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PROJET DE LOI

relatif à l’élection des représentants au Parlement européen

ETUDE D’IMPACT

29 octobre 2010

SOMMAIRE

1. La désignation de deux représentants supplémentaires au Parlement européen 5

1.1 Le projet de loi vise à tirer les conséquences de la modification, adoptée le 23 juin dernier, du protocole sur les dispositions transitoires annexé au traité de Lisbonne, en prévoyant la désignation des deux représentants au Parlement européen supplémentaires 5

1.2 L’intervention d’une loi est nécessaire. 5

1.3 Les possibilités ouvertes par le Conseil européen sur la désignation des deux membres du Parlement européen. 6

1.4 Les solutions écartées. 7

1.5 La solution retenue. 9

1.6 Impacts. 10

Impacts juridiques 10

Impacts politiques 10

Impacts budgétaires 10

2. La participation des Français établis hors de France aux élections européennes 11

2.1 Le rétablissement de l'exercice du droit de vote des Français établis hors de France aux élections européennes permet de redonner à ceux-ci un droit qu’ils ont exercé jusqu’en 2003. 11

3.2 Les modalités envisagées de participation des Français de l’étranger aux élections européennes. 12

3.3 Les solutions écartées. 12

a) Création d’une circonscription ad hoc 12

b) Participation des Français de l’étranger dans le cadre d’une circonscription nationale unique. 12

c) Création d’une section « Français de l’étranger » au sein de la circonscription outre-mer. 13

3.4 Solution retenue 13

3.5 Analyse des impacts des dispositions envisagées. 14

Impacts juridiques 14

Impacts politiques 14

Impacts budgétaires 15

Impacts sur les administrations 15

En application de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 et de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution, le Gouvernement a préparé, à l’appui du projet de loi relatif à l’élection des représentants au Parlement européen, une étude d’impact répondant aux prescriptions définies par le législateur organique.

Ce document vaut d’être mis en regard avec l’étude d’impact présentée à l’appui du projet de loi tendant à autoriser, en application de l’article 53 de la Constitution, la ratification du protocole modifiant le protocole sur les dispositions transitoires annexé au traité sur l’Union européenne, au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et au traité instituant la communauté européenne de l’énergie atomique, qui expose de façon plus détaillée les éléments de contexte au niveau européen concernant ce protocole.

Les deux dispositions du projet de loi – la désignation de deux représentants supplémentaires au Parlement européen et la participation des Français établis hors de France aux élections européennes - seront abordées successivement dans la présente étude d’impact.

Compte tenu de la matière traitée, il n’y a pas lieu de rechercher en l’espèce d’éventuelles incidences économiques, sociales ou environnementales, ni même des répercussions sur l’emploi public, qui seraient tout à fait minimes eu égard à l’objet du projet de loi.

On peut également signaler d’emblée qu’aucune consultation obligatoire sur les dispositions proposées n’a été relevée et qu’aucun acte réglementaire d’application n’apparaît nécessaire sur les deux volets du projet de loi.

1. La désignation de deux représentants supplémentaires au Parlement européen

1.1 Le projet de loi vise à tirer les conséquences de la modification, adoptée le 23 juin dernier, du protocole sur les dispositions transitoires annexé au traité de Lisbonne, en prévoyant la désignation de deux représentants au Parlement européen supplémentaires pour la France

Le traité modifiant le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, signé à Lisbonne, le 13 décembre 2007 est entré en vigueur le 1er décembre 2009, donc après les dernières élections européennes. Celles-ci ont donc, dans chaque Etat membre, pourvu le nombre de représentants au Parlement européen fixé par le traité de Nice et non pas celui fixé par le traité de Lisbonne, qui attribue 18 sièges supplémentaires au total.

Afin de remédier à cette distorsion, le protocole adopté le 23 juin 2010 modifie l’article 2 du protocole sur les dispositions transitoires annexé au traité de Lisbonne.

Il fixe, pour ceux des Etats membres dont le nombre de représentants au Parlement européen aurait été plus élevé si le traité de Lisbonne avait été en vigueur à la date des élections européennes de juin 2009, le nombre de sièges supplémentaires alloués jusqu’à la fin de la législature 2009-2014, portant de 72 à 74 le nombre de représentants au Parlement européen dévolus à la France.

Le protocole donne aux Etats membres concernés trois possibilités de désigner les personnes qui occuperont ces sièges supplémentaires : par une élection au suffrage universel direct, conformément aux dispositions applicables pour les élections au Parlement européen ; par référence aux résultats des dernières élections européennes ; ou par désignation par leur parlement national, en son sein, du nombre de députés requis, selon une procédure ad hoc, les personnes en question devant avoir été élues au suffrage universel direct.

Il convient en conséquence de désigner, selon des modalités transitoires et dérogatoires aux dispositions de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen, deux nouveaux représentants au Parlement européen en sus de ceux élus en juin 2009, en choisissant l’une des trois options ainsi offertes.

1.2 L’intervention d’une loi est nécessaire.

La désignation de deux membres du Parlement européen supplémentaires relève de la loi. Il est en effet nécessaire de déroger aux dispositions de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen, qui ne prévoient pas expressément cette hypothèse.

• Le projet de loi n’opère pas un simple renvoi aux dispositions du règlement de l’Assemblée nationale.

La loi doit fixer le principe d’une désignation par le Parlement. Au-delà, elle peut fixer les modalités de la désignation, mais ces dernières peuvent également relever des règlements des assemblées. A titre d’exemple, le chapitre VI du règlement de l’Assemblée nationale régit les nominations effectuées par cette assemblée « en vertu de dispositions constitutionnelles, légales ou réglementaires ». Le recours implicite aux règlements est une pratique courante. Ainsi, l’article 13 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés mentionne simplement la désignation de deux membres de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés par l’Assemblée nationale et par le Sénat. Cette solution aurait évité de mettre en place un dispositif transitoire trop lourd et ne laisserait à la loi que le soin de prévoir les éléments indispensables tels qu’ils sont prévus dans les conclusions du conseil européen.

Le Gouvernement a cependant fait le choix de détailler les modalités d’élection des deux représentants au Parlement européen supplémentaires : il lui est en effet apparu souhaitable de préciser tant le mode de scrutin (proportionnel) que les règles de candidatures afin de maintenir une certaine cohérence avec le mode de scrutin en vigueur pour le renouvellement général des représentants français au Parlement européen fixé par la loi précitée du 7 juillet 1977 et d’éviter toute contestation ultérieure.

1.3 Les possibilités ouvertes par le Conseil européen sur la désignation des deux membres du Parlement européen.

Le protocole modificatif introduit trois modes possibles de désignation, conformément à ceux énumérés dans les conclusions du Conseil européen des 18 et 19 juin 2009 :

a) par une élection au suffrage universel direct ad hoc dans l’Etat membre concerné, conformément aux dispositions applicables pour les élections au Parlement européen ;

b) par référence aux résultats des élections au Parlement européen du 4 au 7 juin 2009 ;

c) par désignation par le Parlement national de l’Etat membre concerné, en son sein, du nombre de députés requis.

Le choix du mode de désignation est laissé à l’appréciation de chaque Etat membre concerné, en fonction de ce qu’autorise son droit national. Dans tous les cas, les personnes désignées doivent avoir faire l’objet d’une élection au suffrage universel direct.

• Situation dans les autres pays européens

S’agissant de la désignation des 18 députés supplémentaires, une grande partie des Etats membres concernés a choisi de recourir au système des suivants de liste, sur la base des résultats obtenus aux dernières élections européennes (juin 2009). Le Gouvernement n’a pas choisi cette solution pour des raisons qui sont détaillées ci-après.

1.4 Les solutions écartées.

• La désignation sur la base des résultats des élections européennes de juin 2009 poserait des difficultés au regard du principe de sincérité du scrutin.

La solution consistant à appliquer, postérieurement au scrutin, les résultats des élections du 7 juin 2009 aux circonscriptions gagnant un siège a été écartée. En effet, il apparaît contraire au principe de sincérité du scrutin d’utiliser a posteriori les résultats d’un scrutin pour l’élection d’un nombre de représentants différent du nombre initialement prévu.

La solution consistant à répartir de manière rétroactive deux nouveaux sièges de représentants au Parlement européen à des circonscriptions électorales dont le nombre de sièges a été calculé sur la base des recensements de population de 2008, applicables pour l’élection de 2009, semble également peu compatible avec le principe de l’intelligibilité de la norme.

En outre, le calcul a posteriori comporte des aléas puisque la répartition des sièges à la plus forte moyenne est susceptible de donner des résultats différents selon le nombre de sièges à pourvoir. Le résultat des élections de 2009 pourrait en être rétrospectivement modifié, aggravant l'atteinte au principe de sincérité du scrutin.

Par ailleurs, la répartition des 74 sièges entre les huit circonscriptions d'élection des députés européens aurait été différente selon qu'elle aurait été effectuée sur le fondement des chiffres de population au 1er janvier 2006 (connus à la fin de l'année 2008), chiffres qui ont été utilisés pour la répartition des 72 sièges pourvus lors des élections de 2009 (décret n°2009-317 du 20 mars 2009 fixant le nombre de sièges et le nombre de candidats par circonscription pour l'élection des représentants au Parlement européen) ou sur celui des chiffres de population au 1er janvier 2007, connus depuis la fin de l'année 2009 : les deux sièges supplémentaires auraient été attribués aux circonscriptions Nord-Ouest et Est dans le premier cas, aux circonscriptions Nord-Ouest et Ouest dans le second cas, donc avec des élus différents, figurant sur des listes présentées par des partis différents, selon l’hypothèse retenue. Les règles électorales imposant de toujours répartir les sièges en fonction des derniers chiffres disponibles à la date de l’élection (article 4 de la loi précitée du 7 juillet 1977), il aurait été difficile d'utiliser des chiffres qui n'étaient pas les plus corrects pour répartir les deux sièges supplémentaires en fonction des résultats de juin 2009.

• L’organisation d’une élection partielle a été exclue en raison de son coût, de la faible participation probable, et de son caractère peu approprié à l’objet de l’élection.

De même, n’a pas été retenue l’option consistant à organiser une élection partielle dans les circonscriptions impactées, compte tenu notamment des difficultés d’une telle organisation et de son coût. Une élection partielle non-couplée à une élection générale risquerait en outre de générer une très faible participation pour des coûts d’organisation élevés.

Par ailleurs, l’organisation d’une élection partielle dans une circonscription où un seul siège serait à pourvoir est de nature à clairement remettre en cause le caractère globalement proportionnel du mode de scrutin imposé par les stipulations de l’article 8 de l’Acte du 20 septembre 1976 portant élection des représentants au Parlement européen au suffrage universel direct1.

En outre, l'organisation d'une élection nationale, dans deux circonscriptions comptant chacune environ six millions d'électeurs, pour élire deux députés européens donnerait à l'élection un enjeu politique sans commune mesure avec l'objet de l'élection : deux membres du Parlement européen élus avec plusieurs millions de voix chacun.

Par comparaison, la désignation de deux représentants au Parlement européen par le Parlement national présente plusieurs avantages :

- simplicité et lisibilité ;

- rapidité, ce qui permettrait à la France de disposer au plus vite de deux voix supplémentaires au Parlement européen ;

- faible coût en comparaison de l’organisation d’une élection partielle dans les circonscriptions gagnant un siège ;

- légitimité des nouveaux représentants, déjà élus au suffrage universel.

Les inconvénients sont peu nombreux. Il pourrait être objecté que la solution créerait deux catégories de représentants, mais cette différence se justifie par le caractère transitoire de la solution qui ne préjuge pas de l’affectation, pour l’avenir, de ces deux sièges supplémentaires. A partir de 2014, les sièges à pourvoir seront en effet répartis, par décret, entre les circonscriptions proportionnellement à leur population authentifiée lors du dernier recensement avec application de la règle du plus fort reste, en application du III de l’article 4 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen. La répartition des sièges à pourvoir en 2014 se fera donc sur la base des derniers chiffres de population connus à la fin de l’année 2013.

Les stipulations du protocole du 23 juin 2010 réservent les sièges supplémentaires à des représentants élus au suffrage universel direct.

Ces stipulations, reprenant les principes énumérés dans les conclusions du conseil européen des 18 et 19 juin 2009, semblent exclure les membres du Sénat dont l’élection, en application de l’article L. 280 du code électoral, ne se déroule pas au suffrage universel direct.

Certes, une majorité d’entre eux est également élue pour un autre mandat au suffrage universel direct ; une lecture constructive des conclusions du conseil européen aurait peut-être pu permettre de dégager une possibilité de désigner certains sénateurs.

Mais cette désignation se serait faite au prix d’une rupture d’égalité entre ceux disposant d’un mandat au suffrage universel direct et ceux ne détenant aucun mandat pourvu au suffrage universel direct : il aurait été nécessaire d’édicter une règle spécifique d’inéligibilité ne concernant que les sénateurs ne détenant aucun mandat procédant du suffrage universel direct. Cette solution, entérinant une telle rupture d’égalité, n’a pas semblé susceptible d’être retenue par le Gouvernement.

La possibilité de désigner les représentants par un seul des deux organes du Parlement, en l’espèce l’Assemblée nationale élue au suffrage universel direct, est en revanche parfaitement conforme aux conclusions du conseil européen et aux stipulations du protocole précitées.

Le Gouvernement a donc jugé préférable de prévoir dans le présent projet de loi une désignation par la seule Assemblée nationale.

1.5 La solution retenue.

Le présent projet de loi définit les modalités de désignation de deux membres du Parlement européen par l’Assemblée nationale. Il est prévu que cette désignation aura lieu au scrutin de liste, à la représentation proportionnelle, dans le respect de l’exigence constitutionnelle de promouvoir un égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux.

La question se pose de savoir si le projet de loi devrait également organiser une voie de recours contentieux contre l’élection ainsi prévue. Par analogie avec l’article 25 de la loi précitée du 7 juillet 1977 qui confie le contentieux de l’élection des représentants au Parlement européen au Conseil d’Etat, on pourrait imaginer de rendre le Conseil d’Etat compétent en tant que juge de l’élection pour la désignation des deux représentants au Parlement européen supplémentaires par l’Assemblée nationale. Sauf à modifier les articles 58 à 60 de la Constitution, il n’est en effet pas possible d’attribuer cette compétence au Conseil constitutionnel.

Toutefois, cette assimilation de la désignation de deux représentants au Parlement européen par la représentation nationale à l’élection au suffrage universel des représentants français au Parlement européen ne semble pas, du point de vue du droit de recours, devoir être poussée trop loin. Il s’agit en effet d’une désignation par l’Assemblée nationale, et en son sein, de deux représentants au Parlement européen. Le principe de séparation des pouvoirs rend juridiquement délicate l’attribution d’une compétence au Conseil d’Etat pour statuer sur une élection interne à l’Assemblée. En conséquence, il est proposé de ne pas prévoir de procédure contentieuse particulière : c’était d’ailleurs le cas pour la désignation des représentants français au Parlement européen avant l’intervention de l’Acte précité du 20 septembre 1976 (loi n° 58-239 du 8 mars 1958 et décret n° 59-903 du 31 juillet 1959) et c’est toujours le cas, par exemple, pour celle des représentants de la France à l’assemblée consultative du Conseil de l’Europe (loi n° 49-984 du 23 juillet 1949 et décret n° 59-904 du 31 juillet 1959).

1.6 Impacts.

• Impacts juridiques

Outre la fixation des modalités de désignation des deux représentants supplémentaires au Parlement européen, l’article 1er du projet de loi rend applicables le chapitre III et l’article 24 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relatif aux inéligibilités et incompatibilités, ainsi qu’au remplacement éventuel par les suivants de liste.

Le chapitre III de la loi précitée du 7 juillet 1977 rend applicables à l’élection des représentants au Parlement européen les dispositions des articles L.O. 127 à L.O. 130-1 et des articles L.O. 139, L.O. 140, L.O. 142 à L.O. 150 et L.O. 152 du code électoral.

L’applicabilité de l’article 24 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 permet de régler les hypothèses où un des représentants au Parlement européen désigné par la présente loi serait amené à cesser son mandat pour quelque cause que ce soit, et notamment en raison d’acceptation de fonctions gouvernementales. Le système du suivant de liste serait alors appliqué.

• Impacts politiques

Sans préjuger du vote des députés, le mode de scrutin retenu devrait, selon toute vraisemblance et compte tenu de la taille des groupes parlementaires à l’Assemblée nationale, permettre de désigner un candidat issu de la majorité et un candidat issu de l’opposition.

Cette désignation entraînera l’organisation de deux élections législatives partielles, dans les conditions prévues par l’article L.O. 178 du code électoral : le mandat de représentant au Parlement européen est en effet, en application des dispositions de l’article L.O. 137-1 du même code, incompatible avec celui de député.

• Impacts budgétaires

Les impacts économiques et financiers de la réforme seront très limités. Les deux représentants supplémentaires au Parlement européen relèveront du régime indemnitaire des membres de celui-ci.

2. La participation des Français établis hors de France aux élections européennes

2.1 Le rétablissement de l'exercice du droit de vote des Français établis hors de France aux élections européennes permet de redonner à ceux-ci un droit qu’ils ont exercé jusqu’en 2003.

La modification sur ce point de la loi précitée du 7 juillet 1977 s’inscrit dans le contexte des demandes réitérées, émanant notamment des représentants des Français de l’étranger, de permettre à ces derniers de participer à l’élection des députés européens. En effet, l’exercice du droit de vote des Français établis hors de France pour les élections des représentants au Parlement européen a fait l’objet de trois propositions de loi depuis 20032, date à laquelle la loi n° 2003-327 du 11 avril 2003 relative à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques a supprimé la possibilité qui était offerte aux Français établis hors de France de voter dans les centres de vote consulaires pour les élections européennes.

Il avait en effet été alors décidé le découpage en huit circonscriptions interrégionales de la circonscription nationale unique, dans le but de rapprocher les représentants au Parlement européen des citoyens. L’exposé des motifs de la loi du 11 avril 2003 mentionnait ainsi les inconvénients d’une circonscription nationale unique : « les élus ne peuvent échapper à l'anonymat des listes nationales et ne sont donc pas clairement identifiés par leurs électeurs. Cet état de fait ne stimule pas la participation électorale. »

Cette réforme a eu pour effet de limiter la participation des Français établis hors de France aux élections européennes : si, aux termes de l’article 22 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, tout ressortissant français résidant dans un Etat membre dispose du droit de vote et d'éligibilité aux élections au Parlement européen dans l'État membre où il réside, cette faculté, réservée aux seuls Français établis dans un Etat membre, a cependant été peu utilisée.

Plutôt que le choix d'une circonscription et de représentants propres, le rattachement des Français établis hors de France à leur commune d'origine pour cette élection, en application de l’article L.12 du code électoral, avait été préféré. Il est à noter que cet article ouvre des possibilités très larges de rattachement à une commune en France (commune de naissance, commune du dernier domicile, commune de dernière résidence à condition qu’elle ait été de six mois au moins, commune où est né, est inscrit ou a été inscrit un ascendant ou un parent jusqu’au quatrième degré).

Or, cette possibilité de voter, le cas échéant par procuration, dans la commune de rattachement a également été peu utilisée. Il apparaît donc opportun de rétablir, pour les Français établis hors de France, le vote aux élections européennes dans les centres de vote consulaires, objet des propositions de loi évoquées précédemment.

3.2 Les modalités envisagées de participation des Français de l’étranger aux élections européennes.

Ont été envisagées quatre hypothèses :

i) la création d’une circonscription ad hoc ;

ii) le retour à une circonscription unique ;

iii) la création d’une section spécifique aux Français établis hors de France au sein de la circonscription outre-mer ;

iv) le rattachement à une circonscription métropolitaine.

Les trois premières options ont été écartées au profit de la dernière.

3.3 Les solutions écartées.

Trois options permettant la participation des Français établis hors de France aux élections européennes ont été envisagées :

a) Création d’une circonscription ad hoc

La création d’une circonscription ad hoc, à laquelle seraient attribués un ou deux sièges, ne respecterait pas le principe du caractère globalement proportionnel du scrutin imposé par l’article 8 de l’Acte du 20 septembre 1976 portant élection des membres au Parlement européen au suffrage universel direct. Par ailleurs, la participation traditionnellement faible des Français de l’étranger aux élections a incité le Gouvernement à ne pas retenir cette proposition, qui aurait pu conduire à heurter le principe d’égalité du suffrage.

Par ailleurs, aux termes du traité de Lisbonne, le nombre de sièges alloué à la France au Parlement européen diminuerait en cas d’adhésion de la Croatie ou de l’Islande. Il aurait été difficile de justifier alors l’existence d’une circonscription à un ou deux représentants au Parlement européen, élus par un nombre d’électeurs très faible.

b) Participation des Français de l’étranger dans le cadre d’une circonscription nationale unique.

Jusqu’en 2003, l’élection des représentants au Parlement européen se faisait dans le cadre d’une circonscription unique, commune à l’ensemble du territoire de République. Les Français de l’étranger pouvaient alors participer à cette élection et figurer dans les listes nationales présentées par les partis politiques.

Il a été décidé en 2003 de « territorialiser » l’élection afin de rapprocher les élus européens de leurs électeurs par la création de circonscriptions interrégionales. Cette solution a eu pour conséquence d’écarter totalement de cette élection les Français résidant hors de l’Union européenne et non inscrits sur les électorales en France.

Le Sénat a adopté le 23 juin 2010, à une courte majorité, une proposition de loi n° 422 rectifiée déposée par M. Yvon COLLIN et les sénateurs du groupe RDSE tendant au rétablissement d’une circonscription unique pour l’élection des représentants au Parlement européen. Le Gouvernement considère cependant que les motifs qui ont présidé à la réforme de 2003 restent toujours d’actualité et qu’il n’est pas opportun de revenir sur la territorialisation des élections européennes.

c) Création d’une section « Français de l’étranger » au sein de la circonscription outre-mer.

Afin de permettre aux Français établis hors de l’Union Européenne de pouvoir participer à la désignation des représentants au Parlement européen, il a été parfois proposé de créer une section particulière intitulée « Français de l’étranger » au sein d’une circonscription rebaptisée « Outre-mer et Français de l’étranger ». Compte-tenu du poids démographique des Français établis hors de l’Union Européenne, cette nouvelle section pourrait être dotée d’un ou deux sièges.

Il n’est pas paru souhaitable de retenir cette option en raison de la complexité encore accrue que cela entraînerait et de l’incompréhension légitime qui pourrait apparaître parmi les populations d’outre-mer d’être assimilées aux « Français de l’étranger ».

3.4 Solution retenue

Actuellement, les Français établis à l’étranger hors de l’Union européenne et qui ne sont pas inscrits sur une liste électorale en France n’ont pas la possibilité d’exercer leur droit de vote aux élections européennes. D’après les chiffres fournis par le Ministère des Affaires Etrangères et Européennes et repris dans l’exposé des motifs de la proposition de loi précitée de MM. Mariani et Urvoas, ce sont 332 492 électeurs qui ne peuvent pas, en l’état actuel du droit, participer du tout à la désignation des représentants français au Parlement européen, les autres électeurs pouvant soit voter dans leur pays de résidence si celui-ci fait partie de l’Union européenne (article 2 de la loi précitée du 7 juillet 1977), soit voter en France dans leur commune d’inscription sur les listes électorales.

Il est apparu cependant délicat, au regard du principe d’égalité, de réserver la participation aux élections européennes aux seuls Français résidant hors de l’Union Européenne : la faculté pour les Français résidant dans l’un des 27 Etats membres de participer à l’élection des représentants de ces Etats au Parlement européen ne saurait en effet justifier leur exclusion de la nouvelle possibilité offerte à leurs compatriotes établis hors de l’Union européenne.

C’est pourquoi l’article 2 du présent projet de loi modifie la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen, pour rétablir la possibilité pour tous les Français établis hors de France d’exercer leur droit de vote dans les centres de vote consulaires pour l’élection des représentants au Parlement européen et les rattacher à la circonscription d’Ile-de-France.

Le Gouvernement a choisi de s’inspirer de la rédaction de la proposition de loi déposée par les députés Thierry MARIANI (UMP) et Jean-Jacques URVOAS (SOC), qui a été adoptée à l’unanimité par la commission des lois de l’Assemblée nationale. Cette dernière option, celle du rattachement à une circonscription existante, a semblé de loin l’option la plus simple et la plus consensuelle. Elle satisfait la demande des représentants des Français établis hors de France de permettre à ceux qui en sont aujourd’hui empêchés de participer à ce scrutin, comme ils en avaient la possibilité jusqu’en 2003 lorsque l’élection des représentants de la France au Parlement européen se faisait dans le cadre d’une circonscription unique.

Deux raisons justifient le choix d’un rattachement des Français établis à l’étranger à la circonscription Ile-de-France. D’une part, leurs organes de gestion (Direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire du Ministère des affaires étrangères et européennes) et de représentation (Assemblée des Français de l’étranger, parlementaires représentant les Français établis hors de France) sont situés à Paris. D’autre part, les juridictions compétentes pour le contentieux des opérations de vote dans les circonscriptions consulaires et l’inscription sur les listes électorales consulaires ont un ressort parisien.

Le rattachement à la circonscription d’Ile-de-France devrait avoir pour conséquence d’augmenter le nombre de sièges de cette circonscription. L'article 4 de la loi précitée du 7 juillet 1977 prévoit en effet que les sièges à pourvoir sont répartis entre les circonscriptions proportionnellement à leur population avec application de la règle au plus fort reste.

Le 2° de l’article 2 du projet de loi précise le recensement à prendre en compte pour déterminer la population en métropole et outre-mer et les modalités de prise en compte de la population des Français établis hors de France dans le calcul du nombre de sièges de représentants au Parlement européen alloué à la circonscription d’Ile-de-France.

Sur la base des chiffres du dernier recensement connu, à savoir celui de 2007 (recensement glissant de l'INSEE), la répartition des 74 sièges entre les circonscriptions permettrait à l'Ile-de-France, en incluant la population des Français de l’étranger (environ 1 400 000 personnes), de gagner deux sièges supplémentaires. La répartition des sièges à pourvoir lors du prochain renouvellement du Parlement européen sera toutefois effectuée sur la base des recensements qui auront été publiés d’ici la fin de l’année 2013.

3.5 Analyse des impacts des dispositions envisagées.

• Impacts juridiques

Il ne paraît pas nécessaire de modifier des dispositions autres que celles figurant dans la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen.

• Impacts politiques

Pour mémoire, et selon les chiffres du ministère des affaires étrangères et européennes, la population française inscrite au registre des Français établis hors de France s’élève à 1 469 629 personnes au 31 décembre 2009. Ce nombre serait donc additionné à celui de la région Ile-de-France pour déterminer la population totale de la circonscription « Ile-de-France / Français établis hors de France » dans la répartition des sièges à pourvoir lors des prochaines élections européennes, qui auront lieu en juin 2014.

• Impacts budgétaires

Le coût de la participation des Français de l’étranger aux élections présidentielles de 2002 et 2007 se monte respectivement à 2,8 millions d’euros et 3,6 millions d’euros. Lors des dernières élections européennes auxquelles les Français de l’étranger ont participé, à savoir celles de 1999, le coût total de leur participation à ce vote avait été évalué à 285 000 euros. Ce coût, bien inférieur à celui des élections présidentielles, s’explique par le mode de scrutin (un seul tour), le nombre de Français inscrits sur les listes (qui s’accroît à l’approche de l’élection présidentielle) et le nombre de bureaux de vote.

Le coût par électeur inscrit lors des élections européennes de 2009 était légèrement supérieur à 3 €. On peut donc évaluer a minima le coût de la participation des Français de l’étranger aux élections européennes de 2014, compte tenu du nombre d’inscrits pour l’élection présidentielle de 2007 (821 000), à environ 2,5 millions d’euros.

• Impacts sur les administrations

S’agissant de la participation des Français de l’étranger aux élections européennes, il sera nécessaire de vérifier que les Français résidant dans l’Union Européenne ne votent pas deux fois : une première fois dans leur consulat de rattachement pour des listes présentées en France ; une seconde fois pour des listes présentées dans leur pays de résidence.

La gestion des listes électorales demeurant de la compétence exclusive des Etats membres, il n’existe pas au niveau communautaire de système de contrôle intégré ; la directive 93/109/CE du Conseil du 6 décembre 1993 impose néanmoins de mettre en place un dispositif d’échanges d’informations entre Etats. En conséquence, la lutte contre la fraude repose uniquement sur la qualité des échanges d’informations organisés entre les Etats membres en amont de l’élection. Des échanges se tiennent régulièrement sur ce thème à Bruxelles au cours desquels la France est représentée par des agents du ministère de l’intérieur et de l’INSEE.

1 Article 8 : « Sous réserve des dispositions du présent acte, la procédure électorale est régie, dans chaque État membre, par les dispositions nationales.

Ces dispositions nationales, qui peuvent éventuellement tenir compte des particularités dans les États membres, ne doivent pas globalement porter atteinte au caractère proportionnel du mode de scrutin. »

2 Proposition de loi n° 21114 déposée à l’Assemblée par M. Thierry Mariani le 27 novembre 2009 ; proposition de loi n°1346 déposée à l’Assemblée nationale par MM. Thierry Mariani et Jean-Jacques Urvoas le 18 décembre 2008 ; proposition de loi n°134 déposée au Sénat par MM. Cointat et autres le 3 décembre 2009.


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