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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

     

Ministère des affaires étrangères

et européennes

     
     

NOR :

MAEJ1101677L/Bleue-1

PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République

française et le Gouvernement du Monténégro relatif à la mobilité des jeunes

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ÉTUDE D’IMPACT

I – Situation de référence et objectifs de l’Accord

I -1 Situation de référence

Avec une superficie de 13 812 km2 pour une population de 627 000 habitants (projection 2025 : 637 000) dont 64 % est urbaine, 20 % a moins de quinze ans et 13 % a plus de soixante-cinq ans, le Monténégro a connu en 2007 un taux de croissance de 7,5 %.

En France, avec une communauté s’élevant à cent personnes en 2008, le Monténégro se situe au 158ème rang des pays d’origine de migrants résidant en France. Le flux annuel (premiers titres délivrés) en 2008, était de 36 personnes (128ème rang). On constate une très forte augmentation du nombre de ressortissants monténégrins entre 2007 et 2008 (de 7 à 100 personnes). Quant au flux annuel, il a connu une progression équivalente passant de 11 en 2007 à 36 en 2008.

L’immigration familiale représente environ 40 % de l’ensemble des flux d’entrées
(4 personnes sur un total de 11 en 2007 et 15 personnes sur un total de 36 en 2008) ce qui ne la place cependant qu’au 118ème rang.

Le nombre de réfugiés, apatrides et demandeurs d’asile est passé de 1 en 2007 à 7, ce qui place le Monténégro au 69ème rang.

Le nombre d’étudiants et stagiaires monténégrins en France est très faible (2 en 2007 et 3 en 2008), ce qui place le Monténégro au 139ème rang.

En matière d’immigration pour motifs professionnels, avec un flux d’entrées de huit personnes en 2008, il n’occupe que la 117ème place.

Au Monténégro, il y a 20 475 étudiants sur une population totale de 627 000 habitants.

Il n’y a qu’un seul établissement monténégrin réellement lié par une convention avec un établissement supérieur français : la Faculté de Sciences économiques de Podgorica avec la Faculté de Sciences et de gestion économiques de l’Université Sophia Antipolis de Nice. (programme bilingue de co-diplomation en licence : 46 étudiants inscrits en 2010-2011).

Mais il y a des échanges réguliers entre:

- la Chaire de langue et littérature française de la Faculté de philologie de Niksic et les Facultés de littérature et de langue française de l’Université François Rabelais de Tours et de l’Université de Strasbourg (doctorants monténégrins en co-tutelle, échanges de professeurs) ;

- la Faculté d’ingénierie électronique de Podgorica et l’Institut national polytechnique de Grenoble (un étudiant boursier monténégrin en master 2 cette année, intervention régulière d’un enseignant de l’INPG à Podgorica, travaux de recherche communs).

Par ailleurs, les facultés de sciences politiques de Podgorica et de tourisme de Kotor ont été encouragées à se rapprocher de l’Université Sophia Antipolis de Nice (une boursière cette année en master 2 de tourisme).

Tous ces établissements monténégrins appartiennent à l’Université d’Etat du Monténégro.

I - 2 Objectifs de l’Accord

Cet accord a été conclu afin de favoriser la mobilité des jeunes (étudiants, stagiaires et jeunes professionnels). Il est un véritable pari fait sur la jeunesse d’un pays qui a vocation à intégrer l’Union européenne.

Il s’inscrit dans le cadre de l’accord de stabilisation et d’association entre l’Union européenne et le Monténégro, signé le 15 octobre 2007.

Doté de mesures allant au-delà des standards du droit commun, il s’inscrit à la suite de la décision prise par les ministres européens chargés des questions migratoires, lors du Conseil européen du 30 novembre 2009, de lever, pour les ressortissants monténégrins, l’obligation de visa de court séjour au sein du territoire Schengen, à compter du 19 décembre 2009.

En effet, le gouvernement français a voulu marquer sa volonté d’entretenir avec ce pays des relations de coopération plus étroites destinées à contribuer à son rapprochement avec l’Union européenne. Cette volonté s’est concrétisée par la signature de cet Accord, fondé sur la réciprocité et destiné à favoriser des séjours de longue durée.

L’accord offre à un public composé d’étudiants en cours ou en fin de formation mais aussi de jeunes de 18 à 35 ans entrant ou déjà entrés dans la vie active, des possibilités d’emploi ou de stage dans l’autre Etat signataire. Les séjours, dont la durée peut aller de trois à vingt-quatre mois, s’inscrivent dans la perspective d’un retour des bénéficiaires dans leur pays d’origine après avoir acquis une qualification supérieure. La France permet ainsi aux ressortissants monténégrins concernés de bénéficier de conditions d’entrée, de séjour et d’emploi plus favorables que celles prévues par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Forts de cette expérience enrichissante et destinée à contribuer au rapprochement entre jeunes européens, ces jeunes pourraient être les meilleurs « ambassadeurs » de leur pays dans la perspective de son adhésion à l’Union européenne.

Cet Accord permet aussi de faciliter la venue en France des bénéficiaires des cartes de séjour portant la mention « compétences et talents » et « salarié en mission ».

Des actions qui bénéficieront de crédits du ministère français en charge de l’immigration ont été prévues pour accompagner cette mobilité : information, octroi de bourses, opérations de promotion.

Enfin, le champ d’application a été limité, pour ce qui concerne la France, au seul territoire métropolitain dans la mesure où cet accord a été conçu dans le prolongement de la libéralisation des visas de court séjour dans l'espace Schengen, espace qui ne comprend pas les départements d’outre mer, les collectivités d’outre-mer et la Nouvelle-Calédonie, pour permettre la mobilité des jeunes dans une perspective d'adhésion du Monténégro à l'Union européenne. 

II – Conséquences estimées de la mise en œuvre de la convention

II - 1 Conséquences économiques et financières

Cet accord étant conclu sur une base de réciprocité, il permet à un nombre équivalent de ressortissants français de partir au Monténégro, pour y accomplir des stages ou travailler sans opposition de la situation de l’emploi. De plus, il concerne un si petit nombre de personnes qu’il n’aura aucun effet négatif sur le marché de l’emploi.

Il permettra de mieux gérer les flux des jeunes qui pourraient être tentés par une immigration irrégulière et sera un instrument très utile si le traité d’adhésion du Monténégro à l’Union européenne lui imposait une période transitoire en matière de libre circulation des travailleurs.

Pour ce qui concerne les jeunes professionnels dont le contingent est très faible (100 par an dans chaque sens), tous les secteurs d’activité sont concernés tant en France qu’au Monténégro. Aucune incidence n’est attendue sur le marché du travail de l’un et l’autre pays puisque les bénéficiaires n’obtiennent leurs autorisations de séjour et de travail que lorsqu’ils ont trouvé un emploi et que leur contrat a été validé par le service de main d’œuvre étrangère pour ce qui concerne le respect des obligations qui incombent à l’employeur.

Enfin, il est prévu que le dispositif financier (150.000 € sur trois ans) permette :

- d’assurer la promotion de l’offre française de formations supérieures dans les sciences et technologie, dont plus particulièrement des formations de niveau master 2 proposées par les écoles françaises d’ingénieurs ;

- de proposer un programme de bourses dites de « développement solidaire » pour un certain nombre d’étudiants de master 2 dès lors qu’ils n’auront pas bénéficié d’une autre aide financière, ce qui en fait une mesure visant à renforcer la politique d’attractivité de la France ;

- d’organiser des opérations de promotion du dispositif « jeunes professionnels » prévu par l’accord ;

- de faciliter l’accès des jeunes professionnels à des offres d’emploi adaptées à leur profil.

II - 2 Conséquences juridiques

Ce texte ouvre la possibilité d’accorder :

- un titre de séjour d’une durée de validité de douze mois à des étudiants ayant achevé leurs études (niveau master ou licence professionnelle) en France ou au Monténégro dans le cadre d’une convention de partenariat entre universités française et monténégrine. Il se traduit pour les étudiants déjà présents en France par un titre de séjour d’un an et pour les étudiants venant du Monténégro par un visa de long séjour temporaire dispensant de titre de séjour d’une durée d’un an ;

- un visa de long séjour valant titre de séjour d’une durée de validité d’un an à des étudiants ou des salariés souhaitant venir en France pour y effectuer un stage inscrit dans une formation ;

- un visa de long séjour valant titre de séjour d’une durée d’un an à des jeunes professionnels de 18 à 35 ans, sur présentation d’un contrat de travail visé par l’autorité compétente sans que la situation de l’emploi soit prise en compte. Les bénéficiaires de ce visa peuvent éventuellement prolonger leur séjour en sollicitant une carte de séjour « travailleur temporaire » d’une durée maximum d’un an.

Ces deux dernières stipulations ne nécessitent aucune modification d’ordre juridique interne, le visa de long séjour valant titre de séjour ayant été créé par décret n° 2009-477 du 27 avril 2009 relatif à certaines catégories de visas pour un séjour en France d’une durée supérieure à trois mois et mis en œuvre pour les étudiants, les salariés, les conjoints de Français et les visiteurs depuis le 1er juin 2009 (décret codifié - article R. 311-3 du CESEDA).

La première stipulation, qui prévoit la délivrance de ce visa de long séjour valant titre de séjour aux stagiaires, nécessite une modification du droit interne. La modification de l’article R. 311-3-3° du CESEDA. est d’ores et déjà prévue, dès l'adoption du projet de loi « immigration-intégration » en cours d’examen au Parlement.

Les dispositions relatives à la délivrance des cartes « compétences et talents » et « salarié en mission » s’inscrivent dans le cadre de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration (article L. 313-10 6° et L. 315-1 et suivants du CESEDA).

Dans le cadre de cet Accord, le type de visa délivré sera le visa de long séjour valant titre de séjour déjà délivré dans le cadre du droit commun, entre autre, aux étudiants et aux travailleurs. Dans le contexte de l’Accord, il sera étendu aux stagiaires.

Toutes ces mesures sont en conformité avec le droit européen en vigueur, toutes les directives concernées ayant été transposées en droit interne français1.

II – 3 Conséquences administratives

De façon générale, les stipulations de l’Accord apportent des facilités de délivrance : simplifications dans les procédures, réduction des délais, suppression de l’opposition de la situation de l’emploi pour les jeunes professionnels.

Emploi des étudiants après leur cursus universitaire

Ce volet permet aux étudiants de bénéficier d’une expérience professionnelle dans la perspective de leur retour au Monténégro. Il leur offre ainsi la possibilité de compléter leur formation universitaire par un emploi dans le domaine d’activité pour lequel ils ont étudié. Bien souvent, cet emploi est la continuité du stage que les étudiants ont accompli dans le cadre de leur cursus. Il augmente ainsi leur employabilité. Cette disposition vise à faciliter l’accès au marché du travail des étudiants étrangers qui souhaitent bénéficier d’une expérience professionnelle salariée en France dans la perspective de leur retour dans leur pays d’origine notamment lorsqu’ils souhaitent y créer une activité génératrice d’emplois. Le nombre d’étudiants concernés dépendra des possibilités offertes par le marché de l’emploi et de leur capacité à trouver un emploi. Par ailleurs, cette disposition devrait inciter les universités à conclure davantage de conventions de partenariat.

Stagiaires

L’article relatif aux stages en entreprise favorise la venue en France d’étudiants monténégrins souhaitant bénéficier d’un stage en entreprise pour enrichir leur parcours universitaire y compris dans le cadre d’un programme de coopération de l’Union européenne. Mais il permet aussi à des entreprises implantées au Monténégro, filiales ou partenaires d’entreprises sises en France, d’adapter la formation de leurs salariés aux besoins du marché. Basées sur la réciprocité, ces mesures sont également applicables aux ressortissants français qui souhaiteraient se rendre au Monténégro pour y accomplir un stage inscrit dans leur cursus ou dans le cadre d’un programme de coopération de l’Union européenne. Par ces dispositions, il ne s’agit pas d’atteindre un objectif quantitatif mais de favoriser, dans la perspective de l’adhésion du Monténégro à l’Union européenne, la circulation des étudiants.

Immigration de travail

Si l’objectif d’organiser la venue annuelle de 100 jeunes professionnels monténégrins, âgés de dix-huit à trente-cinq ans, à des fins d’emploi, était atteint, la part de l’immigration de travail serait supérieure à celle de l’immigration familiale, ce qui n’est pas contraire à l’objectif poursuivi par le Ministère français en charge de l’immigration dans le cadre de sa politique d’immigration. En effet, en 2008, 15 personnes ont bénéficié d’un titre de séjour pour des raisons familiales et seulement 8 pour des raisons professionnelles. Par ailleurs, les autorités monténégrines se sont engagées à faciliter la venue d’un nombre équivalent de jeunes professionnels français. Comme pour les étudiants, le nombre de jeunes professionnels dépendra des capacités offertes par le marché du travail et du souhait des entreprises de favoriser l’embauche d’un ressortissant de l’autre Etat parce qu’elles y auront trouvé un intérêt notamment dans le cadre d’un partenariat entre entreprises.

Projets de développement solidaire

Des crédits du ministère français en charge de l’immigration sont prévus à hauteur de 150 000 euros sur une période de trois ans pour favoriser la mobilité de ces jeunes, notamment en encourageant leur implication dans des projets socio-économiques. Par ailleurs, des opérations de promotion des différents dispositifs ainsi que des actions destinées à faciliter le rapprochement de l’offre et de la demande d’emploi, seront organisées. Des opérateurs en France et au Monténégro tels que l’Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), l’Association pour l'emploi des cadres (APEC) ou encore l’opérateur monténégrin ZAMTES, seront chargés d’encadrer ces actions en liaison avec le ministère français en charge de l’immigration et l’Ambassade de France au Monténégro. Des conventions pourront être conclues avec d’autres acteurs (partenaires étrangers, secteur associatif …). Le Monténégro a déjà mis en œuvre l’Accord et a, en conséquence, déjà fait la promotion de celui-ci notamment auprès de ses universités ainsi que par la voie de la presse.

Comité de suivi

Par l’observation qu’il fera des flux et du fonctionnement des dispositions de l’accord, le comité de suivi prévu à l’article 4 aura pour mission de formuler des propositions pour en améliorer le fonctionnement et le contenu.

III - Historique des négociations

L’accord a été négocié tout au long de l’année 2009 par différentes rencontres et échanges entre autorités compétentes de chacune des deux parties, à savoir tout particulièrement le ministère de l’Immigration du côté français.

IV - Etat des signatures et ratifications

La convention a été signée à Podgorica, le 1er décembre 2009, par M. Eric BESSON et le Vice Premier Ministre du Monténégro, M. Svetozar MAROVIC. L'Accord a été ratifié du côté monténégrin.

V - Déclarations ou réserves

La France n’a pas fait de déclaration ou de réserve à l’occasion de la signature de cette convention.

1 Directive étudiants n°2004/114/CE du Conseil du 13 décembre 2004

Directive chercheurs n°2005/71/CE du Conseil du 12 octobre 2005


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