunes de vingt et un ou vingt-deux ans.

- Les salaires sont proches du SMIC (dans 75 % des cas inférieurs à 1,1 fois le SMIC) mais les contrats le plus souvent à temps plein (79 %).

- Le dispositif facilite l'accès à l'emploi de jeunes qui étaient préalablement chômeurs et stabilise l'emploi de ceux qui étaient auparavant dans l'entreprise : 33 % des bénéficiaires étaient demandeurs d'emploi auparavant, pour 51 % en emploi (contrats en alternance inclus) ; plus d'un sur quatre travaillait déjà dans la même entreprise mais en contrat temporaire (contrat à durée déterminée, alternance).

Mesure tournée vers les entreprises, et particulièrement les plus petites, où se trouvent les plus grands gisements d'emplois, le SEJE permet à des jeunes d'accéder à un emploi stable (un contrat à durée indéterminée, à temps plein quatre fois sur cinq). Son succès démontre le bien-fondé de la formule. Cependant, au regard de l'objectif fixé, l'insertion dans l'emploi « normal » de jeunes sortis du système scolaire non (ou très peu) qualifiés, le poids des détenteurs de diplômes professionnels (CAP-BEP) parmi les bénéficiaires justifie une réorientation de la mesure.

b) Réorienter le SEJE vers les moins qualifiés

Le projet de loi propose un ajustement du dispositif SEJE : afin d'augmenter la proportion de bénéficiaires sans aucune qualification, actuellement faible, le montant du soutien de l'Etat aux employeurs sera désormais modulé en fonction du niveau de formation du jeune concerné. Ce montant sera fixé par décret ; le gouvernement envisage une fourchette de 100 à 300 euros/mois (le montant fixe étant de 225 euros actuellement).

Par ailleurs, le dispositif sera rendu accessible à l'ensemble des jeunes susceptibles de bénéficier du nouveau programme d'accompagnement créé par le paragraphe II du présent article 9 (voir infra) et qui serait défini à l'article L. 322-4-17-1 du code du travail.

Par rapport à la rédaction initiale du projet, cela signifiait un report de vingt-deux à vingt-quatre ans révolus de la limite d'âge pour entrer dans le SEJE au bénéfice des seuls jeunes sortis du système scolaire sans aucune qualification.

Cependant, la nouvelle rédaction de l'article L. 322-4-17-1 issue du Sénat est beaucoup plus large, puisqu'elle vise tous les jeunes « en difficulté et confrontés à un risque d'exclusion professionnelle » sans mention de niveau de qualification et ce jusqu'à vingt-cinq ans révolus. L'adoption du texte en l'état conduirait donc à un relèvement de la limite d'âge pour entrer en SEJE de vingt-deux à vingt-cinq ans révolus au bénéfice d'un ensemble assez large et surtout indéterminé de jeunes « en difficulté », sans critère objectif de délimitation. Un amendement de coordination apparaît donc nécessaire.

2. L'instauration d'un droit à l'accompagnement vers l'emploi pour les jeunes en difficulté

Le II du présent article 9, tel que réécrit par le Sénat, insère dans le code du travail deux nouveaux articles qui instaurent un droit à l'accompagnement vers la vie professionnelle, organisé par l'Etat, pour les jeunes en difficulté.

Cette mesure s'inscrira dans la continuité de celles mises en place précédemment avec le réseau local d'accueil, d'information et d'orientation et surtout le programme TRACE (trajectoire d'accès à l'emploi), dont elle entend dépasser les limites actuelles.

a) Le bilan mitigé des dispositifs existants

Fin 2002, le réseau d'accueil des jeunes, institué en 1982, regroupait 382 missions locales et 174 permanences d'accueil, d'information et d'orientation (PAIO), employant 8 920 personnes. Le réseau était en 2002 en relation avec 910 000 jeunes, le flux de nouveaux entrants étant un peu inférieur à 400 000/an (sur 1998-2002). 750 000 de ces jeunes ont bénéficié d'au moins un entretien la même année (30).

Ce réseau partenarial, financé et mis en œuvre par l'Etat et les collectivités territoriales de tous niveaux, a le grand mérite de toucher un public très nombreux. Mais il a été critiqué (notamment par le Cour des comptes dans son rapport public 2000) pour le manque d'outils d'évaluation de son action, lié à son éclatement institutionnel et à la faiblesse du pilotage que devrait exercer l'Etat ; il convient de saluer, depuis lors, l'effort de structuration conduit par le conseil national des missions locales.

La loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions a en outre prévu, au bénéfice des jeunes « en difficulté et confrontés à un risque d'exclusion professionnelle », un « accompagnement personnalisé et renforcé ayant pour objet l'accès à l'emploi (...) par l'articulation des actions relevant [des politiques de l'emploi et de la formation professionnelle] » ; priorité devait être donnée aux « jeunes sans qualification, de niveau VI et V bis », c'est-à-dire ceux qui n'ont pas atteint le second cycle (lycée) ou la dernière année de CAP ou de BEP. L'article 138 de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003) a transféré ce dispositif aux régions en l'inscrivant, dans des termes quasi-identiques, dans leurs compétences définies par le code général des collectivités territoriales.

Le programme TRACE, qui a résulté de la loi de 1998, est mis en œuvre principalement par le réseau d'accueil et d'orientation. Il a fait l'objet de diverses études statistiques, parfois contradictoires, mais dont on peut tirer quelques enseignements :

- Au 31 décembre 2002, 237 000 jeunes étaient entrés dans le dispositif depuis sa création ; 110 000 étaient présents dans le parcours à cette date.

- Leurs familles d'origine sont le plus souvent défavorisées : à peine plus d'un père sur deux travaille, trois fois sur quatre en tant qu'ouvrier ; les parents sont une fois sur deux immigrés ; 5,6 % des jeunes entrés dans le dispositif en 2002 déclaraient appartenir à un foyer bénéficiaire du RMI, 2,6 % de l'allocation de parent isolé (API) et 9,3 % de l'assurance chômage (allocation unique dégressive).

- TRACE n'est pas seulement un dispositif d'aide à la recherche d'emploi De manière constante, les services mobilisés pour près d'un jeune sur deux sont ceux liés à la mise en relation avec les partenaires de l'emploi, de la formation et de l'action sociale, mais aussi ceux relatifs à l'accès aux aides financières (fonds d'aide aux jeunes, aides à la mobilité...). Les services liés à la santé sont mobilisés pour un jeune sur quatre environ. Les aides aux démarches administratives sont sollicitées par un jeune sur six.

- D'après une analyse portant sur les années 2000-2002 (31), 69 % des jeunes ont obtenu au moins un emploi pendant leur passage dans le dispositif. Le premier emploi occupé après l'entrée dans le dispositif a été le plus souvent un contrat à durée déterminée ou une mission d'intérim (49 % des cas), un contrat emploi solidarité (23 %), rarement un contrat à durée indéterminée (11 %). A la sortie du dispositif, une petite moitié accède à l'emploi (ce taux s'étant plutôt dégradé de 2000 à 2002, passant de 50 à 43 %). En décembre 2002, sur l'ensemble des 126 000 jeunes sortis du programme depuis ses débuts, 40,4 % étaient en situation d'emploi ou de formation (29,5 % sur des contrats de travail de plus de six mois), 23,2 % étaient sortis sans solution d'emploi, 17,5 % avaient abandonné le programme, 18,8 % étaient sortis pour d'autres raisons (maternité, maladie, incarcération...).

Il ressort du tableau ci-après que le fait d'avoir occupé un ou plusieurs emplois durant le passage dans TRACE est un facteur déterminant de l'insertion ultérieure dans l'emploi, puisque plus de la moitié de ceux qui ont été en emploi pendant ce passage sont dans cette situation après en être sortis, contre un sixième de ceux qui n'ont pas eu d'emploi durant ce passage.

Situation au printemps 2002 des jeunes entrés dans TRACE en 1999

En %

Sur les jeunes ayant occupé depuis l'entrée dans TRACE...

Sur le total
des jeunes

- aucun emploi

- un emploi

- plusieurs emplois

Emploi

17,8

57,8

51,0

47,5

Formation

15,0

5,8

6,0

7,6

Recherche d'emploi

49,3

31,6

38,8

38,0

Inactivité

17,9

4,8

4,2

6,9

Source : DARES, « Premières synthèses » n° 44.4, 10/2003.

Le programme TRACE s'adressant effectivement à des jeunes en grande difficulté, caractérisés à la fois par des origines défavorisées et un faible niveau de formation, ses résultats en matière d'insertion professionnelle ne pouvaient être exceptionnels. Cependant, on ne peut se satisfaire de voir, trois ans après, un bénéficiaire sur deux en situation de chômage ou d'inactivité.

b) Le nouveau droit à l'accompagnement

Le Sénat a totalement réécrit le dispositif, qui dans le projet de loi initial posait effectivement de nombreux problèmes :

- La ou les collectivités compétentes pour la nouvelle politique d'accompagnement (et donc chargées de la financer) n'étaient pas clairement désignées.

- L'articulation avec les dispositifs TRACE et contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS), dont l'objet est très proche et qui relèvent de la compétence des régions depuis la loi de finances pour 2004, n'était pas traitée.

- La définition du public visé présentait des imprécisions (on parlait de jeunes « dont le parcours n'a débouché sur aucune qualification » sans renvoyer à l'échelle classique d'évaluation de la qualification) et était différente de celle prévue pour les autres dispositifs connexes (missions locales, TRACE et CIVIS : âges limite et niveaux de qualification visés différents).

Article L. 322-4-17-1 du code du travail

L'article L. 322-4-17-1 qu'il est proposé d'insérer dans le code du travail pose le principe du « droit à un accompagnement » des jeunes en difficulté.

Ce dispositif se distingue des dispositifs préexistants comme TRACE en se plaçant du point de vue des jeunes qui en bénéficieront et non des administrations chargées de la mise en œuvre : il  ne s'agit plus d'établir que l'Etat, ou les régions, peuvent conduire des actions d'accompagnement de ces jeunes, mais d'affirmer un « droit » pour les jeunes concernés.

Cette affirmation est certainement de nature à mobiliser l'administration et les intervenants. On peut toutefois s'interroger sur le contenu normatif du droit ainsi affiché, dès lors qu'il ne s'agit pas d'accéder à une prestation bien identifiée (une aide financière, un contrat de telle ou telle nature...), mais à une sorte d'intervention administrative plus ou moins définie (un « accompagnement » qui, dans le dispositif TRACE, était composé d'« actions »).

Le public visé est constitué des personnes « de seize à vingt-cinq ans révolus en difficulté et confrontées à un risque d'exclusion professionnelle », dans l'exacte continuité du dispositif TRACE.

Il est enfin clairement indiqué que l'accompagnement ainsi créé relève de l'Etat.

Le présent dispositif n'est pas couvert par la programmation financière du projet de loi (inscrite à son article 38), mais le projet de loi de finances pour 2005 prévoit des moyens conséquents :

- 66 millions d'euros seront inscrits au titre du nouvel accompagnement personnalisé, afin de financer 2 000 postes nouveaux de référents et 500 de coordonnateurs du dispositif ;

- un fonds d'insertion professionnelle nouveau sera doté de 75 millions d'euros, pour financer des actions particulières pour les jeunes les plus en difficulté ;

- l'ANPE recevra 32 millions d'euros pour créer des plateformes des vocations dans les bassins d'emploi, afin d'orienter les jeunes vers les métiers qui recrutent effectivement localement.

Article L. 322-4-17-2 du code du travail

Le nouvel article L. 322-4-17-2 traite des modalités du nouvel accompagnement.

Il est expressément disposé que ce nouveau programme, comme TRACE, sera mis en œuvre par les missions locales et les PAIO.

Une personnalisation et un renforcement de l'accompagnement sont prévus pour les jeunes de niveau VI et V bis (ceux qui n'ont pas atteint la dernière année de CAP/BEP ou la classe de seconde ; les mêmes bénéficiaient dans le programme TRACE d'une « priorité »). La personnalisation se traduira par l'obligation d'assigner un « référent » à ces jeunes.

Le projet de loi impulse clairement une gestion territoriale et partenariale du nouveau dispositif en disposant que pourront être passés des contrats d'objectifs et de moyens entre l'Etat, les régions, les départements, les communes et leurs groupements, et éventuellement les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. L'association des partenaires sociaux, conforme à la valorisation de leur rôle souhaitée par le gouvernement, devrait permettre une meilleure prise en compte par les politiques publiques des réalités territoriales de l'emploi, des métiers où il existe réellement des débouchés dans les entreprises locales. Le projet de loi précise à cet égard que les contrats d'objectifs et de moyens s'appuieront sur des diagnostics par bassin d'emploi.

*

Article L. 322-4-6 du code du travail

La commission a rejeté un amendement de Mme Martine Billard limitant le dispositif des contrats jeune aux entreprises employant au plus cinquante salariés.

La commission a adopté un amendement de coordination de la rapporteure.

La commission a rejeté un amendement de M. Gaëtan Gorce liant le bénéfice du soutien financier de l'Etat au contrat jeune en entreprise à la mise en œuvre d'un plan de formation qualifiant au profit de celui-ci, la rapporteure ayant objecté que le succès du dispositif tient notamment à sa simplicité.

La commission a examiné deux amendements identiques de M. Gaëtan Gorce et de Mme Martine Billard supprimant la possibilité de moduler le soutien financier lié au contrat jeune en entreprise en fonction du niveau de formation du jeune.

Mme Martine Billard a estimé que cette mesure, comme d'autres, tend à aider les publics les plus près de l'emploi, n'octroyant aux autres qu'une aide à la survie et écartant durablement de l'emploi les plus en difficulté.

Mme Hélène Mignon a déclaré ne pas comprendre le refus opposé sur l'amendement précédent à l'inclusion dans le contrat jeune en entreprise d'un volet formation.

La rapporteure a rappelé que le dispositif du contrat jeune en entreprise vise à favoriser l'emploi marchand et s'adresse à des publics souvent en situation d'échec scolaire, donc pas particulièrement friands de formations nouvelles. Ces jeunes peuvent de toute façon accéder aux dispositifs de formation de droit commun de l'entreprise. Il est essentiel de ne pas compliquer la gestion d'un dispositif qui a fait la preuve de son succès.

La commission a rejeté les deux amendements.

Article L. 322-4-17-1 du code du travail

La commission a examiné un amendement de M. Bertho Audifax prévoyant le recensement par l'Etat des jeunes en difficulté quittant le dispositif de formation initiale.

M. Bernard Perrut a reconnu que l'amendement soulève un vrai problème de fond. Le système scolaire ne suit pas assez les jeunes qui en sortent. On constate d'ailleurs fréquemment que ceux-ci s'adressent directement aux missions locales dans l'année qui suit la fin de leur formation au lieu de s'adresser aux cellules d'information et d'orientation (CIO). Il convient donc d'améliorer les liens entre ces structures, même si la formulation retenue par l'amendement n'est peut-être pas la plus adaptée.

M. Bertho Audifax a objecté que cette demande récurrente est systématiquement rejetée au motif que le moment ou le texte choisi ne serait pas le bon. Parallèlement, sur le terrain, on constate les dégâts que produit le renvoi de ces jeunes sans qualification dans des familles frappées par un chômage structurel.

M. Patrick Roy a observé que d'autres zones géographiques, comme le Nord, sont également très marquées par cette permanence du chômage. Toutefois, la solution la plus adaptée semble d'abord passer par le maintien des crédits dédiés à l'éducation, contrairement à ce que fait le gouvernement depuis deux ans.

La rapporteure s'est déclarée favorable à un meilleur repérage des jeunes en difficulté. Cependant, la notion de « recensement » pose problème, car elle touche notamment aux questions de libertés publiques.

M. Bernard Perrut a souhaité que l'on réfléchisse avant l'examen en séance publique à une meilleure articulation entre les missions locales et l'éducation nationale.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer visant à intégrer la lutte contre l'illettrisme à l'accompagnement des jeunes. Sur l'avis favorable de la rapporteure, la commission l'a adopté.

Mme Hélène Mignon a retiré un amendement créant un soutien financier au profit des jeunes pendant les périodes où ils ne sont pas rémunérés au titre d'un stage, d'un contrat de travail ou d'une mesure d'accompagnement personnalisé, compte tenu de son caractère superfétatoire.

Article L. 322-4-17-2

La commission a adopté deux amendements de la rapporteure, l'un de coordination, l'autre de suppression d'une mention inutile.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer prévoyant la remise par les missions locales et les permanences d'accueil, d'information et d'orientation (PAIO) d'un bilan annuel chiffré de leur action.

La rapporteure a rappelé que la plupart de ces organismes procèdent à une transmission régulière d'un tel bilan. Il suffit de le leur demander.

M. Bernard Perrut a surenchéri en rappelant le caractère obligatoire d'un tel bilan.

M. Francis Vercamer a retiré l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Bertho Audifax rendant obligatoire la production de contrats d'objectif entre l'Etat et les collectivités territoriales.

La rapporteure ayant souligné que la contrainte lui semblait antinomique de la notion de contrat, M. Bertho Audifax a retiré l'amendement.

La commission a rejeté un amendement de M. Francis Vercamer instituant un bilan annuel des actions de chaque bassin d'emploi.

La commission a adopté l'article 9 ainsi modifié.

Article 10

Réforme du contrat d'insertion dans la vie sociale

Cet article transfère à l'Etat et aménage le contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS).

1. Le CIVIS en vigueur

Outre qu'elle leur a transféré le programme TRACE, la loi de finances pour 2004 a confié aux régions la mise en œuvre du contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS). Précédemment, un premier volet, dit CIVIS « emplois d'utilité sociale », avait été mis en place, à la charge de l'Etat, par le décret n° 2003-644 du 11 juillet 2003 relatif à l'insertion des jeunes dans la vie sociale ; la loi de finances précitée a ensuite élargi la portée du CIVIS.

Le CIVIS « emplois d'utilité sociale » est destiné à des jeunes de dix-huit à vingt-deux ans révolus qui ont arrêté leurs études avant la fin de premier cycle universitaire et sont porteurs d'un projet personnel à vocation sociale ou humanitaire. L'Etat verse une aide financière à une association qui les embauche dans ce cadre ; cette aide est versée pendant trois ans au plus et plafonnée à 33 ou 66 % du SMIC selon la nature de l'activité.

Le CIVIS régionalisé institué par la loi de finances pour 2004, qui inclut le volet « emplois d'utilité sociale » décrit ci-dessus, s'adresse aux jeunes de seize à vingt-quatre ans révolus, au plus bacheliers ou n'ayant pas achevé le premier cycle de l'enseignement supérieur et rencontrant des difficultés particulières d'insertion. D'une durée de deux ans au plus, le CIVIS est un contrat qui retrace les engagements du jeune pour la mise en œuvre d'un projet professionnel à travers des actions d'accompagnement, d'orientation vers un emploi (notamment un contrat jeune en entreprise, ou en alternance, ou un emploi d'utilité sociale, cf. supra), ou encore une assistance à la création ou la reprise d'entreprise. Il a également été prévu que les jeunes majeurs engagés dans le CIVIS puissent bénéficier d'une allocation (300 euros/mois maximum) versée par la région pendant les périodes durant lesquelles ils ne perçoivent aucun revenu.

Le dispositif n'a pas été mis en œuvre pour le moment : la perspective de l'éventuelle régionalisation, finalement abandonnée, des PAIO et missions locales dans le cadre de la loi relative aux libertés et responsabilités locales, puis celle du plan de cohésion sociale ont entretenu un certain attentisme ; les décrets d'application ne sont pas encore parus ; le transfert des crédits correspondants, inscrits au budget 2004 à hauteur de 36 millions d'euros n'a pas été effectué.

2. Les mesures proposées

Le Sénat a également réécrit le présent article 10, en coordination avec les modifications apportées à l'article 9.

Le I insère deux nouveaux articles dans le code du travail.

Article L. 322-4-17-3 du code du travail

L'article L. 322-4-17-3 transfère des régions à l'Etat la compétence pour mettre en place des CIVIS et reprend l'essentiel de la définition existante de ces contrats, en procédant à quelques ajustements :

- Le public potentiel du CIVIS restera constitué des jeunes de niveau maximum « bac » ou ayant interrompu leur premier cycle universitaire. L'âge limite d'accès est repoussé de vingt-quatre à vingt-cinq ans révolus (par cohérence avec le nouvel accompagnement prévu à l'article 9 du présent projet).

- Les bénéficiaires auront le statut social de stagiaires de la formation professionnelle (comme les bénéficiaires de TRACE).

- Le projet ne reprend pas le plafonnement légal actuel de la durée du CIVIS à deux ans non renouvelables et renvoie à un décret les règles relatives à sa durée et son renouvellement, dont il est précisé qu'elles seront modulées selon le niveau de formation des intéressés. L'exposé des motifs du projet de loi indique que, pour les jeunes sans qualification, la durée du CIVIS devrait être fixée à un an, mais avec renouvellement possible jusqu'à la fin de la période d'essai suivant la signature d'un contrat de travail par le jeune.

- Le texte ne définit plus la nature des actions inscrites dans le CIVIS (le texte en vigueur mentionnant l'accompagnement, l'orientation vers un emploi, l'assistance à un projet de création ou de reprise d'entreprise, etc.). La nature des engagements des bénéficiaires est renvoyée au décret d'application.

Le gouvernement a fait état de son intention de supprimer le volet « emplois d'utilité sociale » du CIVIS, eu égard à son faible succès (seulement 405 contrats signés depuis janvier 2004) et au motif que les jeunes souhaitant s'engager dans un projet d'intérêt général pourront bénéficier du nouveau contrat d'accompagnement dans l'emploi, qui sera ouvert aux associations. Le projet de loi de finances pour 2005 intègre une réduction des crédits de 56 millions d'euros liée à cette suppression. Le présent projet de loi dans sa version initiale l'opérait en rayant la base légale de ce volet ; la version issue du Sénat ne définissant plus les actions que peut prévoir un CIVIS, donc ses « volets », la question ne relève plus de la loi et reste ouverte dans le texte soumis à l'Assemblée.

Article L. 322-4-17-4 du code du travail

L'article L. 322-4-17-4 du code du travail reprend les dispositions existantes qui prévoient le versement d'une allocation aux jeunes titulaires d'un CIVIS et majeurs pendant les périodes où ils ne bénéficient pas d'un autre revenu.

La rédaction proposée ouvre la voie à une modulation de cette allocation en renvoyant au décret d'application les montants « minimum et maximum » et non « le » montant de cette allocation.

Le projet de loi de finances pour 2005 comprend une mesure nouvelle de 52 millions d'euros au titre de cette allocation.

Le II du présent article 10 tire la conséquence de l'« étatisation » de l'accompagnement des jeunes en difficulté et du CIVIS en supprimant dans le code général des collectivités territoriales les dispositions introduites par la loi de finances pour 2004 et qui fondaient la compétence des régions en la matière.

Le III procède à une coordination avec le nouvel accompagnement prévu à l'article 9 en portant à vingt-cinq ans « révolus » la limite d'âge des jeunes pouvant bénéficier des services des missions locales.

La rédaction de ce paragraphe devra être ajustée pour tenir compte de la codification des dispositions relatives aux missions locales qu'opère l'article 1er bis du présent projet.

Le IV modifie, dans l'article 138 de la loi de finances pour 2004, les dispositions fixant la compensation aux régions du transfert de TRACE et de la création du CIVIS : le retour prévu de ce dernier et de l'accompagnement des jeunes en difficulté dans le giron de l'Etat justifie que cette compensation ne soit prévue que pour 2004 ; les mentions des exercices ultérieurs sont donc supprimées.

*

La commission a adopté un amendement de coordination de la rapporteure.

La commission a adopté l'article 10 ainsi modifié.

Article 11

Non-remplacement des emplois jeunes rompus avant terme

Cet article tend à accélérer l'extinction du programme « nouveaux services-emplois jeunes » en mettant fin à la possibilité de remplacer les jeunes rompant leur contrat avant terme pour la durée résiduelle de celui-ci.

1. Les emplois jeunes : un dispositif indifférencié et coûteux

Le dispositif emplois jeunes a été créé en 1997. Il repose sur le versement d'une subvention de l'État aux organismes publics ou à but non lucratif qui créent des activités d'utilité sociale. L'aide est versée pour chaque emploi créé occupé par un jeune, âgé de dix-huit à vingt-cinq ans quelle que soit sa situation ou jusqu'à vingt-neuf ans s'il est sans emploi et ne bénéficie pas d'une allocation de chômage ; son montant unitaire a atteint près de 16 000 € en 2002.

Ne ciblant pas les moins qualifiés, qui sont ceux qui rencontrent des difficultés structurelles pour accéder à l'emploi, les emplois jeunes ont bénéficié à des jeunes de toutes qualifications. Dans les associations et les collectivités territoriales, un tiers des jeunes recrutés a un niveau de diplôme inférieur au baccalauréat, un tiers a ce niveau, un tiers un niveau supérieur.

Le coût élevé du dispositif pour les finances publiques et son utilité contestable au service de l'emploi, faute de ciblage, ont conduit le gouvernement à en fermer l'accès en 2002.

L'arrivée progressive à échéance des contrats, conclus pour cinq ans, entraîne une réduction de la dépense publique en l'absence de nouvelles entrées ; 1,59 milliard d'euros restaient toutefois inscrits en 2004 au budget du travail au titre des emplois jeunes.

2. La mesure proposée

En cas de rupture anticipée d'un contrat emploi jeune, conclu pour cinq ans, le droit en vigueur autorise les employeurs concernés à recruter sur le même poste, avec l'aide de l'Etat, un autre jeune, mais seulement en contrat à durée déterminée pour la durée résiduelle du premier contrat. Cette disposition est sans doute avantageuse pour les employeurs, mais guère pour les jeunes concernés, qui sont recrutés pour une période raccourcie.

Il est proposé de supprimer cette faculté en interdisant le remplacement des emplois jeunes quittés avant terme par un autre contrat à durée déterminée (CDD).

La prohibition dans ce cas de figure de tout CDD, et pas seulement d'un nouveau CDD-emploi jeune, se justifie, car un CDD « de droit commun » ne peut avoir pour vocation de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale d'une entreprise (article L. 122-1 du code du travail). Il n'y a pas de raison que les employeurs publics ou associatifs engagés dans la pérennisation des postes issus des emplois jeunes puissent déroger à ce principe.

Cette mesure entraînera une économie budgétaire substantielle : spontanément, la dépense budgétaire pour les emplois jeunes sur le budget du ministère du travail devait diminuer de 509 millions d'euros en 2005 par rapport à 2004. La présente mesure conduira à une économie supplémentaire de 69 millions d'euros. Le tableau ci-après permet en effet de constater l'importance relative des flux de remplacements en cours de contrats, qui seront désormais taris.

Flux et « stock » d'emplois jeunes (France entière)

Flux d'entrée annuel

Flux de sortie annuel

« Stock » en fin d'exercice

Total

- dont 1res entrées

- dont remplacements

2001

52 136

23 651

28 485

40 414

145 748

2002

48 940

18 496

30 444

43 232

149 623

2003

26 756

3 321

23 435

65 255

109 831

2004
(1er semestre)

10 611

207

10 404

21 615

97 589

Source : ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.

*

La commission a adopté l'article 11 sans modification.

Section 2

Amélioration du statut de l'apprenti

Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué que la section 2 du chapitre II du titre Ier du projet a pour objectif de revaloriser l'apprentissage qui est aujourd'hui une voie efficace pour s'insérer dans l'emploi mais qui souffre pourtant d'une mauvaise image de marque. Il convient de stopper l'érosion du nombre de jeunes en apprentissage et ce nouveau dispositif a pour ambition d'augmenter de 40 % le nombre d'élèves dans cette filière, pour le porter à 500 000 titulaires de ce type de contrat d'ici quelques années. Les mesures proposées visent à rendre le contrat d'apprentissage plus attractif, en améliorant le statut de l'apprenti et en établissant une incitation fiscale à l'emploi d'apprentis, et à prévoir un système de financement plus transparent de l'apprentissage.

Article 12 A

Suppression de dispositions du code du travail caduques relatives
aux contrats d'apprentissage conclus avant le 1er juillet 1972

Cet article est le premier d'une section de plusieurs articles consacrée à l'« amélioration du statut de l'apprenti ».

Cette section 2, après la première section consacrée à l'insertion des jeunes, vient également avant deux autres sections (les sections 3 et 4) consacrées plus spécifiquement au financement de l'apprentissage.

Il pouvait sembler naturel, dans la perspective d'une vaste relance de l'apprentissage en France, de commencer par le statut de l'apprenti. « Rendre l'apprentissage plus attractif », tel est d'ailleurs l'objectif poursuivi par la présente section, aux termes de l'exposé des motifs.

Il est possible toutefois de s'interroger sur le faible nombre de mesures contenues initialement dans le projet, l'une permettant de conclure un contrat d'apprentissage plus court, l'autre permettant d'en conclure un à un âge plus avancé : moyens d'apparence bien modestes au regard du vaste objectif de relance de l'apprentissage. L'avant-projet de loi en contenait d'ailleurs davantage.

C'est que cette matière, pour une large part, relève de la compétence réglementaire. Aussi, c'est à la suite de l'avis rendu par le Conseil d'Etat qu'un certain nombre de dispositions auraient été retirées du texte comme ressortissant à la compétence du règlement.

De ce point de vue, l'exposé des motifs se présente comme une vaste annonce de toutes les réformes d'ordre réglementaires qui seront appelées à compléter la loi. C'est dans ce cadre que seront mis en œuvre :

- une personnalisation du parcours des apprentis, par une évaluation systématique des compétences du futur apprenti quand il commence son contrat en cours d'année scolaire et, sur cette base, une réduction ou un allongement de la durée du contrat ;

- un entretien formalisé pour un premier bilan dans les deux mois suivant la conclusion du contrat, afin de déceler les premières difficultés rencontrées, dans l'entreprise ou dans le centre de formation d'apprentis ;

- des actions pour améliorer le déroulement de la formation, comme la mise en place d'une charte de qualité ou l'instauration de formations destinées aux nouveaux maîtres d'apprentissage, arrêtées de manière concertée.

Mais d'ores et déjà le Sénat, en ajoutant à la présente section cinq nouveaux articles, a, le plus souvent à très juste titre, enrichi une construction qui ne demandait qu'à l'être.

Le présent article 12 A a été introduit par le Sénat dans un souci de simplification du droit du travail.

Il vise en effet à supprimer les dispositions des chapitres Ier à IV du titre premier du livre premier du code du travail consacré au contrat d'apprentissage, comprenant les articles L. 111-1 à L. 114-1, dispositions applicables aux contrats d'apprentissage qui avaient été conclus avant le 1er juillet 1972.

Ces articles correspondent aux quatre premiers chapitres relatifs respectivement à l'établissement du contrat, aux devoirs des maîtres et des apprentis, à la résiliation et l'expiration du contrat ainsi qu'à l'apprentissage artisanal.

Or il n'existe plus aujourd'hui de contrats conclus avant cette date. La commission des affaires sociales a donc proposé l'abrogation de ces dispositions, soutenue, au cours de la séance publique, par le gouvernement « sensible au souci de simplification » ainsi exprimé. Il est vrai au reste que les éditions actuelles du code du travail ne font plus mention de ces dispositions (32). Tout au plus peut-on s'étonner qu'elles aient ainsi perduré.

La rapporteure s'associe au souci de simplification du code du travail ainsi exprimé pour approuver l'adoption de cette disposition, à l'heure où de nombreuses voix s'élèvent pour relever la complexité croissante du code du travail (33).

*

La commission a adopté l'article 12 A sans modification.

Article 12

Conclusion d'un contrat d'apprentissage pour une durée comprise
entre six mois et un an

Cet article a pour objet de rendre possible la signature d'un contrat d'apprentissage pour une durée comprise entre six mois et un an.

Il convient en effet de garder présente à l'esprit la logique spécifique qui préside à la conclusion d'un contrat d'apprentissage, à savoir une liberté restreinte. Contrairement au contrat de travail de droit commun, le contrat d'apprentissage, en raison de sa spécificité même, est un contrat de travail à durée déterminée particulier.

1. Le cadre juridique existant et l'état des lieux

Aux termes du premier alinéa de l'article L. 115-2 du code du travail, « la durée du contrat d'apprentissage est au moins égale à celle du cycle de formation qui fait l'objet du contrat ».

En principe, cette durée est fixée à deux ans. Mais, sous certaines conditions, la durée du contrat d'apprentissage peut varier entre un et trois ans, en fonction du type de profession et du niveau de qualification préparé. Cette durée est fixée par accord entre les co-contractants, pour tenir compte du niveau initial de compétence de l'apprenti, sur autorisation du recteur de l'académie ou du directeur régional de l'agriculture et de la forêt après avis du président de l'université ou du directeur de l'établissement concerné - les demandes étant réputées acquises en l'absence de réponse pendant un mois.

Sans doute existait-il donc déjà des pratiques régulières de réduction du contrat d'apprentissage à un an, pour les apprentis déjà qualifiés entrant en apprentissage pour achever une formation et pour les personnes déjà titulaires d'un diplôme de même niveau ou de niveau supérieur. A l'inverse, on assistait à la prolongation de certains contrats d'apprentissage en cas d'échec à l'examen, ou de situations de handicaps. Mais aucune dérogation à la limite inférieure d'un an n'existait. Le tableau suivant illustre la manière dont, à l'intérieur de ce cadre donné, les durées moyennes des contrats d'apprentissage ont évolué depuis 1998.

Durée moyenne des contrats d'apprentissage

(en  %)

1998

1999

2000

2001

2002

2002/2001

1 an et moins

18,4

19,1

18,7

18,9

19,1

0,2

13 à 23 mois

12,5

14,6

17,0

18,5

18,9

0,4

24 mois

60,6

57,9

55,8

53,8

52,5

- 1,3

25 mois ou plus

8,6

8,4

8,5

8,9

9,5

0,6

Source : DARES.

On note qu'un peu moins d'un cinquième des contrats d'apprentissage sont donc d'ores et déjà conclus de manière régulière pour des durées d'un an, la mention à moins d'un an étant réservée aux cas de rupture du contrat d'apprentissage avant l'échéance minimale d'un an.

Ce cadre, toutefois, n'était pas satisfaisant.

2. La nécessité de permettre la conclusion de contrats d'apprentissage pour des durées de moins d'un an : compléments de formation et réorientations

La mesure ainsi proposée répond à deux situations distinctes.

D'une part, il existe aujourd'hui un certain nombre de situations dans lesquelles le diplôme auquel a conduit le contrat d'apprentissage n'est pas entièrement satisfaisant car, sans en être entièrement éloigné, il ne correspond pas tout à fait au type d'emploi offert. Par exemple, un jeune titulaire d'un CAP de coiffure ne trouve pas de travail car il lui manque une spécialisation de coloriste permanentiste : sans reprendre entièrement sa formation initiale, il lui revient de compléter celle-ci en se spécialisant. De même, un boulanger va souhaiter s'orienter vers la pâtisserie ; ou encore un carrossier pourrait vouloir devenir peintre en carrosserie, ou un serveur être barman. Ces cas ne sont peut-être pas innombrables, mais ils existent et le droit actuel constitue un obstacle à ces parcours dans la mesure où il oblige le jeune à reprendre sa formation pour au moins une année, là où quelques mois suffiraient.

D'autre part, de manière très distincte, d'autres difficultés se posent pour de nombreux jeunes qui, au sortir d'une formation d'un niveau déjà élevé, souhaiteraient obtenir une formation pratique par la voie de l'apprentissage, mais de manière assez rapide et sans passer par la partie théorique dispensée dans les centres de formation d'apprentis qui ne leur est pas nécessaire. On peut penser, à titre d'exemple, à un jeune ayant suivi deux années d'un DEUG de sociologie ou de psychologie, qui souhaite se réorienter vers le secteur tertiaire pour un poste de secrétariat : cas type où le jeune n'a pas besoin de formation théorique complémentaire et où l'acquisition des gestes professionnels peut être effectuée dans des délais inférieurs à une année.

C'est donc pour répondre à ces deux problèmes que le présent article vise à compléter l'actuel article L. 115-2 du code du travail pour prévoir deux cas de conclusion d'un contrat d'apprentissage pour des durées inférieures à un an.

3. Le dispositif proposé

Aux termes de l'article 12, le contrat d'apprentissage pourra être inférieur à un an lorsque la formation aura pour objet l'acquisition d'un diplôme ou d'un titre :

- « a) De même niveau et en rapport avec un premier diplôme ou titre obtenu dans le cadre d'un précédent contrat d'apprentissage ».

Paradoxalement, on se trouve là dans une logique inhérente à l'apprentissage, qui vise à étendre une période d'apprentissage, même si c'est pour peu de temps (moins d'un an) (34), puisque le contrat visé est nécessairement un deuxième contrat d'apprentissage. Ce deuxième contrat d'apprentissage doit être de même niveau, ce terme étant entendu au sens des niveaux de diplôme délivrés par l'Education nationale, mais aussi « en rapport » avec le premier diplôme, c'est-à-dire dans le même secteur d'activité ou dans un secteur faisant appel à des compétences comparables.

- « b) De niveau inférieur à un diplôme ou titre déjà obtenu ».

On se trouve ici dans l'hypothèse d'un contrat d'apprentissage unique, conclu, dans le cadre d'une réorientation de la formation initiale, pour l'obtention d'un diplôme de niveau inférieur. Ce deuxième cas doit, quantitativement, recouvrir plus de situations que le premier.

Par ces deux mesures, il doit donc, ainsi que le précise l'exposé des motifs, être possible « d'adapter la durée du contrat, dans le premier cas, à celle des formations complémentaires de courte durée, dans le second cas, aux acquis d'un jeune souhaitant réorienter sa formation initiale par la voie de l'apprentissage ».

Le Conseil économique et social, dans son avis du 31 août 2004, avait salué ces dispositions tout en alertant le gouvernement sur un point, la durée minimale de formation en centre de formation d'apprentis : « Le Conseil est favorable à ce que la durée d'un contrat d'apprentissage puisse dans certains cas être inférieure à un an, en particulier pour permettre une réorientation ou un complément de formation, sans toutefois que la durée de formation en CFA soit inférieure à une durée minimale restant à fixer ».

La discussion de cet article au Sénat a permis d'apporter une réponse à cette question, puisqu'a été adopté un amendement présenté par la commission des affaires sociales précisant que la durée du contrat « peut varier entre six mois et un an », établissant de ce fait une durée « plancher ».

Le rapporteur de la commission des affaires sociales, M. Louis Souvet, s'est prévalu, lors de la présentation de l'amendement en séance publique, de l'avis du Conseil économique et social, tout en soulignant la volonté de ne pas faire du contrat d'apprentissage un « stage », ajoutant : « Le contrat d'apprentissage relève de la formation initiale : il a une vocation éducative. Que le gouvernement veuille permettre à des personnes déjà engagées dans la vie active de compléter leur spécialisation en peu de temps est louable. Mais il ne faut pas confondre formation initiale et formation professionnelle continue ». La rapporteure souscrit entièrement à cette clarification du dispositif.

La question de la durée de la formation est abordée par un alinéa complémentaire précisant que « le nombre d'heures de formation dispensées dans les centres de formation d'apprentis ne peut être inférieur à celui prévu au premier alinéa de l'article L. 116-3 calculé au prorata de la durée du contrat ». Un amendement sera déposé par la rapporteure pour rectifier une erreur matérielle et éviter toute ambiguïté dans la compréhension de cette disposition.

Cette durée est fixée à 400 heures par an ; elle assure l'existence d'une formation théorique minimale. Autrement dit, un contrat signé pour six mois devra prévoir 200 heures de formation au minimum.

Il est possible de s'interroger sur la portée de ces deux mesures : aucun chiffrage n'a manifestement été entrepris à ce jour et le projet de loi de programmation n'est pas accompagné d'une étude d'impact.

De manière plus fondamentale, on peut mettre en cause le bien-fondé du deuxième volet de cette mesure. En effet, autant on peut comprendre l'opportunité d'une spécialisation courte dans le cadre d'une formation qui relevait déjà et continue à relever de l'apprentissage, voir d'une légère réorientation dans ce cadre, autant l'idée d'une reconversion par l'apprentissage n'est pas naturelle. Il n'est pas question de tomber dans la facilité conduisant à faire de la voie universitaire une voie d'excellence, de l'apprentissage une voie seconde - toute la philosophie du présent texte tend à démontrer le contraire. Cependant, est-il vraiment judicieux de proposer comme deuxième chance à des jeunes ayant déjà entamé des parcours d'études parfois longs une formation de quelques mois dans les centres de formation d'apprentis ? Cette réorientation est d'inspiration très pratique. Mais l'éducation doit-elle toujours l'être ? Cette mesure ne pèche-t-elle pas par défaut d'idéal ?

Il conviendrait en effet de s'attaquer également à la racine du mal, à savoir les raisons de l'échec scolaire, pour lutter contre celui-ci, plutôt que de le contourner en proposant une formation « de niveau inférieur ». Si d'ailleurs, comme on le verra ci-après, la loi du 4 mai 2004 a permis la conclusion de contrats d'apprentissage après 25 ans, c'est, notamment, pour poursuivre des études mais d'un niveau supérieur au cursus déjà entrepris.

*

La commission a examiné deux amendements de M. Christian Paul et de Mme Muguette Jacquaint tendant à supprimer cet article.

M. Christian Paul a indiqué qu'il ne s'étendrait pas au cours de cette séance de commission sur le dispositif général de l'apprentissage et qu'il se bornerait à commenter les aspects techniques de cet amendement. Si l'on prétend faire de l'apprentissage une filière d'excellence, il convient d'assurer une formation de qualité et il paraît illusoire d'arriver à cet objectif avec des contrats d'une durée inférieure à un an. C'est pourquoi un amendement de suppression de cet article est proposé pour garantir une formation rigoureuse.

M. Maxime Gremetz a souligné que l'apprentissage est une voie de formation professionnelle importante qui ne doit pas devenir une filière au rabais. Une durée de formation inférieure à un an n'est pas compatible avec l'acquisition d'une réelle qualification. Les contrats d'apprentissage de moins d'un an ne sont pas adaptés à la réalité des entreprises et ne permettront pas une véritable employabilité pour reprendre un terme cher aux employeurs. Il convient donc de supprimer cet article.

M. Bernard Perrut s'est inscrit en faux contre les propos de MM. Christian Paul et Maxime Gremetz car de nombreux acteurs de la vie économique ont fait part de l'utilité de contrats d'apprentissage de courte durée afin d'offrir à des jeunes, ayant déjà un diplôme général, la possibilité de compléter leur formation pour acquérir une qualification professionnelle pointue comme par exemple le coiffeur qui souhaite suivre une formation de coloriste ou le boulanger qui souhaite acquérir une qualification en pâtisserie.

M. Dominique Dord a souligné que ces nouveaux contrats d'apprentissage sont encadrés par la loi, certaines dispositions étant obligatoires. L'apprentissage doit gagner en souplesse pour être en mesure de proposer des formations allant de trois mois à plusieurs années.

Mme Hélène Mignon a indiqué qu'il ne faut pas se focaliser sur une durée de formation mais garantir aux apprentis l'acquisition d'une formation générale leur permettant de rebondir pour se réorienter éventuellement, l'apprentissage ne devant pas se borner à être un stage professionnel.

Défavorable à cet amendement, Mme Françoise de Panafieu, rapporteure, a insisté sur la nécessité de prévoir un dispositif permettant d'affiner la formation initiale ou d'acquérir une qualification complémentaire. En aucun cas, il ne s'agit d'une formation au rabais puisque le Sénat a prévu une période de formation de six mois minimum.

La commission a rejeté ces deux amendements.

M. Jean-Paul Anciaux a présenté un amendement prévoyant un allègement des dispositifs réglementaires pour la conclusion de contrats d'apprentissage pour des élèves ayant un niveau supérieur au bac. Dans ce cas, l'avis favorable du directeur de l'établissement d'enseignement supérieur serait suffisant alors que pour les autres contrats une autorisation du service de l'inspection de l'apprentissage est nécessaire.

Après avoir souligné la qualité des propositions très pragmatiques émises par le groupe de travail dont font partie MM. Jean-Paul Anciaux et Patrick Beaudouin, et qui ont été très utiles à la préparation de ce texte, la rapporteure a émis un avis favorable sur cet amendement qui permet d'apporter de la souplesse dans la conclusion des contrats d'apprentissage.

La commission a adopté cet amendement.

M. Jean-Paul Anciaux a présenté un amendement prévoyant une évaluation obligatoire des compétences pour l'entrée « hors cycle » des futurs apprentis (c'est-à-dire de janvier à juin) avant la signature du contrat. Cette évaluation permettra de proposer un parcours de formation personnalisée tant pour le contenu de la formation que pour la durée du cycle d'apprentissage.

Sur l'avis favorable de la rapporteure, la commission a adopté cet amendement.

Puis, la commission a adopté un amendement rédactionnel de la rapporteure.

La commission a examiné un amendement de M. Yvan Lachaud permettant de porter à quatre ans la durée du contrat lorsque la qualité de travailleur handicapé est reconnue à l'apprenti.

M. Francis Vercamer a précisé que la durée normale du contrat d'apprentissage peut varier entre un an et trois ans en fonction du type de profession et du niveau de qualification préparé. La prolongation d'une durée d'un an offerte aux apprentis handicapés devrait faciliter le déroulement de leur formation.

M. Denis Jacquat a considéré qu'il serait très utile de connaître la position des associations de défense des personnes handicapées sur cette question. Mme Martine Billard a exprimé le même souhait considérant qu'au minimum la prolongation de la durée du contrat devrait se faire avec l'accord de l'apprenti concerné.

M. Maxime Gremetz a estimé qu'il existe une grande diversité dans les types de handicap et qu'il n'est pas possible d'appliquer à ces personnes une règle unique. Il faut craindre de plus un risque de discrimination entre les apprentis handicapés dont le contrat durerait quatre ans et les autres dont le contrat durerait trois ans.

Mme Hélène Mignon a suggéré que cette proposition trouverait mieux sa place dans le cadre du projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, insistant sur la nécessité de consulter les associations. De plus, il faut se rappeler que dans le cadre du débat sur le projet de loi sur l'exclusion en 1998, les handicapés avaient refusé toute disposition spécifique les concernant.

M. Denis Jacquat a également évoqué les différents débats parlementaires concernant les personnes handicapées qui ont montré qu'elles sont très attachées à se voir reconnaître les mêmes droits que les autres travailleurs, notamment en ce qui concerne la durée du travail.

La rapporteure s'est déclarée favorable à l'amendement, en raison de l'adaptation particulièrement opportune de ces dispositifs aux personnes handicapées, et parce qu'il n'impose pas une durée mais offre une simple possibilité aux personnes handicapées de prolonger le contrat. Toutefois, il faut éviter, en tenant compte de la spécificité des personnes handicapées, de basculer dans une forme de discrimination.

Le président Jean-Michel Dubernard a fait observer qu'un texte sur la cohésion sociale doit intégrer le handicap. Il a toutefois proposé aux auteurs de retirer leur amendement afin de recueillir l'avis des associations concernées et de le redéposer le cas échéant.

L'amendement a été retiré par M. Rodolphe Thomas.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Paul Anciaux permettant, notamment par la voie de la validation des acquis de l'expérience (VAE), de prolonger un cycle de formation entamé sous un autre mode d'enseignement par la conclusion d'un contrat d'apprentissage d'une durée inférieure à un an.

M. Jean-Paul Anciaux a précisé que l'amendement vise la situation des jeunes qui commencent une formation dans un lycée professionnel et souhaitent en cours de formation s'orienter vers l'apprentissage. Il faut leur éviter d'avoir à tout recommencer en tenant compte des nouvelles possibilités offertes par la VAE. Des équivalences ou unités de diplômes pourront ainsi être acquises et favoriseront une réorientation facilitée par la souplesse des dispositifs.

La rapporteure s'est déclarée défavorable à cet amendement en raison de la difficulté à mettre en œuvre un dispositif qui mélange les rôles de l'apprentissage et de l'école. Il faudrait au minimum connaître la position de l'Education nationale sur cette question.

M. Jean-Paul Anciaux a précisé qu'au cours des auditions les représentants de l'Education nationale ont fait part de leur accord. Il est en effet important de rapprocher la formation professionnelle et la formation par alternance de l'enseignement scolaire et l'amendement ouvre cette voie, peut-être de façon un peu prématurée.

M. Denis Jacquat a approuvé l'amendement en disant que la VAE constitue une avancée reconnue par tous.

M. Rodolphe Thomas a considéré que le développement de l'apprentissage ne doit pas être entravé par les lourdeurs de l'Education nationale.

Mme Martine Billard a exprimé la crainte de voir les jeunes quitter prématurément leur formation, comme ils le font déjà souvent, pour rentrer en entreprise.

Tout en considérant qu'il faut valoriser les formations par alternance et l'apprentissage, la rapporteure a donné un avis défavorable à l'amendement car les conditions de son application ne sont pas réunies.

La commission a adopté l'amendement.

La commission a adopté l'article 12 ainsi modifié.

Après l'article 12

La commission a examiné un amendement de M. Patrick Beaudouin concernant le rôle des centres de formation d'apprentis (CFA) dans la recherche d'entreprises susceptibles de les accueillir.

M. Patrick Beaudouin a précisé qu'il s'agit de reconnaître le rôle d'accompagnateur joué par les CFA auprès des futurs apprentis, notamment en sélectionnant l'offre de formation la plus appropriée et en coordonnant le parcours pédagogique de l'apprenti, pour aller au-delà des seules missions reconnues aujourd'hui par l'article L. 116-1 du code du travail aux centres de formation d'apprentis.

La rapporteure a estimé que les CFA remplissent déjà cette fonction mais qu'ils ne sont pas un organisme de placement. De surcroît, cette disposition ne relève pas de la loi.

M. Maxime Gremetz a interrogé la rapporteure sur la place des CFA au sein du service public de l'emploi, précisant que ces centres font de la formation et non pas du placement.

La rapporteure a confirmé que les CFA ne doivent pas devenir un organisme de placement.

La commission a rejeté l'amendement.

Elle a examiné un amendement de M. Jean-Paul Anciaux permettant aux jeunes qui, à l'issue du collège, manifestent le souhait d'entrer en apprentissage, de suivre une période de découverte en entreprise d'une durée de quinze jours.

M. Jean-Paul Anciaux a précisé qu'il s'agit de limiter les ruptures de contrat d'apprentissage qui sont trop élevées et qui déstabilisent les jeunes. Il faut donc accorder à ceux qui hésitent dans leurs choix d'orientation une courte période en entreprise préalable au contrat.

Mme Hélène Mignon a estimé que l'orientation vers l'apprentissage ne correspond pas toujours à une réelle motivation des jeunes mais se fait souvent par commodité. L'amendement permettrait un choix plus éclairé. Toutefois, il faut s'interroger sur le statut des jeunes pendant cette période de quinze jours.

M. Maxime Gremetz a répété qu'il faut éviter de tirer toutes les formations vers l'apprentissage aux dépens des autres enseignements professionnels. De plus, il faudra encore définir un statut pour une durée de quinze jours.

M. Rodolphe Thomas a estimé que la disposition concerne les jeunes ayant manifesté le souhait d'entrer en apprentissage. Des conventions entre les collèges et les entreprises devraient permettre de régler la question du statut au cours de cette période préalable.

M. Denis Jacquat s'est déclaré d'accord sur le fond mais a également demandé quel serait le statut du jeune sorti du collège et pas encore entré en contrat d'apprentissage.

M. Dominique Dord s'est déclaré hostile à l'amendement car il va compliquer l'action des maîtres de stage, qui ont déjà du mal à gérer ces jeunes qui arrivent et qui repartent sans arrêt de l'entreprise. Ou bien les jeunes savent à quoi ils s'engagent, ou bien ce n'est pas en quinze jours qu'ils pourront le découvrir.

M. Christian Paul s'est étonné de la tournure du débat qui semble ignorer les problèmes de l'orientation. On ne peut qu'être d'accord avec l'établissement d'une période de découverte de l'entreprise pendant quinze jours à condition que le statut correspondant soit précisé.

M. Bernard Perrut a approuvé l'amendement qui devrait aider les jeunes à découvrir un métier et anticipe ainsi sur le futur projet de loi d'orientation sur l'école. Il est urgent de rapprocher les établissements scolaires et l'apprentissage. Les forums des métiers révèlent régulièrement l'écart entre l'Education nationale et les CFA. L'amendement devrait aider l'apprentissage à entrer à l'école et à devenir une voie de formation parmi d'autres.

M. Bertho Audifax s'est déclaré favorable à l'amendement car il devrait contribuer à réduire le hiatus entre la sortie du collège et l'insertion professionnelle.

M. Christian Paul a ajouté que si l'on veut faire dialoguer l'Education nationale et l'apprentissage il faut que chacun trouver sa place et son rôle dans l'orientation des jeunes.

M. Jean-Paul Anciaux a approuvé les interventions qui pointent les difficultés relationnelles entre l'Education nationale et l'apprentissage. Quant au support juridique, il peut prendre deux formes : soit le jeune fait acte de volontariat et il conserve son statut scolaire, soit une convention spécifique est signée pour quinze jours.

M. Laurent Wauquier a exprimé la crainte qu'un stage de quinze jours ne complique la tâche des maîtres de stage.

La rapporteure a jugé pertinent de vouloir rapprocher l'enseignement scolaire et l'apprentissage et éviter que ce dernier soit vécu comme un échec. Mais on ne peut nier que le statut des jeunes dans l'entreprise pendant le délai de quinze jours pose problème. Le futur apprenti risque de ne pas être véritablement intégré au sein de l'entreprise et donc de ne pas être en mesure d'effectuer un réel choix. Il est préférable de mener ce débat dans le cadre de la discussion du projet de loi d'orientation sur l'école.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté l'amendement.

M. Maxime Gremetz a présenté un amendement tendant à faciliter le travail du maître d'apprentissage en lui permettant de disposer du temps de travail nécessaire pour assurer sa fonction et suivre les formations appropriées. M. Christian Paul a défendu un amendement identique en expliquant qu'il est indispensable d'ouvrir des possibilités de formation aux maîtres d'apprentissage.

M. Dominique Dord a indiqué que l'intention est bonne mais que ces amendements constituent une contrainte supplémentaire devant être supportée par les entreprises qui se plaignent du poids excessif de la réglementation en matière d'apprentissage.

La rapporteure a précisé que la possibilité de formation du maître d'apprentissage existe dans le cadre de la formation professionnelle continue. En outre, elle a indiqué avoir déposé, après l'article 13, un amendement répondant partiellement au souci de MM. Maxime Gremetz et Christian Paul et a donc donné un avis défavorable.

La commission a rejeté les deux amendements.

Article additionnel après l'article 12

Constitution d'équipes tutorales d'apprentissage

M. Jean-Paul Anciaux a présenté un amendement donnant un statut législatif à l'équipe tutorale exerçant la fonction de maître d'apprentissage. On constate en effet que cette fonction est de plus en plus souvent exercée non par une personne unique mais par une équipe de professionnels au sein de laquelle un maître d'apprentissage référent assure la coordination. L'amendement précise les conditions d'expérience et de diplôme requises collégialement au sein de l'équipe.

La rapporteure s'est déclarée favorable à l'amendement sous réserve de ne pas limiter le dispositif au cadre de l'enseignement supérieur et de ne pas confier au maître d'apprentissage référent une mission de vérification de l'adéquation entre les séquences de formation en entreprise et l'enseignement académique, rôle qui n'est pas le sien.

M. Jean-Paul Anciaux a rectifié son amendement afin de supprimer ces deux mentions.

La commission a adopté l'amendement ainsi rectifié de M. Jean-Paul Anciaux.

Après l'article 12

M. Patrick Beaudouin a présenté un amendement destiné à permettre à l'apprenti de continuer à suivre la formation proposée par le centre de formation d'apprentis pendant les trois mois qui suivent une résiliation de contrat. Cette période doit permettre à l'apprenti de retrouver une autre entreprise ou de bénéficier d'autres dispositifs d'insertion dans l'emploi. Son statut pourra être celui de stagiaire de la formation professionnelle, comme le pratiquent de nombreuses régions par le biais de conventions passées avec les centres de formation d'apprentis. Il pourrait également relever d'un contrat aidé du type contrat d'insertion dans la vie sociale.

La rapporteure s'est interrogée sur la prise en charge du financement du dispositif et a souhaité avant de se prononcer qu'une étude du dispositif puisse être réalisée.

M. Patrick Beaudouin a indiqué que le financement serait assuré dans le cadre des contrats aidés signés avec la région, qui permettent la prise en charge sociale des jeunes inscrits en centre de formation d'apprentis.

Le président Jean-Michel Dubernard a proposé que l'amendement soit retiré pour être réexaminé lors de la réunion qui se tiendra en application de l'article 88 du Règlement. M. Patrick Beaudouin a retiré son amendement.

M. Jean-Paul Anciaux a présenté un amendement offrant la possibilité aux mineurs âgés de quatorze ans de découvrir un métier ou une entreprise pendant leurs vacances scolaires par le biais d'un stage de découverte donnant lieu à l'établissement d'une convention entre l'entreprise et la chambre consulaire, l'organisation professionnelle, le centre de formation d'apprentis ou la collectivité territoriale qui en assure l'organisation.

Mme Martine Billard s'est déclarée en désaccord avec la proposition car un jeune de quatorze ans a autre chose à faire pendant les vacances scolaires que d'aller travailler en entreprise. Elle a indiqué avoir le sentiment de revoir sous une autre forme l'amendement déposé par M. Serge Dassault au Sénat.

M. Maxime Gremetz a déclaré partager l'avis de Mme Martine Billard et jugé inacceptable de vouloir faire travailler des jeunes de quatorze ans.

M. Jean-Paul Anciaux a précisé que le but de l'amendement est seulement de permettre aux jeunes de mieux comprendre le monde du travail.

La rapporteure s'en est remise à la sagesse de la commission, qui a rejeté l'amendement.

Article 12 bis (nouveau)

Modification du régime de rémunération des apprentis

Cet article, introduit dans le projet lors de son examen au Sénat, apporte une réponse à une difficulté qui affectait de longue date le mode de rémunération des apprentis.

1. Une iniquité dans la détermination du mode de rémunération des apprentis

Le problème est lié au mode de détermination de la rémunération des apprentis. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 117-10 du code du travail, « l'apprenti perçoit un salaire déterminé en pourcentage du salaire minimum de croissance et dont le montant, qui varie en fonction de l'âge du bénéficiaire, est fixé pour chaque année d'apprentissage par décret (...) ».

L'enjeu du débat réside dans l'interprétation de cette disposition. Jusqu'ici, en effet, cette interprétation conduisait à prendre en compte l'année d'exécution du contrat pour déterminer le montant de sa rémunération, selon le barème établi à l'article D. 117-1 du code du travail - dont la rédaction résulte, en dernier lieu, du décret n° 92-886 du 1er septembre 1992 - et que résume le tableau ci-après.

Mode actuel de calcul de la rémunération des apprentis

(en  % du SMIC)

Année 1

Année 2

Année 3

16-17 ans

25 %

37 %

53 %

18-19-20 ans

41 %

49 %

65 %

21 ans et plus

53 %

61 %

78 %

On mesure bien, à la lecture de ce seul tableau, la progression qui peut résulter de l'application de ces taux en cas de conclusion d'un nouveau contrat d'apprentissage : un jeune de 20 ans en troisième année perçoit 65 % du SMIC, mais l'année d'après, âgé de 21 ans, il ne touche plus que 53 % du SMIC car il se retrouve en première année de son deuxième contrat.

Cette situation est d'autant plus inéquitable que la conclusion d'un nouveau contrat peut ne pas être le fait de l'apprenti, mais résulter de la rupture du premier contrat pour une cause qui lui est extérieure, la fermeture de l'entreprise par exemple.

2. Une entrave au développement des « filières » en matière d'apprentissage

Cette difficulté était connue. A l'heure de la relance de l'apprentissage, elle prenait un tour plus préoccupant encore. Il convient en effet aujourd'hui de renforcer la notion de filière, pour permettre à des étudiants d'accomplir, s'ils le souhaitent, la totalité de leur scolarité en apprentissage : après le baccalauréat, de passer par exemple un brevet de technicien supérieur par ce biais. Dès lors que l'on souhaite encourager une telle progression, il convient aussi de permettre l'établissement d'une grille de rémunération allant dans le sens de celle-ci.

Le « livre blanc sur l'apprentissage » établi par M. Renaud Dutreil (35) avait pointé, dans sa proposition 7.1., cette difficulté, et proposé, afin d'éviter ces effets de « décrochage », « de modifier la grille des rémunérations minimales en tenant compte à la fois de l'âge mais aussi du niveau de diplôme préparé ». Il allait même jusqu'à proposer un barème permettant à la fois d'assurer une progression de la rémunération d'un niveau à l'autre, de maintenir une progression, à l'intérieur d'un cursus, entre la première et la seconde année et, enfin, de maintenir, pour les troisièmes années, le niveau de rémunération de la seconde, comme l'illustre le tableau suivant.

Barème proposé de rémunération des apprentis

(en  % du SMIC)

16-17 ans

18-20 ans

21 ans et plus

Niveau V

- 1re année

25

33

43

- 2e et 3e année

33

41

51

Niveau IV

- 1re année

33

43

53

- 2e et 3e année

41

51

61

Niveau III

- 1re année

43

53

63

- 2e et 3e année

51 *

61

71

Niveaux II et I

- 1re année

53 *

63

73

- 2e et 3e année

61 *

71

81

* Il semble très peu probable de trouver un apprenti de 17 ans en 2e année d'un diplôme de niveau III, puisque cela impliquerait qu'il ait obtenu un baccalauréat à 16 ans.

C'était d'ailleurs, dès l'origine, le souhait du gouvernement. Dans l'avant-projet de l'été 2004 figurait la disposition désormais introduite dans le texte par le Sénat. L'exposé des motifs de l'avant-projet soulignait la difficulté de la pénalisation des jeunes, liée au fait que « la rédaction actuelle de l'article L. 117-10 du code du travail [conduisait] à prendre en compte l'année d'exécution du contrat pour déterminer le montant de la rémunération ».

Mais le Conseil d'Etat, dans l'avis qu'il a rendu sur cet avant-projet, en aurait jugé autrement, estimant que la rédaction en vigueur de l'article L. 117-10 du code du travail ne s'opposait pas à une modification de la grille de rémunération.

La fixation du barème « pour chaque année d'apprentissage » n'est pas en effet nécessairement synonyme de détermination « pour chaque année du contrat » : elle peut tout aussi bien être considérée comme signifiant « pour chaque année d'apprentissage entendu dans sa progression sur plusieurs contrats ».

Néanmoins, ce raisonnement n'a pas entièrement convaincu le Sénat. La commission des affaires sociales a souhaité expressément modifier l'article L. 117-10 du code du travail pour y substituer aux mots « , est fixé pour chaque année d'apprentissage » les mots : « et de sa progression dans le ou les cycles de formation faisant l'objet de l'apprentissage, est fixé » - reprenant en cela les termes mêmes de la rédaction gouvernementale initiale.

Ainsi est consacrée expressément la notion de « cycle de formation », qui implique une évolution de la rémunération même en cas de signature d'un nouveau contrat. Comme M. Louis Souvet, rapporteur de la commission des affaires sociales, l'a souligné en séance publique, ainsi peut être modifiée « cette grille de rémunération minimale en tenant compte non seulement de l'âge de l'apprenti, comme c'est le cas aujourd'hui, mais aussi du niveau du diplôme préparé ». Il a précisé, à cette occasion, que cette modification ne portait en aucun cas atteinte à « la liberté des partenaires sociaux de négocier, par un accord national interprofessionnel, le relèvement global des minima sociaux, comme cela est prévu pour les mois à venir ».

La rapporteure approuve, assortie de ces précisions, la modification du code du travail opérée, qui permet d'afficher clairement la règle qui sera à l'avenir appliquée en matière de rémunération des apprentis.

Elle proposera un amendement tendant à compléter le dispositif proposé de la suppression du dernier alinéa de l'article L. 117-10 du code du travail, suppression initialement prévue dans le projet par le I de l'article 23, abrogé par le Sénat. En effet, ce dernier alinéa précisait la nécessité d'une continuité de rémunération entre un contrat d'orientation et un contrat d'apprentissage. Or la suppression du contrat d'orientation par la loi du 4 mai 2004 rend désormais sans signification cette disposition.

*

La commission a adopté un amendement rédactionnel de la rapporteure.

La commission a adopté l'article 12 bis (nouveau) ainsi modifié.

Après l'article 12 bis (nouveau)

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer visant à améliorer la qualité de la prise en charge des apprentis en entreprise en imposant à l'employeur de procéder à une évaluation trimestrielle de leur satisfaction.

M. Rodolphe Thomas a indiqué que cet amendement met en place une véritable évaluation des conditions d'accueil de l'apprenti et incite les entreprises au respect des règles déontologiques.

La rapporteure a donné un avis défavorable à cet amendement qui crée des contraintes nouvelles pour les entreprises alors même que ces objectifs peuvent être atteints par le truchement des contrats d'objectifs et de moyens prévoyant des chartes de qualité signées par les entreprises et les CFA.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Christian Paul qui dispose que la part de la dotation de décentralisation relative à l'apprentissage doit tenir compte de l'augmentation du nombre de contrats d'apprentissage.

M. Christian Paul a rappelé que les compétences en matière de formation professionnelles ont été récemment transférées aux régions qui sont désormais les premiers financeurs publics en ce domaine. Cette réforme fait naître de légitimes craintes quant à la compensation opérée par l'Etat : c'est à celles-ci que répond l'amendement.

La rapporteure a donné un avis défavorable à cet amendement relevant davantage de la loi de finances, qui prévoit d'ailleurs une procédure d'ajustement entre la nouvelle contribution au développement de l'apprentissage et la diminution de la dotation de décentralisation. Cette préoccupation est par ailleurs satisfaite par un amendement présenté après l'article 16 bis (nouveau) sur l'évaluation de l'ensemble de ces dispositifs.

La commission a rejeté l'amendement.

Article 12 ter (nouveau)

Obligation pour les personnels dispensant des enseignements techniques
et pratiques d'effectuer périodiquement des stages pratiques en entreprise

Le présent article, introduit lors de la discussion au Sénat, complète le premier alinéa de l'article L. 116-5 du code du travail relatif à la question de « la formation des formateurs » des centres de formation d'apprentis (CFA).

Aux termes du premier alinéa de l'article L. 116-5, dans sa version aujourd'hui en vigueur, « les membres du personnel de direction, d'enseignement et d'encadrement des centres de formation d'apprentis devront posséder des qualifications définies selon des règles fixées par le décret prévu à l'article L. 119-4 ».

C'est ainsi que le décret n° 93-316 du 5 mars 1993 a posé à l'article R. 116-5 du code du travail que la convention portant création du CFA institue, auprès du directeur et de l'organisme gestionnaire du centre, un conseil de perfectionnement. Ce conseil de perfectionnement se réunit au moins trois fois par an sur convocation de son président et il est, entre autres, saisi pour avis des questions relatives à l'organisation et au fonctionnement du CFA ou de la section d'apprentissage, notamment des « conditions générales de préparation et de perfectionnement pédagogique des formateurs » (article R. 116-7 du code du travail).

Or ce dispositif a paru insuffisant au cours du premier examen du texte devant le Sénat. Ainsi que l'a exposé M. Louis Souvet, rapporteur de la commission des affaires sociales, lors de la présentation de son amendement en séance publique, « garantir un niveau de formation élevé en CFA suppose que celle-ci soit en phase avec la réalité des métiers, donc avec les besoins réels des entreprises formatrices ». Or les technologies évoluant, il convient de permettre aux formateurs de s'adapter en permanence. Ainsi est motivée l'idée de « systématiser les stages en entreprise pour les formateurs de CFA en charge des enseignements professionnels, par exemple pendant dix jours par an, ce qui leur permettrait de se mettre au courant des évolutions des technologies ».

Cette idée constitue la reprise de la proposition n° 15.2. du Livre blanc sur l'apprentissage précité.

Le Sénat a donc introduit dans une phrase complétant le premier alinéa de l'article L. 116-5 du code du travail l'obligation pour les personnels des enseignements techniques et pratiques « d'effectuer périodiquement des stages pratiques en entreprise », dans des conditions fixées par décret.

Il est possible de s'interroger sur les effets de l'adoption d'une telle mesure.

D'abord va se poser la question de son coût. A la charge des CFA, le coût de cette formation va vraisemblablement se répercuter sur les régions. Ne serait-il pas plus judicieux d'utiliser les fonds qui seront mis à disposition des régions dans le cadre de la signature des contrats d'objectifs et de moyens tels qu'ils sont prévus à l'article 16 du projet ? La vocation de ces contrats d'objectifs et de moyens est en effet, entre autres, de poursuivre l'« adaptation de l'offre de formation aux besoins quantitatifs et qualitatifs » et de procéder à l'« amélioration de la qualité des formations dispensées ».

Par ailleurs, une réflexion plus globale sur le système de formation des formateurs est nécessaire. D'autres possibilités que les stages pratiques des formateurs existent. Par exemple, dans certains grands groupes industriels, certains personnels pourraient être mis à la disposition de CFA pour une durée déterminée afin de faire profiter de leur expérience le dispositif de formation du CFA.

*

La commission a adopté l'article 12 ter (nouveau) sans modification.

Après l'article 12 ter (nouveau)

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer visant à permettre au maître d'apprentissage de suivre une formation pédagogique.

M. Rodolphe Thomas a indiqué que cette formation est nécessaire afin que le maître d'apprentissage puisse exercer sa mission et suivre l'évolution du contenu des formations.

La rapporteure a donné un avis défavorable à cet amendement car il est déjà satisfait par les dispositions générales relatives à la formation tout au long de la vie. De plus, ces formations peuvent être prévues dans le cadre des chartes de qualité.

M. Rodolphe Thomas a indiqué qu'il s'agit plus spécifiquement des formations pédagogiques pour les maîtres d'apprentissage.

Mme Pascale Gruny a rappelé qu'il existe d'ores et déjà des formations de tuteur et qu'il convient de conserver la souplesse nécessaire au fonctionnement harmonieux de ce dispositif au sein de l'entreprise.

M. Georges Colombier a également estimé qu'à trop vouloir bien faire, on ajoute des contraintes excessives à la charge des entreprises.

Mme Martine Billard s'est interrogée sur la finalité de ce projet : s'agit-il de parvenir à un objectif chiffré en termes de contrats signés ou bien de permettre aux jeunes de trouver un vrai métier et de s'épanouir dans la vie ?

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer visant à doter les coordonnateurs et les formateurs de CFA d'un statut spécifique.

La rapporteure a donné un avis défavorable à cet amendement au motif qu'il n'est pas nécessaire d'adopter un statut spécifique pour ces personnels.

La commission a rejeté l'amendement.

Article 12 quater (nouveau)

Obligation de délivrance d'une carte d'apprenti par les centres de formation

Cet article résulte de l'adoption à l'unanimité d'un amendement de la commission des affaires sociales du Sénat et doit être, d'emblée, salué puisqu'il assure la délivrance d'une carte d'apprenti à tout apprenti par son centre de formation.

La portée de la modification ainsi proposée est incontestablement symbolique, dans la mesure où est ainsi consacrée la filière de l'apprentissage au même titre que toute formation initiale, et elle est bien sûr dans le même temps pratique car, inscrite dans la loi, elle constitue un droit pour l'apprenti qui désormais pourra s'en prévaloir.

C'est que la consécration législative d'une telle disposition ne correspond pas à une évidence.

1. La consécration législative d'une mesure nécessaire

Cette mesure était de celles que le gouvernement avait choisi de consacrer dans son avant-projet de loi, la justification étant ainsi développée dans l'exposé des motifs : « La généralisation de l'attribution de cette carte contribuera à la reconnaissance de la formation initiale par l'apprentissage et encouragera le développement, au bénéfice des apprentis, d'avantages consentis jusqu'alors aux seuls élèves du secondaire ou aux étudiants ».

Elle constituait d'ailleurs la reprise de l'une des propositions du Livre blanc sur l'apprentissage précité. Aux termes de la proposition 8.1., cette carte d'apprenti, sans être celle d'un étudiant, devait permettre « aux jeunes en apprentissage de comprendre que cette formation leur donne droit à des avantages », notamment : accès à des billets de transport collectif à prix réduit, accès aux restaurants universitaires, accès aux activités culturelles et de loisirs (musées, salles de spectacle, installations sportives,...) à prix réduit, ou encore accès à une mutuelle spécifique susceptible d'offrir les mêmes services que les mutuelles des étudiants.

Mais le Conseil d'Etat, dans son avis sur le projet, aurait considéré, comme pour d'autres mesures, que celle-ci n'avait pas de caractère législatif.

De plus, présentée comme une première, cette mesure n'en est pas tout à fait une. Le rapport Dutreil avait d'ailleurs évoqué l'« expérience de délivrance de carte d'étudiant en apprentissage par les CFA ».

En effet, deux circulaires n° 78-224 du 13 juillet 1978 et n° 78-454 du 15 décembre 1978 avaient prévu la délivrance aux apprentis, dès leur inscription dans un centre de formation des apprentis, d'une carte d'étudiant en apprentissage leur permettant de bénéficier des réductions habituellement réservées aux étudiants (musées, transports, spectacles,...) et d'accéder au tarif « passager » dans les restaurants universitaires et cantines scolaires, dans la mesure où le CFA dont ils relèvent avait passé avec le centre régional des œuvres universitaires et sociales une convention à cet effet.

Déjà l'objectif affiché consistait à « poursuivre l'effort d'amélioration et de développement de l'apprentissage » en donnant « un véritable statut aux jeunes qui choisissent cette voie de formation ». Mais cet objectif n'a été, dans les faits, que rarement atteint, seules quelques expériences ponctuelles ayant vu le jour. L'inscription dans la loi, il faut l'espérer, permettra la généralisation de cette pratique dont le bien-fondé ne semble devoir être remis en cause par personne.

2. La reconnaissance d'un droit

L'article 12 quater insère donc dans le code du travail un nouvel article L. 117 bis-8 dont le premier alinéa pose le principe de la délivrance de la carte d'apprenti à l'apprenti par le centre qui assure sa formation. Cet alinéa résulte de l'amendement de la commission des affaires sociales du Sénat.

Un deuxième alinéa, issu de l'adoption d'un sous-amendement proposé par les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, précise que la carte d'apprenti est valable sur l'ensemble du territoire national. En outre, cet alinéa souligne que la carte « permet à l'apprenti de faire valoir la spécificité de son statut auprès des tiers », notamment en vue d'accéder à des réductions tarifaires. Cette dernière disposition conforte le caractère de droit de ce nouvel avantage. Assorti de la condition de territorialité, il permettra donc aux apprentis de se prévaloir effectivement auprès de leur centre de formation du bénéfice de ces dispositions et, partant, de prétendre au bénéfice des avantages auxquels donne droit ce type de carte.

*

La commission a adopté l'article 12 quater (nouveau) sans modification.

Article 13

Etablissement d'une nouvelle dérogation à la limite d'âge de vingt-cinq ans
pour signer un contrat d'apprentissage

Cet article autorise la signature d'un contrat d'apprentissage après vingt-cinq ans pour les personnes qui ont un projet de création ou de reprise d'une entreprise dont la réalisation est subordonnée à l'obtention d'un diplôme ou sanctionnant la formation poursuivie. Ce faisant, il ajoute un nouveau cas de dérogation à la règle de la limite d'âge posée dans le cadre du contrat d'apprentissage.

1. Le régime juridique existant

En application du premier alinéa de l'article L. 117-3 du code du travail, nul ne peut être engagé en qualité d'apprenti s'il a plus de vingt-cinq ans au début de la période de l'apprentissage.

Un certain nombre de dérogations existent d'ores et déjà, issues de l'adoption de l'article 30 de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 :

- lorsque le contrat proposé fait suite à un contrat d'apprentissage précédemment souscrit et conduit à un niveau de diplôme supérieur à celui obtenu à l'issue du contrat précédent ;

- lorsqu'il y a eu rupture du contrat pour des causes indépendantes de la volonté de l'apprenti ou suite à une inaptitude physique et temporaire de celui-ci ;

- au bénéfice des personnes handicapées dont l'âge maximal, fixé par décret, ne peut être supérieur à trente ans ; cette dernière dérogation avait été posée par voie réglementaire dès avant la loi du 4 mai 2004.

Il est à noter que, excepté pour le cas particulier des personnes handicapées, les deux types de dérogations existants n'ont pas pour objet de permettre une entrée en apprentissage après vingt-cinq ans, mais de poursuivre l'apprentissage après cet âge, soit pour acquérir un diplôme de niveau plus élevé, soit dans le cas où la signature d'un nouveau contrat s'avère nécessaire, le premier ayant été accidentellement rompu.

D'une certaine façon, on peut parler de dérogations d'ajustement. Il n'en va pas de même de la présente disposition, qui relèverait plutôt d'une dérogation liée à une réelle politique d'adéquation entre un objectif final - le développement des entreprises à reprendre et donc de l'emploi - et un moyen - le développement de l'apprentissage des plus âgés.

2. Favoriser la reprise... ou la création d'entreprises ?

La présente mesure se présente d'abord comme une volonté de répondre à un besoin : la reprise des entreprises dans les années à venir. D'une certaine façon, on peut affirmer que son caractère est économique avant d'être social.

Aux termes de l'exposé des motifs du projet, en effet, « l'apprentissage répond (...) directement aux besoins de nombreuses professions appelées à remplacer un nombre important de salariés qualifiés ou de chefs d'entreprises ». L'exposé des motifs d'un avant-projet était encore plus précis : « Près de 500 000 chefs d'entreprise cesseront leur activité dans les quinze ans à venir, en particulier dans les très petites entreprises. La perspective de leur remplacement donne également un gage d'attractivité favorable au développement [de l'apprentissage] ».

De fait, le potentiel d'entreprises à reprendre aujourd'hui s'accroît. Selon une récente étude de l'INSEE  (36), 700 000 entreprises étaient dirigées en 1999 par des personnes de plus de cinquante ans, qui pourraient donc partir en retraite dans les dix ans à venir (contre 645 000 en 1990).

Les personnes qui veulent aujourd'hui entreprendre sont davantage tentées par la création d'une nouvelle entreprise que par la reprise d'une unité existante : en 2003, sur 300 000 entreprises créées, 200 000 résultent d'une création nouvelle, 40 000 d'une reprise et les autres d'un processus de réactivation. Ce mouvement de baisse de la part des reprises dans les créations est constant : en 2003, on ne note plus qu'une reprise pour cinq créations, contre une pour trois et demie dix ans plus tôt.

Cette tendance est d'autant plus regrettable, au plan économique, que les effets des reprises sur la relance de l'emploi sont plus importants que ceux des créations d'entreprises : la moitié des entreprises créées par reprise en 2003 ont démarré avec des salariés, contre seulement 16 % de celles qui étaient des créations pures. Plus encore, la survie économique des reprises est meilleure que celle des créations pures. Or face à cette situation l'apprentissage peut sembler un moyen d'encourager les initiatives.

En effet, d'une part, la plupart des reprises concernent des activités de proximité : restauration traditionnelle ou rapide, salons de coiffure, boulangerie, commerce de détail,... ; le secteur de l'hôtellerie-restauration concentre à lui seul un tiers des reprises. D'autre part, les repreneurs sont en moyenne moins diplômés que l'ensemble des créateurs : 32 % détiennent au plus un diplôme technique de niveau CAP ou BEP, contre 24 % des créateurs d'entreprises. Enfin, la reprise concerne souvent des entreprises dans lesquelles il est nécessaire de maîtriser une technique (boulangerie, coiffure, boucherie,...). Elle est privilégiée par les artisans ou les personnes, salariées ou non, qui bénéficient d'une expérience dans un domaine précis.

Or ces caractéristiques correspondent précisément à celles des apprentis, qui majoritairement - aux deux tiers - sont titulaires d'un diplôme de niveau V à l'issue de la période d'apprentissage et sont très présents dans les secteurs du commerce, de l'hôtellerie ou de la coiffure.

En outre, il convient de garder à l'esprit que l'apprentissage est effectivement peu développé aujourd'hui dans les catégories de jeunes les plus âgées, comme l'illustre le tableau suivant. La présente mesure peut constituer un moyen d'inverser cette tendance.

Répartition des contrats d'apprentissage signés en fonction de l'âge des apprentis

2000

2001

2002

2002/2001

15 ans

10,3

10,9

10,9

0,0

16 ans

24,3

25,2

24,9

- 0,3

17 ans

16,9

16,2

16,3

0,0

18 ans

16,4

15,5

15,4

- 0,2

19 ans

11,2

11,1

10,7

- 0,5

20 ans

7,7

7,9

8,0

0,2

21 ans

5,1

5,4

5,7

0,3

22 ans et plus

8,1

7,8

8,2

0,4

Source : DARES.

Face à cette situation, l'article 13 prévoit donc d'ouvrir aux personnes de plus de vingt-cinq ans la voie de l'apprentissage si elles ont « un projet de création ou de reprise d'une entreprise dont la réalisation est subordonnée à l'obtention du diplôme ou titre sanctionnant la formation suivie ». A cet égard, quelques remarques s'imposent :

- Le Sénat a souhaité introduire dans la loi une limite supérieure de 30 ans, arguant de ce que cette même limite existe dans le cas de la dérogation d'âge accordée au bénéfice des travailleurs handicapés, par le même article L. 117-3 du code du travail. Ce faisant, il a appliqué cette limite à l'ensemble des autres exceptions à la limite d'âge en vigueur (à savoir les cas de conclusion d'un nouveau contrat pour acquérir un diplôme de niveau plus élevé ou après la rupture accidentelle du précédent). Le rapporteur, M. Louis Souvet, en présentant l'amendement de la commission des affaires sociales en séance publique, a considéré qu'il était plus sûr d'apporter une telle précision par la voie législative que par la voie réglementaire.

M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, s'en est remis à la sagesse du Sénat, non sans avoir souligné qu'il pouvait être opportun de laisser, dans certains cas, la possibilité de reprendre une entreprise à des personnes âgées de plus de trente ans, et que l'inscription dans la loi d'une telle limite donnait moins de souplesse dans l'appréciation du dispositif. Néanmoins, la Haute assemblée a finalement introduit dans la rédaction nouvelle de l'article L. 117-3 cette précision.

- La mesure n'est pas limitée au cas de reprise, mais s'étend aux créations. On peut s'en étonner, au regard des ambitions affichées, même si l'une n'empêche pas l'autre.

- Le texte évoque le « projet » de reprise ou de création : il faut s'interroger sur les procédures d'éventuels contrôles a posteriori de la réalisation effective de la reprise ou de la création.

- La réalisation du projet doit être subordonnée à l'obtention du diplôme ou du titre sanctionnant la formation poursuivie.

Pour être entrepreneur dans des secteurs comme la boucherie, la boulangerie ou la coiffure, il convient en effet d'être titulaire d'une qualification minimale. C'est le décret n° 98-246 du 2 avril 1998 qui établit cette exigence de qualification pour l'exercice de certaines activités, comme l'illustre le tableau suivant.

Secteurs d'activités et métiers concernés

Secteurs d'activité

Métiers

Entretien et réparation des véhicules et des machines

· réparateur d'automobiles

· carrossier

· réparateur de cycles et motocycles

· réparateur de machines agricoles, forestiers et de travaux publics

Constructions, entretien et réparation des bâtiments

· métiers de gros œuvre

· métiers de second œuvre

· métiers de finition du bâtiment

Mise en place, entretien et réparation des réseaux et des équipements utilisant les fluides ainsi que des matériels et équipements destinés à l'alimentation en gaz, au chauffage des immeubles et aux installations électriques

· plombier

· chauffagiste

· électricien

· climaticien

· installateur de réseaux d'eau, de gaz ou d'électricité

Ramonage

· ramoneur

Soins esthétiques à la personne autres que médicaux et paramédicaux

· esthéticien

Réalisation de prothèses dentaires

· prothésiste dentaire

Préparation ou fabrication de produits frais de boulangerie, pâtisserie, boucherie ou poissonnerie, préparation ou fabrication de glaces alimentaires artisanales

· boulanger

· pâtissier

· boucher

· charcutier

· poissonnier

· glacier

Activité de maréchal-ferrant

· maréchal-ferrant

Source : Ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.

L'ensemble de ces activités ne peuvent être exercées que par une personne qualifiée professionnellement ou sous le contrôle effectif et permanent d'une telle personne. Les personnes qui les exercent doivent être titulaires d'un CAP ou d'un BEP, ou d'un diplôme homologué de même niveau ou d'un niveau supérieur. Sinon, elles doivent justifier d'une expérience professionnelle de trois années effectives sur le territoire de l'Union européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, en qualité de travailleur indépendant ou de salarié dans l'exercice de l'un des métiers réglementés. Dans le cas où le chef d'entreprise ne remplit pas ces conditions, celles-ci doivent l'être par une personne qui travaille dans l'entreprise.

Il convient de noter que le diplôme ou l'expérience exigée est valable pour l'ensemble des métiers de chaque secteur d'activité. Par ailleurs, par-delà la liste énumérée dans le présent tableau, des réglementations spécifiques existent dans certaines activités, comme celles de taxi, ambulance, coiffure, déménagement ou contrôle technique.

Il ne faut pas oublier en effet la spécificité première du contrat d'apprentissage : constituer une formation qualifiante. Le mécanisme envisagé dans son ensemble correspond donc à la structure « syllogistique » suivante : un entrepreneur est sur le point de partir à la retraite ; le repreneur doit être titulaire d'un diplôme professionnel ; l'entrepreneur recrute donc un apprenti dont les caractéristiques correspondent au profil recherché et qui sera doté du diplôme requis.

Cette mesure se place dans le droit fil de la proposition n°6.3 du Livre blanc sur l'apprentissage, qui vise à l'introduction de la possibilité de conclure un contrat d'apprentissage au-delà de l'âge maximum de 25 ans, à l'appui des deux arguments suivants : « cette restriction absolue apparaît comme une anomalie dans la mesure où la formation initiale, dont relève l'apprentissage, ne connaît pas de limite d'âge » - et il est vrai, par exemple, qu'il est possible de passer le baccalauréat à tout âge ; « s'agissant de l'apprentissage maritime la loi prévoit que la limite d'âge est portée à 30 ans dans les départements d'outre-mer ».

3. Explorer aussi d'autres voies ?

Cependant, on peut s'interroger sur les effets de l'adoption d'une telle mesure. Comme dans le cas de l'article 12, il faut regretter l'absence d'étude d'impact qui empêche toute estimation quantitative de ses effets.

Dans son avis précité, le Conseil économique et social « reconnaît l'intérêt d'un assouplissement de la limite d'âge à 25 ans du contrat d'apprentissage pour permettre, dans certains cas, la poursuite d'un parcours d'apprentissage à des personnes au-delà de cet âge. Cette voie pourrait utilement être explorée au niveau des branches professionnelles ».

Néanmoins, certaines questions sont inévitables. Est-il vraiment impossible de concevoir des repreneurs d'entreprise de moins de vingt-cinq ans ? A l'inverse, si tel est le cas, ne peut-on envisager un autre recours que la voie de l'apprentissage ? En prolongeant la durée de la formation initiale, on modifie la philosophie de l'apprentissage. L'apprentissage à tout âge n'est-il pas un « faux remède » pour s'attaquer au « vrai mal » que constitue le chômage ? Certaines voies alternatives existent en effet, à commencer par la voie de la validation des acquis de l'expérience.

A ces questions, on peut répondre que la reprise d'une entreprise nécessite en effet une certaine maturité, qu'un jeune de vingt-cinq ans ou moins n'a peut-être pas toujours. On peut rappeler en outre l'argument du Livre blanc, selon lequel il n'y a pas d'âge pour la formation initiale. Les exemples étrangers, au premier rang desquels l'exemple allemand, montrent bien d'ailleurs que la formation initiale peut, en moyenne, toucher les jeunes jusqu'à trente ans.

*

La commission a examiné un amendement de suppression de cet article présenté par Mme Muguette Jacquaint.

M. Maxime Gremetz a indiqué que l'objectif de création ou de reprise d'entreprise est étranger à l'objet du contrat d'apprentissage.

Estimant qu'au contraire cet article permet de favoriser un projet entrepreneurial grâce à une formation adaptée, la rapporteure a donné un avis défavorable à cet amendement.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Patrick Beaudouin supprimant la limite d'âge de trente ans introduite par le Sénat dans le cas où une personne de plus de vingt-cinq ans souscrit un contrat d'apprentissage dans le cadre d'un projet de création ou de reprise d'entreprise.

M. Patrick Beaudouin a précisé qu'il convient de revenir au texte initial du gouvernement et permettre ainsi la réussite de projets entrepreneuriaux à tous les âges.

La rapporteure s'est déclarée favorable à cet amendement qui apporte plus de souplesse.

La commission a adopté l'amendement.

La commission a adopté l'article 13 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 13

Information du maître d'apprentissage assumant pour la première fois
la responsabilité de la formation d'un apprenti

La commission a examiné un amendement de la rapporteure prévoyant que le maître d'apprentissage reçoit une information sur les conditions d'accueil des apprentis et les modalités de la formation en alternance à l'occasion de sa première prise en charge d'apprentis.

M. Maxime Gremetz s'est interrogé sur l'efficience de cette information.

M. Rodolphe Thomas a souligné que cet amendement est proche de celui qu'il a présenté sur la formation.

M. Dominique Dord s'est déclaré en accord avec cet amendement tout en relevant qu'une telle information doit normalement être assurée au sein des chambres de métiers.

La commission a adopté l'amendement.

Article additionnel après l'article 13

Possibilité pour les apprentis de suivre des modules complémentaires
au cycle de formation

La commission a examiné un amendement de M. Patrick Beaudouin visant à permettre aux apprentis qui le souhaitent de suivre en dehors du temps de travail des modules complémentaires, dans le cadre notamment d'un projet lié à la reprise ou la création d'entreprise ou d'un projet lié à un retour dans le système scolaire.

M. Patrick Beaudouin a précisé qu'il s'agit de permettre aux CFA d'émettre un avis sur l'opportunité de ces démarches et d'en assurer le financement.

La rapporteure, s'est déclarée favorable à cet amendement qui s'intègre pleinement dans l'économie du texte.

La commission a adopté l'amendement.

Après l'article 13

La commission a examiné un amendement de M. Bertho Audifax visant à permettre l'engagement de deux apprentis en alternance pour un même poste de travail.

Tout en relevant l'intérêt sur le fond que revêt cet amendement, la rapporteure a donné un avis défavorable à son adoption en raison de son caractère réglementaire et du risque, qu'il convient d'évaluer, pour la qualité de l'apprentissage.

La commission a rejeté l'amendement.

Article 13 bis (nouveau)

Assouplissement du régime fiscal des apprentis

Cet article résulte d'un amendement présenté par le gouvernement lors de la discussion du texte devant le Sénat et adopté à l'unanimité. Il vient comme en corollaire de l'article 12 bis dans la mesure où il apporte une modification fiscale rendue d'autant plus nécessaire que la rémunération des apprentis va être revalorisée.

Le problème a été posé dans les termes suivants par M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes, présentant l'amendement gouvernemental : « La majorité des apprentis étant déclarés dans le foyer fiscal de leurs parents, le fait non seulement de les rémunérer, mais aussi d'envisager d'augmenter la rémunération des plus jeunes en première année, ne fait qu'accroître ce problème et suscite une réticence. Pour lever cette réticence chez ceux qui redoutent que les apprentis ne deviennent imposables, qu'ils ne « sautent une tranche », comme l'on dit, et surtout qu'ils ne perdent les avantages qui s'attachent aux revenus non imposables, il est proposé que les apprentis ne soient pas imposables ».

Il est donc proposé de modifier l'article 81 bis du code général des impôts. Celui-ci, en l'état actuel du droit, exonère en effet les salaires des apprentis munis d'un contrat de l'impôt sur le revenu pour une fraction n'excédant pas une limite mentionnée au 2° bis de l'article 5 du code général des impôts, à savoir un revenu net de frais professionnel de 7 250 euros.

C'est ainsi que le I de l'article 13 bis substitue à ce plafond un nouveau plafond plus élevé, défini comme « le montant annuel du salaire minimum de croissance ».

Le II précise que cette disposition sera applicable à compter de l'imposition des revenus de 2005.

Il convient d'observer que cette disposition, qui a pour effet de soustraire à l'impôt l'intégralité de la rémunération de l'apprenti, permettra en outre, dans certaines situations, aux parents de l'apprenti de conserver le bénéfice des prestations familiales.

On ne peut que se réjouir de l'adoption d'une telle mesure qui, si elle ne figurait pas dans le Livre blanc, est toutefois loin d'être anodine. Elle doit d'ailleurs être replacée dans le cadre plus général des dispositions tendant à améliorer les conditions matérielles de l'apprenti et de sa famille, et dont la rapporteure souhaite souligner l'importance, tant il est vrai que la revalorisation d'un statut passe nécessairement, aussi, par l'attribution d'avantages matériels nouveaux.

Ce n'est pas un hasard si l'un des thèmes du Livre blanc consacré au développement de l'apprentissage porte précisément sur l'amélioration des conditions matérielles de l'apprenti et de sa famille. Au titre de ce thème figurent un certain nombre de propositions, dont une mesure tendant à favoriser le maintien des allocations familiales dans les familles d'apprentis - et à laquelle répond le présent article. Il serait opportun que le gouvernement enrichisse encore, dans ces perspectives, la construction relative au statut de l'apprenti ainsi ébauchée.

*

La commission a adopté l'article 13 bis (nouveau) sans modification.

Après l'article 13 bis (nouveau)

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Paul Anciaux relatif à la fixation de la durée de la formation dispensée dans les CFA par la convention prévue à l'article L. 116-3 du code du travail.

M. Jean-Paul Anciaux a expliqué que l'article L. 116-3 impose actuellement une durée minimale de formation en CFA de 400 heures par an en moyenne, qui peut être réduite à 240 heures en cas de prorogation du contrat en raison d'un échec de l'apprenti à l'examen. Or ces dispositions conduisent à soumettre un jeune dispensé de certaines épreuves de l'examen à l'obligation d'assister aux cours du CFA pendant cette durée minimale. Il est donc proposé de permettre aux régions et aux CFA, en liaison avec les établissements consulaires et les organisations professionnelles, de négocier un quota d'heures de formation en milieu scolaire sans autre contrainte que les nécessités pédagogiques et l'intérêt des jeunes apprentis.

Après que la rapporteure s'est déclarée défavorable, en jugeant nécessaire de préserver la durée de la formation théorique dispensée par les CFA et que, de toute façon, cette durée s'élève aujourd'hui à près de 600 heures en pratique, la commission a rejeté l'amendement.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a également rejeté deux amendements de M. Jean-Paul Anciaux : le premier prévoyant la possibilité pour les chambres de métiers et les chambres de commerce et d'industrie (CCI) d'organiser des stages de découverte d'un métier en dehors des périodes d'enseignement ; le second visant à préciser que les deux jours de repos visés par l'article L. 222-4 du code du travail peuvent ne pas être consécutifs si l'un des jours de repos est suivi ou précédé d'un jour de formation en établissement scolaire.

Article additionnel après l'article 13 bis (nouveau)

Institution d'un régime dérogatoire pour la délivrance d'une autorisation
de travail préalablement à la conclusion de contrats en alternance avec
les jeunes étrangers accueillis par les services de l'aide sociale à l'enfance

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Marie Rolland prévoyant que lorsque l'autorisation de travail est demandée en vue de la conclusion d'un contrat d'apprentissage ou d'un contrat de professionnalisation, la situation de l'emploi ne peut être opposée à la demande d'un étranger qui a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance (ASE).

M. Jean-Marie Rolland a expliqué qu'il s'agit d'améliorer la prise en charge et l'accès à la formation professionnelle des mineurs étrangers isolés, qui est actuellement rendue impossible par l'absence d'un statut leur permettant de bénéficier d'un droit au travail. Il est donc proposé d'instituer une dérogation à la règle d'opposabilité de la situation de l'emploi dans le cas précis des jeunes accueillis par l'ASE et pour les seuls contrats en alternance.

Le président Jean-Michel Dubernard a souhaité profiter de cette occasion pour saluer à nouveau la qualité de l'excellent rapport pour avis de M. Jean-Marie Rolland sur les crédits de l'action sociale pour 2005.

Suivant l'avis favorable de la rapporteure, la commission a adopté l'amendement.

Article additionnel après l'article 13 bis (nouveau)

Suppression de la période d'essai en cas de conclusion
d'un contrat à durée indéterminée et prise en compte de la durée
du contrat d'apprentissage pour le calcul de la rémunération
et de l'ancienneté du salarié

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer prévoyant la suppression de la période d'essai, sauf dispositions conventionnelles contraires, lorsque le contrat d'apprentissage est suivi de la signature d'un contrat de travail à durée indéterminée.

M. Rodolphe Thomas a précisé qu'il s'agit ainsi d'inciter les jeunes à rester dans l'entreprise à la fin de leur contrat d'apprentissage, puisque l'une des principales motivations à l'embauche d'un apprenti est son intégration future à l'entreprise en tant que salarié. Dans ce but, l'amendement prévoit également que la durée du contrat d'apprentissage est prise en compte pour le calcul de la rémunération et l'ancienneté du salarié.

Tout en reconnaissant l'intérêt présenté par cette proposition, la rapporteure s'est déclarée défavorable à cet amendement en raison des problèmes techniques posés, s'agissant notamment des modalités de calcul de l'ancienneté du salarié, qui relève davantage du champ de la convention collective.

M. Rodolphe Thomas a cependant souligné la nécessité de mieux valoriser le statut des apprentis.

Mme Pascale Gruny s'est également déclarée favorable, en faisant valoir que la durée des contrats de travail intérimaires est également prise en compte pour le calcul de l'ancienneté des salariés.

Le président Jean-Michel Dubernard a jugé préférable de ne pas inscrire dans ce texte des dispositions qui ne relèvent manifestement pas du domaine législatif.

Mme Martine Billard a estimé au contraire que cette question relève bien du domaine législatif et rappelé que lorsque l'apprentissage est assuré au sein des entreprises, il est prévu que l'ancienneté des apprentis est prise en compte lors de leur intégration dans l'entreprise. En tout état de cause, l'amendement permettrait simplement d'ouvrir la possibilité que ces dispositions soient prévues par les conventions collectives de branche.

La commission a ensuite adopté l'amendement.

Section 3

Modernisation et développement de l'apprentissage

Avant l'article 14

La commission a examiné six amendements de M.  Francis Vercamer :

- le premier instituant l'obligation pour les enseignants d'organiser des visites d'information, dès la classe de sixième, pour les élèves de l'enseignement général afin de leur permettre de mieux comprendre les métiers des entreprises artisanales ;

- le deuxième prévoyant, à la demande des départements ou communes concernés, la possibilité de transférer aux régions par convention les centres publics d'information et d'orientation, dont ils assurent le fonctionnement matériel ;

- le troisième prévoyant un rapport au Parlement sur l'opportunité de l'organisation d'une campagne annuelle d'information sur la formation professionnelle par le ministère de l'éducation nationale et les branches professionnelles ;

- le quatrième posant l'obligation pour les établissements scolaires de s'associer avec les CFA afin de favoriser les échanges et les contacts ;

- le cinquième ouvrant la possibilité aux régions, à titre expérimental et jusqu'au 31 décembre 2009, de participer à l'organisation des services chargés de l'information et de l'orientation des jeunes ;

- le dernier prévoyant le dépôt d'un rapport au Parlement concernant l'évolution de l'apprentissage au cours d'une période de deux ans après l'entrée en vigueur du présent texte.

Le président Jean-Michel Dubernard a suggéré que ces propositions - à l'exception de la dernière - soient plutôt examinées lors de l'examen du projet de loi d'orientation sur l'école et ce d'autant plus qu'un nombre important de sujets pourraient être présentés comme reliés à la problématique de la cohésion sociale.

M. Rodolphe Thomas a jugé au contraire que ces amendements, qui visent à renforcer l'apprentissage, s'inscrivent pleinement dans ce projet de loi, et ce d'autant plus que le gouvernement s'est fixé comme objectif de porter le nombre d'apprentis à 500 000 contre 350 000 environ actuellement. Il est donc nécessaire de mettre en place une politique cohérente de formation et d'information en destination du jeune public et il est légitime de s'interroger sur l'avenir de l'apprentissage et de la formation. Il est par ailleurs important de prendre en compte les préconisations du rapport de M. Michel Camdessus - « Le sursaut - Vers une nouvelle croissance pour la France » - selon lequel l'Education nationale oriente insuffisamment vers la formation professionnelle les jeunes qui pourraient y trouver une voie d'insertion dans la vie active et de promotion sociale.

Après que la rapporteure s'est déclarée défavorable à ces amendements, au motif, d'une part, que ces dispositions relèvent en effet du projet de loi d'orientation sur l'école et, d'autre part, que les départements et les régions ont d'ores et déjà la possibilité de participer au financement de ces dispositifs de formation, la commission les a rejetés.

Article 14

Suppression des deux motifs d'exonération
au titre de la taxe d'apprentissage

Le présent article vise à supprimer deux motifs d'exonération au titre de la taxe d'apprentissage qui résultent de la loi (37).

Il importe, avant de revenir sur le détail du dispositif proposé, de redire, de manière plus détaillée que dans la présentation générale, comment se situent ces exonérations au sein du dispositif - au demeurant assez complexe - qui régit le fonctionnement de la taxe d'apprentissage.

1. Le dispositif d'exonérations de la taxe d'apprentissage

Les entreprises redevables de la taxe d'apprentissage sont les personnes physiques ou morales exerçant une activité commerciale, industrielle ou artisanale, qui relèvent de l'impôt sur les sociétés ou qui sont soumises à l'impôt sur les revenus au titre des bénéfices industriels et commerciaux et qui ont au moins un salarié - étant précisé que les entreprises dont la masse salariale est inférieure à six fois le SMIC annuel et qui ont employé au moins un apprenti au cours de l'année au titre de laquelle la taxe est due sont affranchies de la taxe d'apprentissage.

Le taux de cette taxe est de 0,5 % de la masse salariale brute.

Le montant total de la taxe est divisé en deux fractions : l'une dite fraction « du quota », réservée au financement de l'apprentissage ; l'autre, dite fraction « du hors quota », ou « du barème », est réservée au financement des premiers enseignements professionnels et technologiques.

En application de l'article L. 118-3 du code du travail, la fraction du montant de la taxe d'apprentissage dite du quota est réservée au développement de l'apprentissage. L'article R. 119-1 du même code a fixé ce montant obligatoirement affecté à l'apprentissage à 40 % du montant total de la taxe.

C'est sur cette fraction de 40 % réservée au développement de l'apprentissage, comme le précise bien l'article R. 119-5, qu'est imputée une fraction égale à 10 % de l'ensemble du produit de la taxe (soit donc 25 % de la fraction du quota) versée obligatoirement au Trésor public, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un organisme collecteur - jusqu'à l'application de la présente réforme - en application de l'article L. 118-2-2 du code du travail.

Ce produit est reversé intégralement aux fonds régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continue (via le fonds national de péréquation de la taxe d'apprentissage), qui l'affectent au financement des centres de formation d'apprentissage (CFA) et des sections d'apprentissage.

De plus, lorsque les entreprises emploient un apprenti, obligation leur est faite d'apporter un concours financier au CFA ou à la section d'apprentissage où est inscrit l'apprenti, imputable sur ce quota (articles L. 118-2, deuxième alinéa, et R. 119-4 du code du travail). Le montant de ce concours est au moins égal, dans la limite du quota, au coût par apprenti fixé par la convention de création du CFA ou de la section.

Enfin, les concours librement apportés aux CFA et sections d'apprentissage permettent aux entreprises de s'exonérer aussi de cette fraction de la taxe de 40 % (article L 118-2, premier alinéa).

Toutefois, si ces derniers versements libres sont tels qu'ils excèdent le montant total de la fraction, l'effet libératoire continue malgré tout de jouer, mais au titre de l'autre fraction cette fois, dite du « hors quota ». Il faut donc noter que dans ce cas, et dans celui-là seulement, de facto, une partie de la fraction dite « hors quota » sera consacrée, par le jeu de ces dépenses libératoires, à l'apprentissage.

L'autre fraction de la taxe d'apprentissage (le « hors quota ») correspond à 60 % de la taxe brute. Son montant est obtenu après le calcul du quota d'apprentissage, donc de manière résiduelle. Cette fraction n'est d'ailleurs pas définie en tant que telle par le code du travail. Cette part est aussi dite part « du barème » car elle est répartie en fonction d'un barème (voir, sur cette question, la réforme du barème présentée dans le commentaire de l'article 22). Elle est consacrée non pas à l'apprentissage, mais aux premières formations technologiques et professionnelles.

Un certain nombre de dépenses permettent aux entreprises de s'exonérer de cette deuxième fraction. La liste de ces dépenses résulte principalement du décret n° 72-283 du 12 avril 1972, qui a été modifié à plusieurs reprises (38).

Il faut ainsi citer, au titre des dépenses libératoires de la fraction de taxe d'apprentissage dite « hors quota » :

- les frais de chambre de commerce et d'industrie ou frais de chambre d'agriculture ainsi que les versements spontanés aux chambres de métiers par leurs ressortissants ;

- les dépenses en faveur des stagiaires de la formation initiale. Il s'agit de stages obligatoires effectués en milieu professionnel en vue de la préparation d'un diplôme de l'enseignement technologique Ces stages donnent lieu à déduction partielle. Un forfait journalier est fixé chaque année, à un niveau différent selon le niveau des trois formations (ouvrier qualifié, cadres moyens et supérieurs). En tout état de cause, la déduction totale ne peut excéder 20 % du barème ;

- les salaires des membres des conseils. Il s'agit des membres représentant les salariés dans les conseils, comités et jurys d'examen. Les salaires de ces membres augmentés des cotisations sociales obligatoires peuvent être réduits, au prorata du temps passé dans ces commissions ;

- la formation pédagogique des maîtres d'apprentissage : ce sont les dépenses exposées pour la formation pédagogique des maîtres d'apprentissage. Cette possibilité d'exonération est encadrée par la limite de un dixième par apprenti ;

- les frais afférents à la prise en charge des activités complémentaires, telle l'orientation scolaire et professionnelle, et la vie sociale et professionnelle ;

- les bourses d'études accordées aux élèves.

Le tableau présenté ci-après, retrace le chiffrage des différentes exonérations existantes au titre du « hors quota ». Au total, l'ensemble de ces exonérations s'élève à 940 millions d'euros.

Chiffrage des exonérations existantes

Dépenses exonératoires « hors quota »

Montants (M €)

Subventions aux établissements

683,1

Frais de chambres

123,2

Frais de stage (limité à 4  % de la taxe d'apprentissage)

92,4

Subventions CFA

26,7

Dépenses des écoles

9,6

Activités complémentaires

2,9

Versements aux chambres des métiers (supprimé en deux ans)

2,0

Bourses

0,8

Salaires des jurys

0,3

Dépenses pédagogiques maîtres d'apprentissage

0,2

Total estimé

940,8

Source : Rapport d'enquête des inspections générales sur la taxe d'apprentissage - octobre 2003.

Concrètement, l'entreprise procède chaque année à une déclaration au titre de la taxe d'apprentissage : conformément à l'article 140 C de l'annexe II du code général des impôts, la demande d'exonération est présentée par l'entreprise sur un modèle agréé. Ce formulaire fait mention de l'ensemble des dépenses dont l'entreprise pense pouvoir se prévaloir au titre de l'exonération de la taxe d'apprentissage. Elle est d'ailleurs jointe à la déclaration fiscale relative à la taxe d'apprentissage effectuée en application de l'article 229 du code général des impôts - déposée à la recette des impôts du lieu de souscription de la déclaration des résultats de l'entreprise, au plus tard le 30 avril de l'année suivant celle du paiement des salaires.

Mais en application des articles 229 et 1678 quinquies du code général des impôts, le versement de la taxe d'apprentissage (dont le montant est établi après déduction des dépenses exonératoires) doit nécessairement accompagner la déclaration du contribuable : l'entreprise, notamment, qui n'aurait pas procédé au versement dû au titre de la péréquation perd tout droit à imputer les autres dépenses libératoires sur la taxe. Toutes les exonérations une fois prises en compte, la somme qui reste due au Trésor public est calculée sans distinction au titre du quota ou du hors quota.

Le schéma présenté ci-après synthétise le mécanisme d'ensemble du paiement de la taxe d'apprentissage avant la réforme.

Paiement de la taxe d'apprentissage

graphique

graphique

2. Les motivations au fondement de cette mesure

Il importe avant tout de préciser qu'il s'agit d'un dispositif global de refonte financière de la taxe d'apprentissage. Ainsi que cela a été rappelé dans la présentation générale, trois éléments doivent être pris en considération, au plan macroéconomique :

- deux éléments contribuant à diminuer la ressource des entreprises : la suppression des exonérations (au profit de l'apprentissage(39)) ainsi que la création d'une contribution au développement de l'apprentissage (au profit des régions, d'un montant équivalent à une diminution de la dotation de décentralisation programmée, aux termes du projet de loi de finances pour 2005, sur trois ans) ;

- un élément doit en revanche favoriser les entreprises, et se présente comme la pièce indispensable présente sur « l'autre plateau » de la balance, dans ce qui est présenté par le ministère comme un mécanisme de « bonus-malus » : le nouveau crédit d'impôt qui fait l'objet de l'article 15 du présent projet de loi.

C'est donc, dans une certaine mesure, un motif financier qui est à l'origine de cette mesure. Sans doute, le montant de la suppression de ces deux exonérations législatives représente environ un demi-million d'euros, somme relativement modeste.

Mais il convient de prendre en considération le montant de 123 millions d'euros, annoncé dans le cadre du projet de loi de finances, qui correspond à l'ensemble de la suppression des chefs d'exonération - y compris, donc, ceux qui seront réalisés par voie réglementaire - pour l'année 2005, à partir d'une évaluation sur la base des données de l'exercice 2002.

Certes, l'exposé des motifs précise : « Ces mesures, associées à une nouvelle répartition de la taxe d'apprentissage entre le quota et le barème, permettront d'accroître les ressources consacrées à l'apprentissage d'environ 190 millions d'euros (évaluation sur la base des données de l'exercice 2002 mentionnées dans le rapport des inspections précitées) ». Ce montant de 190 millions (somme arrondie) correspond quant à lui au chiffrage total de la suppression des exonérations à horizon 2006 - la suppression étant, comme le montre le tableau suivant, progressive. La différence entre les deux montants correspond aux exonérations relatives aux frais de chambres, qui seront supprimées en deux ans.

Dépenses libératoires au titre du versement de la taxe d'apprentissage

(en millions d'euros)

Dépenses libératoires

Montants 2002

Suppression
en 2005

Suppression
en 2006

Frais de chambres de commerce et d'industrie

123,2

61,6

61,6

Frais de chambres des métiers

2,0

1,0

1,0

Frais de stage (1)

92,4

32,4

Subventions aux centres de formation d'apprentis

26,7

26,7

Bourses

0,8

0,8

Salaires des jurys (2)

0,3

0,3

Dépenses pédagogiques (2)

0,2

0,2

Total

245,6

123,0

62,6

(1) A partir de 2005, plafonnement à 4 % du montant de la taxe due.

(2) Imputation possible sur la participation des employeurs à la formation professionnelle.

L'élément mis en avant par l'exposé des motifs est, au reste, autant pratique que financier : « Le mécanisme exonératoire de la taxe d'apprentissage est d'une grande complexité pour les entreprises et il ne facilite pas son contrôle par l'administration ». C'est donc même un double point de vue pratique qui est mis en avant et vise les entreprises et l'administration.

C'est dans ce sens que le même exposé des motifs rappelle aussi qu'un rapport commun des inspections générales - inspection générale des finances, inspection générale des affaires sociales, inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, inspection générale de l'administration - préconisait en octobre 2003 de réduire le nombre des chefs d'exonération de la taxe d'apprentissage au titre du « hors quota ».

3. Le dispositif proposé et les risques possibles

C'est ainsi que le I procède à une réécriture de l'article L. 118-1-1 du code du travail.

Dans sa rédaction initiale, l'article L. 118-1-1 prévoyait que les dépenses exposées par les entreprises pour la formation pédagogique des maîtres d'apprentissage étaient prises en compte au titre :

- « soit de la part non obligatoire affectée à l'apprentissage » : il s'agissait des versements librement effectués par les entreprises au titre de la fraction du quota, au bénéfice des CFA de leur choix ;

« soit de l'exonération établie par l'article 1er de la loi du 16 juillet 1971 » : il s'agit de l' « exonération totale ou partielle de la taxe d'apprentissage à raison des dépenses réellement exposées en vue de favoriser les premières formations technologiques et professionnelles » ;

- « soit de l'obligation de participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue définie à l'article L. 950-1 du présent code ».

Seul ce dernier élément subsiste dans la rédaction finale.

C'est que, ainsi que le précise l'exposé des motifs, l'article 14 « laisse subsister la possibilité d'imputer les dépenses correspondantes sur la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle ».

Le II procède à une modification de l'article L. 992-8 du code du travail, qui régit le cas d'un « salarié de l'entreprise (...) désigné pour siéger dans une commission, un conseil ou un comité administratifs ou paritaires appelés à traiter des problèmes d'emploi et de formation ou pour participer à un jury d'examen ou de validation des acquis de l'expérience ».

Le dernier alinéa de cet article vise les cas où « le salaire ainsi que les cotisations sociales obligatoires et, s'il y a lieu, la taxe sur les salaires qui s'y rattache » sont pris en compte au titre d'exonérations : l'article 14 supprime le cas des exonérations établies au titre de l'article 1er de la loi n° 71-578 du 16 juillet 1971 pour ne laisser subsister que celle établie « au titre de la participation mise à la charge des employeurs par l'article L. 950-1 ci-dessus ».

L'exposé des motifs du projet ouvre les perspectives : « La suppression d'autres chefs d'exonérations sera progressivement effectuée par la voie réglementaire de manière à ne laisser subsister que : les versements exonératoires aux établissements, les dépenses pédagogiques, celles liées aux activités complémentaires et, partiellement, les dépenses correspondant aux frais de stage ». Interrogés sur ces exonérations par la rapporteure, les services du ministère ont précisé que ces dépenses seraient maintenues dans la limite de 4 % de la taxe d'apprentissage. Ils ont par ailleurs indiqué que les exonérations concernant les chambres consulaires seraient supprimées en deux ans, subsistant donc à hauteur de 50 % en 2005.

4. Les effets des suppressions d'exonération proposées

Il est à noter que certains s'interrogent d'ores et déjà sur les effets d'une telle mesure.

Le premier risque serait de favoriser la formation professionnelle continue au détriment de la formation professionnelle initiale que constitue l'apprentissage, dès lors que subsiste la possibilité d'imputer les dépenses en question au titre de la formation professionnelle continue. Sans doute cette possibilité existait-elle déjà. Mais elle sera désormais, en l'absence d'exonération au titre de la taxe d'apprentissage, systématique. D'aucuns pourraient craindre la « fuite » de ces sommes vers la formation professionnelle continue, au détriment de la formation professionnelle initiale. Cela contribuerait à affaiblir encore la distinction entre formation initiale et formation continue. Déjà, les nouvelles possibilités de subventions des CFA par les fonds de la formation professionnelle aux termes de la loi du 4 mai 2004 allaient dans ce sens.

Dans son avis en date du 31 août 2004, le Conseil économique et social a soulevé ce risque, pour regretter « que les exonérations concernant la taxe d'apprentissage soient reportées sur les fonds de la formation continue, ce système étant de nature à diminuer d'autant les fonds de la formation tout au long de la vie ». Et plus loin : « ces financements [risquent] de fait d'être reportés sur le plan de formation des entreprises ».

Sans doute, on pourra objecter que, dans le nouveau système, le risque de double imputabilité de ces sommes, de caractère frauduleux, à la fois au titre de l'apprentissage et au titre de la formation professionnelle, sera écarté. Que, par ailleurs, les sommes en cause sont, somme toute, modestes - un demi-million d'euros toutefois.

*

La commission a examiné deux amendements de suppression de l'article de M. Christian Paul et M. Maxime Gremetz.

Mme Hélène Mignon a expliqué que la rémunération de la formation des maîtres d'apprentissage doit être assurée par la taxe d'apprentissage et non par l'obligation de participation des employeurs à la formation continue, qui conduit à mélanger sans aucune justification les financements de la formation initiale et continue. Ce transfert est par ailleurs porteur de graves difficultés pour les petites entreprises qui accueillent pourtant le plus grand nombre d'apprentis.

Après que M. Maxime Gremetz a déclaré partager les propos tenus par Mme Hélène Mignon, la rapporteure a émis un avis défavorable dans la mesure où cet article permet de supprimer un régime d'exonérations complexe pour les entreprises et les administrations et constitue un instrument essentiel de la réforme financière de l'apprentissage engagée par le gouvernement.

La commission a ensuite rejeté les amendements.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer visant à compléter cet article par un nouvel alinéa prévoyant que le maître d'apprentissage reçoit une aide forfaitaire de l'Etat dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.

M. Francis Vercamer a souligné que l'amendement vise à garantir une meilleure reconnaissance matérielle des maîtres d'apprentissage.

Tout en reconnaissant la nécessité de trouver des voies d'amélioration s'agissant de la reconnaissance des maîtres d'apprentissages, la rapporteure s'est opposée à l'amendement, en rappelant que le crédit d'impôt permet aux entreprises de les valoriser, si elles le souhaitent, et en soulignant par ailleurs que l'amendement constitue une charge pour l'Etat et risque en conséquence de se voir opposer les dispositions prévues par l'article 40 de la Constitution.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a adopté l'article 14 sans modification.

Article 15

Institution d'un crédit d'impôt au bénéfice des entreprises
employant des apprentis

Le présent article vise à instituer un crédit d'impôt nouveau au bénéfice des entreprises employant des apprentis.

Il existe d'ores et déjà beaucoup de mesures en faveur des apprentis. On évoquera simplement, pour mémoire : les salaires calculés en pourcentage du SMIC ; les exonérations fiscales ; l'indemnité compensatrice forfaitaire versée par la région ; les aides à la formation et les primes d'incitation à la formation d'apprentis handicapés.

1. Un dispositif d'incitation fiscale au développement de l'apprentissage

Mais la présente mesure revêt une certaine spécificité. Elle constitue, par-delà le volet qualitatif constitué par les dispositions relatives au statut de l'apprenti, le moyen d'incitation fiscale à l'embauche d'apprentis - en particulier dans les grandes entreprises où il s'avère que le pourcentage d'apprentis est relativement plus faible.

Le principe en est le suivant : toutes les entreprises pourront bénéficier de ce crédit d'impôt, à hauteur de 1 600 euros par apprenti (et 2 200 euros lorsque l'apprenti est issu du nouveau programme d'accompagnement personnalisé et renforcé), dès lors qu'elles auront accueilli l'apprenti pendant une durée d'au moins six mois au cours de l'année de référence.

On rappellera que le montant total de ce crédit d'impôt - estimé à hauteur de 472 millions d'euros - compenserait totalement les charges nouvelles pour les entreprises issues à la fois de la création d'une contribution au développement de l'apprentissage par l'article 20 du projet de loi de finances pour 2005 et de la suppression des exonérations au titre de la taxe d'apprentissage.

Le principe d'une telle mesure a été retenu en raison des avantages en termes de simplicité, de lisibilité et d'efficacité qu'elle revêt. Cela doit aussi être le moyen d'aider les branches professionnelles dans les multiples initiatives qu'elles peuvent envisager de mettre en œuvre pour revaloriser la rémunération de l'apprenti ou des maîtres d'apprentissage, établir des processus « qualité » dans l'accueil des apprentis, prendre en compte, le cas échéant, les questions de transport, de logement, de restauration ou d'équipement.

2 La définition du nouveau crédit d'impôt

Le I de l'article 15 porte modification du code général des impôts.

Il convient avant tout d'observer que le en a été supprimé par le Sénat. Relatif à la traduction du principe d'intermédiation obligatoire pour la collecte de la taxe d'apprentissage, il concernait davantage l'article 18, qui porte exclusivement sur cette dernière question. Par souci de lisibilité, la commission des affaires sociales a estimé, à très juste titre, préférable de déplacer ces dispositions à l'article 18, pour consacrer entièrement le présent article 15 à la définition du crédit d'impôt.

Ledu I insère dans le code général des impôts un nouvel article 244 quater G qui crée le crédit d'impôt.

Aux termes du I de cet article, en effet, « les entreprises imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 octies et 44 decies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt égal au produit du montant de 1600 euros par le nombre moyen annuel d'apprentis (...) ». Sont donc visées les entreprises imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées au titre des mesures fiscales relatives à certaines entreprises nouvelles, aux entreprises implantées dans des zones franches et aux entreprises implantées en Corse.

Le même paragraphe précise que le montant du crédit d'impôt est porté à 2 200 euros dans le cadre du nouveau dispositif d'accompagnement personnalisé tel qu'il est prévu à l'article L. 322-4-17-1 du même code : il convient en effet de renforcer l'effet incitatif pour les entreprises qui useraient, dans le même temps, du dispositif établi à l'article 9 du présent projet.

Il faut noter que le II de ce nouvel article 244 quater G plafonne au niveau du montant total de la dépense consacrée aux apprentis minorée de l'ensemble des subventions publiques reçues ce nouveau crédit d'impôt. Il ne faudrait pas, en effet, que ce crédit d'impôt puisse finir par constituer un apport nouveau pour l'entreprise : il doit rester une seule possibilité de diminution de la dépense, en aucun cas de création d'une ressource nouvelle.

Le III établit les conditions du bénéfice de ce crédit d'impôt par les associés de certaines sociétés de personnes ou de groupements, proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou groupements - à la condition qu'il s'agisse de redevables de l'impôt sur les sociétés ou de personnes physiques participant à l'exploitation au sens du 1° bis du I de l'article 156 du code général des impôts, c'est-à-dire une participation à l'exploitation de l'activité de façon personnelle, continue et directe (40).

Le IV, enfin, précise que le nombre moyen d'apprentis s'apprécie en fonction du nombre d'apprentis dont le contrat a été conclu avec l'entreprise depuis six mois. Le but de cette disposition est d'éviter la conclusion de contrats dans le seul but de bénéficier du crédit d'impôt, et des ruptures immédiates. Il ne faut pas oublier que l'un des objectifs du plan de relance de l'apprentissage consiste aussi justement à diminuer le nombre de ruptures anticipées des contrats d'apprentissage.

Ledu I, en insérant un article 199 ter F dans le code général des impôts, prévoit, dans le cas de l'imputation du crédit d'impôt au titre de l'impôt sur le revenu, que cette imputation s'opère au titre de l'année au cours de laquelle les apprentis ont été employés. En outre, si le montant du crédit d'impôt excède l'impôt dû au titre de l'année, l'excédent est restitué. On retrouve là l'idée selon laquelle le crédit d'impôt n'a pas vocation à constituer une ressource nouvelle « en positif » pour l'entreprise.

Ledu I introduit dans le code général des impôts un article 220 H qui prévoit que le crédit d'impôt est imputé sur l'impôt sur les sociétés dû par les entreprises dans les conditions prévues à l'article 199 ter F. Il s'agit donc d'une transposition des conditions prévues par l'article 199 ter F dans le cadre des redevables de l'impôt sur le revenu au cas des redevables de l'impôt sur les sociétés.

Levise à inclure le nouveau crédit d'impôt dans le dispositif de l'article 223 O du code général des impôts, à savoir que, dans le cas de substitution d'une société mère aux différentes sociétés du groupe, le crédit d'impôt est imputable sur l'impôt sur les sociétés acquitté par la société mère, l'année prise en compte correspondant à celle où les différentes sociétés du groupe ont employé des apprentis.

Le II de l'article renvoie à un décret le soin de fixer les conditions d'application de l'ensemble du dispositif.

3. Les risques d'une mesure pensée au plan global sans prise en considération de la diversité des situations individuelles

Sans douter du caractère fortement incitatif de la mesure proposée, la rapporteure souhaite, en une forme de recommandation, évoquer un double risque.

D'une part, le fait que certaines entreprises puissent finir par ne plus rien payer aux apprentis. La somme des exonérations, indemnités compensatrices et crédits d'impôt pourrait en effet faire tendre vers zéro le coût d'un apprenti. Néanmoins, les dispositions examinées plus haut, en assurant que le crédit d'impôt ne pourra en aucun cas constituer une ressource supplémentaire pour l'entreprise, constituent, semble-t-il, une certaine garantie.

A l'inverse, les entreprises qui ne bénéficient pas du crédit d'impôt subiront le seul effet de la contribution au développement de l'apprentissage. Or il est un fait que certaines entreprises, plus fragiles que d'autres, et n'ayant, en raison des caractéristiques propres à leur activité, pas recours à l'apprentissage, pourraient pâtir de cette situation. Mais il est vrai que l'on peut retourner le raisonnement et objecter que, précisément, le projet a vocation aussi à susciter le développement de l'apprentissage là où il n'existe pas encore.

La rapporteure, sensible à ces risques de déséquilibre dans l'application au cas par cas d'une telle mesure de portée générale, souhaite néanmoins, sans pour autant remettre en cause l'économie générale du dispositif, que le gouvernement soit attentif à cette situation et puisse, si ces déséquilibres étaient avérés, apporter, en temps utile, les correctifs nécessaires. A cet égard, il serait souhaitable qu'un bilan comportant des indicateurs tant qualitatifs que quantitatifs soit effectué au plus tôt.

*

La commission a examiné deux amendements de suppression de l'article de M. Christian Paul et M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz a jugé que le système de vases communicants mis en place par cet article ne garantit aucunement le développement de l'apprentissage et risque au contraire de favoriser les grandes entreprises et de pénaliser les plus petites qui seront soumises à des charges plus importantes sans pouvoir embaucher plus d'apprentis.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, qui a fait valoir que cet article comporte un élément central de la politique d'incitation fiscale prévue par le texte, la commission a rejeté les deux amendements.

M. Francis Vercamer a retiré un amendement visant à moduler le crédit d'impôt en fonction du montant de la rémunération et du nombre moyen annuel d'apprentis.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer visant à porter le montant du crédit d'impôt pour l'embauche d'un apprenti bénéficiant de l'action d'accompagnement personnalisé à 3 200 euros. M. Rodolphe Thomas a précisé que l'amendement est gagé par la création d'une taxe additionnelle à la taxe prévue à l'article 1001 du code général des impôts.

La rapporteure a émis un avis favorable, en insistant sur la nécessité de préserver l'équilibre financier du dispositif. Le président Jean-Michel Dubernard a précisé que le gage proposé porte sur une taxe spéciale sur les contrats d'assurances.

La commission a adopté l'amendement.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Patrick Beaudouin visant à attribuer un montant de crédit d'impôt majoré aux entreprises qui emploient un apprenti handicapé.

La rapporteure a émis un avis favorable, à la condition que l'amendement soit modifié afin qu'il comporte la référence à « la qualité de travailleur handicapé dans les conditions prévues à l'article L.  323-10 ».

Mme Hélène Mignon a estimé que l'adoption de l'amendement constituerait un signe de ségrégation à l'égard des handicapés. La loi pénalise les entreprises ne respectant pas l'obligation d'emploi : il n'y a pas lieu de « récompenser » celles qui la respectent.

M. Jean-Paul Anciaux a jugé que l'amendement ne remet pas en cause l'incitation à l'emploi.

Mme Martine Billard a considéré que l'amendement est porteur de discrimination car il crée une catégorie spéciale.

La commission a adopté l'amendement ainsi rectifié.

La commission a ensuite adopté un amendement de la rapporteure tendant à harmoniser le dispositif du crédit d'impôt avec la rédaction nouvelle des articles L. 322-4-17-1 et L. 322-4-17-2 du code du travail à la suite de la première lecture au Sénat.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Francis Vercamer visant à accorder un crédit d'impôt majoré à une entreprise embauchant un apprenti domicilié en zone urbaine sensible (ZUS) ou en zone d'éducation prioritaire (ZEP).

M. Rodolphe Thomas a souligné que l'amendement permet de prendre en compte le taux de chômage très élevé des quartiers bénéficiant d'un contrat de ville.

La rapporteure a émis un avis défavorable, estimant qu'il est plus opportun de viser des publics plutôt que des zones.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Yvan Lachaud introduisant une référence à la notion de handicap définie par l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles dans la description des bénéficiaires du dispositif de crédit d'impôt. La rapporteure ayant précisé que l'amendement est déjà satisfait, la commission l'a rejeté.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Bertho Audifax proposant d'augmenter le crédit d'impôt pour l'embauche des apprentis âgés de plus de vingt et un ans dans les régions confrontées à des taux de chômage des jeunes particulièrement élevés. Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a adopté l'article 15 ainsi modifié.

Après l'article 15

La commission a examiné un amendement portant article additionnel de M. Yvan Lachaud proposant que le conseil régional détermine la fraction des sommes perçues par l'employeur au titre de l'indemnité qui doit être reversée à la région en cas de non obtention par l'apprenti du diplôme préparé.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté l'amendement.

Article 16

Conclusion de contrats d'objectifs et de moyens entre l'Etat, les régions,
les organismes consulaires et les organisations représentatives d'employeurs et de salariés visant au développement de l'apprentissage

Le Sénat a assez substantiellement modifié cet article dont l'objet est au cœur du dispositif de réforme du financement de l'apprentissage tel qu'il est présenté par le présent projet. Il importe, pour bien saisir l'enjeu du débat, de rappeler d'abord l'origine de l'idée de contrats d'objectifs et de moyens, puis de revenir sur l'article 16 tel qu'il était présenté par le gouvernement et enfin d'analyser la portée et l'opportunité des modifications introduites au Sénat par voie d'amendement.

1. Le principe de la signature des contrats d'objectifs et de moyens

L'idée de contrats signés entre l'Etat, la région, les chambres consulaires et les organisations représentatives d'employeurs et de salariés repose sur des considérations de deux ordres.

La première considération est d'ordre administratif et politique. L'apprentissage, depuis la loi du 13 août 2004, relève entièrement de la compétence des régions : si donc l'Etat souhaite continuer, d'une manière ou d'une autre, à impulser une dynamique en cette matière - et c'est bien le cas du présent projet, qui vise à relancer à une grande échelle l'apprentissage -, il n'a pas d'autre choix que de proposer des contrats aux acteurs qui disposent désormais des pleins pouvoirs en la matière.

La deuxième considération est directement technique. Les régions perçoivent environ 600 millions d'euros par année en dotation générale de décentralisation au titre de l'apprentissage. Dans les faits, elles dépensent environ 800 millions d'euros. Ces dépenses consistent en des versements aux centres de formation des apprentis, en fonction des besoins de ceux-ci, compte tenu de la réception par eux d'une partie de la taxe d'apprentissage.

Or l'un des trois piliers du projet (41), en matière d'incitation financière au développement de l'apprentissage, est constitué par la suppression de chefs d'exonération : chiffrée à 123 millions d'euros, elle pèsera sur les entreprises, qui vont se voir obligées de s'acquitter à des montants d'autant plus élevés de la taxe d'apprentissage que leurs possibilités de procéder à des dépenses libératoires diminuent.

Cette augmentation du produit de la taxe d'apprentissage constitue la ressource nouvelle essentielle créée par le projet au profit de l'apprentissage : car la nouvelle contribution au développement de l'apprentissage ne constitue pas réellement une ressource nouvelle, dans la mesure où elle se substitue à la dotation de décentralisation.

La question qui se pose est donc de maximiser cette ressource, or :

- soit les entreprises « compensent » d'une certaine façon la suppression des exonérations en accroissant leurs versements libératoires directement au profit des centres de formation des apprentis : dans ce cas, les besoins des centres de formation des apprentis vont être moindres ; le risque est le suivant : les centres de formation des apprentis ayant moins besoin d'argent, les régions, mécaniquement, par le jeu de la péréquation, leur verseront des sommes moins importantes, cette situation conduisant à un désengagement des régions, à des lieues de l'objectif poursuivi par le projet ;

- soit décision est prise de « canaliser » cette ressource nouvelle, de l'affecter à un usage spécifique, l'apprentissage. Mais cela est difficile en raison de l'existence du principe de libre-affectation, qui laisse libres les entreprises de choisir les établissements envers qui elles souhaitent s'acquitter de leurs obligations.

Pour ce faire, trois étapes sont donc nécessaires.

D'abord, il importe de modifier la répartition du montant total de la taxe d'apprentissage, c'est-à-dire la répartition entre la fraction dite « du quota » (réservée à l'apprentissage) et la fraction dite par opposition « hors quota » (réservée aux premiers enseignements professionnels et techniques). Ainsi, par définition, une somme plus importante sera consacrée au financement de l'apprentissage.

Mais il faut ensuite encore s'assurer de l'usage de l'argent de l'apprentissage au sein de la fraction « du quota » ainsi élargie. Pour cela, il importe de créer une sorte de « centrale de redistribution » qui non seulement aura une fonction « classique » de péréquation, à l'image de l'actuel fonds national de péréquation de la taxe d'apprentissage, mais sera dotée d'une autre fonction plus nouvelle dite de modernisation et de développement.

Ce fonds, créé par l'article 16 bis nouveau du présent projet (voir le commentaire ci-après) sera donc composé de deux sections, l'une en charge de la péréquation, l'autre de la modernisation et du développement.

Une fois cette « centrale » créée, encore convient-il de lui réserver une part suffisante au sein de la fraction du quota. On sait, en effet, qu'aujourd'hui un quart de la fraction du quota est versé par les entreprises directement au Trésor public par le biais du fonds national de péréquation de la taxe d'apprentissage. Cette part va augmenter, de sorte qu'elle représente un taux lui permettant de percevoir une somme totale en augmentation d'un montant équivalent au montant des exonérations libératoires qui ont été supprimées.

Enfin, et c'est l'un des intérêts des nouveaux contrats d'objectifs et de moyens, encore faut-il définir l'utilisation qui va être faite de ces sommes par la section en charge de la modernisation et du développement de l'apprentissage.

C'est, précisément, l'objet des contrats signés entre toutes les parties prenantes et par lesquels celles-ci s'accordent sur des objectifs et des moyens, pour lesquels elles disposent de crédits nouveaux.

Ces contrats sont autant de garanties pour l'ensemble des parties de se voir associées à l'affectation finale de ces fonds, à l'heure où, dans le même temps, il leur faut s'acquitter d'une nouvelle contribution.

Le schéma présenté ci-après décrit le dispositif de financement après la réforme.

Flux financiers de l'apprentissage et taxe d'apprentissage

graphique

Source : secrétariat d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes.

2. Le dispositif retenu : une inversion et une « simplification » de la présentation du dispositif lors de la discussion au Sénat

Le I de l'article 16 rétablissait dans le code du travail un article intitulé article L. 118-1, placé en tête de l'ensemble des dispositions financières contenues dans le chapitre VIII du titre premier consacré au contrat d'apprentissage dans le livre premier, dédié aux conventions relatives au travail.

Cet article établissait la possibilité de conclure des « contrats d'objectifs et de moyens », dans le but de développer l'apprentissage (thème déjà présent dans l'intitulé de la nouvelle « contribution au développement de l'apprentissage », et révélateur de l'ambition de l'ensemble du projet, maintes fois réaffirmée : développer l'apprentissage).

Les parties à ces contrats pourront être : l'Etat ; la région ; les chambres consulaires ; une ou plusieurs organisations représentatives d'employeurs et de salariés. Le Sénat a rajouté à ces acteurs les « organismes mentionnés à l'article L. 351-21 du code du travail », c'est-à-dire les associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (ASSEDIC).

Ces contrats visent en premier lieu le développement de l'apprentissage.

Comme leur nom l'indique, ils doivent prévoir la définition d'objectifs, qui sont autant d'objectifs intermédiaires destinés à œuvrer à la poursuite des objectifs finals suivants :

- l'adaptation de l'offre de formation aux besoins quantitatifs et qualitatifs ;

- l'amélioration de la qualité des formations dispensées ;

- la contribution à un meilleur déroulement de séquences d'apprentissage dans les Etats membres de l'Union européenne.

Ces trois objectifs initiaux ont été enrichis lors du passage au Sénat, qui a ajouté :

- la création de centres de formation d'apprentis interrégionaux, comme déclinaison de l'une des facettes de l'adaptation de l'offre de formation aux besoins quantitatifs et qualitatifs ;

- la valorisation de la condition matérielle des apprentis : ce point figurait dans l'exposé des motifs du projet (sous la forme de l'amélioration des conditions de vie des apprentis), dans le but d'encourager les mesures en faveur des apprentis en matière de logement, de transport, d'acquisition d'équipements pour la formation.

Mais l'exposé des motifs du projet apportait une vision plus développée encore des objectifs poursuivis par le législateur :

- s'agissant de l'adaptation de l'offre de formation, il fait allusion à l'expérience menée à la faculté des métiers de Ker Lann, en Bretagne (42) ;

- concernant la qualité des formations, l'exposé des motifs évoque le respect d'un cahier des charges passant par la signature d'une charte qualité, des échanges réguliers entre les formateurs des CFA et les maîtres d'apprentissage, l'adaptation de la pédagogie aux rythmes et contraintes de l'activité des entreprises,... La politique régionale pourrait prendre en compte ces éléments pour décider de ses conventionnements avec les CFA ou d'attribution des primes versées aux employeurs.

- le développement d'initiatives innovantes et le soutien à l'expérimentation sont également mentionnés.

Au regard de ces objectifs doivent être établis les moyens mobilisés par les parties.

Le II visait à compléter le V de l'article L. 214-13 du code de l'éducation par un nouvel alinéa rappelant cette possibilité nouvelle de contractualisation d'une phrase, dans une rédaction de l'article L. 214-13 issue de la loi du 13 août 2004. Le placement à la fin du V était motivé par le fait que ce V prévoit les conditions de conclusion de contrats fixant des « objectifs de développement coordonné des différentes voies de formation professionnelle initiale et continue, notamment de formation professionnelle alternée et de financement des demandeurs d'emploi », par l'Etat, les régions, les organisations représentatives des milieux socioprofessionnels et, le cas échéant, les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 du code du travail.

Le Sénat, dans un souci de clarification des dispositions, a jugé qu'il suffisait d'ajouter aux objectifs du contrat d'objectifs et de moyens du V de l'article L. 214-13 du code de l'éducation (à savoir le développement des différentes voies de formation professionnelle et le financement des demandeurs d'emploi) l'objectif de développement de l'apprentissage tel que défini par l'article L. 118-1, ces deux types de contrats ne faisant plus qu'un - en l'espèce, le contrat existant originellement dans le V de l'article L. 214-13 du code de l'éducation. Il n'est dès lors pas nécessaire de créer un nouveau contrat

Ainsi que l'a expliqué le rapporteur, M. Louis Souvet, en séance publique lors de la présentation de cet amendement, « il existe suffisamment de conventions (43) et (...) il n'est pas nécessaire d'en créer une de plus (...) On se passerait ainsi d'une énième convention en matière d'apprentissage, tout en reprenant les dispositions intéressantes de la convention, en les intégrant dans le processus conventionnel qui est en cours ».

C'est la raison pour laquelle le Sénat a inversé la présentation globale du dispositif :

- le I procède désormais à une redéfinition des contrats d'objectifs et de moyens du V de l'article L. 214-13 du code de l'éducation pour y inclure les spécificités relatives à l'apprentissage ;

- le II procède au rétablissement de l'article L. 118-1 du code du travail pour y faire figurer ces contrats, mais sans qu'il y ait là création nouvelle : c'est une simple référence aux contrats existants à l'article L.  214-13 du code de l'éducation.

3. Les perspectives

L'un des avantages de cette mesure est qu'elle permet de lier les aspects qualitatifs et quantitatifs du développement de l'apprentissage. Encore est-il nécessaire de prévoir, d'une manière ou d'une autre, un moyen de suivre l'évolution de ces contrats.

L'une des possibilités consisterait à créer un comité d'orientation entre le préfet de région et le conseil régional (44). Il serait en quelque sort l'organe politique de ces contrats, informant chaque année le comité de coordination régionale de l'emploi et de la formation du contenu des travaux des contrats d'objectifs et de moyens.

Les fonds provenant de la deuxième section du Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage seront versés aux fonds régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continue au vu des orientations définies et des contrats signés. Ces fonds seront suivis par les conseils régionaux dans un état annexe au budget relatif au financement de l'apprentissage.

Par ailleurs, un comité de projet pourrait être constitué pour chaque contrat d'objectifs et de moyens, composé de tous les partenaires parties au contrat. En liaison avec les objectifs définis par le comité d'orientation, il proposerait les actions propres à ce contrat, en suivrait l'exécution et organiserait son évaluation. Il informerait régulièrement le comité d'orientation.

*

La commission a examiné deux amendements de suppression de l'article de M. Christian Paul et de Mme Muguette Jacquaint.

Mme Hélène Mignon a estimé qu'il n'est pas nécessaire de créer un dispositif supplémentaire et facultatif de contractualisation de manière distincte des procédures du plan régional de développement des formations professionnelles des jeunes, alors que les dispositifs existants ont vocation à s'inscrire dans le plan régional de développement de la formation.

La rapporteure a précisé qu'un de ces amendements vise à rétablir les contrats d'objectifs et de moyens.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté les deux amendements.

La commission a ensuite examiné un amendement de la rapporteure proposant une nouvelle rédaction de l'article 16 en réécrivant le dispositif relatif aux contrats d'objectifs et de moyens.

La rapporteure a expliqué que le Sénat a supprimé ces contrats et a élargi en contrepartie le champ des contrats déjà existants à l'article L.  214-13 du code de l'éducation en y faisant figurer l'apprentissage. L'amendement répond au souci légitime de simplification du Sénat en prévoyant que le contrat peut prendre la forme d'une annexe aux dispositifs visés à l'article L. 214-13 du code de l'éducation. La nouvelle rédaction attribue de nouveaux objectifs à ces contrats : la promotion du soutien et de l'initiative pédagogique, ainsi que de l'expérimentation, et l'aide en faveur de l'accès de jeunes handicapés à l'apprentissage.

La commission a adopté l'amendement.

M. Bertho Audifax a retiré un amendement visant à rendre obligatoire la conclusion de contrats d'objectifs.

Deux amendements, le premier de M. Bertho Audifax visant à inclure dans les contrats d'objectifs non seulement les objectifs et les moyens mais aussi les modalités d'exécution des actions définies par les parties, le second de M. Yvan Lachaud visant à promouvoir l'égalité d'accès des filles et des garçons à l'apprentissage, sont devenus sans objet.

La commission a adopté l'article 16 ainsi modifié.

Article 16 bis (nouveau)

Création du Fonds national de développement
et de modernisation de l'apprentissage

Permettre la réalisation d'actions concrètes dans le cadre de la signature des contrats définis à l'article 16 grâce à un mode de financement spécifique qui viendra s'ajouter aux moyens déjà prévus par les parties, tel est l'objet de l'institution d'un Fonds national de développement et de modernisation, qui se substituera à l'actuel fonds national de péréquation de la taxe d'apprentissage.

L'introduction de ces dispositions dans le projet de loi par voie d'amendement, comme l'a expliqué le secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes lors de leur présentation au Sénat, s'explique par l'intervention de l'avis du Conseil d'Etat sur le projet de loi de finances pour 2005.

Initialement en effet, le gouvernement avait envisagé de faire figurer cette disposition dans la loi de finances pour 2005. Une partie de ce fonds continuera en effet d'être affectée à la péréquation entre les régions, pour un montant peu ou prou identique au montant actuel, c'est-à-dire 30 millions d'euros. Ces sommes étant collectées par le Trésor public et affectées ensuite aux régions, il semblait nécessaire, en application de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, de prévoir la création du fonds par une loi de finances.

Mais le Conseil d'Etat en a, semble-t-il, estimé autrement : dans la mesure où cette part affectée à la péréquation est relativement faible par rapport au montant total du fonds - plus de 340 millions d'euros -, il s'avérait possible de réintégrer cette disposition dans la loi « ordinaire ».

Dès lors, ne subsistait plus, dans l'article 20 du projet de loi de finances pour 2005, que la disposition instituant un nouvel article L. 118-3-1 dans le code du travail (l'actuel article L. 118-3-1 devenant article L. 118-3-2) et selon laquelle les versements au Trésor public sans affectation ou qui résulteraient d'une insuffisance de versements soit au titre de la fraction mentionnée à l'article L. 118-2-2, soit au titre de la contribution restant due par le redevable après déduction de la fraction précitée, sont reversés au nouveau fonds.

L'exposé des motifs du projet consacrait de toute façon déjà des explications assez longues à cette institution. Il annonçait ainsi :

- la création du Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage par une nouvelle rédaction de l'article L. 118-2-3 du code du travail.

Le nouveau fonds sera divisé en deux sections, la première correspondant à la vocation actuelle du Fonds national de péréquation, la deuxième plus spécifiquement centrée sur la mise en œuvre des contrats d'objectifs et de moyens. Il faut ajouter que le mécanisme de redistribution entre les régions - qui relève de la compétence réglementaire - sera modifié, en réponse aux observations formulées dans le rapport des inspections quant à son faible effet redistributif et afin de mieux satisfaire les régions au regard de leurs efforts réels pour l'apprentissage. Par ailleurs, la gestion financière du fonds continuera à être assurée par le Trésor public (45).

- la modification de l'article L. 118-2-2 du code du travail pour tirer les conséquences des nouvelles missions de ce Fonds ;

- l'introduction dans le code du travail d'un nouvel article L. 118-3-1 (l'actuel article L. 118-3-1 devenant l'article L. 118-3-2) prévoyant que les versements résiduels de taxe d'apprentissage effectués au Trésor public seront reversés au nouveau fonds : disposition figurant donc à l'article 20 du projet de loi de finances pour 2005.

Le I de cet article procède à une modification de l'article L. 118-2-2 du code du travail.

Le a une valeur essentiellement rédactionnelle, dans la mesure où il remplace le mot « critères » par le mot « modalités ».

Leintroduit quatre nouveaux alinéas dans l'article L. 118-2-2 du code du travail, qui tendent à préciser l'affectation des sommes reversées aux fonds régionaux de l'apprentissage et de la formation professionnelle continue telles qu'elles figurent au premier alinéa de l'article L. 118-2-2 (sommes qui correspondent donc à la part du quota obligatoirement versée au Trésor public), à savoir :

- les centres de formation d'apprentis et sections d'apprentissage pour lesquels la région a passé des conventions, et les CFA pour lesquels a été passée convention avec l'Etat : cela correspond aux modalités habituelles de financement des CFA par la région ;

- les actions arrêtées en application des contrats d'objectifs et de moyens mentionnés à l'article L. 118-1 : c'est le propre de la vocation nouvelle du fonds dans sa mission de développement et de modernisation de l'apprentissage.

Il est à noter que le projet prévoit d'emblée un dispositif de contrôle puisqu'il revient à la région de présenter chaque année un rapport indiquant l'utilisation de ces sommes au comité de coordination régional de l'emploi et de la formation professionnelle.

Le porte modification rédactionnelle du deuxième alinéa.

Le a) en supprime la première phrase, devenue inutile dans la mesure où cette mention du dispositif de financement « classique » des CFA par les régions a disparu.

Le b) procède à une coordination en réservant à la part du financement « classique » les priorités d'affectation aux personnes les plus démunies, ou à la dispense des formations sans considération d'origine régionale.

Le c) supprime la dernière phrase relative au rapport au comité de coordination régional de l'emploi et de la formation professionnelle par coordination avec l'ajout effectué par le 2°.

Le précise que les sommes excédentaires, du fait, pour les CFA, de ressources supérieures au plafond fixé, sont affectées au système de financement « classique ».

Le II procède à la modification de l'article L. 118-2-3 du code du travail.

Le a) duopère une rectification matérielle au premier alinéa de façon à donner au fonds sa nouvelle dénomination de Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage.

Le b) du supprime d'une part la référence aux dépenses de ce fonds, qui va faire l'objet, par le 2°, de l'introduction d'alinéas nouveaux dans l'article L. 118-2-3.

D'autre part, il ajoute aux recettes évoquées, qui sont celles de la fraction de la taxe visée au premier alinéa de l'article L. 118-2-2, les versements nouveaux qui figurent dans le nouvel article L. 118-3-1 tel qu'il a été défini par le projet de loi de finances pour 2005, à savoir les versements sans affectation ou résultant d'insuffisances de versements.

Le insère, après le premier alinéa de l'article L. 118-2-3, quatre nouveaux alinéas :

- Le premier pose la division en deux sections du fonds, renvoyant à un arrêté conjoint du ministre chargé de la formation professionnelle et du ministre chargé du budget la répartition des recettes entre les deux sections ; on rappellera simplement que la clef de répartition retenue doit permettre de réaliser une équivalence entre les apports à la section relative à la modernisation et les ressources résultant de la suppression des exonérations mentionnée notamment à l'article 14.

- Le deuxième précise que chaque section comporte en recettes les ressources du fonds qui lui sont attribuées. S'agissant des dépenses, les reversements effectués au profit des fonds régionaux de l'apprentissage et de formation professionnelle doivent bien être distingués : c'est la première section, consacrée à la péréquation, qui procédera aux dépenses visées au troisième alinéa de l'article L. 118-2-2, autrement dit relatives à la fonction de péréquation traditionnelle ; en revanche, c'est la deuxième section, de modernisation, qui effectuera les dépenses visées au quatrième alinéa de l'article L. 118-2-2, autrement dit celles opérées en application des nouveaux contrats d'objectifs et de moyens.

La première section continuera à bénéficier des ressources actuelles du fonds national de péréquation de la taxe d'apprentissage (soit 150 millions d'euros), comme le souligne le troisième alinéa ; la deuxième, aux termes du quatrième alinéa, se verra affecter d'une part les recettes supplémentaires provenant de la suppression des chefs d'exonération (soit 186 millions d'euros), d'autre part celles correspondant aux sommes perçues aujourd'hui à titre résiduel par le Trésor public - le montant de la taxe d'apprentissage une fois déduites toutes les dépenses libératoires, soit 28 millions d'euros.

*

La commission a adopté l'article 16 bis (nouveau) sans modification.

Article additionnel après l'article 16 bis (nouveau)

Evaluation du dispositif relatif aux contrats d'objectifs et de moyens
visant au développement de l'apprentissage

La commission a adopté un amendement portant article additionnel de la rapporteure prévoyant que le gouvernement remet chaque année un rapport au Parlement comprenant les données quantitatives et qualitatives sur la signature et l'exécution des contrats d'objectifs et de moyens, ainsi que des données relatives aux effets de la suppression des exonérations, au nouveau Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage et au nouveau crédit d'impôt.

Après l'article 16 bis (nouveau)

La commission a examiné un amendement de M. Maxime Gremetz visant à ce que le conseil d'administration des CFA représente l'ensemble des parties prenantes.

La rapporteure a rappelé qu'un décret précise que chaque CFA est indépendant et dispose d'un conseil d'administration, et que la convention portant création d'un CFA fixe ses modalités d'organisation administrative, pédagogique et financière.

M. Laurent Wauquiez a jugé le dispositif proposé trop imprécis.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté l'amendement.

Article 17

Création d'un état annexe au budget des conseils régionaux consacré
au financement de la formation professionnelle des jeunes

Le présent article complète l'article L. 4312-1 du code général des collectivités territoriales afin de prévoir la présentation par les conseils régionaux d'un état annexe au budget relatif au financement initialement du seul apprentissage et désormais, après la discussion au Sénat, également de l'ensemble de la formation professionnelle des jeunes.

Le problème initialement posé résulte directement de l'exposé des motifs, aux termes duquel : « il n'existe pour le moment aucun document comptable permettant de retracer les fonds versés aux régions par l'intermédiaire du fonds national de péréquation de la taxe d'apprentissage et attribués ensuite aux centres de formation ».

La thématique, contrairement à celle des trois articles précédents, appartenant à la même section 3 intitulée « Modernisation et développement de l'apprentissage », n'est plus celle du dispositif de financement de la relance de l'apprentissage, composé de la suppression des exonérations, de l'institution du crédit d'impôt ou des financements complémentaires au profit des contrats d'objectifs et de moyens. La problématique serait davantage celle des articles suivants immédiatement, mais regroupés dans une section 4 intitulée « Transparence de la collecte et de la répartition de la taxe d'apprentissage ».

Le dispositif établi par le présent article vise en effet en premier lieu à faciliter les contrôles des fonds versés aux régions par l'intermédiaire du fonds national de péréquation de la taxe d'apprentissage.

1. Le dispositif de péréquation de la taxe d'apprentissage

Le Fonds national de péréquation de la taxe d'apprentissage a été créé par la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997, par l'institution d'un nouvel article L. 118-2-3 qui lui confère l'autonomie financière ainsi décrite de manière très simple :

- il reçoit en recettes la fraction de la taxe mentionnée au premier alinéa de l'article L. 118-2-2 du code du travail, à savoir la fraction de la taxe d'apprentissage (aujourd'hui de 10 % du total) qui revient au Trésor public ;

- il comporte, en dépenses, les reversements de ces sommes aux fonds régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continue, étant précisé à l'article L. 118-2-2 que ce reversement porte sur l'intégralité des sommes perçues.

C'est le ministre chargé de la formation professionnelle l'ordonnateur des recettes et des dépenses du fonds, le Trésor public en assurant la gestion financière.

Le fait que le Fonds national de péréquation de la taxe d'apprentissage ait vocation à être remplacé par le Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage (aux termes de l'article 16 bis du présent projet et de l'article 20 du projet de loi de finances pour 2005 actuellement en discussion au Parlement) ne change rien aux données du problème. La première section du nouveau fonds continuera en effet à assurer la péréquation entre régions.

Le rôle des fonds régionaux de l'apprentissage et de la formation professionnelle continue est double.

D'une part, dans le cadre de la péréquation nationale au titre de la fraction du quota versée en application de l'article L. 118-2-2 du code du travail, ces fonds jouent un seul rôle d'intermédiaire, les sommes provenant du fonds national étant transmises ensuite aux différents centres de formation d'apprentis et sections d'apprentissage.

D'autre part, il existe, aux côtés de la péréquation nationale, une péréquation régionale, concernant les CFA ou SA disposant de ressources excédentaires. Ces excédents sont, en application de l'article L. 118-2-2, reversés au fonds régional, pour être ensuite transmis par la région aux CFA et aux sections d'apprentissage déficitaires.

2. Favoriser le contrôle des fonds de la formation professionnelle par le conseil régional

Dans sa version actuelle, l'article L. 4312-1 du code général des collectivités territoriales, issu de la loi n° 72-619 du 5 juillet 1972, pose le principe de publicité du budget et du compte administratif de la région et établit les modalités de mise à disposition du public de ces documents.

Le présent article complétait dans un premier temps ce dispositif d'une phrase selon laquelle les documents budgétaires sont également assortis d'un état annexe présentant les données financières relatives à l'apprentissage et précisant notamment l'utilisation des sommes versées au fonds régional de la formation professionnelle. Le Sénat a modifié la présentation de l'article, mais ce dispositif subsiste.

Quelques remarques s'imposent :

- Le contenu des dispositions devant désormais figurer dans les documents budgétaires est assez flou. D'une part, l'expression « données financières relatives à l'apprentissage » est imprécise. D'autre part, la référence, plus précise, à l'utilisation des sommes versées au fonds régional est assortie de l'adverbe « notamment », laissant présager des compléments à venir. Au reste, le texte renvoie expressément à un décret le soin de définir les modalités de présentation de ces documents.

- Si l'obligation liée à l'existence d'un tel document est claire, il en va différemment de ses modalités de publicité. Les modalités applicables au budget et au compte administratif le seront-elles à ce nouveau document ? Là encore, le décret devra sans doute le préciser. On peut d'ores et déjà présumer que l'accessoire suivant le principal, l'état annexe suivra le même sort que le budget et le compte administratif.

- On est en droit, enfin, de s'interroger sur l'application pratique de cette nouvelle obligation. Dans quelle mesure la région a-t-elle, en effet, une connaissance suffisante de l'utilisation des sommes qui ont été reversées aux fonds régionaux de l'apprentissage et de la formation professionnelle ?

En dépit de ces interrogations, l'intention ainsi manifestée ne peut être que saluée. Il faudra veiller, en pratique, à sa bonne application. L'élaboration du décret d'application sera, à cet égard, déterminante.

Au cours de la lecture au Sénat, un amendement présenté par les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, adopté à l'unanimité, a complété ce dispositif en prévoyant que l'état annexe serait dédié non seulement aux données financières, mais plus généralement à l'évolution des dépenses consacrées à la formation professionnelle des jeunes, tenant compte à la fois de l'apprentissage, de l'enseignement professionnel sous statut scolaire et des formations continues en alternance.

Ainsi que l'a précisé M. Jean-Pierre Mélenchon en présentant cet amendement, il convient ainsi d'« introduire l'idée que le document annexe fasse le point non seulement sur le quota, mais aussi sur le barème pour tout ce qui concerne les enseignements professionnels », de manière à ce que soient également identifiées les sommes transitant par la région au profit des lycées professionnels et des formations continues.

La rapporteure s'associe à cette approbation unanime, tout en réaffirmant, sur cette question également, son souci d'une application pratique effective de ces mesures, notamment à l'occasion de la rédaction des décrets d'application.

*

La commission a adopté l'article 17 sans modification.

Section 4

Transparence de la collecte et de la répartition de la taxe d'apprentissage

Article 18

Obligation de l'intermédiation des organismes collecteurs
pour les versements obligatoires au titre de la taxe d'apprentissage

L'article 18 comporte peut-être l'une des mesures les plus symboliques de l'ensemble des dispositions concernant la transparence du système de financement de la taxe d'apprentissage : il rend en effet obligatoire l'intermédiation des organismes collecteurs pour les versements obligatoires aux centres de formation des apprentis, aux sections d'apprentissage et pour les subventions aux écoles d'entreprises et centres de formation du secteur des établissements de crédit et des assurances.

Mais le dispositif proposé obéit à une logique en deux temps : il faut en effet ajouter à cette obligation nouvelle la subsistance d'un principe antérieur, celui dit de libre affectation de la taxe d'apprentissage, en application duquel, comme le rappelle l'exposé des motifs, « l'entreprise conserve la possibilité d'indiquer à l'organisme collecteur le ou les organismes bénéficiaires auxquels elle souhaite que soit versé le produit de sa taxe ».

Le rappel de la portée de l'établissement du principe nouveau permet d'évoquer la multiplicité de l'obligation contributive des entreprises, cependant que la subsistance du principe de libre affectation laisse ouvertes certaines questions.

1. Le dispositif proposé : la déclinaison du principe d'obligation de l'intermédiation des OCTA pour tous les versements

De fait, l'article 18 se présente, dans chacun de ses paragraphes, comme déclinant le nouveau principe aux différents cas d'obligation de versement de la taxe d'apprentissage (46).

Le Sénat a commencé par introduire un nouveau paragraphe I A au début du dispositif. Il s'agit d'un paragraphe qui figurait initialement au début de l'article 15 consacré au crédit d'impôt et que le Sénat, pour des raisons de cohérence, a préféré inclure dans le présent article, puisque ce paragraphe procède de la même démarche, concernant la rédaction actuelle de l'article 226 B du code général des impôts :

- Il supprime la possibilité de versements directs telle qu'elle figure dans cet article par transposition des dispositions du premier alinéa de l'article L. 118-2-2 du code du travail.

- Il procède à la substitution à la référence à l'article L. 119-1-1 de la référence à l'article L. 118-2-4, pour une raison de toilettage du texte. En effet, avant la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, les organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage n'existaient pas dans la loi - leur régime relevant essentiellement du décret n° 72-283 du 12 avril 1972 : la seule mention qui y était faite figurait à l'article L. 119-1-1 du code du travail relatif au contrôle financier de l'Etat sur ces organismes. Or la loi de modernisation sociale ayant introduit dans le code du travail un nouvel article L. 118-2-4 entièrement dédié aux conditions d'habilitation de ces organismes, c'est désormais plutôt par référence à ce nouvel article qu'il convient de les définir.

- Il substitue à la référence au comité de coordination des programmes régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continue une référence au conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie.

Le I s'applique au deuxième alinéa de l'article L. 118-2 du code du travail. Ce deuxième alinéa vise l'obligation des entreprises employant un apprenti de se libérer d'une partie de la fraction au titre du quota (soit 40 %, telle qu'elle est définie à l'article L. 118-3) en apportant des fonds au CFA ou à la SA où est inscrit l'apprenti.

On rappellera que ce coût, depuis la loi de modernisation sociale, doit être au moins égal au coût par apprenti fixé par la convention de création du CFA ou de la SA (dans la limite de la fraction au titre du quota).

Aux termes du du I, les mots « soit directement, le cas échéant par le biais de leurs établissements, soit » sont supprimés : ne subsiste donc que la possibilité d'opérer ce versement « par l'intermédiaire d'un des organismes collecteurs ».

Le II porte sur l'article L. 118-2-1 du code du travail. Il importe de s'arrêter sur les cas spécifiques visés par cet article, à savoir la possibilité de s'exonérer de l'obligation de versement de la taxe d'apprentissage au titre de la fraction du quota par les « concours financiers apportés aux écoles d'enseignement technologique et professionnel qui bénéficient à la date de promulgation de la loi n° 77-767 du 12 juillet 1977 d'une dérogation au titre du régime provisoire prévu par l'article L. 119-3 ».

Cet article avait été introduit dans le code par la loi n° 77-767 du 12 juillet 1977 pour des motifs qu'exposait très clairement le rapport préparatoire (n° 3028) établi par M. Emmanuel Aubert au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale. Celui-ci rappelait en effet l'existence d'écoles d'entreprises bénéficiant de dispositions plus souples en matière d'exonérations. Il s'agissait d'établissements spécialisés et de haut niveau, où la formation alternée était donnée au sein de l'école fréquentée à plein temps par l'apprenti, telles l'école privée de la régie Renault ou l'école industrielle de Rouen.

La loi de 1977 avait ainsi officialisé une pratique à laquelle la loi du 16 juillet 1971 avait commencé par conférer un caractère provisoire, en prévoyant que les concours financiers apportés par les employeurs à ces établissements valaient exonération au même titre que les concours apportés « aux véritables CFA », et cette pratique a toujours cours aujourd'hui. Le II précise donc que ces versements doivent désormais transiter par les organismes collecteurs mentionnés à l'article L. 118-2-4.

Le III vise le premier alinéa de l'article L. 118-2-2 du code du travail, autrement dit le versement effectué au profit du Trésor public, à hauteur de 10 % du montant de la taxe professionnelle, pour rendre là encore obligatoire le passage « par l'intermédiaire d'un des organismes collecteurs mentionnés à l'article L. 118-2-4 ».

Le IV vise un dernier type de versement, à l'article L. 118-3-1 du code du travail. Cet article a, comme l'article L. 118-2-1, été introduit par la loi du 12 juillet 1977, dont le rapport préparatoire précité rappelle bien la raison d'être du dispositif. Certaines professions, en particulier les banques et les assurances, assurent à leurs jeunes salariés bénéficiant d'un contrat de travail de droit commun une formation professionnelle alternée comparable à l'apprentissage, conformément à leurs conventions collectives. Il est vrai que ces dispositifs s'apparentent à la formation professionnelle continue. Mais, dans un souci d'équité, ces entreprises étant par ailleurs soumises à la taxe d'apprentissage, il semblait nécessaire de leur permettre de bénéficier de ces possibilités d'exonération. En contrepartie, elles sont tenues d'appliquer des mécanismes de formation très comparables à ceux de l'apprentissage, notamment pour ce qui concerne la durée minimum d'enseignement ainsi que la répartition de la formation théorique et de la formation pratique.

Il est à noter que le rapport pointait, dès 1977, le problème de principe soulevé par un tel dispositif, qui aboutit à « détourner l'utilisation de sommes très importantes sur les fonds destinés à l'apprentissage (...) », de « consacrer ces sommes à la formation continue et de rendre ainsi plus léger l'effort (...) fait en faveur de la formation de leur personnel ». Problématique, on l'a vu avec l'examen de l'article 14, qui est loin d'avoir disparu.

C'est sans doute la raison pour laquelle ce dispositif avait été limité aux seuls secteurs des banques et des assurances.

Le IV procède, pour ces versements, à une insertion à l'article L. 118-3-1 du code du travail, destinée à préciser, là encore, l'intermédiation nécessaire des organismes collecteurs visés à l'article L. 118-2-4 du code du travail.

Le Sénat a complété ce dispositif en ajoutant le V par lequel il est procédé, dans l'article L. 151-1 du code du travail, à la substitution à la référence à l'article L. 119-1-1 de la référence à l'article L. 118-2-4, et qui correspondait au II de l'article 23, qui a été supprimé par le Sénat. Ce rapprochement était logique dans la mesure où la modification en cause relève de la même démarche que les modifications effectuées par le présent article.

2. La subsistance du principe de libre affectation

Le principe de l'intermédiation obligatoire doit en effet s'entendre avec la subsistance du principe de libre affectation.

Ce principe, également dénommé principe de l'« ordre impératif » par les professionnels, permet à une entreprise de désigner le bénéficiaire des versements auxquels elle procède. Il résulte des articles 4 et 5 du décret précité du 12 avril 1972 : à l'exception des dépenses libératoires obligatoires - soit le versement dit de péréquation du premier alinéa de l'article L. 118-2-2 du code du travail et le versement obligatoire au titre du quota -, il est possible à tout assujetti à la taxe d'apprentissage de s'acquitter de son obligation par des versements aux établissements qu'il choisit. Les employeurs sont très attachés à la subsistance de cette faculté, qu'il ne convenait pas de remettre en cause.

On peut néanmoins s'interroger. Etablir une intermédiation obligatoire est sans conteste un progrès. Mais la subsistance d'un « fléchage » ne risque-t-elle pas de laisser subsister la volonté, de manière plus ou moins licite et plus ou moins occulte, de conserver une maîtrise de l'affectation des fonds ? Le rôle des contrôleurs sera, à cet égard, déterminant.

*

La commission a examiné un amendement de suppression de l'article de M. Christian Paul. Mme Hélène Mignon a expliqué que l'obligation de versement par l'intermédiaire d'un collecteur n'est pas nécessairement une garantie de transparence. Elle risque au contraire d'aggraver la complexité du circuit d'affectation de la taxe et de l'alourdir dans certains cas, avec des frais de gestion qui n'existent pas en cas de versement direct. Cette intermédiation risque de bouleverser le tissu très étroit de partenariat qui s'est noué entre les entreprises à l'échelle des bassins d'emploi et de formation.

La rapporteure a exprimé son étonnement en rappelant que l'ensemble des personnes auditionnées a confirmé l'intérêt de l'intermédiation, qui s'inscrit dans la continuité des dispositions de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a adopté l'article 18 sans modification.

Article 19

Précisions relatives au régime d'habilitation des organismes collecteurs
Régime de la collecte outre-mer

Le présent article vise à clarifier la rédaction de l'article L. 118-2-4 du code du travail.

On rappellera que cet article, introduit par la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, établit, pour l'essentiel, de nouvelles règles d'habilitation à collecter sur le territoire national, ouvrant ainsi la voie à une vaste restructuration des organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage (47).

Le I procède à la modification de l'article L. 118-2-4 du code du travail, consacré au dispositif d'habilitation des organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage.

Le substitue à la référence aux groupements régionaux des chambres consulaires régionales celle de « groupements inter-consulaires, ou dans les départements d'outre-mer, [d'] une seule chambre consulaire, par décision du préfet de région », permettant l'adaptation du dispositif à la situation des départements d'outre-mer.

En effet, la situation outre-mer se caractérise par l'absence de chambre consulaire régionale. Or l'article L. 118-2-4 du code du travail, créé par la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, a prévu l'habilitation à « collecter des versements, donnant lieu à exonération de la taxe d'apprentissage » notamment aux « chambres consulaires régionales ainsi [qu'à] leurs groupements régionaux ».

Désormais, ce sont donc les chambres consulaires régionales, mais aussi, dans les départements d'outre-mer, des groupements inter-consulaires, voire une seule chambre consulaire, par décision du préfet de région qui pourront procéder à la collecte.

Le supprime, au septième alinéa, la référence à l'agrément. C'est en effet la seule habilitation qui conditionne la qualité de collecteur d'un établissement.

Le modifie le huitième alinéa de l'article. Il remplace le terme de collecteur par celui d'organisme.

Par ailleurs, il supprime, par deux fois, la référence à l'agrément.

Le renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin non plus seulement de fixer les conditions d'application du présent article, mais également de déterminer « les règles comptables applicables aux organismes collecteurs », en l'absence de telles règles prévalant pour l'ensemble des organismes aujourd'hui.

Au cours de la discussion au Sénat, il a été rajouté un paragraphe II, issu de l'adoption d'un amendement de M. Francis Grignon et Mme Catherine Troendle prévoyant qu'avant le 1er juin, les représentants des collecteurs régionaux, les représentants en région des collecteurs nationaux des branches professionnelles et les collecteurs nationaux dont le montant de la collecte est supérieur à 10 millions d'euros remettent à la région et au comité de coordination régional pour l'emploi et la formation professionnelle un rapport annuel justifiant de l'utilisation exacte du produit collecté en région au titre du quota de la taxe d'apprentissage, de la répartition de ces ressources entre les centres de formation d'apprentis de la région ainsi que des critères et modalités de répartition des sommes collectées au titre de l'année en cours.

Cet amendement était motivé, ainsi que l'a expliqué Mme Catherine Troendle lors de sa présentation en séance publique, par le souci de mener à bien les concertations en matière de financement des CFA par les principaux collecteurs, concertations qui se tiennent dans le cadre de l'application de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : or l'absence d'information concernant non la collecte au plan régional, mais la collecte au plan national, rend aujourd'hui ces concertations difficiles. Cela explique la nécessité d'un rapport d'information sur cette question.

Il convient toutefois d'observer que la disposition ainsi établie ne met pas cette obligation nouvelle à la seule charge de l'Etat, mais également à la charge des collecteurs régionaux.

Ce rapport doit être particulièrement détaillé puisqu'il doit contenir la justification de l'utilisation exacte du produit collecté, la répartition de la ressource entre CFA ainsi que les modalités de la répartition. Il faut saluer l'apparition de cet outil en une matière dont il convient d'accroître la transparence.

*

La commission a adopté l'article 19 sans modification.

Article 20

Réforme de la procédure de contrôle financier et administratif par l'Etat
des organismes collecteurs et interdiction des pratiques de courtage
pour ces organismes

Le présent article vise, au même titre que l'article 21 suivant, à renforcer les contrôles des procédures de collecte de la taxe d'apprentissage.

On rappellera simplement la logique de ce dispositif, exposée dans la présentation générale de la réforme : dès lors qu'en application du principe de l'intermédiation obligatoire, les organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage (OCTA) se voient reconnaître une place centrale dans le dispositif de financement de l'apprentissage, il importe de renforcer les procédures de contrôle à leur égard.

1. Les contrôles déjà existants : l'apport des lois du 6 mai 1996 et du 17 janvier 2002 sur le contrôle des organismes collecteurs de la taxe

Naturellement, en matière d'apprentissage de manière générale, les corps d'inspection compétents peuvent intervenir lors des contrôles afférents à l'apprentissage. Il s'agit des inspecteurs de l'apprentissage, des inspecteurs et contrôleurs du travail et des inspecteurs et contrôleurs des impôts.

Mais il importe ici de se concentrer sur le contrôle effectué précisément sur l'activité des OCTA.

En effet, les OCTA sont soumis au contrôle financier de l'Etat pour ce qui concerne tant les procédures de collecte que l'utilisation des ressources qu'ils collectent à ce titre. Ce contrôle a été réorganisé par la loi n° 96-376 du 6 mai 1996.

a) Le contrôle résultant de la loi n° 96-376 du 6 mai 1996

Sans doute l'article 7 du décret du 12 avril 1972 posait-il déjà le principe selon lequel les organismes collecteurs étaient soumis au contrôle financier de l'Etat en ce qui concernait l'utilisation des ressources collectées au titre de la taxe d'apprentissage. Ces organismes pouvaient ainsi faire l'objet de contrôles sur place diligentés par le préfet du département ou par le comité départemental de la formation professionnelle, de la promotion sociale et de l'emploi, contrôles exercés soit par des fonctionnaires des corps d'inspection des ministères de l'éducation nationale, de l'agriculture ou des finances, soit par des délégués désignés par le préfet, pouvant être choisis parmi les conseillers de l'enseignement technique.

Mais cette disposition était restée lettre morte, en raison d'une triple carence, ainsi que le rappelait le rapport préparatoire à la loi du 6 mai 1996 établi au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale : « l'absence de désignation de corps de fonctionnaires chargés d'effectuer les contrôles ; l'absence de dispositions définissant les pouvoirs des agents de contrôle et les obligations des organismes collecteurs ; l'absence de dispositions relatives aux sanctions susceptibles d'être mises en œuvre lorsque l'organisme collecteur ne respecte pas ses obligations ». Un certain nombre de rapports administratifs avaient alors dénoncé ces dérives.

L'article L. 119-1-1 du code du travail, institué par la loi de 1996, se présente comme une première réponse à ces critiques.

D'une part, il désigne le corps de contrôle qui sera désormais compétent, en étendant les compétences de l'inspection de la formation professionnelle au contrôle des OCTA. Les compétences de l'inspection sont fixées par l'article L. 991-3 du code du travail. Ce sont donc désormais les services du ministère du travail qui devenaient contrôleurs.

Ce choix, comme le rappelait le rapport précité, se justifiait pour deux raisons :

« - d'une part, la compétence professionnelle et le savoir-faire d'un corps de contrôle auquel est déjà dévolu le contrôle financier des organismes paritaires agréés au titre de la formation continue ;

- d'autre part, le fait que ce corps de contrôle est soumis à des règles déontologiques précises ».

Naturellement, le nouvel article L. 119-1-1 précise que ce contrôle est exercé « sans préjudice des attributions des corps d'inspection compétents en matière d'apprentissage », cités plus haut.

D'autre part, la loi de 1996 précise les modalités d'exercice du contrôle, qui peut être opéré soit sur place, soit sur pièces. Les résultats du contrôle, comme le souligne aussi l'article L. 119-1-1, sont notifiés à l'organisme intéressé dans un délai de trois mois maximum à compter de la fin des opérations de contrôle. Lors du contrôle, les OCTA doivent pouvoir justifier l'origine des fonds perçus, la réalité des dépenses exposées et l'utilisation faite de ces sommes. A défaut, ces dépenses sont regardées comme non justifiées.

Enfin, la loi de 1996 établit un système de sanctions, dans le cas de sommes indûment utilisées ou conservées, ou de sommes non justifiées plus généralement : ces sommes doivent donner lieu à un versement d'égal montant au Trésor public. Mais la décision de versement au Trésor public ne peut intervenir que si la procédure de notification a été respectée. Elle doit en outre être motivée et notifiée aux intéressés.

L'article L. 151-1 du code du travail, établi par cette même loi, prévoit une sanction pénale : « sera puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 37 500 euros toute personne physique qui, en qualité de responsable d'un des organismes collecteurs (...) aura utilisé frauduleusement les fonds collectés ».

b) Le contrôle enrichi par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002

La loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a commencé à enrichir cette construction, conformément au nouvel article L. 118-2-4 qu'elle insérait dans le code du travail.

D'une part, elle a étendu le champ du contrôle financier exercé par les inspecteurs et contrôleurs de la formation professionnelle en ajoutant à l'« utilisation des ressources » des OCTA les « procédures de collecte », qui résultent notamment du nouvel article L. 118-2-4 du code du travail, posant, outre les règles nouvelles d'habilitation, l'obligation de la tenue de comptes distincts pour les deux fractions de la taxe d'apprentissage.

D'autre part, elle interdit expressément aux OCTA « de recourir à un tiers pour collecter ou répartir des versements exonératoires de la taxe d'apprentissage », tout en organisant une possibilité de délégation conclue dans le cadre d'une convention passée après avis du service chargé du contrôle de la formation professionnelle. Premier pas vers l'interdiction des pratiques de courtage, développée par le présent projet.

Enfin, elle étend le champ de l'obligation de reversement au Trésor public de certaines sommes à celles qui ont été « collectées », et donc non plus seulement à celles qui ont été « utilisées ou conservées ».

L'article L. 119-1-1 du code du travail se présente donc aujourd'hui comme résultant de deux premières réformes. Il concerne uniquement le contrôle des organismes collecteurs. L'article 20 se place, à cet égard, dans une certaine continuité, tout en proposant des éléments véritablement novateurs.

2. Une nouvelle rédaction de l'article L. 119-1-1 du code du travail

Partant de l'existant, le nouveau dispositif proposé repose sur deux enjeux, rappelés par l'exposé sommaire du projet de loi : améliorer les procédures de contrôle ; renforcer la transparence, en excluant les pratiques de courtage.

Les 1°, 2° et 3° procèdent à des modifications d'ordre rédactionnel du premier alinéa.

Le vise, conformément aux substitutions opérées, dans le même sens, par l'article 18, à mettre en conformité l'article L. 119-1-1 avec le nouvel article L. 118-2-4 institué par la loi de modernisation sociale, en précisant que les organismes collecteurs sont désormais définis à cet article.

Le précise que le contrôle auquel seront désormais soumis les OCTA n'est pas seulement financier, mais est également « administratif ».

Le substitue à l'expression « inspecteurs et contrôleurs de la formation professionnelle » le mot « agents ».

Le introduit un alinéa nouveau dans l'article, aux termes duquel « il est interdit aux organismes collecteurs de rémunérer les services d'un tiers dont l'entremise aurait pour objet de leur permettre de percevoir des versements des entreprises pouvant donner lieu à exonération de la taxe d'apprentissage ».

L'inspiration de cet alinéa est particulièrement novatrice. Il vise en effet expressément à poser une interdiction nouvelle, celle du courtage, que l'on pourrait définir comme pratique tendant à user des services d'un tiers - en échange d'une rémunération - pour attirer à soi les versements libératoires de la taxe d'apprentissage par les entreprises.

Il est à noter que ce type de pratiques peut provenir tant des organismes de formation eux-mêmes (CFA ou SA notamment) que des organismes collecteurs, ainsi que l'a rappelé encore récemment le rapport établi par les inspections générales sur la taxe d'apprentissage (48). Il s'agit de « démarchages » ou de « rabattages » dont les effets peuvent être importants : par exemple, le démarchage auprès des entreprises de la part des établissements bénéficiaires induit une rétrocession au courtier de l'ordre de 30 % de la taxe. Le service académique de l'inspection de l'apprentissage de Paris a établi un constat similaire avec un taux de rétrocession de l'ordre de 20 %. D'une certaine façon, il y a alors une menace sur le principe de « libre affectation ».

En l'espèce le présent alinéa vise exclusivement de tels comportements provenant des OCTA. Sans doute, l'interdiction de délégation de collecte posée par l'article L. 119-1-1 du code du travail - à l'exception du cadre des conventions de délégation de collecte soumises pour avis au service de contrôle territorialement compétent - a-t-elle eu un effet positif tendant à restreindre ces pratiques. Mais celles-ci perdurent toutefois. C'est la raison pour laquelle a été posé le principe que l'on peut dire « d'interdiction du tiers intervenant dans les mécanismes de collecte et de répartition ».

Le tend à préciser le troisième alinéa, qui avait été posé dès la loi de 1996, et relatif aux procédures de contrôle.

La portée du a) est rédactionnelle. Celui-ci vise à supprimer les mots « de la taxe d'apprentissage » pour que ne soient plus visés que les « organismes collecteurs ». En effet, avec la nouvelle rédaction, le premier alinéa désigne désormais « les organismes collecteurs mentionnés à l'article L. 118-2-4 ». Dès lors, les alinéas suivants peuvent ne faire que reprendre l'expression d'« organismes collecteurs », d'autant plus que l'article du code du travail considéré désormais comme définissant ces organismes n'a pas institué la terminologie d'« organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage ».

Le b) poursuit un double objectif. Tout d'abord, il ne fait plus porter le contrôle de la réalité des sommes sur les « dépenses », mais sur l' « emploi des fonds ». En effet, les organismes collecteurs, dans leur fonction de collecte et de répartition, ne sont jamais que des « dépositaires » de ces fonds. Dès lors, la notion comptable d'« emplois de fonds » est plus appropriée que la notion de « dépense ». C'est du reste cette terminologie qui est utilisée s'agissant des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) en matière de formation professionnelle.

Ensuite, il précise que les dépenses qui ne satisfont pas aux conditions ne sont pas « regardées comme non justifiées », mais sont, ce qui est plus précis, « regardées comme non conformes aux obligations résultant du présent titre », notamment celles figurant désormais au troisième alinéa.

Le porte modification du quatrième alinéa pour en accroître la portée. Cet alinéa prévoyait précédemment que les contrôles avaient lieu sur place ou sur pièces et établissait certaines obligations procédurales de notification notamment. Désormais, un seul renvoi à l'article L. 991-8 suffit pour décrire l'ensemble de ces procédures.

La procédure de l'article L. 991-8 présente l'avantage d'être beaucoup plus riche que la procédure précédemment en vigueur. Cet article L. 991-8 avait été introduit par l'article 75 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993.

Le 7° procède, dans le cinquième alinéa, à la même modification que celle établie par le 5°, destinée à viser désormais « l'emploi de fonds non conformes aux obligations résultant du présent titre ».

Par ailleurs, il supprime au cinquième alinéa des indications d'ordre procédural destinées à prévoir la motivation et la notification des décisions de reversement de l'emploi de fonds non conformes au Trésor public, ces précisions étant, du fait du renvoi opéré par le 6° à l'article L. 991-8, devenues inutiles. En revanche, il précise, fort opportunément - cela n'avait pas été fait en 1996 -, que ces décisions de reversement sont prises par le ministre chargé de la formation professionnelle.

Le insère après le cinquième alinéa deux nouveaux alinéas.

Le premier détermine les modalités de recouvrement des reversements effectués au Trésor public, pour préciser :

- d'une part que ceux-ci sont « recouvrés selon les modalités ainsi que sous les sûretés, garanties et pénalités applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires » ;

- d'autre part l'applicabilité des sanctions prévues aux articles 1741 et 1750 du code général des impôts, à savoir : en application de l'article 1741, une amende pouvant aller de 37 500 euros à 75 000 euros et un emprisonnement de cinq ans ; en application de l'article 1750, une amende de 18 000 euros et/ou une peine d'emprisonnement de deux ans.

L'établissement de ce dispositif comble certaines lacunes de l'article L. 119-1-1 du code du travail. Celui-ci ne précisait pas les modalités de recouvrement des versements au Trésor public. Le contrôle effectué dans le cadre de l'article L. 119-1-1 est opéré par le comptable public par l'émission d'un titre authentifiant la créance du Trésor, l'avis de mise en recouvrement (AMR). Les comptables publics disposent d'un délai de quatre ans à compter de la notification de l'AMR pour obtenir le paiement de la créance au Trésor. Ils peuvent saisir entre les mains d'un tiers les sommes d'argent dont ces derniers sont débiteurs envers le contribuable et peuvent recourir aux voies d'exécution de droit commun. Le recouvrement des créances est garanti par des sûretés réelles ainsi que par la responsabilité solidaire de certains tiers.

Quant au régime des sanctions fiscales, il se caractérise par l'application généralisée d'un intérêt de retard de 0,75 % par mois « dû indépendamment de toute sanction ».

Le dispositif de sanctions pénales visé aux articles 1741 et 1750 du code général des impôts vise des faits particulièrement graves. De telles poursuites pourraient être engagées sur plainte de l'autorité administrative, par exemple à l'occasion du constat d'établissement de faux documents ayant pour objet de détourner la taxe d'apprentissage.

Enfin, le dispositif est complété par un deuxième alinéa instituant un mécanisme de régulation constitué par la mise en demeure, destiné à corriger les manquements éventuellement constatés aux dispositions législatives et réglementaires.

A l'initiative de la commission des affaires sociales, un amendement a été adopté à l'unanimité au Sénat pour « indiquer les suites possibles que le ministre chargé de la formation professionnelle (...) peut donner aux manquements constatés auprès des organismes collecteurs, à savoir le retrait de l'habilitation », comme l'a précisé lors de la séance publique le rapporteur, M. Louis Souvet. Cette disposition vient compléter utilement le contrôle ainsi mis en place.

*

La commission a adopté l'article 20 sans modification.

Article 21

Etablissement d'un contrôle administratif et financier sur les établissements bénéficiaires et les organismes gestionnaires de la collecte
et interdiction du courtage pour les établissements bénéficiaires et organismes gestionnaires de centres de formation d'apprentis

Cet article est plus novateur encore que le précédent, dans la mesure où il se détache de l'article L. 119-1-1 pour en créer deux nouveaux.

Les réformes passées se sont en effet révélées insuffisantes. Plus qu'une amélioration, nécessaire, de l'existant, réalisée par l'article 20 du présent projet, il convenait également de procéder à l'ajout d'outils entièrement nouveaux. Nécessité à laquelle répondent les deux nouveaux articles L. 119-1-2 et L 119-1-3 du code du travail, qui procèdent, pour l'essentiel respectivement à l'établissement d'un nouveau type de contrôle et à l'interdiction de la pratique du courtage par les centres de formation des apprentis (CFA).

Naturellement, l'idée générale reste la même : poursuivre l'entreprise de contrôle du système de financement de l'apprentissage, amorcée par les lois du 6 mai 1996 et du 17 janvier 2002. Mais, contrairement à ces deux lois, le présent projet instaure un contrôle portant directement sur les établissements bénéficiaires et sur les organismes gestionnaires des dépenses exonératoires.

1. Les dispositifs préexistants

Ces contrôles étaient assez peu développés jusqu'ici et résultaient de dispositions réglementaires. Pour mémoire, on en rappellera néanmoins les principaux traits.

a) Le contrôle des établissements bénéficiaires des dépenses exonératoires

A l'initiative du préfet ou du comité départemental, il peut être procédé à des enquêtes sur l'utilisation des fonds recueillis. Ces enquêtes sont réalisées soit par des fonctionnaires chargés de mission ou de fonctions d'inspection relevant du ministère de l'éducation nationale ou de l'agriculture, soit par des fonctionnaires du ministère en charge de l'économie dans le cas de vérifications budgétaires et comptables, soit encore par des délégués désignés par le préfet sur proposition du comité.

Ces personnes sont habilitées à visiter les établissements bénéficiaires des dépenses exonératoires, à demander communication des budgets et des comptes et à contrôler l'utilisation des ressources recueillies au titre de la taxe d'apprentissage.

b) Le contrôle des organismes gestionnaires des CFA

Ces organismes peuvent être contrôlés par les inspecteurs de l'apprentissage s'agissant du montant et de l'utilisation des fonds collectés au titre de la taxe d'apprentissage.

Néanmoins, ces dispositions répondent à des besoins spécifiques, ainsi que le souligne l'exposé des motifs du projet.

D'une part, l'inspection chargée de la formation professionnelle contrôle les organismes collecteurs, mais sans disposer d'un droit de suite auprès des centres et établissements bénéficiaires de la répartition.

De ce fait, il n'est pas possible d'opérer une vérification de l'utilisation effective des fonds par les établissements bénéficiaires qui, dans certains cas, peuvent « jouer le jeu » du courtage en procédant à un usage non-conforme des fonds en accord avec l'organisme collecteur.

L'objet et l'intérêt du droit de suite, tel qu'il est présenté par les services du ministère interrogés sur cette question par la rapporteure, est bien de « rendre le contrôle de la collecte et de la répartition de la taxe d'apprentissage plus efficient en permettant à un contrôle ciblé de s'exercer à l'encontre des établissements bénéficiaires sur lesquels des questionnements auraient pu survenir dans le cadre d'une procédure de contrôle d'un organisme collecteur ».

D'autre part, depuis l'adoption de la loi du 4 mai 2004, qui a introduit dans le code du travail un nouvel article L. 983-4, les organismes paritaires collecteurs agréés au titre de l'alternance peuvent prendre en charge sans limite les dépenses de fonctionnement des CFA. Mais cette possibilité nouvelle existe en l'absence de tout contrôle : « il faut y remédier, afin d'éviter notamment des surfinancements ou des multifinancements d'une même dépense des CFA ».

Ces mesures se veulent donc ambitieuses. Après quelques mois seulement de l'adoption du nouveau dispositif, elles prennent acte de la nécessité de l'établissement de procédures de contrôle nouvelles - progrès si l'on se rappelle le temps qu'il a fallu pour établir un contrôle sur les organismes collecteurs.

2. Le nouveau contrôle administratif et financier des établissements bénéficiaires et organismes gestionnaires

Le nouvel article L. 119-1-2 précise les conditions dans lesquelles l'Etat exerce son contrôle administratif et financier.

a) Le champ du contrôle administratif et financier

Comme le précisent les trois premiers alinéas de l'article L. 119-1-2 du code du travail, ce contrôle a vocation à s'exercer :

- sur les établissements bénéficiaires de fonds versés par les organismes collecteurs ; il est précisé que ce contrôle portera à la fois sur l'origine (donc sur les organismes collecteurs) et sur l'emploi des fonds.

- sur les organismes gestionnaires des centres de formation des apprentis : plus précisément, sur leurs dépenses de fonctionnement, qui peuvent désormais être prises en charge par les organismes collecteurs paritaires agréés pour l'alternance.

b) Les autorités exerçant le contrôle administratif et financier

Le contrôle est effectué par les agents mentionnés à l'article L. 991-3, comme dans le cas des contrôles portant sur les organismes collecteurs, et comme dans ce cas également, sans préjudice des attributions des corps d'inspection compétents en matière d'apprentissage.

Il est à noter toutefois que l'article L. 119-1-2 est sensible à la manière dont s'articulera ce nouveau mode de contrôle avec les procédures déjà existantes, et qu'il veille à aménager cette coexistence. C'est ainsi qu'il est prévu au quatrième alinéa que lorsque le contrôle porte sur les établissements bénéficiaires, les agents exerçant le contrôle administratif et financier le font « en collaboration avec les agents des administrations compétentes à l'égard de ces établissements ».

La mention de la « collaboration » a été introduite au Sénat, par un amendement de la commission destiné à supprimer la référence initiale à la « liaison », jugée trop floue : il importait en effet de bien marquer le travail commun de l'Etat et des régions en matière de contrôle. C'est pour cette même raison que le terme générique d'« administrations » a été préféré à celui, initialement retenu, d'« inspections ». Néanmoins, à cette occasion, la référence au 1° de l'article a été indûment supprimée, et la rapporteure proposera de la rétablir afin de préciser que le contrôle en question porte bien sur les seuls établissements bénéficiaires de fonds et non sur les organismes gestionnaires.

Par ailleurs, le projet précise d'une part que l'autorité administrative dont relèvent ces agents des inspections est informée préalablement du contrôle, d'autre part que « des contrôles conjoints sont réalisés en tant que de besoin ».

Le cinquième alinéa précise que les administrations qui étaient auparavant déjà compétentes pour réaliser des contrôles tant sur les établissements bénéficiaires que sur les organismes gestionnaires « sont tenues de communiquer aux agents mentionnés à l'article L. 991-3 les renseignements et documents nécessaires à l'accomplissement de leur mission ».

c) Les modalités du contrôle administratif et financier

Ces modalités sont identiques à celles du contrôle exercé sur les organismes collecteurs :

- le sixième alinéa dispose que les établissements faisant l'objet du contrôle sont tenus de présenter aux agents les documents et pièces établissant l'origine des fonds reçus, la nature, la réalité et le bien-fondé des dépenses exposées ainsi que la conformité de leur utilisation aux dispositions législatives et réglementaires ; on peut observer que la référence faite aux « dépenses exposées » - et non, comme dans le cadre des organismes collecteurs dépositaires, à l'emploi des fonds - se justifie ici par le fait que les établissements contrôlés sont bénéficiaires et non dépositaires : les montants donnent lieu à des « dépenses » effectives ;

- aux termes du septième alinéa, ce contrôle s'exerce selon la procédure définie à l'article L. 991-8 du code du travail.

Par ailleurs, il convient de relever que le nouveau dispositif, aux termes du huitième alinéa, pousse le parallélisme avec la procédure de l'article L. 119-1-1 dédié aux organismes collecteurs jusqu'à consacrer pour les établissements bénéficiaires et les organismes gestionnaires le même dispositif que celui prévu au dernier alinéa, à savoir :

- les fonds indûment reçus, utilisés ou conservés, les dépenses et prises en charge non justifiées ne sont pas admis et donnent lieu à rejet ;

- les établissements ou organismes doivent reverser au Trésor public une somme égale au montant des rejets.

Il est précisé que c'est le ministre chargé de la formation professionnelle qui décide des versements au Trésor public.

L'article L. 119-1-2 prévoit aussi l'information, dans ce cas, du comité de coordination régional de l'emploi et de la formation professionnelle.

Enfin il est précisé que :

- les versements au Trésor public sont recouvrés selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et pénalités applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires, en application du neuvième alinéa ;

- les sanctions prévues aux articles 1741 et 1750 du code général des impôts sont applicables, en vertu du dixième alinéa.

d) L'interdiction de la pratique du courtage pour les établissements bénéficiaires et les organismes gestionnaires

Aux termes du nouvel article L. 119-1-3, le courtage est prohibé pour les établissements bénéficiaires et les organismes gestionnaires dans les mêmes termes que pour les organismes collecteurs, à savoir qu'ils ne peuvent « rémunérer les services d'un tiers dont l'entremise aurait pour objet de leur permettre de recevoir des fonds » de la part des collecteurs, ou de bénéficier d'une prise en charge de leurs dépenses de fonctionnement par des organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle au titre de l'alternance.

Comme le souligne l'exposé des motifs du projet, il s'agit là encore de « mettre un terme à des mécanismes de déperdition de ressources en taxe qui s'opèrent au détriment de l'appareil de formation ».

*

La commission a examiné un amendement de M. Christian Paul visant à soumettre les centres de formation d'apprentis au contrôle technique et financier de la région.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Bertho Audifax visant à prendre en compte les dépenses relatives à l'acquisition de matériels, à l'accès aux réseaux et aux nouvelles technologies afin de les inclure dans les dépenses de fonctionnement des organismes gestionnaires de centres de formation d'apprentis prises en charge dans les conditions définies à l'article L. 983-4 du code du travail et sur lesquelles porte le contrôle administratif et financier de l'Etat. La rapporteure s'en est remise à la sagesse de la commission.

La commission a adopté l'amendement.

La commission a ensuite adopté un amendement de précision rédactionnelle de la rapporteure.

Puis elle a adopté l'article 21 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 21

Mesures réglementaires

La commission a adopté un amendement portant article additionnel de la rapporteure visant à ouvrir la possibilité de prendre par décret simple des mesures réglementaires qui fixent les montants de la fraction de la taxe d'apprentissage réservée au quota et de la fraction destinée au Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage.

Article 22

Modification du mécanisme de répartition de la fraction
de la taxe dite « hors quota » ou du « barème »

Complexité et opacité : le mécanisme dit « du barème » résume à lui seul les principaux inconvénients de l'ensemble du système de financement de l'apprentissage. A ce titre, il revêt une valeur emblématique.

Pour autant, les enjeux n'en sont pas moins très pratiques. « Ce mécanisme est d'une telle complexité qu'il favorise, entre les organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage, les pratiques d'échange entre les catégories de barème. Ces pratiques amoindrissent la lisibilité des flux financiers réels de la taxe d'apprentissage », stigmatise l'exposé des motifs du présent projet.

Il importe de revenir sur l'origine et le fonctionnement de ce mécanisme, avant d'en détailler les principaux inconvénients et de revenir sur le nouveau dispositif proposé.

1. L'origine et le fonctionnement du mécanisme du barème

Ce mécanisme résulte de l'article 1er de la loi n° 71-758 du 16 juillet 1971 sur la participation des employeurs au financement des premières formations technologiques et professionnelles.

Il est intéressant de retrouver, à la lecture du rapport établi alors par le rapporteur général Guy Sabatier au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan dans la perspective de la discussion parlementaire, la justification de l'établissement du système : « les décisions rendues en matière d'affectation du produit de la taxe par les comités départementaux manquent d'homogénéité : c'est la raison pour laquelle le nouveau texte prévoit qu'un arrêté ministériel fixera des barèmes. Ainsi seront simplifiées à la fois la tâche des entreprises et celle des comités qui instruiront les demandes d'exonération ». C'est donc au nom de la simplification qu'a été mis en place le système, et c'est au nom de la même exigence qu'il y est désormais mis fin....

L'article 1er de la loi du 16 juillet 1971 pose que les employeurs peuvent, sous certaines conditions, « obtenir exonération totale ou partielle de la taxe d'apprentissage à raison des dépenses réellement exposées en vue de favoriser les premières formations technologiques ou professionnelles ».

Le deuxième alinéa du même article définit ces premières formations comme « celles qui, avant l'entrée dans la vie active, préparent les jeunes à un emploi d'ouvrier ou d'employé, spécialisé ou qualifié, de travailleur indépendant et d'aide familial, de technicien, technicien supérieur, d'ingénieur ou de cadre supérieur des entreprises des divers secteurs économiques ».

Ces formations peuvent être dispensées soit par un établissement d'enseignement à temps complet, soit dans un établissement d'enseignement technologique, soit dans un établissement de formation professionnelle agricole, soit encore dans un établissement proposant des formations dans le cadre de l'apprentissage. L'apprentissage peut donc aussi être financé par ce biais, même si ce n'est, dans ce cadre, contrairement à ce qui prévaut pour la fraction dite du quota, pas nécessairement exclusif.

L'article 2 de la loi prévoit que cette possibilité d'exonération est fixée, notamment, dans les conditions posées par l'article 228 du code général des impôts, lequel précise que les exonérations ne peuvent être accordées « qu'à concurrence des dépenses réellement exposées en vue de favoriser les premières formations technologiques et professionnelles (...) dans les limites fixées par les barèmes de répartition établis par arrêté interministériel ».

Il convient aussi de noter que cette possibilité d'exonération permet à l'employeur de se libérer de son obligation au titre de la taxe d'apprentissage sur la part dite « hors quota », qui s'élève à 60 % du produit de la taxe.

L'arrêté en date du 12 avril 1972 précise les modalités selon lesquelles est fixé le barème de répartition : celui-ci comporte des pourcentages différents selon le secteur professionnel de l'entreprise assujettie. Il se décompose en trois degrés d'enseignement : ouvriers qualifiés, cadres moyens et cadres supérieurs, selon le tableau présenté ci-après. Il a été suivi de nombreux autres arrêtés, jusqu'à celui du 8 mars 2002.

Répartition des dépenses consenties en faveur des premières formations technologiques

1re catégorie

2e catégorie

3e catégorie

Barèmes

Ouvriers et employés spécialisés
ou qualifiés


Cadres moyens


Cadres supérieurs

A

50 %

40 %

10 %

B

35 %

35 %

30 %

C

10 %

40 %

50 %

Ce tableau permet le rattachement de chaque entreprise à l'un des trois barèmes (A, B ou C), en fonction de son code NAF (nomenclature d'activités françaises). C'est une note du ministère de l'Education nationale en date du 17 mars 1994 qui a présenté le barème de répartition à partir de la nomenclature d'activités françaises.

Si l'entreprise a plusieurs activités, elle en retient une principale pour le choix du barème. Ce choix est arrêté pour cinq années civiles.

Chaque catégorie correspond à un type de dépense. D'une certaine façon, la catégorie est le critère opérant pour la détermination de l'entreprise et l'application à son activité d'un barème. Le tableau permet ensuite d'affecter à chaque catégorie un certain pourcentage. Enfin, l'existence d'une correspondance entre la catégorie et le type de formation, donc d'établissement au profit duquel sont effectués les versements, permet une affectation quasi-mécanique de la dépense pour une entreprise donnée, à tel ou tel type d'établissement.

La correspondance entre la catégorie professionnelle et l'établissement d'affectation de la dépense s'établit de la façon suivante :

- Pour les ouvriers et employés qualifiés : lycées d'enseignement professionnel ou agricole, publics ou privés, préparant à un certificat d'aptitudes professionnelles et à un brevet d'études professionnelles ; classes de quatrième et de troisième technologiques et troisième d'insertion, notamment.

- Pour les cadres moyens : lycées d'enseignement technologique ; instituts universitaires de technologie ; établissements techniques et agricoles privés et agricoles préparant à un baccalauréat de technicien ou à un baccalauréat professionnel, à un brevet de technicien supérieur, à un diplôme universitaire de technologie, à un diplôme d'études universitaires scientifiques et techniques.

- Pour les cadres supérieurs : écoles d'ingénieurs publiques ou privées, écoles de haut enseignement économique et commercial, laboratoires, unités d'enseignement et de recherche préparant au diplôme d'études supérieures spécialisées et au diplôme d'ingénieur-docteur, établissements délivrant des maîtrises de sciences et techniques à caractère technologique.

2. Les limites du mécanisme du barème

Deux exemples illustrent la complexité du mécanisme.

Il est possible de cumuler les pourcentages prévus par un barème entre deux catégories voisines, au profit d'une seule des deux catégories. Par exemple, une entreprise dont l'activité est classée B pourra répartir ses dépenses en faveur des premières formations technologiques et professionnelles en groupant la première et la deuxième catégorie sur la première (soit un total de 35 + 35 = 70 %), ou au contraire sur la deuxième, ou encore grouper la deuxième et la troisième catégorie sur la deuxième ou sur la troisième,... Cette possibilité permet aux entreprises de verser la part réservée à deux catégories voisines à un seul établissement, même si celui-ci n'assure pas la formation correspondant à l'une de ces catégories.

De plus, en application de l'article 5 de l'arrêté du 12 avril 1972 modifié par l'arrêté du 12 février 1976, les entreprises dont le montant de la taxe d'apprentissage n'excède pas 305 euros sous réserve du paiement du quota sont dispensées du paiement du barème. Cette dispense, qui permet aux entreprises de répartir les dépenses soumises au barème sans tenir compte de celui-ci, se justifie par la volonté d'alléger les coûts administratifs et de gestion des entreprises et des OCTA pour des montants peu élevés.

Enfin, les pratiques d'échanges entre catégories de barèmes, entre les différents OCTA, sont trop fréquentes, ce qui nuit à l'appréhension des flux financiers de la taxe d'apprentissage.

C'est la raison pour laquelle l'article 22, procédant par substitution, remplace, dans le premier alinéa de l'article 1er de la loi n° 71-578 du 16 juillet 1971 sur la participation des employeurs au financement des premières formations technologiques et professionnelles, la référence aux barèmes de répartition fixés par arrêté ministériel par une répartition des dépenses « selon le niveau de formation », étant précisé que cette répartition sera réalisée « par voie réglementaire ». Comme l'indique l'exposé des motifs, ce nouveau mécanisme sera fondé sur des taux fixes, déterminés en fonction du niveau des formations dispensées par les établissements.

*

La commission a adopté l'article 22 sans modification.

Section 5

Dispositions diverses

Article 23

Dispositions de coordination dans le code du travail

Cet article a été supprimé au cours de la première lecture devant le Sénat.

Le I portait suppression du dernier alinéa de l'article L. 117-10 du code du travail. Ce dernier alinéa soulignait la nécessité de la continuité de la rémunération entre un contrat d'orientation et un contrat d'apprentissage. Mais la suppression du contrat d'orientation par la loi du 4 mai 2004 rend désormais sans signification cette disposition, qu'il convient donc d'abroger. C'est la raison pour laquelle la rapporteure déposera un amendement tendant à rétablir cette abrogation, à l'article 12 bis.

Le II prévoyait la substitution, à l'article L. 151-1 du code du travail, à la référence à l'article L. 119-1-1 de la référence à l'article L. 118-2-4 du code du travail. C'est en effet aujourd'hui ce dernier article, relatif aux conditions d'habilitation des organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage, qui permet de définir ces organismes.Cette modification, dans un souci bienvenu de clarification, étant, aux termes de la première lecture au Sénat, prévue à l'article 18 du présent projet, elle n'a effectivement plus lieu d'être.

*

La commission a maintenu la suppression de l'article 23.

25 () Voir le rapport Marimbert précité pour cet historique.

26 () N° 255886 et suivants, Association AC ! et autres, 11 mai 2004.

27 () En pratique, ils y ont ajouté une sanction symbolique : l'avertissement.

28 () Cela signifie que pour 100 allocataires payés depuis plus de trois mois, 3,6 autres sont suspendus pour non-respect du contrat d'insertion, refus de contractualiser ou de renouveler leur contrat. On relève par ailleurs que ce taux de suspension est très variable selon les départements (bien que la statistique porte sur l'année 2003, donc avant la décentralisation du RMI et alors que le pouvoir de suspension appartenait encore au préfet) : il dépasse 8 % dans une vingtaine de départements et atteint 39 % dans un (sachant qu'un allocataire peut être suspendu plusieurs fois dans l'année, ce qui « gonfle » un peu la statistique).

29 () DARES, Premières synthèses, 9/2004, n° 40.1.

30 () Données extraites des « Premières synthèses » de la DARES, nos 27.3 et 31.1, 7/2003.

31 () DARES, « Premières synthèses » n° 42.1, 10/2003.

32 () C'est ainsi qu'une version du code du travail de l'année 2004 renvoie aux éditions de l'année 1980 ou antérieures si le lecteur souhaite se référer au texte en question !

33 () A titre d'exemple, ce constat trouvé dans le rapport de M. Michel de Virville publié en janvier 2004 : « souvent obscur, complexe et changeant, le droit du travail est peu ou mal appliqué. » (« Pour un code du travail plus efficace », rapport au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité).

34 () Dans cette perspective, la mesure proposée offre des similitudes avec les possibilités de dépassements de la limite d'âge de 25 ans qui fait l'objet des développements de l'article 13. Il s'agit dans tous ces cas de faciliter la poursuite de la période d'apprentissage au-delà de la période « normale ».

35 () « Moderniser l'apprentissage, 50 propositions pour former plus et mieux », Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, 2003.

36 () L'ensemble des données chiffrées contenues dans le présent développement résultent d'un article intitulé « Le rôle économique des repreneurs d'entreprise », paru dans Insee Première, n° 975, juillet 2004.

37 () On garde à l'esprit qu'il s'agit bien ici des exonérations au titre de la taxe d'apprentissage, à distinguer des exonérations sociales qui prévalent par ailleurs en matière d'apprentissage.

38 () Texte qui comporte également les références des exonérations au titre du quota.

39 () La suppression des exonérations au titre de la taxe d'apprentissage permettrait « de redéployer le produit dégagé au bénéfice des CFA et des sections d'apprentissage », selon l'expression des services du ministère.

40 () Il s'agit des associés des société en nom collectif et des commandités des sociétés en commandite simple personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société (article 8) ; les membres des société civiles autres que les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions et les sociétés en responsabilité limitée, les membres des sociétés en participation indéfiniment responsables, les membres des sociétés à responsabilité limitée ayant opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes, les associés des exploitations agricoles, les associés des sociétés civiles de moyens (article 239 quater A), les associés des groupements forestiers (article 238 ter), les associés des groupements de l'intérêt économique (article 239 quater), les associés des groupements d'intérêt public (article 239 quater B), les associés des groupements européens d'intérêt économique (article 239 quater C), les associés des syndicats mixtes de gestion forestière et groupements forestiers non soumis à l'impôt sur les sociétés (article 239 quinquies) - pour s'en tenir à l'essentiel.

41 () Aux côtés du nouveau crédit d'impôt et de la nouvelle contribution au développement de l'apprentissage.

42 () Voir par exemple le site internet présentant cette faculté : http://www.fac-metiers.fr.

43 () « Le contrat de plan, le contrat d'objectifs et de développement coordonné, le plan régional de développement des formations professionnelles, le programme régional d'apprentissage, les schémas régionaux ou encore les conventions d'application du plan ».

44 () Interrogés par la rapporteure sur cette question, les services du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale ont apporté les éléments d'information figurant dans le présent développement.

45 () Mais les frais de gestion prélevés par le Trésor public, qui s'élèvent aujourd'hui à 4 % du montant des sommes affectées au fonds de péréquation, seront réduits à 2 %.

46 () On peut se référer, pour resituer chacun de ces différents cas, au schéma d'ensemble présenté dans le commentaire de l'article 14.

47 () En particulier la réduction du nombre d'OCTA de plus de 550 à environ 150, soit à hauteur de 75 %.

48 () Rapport d'enquête sur la taxe d'apprentissage, octobre 2003, inspection générale de l'administration, inspection générale des affaires sociales, inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, inspection générale des finances.


© Assemblée nationale