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mis en distribution

le 9 mai 2008


N° 831

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 avril 2008.

PROPOSITION DE LOI

visant à créer un financement « performance énergétique »,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire,
à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

PAR MM. Richard MALLIÉ, Yves ALBARELLO, Jean-Claude BEAULIEU, Philippe BOËNNEC, Jean-Yves BONY, Jean-Claude BOUCHET, Patrice CALMÉJANE, Dino CINIERI, Georges COLOMBIER, René COUANAU, Gilles D’ETTORE, Olivier DASSAULT, Marc-Philippe DAUBRESSE, Jean-Pierre DECOOL, Lucien DEGAUCHY, Éric DIARD, Michel DIEFENBACHER, Jacques DOMERGUE, Dominique DORD, Jean-Michel FERRAND, Marc FRANCINA, Guy GEOFFROY, Jean-Pierre GRAND, Jean-Jacques GUILLET, Michel HERBILLON, Olivier JARDÉ, Pierre LASBORDES, Thierry LAZARO, Jean-Marc LEFRANC, Lionnel LUCA, Jean-Pierre MARCON, Thierry MARIANI, Muriel MARLAND-MILITELLO, Philippe Armand MARTIN, Patrice MARTIN-LALANDE, Mme Henriette MARTINEZ, MM. Christian MÉNARD, Jean-Marie MORISSET, Georges MOTHRON, Jean-Marc NESME, Jean-Pierre NICOLAS, Bertrand PANCHER, Bernard PERRUT, Mme Bérengère POLETTI, MM. Didier QUENTIN, Jacques REMILLER, Francis SAINT-LÉGER, André SCHNEIDER Michel SORDI, Éric STRAUMANN, Patrice VERCHÈRE, Jean-Sébastien VIALATTE, Philippe VITEL et Michel VOISIN,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Notre pays est en tête pour l’efficacité énergétique dans le secteur des transports. En revanche, nous avons pris un retard considérable dans celui du bâtiment. En effet, la consommation d’énergie de chauffage par mètre carré en France, corrigée du climat, demeure ainsi deux fois plus élevée qu’en Norvège. Le bâtiment français est à l’origine de 23 % de nos émissions de gaz à effet de serre et absorbe 42 % de toute l’énergie finale consommée dans le pays. L’habitation apparaît donc comme un gisement d’économie d’énergie potentiel important.

La consommation moyenne primaire du parc existant français est de 240 KWh/m²/an en 2007. Pour une habitation individuelle, le chauffage représente la principale dépense d’énergie, suivie de l’eau chaude sanitaire et des consommations liées à l’éclairage, à l’électroménager et à l’électronique. En ce domaine, un gain sur les dépenses de chauffage profiterait à tous. En effet, la part des dépenses de chauffage représente, au minimum, 1/10 du budget des 20 % des français les plus défavorisés.

Ce constat conforte le choix de retenir le secteur du logement parmi les priorités d’action lors du Grenelle de l’environnement. En effet, le groupe de travail sur le bâtiment a proposé durant le Grenelle un plan thermique de grande ampleur comportant deux objectifs chiffrés précis pour l’échéance 2020 : une consommation énergétique moyenne de 150 KWh/m²/an dans les immeubles d’habitation et de 80 KWh/m²/an pour les immeubles de bureaux.

Pour y parvenir, toutes les constructions lancées dès 2012 devront répondre aux normes dites de basse consommation (50 KWh/m²/an). Dans la même optique, la pose de fenêtre à simple vitrage dans les constructions neuves sera interdite dès 2010.

La simple rénovation énergétique de l’existant a un coût estimé à plusieurs dizaines de milliards d’euros.

Les propriétaires et les copropriétaires sont donc les principaux acteurs de l’économie d’énergie et se retrouvent en première ligne. Le calendrier annoncé pour réaliser les travaux est relativement court et leur financement sera élevé. Beaucoup de propriétaires, occupants ou bailleurs, n’ont pas à ce jour la trésorerie disponible pour financer ces opérations estimées à 30 000 euros, en moyenne, pour une habitation.

On entend parler de diverses hypothèses classiques d’aides au financement, le crédit d’impôt étant la « mesure » phare. Ceci étant, ce mode de financement est actuellement un échec concernant l’aide à la mise en place de pompes à chaleur, de systèmes de production d’eau chaude solaire ainsi que pour les chaudières à condensation. Le crédit d’impôt implique également un effort financier important. Par exemple, le crédit d’impôt accordé aux ménages équipant leur habitation de chauffages écologiques pour 2007 a entraîné une perte de recettes pour l’État de 2 milliards d’euros.

En ce qui concerne les financements disponibles pour un propriétaire, aussi bien le système d’hypothèque rechargeable que le prêt viager hypothécaire montrent leur limite et sont très peu utilisés aujourd’hui. En effet, l’ordonnance du 23 mars 2006 permet théoriquement aujourd’hui, par l’hypothèque rechargeable et le prêt viager hypothécaire, de trouver un financement sans se dessaisir de son bien. Mais en réalité, la lourdeur du dossier, son coût très élevé et une certaine réticence des banques ne permettent pas à ces deux systèmes de se développer.

Devant l’ampleur du chantier, il nous faut trouver des solutions novatrices, efficaces et assez rentables afin que les propositions du Grenelle soient applicables et appliquées. C’est pourquoi, je vous propose un nouveau moyen de financement : l’ouverture de crédit en compte courant garanti par un privilège immobilier simplifié.

Le propriétaire d’un logement pourrait disposer, sur simple engagement de sa part, d’une somme allant jusqu’à 40 000 euros par logement, cette somme étant disponible à sa banque via son compte courant. Le propriétaire disposerait ainsi d’une sorte de crédit permanent lui permettant de réaliser ses travaux pour le seul coût immédiat des intérêts annuels, le remboursement du capital se faisant à une date ultérieure, dans le même ordre d’idée que le crédit in fine, à l’occasion d’une transmission ou d’une cession par exemple. Il pourrait d’ailleurs rembourser partiellement, par anticipation, une partie du crédit. Le prêt a toutefois une durée maximale de 20 ans, sauf convention contraire des parties au contrat.

Pour favoriser la conclusion de prêts permettant, dans les bâtiments anciens, l’exécution de travaux visant à améliorer la performance énergétique, il convient de prévoir un taux d’intérêt et des conditions de remboursements attractifs. Le propriétaire se servirait de ce crédit en fonction de ses besoins et paierait des intérêts sur les seuls montants utilisés et pendant la période d’utilisation concernée. Les intérêts payés doivent être proches des taux du marché et comptabilisés sur les seules sommes utilisées. En effet, la France compte plus de 22 millions de logements dont la majorité appartiennent à des propriétaires. Ainsi, ce nouveau type de financement permettrait d’utiliser cette réserve immobilière en anticipant sur la valeur du bien.

Il ne serait versé des intérêts que sur la somme utilisée, sans remboursement de capital immédiat, déductible fiscalement mais aussi récupérable en économies d’énergie. En effet, tandis que pour un propriétaire-bailleur les travaux exécutés dans le logement loué (entretien ou amélioration du logement, ce qui est le cas ici) sont déduits du revenu foncier, le propriétaire-occupant, qui fera appel à ce nouveau type de financement pourra également déduire à 100 % de son impôt sur le revenu les intérêts payés, et cela durant les cinq premières années qui suivent l’ouverture du crédit en compte courant.

Cette procédure serait garantie par un privilège immobilier pour lequel une formule de publication simplifiée sera mise en place pour un coût minime. En effet, comme c’est déjà le cas pour les fonds de commerce, le créancier pourrait inscrire au fichier immobilier un privilège garantissant une ouverture de crédit par simple acte sous-seing privé enregistré.

La solution du privilège est préférable à celle de l’hypothèque conventionnelle, compte tenu du caractère prioritaire de ces travaux, et aussi compte tenu du fait qu’en droit français, l’hypothèque est un acte solennel, et ne peut être constituée que par acte notarié (article 2416 du code civil), ce qui n’est pas le cas pour le privilège.

Par ailleurs, une telle mesure aurait des retombées économiques très importantes pour notre économie, notamment pour le secteur du bâtiment, sans demander d’effort financier important de la part de l’État. Aussi, 2 millions de logements rénovés, pour une rénovation moyenne de 20 000 euros chacun, représenteront près de 40 milliards d’euros directement injectés dans l’économie de notre pays.

Le bâtiment est responsable de la moitié de la consommation d’énergie et de plus d’un quart des émissions de gaz à effet de serre. Des solutions techniques sont immédiatement applicables avec de réels profits économiques sociaux et environnementaux. Je propose que tout le monde puisse y recourir et de façon la plus simple possible. En anticipant sur l’avenir, ce nouveau type de financement nous permettra d’améliorer notre futur.

Tel est l’objet de la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L’article 2374 du code civil est complété par un 9° ainsi rédigé :

« 9° ceux qui auront fourni les deniers pour l’exécution, dans un immeuble existant, des travaux d’économie d’énergie visant à améliorer la performance énergétique d’un logement achevé. »

Article 2

Après l’article 2384-4 du code civil, il est inséré un article 2384-5 ainsi rédigé:

« Art. 2384-5. – Le prêteur de deniers visé au 9° de l’article 2374 conserve son privilège par l’inscription faite de l’acte authentique ou de l’acte sous seings privés, dûment enregistré, dans le délai de deux mois de sa date. »

Article 3

Après l’article L. 314-20 du code de la consommation, il est inséré un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« Prêt “performance énergétique”

« Le prêt consenti à un particulier pour exécuter des travaux, définis par décret, en vue d’améliorer la performance énergétique d’un bâtiment ancien est consenti par les banques à un taux effectif global qui ne doit pas être supérieur, au moment où il est consenti, au taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les banques pour des opérations de crédit immobilier aux particuliers.

« Les intérêts sont payés mensuellement sur les sommes effectivement débloquées. Le capital est remboursé in fine, sauf convention contraire des parties au contrat de prêt. Le prêt a une durée maximale de vingt ans, sauf convention contraire des parties au contrat de prêt.

« Le prêt est garanti par l’inscription du privilège visé au 9° de l’article 2374 du code civil ».

Article 4

Après l’article 200 quater B du code général des impôts, il est inséré un article 200 quater C ainsi rédigé :

« Art. 200 quater C. – Il est institué un crédit d’impôt sur le revenu au titre de l’habitation principale du contribuable située en France. Il est égal au montant des intérêts du prêt ayant financé le coût de travaux, définis par décret, visant à améliorer la performance énergétique d’un logement achevé.

« Ce crédit d’impôt s’applique aussi aux logements loués par les personnes physiques.

« Il s’applique aux dépenses payées entre le 1er juillet 2008 et le 31 décembre 2012 dans la limite d’un plafond fixé à 30 000 € par logement. Ce crédit d’impôt vient en réduction de l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année au cours de laquelle les dépenses sont effectivement supportées, après imputation des réductions d’impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200 bis, des crédits d’impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires. Si le crédit d’impôt excède l’impôt dû, l’excédent est restitué. »

Article 5

Les pertes de recettes résultant pour l’État des dispositions de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 402 bis et 403 du code général des impôts.


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