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le 21 octobre 2005

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N° 2601

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 19 octobre 2005.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 2555, autorisant l'approbation de l'accord entre les Gouvernements de la République française, de la République fédérale d'Allemagne, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord et du Royaume des Pays-Bas, relatif à la coopération dans le domaine de la technologie de la centrifugation,

PAR M. JACQUES REMILLER,

Député

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INTRODUCTION 5

I - UNE CONVENTION QUI CONFORTE LA SÉCURITÉ ÉNERGÉTIQUE DE LA FRANCE 7

A - L'ACCORD ENTRE LA SOCIÉTÉ AREVA ET LE CONSORTIUM URENCO : UNE COOPÉRATION PERMETTANT À AREVA DE MODERNISER SA TECHNOLOGIE 7

1. L'enrichissement par diffusion gazeuse : un choix industriel qui ne se justifie plus 7

2. La coopération entre Areva et Urenco : le choix industriel de l'avenir 8

B - UN ACCORD INDUSTRIEL SUBORDONNÉ À L'ADOPTION D'UN ACCORD INTERGOUVERNEMENTAL 9

II - UN ACCORD QUI PRÉSENTE TOUTES LES GARANTIES DE SÉCURITÉ EXIGÉES PAR LE DROIT INTERNATIONAL 11

A - LES DISPOSITIONS CLASSIQUES 11

B - LES DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES 11

1. Une coopération transparente au regard des règles de non-prolifération 12

2. Une coopération qui s'effectue dans un cadre sécurisé 12

CONCLUSION 15

EXAMEN EN COMMISSION 17

Mesdames, Messieurs,

Alors que la flambée des prix du pétrole semble s'inscrire dans la durée, la préservation de l'indépendance énergétique de la France est, plus que jamais, à l'ordre du jour.

Or la sécurité énergétique n'est jamais un acquis mais un processus continu, qui doit être adapté aux évolutions technologiques et scientifiques. Qui plus est, du fait des progrès de l'intégration européenne, ce qui était jusqu'alors une quête nationale acquiert désormais une dimension européenne : la mise en place du grand marché européen de l'énergie donne de nouvelles marges de manœuvre à la recherche de la sécurité des approvisionnements énergétiques.

C'est dans cette double dimension - technologique et européenne - que s`inscrit l'accord signé à Cardiff, le 12 juillet dernier, par la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas, relatif à la centrifugation. Cet accord vise en effet à permettre à la société française Areva et au consortium germano-néerlando-britannique Urenco, de mettre en place une coopération, afin qu'Areva puisse acquérir la technologie de l'enrichissement de l'uranium par ultracentrifugation. Sur la base de cette technologie nouvelle, qui va permettre à Areva d'abandonner la technique d'enrichissement de l'uranium par diffusion gazeuse, forte consommatrice d'énergie et de moins en moins compétitive, Areva va en effet pouvoir construire, une nouvelle usine d'enrichissement qui doit entrer en production en 2006.

C'est, pour Areva, un choix industriel majeur, qui conditionne le maintien de ses positions sur le marché de l'enrichissement ; c'est, pour le site industriel du Tricastin, la condition nécessaire à la pérennisation de l'emploi (1 500 personnes concernées) ; c'est pour la France, un enjeu stratégique essentiel au regard de l'impérieuse nécessité de sécuriser ses approvisionnements énergétiques.

I - UNE CONVENTION QUI CONFORTE LA SÉCURITÉ ÉNERGÉTIQUE DE LA FRANCE

A - L'accord entre la société Areva et le consortium Urenco : une coopération permettant à Areva de moderniser sa technologie

1. L'enrichissement par diffusion gazeuse : un choix industriel qui ne se justifie plus

Leader mondial dans les métiers de l'énergie (énergie nucléaire et acheminement de l'électricité), le groupe Areva qui a aujourd'hui une importante activité d'enrichissement de l'uranium (1) (16 % des parts du marché mondial), est cependant pénalisé par la technologie ancienne qu'il utilise (diffusion gazeuse), forte consommatrice d'énergie et de moins en moins compétitive.

le groupe Areva : fiche d'identité

Le groupe Areva est une société anonyme, créée le 3 septembre 2001 par le regroupement des principales sociétés industrielles intervenant en France dans le secteur nucléaire : Framatome, Cogema, Technicatome et CEA-Industrie). Le capital du groupe est détenu par le Commissariat à l'Energie Atomique (78,96 %), l'Etat (5,19 %), la Caisse des Dépôts et Consignations (3,59 %), l'ERAP (3,21 %), EDF (2,42 %), Framepargne(1,58 %), Total (1,02 %) et le flottant (4,03 %). La participation publique représente en conséquence 93,37 % du capital.

Le groupe est aujourd'hui présent sur l'ensemble du cycle du combustible nucléaire (Cogema) ainsi que sur la conception, la fabrication et la maintenance des réacteurs nucléaires (Framatome ANP). Le groupe est par ailleurs présent dans la distribution de l'énergie, depuis le rachat en janvier 2004 d'Alstom T & D.

Areva a réalisé un chiffre d'affaires de 11,109 milliards d'euros au cours de l'exercice 2004, avec un résultat net de 428 millions d'euros. Le groupe emploie 70 000 personnes dans le monde.

L'activité d'enrichissement est réalisée par la société Eurodif, filiale contrôlée à 59,65 % par Cogema. Eurodif exploite une usine d'enrichissement sur le site de Pierrelatte dans la Drôme, dénommée Georges Besse I. La société a réalisé en 2004 un chiffre d'affaires de 681 millions d'euros, pour 1517 personnes employées.

En effet, la diffusion gazeuse, qu'utilise, outre Areva, la société américaine USEC, est certes un procédé industriel d'une grande souplesse d'utilisation, mais également très consommateur d'électricité. De ce fait, l'électricité représente aujourd'hui 60 % environ du prix de revient des services d'enrichissement. Or, en raison d'une concurrence accrue, les prix de marché sont de plus en plus serrés.

Il se trouve par ailleurs que l'usine d'enrichissement Georges Besse I, exploitée depuis plus de 25 ans et qui recourt au procédé de la diffusion gazeuse, va bientôt devoir être remplacée, car frappée d'obsolescence technique.

Il est évidemment impensable qu'Areva perde du terrain dans le secteur de l'enrichissement : elle doit disposer en permanence de services d'enrichissement pour les électriciens, condition indispensable pour les fidéliser. Il s'agit par ailleurs d'une question stratégique pour la France, notamment vis-à-vis de la sécurité des approvisionnements en uranium enrichi pour les 58 réacteurs électronucléaires exploités par EDF : l'enrichissement est en effet une étape indispensable pour la fabrication des combustibles nucléaires utilisés dans ces centrales.

2. La coopération entre Areva et Urenco : le choix industriel de l'avenir

Dans ce contexte d'une double obsolescence, technique et économique, de la technologie d'enrichissement à laquelle il recourt depuis plusieurs décennies, le secteur nucléaire français explore, depuis plusieurs années, de nouveaux procédés d'enrichissement par laser, dont le développement industriel à des conditions économiques de marché n'est cependant, pour le moment, pas envisageable. Areva a donc décidé de recourir désormais à la technologie plus performante de la centrifugation et s'est tournée, à cette fin, vers son concurrent direct sur le marché de l'enrichissement, le consortium germano-néerlando-britannique Urenco (2). En effet, contrairement à Areva, qui utilise la technologie de l'enrichissement par diffusion gazeuse, Urenco recourt au procédé de la centrifugation. Or la technologie de centrifugation qu'utilise Urenco, à l'instar de la Russie et du Japon, met en œuvre des installations qui consomment cinquante fois moins d'énergie que celles qui utilisent le procédé de diffusion gazeuse.

Le partenariat avec Urenco va permettre d'engager l'industrialisation de ce procédé dans les meilleurs délais et avec un minimum de risques, Urenco étant en effet aujourd'hui l'une des sociétés occidentales qui maîtrisent le mieux cette technologie. Quant à Urenco, il voit dans ce partenariat industriel avec Areva le moyen de tirer dès maintenant des profits industriels, grâce à la vente de la technologie de centrifugation, et de conforter ses positions à l'exportation.

L'accord de coopération industrielle signé le 24 novembre 2003 par les deux groupes permet ainsi la création d'une société, dénommée ETC, à laquelle Urenco aura préalablement transféré sa technologie, et qui aura pour fonction de produire et de vendre des centrifugeuses aux sociétés d'enrichissement telles qu'Areva et Urenco, ainsi qu'à des tiers, dans les conditions fixées par la présente convention.

Une fois cette technologie acquise, Areva pourra alors procéder à la construction d'une nouvelle usine d'enrichissement, dénommée Georges Besse II, et pourra se fournir en centrifugeuses. Les premières productions d'UTS pourraient intervenir dès 2008, la future usine étant appelée à coexister avec Georges Besse I jusqu'en 2012. Il est donc urgent de pouvoir assurer la continuité industrielle des deux entités dans de bonnes conditions. Si cette garantie n'était pas apportée par Areva, le groupe perdrait, en effet, dès maintenant de nombreux contrats d'enrichissement avec les électriciens.

B - Un accord industriel subordonné à l'adoption d'un accord intergouvernemental

La mise en œuvre de l'accord industriel entre Urenco et Areva - et donc la construction par Areva de sa nouvelle usine d'enrichissement - est subordonnée à la conclusion d'un accord intergouvernemental entre les quatre Etats concernés - la France, pour Areva, et les trois pays fondateurs du consortium Urenco. En effet, la création du consortium Urenco avait été encadrée par un accord intergouvernemental, le traité d'Almelo.

A la fin des années 60, le Royaume-Uni, l'Allemagne et les Pays-Bas, qui poursuivaient, chacun de son coté, des recherches - plus ou moins avancées selon les pays - sur l'enrichissement par centrifugation, ont décidé de joindre leurs efforts en créant une société commune, Urenco. Ce rapprochement s'est fait à l'initiative et sous l'égide des trois gouvernements qui ont conclu un accord sur la coopération en matière de développement et d'exploitation du procédé de centrifugation pour la production d'uranium enrichi, accord signé à Almelo, au Pays-Bas, le 4 mars 1970. Chacun constatera l'absence de la France dans cette coopération. De fait, celle-ci ne présentait pas d'utilité pour elle : la France disposait à la fin des années 1960 d'une certaine avance en matière d'enrichissement par diffusion gazeuse, technologie alors plus mature que la centrifugation.

Le traité d'Almelo, toujours en vigueur, est destiné à fixer les règles de la coopération entre les trois Etats : il crée un comité conjoint chargé de prendre les principales décisions en la matière et comporte par ailleurs des engagements de non prolifération, des dispositions relatives à la protection du secret et enfin des clauses relatives à la propriété intellectuelle. Qui plus est, cet accord interdit tout transfert de la technologie de la centrifugation développée dans le cadre de la collaboration entre ces trois États, sauf conclusion d'accords de coopération particuliers avec des États tiers.

Pour fournir une base juridique conforme aux règles du droit international à l'accord industriel conclu entre le groupe Areva et le consortium Urenco, c'est-à-dire pour permettre l'accès par Areva à la technologie de la centrifugation, deux solutions étaient donc envisageables : l'adhésion de la France au traité d'Almelo ou la conclusion d'un accord quadripartite distinct. Une adhésion au traité d'Almelo aurait toutefois impliqué une révision importante de cet accord, certaines clauses n'étant pas, telles quelles, applicables à la coopération entre Urenco et Areva. Il a donc été décidé de négocier un accord de coopération distinct, mais découlant du traité d'Almelo. C'est cet accord quadripartite conclu entre les trois États parties au traité d'Almelo et la France qui est aujourd'hui soumis à l'approbation du Parlement.

II - UN ACCORD QUI PRÉSENTE TOUTES LES GARANTIES DE SÉCURITÉ EXIGÉES PAR LE DROIT INTERNATIONAL

L'accord de Cardiff, qui conditionne l'entrée en vigueur de l'accord industriel signé en 2003 par Areva et Urenco, reprend, pour les raisons évoquées ci-dessus, très exactement l'architecture et les termes du traité d'Almelo, à l'exception de quelques dispositions obsolètes et de quelques dispositions liées aux évolutions intervenues depuis 1970.

Outre les dispositions classiques propres à ce type d'accord, il comporte des dispositions spécifiques, liées au caractère sensible de la technologie qui fonde la coopération entre Areva et Urenco.

A - Les dispositions classiques

L'accord de Cardiff se présente comme un accord intergouvernemental classique et comporte à ce titre les dispositions suivantes :

- un dispositif de règlement des différends prévoyant la soumission de ceux qui ne pourraient être réglés à l'amiable ou par négociation à une commission d'arbitrage (article XII) ;

- une clause précisant le champ d'application de l'accord, en l'occurrence le territoire européen des États parties (article XIII) ;

- des dispositions relatives à l'entrée en vigueur et à la durée (trente ans) de l'accord (article XIV)

- les règles de modification et d'amendement de celui-ci (article XV).

B - Les dispositions spécifiques

La centrifugation étant une technologie sensible au regard du régime international de non-prolifération, l'accord de Cardiff comporte des dispositions visant à la fois à en interdire le détournement à des fins autres que celles contenues dans l'accord et à encadrer très strictement la mise en œuvre de la coopération entre Areva et Urenco, par l'édiction de règles de sécurité extrêmement rigoureuses.

1. Une coopération transparente au regard des règles de non-prolifération

L'histoire a prouvé que la centrifugation pouvait être une technique extrêmement proliférante. En conséquence, l'accord de Cardiff s'attache à définir des règles garantissant la transparence totale des activités mises en oeuvre par Areva, Urenco et ETC dans le cadre de leur coopération.

Ainsi, disposition centrale de cet accord, une clause d'utilisation pacifique énonce l'engagement des quatre gouvernements, conformément au traité de non prolifération nucléaire (TNP) du 1er juillet 1968, à ne pas utiliser la technologie de la centrifugation acquise dans le cadre de cette coopération pour aider un Etat non doté d'armes nucléaires à fabriquer ou à acquérir des armes nucléaires ou d'autres dispositifs nucléaires explosifs. Par ailleurs, la France s'engage à veiller à ce que cette technologie ne soit pas utilisée pour la production d'uranium permettant la fabrication ou l'acquisition d'armes ou de dispositifs tels que cités ci-dessus (article IV).

Le respect de ces engagements est vérifié à travers l'application de garanties internationales conformes aux obligations internationales souscrites par chaque Etat partie à l'accord. La France s'engage en particulier à soumettre en permanence aux garanties de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) toute usine d'enrichissement construite sur son territoire et utilisant la technologie de la centrifugation d'ETC (article V).

Il n'y a là, en réalité, rien de nouveau, la France ayant d'ores et déjà souscrit à tous les accords nécessaires avec l'AIEA ; aucune modification du droit existant n'est donc nécessaire pour permettre l'application du présent accord. Plus largement, au-delà de ces règles relatives à la non-prolifération, c'est l'ensemble des principes qui régissent la coopération instaurée par cet accord, dans les domaines de la protection physique des matières nucléaires et de la protection du droit de propriété intellectuelle et industrielle, qui sont déjà souscrits par la France en application de ses engagements internationaux ou selon sa réglementation nationale.

2. Une coopération qui s'effectue dans un cadre sécurisé

La coopération entre Areva et Urenco est en outre encadrée par des règles de sécurité très rigoureuses, que justifie la technologie sensible à l'origine du rapprochement entre les deux concurrents. Le cadre de leur coopération est sécurisé à tous les niveaux :

- Au niveau politique, le traité instituant un comité quadripartite (article III), chargé d'assurer, au profit des quatre gouvernements, une supervision efficace de la coopération entre les deux groupes.

- Au niveau juridique, l'accord prévoyant, en son article VIII, la désignation par chaque gouvernement d'une agence nationale chargée de s'assurer de l'effective mise en œuvre sur son territoire des mesures de protection. Ces agences nationales conseilleront par ailleurs le comité sur les questions de classification et de procédure de sécurité.

Les tâches de ces agences découlent des responsabilités attribuées par le traité, telles que la gestion des habilitations des ressortissants français travaillant sur le projet, la responsabilité dans les procédures de transmission d'informations ou matériels classifiés, le lancement des investigations en cas de compromission, le contrôle des contrats classifiés, la participation au sous-comité chargé de la classification et de la sécurité, la tutelle légale des entreprises.

La plupart des tâches de cette « agence nationale » sont assurées dans les pays partenaires par des ministères. En France, les services du haut-fonctionnaire de défense du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie assurent déjà ce type de missions dans le domaine nucléaire civil national. Aussi a-t-il paru logique de prévoir de les désigner comme « agence nationale » au sens du traité quadripartite.

- Au niveau technique et opérationnel, la protection physique des matières nucléaires utilisées ou produites dans le cadre de cette coopération devat être assurée sur la base de normes agréées au plan international (article VI). L'accord précise par ailleurs les dispositions qui doivent être prises par les Etats parties pour protéger les informations classifiées (article VII et VIII et annexe II). La protection des informations relevant du droit de propriété (brevets et autres droits industriels) fait également l'objet de procédures définies en commun (article IX et annexe I).

CONCLUSION

L'accord industriel entre les deux champions européens en matière d'enrichissement ouvre la voie à une coopération européenne essentielle pour la préservation de notre sécurité énergétique. L'accord de Cardiff qui en permet l'application s'inscrit en cela dans la droite ligne des objectifs européens en la matière, définis par le livre vert de la Commission européenne sur l'énergie. Cet accord permettra en effet la mise en œuvre d'une technologie garantissant une grande fiabilité technique et un impact environnemental limité. Il permettra également d'assurer le maintien de nos capacités d'enrichissement, et donc de garantir la sécurité d'approvisionnement de nos centrales nucléaires (80 % de la production électrique en France). Il consolidera par ailleurs la capacité industrielle et l'indépendance énergétique européenne.

La mise en œuvre rapide de l'accord industriel s'impose donc. Celle-ci étant soumise à une clause de caducité, exigeant l'entrée en vigueur, au plus tard le 31 décembre 2005, de l'accord de coopération liant les quatre gouvernements concernés et fournissant l'encadrement étatique nécessaire au bon déroulement de cette collaboration, l'approbation, par notre Assemblée, du projet de loi portant l'accord de Cardiff doit intervenir dans les plus brefs délais. Votre Rapporteur ne peut dès lors que la recommander très vivement.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 19 octobre 2005.

Après l'exposé du Rapporteur, M. Guy Lengagne a félicité le Rapporteur pour la qualité de sa présentation d'un sujet hautement technique. Il a fait observer que le présent accord montrait que la France avait été dépassée sur le plan technologique, puisque Areva est aujourd'hui contrainte de s'engager dans une coopération industrielle avec le consortium Urenco. Il convient de s'interroger sur le point de savoir pourquoi le Commissariat à l'énergie atomique et la recherche française n'ont pu mettre au point la technologie développée par ce consortium. Cette situation s'explique peut être par la mauvaise situation de la recherche française, ce qui est préoccupant pour l'avenir.

Le Président Edouard Balladur a fait observer que les Etats-Unis n'étaient pas plus avancés que la France dans le domaine concerné par l'accord. Il a souhaité savoir s'ils étaient intéressés pour nouer un accord avec Urenco. Il est en tout état de cause toujours possible que le progrès technique remette en cause le monopole dont disposent certaines entreprises.

M. Jacques Remiller a apporté les éléments de réponse suivants :

- Le choix fait par l'industrie nucléaire française a été opéré dans les années 1960 ; aujourd'hui la technique de la diffusion gazeuse qu'utilise, outre Areva, la société américaine USEC, est certes un procédé industriel d'une grande souplesse d'utilisation, mais également très consommateur d'électricité. De ce fait, l'électricité représente aujourd'hui 60 % environ du prix de revient des services d'enrichissement. Or, en raison d'une concurrence accrue, les prix de marché sont de plus en plus serrés.

- Sur un marché aussi concurrentiel que l'enrichissement, les considérations économiques sont déterminantes ; aussi le groupe Areva fait-il le choix économique le plus rationnel en se tournant vers une coopération avec Urenco, plutôt qu'en développement lui-même cette technologie.

- Ce choix de la coopération avec Urenco est essentiel pour qu'Areva préserve ses positions internationales ; si la coopération entre Areva et Urenco n'avait pas lieu, il est très probable qu'Urenco se serait tourné vers le groupe américain USEC, également concurrent d'Areva ; ce qui compte en l'occurrence, ce sont les objectifs plutôt que les moyens.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 2555).

*

* *

La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l'accord figure en annexe au projet de loi (n° 2555).

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N° 2601 - Rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi n° 2555, autorisant l'approbation de l'accord entre les Gouvernements de la République française, de la République fédérale d'Allemagne, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord et du Royaume des Pays-Bas, relatif à la coopération dans le domaine de la technologie de la centrifugation (M. Jacques Remiller)

1 () L'enrichissement de l'uranium est une opération de séparation isotopique qui permet d'augmenter la proportion d'uranium fissile (U 235) dans le combustible. Elle se mesure en UTS (Unité de Travail de Séparation) et constitue un service d'enrichissement vendu aux électriciens. Le marché mondial de l'uranium enrichi représente environ 37 millions d'UTS par an et connaît une progression de l'ordre de 0,5 % par an. La fourniture d'UTS est principalement concentrée autour de 4 opérateurs mondiaux : l'américain USEC (10,5 MUTS), le russe MINATOM (10 MUTS), le français Areva (10 MUTS) et le consortium européen URENCO (6,5 MUTS).

2 () Créé le 31 août 1971, à la suite du traité d'Almelo signé le 4 mars 1970 entre les gouvernements du Royaume-Uni, d'Allemagne et des Pays-Bas, Urenco est un consortium international, dont le capital d'Urenco est détenu à 33,33 % par le groupe britannique BNFL (via la société INFL), à 33,33 % par l'Etat néerlandais (via la société UCN) et à 33,33 %, par les groupes allemands RWE et E.on (via leur société commune Uranit). Il a réalisé un chiffre d'affaires de 707 millions d'euros et un résultat net de 134 millions d'euros en 2004, pour 1640 personnes employées.


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